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ACTIONS Retour en force des actions les moins prometteuses Pour les investisseurs sur les marchés actions, 2016 semble devoir être l’année du chien. Depuis janvier, acheter les actions les moins performantes (les dog stocks) des trois derniers mois (cycliques et très volatiles) a battu la stratégie qui consiste à parier sur les vedettes récentes (valeurs défensives et faiblement volatiles), et a généré neuf mois de hausse, du jamais vu depuis 1996 au moins. Le rendement supplémentaire procuré par la préférence pour ce qu’on appelle les « dog stocks » a atteint 7 % (en euros), un fort contraste avec 2015 où la stratégie de l’année était d’acheter les actions gagnantes. Cette évolution vers la quête des bonnes affaires reflète la crainte des investisseurs de payer trop cher les actions, la hausse du marché approchant de sa huitième année. Alors que la préférence pour les titres retardataires a permis d’étendre les gains des services aux collectivités à l’énergie et à la technologie, l’inverse complique davantage une année qui s’annonce déjà comme l’une des plus mauvaises pour la sélection de titres. Le sentiment favorable au risque (« risk-on ») et la quête de rendement qui ont marqué ces quatre derniers mois, et qui ont profité aux actifs à risque (et spécialement aux actions les moins performantes/mal aimées), étaient basés sur l’hypothèse que les banques centrales allaient encore stimuler l’économie. Si le soutien des banques centrales n’est pas prêt de disparaître, nous devons cependant admettre que les résultats de leurs politiques monétaires accommodantes sont de moins en moins probants, la Banque du Japon (BoJ) étant la meilleure illustration de cette impuissance. Si le gouverneur Kuroda a nié toute intention de réduire le montant des achats d’actifs de la BoJ (« tapering » ou désengagement), la réaction sur le marché des changes à sa tentative de contrôle de la courbe des rendements montre que les investisseurs ont considéré cette décision davantage comme un resserrement que comme un assouplissement. Qu’il s’agisse d’un désengagement ou pas, le fait de fixer un objectif maximal au taux à dix ans autour de 0 % signifie qu’une diminution des achats de titres deviendra à un moment inévitable. Beaucoup d’acteurs du marché ont associé le renforcement des achats d’obligations à un affaiblissement de la monnaie japonaise, le fait de les réduire pourrait donc les inciter à acheter du yen. OCTOBRE 2016 L'analyse de Thierry Masset Retour en force des actions les moins prometteuses On ne parle plus que du retour de l’inflation Brexit et sterling ne font pas bon ménage Retour en force des actions les moins prometteuses La pharma US n’est pas ménagée par Hillary Clinton Baisse de l’encours des obligations à rendements négatifs

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ACTIONS

Retour en force des actions les moins prometteuses

Pour les investisseurs sur les marchés actions, 2016 semble devoir être l’année du chien. Depuis janvier, acheter lesactions les moins performantes (les dog stocks) des trois derniers mois (cycliques et très volatiles) a battu la stratégie quiconsiste à parier sur les vedettes récentes (valeurs défensives et faiblement volatiles), et a généré neuf mois de hausse, dujamais vu depuis 1996 au moins. Le rendement supplémentaire procuré par la préférence pour ce qu’on appelle les « dogstocks » a atteint 7 % (en euros), un fort contraste avec 2015 où la stratégie de l’année était d’acheter les actions gagnantes.

Cette évolution vers la quête des bonnes affaires reflète la crainte des investisseurs de payer trop cher les actions, la haussedu marché approchant de sa huitième année. Alors que la préférence pour les titres retardataires a permis d’étendreles gains des services aux collectivités à l’énergie et à la technologie, l’inverse complique davantage une annéequi s’annonce déjà comme l’une des plus mauvaises pour la sélection de titres.

Le sentiment favorable au risque (« risk-on ») et la quête de rendement qui ont marqué ces quatre derniers mois, et qui ontprofité aux actifs à risque (et spécialement aux actions les moins performantes/mal aimées), étaient basés sur l’hypothèseque les banques centrales allaient encore stimuler l’économie.

Si le soutien des banques centrales n’est pas prêt de disparaître, nous devons cependant admettre que lesrésultats de leurs politiques monétaires accommodantes sont de moins en moins probants,

la Banque du Japon (BoJ) étant la meilleure illustration de cette impuissance. Si le gouverneur Kuroda a niétoute intention de réduire le montant des achats d’actifs de la BoJ (« tapering » ou désengagement), la réaction sur lemarché des changes à sa tentative de contrôle de la courbe des rendements montre que les investisseurs ontconsidéré cette décision davantage comme un resserrement que comme un assouplissement. Qu’il s’agisse d’undésengagement ou pas, le fait de fixer un objectif maximal au taux à dix ans autour de 0 % signifie qu’une diminutiondes achats de titres deviendra à un moment inévitable. Beaucoup d’acteurs du marché ont associé le renforcementdes achats d’obligations à un affaiblissement de la monnaie japonaise, le fait de les réduire pourrait donc les inciter àacheter du yen.

OCTOBRE 2016

L'analyse de Thierry MassetRetour en force des actions les moinsprometteusesOn ne parle plus que du retour del’inflationBrexit et sterling ne font pas bonménageRetour en force des actions les moinsprometteusesLa pharma US n’est pas ménagée parHillary ClintonBaisse de l’encours des obligations àrendements négatifs

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Les investisseurs ne comptent plus autant sur le soutien des banques centrales qu’auparavant aux États-Unis et dansla zone euro : la Fed prépare un nouveau relèvement des taux d’intérêt et la Banque centrale européenne asignalé l’éventualité de limiter la poursuite de sa politique d’assouplissement.

Sur fond d’inquiétude croissante, les malheurs de Deutsche Bank se répercuteront sur le secteur financier, et, lecalendrier politique restant chargé à travers le monde, il est probable que l’on assistera à un regain de volatilitédans les semaines qui viennent.

En effet, selon Bloomberg, l’histoire montre que la volatilité des actions pendant les mois de novembred’années d’élection présidentielle a été 22 % supérieure à la moyenne des autres mois.Octobre est généralement un bon mois pour les actions, mais voici quelques exceptions notoires. Sur les sixfois où l’indice MSCI Monde s’est replié en octobre depuis 1996, trois correspondaient à une année d’électionprésidentielle américaine : 2012, 2008 et 2000. Le plongeon de 19 % en octobre 2008 faisait partie de la débâcledéclenchée par la crise financière mondiale. Si l’on remonte à 1995, on constate un recul de 17 % en octobre 1987. Eneffet, le 19 octobre 1987, le fameux « lundi noir », le S&P 500 a dévissé de 20 %.

La liste des arguments en faveur d’un renforcement du deuxième marché haussier le plus long aux États-Unis se raccourcitdonc, particulièrement lorsque nous savons que les bénéfices restent ternes.

Les bénéfices trimestriels des sociétés du S&P 500 ont enregistré leur cinquième baisse consécutive au troisièmetrimestre (-3,8%), égalisant le record de la plus longue période de récession des bénéfices de tous les temps.L’amplitude de l’écart entre les bénéfices actuels (106 USD par action) et les bénéfices futurs (123 USD pour les 12prochains mois) depuis le début de la hausse du marché, prouve que l’on nous a fait espérer une croissance irréalistedes résultats. La réalisation des prévisions données pour l’année prochaine exigerait que les bénéfices dessociétés du S&P 500 augmentent de 13%, un taux de croissance inconnu depuis 2011 ! Dans le cas contraire,les valorisations des actions risquent d’être gonflées, alors qu’à 20 fois le résultat annuel, elles ont atteint leur niveau leplus haut depuis la crise financière.

Si nous ne tablons pas sur une revalorisation importante des multiples de marché à ce stade avancé du cycleéconomique et étant donné l’éventualité d’une hausse des taux d’intérêt, nous n’anticipons pas non plus une baisseconsidérable des valorisations car les taux resteront probablement bas dans l’absolu. Soit les rendements obligataires et lestaux d’intérêt restent à des taux historiquement bas et la croissance des bénéfices et de l’économie déçoivent une foisencore (et plafonnent les valorisations), soit l’augmentation des taux de croissance et d’inflation crée la surprise (peut-êtresuite à un assouplissement budgétaire) mais les rendements obligataires s’ajustent plus haut (plafonnant également lesvalorisations). Dans tous les cas, un environnement potentiellement plus volatil n’augure rien de bon pour les actifs risqués.

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Les rendements subissant des pressions à la hausse dues aux doutes concernant la soutenabilité de la politique monétairede relance par l’achat d’obligations et la valeur de marché de la dette à rendement négatif souveraine, d’État, d’entreprise ettitrisée de l’indice Bloomberg Barclays Global Aggregate, qui avait atteint 12 200 milliards USD en juin (contre moins de7 milliards USD un an avant), étant retombée à 10 400 milliards USD le mois dernier, nous conseillons de :

acheter des obligations qui protègent contre l’inflation, la hausse des prix à la consommation étantsusceptible de dépasser l’objectif (2%) de la Fed et de la Banque d’Angleterre (voir commentaires détaillésdans la section sur les Obligations),vendre certains titres assimilables aux obligations tels que les actions des secteurs des télécoms et desbiens de consommation de base.Parallèlement, nous restons sous-pondérés en obligations souveraines et surpondérés en actions derendement, notamment dans les secteurs de l’énergie (surpondération) et des financières américaines,C’est également le moment de faire preuve de plus de prudence sur l’immobilier.

Les perspectives d’un relèvement des taux d’intérêt et d’une hausse du dollar US rendant les marchés nerveuxdans un contexte de croissance modérée des bénéfices, de valorisations relativement élevées et d’inquiétudesentourant le Brexit, nous maintenons notre approche prudente sur les actions et prenons des profits sur nos positionssur les marchés émergents (actions et obligations). Un cinquième mois de surperformance des actions des pays endéveloppement rétrécit l’écart de leurs valorisations avec leurs pairs des pays riches. Le ratio cours/bénéfice de l’indice MSCIdes marchés émergents a atteint 79 % de celui de l’indice MSCI Monde pour la première fois depuis avril 2013, un mois avantque le Fed annonce la fin de son plan d’achats d’obligations, ce qui avait déclenché une fuite des capitaux vers des actifsmoins risqués. Les investisseurs ont placé 22 milliards USD dans des exchange-traded funds (ETF) américains spécialiséssur les actifs des marchés émergents au cours des 19 semaines passées.

Enfin, selon nous, le cours du pétrole devrait se situer entre 40 et 55 USD le baril en 2016 avec un risque de hausse et entre55 et 70 USD le baril en 2017, la décision de l’OPEP de diminuer sa production étant supposée résorber l’excès d’offre surles marchés pétroliers internationaux. Dans ce contexte, nous avons augmenté notre exposition au secteur del’énergie (neutre à surpondérer) des deux côtés de l’Atlantique avec une préférence particulière pour lescompagnies pétrolières intégrées qui devraient surperformer les raffineurs et les prestataires de services pétroliers etgaziers. Nous avons d’autre part revu notre position vis-à-vis des services aux collectivités de surpondérer à neutre alors quenous conservons notre préférence pour les « actions défensives/de rendement ».

1.1 Régions

1.1.1 Zone euro : sous-pondération

Au cours des derniers mois, la rotation importante vers les valeurs cycliques, qui comprennent des secteurs allant de lafinance à la technologie et l’industrie, suggère que les actions européennes sont aujourd’hui plus vulnérables à toutedéception.

L’optimisme était timidement revenu à l’annonce d’indicateurs économiques de la zone euro meilleurs que prévu et lorsqueles inquiétudes concernant les institutions de crédit s’étaient estompées. Mais cet optimisme encore fragile a été entamépar le consensus informel qui s’est formé au sein de la Banque centrale européenne (BCE) de diminuerprogressivement l’assouplissement quantitatif. La banque centrale tente peut-être de tester le marché en observant saréaction à ce type de nouvelle et de lever ainsi une partie des pressions que nous avons connues sur le système bancaire.Elle prend peut-être conscience que la politique monétaire n’aide pas le secteur bancaire et que de ce fait les mesuress’avèrent finalement contre-productives.

Dans ce contexte, le référendum sur le Brexit, l’instabilité politique, la contraction des bénéfices et la perted’efficacité de la politique monétaire créent un climat d’incertitude dans lequel il est plus difficile de prendre desdécisions, tant pour les autorités que pour les entreprises et les investisseurs.

La sortie des Britanniques pourrait avoir un impact négatif sur les échanges commerciaux et encourager lesautres États membres à renégocier leur relation avec l’UE, ce qui pourrait entraîner de nouvelles pertes dans lazone euro (sept des neuf principaux partenaires commerciaux du Royaume-Uni se situent dans l’UE).La politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) est sur le point d’atteindre ses limites.D’après Klaas Knot, membre du Conseil des gouverneurs et président de la banque centrale néerlandaise, toutenouvelle extension du programme d’achat d’actifs pourrait entraîner des problèmes sur le plan juridique et au niveau dela stabilité financière. Selon lui, « le bénéfice marginal pouvant être dégagé par d’éventuelles nouvelles mesures est deplus en plus ténu et l’assouplissement quantitatif augmente les risques d’effets secondaires indésirables tels que lacréation de bulles, une recherche effrénée de rendement, le refinancement d’emprunts problématiques,l’accroissement des inégalités de richesse et une dépendance aux taux d’intérêt bas. » Une autre conséquencepossible est que les gouvernements soient moins disposés à engager des réformes structurelles et à réduire leur detteétant donné la générosité de la politique monétaire. « La balle est maintenant clairement dans le camp des politiques »,a ajouté Klaas Knot.Dans ce contexte, les investisseurs demeurent sceptiques par rapport à la reprise dans la région et ce, malgré lesmesures de relance de la banque centrale. Les analystes estiment que les bénéfices des sociétés européennes serontsous pression cette année, alors qu’ils s’attendaient auparavant à une progression. Depuis août 2015, les bénéficespar action des sociétés de l’Euro Stoxx 50 ont chuté de 25 %.

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À part l’argent hélicoptère, les banques centrales ont pratiquement tout essayé. Et pourtant, les entreprisesne veulent toujours pas dépenser. Selon Standard & Poor’s, les investissements ont chuté de 10 % à l’échellemondiale en 2015 et ils pourraient encore reculer de 4 % cette année. Principalement sous le poids du secteur desmatières premières. Mais même en ne tenant pas compte de ce secteur et de celui de l’énergie, les investissementsse sont repliés de 2 % l’année passée. Que s’est-il passé ? Dans un monde marqué par une faible croissance et unproblème de surcapacité dans l’industrie, il est difficile pour les entreprises de générer un rendement supérieur à leurcoût du capital, ce qui constitue clairement un frein aux investissements. En outre, le coût élevé des capitaux propres aaussi d’autres conséquences néfastes. Les investisseurs obligataires qui ont dû se tourner vers les actions à causedes achats massifs effectués par les banques centrales exigent d’importants dividendes en échange. Ces actionnaireshostiles au risque pénalisent les sociétés qui mettent la priorité sur les investissements à long terme plutôt que sur lesversements de liquidités.

Malgré les craintes que suscite un éventuel échec de la politique d’assouplissement quantitatif, la prime deliquidités associée aux actions européennes est près de huit fois supérieure à celle des obligations : jamais l’écartentre les dividendes de sociétés et les rendements obligataires n’a été aussi élevé (12 %).

Après avoir entendu Mario Draghi évoquer le maintien des mesures de relance de la BCE, les traders se sonttournés en masse vers le marché obligataire. Le rendement moyen des titres repris dans l’indice Bloomberg desobligations souveraines de la zone euro est tombé à environ 0,28 % et plus de 4 500 milliards USD proposent desrendements négatifs. Les emprunts à court terme émis par l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne et la Belgique sonttombés à des niveaux négatifs inédits.

Dans un même temps, les craintes concernant le ralentissement en Chine et l’instabilité du secteur bancaire ontfait plonger l’Euro Stoxx 50 de 20 % par rapport à son pic d’avril 2015. Et les entreprises de l’indice ont, parconséquent, vu leur rendement de dividende grimper à 4 % (estimation annualisée), contre 3,7 % fin avril 2015. Si vouspensez que nous parviendrons à éviter une récession mondiale et que les craintes de déflation sont exagérées,les bonnes affaires ne devraient alors pas manquer pour vous.

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1.1.2 Japon : sous-pondération => neutre

Le yen n’ayant pas réussi à franchir la barre des 100 yens pour un dollar malgré son rebond suite aux décisions dela Banque du Japon (la BoJ s’est éloignée d’une politique monétaire qui affaiblissait sa monnaie pour se concentrer sur lacourbe des rendements), considérées comme haussières pour la devise nippone, nous réduisons de surpondérer àneutre notre position sur le yen, qui a progressé de 20 % cette année (la meilleure performance parmi 10 pairs majeursdes pays développés et sa plus forte hausse depuis 2008).

Le yen et les actions locales (celles des sociétés exportatrices en particulier) ayant tendance à varier en sensopposés, nous renforçons notre exposition aux actions japonaises (sous-pondérer => Neutre).

En rendant son arsenal de mesures plus complexe, la BoJ donne l’impression aux marchés qu’elle a atteint seslimites.

Les stratégistes doutent de la capacité de la BoJ à contrôler la fameuse courbe des taux (surtout sur lapartie longue de la courbe) comme elle l’envisage. On soupçonne déjà Haruhiko Kuroda d’employer cette stratégiecomme un écran de fumée pour lui permettre de réduire ses achats d’actifs. Si la BoJ devrait être en mesured’empêcher une envolée des taux et les guider en direction de 0 % sur les échéances à 10 ans via les nouvellesopérations, on peut se demander comment elle réagira si les taux tombent à des niveaux inférieurs à ceux souhaités.La BoJ ne disposera alors que de deux options : soit vendre des obligations d’État à long terme, soit renoncer auxopérations d’achat. Si la première option paraît irréaliste, la seconde ne suffira pas à elle seule à faire repartir les taux àla hausse.

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Les doutes quant aux chances de succès de l’Abenomics, le programme de relance économique du Premierministre Shinzo Abe, pourraient s’accroître si les observateurs commencent à estimer que la politiqueagressive menée par la BoJ depuis le début du mandat d’Haruhiko Kuroda est en train de montrer ses limites.Si le gouverneur Kuroda a nié toute intention de réduire le montant des achats d’actifs de la BoJ (« tapering » oudésengagement), la réaction sur le marché des changes montre que les traders ont considéré cette décisiondavantage comme un resserrement que comme un assouplissement. Qu’il s’agisse d’un désengagement ou pas,le fait de fixer un objectif maximal au taux à dix ans autour de 0 % signifie qu’une diminution des achats de titresdeviendra à un moment inévitable.

Une fois la déception des investisseurs passée, il semble toutefois qu’Haruhiko Kuroda ait vu juste, si l’on en jugepar la réaction du marché boursier nippon. Le mois passé, les actions en Bourse de Tokyo ont enregistré leur plus forteprogression (+1,6 % en euros) depuis juillet après l’ajustement de politique de la BoJ. Leur performance depuis le début del’année demeure cependant négative (-11,7 % en yens et +1,5 % en euros).

Les banques ont gagné du terrain après la décision de la banque centrale de ne pas abaisser davantage les tauxnégatifs. Une courbe des taux plus pentue est censée rendre le crédit plus rentable pour les banques.Les exportateurs ont profité de l’affaiblissement du yen.L’indice Topix a surperformé le Nikkei 225, la banque centrale ayant annoncé son intention d’acheter davantage d’ETFsur l’indice plus large. Au lieu de se focaliser sur les grandes valeurs du Nikkei 225, la BoJ va acheter des ETF defaçon plus équilibrée et plus en phase avec la capitalisation du marché. L’omniprésence de la BoJ dans le Nikkei 225préoccupe certains investisseurs. En fin juillet, la banque centrale possédait près de 62 % des ETF japonais et elledevrait devenir le premier actionnaire de 55 sociétés reprises dans le Nikkei 225 d’ici à la fin de 2017.

Le marché boursier a été rassuré par le fait que les taux de dépôt n’ont pas été abaissés davantage. Mais, demanière générale, cette décision sera perçue comme un resserrement vu qu’elle implique un redressement de lacourbe des taux.

1.1.3 Marchés émergents (par rapport aux marchés développés) : surpondération

Les fluctuations du prix des actions émergentes s’amplifient, les investisseurs tentant d’évaluer l’impact d’unrelèvement des taux d’intérêt de la Réserve fédérale sur l’amélioration des bénéfices des entreprises dans lespays développés. La volatilité historique sur 30 jours de l’indice MSCI des marchés émergents a bondi de 35 % le moisdernier, après que les traders de contrats futures ont estimé à 69 % la probabilité d’une hausse des taux de la Fed endécembre, décision qui renforcerait le dollar et rendrait les actifs risqués moins attrayants.

Les perspectives d’un relèvement des taux d’intérêt et d’une hausse du dollar US rendant les marchés nerveuxdans un contexte de croissance modérée des bénéfices et de valorisations relativement élevées, nous avons prisdes profits sur nos positions sur les actions des marchés émergents.

L’indice MSCI des actions émergentes a grimpé de 13,5 % (en euros) depuis le début de l’année, soit près de quatrefois plus que l’indice MSCI Monde des actions des pays développés, mais il affiche toujours une baisse de 40 % parrapport à 2011.Un cinquième mois de surperformance des actions des pays en développement rétrécit l’écart de leurs valorisationsavec leurs pairs des pays riches. Le ratio cours/valeur comptable de l’indice MSCI des actions émergentes a atteint71 % de celui de l’indice MSCI des actions des pays du G7 pour la première fois depuis avril 2013, un mois avant quela Fed annonce la fin de son plan d’achats d’obligations, ce qui avait déclenché une fuite des capitaux vers des actifsmoins risqués. Cela étant, il se situe encore 30 % en dessous de leur moyenne à long terme !Parallèlement, un indice reprenant 20 devises émergentes a bondi de 7 % depuis le début de l’année et est sur le pointd’enregistrer sa plus forte hausse en sept ans.

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Néanmoins, les investisseurs ont placé 22 milliards USD dans des exchange-traded funds (ETF) américains spécialisés surles actifs des marchés émergents au cours des 19 semaines passées. Les rendements négatifs en vigueur dans denombreux pays développés les ont poussés à se tourner vers des destinations plus exotiques et à jeter souventleur dévolu sur des obligations, actions ou devises de pays englués dans une récession.

Si les rendements des obligations émergentes en devises fortes ont plongé de 1,10 % depuis janvier (à 4,40 %) enraison de leur succès auprès des investisseurs, ils n’en restent pas moins largement supérieurs aux rendementsproposés dans d’autres régions comme les États-Unis, la Zone Euro et le Japon. À l’échelle mondiale, les obligationsproposant un rendement négatif représentent une valeur avoisinant 9000 milliards de dollars. Les investisseurs enobligations émergentes en devises fortes ont, quant à eux, obtenu des rendements moyens de 10 % (en euros) cetteannée.Le rendement sur l’indice MSCI des marchés émergents a atteint l’un de ses niveaux les plus élevés (1 %)depuis 2014 par rapport au rendement des obligations spéculatives, ce qui signifie que les investissements enactions rapportent plus aux investisseurs. Cet écart entre actions et obligations s’explique par la révision à la haussedes prévisions bénéficiaires des analystes et par la reprise des emprunts offrant un rendement plus élevé dans uncontexte de taux d’intérêt négatifs.

Certaines des économies et des entreprises les plus en difficulté ces dernières années dans le monde émergentsont en train de montrer des signes encourageants.

La Chine devrait être en mesure d’atteindre son objectif de croissance, alors que le Brésil et la Russie sont sur le pointde sortir du marasme.Les pays en voie de développement ont également gonflé leurs réserves de change de 144 milliards de dollars à9900 milliards de dollars, après les avoir vues tomber à leur niveau le plus bas en trois ans au mois de mars.L’indice MSCI des marchés émergents, qui regroupe plus de 800 entreprises, a enregistré une croissance moyenne dubénéfice par action de 47 % le trimestre dernier, alors que les bénéfices des sociétés du Standard & Poor’s 500 sesont repliés.Les entreprises et les ménages des pays émergents ont commencé à réduire leurs dettes (exprimées en pourcentagedu PIB). Si l’on ne tient pas compte de la Chine, le ratio crédit/PIB est passé de 128 % à la fin de l’année passée à127 %, le premier recul enregistré depuis la crise financière mondiale. Les entreprises sont en particulier en train deréduire leurs niveaux d’endettement, lesquels étaient devenus de plus en plus préoccupants, sur fond de chute desdevises ces dernières années.

Par ailleurs, la Chine semble avoir réussi à éviter (pour le moment) le scénario d’un atterrissage brutal. Lesdirigeants sont visiblement parvenus à stabiliser leur économie, qui pèse plus de 10 000 milliards USD, par le biais d’unestratégie déjà bien éprouvée : débloquer d’immenses quantités de crédits afin de provoquer une envolée des emprunts et desdépenses.

Ces afflux d’argent ont permis de faire repartir les prix immobiliers à la hausse, de relancer les investissements, destabiliser les marchés et de donner un coup de pouce aux consommateurs. Le produit intérieur brut (PIB) a par ailleursaffiché un gain de 6,7 % par rapport à l’année passée au deuxième trimestre, un taux conforme aux prévisions et àl’objectif du gouvernement (entre 6,5 % et 7 % pour 2016).Derrière cette accélération du PIB chinois se cachent cependant plusieurs risques majeurs. La croissance ducrédit a explosé au premier trimestre alors que l’économie doit déjà faire face à un problème de surendettement et desurcapacité dans l’industrie. L’écart entre le crédit et le produit intérieur brut (différence entre le ratiocrédit/PIB et sa tendance à long terme) a en effet atteint 30,1 %, son niveau le plus élevé depuis 1995, selonla Banque des règlements internationaux basée à Bâle. Au-delà de 10 %, l’institution considère que le pays est enrisque bancaire : un gonflement de ce chiffre peut être le signe d’une croissance excessive du crédit et de la possibleimminence d’une crise financière.Cet essor des emprunts risque de ne pas être viable et pourrait rendre la situation encore plus délicate. À moinsque le gouvernement du président Xi Jinping ne parvienne à remplir ses objectifs de réformes des entreprisespubliques et d’assainissement du secteur bancaire, plombé par les créances douteuses. Certains analystes estiment

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publiques et d’assainissement du secteur bancaire, plombé par les créances douteuses. Certains analystes estimentque la Chine devra recapitaliser ses banques dans les prochaines années, vu que les volumes de créances douteusespourraient être plus élevés que ceux indiqués dans les chiffres officiels.

1.1.4 États-Unis : sous-pondération

Pour la première fois depuis avril, les hedge funds ont pris des positions baissières sur les futures actions US, leS&P 500 étant sur le point de dépasser la limite basse de son intervalle de fluctuation sur trois mois. Les gros spéculateursaffichaient une position nette courte de 2 200 contrats après être restés longs pendant 25 semaines successives, selon lesdonnées les plus récentes de la Commodity Futures Trading Commission. Le rythme auquel le sentiment s’est dégradé estle plus rapide depuis 2011 !

Valorisations en hausse - à 20 fois les résultats, le S&P 500 est valorisé à près de 20% au-dessus de sa moyenne sur 10ans. Cela a donné aux haussiers une raison de faire une pause, bien que les actions conservent l’avantage d’être plusattrayantes que le marché obligataire. Dans le modèle de la Fed comparant le rendement des actions au rendement desTreasuries à 10 ans, le S&P 500 est actuellement moins cher qu’il ne l’a été 84 % du temps depuis 2000.

Les entreprises voient leur coussin de liquidités fondre petit à petit. Après avoir été mises sous pression pendant un an etdemi par la chute des bénéfices et les importants moyens mis en œuvre pour les rachats d’actions et les versements dedividendes, les réserves de cash des entreprises américaines ont commencé à diminuer. La trésorerie et les équivalentsde trésorerie des sociétés reprises dans le S&P 500 sont retombés à 860 millions de dollars (médiane) le trimestredernier, des niveaux qui n’avaient plus été atteints depuis trois ans selon des données compilées par Bloomberg.

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Même si cela ne signifie pas qu’il faut s’attendre à une explosion des cas d’insolvabilité, ce recul complique tout de même latâche des CEO, alors que ceux-ci tentent de rassurer leurs actionnaires sur fond de baisse des bénéfices. Les rachatsd’actions, qui ont permis de faire oublier aux investisseurs les errements de l’économie ces sept dernières années,deviennent de plus en plus difficiles maintenant que la Réserve fédérale envisage de relever ses taux d’intérêt.

Au premier abord, les caisses des sociétés du S&P 500 semblent encore bien remplies. Hors secteur financier, lesentreprises disposaient encore de 825 milliards de dollars de liquidités à la fin du deuxième trimestre, soit pratiquement leniveau le plus élevé depuis le début du marché haussier. Le problème est que cet argent est principalement concentrédans un seul segment du marché. Plus de la moitié du total se trouve en effet dans les coffres des 50 sociétés lesplus riches de l’indice. Pour les autres 90 %, les bilans sont en train d’être réduits à un rythme totalement inédit depuis ledébut du marché haussier. Les liquidités de ces entreprises totalisaient 385 milliards de dollars au deuxième trimestre,contre 447 milliards de dollars en fin 2015. Une baisse de 10 % par rapport à l’année précédente et qui rappelle le recul de11 % enregistré en fin 2014 (le plus important recul depuis 2009).

Les liquidités deviennent moins abondantes, tous secteurs confondus, notamment à cause des grandes sociétés. Latrésorerie a ainsi chuté de 26 % par rapport à il y a un an chez Alphabet, la société mère de Google, et de 66 % chez AT&T.Les principales pertes ont été enregistrées dans des groupes pétroliers tels que Chesapeake Energy, dont les réserves sontpassées de 2,1 milliards de dollars à 4 millions de dollars sur l’année écoulée. Plusieurs firmes technologiques ontégalement été touchées : EBay et NetApp ont ainsi vu leur trésorerie chuter d’au moins 24 %.

Le nœud du problème réside dans la détérioration des bénéfices. Cela fait six trimestres d’affilé que les sociétés duS&P 500 enregistrent une croissance bénéficiaire négative, une série qui n’a été dépassée qu’une seule fois depuis 1936,lors de la crise financière. Selon des données compilées par Bloomberg, les bénéfices avant intérêts et impôts des sociétésdu S&P 500 ont atteint 1100 milliards de dollars au cours de l’année clôturée le trimestre passé, leur niveau le plus basdepuis 2011.

La pression s’accentue sur les entreprises US qui ont préféré restituer de l’argent à leurs actionnaires plutôt qued’investir dans des installations et des équipements. Les investisseurs sont en train de revoir leurs priorités : lesentreprises qui investissent le plus devancent celles les plus actives dans le domaine des rachats d’actions.

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Certains signes montrent déjà que les entreprises ne veulent plus dépenser au même rythme qu’avant. Les annonces denouveaux rachats ont ainsi chuté de 115 milliards de dollars depuis 2015 et les dividendes devraient connaître leurpire taux de croissance depuis 2010, selon Barclays. Comme les rachats et les dividendes dans le S&P 500 équivalent àenviron 128 % des bénéfices annuels cette année, le pourcentage le plus élevé jamais enregistré en dehors de la crisefinancière, ce ralentissement des paiements a de quoi inquiéter. Et si les bénéfices ne s’améliorent pas, cela limitera lacroissance des dividendes, ce qui, à son tour, risque de peser sur la performance du marché boursier.

La faiblesse persistante des taux d’intérêt et le flou entretenu par la Réserve fédérale poussent les entreprisesUS à toujours miser sur la même recette, à savoir un loyer de l’argent quasiment nul qui a alimenté le boom ducrédit tout au long du marché haussier. La dette totale moyenne dans le S&P 500 a grimpé à 5,43 milliards de dollars audeuxième trimestre, le niveau le plus élevé jamais enregistré, selon Bloomberg. Emprunter à ces taux exceptionnellementbas afin d’utiliser les fonds ailleurs, y compris pour des dividendes ou des rachats d’actions, peut être une bonne idée, mais ily a une limite que les entreprises ne peuvent pas dépasser. Le recul des bénéfices pourrait, un jour, mettre fin à tout cela. Ladette des sociétés internationales cotées par S&P était déjà trois fois plus élevée que les bénéfices avant intérêts, impôts etamortissements en 2015, son niveau le plus élevé depuis 2003 et une hausse par rapport à l’an dernier, où elle était 2,8 foisplus élevée, selon l’agence de notation.

Dans ce contexte, il est logique que le marché ait clairement montré à la présidente de la Fed, Janet Yellen, qu’ilvalait mieux modifier les taux de manière progressive que d’agir dans la précipitation. Une telle approche a déjàfait ses preuves dans le passé et a d’ailleurs déjà permis d’engranger des gains non négligeables. Ainsi, lorsque laRéserve fédérale opte pour un resserrement progressif de ses taux, on constate que les actions US affichent uneprogression moyenne de 11 % sur un an. À titre de comparaison, elles perdent 2,7 % en moyenne lors de cycles plusrapides. En procédant lentement après un premier relèvement, la banque centrale aurait le temps de bien évaluer l’impact dela hausse des taux sur l’économie et pourrait ainsi réduire le risque d’un resserrement excessif. Nos économistes continuentde penser que les autorités monétaires américaines neutraliseront l’impact de la hausse des taux de décembre en insistantsur le caractère progressif des prochains resserrements : 50 points de base en 2016 et 50 points de base en 2017.

Même si les analystes prédisent que la récession des bénéfices est sur le point d’atteindre 18 mois et si le résultatnet des sociétés du S&P 500 a diminué de 1,6 % au troisième trimestre, la baisse prévue est tellement petitequ’elle se transformera presque certainement en hausse dès que les entreprises seront en mesure de dépasserles prévisions. Pour les investisseurs en actions optimistes, le moment est idéal, l’histoire prouvant que l’interruption dudéclin des résultats précède généralement certaines des périodes les plus fastes pour les marchés actions. Pour lesinvestisseurs recherchant la preuve que le S&P 500 peut offrir au marché une neuvième année de hausse, la fin de l’érosiondes bénéfices est de bon augure. Sur les neuf cas de sortie d’une période prolongée de ralentissement de la croissance desentreprises, tous se sont accompagnés d’une hausse des actions sauf deux. Le S&P 500 a progressé en moyenne de 12 %au cours de l’année qui a suivi, contre un rendement annualisé de 6,3 % sur les 80 dernières années. Au cours des troispériodes pour lesquelles la contraction des bénéfices n’a pas coïncidé avec une récession économique, comme c’est le casaujourd’hui, les actions ont connu une progression moyenne de 13 %.

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1.2 Styles

1.2.1 Cycliques contre défensives : neutre

Récemment, la bonne performance des sociétés les plus dépendantes de l’économie ne se justifie pas étantdonné les risques sur la croissance mondiale (les indicateurs chinois ravivent les inquiétudes concernant la solidité de lareprise mondiale) et sachant que les valorisations des sociétés cycliques ont atteint leur plus haut niveau depuisdeux ans comparés aux valeurs défensives. L’indice Bloomberg Monde de la consommation cyclique, qui comprend dessecteurs allant de la finance à la technologie et l’industrie, a progressé de 12 % (en euros) d’un point bas en juin à un pointhaut en septembre, soit près de trois fois plus qu’un indice similaire de valeurs défensives. De ce fait, les valorisations ont étépoussées à plus de 14 fois les bénéfices estimés, proches de leur plus haut niveau depuis novembre 2015 par rapport auxdéfensives.

La saison de publication des résultats battant son plein, on constate un regain de scepticisme. Les résultatséconomiques mitigés et les inquiétudes concernant les sociétés financières et l’avenir des politiques monétaires desbanques centrales menacent les titres sur lesquels les investisseurs avaient misé. Les analystes prédisent une contractiondes bénéfices cette année, et les producteurs de matières premières et les banques, c’est-à-dire ceux qui ont mené le rallyedes cycliques, sont donnés comme les plus mauvais élèves.

Au cours des derniers mois, la rotation importante vers les valeurs cycliques suggère que ces actions sontaujourd’hui plus vulnérables à toute déception, l’excès d’optimisme du marché ayant gonflé les valorisations. La reprisede l’économie mondiale n’est pas suffisante. Les investisseurs l’ont légèrement surestimée.

Les surprises macroéconomiques, qui guident généralement l’activité manufacturière mondiale (PMI), sont tropvolatiles pour tabler sur une hausse régulière de cette dernière. En d’autres termes, il est difficile de dire si le momentummacroéconomique pourrait s’améliorer et si les cours des actifs à risque pourraient réagir favorablement à cette hausse. Noséconomistes ont maintenu leurs prévisions relatives à la croissance du PIB mondial au-dessous de 3 % (2,3 % en 2016 et2,7 % en 2017). Cela ne devrait pas aider les cycliques à limiter leur sous-performance par rapport aux défensives.

Nous pensons que les taux devraient légèrement augmenter à moyen terme et nous savons qu’un contexte baissier du

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marché obligataire nuit aux actions défensives et aux actions assimilables aux obligations (l’orientation des rendementsobligataires ayant constitué par le passé est un très bon indicateur de la performance relative entre les secteurscycliques et les secteurs défensifs), mais les valeurs cycliques ne devraient néanmoins pas surperformer de sitôt.

1.2.2 Actions de rendement (actions avec faible ratio cours/valeur comptable) : surpondération (par

rapport aux actions de croissance)

Les actions de rendement pourraient prendre le dessus sur celles de croissance. Les premiers relèvements destaux de la Réserve fédérale depuis 2006 (en décembre 2015 et probablement en décembre 2016) devraient jouerun rôle à ce niveau, car les sociétés dans cette catégorie profitent davantage de ce type de mouvement. La hausse desrendements obligataires joue en faveur des actions de rendement, car il existe généralement une importante corrélationpositive entre la performance relative des actions de rendement par rapport aux actions de croissance et l’orientationhaussière des rendements obligataires.

L’environnement macroéconomique plaide toujours légèrement en faveur des actions de rendement sur fondd’amélioration de la croissance mondiale, les rendements obligataires devant s’apprécier avec le temps.

Sur le long terme, les actions de rendement performent mieux que les actions de croissance. En période decontraction économique, la performance relative des actions de rendement est généralement moins flatteuse. Toutefois, ilfaut être conscient que les cycles baissiers durent globalement moins longtemps que les cycles haussiers. Cela signifie quemême une détention passive d’actions de rendement se révèle bien souvent profitable pour les investisseurs disposant d’unhorizon de placement à long terme.

Les actions de croissance, que nous définissons comme celles présentant le ratio cours/valeur comptable le plus élevé,affichent toujours une prime de valorisation par rapport aux actions de rendement.

1.2.3 Grandes capitalisations : surpondération (par rapport aux petites capitalisations) aux États-Unis et

neutre en Europe

Le cycle pourrait de nouveau tourner en la faveur des grandes capitalisations aux États-Unis. La zone euro devraitconnaître la même évolution lorsque l’aversion pour le risque aura de nouveau gagné du terrain sur les marchésfinanciers, car on observe généralement un biais en faveur du côté sûr des actions (« fuite vers la liquidité »). Le ratio entrel’indice S&P 100, composé des 100 plus grandes sociétés du S&P 500 en termes de valeur en Bourse, et l’indice des petitescapitalisations (Russell 2000) est passé d’un plancher quasi historique (0,7) à 0,8 au cours de ces quatre dernièresdécennies.

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Un fossé est en train de se creuser sur le marché boursier US entre les sociétés dont le chiffre d’affairesaugmente et les autres. Jusque récemment, ces dernières avaient la préférence des investisseurs. Les chiffres d’affairesdes plus grandes entreprises américaines sont en recul et ce, alors que les cours flirtent avec leurs plus hauts historiques.Conséquence, les grandes capitalisations n’avaient plus été aussi chères depuis plus de dix ans (d’après leur chiffred’affaires). L’indice Russell 1000, qui suit l’évolution des plus grandes actions en termes de valeur en Bourse, s’échange à1,8 fois le chiffre d’affaires, contre un ratio de 1,1 pour les petites capitalisations du Russell 2000, l’écart le plus importantdepuis 2003.

Lorsqu’elles sont rapportées aux revenus, les valorisations brossent un tableau plus extrême que par rapport auxbénéfices. Le S&P 500 affiche un ratio cours/chiffre d’affaires de 1,8, soit environ 20 % de moins que le plus haut de 2000,selon des données compilées par Bloomberg et S&P. Parallèlement, le ratio cours/bénéfice de l’indice de 20,1 est environ30 % plus bas qu’au moment du pic de la bulle Internet. Les ratios cours/chiffre d’affaires des grandes capitalisations ontcommencé à décoller au premier trimestre de 2014, lorsque l’indice Russell 1000 a surpassé son équivalent pour les petitescapitalisations pour la première fois depuis le début du marché haussier. L’indice a gagné 18 % (en dollars) depuis lors,contre un gain de 7 % pour le Russell 2000.

Le ralentissement de la croissance du chiffre d’affaires n’a pas été aussi fort pour les membres du Russell 2000.Malgré un pic de leur croissance en 2014, les chiffres d’affaires des petites capitalisations ont, en effet, par la suite continuéde progresser chaque trimestre. Les petites sociétés ont connu une plus forte croissance de leur chiffre d’affaires que lesgrandes capitalisations et ce, dans tous les secteurs du marché boursier, à l’exception de celui des télécommunications.

La récente progression des plus grosses capitalisations s’explique notamment par leur ubiquité dans les ETF, quiles rend plus accessibles pour les acheteurs voulant investir d’importantes sommes d’argent sur la Bourse américaine. Sivous êtes un gestionnaire global ou un fonds souverain et que vous voulez placer de l’argent aux États-Unis, vous aurez eneffet tendance à privilégier les noms les plus liquides. Même avec de meilleurs fondamentaux, les petites capitalisationsseront toujours perdantes dans ce contexte.

L’écart de valorisation est également en partie dû à l’impact plus important des prix pétroliers sur les grossescapitalisations : le secteur de l’énergie représente 6,8 % du Russell 1000, contre 2,4 % dans le Russell 2000.

1.2.4 Mettre l’accent sur les actions à dividende élevé et la croissance des dividendes.

Le surplus de rendement des actions par rapport au crédit est plus élevé que lors des cycles précédents et mettra sansdoute plus de temps à se normaliser, et les investisseurs privilégient toujours la quête de rendement, en particulier siles sociétés continuent d’augmenter les dividendes distribués.

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D’ordinaire, le rendement des obligations émises par les entreprises tend à être inférieur au rendement des dividendes et auxrendements boursiers car ces derniers fluctuent en fonction des anticipations de croissance des sociétés alors que lescoupons des obligations sont fixes. Or, cette fois, pour égaler le rendement moyen de l’indice Stoxx Europe 600, ilfaudrait que le rendement moyen des obligations d’entreprise « investment grade » européennes (indiceBloomberg) (actuellement de 0,5 %) augmente de 3,1 %.

En Europe, nous continuons à privilégier les actions disposant de rendements élevés et qui tendent à accroîtreles dividendes distribués : elles surperforment l’indice MSCI World All Countries de 1,3 % (en euros) depuis fin 2015. Ilconvient de miser sur les actions capables d’offrir un rendement des dividendes élevé et durable. Le rendement desdividendes et la croissance de ce rendement constituent la première source de rendement des actions sur le longterme.

Les actions européennes offrent un rendement de dividende plus élevé (4 %) que les actions des autres régions (2,6 %aux États-Unis ou 1,9 % au Japon).Les actions à haut dividende surperforment les actions à faible dividende et le marché sur le long terme.

1.3 Secteurs

1.3.1 Secteurs

1.3.1.1 Énergie : neutre => surpondération

Pour ce qui concerne les matières premières, l’Organisation des pays producteurs de pétrole (OPEP) a jeté unpavé dans la marre des marchés à terme en annonçant que ses principaux membres gèleraient leur production,une première en huit ans. Globalement, l’accord réduirait la production d’un volume estimé entre 200 000 et 700 000 barilspar jour (la portant à entre 32,5 et 33 millions de barils par jour).

Les analystes s’accordent pour dire que, même si la production diminue, cela ne changera pas grand-chose. L’OPEPayant atteint ou s’approchant de son niveau de production maximum, une petite réduction ne constitue pasune grosse concession, notamment lorsque l’on connaît l’histoire des relations entre l’Iran et l’Arabie Saoudite (l’Iran,le Nigeria et la Libye sont exemptés de l’accord) et la possibilité d’une offre supplémentaire provenant des pays nonmembres de l’OPEP et des stocks.

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On reproche également à l’OPEP d’avoir repoussé l’annonce officielle de l’accord jusqu’au 30 novembre, date de saprochaine réunion qui se tiendra à Vienne. L’application de la réduction de la production est difficile pour legroupe, et l’histoire prouve que les accords ne sont pas toujours crédibles. Le marché a bien accueilli la rhétorique del’OPEP (les contrats futures sur le Brent ont progressé de 16 % en euros à 47 USD le baril). Voyons si ils tiennentleurs promesses.L’important dans cet accord-cadre sur la production de l’OPEP n’est pas tant le volume de la réduction implicite ouréelle mais le fait que l’Arabie Saoudite et l’OPEP ont repris le pilotage du marché.S’il est difficile d’exagérer l’importance de ce changement et si les modalités de la mise en œuvre du plan sont encoreimprécises, Goldman Sachs prévoit une hausse des cours du pétrole de 7 à 10 USD le baril en 2017, et peut-être plus élevée si l’accord relatif à la réduction de la production intervient.Nous pensons que le prix du pétrole devrait se situer entre 40 et 55 USD le baril en 2016 avec un risque de hausse etentre 55 et 70 USD le baril en 2017, la décision de l’OPEP de diminuer sa production étant supposée résorber l’excèsd’offre sur les marchés pétroliers internationaux. Dans ce contexte, nous avons renforcé notre position dans lesecteur de l’énergie (neutre à surpondérer) des deux côtés de l’Atlantique avec une préférence particulièrepour les compagnies pétrolières intégrées qui devraient, surperformer les raffineurs et les prestataires de servicespétroliers et gaziers. Nous avons d’autre part revu notre position vis-à-vis des services aux collectivités de surpondérerà neutre alors que nous conservons notre approche « valeurs défensives/de rendement » sur les actions.

Depuis la décision de l’OPEP le 28 septembre, les cours du pétrole et des actions des majors pétroliers ontrebondi, forçant les investisseurs à déboucler les positions qui bénéficieraient d’une baisse. Ce secteur semble sourire auxsélectionneurs d’actions, ce qui ne leur est pas arrivé depuis longtemps. S’il existe des positions courtes concentrées et quevous y êtes exposés, l’imminence d’un évènement à risque doit vous inciter à la prudence. Mais maintenant qu’elles ont étéliquidées, cela a pu assainir le marché.

Maintenant que les investisseurs sont moins préoccupés par la possibilité d’une faillite de l’industrie pétrolièredue à une surproduction incontrôlée, ils peuvent se concentrer davantage sur les caractéristiques propres desactions des compagnies énergétiques. Cela représenterait un changement important pour un secteur dont les cours ontfluctué au gré des caprices des prix du pétrole pendant les 18 derniers mois.

Selon les prévisions, les investisseurs dans les actions du secteur de l’énergie devront affronter un huitièmetrimestre consécutif de profits plus faibles. Le groupe prévoit une contraction des bénéfices de 65 % au troisièmetrimestre aux États-Unis, selon les estimations de stratégistes compilées par Bloomberg. Toutefois, les sociétés peuventencore dépasser les attentes de Wall Street puisque les perspectives ont été tellement mauvaises que les prévisions debénéfices ont été revues à la baisse de 27 %, plus que tous les autres secteurs.

1.3.2 Secteurs US :

1.3.2.1 Financières: neutre => surpondération

Étant donné l’écart de valorisation important entre les financières et les sociétés des autres secteurs, il n’est pasexagéré d’affirmer qu’une stratégie de rendement parie sur la hausse des financières et qu’une stratégie de croissanceparie sur la baisse des financières.

Les financières sont de loin le secteur le plus important dans les indices composés des grandescapitalisations américaines de rendement, et comptent parmi les actions américaines les moins chères. Ellesreprésentent 23 % de l’indice S&P 500 des valeurs de rendement et 24 % de l’indice Russell 1000 des valeurs derendement.Les financières sont également les valeurs les moins chères au regard de leurs fondamentaux, que ce soitpar les actifs ou par les résultats. Celles du S&P 500 se négocient à un ratio cours/bénéfice de 13,8 (calculé à partirdu bénéfice des 12 derniers mois, contre 14,3 avec des bénéfices estimés sur 12 mois) et un ratio cours/valeurcomptable de 1,1. Les secteurs qui se situent juste au-dessus de ces valorisations s’échangent à un ratiocours/bénéfice de 15,4 (télécoms) et un ratio cours/valeur comptable de 1,9 (énergie et services aux collectivités).

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Par ailleurs, l’indice S&P 500 des financières est sorti, au troisième trimestre, d’une période de plusieurs années destagnation des revenus.

En effet, les revenus avaient à peine augmenté entre le deuxième trimestre 2013 et le deuxième trimestre 2016, avecune croissance trimestrielle moyenne de 0,4 % seulement pendant cette période. Toutefois les revenus ont bondi de16,4 % au troisième trimestre 2016.Les bénéfices ont augmenté de 16,6 % au cours du trimestre précédent, après une hausse de 10,1% audeuxième trimestre. Il faut remonter à 2009 pour trouver une croissance à deux chiffres pendant plusieurs trimestresconsécutifs dans ce secteur.

Bien sûr, il serait prématuré de considérer les résultats du troisième trimestre comme un tournant pour les financièresaméricaines, mais il semblerait que certains investisseurs retrouvent confiance dans ce secteur. L’indice S&P 500des financières a offert un rendement de 23 % (en USD) entre le 11 février, où le marché a touché un point bas, et la fin dumois dernier, contre 18 % pour le S&P 500 sur la même période.