RÉPUBLIQUE D’HAÏTI : VOIES ET MOYENS POUR LA STABILITÉ FINANCIERE ET UNE REPRISE ECONOMIQUE...

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    Banque de la RpubliquedHati

    DOCUMENT CADRE

    RPUBLIQUE DHATI

    VOIES ET MOYENS 1

    POUR LA STABILIT FINANCIERE

    ET UNE REPRISE ECONOMIQUE EQUILIBREE_________________________________________________________________________

    7 fvrier 2010

    1. PRAMBULE1.1 Hati vient de faire face lune des plus svres catastrophes naturelles layant jamaisfrappe, un tremblement de terre de catgorie 7.0 provoquant la destruction quasi-intgrale ducentre-ville de Port-au-Prince et de quatre villes avoisinantes, la perte denviron 200,000 vieshumaines et laffectation directe ou indirecte de 3 millions dHatiens selon les estimations

    prliminaires. A premire vue, cette situation prsente des perspectives plutt sombres pourlconomie et la population. Toutefois, au-del de ces risques immdiats, cette crise, comme biendautres, offre une vritable opportunit, celle de ne pas se contenter tout simplement dereconstruire mais de littralement repenser les structures conomiques et sociales de mme quelorganisation spatiale du pays, certes de sa capitale, Port-au-Prince, mais galement des autresvilles dimportance. Il est rconfortant et encourageant de noter que suite ce sisme, le paysfait lobjet de la plus forte mobilisation internationale de son histoire et de promesses dai definancire apparemment sans prcdent, avec notamment la recommandation du DirecteurGnral du Fonds Montaire International dentreprendre un Plan Marshall pour Hati.

    1.2 Certes, les retombes relles des programmes daide ont souvent t en deca desesprances, les dcaissements ayant t majoritairement dirigs vers lhumanitaire, avec desretombes de courte dure, en lieu et place dun dveloppement conomique rel susceptibledaffranchir le pays de sa dpendance de lassistance internationale. Cest loccasion de rompre,une fois pour toutes, avec cet tat de choses, dimpulser la croissance et la cration demplois ensappuyant prioritairement sur linvestissement, sur de meilleures bases, dans les secteurs

    1Le Ministre de lEconomie et des Finances et la Banque de la Rpublique dHati remercient les banquiers et conomistes

    qui ont, de bonne grce, particip llaboration de ce document : Pierre-Marie Boisson, F. Carl Braun, Kesner Pharel et

    Bernard Roy.

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    btiment et travaux publics, agricole, manufacturier, touristique et commercial, servis par uneorganisation spatiale et des services publics nettement plus adquats dcoulant de politiquespubliques cohrentes.

    1.3 Ce document na pas lambition dadresser lensemble des actions, mesures et politiquespubliques correspondant lampleur de la situation et des ambitions susvises. Il se concentre

    plutt sur les aspects concernant le systme financier et les mesures prendre en vue : (i) demaintenir une bonne qualit de portefeuille et de mitiger limpact des pertes subies par sesclients emprunteurs ; et (ii) de permettre aux banques de supporter, travers loctroi de crdit,leffort de reconstruction ncessaire. Nous distinguerons, cet effet, cinq phases, savoir : (a) larestauration immdiate du systme de paiements ; (b) le rtablissement dune capacit minimalede lEtat dans les domaines lis la sant du systme, principalement sa capacit fiscale etdouanire, la justice et la scurit publique; (c) la gestion des pertes attendues ; (d) la relance ducrdit court terme ; et (e) la reconstruction et la relance subsquente de lconomie. Le casparticulier du portefeuille de microcrdit, reprsentant environ 15% du total du systme, estconsidr de manire distincte, compte tenu de ses spcificits propres.

    1.4 Une brve prsentation du contexte pr-dsastre permettra dillustrer la fois lironie dela catastrophe survenant au moment-mme o le pays donnait des signes de normalisation,aussi bien que la forte probabilit dune rponse vigoureuse de la socit, facilite par unnouveau climat social, fait de courage, desprit dinitiative, de solidarit despoir et de volontde dialogue et de construction.

    2. CONTEXTE PRE-DESASTRE2.1Le dsastre nous surprend notre cinquime anne de croissance conscutive du Produit

    Intrieur Brut, avec un taux de croissance relle de 2.9% en 2009, en net contraste avec celui

    de la plupart des pays du monde pendant cette priode de profonde rcession, six annes de

    rduction quasi-ininterrompue de linflation, une rgression de linscurit que vit la socit

    hatienne depuis 20 ans et qui a connu son apoge en 2005, un programme dinvestissement

    public important, particulirement dans le secteur agricole qui franchit en 2009, pour la

    premire fois depuis de nombreuses annes, le chiffre de croissance relle de 5% par anne,

    et des progrs notables dans de nombreux domaines institutionnels et sociaux, y compris le

    dialogue entre secteurs priv et public. Sur ce dernier point, il est plus que symptomatique

    de noter que, tranchant avec la tendance de nombreuses annes, linvestissement priv ait

    t en nette reprise durant les trois dernires annes, linvestissement tranger direct

    dpassant le demi milliard de dollars, incluant la construction par la Royal Caribbean CruiseLine , dans le cadre dun partenariat avec le Gouvernement, de lun des quatre plus

    importants ports de croisire de la Carabe, les investissements denvergure consentis

    notamment dans les domaines de la tlphonie cellulaire, de la minoterie, de linfrastructure

    portuaire, de lhtellerie, de lnergie et de la finance. Soixante pour cent de la dette

    extrieure dHati ont t annuls en 2009, suite aux efforts dassainissement financier et de

    meilleure gouvernance publique entrepris par lEtat Hatien.

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    2.2Ce contexte justifie la conviction que la nation hatienne porte en elle les germes dereconstruction et de reprise requis en la circonstance. Dans ce contexte, leffort de

    reconstruction et de reprise conomique requiert lappui dun secteur financier renforc et

    capable de jouer pleinement son rle institutionnel.

    3 RESTAURATION DU SYSTEME DE PAIEMENTS3.1 Grce lexcellente collaboration entre la communaut bancaire et les autorits publiques

    concernes, la restauration du systme de paiements a pris place en seulement neuf (9) jours

    pour les villes de province et onze (11) jours pour la zone mtropolitaine. Cette phase a surtout

    consist en la remise en tat de fonctionner des installations bancaires existantes, incluant

    principalement la ractivation des systmes dinformation et de communication, affects par

    leffondrement des immeubles les logeant, la fermeture et la validation des donnes comptables

    et la scurisation des services bancaires, le tout conduisant une reprise des oprations sur base

    minimale dans limmdiat et progressive par la suite. Ces oprations se sont limites, en un

    premier temps, aux services de caisse (retraits, dpts et paiement de transferts dmigrs), avec

    rationnement temporaire des tirages de la clientle, et se sont tendus quelques jours aprs

    dautres services (achat de chques), aux transferts lectroniques et aux services de banque

    distance (cartes bancaires, internet, ATM). Il importe cependant de noter que les dommages

    causs au rseau financier tlmatique, connectant la banque centrale aux banques et au

    Ministre des Finances, compromettent le retour lefficacit pr -dsastre du systme de

    paiements, notamment au niveau des transferts de banque banque et du paiement des

    employs de lEtat par crdit direct leur compte en banque.

    4 RESTAURATION DE LA CAPACITE MINIMALE DE SERVICE DE LETAT4.1 Lun des secteurs les plus touchs par le sisme du 12 janvier est indubitablement lEtat,avec la destruction, entre autres, dimmeubles dinstitutions directement lies aufonctionnement du systme financier, la Direction Gnrale des Impts, le Palais de Justice, lePalais de Ministres, le Ministre de la Justice et le Port de Port-au-Prince, indispensable aufonctionnement de lAdministration Douanire. La crise a galement svrement affectlappareil de scurit publique, par la disparition de ltat-major de la MINUSTAH et plus de300 membres du personnel de cette institution et lvasion de plus de 3,000 prisonniers duPnitencier National, entrainant une brusque augmentation de la criminalit, au moment-mmeou les forces de scurit subissent de lourdes pertes en personnel-cl.

    4.2 Face cette situation, il est impratif de rhabiliter en urgence certaines institutionspubliques vitales au bon fonctionnement de lEtat en gnral et du systme financier enparticulier :

    (a)Lappareil fiscal et douanier, frapp par la destruction de limmeuble central de laDGI, par la mort de ses principaux dirigeants et par laffaiblissement de la capacitadministrative des douanes ; il sagit ici (i) pour la DGI, de rapidement combler lesvacances au niveau de lquipe de direction, damnager des espaces provisoires de

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    travail et dengager au plus vite le travail de reconstruction ; et (ii) pourladministration des douanes, de librer, par anticipation, la plus grande partiepossible des marchandises entreposes, en prenant les mesures requises pour assurerla taxation future, dengager au plus tt les travaux de rhabilitation portuaire etaroportuaire et de rhabilitation des espaces affects et de complter au plus tt lesinvestissements requis dans les ports de provinces pour poursuivre le travail de

    renforcement de la capacit de collecte en cours depuis plusieurs annes ;

    (b)Lappareil judicaire et de scurit publique, lourdement affect par leffondrement duPalais de Justice et du Ministre de la Justice et les ravages causs par le sisme auxforces de police et la Minustah ; il sagit ici de faire appel durgence la cooprationinternationale en vue de reconstituer au plus tt leffectif de la force des Nations-Unies, dintensifier le recrutement et la formation dofficiers de justice et de policierset de combler au plus tt la carence en immeubles de la Justice en amnageant enurgence des espaces temporaires et en engageant leffort de construction de nouveauximmeubles.

    5 MITIGATION DES PERTES DU SYSTEME FINANCIER5.1 Une autre consquence de la catastrophe est la dcapitalisation brutale de nombreuxclients emprunteurs de la capitale et des autres villes touches par le sisme, suite la pertedactifs immobiliers et de marchandises. Une partie du risque sera certes assume par les policesdassurance acquises par les concerns. Toutefois, ces polices pourraient, pour de mult iplesraisons, ne couvrir quune partie des dommages, ce qui maintiendrait de nombreux clients dansun tat dinsolvabilit et entrainerait un risque de contraction du crdit et donc de rcession etdaccroissement du chmage.

    5.2 Pour faire face ce risque, les premires mesures recommander sont dordrerglementaire. Il sagira donc essentiellement dadapter la rglementation prudentielle, afindallger certaines contraintes et de faciliter loctroi de crdit.

    6 RELANCE DU CREDIT A COURT TERME6.1 Le systme bancaire regorge de liquidits et peut facilement faire face aux besoins decrdit de la clientle. Actuellement en effet, le total des dpts est de lordre des 100 milliards degourdes alors que le crdit nest que de 36 milliards, soit un ratio prts/dpts de seulement36%, contre 55-60% dans la rgion. Le problme du faible recyclage de ces fonds en crdit tient

    aujourdhui : (i) de la faiblesse de la demande solvable ; et (ii) du faible niveau de capital-risquedisponible dans lconomie.

    6.2 A court terme donc, on peut faire lhypothse de lexistence dune demande accrue decrdit en provenance des besoins en immobilisation et en reconstitution de fonds de roulement,demande dont les perspectives de solvabilit devraient tre assez prometteuses du fait desvolumes attendus de transferts de la diaspora, des exportations manufacturires, des fluxdaide et, par voie de consquence de lactivit commerciale. Le problme rel adresser nest donc

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    pas le manque de liquidit mais la faiblesse du capital-risque disponible dans le systme bancaire et danslconomie en gnral.

    6.3 Pour faire face ce problme, il faudra sensiblement renforcer le capital-risque la

    disposition du systme bancaire, travers entre autres les mesures suivantes :

    1. Etablissement de fonds de garantie partiel, couvrant les crdits offerts par les banquesen vue aussi bien dassurer la relance de lconomie; ces fonds de garantie viseraientaussi bien les crdits futurs que le refinancement de crdits existants avant le sisme.

    2. Etablissement de mcanismes de recapitalisation des banques, prvoyant notamment :(i) lmission de dettes subordonnespar les banques commerciales; et(ii) le rachat de portefeuilles de crances en souffrance par un fonds ou une entit financire

    ddie cette fin, linstar de la Resolution Trust Corporation cre dans lesannes 80 pour contribuer la rsolution de la crise des caisses dpargne auxEtats-Unis dAmrique. Dans le cas dHati, il serait toutefois indiqu denvisagerque le recouvrement des crances rachetes des banques soit confi cesinstitutions elles-mmes, sur base de commissions lies aux sommes effectivementrecouvres, de faon bnficier au mieux de leur exprience dans le domaine.

    3. Elargissement des mcanismes de garantie acceptables par la BRH, incluant par exemplele warrant de marchandises.

    4. Encouragement aux banques utiliser au mieux les mcanismes juridiques disponibles,tels le leasing dquipement.

    6.4 Ces quatre mesures contribueront agiliser le crdit bancaire, en renforant le niveau decapital devant soutenir loctroi des crdits additionnels ncessaires et en permettant auxbanques daccrotre leur prise de risque. En vue den renforcer lefficacit, les autoritssefforceront galement dadopter la combinaison la plus approprie de politiques financires etmontaires en vue de stimuler efficacement le crdit tout en maintenant la stabilit des prix etde lconomie. Ceci pourrait comprendre, au gr de la situation, la rvision des outils depolitique montaire notamment les rserves obligatoires, les bons BRH et les interventions sur

    le march des changes. Ces mesures viendront en raction la baisse de la liquidit disponibledcoulant de la reprise du crdit.

    7 CAS PARTICULIER DE LA MICROFINANCE7.1 Le crdit aux microentreprises, reprsentant, aprs inclusion du portefeuille offert par lescaisses dpargne, environ 15% du portefeuille total du systme financier, prsente un caractredistinct, en particulier d labsence quasi-gnralise de garanties tangibles solvables, linexistence de mcanisme dassurance tous risques dans ce secteur, lextrme vulnrabilit

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    de la grande majorit des emprunteurs ce genre de crise et leur grande mobilitgographique. Il faut donc sattendre une certaine dtrioration de la qualit du portefeuilledes institutions de microfinance (IMFs), dont le maintien constitue pourtant, pour plus de200,000 familles, le principal outil de financement et en mme temps lunique mcanismedassurance contre les risques de perte de leurs modestes actifs.

    Les mesures suivantes doivent tre considres de manire spare pour ce secteur :

    1. Octroi de dons humanitaires aux microentrepreneurs quon arrivera retracer, en vuenotamment de leur permettre : (i) de faire face leurs besoins de consommationimmdiats ; et (ii) de reconstituer leurs actifs fixes et circulant, en complment desmicrocrdits quils devraient recevoir des IMFs. La distribution de tels dons devraitlogiquement sappuyer sur les IMFs elles-mmes, de faon bnficier de leurconnaissance des bnficiaires et de leur capacit les atteindre travers leur rseau.

    2. Etablissement de fonds de garantie partiels destins relancer le microcrdit aux clientsdes zones touches par le sisme et rpondant aux spcificits propres la microfinance,fonds rpondant toutefois la mme logique que celle des fonds dvelopper pour lesystme bancaire. Ces fonds de garantie viseraient aussi bien les crdits futurs que lerefinancement de crdits existants avant le sisme.

    3. Etablissement de mcanismes de recapitalisation des IMFs suivant le modle ResolutionTrust Corporation, similaire celui propos au paragraphe 6.3.3 pour les banques,prvoyant le rachat de portefeuilles de crances en souffrance par un fonds ou une entitfinancire ddie cette fin et confiant aux IMFs le recouvrement des crances rachetesdes IMFs sur base de commissions lies aux sommes effectivement recouvres.

    4. Etablissement de fonds de garantie ou autres formes dassurance couvrant les risquesfuturs lis lavnement de catastrophes naturelles ou autres chocs externes lactivitdes IMFs.

    8 RECONSTRUCTION DE LINFRASTRUCTURE URBAINE8.1 Lun des faits les plus marquants de lhistoire socio-conomique dHati des soixante (60)dernires annes est limportante migration de la population du pays en qute de mieux -treface la pauprisation rurale. Lune des consquences de cette migration a t la croissancedmographique effrne des principales villes, particulirement la capitale, Port-au-Prince, dont

    le taux de croissance a t denviron 2.5 fois celui de la population hatienne dans son ensemble.Ainsi, la ville de Port-au-Prince est aujourdhui habite par environ 2.5 millions de personnes(25% de la population), dont la plupart logs dans des conditions prcaires et insalubres dansles tablissements informels . De plus, la plupart des artres de la capitale sont aujourdhuienvahies de commerces informels, oprant dans des conditions sanitaires et de scurit endessous des standards minimum.

    8.2 En dtruisant littralement une partie substantielle des immobilisations publiques etprives de la capitale et des autres villes sinistres, le sisme du 12 janvier donne en fait, la

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    premire opportunit relle de compltement repenser lorganisation spatiale du pays. Il nesagit pas dune simple reconstruction, mais plutt dune reconfiguration. On peut penser refaire la voierie et la plupart des btiments publics, utilisant pour ce faire, des normesadquates de protection contre les risques de sisme, dincendie et dinondation. Ladoption detelles normes et de mcanismes efficaces de contrle par lEtat est indispensable la protectiondes vies et des biens face aux risques naturels. Elle constitue galement une condition

    primordiale la relance saine du crdit, les banques aussi bien que leurs assureurs tant eneffet susceptibles daccrotre dornavant leurs exigences de qualit et de ne financer, dassurerou de prendre en garantie que des immeubles construits selon des normes adquates.

    8.3 De surcroit, lexode forc dune partie non ngligeable des habitants de la ville la suitedes dommages causs par le sisme entrane de fait un certain degr de dconcentration, qui silest renforc, offre lopportunit de dcongestionner la capitale et de dvelopper les principalesvilles de province.

    8.4 Dans cette optique, lEtat devrait, brve chance, considrer les mesures suivantes :

    1. Etude dun Nouveau Port-au-Prince prvoyant un zoning urbain appropri, lareconstruction de linfrastructure de la ville et le repositionnement des immeublesadministratifs et des principaux services publics, incluant aires de stationnement,habitations loyers modrs, marchs publics, places publiques, autres espacesrcratifs, gares routires, etc. ;

    2. Dlimitation de zones cibles pour utilisation collective en fonction du nouveau zoninget acquisition par lEtat des espaces requis ;

    3. Construction des nouvelles infrastructures, avec, toutes les fois que possible, concessiondes services des oprateurs privs, choisis par appel la concurrence (gestion des airesde stationnement, gares routires, marchs publics, etc.) ;

    4. Adoption dans les meilleurs dlais de normes adquates de protection contre les risquesde sisme, dincendie et dinondation et mergence dun systme plus efficace decontrle de leur application rigoureuse par les autorits en charge ; et

    5. Rforme urgente du Systme de Conservation Foncire et de Gestion des Droits deProprit.

    8.5 Un tel projet aurait, entre autres, le mrite de redonner la capitale un meilleur aspect etune capacit accrue dattirer le niveau dactivit touristique qui fit sa gloire dans les annes 50. Ilpermettrait galement daccrotre sa capacit daccueil dindustries manufacturires etdactivits de service, incluant le commerce. De la sorte, il constituerait lun des principauxmoteurs de croissance conomique des 10 prochaines annes.

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    8.6 Pour viter toutefois que le succs dun tel programme ne vienne inciter une nouvelleexplosion dmographique, il conviendrait de lancer en parallle, un programme de constructionsimilaire de plusieurs villes de province destin mieux rpartir la population etdcongestionner la capitale. Pour ce faire, on peut galement envisager un train de mesurescomprenant des travaux dinfrastructure (routes, nergie, etc), visant faciliter laccs aux villespriphriques la capitale 2.

    Un tel programme devrait tenir compte des potentiels sectoriels rgionaux (touristique, agricole,agro-industriel, etc) afin den amliorer la comptitivit dans la qute dune augmentation decration demploi, de la production et des exportations manant des zones concernes. Lideest de faire en sorte que les cots dopration des entreprises dans les zones cibles soient plusbas qu Port-au-Prince.8.7 Sous langle financier, un tel programme ncessite, en tout premier lieu, un apportimportant de ressources externes pour le financement des infrastructures publiques susnonces. Il renforce galement nanmoins lopportunit de ltablissement de fonds degarantie partiels, en vue dadresser spcifiquement le besoin de crdit spcifiquement li auxinfrastructures confies des oprateurs privs, tels infrastructures scolaires, rcratives,touristiques, en aire de stationnement et autres.

    9 RELANCE VIGOUREUSE ET EQUILIBREE DE LECONOMIE REELLE9.1 Compte tenu du contexte actuel, il est envisag dengager au plus tt des programmes de

    cration massive demplois en vue dattnuer les effets ngatifs de cette catastrophe sur le

    niveau de vie de la population. Ces programmes tablent notamment sur : (i) le financement

    court terme de projets haute intensit de main-duvre autour du nettoyage et du recyclage

    des dchets de matriaux gnrs par leffondrement dimmeubles dans les zones les plus

    touches par le sisme ; et (ii) le financement moyen terme de projets de reconstruction des

    zones dvastes. Eu gard la faiblesse de lpargne publique, de tels programmes vontinluctablement ncessiter laugmentation substantielle des apports trangers dans le

    financement du budget dinvestissement de la Rpublique et la mise sur pied de partenariats

    entre les secteurs public et priv en vue du financement dinfrastructures routires, portuaires,

    aroportuaires, lectriques et de tlcommunications dans les principaux dpartements

    gographiques du pays jouissant dun potentiel de croissance.

    9.2 Dans un tel contexte, il faut toutefois craindre les effets pervers de lafflux massif de

    ressources dans ces secteurs et limportance des apports externes, susceptibles de crer un

    syndrome hollandais (Dutch Disease Effect), entrainant laffaiblissement de la comptitivit

    des secteurs marchands de lconomie (exportation et industrie de su bstitution aux

    importations, dont lagriculture). Ce phnomne se fait dj cruellement sentir du fait de

    linvasion de produits imports des fins humanitaires et distribus gratuitement sur le march

    dans les semaines ayant suivi le sisme, menaant de faillite les entreprises domestiques

    produisant ou vendant des produits similaires. Ce fut le cas, par exemple, de leau traite et de

    produits pharmaceutiques fabriqus localement ou mme de produits imports sur base

    2Leffet recherch est le dcongestionnement des points dentre/de sortie la capitale (Carrefour, Plaine du Cul-de-Sac, etc)

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    onreuse par les oprateurs commerciaux. Il convient pour lEtat, les bailleurs traditionnels et

    autres donneurs dtudier au plus vite les mesures requises pour pallier ce problme et acqurir

    au moins en partie leurs produits humanitaires des producteurs et commerants tablis sur la

    place.

    9.3 Sur une base plus structurelle cependant, il est plus que jamais impratif de poursuivre,

    en parallle, leffort de rflexion et de planification men en 2009 par la Prsidence travers le

    Groupe de Travail sur la Comptitivit (GC), visant une croissance conomique quilibre et

    rpartie dans toutes les couches sociales et les diffrentes rgions du pays, sappuyant, dans

    limmdiat, sur le dveloppement de cinq grappes de croissance : (i) les fruits, racines et

    tubercules ; (ii) llevage ; (iii) la confection ; (iv) le tourisme ; et (v) la cinquime grappe

    rcemment ajoute par le Groupe, tenant compte de la conjoncture actuelle, celle du logement et

    du dveloppement urbain. Leffort faire ds lanne 2010 est ltablissement, en concertation

    avec lensemble des acteurs, des filires touches, de vritables plans daffaire de ces grappes,

    prvoyant principalement les politiques et investissements publics requis pour leur

    dveloppement, incluant routes, nergie, ducation et formation, technologie et environnement,justice et scurit, normes de construction et, de manire gnrale, un environnement daffaires

    adquat.

    9.4 Le dveloppement de ces grappes productives et des grappes de support y affrentes

    devra en particulier permettre une vritable dcentralisation conomique passant par la cration

    de ples de croissance dans les dpartements gographiques jouissant de secteurs dont la

    comptitivit pourrait tre stimule par les investissements dans infrastructures

    susmentionnes, notamment dans le secteur touristique, en dehors de la capitale hatienne;

    9.5 Une telle stratgie de relance conomique post-dsastre devrait favoriser moyen terme: Un accroissement des recettes dexportation du pays ; Une augmentation de la production et de la cration demplois en particulier dans les

    secteurs btiments et travaux publics, ceux lis au tourisme tels la restauration et

    lhtellerie, lagriculture et llevage ;

    Des perspectives dlargissement du portefeuille de crdit des institutions financires dupays;

    Un apaisement social ; Un ralentissement de lexode rural et de limmigration illgale ; Une rduction de la pauvret et de la criminalit qui en dcoule ; Une augmentation de lassiette fiscale ; Une rduction des sorties de devises au titre des dpenses de voyages et en consquence

    des effets positifs sur les objectifs de stabilit montaire et financire de la BRH. Il en

    dcoulerait galement une rduction des cots de mise en uvre de la politique

    montaire;

    Dautres externalits positives rsultant de la dynamisation de lconomie de la rgion,incluant les impacts positifs sur le secteur de la construction et les services y associs.

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