Reflets d’un trésor dispersé - Exhibitions International d’un trésor ... 2 marcs et 12...

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Le trésor du chapitre de Sainte-Aldegonde de Maubeuge 1482-1693 Nicole Cartier Reflets d’un trésor dispersé DÉPARTEMENTALES

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Le trésor du chapitre de Sainte-Aldegonde de Maubeuge 1482-1693

Nicole Cartier

Reflets d’un trésor dispersé

DÉPARTEMENTALES

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SOURCES

1er inv., le dessin a disparu, fo 1 vo : La fiertee de madame Saincte Aldegonde laquelle toutte d’argent blancq excep-té IIII ymaiges qui sont sour chascun costet ung assavoir sour l’ung des debouts devant l’ymaige de Dieu portant une couronne sour son chief estoffée d’aulcunes pierres et au devant de sa chappe ung gros saphir bleu, de l’aultre bout l’ymaige de la vierge Marie ayant aussi une couronne estof-fée de pierres comme l’aultre et au devant de son mantiau une afficque d’or estoffée au milieu d’une ronde louppe de dyamant et le résidu de III emmeraudes verdes et aultres à l’enthour dudit dyamant et sour les aultres deux lez du loing, ung ymaige de madame saincte Aldegonde, ung de Sainct Jehan Baptiste. Item par dedans le pommiau de ladite fiertee qui est en le moyenne hault fait à manière d’une thourrette bien gentilement ouvré de nouviau temps sont angèles te-nans encensoirs avescques l’ymaige et comme touttes ces dittes pièches dorées de fin or bien richement. Quant au residu de la ditte fertee, qui seroit loing a declarer le tout est fait et ouvret à maniere d’une église en croix estoffée de basses pilliers frolettes tarbernacles remplis d’ymaiges des XII apostres, fourmoiries [fenêtre à meneaux] grandes IIII foellettes florons [feuilles et fleurons] et aultres plusieurs menues parties comme à telle pièche appertient et comme en poet voir. Laquelle pièche poelt avoir de loing […] pies et de hault […] pies2.C.Cambrai, fo 1.2nd inv., fo 62 ro à 63 vo : Déclaration du poix et dénombrement des pièces composantes la fierté où repose le Corps Saincte Aldegonde selon une relivrance du XXVIIIe may XVCIIIIXXVIII.Première les imaiges du Salvator, de la vierge Marie, de st Jean Baptiste et de ste Aldegonde avecq 11 petittes imaiges dorées scavoir de ste Anne, de st George, de st Benoist, de st Philippes, de ste Gertrud, de […], st Charles, la Vierge Marie, st Michel et deux prophètes pèsent qua-rante marcqs, cincq onces et demie .................................................... [9,5 kg][en marge] Il y a encor l’imaige de ste Claudine adjoustee ici depuis.

Les douze apostres avecq leurs diadèmes et les nou-veaux verins pèsent cincquante marcqs, une once, huit esterlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [11,715 kg]La tourette avec la masse dix neuf marcqs, deux onces et un esterli. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [4,496 kg]Trente deux longues voirières avecq autres trente deux lattes d’enrichissement de fleurs de lys y servants et quattre plattes de grandes voirieres, quarantre neuf marcq une once et treize esterlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [11,486 kg]Les quatre grandes voirieres avecq les quattre grands ca-piteaux ÿ servants trente six marcqs quattre onces XIIII esterlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [8,550 kg]Huit piliers longs, cincquante et un marcqs quattre onces et demie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [12,039 kg]Autres douze longs piliers avecq des demys voirieres, soixante dix marcqs quattre onces trois esterlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [16,466 kg]Les quattre principaux piliers estant doubles, quarante quattre marcqs une once XII esterlin et demy ................................................. [10,320 kg]Quattre doubles demis piliers avecq quattre empietements et quattre autres doubles demis piliers soixante marcqs deux onces dix huit esterlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [14,094 kg]Quatre grands capiteaux et douze d’apostres avecq douze autres plus petis, trente huit marcqs cincq onces cincq es-terlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [9,026 kg]Vingt huit petits longs piliers, dix neuf marcqs six onces quattorze esterlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [4,631 kg]3

Douze pieces de molures servantes au soubassement. Item deux pieces de grand coronement et deux plus petites, vingt neuf marcques, sept esterlins et demy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [6,782 kg]Cincquante six pieces de petis coronements... sept marcqs une once VIII esterlins et dem . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [1,676 kg]Toutte la couverture et plusieurs pieces d’enrichissement de fleurs de lis estampées avecq huit queues de laiton avecq grand nombre de cloux rosettes armoiries, trente huit marcqs trois onces et demie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [8,975 kg]Vingt verins de laiton desquels les bouts sont d’argent qui pèsent, six onces dix sept esterlins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . [0,199 kg]

Châsse de sainte Aldegonde

1161, 1439, 1503, 1588Argent et argent doré et cuivre ; diamant, saphir, émeraudes et pierresPoids en 1588 : 129,955 kg (sans compter les statuettes ajoutées au xviie siècle)1

23 novembre 1792 sont saisis : « les débris d’une grande châsse d’argent, ces débris consistant en lames, pilliers, statues, vis, clous pesant 291 livres, 8 onces », soit 136,130 kg

Premier inventaire, collection particulière

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De nombreuses pièces d’orfèvrerie du trésor sont délivrées aux orphèvres pour emplier aux ouvraiges de la fierte en l’an 1588 : la chaînette du cibolle, un bénitier, un hanap, un plat rond de 2 marcs 5 onces, un calice avec sa patène et sa cuillère pesant 3 marcs, un autre calice avec sa louchette de 2 marcs et 12 estrelins, une petite croix en or, un ciboire à bossettes et un calice aux armoiries de madame Antoinette d’Yve de Warelles. Soit environ 5 kg d’argent et un peu d’or4.Après 1588, les chanoinesses ont continué à enrichir la châsse des statues de leurs saintes patronnes : depuis ad-joutté les imaiges et pièces suivantes, un st Josephe, st Franchois, st Michiel, ste Catherinne, ste Agnès, ste Claire, St Adrien et encore quattre autres qui font douze.En 1644, une imaige d’argent doré de ste Jeanne donnée par Mademoiselle Jenne de Crecquÿ avecq les armoiries pendantes en couleur pesantes vingt onces douze esterlins [598,21 g].Une ste Dorothée donnée par Madame Dorothée de Croÿ, Duchesse D’arsquote.

HISTOIRE

La châsse est la pièce maîtresse du trésor. Le corps de sainte Aldegonde a été déposé après sa mort dans une châsse en bois, puis dans des châsses d’orfèvrerie en 1161, en 1439 et en 1588.Après sa mort que tout le monde s’accorde à situer le 20 janvier 685, Aldegonde est inhumée à Cousolre dans le tombeau de ses parents, puis sous l’abbatiat d’Aldetrude, son corps est ramené à Maubeuge où il est alors déposé dans la crypte de l’église du Vieux-Moutier5. En 1039, il est mis dans une châsse en bois6.

Le 6 juin 1161, une nouvelle translation a lieu en présence des évêques de Cambrai et de Laon et du comte de Hainaut, Baudouin IV. La châsse ouverte, le corps ne montre aucun signe de corruption, l’évêque en détache un pied. Le corps est enseveli dans un drap de soie, recouvert d’un linge fin cousu par l’abbesse et par la comtesse de Hainaut, Alix ; il est ensuite offert à la vénération des fidèles. Puis, il est en-veloppé dans une peau de cerf et déposé dans un coffre placé dans une châsse (ou fiertee) d’orfèvrerie7 : « … vas no-bile substili artificio nimiaque ambitione et auro et argento fa-bricatum… », décrite dans les Acta sanctorum : « un meuble riche d’une grande recherche, fabriqué en or et en argent par un artiste habile8 ».

Sous l’abbatiat de Gertrude de Trazegnies, en juin 1427, le duc de Bourgogne, en qualité de nouveau comte de Hainaut et de seigneur du chapitre de Sainte-Aldegonde, vient prê-ter le serment et «… visiter nostre fiertre d’argent et adviser ce qui y estait à parfaire […] fait don de dix marcs d’argent […] [Pour] employer en la cause susdite9 ». Le 14 juin 1428, à Bruges est signé un mandement par le duc pour le paie-ment de la somme de 60 couronnes du roi au chapitre de

Sainte-Aldegonde de Maubeuge pour payer les travaux de « réparation et de perfection de la dite châsse10 ». Il est donc déjà décidé, vu le mauvais état de la châsse, qui date de 1161, de la refaire.

Ainsi, le 25 ou 26 mai 1439, le mardi de Pentecôte, la nou-velle translation du corps a lieu devant tous les dignitaires ecclésiastiques et les nobles de la région11. Le corps est mis dans une première, puis une seconde châsse d’argent et de pierres précieuses. La tête est alors séparée du corps avec un couteau à manche de jaspe et d’argent (cat. no 30), gar-dé précieusement dans le trésor ; elle n’est déposée dans le chef-reliquaire en argent que quelques années plus tard.Sans apporter la preuve de ce fait, Pierart affirme que cette nouvelle châsse a été brûlée avec toute la ville par les troupes de Louis XI, le 6 mai 147812. Les reliques sont mises à l’abri, puis déposées dans un coffre de chêne, peut-être en attendant la réparation de la châsse13. L’abbesse Antoinette de Hénin (1483-1507) prélève à cette occasion quelques fragments de reliques, dont certains sont donnés à l’église Sainte-Aldegonde à Saint-Omer14. D’après André Triquet, le corps est mis dans la châsse en argent le 12 avril 150115. Aucun document ne parle d’une nouvelle châsse.

Au xvie et au xviie siècle, le corps de sainte Aldegonde avec ou sans sa châsse fut très souvent mis à l’abri à Mons. En 1572, la ville est prise par Louis de Nassau, mais la relique fut respectée ; lors de ces manipulations, la châsse a peut-être été malmenée, d’où la nécessité d’une restauration en 1588. L’ancienne châsse est entièrement démontée, les différentes pièces pesées et décrites dans le second inventaire.Pendant les guerres entre l’Espagne et la France, la châsse est envoyée à Mons, à l’abri, à la chapelle de Bourse chez les filles de Notre-Dame. Le 23 avril 1660, après presque vingt ans d’absence, la châsse avec le corps saint revient en grande pompe ; elle est déposée dans le chœur16.

Le 4 octobre 1791, l’église du chapitre étant fermée, la foule s’y introduit et transporte la châsse dans l’église parois-siale devant les commissaires du district impuissants17. Elle est saisie et pesée le 24 novembre 1792 : « les débris d’une grande châsse d’argent, ces débris consistant en lames, piliers, statues, vis, clous pesant 291 livres, 8 onces », soit 136,130 kg18. Le 31 janvier 1793, la châsse est transportée en morceaux au district d’Avesnes. Cette châsse aurait été démembrée avant d’être livrée aux commissaires du district. Elle n’est guère plus lourde qu’en 1588 (130 kg).

DESCRIPTION LA CHÂSSE DE 1161

Il ne subsiste aucune description de cette première châsse d’orfèvrerie lors de la translation de 116119. À cette époque,

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les châsses sont des caisses rectangulaires en forme de sarcophage surmonté d’un toit à deux pans avec des pignons sur les petits côtés suivant le plan de celle de saint Servais de Maastricht (1160-1170). Cette châsse du xiie siècle a été démantelée et les pièces qui la composent probablement réemployées dans une croix, au xve  siècle (cat. no 33). Cette croix a été identifiée dans les collections du musée du Cinquantenaire à Bruxelles : son revers est recouvert de plaques gravées et repoussées et de carrés de quatre modèles différents poinçonnés à la manière de Nicolas de Verdun ; les plaques émaillées, rectangulaires et circulaires sont d’origine mosane20. De plus, à la croisée et aux extrémités des bras ont été placés des cercles émaillés, dont deux sont coupés comme s’ils avaient servi d’auréole ou de nimbe à une statuette, à l’imitation de la châsse de saint Servais.

LA NOUVELLE CHÂSSE DE 1439

L’inventaire du trésor en 1482 commence par la châsse ; le dessin figurant à la première page a disparu ; au verso de la première page suit la description de la fiertee21, une châsse en argent en forme d’une église en croix. Aux extrémités, le Christ sauveur et la Vierge Marie ; leur couronne est ornée de pierres de couleur, la chape du Christ, d’un saphir bleu ; le fermail du manteau de la Vierge est un diamant en loupe entouré de quatre éclats d’émeraude. Sur les longs côtés sont disposés dans des niches les douze apôtres par groupe de trois de part et d’autre du transept, où se trouvent les grandes statues de saint Jean Baptiste et de sainte Aldegonde. Toutes ces statuettes sont en argent doré. À mi-hauteur sur le toit est placée une thourette, ou baldaquin, avec sainte Aldegonde et les deux anges tenant un encensoir selon l’iconographie traditionnelle (cat. no 8)22. Cette châsse est remise en état après le saccage des Français en 1478 et consacrée en 1501. Ces translations successives sont l’occasion de grandes manifestations pour revivifier le culte de la sainte et pour attirer les dons des pèlerins.

En 1588, la châsse est démontée et remontée avec les mêmes pièces ; le second inventaire donne leur nombre, leur poids et leur description : Déclaration du poix et dénombrement des pièces composantes la fierte où repose le Corps Saincte Aldegonde selon une relivrance du xxviiie may xvCiiiiXXviii. Des pièces d’orfèvrerie du trésor sont alors délivrées aux orphèvres pour emplier aux ouvraiges de la fierte en l’an 1588 et représentent à peine 5 kg d’argent et un peu d’or23, faible partie d’une châsse qui pèse 130 kg24. Au regard du faible poids d’argent remis, l’orfèvre a repris les éléments de l’ancienne châsse qu’il n’a fait que remonter selon le même plan en suivant peut-être le dessin aujourd’hui disparu du folio 1 du premier inventaire. La description de la pesée permet d’avoir plus de détails sur

cette châsse. Elle est en argent blanc avec le même plan en croix et un baldaquin sur un toit orné de fleurs de lys. Les grandes statues du Christ, de la Vierge, de sainte Aldegonde et de saint Jean Baptiste sont toujours en argent doré. La nef a trente-deux verrières ou fenestrages et les deux plus grandes sont sur les pignons. Les piliers ou contreforts sont nombreux pour assurer la stabilité d’une telle masse ; sur les longs côtés, douze contreforts montant jusqu’au toit, deux sur chaque pignon ; ils sont doubles et à plusieurs étages aux quatre coins. En 1588, Les statues des douze apôtres avec leurs diadèmes et leurs vérins pèsent 11,715 kg, soit plus de 900  g chacun. Leur taille est sans doute voisine de celle des apôtres de la châsse de Nivelles : entre 22 et 24 cm25.La châsse de Nivelles (1298) mesurait 1,80 m et pesait d’après les estimations environ 90 kg, celle de Notre-Dame de Cambrai (1354), 1,30 m et 101 kg. Le plan et le programme iconographique de la châsse de sainte Aldegonde suivent une tradition qui remonte au xiie siècle. Elle est proche par sa conception architecturale de celle de sainte Gertrude de Nivelles avec ses statues en pied en ronde bosse de part et d’autre du transept où se tient sainte Gertrude, et avec ses verrières le long des grands côtés.

La description de la châsse figure au folio 1 verso, ce qui suppose que le dessin est au folio 1 recto ; de plus, elle précise comme en poet voir sous-entendu sur le dessin, comme il est dit pour d’autres objets quand le scribe ne s’attarde pas sur les détails. Il ne subsiste aucune gravure, ni dessin, ni tableau de la châsse de sainte Aldegonde26. La description et la pesée des pièces par l’orfèvre de Mons, chargé de la remonter en 1588, permettent de faire le rapprochement avec celle de sainte Waudru de Mons du xive  siècle : cette dernière a disparu en 1793 ; au début du xixe  siècle, elle a été refaite en bois sur le même modèle, comme on peut le constater sur des photographies où elle est placée sur le « car d’or » pour la procession annuelle à Mons27. Après 1588, la châsse de sainte Aldegonde s’est enrichie de douze nouvelles statuettes de saint Joseph, de saint François, de saint Adrien et des saintes Françoise, Hélaine, Codille, Thérèse, Agnès, Claire, ainsi que, déjà citées, de sainte Anne, de sainte Catherine et de saint Michel28. Deux statuettes supplémentaires ont été données au xviie siècle ; en 1644, une nouvelle « imaige d’argent doré » de sainte Jeanne par mademoiselle Jenne de Crecquÿ et une sainte Dorothée par l’ancienne chanoinesse, madame Dorothée de Croÿ, duchesse d’Arschot et veuve de Charles de Croÿ29.- Châsse de 1169 : atelier mosan.- Châsse de 1439 : attribution à Mons où a été fabriquée la châsse de sainte Waudru, qui a pu servir de modèle à celle de sainte Aldegonde, ou à Valenciennes ; à cette époque, Hans et Gilles Steclin sont des orfèvres-joailliers de Valenciennes

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célébrés en 1503 par le poète Lemaire de Bavay dans la Couronne Margaritique. Le reliquaire du voile de sainte Aldegonde de 1469 est au poinçon de Valenciennes30.

COMMENTAIRE

Cette châsse tient un rôle majeur dans la vie du chapitre. Au moins depuis 1039, la châsse renfermant le corps de sainte Aldegonde est conservée dans l’église du Vieux-Moutier, dont il ne reste après sa destruction qu’une cha-pelle annexée à la nouvelle église de Sainte-Aldegonde. Elle repose alors dans la crypte de cette chapelle latérale exposée à la dévotion des fidèles qui viennent aussi prier pour des guérisons (cat. no 25-K). Quand il faut recons-truire l’église après l’incendie par les Français en 1478, les

chanoinesses promenèrent à travers les anciens Pays-Bas les reliques de sainte Aldegonde pour se procurer des fonds avec les encouragements par lettres patentes de l’empereur Maximilien et la promesse de quarante jours de pardon par l’évêque de Liège31. Elle est l’objet de la procession annuelle de sainte Aldegonde de tradition très ancienne, le mercredi de Pentecôte ; elle est mentionnée pour la première fois dans une bulle du pape Clément IV du 16 juin 1265, qui accorde cent jours d’indulgence aux fidèles qui viendront prier dans l’église le jour de la procession32. Le cérémonial était très sé-vère. Au xive siècle, la châsse est recouverte par un drap d’or tenu par quatre valets. Le magistrat et une foule de cinq mille à six mille personnes suivent la procession. La châsse reste exposée une nuit et un jour à la vénération des fidèles33.

1 Poids du Hainaut : 1 marc pèse 233,5 g, il vaut 8 onces. 1 once : 29,187 g. 1 esterlin ou estrelin : 1,45 g.2 BM Arras, ms 1325. Second inventaire. Poids et longueur n’ont pas été portés.3 En 1588, le marc vaut 8 onces.4 Jennepin [1889] 1976, fo 2, 31 vo, 33-35 vo, 39 vo, 49-51.5 Cette translation eut lieu un 13 novembre d’une année située sous l’abbatiat d’Aldetrude entre 686 et 697.6 Leroy 1883, p. 110, note 1.7 Le Glay 1849, p. 512 ; Lietard parle d’une translation, en 1148, par l’évêque Nicolas, p. 39.8 Bollandus, Acta sanctorum, Anvers, 1643, p. 1052.9 Devillers 1881. Cartulaire des comtes du Hainaut à l’avènement de Guillaume II et à la mort de Jacqueline de Bavière. (1337-1436) 1881, t. V, p. 23.10 Ibid., t. IV, p. 665.11 Vinchant 1852, p. 185. Acta sanctorum Belgii, vol. IV, p. 333, n. 5, 6.12 Cat. no 20 : « perdue par les franchois ».13 Triquet [1625] 1837, p. 30.14 D’autres fragments seront distribués à des églises honorant sainte Aldegonde.15 Pierart 1851, p. 156. En 1503.16 Estienne 1842, Archives historiques du Nord, 2e série, t. IV, p. 293-305.17 Leroy 1883, p. 184.18 AM Maubeuge, inv. no 26, 53.19 Godefridus Henschenius, Acta sanctorum. Anvers, 1643, p. 1050.20 Cologne-Bruxelles 1972, p. 318-319.21 Sur la première page aurait figuré le dessin de la châsse, alors que texte et dessin des autres pièces sont en vis-à-vis. Au fo 2 figure un ciboire.22 Tourette à la croisée du transept comme sur la châsse de sainte Waudru de Mons.23 Les poids ne sont pas tous donnés : fo 2, 31 vo, 33-35 vo, 39 vo- 51.24 Note 3.25 Cologne-Paris 1996 ; Didier 1995, p. 37, 101 ; Boerner 1973, p. 231-233.26 Devillers 1857, p. 74. Il cite quatre tableaux dans les boiseries de la chapelle de Sainte-Aldegonde dans la collégiale Sainte-Waudru à Mons, représentant

quatre épisodes de la vie de sainte Aldegonde, notamment « la châsse portée en procession ». Ce tableau est encore cité en 1894 par Gonzalès Descamps, p. 130 et en 1928 par E. J. Soil de Moriame. Recherches de Benoît Van Caenegem, conservateur de la collégiale Sainte-Waudru.

27 Tondreau et Stilmant 1985, p. 37, 40, 47, 54. La châsse de sainte Waudru date au moins dans son premier état de 1313 où elle est parachevée par Gobert Pierchon I. Elle est remise en état par Gobert II Pierchon entre 1390 et 1419, puis par Jehan de Thiant en 1487. Elle est réparée en 1592 par Jean de la Vigne qui refait un ange. En 1780, François Joseph Beghin répare et redore la châsse pour la mettre sur le nouveau char processionnel appelé le « car d’or ». Elle est confisquée en 1793 et envoyée au dépôt à Valenciennes où elle disparaît.

28 BM Arras, ms 1325, fo 63.29 Note 27, p. 46. Elle est la fidèle cliente de l’orfèvre de Mons, Arnould Lison.30 Cartier, Valenciennes aux xive et xve siècles, 1996, p. 265, 266.31 Jennepin [1889] 1976, t. II, p. 526.32 Mons, Archives de l’État. Cette publication a lieu sous l’abbatiat de Marguerite de Fontaine.33 Jennepin [1889] 1976. t. II, p. 477-480.

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SOURCES

1er inv., fo 1 : item le ciboire dargent blancq avoecques quelque peu de dorure pendant deseur le grand autel a une chainette dargent ayant ung petit havet au bout et aulcunes petits annelets estant a la ditte chaynaette que pour la mettre et hoster quant necessité est. […] La fachon et estat de la ditte pièche auprès semblable comme demonstre ceste fi-gure. Reservet que elle est plus grande pesant environ […].Sous le dessin, fo 2 : de tant qu’il y a un repositoire particulier et qu’il n’estat plus besoing d’avoir une chainette, icelle a esté délivrée aux orphèvres pour amplier aux ouvrages de la fierte en l’an XVc IIIIxx et huit.C. Cambrai, fo II.2nd inv., sous le dessin, fo 1, inscription postérieure au des-sin : L’on at racomodé sette ciboire pour s’en servir en deux fascon ou ont esté emplies les 50 florin que Monsieur de Bornival avoit donné pour l’église de Ste Aldegonde.Fo 10 : sette croix issÿ a esté misse par dessus la sibolle lors quand l’at racomodé pour s’en servir oussi en remontranse, ell at esté fait le 25eme septembre 1643.

HISTOIRE

Dans le premier inventaire, le ciboire est une réserve à hosties. Sous un dais ou un pavillon appelé à l’origine la cibolle, cette réserve en argent est suspendue par un anneau et une chaîne à une poterne au-dessus de l’autel. Exposée ainsi à l’adoration des fidèles, elle est descendue pour la messe. Sur un volet du

retable du Puy-Notre-Dame d’Amiens représentant le sacre de Louis XII, daté de 1501, figure au-dessus de l’autel, sous un dais, une réserve eucharistique en forme de ciboire1. Au cours du xvie siècle, cette pièce d’orfèvrerie devient le ciboire quand elle est placée sur l’autel dans une caisse, le repositoire ou tabernacle. Sa chaîne devenue inutile est donnée à l’orfèvre comme métal pour refaire la châsse de sainte Aldegonde en 1588. Ce ciboire a deux fonctions : il sert de monstrance ou remontrance pour l’adoration de l’hostie et de réserve à hosties consacrées. Il est réparé grâce au don de 50 florins par monsieur de Bornival. En 1643, il est alors surmonté d’une croix qui se trouvait dans un coffre-reliquaire (cat. no 17).

DESCRIPTION

Pied et tige à six côtés, bord rudenté doré, nœud doré à cabochons ornés de fleurettes ; crosses à feuillages soutenant la coupe. Le couvercle est surmonté d’une couronne dorée à fleurons et d’une tige terminée par un pélican nourrissant ses petits sur un nid de ceps de vigne ; symbole du sacrifice de Jésus-Christ pour la rédemption du genre humain : il se blesse pour permettre à ses petits de se désaltérer. Le nid est entouré de cabochons dorés ciselés de rosettes et peut-être d’une scène émaillée. Le nom de l’orfèvre n’est pas connu. Un rapprochement peut être fait avec Hans Steclin de Valenciennes qui, entre 1455 et 1459, reprend sur l’arbre de vie du retable de Saint-Bertin à Saint-Omer le même thème du pélican2.

Ciboire

Première moitié du xve siècle. Transformé en 1643Argent et vermeilPas de poids

1 Paris, musée de Cluny – musée national du Moyen Âge, inv. CL822 a.2 Cartier 1996, p. 160.

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Fig. 2.2 - Second inventaire, BM Arras

Détail fig. 2.1 - Paris - Musée de Cluny-musée national du Moyen Âge, détail

Fig. 2.1 - Paris - Musée de Cluny-musée national du Moyen Âge

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Premier inventaire, collection particulière

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1. UNE COURONNE EN ARGENT DORÉ, PIERRES ET ÉMAUX. TAFFETAS DE SOIE

Avant 1439

SOURCES

1er inv., fo 2 vo : Item, le chappel de madame saincte Anne, ainsi appelet anchiennement servant audit chief ayans fre-maulx d’argent doret tout à l’enthour de pierryes et esmailles de pluiseurs fachons et couleurs avoecques pettites perles comme voyez la figure. Le soulin de dedens sour quoy il est attachiet est du tafftaf de soye vert. / Item audit chapel est pendue une petite croisette d’or ayans droit au milieu une pointe de dyamant très belle comme démonstre la figure cy dessus, avoecques pluiseurs aultres baghettes chy après déclarez. Marque : C.C. Cambrai, fo II.2nd inv., fo 1 vo : à côté du dessin : Set couronne et aux chefe de Ste Madelbert, elle est changée pour un autre couronne.

HISTOIRE

En 1482, cette couronne est placée sur le chef de sainte Aldegonde ; appelée « anciennement de sainte Anne », elle est antérieure à la fabrication du chef-reliquaire de sainte Aldegonde en 1439. Vers 1667, elle est placée sur le chef-reliquaire de sainte Madelberte, nièce de sainte Aldegonde et troisième abbesse du chapitre (cat. no 103). Pour la procession de sainte Aldegonde, cette couronne sera remplacée par une couronne de violettes fournie par les Sœurs noires1. À cette occasion, la chaîne en or garnie de pierres précieuses était également enlevée.Cette couronne couverte de diamants, de perles et de bijoux fut soustraite aux révolutionnaires par Xavier Estienne et re-mise par son fils à Adrienne Florence de Lannoy, la dernière abbesse ; les chanoinesses la transportèrent à Mons où sa trace s’est perdue2.

DESCRIPTION

Cette couronne est en argent doré, elle est fixée sur une doublure de taffetas vert. Elle est composée de fermaux ou broches d’argent doré, ajourées en forme d’étoiles à huit branches. Aux extrémités de quatre pointes est sertie dans une cupule ronde une pierre rouge, les quatre autres sont ornées d’une fleur de lys en argent doré ou de trois

pierres blanches formant une fleur de lys ; au centre, une pierre rouge ou une fleur bleue émaillée ; entre les broches, des rectangles gravés. Un fermail ajouré, monté en étoile du même modèle, est décrit par Élisabeth Delahaye-Taburet dans le catalogue de l’orfèvrerie gothique du musée de Cluny. Ce modèle a été exécuté au xive siècle, dans toute l’Europe occidentale3. À une chaînette pend une croix en or en forme de croix grecque sertie d’une pointe de diamant. Sur cette couronne sont suspendus les bijoux dessinés au folio 5. Dans le second inventaire Bottieau, la couronne du chef de sainte Aldegonde ne porte plus ces pendentifs.

2. BAGUES SUR LA COURONNE

SOURCES

1er inv., fo 3 vo : S’ensievent aulcunes baghes d’or et d’argent aussi pierres à présent pendantes au grand chapiau des-sus le chief madame saincte Aldegonde, lesquelles plusieurs personnes ont donnet.

Bague de mademoiselle d’Assevent. Après 14391er inv., fo 3 au-dessus sur la page du dessin du chef, inscrip-tion manuscrite postérieure : Mademoiselle D’azeven a don-né une baghe en forme d’estoille de dyamant enclose d’un ouvraige d’or, aiant III gros perles y pendant.2nd inv., fo 2, dessin de la troisième rangée droite : cette bague a été donnée par madamoiselle D’azeven. Elle pen a la couronne de ste Aldegonde.Deux chanoinesses portent le nom de d’Assevent, d’Azeven ou Dazevan. En 1400, la seigneurie d’Assevent est passée à Jean du Sars, dont une fille est citée en 1412. Une autre en 14704.

DESCRIPTION

Le texte indique, accrochée à la couronne, une « bague » or-née d’une étoile de diamant, avec trois perles rondes pen-dantes en grelots.

SOURCES

Bague de mademoiselle d’Oultremont. xviie siècle2nd inv., sous le dessin du chef, fo 3, une mention posté-rieure : Madamoiselle Doultremont at donné une baghue

3Deux couronnes pour le chef-reliquaire

Premier inventaire, collection particulière

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représentant l’Annonciation Notre Dame dedans laquelle y at XVII rubi et un diamant avecq 14 perles5.D’après les deux inventaires, Jeanne d’Oultremont donne une bague représentant l’Annonciation. Elle est la fille de Philippe et de Jeanne d’Awans de Lonchin. Citée en 1623, en 1639, le 26 mars, elle fait son testament. Le 27 décembre, elle décède à Maubeuge. Ses quartiers de noblesse sont Oultremont, Namur, Jupleu, Ittre, Awans de Lonchin, t’Serclaes, Baillet et Averdis6. Elle est citée dans la description de la couronne.

DESCRIPTION

Pas de dessin sous la notice qui est à rapprocher du dessin de la couronne avec un petit tableau de l’Annonciation (se-cond inventaire, cat. no 83).

3. LA CROIX GRECQUE

xve siècleArgent doré

SOURCES

1er inv., fo 2 vo.2nd inv., fo 2, dessin cinquième rangée droite : Sette croix pen

aux chefzs de ste Madelbert, depuis elle pen à son manteaux.En 1482, elle orne la couronne du chef-reliquaire de sainte Aldegonde (cat. no 4). Elle est aussi dessinée sur la première couronne (cat no 3). Au xviie siècle, elle est placée sur le chef de sainte Madelberte et ensuite elle est accrochée à son manteau (cat. no 103).

DESCRIPTION

Croix grecque gravée d’un trèfle sur les montants et d’une perle à la croisée.

4. UNE COURONNE EN OR, PERLES DE COULEUR

Début du xive siècle

SOURCES

1er inv., fo 2 vo : Item, sour le devant dit chief est encoire ung chappelet d’or ouvret comme porte ceste figure au quel sont XXX pierres de pluiseurs coulleurs par raison vaillables es-taublies sour chascune fleur à manière de frémaillet et chas-cun d’iceulx enrichis de quatre perle, réservet que l’ung n’en at que trois. Marque : b.

HISTOIRE

Cette seconde couronne ou chappelet en or était louée aux jeunes mariées pour être portée pendant la cérémonie reli-gieuse : dans les comptes du chapitre de l’année 1487, elle est prêtée quatre fois et le coût est de 20 sols7. Plus étroite que la précédente, elle a disparu dans le second inventaire.

DESCRIPTION

Constituée de plaques ovales sur lesquelles est fixé un fermail de cinq pierres, dont au centre une rouge ou une bleue et quatre blanches sur une cupule unie surmontée d’une bande découpée en griffes, ces pierres sont séparées par des fili-granes, ornées de feuilles trilobées découpées, détachées du fond et retournées sur l’envers. Le dessinateur a bien montré l’intérieur de la couronne, ce qui permet d’apprécier le montage du fermail fixé par un rivet sur une plaque ovale ; ces plaques sont maintenues ensemble par un épais cordon torsadé.La présence de filigranes permettrait de la dater du début du xive siècle. Ces fermaux doivent leur valeur à l’or et aux diamants, aux rubis ou aux perles qui les composent.

Fig. 3.1 - BM Arras

Fig. 3.2 - Second inventaire, BM Arras

1 Jennepin [1889] 1976, t. II, p. 479.2 Leroy 1883, p. 182.3 Cat. no 11.4 Denis du Péage 1938, p. 128.5 Cat. no 83.6 AD Nord, 25 H 5, fo 159, 160 ; BM Arras, ms 1316, fo 159, 169.7 Jennepin 1889, t. II, p. 511.

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SOURCES

1er inv., fo 3 au-dessus du dessin : Item le chief madame sainte Aldegonde ayant par le dessuire […] pour recoellier ledit chief remplis de mollures et aultres […], piet estoffet par le dessoubz de VIII buzettes faisants piet sont estaublis deux angeles agenouilliez [tenants] une petite nef pour l’enchiens […] Toutte ceste [piéche] plusieurs lieux de dorures comme la pièche […] au devant dudit chief est ung angèle tenant [a] petit taubliau de fin or estoffet de pluiseurs […] et esmaillures comme plus au plain sera [par] séquente. (Déchirures).C. Cambrai, fo V.2nd inv., fo 3. Dessin.

HISTOIRE

Le 25 ou 26 mai 1439, la nouvelle translation du corps de sainte Aldegonde a lieu devant tous les dignitaires de l’Église et les nobles de la région1. Le corps est mis dans la nou-velle châsse d’argent et de pierres. La tête est séparée du corps avec un couteau à manche d’agate et d’argent, gardé précieusement dans le trésor (cat. no 30/ 2). Cette sépara-tion n’est pas prévue et il faut quelque temps avant que le chef-reliquaire en argent et pierreries ne soit prêt à accueillir la relique2.Le 28 novembre 1625, sous l’abbatiat de Bonne de Haynin, en présence des révérends pères Pierre Lejeune, abbé d’Hautmont et D. Antoine de Winghe, abbé de Liessies, le chef de sainte Aldegonde est ouvert ; il ne reste que trois dents sur sa mâchoire supérieure ; l’une fut remise à D. Antoine, abbé de Liessies, pour les services rendus à l’église Sainte-Aldegonde3.Le 23 janvier 1791, la population par la voix du curé de Maubeuge, M. Demeuldre, demande à la nouvelle munici-palité l’autorisation d’exposer le chef-reliquaire dans l’église paroissiale. Il est remis au petit portail de l’église Sainte-Aldegonde par les chanoinesses au commandant de la garde nationale et à son escorte4.

RELIQUES DE LA CHÂSSE ET DU CHEF-RELIQUAIRE APRÈS 1792

En novembre 1792, le curé constitutionnel Michel transporte dans sa maison les reliques retirées de la châsse et du chef-reliquaire qui, le 31 janvier 1793, sont envoyés au

district d’Avesnes pour être fondus. Les reliques sont ensuite remises à Florent Jean qui les transmet à son frère Louis Jean, marchand droguiste à Maubeuge. Le 17  juillet 1802, par acte notarié, devant le curé de Maubeuge, maître Wallerand constate que la relique du chef de sainte Aldegonde est enveloppée dans une serviette et reconnue par deux prêtres de Maubeuge. Le coffre de chêne avec les restes du corps de la sainte est ouvert ; les restes calcinés sont bien dans un sac en peau de cerf. Les reliques sont déposées en 1803 dans la chapelle du Saint-Sang de l’église paroissiale. En 1808, l’évêque de Cambrai, monseigneur Belmas, les authentifie et y appose son sceau. Le 29 juin 1815, les Prussiens assiègent la ville et les reliques sont calcinées dans un incendie. Les cendres sont enfermées en 1824 dans un nouveau reliquaire en cuivre réalisé par un orfèvre parisien, Bertrand.

4 Chef-reliquaire de sainte Aldegonde,

1439Or, argent doré, émail rouge ; bijoux et pierres de couleur

Fig. 4.1 - Chef-reliquaire de Saint-Momelin

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DESCRIPTION

Buste de sainte Aldegonde, dont la tête est couverte d’un voile et d’une couronne d’orfèvrerie ; il est posé sur un pla-teau reposant sur huit pieds en forme de piliers et ceintu-ré d’une rangée d’oves surmontée d’une gorge unie ornée de pierres. Six médaillons gravés des figures de saints sont placés à la base du buste. Deux anges à genoux tiennent un encensoir d’une main et de l’autre une coupe selon la représentation traditionnelle de sainte Aldegonde qui figurait sur la châsse de 1439 et sur le reliquaire du voile de 1465 (cat. no 8).

ORFÈVRE : GILLES STECLIN

Ce chef rappelle ceux de saint Bertin (1462-1464) et de saint Momelin (1466) par Gilles Steclin de Valenciennes5. Sur la gravure du chef de saint Bertin, des anges entourent le buste6. Celui de saint Momelin au poinçon de Valenciennes a le visage en émail peint à froid, comme celui d’Aldegonde ; il repose sur un plateau soutenu par des piliers à contre-forts, alors qu’ils sont à section carrée sur celui de sainte Aldegonde.

1 Ghesquiere, Acta sanctorum Belgii, 1658, t. IV, p. 333, n. 5, 6.2 Bollandus, Acta sanctorum Belgii, t. III, p. 650, n. 9.3 Leuridan 1905, p. 239.4 AM Maubeuge, 1P10.5 Cartier 1996, p. 265, 266.6 Bollandus 1643, t. I, p. 585. Le dessin représentant le buste de saint Bertin est dessiné par P. B. Bouttats et gravé par G. L. De Roose.

Fig. 4.2 - Second inventaire, BM Arras

Fig. 4.1

Premier inventaire, collection particulière

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SOURCES

1er inv., fo 3 vo, sous l’ange : Item, une petite relicque quarrée de fin or, dedens laquelle il y at du précieux sang de nostre Seigneur Jésus Christ aournée de IIII saphirs, IIII grenas, IIII grands perles VIII petis, IIII petittes tourquoisettes, pesans ensemble deux onches dix sept estrelins demy, laquelle pièche tient ung angèle devant le chief de madame saincte Aldegonde comme demonstre aulcunement ceste figure.2nd inv., fo 3 vo, à gauche de l’ange-porteur de reliques : Cest ange est encore painct avecq le chief. Sous l’ange, une autre inscription : Relicques trouvées au quaré que tient l’ange cy dessus estant d’ordinaire devant le chief Madame ste Aldegonde ouvert le XXVIIIe novembre de l’an 1625 par le R. Prélat de Liessies, Don Anthoine de Wincz etcs, par l’inscrip-tion latinne suyvante. De corona Domini, sanguine, linteo, spongia. Sindone, tabula in qua facies Christi apparet, cum cruce ejus tincta cruore, capillis B [ea] tae Mariae. Et s’y at esté trouvé une pièce du corporalle trempé au sang du sau-veur au miracle faict à Mauboeuge.C. Cambrai, fo V.

HISTOIRE

Placé sur la poitrine du chef de sainte Aldegonde, ce pe-tit reliquaire contient plusieurs reliques dissimulées sous la plaque en or émaillé servant de couvercle « De la Couronne du Seigneur, du Sang, du linge, de l’éponge, du suaire, du tableau où le visage du Christ est visible, avec de la Croix, teinte de son sang, des cheveux de la bienheureuse Marie ». Quant au morceau du corporal taché par le sang du Christ, il provient du « Miracle du sang du Christ » qui eut lieu avant 1395 dans la chapelle située hors de la porte de la Maladrerie à Maubeuge. Le prêtre célébrant la messe douta de la présence réelle du Christ dans l’hostie. Au moment de prononcer les paroles de la Consécration, le sang se mit à bouillonner, à remplir le calice et à déborder sur le corporal qui devint la relique du saint Sang.

DESCRIPTION

Devant le buste de sainte Aldegonde, un ange en pied d’argent doré, les ailes repliées, le manteau fermé par une afficque en forme de quadrilobe ou de fleur, est posé sur un

socle à pans coupés et à bord rudenté. Il tient un petit ta-bleau-reliquaire d’or dont la tranche, à décor de chevrons et, aux angles, de rinceaux, est visible sur deux côtés ; le cadre, relativement large, filigrané, est orné de quatre grenats, de quatre saphirs bleus, de quatre perles placées aux angles, flanquées chacune d’une petite turquoise, et de quatre perles plus petites disposées deux par deux au milieu de chaque côté. Tout le centre est occupé par une plaque en or et émail cloisonné où figure la Crucifixion : le Christ en croix, les pieds réunis l’un sur l’autre avec un seul clou sans l’es-cabeau ou suppedaneum, la Vierge et saint Jean et, au-des-sus, le Soleil et la Lune. De part et d’autre de la croix court une inscription, relevée seulement sur le dessin du premier inventaire à l’aide de quelques signes indéchiffrables, omise dans le second inventaire. Enfin, une bélière en forme de main refermée sur un anneau indique que le petit reliquaire pouvait éventuellement être suspendu.

Indépendamment de restaurations évidentes, en particulier de la bélière à l’aspect naturaliste issue des traditions de l’art gothique tardif, il faut peut-être reconnaître dans ce reliquaire le vestige d’un petit autel portatif ou staurothèque byzantine, ou du moins sa copie fidèle, en forme de coffret plat et couvercle à glissière ici orné d’une Crucifixion, image par ailleurs la plus courante sur les couvercles des staurothèques byzantines. Le reliquaire visuellement ressuscité par les deux inventaires rappelle en effet la petite staurothèque d’or émaillé du trésor de Santa Maria della Scala à Sienne, attribuée au xiie siècle, elle aussi enrichie d’une bordure gemmée et dont le couvercle coulissant émaillé est orné d’une Crucifixion1. La Crucifixion émaillée elle-même évoque plusieurs exemples byzantins des xe-xiie siècles, comme celle de l’un des reliquaires remontés au centre du triptyque-reliquaire de Stavelot, celle du couvercle d’un coffret-reliquaire de la vraie Croix du trésor de Saint-Marc à Venise ou encore celle du couvercle du triptyque-reliquaire de la cathédrale de Monopoli, où les pieds du Christ reposent toutefois, comme pour les autres exemples invoqués, sur un suppedaneum2. Enfin, les reliques mentionnées en 1625 relèvent d’un ensemble caractéristique de reliques byzantines du Christ, sauf

4 bis Reliquaire du saint sang

Tableau-reliquaire en or et émail cloisonné sur or (Byzance ?, xe-xie siècle ?)Poids du reliquaire en or : 2 onces et demie : 76,47 g

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bien sûr la relique adventice liée à un miracle survenu à Maubeuge qui implique la présence réelle du sang du Christ dans le calice et dont l’ajout à Maubeuge s’explique aisément par la nature même des autres reliques.

PAR ANALOGIE

Cet ange en pied a servi de modèle à un reliquaire du xviie siècle en argent conservé dans la collégiale Sainte-Waudru à Mons. Haut de 20 cm, il tient devant lui un médaillon ovale contenant une relique de sainte Aldegonde. Jannic Durand3

1 Sienne-Milan 1996.2 Paris 1984, no 13. New York, Pierpont Morgan Library, inv. AZ 001. Triptyque de l’abbaye de Stavelot. Sur la petite plaque supérieure, les pieds du Christ reposent sur le

suppedaneum ; Londres 2011, cat. p. 168.3 Durand 2014, p. 336-344.

Premier inventaire, collection particulière

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A. CAMÉE EN AGATE OU BAGHETTE APPELÉE CATTE MAHIEU

1474Argent doré, agate

SOURCES

1er inv., fo 4, au-dessus du dessin à gauche de la première rangée : P° 1 baghette appelée catte mahieu que donna Gertrud d’Escaussines, trésorière de la dite église, laquelle est encassée en argent doret comme demonstre la figure. Mention postérieure : il est au chappelet de tattaffe rouge.2nd inv., sous le dessin, fo 2, première rangée gauche : l’on a print cest agathe pour la Nostre Dame, l’an 1679.

HISTOIRE

La donatrice Gertrude d’Ecaussinnes de Lalaing, trésorière entre 1440 et 1469, est décédée en 1474.Cette baghette appelée catte mahieu est un camahieu d’agathe ou camée en agate. L’agate avait la réputation de protéger des morsures de serpent, elle est efficace contre la soif, donne la grâce à celle qui la porte et apporte le réconfort1.La note postérieure précise qu’elle est accrochée à la cou-ronne du chef de sainte Aldegonde doublée de taffetas rouge (cat. no 3/ 1). En 1679, elle orne la statue de Notre-Dame des Cœurs (cat. no 120).

DESCRIPTION

Ce pendentif est formé d’une agate enchassée dans une monture en argent doré, bordée d’un cordonnet : elle est

entaillée d’une tête de face à longs cheveux avec une che-mise imprimée de la lettre A et peut-être la lettre grecque omega, le bras droit cache l’autre bras. Il s’agirait de Jésus. Un lien rouge est accroché à l’anneau.

B. IMAGE DE SAINT JEAN BAPTISTE

xve siècleArgent doré, émaux

SOURCES

1er inv., fo 4, au-dessus du dessin du milieu de la première rangée : Item ung imaige de sainct Jehan Baptiste esmail-liet sour une ronde afficque d’or venant de mademoiselle Katherine de Frézin. Mention postérieure : ces deux pièces [avec celle de droite] sont remises au repoz.

HISTOIRE

La donatrice est la chanoinesse Catherine de Gavre de Frézin. Il y eut deux Catherine de Gavre chanoinesses au xve siècle. La première est la fille de Guillaume de Gavre de Steenkerque et de Jeanne de Berlo, dame de Frézin ; elle quitte Maubeuge pour devenir religieuse à l’abbaye de nobles femmes de Guislenghien ; elle est la sœur de Marguerite, abbesse du chapitre de Maubeuge entre 1429 et 1443. La mention venant de signifie qu’elle a quitté le chapitre avant 1482. La seconde est tout juste présente en 1482 ; elle est la fille de Godefroy II dit Pinchart, décédé vers 1479, chevalier seigneur de Frézin, qui a épousé vers 1460 Marie de Ghistelles, elle-même fille de Jean et de Jacqueline

5 Ensemble de bijoux

Ces bijoux, fermail, baguette, coffre, Agnus-Dei, bulle, cœur et croix munis d’un anneau de sus-pension et des bagues, sont tous des pendentifs accrochés à la couronne du chef de sainte Aldegonde. Leur donation date du xve siècle, avant 1482. Certains ont ensuite eu un autre usage. La plupart ont disparu :- en 1642, pour la fabrication des reliquaires en forme de pyramide ont été donnés à l’orfèvre plu-

sieurs pendentifs avec une croix, avec un soleil, avec perles et rubis, avec un Agnus-Dei et un cœur ;- en 1679, un médaillon avec une agate est remis à l’orfèvre pour la statue de Notre-Dame ;- en 1692, quatre croix dont une avec trois perles et un anneau en or sont fondues pour faire trois

pièces de la nouvelle couronne d’un chef-reliquaire.1er inv., fo 4.Chiffres romains minuscules V.C. Cambrai, fo VI.

Premier inventaire, collection particulière

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de Craon2. Elle est la nièce de Yolande de Gavre, abbesse entre 1468 et 1482 et la sœur de Michelle de Gavre, abbesse entre 1507 et 15493.Ce bijou est accroché sur la couverture du « repos » ou ber-ceau de Noël (cat. no 66).

DESCRIPTION

Forme ronde bordée d’une rangée d’oves et de filets. Le centre émaillé est orné d’une figure de saint Jean Baptiste auréolé ; il tient dans sa main droite un agneau et de la main gauche remonte son manteau rouge recouvrant une che-mise blanche. De part et d’autre, une tige avec des feuilles et une pensée à trois pétales rouges et deux blancs émaillés. L’émail blanc apparaît au xve siècle.

C. COFFRE

Vers 1469Argent doré, nacre, perles d’eau

SOURCES

1er inv., fo 4, sur le dessin à droite de la rangée supérieure : Item ung co […] d’argent […] petites ymaiges par dedans et par dehors de coquilles et perles que donna monseigr Jehan Gosset escolastre d […] chéens. Mention postérieure : ces deux pièces [avec celle de gauche] sont remises au repoz.

HISTOIRE

Jehan Gosset a été écolâtre du chapitre, c’est-à-dire le dernier des six sous-diacres du chapitre de Saint-Quentin, choisi par l’abbesse pour s’occuper du culte. Il est appelé Monseigneur, il pourrait s’agir de Jean Gosselet, plus tard abbé de Maroilles qui assiste à la déposition du voile de sainte Aldegonde dans le reliquaire en 1469. Cette petite boîte est mise sur le berceau de Noël appelé « le repos » (cat. no 66).

DESCRIPTION

Ce petit pendentif s’ouvre par le milieu pour former deux volets avec une cavité où figurent, en pied, à droite un per-sonnage auréolé et à gauche une Vierge couronnée avec l’Enfant Jésus dans le bras gauche. D’après le texte ac-compagnant le dessin, ce coffre est décoré de coquilles (de nacre) et de perles. Il est attaché à une chaîne terminée par une pointe qui permet de le maintenir fermé. Un petit pendentif identique en forme de diptyque, dont les deux vo-lets s’articulent autour d’une longue charnière, est conservé à Londres au Victoria and Albert Museum4.

D. AGNUS-DEI

1474-1504. Fondu en 1642Or, émaux

SOURCES

1er inv., fo 4, deuxième rangée, gauche, au-dessus du dessin : Item, un agnus dei d’or ayant d’un lez ung agieau blanc et d’aultre une + [pour une croix] azur et à cos-tez lettres esmaillé blanc que donna Made. Barbe de la Contey. Mention postérieure : il est mis au chap [chapeau ou couronne].2nd inv., sous le dessin, fo 2 à gauche de la deuxième rangée : On at pris sette agnus pour mestre aux piramide l’an 1642.

Fig. 5.1 - BM Arras

Fig. 5.2 - BM Arras

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HISTOIRE

La chanoinesse Barbe de la Contey est citée en 1474. Fille de Renaud seigneur de Tronlay, conseiller au Grand Conseil sous l’empereur Maximilien et de Jeanne de Boussois. Décédée en 1504, elle est la sœur de Marguerite, décédée en 15005.La devise abrégée, « COUI VEM MOULT », pourrait être un acte de foi et signifier : « Je viens à ta rencontre avec beaucoup d’ardeur. » Ce médaillon rond est accroché à la couronne de sainte Aldegonde. En 1642, il est fondu pour faire les reliquaires en forme de pyramide (cat. no 99).

DESCRIPTION

Pendentif circulaire bordé de filets et de redans, il est orné d’une croix d’azur émaillée, entourée de lettres en émail blanc avec l’inscription « COUI VEM MOULT ». Sur l’autre face, hors la vue, un agneau blanc.Sur un tableau daté de 1582, une dame porte un pendentif ciselé d’une croix identique. Plus d’un siècle s’est écoulé entre Barbe de la Contey et cette dame, ce qui montre que la date de donation ne correspond pas toujours, surtout pour les bijoux, à la date de fabrication6.

E. AGNUS-DEI

Vers 1444. Fondu en 1642Or, émaux

SOURCES

1er inv., dessin au milieu de la deuxième rangée, fo 4 : item une aultre agnus dei d’or où il y at d’ung lez, ung st Anthoine que donna Anthoine de Sorreil. Inscription postérieure : l est mis au chapeau [de sainte Aldegonde].2nd inv., fo 2 : et celle ÿssy [donné pour les pyramides].

HISTOIRE

La chanoinesse Antoinette de Sorreil est citée en 14447. En 1642, cet Agnus-Dei est remis à l’orfèvre pour faire les reli-quaires en forme de pyramide (cat. no 99).

DESCRIPTION

Pendentif rond sur un fond émaillé rouge, orné au centre d’un Soleil gravé des lettres I N S (Jésus notre Seigneur). Il est entouré d’un cordonnet en vermeil.

F. FERMAIL

xive siècle. Fondu en 1642Or, perles

SOURCES

1er inv., fo 4 : au-dessus du dessin droit de la deuxième ran-gée : Item, ung fermail […] d’or ayant trois [perles] et une pierre […] en la moyenne. Mention postérieure : il est mis au chap.2nd inv., sous le dessin, fo 2, deuxième rangée gauche : et celle ausy.

HISTOIRE

Il fait partie des fermaux en forme de rose couverts de perles et de pierres et datés de la fin du xive siècle8. Il est accroché à la couronne de sainte Aldegonde. En 1642, il est fondu et démon-té pour faire les reliquaires en forme de pyramide (cat. no 99).

DESCRIPTION

Fermail en forme de rose à six pétales, ornée de trois perles blanches ou perles d’eau et au centre d’un grenat de forme carrée entouré d’un bandeau lisse9. Attaché à un lacet par un anneau. Madeleine de France, épouse de Ladislas  V de Hongrie, porte un fermail similaire sur un tableau de 1460-1480.

G. BULETTE

xve siècle. Fondue en 1642Argent doré

SOURCES

1er inv., fo 4, dessin à gauche de la troisième rangée : Item, une petite bulette d’argent doret. Mention postérieure : il est mis au chap.2nd inv., sous le dessin, fo 2, troisième rangée, gauche : et set agnus.

HISTOIRE

La bulette est un médaillon en forme de bulle de petite taille. D’abord placée sur une couronne, elle est fondue en 1642 pour les reliquaires en forme de pyramide (cat. no 99).

DESCRIPTION

Elle est bordée de godrons, au centre un agneau auréolé est surmonté d’un étendard crucifère.

H. CŒUR

xve siècle. Fondu en 1642Argent doré, émaux

SOURCES

1er inv., fo 4, au-dessus du dessin central de la troisième ran-gée : Item, un petit coer d’argent doret esmaillé d’azur que

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donna Sr Alexandre Chanoine. Deux mentions postérieures : remis au chapiau. Puis, bien après : en la maison Mainart la nuyt st Jehan XXXIX.2nd inv., fo 2 : et se coeur.

HISTOIRE

Le donateur est Alexandre, chanoine du chapitre de Saint-Quentin fondé par sainte Aldegonde par testament pour as-surer les services religieux du chapitre.Ce cœur est remis à l’orfèvre de Mons, Maisnart, en 1639. Il est fondu en 1642 pour faire les reliquaires en forme de pyramide.

DESCRIPTION

Pendentif en argent doré en forme de cœur émaillé bleu, en-touré d’un cordonnet en argent doré.

I. CROIX DE PERLES

Fil d’or, perles

SOURCES

1er inv., fo 4, au-dessus du dessin droit de la troisième ran-gée : Item, une croix de fil d’or toutte remplie de perles que donna une bonne femmel […]. Mention postérieure : Il est mis au chapeau.2nd inv., fo 2 : dessin sans commentaire.

HISTOIRE

Elle est accrochée à la couronne de sainte Aldegonde.

DESCRIPTION

Croix formée de perles blanches ou perles d’eau enfilées avec deux anneaux dorés et un lien. Les perles d’Orient sont transparentes et moins blanches que les perles d’eau douce des rivières de France (Oise ou Seine), d’Angleterre et d’Écosse10.

J. BAGUE

xve siècleOr, diamant, rubis, émaux

SOURCES

1er inv., fo 4, au-dessus du dessin gauche de la quatrième rangée : item I verge d’or à laquelle sont deux pierres chas-cune lozenghe de dyamant, l’aultre une de rubi que donna Mad. de Warlusel. Mention postérieure : Il pend au chap. Ceste partie a esté perdue ci en ce lieu.2nd inv., fo 36 vo : sous la couronne.

Fig. 5.3 - BM Arras

Fig. 5.4 - Second inventaire, BM Arras

47

HISTOIRE

Plusieurs demoiselles de Warluzel ont fait partie du cha-pitre : Alienor de Warluzel, écolière citée en 1444, est morte en 1474. Antoinette, écolière en 1474, a épousé Robert de Bernes, chevalier, seigneur du Cardonoy11 ; citée en 1482, elle est probablement la donatrice de cette bague d’épou-sée suspendue au chef de sainte Aldegonde.

DESCRIPTION

Bague que l’on appelle une verge ou anneau, ornée de quatre feuilles émaillées enserrant un losange enchâssé d’un diamant et d’un rubis, qui sont les pierres les plus chères. Ce modèle en de nombreux exemplaires orne la couronne du chef de sainte Aldegonde au xviie siècle (cat. no 83).

K. BAGUE

Après 1475Or, diamant, rubis

SOURCES

1er inv., fo 4, au-dessus du dessin central de la quatrième ran-gée : Item, une aultre verge d’or ayant deux pierres, l’une ung dyamant à demi pointu, l’aultre ung rubi que donna mad.du Maisnil. Mention postérieure : Audit chappelet.2nd inv., dessin, fo 2 : set aneaux et a sa courone.

HISTOIRE

La chanoinesse mademoiselle Du Maisnil est citée en 146012. Elle offre aussi une baguette carrée avec le Christ au pilier (cat. no 7). Ancienne chanoinesse en 1482, elle ne fait plus partie du chapitre, qu’elle a pu quitter pour se marier.

Cette bague est accrochée à la couronne de sainte Aldegonde. La valeur du rubis supplante celle du saphir au cours du xive siècle13. La croyance populaire attachait aux pierres un pouvoir magique.

DESCRIPTION

Cette bague est ornée de deux médaillons, l’un enchâssé d’un diamant taillé en pointe dans une collerette découpée, l’autre d’un rubis carré dans une monture formée de quatre pétales14. La taille des pierres précieuses apparaît vers 147515.En 1503, dans un testament est relevée « la bague de ma-riage portant diamant et rubis en icelle16 ». Ces deux ba-gues associant le rubis et le diamant sont des bagues de fiançailles ou de mariage. Ce modèle est répandu à travers l’Europe17.

L. PETITE CROIX D’OR

xve siècle. Vendue en 1592

SOURCES

1er inv., fo 4 vo : pas de dessin. Le XXVe juing au XVc IIIIxx Et douze a esté vendue une petite croix d’or donnée par sire Jean Lambert / au chef.2nd inv., fo 2 : dessin.

HISTOIRE

Le donateur est probablement Jean Lambert de Grand Han, décédé le 4 juin 1507 à Grandhan. Cette croix est suspendue à la couronne du chef de sainte Aldegonde. Elle est encore citée dans le second inventaire avant d’être vendue en 1592.

1 Sirat 1968, no 5, p. 5.2 BM Arras, ms 1316, fo 26 ; Denis du Péage 1938, p. 107.3 En 1479, Catherine est encore une petite fille, sa sœur aînée a neuf ans. Comte de Liedekerque 1969, p. 67.4 Londres, Victoria and Albert Museum, inv. 214-1874.5 Denis du Péage 1938, p. 102.6 Londres, Victoria and Albert Museum, inv. 4833, 4834-1857.7 Denis du Péage 1938, p. 133.8 Paris 1998, no 159.9 Campbell 2009. Budapest, Szepmüvészeti Museum, inv. 690 ; Descatoire, dans Paris 2007, p. 68, cat. 32.10 Sirat 1968, no 5, p. 66.11 Denis du Péage 1938, p. 137.12 Ibid., p. 120.13 Paris 1998, no 163.14 Londres, British Museum, collection Castellani, inv. 1090.15 Sirat 1968.16 Ward 1981, p. 59.17 Campbell 2009, no 7 ; Descatoire 2007, p. 62-66.

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1. UN MOUTON (OU AGNEL) D’OR

xive-début du xve siècle. Vendu en 1559Or

SOURCES

1er inv., fo 4, sur le dessin droit de la quatrième rangée : item une piè [ce] d’or apelée […] que donna M [r] de la Fo… [déchirures].

HISTOIRE

Le donateur, Mr de la Fo…, n’est pas identifié. Cette monnaie d’or est dessinée mais reste difficile à identifier avec précision.

DESCRIPTION

Inscription : +AGNVS DEI QVI TOLLIS PECCATA MUNDIL’Agneau pascal tenant dans sa patte avant gauche un gon-fanon chargé d’une croix.

COMMENTAIRE

Ce dessin est inexact : il manque des lettres sous l’Agneau qui indiquent le pouvoir émetteur et la fin de la légende MIS [ERERE] NOB [IS]. La déchirure du papier qui nous prive du nom de la monnaie renforce encore l’incertitude : s’agit-il d’un mouton, d’un moutonnet ou d’un agnel ? Le type de l’Agneau pascal, très fréquent dans la numismatique1, a été utilisé dans le royaume de France de 1311 à 1326 (« agnel d’or » de Philippe IV, Louis X, Philippe V et Charles IV), puis de 1355 à 1358 (« mouton d’or » et « moutonnet d’or » de Jean II), enfin de 1417 à 1427 (« agnel d’or » de Charles VI, Henri V et Charles VII)2. L’« agnel d’or » du xive siècle serait très ancien dans ce contexte. Le « moutonnet » de Jean II est trop rare pour qu’on le retienne. Restent le « mouton d’or » (1355-1358) et l’« agnel d’or » (1417-1427) des rois de France, mais aussi leurs imitations : le « mouton d’or » a été imité dans

de nombreuses seigneuries des Pays-Bas méridionaux et l’« agnel d’or » dans quelques-unes3. La présence de la croix sur le gonfanon, qui n’existe pas sur les monnaies du roi de France, peut faire penser plutôt à une de ces imitations des Pays-Bas méridionaux.

2. UN ÉCU DU HAINAUT

1389-1427. Vendu en 1559Or

SOURCES

1er inv., fo 4, texte à côté du dessin gauche de la cinquième rangée : item, une pièche d’or anchienne que on dist escut de Haynau, venant d’ung jouene filz à marier qu’il lessa à son trespas. Cette monnaie n’est pas dessinée.

HISTOIRE

Le légataire est anonyme.

DESCRIPTION (D’APRÈS UN ÉCU D’ALBERT DE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE)

+ DVX ALBERTVS DEI GRA COMES HANONIE ; écu écar-telé aux 1 et 4 d’un losangé et aux 2 et 3 d’un lion, sous une couronne « à bonnet ».+ XPC VINCIT XPC REGNAT XPC IMPERAT ; croix feuillue et fleuronnée évidée en cœur dans un quadrilobe tréflé canton-né de quatre couronnes ; au centre : une rose.

COMMENTAIRE

Il s’agit très probablement d’un « écu d’or à la couronne » frappé par les comtes de Hainaut à l’imitation de celui émis par les rois de France, Charles VI et Charles VII, de 1385 à 1436. En Hainaut, l’« écu d’or à la couronne », copie de

6 Ensemble de pièces d’or

Chaque chanoinesse le jour de la réception de la prébende devait remettre une pièce d’or au chapitre. D’autres étaient données lors d’une cérémonie religieuse ou en offrande. Même démo-nétisées, elles valaient leur poids d’or.Dans ce premier inventaire, les dessins ne sont pas très précis : les types ne sont pas reproduits exactement et les légendes sont mal reproduites ou incomplètes. Ces monnaies semblent avoir été dessinées non pas d’après nature, mais sans doute de mémoire. Il en résulte une certaine difficulté à les identifier. La fragilité du papier et des colorants nous prive aussi d’informations qui auraient été précieuses.

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la monnaie royale, a été frappé sous Albert (1389-1404), puis sous Guillaume IV (1404-1417) et Jean III (1418-1427)4, comme le confirme Jean Duplessy5. À la lecture de la des-cription de la monnaie no 5 de ce manuscrit désignée comme un Albertus de Bavière, il est permis de penser que l’écu de Hainaut mentionné au no 3 est d’un autre comte qu’Albert : Guillaume IV ou Jean III, d’où la différence pour le scribe du xvie siècle.

3. UN ANGELOT D’OR

1404-1427. Vendu en 1559

SOURCES

1er inv., fo 4 vo : Avec le susdit angelo venant du déffunct tré-sorier Gossart en récompense d’une verghe perdue cy de-vant. Cette monnaie est dessinée.

HISTOIRE

Cet angelot a été donné par le trésorier du chapitre, Gossart, pour remplacer la perte d’une bague. Ce Gossart est à rap-procher de Jan Gossart6, dit Mabuse, né à Maubeuge vers 1478.

DESCRIPTION

MONETA AUREA FRANCORUM REX SIT NOME’ D’ Ange de face tenant deux écus ; entre ceux-ci, une fleur de lys.

COMMENTAIRE

Le dessin est inexact mais identifiable : il s’agit d’un très rare ange d’or du Hainaut, émis sous Guillaume IV (1404-1417)7 et Jean III (1418-1427)8. Le dessin montre une fleur de lys entre les deux écus au lieu du lion de Hainaut. La légende est manifestement composée de trois parties que l’on ne rencontre jamais ensemble : MONETA AUREA fait penser à certaines monnaies des Pays-Bas, FRANCORUM REX est un fragment de légende de monnaie royale française et SIT NOMEN DOMINI est le début d’une légende de revers…

4. UN LION D’OR DE FLANDRE

1454-1460. Vendu en 1559

SOURCES

1er inv., fo 4, à côté du dessin droit de la dernière rangée : Item, ung lyon [d’or] donna un [e jeune] fille à mar [ier]. Cette monnaie est dessinée.

DESCRIPTION

PHILIPPUS DUX BURGVNDIE COMES FLAD.Lion assis à gauche.

COMMENTAIRE

La légende est inexacte : on devrait avoir PHS’x DEI’x DVX BVRG’x COM’x FLAND’. Et le type est dessiné de façon inexacte également : le lion devrait être sous un dais go-thique entre deux briquets enflammés. Cependant, il n’y a pas d’hésitation possible ; la dénomination donnée : lyon d’or commande l’identification. Il s’agit d’un lion d’or de Philippe le Bon, dont l’émission a été ordonnée le 11 juin 1454. Cette espèce fut frappée en Brabant, en Flandre, en Hainaut et en Hollande jusqu’en 1460. La légende dessinée, quoique inexacte, montre clairement qu’il s’agit d’un exemplaire de Flandre, frappé à Bruges entre 1454 et 1459, puis à Gand en 1459-14609. Au vu du seul dessin, on pourrait penser au très rare tiers de lion d’or, dit « lionceau d’or10 » sur lequel le lion est assis dans un polylobe et il n’y a pas de dais ; mais le scribe n’aurait certainement pas écrit lyon d’or pour cette division.

5. UN ALBERTUS DE BAVIÈRE

1389-1404. Vendu en 1559

SOURCES

1er inv., fo 4 vo : Item une pièce d’or nommée Albertus de Bavière venant de Mademoiselle Jehenne de Mortaigne ditte de Potelles, pendant audit chappel Ste Anne. Cette monnaie n’est pas dessinée.

HISTOIRE

La chanoinesse Jeanne de Mortaigne, dite de Potelles, citée écolière en 1462, est décédée en 152811 ; elle est la fille de Jean, seigneur de Potelles et de Marguerite de Schouteet (Mortagne, Sloef, Schouteet, Liedekerke). Quartiers de no-blesse paternels : Mortaigne, « d’or à la croix de gueules », Montigny. Maternels : Mamine, « d’azur au lion d’or armé lampassé d’or chargé à l’épaule d’un lys de gueules », Liedekerke12. Cette monnaie est suspendue à la couronne du chef dit de sainte Anne.

COMMENTAIRE

Cette monnaie n’est ni dessinée, ni décrite. Sa dénomination Albertus de Bavière pourrait désigner toutes les monnaies qu’Albert de Bavière a pu émettre dans ses différents États. Le plus probable est qu’il s’agisse d’un écu de Hainaut à la couronne, comme le no 3, mais au nom du comte Albert (1389-1404)13.

DESCRIPTION (D’APRÈS UN ÉCU DE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE)

+ DVX ALBERTVS DEI GRA COMES HANONIE ; écu écar-telé aux 1 et 4 d’un losangé et aux 2 et 3 d’un lion, sous une couronne « à bonnet ».

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+ XPC VINCIT XPC REGNAT XPC IMPERAT ; croix feuillue et fleuronnée évidée en cœur dans un quadrilobe tréflé canton-né de quatre couronnes ; au centre : une rose.

6. DEUX EXEMPLAIRES DU RÉAL D’AUTRICHE

1521-1556. Vendus en 1559

SOURCES

1er inv., fo 4 vo : item deux pièches d’or nommées réal d’Aus-trice, l’une venant de madamoiselel Bonne de Lixes, vesve de feu Simon Lestime et l’aultre d’une bonne personne, laquelle ne scet volu nommer. Ces monnaies ne sont pas dessinées.

HISTOIRE

La première donatrice n’a pu être identifiée et la seconde est anonyme.

COMMENTAIRE

Le réal est à l’origine une monnaie espagnole. Mais la dénomination n’est pas équivoque : à partir de 1521, Charles Quint fait frapper aux Pays-Bas un réal d’or portant au revers un écu d’Autriche-Bourgogne posé sur une aigle bicéphale, d’où le nom de réal d’Autriche. Cette espèce est frappée à Anvers pour le Brabant (1521-1540 et 1546-1556), à Nimègue pour la Gueldre (1546-1552), à Bruges pour la Flandre (1521-1556) et à Dordrecht pour la Hollande (1545-1556)14.Dans l’inventaire dressé par les exécuteurs testamentaires de Gypus après sa mort en 1562, le réal d’or, encore en circulation, est estimé à 500 livres en monnaie de Hainaut d’après Jennepin en 1889.

Ces sept pièces ont été vendues le 10 juillet 1559 comme l’indique l’inscription : Les IIII Pièces cy dessus avecques les aultres trois figurées en la page précédente ont esté hostées par madame et mes damoiselles de l’église ce Xe juillet XVe LIX pour subvenir aux affaires d’icelle église15. Michel Dhénin

1 Dhénin, « Agnus theme monétaire», dans Paris 1974, p. 163-177.2 Duplessy 1988, no 212, 234, 237, 239, 291, 292, 372, 404, 416, 430, 452.3 Dhénin et Duplessy 1976, p. 129-132, pl. XXIV.4 Chalon 1848, no 117, 133 et 146.5 Duplessy 1983, p. 45.6 Voir Gossart dessinateur dans l’introduction.7 Chalon 1848, no 130.8 Delmonte 1964, no 258.9 Van Gelder et Hoc 1960, no 3-2.10 Ibid., no 5-2.11 AD Nord, ms 356, fo 6, no 11.12 AD Nord, 25 H 5 no 11, 12 ; BM Arras, ms 1315, fo 11, 12.13 Chalon 1848, no 117.14 Van Gelder et Hoc 1960, no 183-1, 4, 5, 6.15 Inventaire, 1482, fo 4 v°.

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SOURCES

1er inv., au-dessus du dessin, fo 4 vo : Item, sour la relicque devant ditte est pendue une bagette comme quarrée, estof-fée d’ung cristal encasset en argent tout à l’enthour, dedens lesquel on voit l’ymaige d’ung Dieu de pitet, ouvret comme d’or de deux costez, que donna mademoiselle Du Maisnil, jadis chanoinesse de cheens. Mention postérieure : Bon pour le coffre.C. Cambrai, fo VII.2nd inv., fo 27 : En coffre de la trésorerie… L’on a prins cest image pour la Ntre Dame l’an 1679.

HISTOIRE

La relique est donnée par mademoiselle Du Maisnil, ancienne chanoinesse, citée en 1460 et absente du chapitre lors de la rédaction de l’inventaire en 1482.Elle pend au reliquaire de sainte Aldegonde. Elle a ensuite été enlevée, remisée au coffre du trésor et enlevée en 1679 pour faire la statue de Notre-Dame (cat. no 120).

DESCRIPTION

Sous un cristal de roche enchâssé d’argent, un Christ au pilier sur un fond d’argent doré ou un Christ aux liens. La monture à griffes est identique à celle du reliquaire en forme de losange (cat. no 20). À l’anneau est attaché un lien rouge.

7 Pendentif de Jésus au pilier

1460-1482. Fondu en 1679Argent et cristal de roche

Premier inventaire, collection particulière

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SOURCES

1er inv., description fo 4 vo : Item, une grande relicque d’argent doree réservet le piet, lequel est de blancq argent la plus part ; en laquelle est ung ron bericle cristallin lequel tiennent de leurs mains deux angeles à demi-droit ; dedans le quel est le benoy veu de Madame Saincte Aldegonde. Et par deseure le dict bericle est ung tabenacle où est l’ymaige de Madame Saincte Aldegonde en genoulx et pour le de-seure une petitte croix et le crucifix tout d’argent dorret aussi comme demonstre ceste figure.Dessin, fo 6.2nd inv., fo 4 : dessin.C. Cambrai, fo VIII.CIMH 15 avril 1896. Maubeuge, trésor de l’église Saint-Pierre-et-Saint-Paul.

BIBL. SUR LE RELIQUAIRE

Van Drival 1876, p. 66-70, p. 15 ; Harvard 1896, p. 376, 277 ; Dehaisnes, a) Histoire de l’Art 1866, p. 267. b) 1897, p. 135 ; Leroy (1883), p. 107 ; Jennepin 1889-1909, p. 531, 532 ; Bonenfant-Feytmans 1953, p. 63, 64 ; Cartier 1996, p. 265, 266.

EXP.

Lille 1874, p. 120 ; Paris 1889-1900, no 1738 ; Bruxelles 1958 ; Paris 1965.

HISTOIRE

Ce reliquaire évoque le miracle de sainte Aldegonde le jour de sa prise de voile au monastère d’Haumont devant les évêques Amand et Aubert, quand le Saint-Esprit sous la forme d’une colombe prend avec le bec le voile consacré par les évêques et le dépose sur la tête de la jeune vierge devant l’assemblée des fidèles1. Ce voile a été conservé : c’est un crêpe de laine très léger, étroit, mesurant 3 à 4 m de long, d’après Mortreux, vicaire à Maubeuge, qui l’a dé-plié en 1882 : il est alors en lambeaux et la trame a presque totalement disparu2. Ce voile a d’abord été conservé dans un coffre en argent avant sa translation dans un nouveau reliquaire le 16 juin 1469 ; Jean Baccart, abbé de Liessies,

Jean Gosselet, abbé de Maroilles et Estienne Dubois, doyen de Maubeuge, délégués par Jean de Bourgogne, évêque de Cambrai, assistent à cette déposition. Le procès-verbal dressé par Jean de la Rue, prêtre et notaire apostolique, est enfermé avec le voile3.Ce reliquaire fut conservé durant la Révolution par la comtesse Félicité Parfaite de Ghistelles de Saint-Floris, chanoinesse aînée du chapitre, qui le donna par testament à l’église de Maubeuge, elle le confia aux bénédictins de

8Reliquaire du voile de sainte Aldegonde

1469Argent et vermeilH. : 53 cm ; L. du pied : 38 cm

Fig. 8.1 - Second inventaire, BM Arras

53

Premier inventaire, collection particulière

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Saint-Trond qui le transportèrent en Allemagne d’où il fut ramené en 1821. Monsieur le chevalier de Mentex de Hornes le remit à monsieur le baron de Blondel de Beauregard, qui le déposa entre les mains de l’abbé Bévenot, curé et doyen de Maubeuge, en décembre 1821. Le verre du cylindre fendu a été remplacé en 1885 par un nouveau « cristal », dans lequel fut remis le voile par les soins de l’abbé Lasselin, curé-doyen de Maubeuge4.

DESCRIPTION

Le cylindre à reliques est horizontal, il est tenu par deux anges ailés, revêtus de l’aube. Le pied supportant le reliquaire est orné à la base d’une galerie d’arcatures de piliers et de pinacles, le nœud est en côtes de melons à crochets, la tige se divise en deux crosses. Surmontant le cylindre, sous un baldaquin de piliers, d’arcs-boutants et de pinacles, est agenouillée sainte Aldegonde avec la crosse abbatiale, une colombe déposant le voile sur sa tête. Une croix fleurdelisée sur un nœud en côtes de melons à crochets termine l’ensemble. La base est unie, son bord polylobé est orné, entre deux filets, de pierres enchâssées dans une collerette de feuilles. La coiffe de la sainte et le voile tenu par la colombe sont peints d’un émail blanc sur le métal aplani : technique apparue en Flandre au xve siècle.Deux poinçons : 1) lion passant pour la marque de Valenciennes, xve siècle ; 2) une grappe de raisin pour la marque de l’orfèvre, attribuée à Jehan Steclin.

COMMENTAIRE

La qualité exceptionnelle et la précision de ce dessin témoignent de la main d’un excellent dessinateur.Aucun document n’accrédite cette attribution à Jan Gossart, dit Mabuse, né à Maubeuge vers 1478, excepté la présence d’un Gossart comme responsable du trésor du chapitre5. Quand commence cet inventaire de dessins en 1482, ses dons auraient été remarqués par l’abbesse du chapitre qui l’aurait placé dans un atelier de peintre.

1 Triquet 1625 ; Bollandus 1658, t. III, p. 650, notice 9.2 Leroy 1883, p. 197, n. 1.3 Basilides 1623, p. 188 ; Jennepin [1889] 1976, t. II, p. 606.4 Triquet [1625] 1837.5 Voir Gossart dans l’introduction.

Détail fig. 8.2 Détail fig. 8.2

Fig. 8.3 - Poinçons

Fig. 8.2 - Église Saint-Pierre-et-Saint-Paul, Maubeuge

55

56

SOURCES

1er inv., fo 6 vo : Item, une grande et haulte pièche nouvellement faitte, toutte d’argent doret. La ditte pièche estoffée d’ung piet plat d’un gros neux, parmy le tenoile par le deseure de pluiseurs pilliers et machonneries à manière d’une thourette bien honestement et de bonne mesure ouvrée avoecq une petitte croix sour le deseure dudit ouvrage et par le dedens ung bericle cristallin rond par dedens lequel au jour du Sacrement on met le saincte hostie pour porter à procession comme de coustume est, puis après que il est osté, on y met ung petit reliquiaire dedens lequel est une des espines de la couronne nostre seigneur. Laquelle pièche comme elle est poet peser environ XIIII mars. Dont s’ensieult la figure. Dessin, fo 7.Chiffres romains minuscules VIII à gauche.C. Cambrai, fo IX et X.2nd inv., fo 5 : Il y at ung sercle d’or avuqc un petit cofres de-soux quy signifie la manne. Dessin, fo 5.

HISTOIRE

Cette pièce fabriquée vers 1482 pèse plus de 3 kg. Elle a un double usage : présenter l’hostie pour la procession du Saint-Sacrement et servir de reliquaire à une épine de la couronne du Christ, qui était conservée dans un petit reli-quaire plus ancien (cat. no 20). Le commentaire au folio 13 de l’inventaire Bottieau précise que cette espine de la couronne de Jésus Christ N.S. remis dans un plus grand reliquaire et l’enchassure a esté fondue pour les piramides, plus tard en 1642 (cat. no 99).

DESCRIPTION

Le pied à six lobes est gravé de cuirs entre des fonds striés. L’embase est formée de six fenêtres aveugles trilobées sé-parées par des cathèdres. La tige est courte à pans gra-vés de lambris, séparés par de fines colonnettes torsadées. L’embase entourée de fenêtres aveugles est à rapprocher du calice du musée de la ville de Gouda, daté du xve siècle1. La partie supérieure est architecturée autour du cylindre de cristal, bordé de feuilles trilobées ; elle est soutenue par des colonnettes torsadées et par deux tours surmontées de pi-

9Reliquaire de la sainte Épine et de la sainte Manne

Fin du xve siècleArgent et argent doréPoids : 14 marcs : 3,269 kg

Détail

Fig. 9.2 - Second inventaire, BM Arras

Fig. 9.3 - Gotische monstrans, Meester W met de Sleutel, 1465-1485/ Rijksmuseum d’Amsterdam, Cabinet des dessins/ inv. RP-P-OB-2163

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nacles sur lesquels s’appuient deux arcs-boutants formant deux chapelles à deux étages abritant deux statuettes, à gauche, sainte Aldegonde en abbesse avec sa crosse et, à droite, saint Blaise avec son peigne à carder, patron des peigneurs et des métiers de la laine, particulièrement ho-noré dans le Hainaut. Le nœud est un globe écrasé, orné d’arêtes à crochets qui rappelle celui du reliquaire du voile de sainte Aldegonde de 1469. Une gravure du cabinet des dessins du Rijksmuseum à Amsterdam, à l’usage des artistes et des orfèvres, est proche de ce reliquaire de la sainte Manne2. Ce baldaquin à étages et cette profusion de pinacles surmontent de nombreux reliquaires du xve siècle dans toute l’Europe occidentale entre 1470 et 15203. Les serpentins soudés entre les pinacles sont des modèles conservés au Musée historique de Bâle4.

COMMENTAIRE

Le dessin est d’une grande qualité et d’une grande préci-sion. Sous l’entablement apparaît entre les ciselures une tête de clerc, portrait ou hommage au responsable du tré-sor qui est toujours un chanoine.

1 Fritz 1982, no 438.2 De Jong et De Groot 1988, t. 1, no 118, G 1988.3 Ibid., no 542, 543, 693-695, 737, 738.4 Fritz 1982, no 703-704. Premier inventaire, collection particulière