Rapport e-NS@ - Ecosystème numérique de santé...

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Rapport e-NS@ - Ecosystème numérique de santé aquitain mai 2015 par Géraldine GOULINET-FITE Etat des lieux des usages et pratiques numériques en France et en Aquitaine

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Rapport e-NS@ -Ecosystème numérique de santé

aquitain

mai 2015

par Géraldine GOULINET-FITE

Etat des lieux des usages et pratiques numériques en France et en Aquitaine

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Le contexte

Le déploiement de dispositifs numériques de télémédecine et de télésanté nécessite une mise en visibilité des différentes initiatives afin d’analyser leur contribution à la e-inclusion des sujets à la santé fragilisée, qu’ils soient atteints de maladies chroniques et/ou soient vieillissants. Cette étude vise à comprendre en quoi et comment ces dispositifs numériques sont potentiellement vecteurs de démocratie sanitaire, favorisent le maintien de ces personnes en situation d’autonomie agissante et contribuent au renforcement du lien social, composante centrale de l’équilibre de santé. Centré sur les usagers, patients et/ou seniors, le questionnement principal vise à comprendre la dynamique de leur acculturation numérique afin qu’ils soient en capacité de maîtriser ces dispositifs au regard de leurs besoins. La mission

Pour comprendre ces processus « d’écologisation1 » des pratiques comme vecteur de e-inclusion, quatre axes d’analyse sont proposés à cette étude :

- catégorisation à partir des équipements des différentes pratiques numériques des familles de population ;

- catégorisation des services numériques proposés ; - identification et catégorisation des acteurs engagés dans ces dispositifs ; - identification des compétences requises pour l’usage de ces dispositifs

numériques.

La finalité

Par ces études spécifiques, il s’agit de définir la maturité numérique du territoire en matière d’e-santé et les différents régimes d’engagement des acteurs (producteurs de services, professionnels, aidants, patients, seniors) afin d’identifier ce qui fait sens commun. Nous questionnons notamment l’articulation entre les sphères formelle et informelle pour identifier l’évolution des rôles des acteurs. L’approche par compétence vise à anticiper les besoins de formation qui pourraient à terme être reliés aux actions formatives proposées sur les territoires. Elle contribuera également à la production de recommandations ergonomiques pour les concepteurs de services numériques.

1 La notion d’écologisation désigne les processus par lesquels l’environnement est pris en compte dans les politiques publiques, dans les organisations,

voire dans les pratiques professionnelles. L’environnement est ici entendu largement, il comprend aussi bien les questions sanitaires que les milieux

naturels ou anthropisés qui supportent la vie. (Mormont, 2013)

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I. ÉLÉMENTS de CADRAGE ........................................................................................................ 4

1. Rappels sémantiques .......................................................................................................... 4 2. Les principaux enjeux des TIC en santé ......................................................................... 12 3. Les principaux freins et menaces .................................................................................... 15 4. La santé numérique : pour qui et pour quoi ? ............................................................... 16 5. Les axes prioritaires de la stratégie numérique en santé ............................................. 18

II. QUEL ECOSYSTÈME en FRANCE ? ..................................................................................... 24 1. Les tendances nationales des systèmes d’information et infrastructures numériques – Brique e-santé – Logique B2B ............................................................................................... 24 2. Les tendances nationales de la télémédecine - Brique TELEMEDECINE – logique B2B (industriels/professionnels) ............................................................................................. 35 Trois éléments orientent la présentation de l’état des lieux de la télémédecine en France : ....................................................................................................................................... 35 3. Les tendances nationales de la télésanté et m-santé – logique B2B2C (professionnels/industriels/patients) ...................................................................................... 40

III. QUEL ECOSYSTÈME en AQUITAINE ? ............................................................................... 50 1. Cartographie des équipements et des services numériques de télésanté et m-santé 50 2. Cartographie des différents programmes d’expérimentation « télésanté » financés en Aquitaine depuis 2012 ........................................................................................................ 53 3. Caractérisation des compétences, formation, accompagnement .............................. 56

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I. ÉLÉMENTS de CADRAGE

1. Rappels sémantiques

La e-santé, de quoi parle-t-on ? Tentative d’une définition et de ses périmètres

Selon la définition de la Commission européenne2 la e-santé est « l'application des technologies de l'information et de la communication à l'ensemble des activités en rapport avec la santé », la e-santé recouvre en fait plusieurs champs d’actions qu’il convient de détailler pour comprendre le rôle de chacun dans l’écosystème sur lequel elle repose :

- les TIC3 comme outils de transmission et de partage d’information et de données : architecture du système d’information ;

- les TIC comme support dématérialisé aux actes de santé : télémédecine ; - les TIC comme réseaux d’échanges et de médiations relationnelle,

organisationnelle, éducationnelle : télésanté ; - les TIC comme dispositif connecté et mobile d’auto-surveillance, de

contrôle et de prévention : m-santé. En cela, la e-santé induit de nombreux changements communs à ces quatre caractéristiques sur le système de santé actuel :

- géographiques et de localisation : lieu de la prise en charge, connectivité, mobilité ;

- temporels : immédiateté, permanence et fréquence des échanges ; - usuels : modalités d’usages des technologies ; - économiques : rémunération des actes, des offres et solutions ; - compétences : expertise, connaissance, apprentissage.

2 Les dossiers européens « La E-santé en Europe » Mai-Juin 2009 n°17

3 Selon la définition de l'Office québécois de la langue française, les Technologies de l’Information et de la Communication sont un ensemble des technologies issues de la convergence de l'informatique et des techniques évoluées du multimédia et des télécommunications, permettant l'émergence de moyens de communication plus efficaces, en améliorant le traitement, la mise en mémoire, la diffusion et l'échange de l'information. http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8349341

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Ainsi, l'écosystème numérique appliqué à la santé prend en compte les interactions entre les acteurs du système de santé, l’environnement TIC et les modalités d’utilisation des technologies de l’information pour la santé. On peut schématiser cet écosystème selon les représentations suivantes :

Figure 1 : Représentation organisationnelle de l’écosystème numérique en santé

Figure 2 : Représentation sectorielle de l’écosystème numérique en santé (source CNOM, 2013)

C’est à partir de cette représentation sectorielle que nous proposons de réaliser l’état des lieux des pratiques et des usages en matière de e-santé, télémédecine, télésanté et m-santé pour et auprès du patient, par l’étude des spécificités en fonction des acteurs et des compétences requises.

Représensation systémique de l'écosystème numérique de santé

Organisation du système de santé

Soins primaires (généraliste)

Soins secondaires (spécialisé)

Soins Tertiaires (de pointe)

TIC en santé Reseau Internet

Informatique Télécommunication

mobile Domotique

Organisation du système de santé

Payeurs

INdustriels

Professionnels de santé

Patients

Agences sanitaires, Institutionnels

Organisation TIC en santé

E-santé : Protocole

d'échanges et interfaces métiers : Systèmes

d'Information

Organisation d'actes de

médecine à distance :

Télémedecine

Réseaux d'échanges et de médiation

relationnelle, organisationnelle, éducationnelle :

Télésanté - M-santé

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Les TIC comme outils de transmission et de partage d’information et de données : architecture et système d’information, e-santé

Le rapport de l’ANAP4 (Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux) de Mai 2010, concède au concept de Système d'Information (SI) 2 fonctions-clés :

- C’est un ensemble organisé de ressources (matériels, logiciels, personnel, données et procédures) qui permet d'acquérir, de stocker, de structurer et de communiquer des informations sous forme de textes, images, sons, ou de données codées.

- C’est un système ou sous-système d'équipements, d'informatique ou de télécommunication, interconnectés dans le but de l'acquisition, du stockage, de la structuration, de la gestion, du déplacement, du contrôle, de l'affichage, de l'échange (transmission ou réception) de données sous forme de textes, d'images, de sons, et/ou, faisant intervenir du matériel et des logiciels.

En cela, le SI permet :

- La gestion de contenu (en anglais : content management), destinée à gérer les informations brutes et à les transformer en connaissances ou données mieux structurées ;

- La gestion des accès, c'est-à-dire la gestion des flux et des protocoles d'échange dans les réseaux de télécommunications internes ou partagés avec les partenaires.

L’interconnexion entre les systèmes est rendue possible par l’interopérabilité c’est-à-dire la capacité donnée à fonctionner avec d’autres produits ou systèmes informatiques, existants ou futurs, sans restriction d’accès ou de mise en œuvre. L’intégration de cette notion dans l’étude de l’écosystème numérique de santé est essentielle pour mesurer les enjeux en termes d’organisation territoriale de l’offre de soins, et la coordination des acteurs pour assurer la continuité des prises en charge. C’est dans ce sens que l’étude « TIC et systèmes de santé5 » publiée par l’OTeN en 2010 (Observatoire des Territoires Numériques) révèle plusieurs risques liés au développement et au maillage au niveau régional et local, dont notamment la menace sur l’égalité d’accès sur le territoire et la non coordination des systèmes entre eux, à l’origine d’une organisation en « silo ». La création des Espaces Numériques Régionaux de Santé (ENRS) s’engage à respecter ce cadre d’interopérabilité, et les référentiels développés par l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP) s’efforcent d’homogénéiser les pratiques tout en répondant aux besoins régionaux de santé.

4 « Audit des Systèmes d’Information Hospitaliers auprès d’établissements représentatifs »

https://www.sante-centre.fr/portail/gallery_files/site/592/593/985.pdf

5 http://oten.fr/IMG/pdf/OTEN_TICSante_final.pdf

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Les TIC comme support dématérialisé aux actes de santé : télémédecine

Sur le plan de l’étymologie grecque, « télé » signifie « à distance ». Cette conception de « médecine à distance » prend ses sources dès 2003 au sein de la Commission Européenne. La loi “Hôpital, patients, santé, territoires” (HPST6) de 2009 précise que « la télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Elle met en rapport, entre eux ou avec un patient, ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical, et le cas échéant, d’autres professionnels apportant leurs soins au patient. Elle permet d’établir un diagnostic, d’assurer pour un patient à risque un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou réaliser des prestations ou des actes, ou d’effectuer une surveillance de l’état des patients. » La DGOS (Direction Générale de l’Offre des Soins) et le rapport Lasbordes7 de 2009 adjoignent à cette précision juridique la vision synoptique suivante : Typologie Description des actes Téléexpertise/Téléformation/ Télécompagnonnage

Echanges d’avis entre professionnels des santé, seconde opinion, visio-réunions mono ou pluridisciplinaires : assister/délivrer des informations, voire un enseignement ou une formation entre professionnels.

Téléconsultation Consultation médicale d’un patient à distance qui nécessite son consentement avec ou non un professionnel de santé à ses côtés.

Télésurveillance/ Télémonitoring

Surveiller à domicile ou en ambulatoire des patients porteurs d’une pathologie chronique sévère ou en postcritique après hospitalisation, par un contrôle sur une ou plusieurs fonctions vitales.

Téléassistance médicale/ Téléintervention (téléchirurgie)

Assister à distance principalement par des conseils, diagnostics thérapeutiques et/ou prise en charge d’un patient éloigné et/ou isolé. Dans le domaine de l’urgence, pratiquer totalement et exclusivement à distance un acte médico-chirurgical.

Figure 3 : Catégorisation des actes de télémédecine (2009)

6 http://www.sante.gouv.fr/la-loi-hopital-patients-sante-et-territoires.html 7 http://www.sante.gouv.fr/la-telesante-un-nouvel-atout-au-service-de-notre-bien-etre.html

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Le décret du 19 octobre 20108 précise les conditions de mise en œuvre d'une activité de télémédecine et le tableau suivant, publié par l'ANAP (Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux)9, synthétise, à partir du cadre juridique des 4 principaux actes de télémédecine, les processus organisationnels et les conditions de mises en œuvre de ces activités par les différents acteurs :

Figure 4 : Catégorisation des activités et des conditions de mise en œuvre d’un acte de télémédecine (synthèse Rapport ANAP)

8 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000022932449&categorieLien=id

9 http://www.silvereco.fr/wp-content/2012/telemedecine_en_action_tome1.pdf

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Les TIC comme réseaux d’échanges et de médiation relationnelle, organisationnelle, éducationnelle : télésanté et m-santé

Le rapport Lasbordes de 2009 intitulé « La télésanté : un nouvel atout au service de notre bien-être » désigne la télésanté comme l’utilisation des outils de production, de transmission, de gestion et de partage d’informations numérisées au bénéfice des pratiques tant médicales que médico-sociales. Les applications, vues du patient, sont catégorisées selon la nomenclature suivante :

- la téléinformation : capacité à accéder à un portail grand public sur lequel les usagers/patients et les acteurs du monde médico-social pourront accéder à des informations de prévention et de recommandations sanitaires, à des alertes (situations de crise, épidémie), à des conseils et bonnes pratiques, à des annuaires, des guides d’accompagnement leur permettant d’identifier le point d’entrée qui correspond à leur problématique ;

- la télévigilance : alerte, suivi et accueil téléphonique des personnes utilisant notamment des capteurs dynamiques de positionnement, de comportement, de fonctionnement d’organes vitaux ou des appareils supplétifs et des outils de géolocalisation (par exemple pour les pathologies type Alzheimer) ;

- le télémonitoring : enregistrement de divers paramètres physiologiques sur un patient et transmission aux professionnels concernés (médecins, sages-femmes, infirmières) souvent dans le cas de pathologies chroniques : enregistrement de la tension artérielle, surveillance des insuffisants respiratoires chroniques, surveillance des grossesses à risque ;

- la télécollaboration : outils d’animation de communautés et de réseaux de santé, plates-formes collaboratives dédiées ;

- le télémajordome : outils et offres de services permettant à distance de commander ou mettre en œuvre des services d’accompagnement (restauration, aides à domicile…) notamment pour les maladies chroniques, les hospitalisations à domicile, les personnes handicapées… ;

- la téléanimation : accès à une gamme d’outils interactifs (loisirs, messageries multimédia simplifiées, webconférences, serious game) incitant les usagers/patients à conserver un lien social et un minimum d’activité physique et cérébrale ;

- la téléformation : services de télécommunications synchrones ou asynchrones ; téléphonie, visioconférence, messagerie, forums, serveurs d’images. Ces services de formation à distance, s’adressant à des étudiants ou à des professionnels de santé, permettent l’accès à un savoir-faire ou à des connaissances, quelle que soit leur localisation (base de données médicales sur le Web, modules de e-learning, interventions chirurgicales visualisées à distance par des internes) ;

- la téléprescription : elle permet la dématérialisation des prescriptions médicales et permet d’éviter les déplacements inutiles.

La configuration de la m-santé contribue largement au déploiement des services de télévigilance et de télémonitoring notamment à travers l’Internet des objets et les applications dédiées.

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Les TIC comme dispositif connecté et mobile d’auto surveillance, de contrôle et de prévention : m-santé, objets connectés

En Janvier 2015, le livre blanc du Conseil National de l’Ordre des Médecins10 relatif à la santé connectée propose un cadre de référence à l’appellation m-santé. Si la définition générique du Pr Robert Istepanian, universitaire londonien, désigne la m-santé comme « l’utilisation des communications mobiles émergentes en santé publique », l’OMS dans son rapport de 201111, propose d’en affiner la lecture en définissant la santé mobile comme « les pratiques médicales et de santé publique reposant sur des dispositifs mobiles tels que téléphones portables, systèmes de surveillance des patients, assistants numériques personnels et autres appareils sans fil ». Sur le plan des usages, le périmètre s’étend des fonctions basiques du téléphone (voix et textos, ou SMS) aux fonctionnalités les plus sophistiquées faisant appel aux technologies les plus récentes. Sachant que le smartphone et la tablette sont devenus les points d’accès Internet quasi exclusifs, l’OMS a classé les services de la santé mobile en 13 catégories autour de 3 axes :

- Communication entre des individus et des services de santé (apparentée à la télémédecine) ;

- Accès distant à l’information (notamment au dossier médical du patient) ; - Monitoring et surveillance des patients, avec des dispositifs de mesure

communicants.

Figure 5 : Catégorisation des services de m-santé (source OMS, 2009)

10 Livre Blanc Santé connectée : De la e-santé à la santé connectée, http://esante.gouv.fr/actus/ethique/sante-connectee-le-livre-blanc-du-cnom-de-la-e-

sante-a-la-sante-connectee

11 World Health Organization, Global Observatory for eHealth, mHealth : New Horizons for Health through Mobile Technologies. Geneva, 2011.

https://who.presswarehouse.com/books/BookDetail.aspx?productID=295980

11

Outre l’usage des tablettes et des smartphones, la m-santé intègre également les dispositifs de santé connectée que l’on peut qualifier d’Internet des objets. Ces derniers ont la particularité de répondre à un principe d’auto-gestion de paramètres spécifiques. Le mouvement du Quantified self s’inscrit dans cette catégorisation. Lancé en 2007, il regroupe les outils, les principes et les méthodes permettant à chacun de mesurer ses données personnelles, de les analyser et de les partager. La CNIL, en 2014, donne une définition du quantified self : « Renvoie à un ensemble de pratiques variées qui ont toutes pour point commun, de mesurer et de comparer avec d’autres personnes des variables relatives à son mode de vie ». Deux catégories d’applications émergent12:

- celles qui s’appuient sur des mesures objectives : biologiques, d’activités, voire d’habitudes, mais aussi de performances physiques ou sportives, ou accompagnées le cas échéant d’éléments de contexte et d’une dimension ludique qui stimule les activités visées (marche, sport, mais aussi par exemple la conduite automobile, la créativité, la mémoire, pour tous ou spécifiquement pour les personnes âgées) ;

- celles qui recueillent la perception instantanée de la personne sur son sentiment de bien-être, ses émotions, associés éventuellement à une activité particulière ou à une performance.

L’objectif est de faire interagir les utilisateurs entre eux afin d'assurer une production continuelle de contenus, et non plus uniquement la distribution de documents. En cela, les TIC issues du Web 2.013 et Web 3.014 contribuent particulièrement au développement de 3 fonctions cibles : le réseautage, l’auto-mesure et la communication intelligente des données. Cette perspective de partage et d’échange d’informations et de coopération de santé entre les différents acteurs repose sur un principe de co-construction opérant soit dans la cadre de la télésanté (gestion de la santé à distance) ou de la m-santé (usages d’outils mobile en santé). En s’appuyant sur les approches conceptuelles de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Loïck Menvielle, Sylvaine Castellano, François Druy (2012) mettent en exergue « un management de la connaissance dans le domaine de la santé15 » à partir de compétences info-communicationelles structurelles qui composent l’écosystème numérique de santé16.

12 Rapport « Bien vivre grâce au numérique » - Robert PICARD. CGIET, Février 2012.

http://www.cgeiet.economie.gouv.fr/Rapports/2012_02_12_2011-36-Rapport.pdf

13 Web 2.0 : les internautes contribuent à l'échange d'informations et peuvent interagir (partager, échanger, etc.) de façon simple, à la fois avec le contenu et la

structure des pages, mais aussi entre eux, créant ainsi notamment le Web social. L'internaute devient, grâce aux outils mis à sa disposition, une personne active sur la

toile. http://fr.wikipedia.org/wiki/Web_2.0

14 Web sémantique ou web 3.0 : vise à aider l'émergence de nouvelles connaissances en s'appuyant sur les connaissances déjà présentes sur Internet. Pour y

parvenir, le Web sémantique met en œuvre le Web des données qui consiste à lier et structurer l'information sur Internet pour accéder simplement à la connaissance

qu'elle contient déjà. http://fr.wikipedia.org/wiki/Web_3.0

15 MENVIELLE, Loïck, CASTELLANO, Sylvaine, et DRUY, François. Santé 2.0 : vers une nouvelle relation Docteur-Patient versus Docteur-Consommateur ?

http://www.etatsgenerauxdumanagement.fr/egm2012/ddoc-286-S12-L.Menvielle.andCo.pdf

16 O.M.S. (2011), Rapport final de l’Organisation Mondiale de la Santé, disponible à

http://new.paho.org/hq/index.php?option=com_docman&task=doc_download&gid=15106&Itemid

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Figure 6 : Modélisation du management de l’information et de la communication de l’écosystème numérique en santé selon l’OMS, 201117

 

2. Les principaux enjeux des TIC en santé

Face aux défis que représentent le vieillissement de la population, l'accroissement des dépenses de santé, l'explosion des maladies chroniques et la désertification médicale, la e-santé est devenue un enjeu majeur, représentant un marché estimé entre 1,8 et 2,5 milliards d’euros en France.

Les simulations liées au déploiement de la télémédecine réalisées pour le livre blanc de Syntec Numérique intitulé « Télémédecine 2020 - Modèles économiques pour le télésuivi des maladies chroniques 18», concernant les gains financiers autour de 4 pathologies majeures et chroniques, démontrent une fourchette allant de 925 € à 12 035 € par patient/an. Michel Gagneux, président de l’Agence des systèmes d’Information partagés de santé (ASIP), indique quant à lui, que la transformation de notre système de santé vers la e-santé doit répondre à 6 défis majeurs :

- Le défi de l’efficience : Actuellement 11 % de notre richesse nationale est consacrée aux dépenses de santé.

- Le défi de la qualité des soins : Entre 125 000 et 165 000 hospitalisations par an seraient évitables.

- Le défi de l’accès aux soins pour tous : Besoin d’un outil de compensation pour une couverture homogène du territoire.

- Le défi démographique (la dépendance) : Nécessité de trouver des dispositifs qui évitent l’hébergement ou l’hospitalisation, et d’adapter nos outils pour la médecine à domicile.

- Le défi de la prévention : L’utilisation des nouvelles technologies au service de l’éducation thérapeutique, l’assistance au patient, la prise en charge par le patient de sa propre santé.

17 O.M.S. (2011), Rapport final de l’Organisation Mondiale de la Santé, disponible à

http://new.paho.org/hq/index.php?option=com_docman&task=doc_download&gid=15106&Itemid

18 Livre blanc Syntec Numérique : Télémédecine 2020, Modèles économiques pour le télésuivi des maladies chroniques, 2013.

http://esante.gouv.fr/actus/telemedecine/prise-en-charge-de-maladies-chroniques-le-livre-blanc-telemedecine-2020-du-syntec

Systèmes d’Informations partagées : SI

Traitement et surveillance physique et psychologique à distance : Télémédecine

Management de la connaissance de la santé : Télésanté/M-santé

Web 2.0

Web 3.0

Web 1.0

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- Le défi du partage et de l’optimisation de la connaissance : Le traitement ne peut plus être fait à titre individuel mais doit s’inscrire dans un réseau de santé coordonné et articulé entre les besoins relevant du champ sanitaire et du social.

Il précise également que la e-santé permet de libérer l’information de son support physique, que l’on peut partager cette information centrée sur le patient entre différents praticiens et disciplines (médecine hospitalière et ambulatoire) et qu’elle développe la participation du patient « citoyen » plus grandement associé à son suivi et à sa prise en charge. En effet, les modalités d’intervention de la télésanté et de la m-santé permettent à ces patients de prendre une part plus active dans le suivi de leur santé. Qu'il s'agisse de la surveillance des malades à distance, d'accès à l’information par voie électronique ou encore de diagnostic partagé, la télésanté a pour premier objectif de mieux répondre aux besoins et aux attentes des patients, des personnes fragilisées, dépendantes ou handicapées. Le bénéfice pour l’usager/patient doit ainsi rester en permanence au centre des préoccupations et de la mesure de l’efficacité des politiques et des moyens alloués. Le livre blanc19 « D'un modèle de santé curative à un modèle préventif grâce aux outils numériques » de septembre 2014 émanant du « Think Tank » du collectif Renaissance Numérique20, met particulièrement en évidence le changement de paradigme sociétal et économique opéré notamment sur la relation médecin-patient avec l’émergence des offres et des services de télésanté et de m-santé et le potentiel de ces dispositifs pour (ré)organiser le modèle préventif des politiques publiques.

Figure 7 : Tableau récapitulatif des changements entre le modèle curatif et préventif en santé

19 http://www.renaissancenumerique.org/publications/rn/698-libre-blanc-dun-modele-de-sante-curative-a-un-modele-preventif-grace-aux-outils-numeriques-

20 Renaissance Numérique est le laboratoire d’idée ou Think Tank de la société numérique, créé en 2005. Il réunit les chefs des grandes entreprises de l’Internet,

françaises et multinationales, les entrepreneurs, les universitaires et les experts du numérique ainsi que les représentants de la société civile, pour participer à la

définition d’un nouveau modèle économique social et politique issu de la révolution numérique.

14

En termes de coûts, de pérennité des systèmes de santé et d’amélioration des soins aux patients, l’Union Européenne a présenté son plan d’action d’ici 202021 en 2013. Dans les grandes lignes, il porte sur :

- la prévention et la gestion des maladies chroniques ; - l’innovation dans les soins aux patients ; - la digitalisation des organisations de santé.

Des axes clés pour la concrétisation de cette stratégie e-santé sont identifiés d’ici 7 ans :

- créer un réseau européen de la santé et favoriser les échanges d’informations entre professionnels de santé des différents pays de l’UE ;

- développer l’utilisation du data analytique et des modèles prédictifs ; - évaluer les actions, les thérapies les plus efficaces ; - établir des standards pour la protection des données personnelles et les e-

prescriptions.

Enfin, le marché de l’écosystème numérique de santé est un secteur économique et industriel en plein développement, vecteur de croissance et de création d’emploi pour l’avenir. Les résultats de l’étude22 « Les marchés de l'e-santé à l'horizon 2020 » menée en 2014 par Xerfi Precepta, chiffrent le marché à 2,4 milliards d’euros en 2013 avec une progression de 4 à 7 % par an d’ici 2017.

Ne s’agissant que de la télémédecine, Syntec Numérique23, un syndicat professionnel des entreprises du numérique, évalue le marché de la télémédecine en France entre 80 et 140 millions d’euros, avec des perspectives de croissance de l’emploi comprises entre 13 et 28 % pour les 5 prochaines années.

De fait, le numérique transforme l’économie de la santé au même titre que les autres secteurs d’activités, et génère de l’emploi. En 2011, une étude McKinsey24 estimait à 4 % la part de la population active employée directement ou indirectement par une entreprise de la filière numérique. Au niveau mondial, ce sont 1,15 millions d’emplois qui ont été créés ces 15 dernières années par la filière Internet (source : McKinsey Global Institute, 2011).

Enfin, le marché de la santé mobile pourrait représenter 26 milliards de dollars en 2017 (environ 19 milliards d’euros). En 2012, il pesait déjà plus d’1,3 milliard de dollars (960 millions d’euros), avec plus de 97 000 applications en santé recensées et 300 000 téléchargements payants effectués chaque jour selon une étude américaine Research2Guidance25 publiée en mars 2013.

21 http://www.europarl.europa.eu/document/activities/cont/201309/20130920ATT71712/20130920ATT71712EN.pdf

22 http://www.xerfi-precepta-strategiques-tv.com/emission/Philippe-Gattet-Les-marches-de-l-e-sante-a-l-horizon-2020_1975.html 23 http://www.syntec-numerique.fr 24 http://www.mckinsey.com/insights/high_tech_telecoms_internet/internet_matters

25 Mobile Health Market Report 2013-2017 - http://www.research2guidance.com/shop/index.php/mhealth-report-2

15

3. Les principaux freins et menaces

Le rapport 2013 de Robert PICARD26 fait le constat de difficultés dans la prospective d’un déploiement efficace et efficient de l’e-santé dans l’organisation des soins :

- Les solutions sont entre les mains des décideurs à différents niveaux : l’approche normative de l’administration et la logique de décentralisation mises en œuvre conduisent d’un côté à des solutions technologiques nationales, perçues comme rigides et pas nécessairement adaptées aux besoins opérationnels, et de l’autre à des solutions locales multiples, incompatibles, non duplicables et sources de dépenses redondantes. De plus, les promoteurs des solutions nationales et locales, visant des objectifs administratifs différents, tendent à s’ignorer mutuellement au détriment du besoin citoyen.

- La pénétration rapide et hétérogène des technologies (stratégies d’innovation des industriels, appropriation variable selon l’état de santé et l’âge du patient, et selon la formation, l’appétence et l’expérience des professionnels) accroît l’inadéquation des approches normatives et la disparité des réponses territoriales.

- Les spécialités médicales, y compris la gériatrie, ont des problématiques spécifiques qui tendent à générer des solutions également spécifiques, malgré la possibilité et l’intérêt sanitaire et économique de modules partagés, voire mutualisés.

Le Groupe Xerfi-Precepta dans son rapport « Les marchés de la e-santé à l’horizon 202027 » d’octobre 2014, confirme cette analyse en admettant que l’absence, jusqu’ici d’un positionnement clair des décideurs publics en matière de développement industriel et normatif, d’architecture et de sécurité a conduit à la cristallisation de 2 freins majeurs :

- un manque de visibilité sur les modalités de valorisation des prestations sur le segment de la télémédecine ;

- la persistance d’une distorsion de la concurrence entre opérateurs publics et privés qui se traduit par une vision opaque du système d’information hospitalier.

26 Rapport CGIET – septembre 2013 « Prospective organisationnelle pour un usage performant des technologies nouvelles en Santé ». Robert PICARD et Antoine

VIAL.

27 http://www.xerfi-precepta-strategiques-tv.com/emission/Philippe-Gattet-Les-marches-de-l-e-sante-a-l-horizon-2020_1975.html

16

4. La santé numérique : pour qui et pour quoi ?

Face à la multiplicité des offres et des solutions, la pluralité des acteurs aux logiques parfois divergentes notifiées dans le rapport PICARD mérite que l’on identifie qui fait quoi au sein de cet environnement numérique de santé afin de comprendre ce qui peut faire sens commun et ce qui est spécifique à chaque catégorie d’acteurs. Le modèle CARTOSAN28 réalisé par le CATEL29 (réseau multidisciplinaire de compétences en télésanté) permet de profiler les principaux acteurs en fonction du domaine d’exercice, de leur rôle et des fonctions attribuées. Catégories

Domaine d’exercice Rôle Fonction

Institutionnels, Collectivités territoriales

Ministère de la Santé, Industrie, Recherche, DIACT, HAS, CNAM, Caisse des Dépôts, ASIP Santé, Conseils Régionaux, Conseils Généraux, Conseil de l’Ordre, GIP CPS, GMSIH

Aménagement du territoire, Développement économique, Développement durable, Santé publique, Législatif, Normes, Code déontologique et de bonnes pratiques

Animation, Organisation, Décision Innovation organisationnelle

Associations de patients, patients

CISS, UFC Que Choisir, Malades chroniques, Usagers de santé

Bénéficiaires « consommateurs » Santé Action sociale/service à la personne

Information et communication santé, Échanges de connaissance Innovation sociale/citoyenne

Professionnels de santé et du social, Établissements et réseaux de santé publics et privés, Syndicats professionnels

URPS, CHU, CH, EHPAD, HAD

Bénéficiaires « intermédiaires » Santé, Action sociale/service à la personne

Prescription, Information et communication médicale, Echanges de savoirs Innovation professionnelle

Établissements de recherche et de formation

Universités, Institut de Formation en Soins Infirmiers, Instituts, Écoles

Formation médicale, paramédicale et sociale Formation en TIC, en informatique, en électronique, en cognitique, en SHS, en économie et gestion

Formation, Recherche Innovation pédagogique

28 Etude technico-opérationnelle (ETO) réalisée en 2009 par le CATEL et ses partenaires.

29 http://www.portailtelesante.org/users_private/CARTOSAN/CARTOSAN-nouvelle.pdf

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Industriels (produits)

Éditeurs de logiciels, Fabricants de dispositifs et de matériel informatique

Développement technologique

Conception et distribution de solutions Innovation technologique

Prestataires (services)

Association de services à la personne, Opérateur télécom, Hébergeurs de données de santé, Sociétés de conseil, Assureurs, Laboratoires pharmaceutiques, SSII (Société de services en ingénierie informatique)

Développement économique : offre de service

Proposition de solutions et de services Innovation économique

Ainsi et selon le rapport, les logiques de relations entre acteurs convergent lorsque :

- les offres technologiques, industrielles et commerciales proposées sont en adéquation avec les besoins de l’ensemble des acteurs du domaine (professionnels de santé, industriels, scientifiques, institutionnels et collectivités territoriales) ;

- les applications (projets) fournissent des bases de connaissances au modèle économique, juridique ou organisationnel centré sur l’évaluation du service médical rendu ;

- l’expérimentation de prototypage, d’intégration permet la normalisation pour l’organisation.

La dynamique de relation s’inscrit dans une logique fondée sur l’économie de marché au service de l’innovation technologique et d’une réponse productive entre l’offre et la demande. L’approche proposée par Gunther Eysenbach 30 (2001) modélise ces convergences d’intérêts en empruntant la logique des relations à celle du commerce électronique :

- le B2C : interactions entre professionnels (B de Business) et patients (C de Consumer) ;

- le B2B : relations et échanges entre professionnels ; - le C2C : échanges entre patients seuls.

30 EYSENBACH, G. What is e-health? Journal of Medical Internet Research [en ligne]. 18 juin 2001. Vol. 3, n° 2. http://www.jmir.org/2001/2/e20/

18

Figure 8 : Modélisation de la logique des relations selon Gunther Eysenbach31

Ce modèle est aujourd’hui lui-même en pleine mutation notamment avec l’émergence de l’Internet des objets (m-santé). Selon le livre blanc du G9+ 32 intitulé « Les nouveaux eldorados de l’économie connectée »33 de 2013, les modalités info-communicationnelles émanant de l’Internet des objets et de l’ensemble des dispositifs mobiles engagent de nouvelles logiques relationnelles entre les professionnels de santé, le marché industriel et les usagers, celle du « B2B2C ».

5. Les axes prioritaires de la stratégie numérique en santé

Le socle organisationnel et l’animation du volet numérique de la Stratégie nationale de santé du Ministère de la Santé et de l’Autonomie, dévoilée par le Premier ministre le 28 février 201334 s’appuient sur trois plans nationaux confiés sur les territoires aux structures institutionnelles de santé et aux collectivités territoriales : Le Programme Hôpital Numérique

Initié par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS), ce programme vise le développement et la modernisation des systèmes d’informations hospitaliers pour la période 2012-2017. Il a notamment pour ambition d’amener l’ensemble des structures de soins à un palier de maturité de leurs systèmes d’informations permettant à l’ensemble des établissements de santé :

- le partage et l’échange d’informations autour d’une prise en charge coordonnée du patient avec les différents acteurs du territoire ;

- l’amélioration significative de la qualité et de la sécurité des soins, et de la performance dans des domaines fonctionnels prioritaires autour de la production de soins tout en assurant la sécurité des données.

31 G Eysenbach - Journal of medical Internet research, 2008 - Medicine 2.0: social networking, collaboration, participation, apomediation, and openness 32 http://www.g9plus.org

33 http://cr.g9plus.org/2013-12-G9plus-NouveauxEldorados.pdf

34 http://www.social-sante.gouv.fr/strategie-nationale-de-sante,2869/

Relations C2C : Patients

TÉLÉSANTE - M-SANTÉ

Relations B2B2C : Décideurs/Professionnels de santé/Formation

recherche/Prestataires/Patients

TÉLÉSANTE- TÉLÉMEDECINE

Relations B2B: Décideurs/Professionnels de santé/Prestataires/

Industriels/Formation recherche

E-SANTE -TÉLÉMEDECINE

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Figure 9 : Le schéma fonctionnel du Programme Hôpital Numérique35

Territoire de Soins Numérique

Confié aux Agences Régionales de Santé dans le cadre des programmes d’Investissements d’Avenir, ce plan, complémentaire du programme « Hôpital numérique » a pour ambition de favoriser l’émergence de territoires à l’avant-garde en matière d’usage des outils numériques au service de l’amélioration du système de soins. Il poursuit un objectif général d’amélioration de l’état de santé de la population du territoire via le soutien aux logiques de parcours et de prises en charge coordonnées des patients en se reposant sur :

- le soutien à la mise en œuvre de démarches innovantes et proactives de prévention, d’optimisation de l’organisation des soins, du processus de prise en charge des patients, de l’utilisation des ressources et de la sécurisation du circuit du patient, en ambulatoire et en lien avec l’hôpital ;

- une coordination forte et un appui à la transversalité entre les différents acteurs impliqués dans le parcours de santé du patient (acteurs ambulatoires, établissements sanitaires, médico-sociaux, du secteur social et de la coordination, intervenant dans le parcours du patient) ;

- des systèmes d’information modernes, innovants, collaboratifs, évolutifs, ouverts à l’ensemble des acteurs de la chaîne de soins et proposant des services nouveaux aux professionnels de santé et aux patients, en soutien au développement des prises en charge innovantes et coordonnées.

Sur les 18 projets, 5 ont été sélectionnés pour leur caractère innovant et pérenne, leur adaptation aux réalités territoriales, leur capacité à mobiliser une majorité d’acteurs et leur impact escompté sur le développement des filières industrielles de l’e-santé pour la période 2014-2017, pour un financement global de 80 millions d’euros :

- pour la région Aquitaine : XL ENS (Landes Espace Numérique de Santé) ; - pour la région Bourgogne : E_TICSS (Territoire innovant coordonné santé

social) ; 35 http://www.sante.gouv.fr/le-programme-hopital-numerique.html

20

- pour la région Île-de-France : TerriS@nté (Le numérique au service de la santé en métropole du Grand Paris) ;

- pour la région Rhône-Alpes : PASCALINE (PArcours de Santé Coordonné et Accès à L’Innovation NumériquE) ;

- pour l’Océan Indien : PLEXUS OI (Plateforme d’échange pour les nouveaux usages des TIC en santé dans l’Océan Indien).

La configuration de ce programme s’appuie sur la pyramide de Kaiser qui formalise la prise en charge en fonction de l’état de santé de la population. Cette pyramide se réfère au modèle appelé Chronic Care Model (CCM) formalisé dans le rapport de 2008 sur la prise en charge des maladies chroniques36.

Figure 10 : Modèle de gestion des maladies chroniques37

Figure 11 : Pyramide de Kaiser – 3 niveaux d’intervention en fonction de la complexité du patient chronique

36 http://www.improvingchroniccare.org/index.php?p=The_Chronic_CareModel&s=2

37 Wagner EH, (1998) Chronic Disease Management : What Will It Take To Improve Care for Chronic Illness ? Effective Clinical Practice, August/September 1998.

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Structuration du marché de la Silver Economie

Organisée autour d’un contrat de filière et animée par un comité chargé de structurer le déploiement en régions des projets et des actions, la Silver Economie résulte de l’engagement politique du Ministère de l’économie et du redressement productif et du secrétariat d’état en charge des personnes âgées et de l’autonomie. Sa gouvernance nationale est confiée à la Direction Générale de la Compétitivité, de l'Industrie et des Services (DGCIS), en lien avec la Direction Générale de la Cohésion Sociale (DGCS) et la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA). 6 secteurs industriels constituent l’économie des biens et des services du marché des seniors

• Habitat : domotique, urbanisme, architecture, hébergement collectif, logement adapté (MAD), efficience énergétique…;

• Communication : téléphonie mobile, tablettes tactiles, accès Internet, réseaux sociaux...;

• Transport : transports mieux adaptés, solution à trouver au « dernier kilomètre »...; • E-autonomie : téléassistance active/passive/évoluée, bouquets de services...; • Alimentation : produits alimentaires pour personnes âgées, bouchées

alimentaires seniors... ; • Sécurité : télévigilance, téléassistance, mode de paiement, gestion bureautique...; • Santé : e-santé, nutrition, télémédecine, m-santé...; • Services : service à la personne, portage de repas, assurances…; • Distribution : adaptation du parcours du consommateur, adaptation des

packagings...; • Loisirs : jeux, fitness, stimulation sensorielle, intergénérationnel...; • Travail : télétravail, formation et soutien des aidants familiaux...; • Tourisme : tourisme des seniors…

À ce jour, 8 régions se sont engagées dans la Silver Economie en structurant le comité de Région (Silver Région) :

- Basse-Normandie - Aquitaine - Île-de-France - Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) - Nord-Pas-de-Calais - Limousin - Martinique - Pays de la Loire

La Silver Economie prend ses sources dans le rapport sur le plan national « Bien vieillir » (2007-2009)38. Ce dernier rappelle qu’entre 50 et 70 ans, il est possible d’organiser une prévention ciblée et une vie active et adaptée pour maintenir au plus haut niveau ses performances et ainsi prévenir ou retarder l’apparition de pathologies ou d’incapacités.

38 Rapport « Bien Vieillir » Ministère de la Santé et des solidarités, http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/presentation_plan-3.pdf

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La caractérisation du concept de « Bien vieillir » formalisée dans ce rapport, permet de structurer trois niveaux au processus de vieillissement :

- le processus « réussi », sans pathologie, avec peu de risques d’en développer et une grande autonomie ;

- le processus « normal » sans pathologie mais avec des risques d’en développer ;

- le processus « pathologique » marqué par de nombreux facteurs de risques, des pathologies et/ou des incapacités installées très tôt.

Figure 12 : Modélisation du vieillissement, Kalache et Kickbusch, 1997

23

QUE RETENIR ? L’écosystème numérique de santé s’appuie sur différentes briques fonctionnelles (e-santé, télésanté, télémédecine, m-santé) au service de l’organisation du système de santé et de l’habitat intelligent (domotique). Sa stratégie de développement repose sur deux programmes complémentaires (Territoire de Soins Numérique, la Silver Economie) motivés par deux enjeux de santé publique majeurs : le vieillissement de la population et la forte prévalence des maladies chroniques. Les différentes briques fonctionnelles qui composent l’écosystème offrent l’opportunité de repenser le modèle de santé à partir de la trajectoire du patient et non plus en fonction des structures composant l’offre de soins. Trois freins majeurs au développement de ce marché subsistent : dans la formalisation d’un modèle économique viable (valorisation des prestations, emploi et formation), dans la normalisation des procédures d’échanges (interopérabilité et sécurité des données) et dans la structuration de nouvelles modalités d’interactions (mobilité, communauté, auto-mesure). Les différentes briques fonctionnelles de cet écosystème engagent des modalités relationnelles différenciées entre les acteurs : - La sphère e-santé formalise des pratiques info-communicationnelles entre professionnels de santé à distance, autour de la gestion du « dossier patient ». Les enjeux pour les acteurs concernés se centrent sur la question de la dématérialisation des échanges et des documents professionnels dans un système interopérable et sécurisé. L’activité numérique du patient vise à renseigner les informations médicales. - La sphère télémédecine formalise des pratiques info-communicationnelles entre les professionnels et les patients à distance, autour de sa prise en charge. Les enjeux pour les acteurs concernés se centrent sur la question de l’organisation de la pratique médicale à distance dans un système réglementé. L’activité numérique du patient vise à participer au programme proposé (consentement libre et éclairé de la personne). - La sphère télésanté et m-santé formalise des pratiques info-communicationnelles entre professionnels-patients/patients-patients à distance autour de la gestion de leur santé. Les enjeux pour les acteurs concernés se centrent sur la question de l’accès et du contenu de l’information santé pour gérer la santé, dans un principe de maintien de la qualité de vie et du bien-être. L’activité numérique du patient vise à participer, contribuer, s’autogérer en produisant ou en utilisant l’information, à partir de dispositifs numériques disponibles et sélectionnés, soit par lui-même soit par un professionnel de santé, en fonction de ses besoins et attentes. Selon la sphère dans laquelle le patient évolue, sa fonction diffère. Ainsi, dans le cadre réglementé et sécurisé (espace numérique de confiance) de la e-santé et de la télémédecine, le patient assure une fonction « support » à la production numérique des professionnels. Dans le cadre ouvert de la télésanté et de la m-santé, le patient assure une fonction « productive » à la connaissance numérique dans un espace librement partagé

24

II. QUEL ECOSYSTÈME en FRANCE ?

1. Les tendances nationales des systèmes d’information et infrastructures numériques – Brique e-santé – Logique B2B

En structures hospitalières

Source Atlas 2014 des systèmes d’information hospitaliers39 – Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS) Analyse du marché : une offre logicielle atomisée

- 262 sociétés déclarées dans RELIMS40 [+13 % par rapport à 2013, (227)] ; - 703 logiciels déclarés [+ 23 % par rapport à 2013 (544)] ; - Plus de 70 % des logiciels sont utilisés ou utilisables par les CHU/CHR ; - Près de 80 % des logiciels dédiés aux activités médicales sont utilisables pour

l’activité « Médecine Chirurgie Obstétrique » (soit 558 logiciels). Les activités « Service de Soins de Suite et Long Séjour » sont également couvertes par plus de la moitié des logiciels.

En 2014, l’observatoire RELIMS s’est enrichi de 35 sociétés et 159 logiciels supplémentaires par rapport à 2013.

Figure 13 : Offre logicielle des activités couvertes par la structure santé en 2013

39 Atlas des systèmes d’information hospitaliers - http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Atlas_des_SIH_2014-2.pdf

40 L’observatoire RELIMS, renseigné chaque année par les éditeurs de logiciels du monde de la santé et renseigné de manière déclarative, permet de disposer d’un

référencement croissant du panel de logiciels utilisés par les établissements sanitaires mais également par les établissements médico-sociaux, les professionnels

libéraux, les maisons, pôles et centres de santé et les centres de dialyse.

Cet état des lieux distingue :

- les industriels et leur positionnement commercial, en fonction du type et de l’activité des clients ;

- les logiciels et leur type d’utilisateur ;

- les logiciels et leur type d’activité, notamment l’évaluation de la couverture logicielle des fonctions MCO et des domaines prioritaires Hôpital Numérique.

RELIMS Référencement des éditeurs de logiciels et des intégrateurs du monde de la santé : http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/RELIMS_-

_Rapport_d_analyse_des_donnees_declarees_-_Decembre_2012.pdf

558 368 301 215 216 191 117 79 52 43 30 30 21 16

MCO SRR/LS PSY HAD EHPAD Médico sociale Activité libérale

L'offre logicielle répondant à au moins une des activités couvertes par la structure de santé

Nbre de logiciels % logiciels

25

Un déploiement des SIH41 inégal en structures hospitalières sur le territoire Initiée dans le cadre du programme « Hôpital numérique », une grille d’analyse « déploiement/usages » a été mise en place en 2014, afin de suivre le niveau de déploiement informatique. A ce jour, l’informatisation du dossier patient est achevée ou en cours dans plus de 75 % des établissements. L’atteinte du socle commun du programme « Hôpital numérique » obtient une moyenne nationale de 43 % dans les cinq domaines prioritaires. Domaine d’informatisation (déploiement)

Domaines prioritaires HN (usages)

La gestion du dossier informatisé (DPI) Dossier patient informatisé interopérable La gestion des prescriptions et la gestion du dossier de soins

Prescription électronique alimentant le plan de soins

La programmation des ressources Programmation des ressources et l’agenda du patient Système d’information de pilotage Pilotage médico-économique

Figure 14 : Domaines cibles du programme « Hôpital Numérique »

Figure 15 : Programme « Hôpital Numérique », taux moyen d’attente des domaines prioritaires par région

41 Système d’Information Hospitalier

26

Figure 16 : Programme « Hôpital Numérique », équipements en structures hospitalières (PC, téléphone, accès wifi), nombre moyen

27

En activités libérales

Source « Panorama des éditeurs pour les Professionnels de Santé libéraux42 » du GIE SESAM-Vitale 2014.

Analyse du marché : un marché concentré sur la télétransmission :

- sur 265 sociétés qui composent le marché des éditeurs libéraux, 170 proposent un logiciel de facturation SESAM-Vitale, 50 proposent un logiciel métier pour les médecins ;

- 14 éditeurs représentent 80 % des médecins libéraux et 88 % des infirmiers libéraux en télétransmission ;

- seulement 55 à 60 % des praticiens utiliseraient des logiciels métiers pour gérer les dossiers patients, un agenda ou une aide à la prescription43 (cf. Fédération des Editeurs d’Informatique Médicale et paramédicale Ambulatoire, FEIMA) ;

- la synthèse médicale est réalisée par 78 % des médecins en 2013, contre 71 % en 2012 ;

- l’équipement en logiciels d’aide à la prescription est passé de 64 % en 2012 à 72 % en 2013 ;

- 98 % des infirmiers sont équipés d’un logiciel métier. Les équipements des professionnels libéraux : Ordinateurs fixes et portables, connexion Internet

- 83 % des cabinets de généralistes utilisent un ordinateur ; - 73 % des praticiens disposent d’une connexion Internet ; - 89 % des infirmiers libéraux possèdent un ordinateur ; - 86 % des infirmiers libéraux disposent d’une connexion Internet.

Smartphones, tablettes

- 98 % des infirmiers libéraux ont un mobile et 65 % sont équipés d’un smartphone ou d’un appareil numérique portable ;

- 94 % des médecins utilisent leur smartphone et 56 % possèdent une tablette tactile.

42 https://www.sesam-vitale.fr/documents/10195/22741/PanoramaEditeursPSLiberaux.pdf/24e1d33d-8937-4a55-9c02-5d81598f5b52 43 http://www.alliancy.fr/article/no-theme/2013/01/25/une-offre-it-mieux-encadree-pour-les-medecins

28

Perception de l’informatisation médicale par les usagers de santé

Depuis la réalisation d’une enquête nationale menée en 2000 sur « l’apport de l’informatique dans la pratique libérale »44, il n’existe pas à ce jour d’études récentes permettant d’évaluer la perception des usagers vis-à-vis de l’informatique médicale. La thèse de médecine de Mélanie Remoiville (2011) 45 , intitulée « L’informatisation des médecins généralistes : qu’en pensent les patients ? », actualise le regard porté sur l’intégration du tiers numérique dans le processus relationnel.

Figure 17 : Questionnaire de la thèse de médecine de Mélanie Remoiville (2011)

En Belgique, la revue « Santé conjugée »46 de 2011, coordonnée par la Fédération des Maisons Médicales et des Collectifs de Santé Francophones, publie un dossier complet sur la thématique « La place de l’informatique dans la relation de soins, point de vue des patients ». La synthèse est réalisée auprès d’un panel de 20 patients, âgés de 25 à 85 ans dans 2 maisons médicales, avec ou sans pratique numérique dans la sphère privée. Il en ressort que :

- L’informatisation médicale est considérée comme pratique : c’est un gain de temps dans la gestion des demandes de rendez-vous et dans la consultation du dossier médical par le médecin traitant. C’est un gain d’efficacité dans la gestion des demandes de rendez-vous et dans la consultation du dossier médical par le médecin traitant.

44 http://www.irdes.fr/Publications/Rapports2000/1333syntheseFormmel.pdf 45 http://www.balint-smb-france.org/medias/files/7theseremoiville.pdf 46 http://www.maisonmedicale.org/

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- L’informatisation médicale interroge sur la confidentialité et la sécurité des données : à la fois pour des questions éthiques liées au secret médical et secret partagé, pour des questions de transparence d’accès du patient lui-même à ses données, pour des questions d’utilisation des données par le patient ou par un tiers ou encore par rapport au risque de piratage des données.

- L’informatisation médicale interpelle sur la place occupée de ce tiers dans la relation en termes d’altérité, d’écoute et d’acceptabilités technologique et sociale.

Autour de l’espace numérique de confiance : MSSanté et DMP

L’espace numérique de confiance permet l’échange de données de santé à caractère personnel par mail, de manière sécurisée et ce entre professionnels de santé (messagerie interprofessionnelle) ou entre systèmes d’informations de l’espace de confiance (messagerie inter-applicative). L’espace de confiance s’appuie sur :

- un annuaire national, le RPPS (répertoire partagé des professionnels de santé) : il permet de référencer l’ensemble des professionnels de santé (libéraux ou exerçant en établissement). Cet annuaire commun définit une communauté fermée d’utilisateurs clairement identifiés ;

- une carte CPS (carte professionnelle de santé électronique) : elle contient les données d’identification de son porteur (identité, profession, spécialité) et les situations d’exercices (cabinet ou établissement) permettant d’attester de son identité et de ses qualifications professionnelles.

L’espace numérique de confiance s’articule autour de :

- l’échange d’informations en santé entre professionnels à partir du système de messagerie sécurisée en santé (MSSanté) – logique B2B ;

- le partage d’informations autour du dossier médical électronique, dont les données sont accessibles aux professionnels et aux patients (DMP) – logique B2B2C.

30

Focus sur la Messagerie Sécurisée de Santé (MSSanté)

Source bilan de l’état des lieux des messageries sécurisées de santé en région – ASIP Santé, Février 201447 Cartographie d’usages L’état des lieux mené en 2013 par l’ASIP Santé dresse le constat suivant :

- environ 5 % des professionnels de santé en France utilisent une messagerie sécurisée ;

- 1/3 des médecins français communiquent par email avec leurs confrères sur leurs patients ;

- les usages de solutions régionales (qualifiées sur 16 régions) représentent environ 25 000 professionnels de santé soit 2,2 % des professionnels de santé en France ;

- les utilisateurs de la solution Apicrypt48 (qualifiée sur la base de l’annuaire Apicem) représentent plus de 55 200 adhérents au 1er février 2015. Ce sont principalement des médecins libéraux (7 % d’usages par les établissements de soins).

Figure 18 : Etat des lieux en région, ASIP Santé Juin 2013

47 https://www.esante-poitou-charentes.fr/portail/gallery_files/site/397/398/1172.pdf

48 http://www.apicrypt.org

31

Figure 19 : Etat des lieux en région du déploiement des projets MSSanté, ASIP Santé Juin 2013

Perception de la MSSanté par les professionnels de santé

L’analyse des motivations et des freins d’usages réalisée par Accenture « The Digital Doctor is “In” »49 en 2013 à travers un rapport d’étude mené auprès des médecins en vue de comprendre les changements de tendance en France, en matière d'informatique médicale met en évidence les points suivants :

Sur les motivation d’usages Sur les freins d’usages Réduction des délais (envoi des comptes-rendus) ; Coordination des soins ; Optimisation des coûts d’affranchissement ; Dématérialisation des processus ; Sécurisation des échanges de données de santé à caractère personnel.

Coût pour l’activité ; Inquiétude sur la confidentialité et sécurité des données des patients ; Perte de productivité, temps de saisie ; Complexité du système ; Problèmes d’interopérabilité entre les systèmes ; Manque d’expertise technique pour gérer la mise en œuvre ; Difficulté d’accès à l’ordinateur ; Manque de compétences informatiques.

49 http://www.accenture.com/SiteCollectionDocuments/PDF/Accenture-Digital-Doctor-Is-In-UK.pdf

32

Focus sur le Dossier Médical Partagé/Personnel (DMP) – LOGIQUE B2B2C

Le DMP est un dossier médical informatisé accessible via Internet. Il contient les informations et documents médicaux que les professionnels de santé estiment utiles à la coordination des soins. Il présente la particularité d’être créé par le médecin lors de la consultation et peut être administré par lui-même et le patient. Il est organisé en 8 espaces :

- Synthèse - Traitement - Compte-rendu - Analyses - Prévention - Certificat - Espace Perso

Figure 20 : Organisation de l’espace de confiance autour du DMP50 Cartographie d’usages Source ASIP Santé 2014 et espace DMP.gouv 51

- 538 496 DMP créés à fin avril 2015 ; - 244 000 DMP alimentés avec 5,2 documents en moyenne à la mi-mai 2014 ; - 1 280 000 documents médicaux dans les DMP en 2014 ; - 4 régions expérimentatrices dès 2011 (Alsace, Aquitaine, Franche-Comté et

Picardie), 14 régions en 2015 ; - 616 établissements utilisateurs à fin avril 2015 et 5 780 professionnels de santé

libéraux à la mi-mai 2014 ; - 141 logiciels homologués DMP compatibles.

50 Ateliers ASIP SANTE - Le DMP et les messageries sécurisées de santé au service des parcours de soins Salons Santé et Autonomie - 20 mai 2014

51 http://www.dmp.gouv.fr/nb-dmp-par-region

33

Sur les 1 280 000 documents médicaux contenus dans les DMP :

Figure 21 : Contenu du DMP52

Figure 22 : Cartographie nationale du déploiement DMP en France53

52 Ateliers ASIP SANTE, Le DMP et les messageries sécurisées de santé au service des parcours de soins Salons Santé et Autonomie - 20 mai 2014 53 http://www.dmp.gouv.fr/nb-dmp-par-region

34

PRADO (programme d'accompagnement au retour à domicile après hospitalisation) : un programme de l’assurance-maladie Initié en 2014, ce projet vise à accompagner le retour à domicile du patient et à fluidifier le parcours hôpital-ville. L’approche se fait par pathologie (maternité, orthopédie, insuffisance cardiaque). Un test de promotion du DMP a ciblé les PRADO « Orthopédie » et « Insuffisance Cardiaque ». Il implique une douzaine d’établissements des régions Alsace, Aquitaine, Centre, Île-de-France et Picardie. Le Conseiller de l’Assurance Maladie (CAM) passe dans les chambres et propose au patient d’adhérer au PRADO, il lui propose en même temps de créer son DMP et recueille son consentement. Le DMP est créé dans l’établissement et alimenté avec le document de sortie. Le CAM appelle les professionnels de santé chargés de la coordination du patient dont les noms lui ont préalablement été communiqués par le patient, pour organiser des consultations en sortie d’hospitalisation. Il informe ces professionnels de santé que le patient dispose d’un DMP qui contient le document de sortie. Le patient se rend chez les professionnels de santé concernés, qui consultent son DMP et l’alimentent avec un document de synthèse (VSM, bilan kiné…).

Perception du DMP par les professionnels de santé et les patients En partenariat entre l’ASIP Santé et Ipsos Santé, le dernier « baromètre de notoriété et d’image »54 de mars 2012 identifie les points suivants : Perception des médecins :

- 79 % des médecins se sentent mal informés et restent peu conscients de l’avancée du déploiement du Dossier Médical Personnel : 24 % savent qu’il existe déjà ;

- 77 % des médecins interrogés se déclarent favorables à la mise en place du Dossier Médical Personnel (80 % chez les médecins hospitaliers et 73 % chez les médecins généralistes) ;

- 63 % des médecins (toutes spécialités confondues) se déclarent prêts à recommander le DMP à leurs patients, les médecins généralistes sont plus réservés (57 %) que les spécialistes. Les réticences sont principalement liées au besoin d’être rassuré sur la sécurité et la confidentialité, sur le risque de lourdeur et parfois sur la crainte liée au contrôle par le patient.

54 Dossier Médical Personnel : baromètre de notoriété et d’image de mars 2012 - http://esante.gouv.fr/sites/default/files/BrochureASIP_Ipsos_web_0.pdf

35

Perception des usagers de santé : - 42 % des Français déclarent avoir entendu parler du Dossier Médical Personnel

(après définition), sans qu’aucune communication grand public n’ait encore été déployée. Cette notoriété est plus élevée auprès des personnes âgées de plus de 65 ans (48 %), des femmes (47 %), des patients chroniques (47 %) et des plus gros utilisateurs d’informatique pour leur santé (56 %).

- 84 % ont une bonne opinion du DMP. La part des « très bonnes » opinions augmente avec l’âge et est plus importante chez les patients chroniques (18 %).

Les bénéfices perçus sont :

- faciliter le partage d’informations médicales entre médecins : 92 % ; - améliorer le suivi du patient entre l’hôpital et les médecins de ville : 89 % ; - faire gagner du temps aux médecins : 88 % ; - faciliter l’accès du patient à son propre dossier médical : 83 % ; - éviter les examens ou prescriptions inutiles : 79 % ; - développer l’implication du patient dans son suivi médical : 74 % ; - améliorer la qualité des soins : 72 %.

2. Les tendances nationales de la télémédecine - Brique TELEMEDECINE – logique B2B (industriels/professionnels)

Trois éléments orientent la présentation de l’état des lieux de la télémédecine en France :

- une évaluation quantitative proposée par la DGOS permettant de recenser de manière exhaustive les activités de télémédecine55 ;

- une évaluation qualitative fondée sur la valeur médico-économique et les gains potentiels, telle que proposée par la Haute Autorité de Santé56 ;

- l’enquête d’opinion portant sur le rapport entretenu entre la pratique de télémédecine et les usagers de santé (FHF et Fondation pour l’Avenir)57.

Le recensement des activités de télémédecine – DGOS : évaluation de la maturité du déploiement en fonction des chantiers prioritaires

Source DGOS « La preuve par 10 : Principaux enseignements du bilan du PRT et du recensement des projets de télémédecine en France en 2013 ». Le recensement des activités de télémédecine s’appuie sur le retour d’information des référents des 26 ARS en région. Il se base sur la stratégie nationale de déploiement de la télémédecine en France qui identifie 5 chantiers nationaux prioritaires :

- permanence des soins (PDS) en imagerie médicale ; - prise en charge des accidents vasculaires cérébraux (AVC) ; - santé des personnes détenues ;

55 http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Telemedecine_Plaquette_Communication_DGOS.pdf

56 Efficience de la télémédecine : état des lieux de la littérature internationale et cadre d’évaluation, HAS (2011),

http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2013-07/efficience_tlm_vf_2013-07-18_14-48-38_743.pdf 57 http://www.fondationdelavenir.org/portail/wp-content/uploads/cp_enquete_telemedecine_161012.pdf

36

- prise en charge d’une maladie chronique : insuffisance rénale chronique, insuffisance cardiaque, diabète ;

- soins en structure médico-sociale ou en hospitalisation à domicile (HAD). 331 projets de télémédecine sont recensés sur les 26 régions françaises en 2013 soit + 48 % par rapport à 2011. Les principaux résultats de ce bilan mettent en évidence les points suivants : Des projets majoritairement orientés sur les priorités nationales et en téléconsultation et téléexpertise (78 %)

- 187 projets soit 56 % concernent la permanence des soins en imagerie (PDS), la prise en charge des AVC ou des maladies chroniques ;

- 20 régions sur 26 ont au moins un projet de télésurveillance.

Figure 23 : Répartition des projets de télémédecine par priorité nationale (Bilan DGOS télémédecine)

Figure 24 : Répartition des projets de télémédecine par type d’actes (Bilan DGOS télémédecine)

37

Des projets à dominance « tout public » et ciblés sur la prise en charge des maladies chroniques

Figure 25 : Répartition des projets de télémédecine par typologie de patients (Bilan DGOS télémédecine)

Figure 26 : Répartition des projets de télémédecine selon les maladies chroniques (Bilan DGOS télémédecine)

38

Constance de la prédominance hospitalière dans le déploiement des projets de télémédecine (57 % en 2011)

Figure 27 : Répartition sectorielle des projets de télémédecine en 2013 (Bilan DGOS télémédecine)

Une articulation inter-structure à géométrie variable :

- 30 % des projets impliquent le secteur ambulatoire ; - 96 % des projets concernent au moins 1 établissement de santé ; - 4 % des projets sont extrahospitaliers.

Figure 28 : Répartition sectorielle des projets de télémédecine en 2013 par catégorie d’acteurs (Bilan DGOS télémédecine)

39

Cartographie Nationale des projets de télémédecine

Figure 29 : Evolution de la répartition des projets par région en 2013 par rapport à 2012

Le rapport entre la pratique de la télémédecine et les usagers de santé

Source FHF « Les Français et l’hôpital public 58», enquête d’opinion TNS Sofres du 27 au 30 mars 2013, résultats avril 2013. A la demande de la FHF (Fédération Hospitalière de France), l’organisme TNS Sofres a réalisé un sondage d’opinion auprès de 1 011 individus représentatifs de la population française, âgés de 18 ans et plus. Le mode de recueil s’est effectué par interview en face-à-face à domicile par le réseau des enquêteurs TNS Sofres. Le terrain s’est déroulé du 27 mars au 30 mars 2013. Les résultats soulignent les tendances suivantes :

- 59 % des personnes interrogées sont prêtes à avoir recours aux nouvelles technologies pour la transmission de leurs analyses de laboratoire, prises de sang, imageries interprétées par un professionnel de santé à distance.

- Si les 25-34 ans, très à l’aise avec les nouvelles technologies, se montrent prêts à avoir recours à la télésurveillance médicale (70 %), plus d’une personne sur 2, âgée de 65 ans et plus, se montre réticente.

- 53 % des Français sont également enclin à prendre un avis complémentaire auprès d’un professionnel de santé ou de faire préciser des informations données par leur médecin traitant par téléphone, visioconférence ou messagerie.

58https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=2&ved=0CCwQFjAB&url=http%3A%2F%2Fwww.fhf.fr%2Fcontent%2Fdownload%2F72925%2

F476022%2Fversion%2F1%2Ffile%2FLes%2BFran%25C3%25A7ais%2Bet%2Bl%2527H%25C3%25B4pital%2Bv3-

V%2BDEF.pdf&ei=WAVbVaHxBciAU6fQgYgI&usg=AFQjCNH9XF5Awsj5t1yzc9vXs_VeYRm8Zw&sig2=QLhVdshfm1CbRWh9ZklMMw&bvm=bv.93564037,d.d24

40

- Les personnes âgées (45 %) et les retraités et inactifs (50 %) sont plus réticents à utiliser ce procédé.

- Pour obtenir un diagnostic médical à distance, les Français se montrent moins ouverts. Seulement 37 % se disent pour.

- Les jeunes de 18-24 ans sont majoritairement contre (74 %), comme les habitants des zones rurales touchées par la désertification médicale (69 %).

3. Les tendances nationales de la télésanté et m-santé – logique B2B2C (professionnels/industriels/patients)

Internet et santé (téléinformation)

Devant le processus de médiatisation de la santé permettant à chacun d’accéder à un portail grand public, la téléinformation est soumise à une dualité conceptuelle autour de la notion d’information. Pour les professionnels de santé, l’acception de l’information renvoie au sens d’une production de données par les spécialistes, encadrée et légiférée par des autorités professionnelles telles que le Conseil de l’Ordre des Médecins. L’utilisation d’Internet a modifié cette configuration en proposant au grand public une information santé, au contenu vulgarisé, peu contrainte par la loi et produite par des acteurs multiples, ce qui questionne sur la fiabilité et la qualité du contenu. C’est la raison pour laquelle la HAS (Haute Autorité de Santé) de 2009 à 2013 a proposé un contrôle et une certification des sites dédiés à la santé selon les principes du HONcode59. A ce jour, 882 sites français répondent aux critères de l’HONCode sur 3 800 000 pages mises à jour quotidiennement. Au regard des évaluations réalisées, la certification améliore la qualité des sites de santé notamment dans le respect des principes de transparence et de bonnes pratiques éditoriales, mais ne permet pas de garantir la qualité du contenu des sites. C’est pourquoi, la HAS travaille actuellement à la construction d’un dispositif qui privilégie l’esprit critique des internautes par l’identification de « repères » permettant de les accompagner dans cet apprentissage. En illustration de ce foisonnement d’offres proposées sur le marché, l’analyse typologique d’Hélène Romeyer (2010)60 et le mapping61 de Fabrice Vezin aident à caractériser les services proposés en fonction des acteurs.

59 La fondation suisse Health On the Net (HON) (La Santé sur Internet) est l’organisme en charge de la certification dans le cadre d’une convention de partenariat

avec la HAS. La certification est gratuite pour l’éditeur de site et repose sur une démarche volontaire de ce dernier.

60 Hélène Romeyer, « La santé en ligne », Communication [En ligne], Vol. 30/1 | 2012, mis en ligne le 23 février 2012, consulté le 19 mai 2015. URL : http://communication.revues.org/2915 61 https://www.mindmeister.com/fr/240071051/typologie-des-services-et-sites-d-informations-sant-pour-le-grand-public-et-les-m-decins-by-lemondedelaesant

41

Figure 30 : Typologie des sites de santé, Hélène Romeyer, 2012

Les raisons de l’utilisation d’Internet en santé Selon le baromètre de l’INSEE sur l’usage d’Internet en 201362, 1 personne sur 2 a déjà utilisé Internet pour chercher ou partager des informations de santé. L’étude de Patients & Web et de Lauma Communication sur la thématique « A la recherche du ePatient : Les Français et l’internet santé • Maladie chronique et numérique attitude »63 la même année en détaille les motifs :

- 92 % des recherches réalisées par les internautes portent principalement sur une maladie ou un problème de santé et dans la moitié des cas, elles concernent des maladies chroniques (cancer, diabète, insuffisance rénale) ;

- 63 % des consultations s’orientent vers des recherches autour des traitements/médicaments ou des témoignages d’autres personnes ;

- 61 % des panelistes estiment que les informations trouvées sur lnternet permettent de mieux prendre en charge sa santé ou celle d’un proche ;

- 58 % considèrent que les échanges de la relation médecin-patient sont plus riches et renforcent la confiance ;

- 19 % des recherches sont réalisées avant une consultation. Dans 53 % des cas, c’est pour mieux comprendre ce que le médecin va dire et dans 42 % des cas, c’est pour pouvoir discuter du traitement avec lui ;

- 34 % des recherches sont réalisées après une consultation. Dans 72 % des cas, c’est pour chercher des informations complémentaires sur la maladie ou sur des médicaments et traitements (44 %).

62 http://insee.fr/fr/ffc/ipweb/ip1452/ip1452.pdf http://insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1452#inter1 63 Étude réalisée par téléphone du 4 au 16 février 2013 pour Patients & Web auprès d'un échantillon national de 1 002 personnes représentatif des Français âgés de

18 ans et plus. Méthode des quotas (sexe, âge, PCS du chef de famille, région de résidence et catégorie d'agglomération). http://www.patientsandweb.com/wp-

content/uploads/2013/04/A-la-recherche-du-ePatient-externe.pdf

42

Si la téléinformation s’inscrit dans les pratiques usuelles de recherche d’information, des freins à l’utilisation persistent de la part des panelistes. Les raisons du non-usage d’Internet en santé :

- 54 % privilégient la relation physique et réelle avec le médecin ou le pharmacien ;

- 25 % n’ont pas le réflexe ; - 21% ne le font pas car ils ne sont pas connectés ; - 3 % ne savent pas se servir d’Internet.

L’étude de Patients & Web réalisée permet de dresser pour la première fois une classification des usages en fonction de la typologie d’utilisateurs « usagers de santé ».

- Les « Déconnectés » (15 %), distants d'Internet et réticents à l’utiliser pour s'informer sur la santé, sont principalement des seniors. Ils ont peu d'attentes de services en ligne et seule la garantie des informations par leur médecin ou les professionnels de santé les séduit un peu.

- Les « Méfiants » (24 %), ils n'ont pas – encore – assez confiance en Internet pour s'informer sur la santé. Ils sont intéressés par la garantie des informations par leur médecin (55 %) et la prise de rendez-vous en ligne (66 %).

- Les « Détachés » (12 %), connectés, ils n'éprouvent pas le besoin de s'informer sur la santé ou n'en ont pas le réflexe. Garantie des informations par les professionnels de santé (53 %), prise de rendez-vous en ligne (65 %) et accès aux résultats d'analyse médicale (63 %) les intéressent.

- Les « Occasionnels » (23 %), utilisant ponctuellement Internet pour s'informer, ils n'en sont pas encore à l'utiliser pour dialoguer. Ils souhaitent accéder aux résultats d'analyses médicales (70 %) et à leur dossier médical (69 %) en ligne, prendre rendez-vous (69 %) et échanger par e-mail avec leur médecin (61 %).

- Les « Adeptes » (13 %), utilisant fréquemment Internet pour s'informer sur la santé et rester en bonne santé, leurs attentes sont les mêmes que celles des « Occasionnels » mais elles sont encore plus fortes (analyse médicale 76 %, dossier médical 71 %, prise de rendez-vous 69 %, échange par e-mail 65 %).

- Les « Communicants » (13 %), allant fréquemment sur Internet pour rechercher des informations médicales, ils sont également contributifs via leur dialogue sur le Web avec des patients ou des médecins. 77 % d'entre eux souhaitent accéder à leur analyse médicale sur le Web et 70 % à leur dossier médical. 77 % aimeraient prendre rendez-vous via Internet, 69 % échanger par e-mail et plus d'1 sur 2 (51 %) échanger en visio-conférence, visiophonie avec leur médecin.

Ce profilage vient compléter celui réalisé en 2010 par le Germs (Groupe d’études et de recherche en marketing santé) et de son Master marketing de la santé dans l’étude intitulée « Les acteurs de la santé face à Internet : étude sur la perception de l’Internet Santé 64» qui fait apparaître des différenciations liées à l’âge (nombre de consultations moins important pour les 18-25 ans que pour les plus de 56 ans).

64 http://www.annuaire-secu.com/pdf/master-marketing-sante-130410.pdf

43

Figure 31 : Profil des usages d’Internet en santé – dans « Les acteurs de la santé face à Internet : étude sur la perception de l’Internet Santé », Germs, 2010

Web social et santé (télécollaboration)

La collaboration à distance interpelle, comme pour la téléinformation, le cadre conceptuel de l’acception du terme. Dans le cadre de l’espace collaboratif entre médecin-patient, répondant aux principes du colloque singulier, le livre blanc du CNOM « Déontologie médicale sur le Web65 » rédigé en 2011 rappelle que, si les dispositifs numériques tels que les forums, les blogs et les réseaux sociaux offrent des possibilités de partage et d’échanges bénéfiques à la relation médecin-patient, les principes élémentaires du code de déontologie doivent être respectés notamment en ce qui concernent :

- la protection de la confidentialité des patients ; - le respect d’une certaine « distance relationnelle » entre médecins et patients

notamment dans le champ des réseaux sociaux ; - le rappel que l’exercice de « téléconseil » doit s’inscrire dans le cadre d’une

information personnalisée à la demande d’un internaute et qu’en tant que modérateur potentiel de forum, le médecin doit rappeler la nécessité d’une consultation médicale lorsque l’information du patient devient personnalisée.

Dans le cadre de l’espace collaboratif entre patients, la multiplication de sites communautaires, modérés ou non par des professionnels de santé, permet à l’usager de

65 http://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/livre_blancdeontoweb2012.pdf

44

participer à la production et la diffusion de contenus autour de récits de vie, de témoignages, de partage d’expériences. A ce jour, il n’existe pas d’enquête d’envergure permettant d’identifier les motivations d’usages et de caractériser de manière exhaustive les pratiques réalisées. La thèse de Raphaëlle Laubie, « Comprendre les déterminants de l’action collective en ligne : le cas des patients 2.0 66 » ayant comme terrain d’étude les utilisateurs de la plateforme « Cancer Contribution », attribue aux productions numériques réalisées sur cette plateforme des valeurs d’usage (Valeurs utilitaires/valeurs sociales/valeurs hédonistes-bien-être) qu’elle réalise à partir d’entretiens et de questionnaires en ligne.

Figure 32 : Modélisation des déterminants de l’action collective, Laubie (2014)

M-santé et objets connectés (télévigilance, monitoring, majordome, prescription)

Selon le dernier livre blanc du CNOM de Janvier 2015 « Santé connectée – de la e-santé à la santé connectée »67, le volume mondial des applications mobiles de santé est passé de 6 000 en 2010 à 20 000 en 2012 et 1 000 000 en 2013. En France, sur une veille de 4 000 applications santé/bien-être (réalisée par la société DMD68) on observe que 60 % sont destinées au grand public et 40 % aux professionnels de santé. Cependant, la tendance serait en train de s’inverser. Avec 27 millions de possesseurs de smartphones en France en 2013 (soit 50 % de la population française de 11 ans et plus), 7 millions sont des mobinautes santé et 1/3 sont atteints de maladies chroniques. Sur cet effectif, 22 % ont téléchargé au moins une application (2,3 applications en moyenne). 52,9 % des mobinautes santé atteints d’une maladie chronique souhaitent que leur médecin leur conseille des applications mobiles de santé69.

66 http://raphaellelaubie.com/wp-content/uploads/2014/03/Thesis-EDBA_Raphaelle-Laubie_March-17-2014.pdf 67 http://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/medecins-sante-connectee.pdf 68 DMD créé en 2012, s’est donné comme mission d’une part d’évaluer les applications santé et d’autre part de formaliser un label qualité « MHealth Quality » à partir

du programme scientifique européen actuellement en cours de réalisation. 69 A la recherche du e-patient, http://www.patientsandweb.com/wp-content/uploads/2013/04/A-la-recherche-du-ePatient-externe.pdf

45

Malgré l’intérêt des patients pour la santé mobile relevé dans le livre blanc, le baromètre « Santé 360 », d'Orange Healthcare et de la MNH réalisé par ODOXA70 en janvier 2015 sur la santé connectée, affine ces tendances à partir :

- d’un échantillon grand public composé de 1 016 personnes représentatives de la population française âgée de 18 ans et plus ;

- d’un échantillon de 406 personnes atteintes de maladies chroniques ou d’affections longue durée 5ALD) issues d’un échantillon représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus ;

- de 399 médecins spécialistes et généralistes.

L’utilité de l’implication du patient dans le traitement et le suivi de la maladie varie en fonction du statut de l’usager de santé : « normal » ou « pathologique ».

Figure 33 : Utilité perçue d’impliquer le patient dans le traitement et le suivi de sa maladie

Les objets connectés sont sous-utilisés au regard de leur potentiel d’accueil dans la société. Les objets connectés ne sont aujourd’hui prescrits qu’à 5 % des patients alors que le haut niveau d’utilisation et de familiarité des Français à ces objets permettrait d’en étendre largement l’usage… Les médecins sous-estiment largement la capacité de leurs patients à accepter ce type d’objets. Les objets connectés sont jugés particulièrement adaptés à nombre de patients… …et tout particulièrement à ceux souffrant d’ALD et de maladies chroniques… dès lors les objets connectés médicaux liés aux maladies respiratoires et à l’HTA sont ceux qui sont le plus souvent cités comme utiles.

70 Baromètre santé 360 – La santé connectée - Janvier 2015, https://www.mnh.fr/espace_info/actualites/201501_baro-sante360-sante-connectee.pdf

46

Figure 34 : Leviers identifiés par les patients et médecins pour une plus large utilisation des objets

de santé connectée

Il existe un fort consensus sur l’utilité des objets connectés Les Français, les médecins et les patients sont quasi-unanimes à percevoir la santé connectée comme une opportunité pour la qualité des soins (67 % du grand public, 72 % des patients et 81 % des médecins) et une opportunité d’améliorer la prévention (78 % du grand public, 80 % des patients et 91 % des médecins). La santé connectée séduit, mais elle fait peur aussi Un quart à un tiers des médecins et des patients perçoit la santé connectée comme une menace pour la liberté des patients, et un sur deux comme une menace pour le secret médical. Comment développer la santé connectée ? Patients et médecins considèrent que mieux informer les médecins est la clé n°1 pour développer l’usage des objets connectés. Les autres pistes concernent la meilleure adaptation du service lui-même, et pour les patients, de meilleures garanties sur la confidentialité des données.

47

Figure 35 : Les raisons perçues d’une utilisation limitée

48

QUE RETENIR ? Les différentes briques sectorielles de l’écosystème numérique de santé ont atteint un niveau de maturité industrielle favorable au développement bien que celles-ci se déploient de manière uniforme. La caution d’une acceptabilité technique et sociale par les professionnels et les patients n’interdit pas des usages et des pratiques numériques polymorphes, variant en fonction des enjeux, de l’utilisabilité technique et sociale accordée à ces dispositifs et des régimes d’engagement entre les différents acteurs. Sur les usages e-santé : Le déploiement des offres et des services sont prioritairement centrés sur les solutions « métiers » professionnelles répondant à une logique de dématérialisation des documents papier en version numérique, perçue par les médecins et les patients comme un gain d’efficacité. Les services de partage et d’échanges de la MSSanté et du DMP, répondant au cadre réglementaire de l’espace numérique de confiance entre professionnels, sont intégrés de manière inégale sur le territoire. Les freins évoqués sont la complexité et les coûts nécessaires à la mise en conformité pour le professionnel de santé, notamment en libéral. Sur les usages télémédecine : Ancrés depuis 2003 dans les pratiques médicales, les actes de soins à distance bénéficient d’un cadre réglementaire favorable au développement d’un capital confiance auprès des professionnels de santé. Considérée comme une pratique médicale, la télémédecine nécessite des compétences numériques et de l’expertise médicale du professionnel. C’est un outil d’expertise ou de consultation afin d’échanger et de partager le savoir médical autour des prises en charge complexes ou nécessitant un suivi régulier (maladies chroniques, personnes âgées). Loin d’être une pratique généralisée, les projets de télémédecine restent néanmoins une démarche hospitalo-centrée et ont du mal à s’inscrire dans le cercle collaboratif ville-hôpital. Sur les usages télésanté et m-santé : Portées par la démocratisation de l’information santé via Internet, la télésanté et la m-santé favorisent la participation de l’usager citoyen et du patient dans la gestion curative et préventive de sa santé. Ce dernier, en produisant de l’information, transforme les postures relationnelles du médecin « sachant » et du patient profane. Néanmoins, en fonction de son état de santé, et de l’âge, la contribution du patient à la gestion de sa santé diffère. Si elle est réclamée autant par les médecins que les patients dans le cadre « pathologique » des maladies chroniques et de l’avancée en âge, le médecin reste le gardien, le tuteur gestionnaire du quotidien de l’usager en contexte « normal ». En bien et lieu commun à tous les acteurs, les usages numériques en télésanté et en m-santé sont une opportunité pour améliorer la qualité des relations et devient un support à l’observance thérapeutique. La question de la confiance reste centrale pour le professionnel comme le patient en termes de confidentialité des données médicales. A ce titre, le médecin reste le référent pour conseiller et prescrire les dispositifs adaptés aux attentes et aux besoins des patients. Il est nécéssaire de mobiliser de nouvelles compétences pour accompagner ces nouveaux usages.

49

Figure 36 : Proposition de schématisation de la typologie du patient en fonction de la pathologie et

de ses bases de connaissances

50

III. QUEL ECOSYSTÈME en AQUITAINE ?

1. Cartographie des équipements et des services numériques de télésanté et m-santé

Cartographie du marché industriel de la télésanté en Aquitaine

Source : Rapport d’activité 2013 Cluster TIC Santé aquitain71 et base de données annuaire des adhérents Adeiso)72 Les offres et les services de télésanté et de m-santé développés en Aquitaine sont globalement concentrés sur la télécollaboration entre professionnels et la télésurveillance/télémonitoring des professionnels avec les patients autour de pathologies spécifiques. Le développement d’applications mobiles en santé en Aquitaine reste timide avec une seule application développée et adaptée à un projet connexe : « mesvaccins.net ».

Figure 37 : Cartographie des solutions développées de télésanté/m-santé en Aquitaine Industriels Dépt Solution développée Télésanté/m-santé Télésanté - Isa

33 Plateforme info Santé Aquitaine Téléinformation patients

Télésanté – ma santé Services e-santé patients Télécollaboration m-santé Télésanté – pro Services e-santé professionnels Télécollaboration m-santé Allo Docteurs 24 Prise de rdv par Internet Télécollaboration pro/patients Sanofi 33 Annuaire médico-social Télécollaboration pro/patients Mesvaccins.net 33 App. mobile patients/pro Télécollaboration pro/patients MCI services

33

Plateforme CEPPIA Télécollaboration pro/patients Plateforme IDIAS Télécollaboration pro/patients Plateforme RESPIR Téléformation pro

K-Lab 33 App. mobile dossier patient Télécollaboration pro Domicalis 33 Plateforme logicielle web Télécollaboration pro Wiidii 33 Application mobile perso pro Télécollaboration pro/patients Wopata 33 Sté développement app Télécollaboration pro/patients Symbio System 33 Dispositifs de télévigilance Télésurveillance patients Aqsitania 33 Télésurveillance IR*- R** Télésurveillance m-santé Doado 33 Application mobile patient Télésurveillance m-santé LNC 33 Plateforme de soutien nutrition Télésurveillance, collaboration

Ap. mobile patient bariatrique Télésurveillance m-santé eDevice 33 Capteurs et DM*** connectés Télémonitoring m-santé EOVE 40 Dispositif connecté Télémonitoring m-santé Onéla 33 Plateforme de services Télémajordome Université de Bordeaux 33 Enseignement à distance Téléformation étudiants santé Itwell 33 Information santé intelligente Téléanimation, collaboration Interaction Healthcare 33 Serious game Téléanimation Zippyware 33 Serious game Téléanimation patients Nutrikeo 33 Développement PLAN’EAT Téléanimation pro/patients Abracadacook 33 App.mobile menu alimentaire Téléconseils m santé public

* Insuffisance Cardiaque ** Respiratoire *** Dispositifs Médicaux

71 http://cluster-tic-sante-aquitain.com/rapport-d-activite-2013

72 http://adeiso.com/

51

Codes couleurs par type d’offres et de services Téléinformation Télécollaboration Téléformation Télésurveillance, télémonitoring Téléanimation L’une des particularités majeures de cet écosystème tient dans l’équilibrage des forces industrielles sur la totalité des briques fonctionnelles, ce qui lui confère une dynamique distinctive par rapport à d’autres territoires. En chiffre, sur les 74 entreprises régionales identifiées sur ce secteur, 30 % concernent l’édition de logiciels, 26 % proposent des solutions diffusables (télémédecine, télésanté, m-santé), 10 % permettent l’hébergement de données de santé et 6 % favorisent le maintien à domicile des personnes dépendantes.

Figure 38 : Répartition des typologies d’activités industrielles de l’écosystème numérique aquitain

(source Cluster TIC Santé aquitain)

Concernant l’activité de téléinformation, il n’existe pas à ce jour de cartographie permettant d’avoir une visibilité complète de l’offre informationnelle numérique aquitaine disponible sur le territoire. La seule possibilité d’exploitation de base de données est celle proposée par le HONcode. Or, les indicateurs retenus à la certification ne permettent pas d’avoir une exhaustivité des solutions.

30%

26%

21%

10%

6% 4% 3%

Edition logiciels

Solutions TIC utilisables au secteur santé

Audits, réalisation d'études stratégiques, conseil

Hébergement de données de santé, sécurité des données

Dispositifs médicaux

Services de maintien à domicile des personnes dépendantes

Autres

52

En revanche, les éléments d’identification obligatoire à la certification quant aux auteurs et aux hébergeurs de site, offrent l’avantage de catégoriser le recensement en fonction des différentes applications attribuées à la brique « Télésanté ». Cartographie des sites issue du recensement des sites HONcode

Figure 39 : Recensement des sites certifiés HONCode sur l’Aquitaine en 2015

Caractérisation des sites certifiés Typologie télésanté 24 33 40 47 64 Présentation structure de soins

Téléinformation

3 Présentation et Formation 1 1 Association grand public 1 2 Association médicale – société savante 5 2 Présentation cabinets médicaux 3 21 3 4 12 Présentation laboratoires, pharmacies 2 Sites conseils prévention grand public 3 1 Blog information santé grand public Télécollaboration 1 Communauté doc professionnelle Télécollaboration,

Téléformation 2

Comparateur mutuelles Téléinformation 2 App public/pro Mesvaccins.net Télécollaboration,

Télésurveillance 1

App public/pro Santevoyage-guide.com 1 Total 4 42 17

La pratique de certification de l’information de santé est peu développée en Aquitaine, y compris sur des sites institutionnels à qui l’on confère une légitimité naturelle. Ainsi, par exemple, le site de Télésanté Aquitaine, qui offre pourtant un bouquet de services informationnels en fonction du public (grand public, professionnel de santé), de la trajectoire du patient ou des outils de gestions (DMP), n’est pas certifié.

53

2. Cartographie des différents programmes d’expérimentation « télésanté » financés en Aquitaine depuis 2012

(SOURCE ORIS73, Faire avancer la santé numérique en Aquitaine, Aquitaine Numérique, Tour de France du Numérique FORMATICSanté74) Cette cartographie permet de dresser l’état des lieux des différents programmes d’expérimentation ayant fait l’objet d’un financement par les pouvoirs publics. Projet Objectif Dépt. Cible Dom Assist Fournir aux personnes âgées autonomes ou en perte

d’autonomie et à leurs aidants (professionnels ou familiaux) une plateforme ouverte d’applications d’assistance numérique (Dom Assist). L’assistance porte sur le lien social (communication augmentée), la suggestion d’activités culturelles, la gestion de tâches (courses, préparation des repas…)…

33 48 patients

PAACO Proposer à un certain nombre d’acteurs de la santé, une plateforme régionale numérique pour la communication et la coordination en santé (dispositif de système d’information partagée).

33,24 12 structures 250 patients

PAACO+ Proposer aux infirmiers libéraux de la santé, une plateforme répondant aux conditions de mobilité, en vue de gérer les activités à domicile.

40 50 infirmiers

ALLIAGE Préconiser sous licence libre une solution couvrant un ensemble de thématiques complètes : e-santé, bien-être et prévention, domotique, services à domicile, informations mais aussi des jeux, à destination des aidants, des aidés et les familles.

24,33, 40,47,

64

50 patients

PELICAN Favoriser des liaisons concrètes et sécurisées entre professionnels de santé pour mieux entourer les patients sur leur lieu de vie à la fois pour les soins mais aussi pour le bien-être. Il repose sur un module logiciel médicalisé et sécurisé spécifique à la cancérologie, qui est intégré au réseau social Domicalis.com. Sous-forme d’application web, il est consultable à domicile et à distance via une tablette, un ordinateur ou un smartphone.

33 NC

MONALI Échanger et partager entre professionnels facilement les données clés des patients, Monali est une application sur tablette. Elle est conçue comme un réseau social médicalisé pour la gestion de la communication entre les professionnels de santé en lien avec les patients. Elle propose des outils collaboratifs (annuaire, agenda) au service des patients et des professionnels .

64 NC

MediActiv Ce jeu de simulation médicale et d’aide à la formation piloté par l’INRIA et Interaction Healthcare doit permettre aux chirurgiens de s’entraîner virtuellement à des opérations à destination de patients atteints de maladies chroniques.

33 NC

73 http://www.oris-aquitaine.org/

74 http://formaticsante.fr/index.php/13-accueil/activitesformaticsante/1250-tour-de-france-du-numerique-pour-la-sante

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La diversité des projets R&D sur le territoire s’accompagne d’une politique d’investissement régionale offensive pour permettre le passage à l’échelle économique. Ces derniers, issus pour la plupart de candidatures AMI (Appel à Manifestation d’Intérêt) s’inscrivent tous, dans une démarche de validation scientifique par la recherche de partenariats universitaires (ISPED, INRIA, MICA) en vue d’assurer les procédures d’évaluation selon des concepts méthodologiques variés. Focus sur le projet XL ENS: Territoire de soins Numérique

Outre ces expérimentations, l’Aquitaine est aujourd’hui porteuse du projet Territoire de Soins Numériques (TSN) XL ENS. Ce dernier, conduit sur le territoire landais, touche un bassin de population de 42 000 habitants et a été choisi en fonction d’enjeux de santé publique représentatifs (vieillissement de la population, prévalence des maladies chroniques, offre de soins inégale, désertification médicale). Le projet, dont le démarrage opérationnel est attendu en 2016, s’appuie techniquement sur une plateforme de services en ligne accessible aux professionnels ainsi qu’au grand public (patients, aidants), tant au sein de structures, qu’en ambulatoire et au domicile des patients. L’espace numérique de santé territorial offrira un cloud 75 privé sécurisé regroupant l’ensemble des services accessibles en ligne en multi-canal :

- interconnecté avec les services nationaux et les services régionaux ; - interfacé avec les SI des établissements et des professionnels libéraux ; - offrant une connectivité avec les objets communicants et les applications

mobiles. La conception de cet espace numérique est adapté aux spécificités de santé territoriale et aux 3 typologies d’acteurs (professionnels de santé/patients-aidants/cellule de soutien territorial), en ne présentant que les services dont ont besoin les acteurs. Ces services sont aussi disponibles sous forme d’un catalogue d’applications téléchargeables (Store XL_ENS) qui s’enrichira progressivement au fur et à mesure que de nouveaux services seront développés. La solution technologique est constituée d’une plateforme ouverte qui doit pouvoir communiquer de manière sécurisée avec les systèmes d’informations externes : systèmes d’informations des établissements, SI nationaux et régionaux, logiciels des acteurs libéraux, applications mobiles, objets connectés..., ce dans une logique d’EAI (Enterprise Application Integration). La solution respectera les exigences spécifiques à la manipulation des données personnelles de santé et les standards du marché en termes d’interopérabilité. Elle s’appuiera sur une architecture modulaire et urbanisée des services, pour répondre aux exigences d’évolutivité et de stabilité, et ainsi proposer aux utilisateurs des services fonctionnels et personnalisables de la plateforme (logique de store d’applications).

75 Le cloud computing, ou l’informatique en nuage ou nuagique ou encore l’infonuagique (au Québec), est l'exploitation de la puissance de calcul ou de stockage de

serveurs informatiques distants par l'intermédiaire d'un réseau, généralement Internet.

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Elle sera construite pour être réplicable et transposable, afin de permettre sa généralisation à d’autres territoires. Enfin, le respect de l’état de l’art en matière d’accessibilité et de simplicité d’utilisation est une exigence visant à garantir une appropriation rapide de la solution par les différents utilisateurs. Classification des briques télésanté/m-santé retenues par type d’acteurs de XL ENS

Patients/Aidants Professionnels de santé Cellule de Soutien Territorial

- Informations utiles : prévention, droits sociaux, cartographie offre de santé… - Services logistiques : prises de rendez-vous, démarches administratives, agenda santé patient… - Aide à l’orientation - Outils personnalisés de santé : DMP, carnet de vaccination, résultats de laboratoires... Objets connectés : télésurveillance et accès aux données d’auto-mesure et aux éventuelles alertes remontées, dispositifs médicaux.

- Informations, gestion et support logistique et administratif : accès à des informations de droit sociaux (aides financières), offre de santé, alertes sanitaires. - Référentiel de bonne conduite en cas d’épidémie. - Simplification des démarches administratives : agenda en ligne pour la prise de rendez-vous par ses patients, prise de rendez-vous vers des plateaux techniques ou vers des acteurs de second recours (en présentiel ou via les outils de la plateforme régionale de télémédecine). - Actions de dépistage, soutien aux pratiques professionnelles : aides des formations continues, référentiels de compétences, protocoles de soins pluridisciplinaires. - Aide à l’orientation du patient - Accès simplifié et intégré depuis les logiciels de cabinet médical : MSSanté, Dossier Pharmaceutique, DMP, Carnet électronique de vaccination du patient, PPS, e-prescription… - Aide au diagnostic : avis d’experts et téléconsultations via les outils de la plateforme régionale de télémédecine. - Coopération inter-professionnelle : outils accessibles en mobilité, en modes connectés et déconnectés, pour les échanges quotidiens entre acteurs de la prise en charge (transmissions multimédia).

- Structuration d’un dispositif de gestion des sollicitations patients et professionnels (type CRM*), facilitant notamment le repérage de personnes en situation de fragilité et la fluidité du suivi (dans le respect des contraintes légales et de la CNIL). - Construction d’un outil de Case Management facilitant la gestion des cas complexes, la coordination des services de proximité et produisant le tableau de bord de suivi du protocole de soins pluridisciplinaire partagé entre acteurs. - Outil de reporting du suivi à domicile.

* Customer Relationship Management

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Figure 40 : Calendrier de déploiement de TSN Aquitaine

3. Caractérisation des compétences, formation, accompagnement

L’accompagnement des compétences pour le développement des usages numériques en santé se structure autour d’une offre de formation initiale et continue touchant à la fois les connaissances au service de l’informatique médicale, l’évolution des pratiques professionnelles à l’usage des TIC en santé - et notamment en télémédecine – et l’évaluation des compétences acquises au travers du C2i76 « métiers de la santé ». 3 actions phares sont à relever en Aquitaine : La création d’un Master Santé Publique spécialité informatique médicale piloté par l’Université de Bordeaux

Le contenu pédagogique vise les compétences suivantes : - connaître les spécificités du monde hospitalier ; - savoir adapter les logiciels aux besoins des acteurs de santé ; - savoir résoudre les contraintes liées à l’interopérabilité ; - savoir répondre à un appel d’offres dans le domaine de l’informatique

médicale et savoir manipuler l’information médicale ; - connaître la législation concernant la sécurité et la confidentialité des données

et leurs particularités en santé ; - connaître les contraintes de vigilance ; - comprendre les enjeux de l’informatique médicale en lien avec

l’épidémiologie.

76 Certificat Informatique & Internet

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Le lancement d’un DU de télémédecine piloté par l’Association Française de télémédecine

Programmé sur 8 jours de formation et ½ journée de stage pratique, ce DU ouvert à l’ensemble des professionnels de santé vise : Module 1 : Découverte et définition de la télémédecine Module 2 : Construction d’un projet de télémédecine Module 3 : La télémédecine en pratique : retours d’expérience Module 4 : Les industriels en télémédecine Module 5 : Aspect sciences humaines et sociales de la télémédecine Module 6 : Aspects techniques de la télémédecine Modules 7/8 : Télémédecine et outils e-santé La formalisation du programme C2i niveau 1 Sanzipense proposé par l’IFSI de Libourne

L’intérêt du projet développé par l’IFSI est de mesurer le niveau de compétences C2i aux différents moments des enseignements réalisés auprès des élèves infirmiers et de leur permettre de valider ces compétences, sans que cela entraîne un surplus au programme de formation pour les étudiants qui souhaitent passer la certification C2i niveau 1. Le projet ayant reçu l’avis favorable de la cellule C2i de l’Université de Bordeaux, il devrait être opérationnel pour la certification 2016-2017 de la formation infirmière. Du côté des patients et des usagers de santé, la caractérisation et la spécification des compétences numériques ne font pas l’objet de recherche particulière. En conséquence, il n’existe pas à ce jour de référentiel de compétences, ni de programme d’accompagnement à l’usage pour que les patients où l’usager puissent apprendre à utiliser les dispositifs numériques mis à sa disposition.

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QUE RETENIR ? Malgré la faible production de données régionales sur la télésanté, le recensement et la classification des offres et des services réalisés à partir du fichage des industriels adhérents aux différentes structures fédératrices du numérique (Cluster TIC Santé aquitain et Adeiso) mettent en évidence que : - L’écosystème numérique de santé est harmonieux et équilibré quant aux offres et solutions proposées par les industriels sur les différentes briques fonctionnelles qui le composent. - La dynamique d’innovation régionale est centrée majoritairement sur le marché de la télécollaboration et de la télésurveillance entre professionnels de santé et patients. - Le niveau de maturité économique nécessaire au développement d’applications mobiles et d’objets connectés n’offre pas les moyens d’évaluer quantitativement et qualitativement ces derniers auprès des utilisateurs. Les espoirs formulés autour du programme « Territoires de soins numériques » ne sont pas seulement technologiques mais répondent à des enjeux d’innovations organisationnelle, économique et citoyenne, en prenant en considération, dans la construction de l’espace numérique d’expérimentation, les logiques patients/professionnels/société civile.

Conclusion Deux constats sont relevés dans l’étude de cet écosystème numérique de santé : - face au vieillissement de la population et à la prévalence des maladies chroniques en Aquitaine, il n’y a pas eu de questionnement sur la perception des usages numériques des utilisateurs finaux, c’est-à-dire les patients sur le territoire. Les orientations prioritaires visent effectivement la coordination et l’articulation des professionnels au service du patient. Or, les freins d’usages demeurent très saillants pour la catégorie des seniors. En effet, plusieurs études (Crédoc 2010 ,2013, BVA 2014) et recherches issues de la littérature (Bourdelois et Boucher_Petronic, 2014), (Granjon 2009), (Collot, 2013) montrent que le niveau d’intégration et d’appropriation pour cette population est enclavé à des variables spatiales et biographiques de genre, d’âge, de conditions sociales. - si l’Aquitaine bénéficie d’un tissu socioéconomique favorable au développement de l’écosystème numérique et de projets d’investissements, l’offre de formation initale et continue demeure restreinte, réservée et spécifique avec une prévalence pour les métiers de l’ingénierie informatique. Or, la question de l’accompagnement généralisé des professionnels de santé aux pratiques numériques, plus particulièrement dans les domaines de la télésanté et de la santé mobile ne font pas l’objet de démarches particulières sur le territoire. Une étude sur l’utilisation du référentiel C2I métiers de la

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santé en Aquitaine permettrait d’avoir une lisibilité sur le niveau de compétences numériques des acteurs. C’est pourquoi, l’un des réinvestissements possible serait de réaliser un observatoire des pratiques numériques des patients et usagers de santé sur le territoire aquitain. Ciblé potentiellement sur les deux grands enjeux de santé publique (senior vieillissant) et/ou maladie chronique (cancer, diabète, AVC etc.), il pourrait identifier :

- les perceptions d’usages ; - le niveau de littératie en santé et en compétences numériques ; - les usages réalisés selon les différentes briques fonctionnelles des TIC en santé (e-

santé : DMP), télémédecine (téléconsultation, surveillance), télésanté et m-santé en national et en régional selon différentes variables repérées comme significatives : âge, sexe, situation géographique, réseau de soins et réseau social associé, déterminants de santé La finalité de cette étude serait de pouvoir construire un référentiel d’évaluation permettant de mesurer les compétences acquises par le patient à partir d’une action de formation permettant d’accompagner les usages du numérique.

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Bibliographie Rapports et Etudes A la Recherche du E-patient, Patients&web, avril 2013 3ème baromètre sur l’utilisation des smartphones chez les médecins, Vidal-CNOM, février 2015 Baromètre Santé 360 – Orange Healthcare et MNH, 2015 Enquête en ligne “santé connectée : pratiques et attentes des internautes”, CCM Benchmark Panel, mars 2014 Sondage sur la perception des français à l’égard des applications smartphone en santé, Viavoice Groupe Pasteur Mutualité, 2013 Enquête nationale sur l’observance « Vos traitements et vous ? », mars 2015 Rapport CGIET, Bien vivre grâce au numérique, Février 2012 Rapport CGIET, de l’information du patient à la démocratie sanitaire :enjeux des technologies de l’information et de la communication, septembre 2012 Revue de littérature, le patient internaute, HAS, 2007 Rapport CNIL, le corps nouvel objet connecté, mai 2014 Livre Blanc CNOM, déontologie médicale sur internet, 2011 Livre Blanc CNOM, santé connectée, janvier 2015 Ouvrages et articles de réference CASILLI, Antonio. Usages numériques en santé: conflictualité épistémique et sociale dans les communautés de patients en ligne. Internet: des promesses pour la santé, 2011, p. 181-191. DE BIASI, Mary Annick. Réflexion sur la prise en compte des réseaux sociaux santé dans l’éducation thérapeutique du patient. 2014. EVEILLARD, Philippe. Éthique de l'Internet santé. Ellipses, 2002. FANELLI Gaelle, PAGES Frédérique, Le patient internaute (Haute Autorité de Santé (HAS), May 2007), p. 59 GERVAIS, Jean-François. Web 2.0: les internautes au pouvoir: blogs, réseaux sociaux, partage de vidéos, mashups.. Dunod, 2007. GOULINET, Géraldine. Rôle socio-culturel des communautés virtuelles de patients dans le suivi des maladies chroniques. 2014. HARDEY, Michael. Internet et société: reconfigurations du patient et de la médecine? Sciences sociales et santé, 2004, vol. 22, no 1, p. 21-43. KIVITS, J. Les usages de l’internet-santé. Internet et santé: acteurs, usages et appropriations, 2012, p. 37-56. LAMBERTERIE, Isabelle de. Quelle régulation pour les technologies en santé?. In : Annales des Mines-Réalités industrielles. ESKA, 2014. p. 94-98. LÉVY, Joseph Josy, and Christine THOËR, eds., Internet et Santé: Acteurs, Usages, et Appropriations, Collection Santé et Société (Québec: Presses de l’Université du Québec, 2012)

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