Questionnaire sur l'accueil des demandeurs d'asile en psychiatrie libérale

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1 Retour sur le questionnaire à propos du « Suivi de demandeurs d'asile pour des soins médico- psychologiques en cabinet de ville » Je remercie tout d’abord les modérateurs des listes de diffusion qui ont accepté ma proposition ainsi que toutes celles et ceux qui ont répondu, soit par mail, soit en ligne, qu’ils aient ou non une expérience de ce travail : toutes les réponses obtenues m’ont été et me sont utiles. Pourquoi ce questionnaire ? J’ai eu l’idée de ce questionnaire en lien avec un travail que je fais dans le cadre du DIU Santé, Société, Migrations 1 auquel je me suis inscrit pour « travailler » mon expérience personnelle de suivis de migrants identifiés comme « demandeurs d’asile » en cabinet d’exercice libéral. En effet, ma pratique avec des originaires principalement d’Afrique Sub- saharienne, me confrontait à des difficultés multiples : différences culturelles, traumatismes psychologiques en lien avec des violences et tortures, situations sociales et administratives complexes et délétères paraissant influer considérablement sur l’état de santé et les suivis de ces patients, etc... Déboutés pour la majorité d’entre eux à la CNDA (Cour Nationale du Droit d’Asile), demandant un titre de séjour comme « étranger malade » pour stress post-traumatique, ces patients se « retrouvent » sans hébergement ni allocations ni droit de travail et ceci durant le temps éminemment variable du traitement de leur demande par la préfecture. Contraints pour subsister de solliciter l’aide aléatoire des associations caritatives ou de militants, ils dépendent du « 115 » pour l’hébergement (lequel répondait négativement à 98% des appels en décembre 2014 en Isère 2 ) Néanmoins, ils peuvent bénéficier de l’AME pour prise en charge des soins. Certains patients deviennent des « sans-papiers ». 1 http://offre-de-formations.univ-lyon1.fr/parcours-1102/sante,-societe-et-migration.html 2 Voir l’appel du 115 : http://www.untoitpourtous.org/fichiers/1698/lettre-ouverte-115-de-lisere.pdf

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Simple questionnaire proposé à des soignants en psychiatrie (d'exercice libéral principalement) à propos de leur expérience de soins à des migrants demandeurs d'asile ou demandeurs d'un titre de séjour comme "étrangers malades". Février 2015.

Transcript of Questionnaire sur l'accueil des demandeurs d'asile en psychiatrie libérale

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    Retour sur le questionnaire propos du

    Suivi de demandeurs d'asile pour des soins mdico-

    psychologiques en cabinet de ville

    Je remercie tout dabord les modrateurs des listes de diffusion qui ont accept ma

    proposition ainsi que toutes celles et ceux qui ont rpondu, soit par mail, soit en ligne, quils

    aient ou non une exprience de ce travail : toutes les rponses obtenues mont t et me sont

    utiles.

    Pourquoi ce questionnaire ?

    Jai eu lide de ce questionnaire en lien avec un travail que je fais dans le cadre du DIU

    Sant, Socit, Migrations1 auquel je me suis inscrit pour travailler mon exprience

    personnelle de suivis de migrants identifis comme demandeurs dasile en cabinet

    dexercice libral. En effet, ma pratique avec des originaires principalement dAfrique Sub-

    saharienne, me confrontait des difficults multiples : diffrences culturelles, traumatismes

    psychologiques en lien avec des violences et tortures, situations sociales et administratives

    complexes et dltres paraissant influer considrablement sur ltat de sant et les suivis de

    ces patients, etc...

    Dbouts pour la majorit dentre eux la CNDA (Cour Nationale du Droit dAsile),

    demandant un titre de sjour comme tranger malade pour stress post-traumatique, ces

    patients se retrouvent sans hbergement ni allocations ni droit de travail et ceci durant le

    temps minemment variable du traitement de leur demande par la prfecture. Contraints pour

    subsister de solliciter laide alatoire des associations caritatives ou de militants, ils dpendent

    du 115 pour lhbergement (lequel rpondait ngativement 98% des appels en dcembre

    2014 en Isre2) Nanmoins, ils peuvent bnficier de lAME pour prise en charge des soins.

    Certains patients deviennent des sans-papiers .

    1 http://offre-de-formations.univ-lyon1.fr/parcours-1102/sante,-societe-et-migration.html

    2 Voir lappel du 115 : http://www.untoitpourtous.org/fichiers/1698/lettre-ouverte-115-de-lisere.pdf

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    Pour tenter de dpasser les difficults vcues dans laccueil de ces patients, jai voulu :

    1- approcher lexprience de collgues travaillant dans un cadre similaire au mien

    2- recueillir des tmoignages dautres soignants ou collgues travaillant dans dautres

    cadres institutionnels.

    3- Etablir des contacts pouvant aider ma pratique

    Mon questionnaire, loin dtre une enqute systmatique ou un sondage rigoureux (!) avait

    pour objectif denrichir mon questionnement et tester quelques pistes. En particulier :

    - Les demandeurs dasile sont-ils reus (et dans quelles proportions) en cabinet libral ?

    - Sils le sont peu, quelles en sont les raisons ? Est-ce par ignorance des thrapeutes

    et/ou des patients quant aux possibilits de soin en libral, cause de la situation

    gographique des cabinets, pour difficults pratiques et/ou conomiques (financement

    des soins, fiabilit aux rendez-vous, dmarches urgentes dans un contexte de

    survie peu compatible avec les dlais souvent annoncs long en libral pour

    obtenir un RDV, etc. ?

    - Et surtout : quelles sont les difficults ressenties ou vcues dans ces soins, comment

    sont-elles dpasses ou non (par exemple quand la contrainte sociale priorise

    lurgence de survie immdiate sur la question du traitement du trauma) ?

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    Mthode et ralisation

    Afin de recueillir le maximum de tmoignages et dides, jai rdig ce questionnaire avec

    quelques questions simples fermes pour identifier succinctement les rpondeurs

    (profession, ge, lieu dexercice), pour quantifier simplement la pratique (nombre de

    patients suivis en diffrenciant si possible les catgories de demandeurs dasile , de

    dbouts , dtranges malades , le nombre de consultations avec ces patients et le temps

    consacr ces consultations) mais surtout trois questions ouvertes pour recueillir des

    retours spontans , autant que possible.

    Jai prsent ce questionnaire sur deux listes de diffusion auxquelles je suis abonn

    permettant de contacter facilement un nombre important de collgues dans le Rhne et dans

    lIsre principalement. Je nai expos ni mon exprience et ses difficults, ni mes hypothses

    sur le sujet, ni les particularits de ma pratique ou mes options idologiques .

    Jai dlibrment nglig des informations intressantes mais susceptibles de distraire de

    lobjectif central ou provoquer des rticences. La question des demandeurs dasile dbouts

    ayant des implications politiques videntes et impliquant une souplesse particulire des

    praticiens, jai voulu, dans une priode de mouvement de syndicats de mdecins libraux

    contre les rformes envisages par le ministre de la sant (o la question du tiers-payant

    faisait polmique), viter de questionner le conventionnement des praticiens au regard de la

    scurit sociale, les particularits de lactivit (revenus, orientations thoriques, attitudes

    envers le tiers payant, etc.) ainsi que les options politiques ou les positions relatives laccueil

    des migrants sur le territoires franais.

    Mes questions ouvertes ont t ordonnes de manire ne pas stimuler excessivement les

    retours ngatifs attendus daprs mon exprience : premire question sur les points

    intressants de cette pratique, deuxime sur les difficults puis invitation discussion

    complmentaire.

    Javais joint une adresse mail pour recueillir des contacts ventuels de collgues familiers de

    ces questions ou des retours dexpriences dtaills.

    Ce questionnaire anonyme a t propos en ligne sur Internet, accessible par un lien indiqu

    sur deux listes de diffusion prsentes ci-aprs. Sans contact direct, donc sans pression sur

    les interrogs, je pensais nanmoins obtenir des rponses :

    - Par intrt pour un sujet rsonnant avec lactualit : le thme omniprsent des migrants

    dans la politique nationale et internationale, les drames rcurrents de lexil en

    Mditerrane et ailleurs

    - Par empathie probable des psychiatres pour les victimes de perscutions politiques

    et/ou ayant eu des parcours extrmes .

    - Parce quavoir suivi de tels patients en cabinet me semblait impliquer le dsir den

    tmoigner. En revanche, il me semblait a priori difficile dobtenir des rponses de

    praticiens nayant pas reu encore ces patients, sauf vouloir rendre service au

    collgue demandeur (!).

  • 4

    1- La liste GPLR-RA : [email protected]

    Modre par Philippe Cialdella, psychiatre dexercice libral, lie initialement au GPLR

    (Groupement des Psychiatres Libraux de la Rgion Rhne Alpes), association laquelle

    jadhre et qui regroupe des psychiatres dexercice libral de toutes orientations, cette liste

    comporte environ 160 destinataires, psychiatres en ville ou clinique prive mais galement

    psychiatres du public, mdecins gnralistes, psychologues.

    Cette liste est un support dinformations lies la psychiatrie (formations, informations

    pratiques, thrapeutiques et syndicales diverses) et sert parfois des changes publics .

    Il sagit dabord dun organe de liaison au service dun corps professionnel mdical : les

    psychiatres libraux.

    Connaissant personnellement plusieurs membres du GPLR, jattendais une participation

    galement de la part de non-receveurs de demandeurs dasile dsireux de me rendre

    service ( !).

    2- La liste du collge psy de lIsre : [email protected]

    Relaye par Jean-Claude AUCOUR, secrtaire du Collge en Isre, cette liste est lorgane de

    liaison du Collge de psychiatrie3 dont le projet li aux tats gnraux de la psychiatrie a une

    optique militante de dfense dune clinique vivante , clinique du singulier

    rfrence principalement la psychanalyse.

    Diffuse 260 destinataires, la liste sadresse une varit de professionnels (psychiatres,

    psychologues, soignants divers sans exclusive) pour diffuser des informations lies des

    formations et/ou la psychanalyse, psychiatrie, psychologie ainsi que des textes intressant les

    tensions traversant le monde de la psychiatrie. Sans liens pralables avec les membres de cette

    association, jattendais nanmoins des rponses du fait de la sensibilit, lintrt et

    lengagement suppos des destinataires de la liste aux questions socio-politiques interfrant

    avec la clinique psychiatrique des demandeurs dasile.

    Intress par une ventuelle diffrence des rponses aux deux listes, jai diffus mon

    questionnaire en deux temps durant le mois de fvrier 2015 : la liste GPLR-RA puis huit

    jours plus tard celle du collge psy .

    Je nai aucune information sur le nombre de personnes rellement contactes par chacune des

    listes.

    3 http://www.collegepsychiatrie.com/f/index.php

    mailto:[email protected]://www.collegepsychiatrie.com/f/index.php

  • 5

    Rappel de la proposition telle quelle a t prsente sur les listes

    Je souhaite avoir un simple aperu de votre exprience en ce domaine pour avoir une ide

    de l'importance de tels suivis dans votre activit et des particularits ou difficults

    rencontres: je propose un questionnaire court : vos retours me seront utiles mme si vous

    ne suivez pas ou peu de demandeurs d'asile (rpondre sera alors plus court!). Des

    questionnaires mme incomplets ou avec rponses approximatives (par impossibilit de

    chiffrer par exemple...) seront intressants pour moi.

    Si vous le souhaitez, vous pouvez voquer en quelques mots en fin du questionnaire vos

    remarques ou m'adresser des commentaires ce sujet via le mail ci-dessous.

    Ce questionnaire anonyme relve de ma propre initiative et n'est li aucun organisme priv

    ou public. S'il s'adresse plutt aux psychiatres, des retours de collgues psychologues ou

    mdecins gnralistes (ou autres spcialits) susceptibles de recevoir des "demandeurs

    d'asile" sont bienvenus!

    Je propose de faire un retour (rapide) sur ce questionnaire dans un dlai qui reste prciser

    (beaucoup moins rapide).

    Je vous remercie vivement pour votre participation, quelle que soit votre exprience dans ce

    domaine.

    https://www.sondageonline.fr/s/933631cmailto:[email protected]

  • 6

    Rsultats et commentaires

    Jai obtenu 18 rponses dont 10 par la liste GPLR et 8 par celle du Collge Psy. La plupart

    des rpondants dont galement ceux qui nont pas en soin de demandeurs dasile ont prcis

    leur ides aux questions ouvertes, rvlant leur intrt pour la question (ou ce questionnaire !).

    Le taux de rponses au questionnaire semble faible mais devrait tre compar avec des

    pratiques similaires sur Internet. Si lon admet que recevoir des demandeurs dasile ne peut

    laisser indiffrent et qutre impliqu dans cette pratique incite (fortement ?) rpondre un

    tel questionnaire, ne pas rpondre indiquerait alors labsence de ce type dexprience, ce qui

    soutiendrait lhypothse dun accueil rare en exercice libral de demandeurs dasile. En toute

    rigueur, ce point nest pas rsolu.

    Du fait du petit nombre de rponses, jai prfr ne pas donner de pourcentages aux rponses

    des diffrentes questions en diffrenciant les catgories de rpondeurs.

    Questions fermes

    Profession

    Les rpondants au questionnaire sont 14 psychiatres,1 psychologue, 2 mdecins gnralistes,

    1 infirmier.

    A lannonce de la liste GPLR : 10 psychiatres et 1 mdecin gnraliste.

    A celle de la liste Collge Psy : 4 psychiatres, 1 mdecin gnraliste, 1 psychologue, un

    infirmier.

    En sus du questionnaire, jai eu deux contacts par mail suite la liste GPLR : un mdecin

    gnraliste recevant de nombreux patients Mdecins du Monde et un psychiatre ayant une

    exprience de suivi de nombreux demandeurs dasile dans une activit en secteur public.

    ge, sexe et lieu de travail :

    GPLR : 10 gs de plus de 52 ans, 1 de 40 ans, dont 7 hommes et 3 femmes. Majoritairement

    dans le Rhne, un savoyard, un isrois.

    Collge psy : 5 de plus de 52 ans, 2 de 40 dont 4 femmes et 3 hommes, tous en Isre.

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    Suivez-vous des migrants demandeurs d'asile ou des migrants demandant un (ou

    disposant d'un) titre de sjour comme "tranger malade" votre cabinet?

    Actuellement, quel est le nombre de demandeurs d'asile ou d'trangers malades que

    vous avez en soin dans votre cabinet de ville?

    Combien de consultations de migrants demandeurs d'asile ou "trangers malade"

    donnez-vous par mois en moyenne?

    Les rpondants se rpartissent ainsi :

    A- Les 9 rpondants qui nen suivent pas actuellement sont tous psychiatres. Parmi

    eux, 8 prcisent la question en fin du questionnaire :

    - 3 ont une exprience personnelle antrieure en cabinet : 2 ont suivi un patient (unique) en cabinet, exprience marquante dtaille en fin du questionnaire, 1

    voque une situation antrieure difficile : Quand des demandeurs d'asile sont

    arrivs au cabinet sans prvenir, je ne comprenais rien leur demande. J'ignorai

    que j'tais sur une liste et mes patients attendaient. Les demandeurs se sentaient

    humilis et les responsables de cet chec dorment. Moi j'y pense encore.

    - 1 en a suivi en CMPE : un suivi complexe .

    - 4 attribuent ce non accueil de demandeurs dasile, non une volont de leur

    part mais labsence de demande (1) et/ou aux dlais longs de RDV annoncs

    (2), la localisation (hors de la ville) (1), une priode de surcharge de travail

    lors dune demande malgr lintrt pour un tel suivi (1).

    B- Les 9 rpondants recevant des demandeurs dasile sont 5 psychiatres et tous les autres professionnels (2 mdecins gnralistes, 1 psychologue, 1 infirmier). Ils

    dtaillent leurs expriences plus loin.

    Ainsi, au total, sur 18 rpondants au questionnaire et 2 rpondants par mail, seuls 2

    psychiatres (sur 15 psychiatres) nvoquent aucun suivi actuel ou pass de demandeur

    dasile. On peut infrer que cest limplication des praticiens qui a conditionn leur

    participation.

    Mais si les rpondants ont eu majoritairement une exprience de suivi, ft-elle unique et

    marquante comme latteste leur soin prciser les difficults et lintrt de lexprience dans

    les questions ouvertes suivantes, seuls 5 psychiatres en suivent actuellement en libral ,

    plus 1 (rpondant par mail) dans un cadre public .

  • 8

    Le nombre de patients parat faible : 1 voit 4 patients demandeurs dasile, 1 en voit 3, les

    autres, 1.

    Le nombre de consultations pour ce public par ces psychiatres varie entre 1 5 par

    mois.

    Les autres professionnels en reoivent plus : psychologue (3) mais pas en cabinet libral

    (ce qui ntonne pas en absence de convention avec la scurit sociale), linfirmier en reoit 5

    10, 1 mdecin gnraliste 10 (avec 1 5 consultations par mois), 1 mdecin gnraliste en

    voit 3 (pour un total de 1 5 consultations par mois)

    Dans les questions ouvertes en fin de questionnaire, des raisons cette difficult daccs

    sont proposes spontanment par les rpondants, qui confirment plus ou moins

    explicitement ne pas vouloir exclure, certains regrettant navoir pu recevoir ces patients :

    1- Impossibilit de rpondre toutes les demandes de premier RDV et dlai dattente (6 9 mois, dit un rpondant).

    2- Manque de lien avec des associations ou l'environnement social au sens large

    3- Symptomatologie complexe o il est difficile de faire la part entre les symptmes ractionnels et ceux de structure.

    4- Lieu de pratique (en dehors de la ville)

    5- Surcharge de travail nayant pas permis une prise en charge qui avait t demande

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    Modalits pratiques du suivi des demandeurs dasile

    Combien de consultations de patients sans papiers recevez-vous votre cabinet en

    moyenne par mois?

    1 rpondant dit avoir 1 consultation par mois, 5 entre 1 et 5, 3 entre 5 10 consultations par

    mois.

    Ceux qui donnent entre 5 10 consultations par mois ne sont pas psychiatres : 1 mdecin

    gnraliste, 1 psychologue (dans le public), 1 infirmier dans des consultations dans le cadre de

    consultations lADATE et la RELEVE (associations daccueil des demandeurs dasile

    Grenoble).

    Quelle est la frquence moyenne de consultations dans votre cabinet pour vos patients

    migrants demandeurs d'asile ou trangers malades?

    Les rponses oscillent entre : 1 consultation par mois au plus (6 rponses), une fois par

    quinzaine (1.), une fois par semaine ou quinzaine (psychologue), 5 10 par mois (infirmier).

    Aucune question na t pose sur le contenu des consultations : on peut imputer la

    frquence mensuelle majoritaire un profil proche dun suivi psychiatrique (comme on peut

    en voir pour des suivis au long court ?), loign du profil dun suivi psychothrapeutique

    soutenu quon valuerait des sances hebdomadaires comme le suivi du rpondant

    psychologue ou de linfirmier.

    Combien de patients dbouts de leur demande d'asile recevez-vous en moyenne par

    mois?

    Sil peut y avoir incertitude sur le statut (2 rponses), les rponses oscillent entre 0 et 1 pour 5

    rpondants, 2 patients en attente de recours de la CNDA4 pour 1 mdecin gnraliste, tous les

    patients suivis (5 10) par linfirmier. Les psychiatres ont peu de patients dbouts (0 1).

    Temps moyen de consultation avec un patient migrant votre cabinet?

    Sur 9 rpondants : 5 rpondent 30 ; 1 (psychiatre) : 40 ; 1 (psychologue) 40 ; 1

    (psychiatre) : 30 1 heure ; 1 (psychiatre) : environ une heure (consultations avec interprte).

    4 Cour National du Droit dAsile

  • 10

    Ces dures de consultations paraissent correspondre aux pratiques habituelles des psychiatres,

    peut-tre moins pour un mdecin gnraliste qui, donc, ne brade pas la consultation. Ceux

    dont lhoraire approche une heure prcisent quelles sont plus longues que dordinaire.

    Si vous tes mdecin agr auprs de la prfecture pour demande de titre de sjour

    comme tranger malade, combien

    Aucun rpondant nest mdecin agr.

    Les mdecins agrs tant peu nombreux sur lIsre par exemple, ils sont amens recevoir

    de nombreux patients, ce qui nimplique pas de suivis thrapeutiques mais ne lexclue pas

    pour autant : je mattendais des retours dexprience fournis de la part de tels praticiens en

    Rhne ou Isre. Rien ne garantit que les listes de diffusion aient contact de tels praticiens.

    Questions ouvertes

    Pouvez-vous dire en quelques mots quels sont les points intressants d'un suivi en

    cabinet de ville de patients migrants demandeurs d'asile ou trangers malades?

    Les 9 praticiens recevant un (ou des) demandeurs dasile et 1 ayant eu une exprience

    rpondent ainsi :

    Soit en soulignant (ou exprimant le souci dinscrire ces patients dans) une commune

    condition plutt quune spcificit des demandeurs dasile, ce qui parat tmoigner dune

    intention dviter une sgrgation :

    - Cest surtout la ncessit de soigner qui importe. - A propos de patients suivis initialement MDM puis en cabinet de psychiatrie,

    rien de plus particulirement intressant suivre des sans-papiers/ clientle de

    cabinet

    - Les mmes que pour tout autre patient. - Je ne suis que des "adolescents isols" selon l'euphmisme administratif (ce

    qui sous-entend sans doute lide contraire dune particularit propre ces

    situations).

    - Leur offrir la mme offre de soins que l'ensemble de la population gnrale. Eviter une sgrgation de soins, mme si celle-ci reste trs srieuse. Pour leur dire

    que ce sont des usagers comme les autres. Leur permettre d'tre dans la socit

    comme tous les individus.

  • 11

    Soit en indiquant un objectif particulier pour ces patients qui on reconnat donc des spcificits : situation sociale clarifier ou consolider ; problme de prcarit qui est

    prioritaire ; particularit de la demande de soin ; intrt dun suivi en cabinet pour

    ces patients inscrits dans des filires possiblement stigmatisantes (rseaux associatifs

    accueillants ces publics en prcarit).

    La tonalit des rponses indique quon prend ces situations particulires cur : un

    praticien dit lintrt dapprhender une ralit socio-politique au niveau mondial:

    - leur procurer un lieu o ils peuvent parler de leurs difficults en dehors des problmes administratifs, ou de recherche de ressources vitales. Etre reconnu

    comme une personne avec respect, ce qui peut les aider rester debout. Avec un

    travail sur la dure, il est possible d'aborder leur situation avec les refus, et les

    adaptations ncessaires (refus demande asile, recours refus, entre dans la

    clandestinit).

    - Un suivi. Accueillir leur souffrance psychique. Les mettre en lien avec des personnes de leur voisinage et des structures

    - Selon un mdecin gnraliste, qui prcise les conditions pratiques initiales : concertation avec la PASS pour rsoudre la situation administrative et lintrt du

    suivi de ces patients galement dans une optique de sant publique. Ds que les

    droits la sant sont tablis, la PASS nous contacte pour que nous puissions

    assurer le suivi. La dure des consultations est fonction de notre ambition de

    soignants car, habituellement, ces personnes ne dsirent souvent que des soins

    ponctuels et rapides. Les aider s'inscrire dans un processus de prvention et de

    rduction des risques dpend plus de notre motivation professionnelle que des

    besoins exprims par les patients eux-mmes. Le recours des pairs et aux

    services d'interprtariat est souvent essentiel. La prise en charge des pathologies

    infectieuses et leur dpistage est galement utile pour la collectivit. La

    concertation avec les services sociaux et d'accompagnement est essentielle car,

    pour se soigner efficacement, les conditions de vie de base sont prioritaires

    (logement notamment) - cela a un ct renarcissisant pour le patient du fait quil sort des circuits

    sociaux ddis aux seuls personnes dclasses et exclues. Pour le praticien cela

    permet de rencontrer des pathologies peu vues au cabinet (histoires psycho-

    traumatiques, histoires de vie incroyables), douvrir sur une ralit mconnue

    et de toucher du doigt le phnomne de la mondialisation son chelle.

  • 12

    Pouvez-vous dire en quelques mots quelles sont les difficults du suivi de patients

    migrants, demandeurs d'asile ou trangers malade dans le cadre de votre cabinet de

    ville?

    Les rponses mont sembles exprimer non simplement un inventaire de problmes rels que

    le rel souci dindiquer des pistes permettant de suivre ces patients, en particulier de la part

    des mdecins gnralistes inscrits dans cette pratique. Il existe nanmoins aussi un dsarroi et

    un doute sur la possibilit dun tel suivi. Les difficults voques sont :

    - La langue : ncessit de la prsence d'un traducteur , difficult majeure, la ncessit de prsence d'un interprte. , il faut que les personnes puissent

    s'exprimer en franais. Besoin dinterprte parfois donc pas simple

    - La compatibilit avec lorganisation, lconomie et lorganisation dun cabinet (le cas

    de dpassement dhonoraires). En particulier : lassiduit ( Pas de rgularit aux

    sances .pas de possibilits de dpassement d'honoraire pour compenser les RDV non

    venus non prvenus , les RV manqus, , des problmes de paiement qui nauraient

    pas lieu dtre avec des adolescents isols , le problme des dlais dattente (6 9

    mois ne permettant pas de rpondre une telle demande). Pourtant, un mdecin

    gnraliste contredit cette version de mauvaise assiduit : contrairement ce qu'on

    pourrait penser, ce sont des patients qui viennent aux rendez-vous, qui apprcient la

    qualit de l'accueil. Du fait de la prcarit des conditions de vie, il faut souvent retarder

    certaines prises en charge, s'occuper en premier de ce qui est urgent, tablir une stratgie

    pour faire avancer en premier la vie sociale avant de pouvoir faire vritablement du soin

    sur le fond.

    - Laccs au cabinet : Les personnes sont venues au cabinet car je les suivais MDM, sinon il est difficile de venir consulter d'emble un mdecin en ville

    - Les difficults lies la pathologie : dcalage entre la lourdeur de la pathologie et la possibilit de soins. , Dans mon souvenir c'tait une

    symptomatologie complexe o il tait difficile de faire la part entre les symptmes

    ractionnels et ceux de structure.

    - Les particularits des cultures et le travail impliqu : La langue. L'abord diffrent du symptme et du corps en fonction des cultures. Adapter notre socit

    de prcaution qui limine les maladies plutt qu'elle ne cherche des diagnostics.

    Expliquer ce concept . Un mdecin gnraliste familier de tels suivis dit : la

    difficult consiste s'adapter au diffrentes cultures et langues, pour comprendre

    et se faire comprendre. La notion de psychiatrie tant elle-mme trs diffrente

    d'un pays un autre et la notion mme de soin en psychiatrie est encore plus mal

    comprise par les migrants. Autre difficult : la ncessit et le suivi du traitement

    mis en place, lorsque ceux-ci prennent le traitement prescrit c'est souvent 1 jour

    ou 2 et si pas d'effets ils arrtent, et sans en parler. L'valuation s'en trouve

    difficile (..). Dernire difficults, la notion de rdv qui est souvent alatoire d'un

    pays un autre, avec des gens qui viennent soit en retard, soit pas du tout.

  • 13

    - Limportance dun travail de lien social en sus des consultations et dune adaptation qui ncessite du temps : Beaucoup de liens faire avec assistantes

    sociales et leur entourage familial et autre , Chronophage. Comme cest une

    pratique un peu inhabituelle, cela demande quelques efforts pour sadapter.

    Ncessite de travailler avec dautres qui ont cette pratique (groupe de travail ou

    de lecture) , On pourrait galement citer le manque de travail en lien avec des

    associations ou l'environnement social au sens large

    - La question des certificats mdicaux: enfin dernire difficult, les demandes faites par les demandeurs d'asile, qui pensent venir rcuprer des certificats

    mdicaux pour conforter leur demande d'asile .

    - Lintrication de difficults plusieurs niveaux : la vrit du rcit, la dtresse psychique de ces patients expliquant la difficult dassiduit: langue,

    mensonge et vrit... le travail gratuit que cela m'impose... , Les angoisses, le

    dcouragement et les refus fragilisent ces personnes, cela a pour consquence le

    manque dassiduit leur rendez-vous . Difficult comprendre vraiment la

    situation du patient au niveau de son statut, de ses droits, de sa situation relle.

    Avez-vous des remarques complmentaires suscites par les questions et points

    prcdents ou, si vous ne recevez pas de demandeurs d'asile en cabinet, dire s'il y a des

    raisons particulires cela.

    10 personnes ont prcis l les questions prcdentes :

    - En apportant des tmoignages dexpriences personnelles difficiles : lune relatant une incomprhension relativement la demande du patient lie une

    manque de communication des services demandeurs, une autre au dnouement

    favorable aprs un suivi difficile, expose en dtail, prsentant de nombreux

    aspects problmatiques dont voici lessentiel :

    Adress par un autre patient travaillant dans un centre d'hbergement. Etat anxio-

    dpressif ractionnel sa situation (deuxime anne d'attente. Assiduit aux RV

    marque par des absences lorsque sa peur de sortir dehors et subir un contrle de

    police devenait trop forte. Dmuni pour l'aider. Le patient avait tendance

    surinvestir les consultations et l'aide que je pouvais lui apporter, alors que je ne

    pouvais que donner quelques instants de prsence et des paroles d'encouragement.

    Mal l'aise avec les prescriptions (somnifres, BZD) ncessaires tant donn les

    symptmes mais choquantes thiquement puisque les symptmes taient gnrs

    par le contexte inadmissible de l'attente et de l'interdiction de travailler infliges

    aux demandeurs d'asile (ce patient de 40 ans n'avait aucun ATCD psy ni

    personnel, ni familial). Fort heureusement pour lui, il a obtenu des papiers. La

  • 14

    prise en charge a pris fin ainsi. J'aurais t embarrass si elle avait d se

    poursuivre dans l'isolement de mon petit cabinet. Je ne sais pas ce que j'aurais pu

    faire, dans la dure, de ma colre envers ce systme et mon impuissance

    rpondre aux demandes (portant sobres et dignes) de ce patient.

    - En prcisant le contexte daccueil, le psychologue prcise quil sagit dune structure de prvention contre lisolement et le suicide o ces patients sont

    adresss par des psychologues de mdecins du monde en relation. Le travail de

    lien que nous faisons permet une rassurance et une mise en confiance .

    Linfirmier expose le taux de retour des patients cela varie, du respect des rdv

    fixs par les demandeurs, mais 80% il sagit surtout de premires demandes.

    Seuls 20% reviennent, lorsque l'on juge ncessaire de les faire revenir, ou de leur

    fixer un nouveau rdv avec le dr du cmp.

    - Un psychiatre pose la question du non adressage : Je ne reois pas de demandeurs dasile parce quon ne men adresse pas. Je crois aussi que les

    associations qui sen occupent cherchent plus souvent des prescripteurs de

    psychotrope que des psychiatres qui coutent.

  • 15

    Conclusion

    Lobjectif du questionnaire tait limit: approcher la pratique du soin aux demandeurs

    dasile et aux trangers malades en pratique psychiatrique librale. Il sagissait de faire

    remonter les tmoignages pour prciser les problmes rencontrs par des praticiens. Ceci

    pour les confronter ultrieurement mon exprience personnelle pour un travail qui ne fait

    pas lobjet de cette prsentation et aussi pour tablir des contacts utiles pour cette pratique.

    Les psychiatres reoivent-ils des demandeurs dasile ? Et quelles sont les particularits

    de cette pratique, ses difficults, son intrt ?

    Pourquoi limiter la question aux demandeurs dasile ? demande un mdecin gnraliste

    ayant rpondu par mail. Travaillant bnvolement Mdecin du Monde Lyon, ce

    praticien tmoigne en effet de laugmentation de la population des personnes sans droits de

    sjour qui sont des demandeurs d'asile dbouts (90% des demandes) et migrants

    clandestins de tous ordres qui ne peuvent pas demander de droit de sjour. (). Parmi tous

    ces gens certains peuvent demander un droit de sjour (et donc le droit de travailler) soit par

    le biais de la procdure "tranger malade" (), soit par le regroupement familial, soit pour

    faire des tudes... Mais les lus sont de plus en plus rares. (). Il ressort de ces lments que

    de nombreuses personnes sont sans droit de travail, sans logement (2 500 personnes dorment

    dehors tous les soirs sur Lyon en dehors de la priode hivernale) ou en logement (trs)

    prcaire, et beaucoup ne mangent pas tous les jours. Ajoutons ces preuves les syndromes

    post traumatiques de ceux qui ont fui les zones de guerres comme le Congo, le Kosovo et

    lAlbanie o la mafia fait des ravages sociaux. Lexclusion sociale et la situation de non droit

    dans laquelle ils se trouvent joue un rle aggravant. Ils vivent la peur au ventre dtre

    contrls. Les contrles et les mesures de rapatriement sont souvent arbitraires et sans gard

    la condition des personnes. Les troubles psychologiques provoqus sont omniprsents

    dbouchant sur des dpressions frquentes et sur la constitution de troubles psychiatriques.

    Effectivement, la question souleve croise des dimensions multiples intriques dont

    certaines, comme la prcarit sociale et/ou administrative paraissent prdominantes et ne pas

    concerner uniquement ces patients que jai identifis comme demandeurs dasile . Leur

    situation a t expose ci-dessus5 : il sagit souvent en ralit de migrants dbouts de leur

    demande dasile, demandeurs dun titre de sjour comme trangers malades au moment o

    se termine leur parcours (et leur hbergement, pour ceux qui en bnficient) au CADA

    (Centre dAccueil des Demandeurs dAsile). Leur suivi en psychiatrie avait dbut avec

    lespoir de rgularisation et le soutien du CADA avant dtre fragilis par la dgradation de

    leur situation : absence de revenu, dhbergement, de droits rduction sur les transports et

    5 Au chapitre Pourquoi ce questionnaire .

  • 16

    ceci sans droit de travail ni garantie de dure du traitement de leur dossier, attente qui peut

    excder lanne. On peut citer parmi ces dimensions croises qui font problme et qui ont t

    abordes par les rpondants:

    - Particularits sur le plan culturel et/ou psychologique de ces patients

    migrants

    - Soin des patients non francophone, question de linterprtariat (accessibilit

    et/ou particularit de ce travail)

    - Conditions sociales et administratives des demandeurs dasile dans le contexte

    socio-politique actuel

    - Parcours des demandeurs dasile dbouts faisant une demande de sjour au

    titre dtranger malade et devenant parfois (souvent ?) sans-papiers.

    - Place du juridique (certificats mdicaux) dans le soin des patients dont les

    alas du statut administratif dterminent les conditions de vie (ou survie).

    - Accueil de patients en situation de prcarit en exercice libral.

    - Psycho-traumatisme li des expriences de torture et violences politiques

    (quel soin possible envisageable en situation dune telle instabilit ?)

    - Autres.

    Lensemble des retours (questionnaire et mails) montre lintrt des praticiens pour une

    catgorie de patients dont le demandeur dasile dbout , figure emblmatique, excde

    cette dfinition choisie ici, dfinition qui correspond de prs aux patients que jai reus.

    Mais les rponses obtenues indiquent galement la raret de leur accueil en psychiatrie

    librale (et de manire gnrale en pratique librale ). Sil nest pas possible par

    extrapolation de connatre la ralit quantitative des soins prodigus aux demandeurs dasile

    en psychiatrie librale, il semble difficile de trouver des crits tmoignant de tels suivis : une

    enqute plus significative serait bienvenue...

    Dans cet chantillon , les praticiens le plus confronts ces situations sont les mdecins

    gnralistes, un psychologue en situation salarie, un infirmier dans un cadre associatif.

    Le moindre taux daccueil par les psychiatres semble pourtant relever ici plus de la

    gographie (prsence de CADA ou dassociation faisant lien proximit ?) ou de la

    disponibilit faible des praticiens (dlais, attente, surcharge) que dune rticence explicite.

  • 17

    On peut rsumer les problmes rencontrs par les praticiens dans lexercice libral :

    lassiduit aux consultations (avec consquences en termes dorganisation et dconomie du

    cabinet dimportance variable selon les rpondants), linfluence du contexte social et

    administratif sur ltat de sant et de dtresse du patient et son impact sur le praticien

    suscitant un sentiment dinjustice ou dimpuissance constater les consquences sur la sant

    des politiques durcies lgard des migrants, cause dune aggravation de la prcarit des

    patients, mais aussi, une ouverture sur les ralits du monde .

    Cette pratique comporte certainement un aspect douloureux , heurtant les habitudes de

    lorganisation librale, confrontant des dtresses sociales (sans-abris, sans-papiers) souvent

    orientes vers les institutions associatives (MDM) ou les services publics. Nanmoins, la

    tonalit et linvestissement des rponses, que ce soit dans les mails reus ou dans le

    questionnaire, tmoigne dun intrt port ces patients et ces questions qui ont un

    impact personnel, ce qui est clairement affirm dans plusieurs rponses.

    Ainsi, le mdecin gnraliste, travaillant MDM a beaucoup rflchi ces questions, ce qui

    la amen une attitude assez proche en dfinitive de celle que j'avais dans mon cabinet de

    mdecine rurale (), qui est de considrer la personne devant nous comme un gal, lui faire

    confiance pour lui redonner justement confiance en lui, et de ne pas tomber dans de

    l'empathie trop appuye qui devient vite de la charit avec sa charge de soumission-

    humiliation. Son tmoignage souligne a contrario certaines difficults attendues en pratique

    librale : On voit se succder tellement de situations dramatiques qu'on a envie de

    rgler individuellement au vu de la faiblesse des moyens sociaux mis en uvre (carence de

    l'tat). (). Mais ils sont tellement nombreux que trs vite on se rduit une aide mdicale

    et/ou psychologique. Leur redonner confiance en eux, c'est dj pas mal. A MdM nous

    pouvons compter sur l'quipe (Assistants sociaux, mdecins, infirmires, psychologues)

    pour grer les situations sociales en collaboration souvent avec d'autres assoc. qui font dans

    le logement, l'ducation

    Dautre part, les questions plus spcifiques au soin psychiatrique ou psychothrapique

    individuel auprs de patients traumatiss quon aurait pu attendre de la part du

    psychiatre en libral sont ici domines par des questions tenant du lien social, ceci tant

    du ct des patients que du ct des soignants (rseaux et liens aux associations), du

    politique et du juridique, de lconomique.

    Les questions de vrit du rcit ou des certificats sont peu cites ici : elles participent

    pourtant de la mise en tension la fois des cadres de soins habituels des psychiatres (surtout

    quand ils sont dorientation psychothrapeutique ?) mais des assistants divers qui soutiennent

    ces patients et attendent une aide de la part des mdecins ce niveau parfois crucial pour la

    vie des patients.

  • 18

    Et aprs ?

    Ces retours dexprience, confirment mes yeux lintrt ports par les soignants pour ces

    patients. Ceci encourage rflchir ces questions pour soigner au mieux en dpit dun

    contexte politique et social contraignant (et inquitant).

    La confrontation la prcarit et laccueil des migrants fait choc dans linstitution librale.

    Elle remet en cause les pratiques et rfrences habituelles, la ralit externe y prend une

    place considrable, conditionnant sinon dterminant la possibilit du soin. Elle oblige

    modifier les stratgies employes et les objectifs poursuivis, questionner les priorits,

    repenser le soin psychiatrique et/ou psychothrapique, construire des alliances nouvelles : la

    souffrance vcue par le professionnel pourrait bien constituer une vritable cure de

    jouvence en questionnant pratiques et thories...

    Laccueil de patients migrants demandeurs dasile en pratique librale prsente

    certainement de relles difficults et implique probablement un investissement particulier,

    peut bouleverser la pratique. Mais outre lintrt de participer la lutte contre les

    discriminations vcues par des patients en dtresse, les recevoir en ville permet des rencontres

    profondment humaines . Des rencontres qui ne laissent pas indemnes mais donnent

    lactivit de soin psychique tout son sens.

    .

    Franois Journet

    Le 14 mars 2015

    PS : Je recevrai avec plaisir toute remarque complmentaire mon retour sur ce questionnaire

    ladresse mail suivante : [email protected]