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Qualité des semences de céréales et protéagineux Mai 2018 Le biocontrôle pour lutter contre les maladies des céréales à paille En quelques années, le biocontrôle s’est organisé en France, notam- ment via le Consortium Biocontrôle. Créé en 2016 à l’initiative de l’INRA, ce Consortium est un partenariat public-privé pour la recherche, le développement et l’innovation du biocontrôle en France qui réunit actuellement 47 membres (entreprises, instituts de recherche, instituts techniques, pôles de compétitivité). La finalité est de contribuer à l’es- sor du biocontrôle en France et de favoriser l’usage des produits par les agriculteurs. Dans ce cadre, des réseaux d’expérimentation dédiés au biocontrôle ont été constitués (projet XP-BC) qui visent à déployer trois réseaux expérimentaux, multi-cultures et multi-régions dont l’un concerne les maladies en grandes cultures (blé et colza). Ce réseau d’expérimentation est complémentaire au réseau R2E (réseau d’excellence expérimentale), instance de collabora- tion entre diverses structures de recherche et développement travaillant ensemble à l’élaboration de références agronomiques et qui vise à évaluer collectivement les innovations agronomiques au sens large. La Fnams participe activement à ces dif- férents réseaux d’expérimentation. Par exemple, depuis 2016, la Fnams a rejoint le réseau R2E regroupant ARVALIS et des coopératives, sur la thématique de la gestion de la fusariose sur céréales à paille. Ces essais ont pour objectif d’évaluer les performances de produits de biocontrôle (micro-organisme, soufre, …) en application du produit seul ou associé à des doses réduite de fongicide. Les essais se poursuivent en 2018 avec de nouvelles pistes (micro-organismes, extraits végétaux). Tableau 1 : Liste des produits de biocontrôle actuellement disponibles pour lutter contre les maladies des céréales à paille Type de produits Spécialité Matière active Usages - Maladies Macro-organismes / / / Micro-organismes Cerall Pseudomonas chlororaphis (souche MA 342) TS céréales Carie + fusarioses + septoriose Polyversum Pythium oligandrum (souche M1) TPA blé + orge Fusarioses Médiateurs chimiques / / / Substances naturelles Vacciplant GC laminarine Nombreuses spécialités Soufre TPA blé + orge Oïdium + piétin-verse + septoriose + helminthosporiose Coopseed sulfate de cuivre TS céréales Carie + fusarioses Silicosec terre de diatomées Céréales Ravageurs stockage

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Qualité des semences de céréales et protéagineux

Mai 2018

Le biocontrôle pour lutter contre les maladies des céréales à paille En quelques années, le biocontrôle s’est organisé en France, notam-ment via le Consortium Biocontrôle. Créé en 2016 à l’initiative de l’INRA, ce Consortium est un partenariat public-privé pour la recherche, le développement et l’innovation du biocontrôle en France qui réunit actuellement 47 membres (entreprises, instituts de recherche, instituts techniques, pôles de compétitivité). La finalité est de contribuer à l’es-sor du biocontrôle en France et de favoriser l’usage des produits par les agriculteurs. Dans ce cadre, des réseaux d’expérimentation dédiés au biocontrôle ont été constitués (projet XP-BC) qui visent à déployer trois réseaux expérimentaux, multi-cultures et multi-régions dont l’un concerne les maladies en grandes cultures (blé et colza).

Ce réseau d’expérimentation est complémentaire au réseau R2E (réseau d’excellence expérimentale), instance de collabora-tion entre diverses structures de recherche et développement travaillant ensemble à l’élaboration de références agronomiques et qui vise à évaluer collectivement les innovations agronomiques au sens large. La Fnams participe activement à ces dif-férents réseaux d’expérimentation. Par exemple, depuis 2016, la Fnams a rejoint le réseau R2E regroupant ARVALIS et des coopératives, sur la thématique de la gestion de la fusariose sur céréales à paille. Ces essais ont pour objectif d’évaluer les performances de produits de biocontrôle (micro-organisme, soufre, …) en application du produit seul ou associé à des doses réduite de fongicide. Les essais se poursuivent en 2018 avec de nouvelles pistes (micro-organismes, extraits végétaux).

Tableau 1 : Liste des produits de biocontrôle actuellement disponibles pour lutter contre les maladies des céréales à paille

Type de produits Spécialité Matière active Usages - Maladies

Macro-organismes / / /

Micro-organismesCerall Pseudomonas chlororaphis

(souche MA 342)TS céréales

Carie + fusarioses + septoriose

Polyversum Pythium oligandrum (souche M1)

TPA blé + orge Fusarioses

Médiateurs chimiques / / /

Substances naturelles

Vacciplant GC laminarine

Nombreuses spécialités Soufre TPA blé + orge

Oïdium + piétin-verse + septoriose + helminthosporiose

Coopseed sulfate de cuivre TS céréales Carie + fusarioses

Silicosec terre de diatomées Céréales Ravageurs stockage

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Gestion des lots de report : un test pour évaluer l’aptitude des lots d’orge à la conservationLe test de vieillissement accéléré (test VA) a été mis au point par la Fnams sur blé. Ce test permet d’évaluer l’aptitude des lots à bien se conserver. A chaque lot, est défini un risque de perte de faculté germinative en cours de conservation qui dépend à la fois de la teneur en eau du lot et du résultat du test VA. Ce test permet ainsi une meilleure gestion des problèmes de germina-tion que l’on peut rencontrer sur les lots de report. Cet outil de diagnostic a été mis à disposition des établissements produc-teurs de semences en 2003 qui, depuis, utilisent ce test avec succès.

Afin de poursuivre la mise à disposition de nouveaux outils vers les laboratoires des stations de semences, la Fnams a décidé de paramétrer le test de vieillissement accéléré à l’orge. Les résultats montrent que la prédiction du test VA est satisfaisante sur blé et orge pour les lots à faible risque : le risque d’observer une perte de faculté germinative >10% en 6 mois est effective-ment quasi-nul (0-1%) pour les deux espèces. Pour les autres classes de risque (moyen, élevé et très élevé), le risque apparait supérieur pour l’orge par rapport au blé, c’est-à-dire que davantage de lots d’orge présentent une perte de faculté germinative >10% en 6 mois. En conclusion, la grille de risque établie pour le blé est valable pour l’orge.

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Positionnement des points « orge » sur la grille de risque établie pour le blé. Le risque de perte de faculté germinative >10% dans les 6 mois dépend de la teneur en eau du lot et du résultat du test TVA. Les points en rouge correspondent aux échantillons pour lesquels une perte de FG >10% au bout de 6 mois a effectivement été observée. La propor-tion de points rouges est d’autant plus élevée que le risque augmente.

Nématodes des tiges sur féverole : repérer les dégâts en parcelle et contrôler la qualité des semences !Deux espèces de nématodes des tiges Ditylenchus dipsaci et Ditylenchus gigas sont à l’origine de dégâts en culture de féverole. Même si l’impact sur le rendement reste très aléatoire, les pertes de rendement liées à la présence des nématodes peuvent atteindre 70% en cas de forte infes-tation. La contamination des semences par ces nématodes pose problème car les semences constituent alors une source de dissémination des nématodes. Sachant que la survie du néma-tode dans le sol peut atteindre 10 ans et qu’il n’y a actuellement aucun moyen de lutte en végéta-tion, l’utilisation de semences contaminées par le nématode est à proscrire.

Les enquêtes en parcelles de multiplication menées par la FNAMS ont permis de mettre en évidence trois facteurs de risque. Une fréquence élevée de retour de la féverole sur la parcelle (>2 en 10 ans ou 2 rapprochées en 10 ans) constitue le facteur de risque majeur. Viennent ensuite l’absence de contrôle des semences de base et enfin le type de sol (le nématode préfère les sols riches en argile et facilement hydromorphes). Il ne faut pas oublier le climat au printemps car le nématode se développe et se déplace plus facilement en conditions fraîches et humides.

Les travaux actuels de la FNAMS sur ces nématodes visent à évaluer (i) la persistance du nématode dans le sol (en fonction de la rotation et des cultures) et (ii) l’efficacité de la fumigation de plusieurs produits contre les nématodes du genre Ditylenchus sur semences de féverole.

Symptômes liés à la présence de nématodes du genre Ditylenchus sur féverole. A droite, des plantes touchées qui sont chétives (croissance terminale stoppée), tordues et épaissies par rapport aux plantes saines à droite.

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Lors des récoltes, des déchets s’accumulent sur les diffé-rents matériels. Les graines d’autres espèces ou de variétés différentes, souvent inséparables au triage, peuvent entraî-ner la perte partielle d’un lot de semences (non-respect des normes de pureté variétale ou/et spécifique). Quelle que soit l’espèce préalablement récoltée, la moissonneuse-batteuse sera soigneusement nettoyée avant toute intervention dans une parcelle de multiplication de semences. Cette opération est à réaliser en dehors des parcelles afin d’éviter de les polluer par les adventices. Le souffleur-aspirateur thermique à feuilles ou le compresseur permettent de nettoyer rapide-ment toutes les parties accessibles. La vigilance portera sur la coupe, le convoyeur, le bac à pierres, le batteur, la trémie et les vis et pieds d’élévateurs. Pour parfaire le travail, un aspirateur industriel sera bien utile.

Il faut également s’assurer de la propreté des bennes et des caissons utilisés pour le transport des semences. Contrôler leur propreté, c’est aussi s’assurer du bon verrouillage des portes. Bien avant les récoltes, un nettoyage du ou des silos d’entreposage, vis, élévateurs, trémie de déchargement sera impératif. En production de semences, le nettoyage est une étape indispensable pour préserver la qualité du lot mais il permet aussi de vérifier l’état de fonctionnement du maté-riel.

En production de semences, le nettoyage du matériel est indispensable !

La propreté des contenants doit être vérifiée lors de l’arrivée au champ.

Nettoyage de la moissonneuse : le souffleur thermique est d’une aide précieuse, la finition se fera avec l’aspirateur industriel.

La bruche de la féveroleMalgré des moyens significatifs dans la recherche de nouvelles solutions, la gestion effective du ravageur en parcelle de produc-tion de semences de féverole reste pour le moment limitée.

Avec le retrait successif de matières actives (ex : bifenthrine, endosulfan) et de produits commerciaux (ex : KARATE XPRESS), en même temps que le durcissement de la réglementation concernant l’usage (une seule application en floraison autorisée), la lutte contre la bruche devient de plus en plus problématique. Depuis plusieurs années, Terres Inovia et la Fnams réalisent des essais sur la lutte contre la bruche de la féverole. A l’heure actuelle, les solutions testées à base de pyréthrinoïdes de syn-thèse (betacyfluthrine, esfenvalérate) ou de produits de biocontrôle (huile de paraffine, micro-organisme, kaolinite, fructose), ne permettent pas de diminuer significativement le taux de grains bruchés. Les essais se poursuivent en 2018 sur de nouvelles

matières actives (produits chimiques et de biocontrôle). Des essais équivalents sont également mis en place sur les pois et la lentille porte-graine.

Ces travaux sont menés en partenariat avec Terres Inovia et l’ANILS. En parallèle, l’INRA de Versailles a réalisé une étude sur le comportement de la bruche de la féverole. Cette étude a permis d’identifier les signaux chimiques (émis par la féverole) attractifs pour les bruches.

Un kit « d’odeurs attractives » et un piège pouvant potentiellement servir à l’avertissement agricole ont ainsi été mis au point. Deux années supplé-mentaires sont nécessaires pour évaluer la possibilité de développer du « piégeage de masse » sur le même principe. Bruche adulte qui émerge d’une graine de féverole

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Document conçu et réalisé par le service technique de la FNAMS (M. Bomard, C. Buridant, C. Etourneau, J.-A. Fougereux, A. Joffre, J. Gombert) dans le cadre des actions techniques de la Section Céréales et Protéagineux du GNIS. Photos FNAMS.

GNIS - 44 rue du Louvre - 75001 PARIS Tél : 01 42 33 78 01 - Fax : 01 42 33 88 30

[email protected]

FNAMS - Impasse du Verger - Brain sur l’Authion - 49800 LOIRE - AUTHION Tél : 02 41 80 91 00 - Fax : 02 41 54 99 49

[email protected]

2017 a été marquée par la perte de l’isoproturon, 2018 voit la disparition d’une autre substance active : le flupyrsulfu-ron. Quelles conséquences pour le désherbage des céréales à paille d’hiver ?

La perte de ces deux matières actives entraîne une dimi-nution des solutions de désherbage contre les graminées adventices. Les solutions restantes sont plus onéreuses et sont à base de matières actives dont l’avenir reste incertain : prosulfocarbe, pendiméthaline, flufenacet et chlortholuron. Cette dernière montre des résultats similaires à l’isoprotu-ron mais il existe de fortes restrictions : non utilisables sur sols drainés et applicables uniquement sur variétés tolé-rantes à la molécule.

La perte du flupyrsulfuron entraîne notamment une impasse de désherbage anti-graminées dans les avoines d’hiver.

Tableau 1 : Rappel des différentes dates pour le retrait des produits

Produits à base de :

Date de

retrait de l’AMM

Date de fin de commercialisation

Date de fin d’utilisation

isoproturon 09/09/16 31/03/17 30/09/17

flupyrsulfuron 13/12/17 13/03/18 13/06/18

Désherbage des céréales, perte de matières actives !

Comment protéger à l’automne les céréales contre les pucerons vecteurs de la jaunisse nanisante de l’orge ( JNO) sans néonicotinoïde ?La jaunisse nanisante de l’orge (JNO) est une maladie virale transmise par les pucerons qui touche les céréales à paille. L’orge est l’espèce la plus sensible, la maladie pouvant entrainer des pertes de rendement de 20 à 30 q/ha, voire plus dans certaines situations. La lutte contre la maladie se fait essentiellement par le contrôle des pucerons vecteurs des virus. En France, même si plusieurs espèces peuvent transmettre la JNO, l’espèce Rhopalosiphum padi est celle qui représente le risque majeur à l’automne. Le stade le plus sensible de la plante se situe entre les stades 1 à 3 feuilles puis diminue avec le développement.

Jusqu’à présent, la lutte insecticide était réalisée soit par un traitement de semences à base d’imidaclopride (insecticide de la famille des néonicotinoïdes), soit par un traitement en végétation (nombreuses pyréthrinoïdes). Suite à l’interdiction de l’imidaclopride et en l’absence d’une éventuelle dérogation, seuls les traitements en végétation resteront possibles à l’automne 2018. L’avantage du traitement de semences réside en son action systémique par ingestion par rapport aux pyréthrinoïdes qui agissent par contact. Le traitement en végétation ne doit donc se faire qu’en présence avérée de pucerons (10% de plantes porteuses ou présence des pucerons depuis plus de 10 jours sur la parcelle). De plus, en raison de leur persistance d’action d’environ 2 à 3 semaines, les pyréthrinoïdes ne protègent pas les nouvelles feuilles formées. Ainsi, la surveillance des parcelles est indispensable pour répéter l’application si de nou-velles infestations sont observées.

En matière de lutte intégrée, il est possible de réduire les infes-tations en évitant les semis précoces qui exposent fortement les jeunes plantes aux pucerons et d’utiliser des plantes tolérantes à la JNO qui supportent des infestations soutenues de pucerons. Cepen-dant, ce levier génétique n’est actuellement possible que sur l’orge avec seulement deux variétés tolérantes.

Pucerons adultes ailés et larves aptères de Rhopalosiphum padi, principale espèce vectrice de la maladie JNO à l’automne sur céréales

JNO sur orge : à gauche parcelle protégée par deux traitements en végétation à l’automne et à droite symptômes de JNO sur parcelles non protégée ou protégée par un seul traitement en

végétation à l’automne dans des conditions de très forte pression de pucerons