Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain...

7

Click here to load reader

Transcript of Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain...

Page 1: Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), Olivier Besancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée

3 JDJ-RAJS n°279 - novembre 2008

Pétition pour la fermeture des EPMParmi les sept établissements pénitentiaires pour mineurs, pré-vus par la loi Perben I de septembre 2002, cinq ont été ouverts àgrand renfort d'une communication gouvernementale démago-gique. Ainsi, le précédent Garde des sceaux se plaisait à procla-mer que l'objectif des EPM serait «de faire tourner la détentionautour de la salle de classe». Non ! L'objectif des EPM est biend'augmenter l'incarcération et invoquer la salle de classe est unefaçon de minimiser le poids des murs, du système disciplinaire,de l'isolement et le but punitif de la prison.

Signer la pétition

Plus récemment, malgré le suicide d'un adolescent à l'EPM de Meyzieule 2 février 2008 Rachida Dati l'actuelle Garde des Sceaux en rajoutaitdans la banalisation. Elle affirmait «il faut pérenniser ce type de structu-res, elles ont fait leurs preuves».

La ministre, obnubilée par la promotion de ces nouvelles prisons, en tireavant l'heure un bilan positif. Le suicide d'un adolescent n'est qu un acci-dent regrettable lorsqu il s agit de mettre en œuvre une politique de ré-pression toujours plus forte à l'égard des mineurs qui commettent desdélits. Dans le droit fil des propos du président de la République pendantla campagne électorale, qui déclarait qu'un adolescent très grand et vio-lent ne pouvait être considéré comme un mineur, sa ministre de la justiceannonce pour 2008 une refondation de l'ordonnance de 1945.

Au prétexte d'un changement de nature de la délinquance des mineurs,elle propose d'appliquer aux plus âgés le droit pénal des majeurs, et d'in-fliger des peines à des enfants de plus en plus jeunes. Trahissant l'espritde l'ordonnance de 1945, le gouvernement fait le choix de répondre auxactes délictueux par la seule logique de l'enfermement, écartant la néces-saire recherche des causes de ces passages à l'acte qui seule pourrait enéviter la réitération.

La création de nouvelles prisons est emblématique de cette politique.Elle encourage l'incarcération, allant jusqu à lui conférer des vertus deréinsertion, en dépit de tous les constats généralement admis. Depuisl'ouverture du premier EPM début 2007 de nombreux incidents violentsse sont multipliés dans ces établissements entraînant des opérations demaintien de l'ordre, des mesures d'isolement pour les jeunes et des consi-gnes de silence en direction des personnels. Ce climat de violence estaccentué par la prégnance des activités intensives et obligatoires. Lesmouvements de rébellion qui éclatent dans les EPM, focalisent les per-sonnels sur les moyens disciplinaires pour soumettre les mineurs. Alors,la souffrance des adolescents, renforcée par l'enfermement, ne peut êtreentendue.

N'oublions jamais que les adolescents qui commettent des délits ont vécudes difficultés profondes et anciennes, des situations de violence et deprise de risque, et peuvent porter atteinte à leur propre intégrité physi-que. L'incarcération qui est une rupture supplémentaire, renforce les ris-ques de passages à l'acte violent tournés contre les autres ou contre eux-mêmes. Le souci du soin et de l'éducation pour prévenir les mises endanger des détenus, est contradictoire de fait, avec la logique punitive dusystème carcéral.

Pourtant ces prisons sont présentées comme des lieux d'éducation et ceuxqui parlent d'éducation par la prison font semblant d'oublier qu elle ren-force toujours l'exclusion et favorise la récidive. Pour des jeunes en si-tuation d'exclusion sociale, le risque existe pour beaucoup d'entre eux dese construire une identité de délinquant et de se réfugier dans un statut de«taulard». Fernand Deligny disait «Être un vaurien vaut mieux que n'êtrerien».

L'ordonnance de 1945, posait le principe du caractère exceptionnel del'incarcération. C'est à partir du constat des effets pathogènes des lieuxd'enfermement que les centres d'observation pour mineurs dans les pri-sons ont été fermés dans les années 1970. Déjà, à l'époque de la créationde ces centres, ils avaient été présentés comme innovants au nom de laprésence d'éducateurs de la PJJ au sein de la détention.

De tous temps, que ce soit au nom d'une observation des mineurs commehier, d'une amélioration des conditions de détention comme aujourd'huiles «prisons modernes» ont toujours conduit à une augmentation de l'in-carcération. Les quatre premiers EPM sont aujourd'hui complets, danscertaines régions les quartiers mineurs des prisons restants sont saturés.

Ainsi, le gouvernement privilégie l'incarcération des adolescents en créantles EPM au détriment des structures éducatives. Un seul de ces EPM de60 places équivaudrait à 6 foyers éducatifs de 10 places et 8 servicesd'insertion professionnels pour 250 mineurs ainsi que 10 services de mi-lieu ouvert soit 1 500 jeunes suivis. Ce sont là des modalités de prise encharge éducative qui ont fait la preuve de leur efficacité.C est également ce que préconise la Convention internationale des droitsde l'enfant qui impose la recherche de solutions éducatives pour les jeu-nes délinquants.Il existe en France un à deux millions d'enfants pauvres, la précarité etl'exclusion s aggravent. Ce sont là des facteurs qui détruisent le lien so-cial, accentuent l'isolement et le repli des familles, multipliant ainsi lesrisques de passage à l'acte au moment si tourmenté de l'adolescence. Aulieu de renforcer l'accompagnement éducatif et social qui peut limiter lesrépercussions négatives de la précarité sur la construction psychique desadolescents, le choix est fait pour ceux-ci, d'ajouter l'exclusion de l'incar-cération à l'exclusion sociale.

Nous soutenons que les moyens pour l'accompagnement éducatif doi-vent primer sur les dispositifs d'enfermement.Nous dénonçons une politique qui réduit les jeunes délinquants à leursseuls passages à l'acte, les enfermant ainsi dans une identité de délin-quant.

Nous dénonçons une politique qui en s'appuyant sur le déterminismesocial et comportemental décrète l'inéluctabilité de certains adolescentset ce faisant nie leurs possibilités de reconstruction et de perspectivesd'avenir.Nous nous opposons à une réforme de l'ordonnance de 1945 qui mettraitfin à la spécificité de la justice des mineurs et à la primauté de l'éducationsur la répression à l'égard des jeunes auteurs de délits.Nous réaffirmons que les établissements pénitentiaires pour mineurs nesont pas des structures éducatives, ce sont des prisons destinées à facili-ter le recours à l'incarcération; parce que nous avons une autre ambitionpour la jeunesse nous appelons à leur fermeture et au redéploiement desbudgets au bénéfice des structures réellement éducatives.Premiers signataires (920 signatures électroniques enregistrées):

Gérard Aschieri (secrétaire général de la FSU), Clémentine Autain (féministe, di-rectrice de rédaction du mensuel Regards), Régine Barthelemy (présidente duSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), OlivierBesancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée de Paris), NicoleBorvo Cohen-Seat (sénatrice de Paris), Jacques Bourquin (directeur à la PJJ re-traité), Maïté Bourquin (directrice à la PJJ retraitée), Robert Bret (sénateur desBouches du Rhône), Alain Bruel (juge des enfants à la retraite), AnnickCoupe (Union Syndicale Solidaires), Bernard Defrance (philosophe), PierreDelion (chef de service de pédopsychiatrie au CHU de Lille), YvesDouchin (directeur régional PJJ honoraire), Jean-pierre Dubois (président de laLigue des Droits de l'Homme), Jean-luc Einaudi (éducateur, écrivain), HélèneFranco (juge des enfants, secrétaire générale du Syndicat de la Magistrature),Romain Goupil (Cinéaste), Claude Gutman (écrivain), NoëlleGutman (puéricultrice retraitée), Maria Ines (co-secrétaire nationale du SNPES-PJJ/FSU), Samuel Joshua (professeur de Sciences de l'Éducation Université deProvence), Thomas Lacoste (cinéaste, éditeur et essayiste – La bande passante),Jacques Ladsous (vice-président des CEMEA, secrétaire du Musée Social, an-cien vice-président du Conseil Supérieur du Travail Social), Léonore LeCaisne (ethnologue), Yann Le Pennec (directeur à la PJJ retraité), NoëlMamere (député de Gironde, maire de Bègles), Jacques Miquel (Théâtre du Fil),Laurent Mucchieli (sociologue), Pierre Paresys (président de l'Union Syndicalede la Psychiatrie, psychiatre de secteur), Emmanuelle Piet (médecin de PMI), SergePortelli (magistrat), Laurent Puech (président de l'ANAS), Jack Ros (directeurrégional retraité), Evelyne Sire-Marin (magistrat, membre de la LDH), IsabelleSorente (écrivain), Catherine Stef (psychiatre, responsable d'une unité d'hospita-lisation pour adolescents), Dominique Voynet (sénatrice de Seine St Denis, mairede Montreuil)

http://petitions.fsu.fr/index.php?petition=3

Page 2: Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), Olivier Besancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée

4 JDJ-RAJS n°279 - novembre 2008

brèves

Recentrage à la PJJ…Rachida Dati, à l'occasion del'inauguration du nouvel édificede l'École nationale de protec-tion judiciair e, le 10 octobredernier à Roubaix, a soulignéclairement les intentions du mi-nistère de la justice quant à l'ave-nir de la justice des mineurs etde la PJJ en particulier. Mor-ceaux choisis :

«La justice des mineurs estainsi recentrée sur le cœur desa mission : faire acte d'autoritéet sanctionner. En matière d'as-sistance éducative, les juges desenfants n'interviennent désor-mais que lorsqu'il s'agit d'impo-ser des mesures. C'est le caslorsque les familles refusent l'in-tervention de l'aide sociale àl'enfance ou n'adhèrent pas auprojet éducatif proposé par lesservices du département».

(…)

«Cette évolution de la place dela Justice dans le traitement dessituations de danger conduit àune recentrer l'action de la pro-tection judiciaire de la jeunessesur les mineurs délinquants».

«De manière générale, c'est undevoir à l'égard de nos conci-toyens de renforcer l'action dela Justice à l'égard des mineurscriminels ou délinquants. Mamission est de mener sur ce ter-rain la politique de fermeté queles Français attendent».

Et pour le bouquet : «Je remer-cie à cette occasion l'UNASEA(représentée par son Vice-Pré-sident, Jean-José BOUQUIER).Je salue l'action de ce parte-naire qui a joué un rôle déter-minant dans la mise en placedes Centres éducatifs fermés.Son réseau d'associations estparvenu à surmonter de trèsnombreuses réticences. Des ré-sultats très encourageants ontété obtenus dans ces structures».

… tenez vous-le pourdit…«Aujourd'hui, le clivage entre larépression et la prévention esttotalement dépassé. La mission dela Justice commence lorsqu'unmineur enfreint la loi pénale. Apartir de ce moment là, elle inter-vient pour sanctionner l'acte dé-linquant et, en même temps, pren-dre toutes les mesures nécessai-res pour éviter un nouveau pas-sage à l'acte».«Je rencontre trop de jeunes quisont des délinquants endurcis aux-quels on a trop longtemps dit quele juge était là pour les aider. Seu-lement, ces jeunes très souvent nesavent même pas qu'ils ont faitl'objet d'une mesure pénale. Ilssont confortés dans une attitudeautocentrée qui les conduit à igno-rer totalement la portée sociale deleurs actes et le traumatisme pourles victimes».«Je le dis clairement : en matièrede délinquance juvénile, la con-fusion participe au sentimentd'impunité des mineurs délin-quants et constitue un facteurimportant de récidive».«À compter du 1er janvier 2009,la carte de la PJJ sera modifiée.Les 15 directions régionales lais-seront place à 9 directions inter-régionales. Dans le prolongementde la réforme de la carte judi-ciaire, cette réorganisation don-nera une plus grande homogé-néité à l'ensemble des services dela Justice».Recentrage… et cadenassage.

http://www.presse.justice.gouv.fr/index.php?rubrique=10093&ssrubrique=10720&article=16082

… et pour les non-ditsIl se répand également que laChancellerie songerait à abrogerle décret n° 75-96 de 18 février1975 fixant les modalités de miseen œuvre d'une action de protec-tion judiciaire en faveur des jeu-nes majeurs autorisant le juge àprolonger ou à organiser une ac-tion de protection, avec l'accordde l'intéressé, en faveur du jeunede 18 à 21 ans.

La charge de cette mesure pesantsur le ministère de la justice in-combe à la PJJ dont les missions«civiles» sont déjà réduites à leur

plus simple expression. Le pro-blème n'est pas nouveau et depuisplus de trois ans, les directionsdépartementales et régionales dela PJJ ont signalé aux magistratset aux associations que le robinetétait à sec (voy. notre dossier, JDJn° 252, février 2006, p. 17-32).

L'intention, sans aucun doute, estde faire peser la charge sur lesdépartements, dans le cadre descontrats «jeunes majeurs» (art.L221-1 du CASF prévoyant «unsoutien matériel, éducatif et psy-chologique (…) aux mineursémancipés et majeurs de moins devingt et un ans confrontés à desdifficultés familiales, sociales etéducatives susceptibles de com-promettre gravement leur équili-bre»). Le droit à l'aide ne sera plusdéterminé par une décision judi-ciaire faisant autorité, mais par lasimple faculté du département àproposer un «contrat» au jeune.On connaît déjà la propension desdépartements à n'accorder cettepossibilité qu'aux jeunes pris encharge par l'ASE alors qu'ilsétaient mineurs et, bien souvent,à ne pas la réserver aux «mineursétrangers isolés» atteignant l'âgede la majorité civile, quelle quesoit leur situation administrative.

Rien ne dit de ce qui adviendrade ce qui peut demeurer unecharge pour la PJJ, dans ses com-pétences «pénales», puisque l'ar-ticle 16bis de l'ordonnance de1945 prévoit que le placement dujeune peut se poursuivre «aprèsla majorité de l'intéressé que sicelui-ci en fait la demande». Lasuite au dépôt prochain du rapportde la Commission Varinard.

Taser (suite)Pendant que l'importateur enFrance du pistolet à impulsionélectrique Taser se débat avecOlivier Bensancenot (deux pro-cédures, l'une pour «dénigrementde la marque commerciale» con-tre le porte-parole de la LCR;l'autre pour violation de la vie pri-vée du même leader par AntoineDi Zazzo, patron de SMP Tech-nologies, suspecté de l'avoir faitespionner), le génial engin destinéà paralyser les perturbateurs del'ordre public fait encore parler delui.

Le 21 octobre dernier, à Marseille,un mineur, sans papier de 15 ansa été «tasé» sur un toit par unCRS. Pour le RAIDH (Réseaud'alerte et d'intervention pour lesdroits de l'Homme), cet usagesemble constituer «l'archétype desdérives prémonitoires». L'organi-sation, également en délicatessejudiciaire avec SMP Technolo-gies, demande que la dotation duTaser X26 soit restreinte aux seu-les unités d'élite de la police et lagendarmerie (GIGN, GIPN,RAID) et a introduit des requêtesau Conseil d'État tendant à l'an-nulation des décrets autorisantpoliciers nationaux et municipauxà être dotés de cette arme.

On relèvera avec intérêt que lesinstructions du directeur généralde la police nationale (PN/CAB/N°CSP 07-2670 du 07/05/2008),relatives à cette arme (de qua-trième catégorie) ne prohibent passon utilisation contre les enfants.Si elles rappellent que son emploi«doit en tout état de cause resterstrictement nécessaire et propor-tionné», notamment en cas de lé-gitime défense ou d'état de néces-sité (réf. art. 122-7 du code pénal),elle appellent simplement lesfonctionnaires à tenir compte «deséléments objectifs et présumésconcernant l'état des personnesprésentant une vulnérabilité par-ticulière», citant entre autres lesfemmes enceintes, les maladescardiaques ou encore les person-nes sous l'influence de stupé-fiants… et pas un mot concernantl'âge de la «cible» !

Dans ses observations relatives aurespect par le Royaume Uni de laconvention des droits de l'enfant,le comité des experts des Na-tions unies recommande auxautorités de mettre fin à l'usage surles enfants des armes nuisiblescomme le Taser.

www.raidh.org;

http://www2.ohchr.org/english/bodies/c r c / d o c s / A d v a n c e Ve r s i o n s /CRC.C.GBR.CO.4.pdf

Royaume UniNon content de se faire épinglerpar le Comité des droits de l'en-fant, le Royaume Uni se fait tan-cer par Thomas Hammarberg,commissaire aux droits del'homme du Conseil de l'Europe :

Page 3: Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), Olivier Besancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée

5 JDJ-RAJS n°279 - novembre 2008

«Il faut réformer le système dejustice pour mineurs (…) Il esttrop répressif et trop peu axé surla réhabilitation». Il est non seu-lement préoccupé «par les chif-fres élevés d'enfants placés endétention en Angleterre et au Paysde Galle» mais également par lerecours au châtiment corporel. Ilrappelle au Gouvernement sesobligations quant à la protectiondes enfants face à toutes formesde mauvais traitement.

Les conditions de détention desenfants et le recours à attaches età des moyens de distraction sontégalement critiqués. Le Commis-saire exhorte le gouvernement desuspendre le recours à la «nosedistraction technique» (techniqueparticulière de contrainte sur lenez) et à la «double basket hold»(technique d'immobilisation vio-lente) et appelle à l'arrêt de toutesces méthodes. Il souligne égale-ment le rôle fondamental des auto-rités locales qui «devraient assu-rer entièrement l'offre de servicespour les enfants en prison et encouvrir les frais; ils devraient éga-lement assumer toutes leurs res-ponsabilités légales vis-à-vis desenfants détenus dans ces établis-sements».

Il ajoute : «la répression ne cons-titue pas l'unique réponse à ladélinquance juvénile : des appro-ches alternatives pourraient four-nir de meilleurs résultats».

www.coe.int/press

Pour en savoir plus, on peut égalementse procurer l'«Étude Européenne sur lesviolences faites aux enfants détenus»menée conjointement par trois sectionsnationales de DEI (Belgique, France,Pays-Bas) et la Howard League (Angle-terre, Pays de Galle) : http://www.dei-france.org/DEI-communiques-commen-t a i r e s / 2 0 0 8 / R a p p o rt _ D E I _Daphne2008_francais.pdf

Rikiki…«Neuf plates-formes associatives,chargées de l'accueil et de l'orien-tation des demandeurs d'asile,seront fermées au 1er janvier2009 en province. Seules subsis-

teront des plates-formes régiona-les, bénéficiant d'une dotationannuelle de 30 à 35 000 euros.Autrement dit, une somme ne per-mettant nullement de faire fonc-tionner ce type de dispositif.

Ces fermetures, alliées à la baissedes crédits de l'hébergement d'ur-gence des demandeurs d'asile et àla suppression de 1500 placesd'hébergement, auront des effetsdésastreux.

En effet, il est prévu 30 millionsd'euros sur l'exercice 2009 pourl'hébergement des demandeursd'asile, une somme en baisse deplus de 13 millions par rapport auconsommé 2008 à la fin septem-bre (43 millions d'euros).

Seules sont programmées 2 722places pour l'ensemble des dépar-tements hors Ile-de-France et1500 places pour cette dernière.Ce dispositif, insensé, est un trans-fert de charges sur les collectivi-tés et le 115 (numéro national d'ur-gence sociale pour l'accueil sansabri), dont les effets seront parti-culièrement visibles en Île-de-France.

Faute d'accueil en province, lesdemandeurs d'asile se replient eneffet sur la région parisienne, oùla demande d'asile et d'héberge-ment a augmenté de manière con-sidérable (+ 25% en Seine-Saint-Denis pour les isolés sur les 9 pre-miers mois de l'année 2008 com-paré à 2007 et plus 100% pour lesfamilles sur Paris sur la mêmepériode).

On mesure sans difficulté les con-séquences de cette politique surdes territoires déjà saturés.

Aujourd'hui, près de 30 000 per-sonnes (nationaux et étrangers) enÎle-de-France sont prises encharge dans des structures d'hé-bergement d'urgence (foyer, hô-tels…).

De son côté, l'ANAEM (Agencenationale d'accueil des etrangerset des migrations), qui devien-dra l'Office français de l'immi-gration (OFI) en 2009, verra ladisparition programmée de 100emplois, non intégralementcompensés par le transfert de 60emplois sur deux ans en prove-nance de l'ACSÉ (agence pourla cohésion sociale et l'égalitédes chances).

Les centres de rétention bénéfi-cient, eux, d'une programmationde 15 millions d'euros sur troisans, soit cinq millions annuels, enlégère hausse.

Enfin, dernière innovation budgé-taire, l'aide au retour, si souventvantée par le Ministère, subit unebaisse de 50%, passant de 3 à 1.5millions.

Si les centres d'accueil pour de-mandeurs d'asile sont relative-ment protégés, le placement desdemandeurs d'asile en procédureprioritaire, pour près de 30%d'entre eux; la réforme de l'allo-cation temporaire d'attente, quiexclut les demandes de réexamen;la baisse drastique des créditsd'hébergement d'urgence et lasuppression de plates-formes as-sociatives sont des indices d'unepolitique annonciatrice de dra-mes».

Communiqué de France Terre d'asile, 24/10/2008, www.france-terre-asile.org

… pas selon la ministreSelon Christine Boutin, ministredu logement, 100 000 places d'hé-bergement d'urgence sont dispo-nibles dans le cadre du plan «hi-ver» «en comptant celles du dis-positif dédié aux demandeursd'asile», soulignant que «l'effortde l'État en matière d'accueil etd'hébergement généraliste appro-che désormais le milliard d'euros.La progression ces dernières an-nées est considérable».

Qui (sur)vivra… verra !

Centres de rétention…quel jeu joue-t-on ?

Le mois dernier, 80 organisationss'opposaient à la façon dont le mi-nistre de l'Identité nationale, etc.,Brice Hortefeux, voulait enca-drer l'intervention des organisa-tions humanitaires dans les cen-tres de rétention administrativepour étrangers illégaux, considé-rant que la CIMADE ne pouvaitdemeurer la seule ONG chargéede l'information et de l'aide juri-dique aux étrangers retenus,

L'appel d'offre lancé par le minis-tre, déroge au décret, en imposantles «devoirs de discrétion et deneutralité» non prévus par letexte, vise à modifier fondamen-

talement la nature de l'aide assu-rée aux étrangers puisque celle-cise limiterait désormais àl'«information, en vue de l'exer-cice de leurs droits», gommantainsi la mission essentielle «de lesaider à exercer leurs droits».

Le tribunal administratif de Parissaisi d'un référé précontractuelcontre l'appel d'offres a pris unepremière ordonnance gelant pro-visoirement le marché jusqu'au 31octobre. Les dossiers devant êtredéposés pour le 22 octobre au mi-nistère, six associations ont ré-pondu à l'appel d'offre, dont laCIMADE… mais aussi FranceTerr e d'asile (pour le Nord etl'Est) alors qu'au départ les asso-ciations refusaient ce marché lesempêchant d'intervenir ensembledans la défense des étrangers. Se-lon FTDA, «Jusqu'à la dernièreminute, nous avons souhaité tra-vailler avec la Cimade en dépo-sant une réponse commune sur unou plusieurs lots. La Cimade, pourdes raisons que nous respectons,n'a pas jugé possible une telle ré-ponse. Si la Cimade nous avaitdemandé de ne pas postuler, nousaurions accédé à sa requête».

Comprend qui peut…

Quel respect ?Parmi les six postulants pour in-tervenir dans les centres de réten-tion, outre la CIMADE et FTDA,on trouve également le ForumRéfugiés, l'Association servicesocial familial migrants (Assfam),l'Ordre de Malte… et le «Collec-tif respect». Le président de cetteassociation, un certain FrédéricBard, est membre de l'UMP Pariset chargé de mission au départe-ment Développement solidaire duministère de l'immigration. Lesétrangers seront entre de bonnesmains.L'apparition de ce collectif dansle marché est des plus curieuses,sa raison sociale étant orientéedans la promotion du «respect dûà l'autorité légitime, et en parti-culier aux institutions et au pré-sident de la République», d'où,sans doute, la parenté de son pro-moteur avec le ministère de l'Iden-tité nationale. Pour la petite his-toire, le «Collectif respect» s'estconstitué en 2003 après le matchFrance-Algérie au cours duquel

brèves

Page 4: Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), Olivier Besancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée

6 JDJ-RAJS n°279 - novembre 2008

La Marseillaise avait été siffléepar une partie du public.

Vont-ils enseigner l'hymne natio-nal pour distraire les longues jour-nées d'attente des étrangers rete-nus ? Ceux-ci leur répondront-ilsen sifflant Douce France de Tre-net ou L'hexagone de Renaud ? Àmoins que les juridictions admi-nistratives ne sifflent la fin de larécréation.

L'image de la justiceSelon un sondage IPSOS, lesFrançais ont majoritairement unemauvaise image de la justice(53,4%). Ce sont finalement lesjeunes de 15-19 ans qui en ont lameilleure (62,6%); ils ont égale-ment une bonne opinion de l'avo-cat (69%), quoiqu'ils y aient eutrès peu recours (7,2%). Mais çase dégrade déjà chez les 20-24 ans(46,1% de satisfait contre 53,9%).

Allez, Madame Dati, encore unpetit effort pour dégoûter notrejeunesse des institutions de laRépublique !

http://www.ipsos.fr/CanalIpsos/articles/2636.asp

Accord franco-roumainencore…Cette fois, c'est DominiqueVersini qui s'en prend au projetde loi de ratification de l'accordpassé entre la Roumanie et laFrance concernant le retour desenfants roumains dans leur pays.

Dans une interview au Parisien(11/10/2008), elle considère quele premier accord, auquel elle aparticipé en qualité de secrétaired'État à la lutte contre l'exclusion,en 2002, «a concerné assez peud'enfants, environ une cinquan-taine. Mais il ne s'agissait pasd'un accord de reconduction mas-sive. Il visait à l'inverse à proté-ger ces mineurs en difficulté enles plaçant sous la protection d'unjuge des enfants. Il s'agissait dedéterminer, au cas par cas, via uneenquête dans leur pays d'origine,

s'ils pouvaient ou non retournerchez eux et retrouver une familledont ils étaient séparés. Le retourne pouvait s'opérer qu'avec leconsentement de l'enfant».

Cette fois, elle s'insurge contre letraité à l'examen de la commissiondes affaires étrangères du Sénat :«Le changement d'approche estclair. On oublie que ces jeunessont en danger, pour les regardercomme des enfants dangereux. Cetexte rend la saisine d'un juge desenfants facultative et permet auparquet d'ordonner une recon-duite immédiate. Il accélère laprocédure et supprime le consen-tement du mineur. Il marque unrenoncement aux principes fonda-mentaux de la protection de l'en-fance, en contradiction avec no-tre propre loi et avec la Conven-tion internationale des droits del'enfant» (pour plus d'info : JDJ n°278, octobre 2008, p. 7-8)

Sera-t-elle entendue ?

DroguesDans un «climat sécuritaire», lesdeuxièmes rencontres nationalesde la réduction des risques enmatière de drogue se sont tenuesle 16 octobre à Bobigny. Le vice-président de l'Association fran-çaise pour la réduction des ris-ques liés aux usages de drogues,Valère Rogissart, considère queles progrès sont insuffisants, mal-gré ceux enregistrés depuis lesannées 80 pour enrayer les conta-minations grâce à la distributionde seringues, visant «les incohé-rences induites par la pénalisationdes drogues».

Les associations se sont toutefoisréjouies de la présence deRoselyne Bachelot , ministre dela santé qui a déclaré vouloir«mieux évaluer les méthodesd'éducation aux risques liés à l'in-jection, en collaboration avec lesassociations qui sont au plus prèsdes personnes souffrant d'addic-tions».

Cantine scolaireLa FCPE réclame la reconnais-sance du statut de la restaurationscolaire comme service public àpart entière.

La restauration scolaireaujourd'hui est de la compétence

des collectivités territoriales (mai-ries pour les écoles, conseil géné-ral pour les collèges et conseil ré-gional pour les lycées), déléguéeà des sociétés privées dans lamoitié des cas en primaire etmoins de 10% des cas dans le se-cond degré.

Considérant qu'il s'agit d'un «outilde santé publique», l'organisationde parents d'élèves réclame «unerestauration de qualité», «un ser-vice ouvert à tous», quelle que soitla situation d'emploi des parents,avec une tarification proposée enfonction du quotient familial, etqu'elle ne soit pas déléguée auprivé.

www.fcpe.asso.fr/

Bel exemple derespect…Suite à une altercation avec desinfirmières scolaires, le recteur del'académie d'Orléans-Tours a dûprésenter sa démission. Recevantles déléguées syndicales venueslui annoncer qu'elles n'avaient pasl'intention de pratiquer des testsde dépistage du langage, actesn'entrant pas dans leurs compéten-ces, le recteur s'est mis en colèreet, après avoir traité la représen-tante du syndicat Snics-FSU de«criminogène» et dit qu'elle por-terait la responsabilité de non-as-sistance en personne en danger, aproféré des mots qu'un conseil dediscipline ne voudrait pas laisserpasser : «Je vais vous gifler», et«je vous emmerde» (par trois fois).

Il ne manquait plus que le «casse-toi pov' conne». C'est lui qui s'est«cassé».

Pas très cosmétiqueL'Agence française de sécuritésanitaire des produits de santé(Afssaps) va renforcer les contrô-les sur les produits cosmétiquesdestinés aux jeunes enfants, no-tamment ceux qui sont gracieuse-ment distribués aux mères dans les«mallettes de naissance» soup-çonnées de contenir un véritable«cocktail toxique».

Des scientifiques soupçonnentnombre de produits de contenirdes parabens, de l'EDTA, dubisphénol A, du phénoxyéthanol(pour plus de renseignements,consulter la pharmacopée).

Paris et la protection del'enfanceÀ Paris, où quelques 5 000 enfantssont confiés à l'aide sociale à l'en-fance, 12% des foyers vivent sousle seuil de pauvreté. Myriam ElKhomri , maire-adjointe pour laprotection de l'enfance et la pré-vention spécialisée à Paris, veut«mettre l'accent sur l'éducatif» eta annoncé le 14 octobre l'ouver-ture de six nouveaux centres so-ciaux d'ici 2014. Elle disposera en2009 d'un budget d'aide sociale àl'enfance de 305 millions d'euros,en hausse de près de 3,5% par rap-port à 2008

Elle veut renforcer les budgets des28 centres sociaux parisiens en2009 et 2010, et en ouvrir six nou-veaux d'ici 2014, dont trois en2011 sur les secteurs Kellermann(18e), Binet (18e) et boulevardMac Donald (18e-19e).

Par ailleurs, des lieux d'accueilinnovants pour les jeunes (soutienscolaire, insertion professionnelle,relations familiales), , doiventouvrir leurs portes dont le premierest prévu début 2009 dans le 10e

Il est aussi prévu de déconcentrerles services d'aide sociale à l'en-fance, actuellement installés ruede Reuilly (12e).

Un nouveau centre d'accueil de 90places ouvrira fin 2012 à la portedes Lilas (20e) pour remplacercelui de Saint-Vincent-de-Paul(14e). On se dirigerait égalementvers la création de structures mê-lant l'éducatif et la psychiatriepour les adolescents ayant de gra-ves troubles du comportement(une cinquantaine de places d'ici2014).

Sur injonction duPrésidentOn se souviendra du coup desang du Président de la Républi-que à l'annonce de la censure parle Conseil constitutionnel d'unepartie de la loi du 25 février2008 relative à la rétention desûreté. Les «Sages» avaientretoqué le caractère rétroactif dela mesure de rétention, considé-rant qu'elle ne pouvait s'appli-quer aux délinquants déjà con-damnés ou condamnés pour desfaits antérieurs à la promulga-tion de la loi (déc. n° 2008-562

brèves

Page 5: Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), Olivier Besancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée

7 JDJ-RAJS n°279 - novembre 2008

DC, 22/02/2008, voy. JDJ n°274, avril 2008, p. 36 à 50 et p.59). Le chef de l'État avait solli-cité les lumières du Premier pré-sident de la cour de cassationpour connaître le moyen de con-tourner ce principe élémentairedu droit pénal.

La Garde des sceaux vient d'an-noncer qu'elle présenterait d'iciquelques semaines «un projet deloi, faisant suite aux recomman-dations du rapport Lamanda, etrenforçant la surveillance des per-sonnes, pouvant s'exercer sur lespersonnes libérées ne pouvant pasêtre placées en rétention de sûretélors de leur libération».

Le rapport du Haut magistratpréconise, parmi 23 recomman-dations, des ajustements «de na-ture à achever l'intégration de laloi (…) parmi les autres disposi-tifs d'exécution des peines», no-tamment en n'accordant pas deremise de peine ou de libérationconditionnelle à ceux qui ne seseront pas fait «soigner» et lerecours à l'appréciation de «ladangerosité criminologique»délimitée par un conseil scienti-fique national.

h t t p : / / l e s r a p p o r t s . l a d o c u m e ntationfrancaise.fr/BRP/084000332/0000.pdf

Juge des tutellesUn petit texte, inclus dans ungrand texte, vient de passer le capde l'Assemblée nationale. Désor-mais, le juge aux affaires fami-liales devrait exercer les fonctionsde juge des tutelles des mineurs.Selon le texte communiqué auSénat, «Il connaît :1° De l'éman-cipation ; 2° De l'administrationlégale et de la tutelle des mineurs ;3° De la tutelle des pupilles de lanation».

Proposition de loi adoptée par l'as-semblée nationale en premièrelecture, «Simplification et de cla-rification du droit et d'allégementdes procédures» (texte adoptén° 190, 14/10/2008).

ErranceL'association marseillaise JeunesErrants a été mise en liquidationjudiciaire faute d'avoir obtenudans les temps le transfert de prèsde 250 000 euros de fonds euro-péens que devaient lui faire par-venir l'État.

Cette association, spécialisée dans«l'aide aux mineurs isolés» s'étaitillustrée dans une pratique discu-table de «retour au pays», sansque soient clairement exposées lesgaranties d'accueil de ces enfants,notamment au Maroc. L'objectifde retirer les enfants de la rue pourles faire échapper à la prostitutionet aux réseaux, pour louable qu'ilsoit, ne pouvait à lui seul consis-ter en traitement social du dangerpar le rapatriement.

Elle avait récemment rué dans lesbrancards (et s'était tirée une balledans le pied ?), reprochant au mi-nistère public de recourir systéma-tiquement aux tests osseux de dé-termination de l'âge, empêchantainsi que les mécanismes de pro-tection de l'enfance – et l'actionde l'association – de pouvoir sedévelopper et d'entretenir la sus-picion à l'égard des jeunes deman-deurs d'aide.

Au-delà des critiques, on s'éton-nera que des fonds européens ré-servés pour 2006 ne soient déblo-qués qu'en 2009, contraignantainsi une association à devoirmettre la clé sous le paillasson.

Le premier déçu serait le Procu-reur de Marseille, selon lequel l'as-sociation est victime «d'un blo-cage administratif que personnen'est en mesure de décrypter».

La créativité etcomment la réveiller

J.Finder (avec la collaboration deS.Tomkiewicz, directeur scienti-fique de l'unité 69 de l'INSERM.)

«Sans succomber à la tentationd'un récit autobiographique, il mefaut faire un aveu «qui me faisaitrougir lorsque j'étais jeune etbeau», et qui me fait sourire main-tenant que je ne le suis plus : Pe-tit garçon, je rêvais d'être un jourécrivain.

Puis, adolescent, je dus me ren-dre à l'évidence que je ne savaispas consigner clairement sur pa-

pier mes idées que je trouvaispourtant pleines d'intérêt.

Pour vaincre mes complexes de«médiocrité», j'avais même suivides cours de rédaction littéraire,dans l'espoir d'effacer en mêmetemps les reliquats de mes origi-nes de métèque.

C'est peut-être pour toutes cesraisons qu'une des passions de mavie a été d'aider à s'exprimer demanière communicable, puis faireécrire, les enfants sans parole.

Lorsque, le 1er juillet 1950, aban-donnant ma très modeste carrièred'enseignant, j'ai franchi les ves-tiges du vieux portail du CentreFamilial des jeunes de Vitry,j'avais dans mes bagages un cer-tain nombre de poèmes en verslibres ou en prose de ma compo-sition.

Les pères maristes chargés de maformation scolaire, prétendaientque mes dons de narrateur méri-taient une formation adéquate. Ilsavaient donc tenté, sans grandsuccès, de me faire composer desalexandrins. L' adolescent quel-que peu entêté que j'étais alorspréférait de loin des vers plus li-bres, débarrassés de leurs règlesaux allures obsessionnelles.

Au début de ma carrière au ser-vice des adolescents exception-nels je ne voyais aucun rapportentre mes maladroites composi-tions personnelles et mon travaildans le cadre d'un foyer, au mi-lieu des jeunes.

La première année, pour mieuxanimer le groupe, d'abord de 16puis de 25 garçons, il fallait àchaque instant tenir compte d'unbudget éducatif, à cette époque …totalement inexistant sur le planfinancier. Nos veillées étaient ali-mentées par des textes littérairesque j'avais traduit de l'anglais oude l'allemand et que je faisais lirepar les jeunes sur son musical.Ces lectures ont donné bientôtnaissance aux émissions radio-phoniques du soir, transmises parnotre «Club Électronique» quiavait équipé chaque chambre d'unpetit haut-parleur mural. Le suc-cès de cette présentation, l'en-thousiasme un peu délirant desadolescents me rendirent plusaudacieux et progressivement jeleur proposai des textes de mapropre création.

Or certains jeunes avaient com-posé des poèmes avant même leurarrivée au Foyer. Mon «succès»encourageait ceux qui, en mal decomposition, n'osaient pas encoresortir leurs œuvres de leurs ca-hiers.En 1952, à l'arrivée de JeanUghetto, premier directeur duC.F.D.J. de Vitry s/Seine supérieu-rement doué pour la compositionet la récitation, la créativité denotre Foyer prit un élan de grandequalité. Au cours des soirées mu-sicales, Jean Ughetto à la guitareet moi à l'accordéon, nous com-mençâmes à improviser chansonset petits textes.Je me contentais de faire des bri-bes de chansons ou de déformercertaines compositions à la mode.Tout cela d'un drôle fort primairequi faisait rire les plus déprimés.C'est à cette époque que JeanUghetto compose la célèbre chan-son de Robert, pour mettre en re-lief le principal personnage de nosjeux sociodramatiques. Dans lespremiers mois de nos «soirées lit-téraires», aucun de nos jeunes nefaisait des chansons de son cru.Jean Ughetto lança aussi le «Clubdes Poètes» du CFDJ, en invitantparfois des spectateurs de l'exté-rieur. J'investis toute mon ardeurdans l'accompagnement musicalet dans l'enregistrement sur ban-des magnétiques de nos produc-tions. Les rencontres aux Studiosd'Essais de l'O.R.T.F avec F.Coupigny, un ancien élève, firentde moi, un adepte de la haute fi-délité de l'époque, voire même dela musique concrète.Les jeunes du Foyer trouvaientamusante cette musique faite debruitages et m'aidaient à récolterdes «sons-matière». Nous faisionsen commun, de petites composi-tions, par exemple l'illustrationmusicale des textes fantastiquesqui restent encore dans nos archi-ves (le Diable, le Conte Fantasti-que, etc)».Petit livr e qui cherche un édi-teur :«Vie, je t'aime, quand même…»(poèmes des adolescents excep-tionnels du centre familial de jeu-nes. Introduction, interventions,conclusions : J. Finder,S.Tomkiewicz, B.ZeillerÉcrire à Joe Finder :

[email protected]

brèves

Page 6: Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), Olivier Besancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée

8 JDJ-RAJS n°279 - novembre 2008

Tous les jours sur son blog http://jprosen.blog.lemonde.fr/jprosen/Tous les jours sur son blog http://jprosen.blog.lemonde.fr/jprosen/

Appel à contribution pour la Revue d'histoire de l'enfance irrégulière(RHEI). Paroles libres, p aroles captives ?

Écrit s de « jeunes placés » dans les dossiers de Justice

La Revue d'histoire de l'enfance «ir régulière» est une publi-cation consacrée au champ de l'enfance et de la jeunesse mar-ginales ou marginalisées. Elle s'intéresse donc à l'enfant dejustice (délinquant), mais aussi à l'enfant victime, à l'orphe-lin, au vagabond…, ainsi qu'aux politiques législatives et ins-titutionnelles et aux pratiques pédagogiques mises en œuvrepour prendre en charge cette jeunesse et cette enfance «irré-gulières «en France et hors de France. Elle consacrera sonprochain numéro (n°11) au thème : «Paroles libres, parolescaptives ? Écrits de «jeunes placés» dans les dossiers de Jus-tice».

Étant donnée la nature particulière des établissements habili-tés par la Justice des mineurs, les dossiers individuels consti-tués sur chaque nouvel arrivant sont souvent denses, quelleque soit la durée de leur séjour. Les moindres faits et gestessont consignés par toute une gamme d'observateurs et le jeunelui-même sans le savoir est parfois appelé à contribution. Dansles dossiers figurent en effet, outre les pièces administrativesclassiques (enquête sociale, ordonnance du juge, rapport degendarmerie…), de très nombreux écrits rédigés de la maindes mineurs (rédactions et dessins provoqués; correspondan-ces, notes, journaux intimes confisqués) ainsi que leurs paro-les retranscrites par des médiateurs que sont le policier, l'édu-cateur, le greffier ou le psychologue (entretiens, tests, rap-ports, notes de comportements…).

Dans ce contexte disciplinaire, voire même d'enfermement,toutes ces paroles recueillies sont-elles seulement biaisées,captives, tronquées ou langue de bois ? Sont-elles le reflet del'emprise institutionnelle, des stratégies du jeune faisant l'ob-jet de la prise en charge ou bien aussi la manifestation d'uneliberté d'expression ? Ces exercices montrent-ils seulementl'efficacité de cette méthode projective inventée par les psy-chiatres et psychologues pour détecter les troubles du com-portement, sont-ils une nouvelle tactique judiciaire pour sus-citer un aveu ? Ou bien ne deviennent-ils pas un moyen d'ex-pression utilisé, parfois à contrecœur, par les jeunes pour seraconter, évoquer leurs ressentis et leurs opinions, pour com-bler leur ennui ? Lorsque les jeunes écrivent ou parlent, cher-chent-ils à se dédouaner de leurs délits, à se présenter sousleur meilleur jour afin de clamer leur innocence et de protes-ter contre l'injustice ou bien se contentent-ils de témoigner,de porter un regard sur leur quotidien, leur itinéraire, leurcondition sociale, leur futur et sur la société en général ?

L'utilisation des dossiers policiers et judiciaires en histoireest depuis longtemps une pratique avérée (Arlette Farge, Jean-Claude Farcy...). Le contenu des dossiers de mineur offre ainsila possibilité de porter un nouveau regard sur la prise en chargedes mineurs en Justice en permettant non seulement de croi-ser les pratiques des différents acteurs mais aussi de les con-

fronter avec le ressenti et les réactions des principaux concer-nés par ces mesures que sont les jeunes eux-mêmes. Leursparoles ne peuvent-elles pas révéler les décalages entre lesintentions et l'interprétation qui peut en être faite, pointantpar exemple les ambiguïtés de cette justice des mineurs qui,au nom de la rééducation, esquive ou module les sanctions ens'intéressant avant tout au milieu dont sont issus les jeunes, aurisque de paraître pour ces derniers aléatoires ou partiales ?

Mais sont-ils uniquement symptomatiques de la délinquancejuvénile, de la marginalité ? Si l'engrenage judiciaire et l'ex-pertise auxquels ils sont soumis à un moment donné de leurexistence constituent une opportunité pour l'historien en créantl'archive et rendant bavards des gens qui normalement lais-sent peu de trace, ces dossiers n'offrent-ils pas d'autres pistespour la recherche ?

Pour une histoire de la minorité et de la majorité qui ne selimiterait pas aux débats et batailles législatives, mais à la fa-çon dont ces seuils d'âges sont perçus par les jeunes mineurseux-mêmes ?

Pour une histoire de la scolarité des jeunes, avec pendant long-temps l'enjeu du CEP, comme rite de passage décisif pour ac-quérir une certaine autonomie ?

Pour une histoire de la guerre vécue par les jeunes, ces en-fants de la guerre qui se retrouvent souvent à faire la guerre(Indochine) ?

Pour une histoire de l'immigration et en particulier de l'immi-gration maghrébine en métropole (avec en filigrane une his-toire de la guerre d'Algérie), en mettant en lumière le phéno-mène des jeunes dits «isolés» souvent absents des statistiquesmigratoires ?

Pour une histoire des sociabilités des jeunes et de leurs loi-sirs, vues par eux-mêmes, phénomène antérieur à celui desBlousons noirs (1959-1964) qui les cristallisent autour de lanotion de bande ?

Pour une histoire de la sexualité des jeunes, par exemple del'homosexualité, et du regard portée par la société sur ce phé-nomène considéré comme déviant ?

Pour une histoire du travail des jeunes, de l'autonomie desjeunes dès l'âge de 13-14 ans, avec comme corollaire une his-toire de l'apprentissage et du rapport au CAP ?

Pour bien d'autres histoires encore….

Contact : Les propositions d'articles (synopsis de 2000 signes maximum) doi-vent être adressées, avant le : 15 novembre 2008. Par messagerie à MathiasGardet : [email protected]. Les propositions retenues (les auteurs en serontinformés dès la fin novembre) pourront devenir un article de 50.000 signesmaximum qui devra être rendu impérativement fin février 2009 par messagerieà Mathias Gardet : [email protected], le numéro 11 de la revue RHEI devantparaître fin 2009.

Page 7: Pétition pour la fermeture des EPM - · PDF fileSyndicat des Avocats de France), Alain Bertho (anthropologue), Olivier Besancenot (Porte parole de la LCR), Martine Billard (députée

9 JDJ-RAJS n°279 - novembre 2008

tribuneUn mineur se suicide en prison,

quelles interrogations ?par Michel Huyette *

Un mineur de 16 ans vient de se suicider en prison. Quelle que soitl'âge de la victime, il n'y a sans doute pas de plus grande violencequ'un suicide puisqu'il s'agit, en conscience, de commettre une agres-sion contre soi-même et, si l'acte atteint son objectif final, de met-tre fin à sa propre existence. C'est un acte qui ne peut jamais êtrebanalisé, et qui, peut-être, retient encore plus notre attention quandil est commis par un adolescent.Dans cette affaire, il s'agit d'un mineur qui, après avoir été placé endétention provisoire, a été condamné par un tribunal pour enfants àune peine de prison ferme. Le procureur de la République, confor-mément à la loi, a mis cette peine à exécution et le mineur a étéemprisonné. Quelques temps après il s'est suicidé.Ce qui a stupéfait les magistrats dans un premier temps, c'est laréaction du ministère de la justice. Non seulement la ministre s'estdéplacée sur les lieux, ce qui est logique à condition que l'on seplace dans une démarche de compréhension du processus et afin deréfléchir à la façon de prévenir de tels drames, mais elle a en mêmetemps ordonné à l'inspection des services judiciaires d'auditionnersans délai ceux qui sont intervenus. Cela aurait pu être acceptables'il avait été procédé sereinement, avec recul et intelligence, au re-cueil des opinions des professionnels. Mais la méthode utilisée fûtplus proche de celle des interrogatoires façon police politique desanciens régimes des pays de l'est. Les inspecteurs ont notammentimposé à un substitut en congé de rejoindre immédiatement le tri-bunal, l'ont fait attendre de longues heures, puis l'ont interrogé aumilieu de la nuit. Les esprits moqueurs diront que c'est une bonnechose que les magistrats expérimentent eux-mêmes les conditionsdes gardes à vue...La méthode a d'autant plus surpris que ce qui a été fait dans cedossier correspond exactement à ce que pouvoir politique et élusdemandent depuis longtemps aux juges.Au cours des dernières années, toutes les lois concernant les mi-neurs ont été votées dans le but exclusif d'accroître considérable-ment la sévérité à leur égard. Il a été décidé d'accélérer le jugementdes affaires, d'abaisser à 13 ans (16 auparavant) l'âge à partir du-quel un mineur peut-être mis en détention provisoire, de leur appli-quer les peines planchers en cas de récidive. Bref, les injonctionsadressées aux juges sont très claires : emprisonnez les mineurs plusjeunes, plus vite, et plus longtemps. Et gare à la colère ministériellequand les condamnations ne sont pas suffisamment sévères. Laministre aurait donc pu voir dans le parquet de Sarreguemines unservice de pointe puisque en mettant rapidement à exécution unecondamnation à de l'emprisonnement les magistrats ont fidèlementobéi aux injonctions du pouvoir.Pourtant, la ministre de la justice a considéré ces magistrats commedes présumés coupables qu'il fallait interroger en laissant courtoi-sie et délicatesse au placard. Il est sans doute utile de désignerdes tiers pour éviter que le projecteur ne soit braqué sur soi.On doit aussi se demander ce qui se serait passé si le procureur,bien que connaissant l'existence de la condamnation, avait décidéd'attendre avant de la mettre à exécution, et si pendant ce délai lemineur avait commis un nouveau délit. Un déluge de critiques seserait abattu sur des magistrats irresponsables qui favorisent l'im-punité d'un mineur et sont directement responsables des récidives.Les inspecteurs des services judiciaires seraient certainement ve-nus leur demander, dans la nuit noire, pourquoi ils ont tant attenduavant d'emprisonner ce mineur...

Parce que la pratique actuelle est de faire une loi à chaque fait di-vers, afin de se convaincre que l'on est utile et que l'on conserve lamaîtrise des évènements, la ministre de la justice a publié un dé-cret, sans doute également rédigé la nuit tombée tant il est arrivévite au journal officiel (1). Il y est écrit que le procureur ne peutmettre une peine à exécution qu'après s'être fait présenter le mineuret avoir rempli une notice sur la condamnation, les antécédents etla personnalité de l'intéressé.

Mais est-il certain qu'une rencontre de quelques minutes permetteà un procureur, qui n'est ni psychologue ni devin, de savoir ce quipourrait se passer pour ce mineur une fois arrivé en prison ? Ce quedevient un détenu dépend autant des personnes qu'il y rencontre,de ce qu'il fait en prison, de l'existence ou de l'absence d'un soutienextérieur, que de la nature de sa condamnation. Et sur cela le ma-gistrat qui met la peine à exécution n'a aucune prise. Et de toutesfaçons, la notice prévue par le code de procédure pénale (2) n'est pasde nature à empêcher l'exécution de la peine. Elle est uniquementdestinée à alerter le directeur de la prison des caractéristiques par-ticulières de celui qui est conduit dans son établissement.

Alors que penser de tout ceci finalement ?

Que les juges soient utilisés une nouvelle fois par le pouvoir commedes bouc-émissaires pour éviter que ne soient posées les questionsde fond ne nous surprend plus tant cela est devenu une habitude.Qu'ils soient humiliés avec la collaboration active de magistrats dela chancellerie est plus troublant, mais cela ne concerne que l'insti-tution et n'est pas vraiment important pour nos concitoyens.

Ce qui apparaît plus fondamentalement, c'est le choc frontal entreun choix politique clairement affiché d'emprisonner un maximumde mineurs pour un maximum de temps, et les conséquences par-fois dramatiques de telles pratiques.

On peut être pour ou contre plus ou moins de sévérité envers lesmineurs. On peut avoir une vision plus éducative ou plus répres-sive, tout est admissible dans une société démocratique.

Mais il aurait été tellement plus noble, pour notre ministre, d'assu-mer ses choix.

Samedi 11 octobre 2008

* Magistrat, conseiller à la cour d'appel de Toulouse. Article publié sur le blog de l'auteur :www.justice desmineurs.fr

(1) Décret n° 2008-1040 du 9 octobre 2008 relatif à la mise à exécution des décisions pro-noncées par le tribunal pour enfants, art. 1 : «Après l'article D. 48-5-2 du code de procé-dure pénale (troisième partie : Décrets), il est inséré un article ainsi rédigé : «Art.D. 48-5-3.-Le procureur de la République ne peut ramener à exécution une peine d'emprison-nement ferme prononcée par le tribunal pour enfants, que celui-ci ait ou non ordonnél'exécution provisoire de sa décision conformément à l'article 22 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, qu'après s'être fait présenter lemineur, après application, s'il y a lieu, des dispositions de l'article 716-5.

Après avoir vérifié son identité et lui avoir notifié la condamnation dont il fait l'objet, cemagistrat remplit la notice prévue par l'article D. 55-1 puis fait procéder à l'incarcéra-tion du mineur.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la mise à exécution dela peine intervient immédiatement à l'issue de l'audience.

Elles ne sont également pas applicables lorsque, conformément aux dispositions desarticles 723-15 et D. 49-5, l'extrait de la décision doit être adressé au juge des enfantspour que ce dernier détermine les modalités d'exécution de la peine et propose le caséchéant une mesure d'aménagement».

(2) «… notice individuelle comportant des renseignements relatifs aux faits ayant motivé lapoursuite de la personne, à ses antécédents judiciaires et à sa personnalité, qui est desti-née, en cas de placement en détention, au chef de l'établissement pénitentiaire» (art.D32-1 du CPP).