PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

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Jean-Jacques MILAN - Cours de photographie - 06/09/2003 - page 06-00 PROPAGATION DE LA LUMIÈRE 06-01 Le principe de FERMAT 06-02 Principes de l'optique géométrique (1) 06-03 Principes de l'optique géométrique (2) 06-04 Vitesse de la lumière (1) 06-05 Vitesse de la lumière (2) 06-06 Vitesse de la lumière (3) 06-07 Réflexion de la lumière (1) 06-08 Réflexion de la lumière (2) 06-09 Les lois de la réflexion 06-10 L'image donnée par le miroir plan (1) 06-11 L'image donnée par le miroir plan (2) 06-12 Jeux de miroirs 06-13 Diffusion de la lumière par les surfaces 06-14 Diffusion dans les milieux troubles (1) 06-15 Diffusion dans les milieux troubles (2) 06-16 Diffusion dans les milieux troubles (3) 06-17 Diffusion dans les milieux troubles (4) 06-18 Réfraction de la lumière (1) 06-19 Réfraction de la lumière (2) 06-20 Réfraction de la lumière (3) 06-21 Réfraction limite – Réflexion totale 06-22 Réflexion totale (1) 06-23 Réflexion totale (2) 06-24 Réflexion totale (3) 06-25 Vrais et faux pentaprismes 06-26 Du pentaprisme au pentamiroir 06-27 Prismes en toit

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Jean-Jacques MILAN - Cours de photographie - 06/09/2003 - page 06-00

PROPAGATION DE LA LUMIÈRE

06-01 Le principe de FERMAT

06-02 Principes de l'optique géométrique (1)

06-03 Principes de l'optique géométrique (2)06-04 Vitesse de la lumière (1)

06-05 Vitesse de la lumière (2)06-06 Vitesse de la lumière (3)

06-07 Réflexion de la lumière (1)06-08 Réflexion de la lumière (2)

06-09 Les lois de la réflexion

06-10 L'image donnée par le miroir plan (1)

06-11 L'image donnée par le miroir plan (2)06-12 Jeux de miroirs

06-13 Diffusion de la lumière par les surfaces06-14 Diffusion dans les milieux troubles (1)

06-15 Diffusion dans les milieux troubles (2)

06-16 Diffusion dans les milieux troubles (3)

06-17 Diffusion dans les milieux troubles (4)06-18 Réfraction de la lumière (1)

06-19 Réfraction de la lumière (2)

06-20 Réfraction de la lumière (3)

06-21 Réfraction limite – Réflexion totale06-22 Réflexion totale (1)

06-23 Réflexion totale (2)06-24 Réflexion totale (3)

06-25 Vrais et faux pentaprismes06-26 Du pentaprisme au pentamiroir

06-27 Prismes en toit

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LE PRINCIPE DE FERMAT

Lorsque vous usiez vos frocs ou vos ju-pettes sur les bancs du lycée, vous avez peut-êtredétesté l'optique. Dommage, car cette sciencepermet de comprendre beaucoup de choses enphotographie. Essayons d'y remédier !

Les grands bonheurs viennent du ciel,les petits bonheurs viennent de l'effort, dit unproverbe chinois.

Imaginez donc que vous vouliez atteindrele sommet d'une montagne. Vous choisirez autantque possible le meilleur itinéraire compte tenu dedivers critères : difficultés techniques, passage parles meilleurs points de vue ou les meilleures sta-tions botaniques, rapidité du parcours, etc. Bref,vous allez OPTIMISER votre ascension.

Supposons maintenant qu'arrivé au som-met, vous laissiez échapper dans la pente un objetcapable de rouler, disons, une boîte de conserve(ou un zoom flambant neuf, n'est-ce pas A. V. ?).Parmi toutes les trajectoires possibles, cet objet vaen "choisir" une qui correspondra elle-aussi àcertains critères. D'une certaine façon, la nature vaOPTIMISER la chute ! Comment ?

En 1744, le mathématicien Pierre-LouisMoreau de MAUPERTUIS (1698-1759) fut lepremier à pressentir que tous les systèmes physi-ques évoluent selon un principe fondamental, qu'ilbaptisa principe de moindre action. La naturechoisit toujours, parmi toutes les possibilités of-fertes dans des circonstances données, celle quiest la plus "efficace". Le principe de moindre ac-tion s'applique également à la lumière. Pierre deFERMAT (1601-1665) avait proposé bien avant

MAUPERTUIS que le trajet suivi par la lumièrepour se rendre d'un point à un autre est celui quicorrespond à un temps de parcours extrémal(presque toujours minimal, parfois maximal). Lesmathématiciens préfèrent le terme "stationnaire"et il vaut mieux retenir le principe de FERMATsous la forme suivante :

Le trajet suivi par la lumière, pour allerd’un point à un autre, correspond à un tempsde parcours stationnaire.

Pierre-Louis de MAUPERTUIS et FERMAT

Ainsi, lorsque la lumière se déplace dansun milieu transparent et homogène, elle le fait enligne droite, mais avec une célérité qui dépend dece milieu. Lorsqu'elle est renvoyée par une surfacepolie ou lorsqu'elle passe d'un milieu transparent àun autre où sa célérité est différente, elle subit desdéviations toujours conformes à ce principe. Nousen reparlerons bientôt !

Le grand physicien Richard FEYNMANs'interroge. Dans un milieu homogène la lumièreva en ligne droite parce que c'est le chemin le pluscourt. Mais comment fait-elle pour savoir quec'est le plus court, a-t-elle essayé tous les autres ?(Lumière et Matière, une étrange histoire)

Richard FEYNMAN

Troublant, n'est-ce pas ???

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PRINCIPES DE L'OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE (1)

L'étude complète de la propagation de lalumière tient compte de sa double nature ondula-toire et corpusculaire, elle n'est pas du tout facile !

L'optique géométrique donne des inter-prétations simplifiées mais suffisantes pour abor-der presque toutes les questions qui intéressent unphotographe, en particulier la formation des ima-ges. Elle utilise un artifice sans existence réelle,mais très commode, le rayon lumineux, qui estune droite ou une portion de droite parcourue parla lumière. Cependant, certains résultats doiventêtre retouchés par d'autres méthodes, en particu-lier pour l'étude de la netteté des images.

Le principe de propagation rectiligneest vérifié par de nombreuses expériences. Onpeut par exemple observer une source lumineuse àtravers des petits trous percés dans une série deparois opaques et alignés à l'aide d'un fil à plomb.

Un faisceau lumineux est constitué parun ensemble de rayons lumineux. Si ces rayonssont émis par un même point S, le faisceau est ditconique, homocentrique ou encore isogène. Untel faisceau est divergent car les rayons lumineuxs'écartent quand on s'éloigne de la source.

Lorsqu'un faisceau lumineux rencontre depetites particules en suspension, de la poussière,de la brume, de la fumée, une partie de la lumièreest diffusée, ce qui permet de le localiser.

Le photographe avisé ne manquera pas detirer habilement parti de cette situation, comme asi bien su le faire notre ami Henri FORT. Ce nomne vous dit probablement rien. Sachez simplementqu'Henri, c'est la gentillesse et le talent soudésensemble. A la place de la maladie qui lui pourritla vie, franchement, je ne serais pas fier.

Henri FORT - Brouillard rétro

Si la source est infiniment éloignée, lesrayons constituent un faisceau parallèle. C'estpratiquement le cas pour la lumière solaire, si l'onraisonne sur une zone de l'espace assez petite.

Le parallélisme apparaît très bien quand lalumière arrive latéralement, comme ici :

Jean ISENMANN - Forêt de Kientzheimhttp://www.photo-alsace.com

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PRINCIPES DE L'OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE (2)

Vus "de l'intérieur", les faisceaux parallè-les présentent un point de fuite (qu'il faut masquerou placer hors du cadre sous peine d'éblouisse-ment). Ils semblent donc divergents, comme ici :

Julien BONICKI - Apparition

Cette divergence apparente n'est qu'un ef-fet de perspective, ce qui se comprend facilementen imaginant que l'on regarde dans un tuyau.

En voici un autre exemple :

Antoine BERGER - Pendant la tempête

Comme nous le verrons, des systèmes op-tiques appropriés peuvent produire des faisceauxparallèles et des faisceaux convergents.

Si le point S' est situé sur un objet opaque,le faisceau ne va évidemment pas plus loin. Sinon,les rayons ne font que s'y croiser et le faisceaudevient divergent, tout se passe comme si S' étaitune source lumineuse.

L'ouverture d'un faisceau lumineux co-nique correspond à l'angle solide défini par lesrayons extrêmes, elle se mesure donc en stéra-dians. Si le faisceau a la forme d'un cône de ré-volution, on peut aussi définir l'ouverture par ledemi-angle au sommet de ce cône. Un faisceauparallèle doit être caractérisé par l'aire de sa sec-tion droite, puisque son ouverture est nulle.

On appelle pinceau lumineux un faisceaudont l'ouverture est très faible ou nulle et dont lesdimensions transversales sont très petites.

Le principe d'indépendance des rayonslumineux peut s'énoncer ainsi :

Un milieu transparent peut transportersimultanément des rayons lumineux issus d'unemême source ou de plusieurs sources, dont lespropagations sont indépendantes.

Cela signifie par exemple qu'un très faiblepinceau lumineux peut traverser un faisceau in-tense sans être modifié en quoi que ce soit.

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 31/07/2003 - page 06-04

VITESSE DE LA LUMIÈRE (1)

GALILÉE semble avoir imaginé le pre-mier que le lumière ne se déplaçait pas de façoninstantanée. Il a décrit une expérience destinée àen évaluer la vitesse, à l'aide de lanternes dispo-sées sur deux collines des environs de Florence.

La première détermination de cette vitessea eu lieu à l'Observatoire de Paris en 1676. Enétudiant les mouvements des satellites de Jupiter,l'astronome danois Ole RØMER remarqua desdifférences entre ses observations et les étudesthéoriques, différences qu'il attribua à la distanceentre la Terre et Jupiter. A partir des valeursconnues du diamètre de l'orbite terrestre et de ladistance de Jupiter, il trouva 225 000 km/s.

Ole RØMER est aussi l'inventeurde la lunette méridienne

Ce résultat fut affiné en 1725 par l'astro-nome anglais James BRADLEY grâce au phéno-mène appelé "aberration des étoiles".

James BRADLEY

Hippolyte FIZEAU (1819-1896), alorsâgé d'à peine 20 ans, améliora la technique dudaguerréotype. Il réalisa en 1849, entre le MontValérien à Suresnes et la butte de Montmartre, lapremière mesure terrestre de la vitesse de la lu-mière. Son système, conservé à l'École Polytech-nique, comporte un disque muni de 720 dents etdeux miroirs, dont un semi-réfléchissant.

La lumière réfléchie par le premier miroirtraverse une échancrure de la roue, se réfléchit surle second miroir et revient à l'observateur aprèsavoir parcouru deux fois les 8633 m du trajet.L'appareillage comporte aussi deux lunettes per-mettant l'aller et le retour de la lumière.

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VITESSE DE LA LUMIÈRE (2)

Si on tourne très lentement la roue, la lu-mière qui passe par une échancrure a le temps derevenir par le même chemin. Dans l’oculaire, onobserve alors un clignotement, la lumière apparaîtet disparaît alternativement selon que les dents luifont obstacle ou non.

Si on accélère quelque peu la rotation, leclignotement disparaît à cause de la persistancerétinienne et l'on ne perçoit plus qu'une lumièrecontinue. C'est ce même phénomène qui fait qu'aucinéma les mouvements semblent continus alorsque la rétine perçoit, à chaque seconde, 24 imagessuccessives séparées par des "trous noirs" pendantlesquels le film avance brutalement.

Si la roue tourne suffisamment vite, lefaisceau parti par une échancrure trouve au retourune dent qui lui ferme le passage. En mesurant lavitesse de rotation pour laquelle cela se produit(12,6 tours/seconde) et la distance parcourue parla lumière pendant un aller-retour (17 266 m), oncalcule facilement la vitesse de la lumière :

En une seconde, le nombre de dents quidéfilent devant un point fixe est 12,6 x 720 = 9072

Le temps de passage d'une dent à un creuxest donc 1 / 18 144 = 0,000551 seconde.

En une seconde la lumière parcourt donc18 144 fois la distance Suresnes-Montmartre aller-retour, soit finalement :

18 144 x 17 266 ≈ 313 000 000 m

FIZEAU trouva environ 315 000 km/s.

Cette valeur était relativement imprécise,à cause de la difficulté de mesurer avec précisionla vitesse de rotation de la roue qui correspondexactement à l'extinction du faisceau lumineux.

Hippolyte FIZEAU et Léon FOUCAULT

En 1862, partant du même principe maisen utilisant un miroir tournant à 24 000 tours/min,Léon FOUCAULT réussit à obtenir une valeurbeaucoup plus précise que celle de FIZEAU, dansl'enceinte même de l'Observatoire de Paris.

On sut alors que la vitesse de la lumièreétait légèrement inférieure à 300 000 km/s.

En 1878, avec un montage que l'on pour-rait qualifier d'assez rudimentaire, Albert Abra-ham MICHELSON et Edward William MORLEYont obtenu une valeur bien meilleure encore :

299.853 km/s à 50 km/s près.

Albert A. MICHELSON et Edward W. MORLEY

En fait MICHELSON et MORLEY, parleur expérience, ont fait voler en éclats toute laphysique du 19e siècle ! En voulant tenir comptede la vitesse de la terre pour corriger leurs mesu-res, ils se sont aperçus non sans surprise que lavitesse de la lumière était la même dans toutes lesdirections et dans tous les espaces, que ceux-cisoient mobiles ou non. Donc, lorsque l'on se dé-place dans le sens de la lumière, les distances secontractent ou alors le temps se dilate …

La théorie de la relativité, développée unpeu plus tard par EINSTEIN, interprète ce phé-nomène pour le moins déroutant.

Dans le vide, toutes les ondes électroma-gnétiques se déplacent avec la même célérité, quivaut approximativement c = 300 000 km/s. C'esttoujours cette valeur que l'on évoque en parlant,sans autre précision, de la "vitesse de la lumière".Il s'agit là d'une constante universelle que l'oncherche toujours à mesurer avec le plus de préci-sion possible.

On est arrivé à c = 299 792 458 m/s.

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VITESSE DE LA LUMIÈRE (3)

La lumière se déplace plus rapidementdans le vide que dans tous les milieux matérielstransparents, que ces derniers soient gazeux, li-quides ou solides.

On trouve ainsi :

- dans l'air : environ 299 780 km/s, on nepeut pas donner de valeur plus précise car cettevitesse varie selon la pression et l'humidité ; ladifférence avec la vitesse dans le vide est trèspetite (0,03 %) et on n'en tient généralement pascompte, sauf dans quelques cas particuliers quiseront envisagés ultérieurement.

- dans l'eau : elle vaut à peu près 3/4 de lavitesse dans le vide, soit environ 225 000 km/s.

- dans le verre "ordinaire" : on ne fait pasde grosse erreur en admettant qu'elle est prochedes 2/3 de la vitesse dans le vide, donc en adop-tant la valeur 200 000 km/s

- dans les verres d'optique on peut admet-tre une gamme de vitesses allant grosso modo de215 000 à 170 000 km/s, selon la composition.

- dans le diamant : ce matériau est excep-tionnel par ses qualités optiques, la lumière s'ydéplace moins vite que dans tous les autres maté-riaux usuels : 125 000 km/s "seulement", il enrésulte des propriétés très particulières.

Ces valeurs varient aussi en fonction de lalongueur d'onde, donc de la couleur. En traversantun milieu matériel, le bleu et le violet sont plusralentis que le rouge.

Après avoir été d'abord déterminé à partirdu méridien terrestre, puis en 1889 à partir duprototype international en platine, le mètre a étéredéfini en 1960 comme étant égal à 1 650 763,73fois la longueur d'onde dans le vide d'une radia-tion orangée de l'atome de krypton 86.

En 1983, compte tenu des progrès des me-sures, on a donné une nouvelle définition fondéesur la vitesse de la lumière : le mètre est devenu"la longueur du trajet parcouru dans le videpar la lumière pendant 1/299 792 458 seconde".

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RÉFLEXION DE LA LUMIÈRE (1)

Qu'arrive-t-il lorsque la lumière trouve unobstacle sur sa route ? Hé bien … cela dépend del'obstacle ! Nous supposerons d'abord qu'il s'agitd'un objet parfaitement lisse et poli, comme on enrencontre beaucoup dans la vie courante.

Vous objecterez peut-être qu'il ne peutexister aucun objet parfaitement lisse, puisque lamatière est composée d'atomes et qu'elle possèdedonc une structure discontinue. Exact, définir la"surface" d'un objet n'est pas chose évidente !

En regardant de loin la Dune du Pyla, on al'impression d'un grand corps aux formes lisseslangoureusement allongé au bord de l'eau. Mais eny regardant de plus près, des irrégularités appa-raissent, ici des traces de pas et là, des formesd'érosion dues à la pluie et au vent.

Jean-Jacques MILAN – Sur la Dune

Alain VERNA – Falaises de sable

En fait, la Dune du Pyla n'a pas vraimentde surface, puisqu'elle n'est rien d'autre que le plushaut tas de sable non stabilisé d'Europe. Avec unbrin d'imagination, si chaque grain figurait unatome, on pourrait se représenter à notre échelle levéritable aspect de la surface des objets, qui est engénéral très loin d'être lisse et régulière …

Les surfaces qui nous paraissent les mieuxpolies et les plus brillantes sont presque toujoursdes surfaces métalliques ou métallisées. Les pro-priétaires des "belles américaines" et même des"belles françaises" des années 50 étaient fiers deleurs chromes qui, a défaut d'être discrets, n'enétaient pas moins rutilants.

Buick Roadmaster, 1950

Jean-Baptiste CHAINE – Les dents de la route

De telles surfaces renvoient la quasi tota-lité des rayonnements lumineux qu'elles reçoivent.Le fameux casque F1 cher aux pompiers en est unautre exemple. Derrière son aspect flatteur se dis-simule la vraie fonction du reflet métallique : enrenvoyant les rayonnements, en particulier l'infra-rouge, il limite efficacement l'échauffement de latête de son propriétaire, quand celui-ci va au feu.

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RÉFLEXION DE LA LUMIÈRE (2)

Les exemples que nous venons de voirmontraient des surfaces dotées d'une propriétéparticulière, l'éclat métallique. De qui s'agit-il ?

Les métaux polis et certains composéschimiques cristallisés (galène, pyrite, etc.) sontopaques et renvoient de façon dirigée une trèsforte proportion de la lumière qu'ils reçoivent. Ilest vraisemblable que l'homme a été fasciné jadispar l'éclat de l'or natif ou par celui de la pyrite,surnommée l'"or des fous".

Or natif - Mine d’Allegheny - Sierra - Californie

Cristaux de pyrite (sulfure de fer)

Le métal le plus "brillant" est l'argent.Les miroirs argentés renvoient 95 % de la lumièrevisible qu'ils reçoivent mais ils noircissent lente-ment sous l'effet de la sulfuration. Malgré leurpouvoir réfléchissant plus faible (89 %), on pré-fère en général utiliser des dépôts d'aluminium quisont beaucoup plus résistants.

L'or et la pyrite, contrairement à l'argentou à l'aluminium qui ont des reflets "blancs", ab-sorbent au contraire beaucoup de bleu et leur éclatest de ce fait teinté de jaune.

La photo des cubes de pyrite montre unedes difficultés classiques de ce type de photo.Pour rendre l'aspect métallique il faut inclure dansl'image des reflets "spéculaires" évidemment trèslumineux. Du coup, le contraste du sujet dépassepresque toujours la gamme de valeurs que peuventenregistrer simultanément les surfaces sensibles,films ou capteurs. Sur l'exemple proposé, un descubes présente une face blanche, "vide", "brûlée".Si l'on voulait la "remplir", alors tout le reste del'image deviendrait trop sombre. Ces problèmesseront traités plus loin dans un chapitre spécial.

Les objets métalliques ou métallisés ontinspiré bien des photographes par leur aspect etleur aptitude à "créer" des images inhabituelles.

Claude BACCHIANA – Regard noir

Claude BACCHIANA - Avioportrait

Mais chaque chose en son temps ! Com-ment la réflexion se passe-t-elle ?

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LES LOIS DE LA RÉFLEXION

La lumière est paresseuse. Ou alors, detemps en temps, pleine de courage. Pour aller d'unpoint à un autre, elle emprunte presque toujours lechemin le plus rapide. Ou sinon, mais c'est beau-coup plus rare, le plus lent (rien n'est plus redou-table qu'un paresseux qui se met à travailler …) !

Lorsqu'elle frappe une surface métalliquepolie, elle rebondit dans une autre direction. Lecas le plus simple est celui d'un miroir plan, figuréci-dessous :

Un rayon lumineux émis par le point Aatteint le point O (l'œil par exemple) après avoirrebondi en M sur le miroir. Les lois classiques dela réflexion spéculaire nous indiquent que :

- le rayon incident AM et le rayon ré-fléchi MO sont dans un plan qui contient ladroite (n) normale en M au miroir, et de part etd'autre de cette normale,

- l'angle d'incidence i est égal à l'anglede réflexion r.

Le rayon qui parvient à l'œil semble alorsprovenir non pas du point A, mais de son symétri-que A' par rapport au miroir.

D'après le principe de FERMAT, le trajetAMO devrait être le plus court de tous les trajetspossibles. C'est bien ce que l'on constate en éva-luant un autre trajet passant par un point M' diffé-rent de M. Quel que soit M', le trajet AM'O estégal au trajet A'M'O, lequel est toujours plus longque le trajet A'MO qui se fait en ligne droite.

Les géomètres avisés vérifieront facile-ment qu'avec un miroir plan il ne peut existerqu'un seul point M tel que i = r et que les deuxrayons incidents et réfléchis se trouvent dans unplan contenant la normale. En tout autre point duplan du miroir, l'une au moins de ces deux condi-tions n'est pas vérifiée.

Le plus court chemin pour aller de A à Oen passant par le miroir est bien sûr toujours leplus court quand on va de O à A. Le sens du par-cours change, mais pas l'itinéraire !

Ajoutons donc à notre "boîte à outils" leprincipe du retour inverse de la lumière.

La connaissance de ce principe n'a guèred'importance quand il s'agit de mettre en œuvre dumatériel photographique ou autre, par contre ellefacilite grandement certaines constructions dans ledomaine de l'optique géométrique.

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L'IMAGE DONNÉE PAR LE MIROIR PLAN (1)

Faux miroir ? Ou fausses jumelles ?

Antoine MANO – Les jumelles

Vraie main gauche et fausse main droite !

Jean-Claude JAVAUX – Dominique

Le miroir plan jouit d'une propriété hau-tement intéressante que les opticiens nommentstigmatisme rigoureux. En gros, cela veut direque le miroir plan donne des objets des imagesnettes (mais qui, en photo, seront parfois floues!).

Par symétrie par rapport au plan, tous lesrayons issus d'un point lumineux appartenant à un

objet réel semblent venir d'un autre point lumi-neux appartenant à une image virtuelle. Cettenotion est importante car l'œil ne peut percevoirque les faisceaux divergents issus d'objets réels oud'images virtuelles.

L'image virtuelle étant toujours plus éloi-gnée de l'observateur que l'objet réel, des problè-mes de mise au point se posent immédiatement.Un objet et son reflet dans un miroir ne pourrontêtre perçus comme nets sur une photo que si laprofondeur de champ est suffisante. Cette ques-tion sera traitée en détail dans le chapitre 14.

Nicolas de WEEZE, alias Nico

Si maintenant c'est un faisceau lumineuxconvergent qui est intercepté par un miroir plan,les rayons qui devraient tous se rencontrer en uncertain point de l'espace le font au point symétri-que. Ils forment alors une image réelle symétri-que d'un objet virtuel.

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L'IMAGE DONNÉE PAR LE MIROIR PLAN (2)

La chiralité (du grec cheir, main) est lapropriété de deux objets symétriques l'un de l'au-tre par rapport à un plan mais non superposables,à l'exemple de nos deux mains. En chimie, deuxénantiomères sont des composés dont les molé-cules sont chirales. On ne peut pas les distinguerpar leur formule globale.

Beaucoup d'énantiomères font tourner en

sens inverse le plan de polarisation d'une lumièrepolarisée. Pour la petite histoire, la plupart desmolécules dont sont faits les êtres vivants, àcommencer par l'ADN dont la structure est celled'une vis, ne sont pas superposables à leur image.Les cellules olfactives distinguent les deux énan-tiomères de la carvone : l'un parfume la mentheverte et l'autre le carvi (cumin sauvage).

Les visages sont approximativement sy-métriques par rapport à un plan particulier appeléplan sagittal mais en fait le côté gauche n'estjamais l'exact symétrique du côté droit ...

Jean-Jacques MILAN – Sophie n° 3

Si l'on joue à réunir deux moitiés droiteset deux moitiés gauches, on découvre deux visa-

ges dont les différences très marquées ne tiennentpas seulement à l'éclairage !

Aucun visage n'est parfaitement symétri-

que. Chacun de nous est familier avec son imagevirtuelle dans un miroir mais pas forcément avecl'image "retournée" offerte par une photo. C'estpourquoi certains portraitistes, soucieux de fournirà leur modèle une image conforme à ce qu'il, ouelle, attend, tirent les négatifs à l'envers.

Les peintres ont moins de soucis !

Paul DELVAUX - Le miroir - 1936

René MAGRITTE – titre inconnu

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JEUX DE MIROIRS

On peut faire beaucoup de choses en as-sociant des miroirs. Si on en dispose deux à 45°ou à 135°, on obtient une équerre optique.

Trois miroirs à angle droit renvoient lalumière en arrière, d'où qu'elle vienne. Les appli-cations des systèmes "rétro réfléchissants" sontrelativement nombreuses. En télémétrie, un rayonlaser frappant une telle cible (placée par exemplesur la Lune) revient dans un temps que l'on vamesurer avec une extrême précision. Citons en-core les catadioptres fixés à l'arrière des véhicules.

Si les miroirs sont parallèles, on obtientun très grand nombre de réflexions successives etun effet de "mise en abyme". C'est une astuceclassique dans les cafés, les magasins, etc., pourdonner une impression d'espace.

Un nombre non négligeable de photogra-phes s'adonne à l'art du kaléidoscope, si l'on encroit le nombre de sites dédiés à ce sujet, en parti-culier outre-Atlantique (kaleido.com et autres).

Deux ou mieux trois miroirs placés à unangle précis, par exemple 60°, 45°, 36°, etc, per-mettent par les réflexions multiples qu'ils provo-quent de réaliser un "pavage" de motifs répétitifs.

Le kaléidoscope est un objet facile à fa-briquer par tout bon bricoleur.

Maison de la Science, Université de Liège

Kaléidoscope "Evolution" de David COLLIER

Kaléidoscope "Sextet" de Marti FREUND

"Pyramid" de Janice CHESNIK

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DIFFUSION DE LA LUMIÈRE PAR LES SURFACES

Vous voulez apprendre le tennis de tableet vous avez de gros moyens ? Primo, procurez-vous un terrain de jeu à la hauteur.

Secundo, achetez un bon robot renvoyeurde balles ou mieux, louez les services d'un au-thentique champion chinois :

LIU GUOLIANG en action

Ça vous paraît hors de prix ? Alors unetable d'un genre un peu plus classique et un ra-diateur d'occasion feront parfaitement l'affaire :

Une idée à breveter d'urgence ! C'est bienmeilleur marché, tout aussi efficace, et en plus …vous êtes moins sûr de perdre à chaque partie carbeaucoup de retours vont sortir !

En touchant les lames du radiateur, la pe-tite balle de 40 mm va rebondir dans une directionimprévisible. Avec un ballon de hand-ball de dia-mètre 18,5 cm, les rebonds seraient bien moinsaléatoires et avec un ballon de basket de diamètre24 cm, on ne constaterait pratiquement plus au-cune perturbation. Quant aux projectiles de dia-mètre plus petit que l'écartement des lames, cer-tains pourraient passer à travers le radiateur.

Comparaison n'est pas raison, pourtant lecomportement des ondes électromagnétiques estanalogue à celui des balles. Dans ce cas, la dimen-sion de référence est la longueur d'onde. Ainsi, ungrillage métallique laisse passer la lumière maisréfléchit les ondes radio.

Les surfaces lisses renvoient la lumièreselon les lois de la réflexion que avons vues. Maisque veut dire "lisse" ? Simplement, que ces surfa-ces présentent des défauts nettement plus petitsque la longueur d'onde de la lumière qu'il fautrenvoyer. Les surfaces dotées d'un poli optiquesont souvent polies "au dixième de longueurd'onde", ce qui signifie que pour renvoyer correc-tement le violet (λ= 0,4 µ), les plus gros défautsne doivent pas dépasser 0,04 µ, soit 0,00004 mm.

Si la taille des défauts est voisine de lalongueur d'onde, la surface est mate et on est pro-che de la diffusion parfaite du corps orthotrope.

La plupart des objets réels produisent uneréflexion semi-diffuse, ils renvoient la lumièredans tout l'espace mais en privilégiant certainesdirections. On a toujours à gauche, l'indicatricedes luminances et à droite, celle des intensités.

Et c'est évidemment ce qui fait toute ladifférence entre le pur coton et le satin ou la soie !

à gauche, doc. Calvin Klein

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 16/08/2003 - page 06-14

DIFFUSION DANS LES MILIEUX TROUBLES (1)

Les phénomènes dont nous allons parlerconcernent les photographes à plusieurs titres :bleu du ciel, voile atmosphérique, photo subaqua-tique, agrandissement noir et blanc, etc.

Lorsqu'un flux de radiations électroma-gnétiques traverse un milieu matériel, il se produittoujours une diffusion, c'est-à-dire qu'une partiede ce flux est renvoyé dans des directions obliquespar rapport à la direction initiale. Les paramètresde cette diffusion sont nombreux et les théoriesqui tentent de l'expliquer, complexes

Il existe en gros trois sortes de diffusion,qui le plus souvent se produisent simultanément,l'une ou l'autre pouvant être prédominante :

- la diffusion de RAYLEIGH, qu'il vau-drait mieux appeler effet TYNDALL,

- la diffusion de MIE,- la diffusion non sélective.

La diffusion de RAYLEIGH a été étu-diée par le savant anglais John William STRUTT,alias lord RAYLEIGH. C'est à elle que l'on doit lebleu du ciel et le rougeoiement de certains leverset couchers de soleil. Mais … le premier qui acommencé à expliquer correctement la couleurbleue du ciel a été John TYNDALL, en 1859.

John TYNDALL (1820-1893) etLord RAYLEIGH (1842-1919)

Cette diffusion se produit dans les milieux"limpides" avec les caractéristiques suivantes :

- elle a lieu essentiellement dans la hauteatmosphère (8 à 15 km d'altitude),

- elle se produit à partir des molécules desgaz atmosphériques ou de particules très petitespar rapport à la longueur d'onde de la lumièreincidente (moins de 1/10e),

- elle varie en raison inverse de la 4e puis-sance de la longueur d'onde (comme 1/λ4), ce quifait que le bleu et le violet sont de 10 à 15 foisplus diffusés que le rouge.

La diffusion de RAYLEIGH est maximalevers l'avant et vers l'arrière par rapport à la direc-tion de propagation de la lumière. Elle est mini-male dans la direction perpendiculaire.

La fumée (non inhalée) d'une cigarette oucelle d'un feu de branchages, vue sous le bon an-gle, paraît bleutée. Une source de lumière blanchevue à travers le nuage paraît au contraire jaune,orangée ou même rouge. Quelques gouttes de laitdans un verre d'eau produisent le même effet.

Les nourrissons ont presque tous les yeuxbleus car les pigments bruns qui colorent généra-lement l'iris et masquent la diffusion ne se formentque vers 8 mois, … et parfois jamais. Le bleu decertains plumages (geais) ou de certaines peaux(lézards) a la même origine.

Si la diffusion de RAYLEIGH n'existaitpas, nous verrions le ciel entièrement noir, tel quenous le montrent les photos prises pendant lespremières "excursions" lunaires. Le bleu du cielest particulièrement intense en altitude et dans lesautres circonstances où rien ne vient l'atténuer.Cette lumière est de plus très fortement polarisée.

Le violet est la couleur la plus diffuséemais elle est très sombre pour l'œil humain etdonc masquée par le bleu et le vert. Il n'en va pasde même pour les pellicules photographiques quisont très sensibles au violet, ce qui explique l'ap-parition de désagréables "dominantes" violacéesquand le ciel est d'un bleu très intense.

Antoine BERGER – Gavade séquentielle

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 16/08/2003 - page 06-15

DIFFUSION DANS LES MILIEUX TROUBLES (2)

La diffusion de RAYLEIGH est respon-sable du phénomène d'opalescence que les habilesverriers de Murano, entre autres, savent mieuxque quiconque utiliser pour leurs créations.

Opaline bleue d'Archimede Seguso

Vase opalescent d'Archimede Seguso

Industria Veneziana Lampadari

Comme les radiations bleues et violettessont déviées de leur trajectoire d'origine, le fais-ceau qui ressort du milieu diffusant est toujoursplus ou moins teinté de rouge et de jaune, selonles circonstances. Une opaline vue par transpa-rence semble toujours jaunâtre.

L'explosion du volcan Saint Helens auxÉtats-Unis, le 18 mai 1980, a projeté dans la hauteatmosphère des millions de tonnes de particulesextrêmement fines, provoquant une intense diffu-sion de RAYLEIGH qui a fait la joie des photo-graphes pendant une décennie.

D. WELLMANN - Photo prise pendantl'éruption principale, d'une distance de 3 miles, àbord de l'avion AEOLUS de la National Oceanicand Atmospheric Administration.

Grâce au volcan, voici un de ces éclaira-ges fabuleux du début des années 80. Nous som-mes en janvier, le froid est vif, il n'y a pas le pluspetit nuage, pas le moindre brouillard. Au niveaude la ligne d'horizon, à environ 8 kilomètres, ondistingue parfaitement les lumières de la villed'Arcachon. La féerie n'a pas duré beaucoup plusd'une dizaine de minutes.

Jean-Jacques MILAN - Rouge couchant

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 16/08/2003 - page 06-16

DIFFUSION DANS LES MILIEUX TROUBLES (3)

La diffusion de MIE est beaucoup pluscomplexe que la diffusion de RAYLEIGH etcontrairement à ce qui se passe pour cette der-nière, on ne sait pas faire de calculs vraiment pré-cis et fiables à son propos. Une théorie a été pro-posée par Gustav MIE en 1908.

Gustav MIE - 1868-1957

Les caractéristiques de cette sorte de dif-fusion sont les suivantes :

- elle a lieu surtout dans les basses cou-ches de l'atmosphère (0 à 5 km),

- elle est due à des particules dont le dia-mètre est voisin de la longueur d'onde de la radia-tion diffusée, par exemple des poussières, de lafumée, du pollen, du brouillard très fin, etc,

- ses effets concernent surtout la lumièrevisible et dépendent de la longueur d'onde,

- dans tous les cas, l'intensité de la lumièrediffusée est maximale dans la direction de propa-gation de la lumière incidente, il se produit assezpeu de diffusion vers l'arrière.

Si les particules sont relativement petites,la diffusion concerne surtout les courtes longueursd'onde, le violet et le bleu, et elle s'étale dans unangle relativement large. Avec des particules plusgrosses, cet angle diminue fortement et la lumièrediffusée tend de plus en plus vers le blanc. Autre-ment dit, plus les particules sont grosses, moins ladiffusion est sélective et moins jaune est le fais-ceau qui traverse directement le milieu.

En outre, plus les particules sont grosses,plus elles ont tendance à tomber rapidement ausol. La diffusion de MIE va donc renvoyer de

moins en moins de bleu et de plus en plus deblanc au fur et à mesure que l'on descend dans lesbasses couches de l'atmosphère. Ce voile atmos-phérique rend les reliefs bleutés et d'autant plusclairs qu'ils sont plus éloignés.

En montagne, il n'est pas rare que l'onpuisse voir clairement des sommets distants d'unebonne centaine de km, comme ici en haut à droite,alors que l'on ne distingue pas le fond des valléesqui sont pourtant bien plus proches. Sa densitérend finalement la brume opaque, pour peu qu'ellesoit traversée sur une distance suffisante.

Jean-Jacques MILAN – vue du Pic du Midi

La seconde photo a été faite en janvier, letemps était clair et le ciel bleu au bord du Bassind'Arcachon. Un petit banc de brume s'est formé aularge, puis il s'est déplacé vers le bord et tout a étéenveloppé de cette étonnante lumière jaune. Heu-reusement, un bateau qui passait par là m'a permisde "meubler" un peu mon cadre.

Jean-Jacques MILAN – Voile doré

Quelques minutes plus tard, la brume estallée se perdre dans l'intérieur des terres et tout estredevenu "ordinaire". Un aérostier volant à quel-ques centaines de mètres aurait certainement vuglisser sur le sol une sorte de petit nuage bleu …

Page 18: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 16/08/2003 - page 06-17

DIFFUSION DANS LES MILIEUX TROUBLES (4)

Voici deux exemples d'une diffusion deMIE provoquée par des aérosols :

François ANDRÉ-ROMAGNY – Hong Kong

STÉVIGNY Louis - Nice

La diffusion de MIE prédomine vers l'ho-rizon, celle de RAYLEIGH vers le zénith.

d'après HyperPhysicsConcepts

Bertrand CLÉMENT – Champ en Espagne

La diffusion non sélective présente descaractéristiques très différentes des deux autres :

- elle concerne la basse atmosphère, lesbrouillards à gouttelettes moyennes, mais aussi lessolides en poudre sèche,

- elle se produit avec des particules de di-mensions beaucoup plus grandes que la longueurd'onde de la lumière,

- elle renvoie indifféremment toutes lescouleurs car elle met en jeu, à très petite échelle,des phénomènes de réflexion et de réfraction.

Cette dernière forme de diffusion nous faitvoir blancs les nuages, la neige, beaucoup de ma-tériaux pulvérisés, le sel, etc. Elle "blanchit" aussibeaucoup d'objets secs qui retrouvent des couleursplus saturées quand on les mouille.

Si les nuages sont peu nombreux et assezfins, la lumière les traverse facilement et ils sontblancs. Ils peuvent par contre paraître gris s'ilssont très épais où à l'ombre d'autres nuages.

Cumulus congestus

Sur cette dernière photo, les trois for-mes de diffusion sont visibles simultanément.On peut dire globalement que la diffusion :

- éclaire indirectement les zones àl'ombre et nous permet d'y voir des détails,

- superpose à la lumière issue des su-jets éloignés celle qui est diffusée par l'atmos-phère, augmentant l'impression de flou tout encréant une certaine perspective aérienne,

- atténue la lumière provenant direc-tement des sources de lumière situées dans lechamp visuel, diminue l'éblouissement,

- rend finalement plus clairs les sujetssombres et plus sombres les sujets clairs, etpar conséquent diminue les contrastes.

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 21/08/2003 - page 06-18

RÉFRACTION DE LA LUMIÈRE (1)

Lorsqu'un rayon lumineux A1 frappe la

surface lisse qui sépare deux milieux transparents, une partie R1 se réfléchit selon les lois connues et une autre partie R2 pénètre dans le 2e milieu en subissant une déviation. Ce dernier est appelé "rayon réfracté". Les trois rayons lumineux sont dans un même plan qui contient aussi la normale à la surface au point d'impact.

Pour comprendre ce qui se passe, imagi-

nons un maître nageur situé sur la terre ferme en A et un baigneur dans une piscine en B. Le bai-gneur appelle soudain au secours.

A priori, un maître nageur n'a aucune rai-

son de connaître les principes de FERMAT et de MAUPERTUIS. Pour autant, cela ne l'empêche pas de comprendre qu'il doit aller le plus rapide-ment possible en B.

Même les plus grands champions de nata-tion courent plus vite qu'ils nagent et le trajet le plus rapide n'est pas le plus court ! Notre homme courra donc tout droit, à la vitesse V, jusqu'à un certain point P à partir duquel il nagera, toujours

tout droit, à la vitesse v, jusqu'en B. Peut-on opti-miser le trajet et trouver la position de P ?

Le calcul qui suit est facultatif et ceux qui sont définitivement fâchés avec les maths pour-ront le sauter à pieds joints. On est quelquefois traumatisé, mais jamais trop mathisé …

Pythagore nous indique que :

2222 bx)-(dPBet xaAP +=+=

Le temps total de parcours sera :

vbx)-(d

VxaT

soit v

PBV

APT

2222 ++

+=

+=

Les valeurs extrémales de ce temps de parcours seront obtenues en annulant la dérivée de T par rapport à x :

0x)-(d2

222

22222=

+

−+

+=

bvdx

xaVx

dxdT

On reconnaît dans cette formule :

rsinbx)-(d

xdet sinixa

x2222=

+

−=

+

alors on simplifie :

0v

sinrV

sini=−

et finalement :

Vv

isinrsin=

Ce résultat remarquable nous indique que les angles r et i sont liés par une relation simple qui ne dépend que les deux vitesses de course et de nage. Peu importe où sont les points A et B !

Mais où donc faut-il plonger ?

Personne ne vous le dira sur le champ, car il faut résoudre une équation du 4e degré et cela ne pourra jamais se faire à l'aide d'une formule.

Le contrepéteur fou, qui ne saurait rater si belle occasion, insinue qu'aucun étudiant n'est jamais suffisamment fort pour ce calcul !

Page 20: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 18/08/2003 - page 06-19

RÉFRACTION DE LA LUMIÈRE (2)

Tant qu'il est dans son élément naturel, lepoisson qui se débat au bout de la ligne a des allu-res de requin. Une fois sorti, hélas, il se présenteen vraie grandeur et le pêcheur est frustré.

La clé plate trempée dans l'eau paraît pliéeau niveau de la surface libre. Cette image vient deBelgique et nous change un peu du traditionnelbâton brisé mais les lois de l'optique se moquentéperdument des frontières.

L. ZIMMERMANN

Il a fallu beaucoup de temps pour que cesphénomènes, et bien d'autres comme les mirages,soient convenablement expliqués.

Les lois de la réfraction de la lumière ontété pressenties vers l'an 1000 par le mathématicienégyptien IBN AL HAYTAM (ALHAZEN) maisd'après HUYGENS c'est le Hollandais WillebrordSNELL, dit "SNELLIUS" selon la mode de l'épo-que, qui les découvrit en 1621.

Willebrord SNELL van Roijen (1580-1626)

Quelques années plus tard, DESCARTESaussi a travaillé la question. Les lois de la réfrac-tion sont baptisées en France "lois de Descartes"mais il n'est pas inutile de savoir qu'à l'étranger onles appelle plutôt "lois de Snell-Descartes", quandce n'est pas "lois de Snell" tout court.

La surface qui sépare deux milieux trans-parents s'appelle un dioptre ; en l'occurrence, lafigure ci-dessous représente un dioptre plan.

Un rayon qui traverse la surface, dans unsens ou dans l'autre, est a priori dévié car la vi-tesse de la lumière n'est pas la même dans tous lesmatériaux. En appelant v1 et v2 les vitesses dansles milieux (1) et (2), et i1 et i2 les angles que faitle rayon avec la normale, la formule de la pageprécédente s'écrit sous une forme plus générale :

1/22

1

2

1 nvv

isinisin

==

Le rapport qui vient d'être défini s'appelleindice de réfraction relatif du milieu (2) parrapport au milieu (1). Sachant que c'est dans levide que la lumière va le plus vite, il est logiquede se servir de ce milieu comme référence. Lesindices relatifs des deux milieux par rapport auvide, ou indices absolus, sont alors définis par :

22

11 v

cnet vcn ==

2

1

1

2

2

1

2

11/2 isin

isinnn

vc

cv

vvn ==×==

La loi de Snell-Descartes s'écrit alors sousla forme simple qu'il est bon de retenir :

2211 isinnisinn =

En posant par convention l'indice du videégal à 1, tous les autres indices auront des valeurssupérieures, par exemple :

- eau …………..: n = 4/3 = 1,33- verre ordinaire : n = 3/2 = 1,5- diamant …….. : n = 2,42- etc.

Page 21: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 18/08/2003 - page 06-20

RÉFRACTION DE LA LUMIÈRE (3)

Une chose à retenir une fois pour toutes,pour ne jamais se tromper de sens :

le rayon est plus proche de la normaledu côté où la lumière va le moins vite.

Cette remarque est souvent utile pourcomprendre ce qui se passe lorsque l'on photogra-phie sous l'eau, à travers une vitre d'aquarium, etc.Que ceux qui ne manipulent pas bien les sinus serassurent, il est possible de trouver les angles avecune règle, un compas et un rapporteur.

La construction de REUSCH consiste àtracer deux demi-cercles centrés au point d'entréedu rayon incident, avec des rayons proportionnelsaux indices de réfraction n1 et n2. Ici le coefficientde proportionnalité est k.

Le segment AH vaut 11 isinkn .

A partir de A on construit B, qui fournitun point du prolongement du rayon réfracté, puis-que BK vaut 22 isinkn .

22112211 isinnisinnisinknisinkn =⇒=

On retrouve évidemment la relation bienconnue de SNELL-DESCARTES.

Ceux qui préfèrent tracer des tangentesutiliseront la construction d'HUYGENS. Commedans le cas précédent, on commence par les deuxcercles de diamètres proportionnels aux indices.

Le rayon réfracté se construit cette fois enmenant les tangentes aux cercles, la démonstrationest aussi facile que dans le cas précédent et je lalaisse aux lecteurs un peu courageux.

Ces constructions peuvent se faire dansles deux sens, en partant du milieu le moins ré-fringent comme sur ces exemples ou, au contraire,du plus réfringent.

Ce dernier cas peut poser un problème !Avec la construction de REUSCH1, il est clair quesi le point A peut parcourir entièrement "son"demi-cercle, ce n'est pas le cas pour B qui ne par-court qu'un arc plus petit. Avec la construction deHUYGENS, il en va de même, on peut toujoursconstruire une tangente au grand demi-cercle maiscela ne marche pas avec tous les points du petit.

La position limite correspond à un angled'incidence de 90°, autrement dit le rayon incidentarrive tangent au dioptre, c'est ce que l'on appellel'incidence rasante.

Le chapitre n'est donc pas terminé !

1 Au fait, si quelqu'un sait qui était REUSCH,

qu'il me fasse signe !

Page 22: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 19/08/2003 - page 06-21

RÉFRACTION LIMITE – RÉFLEXION TOTALE

Si l'incidence est rasante, les deux cons-tructions de REUSCH et de HUYGENS donnentbien sûr le même rayon réfracté, qui fait avec lanormale un angle αlimite ou plus simplement αL.

Il en résulte une conséquence très impor-tante : du côté du dioptre où le matériau est lemoins réfringent, là où l'indice est le plus faible, lerayon incident peut être incliné de n'importe quelangle de 0 à 90°. Par contre, le rayon entrant dansle milieu le plus réfringent ne peut jamais êtreincliné de plus de αL par rapport à la normale.

Le principe du retour inverse de la lu-mière fait que pour sortir du milieu le plus réfrin-gent, le rayon "candidat à l'évasion" ne doit pasêtre incliné par rapport à la normale d'un anglesupérieur à αL. Sinon, il se réfléchit sur le dioptreet reste "prisonnier" du milieu le plus réfringent.

Mais que vaut l'angle αL ?

Supposons que n2 >n1

1isinnn

isin

isinnisinn

21

21

2211

≤=

=

En effet, les bonnes années, le sinus dé-passe rarement 1, et 2003 est une bonne année …

Il en résulte que :

2

1L

2

12 n

nins doncet

nn

isin =α≤

finalement,

2

1L n

nsinArc=α

Ainsi on peut obtenir les valeurs approxi-matives suivantes, par exemple :

- air-eau : 47°- air-verre ordinaire : 42°- air-diamant : 24,4°

Un rayon qui tombe à 45 ° sur le dioptreair-verre s'y réfléchit entièrement, mais en revan-che il traverse le dioptre air-eau.

Cette propriété est mise à profit dans denombreux instruments d'optique, dans les viseursd'appareils réflex, les jumelles à prismes, etc. Laréflexion totale est bien visible sur cette photo, lasurface de l'eau renvoie la lumière provenant dufond de la piscine et reflète les baigneurs. Sous cetangle, il est absolument impossible d'apercevoirles objets situés hors de l'eau.

Nathalie STRIPPE – Tournesol 6

Cela étant, si le pêcheur voit le poisson,alors le poisson voit le pêcheur !

Page 23: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 02/09/2003 - page 06-22

RÉFLEXION TOTALE (1)

La réflexion totale est d'autant plus facileà obtenir que la différence des indices de réfrac-tion des deux milieux est plus élevée. Ainsi, lalumière qui se réfléchit totalement sur les facesd'un prisme de verre les traverse si ce prisme estimmergé dans l'eau. Pour un verre d'indice 1,5,l'angle limite passe de 42 à 62° environ.

Si les joailliers s'intéressent tant aux dia-

mants, ce n'est pas pour leur dureté mais pour leurindice très élevé ! La taille des pierres obéit à desrègles très précises pour bien "emprisonner" lalumière et ne la laisser sortir que sous des anglesparticuliers. On parle des "feux" des diamants àpropos de leur éclat si caractéristique.

Taille "brillant", dont il existe plusieurs variantes

Le Régent (doc. Musée du Louvre)

…et son schéma de taille

Dans un autre ordre d'idées, les automo-bilistes qui roulent en hiver ont vraiment intérêt àse méfier du phénomène de la "glace noire".

Une zone verglacée dont la surface n'estpas lisse diffuse la lumière et paraît donc plus oumoins blanche. Si au contraire sa surface est lisse,une grande partie de la lumière renvoyée par le solreste prisonnière de la glace qui semble alors noireet se confond avec le bitume. Quand on s'appro-che, l'aspect de la plaque change brutalement maisil est souvent trop tard, surtout pour ceux qui frei-nent avec le pied droit dans le radiateur.

Les fibres optiques à saut d'indice utili-sent le même principe. Elles sont constituées debrins cylindriques très fins fabriqués dans un ma-tériau très réfringent et enrobés d'un autre maté-riau moins réfringent. Dans des conditions angu-laires appropriées, la lumière qui entre dans lafibre se réfléchit de très nombreuses fois sur lesparois et ne peut sortir qu'à l'autre extrémité.

Pendant longtemps, on n'a pas disposé dematériaux suffisamment transparents pour réaliserde bonnes fibres optiques, mais on peut aujour-d'hui propager la lumière sans atténuation prohi-bitive sur de très longues distances.

Page 24: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 02/09/2003 - page 06-23

RÉFLEXION TOTALE (2)

Quel que soit le soin apporté à leur réali-sation, les miroirs argentés ou aluminés absorbenttoujours un fort pourcentage de la lumière qu'ilsreçoivent. C'est pourquoi on leur préfère généra-lement les dioptres plans, utilisés bien sûr dans lesconditions de réflexion totale, sauf quand le poidsdoit être minimal. Le verre, ça pèse, surtout quandil s'agit de cristal riche en plomb.

Le prisme simple, comme le miroir planqu'il remplace, donne une image tournée de 90°.

doc. Molecular Expressions

Le prisme d'Ignazio PORRO1, qui provo-que deux réflexions, fait tourner l'image de 180°.

doc. Molecular Expressions

L'association de deux prismes de PORROest largement utilisée dans les jumelles.

Le premier brevet de PORRO a été dépo-sé en 1854. Sur cette base on a construit des mo-noculaires vendus sous le nom de "Longue VueCornets", ils grandissaient 10 à 12 fois.

1 Paolo Ignazio Pietro PORRO, ingénieur, op-

ticien et géodésien italien (1801–1875).

Principe de la lunette de PORRO (doc. Carl ZEISS)

Plusieurs tentatives eurent lieu par la suitepour associer deux lunettes pour obtenir une vi-sion binoculaire. C'est le célèbre mathématicien etphysicien Ernst ABBE, dont le nom est bienconnu de tous ceux qui ont étudié l'optique, quiaccomplit l'avancée décisive. En 1894, ZEISSdéposa le brevet des premières jumelles à prismes.

Ernst ABBE (1840-1905)

Les jumelles de 1894 (doc. Carl ZEISS)

Cette architecture est toujours d'actualité,bien que d'autres formules optiques plus légères etmoins encombrantes aient vu le jour. Outre leurrelative simplicité qui permet des réalisationssolides et de coût raisonnable, les jumelles à pris-mes de PORRO conservent un avantage énorme :l'écart important des objectifs fournit une basestéréoscopique très favorable à la perception durelief. A ne pas négliger lors d'un achat, en parti-culier pour la randonnée en montagne.

Page 25: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 03/09/2003 - page 06-24

RÉFLEXION TOTALE (3)

D'autres combinaisons peuvent être éga-lement utilisées, comme celle-ci :

Le prisme de DOVE est toujours à angledroit mais la lumière y entre et en sort par les fa-ces obliques à 45°. Il est très largement utilisédans les instruments d'optique pour retourner lesimages. On ne peut toutefois s'en servir que pourdes faisceaux de rayons parallèles.

Doc. Molecular Expressions

Le sommet, inutile, est en fait supprimé.

Doc. Molecular Expressions

Comme il est rappelé sur le dessin ci-après, le prisme de DOVE n'a besoin d'aucuneargenture tant que l'angle des faces d'entrée et desortie reste droit, mais ce n'est pas toujours le cas.

Ça vous rappelle quelque chose ?

Le pentaprisme est largement utilisé pourrenvoyer des images à angle droit. Il n'est d'ail-leurs pas vraiment à sa place ici car l'angle d'inci-dence sur les faces réfléchissantes ne permet pasd'obtenir la réflexion totale. Il faut donc procéderà une aluminisation ou à une argenture partielle.

Mais qu'y a-t-il donc sous le capuchon duRectaflex doré du Roi Farouk (1952) ? Le papePie XII en a eu un aussi, à peine plus discret.

www.marcoant.com

Page 26: PROPAGATION DE LA LUMIÈRE - Daniel Huilier

Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 04/09/2003 - page 06-25

VRAIS ET FAUX PENTAPRISMES

Vous pensez qu'il y a un pentaprisme ?

Perdu ! Enfin, à moitié, car tout dépend dece qu'on appelle pentaprisme. En voici des vrais,ce sont bien des prismes au sens de la géométrie,avec les cinq faces latérales réglementaires.

Le prototype Rectaflex 947 présenté à laFoire de Milan en 1947 avait un vrai pentaprisme.Bel italien, premier réflex 24x36 jamais construit,il ouvrit une série qui méritait bien un livre :

"Rectaflex, the magic Reflex", de Marco ANTONETTO (www.marcoant.com).

Le Rectaflex 947

Sur ce prototype, l'image observée dans leviseur était inversée droite-gauche, en effet :

- l'objectif fait pivoter l'image de 180° parrapport au sujet, le haut est en bas, la droite à gau-che et ainsi de suite.

- le miroir réflex fait tourner de 90° la di-rection de visée, remet en place le haut et le basmais pas la droite et la gauche.

- le pentaprisme remet la visée dans l'axede prise de vue, inverse deux fois le haut et le bas,ce qui ne change rien, quant à la droite et à la gau-che, elles sont toujours inversées …

Au lieu du vrai pentaprisme, on utilise denos jours dans presque tous les appareils réflex un"prisme en toit", bloc de verre que l'on persiste àappeler pentaprisme, doublement à tort car ce n'estplus un prisme et il ne présente plus les cinq facesqui justifieraient le préfixe "penta".

Vous aurez peut-être deviné que pour quela visée soit correctement redressée, il faut obli-gatoirement un nombre pair de réflexions, ce quene montrent pas les schémas qui vous sont servis

partout et qui sont tous, sinon faux, du moins éta-blis dans une représentation très particulière.

La forme et les angles du "faux" penta-prisme dessiné ci-dessous ont été volontairementsimplifiés pour la clarté de l'exposé.

La face d'entrée ABCD est juste au-dessusdu verre, généralement dépoli, au niveau duquelse forme l'image de visée. Le rayon vertical quientre en e dans le bloc provient d'un point de cetteimage. Il se réfléchit successivement en 1 et en 2sur les faces du "toit" incliné, puis en 3 sur la faceavant ABEF, avant de ressortir en s par la facearrière et d'arriver à l'œil O du photographe.

La réflexion se produit d'abord sur l'unedes faces du toit, puis sur l'autre. L'image se forme"en deux parties" parfaitement raccordées, l'arêtesommitale reste invisible à condition qu'elle necomporte aucun défaut.

Le rayon qui entre en e provient d'un pointsitué en bas et à droite du dépoli. C'est l'imaged'un point situé en bas et à gauche du sujet. Aprèstrois réflexions, le rayon qui parvient à l'œil sem-ble venir d'en bas à gauche. CQFD.

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 05/09/2003 - page 06-26

DU PENTAPRISME AU PENTAMIROIR

Dès le début de la production en série, leRectaflex a été muni d'un prisme en toit, mais il agardé la forme du capot !

Rectaflex A 1000 de 1948 (www.marcoant.com)

Le concurrent direct, sorti lui aussi en1948, était le Contax de Zeiss Ikon. La forme ducapot ne laisse aucun doute sur le contenu !

Le 1er Contax de 1948

Des deux appareils, le premier breveté aété le Contax, le premier réalisé le Rectaflex, lemoins que l'on puisse dire est que la formule avaitun bel avenir.

D'où viennent donc ces noms ?

Dans certains appareils (Ricoh) le prisme

a été remplacé par des miroirs, ce qui offre despossibilités intéressantes comme la double visée.On en reparlera dans le chapitre adéquat.

Les prismes "solides", c'est-à-dire en verremassif, sont handicapés par leur poids et leur re-lative fragilité. Ils gardent toutefois de nombreuxavantages sur les miroirs : constance des formes etdes dimensions, surfaces réfléchissantes protégéesde l'oxydation et des salissures, etc.

Parions quand même qu'ils seront rempla-cés dans un proche avenir par des miroirs moulésou "pentamiroirs", sur lesquels s'activent aujour-d'hui les services de recherche des grands fabri-cants. Une coque en plastique moulée sous pres-sion est ensuite aluminée ou argentée. Le principalproblème à résoudre est la stabilité des formes dumatériau, pendant et après le moulage.

Pentamiroir moulé

(d'après une animation NIKON)

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 06/09/2003 - page 06-27

PRISMES EN TOIT

On rencontre de nombreux prismes en toit(roof prisms en anglais) dans les appareils opti-ques, les viseurs à télémètre, les longues vues etjumelles, etc. Le plus simple est le celui d'AMICI.

doc. Edmund Optics

Voilà un bon exercice : faire comprendrela forme d'un prisme à l'aide d'une photo … Labonne vieille perspective cavalière, que l'on n'ap-prend plus guère dans nos lycées, est autrementefficace ! Le prisme d'AMICI n'est autre qu'unprisme simple dont la face hypoténuse a été rem-placée par un toit. Les zones inopérantes ont en-suite été tronquées. Avec une réflexion de plusl'image subit une rotation au lieu d'un simple re-tournement droite-gauche.

Le prisme d'ABBE est couramment utilisé

dans les lunettes monoculaires car il fait tournerles images sans changer la ligne de visée. Il estgénéralement assemblé en deux parties, car il estpratiquement impossible de réaliser des surfacesprésentant des angles vifs rentrants.

De nombreux polyèdres portent le nom de

"prisme de WOLLASTON", le plus célèbre étantun prisme polariseur que nous n'étudierons pas ici.Comme tous les prismes où la lumière entre et

sort obliquement, il ne peut être utilisé que pourdes faisceaux de rayons parallèles.

Le bi-prisme de SCHMIDT est un autresystème redresseur d'images utilisé dans les ju-melles "à prisme en toit". Il produit 6 réflexions,et non 5 comme le dessin le suggère. Déjà vu !

Les prismes en toit "replient" davantage letrajet optique que les prismes de PORRO et per-mettent de diminuer l'encombrement, en largeur eten longueur. Rappelons que le rapprochement desoculaires nuit à la perception du relief.

La précision de taillage des prismes ordi-naires est de l'ordre de 3 minutes d'angle, ce quireprésente 1 mm à 1m. Pour les bons prismes entoit, elle passe à quelques secondes d'angle, ce quireprésente 0,01 à 0,05 mm à 1 m. Le coût de fa-brication n'est évidemment pas le même.

Quant à notre brave trièdre trirectangle,réalisé ici sous forme "solide" (et dessiné beau-coup trop pointu), il renvoie infatigablement versl'expéditeur toute la lumière qu'il reçoit. A retrou-ver à des centaines d'exemplaires contigus dans leplastique moulé des catadioptres de nos voitures.

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 06/09/2003 - page 06-28

RÉFLEXION VITREUSE (1)

Lorsque la lumière atteint la surface poliequi sépare deux milieux transparents, une partie seréfracte et l'autre se réfléchit, selon les lois qui ontété vues précédemment.

L'eau tranquille, par exemple, se comportecomme un "miroir sombre", une partie seulementde la lumière diffusée par la vache se réfléchit à lasurface, le reste pénètre dans l'eau pour y être trèsvite absorbé.

Jean-Jacques MILAN – La vache de Certes

Si F0, F1 et F2 sont respectivement les fluxincident, réfracté et réfléchi sur une surface, on a :

F1 + F2 = F0

L'interface entre les deux milieux peutêtre caractérisée par un coefficient de transmissionou transmittance τ et un coefficient de réflexion ρou réflectance tels que :

F1 = τ F0 et F2 = ρ F0

Il en résulte de suite que :

τ + ρ = 1

Ces deux coefficients dépendent beaucoupde l'angle d'incidence i, comme le montrent lescourbes ci-dessous données pour le dioptre air-verre. La courbe A est donnée de le sens air-verre,la courbe B dans le sens verre-air :

En incidence normale (i = 0), la réflexionet la transmission sont indépendantes du sens depassage, la proportion de rayons réfléchis se cal-cule à partir de l'indice de réfraction n du verre :

2

o 1n1n

+−

Avec un verre d'indice 1,5, le dioptre ré-fléchit 6,25 % de la lumière et en transmet donc93,75 %. Si l'incidence augmente, la transmissiondiminue et la réflexion augmente jusqu'à devenirtotale si le premier milieu est plus réfringent quele second (courbe B, sens verre-air).

Jacques LEINNE

Bien qu'il ne se produise pas seul, l'effetque nous venons de décrire est nettement visiblesur cette photo. Au loin, le lac de Gaube se com-porte comme un assez bon miroir, tandis qu'aupremier plan on en distingue nettement le fond.

Nous verrons bientôt que la lumière réflé-chie est polarisée, et que cette propriété intéresseau plus haut point les photographes.

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 07/09/2003 - page 06-29

RÉFLEXION VITREUSE (2)

Dans les systèmes optiques, le fait que laréfraction s'accompagne toujours d'une certainedose de réflexion est souvent très gênant, pour aumoins deux raisons.

La première est la production parfois mas-sive d'images parasites : il suffit, pour compren-dre de quoi il s'agit, de regarder un objet dans unmiroir ordinaire sous une incidence de 70 ou 80°,on aperçoit alors une ou plusieurs images parasi-tes de cet objet, images bien entendu décalées parrapport à l'image principale.

Un rayon lumineux traversant une lame deverre subit en effet toute une série de réfractionset de réflexions partielles :

Outre le rayon principal transmis par lalame, on obtient toute une série de rayons parasi-tes d'ordre 1, d'ordre 2, etc. Avec un peu de maté-riel tout ceci se met facilement en évidence.

La seconde conséquence est double : il seproduit un affaiblissement du flux lumineux quitraverse le système et une baisse du contraste desimages.

Pour une incidence presque normale, doncdans des conditions favorables, la traversée d'unesurface air-verre engendre une perte de lumièrepar réflexion d'environ 7 %. Si les nombreuseslentilles des objectifs modernes n'étaient pas trai-tées, les résultats seraient catastrophiques. Pour un

zoom comportant 10 ou 15 lentilles, parfois plus,le flux transmis atteindrait à peine 10 à 15 % duflux incident, et en prime ce flux serait répartientre les images de différents ordres. Autrementdit, on aurait une image à la fois très affaiblie etde fort mauvaise qualité.

Qui plus est, les opticiens ont besoin qu'onleur fabrique des verres d'indice aussi élevé quepossible, 1,7, voire 1,9. Or, ces verres à haut in-dice sont ceux qui engendrent les plus fortes per-tes par réflexion, conformément à la loi déjà vue.Les opticiens du "bon vieux temps" ne pouvaientdonc utiliser qu'un nombre très limité de lentillespour construire leurs objectifs.

Heureusement, des traitements anti-refletsefficaces, dont nous verrons plus loin le principe,permettent aujourd'hui de limiter la réflexion à desvaleurs de l'ordre de 1 à 2 % par interface. Grâce àeux, les zooms modernes et les autres objectifscomportant un nombre élevé de surfaces air-verrelaissent encore passer 50 à 70 % de la lumière,avec des images parasites considérablement dimi-nuées. Malgré cela, pour les objectifs complexes,l'ouverture photométrique peut être très différentede l'ouverture géométrique, ce qui n'est évidem-ment pas sans conséquences.

Les publicités des lunetiers regorgent dephotos comparatives comme celles-ci, où l'effetdu traitement est évident.

Si l'on considère maintenant la qualité desimages obtenues, le gain est flagrant, surtout pourdes sujets à fort contraste. On voit ci-dessousd'une part que les images des sources lumineusesdeviennent nettes et brillantes et que le ciel noirn'est plus éclairci par les réflexions parasites.

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 07/09/2003 - page 06-30

RÉFLEXION VITREUSE (3)

"Il suffit d'un peu d'eau dans le fond del'ornière pour apercevoir le ciel bleu", écrivait legrand Louis ARAGON. Hommage à ceux que lescirconstances obligent à marcher tête baissée.

Photo Nathalie STRIPPE

La réflexion vitreuse est partout autour denous, ouvrons les yeux ! C'est elle, bien souvent,qui nous permet de reconnaître les objets, d'identi-fier les matières, …

Jean-Jacques MILAN – Rouges de Londres

Antoine BERGER - Saturne

Il est clair que ce sont les reflets qui nouspermettent de différencier au premier coup d'œilles tissus et le vinyle …

Andy METAL – (?) et Model 1, back

Certains n'hésitent pas à affirmer que lesreflets, c'est la vie … Que devient en effet ce re-gard intense, si l'on enlève les petites taches lumi-neuses dans les yeux …

Michel PLANTE – Fleur 03

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 11/09/2003 - page 06-31

RÉFLEXION VITREUSE (4)

La réflexion, vitreuse ou non d'ailleurs,pose des problèmes lorsque la source lumineusen'est pas active au moment de la préparation de laprise de vue. J'évoque ici essentiellement, maispas seulement, la photo au flash. Qui n'a jamaistrouvé sur une de ses photos des reflets inattenduset qu'il n'avait pas vu dans le viseur ? La faute estclassique lorsque l'on reproduit des documents :

J'ai eu l'occasion de reproduire sur diapo-sitives des centaines de documents de nature et deprovenance très diverses. Pour ce travail, je dé-conseille formellement la lumière solaire, tropaléatoire, et les lampes à incandescence. J'ai utili-sé jadis un banc à quatre lampes. Un luxmètrepermettait d'uniformiser la lumière sur le plan detravail. Le temps de faire deux photos, l'une deslampes grillait et il fallait tout recommencer …Contrairement à une idée reçue, il est possibled'obtenir de très bons résultats avec un seul flash(manuel), moyennant quelques précautions :

- le flash doit être suffisamment éloignédu document. Pour des documents A4, compter aumoins un mètre à partir du centre,

- le flash ne doit surtout pas être orientévers le centre mais plus loin vers le bord extérieur.Ainsi, la diminution de l'intensité émise loin del'axe est compensée par le rapprochement.

- placer le flash au-delà du pointillé rougecorrespondant au dernier rayon capable de se ré-fléchir sur le document. Si celui-ci est plus oumoins bombé ou s'il comporte des reliefs (peintureà l'huile), il faut aller nettement au-delà.

- un réflecteur à l'opposé du flash contri-bue à égaliser le niveau d'éclairement. Une simpledalle de polystyrène de 50x50 cm suffit.

Dans ces conditions, sauf si l'on photo-graphie en macro, le diaphragme ne bouge plus,quel que soit le format du document.

Puisque vous avez été sages, je vous pro-pose encore quelques images sur le thème :

Buzz ELLINGTON – Le saunier

Jean GARRETT - Feather reflection 2

Alain LABAT – Grenouille verte

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 09/09/2003 - page 06-32

CAUSTIQUES (1)

Beaucoup d'objets peuvent provoquer, parréflexion ou par réfraction, des concentrations delumière dans certaines zones de l'espace. Si ceszones sont petites et si le rayonnement est intense,cela peut provoquer un échauffement qui a valu àces concentrations le nom de caustiques, du greckaustikos ou du latin causticus, brûlant. On parlede catacaustiques si c'est la réflexion qui entre enjeu et de diacaustiques si c'est la réfraction.

Photos Henrik Wann JENSEN

Les caustiques interviennent dans l'étudedes défauts des systèmes optiques mais elles peu-vent aussi fournir des idées aux photographes. Surla première photo, l'anneau brillant fournit parréflexion une courbe qui n'a pas manqué d'intéres-ser les mathématiciens. La première étude de cettequestion est en général attribuée au physicien alle-mand Ehrenfrid Walter de TSCHIRNHAUSEN(1651-1708), qui a présenté un mémoire en 1682.

Dans les pays anglo-saxons on parle de"coffee-cup curve", courbe de la tasse de café,pensez-y à l'heure du petit déjeuner …

Dans une tasse à parois verticales, la ré-flexion produit une demi néphroïde. Cette courbequi évoque une paire de reins est l'enveloppe desrayons réfléchis par le demi-cylindre ou la trajec-

toire d'un point d'un cercle roulant sans glisser surun autre de rayon double, les forts en maths yverront une épicycloïde à deux rebroussements.

Si votre bol est conique, pour peu que lesrayons soient convenablement orientés, vous dé-couvrirez une cardioïde, autrement dit une épicy-cloïde à un rebroussement

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Jean-Jacques MILAN - Propagation de la lumière - 10/09/2003 - page 06-33

CAUSTIQUES (2)

En général les photographes sont mieuxinspirés par les caustiques par réfraction que parles caustiques par réflexion. Pourquoi ? La lu-mière qui traverse l'eau, le verre ou les matièresplastiques transparentes engendre sans doute desformes plus riches que celle qui se réfléchit. Par-fois, les deux types coexistent, comme ici :

Alain VERNA – Verre n° 24

Parfois aussi, l'auteur d'une photo se posedes questions existentielles …

Gilles REMACLE – Gerris lacustris

Le Gerris est une petite punaise aquatiquetrès commune qui vit à la surface des eaux tran-quilles. Ses pattes munies de poils hydrophobeslui permettent de s'y déplacer par saccades, à larecherche de ses proies. Comment cette bestiolepeut-elle provoquer au fond de l'eau de telles ta-ches sombres entourées d'un halo lumineux ?

La tension superficielle transforme la sur-face de l'eau en une sorte de membrane élastiquequi s'affaisse légèrement dans les zones d'appuides pattes. Au Soleil, cette surface reçoit desrayons lumineux parallèles qui s'y réfractent selon

la loi bien connue. La courbure locale dévie légè-rement ces rayons vers l'extérieur, il en résulte uncône d'ombre qui produit les taches sombres ettout autour, une concentration de lumière. Cettecaustique serait moins visible si la profondeur del'eau était plus grande ou plus petite !

Un phénomène analogue mais plus com-plexe est visible sur cette autre photo. Si la surfacede l'eau était plane au niveau de la ligne de flottai-son du coquetier, l'ombre au fond du bassin seraitconstituée de deux cercles décalés.

Lydia GARTNER – Floating reflection

L'eau agitée peut également produired'intéressantes caustiques au fond des piscines.

Nathalie STRIPPE – Aqua 110