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PRISE EN CHARGE DE LA TOXICITE
MEDULLAIRE DE LA CHIMIOTHERAPIE
Yvan BEAUSSANT
Service d’hématologie
CHU Besançon
25/01/2013
Introduction
Chimiothérapies
Thérapies systémiques anticancéreuses : Chimiothérapies cytotoxiques
Ac monoclonaux, Glivec®
Hormonothérapies, antiangiogéniques
Cytokines (IL2, INF)
Chimiothérapie cytotoxiques : Non spécifiquement anti-tumorales
Actives sur les cellules en division
par action directe sur l’ADN
→ Stress génotoxique
→ Interaction avec cible spécifique
→ Déprivation d’éléments vitaux → Immunomodulation
Chimiothérapies
Action centrée sur l’ADN
Antimétabolites Analogues nucléosidiques Antifolates
Réactions chimiques (agents électrophiles
/ alkylants) Modification de structure (intercalants) Coupures (agents scindants)
Moutardes azotées, dérivés du platine Nitrosurées Inhibiteurs de topoisomérase I&II
Poisons du fuseau / antimitotiques
Inhibiteurs polymérisation tubuline Inhibiteurs dépolymérisation tubuline
Toxicités aiguës des chimiothérapies
-Tissus à renouvellement rapide : - Moelle Osseuse : atteinte du tissus hématopoiétique et des
cellules souches pluripotentes -> cytopénies
- Revêtement cutané: alopécie, diminution de la pilosité
-Tube digestif: mucite, diarrhée
-Tissu gonadique: stérilité
-Dépendent :
- du type de chimiothérapie (produits, fréquence, dose)
- du terrain du patient (TTT antérieur, comorbidités)
HEMATOPOÏESE
ELEMENTS FIGURES DU SANG
Production quotidienne Plq : 500 x109
GR : 200 x 109
PNN : 50 x109
Myélotoxicité : généralités
Le plus souvent = LEUCONEUTROPENIE
Parfois associée à une THROMBOPENIE
Anémie retardée car durée de vie des GR plus longue
Nadir entre 8 et 15 jours
Le plus souvent réversible (de 5 à 10j) mais peut être prolongée
Myélotoxicité importante :
Alkylants (sauf cisplatine), inhibiteurs de topo-isomérase, taxanes
Myélotoxicité faible ou nulle :
Vincristine, bléomycine, L-asparaginase
Neutropénie fébrile
CYTOPENIES
CHIMIOINDUITES
DEFINITIONS des cytopénies
Anémie : Hb < 12 g/dl chez la femme et 13 g/dl chez l’homme Thrombopénie : plq < 150 G/L ou 150 000 / mm3
Leucopénie : GB < 4G/L ou 4000 / mm3
Neutropénie : PNN < 1,5 G/L Agranulocytose : PNN < 0,5 G/L Lymphopénie : Ly < 1 G/L
Pancytopénie : atteinte des 3 lignées Aplasie : pancytopénie d’origine médullaire ou « centrale »
Score OMS: évaluation de sévérité
Toxicité Grade 0 Grade 1 Grade 2 Grade 3 Grade 4
Hb (g/dl) > 11 9,5-10,9 8,0-9,4 6,5-7,9 <6,5
GB (/mm3) >4000 3000-3900 2000-2900 1000-1900 <1000
PNN(/mm3) >2000 1500-1900 1000-1400 500-1000 <500
pl(/mm3) >100000 75000-99000 50000-74000 <50000->25000 25000
Hémorragie Absence pétéchies X XX XXX
Complications graves
Leuconeutropénie : infections graves, choc septique
Thrombopénie : hémorragie cérébrale ou autre hémorragie interne
Anémie : angor fonctionnel, infarctus du myocarde, AVC
ischémique
Pronostic vital engagé
LEUCONEUTROPENIE
Leuconeutropénie
Leucopénie : GB < 4G/L ou 4000 / mm3
Neutropénie: PNN < 1,5 G/L
Agranulocytose : PNN < 0,5 G/L
Lymphopénie: Ly < 1 G/L
Risque +++ = Aplasie fébrile = PNN < 0,5 G/L (ou attendus < 0,5 G/L)
+ Fièvre > 38,3 °C ou > 38° C à 2 reprises, à 1 heure d’intervalle Parfois hypothermie (BGN)
Leuconeutropénie
Risque infectieux selon le nombre de PNN < à 0.5G/L: risque x par 2.5
< à 0,1G/L: risque x par 10
0
1
2
3
4
5
0 100 500 1000
Toutes infections
Infections sévères
Bactériémies
Bodey, Ann Int Med,1966;64:328-40
Aplasie fébrile
Fréquent Tumeurs solides: 13% des patients et 3,6% des cycles Cullen et al NEJM 2005
Leucémies/greffe: 70% des patients Bucaneve et al NEJM 2005
Répété Tumeurs solides: 3% ont au moins 2 épisodes Cullen et al NEJM 2005
Leucémies/greffe: 15% des patients Akova et al CID 2005
Rarement documenté Tumeurs solides: 5-7% Cullen et al NEJM 2005
Leucémies/greffe: 22-39% des infections Bucaneve et al NEJM 2005
Grave Mortalité 4% chez l’adulte Hann, Br J Haematol 1997
Aplasie fébrile
60
30
10 Fièvre d'origine inconue, ni foyer
ni germe
Fièvre microbiologiquement
documentée, avec ou sans foyer
Fièvre cliniquement documentée :
foyer sans germe
BGN CG+
Pseudomonas aeruginosa
Pourquoi une telle modification de l’épidémiologie des infections ?
Plus de cathéters veineux centraux ou CIP
Chimiothérapie plus intensives : mucites
Pression de sélection des C3G et quinolones
Décontamination digestive
Compétence immunologique Neutropénie : profondeur et durée
Immunosuppresseurs
Cytotoxiques
Anticorps monoclonaux
Corticoides
Immunosuppresseurs (allogreffe)
GVH
Irradiation corporelle totale
Comorbidités
Aplasie fébrile
Altération des barrières: Muqueuses :
agents cytotoxiques: Mucite
irradiation
altération de la flore
Dispositifs invasifs : cathéter, CIP
Facteurs de risque :
Immunité cellulaire : taux de lymphocytes T CD4
(VIH, greffé de moelle, chimio lymphopéniante)
infections fongiques (aspergillose, candidose, mucormycose) Virales (CMV) bactéries intracellulaires (legionellose, tuberculose) Parasite : toxoplasmose, pneumocystose
Immunité humorale : taux de lymphocytes B (Ac) (myélome, splénectomisé, asplénie, greffé):
germes encapsulés : pneumocoque, méningocoque, haemophilus virus
Risque infectieux selon le déficit
immunitaire
Courte (<7 jours) :
BGN : E. Coli, pyocyanique
Tube digestif (diarrhée) Urines
COCCI gram + ORL (mucite) : streptocoque Tube digestif : entérocoque Peau : KT centraux : staphylocoque
coag neg, staph aureus (doré) Poumon : pneumocoque HSV (mucite) Candidose (mucite, antibiothérapie)
Risque infectieux selon la durée de
la neutropénie
Prolongée (>7 jours) :
Idem
+
Infections fongiques (aspergillose)
PRISE EN CHARGE DU
RISQUE INFECTIEUX
Prise en charge préventive
Eviter le contact avec les enfants ou adultes infectés (grippe, gastro…)
Limiter le nombre de visite
Eviter les sorties dans les lieux publics Hygiène bucco dentaires et lavage des mains
Eviter toutes les blessures (même anodines), si elles existent ne
pas les négliger
Renforcer les règles d’hygiènes (s’il y a dans l’environnement des animaux et des plantes vertes).
Respecter les règles d’hygiène alimentaire (cuisson des aliments au dernier moment et éviter les restes)
Antibioprophylaxie selon indication : oracilline, bactrim (greffe, splénectomie..)
Alimentation protégée : Aliments à éviter
Produits laitiers : tout ce qui n’est pas pasteurisé ! Fromages au lait cru, fromages à la coupe, fromages à moisissure (Roquefort, Bleu …)
Lait cru, crème crue
Desserts lactés, sauf industriels
Viande, poisson, œufs : viandes crues, saignantes, peu cuites
Œufs crus ou peu cuits (coque)
Abats, Charcuteries froides, sauf conserves et jambon emballé sous vide
Plats cuisinés du commerce, sauf surgelés et conserves
Poissons crus et poissons fumés
Fruits de mer, coquillages
Fruits et légumes : Légumes crus (y compris ail, oignon, persil)
Fruits qui ne s’épluchent pas
Divers : Mayonnaise maison
Pâtisseries fraîches du commerce
APLASIE fébrile
=
URGENCE THERAPEUTIQUE
Aplasie fébrile : Prise en charge
AMBULATOIRE = faible risque neutropénie courte (<7j) Fièvre isolée (examen au domicile
par MT) EG conservé Pas d’ATCD infectieux grave Patient non isolé
HOSPITALISATION = haut risque
neutropénie profonde et
prolongée (>7j) Fièvre > 48h malgré ATB EG altéré, diurèse++ Mucite Patient isolé ATCD infectieux grave ou
hospitalisation récente Patho néoplasique active Type de chimiothérapie
Complication dans 5% des cas
Complication dans 34% des cas
Prise en charge = TTT probabiliste et URGENT
Patient à domicile:
Germes communautaires (entérobacteries, cocci)
double ATB orale
Patient hospitalisé: Germes hospitaliers et sélectionnés
(Cocci, pseudomonas aeruginosa)
double ATB IV après prélèvements microbiologiques
Réévaluation de l’antibio thérapie à 48h00
Prise en charge hospitalière de la neutropénie fébrile
ο Examen clinique complet, recherche signes de gravité
ο marbrures, hypotension, tachycardie, désaturation, trouble neurologiques
ο Bilan biologique standard
ο NFS, plaquettes ο CRP ο Prélèvements bactériologiques :
ο hémocultures KT central et périphérique, répétées aérobies, anaérobies, +/-fongiques,
ο BU +/-CBU,
ο Radiographie pulmonaire
Prise en charge hospitalière de la neutropénie fébrile
ο Antibiothérapie EN URGENCE ο Après les prélèvements microbiologiques
ο Réadaptation du traitement ATB en fonction de :
ο l’état clinique ο du résultat des prélèvements infectieux
ο Augmentation du remplissage par sérum physiologique ou
macromolécules ο si hypoTA
ο Chambre individuelle ο Isolement protecteur ο Isolement septique si germe multi-résistant
ο Protections (masques, surblouse pour le personnel), alimentation bien cuite voire stérile (aplasie prolongée)
ο Attention aux stéthoscopes (survie Gram- 4 à 6H / Gram+ > 18H)
ο Traitement antiviral (aciclovir si mucite) et antifongique
ο Support transfusionnel +/- G-CSF
Prise en charge hospitalière de la neutropénie fébrile
THROMBOPENIE
THROMBOPENIE
Risque d’hémorragie spontanée :
Plaquettes < 20G/l
CUTANE
MUQUEUX
Plaquettes < 10 G/l
VISCERAL : digestive et cérébrale +++
PURPURA, épistaxis,
gingivorragies
Syndrome hémorragique cutanéo-muqueux
Pétéchies Ecchymose Bulles
hémorragiques endobuccales
HEMORRAGIE VISCERALE
Hématurie
Hématome cérébral
Digestive
Hémorragie rétinienne
→ le pronostic vital peut être engagé
PRISE EN CHARGE DE
LA THROMBOPENIE
Prise en charge d’une thrombopénie
Risque hémorragique < 50 G/L
Risque vital < 6 - 10 G/L
Seuil chirurgical
Gestes à éviter si la thrombopénie est inférieure à 50 G/L :
Injection intramusculaire, GAZ du SANG
Biopsies percutanées
Toute intervention chirurgicale
Ponction lombaire
Gestes à éviter si la thrombopénie est inférieure à 20 G/L :
Ponction pleurale
Prise en charge d’une thrombopénie
Vigilance en cas de risque hémorragique peau et muqueuses (jambes, bouche), état neurologique, voie
centrale
Education thérapeutique et conseils au patient : Gingivorragie : brosse souple, bains de bouche
Epistaxis : position assise, narine comprimée avec pouce. Contacter un médecin si prolongée.
Eviter traumatismes ou plaies : pas de sport violent, rasoir électrique
Pas de prise de température rectale
En cas de troubles visuels ou du comportement après un choc : consulter en urgence
Rôle de l’infirmier(e)
ANEMIE
ANEMIE
Problème très fréquent en onco-hématologie :
30 % à 40% des patients anémiques avant tout traitement
54 % des patients après 2 cures
Toxicité plutôt chronique, d’apparition retardée, souvent durable et d’aggravation progressive
Altération de la qualité de vie ++++
ANEMIE
Signes fonctionnels
Asthénie
Dyspnée Douleur thoracique
Palpitations
Céphalées, vertiges, acouphènes
Anorexie
Signes cliniques
Pâleur
Tachycardie
Hypotension artérielle Souffle cardiaque
PRISE EN CHARGE DE
l’ANEMIE
Préventive :
Surveillance biologique
Erythropoïétines (EPO) recombinantes +/- supplémentation martiale Voie sous-cutanée 1 fois par semaine à 1 fois / 3 semaines selon produit Ordonnances de médicaments d’exception
Prise en charge de l’anémie
Prise en charge d’une anémie
Prise en charge curative:
transfusion isogroupe, isorhésus, phénotypée, +/- (irradiés, CMV compatiblisés)
Repos
Oxygénothérapie 1 à 2 l/min en attente de la transfusion si mal supportée
Prise en charge de l’anémie
Objectif : Hb>8g/dl si pas de comorbidités Hb>10g/dl si ATCD cardiaques
8 < Hb < 10 g/dl
Hb < 8 g/dl
10< Hb < 12 g/dl EPO
Transfusion érythrocytaire
Nécessité d’une correction rapide ??
non
oui
Rôle des soins infirmiers
Évaluer : le degré de gravité de l’anémie : TA, FC, pâleur, hypotension artérielle, douleur thoracique, confusion
L’asthénie
les besoins d’aide pour la vie quotidienne (ne pas hésiter à faire appel à l’assistante sociale)
Éducation thérapeutique et conseils aux patients : Ne pas minimiser les symptômes
Respecter les prescriptions de bilans sanguins
Adapter son activité
Conclusion
La toxicité hématologique est la plus fréquente des toxicités aiguës des agents anti-cancéreux
Elle atteint les 3 lignées médullaires (PNN > Plq > GR)
Le rôle des soins infirmiers est primordial :
Information
Prévention
Surveillance
Soutien
Information
Du patient et de sa famille Risques de la chimiothérapie Moyens de prévention
Hygiène renforcée Observance
Signes d’alerte et réflexes à avoir Prise de la température Appel du médecin
Dispositifs d’aide au domicile (assistante sociale)
Des autres personnels paramédicaux Traitement envisagé et risques encourus
Prévention
Infections
Hygiène et asepsie +++ Mesures de protections
Isolement
Alimentation protégée
Hémorragies Gestes à éviter en cas de thrombopénie
Surveillance
Signes cliniques et signes de gravité : donner l’alarme Interrogatoire du patient
Constantes, diurèse, selles
État cutané et des muqueuses
Biologique sur prescription médicale
Voies veineuses
alimentation
Vérification Respect des règles d’isolement et d’hygiène
De la bonne information de tous les intervenants
Transmission dans le dossier de soins infirmiers
Soutien
Rôle prépondérant de l’information et de l’écoute
Compréhension de la maladie et des traitements Acceptation des soins Soulagement
Besoins objectifs mais aussi subjectifs
Liés au ressenti (besoin relationnel ou psychologique…) Pas forcément en relation avec la pathologie Pas toujours exprimés Souvent mal évalués faute de temps, d’envie ou de
formation des professionnels