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Nicolas Sarkozy, lundi 19 septembre 2016, à Franconville dans le Val d'Oise. (Martin BUREAU / AFP)Nicolas Sarkozy, lundi 19 septembre 2016, à Franconville dans le Val d'Oise. (Martin Gérard Diez La Presse en Revue LA PRESSE EN REVUE... SOMMAIRE 1) Les répliques… 2) Le débat est relancé 3) Le ton monte à droite 4) L’ultime barrage 5) Sarko : M. Je sais tout et fanfaron 6) Désoléissance ! VENDREDI 11 NOVEMBRE 2016 I) Trump, répliques françaises et européennes

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Nicolas Sarkozy, lundi 19 septembre 2016, à Franconville dans le Val d'Oise. (Martin BUREAU / AFP)Nicolas Sarkozy, lundi 19

septembre 2016, à Franconville dans le Val d'Oise. (Martin

Gérard Diez La Presse en Revue

LA PRESSE EN REVUE...

SOMMAIRE

1) Les répliques…2) Le débat est relancé3) Le ton monte à droite4) L’ultime barrage5) Sarko : M. Je sais tout et fanfaron6) Désoléissance !

VENDREDI 11 NOVEMBRE 2016

I) Trump, répliques françaises et européennes

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II) Présidentielle. En France, la leçon américaine relance le débat sur 2017

https://youtu.be/WmcJY3etklM

Par La rédaction de Mediapart

Nos invités interrogent les résonances entre l’élection de Donald Trump et les succès électoraux des droites extrêmes et/ou populistes sur le vieux continent.

Nos invités :

Kristin Ross, professeure de littérature comparée à l'université de New York, auteur de L'Imaginaire de la Commune (La Fabrique).Sylvain Cypel, journaliste, essayiste, a publié Un nouveau rêve américain (Ed. Autrement).Cécile Alduy, professeure de littérature française à Stanford University, a publié Marine Le Pen prise aux mots.Edwy Plenel, directeur de Mediapart.

mediapart.fr

Alexandra Chaignon humanite.fr

Photo John Morre/AFP

A six mois de la présidentielle française, l’élection de Trump rebat les cartes. Le PCF souligne que « la gauche française doit en tirer les leçons pour la présidentielle ».

Qui aurait pu croire que le Royaume-Uni allait se prononcer en faveur d’une sortie de l’Union européenne ? Personne ne s’y attendait et pourtant, ça s’est produit. Comme pour l’élection de Donald Trump à la Maison blanche aujourd’hui. « C’était considéré comme inimaginable et c’est arrivé. » Au lendemain de la victoire de Donald Trump, la réaction de François de Rugy, député écologiste ex-EELV, résume un sentiment général exprimé par de nombreux élus et responsables politiques abasourdis par l’accession du milliardaire à la présidence des Etats-Unis.

Seul le Front national y fait exception, en se félicitant de l’issue des élections américaines. Il faut dire que si le parti d’extrême-droite se frotte les mains, c’est qu’il veut voir dans ce résultat un signe de ce qui pourrait se passer en France dans quelques mois. De fait, la victoire de Trump, véritable séisme politique, révèle les profondes lignes de fracture qui scindent aujourd’hui la société américaine. Et qui présentent des ressemblances avec celles qui traversent aussi la société française… ce qui inquiète d’autant plus les partis politiques, à l’approche des élections présidentielles. Favori des sondages pour la primaire de la droite, Alain Juppé a ainsi mis en garde les Français contre « les risques que la démagogie et l’extrémisme font courir à la démocratie et le caractère vital des choix qu’ils ont à faire ». Nicolas Sarkozy voit, lui, dans la victoire du milliardaire populiste « le refus d’une pensée unique ».

L’ancien chef de l’Etat qui fustige « l’alternance molle » qu’incarnerait Alain Juppé juge dans ce nouveau contexte diplomatique qu’il n’y a « pas de place pour l’impuissance, la faiblesse et le renoncement ». Pour Dominique de Villepin, cette victoire est « l’expression d’un malaise extrêmement profond, d’un refus des élites. C’est la sanction des politiques économiques, internationales et sociales qui ne fonctionnent pas », estime l’ancien premier ministre.

A gauche, l’élection américaine constitue un véritable électrochoc, d’autant plus que les sondages promettent une élimination de ses candidats dès le premier tour de la présidentielle. Dans une allocution solennelle, le chef de l’Etat, pour qui la victoire de Trump « ouvre une période d’incertitude », a appelé à « trouver les réponses » qui « sont en nous », aux « peurs » qui auraient abouti à l’élection américaine. Pour le PS, le seul salut possible viendra du rassemblement. « La

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III) Primaire de la droite : le ton montera-t-il entre les favoris ?

gauche est prévenue ! Continuons nos enfantillages irresponsables et ça sera Marine Le Pen », a mis en garde Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du PS, tandis que la porte-parole du parti, Corinne Narassiguin, appelait les candidats possibles ou déclarés à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron et Yannick Jadot, à « rejoindre la primaire » de la « Belle alliance populaire » pour aboutir à un candidat unique. Autant d’appels à l’unité empreints d’une forme de culpabilisation qui, en réalité, font l’impasse sur l’ingrédient essentiel qui alimente la montée de l’extrême droite en France, tout comme il a permis l’élection de Donald Trump : le renoncement des gouvernants se réclamant de la gauche à proposer des politiques alternatives à la mondialisation néolibérale.

Comme le souligne Sébastien Jumel, maire PCF de Dieppe : « Si la gauche n’incarne pas un projet et une candidature à même de porter la colère du peuple et des déclassés, d’en finir avec l’insécurité économique et le déclin industriel, si elle ne porte pas un espoir de reconstruction du contrat social, en rupture franche avec une politique qui se contente d’accompagner depuis trente ans la mondialisation ultralibérale, elle court le risque de se défaire.

Cet événement outre-Altantique conforte, ici en France, le choix d’un candidat à la présidentielle qui représente cette colère. » Et le porte-parole du PCF, Olivier Dartigolles, de prévenir : « Pour ceux qui en doutent, ce qui vient de se passer aux USA doit les faire réfléchir. Les peuples sont en colère, rejettent le système. Sans le rassemblement d’une gauche de progrès, anti-austérité, c’est le populisme de droite qui s’imposera en 2017 ou après ».

Dans un communiqué, le PCF a qualifié hier l’élection de Trump de « véritable séisme » qui met l’« Amérique et le reste du monde en état de choc », et a souligné l’urgence pour la gauche française d’« en tirer les leçons pour la présidentielle » et d’« ouvrir la voie à de réelles politiques de progrès et justice sociale ».

Alexandra Chaignon

LAPRESSEENREVUE.EU

Les deux favoris de la primaire de la droite et du centre, Alain Juppé (à gauche) et Nicolas Sarkozy (à droite), se serrent la main devant

Nathalie Kosciusko-Morizet, lors du premier débat de la primaire le 13 octobre. PHOTO PHILIPPE WOJAZER / REUTERS

Le deuxième débat de la primaire de la droite aura lieu ce 3 novembre. Après le ralliement de François Bayrou à la candidature d’Alain Juppé, le ton est monté d’un cran entre le favori des sondages et son rival, Nicolas Sarkozy.

La question est simple : “Comment faire pour conserver son avance qui semble s’effriter tout en maintenant sa pole position ?” Telle est l’équation qui se présente à Alain Juppé, selon le correspondant à Paris du Temps, le quotidien de Lausanne, au matin du deuxième débat qui va l’opposer aux autres candidats à la primaire de la droite.

“Être présent sur le terrain, et en particulier sur des lieux symboles des promesses non tenues de son principal adversaire. Ne pas se laisser enfermer dans un duel avec Nicolas Sarkozy. Car à ce jeu, l’ancien président, toujours à l’affût, est redoutable. Le fait que la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, ancienne alliée de François Fillon, ait décidé de soutenir le maire de Bordeaux est de ce point de vue très important. Pourquoi s’inquiéter, alors ? Avant tout parce qu’Alain Juppé reste prisonnier de l’équation de la primaire : largement en tête s’il se présentait aujourd’hui directement devant les Français pour la fonction suprême, ce dernier paie le prix de son éloignement du parti, de son manque de base militante, de ses compromis avec le centre”, explique Le Temps.

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Sans grand enthousiasme

Le compromis avec le centre, l’anathème est lancé ! Il concentre les attaques du camp Sarkozy contre l’ancien Premier ministre, coupable d’avoir “vendu son âme à celui qui a soutenu François Hollande en 2012. Qu’Alain Juppé ait accepté le soutien de François Bayrou prouve son manque d’engagement à servir les valeurs conservatrices et l’assurance qu’il finira à la tête d’un gouvernement à la dérive”, explique Politico.

Le message du clan Sarkozy est clair : “La recherche constante du compromis par Alain Juppé relève du même comportement que celui qui a mené la présidence de François Hollande au désastre”, analyse le site américain basé à Bruxelles. Nicolas Sarkozy, lui, ne fera pas de concessions.

Politico note aussi qu’Alain Juppé donne des signes de fatigue et que “s’il ne parvient pas à soulever un enthousiasme réel, c’est qu’il fait campagne sur le seul argument qui est de ne pas s’appeler Nicolas Sarkozy”.

Le chemin sera encore long jusqu’au 27 novembre.

Courrier international - Paris

IV)Mélenchon, ultime barrage contre Le Pen ?

Elie Arié

Né en 1938, chevènementiste, cardiologue, ancien enseignant d'économie de la santé au CNAM, ancien membre du PS puis du

Secrétariat National du MRC jusqu'en 2002, ancien membre du Conseil Scientifique de la Fondation Res-Publica, membe du mouvement République Moderne auteur de "Mondialisation, déclin de l' Occident" (préface de Jean-Pierre Chevènement), graphomane compulsif (livres, articles, tribunes, etc. tous azimuts).

Jean-Luc Mélenchon est le seul susceptible de détourner de Marine Le Pen un certain nombre de ses électeurs potentiels.

Sipa

Il y a tout de même une raison de se satisfaire de la hausse des intentions de vote en faveur de Mélenchon, et même d'espérer qu'elle se maintienne, voire qu'elle augmente.

Non pas qu'il ait la moindre chance d'accéder au pouvoir - auquel cas, comme Syriza, il ne pourrait pas appliquer son programme, ni faire quoi que ce soit de bien différent de ce que fait le gouvernement actuel ; parce que :

-les programmes, tout le monde s'en fout, aussi bien de ceux de Mélenchon que de ceux de Le Pen, ou de tous les autres candidats (qui a lu les 1015 pages du programme de Bruno Le Maire ? qui a l'intention de le faire ? cet énorme travail a-t-il eu la moindre influence sur les intentions de vote en sa faveur ?),

-les rapports de force sont ce qu'ils sont dans le monde de l'économie globalisée et dans l' Union Européenne actuels;

-ni qu'il ait la moindre vision de l'avenir - pas plus que n'importe lequel des politiques actuels - sur les vrais problèmes qui sont devant nous : ceux de la numérisation, de la robotisation et de l'ubérisation de l'économie mondialisée, qui sera dominée par la génétique, les big data, les nanotechnologies, etc.,- monde dont toutes les cartes sont entre les mains des Etats-Unis ( Google, Amazon, Facebook, etc.),et qui vont bouleverser le monde du travail, le monde du salariat, le monde de la santé, le monde de la retraite, etc., et que les politiques sont incapables de penser - en tous cas, ils ne l'évoquent jamais. Notre débat politique est celui d'une époque révolue, et je me demande si ce n'est pas là la principale raison de la désaffection des Français (qui vivent quotidiennement cette mutation) pour les discours d'une classe politique qui leur semble

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LAPRESSEENREVUE.EU

davantage « hors-temps » que « hors-sol »...

Mais parce que je fais partie de ceux qui pensent que les chances de victoire de Marine Le Pen sont très sérieuses pour 2017: dans les sondages, son score reste stable ou augmente alors qu'elle n'intervient pratiquement pas dans le paysage médiatique, et ses rares apparitions ( y inclus dans les émissions de people-politique) écrasent les scores d'audience de tous les autres candidats.

Car une victoire de Marine Le Pen, à condition qu'elle soit confirmée par les législatives qui suivront (d'où le danger que constituerait l'introduction d'une dose de proportionnelle), apporterait, elle, un vrai changement possible : un gouvernement non pas fasciste, mais à la fois autoritaire, populaire et réactionnaire, correspondant sans doute à une vraie demande des sociétés actuelles, comme on le voit dans des pays aussi différents que la Russie, la Pologne, la Hongrie ou la Turquie (le cas des Etats-Unis est différent, même si Trump venait à emporter les présidentielles: les structures mêmes de la société américaine, avec les pouvoirs des Etats et un culte de la liberté individuelle qui n'existent nulle part ailleurs, limitent le pouvoir fédéral.)

Or, par son style démago-populiste, Mélenchon est le seul susceptible de détourner de Marine Le Pen un certain nombre de ses électeurs potentiels (contairement à Sarkozy, qui y était parvenu en 2007, mais le monde a beaucoup changé en 10 ans), et cela d'autant plus que les sondages lui attribueront un score qui rendrait sa candidature plus crédible.

V) Donald Trump élu, Nicolas Sarkozy dénigre Barack Obama, "adoré des élites françaises"

Nicolas Sarkozy et Barack Obama en 2011 © DSK / FRANCE 2 / AFP

Sylvain [email protected]

VENT TOURNANT -C'était son "copain", rencontré alors que le 44e président des États-Unis n'était encore que sénateur. Mais que voulez-vous, le cœur des hommes a ses raisons que la Raison ignore et si, pendant longtemps, Nicolas Sarkozy a loué les qualités de Barack Obama, cette ère est aujourd'hui révolue. Et la fin de règne politique du leader américain n'y est sans doute pas pour rien.

Invité ce jeudi 10 novembre des 4 Vérités France 2, Nicolas Sarkozy évoque l'élection, la veille, de Donald Trump à la présidence des États-Unis d'Amérique. L'ancien chef de l'État français a déjà expliqué, mercredi, combien ce succès est le symbole d'un combat contre "la pensée unique", combat qu'il entend bien mener lui aussi. Ce jeudi, Nicolas Sarkozy va plus loin et ajoute que l'élection du candidat du Parti républicain, bien qu'elle soit importante, ne doit en rien modifier les relations entre la France et les États-Unis. Et pour bien se faire comprendre, l'ex-Président français s'en prend donc à son "copain", comme il avait coutume de l'appeler. Il dit :

J'ai connu ça au moment de Bush. On ne va pas moins aimer les États-Unis parce qu'ils avaient choisi Bush qui n'était pas aimé par les élites françaises que parce qu'ils avaient choisi Obama (sic). On a eu des problèmes et des conflits alors que c'était Obama, adoré des élites françaises.

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LAPRESSEENREVUE.EU

En rappelant les liens historiques entre la France et les États-Unis, Nicolas Sarkozy parvient donc à critiquer les élites françaises qui adoraient Barack Obama. On rappellera que fut un temps où l'ancien chef de l'État français adorait lui-aussi son ami américain. C'était en juillet 2008 quand le Président français recevait celui qui n'était encore que candidat démocrate à la Maison-Blanche. C'était en 2009, quand les deux chefs de l'État se lançaient mutuellement des fleurs sur leur action, même si en coulisses on s'agaçait des prises de positons du leader américain. C'était en 2012 quand Nicolas Sarkozy annonçait tel Paco Rabanne à Barack Obama que tous deux seraient réélus à leur poste.

Les temps ont changé et cela ne date pas d'hier. Cette année, les deux hommes ont eu de vifs échanges par voie de presse interposée. En mars dans The Atlantic, Obama avait dézingué l'attitude des Européens mais surtout de Sarkozy dans la gestion de l'intervention occidentale en Libye en 2011, et le manque de "suivi" opéré après les actions militaires. Il critiquait vertement la "fanfaronnade" du président français d'alors, lui qui "voulait claironner ses succès dans la campagne aérienne alors que nous avions détruit toutes les défenses anti-aériennes". Il rappelait également que "Nicolas Sarkozy avait perdu son poste" l'année suivante... contrairement à lui.

Huit jours plus tard, l'intéressé défouraillait à son tour, sur iTÉLÉ. "Je ne veux pas polémiquer avec monsieur Obama, dont chacun sait que l'action n'est pas son fort", lâchait-il, ajoutant que "monsieur Obama avait dit : 'À la minute où Bachar al-Assad emploie des armes chimiques nous interviendrons'. Bachar al-Assad a employé des armes chimiques, ils ne sont pas intervenus. Quand on fixe des limites, qu'elles sont franchies et qu'on ne fait rien après, ce n'est pas bon signe". Il moquait aussi son prétendu "leadership de l'arrière" et sous-entendait que le commander in chief n'était en fait "pas un leader".

lelab.europe1.fr

VI) Paul Magnette: «Dans l’intérêt de l’Europe, il faut parfois lui désobéir»

Par Ludovic Lamant

Dans un entretien à Mediapart, le ministre-président wallon Paul Magnette tire les leçons de la victoire de Donald Trump pour la social-démocratie et revient en longueur sur les coulisses de sa bataille contre le CETA. « Ce que les démocrates ont subi aux États-Unis, les sociaux-démocrates en Europe peuvent le subir exactement de la même manière », met-il en garde. Le socialiste belge plaide pour une gauche plus offensive sur les questions commerciales.

Il a été la figure du « moment wallon », lorsque cette région belge de 3,5 millions d’habitants a tenu tête à l’Europe, fin octobre, sur le traité de libre-échange avec le Canada (CETA). Dans un entretien à Mediapart, Paul Magnette, ministre-président de la Wallonie, réagit à la victoire de Donald Trump et réfléchit aux leçons politiques à tirer pour la social-démocratie en Europe. Le socialiste revient aussi, longuement, sur les coulisses de cette négociation inédite avec Bruxelles et Ottawa, et explique pourquoi il a choisi, en bout de course, de ratifier ce texte.

Paul Magnette à Bruxelles le 27 octobre 2016, en pleine crise du CETA. © Reuters / Yves Herman

Que vous inspire la victoire de Donald Trump ?

Paul Magnette : Les premiers éléments que l’on observe, surtout lorsque l'on se souvient que le vote des démocrates et des républicains était très figé lors des trois dernières élections, c'est que tous les États de la « rust belt » [la ceinture de la rouille, dans le nord-est – ndlr] ont basculé côté républicain. C'est l’ouvrier qui a subi la désindustrialisation et la pression de la compétitivité, ce sont les classes moyennes qui ont peur du déclassement, et qui ont voté anti-système. Je formule une analyse précoce, parce que je ne connais le résultat que depuis quelques

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heures (lire la boîte noire). Mais si cela se confirme, c’est bien sûr une question fondamentale pour la gauche. Cela veut dire que ce que les démocrates ont subi aux États-Unis, les sociaux-démocrates en Europe peuvent le subir exactement de la même manière.

Nous devons repenser notre rapport à la politique industrielle et aux politiques anti-dumping, de manière beaucoup plus offensive. On ne doit pas devenir un populiste de gauche pour autant, parce qu’on perdrait notre âme de socialiste. La différente entre un socialiste et un populiste de gauche, c’est que nous avons vocation à gouverner la société. Je dis cela tout en étant convaincu que la fonction tribunitienne est très importante.

La réponse à Trump, c'est plus d'agressivité en matière commerciale ?

C’est entendre ce cri des “perdants” de la mondialisation. Si l’on n’entend pas ce cri-là, à quoi on sert, en tant que gauche ? C’est cela qu’on doit incarner. Le problème d’une partie de la social-démocratie européenne, c’est qu’elle a fini par faire partie du système. Sur les questions du libre-échange, la différence idéologique n’est plus aussi nette. Cela ne veut pas dire que l’on doit devenir protectionnistes. Mais je prends toujours l’expression de Gramsci pour le dire : on doit assumer « l’autonomie culturelle » de la gauche. La gauche doit dire : je ne suis ni libérale ni protectionniste, je suis sociale-démocrate et c’est un programme en soi. Si l'on fait des échanges commerciaux avec les pays qui produisent les mêmes produits que nous, et s’ils le font dans des conditions sociales et environnementales inférieures aux nôtres, quel est l'intérêt de l’Europe à se lancer là-dedans ?

Cela commence à bouger un peu à Bruxelles, avec la lutte contre le dumping chinois sur l’acier.

Oui, et ce sont celles-là, les vraies questions. La social-démocratie doit porter ce débat-là : très bien, vous voulez faire du commerce, mais pourquoi ? Cela va créer de l’emploi ? Pour lutter contre le réchauffement climatique ? Il faut forcer la commission à dire : on ne peut pas continuer le “business as usual”. J’espère qu’à la commission, il n’y a plus personne ce matin qui croit que l’on va négocier le TTIP [le traité de libre-échange avec les États-Unis, ou TAFTA – ndlr]. Mais je ne suis pas sûr qu’il n’y en ait pas quelques-uns qui y croient encore.

Si l'on vous suit, votre bras de fer sur le CETA, c'est la bonne manière de revitaliser la social-démocratie ?

Le vice-premier ministre de Belgique, Didier Reynders [MR, droite – ndlr], a dit, en substance : Paul Magnette, Donald Trump, même combat. Il l'a dit de manière plus nuancée. Mais il estime, en gros, que le protectionnisme de Trump n’est pas très différent de la résistance de la Wallonie au CETA. Il y a toujours cette volonté de nous faire passer pour des protectionnistes et d’empêcher les sociaux-démocrates d’avoir un discours critique sur le libre-échange. Mais c'est exactement ce qui tue l’Europe, et la gauche depuis toujours.

Si vous étiez contre l’euro, vous étiez un mauvais social-démocrate et un mauvais européen. Si vous étiez contre les traités, idem. Non : je suis un Européen convaincu, mais je pense, et je l'ai dit sans prémonition lors de mon discours de rentrée [le 3 octobre 2016 – ndlr], que « dans l'intérêt de l'Europe, il faut parfois lui désobéir ». Pour sauver le projet européen, il faut, dans certains moments, se mettre en opposition au projet européen, se mettre presque en infraction, pas au

« Tsipras, lui, avait une contrainte colossale »

Qu’est-ce que le « moment wallon » sur le CETA vous a appris de l'Europe ?J'ai vu de l'intérieur quelles techniques les institutions européennes utilisent pour isoler les « minoritaires ». Un jour, je l’écrirai en détail. Dans le fond, ce sont des techniques diplomatiques classiques. En interne, l'Union fonctionne beaucoup plus comme un système international que comme un État. L’UE n’est pas une machine à produire de l’accord, c’est une machine à réduire les désaccords.

Il y a ceux qui sont pour le traité avec le Canada, très bien. Et il y a les autres. La commission va les voir les uns après les autres, pour cerner les difficultés, et voir comment s’en accommoder. Évidemment, avec une certaine préséance : quand c’est l’Allemagne qui demande, ça n’a pas le même poids que la Wallonie, pour dire les choses clairement.

L'idée, c'est de laisser les plus petits pour la fin. Et à la fin, on vous dit : 27 sont d’accord, vous ne pouvez pas être tout seul à ne pas être d’accord. Comme si le seul fait d’être le dernier vous privait de votre droit au désaccord. Quand on dit que l'UE fonctionne à l'unanimité, ce n'est pas vrai. C'est de la presque unanimité. Au fond, le dernier,

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le dernier, surtout s'il est petit, n’a pas le droit d’avoir un veto.

Il y a d'autres techniques pour vous faire rentrer dans le rang ?

Les ultimatums. On vous dit qu’il y a une date qu'on ne peut pas dépasser, qu'il y a conseil européen, qu'il faut un accord sur le CETA au conseil européen. Je savais que d'un point de vue institutionnel, c'était faux : ce n'est pas au conseil européen [la réunion des chefs d'État et de gouvernement – ndlr] que l'on adopte les traités commerciaux, c'est aux conseils commerce [les réunions des ministres du commerce des 28 – ndlr] de le faire. Même si j'entendais que politiquement, c'était délicat de sortir du conseil européen le 21 octobre sans accord.

Troisième technique : on vous convoque sans cesse à des réunions. Et il faut être honnête, il n'est

pas possible de ne pas y aller. Parce que l'on joue le jeu institutionnel. Il m'est arrivé une seule fois durant la séquence de pratiquer la politique de la chaise vide, parce qu'on avait essayé de me coincer dans un format de réunion qui n'était pas celui que je désirais. Mais sinon, la technique, c’est que l'on vous invite et l'on vous demande d'expliquer vos difficultés. On vous explique pourquoi on ne peut pas y répondre. On vous demande de faire des propositions. On vous fait des contre-propositions. Vous ne pouvez pas sortir de la réunion. La négociation dure. Et il faut reconnaître la qualité intellectuelle et le professionnalisme des experts, de la commission comme du conseil. Ce sont de grands commis de l'État, d'une grande rigueur et honnêteté intellectuelles. Et tout cela fait que l'on se trouve un peu coincés dans le processus.

C’est une technique d’épuisement ?

Une technique d’entonnoir, très classique dans les négociations internationales. Au fil des semaines, de moins en moins d'acteurs s'y opposent. Mi-octobre, il restait encore les Roumains et les Bulgares, qui voulaient des garanties sur les visas avec le Canada, pour signer le CETA. Puis il n'est plus resté que les Wallons. Et puisqu'il n'y a plus que vous, vous allez forcément céder. On a dit non. Et là, ils nous disent qu'ils veulent bien discuter, mais uniquement jusqu’à telle date, et sous telles conditions, et uniquement sur tels aspects. Tout l'enjeu pour nous, tout au long des

discussions, c'était de rouvrir l’agenda, et de rouvrir le calendrier, pour trouver à chaque fois la manière de ne pas se laisser enfermer.

Vous avez pensé à appeler Alexis Tsipras, pour qu'il vous conseille ? [Le premier ministre grec a perdu son bras de fer au sein du conseil européen à l'été 2015, après des mois de bataille, sur l'aide économique à la Grèce]

J’y ai pensé. Mais je ne l’ai pas fait (rires). La grande différence, c’est que Tsipras avait une contrainte colossale. Il avait besoin d’un accord sur la dette, sans quoi le lendemain, son pays était en faillite. Moi, je n’avais besoin de rien. J’étais dans un confort politique beaucoup plus grand. J'avais des pressions diplomatiques, c'est tout.

Vous risquiez gros pour votre carrière politique : j'imagine que ça joue.

Oui, c'est une chose. Mais vous le croirez ou pas, à certains moments du combat politique, il n’y a plus que les principes politiques qui comptent. On est allés tellement loin dans le combat que je me suis dit à un moment donné : je préfère aller jusqu’à bout pour défendre mes principes, et je ferai autre chose si cela tourne mal – je viens de l’université et je peux y retourner –, plutôt que de céder sans avoir obtenu ce que l’’on voulait obtenir.

« Maintenant, il faut atterrir »

C’est une manière de répondre à ceux qui disent que vous avez fait tout cela de manière purement tactique, en réponse à la poussée du PTB (parti à la gauche du PS) en Wallonie ?

Franchement, quand on regarde toute la séquence, on a commencé ce travail parlementaire il y a deux ans quand personne ne parlait du PTB. Au parlement wallon, je dispose d'une majorité des deux tiers avec les Verts, et le PTB n’a pas arrêté d’exprimer son soutien, via les réseaux sociaux, à nos positions sur le CETA. Je crois vraiment qu'on avait dépassé cela, à un moment donné.

Vous, peut-être. Mais d’autres responsables au sein du PS ont senti qu'il y avait un coup à jouer.

Je vais vous répondre, mais avant, je veux contextualiser. D’abord, contrairement à ce que l’on pense, on ne monte pas des coups comme ça. Le CETA, c'est un concours de circonstances incroyable. Il se trouve que la commission a décidé en juillet que c’était un traité mixte [qui

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doit être ratifié par le parlement européen, mais aussi par les parlements nationaux – ndlr]. Sans ça, on ne nous aurait jamais rien demandé. Il se trouve que notre parlement a des pouvoirs constitutionnels à l'échelle de la Belgique. Sans cela, on ne se serait jamais trouvé là. Il se trouve aussi que par hasard, j’étais ministre-président de la Wallonie à ce moment-là. Et il se trouve qu’il y a une décision terrible de Caterpillar en septembre, qui a créé un climat politique très fort (lire notre article sur les plans sociaux en Belgique). Bref, il y a une série de circonstances qui ont créé le dossier.

Mais vous étiez divisés, au sein du PS ?

Je ne conteste pas qu’il y ait eu des débats entre ceux qui ont voulu atterrir, et ceux qui ne voulaient pas atterrir. Cela fait partie du jeu politique. C’est l’ADN de la gauche. On a créé un rapport de force, et après, il faut décider ce qu'on fait de ce rapport de force. Les plus optimistes disent : on a déjà obtenu ça, très bien. Les plus jusqu’au-boutistes veulent carboniser le traité. Entre les deux, il y a ceux, dont je faisais partie, qui étaient sur une ligne de synthèse. Je l'ai dit dès le départ : je voulais arriver à un accord. Mon raisonnement était purement politique. Pour moi, c'était quelque chose de très important que le Canada, coincé dans l'accord de l'ALENA avec les États-Unis, dise : je me tourne vers l'Europe. L'élection de Trump le confirme encore plus.

J e a n - C l a u d e J u n c k e r, président de la commission européenne, et Donald Tusk, p r é s i d e n t d u c o n s e i l européen. © Reuters

Pour le Canada, c’est un geste qui a un coût politique important, associé à un grand bénéfice commercial. Pour l’Europe, le bénéfice commercial sera sans doute maigre. Il n'y en aura peut-être pas du tout. Mais par contre, cela a du sens politique : un grand pays membre du G7 se tourne vers l’Europe. C'est pourquoi je reste persuadé, quand on est de gauche, que l'on doit souhaiter un accord entre l’Europe et le Canada. Mais pas à n’importe quelle condition. Je savais quel était pour moi le minimum que je voulais obtenir, pour aller à l'accord. Et une fois qu’on l’a obtenu, j’ai dit : maintenant, il faut atterrir.

Vous dites que vous avez été très isolé durant ce bras de fer. Pourtant, des sociaux-démocrates en Autriche et en Allemagne ont tiqué, eux aussi, sur le CETA, au cours des

derniers mois. C'est pour convaincre Vienne de ratifier le texte que la commission a publié une première « déclaration interprétative », début octobre. Pourquoi n'avez-vous pas été capable d'enclencher une vraie dynamique collective d'opposition au texte, à l'échelle européenne ?

Je ne peux pas tout raconter. Mais je regrette cet isolement. Je m’étais fait la même réflexion au moment de Tsipras [en 2015 – ndlr]. C’est dingue que les sociaux-démocrates n’aient pas davantage aidé les Grecs, et j’avais appelé Martin Schulz [le président du parlement européen – ndlr] à l’époque pour le lui dire. Sur le CETA, j’ai eu des contacts quotidiens avec Christian Kern, le chancelier autrichien, pendant tout un stade. Mais ensuite il m’a dit très franchement : j’ai obtenu ce que je voulais. On en revient à cette technique du confessionnel que pratique la commission européenne, un par un.

Les Autrichiens voulaient une clause qui indique qu'une entreprise ne peut pas demander d'indemnités supérieures à celles prévues par la législation nationale en cas d'expropriation directe. C'était un débat très important chez eux. J'étais en voyage officiel au Japon à cette époque-là [mi-octobre 2016 – ndlr], et Kern m'a dit : j’ai obtenu ce que je souhaitais, je n’ai plus d’objections, mais maintenant, si tu bloques encore le texte, on exprimera notre soutien. Bon, je dois reconnaître que je ne l’ai pas entendu exprimé si fort que cela, mais…

Et les Allemands ?

Les Allemands avaient eu ce qu’ils voulaient quand Sigmar Gabriel [ministre de l'économie social-démocrate du gouvernement Merkel – ndlr] s'est rendu à Ottawa [mi-septembre 2016 – ndlr]. J’ai eu beaucoup d'échanges avec Sigmar Gabriel, qui a franchement aidé. Et avec Martin Schulz.

Qui a été le plus utile, de Sigmar Gabriel ou de Martin Schulz ?

Ils ont été utiles différemment. Sigmar Gabriel entretient de très bons contacts avec les Canadiens. Il connaît Chrystia Freeland [la ministre du commerce canadienne – ndlr] et Justin Trudeau [le premier ministre – ndlr]. Martin Schulz, lui, a convaincu Juncker qu'il nous fallait du temps, et c'est lui qui a pris cette initiative de faire sauter l’ultimatum de Tusk [ultimatum lié à la tenue du sommet UE-Canada prévu, à l'origine, le 27 octobre – ndlr]. Tout de même, on peut dire qu'une coalition de sociaux-démocrates et de démocrates chrétiens s'est

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formée. Federica Mogherini a aidé, elle aussi [l'Italienne qui dirige la diplomatie de l'UE, sociale-démocrate – ndlr].

À l'inverse, l'arc des libéraux conservateurs a joué contre nous : ils renforçaient les pressions, insistaient sur les ultimatums, jouaient la montre. C'est le front Tusk - Malmström - Verhofstadt [respectivement, président du conseil européen, commissaire européenne au commerce, et chef du groupe des libéraux au parlement européen – ndlr].

« On a violé cinq fois la constitution belge »

Vous ne parlez pas de François Hollande. A-t-il existé dans ce dossier ?

Je dirais qu'il y a eu deux temps. Je suis d'abord allé le voir à l’Élysée [le 14 octobre – ndlr]. Il m’a dit qu’il était très attaché au CETA. Mais il a compris aussi que l’on avait besoin de temps et qu’il ne fallait pas nous enfermer dans un ultimatum. Durant le conseil européen [les 20 et 21 octobre – ndlr], il m’a téléphoné plusieurs fois. Il m’a demandé ce qu'il pouvait faire pour m’aider. Je lui ai notamment expliqué que cela ne pouvait pas s'improviser lors d'un conseil européen.

Hollande n’a pas relayé les pressions de Tusk et d’autres ?

Non, à aucun moment.

Mais il a été moins offensif qu’un Sigmar Gabriel à vos côtés ?

Gabriel a été très impliqué. Les discussions sur le CETA sont très importantes pour les Allemands, et pour le SPD. Gabriel, je le connaissais aussi, parce qu’il était ministre de l’environnement, quand j’étais ministre de l'environnement du gouvernement fédéral belge [de 2007 à 2011 – ndlr]. Les liens interpersonnels jouent aussi dans ce genre de situations.

Construire des rapports de force à Bruxelles pour bousculer la droite, c'est exactement ce que n'a pas su faire Hollande depuis 2012…

Je ne porte pas de jugement. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé lors des réunions au conseil européen.

Mais cette manière d'enrayer la machine, de rouvrir – un peu – l'horizon politique à

Bruxelles, cela ne s'était pas passé depuis longtemps.

Oui, ça, j’en ai pris conscience après coup. La semaine d’après, pendant mes jours de congés, je me suis dit : il

m’est arrivé un truc absolument incroyable. On a

violé cinq fois la constitution belge, et on a violé toutes les règles de fonctionnement de l'UE pendant la période. J’ai par exemple reçu un émissaire canadien ici [au siège de la présidence wallone à Namur – ndlr], alors que je n’ai aucun droit de le faire, sans le gouvernement fédéral [à Bruxelles – ndlr]. J’ai négocié en ligne directe avec la commission européenne, alors que je n’ai pas le droit de le faire sans le gouvernement fédéral, etc.

Nous avons tordu toutes les règles de fonctionnement habituelles. Et ce fut possible parce qu’il y avait ce concours de circonstance extraordinaire. Je savais que la commission devait à tout prix avoir un accord, parce que sinon, elle démontrait au monde entier qu’à cause d’une petite région de 3,5 millions d’habitants, elle était incapable de faire des accords commerciaux. Et je savais que le gouvernement belge en avait aussi besoin : si le gouvernement belge se montrait incapable de mettre de l’ordre dans la maison Belgique, sa réputation, déjà très abîmée, en prenait encore un coup. J’avais face à moi deux interlocuteurs qui avaient besoin d'un accord. Nous avons donc fait des choses sans précédent : le président de la commission, Jean-Claude Juncker, a dépêché un négociateur en chef avec un mandat personnel, autorisé à écrire en séance des amendements et en valider d'autres, pour participer aux réunions avec nous.

Ce qui constitue, au passage, un désaveu total pour la commissaire au commerce Cecilia Malström.

Elle a été complètement écartée de la discussion. J'avais eu une première réunion avec elle. Mais elle était de ceux qui refermaient tellement la négociation… Si l'on continuait avec elle, ça allait aggraver la situation. Juncker l’a compris.

Ce « moment wallon » marque la fin d'une manière de faire de la politique commerciale en Europe ? Ou au contraire, puisque la ratification du CETA se poursuit, un risque existe d'un retour au « business as usual » ?

© Reuters

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Bonjour lapresseenrevue,

Votre blog fête ses 4 ans cette année !

Toute l'équipe d'OverBlog est heureuse de souhaiter un joyeux anniversaire à votre blog La Presse en Revue....

4 ans ça se fête !Dites-le à tout le monde

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Nous avons mené un combat dur. Nous avons pris des risques politiques importants. Un ambassadeur d’un pays de l’UE m’a dit : telle entreprise qui devait investir chez vous, n’investira pas si vous ne signez pas le CETA. Parfois, ces pressions sont plus voilées. On vous dit que telle directive européenne à laquelle vous êtes très attachés, cela va devenir très compliqué de l'adopter. Il y a plein de choses comme ça, qui font que l’on mesure le risque qu'on prend pendant les négociations. En plus du risque de réputation pour la Wallonie, et de mon risque personnel. Mais ça, à un moment donné, on n'y pense plus.

J'ai du mal à vous croire.

Je me suis dit : si je sors de la négociation sans résultat, je passerai pour un “Tsipras bis”, avec tout le respect que j’ai pour lui. Et je ne voulais pas non plus carboniser tout le traité. Ma préférence était d'obtenir des amendements significatifs et de pouvoir dire à la fin : on peut signer ce traité parce que pour des raisons diplomatiques que j’ai évoquées tout à l’heure, c’est important à mes yeux. Je me suis donc senti soulagé d’y arriver.

mediapart.fr

L'entretien s'est déroulé mercredi 9 novembre dans la matinée, quelques heures à peine après l'annonce de la victoire de Donald Trump aux États-Unis. Il s'est déroulé à l'Élysette, le siège de la présidence de la région wallone, à Namur dans le sud de la Belgique. Il n'a pas été relu par Paul Magnette. Cet entretien constitue son récit, subjectif, des négociations, et nous relaierons plus tard d'autres points de vue sur cette bataille politique.

Mediapart avait déjà réalisé, en 2014, un entretien avec le socialiste belge, qui est également bourgmestre (maire) de Charleroi.