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Politique de coopération internationale de la France en matière de lutte contre le VIH/Sida dans les pays en développement

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Politique de coopération internationalede la France en matière de

lutte contre le VIH/Sida dans les pays en développement

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Tous droits d’adaptation, de traduction et de reproduction par tous procédés,y compris la photocopie et le microfilm, réservés pour tous les pays.

Illustration de couverture : Les enfants dans un monde marqué par le sida. 1er décembre 1997. Journée mondiale sida.© Ministère de la Santé publique.

Comité national de lutte contre le sida, les MST et la Tuberculose - Côte d’Ivoire.© CRIPS Ile-de-France, p. 10, p. 32.

© Ministère des Affaires étrangères, 2001. Réédition juin 2002.ISBN : 2-11-092587-6

SommairePolitique de coopération internationale de la France 3en matière de lutte contre le VIH/sida dans les pays en développement

La pandémie de VIH/sida : une tragédie 5

Du constat à l’élaboration de la réponse internationale 10

La France dans le processus mondial 13

Une stratégie d’intervention actualisée 17

Un engagement de poursuivre : faire plus, faire mieux 20

Cadres opérationnels de référence 23Sécurité transfusionnelle 23Test et conseil volontaires 24Prévention de la transmission mère-enfant (TME) du VIH 25Accès aux médicaments 26Dépistage et suivi des patients infectés 27Suivi des patients présentant un déficit immunitaire sévère 28Prise en compte des orphelins 29VIH/sida et monde du travail 30VIH/sida et monde rural 31VIH/sida et secteur éducatif 31Solidarité et prévention 32Associations et lutte contre le VIH/sida 33Financement pérenne des soins 34

Et demain ? 35

Notes 36

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Politique de coopération internationalede la France en matière de lutte contre le VIH/sidadans les pays en développement

Les premiers cas de sida ont étéidentifiés en 1981 aux États-Unischez des hommes homosexuels ;deux ans plus tard, des cas étaientidentifiés en Afrique, chez deshommes et des femmes hétéro-sexuels. Le monde prenait consciencede l’existence d’une menace nouvelleet potentiellement terrible. À la finde 2001, 40 millions de personnesvivent avec le VIH ; 25 millions sontdéjà mortes du sida. « Ces décès neseront pas les derniers, le pire resteencore à venir » (1).

Le problème de chacun« Aujourd’hui que savons-nous, quesavez-vous vous-même à propos dusida ? Peut-être aviez-vous cru quec’était une maladie des autres, quel’épidémie de peur était dispropor-tionnée par rapport à l’épidémie du mal.Aujourd’hui nous savons que cettemaladie longue, épuisante, lourde àgérer psychologiquement, économique-ment et socialement est le problème dechacun » (2).

Une question de respect et dedignité« Je veux mettre un visage au sida. Jeveux que tous ceux et celles quitravaillent pour cette cause prennentconscience que je ne suis pas unestatistique. Je suis une personnehumaine, un être unique comme tousceux et celles qui vivent avec le VIH » (3).

Un avenir à construire ensemble« Le geste fondamental qui distingue lesida des autres fléaux, c’est le refus.Face au sida, des individus ont trouvé lecourage de refuser, de dire ”non”. Ceuxqui refusent ont trouvé le courage des’organiser pour mieux faire, pour agir.Solidarité – c’est le mot clé de notrefutur » (4).

Mais qu’est ce que le sida ?« Le sida n’est ni la seule maladiemortelle (bien des maladies curables lerestent), ni la seule maladie transmis-sible, ni la seule maladie stigmatisantemais sa véritable spécificité c’est bel etbien d’être la seule maladie à revêtir cestrois caractéristiques et à s’inscrire à cepoint dans le registre de la souillure » (5).

Le sida, « syndrome d’immuno-déficienceacquise », se caractérise par la destructionpar le virus VIH de cellules du systèmeimmunitaire essentielles à la défense del’organisme contre les infections et lestumeurs.

La transmission du VIH se fait par :• les rapports sexuels vaginaux et anaux,• l’injection de sang et de produits

dérivés du sang provenant depersonnes infectées,

• les aiguilles, seringues et autresinstruments perforants contaminés,

• le passage du virus de la mère infectéeà l’enfant lors de la grossesse, del’accouchement et durant l’allaite-ment.

Quand le VIH infecte une cellule, il secombine au matériel génétique de cettecellule où il peut rester silencieux,

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pendant plusieurs années. La plupartdes personnes infectées par le VIHpeuvent rester en bonne santéapparente pendant des années ou neprésenter que des maladies bénignes :ces personnes sont infectées mais n’ontpas le sida. Les personnes séropositivespour le VIH sont à la fois infectées etinfectantes : même si elles se portentbien et semblent en bonne santé, ellespeuvent transmettre le virus à autrui.

Après un laps de temps variable, enmoyenne 10 ans, le déficit immunitairedevient important et entraîne progres-

sivement un ensemble de maladiesgraves qui caractérise le sida. Il n’existe pour l’instant pas de vaccinefficace pour prévenir l’infection par leVIH. Les traitements actuels prolongentla vie des patients mais, bien que lamorbidité et la mortalité aient chuté des2/3 en Europe et aux USA suite àl’introduction des multithérapies, le sidareste une maladie mortelle. En l’étatactuel de nos connaissances, la lutteconsiste donc à empêcher lacontamination et, dans le cas contraire,à prolonger et à améliorer la survie desmalades.

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Virus VIH1 (étape de

bourgeonnement à la

surface d’un lymphocyte),

agent causal du sida.

Isolé en 1983 par l’équipe

du Pr. L. Montagnier à

l’Institut Pasteur

(fausses couleurs).

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La pandémie de VIH/sida : une tragédie

« Le sida est loin d’être un simpleproblème médical. Le sida est loin d’êtreun simple problème national. La crise dusida est loin d’être terminée » (6).

En dépit des efforts de lacommunauté internationale – etmême si l’incidence du VIH tend àse stabiliser en Afrique subsaharienne– la situation continue globalementde s’aggraver entraînant une véritablecrise du développement qui creusedavantage encore le fossé séparant lespays riches des pays pauvres.

Problème de santé publique traitédans un cadre national lors de sonapparition, le sida s’est donctransformé en crise majeure dedéveloppement à l’échelle mondiale.Il est aussi en passe de devenir unecrise politique majeure qui pourraitaffecter les relations internationales sila réponse de la communautéinternationale n’était pas ajustée àl’ampleur du défi.

4 Le sidaest une catastrophedémographique…

Près de 40 millions de personnesvivent actuellement avec le VIH/sidadont 2,7 millions d’enfants de moinsde 15 ans. Le cumul des décès depuisl’apparition de la maladie est estimé àprès de 25 millions. Cette situationconduit, dans les pays les plustouchés où la chute des effectifspourrait représenter un cinquième dela population active, à envisager unerestructuration des pyramides des

âges et des déséquilibres forts entreadultes actifs et personnesdépendantes (7).

… touchant principalementl’Afrique sub-saharienne (8)

À elle seule, l’Afrique sub-sahariennecompte 28,1 millions de personnesinfectées et 21 des pays où le taux deséroprévalence du VIH est le plusélevé. Un quart des adultes est infectéau Botswana, au Zimbabwe ou enNamibie et plus de 10% le sont dansau moins 10 autres pays. Avec près de70% du total des personnesinfectées, l’Afrique sub-sahariennesupporte donc le plus gros fardeau del’infection à VIH et du sida. Le siday est désormais la première cause demortalité : la plupart des personnesinfectées mourront dans les dixannées à venir pour s’ajouter aux14 millions d’Africains déjà empor-tés par l’épidémie. Aujourd’hui, laprobabilité qu’un enfant né enZambie ou au Zimbabwe meure dusida dépasse 50%. Selon lesprojections du Bureau du

Estimations mondiales à fin 2001Enfants et adultes

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■ Personnes vivant avec le VIH/sida 4 40 millions

■ Nouveaux cas d’infection à VIH en 2001 4 5 millions

■ Décès dus au sida en 2001 4 3 millions

■ Total cumulé des décès dus au VIH/sida 4 24,8 millions

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recensement des États-Unis, d’ici à2003, au Botswana, en Afrique duSud et au Zimbabwe, le taux decroissance de la population sera

négatif et dans d’autres pays,notamment au Malawi, auSwaziland, en Namibie et enZambie, il demeurera constant (9).

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4 Le sida un drame social

Une conséquence dramatique de lapandémie est l’érosion des progrèsréalisés depuis plusieurs décennies enmatière d’espérance de vie à lanaissance et de survie de l’enfant.

Au Botswana, l’espérance de vie à lanaissance sera divisée par deux aucours des 10 à 12 prochaines annéespour passer de 65 ans à 33 ans,uniquement du fait du VIH/sida.Ceci lui fera perdre, à un rythmerapide, les acquis en matière de

développement, en particulier pource qui est de l’alphabétisation et dessoins de santé, qu’il a obtenus cesdernières années au prix de lourdssacrifices.

Infectées en proportion plusimportante et de plus en plus jeunes,les femmes sont les premièresvictimes : en Afrique, 12 à 13femmes sont infectées pourseulement 10 hommes (10). Ellescontaminent leurs enfants en bas âgedans, en moyenne, un tiers desgrossesses et voient leur taux defécondité baisser significativement.

Amérique Latine150 000

Caraïbes60 000

Amérique du Nord45 000

Europe occidentale30 000

Afrique du Nord& Moyen-Orient

80 000

Afrique subsaharienne3,8 millions

Europe orientale& Asie centrale

250 000 Asie de l’Est & Pacifique130 000

Asie du Sud & Sud-Est780 000

Australie & Nouvelle-Zélande500

Nombre estimatif d’adultes et d’enfantsinfectés par le VIH au cours de l’année 2000

Total : 5,3 millions

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Sur les 10 pays du monde quicomptent le plus d’enfants infectés, 9se trouvent en Afrique sub-saharienne ; en 1999, plus de 500 000nouveau-nés ont contracté le VIH parl’intermédiaire de leur mère.

On estime actuellement à plus de13 millions le nombre d’enfantsorphelins du sida et à 40 millions,l’effectif probable en 2010 ; la majoritéd’entre eux se trouve en Afriquesubsaharienne soit, dans certains pays,plus de 10% de l’ensemble des enfants.Ces enfants doivent généralementsubvenir à leurs propres besoins voireassumer des responsabilités d’adultesdans un foyer qu’ils sont par ailleursplus susceptibles que d’autresd’abandonner ou de perdre ; ils sontparticulièrement vulnérables vis-à-visde l’accès aux soins et à l’éducation ; ilssont soumis à des risques majeursd’extrême paupérisation, d’exclusionet de marginalisation avec tous lesdangers qui y sont liés. Dans denombreux pays, le sida est à l’origined’une forte augmentation du nombredes « enfants des rues ». Ce problèmerevêtira, à court terme, une parti-culière acuité.

Indépendamment des différences decultures et de pays, la familleafricaine élargie et la communautépourvoyaient traditionnellement auxbesoins de ces enfants. L’ampleursans précédent du problème posé, lemodernisme et ses tendancesindividualistes, la pression socio-économique, le développement de lamobilité géographique et del’urbanisation, l’importance descoûts liés à une prise en chargemoderne (éducation, santé)… ontérodé, voire singulièrement mis àmal, ce système traditionnel dont lesmécanismes de solidarité ne sont plusguère opérants (11).

4 Le sida est unemenace économique auxmultiples composantes...

…touchant les secteursproductifs publics et privés (12)

Le sida laisse derrière lui des famillesdétruites, une force de travaildiminuée et donc des perspectives dedéveloppement paralysées oufortement entravées. En touchantpréférentiellement les tranches d’âgeles plus actives, la pandémie deVIH/sida pèse ainsi sur la croissance.La Banque mondiale estime qu’au-delà d’un taux de prévalence de 8%chez les adultes, chaque pointsupplémentaire coûte 0,4 point decroissance.

Si le fort impact macroéconomiquenégatif de la pandémie rétroviralen’est plus à démontrer, ses effets auniveau de l’entreprise en termes de :• perte de personnels qualifiés,• baisse de productivité liée à

l’absentéisme et au remplacementinévitable de personnels souventmoins expérimentés,

• augmentation des coûts derecrutement et de formation,

• augmentation des dépenses desanté, n’en sont pas moins réelsbien que pas encore parfaitementévidents pour tous.

…n’épargnant plus les zonesrurales (13)

Il n’est plus exagéré de dire que lesida est désormais et surtout unproblème rural dans la plupart despays en développement fortementtouchés par la pandémie. Le sida yprogresse plus rapidement qu’enmilieu urbain, les populations y sontmoins bien préparées pour y faire

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face et les coûts liés au VIH/sida sonten grande partie à la charge descommunautés rurales. Il a été montréau Zimbabwe que le décès d’unsoutien de famille dû au sidaréduisait de 61% la production demaïs du ménage dans les zonescommunautaires pratiquant laculture sur petite échelle et, qu’enCôte d’Ivoire, les soins apportés à unplanteur représentaient entre le quartet la moitié du revenu annuel del’exploitation amenant, dans nombrede cas, la famille concernée àdécapitaliser en négociant le cheptelet le matériel agricole. Le sidamenace donc gravement la sécuritéalimentaire (14).

…affectant durement lesecteur de l’éducation (15)

Un système éducatif efficient est unélément central pour lutter contre lapauvreté et parvenir à undéveloppement humain durable : cesystème est actuellement fort malmenédans les pays à fort taux de prévalencede l’infection à VIH/sida où le mondeenseignant est particulièrement touchéet où son auditoire, confronté à lamaladie, est exposé à l’exclusionscolaire, volontaire ou non, temporaireou définitive. En Afrique du Sud, lesida est devenu la première cause demortalité des enseignants : 20% de

ceux du Natal et 16% de ceux desautres provinces sont touchés par levirus.

Un système éducatif efficient estégalement un élément central pourconstituer une réponse efficace àl’épidémie de VIH ; en partie à causede la déstructuration liée à lapandémie, ce système a partiellementfailli : les jeunes en formation, apriori les mieux informés, payent leplus lourd tribut à l’infection.

…déstabilisant profondémentle système de santé

Cinq points de taux de prévalenceaugmentent de 25 % la demande desoins, le taux spécifique d’occupationdes lits d’hôpital urbain par lesvictimes du sida pouvant de ce faitatteindre 50 à 80% (Côte d’Ivoire,Burundi, Zambie, Zimbabwe) alorsque, dans le même temps, les décèsparmi les personnels soignants ont étémultipliés par 13 en 10 ans(Zimbabwe). Le quart (Zimbabwe) –voire les deux tiers (Rwanda) – dubudget de la santé arrive ainsi à êtreconsacré au traitement des patients,sans compter le coût lié àl’accroissement considérable dunombre de cas de tuberculose,infection la plus souvent associée ausida. Les ressources ainsi consacréesaux soins requis par le sida grèventconsidérablement d’autres program-mes d’un bon rapport coût-efficacité :il est ainsi quasiment devenuimpossible d’espérer pouvoir atteindreles objectifs de développement retenusen matière de santé dans les pays lesplus touchés.

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Environ 14 000 nouveaux cas d’infection à VIH par jour en 2001

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■ Plus de 95% dans les pays en voie de développement

■ Environ 2 000 cas chez des enfants de moins de 15 ans

■ Environ 12 000 cas chez l’adulte (15-49 ans), dont :— 50% chez la femme— plus de 50% chez les 15-24 ans

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Au total, parce qu’il décime la main-d’œuvre disponible, disloque etappauvrit les familles, détruit le socledes structures communautaires etfragilise la trame sociale, le sida, de parses effets déstructurants sur le systèmeéconomique et social, comprometgravement le développement des paysles plus touchés, et donc plusparticulièrement de l’Afrique.

4 Mais il constitue aussiune menace politique

Du fait de son impact démogra-phique, économique et social, le sidapourrait conduire à un affaiblis-sement politique des pays les plustouchés, voire à une déstabilisationdes régimes en place. La progressionde la pauvreté, de la précarité et del’exclusion dans des sociétés déjàfragilisées, constitue une épée deDamoclès pour les autoritéspolitiques nationales. La perspective,dans les pays les plus affectés, de ladisparition sur une décennie, de prèsd’un quart de la population adulte,va provoquer une saignée humainesans précédent dans l’histoiremoderne.

Le sida pourrait donc avoir un impactsur les équilibres géopolitiquesrégionaux. La chute démographiqueet ses conséquences économiques etsociales, comme le fort taux deprévalence dans certains segments dela population, notamment les forcesarmées, pourraient affaiblir considéra-blement certains pays qui émergentactuellement comme des puissancesrégionales.

Par ailleurs, l’explosion de lapandémie dans certaines régions dumonde, du fait des modes detransmission, des flux divers de

population et de l’augmentation desvoyages, constitue une menace pourl’ensemble des pays du monde.

Enfin, le gouffre existant entre lasituation au Nord où les malades ontlargement accès aux trithérapies et auSud caractérisé par l’explosion dunombre de malades privés d’accèsaux soins pourrait conduire à uneforte dégradation du climatinternational lorsque l’hécatombe,que les statistiques actuelles laissententrevoir, deviendra une réalité.

« Il y a dix ans, le VIH/sida était vu avanttout comme une grave crise de santé.Aujourd’hui, le sida constitue de touteévidence une crise du développementet, dans certaines régions du monde, ilest rapidement en train de devenir unecrise de la sécurité. L’impact dévastateurdu sida sur les fondations sociales,économiques et démographiques dudéveloppement est sans pareil » (16).

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Estimation du nombre de personnes infectées par le VIHpar région (1980 à 1999)

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S.Pays industrialisésAfrique du Nord & Moyen-OrientEurope de l’Est et Asie centraleAfrique subsaharienneAmérique latine et CaraïbesAsie du Sud-Est

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« Nous sommes à une date pivot del’histoire de l’humanité. Le sida met enévidence tout ce que l’humanité recèlede fort et de faible : notre vulnérabilitéet nos craintes, notre force et notrecompassion, notamment à l’égard deceux qui sont plus fragiles, moinscapables ou plus pauvres que nous » (17).

Après plus d’une décennie de luttecontre l’épidémie, les premiers dénisont été reconnus :

« Témoigner publiquement, ça marquevraiment les gens qui ne peuvent plusdire que le sida, ça n’existe pas » (18).

et la marginalisation progressivements’estompe ; la personne infectée estdavantage comprise, aidée, soutenue :

« J’étais très réticent lorsque l’assistantesociale me donnait rendez-vous pourdes discussions au sujet de la maladie. Jene voulais pas que les personnes mereconnaissent comme un sidéen »(19).

« C’est important pour moi de meretrouver avec d’autres personnesatteintes. Je vois que je ne suis pas touteseule. C’est comme une famille » (20).

Mais beaucoup reste à faire, enparticulier dans le domaine essentieldu respect des droits élémentaires despersonnes, en particulier les plusvulnérables, femmes et enfants :

« Il faudrait mettre un signe sur leurspapiers et les regrouper pour éviterqu’ils n’aillent propager. Il faudrait aussiexpulser les étrangers qui sontcontaminés » (21).« Dès le matin du décès et jusqu’àl’enterrement, nous avons été traités detous les maux, de toutes les accusations,par nos parents paternels. C’est surtoutnotre mère qui était accusée d’avoir voléla fortune de son mari et de l’avoir tué.Ils nous harcelaient pour que l’on quittele domicile familial qui pourtant nousappartient » (22).« La belle famille a répandu descalomnies pour me chasser. Ils ont prismes enfants et tous mes meubles. J’étaismariée légalement »(23).

Devant les incertitudes liées à laprobabilité de disposer rapidementd’un vaccin préventif efficace, devantles difficultés d’accès du plus grandnombre aux thérapeutiques spécifi-ques, devant la confrontation à unecatastrophe aussi multiforme, sanséquivalent dans l’histoire moderne del’humanité et devant l’extensionapparemment inexorable de lapandémie, les illusions quant à unemaîtrise rapide de la maladie se sontpeu à peu effacées.

Du constat à l’élaborationde la réponse internationale

10

-

Est-ce que vous pouvez

trouver la personne qui est

atteinte du sida ?

La réponse est non !

Le virus du sida peut résider

de longues années dans le sang

d’une personne. Les personnes

touchées par le sida ont l’air en

bonne santé, mais elles peuvent

quand même transmettre le

sida à d’autres.

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C’est pourquoi, la communautéinternationale a dû s’organiser pouraffronter efficacement la menace. En complément d’actions bilatérales,sa réponse politique est d’abordinstitutionnelle au travers del’élaboration de stratégies et de lagestion de fonds multilatéraux de luttecontre le sida de l’ONU, confiées en1987 à l’organisation de tutellesanitaire mondiale par le truchementdu GPA/OMS, Programme mondialsida, aujourd’hui de l’ONUSIDA,programme commun des NationsUnies sur le VIH/sida, mis en place en1996 pour permettre une ripostecoordonnée et élargie au fléau :« Il est apparu qu’un programmecommun unissant les institutions desNations Unies dont les compétences etmandats sont complémentaires étaitnécessaire au vu de l’urgence et del’ampleur de l’épidémie, de sesprofondes racines socio-économiques etculturelles, des tabous et de l’hypocrisiequi entourent la question du VIH et deses modes de transmission, de ladiscrimination et des violations desDroits de l’homme auxquelles sontconfrontées les personnes infectées etcelles menacées de l’être » (24).La prise de conscience de la menace afranchi une étape importante aucours de l’année 2000. Le Conseil desécurité des Nations Unies, quin’avait jamais abordé une question desanté publique en 55 ans d’histoire,s’est réuni à trois reprises en l’espaced’une année sur la question du sida.L’Assemblée générale des NationsUnis a également convoqué du 25 au27 juin 2001 une sessionextraordinaire sur ce thème. Laréunion du G 8 d’Okinawa en juillet2000 a aussi fait référence au sida etcontient des engagements clairs pourrenforcer la réponse internationale.Enfin, après que la Commissioneuropéenne ait organisé en

septembre 2000 une table rondeinternationale pour une actionaccélérée sur le VIH/sida, lepaludisme et la tuberculose, leConseil Développement a adopté, le10 novembre 2000, une résolutionarticulée autour de l’optimisation despolitiques de santé et de dévelop-pement, de la réduction des coûts dela prise en charge des soins et d’uneffort accru dans le domaine de larecherche de nouveaux produitspharmaceutiques et sur les aspectssociaux liés aux maladies transmis-sibles. La France a soutenu toutes cesinitiatives et a largement pris sa partdans l’émergence de ce débat sur lascène politique internationale.

Sa réponse est également technique.Centrée à l’origine essentiellementsur la prévention et l’accompagne-ment, elle a progressivement évoluévers une approche globale intégrantnotamment l’accès aux traitements.Il est en effet illusoire de penserqu’une politique de préventionpuisse donner des résultats si elle nes’articule pas avec une espérance desalut par les traitements. Cetteposition présentée par la France à laCISMA tenue à Abidjan en 1997marque le point de départ d’une lutteconstante et opiniâtre des autoritésfrançaises pour faire reconnaître, parla communauté internationale, ledroit des malades du Sud auxmultithérapies.

Cette approche a été validée sur le planinternational lors de la tenue de lasession extraordinaire de l’Assembléegénérale des Nations Unies. Larésolution adoptée préconise en effetune approche globale conjuguantprévention et accès aux soins.

Ses clés de compréhension ont étéprécisées par ONUSIDA :

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Laboratoire sida IRD Montpellier.

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« 15 années d’action contre l’épidémieont permis de mieux saisir quelles sontles ripostes efficaces. Si le soutieninternational aux niveaux politique,financier et technique est important, laréduction de l’incidence etl’atténuation de l’impact doivent être àl’ordre du jour des pays eux-mêmes. Lesactions nationales exigent l’engagementà long terme du gouvernement avec unplan national de lutte unique etsolide ; l’ouverture sociale qui accroît lavisibilité de l’épidémie et s’oppose à lastigmatisation ; des politiques socialesqui s’attaquent aux vulnérabilitésfondamentales ; l’engagement de tousles secteurs et pas seulement de celui dela santé ; une reconnaissance de lasynergie entre prévention et soins ; lesoutien à l’action communautaire ; desinterventions ciblées sur les plusvulnérables, y compris chez les jeunesavant qu’ils ne soient sexuellementactifs » (25).Enfin, sa réponse est financière. Lesida se prête à une action préventiveet thérapeutique efficace pour peuque, défi mondial, il mobiliseeffectivement l’effort concerté de lacommunauté internationale. Eneffet, la lutte contre le VIH/sida, etplus largement celle contre lesprincipales maladies infectieuses, nepeut progresser significativementsans un appui exceptionnel etsolidaire de cette communauté.Sans méconnaître les difficultés dechiffrage au plus près du coût de la lutteet, de ce fait, les appréciationsdivergentes qui en sont données, des

perspectives de financements impor-tants sont envisageables à court terme etla France plaide pour que « les pays endéveloppement utilisent les marges demanœuvre budgétaires engendrées parl’initiative sur la dette pour mettre enœuvre, dans le cadre des programmesstratégiques de réduction de la pauvreté, lesactions de lutte contre le sida »(Déclaration de Prague, septembre2000). L’objectif de mobilisation de 10milliards de dollars américains par lacommunauté internationale, lancée parla délégation française à la réunion dePrague, a reçu un écho favorable,notamment de la part des responsablesde la Banque mondiale. Malgré lamobilisation des ressources, le problèmemajeur sera celui de l’emploi judicieuxde ces fonds au profit, non pas d’unepathologie isolée, mais de l’ensemble dusystème sociosanitaire qui doit êtreconsolidé pour pouvoir espérer uneintervention efficiente et pérenne. Il n’en demeure pas moins vrai que,malgré la volonté réelle de parvenir àun consensus, des divergencescontinuent d’exister entre lesdifférents acteurs de la lutte contre leVIH/sida. Les stratégies d’interven-tion de chaque partenaire, bi oumultilatéral, public ou privé,répondent souvent à des impératifspropres. C’est pourquoi envisagerune action coordonnée despartenaires au développement sur labase d’une stratégie sanitairenationale dont les orientations sontdéfinies par les acteurs eux-mêmesreste encore un objectif à atteindre.

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La France dans le processus mondial

Un engagement ancien…

Une caractéristique fondamentale del’action de la France en matière delutte contre le VIH/sida est sonengagement résolu auprès de sespropres patients dès le début del’épidémie, engagement fortementsollicité et poussé par le mouvementassociatif qui a profondément changéle regard et le rôle de la société et ducorps médical vis-à-vis de la maladie etde ses victimes. Daniel Defert,initiateur de l’association AIDES,écrivait déjà en 1984, dans un textefondateur : « (…) je savais que laquestion du sida ne pouvait être pluslongtemps confinée comme questionmédicale (…) » et, prônant le « partagedu savoir médical,(…) l’appropriationdu savoir médical (…) » par lespersonnes atteintes, plaçait résolumentl’individu, la communauté, au cœurdu dispositif en tant qu’acteurincontournable : « la communauté serabientôt la population la mieux informéedes problèmes immunitaires… » (26).C’est dans ce contexte que leprogramme du gouvernement français,d’appui à la lutte contre le VIH/sidadans les pays en développement, adémarré lui aussi très tôt, en 1985. Laréalisation des premières enquêtesépidémiologiques, dans des échantil-lons de population générale d’Afriquecentrale, a permis une première mesurede l’importance et de la gravité duproblème, d’apprécier sa distributiongéographique et ses principales caracté-ristiques et de mettre en place lespremiers outils d’une surveillanceefficace de ce qui n’était encore qu’une

épidémie. Un programme d’urgence aété lancé pour équiper en kits dedépistage les unités de collecte et detransfusion de sang des pays partenaireset pour développer des actionsd’information, d’éducation et decommunication spécifiques (IEC) dansle cadre des programmes nationaux delutte qui se mettaient progressivementen place sous l’impulsion de l’OMS.

L’expansion de la pandémie endehors des principaux centresurbains et la prise de conscience parles gouvernements africains parte-naires de ses conséquences sanitaires,économiques, sociales et culturellesde plus en plus prégnantes sur ledéveloppement de leurs pays, les ontamené à demander à la France des’engager plus activement encore àleurs côtés. Ainsi, dès juillet 1993 àAbidjan, Côte d’Ivoire, le Gouverne-ment français a affirmé sa volontéd’intensifier son effort de lutte contrele sida et d’en faire un de sesprogrammes prioritaires. Cet engagement, confirmé endécembre 1994 à Paris, lors duSommet consacré à la lutte contre lesida, s’est traduit par une augmentationsignificative des moyens budgétaires ethumains mobilisés, concentrés sur unnombre limité de pays particulière-ment touchés, pour l’essentiel enAfrique noire francophone. LeSommet de Paris a, par ailleurs, commepour l’ensemble des pays signataires,précisé le cadre stratégique générald’intervention du gouvernementfrançais sur des points essentiels :« Protéger et promouvoir, par un

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environnement juridique et social, lesdroits des personnes, notamment despersonnes qui vivent avec le VIH/sida ouqui sont le plus exposées à l’infection ;associer pleinement à l’action des pouvoirspublics, les organisations non gouverne-mentales, les mouvements associatifs et lespersonnes vivant avec le VIH/sida ; faireen sorte que la loi garantisse auxpersonnes vivant avec le VIH/sida uneégale protection quant à l’accès aux soins,à l’emploi, à l’éducation, à la liberté decirculation, au logement et à laprotection sociale » (27).

…qui a mobilisé d’importantsmoyens

Sur la base des conclusions del’évaluation externe des programmes delutte contre le VIH/sida pour ladécennie 1987/1997 (28), l’effort dugouvernement français en direction despays en développement a représenté, enannée pleine, hors engagementsmultilatéraux (29), en moyenne12,2 millions d’euros de dépensestotales effectives, y compris l’assistancetechnique, soit pratiquement le quart del’action dédiée au domaine sanitaire.Cet effort financier se répartit à hauteurde 62% du montant total pour lesprojets eux-mêmes, 35% pourl’assistance technique, le reste serépartissant entre les bourses d’étudeshors projets, les crédits déconcentrésd’intervention auprès des postesdiplomatiques et le cofinancement parle niveau central de projets soutenus pardes ONG et OSI françaises.

Répartition thématique des projetsde coopération dans le domaine des maladies transmissibles

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14,8 M 6,8 M

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2,3 M

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Pour le biennum 2000/2001,45 projets d’appui à la lutte contre leVIH/sida retenant une approchespécifique ou incluant l’interventiondans un projet intégré de santépublique et/ou de programmes derecherche opérationnelle, sont encours d’exécution et/ou d’instructiondans 28 pays dits de la Zone deSolidarité Prioritaire (30) (incluant8 pays non francophones) etl’ensemble des pays de la Caraïbe,pour un montant total de plus de30,5 millions d’euros évalué sur ladurée des projets et programmes.

Dans le même temps, environ 300assistants techniques du dispositifsanté déployé à l’extérieur, près des2/3 sont impliqués pour tout ou par-tie de leur action dans la lutte contrele VIH/sida (30 y consacrent la totali-té de leurs activités et 15 au moins les3/4 de leur temps de travail).

Évolution de la prévalence du VIH en Afrique subsaharienne

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Projets adoptés en 2001par le Fonds de solidarité prioritaire

1982

1997

Pourcentages estimés d’adultes(15-49 ans) infectés par le VIH

16 - 32 %

8 - 16 %

2 - 8 %

0,5 - 2 %

0 - 0,5 %

Données indisponibles

Sida9,77 M

Santé (hors sida)12,45 M

Social3,8 M

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PAYS (Projets bilatéraux) Projet spécifique Programme intégré TOTALVIH/sida de Santé Publique

Total dont VIH/sidaAngola 1,22 1,22Bénin 1,83 1,83Burkina Faso 1,37 1 0,46 1,83Burundi 0,76 0,76Cambodge 0,46 1,22 0,36 0,82Cameroun 1 0,79 0,79Centrafrique 0,93 0,76 0,46 1,39Congo 1,52 0,59 0,59Côte d’Ivoire 3,05 2,74 0,23 3,28Djibouti 1,72 1,72Gabon 0,91 0,91 0,08 0,99Guinée Bissao 0,46 0,46Madagascar 3,51 0,76 0,76Mali 1,37 1,37Mauritanie 2,44 0,17 0,17Mozambique 1,22 1,22Namibie 0,91 0,91Niger 0,76 0,76Rwanda 0,91 0,15 0,15Sénégal 1,83 1,83Togo 2,29 0,46 0,46Zimbabwe 0,91* 0,91

Actions en cours et projets en cours d’instruction pour 2000/2002 (en millions d’euros)

Projets d’Intérêt Général

Recherche 4,88 4,88FSTI (MAE/MES) 3,81 + 3,2 7,01

Programmes mobilisateurs

Af. de l’Est 1,52 1,52CAREC 1,07 1,07Réseau associatif Nord/Sud 2,29 2,29

Coopération décentralisée 0,38 0,38

ONUSIDA 3,13 3,13

* Projets en cours d’instruction.

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Une stratégie d’intervention actualisée

Durant la décennie écoulée,l’évolution de la stratégie française decoopération en matière d’appui à lalutte contre le VIH/sida dans les paysen développement s’est faite par ajoutde modalités successives. Les thèmes etapproches prioritaires premiers(Information-Éducation Communi-cation, sécurité transfusionnelle,implication de la société civile…)n’ont jamais été abandonnés ; enrevanche, d’autres ont été ajoutés(dépistage volontaire et anonyme,réduction de la transmission mère-enfant du VIH, accès auxmédicaments spécifiques…), si bienqu’en définitive, la coopérationfrançaise a abordé quasiment toutes lesmodalités de lutte où elle a acquis, aufil du temps, un savoir-faire indéniableporté par la qualité de son largedispositif d’assistance technique.

La priorité accordée depuis le milieudes années 1980 à la lutte contre leVIH/sida a été maintenue et renforcéedans le cadre de la récente réforme dela coopération française. Leprogramme gouvernemental de lutterepose sur cinq axes stratégiques :

1 - Privilégier, dans le cadre desorientations générales définies auniveau international, une approcherégionale qui prenne en compte lesdiversités nationales et locales. Larecherche de synergies par des projetsrégionaux d’intervention et/ou par lerenforcement du partenariat avecl’ensemble des intervenants bi etmultilatéraux ainsi que laconsolidation des réseaux associatifs

Nord/Sud et Sud/Sud sont affirméescomme stratégies porteuses.

2 - Rendre la lutte efficace enappréhendant le problème dans saglobalité ; il est en effet illusoire deprétendre apporter des solutionsdurables en dissociant prévention etprise en charge et en ne prenant pas encompte l’ensemble des déterminantsqui concourent à la genèse et à ladiffusion de l’infection ainsi qu’à lagravité de ses conséquences.

■ Globalité médicale en intégrant,dans le processus de prise en charge,l’ensemble des compartimentsd’information, de prévention, de soinset d’accompagnement, en considérantla place de la transmission sexuelledans un ensemble plus vaste visant àpermettre aux couples comme auxindividus de pratiquer une parentéresponsable et d’avoir une sexualitésans risques et en prenant garde que lalutte contre le VIH/sida ne se fasse audétriment d’autres programmes, maisau contraire qu’elle les renforce.

■ Globalité extramédicale enconsidérant la complexité desimplications sociales, culturelles,religieuses, économiques, politiques etjuridiques liées à l’infection. Le respectdes droits des personnes atteintes etdes personnes affectées est affirmé etdéfendu tant en ce qui concerne l’accèsaux soins, au travail et à la formation,que pour ce qui traite de la propriété etde la famille comme du devoir desolidarité à l’égard des personnesatteintes. Une attention particulière est

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portée aux personnes et aux groupesvulnérables ou victimes dediscrimination, notamment auxfemmes, aux jeunes filles et, d’unemanière générale, aux enfants.

3 - Impliquer les partenaires nongouvernementaux et les personnesatteintes à la définition et à la mise enœuvre des programmes à tous lesniveaux.

4 - Développer la recherche appliquéedans le cadre de réels partenariatsNord/Sud, dans le strict respect desrègles internationales d’éthique.

5 - Stabiliser les acquis, ce qui imposeun soutien sur le moyen ou le longterme ; les pérenniser, ce qui supposed’intégrer les programmes de luttedans l’ensemble du dispositif d’appuiau secteur sanitaire et social dans unedémarche structurante visant àrenforcer le système national de santé.

L’évolution de la stratégied’intervention de laCoopération française :

■ elle a soutenu dans un premiertemps la mise à disposition desantirétroviraux, en particulier dans lecadre du FSTI, Fonds de SolidaritéThérapeutique International.

Nous n’avons pas le droit d’accepterqu’il y ait désormais deux façons delutter contre le sida : en traitant lesmalades dans les pays développés, enprévenant seulement les contaminationsau Sud (...) nous devons tout faire pourque le bénéfice des nouveauxtraitements soit étendu aux peuplesdémunis d’Afrique et du reste dumonde » (31).

(Jacques Chirac, Abidjan, 1997)

Le FSTI, financé par la France, pourla majeure partie de son budget, apermis le lancement de 5 projetspilotes, en Côte d’Ivoire, au Sénégal,au Maroc, en Afrique du Sud et auBénin.

Le FSTIInitiative lancée par le Président de laRépublique Française et le secrétaired’Etat à la Santé à Abidjan en 1997, leFSTI avait pour principal objectif d’aiderles pays qui le souhaitaient à organiserl’accès aux traitements des personnesatteintes par le VIH avec une approcheprivilégiant la réduction de latransmission du VIH de la mère à l’enfantet la prise en charge de l’infection àVIH/sida pour la mère, l’enfant et, autantque possible, pour le partenaire et lacellule familiale. L’autre cœur de cible duFSTI était l’accès aux antirétroviraux demalades préidentifiés dans le cadre d’uncontinuum de la prise en charge despatients infectés et ce, dans unedémarche de partenariat menée enliaison avec les autorités nationales, avecles coopérations bilatérales, lesinstitutions internationales, lesfondations publiques ou privées et lesecteur privé.

■ aujourd’hui la Coopérationfrançaise renforce l’attentionaccordée à la structuration dessystèmes et des services de santé dansune perspective d’approche globale,intégrée et décentralisée conduisant àune meilleure efficience de la prise encharge et à un accès durable à dessoins de qualité à tous les niveaux dudispositif socio-sanitaire national.

■ elle étend progressivement sonaction à l’ensemble de la Zone deSolidarité Prioritaire.Cette stratégie est pour l’essentiel miseen œuvre par deux grandes directions

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techniques du ministère des Affairesétrangères : celle du Développementet de la Coopération technique(DDCT) d’une part, celle de laCoopération scientifique, universi-taire et de Recherche (DCSUR)d’autre part.

Tout en s’inscrivant dans cetteperspective stratégique, la Missionpour la coopération non gouverne-mentale (MCNG) intervient encofinancement sur des actions demoindre envergure, en général cibléessur des structures de soins ou sur unezone géographique limitée, actionsproposées par les collectivités localeset/ou les ONG françaises et les OSI.

Pour sa part, le ministère chargé de lasanté, dans sa dimension internatio-nale, développe des actions en faveurdes migrants, met un accent fort surl’amélioration de l’organisation dessoins dans la région Antilles-Guyaneen y associant les experts de la luttecontre le VIH/sida de la régioncaribéenne et a cofinancé le FSTI.Dans les pays développés, il revient àl’hôpital d’assurer la maîtrise de laprise en charge thérapeutique despersonnes atteintes. Ainsi, les équipeshospitalières ont-elles désormais uneexpérience avérée, ancienne et appro-fondie. C’est pourquoi la France alancé, en partenariat avec d’autrespays européens (Luxembourg,Espagne, Italie) un programme« Ensemble pour une solidaritéthérapeutique hospitalière en réseau »(ESTHER) faisant de l’hôpital la basede la coopération dans le domaine del’accès au traitement, en développantdes jumelages entre des centreshospitaliers de pays du Nord et descentres de soins de pays du Sud.Quant au groupe de l’AFD, AgenceFrançaise de Développement, il a

convenu de mettre en œuvre unedémarche de réduction du risqueVIH/sida dans l’ensemble des projetset programmes qu’il finance. Ilinsérera ainsi des volets spécifiquesde lutte dans le cadre de l’aide-projet,l’action au niveau local des projets ouprogrammes prenant tout son senspar l’encadrement dans un dispositifde soutien plus large, d’envergurenationale.

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© BD BOOM-GABON. Un document d’éducation

pour la santé réalisé au Gabon.

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Un engagement de poursuivre :faire plus, faire mieux

Le nouvel environnement scienti-fique que traduit l’existenced’avancées thérapeutiques dans lespays les plus développés, la nouvelledonne politique exprimée enparticulier par la demande forted’accès à ces traitements de la partdes leaders des pays du Sud, ladégradation de la situation socio-économique qui va découler de ladramatique croissance du nombre demalades, de décès et d’orphelins ainsique l’extension du champ d’action àla zone de solidarité prioritaire,amènent le Gouvernement français àréorganiser son intervention autour :■ d’un renforcement des moyens

alloués à la lutte contre le sida,notamment sur le plan financier,

■ et d’une meilleure articulation del’action bilatérale avec les principauxautres bailleurs de fonds bi etmultilatéraux.

Cet effort devrait permettre, enprenant en compte les conclusions etles recommandations de l’évaluationexterne des programmes de luttecontre le VIH/sida de la coopérationfrançaise pour la décennie écoulée, dedévelopper 6 axes :

1 - Dans le cadre général de la luttecontre la pauvreté et de la réductiondes vulnérabilités, mobiliserl’ensemble des départementsministériels pour renforcer les moyensdéployés en direction des pays du Sudet introduire, une dimension « luttecontre le VIH/sida » au sein desprojets conçus dans les secteurs autresque celui de la santé et du

développement social, en particulierdans les domaines de l’enseignementet du développement rural.

2 - Valoriser les acquis des différentssommets internationaux et, pour cefaire, s’inscrire dans la mise en œuvrede leurs recommandations qu’ellesviennent des Nations Unies, del’Union européenne ou du G8.L’intervention éventuellementconjointe avec d’autres partenairesextérieurs, bi ou multilatéraux, mettraen avant l’expertise reconnue del’assistance technique française.Dans cet esprit, la France, enpartenariat avec l’ONUSIDA etl’OMS, a organisé le 1er décembre2001 à Paris une réunion d’experts dehaut niveau qui ont élaboré uneDéclaration pour la mise en œuvred’un plan d’action en vue d’améliorerl’accès aux traitements contre le sidadans les pays de développement.

3 - Renforcer le soutien multilatéral,en particulier dans le cadre duPartenariat international pour le sidaen Afrique placé sous l’égided’ONUSIDA au profit duquel uneconvention de subvention a étérécemment mise en place.

4 - Développer progressivement, et àmoyen terme, pour la totalité des paysappartenant à la ZSP, une interventionvisant à la structuration des systèmessocio-sanitaires nationaux pour lesamener à une prise en charge holistiquede l’infection à VIH/sida incluant, sipossible, en fonction du contexte,l’accès à l’ensemble des thérapeutiques

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nécessaires. Bien que pouvant proposerun cadre global très intégrateur et unevision transversale multisectorielle del’intervention, il ne s’agit pas pourautant de prétendre couvrir, pourchacun des pays, la totalité descomposantes de la lutte mais, de façonpragmatique, en complémentarité et ensynergie avec la communauté despartenaires au développement, d’appor-ter un concours dans les domaines noncouverts mais indispensables pour lamise en place d’un système de santéperformant. S’inscrire dans le processusnational de planification stratégiquerépond bien à cette démarche.

Le processus de planificationstratégique (32)

La pandémie de VIH/sida est en fait unassemblage d’épidémies complexesdynamisées par différents facteurs liés aucomportement, à l’économie et à lasociété. La diversité des moteurs de cesépidémies, jointe à la nécessité d’employerle plus efficacement possible les raresressources disponibles, rend nécessaire une« planification straté-gique » qui, élaboréesous la responsabilité nationale, comporteles étapes suivantes :1. Dresser la carte de la situation duVIH/sida ; comprendre les caractéris-tiques de l’épidémie locale en recensantles moteurs de la propagation du VIH ;analyser les forces et les faiblesses de laréponse nationale.2. Établir un plan d’action adapté à lariposte et utilisant au mieux lesressources limitées du pays.

4Pour ce faire, la France continuera deproposer son appui plus spécifiquementdans les domaines où elle a démontré unsavoir faire reconnu, qu’il s’agisse de lasécurité transfusionnelle, du test et duconseil volontaire, de la prévention de latransmission materno-infantile du VIH,de l’accès aux médicaments, dudépistage et du suivi des patients infectés

ou présentant un déficit immunitairesévère. Elle développera par ailleurs, enliaison avec les agences spécialisées desNations Unies (BIT, PNUD, FNUAP,UNICEF), son expertise dans dessecteurs essentiels encore insuffisam-ment investigués, qu’il s’agisse de la priseen compte des orphelins, del’intervention dans le monde du travail,dans celui du milieu rural ou du secteuréducatif, de la thématique solidarité etprévention ou de son rapport avec lesassociations de lutte contre le VIH/sida.

5) Pour les pays récemment pris encompte par la ZSP, favoriser l’approcherégionale en soutenant les organismesinter-Etats (SADC, CAREC…).

6) Développer, sur le moyen terme, enpartenariat avec les pays du Sud et enincluant une dimension forte deformation, un vaste programme derecherche à vocation opérationnellecouvrant en particulier l’essentiel desquestions liées à la mise en œuvre duconcept de prise en charge globale,intégrée et décentralisée :■ étude de l’impact géopolitique de

l’épidémie de VIH/sida en Afrique.■ évaluation des situations et des

comportements à risque, identifica-tion et validation d’éléments appro-priés de réponse.

■ renforcement des systèmes d’informa-tion et de gestion sanitaire permettantde mieux évaluer les situations, d’ensuivre les évolutions, d’identifier etd’analyser leurs déterminants.

■ adaptation/validation du concept deprise en charge globale, intégrée etdécentralisée dans le contexteparticulier des populations endéplacement.

■ soutien à l’élaboration et à la mise enplace de stratégies et de structuresd’appui aux PVVIH, études d’impactsocio-économiques et socio-comporte-mentales.

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■ évaluation des facteurs de limitationdes politiques nationales desmédicaments pour l’accès auxmédicaments génériques et essentiels.

■ soutien à la mise en œuvre des accordssur les aspects de propriétéintellectuelle traitant du commerce(ADPIC).

■ soutien aux politiques nationales dedépistage de l’infection etrenforcement des laboratoires debiologie de première référence,amélioration des techniques dedépistage dans les centres de dépistageanonyme et les services de transfusionsanguine, appui à la création d’unlaboratoire de contrôle de qualité pourl’Afrique francophone.

■ amélioration de l’hygiène hospita-lière pour le développement de lalutte contre les contaminationsaccidentelles et les infectionsnosocomiales.

■ amélioration des connaissances surl’histoire naturelle de la maladie.

■ analyse de la situation des orphelins etdes stratégies de prise en charge.

■ analyse de la situation des exclus et desmarginalisés et des stratégies de priseen charge.

La recherche fondamentale continuerade passer par la participation aufinancement de l’Agence Nationale deRecherches sur le sida (ANRS) etparticulièrement de son « ActionCoordonnée n° 12 » (AC12) dontl’objectif principal est « de favoriser etd’organiser les recherches sur le sidadans l’ensemble de la zone de solidaritéprioritaire » et, au-delà du champ de larecherche, d’appuyer les programmes delutte contre le sida dans les pays endéveloppement y compris au niveau dela prise en charge thérapeutique.

Les axes de recherches privilégiés parl’AC12 sont la biodiversité des VIHcirculant dans le monde, les essaiscliniques visant à réduire la transmissionmère-enfant et à prévenir l’apparition demaladies opportunistes, les études decohortes pré-vaccinales et les essaisvaccinaux, la surveillance des résistancesaux antirétroviraux, les études socio-anthropologiques visant à mieuxcomprendre les raisons de la diffusiondu VIH dans les PVD, l’accessibilité auxsoins spécifiques, le poids économiquede la maladie et des traitements.

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Entre 5 et 10% du total mondial descas d’infection à VIH seraientimputables à la transfusion de sang oude produits sanguins contaminés.L’importance de cet élément de risqueimpose d’aider les États à se doter d’unservice public transfusionnel efficace etrépondant aux besoins nationaux detransfusion de sang ou de ses dérivés.

Dès lors qu’il existe un service nationalde transfusion sanguine, quatreéléments doivent être pris en comptepour contribuer à la sécurité desproduits sanguins. Il s’agit :■ du prélèvement sanguin et de la

sélection des donneurs. Le donneurde sang représente une ressource rare,irremplaçable pour le moment etimprévisible. Mettre en place cetteressource demande d’informer et desensibiliser la population, de lamotiver pour pouvoir recruter,sélectionner et fidéliser des donneursà faible risque dans un système où lapratique du don rémunéré estbannie ;

■ de la qualification des dons qui passepar une sélection clinique attentivecomplétée par un dépistagebiologique normalisé des principauxagents responsables d’infectionstransmissibles par le biais d’unetransfusion (ITT) ;

■ de la préparation des produits enéliminant le risque bactérien par lebiais de la mise en place impérativedans chaque établissement deprocédures de contrôle et d’assurancequalité ;

■ de la distribution des produits et de laformation des prescripteurs, élémentessentiel pour réduire la dispensationde transfusions non indispensables.

Sécurité transfusionnelle

Cadres opérationnels de référence-

Journée d’informations

sur le sida - Abidjan.

© MAE - J.-P. MESGUEN.

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Savoir, c’est pouvoirLes rapports sexuels entre un individuinfecté et un partenaire non infecté sontle moteur de l’épidémie de VIH. Lorsquele statut sérologique des deuxpartenaires est inconnu – et au bas motneuf dixièmes des individus séropositifsdans le monde ne se savent pas infectés– les seules options sûres sont lesrapports sexuels sans pénétration ou lesrapports sexuels protégés par lepréservatif. Néanmoins, le préservatif n’apas que des avantages, en particulierdans le contexte d’une relation stablelorsqu’une grossesse est désirée oulorsqu’il est difficile pour l’un despartenaires de suggérer soudainementd’utiliser le préservatif. Pour denombreux couples et individus enAfrique, où les taux de prévalence duVIH sont élevés, la connaissance de sonstatut sérologique élargirait l’éventail desoptions de prévention du VIH (33).

La politique de dépistage doit reposersur une démarche volontaire despersonnes avec un impératif absolude garantie d’anonymat et/ou destricte confidentialité. La démarchede test associe le conseil avantprescription, le test lui même puisune consultation de rendupermettant un travail de prévention

et/ou l’accompagnement de lapersonne vers la prise encharge. Ce processus de test etde conseil volontaires et lesservices qui le délivrent jouentun rôle essentiel dansl’éventail de mesures propres àmieux assurer la prévention etle soutien en matièred’infection à VIH/sida.L’efficacité de cette démarchea été attestée en matière de :

■ modification positive descomportements sexuels des hommeset des femmes,

■ prévention de la transmission duVIH et des autres infectionssexuellement transmissibles (IST),

■ prévention de la transmission duVIH de la mère à l’enfant,

■ accès plus efficace des personnesinfectées aux soins médicaux,

■ amélioration de l’état sanitaire par lebiais de conseils nutritionnelsappropriés,

■ soutien psychologique, spirituel,social, juridique, financier,

■ extension possible du bénéfice à lacellule familiale et à l’entourage.

En dépit d’un rapport coût-efficacitéacceptable, ces services restentcependant peu développés dansnombre des pays les plus fortementtouchés par la pandémie. Pallier àcette situation demande un appuipour un véritable maillage nationalde centres de dépistage volontairesdont l’efficience sera accrue par :■ l’information de la population sur les

centres et sur les avantages qu’ilsdispensent,

■ une amélioration de la qualité desservices (infrastructure adaptée,plateau technique adéquat,personnels compétents et disponi-bles, confidentialité assurée, soutienpsychologique renforcé...),

■ l’accompagnement par des activitésvisant à atténuer la stigmatisation etla discrimination,

■ un renforcement de la prise encompte des groupes particulièrementvulnérables dont les besoins et lesexigences légitimes demandent à êtremieux connus,

■ l’inclusion d’interventions spécifi-ques améliorant le coût-efficacité dela structure,

■ un élargissement de l’accès audépistage dans les structures socio-sanitaires non spécialisées.

Test et conseil volontaires

Test de dépistage ELISA.© Institut Pasteur.

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Les avancées majeures dans la mise aupoint d’actions efficaces et financière-ment accessibles permettent de réduireles risques de transmission du VIH etd’assurer une prise en charge efficace encas de déficit immunitaire sévère. Ellesmettent au premier rang despréoccupations la prise en compte de laréduction de la TME.

On peut désormais développer uneapproche globale du problèmemettant en œuvre une stratégie deprévention de la transmission mère-enfant et de prise en charge del’infection à VIH/sida pour la femme,l’enfant et, dans une certaine mesure,pour le partenaire et/ou la cellulefamiliale. Un tel programme doitproposer, dans le cadre des services desanté reproductive et de ceux liés à lagrossesse, une offre complète etcohérente de prévention, de soins etde suivi en amont et en aval de la priseen charge médicale stricto sensu,notamment le conseil pré et post testencadrant l’accès à la connaissance dustatut sérologique, la prise en comptede la transmission sexuelle du VIH etdes IST (dépistage, prévention,traitement), la prévention de latransmission verticale du VIH par unecure courte d’ARV, la mise àdisposition de substitut à l’allaitementmaternel, un suivi médical et uneprise en charge adéquate desinfections opportunistes et, sinécessaire, un traitement anti-rétroviral spécifique, un soutienpsycho-social individualisé.

Mais en acceptant de se faire dépister,la femme enceinte prend le risquemajeur de la connaissance d’un statut

de séropositivité à un moment crucialde son existence et à une période deplus grande vulnérabilité. Endéfinitive, il va lui revenir de gérer, laplupart du temps seule, plusieursdifficultés importantes : grossesse,grossesse à risque, assimilation etacceptation psychologique de sonnouveau statut, décision ou non deminimiser les risques de transmissiondu virus à son enfant, culpabilitééventuelle, annonce de son statut àson conjoint et à son entourage.

Il faut continuer à revendiquer le droitde la femme à avoir accès à laconnaissance de son statut sérologiqueet défendre l’idée d’intégrer cette offrede dépistage dans un paquet minimumde services en consultation prénatale endépit des difficultés que cela comporte.Donner cette connaissance auxfemmes, c’est assurément leur donnerles outils nécessaires à leur émanci-pation, mais c’est aussi les fragiliser sielles ne sont pas accompagnées dansleur parcours par un environnementmédical, socioculturel et associatifresponsable.

Concevoir ce type d’interventioncomporte donc toutes les questionsliées à la problématique VIH/sidamais nécessite aussi de prendre pluslargement en compte le concept degenre ; ceci requiert préalablementune réflexion construite autour desdéterminants socioculturels dumonde dans lequel évolue la femmedes pays en développement dont unedes caractéristiques majeures est aussila forte variabilité interpays. Ici plusqu’ailleurs la recherche opération-nelle est une nécessité.

Prévention de latransmission mère-enfant

(TME) du VIH

Prélèvement sanguin au doigt.

Niakhar - Sénégal.

© IRD - Yves Paris.

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Améliorer l’accès aux traitementscontre le sida dans les pays endéveloppement met en jeu desproblématiques complémentaires : ■ intégration de la prise en charge

des personnes vivant avec leVIH/sida dans le système généralde santé,

■ amélioration des systèmes de santé,d’une efficacité insuffisante auregard du défi posé par la prévalencede l’endémie, pour le diagnostic, laprise en charge et le suivi despatients,

■ amélioration des circuits d’approvi-sionnement et de distribution desmédicaments,

■ réduction du coût des médicamentspayés par les patients, pour tendrevers l’adéquation souhaitable entre leprix et leur capacité de paiement dansune démarche de plaidoyer et denégociation en faveur d’une« tarification équitable » des théra-peutiques,

■ répartition efficiente de l’aideinternationale.

Assurer un accès à des traitements dequalité et à coût abordable pour lamajorité de la population passe par : ■ une liste nationale de médicaments

essentiels rigoureusement établiesur la base du rapport coût-efficacité prenant en comptel’épidémiologie locale,

■ une optimisation des stratégiesthérapeutiques de prise en charge,

■ une réglementation adaptée etappliquée concernant l’homolo-gation des produits et l’assurancede la qualité aux différents niveauxde la chaîne d’approvisionnement,

■ une meilleure connaissance desdéterminants du coût desmédicaments et de leurs variations

selon les pays, sur toute l’étenduede la filière entre l’achat aufabricant et la vente au patient,

■ l’identification des options possibles,économiquement rationnelles,publiques et privées, nationales etinternationales, permettant, enfonction des réalités locales, de pesersur les déterminants du coût,

■ l’évaluation sur une baseéconomique, budgétaire, juridiqueet pratique, de la faisabilité et del’efficacité des différentes options,

■ l’augmentation des ressourcesfinancières disponibles faisantappel tant aux contributionsnationales qu’internationales dansle cadre d’une véritable « mobilisa-tion sociale » à l’échelle mondiale.

Accès aux médicaments

File d’attente d’un dispensaire.

Côte d’Ivoire.

© J. L. Rey.

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L’évolution de la pandémie associéeaux nouvelles ouvertures en matièrede prévention médicamenteuse etd’accès à des thérapeutiquesspécifiques ou non, conduisent àorganiser la lutte autour d’unestratégie optimisant la politique dedépistage et permettant un accèsvéritable au diagnostic.

Une telle approche, complémentairede l’ensemble des stratégies préventiveset en particulier de l’extension de lasécurité transfusionnelle à l’ensembledes hôpitaux et des centres detransfusion, amène à retenir, commeobjectifs généraux, de :■ améliorer l’accès au diagnostic afin

d’engager la prise en charge dansles meilleures conditions possibleset de favoriser les conduitespréventives pendant une phase dedissémination virale majeure,

■ favoriser l’accès à une prise encharge globale des personnesatteintes,

■ aider à l’adoption de stratégiespersonnelles d’évitement desrisques et au maintien sur le longterme des attitudes de prévention.

Retenir ces objectifs demande de :■ informer la population et, en

premier lieu, en fonction dessituations locales, les personnes lesplus vulnérables au risque,

■ développer un maillage national decentres de test et de dépistagevolontaires facilitant de surcroîtl’accès à la prévention et à la priseen charge des maladiestransmissibles par voie sexuelle etsanguine dont le VIH ne peut êtredisssocié. Un tel maillagepermettrait de se rapprocher des

sujets et des groupes particulière-ment à risque,

■ assurer le diagnostic et la prise encharge efficace des maladiesopportunistes et associées au sida,principalement la tuberculose, àdes coûts acceptables et au plusprès des lieux de vie du patient, àdomicile ou dans des structuresmédicales ou sociomédicalesadaptées à la problématique d’unepathologie chronique à fortetonalité socioéconomique dans uncontexte d’accroissement continudu nombre de cas identifiés,

■ garantir l’accès à des examens dequalité, ce qui suppose de :◆ définir et valider des stratégies

de dépistage et de suivisimplifiées,

◆ uniformiser les pratiquesd’utilisation des tests (sensibilité,spécificité, simplicité d’emploi,durée de péremption, facilité delecture, conditionnement,prix...),

◆ garantir la chaîne d’approvision-nement en réactifs,

◆ assurer le contrôle interne/externede qualité des laboratoires.

■ définir le rôle des associations depersonnes vivant avec le VIH/sida(PVVIH) et de soutien à la luttecontre le VIH/sida dans l’ensembledu dispositif de suivi de l’infectionet les soutenir dans la mise enœuvre des tâches qui leur sontimparties.

Dépistage et suivides patients infectés

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L’accès aux thérapeutiques spécifi-ques a profondément bouleversé lastratégie de prise en charge dupatient atteint de déficit immunitairesévère. Cet accès est à court termepotentiellement ouvert à l’ensembledes pays, y compris à ceux endéveloppement. Ceci impose deredéfinir le rôle de l’hôpital et deconsidérer dans toute son ampleur ladimension médicosociale duproblème admise désormais commefondamen-tale. La prise en chargedoit être voulue essentiellement enambulatoire et reposer sur uncontinuum de soins, du domicile à lastructure spécialisée de référence, enpassant par l’ensemble des moyensles plus adaptés à l’environ-nementéconomique et socioculturel dupatient.

L’accès aux ARV sera d’autant facilitépour les pays les moins développésqu’un certain nombre d’enjeuxtrouveront leur solution :■ améliorer la sélection des ARV et

des médicaments efficaces contreles maladies opportunistes etassociées,

■ structurer ou renforcer les systèmesd’approvisionnement et de distri-bution,

■ augmenter l’accessibilité financièreà l’ensemble des composantes dutraitement,

■ évaluer l’intérêt et la faisabilitéd’une production locale et demesures permettant l’importationde médicaments génériques.

Un traitement insuffisant favorisantles résistances à l’efficacité thérapeu-tique ; il est essentiel, quel que soit le

pays, et dès la mise à disposition detraitements efficaces, de créer lesconditions d’une bonne observance etde son maintien dans la perspectived’un traitement sur le très long cours.Y parvenir suppose de pouvoirproposer au patient un accompa-gnement destiné à permettre laconstruction d’une démarchevolontaire d’adhésion au traitement.La société civile et plus spécifique-ment les associations de PVVIH et lesONG de soutien à la lutte contre leVIH/sida y ont évidemment touteleur part qu’il convient de préciser etd’accompagner sur les différents planstechnique, logistique et financier.

Enfin, cette prise en charge estindissociable d’une vigilance forte enmatière d’éthique et de droit et de lanécessaire prise en compte dudomaine plus large de la lutte contrela stigmatisation et la discrimination.

Suivi des patientsprésentant un déficitimmunitaire sévère

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Indépendamment des différences decultures et de pays, la familleafricaine élargie et la communautépourvoyaient traditionnellement auxbesoins de ces enfants. L’ampleursans précédent du problème posé, lemodernisme et ses tendancesindividualistes, la pression socio-économique, le développement de lamobilité géographique et del’urbanisation, l’importance descoûts liés à une prise en chargemoderne (éducation, santé)... ontérodé, voire singulièrement mis àmal, ce système traditionnel dont lesmécanismes de solidarité sont demoins en moins opérants.

Il n’empêche que la solution durable àce problème ne peut continuer d’êtreque familiale et/ou communautaire autravers soit de la famille naturelle soitd’une famille d’accueil, permettant àl’enfant de faire face à ses besoinsélémentaires en termes de logement,d’alimentation et de socialisation.L’institutionalisation dans desstructures sociales ne devraits’envisager que commesolution temporaire d’attente,préalable à l’identificationd’une formule de placementadapté, l’institution spécia-lisée, pivot possible dudispositif communautaire,ayant toutefois, à ce titre, unrôle clé à jouer en matièred’organisation, de formation,de soutien, de coordination etd’évaluation de ce dispositif.

La définition d’une politiquenationale de protection de l’enfant etde respect de ses droits en matière, enparticulier, de conservation dupatrimoine, d’accès aux soins, àl’enseignement et à la formationprofessionnelle, ainsi que celle d’unepolitique des droits nouveauxconcédés aux familles d’accueil, sontdu ressort des pouvoirs publics quidoivent conforter les filets de sécuritéexistants ou, en leur absence,imaginer et mettre en place desmécanismes efficaces. Leur mise enœuvre, avec les implicationsfinancières qui en découlent, est,pour l’essentiel, du ressort de l’État etdes collectivités locales.

L’entraide et la solidarité nationales etinternationales devraient permettre demobiliser, de façon complémentaire àla puissance publique, les ressourcesnécessaires pour soutenir les initiativeset les efforts communautaires.

Prise en comptedes orphelins

Nombre total des enfants devenus orphelinsdu sida à l’âge de 14 ans ou avant, jusqu’à fin 1999

Total : 13,2 millions

Amérique du Nord70 000

Caraïbes85 000

Amérique Latine110 000

Europe occidentale9 000

Afrique du Nord& Moyen-Orient

15 000Afrique subsaharienne

12,1 millions

Europe orientale& Asie centrale

500

Asie du Sud & Sud-Est850 000

Australie & Nouvelle-Zélande< 500

Asie de l’Est & Pacifique5 600

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Si le fort impact macroéconomiquenégatif de la pandémie rétroviralen’est plus à démontrer, ses effets auniveau de l’entreprise en termes de :■ perte de personnels qualifiés,■ baisse de productivité liée à

l’absentéisme et au remplacementinévitable de personnels souventmoins expérimentés,

■ augmentation des coûts derecrutement et de formation,

■ augmentation des dépenses desanté,

ne sont pas encore pour tousparfaitement évidents.

Impliquer l’employeur dans la luttecontre le VIH/sida sur les lieux detravail ne conduit pas à exonérer lespouvoirs publics de leurs obligationsen matière de mise en place d’uncadre législatif assurant l’égalité, lerespect des droits des personnesinfectées, la non discriminationfondée sur le statut sérologique.

Impliquer l’employeur dans la luttecontre le VIH/sida sur les lieux detravail devrait déboucher sur la miseen place in situ de programmesglobaux et durables incluant, dans lestrict respect des règles essentielles deconfidentialité, en liaison avec lesautorités publiques responsables, etdans le cadre des politiquesnationales de lutte :■ information continue et formation

adaptée de l’ensemble dupersonnel incluant la mise àdisposition de préservatifs,

■ promotion d’un accès facilité audépistage volontaire, aux servicesde conseil et de soutien pour lesemployés et leur famille,

■ diagnostic, traitement et prise en

charge des IST pour les employéset leurs partenaires sexuels, àl’intérieur de l’entreprise ou dansdes services extérieurs,

■ accès facilité aux thérapeutiquesdes infections opportunistes et auxARV en fonction des politiquesnationales,

■ adaptation des postes de travail auxcapacités résiduelles des personnesatteintes.

Si le coût financier pour l’entreprisene doit pas être sous-estimé,notamment en cas de mise àdisposition d’antirétroviraux, lesavantages liés à cette initiative sont,pour certains aspects, d’une autrenature (image sociale forte au sein dupersonnel et dans le pays, limitationde la perte en investissementhumain, meilleure organisation desremplacements) mais tout aussiimportants.

VIH/sida et mondedu travail

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Il n’est plus exagéré de dire que lesida est désormais et surtout unproblème rural dans la plupart despays en développement fortementtouchés par la pandémie. Le sida yprogresse désormais plus rapidementqu’en milieu urbain, les populationsy sont moins bien préparées pour yfaire face et les coûts liés au VIH/sidasont en grande partie à la charge descommunautés rurales. Il fautdésormais considérer que le sidamenace gravement la sécuritéalimentaire.

C’est pourquoi, inclure unedimension de lutte contre leVIH/sida dans l’ensemble des inter-ventions d’appui au développementrural est une nécessité absolue.

Un système éducatif efficient est unélément central pour lutter contre lapauvreté et parvenir à undéveloppement humain durable : cesystème est actuellement fortmalmené dans les pays à fort taux deprévalence de l’infection à VIH/sidaoù le monde enseignant estparticulièrement touché et où sonauditoire, confronté à la maladie, auproblème des orphelins et à celui del’exclusion volontaire ou non et de lamarginalisation, demande uneorganisation nouvelle de la formation.

Un système éducatif efficient estégalement un élément central pourconstituer une réponse efficace àl’épidémie de VIH ; ce système apartiellement failli : les jeunes enformation, a priori les mieux

informés, payent cependant un trèslourd tribut à l’infection.

Face à l’urgence de l’épidémie, lesinstitutions éducatives doiventnécessairement se restructurer sur labase d’une évaluation prospectiveportant sur :■ les effets induits, dans leurs

composantes humaines, sociales etfinancières, sur la quantité et laqualité des services éducatifs,

■ la disponibilité et le niveau deformation des formateurs,

■ la réaction des familles et descommunautés face à l’impact duVIH,

■ l’évolution des situations et desbesoins des enfants et des étudiantsnon scolarisés, déscolarisés, malscolarisés.

Face à l’urgence de l’épidémie, lesecteur de l’éducation doit apporterdes réponses pertinentes à une jeunesseà considérer dans ses différentspositionnements face à la scolarisation,entrant très tôt dans une vie sexuelleactive, confrontée à des pratiques etcontraintes sociétales en discordanceavec les messages de « comportementresponsable ». Cela demande sansdoute un changement de culture,nécessaire pour permettre uninvestissement actif desjeunes – et de la commu-nauté – dans tous lesdomaines où ils peuventapporter une contribution àleur éducation. Il estindispensable d’adapter laculture éducative auxbesoins des jeunes côtoyantun monde touché par leVIH et le sida.

VIH/sida et secteur éducatif

VIH/sida et monde rural

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Outre son impact sanitaire, lapandémie est doublement unemenace, économique et sociale, avecun fort pouvoir destructurant sur lesmodes d’organisation de la sociététraditionnelle qui prévalent dans lespays en développement.

En dehors de réponses médicalesspécifiques, une telle situationdemande un traitement de chocprenant impérativement en compte ladimension sociale du problème, lasécurité d’un emploi et d’un revenudécent ainsi que la solidarité etl’insertion sociales. À côté de la luttecontre la pauvreté et la précarité, cadregénéral de l’intervention à même dedonner une réponse efficace etdurable à la problématique, ilconvient sans doute de se reposer surles communautés, pour autant qu’ellesexistent encore, sur les ménages et/ousur les ONG et OSI, pour trouver uneriposte efficace qui prenne enconsidération :■ la nécessité de compenser les

réductions de capacité de travail dela famille,

■ la possibilité de générer desactivités propres à maintenir/

développer lesrevenus,■ le soutien aux

enfants et auxorphelins.

Cela ne doit évidemment pasexonérer l’État, en liaison avec sespartenaires extérieurs, de sesobligations en matière de :■ développement de la production

générale de biens et de la mise àlarge disposition des servicesessentiels : éducation, santé,hygiène et environnement, accèsau crédit,

■ amélioration du financement dusystème de santé et, en particulier,mise en place de dispositifs deprotection sociale qui garantissentla solidarité, condition sine quanon à la limitation de l’exclusion,

■ promotion de l’efficacité desONG/OAC par le renforcementde leurs compétences en matièred’élaboration, de planification, degestion et d’évaluation d’inter-ventions,

■ respect des droits des personnesatteintes et des personnes affectéestant en ce qui concerne l’accès auxsoins que pour ce qui est du droitau travail, de la propriété et de lafamille avec une attention spécialepour les groupes les plusvulnérables et en particulier pourles femmes et les enfants.

La prévention sociale desconséquences, envisagée sous l’anglede la solidarité, doit être vue ensynergie avec la préventionproprement dite de l’infection àVIH/sida et autres IST dont lastratégie la plus efficace semble passerpar l’éducation par les pairs, la mieuxà même de modifier lesconnaissances, les attitudes, lespratiques et, partant, lescomportements à risque.

Solidarité et prévention

© Counselling-Sida. CEGID. Dakar - Sénégal.

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L’expertise des associationsen matière d’implicationcommunautaire...Dans les pays du Nord, l’épidémie deVIH/sida a bouleversé, sousl’impulsion des associations depersonnes atteintes, la logique defonctionnement des systèmes de santé,en règle générale, assez peu préoccupéspar la place du malade et descommunautés. Comme acteurs-clés dela lutte contre les préjugés, et commecatalyseurs de la mobilisation de lasociété civile contre l’épidémie, lesassociations de PVVIH ontprogressivement fait évoluer lespratiques médicales et contribué àmodifier en profondeur la relationsoignant-soigné et les représentationssur la maladie. Les associations de luttecontre le sida ont ainsi acquis une réelleexpertise dans le domaine del’implication communautaire ; leurparticipation à la recherche, aux actionsde prévention, à la mise au point detraitements et à l’accompagnementthérapeutique est reconnue comme unélément incontournable des politiquesde santé publique.

…base d’une coopérationinterassociative Nord-Sud àdévelopper…L’expérience des associations duNord en fait des partenaires depremier plan dans la coopérationavec les associations de lutte contre lesida des pays du Sud. Dans les paysen voie de développement, lessystèmes publics de santé sont tropsouvent encore défaillants etincapables d’assurer une prise encharge adéquate des personnestouchées par le VIH/sida. Lesmeilleures réponses émergeant en

matière de réduction des risques liésau VIH et de prise en charge globale,sont portées par les associationslocales qui, sur la base d’uneimplication des personnes touchées,interviennent voire même proposentleurs propres services de conseil audépistage volontaire et anonyme, desuivi médical et d’accès à des soins età une prise en charge thérapeutiquede qualité et à moindre coût.

…plus encore dans lecontexte de l’arrivée destraitements antirétrovirauxAvec l’arrivée des traitementsantirétroviraux dans les pays endéveloppement, il est fondamentalque la coopération interassociativeNord/Sud et le travail en réseauSud/Sud soient renforcés pour :■ favoriser le partage d’expériences,

développer le transfert et lavalorisation de compétencesnouvelles en matière d’informationet de soutien aux personnestouchées,

■ développer le plaidoyer pourl’accès généralisé à desthérapeutiques efficaces,

■ agir de façon concertée pour lerespect des droits des malades,

■ apporter les ressources en conseil eten formation dans les domainesessentiels de la santé/développementcommunautaire : renforcement descompétences gestionnaires desassociations, réduction des risques,approche familiale de la prise encharge, réduction de la vulnérabilitééconomique des personnes touchées,accompagnement à l’observance destraitements.

Dans l’esprit et la logique du Sommetde Paris, appuyer les associations duNord comme du Sud, soutenir lesréseaux inter-associatifs Nord/Sud,favoriser l’émergence de réseauxSud/Sud, est une priorité.

Associations et luttecontre le VIH/sida

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Alors que le financement de la santéest un thème qui prend uneimportance croissante dans lesstratégies d’intervention de l’ensembledes partenaires du développement, laquestion spécifique de la prise encharge financière des malades atteintsdu sida, si elle est effectivementabordée à la fois sur un plan général etsur celui de son coût théorique, n’apratiquement abouti à aucuneproposition construite de solution àl’échelon national, en particulier dansle contexte des pays où le taux deprévalence est élevé. Il existecependant un consensus sur le fait queles systèmes sanitaires nationaux telsqu’ils existent actuellement ne seronten général pas en mesure d’y faire face.

Pour la prise en charge dufonctionnement des services de santé,le manque global de ressources estévident même s’il est doublé d’unemauvaise efficience : la réflexionactuelle sur le financement de la santéporte donc sur ces deux axes. Il s’agitd’accroître la part des ressourcesconsacrées à la santé en jouant sur lacombinaison des sources de finance-ment et d’instaurer des mécanismesqui limitent les gaspillages. Lesréflexions sur la mutualisation durisque favorisent une solidaritéhorizontale dont la limite est lasolvabilité des adhérents au regard dubesoin de financement. La prise encharge de malades lourds risque demettre en faillite ces systèmes naissantset donc fragiles. L’orientation généraleest donc plutôt de couvrir un nombrelimité de risques identifiés, risquesdont le sida et ses conséquences sontgénéralement exclus.

A l’heure actuelle, les malades dusida, qui fréquentent largement lesservices de santé lorsqu’ils souffrentde pathologies opportunistes,rentrent dans le régime commun.Certains pays ont mis en place, dansles structures sanitaires, un stock demédicaments réservés aux maladesatteints du sida. La distribution de cesmédicaments reste aléatoire etlargement insuffisante pour répondreaux besoins.Il est donc urgent d’engager uneréflexion large sur les conséquencesdu sida sur l’organisation et lefinancement des systèmes de santé.La lutte contre le VIH/sida, et plusgénéralement celle contre lesprincipales maladies infectieuses, nepeut progresser significativement sansun appui exceptionnel et solidaire dela communauté internationale. Si desperspectives de financements lourdssont ainsi envisageables à relative-ment court terme (Initiative PPTE,Cadres stratégiques de réduction de lapauvreté...), il n’en demeure pasmoins que le problème majeur qui vase poser, et qui est loin d’être résolu,est celui de leur emploi rationnel auprofit, non pas d’une pathologieisolée, mais de l’ensemble du systèmesociosanitaire qui doit être consolidé.Pour ce faire, des travaux préalablesportant sur la mobilisation des fonds,sur l’engagement politique desgouvernements locaux en vue de larestructuration de leurs dispositifssociosanitaires et sur l’organisation dela coordination et de l’utilisation desmoyens financiers, sont une nécessitépour pouvoir proposer des solutionsfaisables et durables.

Financement pérennedes soins

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Et demain ?

De la situation de déni, d’indifférence ou d’intolérance, de mépris, derejet, de marginalisation ou d’exclusion, le sida est devenu

aujourd’hui en France, grâce à l’engagement, l’abnégation, la volonté, lapersévérance de quelques acteurs particulièrement pugnaces, malades,bénévoles, associatifs, professionnels de la santé, responsablesadministratifs et politiques, une maladie presque comme les autres, priseen charge comme les autres. L’épidémie a été révélatrice et amplificatricedes dysfonctionnements du système général de santé mais, de par le faitmême de la société civile et de la pugnacité de son combat, le sida a finipar y trouver sa « part d’humanité » (34), son « visage » (35).

Cette part d’humanité, la France, fidèle à ses valeurs, entend la fairepartager au monde ; c’est là tout le sens de son engagement en faveur despays les plus démunis.

Mais l’ouverture du regard sur l’autre, permise par le sida, doit l’être toutautant quelle que soit la maladie. A l’évidence, beaucoup reste à faire.

On observe – et c’est bien – une montée en puissance del’institutionnalisation mondiale de la gestion de la pandémie. Le risque,sinon la tentation, pourrait alors être, dans le grand mouvement qui sedessine, d’oublier les leçons de l’histoire, de faire rentrer la lutte contre leVIH/sida dans le rang des autres pathologies « banales », de rendre lepouvoir à la technologie, à la technocratie et d’oublier cette partd’humanité que l’on avait fini par trouver.

Soyons vigilants.

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Notes

(1) Peter Piot, Directeur exécutif d’ONUSIDA,octobre 1999.(2) Daniel Defert, in: E. Hirsch : AIDES,Solidaires, Les éditions du Cerf, Paris, 1991. (3) Donald de Gagné, association Persons withAids, Ve Conférence internationale sur le sida,Montréal, 1989.(4) Jonathan M. Mann, in: E. Hirsch : AIDES,Solidaires, Les éditions du Cerf, Paris, 1991.(5) M. Verboud, 1996.(6) Kofi A. Annan, Secrétaire-Général desNations Unies, 1999.(7) Le point sur l’épidémie de sida. Décembre2001. ONUSIDA/01.75F - (8) id.(9) AIDS and Economic Development. AfricanDevelopment Forum 2000. UN EconomicCommission for Africa. 12/2000.(10) ONUSIDA 1999.(11) Les orphelins du sida; réponses de la ligne defront en Afrique de l’Est et en Afrique australe.UNICEF 1999.(12) HIV/AIDS in Africa: the impact on theworld of work. African Development Forum2000. ILO/Geneva. 12/2000(13) Rapport sur l’épidémie mondiale de sida.Juin 2000. ONUSIDA/00.13F(14) VIH/sida: une menace pour la sécuritéalimentaire et le monde rural. FAO.TC/I/X8713F/1/11.00/1000.(15) Rapport sur l’épidémie mondiale de sida.Juin 2000. ONUSIDA/00.13F(16) Peter Piot, Directeur exécutif d’ONUSIDA,in: Rapport sur l’épidémie mondiale de VIH/sida,juin 2000.(17) Peter Piot, in: Le rapport del’ONUSIDA/99.29F, octobre 1999.(18) Personne atteinte, Centre SAS, Bouaké, Côted’Ivoire, 1999, in: S. Delcroix et D. Floury : Faireface ensemble.(19) Jeune homme, 25 ans, Bouaké, Côted’Ivoire, in: Faire face ensemble.

(20) Femme vivant avec le VIH/sida, Centre SAS,Bouaké, Côte d’Ivoire, in: Faire face ensemble.(21) Responsable d’une association caritativereligieuse, Côte d’Ivoire, 1999, in: S. Delcroix etD. Floury: Faire face ensemble. (22) Orphelin de père, mère suivie par le CentreSAS, Bouaké, Côte d’Ivoire.(23) Veuve. Centre SAS, Bouaké, Côte d’Ivoire.(24) ONUSIDA, 1999.(25) Peter Piot, Directeur exécutif del’ONUSIDA, in: Rapport sur l’épidémiemondiale de VIH/sida, juin 2000.(26) D. Defert. Un nouveau réformateur social :le malade. Communication à la séance plénièredu 6 juin 1989 de la Ve ConférenceInternationale sur le sida à Montréal.(27) Sommet de Paris sur le sida, 1er décembre1994.(28) CREDES : Étude concernant l’évaluationdes programmes de lutte contre le VIH/sida(1987-1997). 01/2001.(29) PM, la France contribue à hauteur de 25%du budget de l’aide au développement de laCommission européenne et du FED.(30) La ZSP, Zone de Solidarité Prioritaire estdéfinie comme celle où l’aide publique audéveloppement bilatéral française, engagée demanière sélective et concentrée, peut produire uneffet significatif et contribuer à un développementharmonieux des institutions, de la société et del’économie. Elle se compose de pays parmi lesmoins développés en termes de revenus, pays aveclesquels la France entend nouer une relation fortede partenariat dans une perspective de solidaritéet de développement durable.(31) Jacques Chirac, Abidjan, Côte d’Ivoire,1997)(32) ONUSIDA/99.29F, octobre 1999.(33) ONUSIDA - Le point sur l’épidémie desida, décembre 2000.(34) E.Hirsch. AIDES, Solidaires. op. cit.(35) Donald de Gagné. AIDES, Solidaires. op. cit.

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