PIERRE SIMON FOURNIER LE JEUNE

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PIERRE SIMON FOURNIER LE JEUNE HISTORIEN, TYPOGRAPHE, GRAVEUR, FONDEUR ET COMPOSITEUR DE MUSIQUE.

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PIERRE SIMON FOURNIER LE JEUNEHISTORIEN, TYPOGRAPHE, GRAVEUR, FONDEUR ET COMPOSITEUR DE MUSIQUE.

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Gravure extraite du Traité historique et critique sur l’origine et les progrès des caractères de fonte pour l’impression de la musique.

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HISTORIEN LES PRéMICES DE LA NOTATION MUSICALE HISTORIQUE DE L'IMPRESSION DE LA MUSIQUE LES PRIVILèGES EMPêCHANT L'éVOLUTION

TYPOGRAPHE - GRAVEUR RECHERCHES D'HARMONIE UN DESSIN PRESQUE INCHANGé

FONDEUR - COMPOSITEUR DOUbLE COMPOSITION DIVISION D'UN CORPS EN QUATRE AUTRES

APRèS FOURNIER AbANDON DES PLOMbS COMPOSITION INFORMATIQUE

CONCLUSION

bIbLIOGRAPHIE - SITOGRAPHIE - REMERCIEMENTS

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PIERRE SIMON FOURNIER LE JEUNEHISTORIEN, TYPOGRAPHE, GRAVEUR, FONDEUR ET COMPOSITEUR DE MUSIQUE.

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INTRODUCTION

Pierre Simon Fournier le Jeune, graveur, fondeur

et imprimeur du XVIII ème siècle, a mis toute son

inventivité au service de la typographie. Ne s’arrê-

tant pas à l’alphabet latin, il inventa de nouvelles

vignettes, grava du grec, de l’hébreu et quand la

levée des privilèges le permit, il se focalisa sur l’im-

pression de partitions musicales. Avant de se pen-

cher sur la création d'un nouveau caractère, il rédi-

gea un traité historique et critique sur les évolutions

techniques et esthétiques de l'impression des parti-

tions musicales. Inscrite dans l'esprit des Lumières,

cette recherche historique lui aura permis de ne

pas faire les mêmes erreurs que ses prédécesseurs.

Fournier a donc revêtu l'habit d'historien pour deve-

nir un meilleur dessinateur de caractère, graveur,

fondeur et compositeur de musique.

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HISTORIEN

Prologus in Antiphonarium1023-1028Guy d’Arezzo

Buxheimer Orgelbuch partition manuscrite, détail

1470 Notes manuscrite, losange, carrée, rhomboïde, ronde et enfin ovale.

Manuscrit Quætiones Super Partes 1322

Johannes de Muris

symboles de notes de durées différentes

LES PRéMICES DE LA NOTATION MUSICALE

L’invention du système de notation de la musique sur

une portée est attribuée au bénédictin Guy d’Arezzo

qui l’expliqua sur un manuscrit datant de 1023-1028 :

Prologus in Antiphonarium *. C’est dans ce même

ouvrage qu’il nomma pour la première fois les notes

Ut, Ré, Mi, Fa, Sol, La, Si, à partir d’un hymne popu-

laire à Saint Jean, dans lequel la première syllabe de

chaque ligne désignait la hauteur à laquelle il fallait

chanter. Les premières partitions manuscrites qui

utilisaient cette notation étaient tracées à la plume :

la forme des notes se rapprochait alors d’un accent

ou d’une apostrophe. La plume se posait sur le papier

puis elle glissait sur le côté pour se terminer en un

trait fin *. C’est de cette forme calligraphique que

découla celle des premières notes imprimées : elles

furent d’abord en forme de losanges puis rhom-

boïdes, carrées, rondes et enfin ovales *. Apposées

sur une portée rouge de 4 lignes, les premières notes

losanges indiquaient la tonalité des syllabes du

chant. 310 ans plus tard, Johannes de Muris rédi-

gea plusieurs ouvrages de recherche et d’étude sur

la notation musicale. Il utilisa dans cet ouvrage une

nouvelle forme de note : la forme carrée *. Ces écrits

techniques très aboutis ont guidé les typographes et

imprimeurs pour la composition des partitions. Ils

ont contribué à la généralisation du système de nota-

tion de la musique.

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HISTORIQUE DE L'IMPRESSION DE LA MUSIQUE

Le Traité historique et critique sur l’origine et les

progrès des caractères de fonte pour l’impression de

la musique écrit par Pierre Simon Fournier, retrace,

dans une première partie, l’évolution de l’impression

de la musique depuis la première partition imprimée

à l’aide de caractères mobiles. Et ce n’est qu’à la fin

du XV ème siècle qu’elle fut tirée. En 1476, Ulrich Han,

un imprimeur de Rome, imprima le premier livre

contenant de la musique : Missale Romanum *. Une

portée rouge ininterrompue fut d’abord imprimée,

puis les notes et les paroles en noir furent ajoutées au

deuxième passage.

Octaviano Petrucci sortit de ses presses vénitiennes

Harmonice Musices Odhecaton en 1501 *. Il obtint, à

la suite de cette parution, une autorisation exclusive

pour l’impression de la musique pour la République

de Venise. Chose remarquable, cet ouvrage imprimé

est polyphonique : l’alto, le ténor et la basse ont cha-

cun leur portée.

Missale RomanumUlrich Han

1476

Harmonice Musices Odhecatonchanson : Por quoy non de Pierre de la Rue

Octaviano Petrucci

1501

Mais Petrucci utilisait encore la technique de l’im-

pression en deux temps qui consistait à reporter

d’abord la portée rouge, suivie ensuite des notes

noires, pleines ou évidées. Ces notes n’avaient pas

à exprimer une valeur de durée comme pour la mu-

sique dite « mesurée », elles indiquaient seulement la

tonalité du chant. Ces partitions sans rythme seront

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appelées plus tard « musique des Huguenots » ou

« musique de plain-chant », elles étaient destinées

au chant des psaumes dans les églises protestantes.

Seulement 25 poinçons différents étaient nécessaires

à l’impression de ces partitions. La portée comportait

quatre lignes, appelées aussi filets. Les éventuelles

allitérations étaient imprimées sur une cinquième

ligne au-dessus de la portée. Le calage devait être fait

avec la plus grande minutie, car si les notes étaient

un peu décalées par rapport à la portée, cela pouvait

changer la tonalité du morceau. Peu de graveurs de

cette époque changeaient l’orientation de la queue

de la note quand celle-ci devenait trop aiguë. Alors

celle-ci dépassant trop de la portée, l’espace entre

les différentes lignes devait être augmenté, la com-

position en devenait très disgracieuse. Cette façon

d’imprimer la musique suffisait, tant que celle-ci

restait dans sa première simplicité. Mais rapidement

des compositeurs de génie allaient écrire des parti-

tions beaucoup plus complexes, on comprend que les

typographes se devaient de trouver un système qui

permettrait d’imprimer ces nouvelles compositions.

En 1554, Guillaume Le Bé utilisait encore cette mé-

thode d’impression en deux temps, ses caractères

furent vite obsolètes *.

Caractères de Guillaume Le Bé exposés dans les Observations sur le traité historique et critique de Monsieur Fournier le Jeune 1766

Gando

Fournier désigne ensuite le graveur et fondeur

Pierre Haultin comme le premier qui maîtrisa l’im-

pression d’une partition en un seul tirage. C’est éga-

lement cet homme qui grava deux corps de notes de

musique différents en 1525. Les imprimeurs qui se

servirent de ses caractères sont Pierre Attaignant, qui

imprima un recueil de chansons en quatre volumes,

et Tylman Susato, qui utilisa également ces plombs

pour imprimer en 1543 le Premier livre des chansons

à quatre parties auquel sont contenues trente et

une nouvelles chansons, convenables tant à la voix

comme aux instruments *.

Premier livre des chansons à quatre parties auquel sont contenues trente et une nouvelles chansons, convenables tant à la voix comme aux instrumentscomposé avec les caractères de Pierre Haultin

1543

Tylman Susato

Fournier cite Nicolas Duchemin et Robert Granjon

qui s’exercèrent également à l’art de la gravure de

caractères de musique. Et aussi Jacques Sanlecque

et son fils qui gravèrent trois caractères : petite,

moyenne et grosse musique en 1635. Louis XIII, sen-

sible au travail de Sanlecque, lui accorda le privilège

exclusif d'être le seul imprimeur de plain-chant pour

la décénie suivante. Le graveur conserva ce privilège

jusqu’à sa mort.

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LES PRIVILèGES EMPêCHANT L'éVOLUTION

Selon Fournier, 150 ans se sont déroulés sans qu’il n’y

ait eu aucun progrès pour l’impression des partitions

musicales à cause de ces privilèges accordés seule-

ment à certains imprimeurs et typographes. Déjà

en 1552, le musicien du Roi Henri II, Adrien le Roi,

associé à l’imprimeur Robert Ballard, obtenait du

roi des Lettres-patentes qui portaient Ballard « seul

Imprimeur du Roi pour la Musique ». Cet imprimeur

se servit de ces lettres pour s’auto-désigner comme le

seul imprimeur de musique partout dans le Royaume

de France. Il commanda des caractères de musique

à Guillaume le Bé, et ne cessa de les utiliser. Quand

Robert I Ballard mourut, ses fils Pierre et Christophe

obtinrent la reconduction des Lettres-patentes.

Elles furent actives jusqu’en 1734.

« Les privilégiés étaient incapables par eux-mêmes

d’ajouter la moindre perfection aux caractères de

musique dont la Nation commençait à s’ennuyer,

la taille-douce vint suppléer à ce défaut. »

Pierre Simon Fournier le Jeune

Traité historique et critique […] de 1756

L’exclusivité accordée à certains graveurs, fondeurs

et imprimeurs empêchait les autres de se pencher sur

l’impression des partitions de musique. La complexi-

fication de ce système écriture nécessitait l’élabora-

tion d’un nouveau système de composition au plomb

et d’un nouveau dessin pour améliorer la lecture de

ces documents.

RECHERCHES D'HARMONIE

C’est sur des plaques gravées que l’on vit les premiers

changements stylistiques : les graveurs imitèrent

d’abord les notes en losange puis, rapidement, ils

leur donnèrent une forme ronde.Dès 1746 Keblin

dessinait la première note ronde qu’il imprima pour

un Duo de Dormel, mais l’ayant gravée sur une

plaque, ce nouveau dessin ne retint pas l’attention

Il Trionfo della FedeltàBreitkopf

1755

Schéma d’agencement des plombs

TYPOGRAPHE - GRAVEUR

des graveurs et fondeurs. Ce fut en 1755, avec une

œuvre composée par la Princesse Royale de Saxe :

Il Trionfo della Fedeltà *, que ces notes rondes réap-

parurent. Bernhard Christoph Breitkopf était l’au-

teur de ces nouveaux caractères en plomb.

Tous les plombs étaient fondus sur un seul corps de

la hauteur de la portée, donc les clés, les queues, et

autres figures qui sont nécessairement plus grandes

que le corps, étaient faites de plusieurs pièces ajus-

tées les unes par rapport aux autres *.

À peine ces caractères parurent-ils, qu’ils furent

imités à Berlin par Zinsk, à Vienne par Trattner, à

Harlem par les Enschede. Il est à noter un petit in-

convénient, ce type de gravure nécessitait la fonte

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de 300 poinçons différents. Dans ces compositions,

les graveurs trouvèrent le moyen d’écrire des tirades

de croches courant sur plusieurs octaves, et éga-

lement d’ajouter des nuances, des allitérations et

autres indications. Afin de ne pas saturer la portée,

des ligatures furent spécialement inventées pour re-

lier les tirades de croches ou doubles croches qui deve-

naient de plus en plus nombreuses. Ces barres noires

situées sur le bout de la queue des notes, permettent

de relier toutes celles qui avaient le même rythme, la

tirade devenait donc plus facile à identifier et à lire.

Au plomb, ces nouvelles ligatures obliques, furent

très difficiles à reproduire.

UN DESSIN PRESQUE INCHANGé

Dans son Traité Historique et Critique de 1756,

Pierre Simon Fournier présente également deux

nouveaux caractères de musique : une moyenne et

une petite musique. Ariette mise en musique par

M. L’Abbé Dugué *, est imprimé avec ces deux

nouveaux caractères. Le système mis au point par

Fournier ne nécessite que 160 poinçons, le dessin

des notes est inédit, elles ne sont pas exactement

rondes, ce qui facilite d’autant plus leur distinction

sur la portée. Dans ses compositions de partitions,

Fournier prend le parti de retourner les queues des

notes le plus souvent possible de manière à compo-

ser au maximum dans la portée, ainsi les paroles

inscrites sous la portée ne touchent pas les liaisons

ajoutées sur ou sous certaines notes. Les ligatures

qui unifient les groupes de trois croches permettent

de mieux identifier la figure particulière qu'est le

triolet : division ternaire écrite dans une partition

binaire. Globalement les mesures sont de même

longueur, la lecture de la partition en est facilitée.

Il est fascinant de constater que cet imprimé datant

de trois siècles est, graphiquement, extrêmement

proche de ceux que l’on utilise encore aujourd’hui.

L'étude historique et critique faite par Fournier lui a

permis d'établir une composition graphique qui tient

compte des points négatifs explicités auparavant.

Ariette mise en musique par M. L’Abbé DuguéPierre Simon Fournier le Jeune

1756

Détails formes des notes et inversion des queues

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Dès 1762, Fournier a déposé un brevet et a obtenu un

décret l’autorisant à imprimer toutes sortes d’ou-

vrages de musique.

« Le Roi étant informé que Pierre Simon Fournier

le Jeune, se serait appliqué avec le plus grand succès

à perfectionner l’Art de fondre les caractères d’Impri-

merie, et notamment ceux de la musique, Sa Majesté,

a jugé à propos de récompenser les talents et les tra-

vaux dudit Fournier, en lui accordant une Place sur-

numéraire d’Imprimeur en la ville de Paris. »

Extrait des registres du Conseil d’État du Roi

Fournier qui critiquait ce système de Lettres-patentes,

s’est quand même réjoui d’obtenir ce privilège du Roi

de France. Mais cet écrit ne l’a pas protégé des contre-

façons. Aussitôt, Loisean, qui avait appris la fonderie

chez Fournier, imita, ce nouveau caractère. François

Gando le fit également. Fournier dénonça ouverte-

ment cette copie et pour se venger Gando publia un

mémoire sous le titre d’Observations sur le traité

historique et critique de M. Fournier le jeune *, où

il déclare être l’inventeur original du système ingé-

nieux de ligatures pour les croches.

Observations sur le traité historique et critique de M. Fournier le jeuneGando, père et fils

1766

page de droite :

Comparaison entre un spécimen d’une partition

par Gando et Fils 1764 (en haut), et une autre de

Pierre  Simon Fournier 1756 (en bas). Les notes de

Fournier sont moins rondes, la difficulté des liga-

tures est parfaitement gérée, elles sont plus grasses

que celles de Gando, cela permet d’identifier le

rythme plus vite. La queue des notes est placée sur

le côté droit ou gauche de la note, ce qui facilite une

meilleure lecture de la note sur la portée.

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FONDEUR - COMPOSITEURDOUbLE COMPOSITION

Plutôt que de graver 300 poinçons différents, Fournier

trouva le moyen de diviser ce nombre par deux. Pour

cela, il choisit de diviser en quatre ou cinq parties

égales la hauteur d’une portée *, ainsi, le composi-

teur peut agencer les plombs en hauteur et largeur

de manière à transcrire toutes les figures et tous les

types de rythmes nécessaires à l’écriture d’une par-

tition. Cela complexifie beaucoup le travail du com-

positeur. Il doit envisager en amont la formation

des ligatures et toujours gérer la composition dans

la ligne afin de ne pas couper une mesure en fin de

phrase. La composition de partitions au plomb n'a

pas été automatisée par les machines Linotype, elle

devait toujours se faire à la main, c'est l'une des rai-

sons qui explique sa disparition.

DIVISION D'UN CORPS EN QUATRE AUTRES

La portée du plain-chant comporte quatre filets, elle

doit donc être fondue sur un corps qui en porte exac-

tement quatre fois un autre, d’où leur appellation :

portée de quatre points de Nompareille. Pour ces por-

tées de quatre points : le quart est bien sûr la Nompa-

reille (6pt), la moitié le Cicéro (12pt), les trois-quarts

le Gros-romain (18pt) et la totalité la Palestine (24pt),

(le corps supplémentaire pour les allitérations est un

corps particulier de 30pt) *. La graduation est donc

de six points entre chaque filet de la portée, cette

mesure étant la plus courante pour l’impression des

livres de pupitres. Pour des recueils d’airs, on pouvait

choisir une graduation plus petite de quatre points :

Perle (4pt), Petit-Texte (8pt), Cicero (12pt) et Gros-Texte

(16pt), (corps supplémentaire : Petit-Parangon 20pt). Il

existait alors deux types de notes : les pleines et les

brisées. Les pleines étaient gravées entièrement sur

un plomb de la taille de la portée, les brisées étaient

décomposées en plusieurs parties *. Toutes les notes

courtes ou à queue, les allitérations et autres sym-

boles devaient avoir exactement la même graisse. Ce

même système était également appliqué aux parti-

tions composées sur des portées de cinq filets.

Découpage de la portée en 4 parties égales

6pt - 12pt - 18pt - 24pt - 30pt

Note pleine et note brisée

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Planches extraites du

Manuel typographique utile aux gens de lettres Volume II 1764 de Pierre Simon Fournier, présentant les différents poinçons

du nouveau système du typographe

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Casse de musique

photographiée au Musée de l’imprimerie de Nantes.

On peut observer des notes brisées, des notes pleines, des barres

de mesures hautes de cinq filets et des lignes de portée vierges.

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Composition au plomb photographiée au musée de l’imprimerie

de Nantes, on peut voir que certaines notes sont brisées quand

d’autres sont pleines.

Sur cette dernière image, les plombs d'une note brisée sortent

de la composition, ainsi on peut distinguer toutes les parties

qui composent la note.

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AbANDON DES PLOMbS

Le système de Fournier, bien qu'il soit ingénieux, n'a

pas perduré car il restait trop complexe et trop minu-

tieux à manipuler. En revanche, le procédé de gra-

vure en creux, plus simple et plus rapide, connu un

grand essor au XIXème siècle, sans pour autant deve-

nir une pratique totalement généralisée. On gravait

sur des plaques de cuivre, et plus tard sur un métal

plus tendre : un alliage d’étain et de plomb. Les lignes

de la portée étaient tracées avec un outil ligneur ou

tire-lignes *. Les clés, les notes et leurs queues, les

liaisons, les ligatures et les indications de mouve-

ment étaient frappées avec des poinçons. Et enfin

on poinçonnait les textes et les paroles *. On tirait

une épreuve de correction par voie typographique :

la plaque était entièrement recouverte d’encre dépo-

sée avec un rouleau encreur. Donc sur la feuille les

notes apparaissaient en blanc sur fond noir. Une fois

la planche terminée et corrigée, on encrait selon la

technique de la taille douce : cette fois l’encre se dé-

posait dans les creux, ainsi sur la feuille, la partition

et le texte étaient en noir sur fond blanc.

APRèS FOURNIER

Plaque d’alliage gravée

Gravure représentant un tire-ligne Fig 1

planche issue de l'EncyclopédieDiderot et d'Alembert

1767

Poinçon d’une blanche

photographié dans l’atelier de Vincent Auger à Paris.

COMPOSITION INFORMATIQUE

Aujourd’hui, de nombreux logiciels, tels que Sibelius™

et Finale™ *, permettent de composer une partition

en quelques clics. Les types de partitions sont pré-en-

registrés : pour piano (clé de sol - clé de Fa), pour du

chant (une portée + une ligne de texte)… Il suffit de

sélectionner un type de note, ronde, blanche, noire

ou autre et de la glisser sur la portée à l’endroit voulu.

L’ordinateur se chargera d’ajouter les liaisons auto-

matiquement. Urtext Music Software, par l’intermé-

diaire de la fonderie FontShop, vient de publier un

set de caractères de musique très complet, compre-

nant 160 glyphes *. Le dessin de ces nouvelles notes

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Aperçu d’un logiciel de composition musicale

se base sur celui qui a été utilisé pour l’impression

des œuvres complètes de Bach par la société Bach-Ge-

sellschaft dès 1851. Cette typographie est renommée

Urtext Kapellmeister, un kappellmeister désigne

une personne qui est chargée d'enseigner la mu-

sique, Jean Sébastien Bach a justement tenu ce poste

en 1717. Bien qu'elle soit inspirée d'un dessin très

ancien, cette typographie a un squelette très actuel

et offre tous les signes nécéssaires aux compositeurs

actuels.

Police de musique : Urtext Kapellmeister II OT

par Urtext Music Software

fonderie Fontshop

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CONCLUSION

Face à la complexification grandissante de l'écriture

des partitions musicales, Pierre Simon Fournier

Le Jeune a su trouver un système de composition

au plomb des plus ingénieux, permettant de former

toutes les figures rythmiques possibles. Réussissant

là où d'autres ont échoué, il proposa une compo-

sition graphique et un nouveau dessin de notes

véritablement modernes, proche de ceux encore

utilisés aujourd'hui. La notation musicale n'a cessé

d'être interrogée à travers les siècles : Rousseau a

ainsi rédigé en 1781, un Projet concernant de nou-

veaux signes pour la musique. Selon lui à partir de

simples chiffres allant de 1 à 7, on pourrait écrire

toute sorte de musique. Et plus proche de nous, dans

les années 50, John Cage, un compositeur New-Yor-

kais, a cherché de nouvelles solutions graphiques et

illustratives pour représenter la musique * inventant

pour cela d'étonnantes compositions non-linéaires et

abstraites.

Cartridge Music1960

John Cage

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bIbLIOGRAPHIE

Fournier le Jeune Pierre Simon

Manuel typographique utile aux gens de lettres &

à ceux qui exercent les différentes parties de l’Art

et de l’Imprimerie.

Paris, 1764

Fournier le Jeune Pierre Simon

Traité historique et critique sur l’origine et les pro-

grès des caractères de fonte pour l’impression de la

musique avec des épreuves de nouveaux caractères

de musique, présentés aux imprimeurs de France.

Paris, 1765

Gando François et Nicolas

Observations sur le traité historique et critique de

M. Fournier le jeune, sur l’origine et les progrès des

caractères de fonte pour l’impression de la musique.

Paris, 1766

Lefèvre Théotiste

Guide pratique du compositeur

et de l’imprimeur typographe.

Éditions Les Introuvables, 1999

Vervliet Hendrick D.L.

The Palæotypography of the French Renaissance.

Éditions BRILL 2008

SITOGRAPHIE

musicologie.org

jacques-andre.fr

wikipedia

(articles : partition, notation musicale,

Guido d’Arezzo, ligature, croche)

digirep.rhul.ac.uk

(site de la Royal Holloway University of London)

publishing.cdlib.org/ucpressebooks/

(site de l’Université de Californie présentant

le livre Italian Music Incunabula Printers and

Type de Mary Kay Duggan)

REMERCIEMENTS

Merci à l’atelier Vincent Auger pour m’avoir montré les poinçons de musique.

Merci au musée de l’Imprimerie de Nantes de m’avoir accueillie dans les réserves,

de m’avoir montré les plaques gravées, les compositions au plomb et la casse de musique.

Merci à Erell Guillemer et Michel Wlassikof d’avoir construit et suivi ce projet.

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LéNA LE POMMELET 2013