Paix_ et_Droit_ 1939_03_À propos de la mort du pape Pie XI

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Paix et droit (Paris) Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

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Paix et droit (Paris)

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

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Alliance israélite universelle. Paix et droit (Paris). 1921-1940.

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DIX-NEUVIEME ANNEE (Mensuel) Numéro 3 MARS 1939.

PAIX ET DROITORGANE DE L'ALLIANCE ISRAÉLITE UNIVERSELLE

Prix du Numéro

2 frases

RÉDACTION ET ADMINISTRATION : .

45, RUE LA BRUYÈRE — PARIS (IX')

Ai . jrrance 20 frasesA^Bnementl Etranger 25 franc.Compte chèques postaux

Alliance Israélite- 408-94- PARIS

SO M M Al RE

Bulletin Alfred BERL

A propos de la mort du Pape Pie XI E. LEVINAS

Autour de la « loi juive » en Hongrie L. G.

Lettre de Pologne : L'action de défense du judaïsme polonais Dr A. T.

La situation des juifs de Dantzig

En Roumanie : Les échos du discours du chancelier Hitler ISAS

La situation des juifs en Italie .

Message de I' « Alliance Israélite » à S. E. le Nonce du Pape à Paris

La question juive en TchécoslovaquieLe problème palestinien : La conférence de Londres

Dans la presse : Drames du racisme en Italie. — Le drame juif d'après M. Robert de

Beauplan dans la « Petite Illustration ». — Racisme et christianisme

Tableau des écoles de I' « Alliance Israélite »

BULLETIN

Pie XI et le judaïsmePie XI n'est plus : au deuil qui frappe toute la chré-

tienté ou pour mieux dire toute l'humanité civilisée, le

judaïsme mondial, que le Souverain Pontife défendit si noble-

ment, s'associe avec ferveur. L'Alliance Israélite eût failli àson devoir si elle n'avait apporté au glorieux disparu l'hom-

mage de sa profonde gratitude et de son immense regret.Le message que nous publions plus .loin, n'est qu'une faible

expression des sentiments qu'elle s'honore d'éprouver pourcette illustre mémoire.

. Si Pie XI fut un grand parmi les plus grands papes,c'est qu'il s'avéra non seulement un savant émérite, un

esprit supérieur, mais aussi une grande âme, un grandhumain.

Sa foi égalait sa science, et chez lui le caractère, laforce de volonté et l'amour des hommes surpassaient encore,si possible, l'intelligence. Encore que les jeux cruels de lapolitique eussent attristé sa vieillesse, son destin apparaîtenviable ; il lui fut donné de réaliser avant sa fin, les admi-rables virtualités que recelait sa riche et puissante person-nalité. Il eut la double gloire d'être à la fois l'interprète leplus haut d'un dogme absolu, et le protecteur de tous lesfaibles, de tous les opprimés ; le représentant infaillibled'une religion universelle et l'adversaire irréductible detoutes les persécutions. ;. ,'•;,.-,>•

En vertu d'une logique transcendante, que peu d'es-prits comprennent, il voyait dans l'Evangile une sourcede vérités religieuses et morales tutélaires pour l'humanité,mais aussi la confirmation et l'accomplissement des révéla-tions sublimes que le judaïsme et le Décalogue apportèrentau monde voici quelque trois mille ans.

Cette conception élargie de la religion unie à une inépui-sable charité F élevait au-dessus de toutes les intolérances etde tous les fanatismes. Son christianisme éclairé par lascience lui dicta son énergique réprobation du racisme,comme sa foi dans la justice du Créateur lui imposait decomprendre Israël dans sa sollicitude universelle pour toutesles créatures. « Nous sommes Sémites en esprit » disait-il,et tous les véritables Chrétiens Je pensent avec lui. Quantaux juifs, nul doute qu'ils ne gardent le souvenir vénéré dece Pape qui voulut justifier totalement son nom et s'affir-mer le père affectueux de tous, l'homme bon et saint à quirien d'humain ne saurait rester étranger.

II

En HongrieLa loi juive et la démission du président hnredy

Le projet de loi juive ou plutôt antijuive, dont Paix etDroit a indiqué clans ses derniers numéros les dispositionsfondamentales, est venu, après examen par les Commissionsparlementaires, à l'ordre .du jour du Parlement. En ce. mo-

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PAIX ET DROIT:

ment, c'est la Chambre basse qui a la parole. Nous avons 1

montré la lourde aggravation que le nouveau texte apportait \

au numerus elamus adopté au mois de mai : il ne s'agit

plus de limiter à 20 % l'activité du judaïsme hongrois clans ;tous les domaines : le projet en cours; de discussion constitue

un démarquage, presque aussi restrictif, du statut d'indi-

gnité de Nuremberg.Si les israélities du. royaume ne sont .pas absolument

déchus de la nationalité hongroise,, il s'en faut de bien peu,et leur disqualification n'est peut-être qu'une question de

temps. La loi les déclare « exclus de la 'collectivité nationale »

et les relègue dans une zone inférieure de l'Etat. L'accès

des services publics leur est complètement interdit ; les pro-fessions libérales sont ouvertes encore à un pourcentageinfime et chaque année décroissant jusqu'à l'exclusion totale.

La loi étant fondée sur le principe racial —• le toura-nisme se substitue ici à l'aryanisme, — le baptême ne

rachète point la tare originelle, s'il est de date trop récente.Est juif non seulement le pur-sang, mais le demi-sang. N'est

•reconnu chrétien, que celui dont les veines ne charrient pas

plus d'un quart de; sang sémite. Quelques exceptions sontadmises pour les services militaires éclatants, les blessures

graves reçues sur le champ -de bataille. Mais l'héroïsme lui- .

même ne protège que ses auteurs, non leur descendance.

L'opposition, — ce qui reste de l'ancien libéralisme hon-

grois, — et au premier rang le comte Bethlen, qui gouvernala Hongrie pendant nombre d'années —, a eu beau montrerles vices d'une telle loi, grosse de contradictions,, de contre-

vérités, de conséquences iniques et funestes où le ridicule le

dispute à l'odieux. Vains efforts ! Par cette loi, des prélatstrès élevés dans la hiérarchie catholique, mais issus d'unions ;mixtes, seront classés comme juifs ! Mieux encore : les des-cendants d'Israélites qui en 1848, sous Kossuth, ont combattu,versé leur sang et sacrifié leur vie pour l'indépendance de la ,Hongrie, seront rejetés hors la cité, hors l'Etat, hors la loi,

'

alors que les petits-fils des Allemands qui à la suite de l'Au-trichien Bach, écrasèrent l'insurrection nationale, sont habi-lités aujourd'hui à devenir les. maîtres du pays et à régirses destinées.

Protestations superflues, "éloquence en pure, perte !D'ores et déjà, la cause est entendue : Israël est condamnéd'avance. Néanmoins il n'est pas seul atteint ;. celui qui amené durement le mauvais combat, tombe à la veille du

triomphe. Il démissionne parce qu'il vient de faire unedécouverte grave, propre à le disqualifier à ses propres yeuxcomme aux yeux de son parti. Il a repéré —: un peu tardive-ment pour la vraisemblance — l'exactitude d'une accusation

qu'il avait jusqu'alors énergiquement démentie, à savoir quedans son ascendance maternelle il compte un. huitième de

sang' juif : il ne peut donc plus diriger la croisade sacrée, etson parti s'incline.

L'opinion reste assez sceptique quant au prétendu motifde cette retraite, plus ou moins volontaire. De tout temps,l'aristocratie magyare s'est montrée trop fière de ses. origi-nes pour en ignorer les moindres particularités, à plus forteraison, une aussi importante. Deux hypothèses sont plausi-bles : ou le président Imredy appréhendait de la part d'ad-versaires politiques cette révélation, avec preuve à l'appui,et a préféré prévenir l'attaque que la subir ; ou, ce quiserait plus probable,, il a saisi un prétexte sensationnel pouréchapper à une crise qu'il sentait prochaine, par le faitd'une opposition sourde, d'abord, mais qu'il sentait grandiret menacer. Sûre, dans la question juive, la înajiorilé gou-vernementale semblait prête à un prochain revirement hos-

tile, dans une autre question à l'ordre du jour, celle de la

réforme' agraire, chère aux extrémistes.Il s'agirait de partager lès biens imanotoilers possédés;

par les juifs. La Chambre basse et surtout la Chambre Haute,

composée d'aristocrates qui ont contracté de fréquentesalliances avec les riches familles israélites, manquent d'en-

thousiasme pour, une mesure aussi hasardée. Quelques-unss'y ralliaient comme à un dérivatif opportun, un vaccinsalutaire- contre l'envie et la haine des classes déshéritées :

les autres, plus, clairvoyants, ne pensent pas de même : ils

considèrent la confiscation des biens juifs non comme une-diversion profitable, mais comme un dangereux précédent.Après la spoliation des juifs viendra le tour des chrétiens, :comme la vue du sang excite la fureur du fauve, l'appétitpopulaire s'aiguise en mangeant.

Imredy a perçu l'imminence de la crise et a. jugé expé-dient de se dérober. Son successeur, Teleki, n'est pas moins,

antisémite, mais il est plus conservateur : alors que le pre-mier ou sa police ne parvenait pas à découvrir lès auteursde l'explosion meurtrière devant Ta Synagogue de Budapest,.lie nouveau président les a.'fait arrêter-, dans les vingt-quatreheures qui ont suivi son- accession au pouvoir-. De plus, il -a

prononcé et réalisé la dissolution eu parti naziste, s'avé-rant ainsi moins, docile à l'agitation raciste qu'aux sugges-tions- du nationalisme conservateur des Hungaristes. Ce n'ejt

pas que l'Etat, magyar soit aujourd'hui en état de faireéchec à la main-nrise du Reick ; sa faiblesse économique luiinterdit actuellement cette illusion ; mais il ne lui est pas-impossible, par la conjonction de sérieux efforts et d'uneheureuse constellation diplomatique, sinon de s'en libérer

; intégralement, du moins d'en desserrer l'étreinte. La colla-boration de l'élément israélite lui serait, dans cet ordre dé-faits, d'un rendement, utile et fécond, si la passion anti-

, juive consentait à désarmer.

Etrange époque où par la perversion des fausses idéolo-gies et des phraséologies creuses, tous les rôles sont inter-

; vertis ; où contre les bas instincts, les viles convoitises des.; masses ignorantes et fanatisées, où contre les appétits et les: haines de race camouflées en-mystiques plus ou moins désin-

téressées, la plus grande autorité dogmatique qui soit aumonde se dresse comme l'ultime défenseur des libertés indi-viduelles,, comme la sauvegarde des élites et connue lesuprême espoir des valeurs spirituelles qui font le prix del'existence, à savoir, les droits de la, conscience: et de lapersonne humaine.

III

En Tcnéco-Sl'ovaquieLe peuple qui fut ?....Dans une des nouvelles; les. plus poignantes qu'il ait

écrites (1), Kipling a raconté l'histoire d'un officier anglais,porté disparu en 1854 après une bataille livrée en Crimée..En réalité cet officier a été fait prisonnier par les Russes..Trente ans après, par une suite de hasards extraordinaires,,il reparaît à Peschaver, au mess du régiment où il étaitlieutenant, en 1854. Ses camarades parviennent à l'identifier ;;mais il est mourant : ayant été: déporté en Sibérie parlé caprice barbare d'un colonel russe, il y a passétrente années. 11 peut à peine pa.rler sa langue mater-nelle, qu'il a, oubliée. On découvre que. son corps: est zébrépar le knout. Les traitements atroces dont il; a été victime

de Frmw'eh0l"w^ /M*" Traduit par les E<*itioas du. Mercure

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=3 PAIX ET DROIT

ont oblitéré sa mémoire et sa raison ; ce n'est plus unhomme, mais une loque humaine : l'homme qui fui.

La nation tchèque, en proie à la brutalité raciste,va-t-elle devenir aussi « le peuple qui fut » ? Il estpermis de se poser la question. Ce n'est pas assez pourle gouvernement nazi d'avoir arraché à la Tchéco-Slc-vaquieses plus riches provinces, de lui avoir pris sa frontière, del'avoir amputée du quart de sa population, de l'avoir spo-liée de ses industries les plus florissantes ; il prétend, aumépris des plus solennels engagements, interdire de vivreune vie indépendante aux populations tchèques qu'il n'apas officiellement annexées. Après les avoir dépouillées ma-tériellement, il veut leur voler leur âme. Les Tchèques s'enor-gueillissaient d'avoir fondé un pays libre, démocrate, égali-taire au point de vue politique, social et confessionnel. A cetidéal le Reieh oppose le sien, le totalitarisme exclusif et ladoctrine raciste. Prague se mettra au pas ou cessera d'exis-

ter. Après tant de gages d'obéissance déjà concédés, Berlin

en exige un autre, une législation antijuive, à l'image de

celle de Nuremberg.Le peuple tchèque, diminué, abandonné de tous, osera-

t-il, pourra-t-il résister à la pression du Moloch qui domine,en attendant qu'il la dévore, l'Europe centrale ? La férocité

méthodique du Germain raciste aura-t-elle raison de l'opi-niâtreté proverbiale du Tchèque ? C'est le secret de demain.

L'antisémitisme auquel la Bohème slave s'était jusqu'icimontrée réfractaire, commence à s'installer sur les rives de

la Moldau, avec les excès, les injustices et les hontes dont il

est ooutumier : c'est une pierre de touche révélatrice de

la santé politique et morale, de la vitalité économique etfinancière des Etats. Puisse l'Etat tchèque sortir indemnede l'épreuve et sauver l'âme nationale !

Alfred BERL.

A PROPOS DE LA MORT DU PAPE PIE XI

La très sincère émotion que la mort de Sa SaintetéPie XI a suscitée dans le monde juif ne procède pas unique-ment de notre admiration pour la grande figure du Pontifedisparu. Il a été « un moment de la conscience humaine »,mais la gratitude pour celui qui a eu le courage de dire lavérité, n'a pas été le seul motif de notre tristesse. Nous avonsété remués plus profondément. Comme si d'autres liens nousrattachaient à tout ce qu'il représentait, comme si nousavions été frappés dans notre intimité même.

Attitude inexplicable si le christianisme demeuraitpour nous ce qu'il nous apparut pendant longtemps, cequ'il restait dans nos souvenirs. Persécuté au cours dessiècles par les peuples qui se disaient chrétiens, le judaïsmedistinguait à peine sur le visage sévère de l'Eglise triom-phante les traits d'une religion autrefois issue de lui. Nonpas que la souffrance ait obnubilé son esprit, non pasqu'elle ait provoqué une haine ou un désir de vengeanceà l'égard de ceux qui l'infligeaient. Le monde, par sesaspirations, par sa morale, par les forces qui le conduisaient,affirmait ses origines païennes. Il semblait dominer l'Egliseplutôt que dominé par elle. L'institution merveilleusementassise sur les hases de la civilisation médiévale dissimulaittrop bien la lutte qu'elle menait contre la barbarie. D'oùcette solitude d'Israël qui caractérise le plus .fidèlementpeut-être son sentiment de la vie au cours des siècles. Lacroix qui surmontait les icathédrales, surmontait les villes.Elle symbolisait sous le ciel un monde qu'Israël ne compre-nait pas.

II ne le comprenait pas, car le judaïsme n'est, en fin decompte, que l'antipaganisme. Il est l'antipaganisme parexcellence. Mais il ne s'oppose pas à des dogmes théoriqueset son hostilité au polythéisme n'est pas son apport le plusoriginal. La lumière naturelle arriverait sans le secoursde la révélation à l'idée d'un Dieu un. L'antipaganisme juifest une manière de vivre et de sentir. H rejette tout unensemble d'éléments dont il est assez malaisé de donnerune définition, qui plongent cependant dans une atmosphèrecommune. Et de cette atmosphère, il ressent instantanémentl'étrangeté. C'est tout ice qui se rapporte à l'épanouissementnaturel de l'être qui se complaît dans sa nature. C'est leculte de la puissance et de la grandeur terrestre, la légitimitépour la force de s'affirmer comme force, c'est aimer et haïrspontanément, monter à cheval, chasser, guerroyer joyeuse-ment, c'est le don de se trouver bien installé dans le réel.

Notions qui se rapportent à ce qu'on est convenu depuisNietzsche d'appeler la « morale des maîtres » et qui, plusque la «libre ipensée » ou l'athéisme, affranchissent de l'in-

quiétude religieuse. Elles ne manquent ni de grandeur nid'élévation peut-être. Mais, en face d'elles, le message du

judaïsme est nn paradoxe et une folie. C'est une folie que detenir à une élection qui ne se manifeste que par la souf-

france, de se situer au noeud de l'histoire universelle sansavoir jamais connu d'indépendance politique réelle, de

séparer la dignité humaine de la puissance et du succès.L'avènement du racisme en Allemagne, le prestige qu'il

acquiert dans le monde apparaissent à la conscience juivecomme l'apothéose de tout ce qui, dans la réalité, est à

l'antipode du judaïsme, comme la cristallisation de la<( morale des maîtres », latente dans l'univers qui prendconscience du refus qu'elle oppose à l'appel du judaïsme,avoue ce refus et s'en glorifie. Dès lors, malgré toutes lesconsidérations sur les causes économiques, politiques etsociales du national-socialisme à la lumière desquelles lespersécutions raciales ne sont qu'un accident dans la tour-mente du monde moderne, les juifs ont le sentiment obscurque l'hitlérisme est comme un rappel de leur voca-tion et de leur destin. Us situent à nouveau leur mal dans lesperspectives de l'Histoire Sainte.

Mais le triomphe du national-socialisme nous rend aussicompréhensible la mission religieuse de l'Eglise. Le retourd'un monde réfractaire à la Bible, à sa condition naturellefait éclater le drame secret que l'Eglise portait en elle. Sonpacte avec le monde profane a été une guerre contre lui.Sous son manteau à nouveau déchiré par la persécution,nous apercevons la marque indélébile de sa naissance juive.Ce que nous savions déjà par l'histoire de son origine, ceque la théologie nous apprenait sur sa tâche parmi lesnations, nous le saisissons brusquement d'une manièreimmédiate, sensible, directe.

Certes notre chemin nous conduit ailleurs. Nous passonsà côté de la Croix, nous n'allons pas vers elle. Mais cettehorreur sacrée que les frères Tharaud ont cru avoir observéeun jour chez tel enfant du ghetto polonais, nous ne l'éprou-vons pas lorsque « l'ombre de la Croix » nous couvre pourun instant. Et dans un monde de plus en plus hostile, qui seremplit de swastika's, c'est vers la Croix à branches droiteset pures que nous levons souvent les yeux.

E. LEVINAS.

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PAIX ET DROIT:

Dans notre 'dernier article, nous annoncions que la « loi

juive ». après de laborieuses négociations, s'est trouvée sou-

mise à la. Chambre Basse de Budapest. Un mois s'est passé

depuis lors, lès événements ont marché, bien; des; boulever-semenfe se sont produits e» Hongrie,, mais, la «, loi juive »

à peu .près, intacte,, se trouve encore devant les, Chambres, oùelle fait l'objet d'âpres discussions..

Le; fait le plus, marquant de révolution de la politique

hongroise est la retentissante démission de M. Bêla Imredy,Président du Conseil, promoteur de la « loi juive ». Celui-ci,au cours d'une réunion dramatique du parti gouvernemental,déclara aux députés du parti, le 15 février-dernier, qu'ayantdécouvert les origines juives de l'un de ses arrière-grands-pères maternels, et possédant par conséquent un huitième de

sang juif dans les veines-, il ne se considérait plus comme-moralement autorisé à présider aux destinées d'un gouver-nement dont la tâche la plus urgente était la réglementationde la question juive dans un esprit raciste.

On s'imagine la stupeur produite par cette déclaration.Les députés du parti gouvernemental proclamèrent qu'ilss-'inclinaient devant la douloureuse décision prise par le Pré-sident du Conseil et qu'ils rendaient hommage à ses scru-

pules. Le Cabinet présenta alors sa démission au Piègent,qui' ^dénoua rapidement la crise- en appelant au pouvoir lecomte Paul Telelii. Celui-ci constitua sans tarder son gouver-nement avec les membres- du Cabinet précédent, auxquelsvint s'ajouter M. Homan, au poste de ministre des Cultes,précédemment détenu par le comte Teleki lui-même.

Mais aussitôt le nouveau cabinet formé, les, commentai-res allèrent leur train, à Budapest.. Les lointaines originesjuives de l'ancien Président du Conseil étaient-elles les seulesraisons de s'a démission ?.

II se: trouva des, observateurs pour souligner que les

motifs du changement de cabinet pourraient être cherchésailleurs. Depuis de nombreuses années,, en effet, en matièrede recherches généalogiques, les Hongrois, ont mis presqueautant de zèle que les Allemands. Dans la vie politique sur-

tout, il est pratiquement indispensable aujourd'hui de con-naître parfaitement ses aïeux. En ce qui concerne M. Imredylui-même, ses adversaires avaient lancé déjà à plusieurs re-

prises le bruit que ses origines n'étaient pas purement aryen-nes, allégations que le Président dû Conseil avait toujoursrepoussées, avec un luxe de documents à l'appui, et toutrécemment encore, dans un grand discours. On peut doncs'étonner que M. Imredy n'ait découvert ce malencontreuxaïeul que ces jours derniers.

Ces mêmes observations mettent en lumière le fait, assezpeu connu à l'étranger, que, depuis quelques semaines, M.Imredy se heurtait à. une opposition d'abord sourde, puis deplus en plus énergique, de la part des membres de la ChambreHaute. Ceux-ci avaient même mis le cabinet en minorité, surune question d'importance secondaire (tes cumuls d'emploi),huit jours avant le coup de théâtre du 15 février.

La raison de cette attitude d?opposilion aurait découlédu fait que M. Imredy, poussé par les extrémistes, se mon-trait de plus en plus partisan d'une réforme agraire assezétendue qui ne pouvait évidemment soulever l'enthousiasmedes aristocrates et des grands propriétaires fonciers qui siè-gent à, la Chambre Haute et ont, par ailleurs, de nombreuxreprésentants à la Chambre Basse. Ceux-ci auraient accepté,à la rigueur, la loi juive élaborée par le gouvernement,, sansplaisir d'ailleurs, étant donné qu'ils sont fréquemment alliésà de grandes familles juives du pays. Mais ils considéraientavec méfiance les perspectives qu'allait ouvrir cette loi au

partage des terres possédées par les juifs, premier pas vers-une réforme agraire contre laquelle ils s'élèveraient avec

énergie si elle devait être exécutée sur une vaste échelle.

Tout se passe aujourd'hui comme si le chef du nouveau

gouvernement hongrois, qui appartient, ne l'oublions, pas àla vieille aristocratie, avait compris à quelle puissance, il ris-

quait de se heurter. Dams son premier discours devant leParlement, il a affirmé avec vigueur qu'il persévérerait d'ansle» politique; de son prédécesseur relativement à la « loi

juive »,et à la réforme agraire. Mais alors qu'il y a tout lieude croire que M. Teleki — qui fut, il y a dix-huit ans l'insti-

gateur du numerus elamus en Hongrie — se montrera effec-tivement d'une grande- fermeté: en ce: qui concerne la « loijuive », il est permis 'de se demander s'il usera de la mêmefermeté pour ce qui est de la réforme agraire. N'a-t-il pasajouté en termes nuancés : « Il ne s'agit pas de partages nide distributions gratuites comme-le prétendent certains, quiprouvent ainsi, à la* fois, leur incompréhension et leur incom-pétence », et qu' c<un vrai Hongrois ne saurait se laisserprendre à de telles formules » !

Quoi qu'il en:soit, tous ces incidents;.ont. démontré, que la,-.question juive en Hongrie,, discutée; au milieu du débordementdès passions, reste, étroitement liée à .d'autres, problèmes, etfournit dans la lutte politique une. monnaie d'échange et desprétextes, commodes-..

Cette constatation nous conduit tout droit au- secondgrand événement de- la politique hongroise, lié, lui aussi, àlà question juive : là dissolution du Parti national-socialistedes Croix Fléchées.

Au lendemain dé l'attentat devant la synagogue dé Bu-dapest, qui ,fit de nombreux blessés, dont certains sont encoreaujourd'hui entre la. vie et la mort, la. police entreprit unevaste-enquête. Par une curieuse coïncidence, celle-ci-aboutitvingt-quatre heures après le départ de M. Imredy. Les au-teurs de l'attentat furent arrêtés et l'a police réussit à obte-nir les (preuves de ce que tout- le monde savait déjà, à savoirque cet acte de terrorisme avait été commis par des nazishongrois appartenant à une- sous-organisation secrète : le« Front Noir ». Le gouvernement de-M. Teleki découvrit alorsque le national-socialisme hongrois menait une politiquesubversive, allant à f'encontre de l'ordre établi, et interdit leparti. Après des perquisitions, effectuées en cent vingt-cinqlocaux rien qu'à Budapest, les quarante-sept chefs subalter^-nes du mouvement furent arrêtés.

Cette fois-ci encore, la même question se pose : l'inter-diction du parti nazi a-t-elle été réellement provoquée par laparticipation active de ses membres à l'attentat ou bien parceque les troupes « hungaristes » exigeaient des solutions1"qua-lifiées d'extrémistes par le gouvernement, non seulementdans la question juive, mais aussi dans d'autres domainesde 3a vie politique ? On peut d'autant, plus se 1e demanderque, pour ce qui est de la question juive, les divergencesentre les nazis et 3e gouvernement Teleki ne sont pas fonda-mentales puisque le gouvernemnt prend à son compte unegrande partie des revendications nazies dans le but — paraît-il— de diminuer la. force d'attraction de ce mouvement. ..

Nous, en arrivons ainsi aux avatars subis par la « loijuive » au cours du dernier mois. Pendant les débats, à laCommission Pléniére de la Chambre qui. eurent lieu sous legouvernement Imredy, la question fut traitée à fond et fi,t3"objet de nombreuses, interventions pathétiques. L'une.desdispositions dé la loi. provoqua., notamment l'indignation, dujudaïsme hongrois : celle qui allait obliger les israélites du

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PAIX ET DROIT;

pays à voter désormais sur une liste spéciale où électeurs etélus seraient exclusivement juifs.

Aprement combattu par l'opposition, le gouvernementdécida enfin d'apporter certaines modifications à la loi,•notamment en ce qui concernait la situation des « demi-

sang », certaines*catégories de mutilés de guerre, les conseil-lers privés de la couronne «t les professeurs à l'Université-d'origine juive. Cependant, tous ces adoucissements ne chan-

geaient rien à l'esprit raciste de la loi, et ne visaient qu'unnombre d'individus assez restreint. Les juifs conseillers pri-vés du gouvernement sont très peu nombreux, et ont chère-ment acheté leur titre ; quant aux professeurs d'Universitéd'origine juive, ils ne sont que quatorze.

Sur un seul point, le gouvernement a admis l'argumen-tation de l'opposition en renonçant à la liste juive:, mais cene fut pas pour améliorer cette disposition, loin de là, et lesisraélïtes hongrois qui, à l'annonce de cette nouvelle,s'étaient d'abord réjouis, durent ensuite déchanter. En effet,selon l'amendement gouvernemental, les juifs pouvaient votersur n'importe quelle liste,, comme tout autre citoyen,, maisseuls avaient droit de vote ceux qui pouvaient prouver queleurs parents, tant du côté maternel .que paternel, vivaient-en Hongrie, de façon permanente, depuis au moins 1S67.Il va sans dire qu'outre les difficultés qu'il y aurait à four-

nir ces preuves formelles de résidence, le gouvernement,dernier juge en la matière, aurait toujours beau jeu de ré-cuser les candidats-électeurs qui lui déplairaient.

Cependant, Je projet de loi passa tel .quel devant lacommission plénière de la Gljambre ; le gouvernement Telekile reprit à son compte, et à l'heure où nous écrivons, la dis-cussion bat son plein à 3a Chambre Basse. L'oppositioncompte présenter un certain nombre de modifications, maisil est douteux qu'elle puisse faire prévaloir son avis sur lespoints importants.

En attendant, la détresse du judaïsme hongrois -aug-mente sans cesse. Les suicides deviennent fréquents, et onlit de plus en plus souvent dans les rubriques nécrologiquesdes quotidiens cette formule éloquente : « décédé subite-ment ». En janvier dernier, le nombre des suicides à Buda-pest fut double de celui de l'année dernière pour le mêmemois. Devant les consulats étrangers stationnent de longuesfiles d'infortunés qui, menacés de perdre tous moyens d'exis-tence par la « loi juive », sont contraints d'émigrer.

Et, indice moins frappant peut-être mais tout aussi si-gnificatif, certains journaux ont renoncé à publier leur feuil-leton quotidien pour consacrer cet emplacement à l'enseigne*ment des langues étrangères...

L.-G.

I/acfion de défense du judaïsme polonais

Un devoir impérieux s'impose au judaïsme polonais :

.grouper toutes ses forces en vue d'organiser une lutte efficace•contre l'antisémitisme qui, de jour en jour, prend plusd'ampleur. A un moment où la Pologne est aux prises avecdes difficultés économiques d'une extrême gravité, où des

-questions vitales se posent pour elle sur le plan politiqueintérieur et extérieur, les dirigeants responsables et le

gouvernement ne semblent préoccupés que d'un seul pro-blème : le problème juif. Sans doute, sous la pression duministère des Affaires étrangères, qui ne 'désirait pas se

çompromettre aux yeux des Etats démocratiques, les projetsde loi relatifs à la dénationalisation des juifs polonais ont-ils•été provisoirement relégués à l'arrière-plan. H se peut aussi

-qu'on redoutait des représailles économiques de la part des

puissances démocratiques qui, eu égard à la détresse écono-

mique de la Pologne et à la failjlesse de sa monnaie, pour-raient avoir des conséquences .catastrophiques. Mais lacampagne d'excitation contre les juifs se poursuit avec toutesa véhémence et si, en principe, les juifs sont encore descitoyens, pratiquement, ils sont dépossédés de presque tousleurs droits.

Au Sejm, l'antisémitisme continue à être /pratiquécomme un véritable sport. Compétent ou ignorant enmatière économique, chacun considère de son devoir deparler de la « nationalisation » du pays et de la nécessited'une émigration forcée 'des juifs. Le récent débat budgé-taire en a été une nouvelle illustration. Le niveau moral etintellectuel du Sejm n'a jamais été aussi lias qu'actuelle-ment. Jadis, il se trouvait du moins, de temps en temps,quelque député animé d'un esprit de justice pour stigmatisercourageusement les bassesses de la politique antijuive.Aujourd'hui, plus aucune voix ne s'élève contre les iniquitéscommises par l'Assemblée et contre les accusations calom-nieuses lancées contre l'élément israélite. Les quelquesdéputés juifs qui essayent de défendre la dignité de leurscoreligionnaires sont conspués

'Quelle triste image se ferait le spectateur du niveaude la culture polonaise s'il voulait juger uniquement d'aprèsles débats qui se déroulent au .Sejm ! Sans doute, les élé-ments démocrates, socialistes et même paysans, qui luttentpour une Pologne nouvelle, représentent-ils une forcemorale. Mais ce qui compte pour l'extérieur, c'est le natio-nalisme étroit et agressif des nationaux-démocrates et duparti gouvernemental, véritable honte de la culture polonaise.C'est contre eux que le judaïsme polonais doit mobilisertoutes ses forces pour prévenir un effondrement dont ledanger est imminent.

Ce front de défense doit se réaliser en premier lieu dansle domaine économique. La question de retirer aux juifsleurs droits civiques ayant passé, pour l'instant, à l'arrière-plan, les agitateurs antisémites se sont assigné comme butessentiel l'éviction totale de l'élément juif de l'activitééconomique. C'est 'le seul champ d'action qui leur reste,l'éviction de lia vie culturelle 'étant déjà un fait accompli.En effet, la plupart des écoles supérieures sont fermées auxjuifs, l'introduction des bancs de ghetto est généralisée, lesagressions contre les étudiants juifs sont devenues quoti-diennes. Le ministre de l'Education nationale, qui a pris3a parole au Sejm pour décrire la situation aux Universités,s'est indigné exclusivement contre les excès physiques qui,il y a quelques semaines, ont coûté la vie à deux jeunesIsraélites. Pas un mot de condamnation pour les bancs deghetto ou pour l'accès interdit aux juifs dans la. plupart desécoles supérieures. Non seulement on ferme aux étudiantsjuifs les portes des Universités, mais on refuse de recon-naître les diplômes qu'ils ont acquis à l'étranger. Plus dequatre cents-médecins juifs ayant acquis leur titre à l'étran-ger sont ainsi condamnés à la famine, parce qu'on refusedeiiostrifier leur diplôme. Us ne trouvent même pas d'emploidans les hôpitaux comme auxiliaires. Voilà la manière donton résout en Pologne la question des étudiants juifs.

Il serait donc difficile d'innover dans ce domaine. Par

Page 8: Paix_ et_Droit_ 1939_03_À propos de la mort du pape Pie XI
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PAIX ET DROIT;

ment, c'est la Chambre basse qui a la parole, Nous avons

montré la: lourde aggravation que le nouveau texte apportait,au numems clausus adopté au mois de mai : il ne s'agit

plus de limiter à 20 % l'activité du judaïsme hongrois dans

tous les domaines : le projet en cours; de discussion constitue

un démarquage, presque aussi restrictif, du statut d'indi-'

gnité de Nuremberg..Si les Israélites du royaume ne. sont «pas absolument

déchus de la nationalité hongroise, il. s'en, faut de bien peu,et leur disqualification n'est peut-être qu'une question de

temps. La loi les déclare « exclus de la collectivité nationale »

et les relègue dans une zone inférieure de l'Etat. L'accèsdes services publics leur est complètement interdit ; les pro-fessions libérales sont ouvertes encore à un pourcentageinfime et chaque année décroissant jusqu'à l'exclusion totale.

La loi étant fondée sur le principe racial —- le toura-nisme se substitue ici à l'aryanisine, — le baptême nerachète point la tare originelle, s'il est de date trop récente.Est juif non seulement le pur-sang, mais le demi-sang. N'estreconnu chrétien, que celui dont les veines ne charrient pasplus d'un quart de sang sémite. Quelques exceptions sontadmises pour les services militaires éclatants, les blessures

graves reçues sur le champ de bataille. Mais l'héroïsme lui-même ne protège que ses auteurs, non leur descendance.

L'opposition, — ce.qui reste de l'ancien libéralisme hon-

grois, — et au premier rang le comte Bethlen, qui gouvernala Hongrie pendant nombre d'années —, a eu beau montrerles vices d'une telle loi, grosse de contradictions,, de contre-vérités, de conséquences iniques et funestes, où le ridicule le

dispute à l'odieux. Vains efforts ! Par cette loi, des prélatstrès élevés,dans la hiérarchie catholique, mais issus d'unionsmixtes, seront classés comme juifs ! Mieux encore : les des-cendants d'Israélites qui en 1848, sousKossuth, ont combattu,A'erséleur sang et sacrifié leur vie pour l'indépendance dé là

Hongrie, seront rejetés hors Ja cité, hors l'Etat, hors la loi,alors que les petits-fils des Allemands qui à la suite de l'Au-trichien Bach, écrasèrent l'insurrection nationale, sont habi-lités aujourd'hui à devenir les, maîtres du pays et à régirses destinées.

Protestations superflues,"éloquence en pure perte !

D'ores et déjà, la: cause est entendue •. Israël est condamnéd'avance. Néanmoins il n'est pas seul atteint ; celui qui amené durement le mauvais combat, tombe à la veille dutriomphe. Il démissionne parce qu'il vient de faire unedécouverte grave, propre à Je disqualifier à ses propres yeuxcomme aux yeux de son parti. Il a repéré — un peu tardive-ment pour la vraisemblance — l'exactitude d'une accusationqu'il avait jusqu'alors énergiquement démentie, à savoir quedans son ascendance maternelle il compte un huitième desang-juif : il ne peut donc plus diriger la croisade sacrée, etson parti s'incline.

L'opinion reste assez sceptique quant au prétendu motifde cette retraite, plus ou. moins volontaire. De tout temps,l'aristocratie magyare s'est montrée trop fière de ses.origi-nes pour en ignorer les moindres particularités, à plus forteraison, une aussi importante. Deux hypothèses sont plausi-bles : ou le président Imredy appréhendait de la part d'ad-versaires politiques cette révélation, avec preuve à l'appui,et a préféré prévenir l'attaque que la subir ; ou, ce quiserait plus probable,, il a saisi un prétexte sensationnel pouréchapper à une crise qu'il sentait prochaine, par le faitd une opposition sourde d'abord, mais qu'il sentait grandiret menacer Sûre..dans la question juive,, la majorité, gou-vernementale semblait prête à un prochain revirement hos-

tile, dans une autre question à l'ordre du jour, celle de la

réforme agraire, chère aux extrémistes.Il s'agirait de partager les biens immobilers possédés;

par les juifs. La Chambre basse et surtout la Chambre Haute,

composée d'aristocrates qui ont contracté de .fréquentesalliances avec les riches familles israélites, manquent d'en-

thousiasme pour, une mesure aussi hasardée. Quelques-unss'y ralliaient comme à un dérivatif opportun, un vaccin

salutaire contre l'envie et la haine des classes déshéritées :

les autres, plus, clairvoyants, ne pensent pas de même : ils

considèrent la confiscation des biens juifs non comme une-

diversion profitable, mais comme, un dangereux précédent.Après la spoliation des juifs viendra: le tour des chrétiens: :comme la vue du sang excite la fureur du fauve, l'appétitpopulaire s'aiguise en mangeant.

Imredy a perçu l'imminence de la crise et a.jugé expé-dient de se dérober. Son successeur, Teleki, n'est pas moins-

antisémite, mais- il est plus conservateur : alors que le pre-mier ou sa police ne parvenait pas à découvrir les auteursde l'explosion meurtrière devant la Synagogue de Budapest,le nouveau président les a fait arrêter, dans les vingt-quatreheures qui ont suivi son accession au pouvoir-. De plus, il a

prononcé et réalisé, la dissolution: du parti naziste-, s'avé-rant ainsi -moins docile à l'agitation raciste qu'aux sugges-irions du nationalisme conservateur des Hungaristes. Ce ii'eotpas que l'Etat, magyar soit aujourd'hui en état de faireéchec à la main-mise du Reich ; sa faiblesse économique luiinterdit actuellement cette illusion ; mais il ne lui est pas-impossible, par la, conjonction de sérieux efforts et d'uneheureuse constellation diplomatique, sinon de s'en libérer

; intégralement, du moins d'en desserrer l'étreinte. La colla-boration de l'élément Israélite lui serait, dans cet ordre de-faits, d'un rendement, utile et fécond, si la passion anti-

, juive consentait à désarmer.i

Etrange époque où par la perversion des fausses idéolo-gies et des phraséologies creuses, tous les rôles sont inter-vertis ; où contre les bas instincts, les viles convoitises desmasses ignorantes et fanatisées, où contre les appétits et leshaines de race camouflées en mystiques plus ou moins désin-téressées, la plus grande autorité dogmatique qui soit aumonde se dresse comme l'ultime défenseur des, libertés indi-viduelles,, comme la sauvegarde ides élites et comme lesuprême: espoir des valeurs spirituelles qui font le prix del'existence, à savoir, les droits de la conscience: et de lapersonne humaine.

III

En Tcliëco-SIovaquieLe peup3e qui fut ?....

t Dans une des nouvelles; les. plus poignantes qu'il aitécrites (1), Ki-plmg a raconté l'histoire d'un officier anglaisporte disparu en 1854 après une bataille livrée en Crimée'En réalité cet officier a été fait prisonnier par les Russes1rente ans après, par une suite de hasards extraordinaires"il reparaît à Peschaver, au mess du régiment où il étaitlieutenant, en 1854. Ses camarades parviennent à l'identifier-mais il est mourant : ayant été. déporté en Sibérie oarle caprice barbare d'un colonel russe, il v a m«*trente années. Il peut à peine parler sa langue mater-nelle qu'il a oubliée. On découvre que son corps est zébré

ï^\^mLU^^mm%atr00esdGnt;il;J^HiSe

de iïiS0™*qUi ^ TïaÛm Par les Edifâ0^ du- Mercure

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^PAIX ET DROIT

ont oblitéré sa mémoire et sa raison ; ce n'est plus un

homme, mais une loque humaine : l'homme qui fui.La nation tchèque, en proie à la brutalité raciste,

va-t-eUe devenir aussi « le peuple qui fut » ? Il estpermis de se poser la question. Ce n'est pas assez pourle gouvernement nazi d'avoir arraché à la Tchéco-Slovaquieses plus riches provinces, de lui avoir pris sa frontière, del'avoir amputée du quart de sa population, de l'avoir spo-liée de ses industries les plus florissantes ; il prétend, au

mépris des plus solennels engagements, interdire de vivreune vie indépendante aux populations tchèques qu'il n'a

pas officiellement annexées. Après les avoir dépouillées ma-tériellement, il veut leur voler leur âme. Les Tchèques s'enor"gueillissaient d'avoir fondé un pays libre, démocrate, égali-taire au point de vue politique, social et confessionnel. A cetidéal le Reich oppose, le sien, le totalitarisme exclusif et ladoctrine raciste. Prague se mettra au pas ou cessera d'exis-

ter. Après tant de gages d'obéissance déjà concédés, Berlin

en exige un autre, une législation antijuive, à l'image de

celle de Nuremberg.Le peuple tchèque, diminué, abandonné de tous, osera-

t-il, pourra-t-il résister à la pression du Moloch qui domine,en attendant qu'il la dévore, l'Europe centrale ? La férocité

méthodique du Germain raciste aura-t-elle raison de l'opi-niâtreté proverbiale du Tchèque ? C'est le secret de demain.

L'antisémitisme auquel la Bohème slave s'était jusqu'icimontrée réfractaire, commence à s'installer sur les rives de

la Moldau, avec les excès, les injustices et les hontes dont il

est coutumier : c'est une pierre de touche révélatrice de

la santé politique et morale, de la vitalité économique et

financière des Etats. Puisse l'Etat tchèque sortir indemne

de l'épreuve et sauver l'âme nationale !

Alfred BERL.

A PROPOS DE LA MORT DU PAPE PIE XI

La très sincère émotion que la mort de Sa SaintetéPie XI a suscitée dans le monde juif ne procède pas unique-ment de notre admiration pour la grande figure du Pontifedisparu. Il a été « un moment de la conscience humaine »,mais la gratitude pour celui qui a eu le courage de dire lavérité, n'a pas été le seul motif de notre tristesse. Nous avonsété remués plus profondément. Comme si d'autres liens nousrattachaient à tout ce qu'il représentait, comme si nousavions été frappés dans notre intimité même.

Attitude inexplicable si le christianisme demeuraitpour nous ce qu'il nous apparut pendant longtemps, cequ'il restait dans nos souvenirs. Persécuté au cours dessiècles par les peuples qui se disaient chrétiens, le judaïsmedistinguait à peine sur le visage sévère de l'Eglise triom-phante les traits d'une religion autrefois issue de lui. Non

pas que la 'Souffrance ait obnubilé son esprit, non pasqu'elle ait provoqué une haine ou un (désir de vengeanceà l'égard de ceux qui l'infligeaient.. Le monde, par sesaspirations, par sa morale, par les forces qui le conduisaient,affirmait ses origines païennes. Il semblait dominer l'Egliseplutôt que dominé par elle. L'institution merveilleusementassise sur les bases de la civilisation médiévale dissimulaittrop bien la lutte qu'elle menait contre la barbarie. D'oùcette solitude d'Israël qui caractérise le plus fidèlementpeut-être son sentiment de la vie au cours des siècles. Lacroix qui surmontait les 'Cathédrales, surmontait les villes.Elle symbolisait sous le ciel un monde qu'Israël ne compre-nait pas.

II ne le comprenait pas, car le judaïsme n'est, en fin decompte, que l'antipaganisme. Il est l'antipaganisme parexcellence. Mais il ne s'oppose pas à des dogmes théoriqueset son hostilité au polythéisme n'est pas son apport le plusoriginal. La lumière naturelle arriverait sans le secoursde la révélation à l'idée d'un Dieu un. L'antipaganisme juifest une manière de vivre et de sentir. Il rejette tout unensemble d'éléments dont il est assez malaisé de donnerune définition, qui plongent cependant dans une atmosphèrecommune. Et de cette atmosphère, il ressent instantanémentl'étrangeté. C'est tout ice qui se rapporte à l'épanouissementnaturel de l'être qui se complaît dans sa nature. C'est leculte de la puissance et de la grandeur terrestre, la légitimitépour la force de s'affirmer comme force, c'est aimer et haïr

spontanément, monter à cheval, chasser, guerroyer joyeuse-ment, c'est le don de se trouver bien installé dans le réel.

Notions qui se rapportent à ce qu'on est convenu depuisNietzsche d'appeler la « morale des maîtres » et qui, plusque la «libre pensée » ou l'athéisme, affranchissent de l'in-

quiétude religieuse. Elles ne manquent ni de grandeur ni

d'élévation peut-être. Mais, en face- d'elles, le message du

judaïsme est un paradoxe et une folie. C'est une folie que detenir à une élection qui ne se manifeste que par la souf-

france, de se situer au noeud de l'histoire universelle sans

avoir jamais connu d'indépendance politique réelle, de

séparer la dignité humaine, de la puissance et du succès.L'avènement du racisme en Allemagne, le prestige qu'il

acquiert dans le monde apparaissent à la conscience juivecomme l'apothéose de tout ce qui, dans la réalité, est à

l'antipode du judaïsme, comme la cristallisation de la« morale des maîtres », latente dans l'univers qui prendconscience du refus qu'elle oppose à l'appel du judaïsme,avoue ce refus et s'en glorifie. Dès lors, malgré toutes lesconsidérations sur les causes économiques, politiques etsociales du national-socialisme à la lumière desquelles les

persécutions raciales ne sont qu'un accident dans la tour-mente du monde moderne, les juifs ont le sentiment obscur

que l'hitlérisme est comme un rappel de leur voca-tion et de leur destin. Us situent à nouveau leur mal dans les

perspectives de l'Histoire Sainte.Mais le triomphe du national-socialisme nous rend aussi

compréhensible la mission religieuse de l'Eglise. Le retourd'un monde réfractaire à la Bible, à sa condition naturellefait éclater le drame secret que l'Eglise portait en elle. Sonpacte avec le monde profane a été une guerre contre lui.Sous son manteau à nouveau déchiré par la persécution,nous apercevons la marque indélébile de sa naissance juive.Ce que nous savions déjà par l'histoire de son origine, ceque la théologie nous apprenait sur sa tâche parmi lesnations, nous le saisissons brusquement d'une manièreimmédiate, sensible, directe.

Certes notre chemin nous conduit ailleurs. Nous passonsà côté de la Croix, nous n'allons pas vers elle. Mais cettehorreur sacrée que les frères Tharaud ont cru avoir observéeun jour chez tel enfant du ghetto polonais, nous ne l'éprou-vons pas lorsque « l'ombre de la Croix » nous couvre pourun instant. Et dans un monde de plus en plus hostile, qui seremplit de swastika's, c'est vers la Croix à branches droiteset pures que nous levons souvent les yeux.

E. LEVINAS.

Page 11: Paix_ et_Droit_ 1939_03_À propos de la mort du pape Pie XI

PAIX ET DROIT:

ITTfMfTR ftP Ik « ï 01 ÏÎÏIVF» FM HOiNCRIF

Dans notre dernier article, nous annoncions que la «• loi

juive ». après de laborieuses négociations, s'est trouvée sou-

mise à la Chambre Basse de Budapest. Un mois s'est passé

depuis lors, les événements ont- marché, bien des. boulever-

sements; se sont; produits en Hongrie,, mais, la «. loi juive »

à peu près* intacte, se trouve encore devant les Chambres, où

elle fait, l'objet, d'âpres discussions..Le fait le plus, marquant de l'évolution de la politique

hongroise est la retentissante démission de M. Bêla Imredy,

Président du Conseil, promoteur de la « loi juive ». Celui-ci,au cours d'une réunion dramatique du parti gouvernemental,déclara aux députés du parti, le 15 février dernier, qu'ayantdécouvert les origines juives de l'un de ses arrière-grands-

pères maternels, et possédant par conséquent un huitième de

sang juif d'ans les veines, il ne se considérait plus comme

moralement autorisé à présider aux destinées d'un gouver-nement dont la tâche la plus urgente était la réglementationde la question juive dans un esprit raciste.

On s'imagine la stupeur produite par cette déclaration.

Les députés du parti gouvernemental proclamèrent, qu'ilss'inclinaient devant la douloureuse décision prise par le Pré-

sident du Conseil et qu'ils rendaient hommage à ses scru-

pules. Le Cabinet présenta alors sa démission au Piègent,

qui- dénoua, rapidement la crise en appelant au pouvoir le

comte Paul Teleki. Celui-ci constitua sans,tarder son gouver-nement avec les membres du Cabinet précédent, auxquelsvint s'ajouter M. Homan, au poste de ministre des Cultes,

précédemment .détenu par le comte Teleki lui-même.

Mais aussitôt le nouveau cabinet formé, les commentai-

res allèrent leur train, à Rudapesl.. Les lointaines origines

juntes de l'ancien Président du Conseil étaient-elles les seules

raisons de sa démission ?II se trouva des, observateurs pour souligner que les

motifs du changement de cabinet pourraient être cherchés

ailleurs. Depuis de nombreuses années,, en effet, en matière

de recherches généalogiques, les Hongrois ont mis presqueautant de zèle que les Allemands. Dans la vie politique sur-

tout, il est pratiquement indispensable aujourd'hui de con-

naître parfaitement ses aïeux. En ce qui concerne M. Imredylui-même, ses adversaires avaient lancé déjà à plusieurs re-

prises le bruit que ses origines n'étaient pas purement aryen-nes, allégations que le Président dû Conseil avait toujoursrepoussées, avec un luxe de documents à l'appui, et tout

récemment encore, dans un grand discours. On peut clones'étonner que M. Imredy n'ait découvert ce malencontreuxaïeul que ces jours derniers.

Ces mêmes observations mettent en lumière le fait, assez

peu connu à l'étranger, que, depuis quelques semaines, M.

Imredy se heurtait à. une opposition d'abord sourde, puis de

plus en plus énergique, de la part des membres de la Chambre'

Haute. Ceux-ci avaient même mis le cabinet en minorité, surune question d'importance secondaire (tes cumuls d'emploi),huit jours avant le COUDde théâtre du 15 février.

La raison de cette attitude d^dpposition aurait découlédu fait que M. Imredy, poussé par lès extrémistes, se moll-irait de plus en plus 'partisan d'une réforme agraire assezétendue qui ne pouvait évidemment soulever l'enthousiasmedes aristocrates et des grands propriétaires fonciers qui siè-

gent à la Chambre Haute et ont. par ailleurs, de nombreux

représentants à la. Chambre Basse. Ceux-ci auraient accepté,à la rigueur, la loi juive élaborée par le gouvernement, sans

plaisir d'ailleurs,, étant donné qu'ils sont fréquemment alliésà de grandes familles juives du pays. Mais ils considéraientavec méfiance les perspectives qu'allait ouvrir cette loi au

partage des terres possédées par lesi juifs, premier pas vers-une réforme agraire contre laquelle ils s'élèveraient avec

énergie si elle devait être exécutée sur une vaste échelle.

Tout se passe aujourd'hui comme si le chef du nouveau

gouvernement hongrois, qui appartient, ne l'oublions, pas àla vieille aristocratie, avait compris à quelle puissance il ris-

quait de se heurter. Dans son premier discours devant lé

Parlement, il a affirmé avec vigueur qu'il persévérerait dansla politique de son prédécesseur- relativement à là.- « loi.

juive ».et à la réforme agraire. Mais alors qu'il y a. tout lieu;de croire que M. Teleki —qui fut, il y a dix-huit ans l'insti-

gateur du numerus ekwsus en Hongrie— se montrera effec-

tivement d'une grande fermeté: en ce: qui- concerne la « loi

juive », il est permis de se demander s'il usera, de la mêmefermeté pour ce qui est de la réforme agraire. N'a-t-il pasajouté en termes nuancés : « Il ne s'agit pas de partages nide distributions gratuites comme le prétendent certains, quiprouvent' ainsi, à fe fois, leur iaiconipréhension et leur incom-

pétence », et qu' (( un vrai Hongrois ne saurait se laisser

prendre à de telles formules » !

Quoi qu'il en. soit, tous ces incidents ont démontré que la-

question juive;en Hongrie,, discutée au milieu' du débordementdes passions, reste étroitement liée à d'autres problèmes etfournit dans la lutte politique une monnaie d'échange et des

prétextes; commodes-.

Cette constatation nous conduit tout droit au- secondgrand événement de la. politique hongroise, lié, lui. aussi, àla question juive : la dissolution du Parti- national-socialiste-des Croix Fléchées.

Au lendemain de l'attentat devant la synagogue clé Bu-dapest, qui fit de nombreux blessés, dont certains sont encoreaujourd'hui entre la. vie et la mort, la police entreprit unevaste enquête. Par une curieuse coïncidence, celle-ci aboutitvingt-quatre heures après le .départ de M. Imredy. Les au-teurs de l'attentat furent arrêtés et l'a police réussit à obte-nir les preuves de ce que tout le monde savait déjà, à savoirque cet acte de terrorisme avait été commis par des nazishongrois appartenant à une sous-organisation secrète : îë« Front Noir ». Le gouvernement de M. Teleki découvrit alorsque le national-socialisme hongrois menait une politiquesubversive, allant à rencontre de l'ordre établi, et interdit leparti. Après des perquisitions, effectuées en cent vingt-cinqlocaux rien qu'à Budapest, les quarante-sept chefs subalter^nés du mouvement furent arrêtés.

Cette fois-ci encore, la même question se pose : l'inter^diction du parti nazi a-t-elle été réellement provoquée parlaparticipation active de ses membres à l'attentat ou bien oarceque les troupes « hungarisles » exigeaient des solutions"qua-lifiées d'extrémistes par le gouvernement, non seulementclans la question juive, mais aussi dans d'autres domainesde la vie politique ? On peut d'autant plus se le demanderque, pour ce qui est de la question juive, les divergencesentre les nazis et le gouvernement Teleki ne sont pas fonda-mentales puisque le gouvernemnt prend à son compte unegrande partie des revendications nazies dans le but — paraît-il — de diminuer la force d'attraction de ce mouvement.

Nous, en arrivons ainsi aux avatars subis par la « loijuive » au cours du dernier mois. Pendant les débats à laCommission Plémère de la, Chambre qui. eurent lieu sous legouvernement Imredy, la question fut traitée à fond et fit1"objet de nombreuses, interventions pathétiques. L'une.desmspositions de la loi. provoqua notamment l'indignation du.judaïsme nongrois : celle- qui allait obliger les Israélites du

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PAIX ET DROIT:

pays à voter désormais sur une liste spéciale où électeurs etélus seraient exclusivement juifs.

Aprement combattu par l'opposition, le gouvernementdécida enfin d'apporter certaines modifications à la loi,notamment en ce qui concernait la situation des « demi-sang », certaines*catégories de mutilés de guerre, les conseil-lers privés de la couronne et les professeurs à l'Université•d'origine juive. Cependant, tous ces adoucissements ne chan-geaient rien à l'esprit raciste de la loi, et ne visaient qu'unnombre d'individus assez restreint. Les juifs conseillers pri-vés du gouvernement sont très peu nombreux, et ont chère-ment acheté leur titre ; quant aux professeurs d'Universitéd'origine juive, ils ne sont que quatorze.

Sur un seul point, le gouvernement a admis l'argumen-tation de l'opposition en renonçant à la liste juive., mais cene fut pas pour améliorer cette disposition, loin de là, et lesisraélites hongrois qui, à l'annonce de cette nouvelle,s'étaient d'abord réjouis, durent ensuite déchanter. En effet,selon l'amendement gouvernemental, les juifs pouvaient votersur n'importe quelle liste, comme tout autre citoyen,, maisseuls avaient droit de vote ceux qui pouvaient prouver queleurs parents, tant du côté maternel que paternel, vivaient-en Hongrie, de façon permanente, depuis au moins 1867.Il va sans dire qu'outre les difficultés qu'il y aurait à four-

nir ces preuves formelles de résidence, le gouvernement,dernier juge en la matière, aurait toujours feeau jeu de ré-cuser les candidats-électeurs qui lui déi^Jairaient.

Cependant, Je projet de loi passa tel quel devant lacommission piénière de la Chambre ; le gouvernement Telekile reprit à son compte, et à l'heure où nous écrivons, la dis-cussion bat son plein à la Chambre Basse. L'oppositioncompte présenter un certain nombre de modifications, maisil est douteux qu'elle puisse faire prévaloir son avis sur lespoints importants.

En attendant, la détresse du judaïsme hongrois -aug-mente sans cesse. Les suicides deviennent fréquents, et onlit de plus en plus souvent dans les rubriques nécrologiquesdes quotidiens cette formule éloquente : « décédé subite-ment )). En janvier dernier, le nombre des suicides à Buda-pest fut double de celui de l'année dernière pour le mêmemois. Devant les consulats étrangers stationnent de longuesfiles d'infortunés qui, menacés de perdre tous moyens d'exis-tence par la « loi juive », sont contraints d'émigrer.

Et, indice moins frappant peut-être mais tout aussi si-gnificatif, certains journaux ont renoncé à publier leur feuil-leton quotidien pour consacrer cet emplacement à renseigne-ment des langues étrangères...

L.-6.

LETTRE DE- POLOGNEL'action de défense dm judaïsme polonais

Un devoir impérieux s'impose au judaïsme polonais :

.grouper toutes ses forces en vue d'organiser une lutte efficace•contre l'antisémitisme qui, de jour en jour, prend plusd'ampleur. A un moment où la Pologne est aux prises avecdes difficultés économiques d'une extrême gravité, où des

questions vitales se posent pour elle sur le plan politiqueintérieur et extérieur, les .dirigeants responsables et le

gouvernement ne semblent préoccupés que d'un seul pro-blème : le problème juif. Sans doute, sous la pression duministère des Affaires étrangères, qui ne désirait pas se

compromettre aux yeux des Etats démocratiques, les projetsde loi relatifs à la dénationalisation des juifs polonais ont-ilsété provisoirement relégués à l'arrière-plan. IJ se peut aussi

qu'on redoutait des représailles économiques de la part despuissances démocratiques qui, eu égard à la détresse écono-mique de la Pologne et à la faiblesse de sa monnaie, pour-raient avoir des conséquences .catastrophiques. Mais tacampagne d'excitation contre les juifs se poursuit avec toutesa véhémence et si, en principe, les juifs sont encore descitoyens, pratiquement, ils sont dépossédés de presque tousleurs droits.

Au Sejm, l'antisémitisme continue à être pratiquécomme un véritable sport. -Compétent ou ignorant enmatière économique, chacun considère de son devoir doparler de la « nationalisation » du pays et de la nécessitéd'une -émigration' forcée -des juifs. Le récent débat budgé-taire en a été une nouvelle illustration. Le niveau moral etintellectuel du Sejm n'a jamais été aussi bas qu'actuelle-ment. Jadis, il se trouvait du moins, de temps en temps,quelque député animé d'un esprit de justice pour stigmatisercourageusement les bassesses de la politique anlijuivc.Aujourd'hui, plus aucune voix ne s'élève contre les iniquitéscommises par l'Assemblée et contre les accusations calom-nieuses lancées contre l'élément isroôlîte. Les quelquesdéputés juifs qui essayent de défendre la dignité de leurscoreligionnaires sont conspués

'Quelle triste image se ferait le spectateur du niveaude la culture polonaise s'il voulait juger uniquement d'aprèsles débats qui se déroulent au .Sejm ! Sans doute, les élé-ments démocrates, socialistes et même paysans, qui luttentpour une Pologne nouvelle, représentent-ils une forcemorale. Mais ce qui compte pour l'extérieur, c'est Je natio-nalisme étroit et agressif des nationaux-démocrates et duparti gouvernemental, véritable honte de la culture polonaise.C'est contre eux que le judaïsme polonais doit mobilisertoutes ses forces pour prévenir un effondrement dont ledanger est imminent.

Ce front de défense doit se réaliser en premier lieu dansle domaine économique. La question de retirer aux juifsleurs droits civiques ayant passé, pour l'instant, à l'arrière-plan, les agitateurs antisémites se sont assigné comme butessentiel l'éviction totale de l'élément juif de l'activitééconomique. C'est le seul champ d'action qui leur reste,1'(éviction de 3a vie culturelle étant; déjà un fait accompli.En effet, la plupart des écoles supérieures sont fermées auxjuifs, l'introduction des bancs de ghetto est généralisée, lesagressions contre les étudiants juifs sont devenues quoti-diennes. Le ministre de l'Education nationale, qui a prisla parole au Sejm pour décrire la situation aux Universités,s'est indigné exclusivement 'contre les excès physiques qui,il y a quelques semaines, ont coûté la vie à deux jeunesisraélites. Pas un mot de condamnation pour les bancs deghetto ou pour l'accès interdit aux juifs dans la plupart desécoles supérieures. Non seulement on ferme aux étudiantsjuifs les portes des Universités, mais on refuse de recon-naître les diplômes qu'ils ont acquis à l'étranger. Plus dequatre cents-médecins juifs ayant acquis leur titre à l'étran-ger sont, ainsi condamnés à la famine, parce qu'on refusede nostrifier leur diplôme. Us ne trouvent même pas d'emploidans les hôpitaux comme auxiliaires. Voilà la manière donton résout en Pologne la question des étudiants juifs.

Il serait donc difficile -d'innover dans ce domaine. Par

Page 13: Paix_ et_Droit_ 1939_03_À propos de la mort du pape Pie XI

= PAIX ET DROIT;sa

contre, dans la vie économique, les antisémites trouventencore des possibilités d'exercer leur action malveillante.Il y a encore quelques positions dont ils peuvent chasserles juifs. Le mot d'ordre des nationaux-démocrates et du

parti gouvernemental est à présent « nationalisation ducommerce et de l'industrie ». Des « spécialistes » de cette .question présentent tous les jours de nouveaux projets.Citons quelques exemples : seuls, les Polonais ont le droitd'apposer la marque « polonais » sur les marchandises etsur leur papier de correspondance. Cela est interdit auxjuifs sous peine de poursuites judiciaires. Actuellement,deux projets de loi sont en préparation, dont l'un prévoitque les autorités peuvent réquisitionner des locaux commer-ciaux pour les commerçants polonais, et dont le secondobligerait les employeurs à n'occuper dans leurs entreprises,en majeure partie, que des ouvriers polonais (90 % de latotalité des ouvriers). Un autre projet prévoit la créationdu monopole d'Etat pour les blés en vue d'évincer égalementles juifs de cette branche.

Ces quelques exemples suffisent pour montrer les dan-gers auxquels est exposée la population juive. Il n'est quetrop évident qu'une action de défense s'impose. Il n'est pasmoins évident qu'on ne pourra, rien obtenir du Sejm. Lesvoix de quelques députés juifs, si toutefois elles arrivent àse faire entendre, ne comptent pas. Il faut chercher lesalut dans les efforts énergiques en vue d'une organisationrationnelle de la vie économique juive. Il a réjà été beaucouprationnelle de la vie économique juive. Il a déjà été beaucoupjuifs dont certains fonctionnent dans les grandes villes,notamment à Varsovie, à Lodz, à Cracovie et à Lemberg.Ils s'efforcent de sauver les positions économiques occupéespar les juifs et d'en créer de nouvelles. De nombreuxsuccès sont à inscrire à l'actif de ces Comités; des centainesde petits commerçants juifs ont été sauvés grâce à l'octroide prêts. En effet, l'Administration municipale, espérantque, par manque de moyens, ils ne pourraient y donnersuite, leur avait ordonné de restaurer leur boutique souspeine d'interdiction de continuer leur commerce. Descentaines d'ateliers juifs ont été remis sur pied grâce àl'achat d'outils et de machines plus modernes. Des centainesde chômeurs juifs ont pu trouver des emplois dans de nou-velles professions. Des milliers. d'ouvriers juifs ont reçuune préparation professionnelle grâce à laquelle ils ont puêtre employés dans les entreprises industrielles. Nous pour-rions citer de nombreux exemples, mais ceux-là suffisent

pour souligner l'importance du travail entrepris par ces

Comités. Ajoutons que leur activité ne se borne pas aux

grandes villes, mais qu'elle en fait bénéficier aussi les

petites villes en instituant des caisses juives de prêts sans

intérêts. De cette façon, des milliers d'existences juivessont sauvées, voire consolidées et rendues à même de

résister efficacement aux assauts de l'antisémitisme. Fina-

lement, un dernier domaine se présente où — chose éton-

nante — on peut compter cette fois-ci, dans un certaine

mesure, sur l'appui du gouvernement : c'est le domaine

de l'exportation des produits juifs. Depuis de longues

années, cette question a fait l'objet d'un examen. De nom-

breux essais ont été tentés et actuellement on envisage la

création d'une société spéciale qui aurait comme tache

d'organiser l'exportation des produits des artisans juifs a

l'étranger et notamment aux Etats-Unis d'Amérique. Le

gouvernement avait essayé tout d'abord de n'autoriser quel'exportation des produits des artisans polonais et d'éliminerlà aussi les juifs. Mais il a changé de tactique et semble

disposé à présent à soutenir les efforts des juifs. Non pas,certes, par sympathie pour eux. Ce qui l'a décidé.à agirainsi, c'est la situation désastreuse de l'économie polonaise.Le bilan commercial accuse un déficit catastrophique quia déjà ébranlé sérieusement la monnaie polonaise et risquede provoquer de graves complications dans la vie économiquedu pays. C'est pourquoi on tente tout, en vue de développerl'exportation. On se sert même des juifs à cette fin, d'autantqu'on spécule d'abord sur l'acheteur juif de l'étrangeret qu'on sait que les marchandises portant la marque de« fabrication purement polonaise » ne trouveront pas depreneurs juifs au dehors. Il serait prématuré toutefois detrop compter sur cet appui, car il est toujours à redouterque l'hystérie antijuive dont sont saisis les dirigeants polo-nais ne paralyse ce projet. Quoi qu'il en soit, cette défensedans le domaine économique constitue actuellement la seulearme efficace. Le judaïsme polonais ne se laissera pas briseréconomiquement par la propagande antisémite, pas plusqu'il ne donnera suite au mot d'ordre d'une émigration for-cée. Voilà l'expérience de ce dernier mois. Puissent les anti-sémites, qu'ils se nomment nationaux-démocrates ou adhé-rents du parti gouvernemental, en tirer la leçon. Il y vanon seulement de l'intérêt des juifs, mais encore, mais sur-tout, de l'intérêt supérieur du pays.

Dr A. T.

La situation des juifs de DantzigLe sort des 5.000 juifs qui vivent encore dans la ville

libre de Dantzig est extrêmement tragique. Au cours de saséance du 24 février, le Sénat de Dantzig a décidé de réduireles 5.000 juifs qui se trouvent dans l'impossibilité de quitterDantzig à l'état d'esclaves. Toute la population juive, fem-mes et enfants compris, sera internée dans des camps deconcentration et astreinte aux travaux les plus pénibles. Onpense plus particulièrement à faire travailler les juifs à laconstruction d'autostrades qui assureront le trafic motoriséentre Dantzig et la Prusse Orientale, mais sans leur payerun salaire.

Les autorités national-socialistes de la Ville Libre avaientpensé tout d'abord à se débarrasser des juifs par le moyen

d'une évacuation forcée. La date du départ d'un premiergroupe de mille juifs avait déjà été fixée, mais ce projet adû être abandonné. Entre temps, les juifs qui devaient fairepartie de ce. premier groupe ont été complètement ruinés.Tous leurs biens ont été vendus à des prix dérisoires et leproduit de la vente a été confisqué par la Gestapo « pourcouvrir les frais de l'évacuation ». On les a expulsés de leursmaisons et parqués en hâte dans des baraquements élevéssur le terrain appartenant à un cercle sportif juif.

Une des raisons de cette mesure paraît être le manquede main-d'oeuvre pour l'exécution du programme des tra-vaux publics que le Sénat s'est fixé pour 1939.

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PAIX ET DROIT:

EN ROUMANIELes échos du discours du chancelier Hitler

Dans l'avant-dernier numéro de ce périodique, nousavions montré que, si plusieurs extrémistes de droiteétaient revenus à résipiscence, divers autres éléments per-turbateurs n'entendaient pas désarmer; que, par consé-

quent, si certains affiliés à la Garde de fer se rendaient,il ne fallait pas en inférer que cette dangereuse associationfût d'ores et déjà liquidée. Elle vient, .une fois de plus, de

faire parler d'elle, et, ce qui est plus grave, c'est que des.officiers de 'l'armée seraient venus renforcer son actionen participant à un complot contre le Palais et la personnede confiance du souverain, M. Caiinesco, vice-président duConseil. Cela n'est pas sans donner du travail aux autorités

policières, et des condamnations, allant jusqu'aux travauxforcés à perpétuité, sont journellement prononcées par lestribunaux militaires.

C'est au milieu de cette effervescence des espritsqu'éclata, de surcroît, Ja harangue hitlérienne devant Je

Reichstag. De ce discours, désormais historique à plusieurségards, l'opinion et la presse roumaines ont enregistré avec

complaisance et souligné avec une égale intensité deux

passages : l'un relatif aux territoires hongrois perdus aprèsla défaite des puissances centrales et cédés, à la Roumanie;l'autre, concernant les violentes accusations lancées contrele judaïsme.

Il n'est pas autrement étonnant que, dans un payscomme la Roumanie où l'antisémitisme est de bon ton etpu (la France juive, de Drumont, 'constitue le livre dejchevet, le credo des sphères intellectuelles, voire de laclasse moyenne, l'approbation qu'ont trouvée les doctrinesracistes, la violence de langage, les railleries et les vitupé-rations spectaculaires du maître du III 0 Reich soitunanime. N'est-ce pas avec le même délire d'enthousiasmequ'avait été accueilli, il y a un an, le programme ministérielde feu Goga, dans lequel on a pu lire, entre autres, que« l'idée nationale domine tous les coeurs au cri de : « La<( Roumanie aux Roumains ! » ; que le devoir sacré de lanation est d'imprimer le sceau de la domination ethniquedans tous les domaines de la vie ; que le gouvernementréalisera la revision des droits obtenus par les élémentssémites qui ont envahi le pays au nombre de plusieurscentaines de milliers et y demeurent incrustés par désirde profit, de corruption et de fraude... » Comment lesadversaires roumains du judaïsme n'applaudiraient-ils pasaux allégations et aux sarcasmes de l'idole de Berchstes-gaden ? Aussi, la plupart des journaux consacrèrent-ils delongues colonnes à excuser le « génial raciste », souli-gnant surtout sa prophétie selon laquelle la future guerremondiale que les juifs provoqueront aboutira à leur dispa-rition de tout le continent européen.

C'est peine inutile que d'essayer d'expliquer que lesisraélites de Roumanie (comme aussi leurs coreligionnairesde la Pologne voisine) sont les derniers à envisager, encoremoins à souhaiter ou à provoquer un conflit armé entre lespeuples, assurés d'avance qu'ils en seraient inévitablementJes premiers sacrifiés et les victimes certaines. Chacun peutconstater que leur bellicisme ne va pas au delà de la bataillequotidienne à laquelle ils sont réduits à se livrer pour lemorceau de pain qui leur est marchandé ou mesuré. Tousces opprimés du sort on la claire vision que, si une guerre.venait à surgir, ce sont eux qui en feraient les frais. C'estpourquoi on peut affirmer que pas un seul juif de Roumaniene pense sans angoisse et épouvante à une conflagration.

Donc pour ne pas demeurer en reste, la presseroumaine a frénétiquement applaudi, aux chefs d'accusationde l'interminable harangue hitlérienne du 30 janvier. C'est,d'ailleurs, dans le mode habituel de cette presse de consi-dérer comme vérité première tout ce qui se dit contrela race sémitique, abhorrée dans le pays totalitaire aryenpris comme modèle. Cependant, en Roumanie, combien peud'importance présentent le judaïsme et ses supposés malé-fices en comparaison avec l'insatiable appétit de dominationde l'Allemagne et les proportions inquiétantes que prennentà cette heure ses manoeuvres d'expansion vers le Sud-Estdes Carpathes ! A presque tous les sujets du roi Carol,Je préjugé et l'aveuglement antijuifs font perdre de vue la« hargne dévastatrice de l'autocratie germanique », ainsi

que vient de s'exprimer le président Roosevelt. N'est-il pasde toute évidence que, pas plus tard que demain, Hitlerse placera aux côtés de la Hongrie et appuiera ses revendi-cations révisionnistes ? C'est pour la Roumanie, on enconviendra, un danger national autrement plus immédiatet plus grave que le prétendu péril juif. C'est 'cependantl'ennemi européen n" 1, dénoncé dans le réquisitoireempreint de. mauvaise foi et plein d'illogismes du chancelierHitler, qui a eu le don de retenir l'attention de la presse.roumaine et l'a fascinée. Elle s'est empressée de propagerdans les quatre coins du pays les vitupérations du chefnazlste et son leitmotiv que les juifs sont porteurs de toutessortes de germes infectieux et contagieux, qu'ils poussentà la guerre pour satisfaire leur désir de vengeance et asseoirjeur domination sur les ruines de l'Europe, etc., etc. Ces

allégations mensongères, ces imputations baroques, engen-drées par le cerveau halluciné du dictateur, ont été analy-sées, commentées, amplifiées par la plupart des feuilles dela capitale et de la province qui ont conclu que le père duracisme a dit vrai et que c'est à juste raison qu'il sévitcontre le peuple parasite, pour qui, assure un publicisteroumain, « la guerre est une route qui conduit à l'abîmeet que ce sentiment domine dans l'esprit de tous les israé-lites du monde » (1). Citons encore ce passage du journalPorunca Vremii du 1er février : « Hier soir, le Fùhrer-chan-celier a prononcé devant le Reichstag, dans une atmosphèrede délire, un discours qui fera époque. Ce discours est le

plus magnifique que l'Europe ait entendu depuis plusieursannées. Etincelant par l'esprit, impressionnant par la formevisionnaire, l'exposé de M. Hitler est superbe de courage.Lavant le régime du Reich de toutes les infâmes accusations

que la diabolique .clique judaïco-internationale lui jette à la.tête, l'orateur a réaffirmé qu'il se sent fier d'avoir été le

promoteur de l'ère qui marquera la délivrance de l'Europede la domination juive. C'est la plus impressionnanteconfession qui ait été faite depuis vingt ans. Le Fùhrerallemand commence à être compris même de ses adversaires

et, aussi, à être considéré comme la figure la plus gran-diose, comme la personnalité la plus marquante des tempsmodernes. »

En Roumanie, comme on le voit, antisémistime etnazisme sont cousins-germains, pour ne pas dire frèressiamois. Leur parenté, leur convergence, leur affinité etleur synchronisme se complètent et s'harmonisent à l'envi.

ISAS.

(1) Le leader-article du précédent numéro de Paix et Droit, a

magistralement fait justice de l'absurdité et de l'illogisme decette affirmation gratuite.

Page 15: Paix_ et_Droit_ 1939_03_À propos de la mort du pape Pie XI

PAIX ET DROIT:

L'élimination des juifs de tous les domaines de la vieitalienne, politique, sociale et professionnelle, sera sans .doute complétée avant la fin du semestre en cours. Le boycot-tage antijui'f bat son plein. Les entreprises juives fermentl'une après l'autre. Le chômage est déjà important parmila -population juive. Les institutions juives essayent de remé-dier au chômage en créant des cours de reclassement pro-fessionnel pour permettre aux chômeurs juifs de trouver un

emploi dans n'importe quelle branche de l'industrie, -mais

peu d'espoir peut être gardé dans l'absorption d'un impor-tant nombre clé chômeurs juifs. La nouvelle législation rela,-tive à l'activité agricole, commerciale et industrielle des

juifs a été publiée. Il est interdit à ceux-ci de posséder desterres ou des immeubles d'un revenu supérieur à 5.000 liresà la campagne et d'une valeur locative de plus de 20.006lires dans les grandes villes, ainsi que de posséder ou de

diriger des entreprises employant plus de cent personnes.

Seul l'Etat est autorisé à racheter aux juifs les pro-priétés dont ils sont obligés de se défaire. Un office spécialest institué pour pourvoir à ces achats qui seront payés enbons du Trésor à 30 ans, productifs d'intérêts à 4 .%. Quantaux affaires industrielles ou commerciales, leur directionsera prise par un commissaire du gouvernement nommé pourune période de six mois et qui veillera à la transformationde ces entreprises en sociétés,anonymes, — le montant desactions devant être versé à l'ancien propriétaire juif sousforme de titres de rentes.

Les juifs ayant épousé une aryenne échappent à la nou-velle législation en ce sens qu'ils sont autorisés à transférerdirectement leurs biens (sans passer par l'Office) à leursenfants considérés comme aryens dans l'état actuel des loisracistes.

Un certain nombre de hautes personnalités fascistes setrouvent d'ailleurs dans le cas précité. On sait notamment

que parmi les membres du gouvernement, M. Bottai, minis-tre de l'Instruction publique, est le fils d'un israélite ; il a

pu ainsi conserver la direction de l'université, alors que tousles professeurs juifs en sont éliminés d'office.

Selon les'journaux anglais, les autorités italiennes ontordonné aux juifs de fournir des renseignements détailléssur leur avoir en Italie et à l'étranger, dans un délai de90 jours. Les citoyens italiens résidant à l'étranger se voientaccorder six mois pour la déclaration en question.

Les juifs peuvent disposer cle leurs biens par la voie de

dons avant l'expiration,des délais ci -dessus, à condition quele donataire ne soit pas de « race juive ».

La date limite pour le départ des juifs étrangers oudéchus de la nationalité italienne, fixée au 12 mars pro-chain, s'approche. Il est possible toutefois qu'en raison de

l'impression que produirait à l'étranger le départ de quelque7 ou 8.000 réfugiés, ce délai soit prorogé au dernier moment.

Les juifs .étrangers astreinte à quitter l'Italie avant le12 mars courent le danger de perdre tout leur avoir. En

effet, un juif quittant l'Italie doit obtenir en premier lieuun certificat éteMissant qu'il s'est ;hbéré de toutes ses detteset un i-peiunis" spécial .pour emporter ses biens personnels.Comme les autorités compétentes sont littéralement submer-

gées par des milliers de demandes ..de certificats, rares'Sontles personnes qui obtiennent les documents .nécessaires en

temps voulu pour se procurer le visa d'un pays étranger.

La liquidation cle l'avoir juif en Italie est entravée pardes difficultés légales quasi insurmontables. Les notaires ne

peuvent plus certifier les transactions dont l'une des partiesest Juive. Ainsi les juifs ne .peuvent plus disposer de leursbiens par la voie légale.

•Certains juifs ont obtenu l'autorisation d'exponter un

capital .-s'élevant à 2.500 lires, mais ils doivent payer leur

passage en devises étrangères. La liste des objets mobiliers

que les juifs peuvent exporter sest très limitée : l'exporta-tion de tout ce qui est facilement réalisable à l'étranger(machines, outils, etc.) est interdite.

Si le gouvernement italien refuse la prolongation du

délai, des arrestations massives suivront son expiration etseules les personnes ayant reçu l'ajournement à titre indivi-duel 'échapperont aux sévères sanctions prévues par la loi

pour ceux qui n'auront pas obtempéré à l'ordonnance d'ex-

pulsion. La situation sera surtout difficile pour les ressor-tissants polonais, roumains, hongrois et allemands qui seront

renvoyés aux frontières de lem.'s pays d'origine. D'ores etdéjà ceux-ci se réfusent à les recevoir. Les ressortissantsfrançais, britanniques et américains se trouvent naturelle-ment dans une situation toute différente.

Les autorités italiennes préparent actuellement un vastecamp de concentration, sur une île en Italie du Sud, destinéà recevoir les juifs étrangers qui n'auront pas quitté l'Italieaprès le 12 mars prochain, date limite.

La police a fait convoquer plusieurs juifs étrangers :.pourleur rappeler qu'ils doivent quitter le pays avant ce délai.

MESSAGE DE L'ALLIANCE ISRAELITEA S. E. LE NONCE DU PAPE A PARIS

L'Alliance Israélite a adressé, à l'occasion du décèsdu Pape, à Mgr Yalerio Valeri, nonce apostolique à Paris,le message suivant :

L'Alliance Israélite, profondément émue de la dispari-tion du grand Pape qui vient de s'éteindre", s'associe a-udeuil qui frappe toute la Chrétienté et tous ceux qui profes-sent l'amour de l'humanité, de la paix, de la justice et ledévouement aux droits de Ja conscience.

Jamais elle n'oubliera la charité et le courage avec

lesquels Pie XI a défendu tous les persécutés, quelle quefût leur race et leur confession, au nom des principes éter-nels dont il a été le plus noble représentant sur la terre.

Gréée pour la protection et Je relèvement du judaïsmeopprimé, l'Alliance faillirait à son devoir si elle ne s'appli-quait à perpétuer dans le coeur de ses coreligionnaires lamémoire de cette admirable figure que suivront dansl'au-delà, leur gratitude inaltérable et leur infinie vénéra-tion.

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PAIX ET DROIT

LA QUESTION JUIVE EN TCiÉCO-SLOVÀQUIEQuand on connaît la pression exercée par le IIIe Reich

sur la Tchécoslovaquie et les « recommandations » faitespar le chancelier Hitler à M.. Chvalkovski, président duConseil tchécoslovaque, on, ne saurait être étonné qu'il yait désormais, une question juive dans ce malheureux pays.Déjà on enregistre un peu partout des incidents dont certainsrevêtent un caractère assez inquiétant. C'est ainsi qu'àPrague, des. bombes ont, été. lancées contre des synagogueset des magasins juifs., A Moravska-Ostrawa, des détaelie-

'ments locaux de <cGardes de Gajda », organisation fascisteparamilitaire-, assistés dé formations d'assaut allemandes,sèment la panique parmi la population juive. Les passantssont molestés, les vitres des magasins juifs brisées, lesconsommateurs juifs chassés de cafés et restaurants; non-juifs.

Sans: qu'il y ait une- législation -antijuive à proprementparler,, on a déjà pris des- mesures très graA'es, qui excluentprogressivement les juifs- de l'activité- nationale-.

Le gouvernement, tchécoslovaque a promulgué'

deuxdécrets d'une extrême importance qui intéressent plus spé-eiailenient les juifs naturalisés ou réfugiés. Le premier prévoitune revision des naturalisations. Il s'applique, à tous ceuxqui ont acquis la nationalité tchécoslovaque depuis lelor novembre 1918; à tous ceux qui, après le 1°' janvier 4938,avaient leur domicile dans lés régions cédées à des puis-sances étrangères après le 30 septembre 1938; à tous ceuxqui avaient acquis la nationalité tchécoslovaque par voie(Je mariage après le lior novembre 1918. Le deuxième décretporte spécialement sur le statut des réfugiés qu'il qualifiecl' <( émigrants ». Un «; émigrant » est une personne n'ayantpas la qualité de citoyen tchécoslovaque et qui n'est ni

Tchèque, ni Slovaque ou Carpatho-Russe, qui ne peut pas-rentrer dans son pays natal et qui est sur le territoire tchéco-slovaque. Les personnes ainsi déterminées doivent quitterla Tchécoslovaquie, sur la demande des autorités, dans undélai de six mois à un an. Ces deux décrets intéressent quel-que 10.000 juifs qui avaient acquis la nationalité tchéco-

slovaque après le l"r novembre 1918;, près de 15.000 juifsayant habité la région des Sud êtes,, le district de Tesz-enetles régions cédées à la Hongrie,, ainsi que tons lès réfugiésaustro-allemands.

La Chambre des; avocats de Tchécoslovaquie a décidéde soumettre à l'examen de sa prochaine session les propo-sitions suivantes :

1° Fixation .d'un pourcentage d'avocats juifs propor-tionnel au nombre 1total de la population juive ; 2° autorisa-tion pour les avocats juifs qui se sont déclarés comme étantde nationalité juive de représenter des clients juifs; 3° exclu-sion définitive de tous les avocats juifs qui ont déclaré

appartenir à la « nation allemande ».562 médecins juifs employés au service des assurances

sociales ont été congédiés. Les médecins juifs employés dansles: services de santé de l'Etat slovaque ont tous reçu avis

qu'ils seront licenciés à partir du tor mars.Le mouvement d'épuration s'est étendu aussi à l'armée.

Les,, officiers juifs ont. été invités à présenter leur demandedé- mise; en disponibilité. Us auront toutefois droit à laretraite réglementaire. La mise en, disponibilité d'officiers

juifs dans les cadres de l'état-major général a été opéréed'office.

Les; rares professeurs juifs des écoles supérieures tchè-

ques ont été mis à la retraite.Epuration également dans l'industrie du film. Les pro-

priétaires de cinémas n'acceptent plus de films produits pardes maisons juives ou sous une direction juive. En consé-

quence., les cinéastes juifs se voient refuser les engagementset, assez souvent, lès anciens contrats sont rompus, lesmaisons productrices préférant payer des dédits élevés

plutôt que. de voir fermer à leur production les portes de la

plupart des cinémas tchèques. Un « Office du film aryen »vient d'être créé, à Prague pour veiller à « l'aryanisation »de la production cinématographique tchèque.

A Bratislava, l'Union des artisans a décidé d'excluretous- ses membres d'origine juive.

Le 7 février s'est ouverte à Londres, au Patois Saint-Mmes, la conférence de: la « Table Bonde » qui doit déciderde- la politique future à suivre en P'alsesiine. A cette confé-rence prennent part.-une délégation britannique, une délé-gation arabe/ et une délégation juive :

Thèse arabe : (d'après' le- résumé officiel rédigé par la bureaude la Conférence :

La-thèse arabe se base sur le fait que la politique poursuiviejusqu'ici en. Palestine constitue une grave injustice envers lepeuple arabe, et que, tant que cette injustice n'aura pas été dûmentredressée,, il ne peut y avoir de paix en Terre sainte. La- thèsearabe contre la politique poursuivie jusqu'ici s'appuie en premierlieu sur le fait que l'indépendance., aurait été promise à maintesreprises au cours de la. guerre et qu'au lieu cle l'accorder on aplacé la Palestine sous une administration irresponsable etbureaucratique dans laquelle l'influence sioniste est.prédominante.Secondement:, on a admis un nombre considérable 'd'immigrantsjuifs étrangers par leur langue, leurs moeurs, leur morale, et leuraspect, dans une mesure telle, que les Arabes furent frustrés d;enombreuses perspectives dans le commerce, les professions libé-rales et d'autres domaines. Troisièmement, sous la pression' sio-

niste, une législation arbitraire-fut instituée en vue-de faciliter

l'acquisition de terres par les juifs sans, réserves adéquates pourla protection de la paysannerie contre la dépossession et l'éviction.'

Les Arabes ont encore d'autres griefs'et estiment que1dans

l'intérêt de tous, l'injustice doit être .réparée sans perdre davan-tage de temps. Ils revendiquent, par conséquent :

1° La, reconnaissance du droit des Arabes à l'indépendancecomplète dans leur pays ;. 2° L'abandon de la tentative d'établirun ceFoyer national juif » en Palestine ; 3° l'abrogation du man-dat et des illégalités qui en résultent, et son remplacement parun traité similaire à- celui- conclu entre la Grande-Bretagne et

l'Irak,, créant en Palestine un Etat arabe souverain ; 4° la cessa-tion, immédiate de- toute immigration juive et de toule v-enie deterre aux juifs.

Les Arabes sont disposés a négocier, dans un esprit conci-liant sur les conditions dans lesquelles: les raisonnables intérêts

britanniques devront être sauvegardés ; à- approuve.]- les garan-ties nécessaires pour la protection et le droit d'accès- h. tous, lesLieux Saints ainsi que pour la protection des droits légitimes desminorités juives et autres en Palestine.

Thèse juive.Les représentants juifs reconnaissent pleinement, les difficul-

tés auxquelles doit faire face le gouvernement de Sa Majesté etsont bien désireux de l'aider. 31y a toutefois pour eux des intérêtsvitaux a sauvegarder et des droits, auxquels ils ne peuvent renon-cer à cette heure, la plus sombre cle l'histoire juive.

La déclaration Balfour a reconnu les liens historiques quirelient l'es juifs avec la Palestine cl clans le préambule du Mandatla reconnaissance de ces liens et tes raisons de la reconstitutiondu foyer national a reçu une consécration internationale

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10 PAIX ET DROIT

La Commission royale avait constaté et reconnu que le gou-vernement de Sa Majesté, en publiant la déclaration Balfour,avait en vue la constitution ultérieure d'un Etat juif en Pales-tine. Cette importante déclaration excluait toute réduction des

juifs à la situation d'une minorité.Il es inconcevable qu'après vingt ans le gouvernement bri-

tannique puisse vouloir chercher une nouvelle interprétation duMandat qui affecterait ces droits fondamentaux des juifs. Un telabandon d'une position morale ébranlerait l'Empire britanniquejusque dans ses fondements, car cet empire est basé sur les liens

purement, moraux de la confiance mutuelle et de la foi aux pro-messes données.

La commission Woodhead a écarté ensuite les conclusions

principales de la commission Peel, l'idée d'un Etat juif fut aban-donnée et ce n'est que la restriction de l'immigration juive à unu maximum politique » qui fut maintenue. A un moment où unedétresse indicible frappe les juifs de l'Europe centrale et où la

tragédie juive s'étend ailleurs encore, les portes du Foyer Natio-nal juif furent presque entièrement fermées. On n'y laissa même

pas entrer des enfants et des vieillards fuyant l'enfer de l'Allema-

gne. En fait, la destinée de 6.000.000 de personnes était en jeu. La

plupart d'entre eux devait partir et personne ne savait leur direoù ils devaient aller.

En ce qui concerne les relations arabo-juives, les juifs ont

depuis toujours désiré une bonne entente entre les deux peupleset se sont efforcés de l'amener. Il est parfaitement vrai que laPalestine est un lieu saint pour les Arabes. Mais elle n'a jamaisété un centre national arabe comme l'est Damas.

Au sujet des prétendues et promesses contradictoires » faitesaux juifs et aux Arabes, le Gouvernement de Sa Majesté a confir-mé à maintes reprises qu'aucun conflit de ce genre n'existe en ce

qui concerne la Palestine occidentale, Sir Henry Mac Manon l'aétabli et le colonel T. E. Lawrence a relevé que le règlement deM. Churchill de 1921-1922 a accompli toutes les promesses britan-

niques à l'égard des Arabes « selon la lettre et selon l'esprit ».Là où il pourrait y avoir eu des promesses contradictoires — en

Transj ordanie — ce conflit a été résolu à cent pour cent en faveurdes Arabes.

Les Arabes se sont trouvés, après la guerre en possession dequatre royaumes. Us ont acquis aisément un statut nationalindépendant, en grande partie grâce au sang et aux efforts britan-niques. De plus^comme la Commission Royale l'a remarqué, laDéclaration Balfour a contribué à la libération des Arabes dansune mesure non moindre qu'à la victoire des Alliés. Il n'est pasdéplacé de comparer ce que les Arabes ont su tirer des avantagesextraordinaires dont ils ont bénéficié sans grand'peine et ce que

les juifs ont accompli grâce à ce qu'on a condescendu à leur

accorder. Do vastes territoires arabes sont déserts aujourd'hui— comme une invite aux' puissants et aux sans scrupules.

Les Arabes proclament que la Palestine est un pays arabe et

doit avoir un gouvernement national arabe. C'est là une revendi-cation qu'on ne peut satisfaire. Les juifs forment déjà un tiersde la population et portent le fardeau des deux tiers ou plus del'activité économique et culturelle de la Palestine. Les Arabesdéclarent craindre la domination juive. Les juifs ne désirent pasavoir les Arabes sous leur domination, mais ne leur permettrontpas de les dominer. Les juifs ne veulent pas s'exposer au sortdes Assyriens en Irak.

La délégation juive est profondément et sincèrement per-suadée que les juifs et les Arabes peuvent trouver un terraind'entente dont ils bénéficieraient tous deux. Mais ceci ne peut êtrele cas que sur la base du Mandat, appliqué selon la lettre et selon

l'esprit ; une immigration juive de grande envergure conformé-ment au principe de la capacité d'absorption économique ; une

politique de développement actif et des sauvegardes effectivescontre le statut de minorité.

Le plan britannique.

Chacune des deux délégations étant restée sur ses positions,la puissance mandataire leur a soumis son plan qui. est de natureà donner satisfaction aux Arabes dans une large mesure.

Une conférence judéo-arabe serait convoquée en automnepour élaborer la Constitution de cet Etat. Seuls les juifs habitantla Palestine seraient admis à se faire représenter à cette confé-rence. Le gouvernement britannique continuerait à assurer legouvrnement du pays, en attendant que celui-ci devienne tout àfait indépendant. La proportion des juifs et des Arabes dansl'administration de cet Etat serait de deux contre cinq. Pendanttoute la période de transition l'immigration, juive serait limitée etles ventes de terres aux juifs réduites au minimum.

La délégation juive a repoussé les propositions britan-

niques comme n'offrant aucune base de négociations. La

délégation arabe a fait de même en déclarant qu'elles nedonnaient pas entière satisfaction aux aspirations arabes.

Voilà où en sont actuellement les travaux de la Confé-rence. Dans ces conditions, la continuation des négociationssemble peu probable.

DANS LA PRESSEDrames du racisme en Italie

La qualité de certaines victimes des lois racistes faitressortir de façon particulièrement aiguë la bassesse de}a politique anlijuive. Inhumaines et lâches quand elless'en prennent à la collectivité juive, les lois racistes devien-nent révoltantes et infâmes quand elles s'appliquent à deshommes qui ont donné le meilleur de lewr être à la patrie,qui n'ont vécu que pour elle. Beaucoup ne peuvent survivreà l'outrage fait à leur honneur et à leur conscience. Lescas de suicide de personnalités israélites des plus éminentessont fréquents. Souvent ils sont pathétiques. On se rappellecelui de M. Formiggini, « la figure la plus représentativede l'édition en Italie », qui, avant de se donner la mort,avait préparé lui-même le [aire-part de son décès qui étaitainsi conçu : « A.-F. Formiggini, maître éditeur, quitte cetteterre, laissant l'impérissable souvenir d'un esprit libre,profondément italien, entièrement consacré à la culturenationale.

La Tunisie Française rapporte le cas du commandantAscoli dans les termes suivants :

On mande de Florence, de source très autorisée, quela population de la célèbre ville italienne est profondémentémue par une des plus récentes conséquences du racismefasciste. Une des plus anciennes, une clés plus honorablesfamilles israélites de Florence se trouve brusquementatteinte en la personne de plusieurs de ses membres quicomptaient parmi les plus hautes personnalités italiennes.

11 s'agit de la famille Ascoli, dont la presse italiennea fait pendant des générations, l'éloge jusqu'aux derniersdécrets racistes. Le professeur Ascoli, fondateur de plusde trente Sanatorium, une des sommités médicales de lapéninsule est soudainement obligé de se démettre de seshautes fonctions.

L'Amiral Ascoli, pourvu d'un haut commandementdans la flotte italienne, a été également, en raison de sesorigines sémitiques, déchu de ses grades et fonctions.

Enfin, plus pathétique que tout est l'épisode suivantque tous les Florentins se rapportent avec une émotion etdes commentaires faciles à imaginer.

Le Commandant Ascoli commandait le bataillon d'unrégiment d'infanterie à Florence. Pour les mêmes raisons,il fut prié de quitter l'armée. On l'autorisa cependant àréunir son bataillon dans la cour du quartier pour prendrecongé.

Le malheureux, avec une émotion difficilement con-tenue, s'exprima à peu près en ces termes :

« Mes amis, mes frères d'armes,« Pour la dernière fois, je vais « obéir ».« Un ordre de l'autorité supérieure exige mon départ

de l'Armée à laquelle j'ai donné spontanément ma vie toutentière. Aujourd'hui j'adresse un ultime adieu au drapeauque toujours j'ai fidèlement servi. Souvent mon sans acoulé. 8

« Partout, j'ai clamé ma foi en une Italie plus grande,plus noble, plus belle à vivre.

'

« Combien, parmi vous ont marché à mes côtés, dansdes campagnes récentes, où bien des nôtres ont pavé cle

Page 18: Paix_ et_Droit_ 1939_03_À propos de la mort du pape Pie XI

PAIX ET DROIT; 11

leur existence la conquête de l'Empire italien et fasciste.Avec eux, j'ai vécu, des heures atroces-, mais combien exal-

tantes sous les; plis du; tricolore que pour la dernière l'ois,

je contemple aujourd'hui. Mon bataillon, le vôtre, est tropchargé de gloire pour qu'il soit possible d'en ajouter en-core.

« Le coeur brisé, mes camarades, je vous invite à=

tourner vos regards vers vos glorieux étendards et à. vousrecueillir en adressant un hommage de reconnaissance etd'amour à ceux qui ont eu la grâce de mourir en com-battant.

« Soldat avant tout, je m'incline devant la décision

prise par mes; chefs qui"ont. décidé mon départ. Je vousdemande — ce sera- le dernier ordre de votre Commandant— de mourir à l'appel de la Patrie, jusqu'au dernier, en

braves, en héros, comme j'aurais tant aimé le l'aire moi-même.

« Adieu mes amis, Adieu ».

L'émotion était générale. Le -Commandant Ascoli em-

brassa le drapeau du régiment, s'enveloppa le visage clans

le tissu sacré et se tira un coup de revolver dans la tempe.Il va sans dire que les autorités fascistes firent tout

pour étouffer l'affaire. Mais on empêchera difficilement

cinq cents témoins d'une scène aussi tragique de la répé-ter, et Florence ne se prive pas de juger à leur valeur les

inhumaines, les cruelles mesures racistes.

Le drame juif d'après RI. Robert de Beauplandans la « Petite Illustration »

La Petite Illustration a publié (4 février) un numéroconsacré au « Drame juif ». Cette élude constitue unsommaire de l'histoire du destin des juifs depuis leur

dispersion jusqu'aux événements les plus récents, en. parti-culier les persécutions racistes des juifs en Allemagne, enItalie ei en Hongrie-. Il convient- de rendre hommage à

l'objectivité parfaite avec laquelle son auteur, M. Robertde Beauplan, a traité le problème juif.

Nous reproduisons quelques passages de sa conclu-sion :

...L'antisémitisme ne saurait trouver sa justificationque clans le racisme, c'est-à-dire dans une idéologie quipose en principe la possibilité de sauvegarder l'intégrité:des races et d'assurer leur hiérarchie. Or, le racisme n'estinstallé que dans un petit nombre d'Etats et il est en contra-diction avec les idées qui, depuis la Révolution française;inspirent la. plupart des sociétés modernes. L'antisémitismeapparaît ainsi comme une expression particulière cle l'anta-gonisme qui oppose, sur bien d'autres points encore, lesrégimes totalitaires et les démocraties ; il arrive aussiqu'en certains endroits, comme en Afrique du Nord et enAlsace, il soit exploité par la propagande hitlérienne, àJ'insu même de ceux qui le professent, à des fins politiquescle dissociation.

...Si les juifs paraissent occuper parfois une place horsde proportion avec leur importance numérique, ils. nedoivent pas leur situation à la faveur, mais à leur intelli-gence, à leur activité et à leur faculté d'adaptation. Gelapeut émouvoir, chez les non-juifs, le légitime sentiment dela concurrence vitale,, mais non justifier une hostilitésystématique.

...Il faut aussi tenir compte au judaïsme de la contri-bution qu'il a toujours apportée à 'la culture universelle,(clans la philosophie, la musique, la littérature, la médecine,

la science. E'n Allemagne même, sur vingt-cinq lauréats duprix Nobel, huit étaient israélites.

...Enfin, la persécution contre les juifs, que l'hitlérismea remise en vigueur, constitue une bien dangereuse régres-sion de la civilisation. Il n'est pas admissible qu'une caté-gorie de citoyens, sans avoir commis aucun délit, puisseêtre rejetée du corps social par la décision souveraine d'ungouvernement ou d'un parti pour l'instant omnipotent.C'est là une rupture du contrat qui- lie lés individus à tasociété. Les efforts du progrès ont toujours tendu, depuisl'avènement du christianisme,, à sauvegrder l'indépendancemorale et spirituelle des individus à l'égard de l'Etat. Sion les écarte de cette voie-, on ouvre la porte à tous lesabus de pouvoir, qu'il a fallu près de deux millénaires pouréliminer, de la vie du monde. Autant que les individus", lescollectivités, de quelque nature qu'elles soient, sont inté-ressées à ce que ne s'instaure pas un régime d'arbitraire,dont elles risquent, elles aussi, de devenir un jour lesvictimes.

Racisme et christianisme

Du Figaro, 9 février, « Racisme ei Christianisme »,par M. Georges Goyau, de l'Académie française :

...Ce qui apparaît en péril,, h l'heure présente, c'est la notion(Uni droit qui participe en quelque mesure de l'absolu, qui par-ticipe en quelque mesure de l'éternel, d'un droit effectivementantérieur et supérieur aux volontés éphémères des individuslussent-ils dictateurs.

'

Pour la défense d'une telle notion, pour son affirmation sou-veraine en lace des exagérations racistes, voici se dresserparallèlement, la foi romaine el, l'esprit, français ; et ces deux-forces s unissent, se coalisent, s'enlr'aidenl, "L'homme a desdroits, proclame la philosophie chrétienne ; il a le droit spécia-lement d'être placé dans des conditions propices à l'accomplis-sement de son devoir, cle tous ses devoirs. Et la philosophie, ducix-lmitiems siècle, malheureusement plus indifférente a l'idéede devoir, redit à son tour : « L'homme a des droits » — 11 n'ena qu en tant que coule dans ses veines un sang allemand, riposiela doctrine hitlérienne, car. il n'existe d'autres droiLs que ceuxde la l'ace.

„ H, f°rmule- Peui-6li'e. vous parait flatteuse pour l'orgueilcollectif du peuple germanique : mais creusez-la. vous ne tar-derez pas à constater que ces droits de la race.' c'est dans lavolonté du Fûhrer qu'ils se condensent, et qu'en définitive ilss identifient avec son caprice individuel de dictateur. » Le droitliait du Fûhrer. Source du droit : les ordres du Fûhrer mêmelorsqu'ils ne revêtent pas la forme d'une loi. » C'est dans unlivre de Lucien Valdor : Le Chrétien devant, le racisme que jecueille celte curieuse citation nazisle. Et en voici une' autre •« La parole du Fûhrer et celle de son entourage immédiat valentactuellement plus que tout droit acquis et légalement défini. »Le maréchal Goering, en personne, a expressément déclaré :« Le droit et la volonté du Fûhrer sont une même chose »

Le racisme, ainsi appliqué, substitue à la souveraineté dudroit la prépondérance de l'arbitraire. <c Justice est ce qui estutile au peuple allemand, tout ce qui lui est nuisible est injuste. »Et de môme que la fantaisie d'un homme devient la cause effi-ciente du <t droit », cle même l'intérêt racial, et lui seul, en estla. cause finale. Car « le but essentiel de l'éducation.

'précise

l'une des propositions racistes condamnées par le Vatican, estd'enflammer les esprits d'un amour brillant de leur propre 'racecomme du bien suprême. »

En fait, c'est au sujet du bien suprême qu'entre la penséegermanique, d'une part, la pensée ch.rélienne cl française.d'autre pari:, le conflit s'exacerbe ; et ce conflit date de loim

...A rencontre du racisme, les deux Testaments. l'Ancien c,1le Nouveau, s,e retrouvent en un lumineux accord, pour soulignerla portée universelle du message révélé et l'authentique carac-tère d'un tel message, émanation d'un Dieu extérieur à l'huma-nité et supérieur à toutes les races qui la composent, môme àcette race germanique qui volontiers se flatlerait d'incarner enson propre avenir les prérogatives du <cdevenir » divin.

Les libéralités testamentaires en faveur de Y « Alliance Israélite » doivent êtreattribuées à sa principale institution, l'ECOLE NORMALE ISRAELITE ORIENTALE,établissement reconnu d'utilité publique.

La formule doit être la suivante :« Je donne et lègue à l'ECOLE NORMALE ISRAELITE ORIENTALE, établissement

reconnu d'utilité publique, dont le siège est à Paris, 45, rue La Bruyère »

Page 19: Paix_ et_Droit_ 1939_03_À propos de la mort du pape Pie XI

32 PAIX ET DROIT

Tableau des Ecoles de F«Alliance Israélite»PAR PAYS (1)

A. — ECOLES NORMALES

D'INSTITUTEURS

FRANCENombred'élèves

Paris garçons 31

Versailles filles 19'50

B. — ECOLES PRIMAIRES

MAROC

Agadir mixte 88

Azenlmour mixte 70

Ben Ahmed mixte 93

Béni Mellal mixte 31

Bai" Rechid mixte 51

Boujad mixte 134

Casablanca, Ecole Narcisse-Leven g. 1.273

Casai lança, id f. 1.104

Casablanca, Ecole Moïse-Nahon g. 513

Casablanca, id f. 565

Casablanca, Verdun g. 627

Demnat mixte 118

El Ksar mixte 142

Fez g. 641— f. 902— Ville Nouvelle....mixte 263

'

Kastoa Ta.dla mixte 97

Larache mixte 208

Marrakech g. 675— f. 803

Mazagan g. 332— f. 344

Meknès g. 394— '. f. 500— Talmud Tora 169

Midelt mixte 106

Mogador mixte 44-4

Oued Zem mixte 36

Ouezzan mixte 230

Oudjda mixte 40

Rabat g. 542— f. 5S7 •

Sali g. 392— ...f. 40S

Salé g. 218— f. 247

Seffrou mixte 319

Settat mixte 151

Tanger g. 653— f. 471

Taourirt mixte 45

Taraudant mixte 157

Tétuan g. 175— f. 286

Tiznil mixte 6715.71

A reporter 15.76

Report 15.761

TUNISIENombred'élèves a

Sfax mixte 205Sousse ...- mixte 339

Tunis, Ecole Malta-Srira. .g. 914— — f. 1.119 B— Ecole Hiafsia g. 1.072

3.649 &

TRIPOLITAINEE

Tripoli mixte 188 18S

EGYPTE E

Tantah mixte 191 191 !:

BULGARIE E

Choumla mixte 60 60

GRECE*'

Démotica mixte 187 l<Janina mixte 293

SaJonique mixte 690 îv

Serrés mixte 190 £

1.360 1

PALESTINE -5

Caïffa mixte 833Jérusalem g. 1.211 i

— f. 516 i

Safed mixte 226Tel-Aviv g. 408

— f. 523Tibériade mixte 365

4.082'

SYRIEJ

Alep g. 251 '

— f. 436 (— Bahsita Ecole popu-

laire g. 75 i— Bahsita Ecole popu-

laire f. 249;

Damas g. 431 <— f. 512— asile 130 *

2.084

LIBAN

Beyrouth g. 206— f. 235— asile 218— Ecole populaire f. 165— Talmud Tora.... 231

Saïda 80

1.135

A reporter 28.510 j

Report 28.510

IRAKNombred'élèves

Bagdad, Collège A. D. Sas- —

soon g. 707— Ecole Laura Ka-

doorie f. 1.681— Ecole Nouriel....g. 302— Ecole Noiam f. 568

Bassorah g. 689— f. 643

Mossoul mixte 4-58

Kirkouk g. 137— f. 106

5.291IRAN

Bidjar mixte 125

Bpurouguerd mixte 187

Golpaygaai mixte 210

Hamadan g. 744— f. 390— Talmud Tora 356

lepahan g. 596— f. 184

Kirrnancliah g. 543— f. 417

Nehavend mixte 195

Seneh mixte 345

Téhéran g. 891— f. 893

Yezd mixte 3006.376

L'Alliance possède, en outre, dansles Balkans, quatorze écoles avecun nombre d'élèves de 4.000

G. — OEUVRES D'EDUCATIONMORALE ET RELIGIEUSE

ALGERIE

Ain Beïda g.)— f.) 170

Alger g.)— f.) 740

Bône g.)— f.) 225

Conslantine g.)— f.) 1.114

Milia-na .g)— f.) 160

Sétif g.)— f.) 175

Oran g.)— f.) 520

Sidi-Bel-Abbès g.)— f.) 14-0

3.244

D. — ECOLE AGRICOLE

Tel-Aviv, Mikweh-Israël ...internes300

E. — ECOLE DE SOURDS-MUETS

Jérusalem 25 25

47.746

(1) Nous avons donné dans le numéro dePaix et Droit de janvier un tableau des écoles.Plusieurs erreurs s'étant glissées dans la com-iposition, nous donnons ici le tableau rectifié.

Le Gérant : Jules CREPIN. Imprimerie Française (Société Anonyme), 123, rue Montmartre, Paris (2°)