ORIENTER LES SOINS VERS LE PATIENT PARTENAIRE

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CONSORTIUM APPS / OCTOBRE 2020 UN LIVRE BLANC POUR LA GRANDE RÉGION Projet cofinancé par le Fonds européen de développement régional dans le cadre du programme INTERREG V A Grande Région ORIENTER LES SOINS VERS LE PATIENT PARTENAIRE

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CONSORTIUM APPS / OCTOBRE 2020UN LIVRE BLANC POUR LA GRANDE RÉGION

Projet cofinancé par le Fonds européen de développement régional dans le cadre du programme INTERREG V A Grande Région

ORIENTER LES SOINS VERS LE PATIENT PARTENAIRE

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Livre Blanc APPS

Pr. Benoît PétréPr. Michèle GuillaumePr. Isabelle BragardClaire LepèreIness OrtizMarine ParidansAude SilvestreBeatrice ScholtesGilles LouisBernard VozEddy HussonNicolas Gillain

Pr. Elizabeth SpitzDehbia MoukahJoris MathieuEstelle FallLaurent MullerBarbara SpickCamille Ricatte Mohamed YounsiManon PongyCharlène LeconstantBéatrice Chiaverini

Dr. Philip BöhmeFatiha Echarif

Pr. Johannes KoppPr. Rüdiger JacobMareike BreinbauerMirko RinnenburgerJoanna Koßmann

Jean-Jacques RepplingerSabrine Lippens

Pr. Peter GallePr. Marcus WörnsDr. Philipp KeilDr. Johannes Niermann

Pr. Michèle BaumannPr. Louis ChauvelAngela OderoIvana PaccoudEtienne Le BihanManon PongyPierre Baumann-CroisierLucas NonnenmacherSenad KaravdicAnne-Marie Hanff

Pr. Olivier ZieglerDr. Phi Linh Nguyen ThiMadeline VoyenLucie GermainThibaut BatisseLaurence FourrièreMarie-Line Erpelding

Pr. Pierre GilletIsabelle PaulMasoumeh TakehMarcela V. Chavez

Université de Liège

Université de Lorraine

LORDIAMN

Université de Trèves

CHL Luxembourg

Université de Mainz

Université du Luxembourg

CHRU de Nancy

CHU de Liège

Les systèmes de santé européens ont besoin de se renouveler pour faire face aux défis sanitaires du XXIème siècle, notamment celui de l’évolution du profil sanitaire de la population et celui du rôle que doivent tenir à l’avenir les différents acteurs de la santé. Au cours de ces dernières années, des expériences internationales ont mis en lumière l’intérêt d’accorder une place active au patient et au citoyen dans les négociations autour des questions de santé. Motivés par le renforcement de la démocratie sanitaire ou par la recherche d’efficience des systèmes de santé, ces mouvements se caractérisent par l’attribution à la personne (patient ou citoyen) d’un statut de partenaire en santé. L’expérience que vit la personne avec sa santé, sa maladie, et son utilisation du système de santé l’amène à construire des savoirs profanes complémentaires aux savoirs scientifiques. Ces savoirs « patients » permettent de mieux encadrer et implémenter les interventions en santé. Cette approche s’applique à diverses activités dans lesquelles cet engagement peut avoir lieu : les pratiques cliniques et la coordination des soins (niveau micro), l’organisation des services et la gouvernance dans les établissements de santé (niveau méso), l’élaboration des politiques de santé (niveau macro), la recherche et la formation des professionnels de santé. Même s’il reste un certain chemin à parcourir, les premiers travaux publiés dans littérature montrent l’intérêt de s’inscrire dans cette approche en santé de par son impact sur la satisfaction des patients, la qualité de leur santé et les économies potentielles qu’elle peut générer. Dans plusieurs pays, des efforts sont entrepris pour impliquer les patients de manière active dans le système de santé. Toutefois, des questions demeurent sur l’implémentation et l’évaluation de ce nouveau modèle que constitue le partenariat et sur son impact sur le système de santé dans le contexte spécifique de chaque territoire.C’est dans ce contexte que le consortium interdisciplinaire APPS, composé de 9 équipes, soutenu par un financement européen et sous le contrôle des autorités régionales partenaires, a développé un programme de recherche sur les questions liées au développement d’une « Approche Patient Partenaire de Soins » (APPS) à l’échelle de la Grande Région (GR). L’objectif général du projet est d’explorer la transférabilité et l’applicabilité de l’approche patient partenaire au sein de la GR en tenant compte de ses caractéristiques socioculturelles, organisationnelles et légales. Sa finalité s’inscrit dans une véritable démarche concertée en matière de prévention en santé en GR.Le Livre Blanc est « une des pièces maitresses » de ce projet. Il propose des pistes de réflexion argumentées pour soutenir le développement du partenariat dans la GR.

RÉSUMÉEXÉCUTIF

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Livre Blanc APPS Livre Blanc APPS

Il s’adresse aux professionnels, patients, responsables d’établissement de santé, mandataires politiques et acteurs de l’enseignement et de la recherche. Les différents chapitres de ce livre proposent une approche holistique pour faire évoluer le système de santé vers le partenariat de soins. Résultat de trois années de recherche et de concertation, le Livre Blanc s’appuie sur des recherches documentaires (analyse de la littérature scientifique et de la législation spécifique de chaque pays), des entretiens et des enquêtes auprès de nombreux acteurs, le repérage et l’analyse d’initiatives en GR et la discussion orientée vers le consensus. Par ailleurs, les propositions de recommandations ont été élaborées et discutées lors d’un séminaire interrégional réalisé en décembre 2019. Le Livre Blanc est structuré en 5 parties qui s’adressent chacune à un public ciblé. La première partie situe le contexte dans lequel s’est réalisé le projet et décrit la méthodologie du programme. La seconde partie est consacrée aux aspects réglementaires de l’approche patient partenaire et à leurs conséquences sur les pratiques et les initiatives analysées sur le terrain. Elle est destinée de manière privilégiée aux mandataires politiques. La troisième partie propose une réflexion sur le développement de stratégies de partenariat au niveau des institutions de santé. Elle concerne les gestionnaires des établissements de santé. La quatrième partie vise à amener les professionnels à s’interroger sur ce que le partenariat de soins peut leur apporter dans leurs pratiques de soins. Elle s’adresse, en particulier, aux acteurs en contact direct avec les patients. La cinquième et dernière partie suggère différentes voies possibles de développement de l’APPS dans les domaines de l’enseignement et de la recherche. Toutes ces parties s’adressent bien évidemment au patient, qui est au cœur de l’APPS. Les prises de position proposées par ce Livre Blanc s’appuient sur les données collectées par le consortium de recherche de 2017 à 2020. Dès lors, ce document ne peut être exhaustif et est appelé à évoluer, basé davantage sur une fonction vectrice de normes que de règles. Pour davantage d’information et pour connaitre nos activités et nos publications, rendez-vous sur le site web du projet APPS (https://www.patientpartner.org/).

Financé par l’Union européenne par le Fonds européen de développement régional « FEDER » à travers le programme

INTERREG V A Grande Région et par les pouvoirs subsidiants (Wallonie - AViQ), le projet interrégional « Approche

Patient Partenaire de Soins » a débuté en 2017. Nous tenons à adresser nos plus vifs et sincères remerciements

pour le soutien constant qui nous a été apporté par les autorités partenaires du programme, les points de contact

régionaux, l’équipe de l’Autorité de gestion et le Secrétariat Conjoint du GECT, en charge de la gestion des projets

INTERREG V A GR, et plus particulièrement Stéphanie Dupuis, point de contact pour la Wallonie, et Alice Giele,

chargée de mission pour le projet APPS, pour la qualité et la bienveillance de leur suivi.

Le projet APPS se base sur les travaux pionniers et novateurs des piliers du Modèle de Montréal, la Professeure Marie-

Pascale Pomey et le PhD Luigi Flora, qui ont fait preuve de tant de talent pour rendre accessible et dynamique cette

notion si complexe qu’est le partenariat. Nous les remercions pour les échanges nourris et les divers travaux publiés

qui ont alimenté et guidé nos réflexions pour l’implémentation de ce concept en Grande Région.

Nous tenons à remercier :

Et bien sûr, nous remercions très chaleureusement les participantes et les participants aux enquêtes, patientes

et patients, citoyennes et citoyens, comités et associations de patients (et plus particulièrement les comités

de patients du CHU de Liège et du CHR de la Citadelle pour les études de cas), les membres du groupe de travail

« patients partenaires » du CHRU de Nancy, professionnelles et professionnels de la santé, gestionnaires et

responsables d’établissements de santé, représentantes et représentants des institutions de la Grande Région…

qui ont donné de leur temps, ces acteurs de terrain du partenariat sans qui rien de ceci ne peut se concrétiser.

Ce Livre Blanc est un premier pas vers le partenariat, qui en appelle de nombreux autres ! Nous remercions

d’ores et déjà toutes les personnes qui liront ce Livre Blanc et qui investiront dans le changement attendu.

Les experts qui nous ont donné leur regard avisé et critique sur les différents documents que nous leur avons soumis (protocoles de recherche, questionnaires, …).

Les membres du consortium APPS, qui ont remporté l’appel à projet Interreg-GR, et se sont investis pleinement dans ce projet.

Nos collègues qui ont enrichi nos réflexions lors de la présentation de nos résultats à différentes manifestations scientifiques.

La société Oh! médias pour son accompagnement dans une stratégie de communication autour du projet.

Les structures qui sont venues appuyer le projet au cours de sa réalisation : la LUSS, fédération francophone des associations de patients et de proches et le porte-parole des usagers des services de santé. Elle œuvre pour l’accès à des soins de santé de qualité pour tous et valorise la participation des usagers aux politiques de santé ; la PAQS asbl, Plateforme pour l’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité des patients. Elle a pour but de promouvoir, de soutenir et d’organiser le développement et la mise en œuvre de démarches d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité dans les institutions de soins de santé à Bruxelles et en Wallonie. Nous remercions également France Assos Santé Grand-Est, l’Union régionale des associations agréées d’usagers du système de santé qui œuvrent à représenter et défendre les intérêts communs de tous les usagers.

REMERCIEMENTS

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TABLE DES MATIÈRES1. Cadre Politico-juridique

RECOMMANDATION PUBLIC-CIBLE MOTS-CLÉS PAGE

1.1. Repenser, à la lueur de la notion de partenariat, les textes législatifs sur les droits du patient et encourager, au niveau de la GR, la recherche d’une harmonisation en ce qui concerne leur intention

• Politique• Professionnel de la

santé (groupe de travail)

• Citoyen-patient

• Partenariat• Cadre législatif• Définitions communes• Participation citoyenne

27

1.2. Inclure des représentants de patients dans les commissions parlementaires des entités de la GR traitant des affaires de santé

• Politique• Collectif de patients• Citoyen-patient

• Comité consultatif• Participation citoyenne• Organes législatifs

28

1.3. Donner les moyens, y compris financiers, aux organisations de patients d’occuper une place dans les institutions politiques du domaine de la santé de la GR

• Politique• Collectif de patients• Citoyen-patient

• Comité• Cadre• Participation citoyenne• Patients• Financement

29

1.4. Assurer la continuité et l’intégration du partenariat dans le parcours de soin

• Politique• Collectif de patients• Etablissement de

santé• Professionnel de la

santé intra et extra-hospitalier

• Parcours de soins• Continuité• Partenariat• Numérique• Réseaux de compétences /

de santé /intégration du partenariat

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2. Stratégies de partenariat dans les établissements de santé

2.1. Formaliser l’engagement du patient et harmoniser les pratiques concernant le partenariat au niveau des établissements de santé en GR

• Etablissement de santé

• Professionnel de la santé

• Collectif de patients• Citoyen-patient

• Partenariat• Engagement• Culture• Établissement de santé

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2.2. Multiplier les formes de participation en différents lieux au sein des établissements de santé de la GR

• Etablissement de santé

• Collectif de patients

• Partenariat• Continuité• Qualité• Décision

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2.3. Accompagner les professionnels de la santé dans le développement d’initiatives relevant d’une culture de partenariat patient

• Etablissement de santé

• Professionnel de la santé

• Collectif de patients

• Temps• Partenariat• Coordination• Point de contact• Formation

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2.4. Doter tous les établissements de santé de la GR d’un Comité de Patients

• Etablissement de santé

• Collectif de patients• Citoyen-patient

• Partenariat• Coordination• Décision

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LISTE DES ABRÉVIATIONS

ABRÉVIATION SIGNIFICATION

APPS Approche Patient Partenaire de Soins

A.R. Arrêté Royal (Belgique)

ARS Agence régionale de santé (France)

AViQ Agence pour une vie de qualité - Agence Wallonne de la santé, de la Protection sociale, du Handicap et des familles (Belgique)

C.A. Conseil d’Administration

CHR Centre Hospitalier Régional

CHRU Centre Hospitalier Régional Universitaire

CHU Centre Hospitalier Universitaire

DES Dossier Electronique de Soins (France)

DU Diplôme Universitaire (France)

ETP Education Thérapeutique du Patient

GBA Gemeinsamer Bundesausschuss - Comité mixte fédéral (Allemagne)

GEIE Groupement Européen d’Intérêt Economique

GECT Groupement Européen de Coopération Territoriale

GR Grande Région

HAS Haute Autorité de Santé (France)

KCE Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (Kenniscentrum – Centre d’Expertise) (Belgique)

Loi HPST Hôpital, Patient, Santé et Territoires (France)

LORDIAMNFédération lorraine des réseaux et structures spécialisées dans la coordination des soins, l’éducation thérapeutique du patient et la formation pour le diabète, l’obésité, les maladies métaboliques et la nutrition

LUSS Ligue des Usagers des Services de Santé (Belgique)

OMS Organisation Mondiale de la Santé

PPFA Patient Partenaire Formateur Pour Autrui

PRT Patienten Rat & Treff (Belgique)

VPP Vlaams Patiëntenplatform – plateforme flamande des patients (Belgique)

ZOAST Zone d’Accès Organisé aux Soins Transfrontaliers

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3. Partenariat dans les relations de soins

RECOMMANDATION PUBLIC-CIBLE MOTS-CLÉS PAGE

3.1. Engager les patients et les professionnels de la santé à s’ouvrir au partenariat

• Citoyen-patient • Entourage du patient• Professionnel de la

santé• Equipe de soins

• Niveau• Autonomie• Décision• Collaboration• Charte

40

3.2. Inclure des représentants de patients dans les commissions parlementaires des entités de la GR traitant des affaires de santé

• Professionnel de la santé

• Collectif de patients• Citoyen-patient • Etablissement de santé

• Espace de réflexion• Communication• Mise en application

41

3.3. Promouvoir et intégrer les différentes formes de soutien social

• Collectif de patients• Citoyen-patient • Entourage du patient• Professionnel de la

santé• Etablissement de santé• Politique

• Aidant• Qualité de vie• Partage d’expérience• Partenariat• Communication

42

3.4. Inscrire l’utilisation des outils d’e-santé dans une perspective de partenariat de soins

• Professionnel de la santé

• Collectif de patients• Etablissement de santé• Politique

• Numérique• Communication• Continuité• Qualité et efficacité• Outils de nouvelles

technologies

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4. Formation

4.1. Enseigner le partenariat (ses concepts, ses méthodes, ses techniques)

• Professionnel de la santé

• Politique• Institut de formation• Etablissement de santé

• Référentiel commun• Compétences

transversales• Formation continue• Formation initiale

51

4.2. Former et accompagner les patients partenaires formateurs pour autrui

• Institut de formation• Professionnel de la

santé• Collectif de patients• Citoyen-patient • Politique

• Objectifs pédagogiques

• Référentiel de compétences

• Méthodes• Accompagnement

52

4.3. Enseigner en partenariat

• Professionnel de la santé

• Collectif de patients• Institut de formation• Politique

• Compréhension• Confiance• Compétences 53

4.4. Développer une ingénierie des activités intégrant les patients partenaires formateurs pour autrui

• Institut de formation• Collectif de patients

• Objectifs pédagogiques

• Méthodes d’apprentissage

• Evaluation• Recrutement

54

5. Recherche

RECOMMANDATION PUBLIC-CIBLE MOTS-CLÉS PAGE

5.1. Situer et distinguer le partenariat dans les démarches d’engagement du patient

• Institut de recherche et de formation

• Professionnel de la santé

• Citoyen-patient

• Définition commune• Consensus 57

5.2. Évaluer la performance des pratiques et processus de partenariat de soins

• Institut de recherche et de formation

• Evaluation• Développement• Impact• Critères• Indicateurs

58

5.3. Identifier les leviers et les barrières au développement du partenariat de soins

• Institut de recherche et de formation

• Fonctionnement du partenariat

• Leviers et barrières59

5.4. Développer et mettre en œuvre la recherche en partenariat

• Institut de recherche et de formation

• Collectif de patients• Citoyen-patient • Professionnel de la

santé• Etablissement de santé• Politique

• Recherche• Co-construction 59

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INTRODUCTION

L’idée de renforcer l’engagement du patient dans le système de soins émerge des évolutions successives qui ont impacté les systèmes des soins de santé au cours des dernières années1-3. L’allongement de la durée de vie et la préservation de la qualité qui l’accompagne, la prévalence croissante des maladies chroniques parmi la population et la nécessité d’une délégation partielle des missions de soins au patient et à ses proches, l’accès simplifié et en masse aux informations sanitaires (correctes ou non), la volonté de ne plus subir le soin et de disposer d’une relative autonomie, sont autant de raisons qui forcent les acteurs de la santé à remettre en question la place occupée jusqu’à aujourd’hui par les patients dans la gestion de leur santé4-7. Il en va de même pour le rôle des professionnels de la santé dans cette dyade et plus largement pour l’organisation et la structuration des systèmes de santé eux-mêmes. Construits sur la base de modèles développés à l’issue de la seconde guerre mondiale, ces systèmes semblent devenir obsolètes pour faire face aux nouveaux challenges posés à la Santé Publique8. Ces nouveaux défis concernent notamment le fardeau grandissant des maladies chroniques et les conséquences socio-sanitaires et économiques qui en découlent. Pour y faire face, l’OMS préconise d’ailleurs fermement à la communauté internationale de réorienter les services de santé vers la prévention des maladies et la promotion de la santé9. Un dernier point, l’un des plus importants, complète ce tableau : il s’agit de la perte de sens et de l’épuisement des professionnels de la santé qui donne des ailes à une nouvelle vision de la relation de soin, moins utilitariste, plus relationnelle et surtout plus humaniste.

De multiples travaux considèrent l’engagement des patients comme un levier pour répondre aux nouveaux défis susmentionnés qui nous attendent, et pour participer, de manière active et dynamique, à l’amélioration générale de la santé des populations ainsi que de la qualité et de la sécurité des soins11.

Diverses approches coexistent, aujourd’hui, pour désigner cet engagement ou cette implication du patient. Parmi ces approches, l’une d’entre elles parait se distinguer, celle du « patient partenaire de soins ». Ce modèle, développé par l’Université de Montréal, est relativement récent et fort plébiscité en Europe francophone car il envisage l’engagement du patient à tous les niveaux du système de santé1.

S’appuyant sur les travaux de Carman et coll. (2013)15, le Modèle de Montréal se décline en deux logiques : d’une part celle d’un continuum de l’engagement du patient (allant de l’information au partenariat, qui en sont les deux extrêmes) et, d’autre part, celle des différentes activités dans lesquelles cet engagement peut avoir lieu : dispensation directe des soins (niveau micro), organisation des services et de la gouvernance dans les établissements de santé (niveau méso), élaboration des politiques de santé (niveau macro), formation des professionnels de la santé et recherche. Orientant le système de santé vers une plus grande implication des patients, le Modèle de Montréal propose ainsi un cadre général pour guider toutes les interventions à mener aux différents niveaux suscités.

Évolution du contexte sanitaire

CONTEXTE GÉNÉRAL

Modèle du patient dit partenaire

“Tous les observateurs s’entendent pour dire qu’il n’est plus possible d’assurer la pérennité du système (de santé) sur ses bases actuelles10.”

Le modèle du « patient partenaire » de Montréal propose un dépassement de l’approche dite centrée sur le patient, en « portant à son apogée » la reconnaissance de l’expertise issue du vécu de la maladie par le patient et en considérant le patient comme un membre à part entière – un partenaire - de l’équipe de soins, au même titre que les autres professionnels12-14. Cette perspective vise à rééquilibrer les rapports au savoir, au contrôle et au pouvoir entre les professionnels de la santé et les malades ; les savoirs expérientiels des patients deviennent complémentaires aux savoirs scientifiques des professionnels de santé12.

- Olivia Gross, Université Sorbonne Paris Nord -

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Figure 1. Modèle de “patient partenaire” de Montréal17

Intérêt de l’Approche Patient Partenaire de Soins (APPS) en Grande RégionLa santé, sa promotion et la prévention des maladies en Europe, est de la compétence de chaque Etat membre, qui reste libre d’organiser et de gérer son système de santé. Ainsi, chaque pays ou territoire de la GR a son propre système de santé. Les régions concernées sont les provinces de Liège (incluant la communauté germanophone) et de Luxembourg pour la Wallonie ; le Grand-Duché du Luxembourg dans son ensemble, les quatre départements de Meurthe-et-Moselle, Meuse, Moselle et Vosges pour la Lorraine, le Land de Sarre et certaines parties du Land de Rhénanie-Palatinat pour l’Allemagne.Toutefois, ces pays ou territoires partagent un socle commun de valeurs qui montrent une volonté commune de protéger et d’informer le citoyen quant à sa santé et à son bien-être. Au Luxembourg, le Ministère de la Santé assure la promotion de la santé et la prévention des maladies de manière intégrée dans toutes les politiques. En Belgique, les politiques de Santé publique se décident au niveau fédéral, mais la promotion et la prévention de la santé dépendent de chaque Région. Pour le sud du pays, cette compétence revient à la Wallonie, sa gestion est assurée par l’Agence pour une Vie de Qualité (AViQ). En France, la Direction de la prévention/promotion de la santé contribue au déploiement des politiques

nationales et au soutien des politiques régionales en matière de prévention, d’éducation pour la santé, de réduction des risques et de promotion de la santé. Elle dépend du Ministère en charge de la Santé. En Allemagne, le Ministère fédéral de la Santé s’occupe de l’information sanitaire et de la prévention des maladies. Ces dernières années, de nombreuses initiatives interrégionales ont vu le jour, notamment dans le cadre de différents programmes européens INTERREG, pour améliorer les conditions de vie des patients résidant au sein du territoire de la GR. Ainsi, ont vu le jour deux observatoires transfrontaliers, constitués en Groupement Européen d’Intérêt Economique (GEIE), et un cadre législatif commun pour favoriser la mise en place de zones d’accès organisées pour les soins transfrontaliers (ZOAST) et de conventions inter-hospitalières. Ces initiatives confirment la volonté des entités de la GR d’améliorer les conditions de vie de ses citoyens, notamment en matière de santé et de soins. C’est dans ce cadre que s’inscrit le projet « Approche Patient Partenaire de Soins (APPS) » dont le but est de favoriser l’offre concertée de prévention de la santé tout en développant une harmonisation transversale de la démarche de partenariat de soins et la promotion d’une approche participative des patients dans les systèmes de soins.Dans plusieurs pays, des efforts ont été entrepris pour impliquer les patients de manière active dans le système de santé16,17. Toutefois, des questions demeurent sur l’implémentation du modèle complet (cf. figure 1) à d’autres systèmes de santé et spécifiques à un territoire donné. Les développeurs de l’APPS eux-mêmes plaident pour des travaux de recherche explorant, plus largement, la « capacité d’autres systèmes de santé à se l’approprier »18. Comment transformer les systèmes de santé dans le cadre de la GR ? Par quoi commencer ? Comment mettre en œuvre ces transformations tout en tenant compte des caractéristiques propres à chaque système de santé ? A notre connaissance, il n’existe aucun travail qui, à ce jour, n’a permis de comprendre intégralement la maturité (la réceptivité et capacité d’intégration) de notre système de santé en GR vis-à-vis de l’approche de partenariat de soins.

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Autrement dit, le projet doit permettre de révéler les conditions nécessaires à la mise en place de cette approche patient partenaire de soins dans un contexte fort différent de celui dans lequel il a trouvé son origine. Il est contributif au développement d’une nouvelle manière d’aborder la place et le rôle des patients en GR, basée sur le concept de patient partenaire.

L’objectif général du projet consiste à explorer la transférabilité et l’applicabilité de l’approche patient partenaire au sein de la Grande Région en tenant compte des caractéristiques socioculturelles, organisationnelles et légales de ce territoire19.

Plus de détail sur les motivations du consortium APPS :

www.patientpartner.org

Article : Revue médicale de Liège, 2018; 73 : 12 : 620-625http://hdl.handle.net/2268/234430Vidéo : https://www.patientpartner.org/Videos

@appsbyinterreg

Le projet s’articule en trois grands axes :

COMPRENDREÀ travers un diagnostic transfrontalier de la situation en GR, il s’agit de mieux cerner la place actuelle et souhaitée de l’APPS et ce à tous les niveaux : de la politique régionale de santé à la relation directe de soins. Cet axe de travail original dans sa démarche questionne l’ensemble des parties prenantes au sujet de l’évolution des soins de santé : patients, professionnels de santé et autres acteurs du domaine de la santé. Les initiatives analysées et caractérisées nous permettent de proposer une définition partagée de l’APPS en GR ainsi qu’une sélection d’actions porteuses et innovantes « transférables et applicables ».

Le projet APPSGrâce à un financement européen et avec l’appui des autorités régionales partenaires, le consortium APPS a voulu répondre aux questions posées par l’implémentation d’une approche patient partenaire à l’échelle du territoire de la GR. L’inscription de notre projet dans l’axe « Services de santé à la population » des projets INTERREG prend tout son sens dans la recherche et le partage des initiatives régionales entre les partenaires impliqués, mais aussi pour favoriser une véritable approche concertée en matière de prévention en santé en GR.Motivées par ces questions, 9 équipes issues de la GR se sont réunies fin 2016 et début 2017 autour du projet « Approche Patient Partenaire de Soins » (APPS). Notre consortium réunit des acteurs de divers horizons scientifiques et professionnels favorables à une approche interdisciplinaire de l’objet d’étude : pédagogie, santé publique, sociologie, psychologie, médecine.Les quatre territoires composant la GR possèdent des disparités tant dans leur système de santé que dans l’offre de services de prévention en santé. Dans ce contexte, le projet APPS va servir de catalyseur pour harmoniser les pratiques autour d’une approche centrée sur le partenariat de soins. Le citoyen circulant en GR, quel que soit son déplacement, devrait pouvoir profiter des meilleures conditions d’accueil possible vis-à-vis de sa santé.

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AGIR

COMMUNIQUER

Cet axe vise à promouvoir l’APPS en soutenant et en évaluant différents types d’actions dans un cadre transfrontalier. Ces actions poursuivent en partie des initiatives existantes au niveau local, mais sont optimisées et renforcées en tirant profit de l’analyse des points forts et points faibles du diagnostic de l’axe 1. Différentes actions ont été repérées et ont fait l’objet d’une attention particulière: les comités de patients, les outils des nouvelles technologies et les formations des professionnels de santé.

Les résultats et les recommandations issus de nos travaux sont diffusés à l’aide de plusieurs actions de communication, à destination de publics divers (communiqués de presse, vidéos, campagne de sensibilisation du grand public, Livre Blanc) afin d’amener les patients et les professionnels de santé à se sentir concernés par le changement de paradigme suscité par l’APPS.

Le Livre Blanc propose des pistes argumentées pour soutenir le développement du partenariat dans la Grande Région. Il s’adresse aux professionnels, patients, responsables d’établissements de santé, mandataires politiques et acteurs de l’enseignement et de la recherche.

MÉTHODE D’ÉLABORATION DU LIVRE BLANCPrincipes généraux de la méthode Les propositions formulées dans ce Livre Blanc sont le fruit d’un processus de recherche répondant aux principes guides qui suivent. La démarche proposée se veut :

exploratoire : l’approche patient partenaire est émergente en GR. Le projet APPS a permis d’identifier des initiatives existantes en GR tout en analysant le niveau de préparation des systèmes de soins de santé à s’orienter vers cette manière de « faire la santé » ;

participative et de proximité : il s’agit d’une démarche de co-construction avec les parties prenantes interrogées tout au long du processus ;

ancrée scientifiquement : les membres du consortium s’appuient sur les données récentes et probantes de la littérature quant à l’implémentation de mesures sur le partenariat de soins ;

orientée vers le changement : le consortium APPS se veut vecteur de changement dans les pratiques de santé à travers l’appropriation par les acteurs concernés des recommandations proposées dans ce Livre Blanc ;

contributive au développement d’un réseau interrégional : l’objectif du consortium l’APPS est d’organiser et de pérenniser une « alliance transfrontalière ». Il sera ensuite nécessaire de poursuivre les actions initiées et de développer de nouvelles actions en fédérant les acteurs locaux publics et privés issus des différentes régions.

Une analyse documentaire au niveau international et au niveau de la GR a été menée en se basant sur une grille de lecture (des repères) pour explorer la situation du terrain, mais aussi le cadre plus ou moins formel (hard and soft laws) qui régule les démarches de partenariat de soins à l’échelle de la GR. Plus de 5.000 références de la littérature scientifique20 et 200 textes de réglementation en matière de santé ont été triés puis classés pour conserver ceux qui étaient les plus pertinents vis-à-vis de notre projet de recherche.

Processus de travailExploration de la littérature et du cadre politico juridique

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mobilisent l’expertise des patients en commençant par les filières d’enseignement en sciences médicales et en soins infirmiers. Le suivi et l’évaluation des initiatives qui ont été retenues ont apporté un éclairage sur les freins et leviers à l’implémentation de démarches de partenariat. Ces investigations ont donné aux partenaires du consortium APPS de la matière pour élaborer une première proposition de pré-recommandations dont le but est de combler l’écart entre la situation actuelle observée et la vision prévisionnelle partagée d’un système de santé plus engagé vers un partenariat de soins.

En s’appuyant sur des observations et des rencontres avec les acteurs de terrain, différentes actions/initiatives mobilisant ou visant le renforcement du partenariat de soins ont fait l’objet d’une attention particulière de la part des partenaires du projet. Ces dernières concernent des comités de patients ou d’usagers dans les établissements de santé, des outils technologiques de l’information et de la communication, mais aussi des initiatives d’enseignement qui impliquent des patients appelés « ressources » dans la formation des professionnels de santé. Ainsi, pendant 3 ans, à l’aide d’une approche semi-participante, nous avons été « immergés » dans plusieurs comités de patients pour mieux comprendre les mécanismes de leur fonctionnement. Parallèlement, de manière à la fois quantitative et qualitative, nous avons mené l’évaluation d’outils de communication numériques. Enfin, nous avons identifié, cartographié, et analysé les stratégies d’enseignement qui

Un évènement de concertation de type « workshop » a permis de faire évoluer ces pré-recommandations en les soumettant aux regards croisés de différents acteurs de la santé : représentants d’associations de patients, d’institutions de soins intra et extrahospitalières, des autorités sanitaires, du monde académique et de professionnels de la santé, issus de la GR (65 participants). Lors de ce workshop, 4 ateliers thématiques ont été proposés : cadre légal et politique ; développement dans les établissements de santé ; relation patient/professionnel de santé et outils de communication ; formation. Pour chaque atelier, différents orateurs ont été invités à faire une courte présentation des résultats des actions du projet, ce qui a permis de cerner la thématique abordée. Le modérateur présentait alors les pré-recommandations pour les soumettre au débat, leur permettant ainsi d’être étoffées, complétées, illustrées par des exemples concrets.Grâce à la présence de Luigi Flora, l’un des membres fondateurs des démarches de patient partenaire à l’Université de Montréal, cette journée d’échanges a été ponctuée par une mise en perspective de nos travaux au regard des approches transatlantiques.Lors de communications orales ou écrites, les partenaires du consortium APPS ont également eu largement la possibilité de confronter leurs résultats aux éléments de discussions de différentes instances scientifiques, au cours d’événements scientifiques. Les retours d’experts internationaux qui ont participé à ces événements ont enrichi considérablement nos conclusions.

Une large consultation de patients, professionnels de santé et gestionnaires d’établissements de santé a été réalisée pour connaître leurs pratiques/expériences actuelles en matière de démarche de partenariat, les stratégies déjà mises en place, leur vision d’un idéal à atteindre et des mesures/propositions qui peuvent être mises en place pour tendre vers cet idéal. Au total, presque 300 personnes ont été consultées sur le territoire de la GR (voir tableau ci-dessous).

Ateliers workshop & communications

Concertation des parties prenantes et repérage d’initiatives

ENQUÊTES EXPLORATOIRES DU PROJET APPSType d’enquête Outil de collecte Public concernés Échantillon

Delphi Questionnaire en deux tours

Experts internationaux 26

Quantitative Questionnaire en ligne

Institutions hospitalières

(par le biais des responsables hospitaliers)

64 hôpitaux (sur 126 invités à répondre)

Qualitative Entretiens semi-directifs

Infirmiers et médecins pratiquant en hôpital au sein de

la Grande Région

78

Quantitative Questionnaire en ligne et papier À venir

Qualitative Focus-group Patients atteints de pathologie(s)

chronique(s) domiciliés en Grande

Région

90

Quantitative Questionnaire en ligne et papier À venir

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Livre Blanc APPS Livre Blanc APPS

Forts de l’ensemble des retours obtenus sur les pré-recommandations présentées lors du workshop de décembre 2019, les partenaires du projet ont tenté de les faire évoluer en y intégrant, de façon précise et argumentée, les résultats des activités qu’ils ont menées et des actions repérées dans la GR en tant que « bonnes pratiques » ou « pratiques prometteuses », ainsi que les apports des initiatives internationales. Un construit théorique constant de « va-et-vient » avec la littérature scientifique internationale a ainsi pu être étayé et validé dans les nouvelles propositions.

Ce Livre Blanc se veut être une prise de position située dans le temps et s’appuyant sur les données collectées par le consortium de recherche. Aussi doit-il être considéré comme un document non exhaustif, appelé à évoluer, basé davantage sur une fonction vectrice de normes que de règles.

Ecriture finale des recommandations

Précautions de lecture

PRÉSENTATION GÉNÉRALEDE LA STRUCTURE DULIVRE BLANCLe Livre Blanc est structuré en 4 parties qui s’adressent respectivement à des publics ciblés :

Toutes ces parties s’adressent bien évidemment au patient, qui est au cœur de l’Approche Patient Partenaire de Soins. L’ensemble des parties sont rédigées selon le même plan. Les propositions de développement sont contenues dans les sous-titres des différentes parties et sont soutenues/argumentées par des références à la littérature et des observations réalisées dans le cadre du projet (indiquée par le pictogramme APPS). Enfin, un choix de bonnes pratiques repérées en GR vient illustrer les propos. Elles sont signalées par la loupe.

La première partie concerne les aspects réglementaires de l’approche patient partenaire et de leur relation avec les pratiques et initiatives rencontrées sur le terrain. Elle est destinée de manière privilégiée aux mandataires politiques.

La deuxième partie donne des propositions de soutien et développement de stratégies de partenariat dans les institutions de santé. Elle touche plus particulièrement les gestionnaires d’établissement de santé.

La troisième partie s’adresse aux professionnels de la santé afin de les amener à s’interroger sur leurs pratiques de soins sous l’éclairage du partenariat de soins. Elle concerne plus particulièrement les professionnels de santé directement en contact avec les patients.

La quatrième partie suggère différentes voies possibles de développement dans les domaines de l’enseignement et de la recherche. Elle est dédiée, en particulier, à ces acteurs.

1

3

2

4

Bonnes pratiquesObservations

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Livre Blanc APPS Livre Blanc APPS

1. Richards T, Montori VM, Godlee F et al.(2013) — Let the patient revolution begin. BMJ, 2013, 346, f2614.

2. Institute of Medicine — Crossing the Quality Chasm : a New Health System for the 21st Century. National Academy of Sciences,

Washington, DC, 2001.

3. Bradshaw PL. (2008) — Service user involvement in the NHS in England : genuine user participation or a dogma-driven folly? J

Nurs Manag, 2008, 16, 673681.

4. Hojk, RB. (2013) — Targets for non-communicable disease: what has happened since the UN summit? BMJ, 2013, 346 (f3300).

5. d’Ivernois JF, Gagnayre R. (2011)— Apprendre à éduquer le patient, approche pédagogique. Maloine, Paris, 2011.

6. Deccache A, Aujoulat I. (2001) — A European perspective: common developments, differences and challenges in patient education.

Patient Educ Couns, 2001, 44, 7-14.

7. Anderson RM, Funnell MM. (2010) — Patient empowerment: Myths and misconceptions. Patient Educ Couns, 2010, 79, 277–282.

8. MacIntosh E, Rajakulendran N, Khayat Z, et al. (2016). Transforming health: Shifting from reactive to proactive and predictive

care. Disponible sur https://bit.ly/2ldlvwF consulté le 11 novembre 2017.

9. World Health Organization. (2013). Global action plan for the prevention and control of noncommunicable diseases 2013-2020.

World Health Organization, Geneva. Disponible sur https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/94384/9789241506236_%20

eng.%20pdf;jsessionid=EEC66CCB67B502EACCC8F67F5E5A8FF4?sequence=1 consulté le 11 novembre 2017.

10. Gross, O. (2017) - L’engagement des patients au service du système de santé. Paris : Doin Editions

11. Brosseau M, Verma J. (2011) — Engaging patients to improve healthcare quality. Healthc Q, 2011, 14, 16-18.

12. Pomey MP, Flora L, Karazivan P, et al. (2015) — «Le Montreal model : enjeux du partenariat relationnel entre patients et

professionnels de la santé». Santé Publique, 2015/HS, S1, 41-50

13. Karazivan P, Dumez V, Flora L, et al. (2015) — The patientas-partner approach in health care : a conceptual framework for a

necessary transition. Acad Med, 2015, 90, 437-441

14. Flora L, Berkesse A, Payot A, et al. (2016) — L’application d’un modèle intégré de partenariat dans la formation des

professionnels de la santé : vers un nouveau paradigme humaniste et éthique de coconstruction des savoirs en santé. J Int

Bioethique, 2016, 27, 59-72

15. Carman KL, Dardess P, Maurer M, et al. (2013) — Patient an family engagement: a framework for understanding the elements and

developing interventions and policies. Health Aff (Millwood), 2013, 32, 223- 231.

16. Center for Advancing Health. (2010). A New Definition of Patient Engagement: What is Engagement and Why is it Important?”

Disponible sur http://www.cfah.org/pdfs/CFAH_Engagement_Behavior_ Framework_current.pdf consulté le 11 novembre 2017.

17. Pomey MP, Ghadiri DP, Karazivan P, et al. (2015) — Patients as partners: a qualitative study of patients’ engagement in their

health care. PLoS One, 2015, 10, e0122499.

18. Flora L, Berkesse A, Payot A, et al. (2016) — L’application d’un modèle intégré de partenariat dans la formation des

professionnels de la santé : vers un nouveau paradigme humaniste et éthique de coconstruction des savoirs en santé. J Int

Bioethique, 2016, 27, 59-72.

19. Thabane L., Cambon L., Potvin L., Pommier J., Kivits J., Minary L., Nour K., Blaise P., Charlesworth J., Alla F. and Discussion

Panel (2019) – Population health intervention research: what is the place for pilot studies? Trials 2019, 20:309 - https://doi.

org/10.1186/s13063-019-3422-4

20. Ortiz Halabi I; Scholtes B.; Voz B.; Gillain N.; Durieux N.; Odero A.; Baumann M.; Ziegler O.; Gagnayre R.; Guillaume M.; Bragard I.;

Pétré B.; The APPS Interreg Group (2020) – “Patient participation” and related concepts: A scoping review on their dimensional

composition. Patient Education and Counseling, 2020, 103 :5-14

Références 1. CADRE POLITICO-JURIDIQUE

Un des objectifs de l’Union Européenne (UE) est de promouvoir et d’améliorer la participation active des patients à la prise de décision au niveau de l’UE (Charte européenne des droits des patients, 2002). Néanmoins, une analyse approfondie du cadre politico-juridique des différents États de la GR, en tant que facteur structurel influençant l’engagement du patient dans le processus de fabrication des politiques de santé, a permis de mettre en évidence que celui-ci s’est développé entre les États concernés de manière distincte tant dans le temps que dans la forme. En conséquence, certains États sont aujourd’hui dotés d’un cadre politico-juridique plus mature que d’autres pour soutenir et encourager les démarches de partenariat de soins, comme cela est décrit concernant l’implication des patients dans les politiques de santé ci-après.

La question de la participation des patients dans la politique de santé est originellement liée au rôle des organismes assureurs (les mutualités), qui outre leur statut de simples assureurs visent aussi à représenter les patients et faire entendre leur voix. Cependant, du fait de leurs diverses tâches, leur positionnement est complexe et ils sont davantage axés sur la représentation des intérêts de l’ensemble de la population assurée que sur la représentation des intérêts spécifiques des patients.Jusqu’à la fin du siècle dernier, la participation des patients au processus d’élaboration des politiques de santé semblait absente, en dehors de celle proposée par les mutuelles. À la fin des années 90, la création des fédérations des associations de patients francophone (LUSS), flamande (VPP) et germanophone (Patienten Rat & Treff), ainsi que l’adoption de la loi sur les droits du patient en 2002 amorcent l’institutionnalisation de l’engagement du patient. À côté de ces fédérations essentiellement chargées d’informer les associations de patients et les usagers des services de santé, la loi de 2002 opère un nouveau déplacement le long du continuum de l’engagement du patient pour tendre vers le niveau de consultation. En effet, en sus du renforcement du statut juridique du patient, cette loi prévoit la création de la Commission fédérale des droits des patients dans laquelle siègent des représentants

Introduction

En Belgique

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des patients (la LUSS et la VPP). Elle se voit notamment confier la mission de formuler des avis au Ministre en charge de la Santé publique. Dans la foulée de cette loi-clef, de nouvelles normes juridiques fédérales apparaissent et viennent consolider ce niveau d’engagement du patient. Ainsi, sont créées dans le domaine de la Santé publique des institutions parastatales fédérales dans lesquelles des représentants des fédérations des associations de patients siègent au sein d’organes consultatifs. Il s’agit notamment du comité consultatif de l’Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé (A.R. de 2007) et la section consultative de l’Observatoire des maladies chroniques (A.R. de 2010). Au sein de ces organes, les représentants des patients ne disposent pas d’une voix délibérative, mais bien consultative. Plus récemment une nouvelle évolution s’est produite pour tendre vers le niveau de collaboration avec l’apparition de représentants de patients dans le C.A. du Centre fédéral d’expertise en soins de santé (KCE) (loi de 2015). Cette nouvelle tendance semble être soutenue par la Note de politique générale de la Ministre de la Santé (19/10/17) qui affirme sa volonté d’accroitre l’implication du patient dans la politique de santé. Très récemment, cette intention s’est en partie concrétisée par l’intégration de représentants de patients dans le Conseil Fédéral des établissements hospitalier (A.R. de 2018), organe qui se prononce sur toutes les questions relatives à la programmation et au financement des hôpitaux. Enfin, en Belgique, force est de constater que c’est essentiellement par l’intermédiaire des fédérations des associations de patients que les patients sont représentés en matière de politique de santé.

En France, la question de la participation du patient dans la politique de santé ne se pose pas avant le début des années 70. C’est en 1974 avec, d’une part, la parution du décret relatif aux règles de fonctionnement des centres hospitaliers, et d’autre part, la charte du malade hospitalisé que s’enclenche la reconnaissance institutionnelle de l’engagement du patient. Ces deux textes énoncent pour la première fois la notion de droits des malades au respect de leur dignité́ et de leur personnalité́, et au droit à l’information. Peu de temps après la décennie 80, marquée par la crise du SIDA, le niveau d’engagement du patient va connaître une nouvelle avancée et dépasser le niveau d’information pour tendre vers un niveau de consultation. Cette évolution est amorcée en 1991, suite à l’adoption de la Loi Évin-Durieux portant sur la réforme hospitalière, et qui formule les prémices d’une représentation des usagers dans les établissements de santé. Cette évolution est corroborée en 1996 avec les ordonnances de Jupé qui instaurent une représentation des usagers au sein des C.A. des établissements de santé. En 2002, la loi Kouchner consolide le degré d’engagement du patient en posant les jalons de la démocratie sanitaire. En ce sens, elle prévoit notamment un renforcement des droits à l’information et au consentement du malade, une participation accrue de l’usager du système de santé avec la mise en place dans chaque établissement de santé d’une Commission des relations avec les usagers et de la qualité́ de la prise en charge (CRUQPC) et l’intégration de représentants des usagers dans la Conférence nationale de santé. Bien que la loi d’août 2004 relative à la politique de santé publique soit à l’origine des balbutiements

En Allemagne, les préludes de l’implication du patient dans la politique de santé sont plus tardifs que dans les deux autres pays de la GR évoqués. C’est en 2003 avec la fondation de l’Agence indépendante du Commissaire aux Affaires des Patients du Gouvernement national (Patientenbeauftragte der Bundesregierung) que commence l’institutionnalisation de l’engagement du patient. Ce nouvel acteur a pour principale fonction de défendre les intérêts des patients auprès du gouvernement et du ministère de la santé. À côté de ce dernier, une institution parapublique va voir le jour en 2004 et renforcer le degré d’engagement du patient pour le faire tendre vers le niveau de consultation. Il s’agit du Comité mixte fédéral (Gemeinsamer Bundesausschuss, GBA) qui exerce une influence sur le système de soins de santé allemand par le biais de ses neuf sous-comités, chacun d’entre eux se concentrant sur un domaine thématique différent de la prestation et du remboursement des services de santé. En vertu de la loi, la représentation des patients est obligatoire à toutes les réunions des sous-comités du GBA, et il existe des dispositions légales qui définissent spécifiquement les caractéristiques des organisations de patients éligibles. Cependant, les représentants des patients n’ont pas le droit de vote dans les décisions des sous-comités. Afin de soutenir et de structurer le travail des représentants des patients, une unité indépendante de représentation des patients (Stabstelle Patientenvertretung) avec son propre conseil de coordination (Koordinierungsausschuss) a été créée au sein de la GBA en 2008. Cette nouvelle entité amorce un accroissement du niveau d’engagement vers une forme de collaboration. En 2013, la loi allemande sur les droits des patients, adoptée sur la base de la directive européenne 2011/24/CE relative aux droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, viendra essentiellement consolider le niveau d’information déjà existant, même si elle avait envisagé (quand elle n’était qu’un projet de loi) de renforcer le niveau de collaboration en octroyant aux représentants des patients siégeant au sein du GBA un droit de vote délibératif. Plus récemment, l’accord de coalition (2017-2020) du gouvernement actuel fait état de l’importance de la place du patient au sein du système de santé en déclarant notamment que « les soins centrés sur le

d’un accroissement du degré d’engagement, c’est avec la loi HPST de 2009 que s’affirme une progression vers un niveau effectif de collaboration2. De fait, elle accroit la participation des usagers à la définition des programmes et actions régionales de santé avec l’implication des représentants des usagers qui émettent un avis sur le projet régional de santé. À partir de 2015, diverses ordonnances vont venir renforcer ce degré d’engagement en permettant notamment aux commissions d’usagers (anciennement CRUQPC) de proposer un projet des usagers dans chaque établissement. Le niveau d’engagement du patient est amené à encore évoluer dans les années à venir, en témoignent récemment la loi promulguée en juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé ainsi que la création par l’HAS (Haute Autorité de Santé) d’un conseil pour l’engagement des usagers.Enfin, actuellement en France, l’implication des patients en matière de politique de santé se fait essentiellement par des représentants des usagers.

En France

En Allemagne

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patient constituent le principe directeur de notre système de santé ». Enfin, en Allemagne, l’implication des patients en matière de politique de santé se fait essentiellement par le Commissaire aux affaires des patients, par les organisations de patients et par l’unité indépendante de représentation des patients.

Face à ce constat, à travers 4 recommandations détaillées ci-après, notre projet proposera des pistes afin d’harmoniser et de promouvoir l’approche du patient partenaire de soins dans les politiques de santé en GR.Bien qu’il existe un Sommet de la Grande Région, piloté par les chefs des Exécutifs des

régions partenaires, qui impulse la coopération transfrontalière, la GR ne possède pas d’organes législatifs interrégionaux. Les systèmes politiques des pays de la GR restent différents. Ainsi, la Belgique et l’Allemagne ont plusieurs niveaux de pouvoir en raison de leur système fédéral, contrairement à la France et au Luxembourg, qui ont des pouvoirs de décision centralisés, ce qui influence sans conteste les politiques et les réformes engagées.

Les différents pays ressortissants de la GR se sont dotés de textes régissant le droit des patients de façon différente tant dans le temps que dans la forme. Alors que la Belgique et la France ont adopté ces textes au tout début de ce siècle, l’Allemagne et le Luxembourg l’ont fait dans le courant dans les années 2010. Cependant, nonobstant des différences de forme qui portent sur la mise en place ou non de dispositifs permettant l’engagement du patient en matière de politique de santé, les différentes législations relatives aux droits des patients, en cohérence avec la Charte européenne des droits des patients (2002), prévoient toutes un renforcement du statut juridique du patient en l’informant des différentes prérogatives dont il est détenteur (par exemple droit à l’information, droit à donner son consentement éclairé, etc.). Pour repenser ces différents textes législatifs à la lueur de la notion de partenariat, il convient de partir de la réalité du terrain en s’appuyant sur les pratiques partenariales existantes dans chaque pays. Ces dernières devraient être relayées et soutenues par des entrepreneurs de morale (acteurs de la société qui défendent les droits des patients, par exemple : collectifs de patients, associations de défense des intérêts des patients, etc.) de façon à influencer le pouvoir politique et l’inciter à revoir la loi en accord avec la notion de partenariat. L’écriture d’un nouveau texte de loi permettra ensuite de diffuser à plus large échelle les différentes normes qui sous-tendent le partenariat. La définition d’un socle commun de valeurs par les principaux entrepreneurs de morale de chaque État de la GR devrait être proposé de façon à encourager la recherche d’une harmonisation en ce qui concerne l’esprit des textes relatifs aux droits des patients. Dans cette optique, divers concepts devront encore être précisés via des groupes de travail interrégionaux afin d’obtenir le consensus sur des notions telles que celles de partenariat, des différents statuts des patients et de l‘entourage (aidant, personne de confiance…), de l’autonomie du patient, … Par ailleurs, les entrepreneurs de morale devraient aussi s’accorder pour approfondir et étendre la portée informative des différentes lois sur les droits du patient de façon à ce que ce dernier ne soit plus seulement vu comme un sujet protégé par des droits, mais bien comme un véritable acteur de santé.

c’est avec l’augmentation démographique de ces dernières décennies, que la question de l’institutionnalisation de l’implication des patients dans les politiques de santé s’est posée. Le pays étant l’un des plus petits en Europe, et doté d’une forte culture associative, la proximité entre décideurs et usagers a toujours permis à la parole des patients d’être omniprésente.Cependant en 2005, le plan d’action eSanté lancé par le gouvernement luxembourgeois entame une implication des patients par la technologie en leur offrant la possibilité de contribuer à l’amélioration de la qualité et de la performance des soins de santé, notamment par une meilleure disponibilité des données relatives à la santé des citoyens et des citoyens mobiles (frontaliers). La volonté de l’implication du patient se poursuit avec la loi de 2014 sur les droits du patient pour que s’enclenche l’institutionnalisation de son engagement en l’informant de ses droits et obligations, et en définissant les missions du service national d’information et de médiation santé. Cette loi précise les principes, notamment, généraux (respect et loyauté, accès à des soins de santé de qualité, libre choix du prestataire de soins de santé, continuité des soins, droit à l’information, droit à l’assistance); la représentation du patient (personne de confiance) ; le dossier patient et les données relatives à la santé du patient (tenue à jour du dossier patient, droits d’accès aux dossiers). Par ailleurs, depuis 2014, les associations de patients sont invitées à participer à plusieurs projets et plans nationaux. Elles font partie tant des structures de gouvernance que des groupes de travail ainsi que de certains travaux du Conseil Scientifique dans le domaine de la santé. Pour l’implémentation du plan cancer 2014-2018, une plateforme nationale cancer (PNC) a été mise en place intégrant dans la commission de suivi un représentant de l’association « Patienten Vertriedung ». En 2017, le ministère déclare souhaiter impliquer davantage les patients et les associations de patients dans les politiques de santé. Dans d’autres plans nationaux (antibiotiques 2018-2022, soins palliatifs, maladies rares 2018-2022, etc.), les comités de pilotage font également appel à des représentants d’associations de patients et à la « Patienten Vertriedung ». Cette prise en compte progressive de la voix des patients participe à une véritablement reconnaissance institutionnalisée de leur engagement à un niveau « consultatif ». Enfin, au Luxembourg, l’implication des patients en matière de politique de santé se fait essentiellement par l’intermédiaire des associations de patients et par l’institution « Patienten Vertriedung », reconnue comme représentation nationale des patients.

Au Luxembourg

Repenser, à la lueur de la notion de partenariat, les textes législatifs sur les droits du patient et encourager, au niveau de la GR, la recherche d’une harmonisation en ce qui concerne leur intention

Recommandation 1.1.

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Enfin et surtout, il convient de promouvoir la participation de la population en général (ou par le biais d’associations) aux événements liés à la politique de santé. À cette fin, les actions existantes devraient être poursuivies (par exemple : en Belgique, le récent plan wallon de prévention et de promotion de la santé qui encourage la mise en œuvre d’actions communautaires ; la plateforme européenne sur la politique de santé de l’UE) et les initiatives novatrices encouragées afin de trouver de nouveaux moyens d’impliquer davantage le public dans les décisions sociopolitiques.

Pour de nombreuses personnes et de nombreux pays, la participation des patients est synonyme de démocratie sanitaire. De nombreuses initiatives ont été prises par les différents pouvoirs politiques des pays de la GR, la plupart via la création de nouvelles institutions ou conseils afin d’inclure autant que possible les patients dans le système de santé. Les patients sont ainsi devenus membres de conseils d’administration de différentes institutions / administrations, par le biais des associations de patients ou par représentation directe, et participent au processus d’élaboration des politiques de santé.En outre, les patients sont impliqués dans l’évaluation de la qualité des soins. En Belgique et en France, ils sont consultés par l’intermédiaire de leurs représentants, par exemple, pour évaluer la qualité de vie, le système de santé et pour garantir la qualité, la sécurité et l’efficacité des produits pharmaceutiques. La présence de représentants de patients dans des conseils consultatifs se limite à un petit nombre d’institutions seulement dans les différents pays de la GR. Pourtant, la participation des patients par le biais d’institutions / comités offre des responsabilités de co-développement et d’évaluation. En vue de renforcer l’implication des patients dans le processus de fabrication des politiques de santé, l’inclusion de représentants de patients dans les commissions parlementaires des entités de la GR traitant des affaires de santé permettrait d’accorder plus de poids à la voix des patients. En conséquence, les représentants de patients ne seraient plus uniquement considérés comme des conseillers, mais bien comme des co-concepteurs dans l’élaboration des politiques de santé. Ainsi, les futures lois dans le domaine de la santé pourront être élaborées conjointement dans l’intérêt des patients (comme pour la Commission européenne qui impose la consultation des représentants des patients).

La participation des représentants des patients / des organisations de patients au niveau politique a jusqu’à présent été subventionnée de manière hétérogène au sein de la GR. Des ressources financières devraient être mises à la disposition des associations / institutions de patients au niveau politique, afin d’assurer leur participation dans la continuité et pour rendre compte de leur investissement en temps.L’exemple pourrait venir d’expériences probantes menées à l’étranger, où de réelles possibilités de rétribution pour les patients ou les associations de patients existent (Modèle de Montréal). Des dotations pourraient être envisagées. Conjointement, une réflexion sur la forme la plus adéquate à donner à cette participation des patients, et, par conséquent, sur les bénéficiaires légitimes de ce soutien public, devrait être engagée. La place et le rôle des représentants des patients au niveau politique sont à clarifier par l’élaboration d’un cadre statutaire, quels que soient les domaines d‘intervention des patients partenaires.

En Wallonie, avec la création de la LUSS (Ligue des usagers des services santé) fin des années 1990, un groupe d’intérêt a été créé qui regroupe aujourd’hui environ 80 associations de patients et de familles et qui soutient et conseille diverses organisations de patients. La LUSS est financée sur base annuelle par des subsides publics venant de l’autorité fédérale et des entités fédérées. La LUSS comporte à ce jour 19 mandats politiques aux différents niveaux de pouvoir.

Création de l’Union Nationale des associations agréées d’usagers du système de santé appelé France Assoc Santé en 2017 : représentation et défense des intérêts des patients et des usagers. Son objectif est de renforcer la démocratie sanitaire et la participation des usagers du système de santé en collaborant avec les agences régionales de santé. Elle assure plusieurs missions : organiser et mieux coordonner la représentation des usagers; rendre des avis aux pouvoirs publics sur les politiques de santé ; agir en justice pour défendre ses intérêts et ceux des citoyens ; animer un réseau associatif sur l’ensemble du territoire ; former les représentants des usagers du système de santé.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Inclure des représentants de patients dans les commissions parlementaires des entités de la GR traitant des affaires de santé

Recommandation 1.2.

Donner les moyens, y compris financiers, aux organisations de patients d’occuper une place dans les institutions politiques du domaine de la santé de la GR

Recommandation 1.3.

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En Belgique, les projets pilotes de soins intégrés pour les maladies chroniques ont été mis en place en janvier 2018. L’objectif est de fluidifier et de rationaliser les soins pour les personnes ayant une affection chronique et d’améliorer la collaboration entre les institutions, les professionnels de santé et le patient afin que ce dernier puisse bénéficier de meilleurs soins et d’une meilleure qualité de vie. Ces projets développent plusieurs composantes des soins intégrés dont celle d’empowerment du patient, vu comme un processus permettant notamment de renforcer la collaboration entre le professionnel de santé et le patient via la prise de décision partagée.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

1. Health care system reform, Law of 17 December 2010 (art. 60ter et 60quater). Available from: http://legilux.public.lu/eli/etat/

leg/loi/2010/12/17/n12/jo

2. Loi HPST, Hôpital, Patient, Santé et Territoires, 2009 (France)

Références

Introduction

2. STRATÉGIES DE PARTENARIAT DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ

Les cadres juridiques et législatifs des quatre pays qui composent la GR sont hétérogènes, notamment en ce qui concerne l’implication des patients dans le système de soins et sa mise en œuvre pratique dans les établissements de santé. Le projet APPS a tenté d’identifier puis de faire la synthèse de ces différentes pratiques afin de regrouper les dénominateurs communs. Le but est de constituer une base interrégionale commune consensuelle qui renforcera la participation des patients et le partenariat dans toutes les régions. Destinées à toute personne impliquée dans les soins de santé, les recommandations ci-après ont été élaborées sur base d’études interrégionales et de recherches bibliographiques. Bien que le projet APPS soit centré sur les initiatives au sein des institutions hospitalières, ces recommandations s’étendent également à d’autres contextes institutionnels, tels que les services de soins primaires.

Le développement d’une approche patient partenaire au sein des établissements de santé demande qu’au préalable un environnement favorable soit établi. L’intégration de cette culture dans les lignes directrices qui régissent à la fois la structure et la stratégie des établissements de santé permettrait de sensibiliser, mais surtout de motiver les acteurs concernés à l’importance de cette approche.

Formaliser l’engagement du patient et harmoniser les pratiques concernant le partenariat au niveau des établissements de santé en GR

Recommandation 2.1.

Assurer la continuité et l’intégration du partenariat dans le parcours de soin

Recommandation 1.4.

Les démarches de partenariat ne tireront profit de leur valeur ajoutée que si elles sont réfléchies à tous les maillons de la chaine de soins ou de santé, pas seulement à l’hôpital mais sur tout le parcours de soins d’un patient (y compris les services de promotion/prévention en santé). Aussi, cette orientation dans la manière de penser la santé devrait guider les réformes de santé qui tendent à redéfinir l’organisation des services de santé de manière intégrée.

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Une enquête menée dans les hôpitaux de la Grande Région1 montre que la plupart d’entre eux (plus de 80 %) incluent la participation des patients dans leur philosophie de soins et que la moitié d’entre eux l’ont inscrite dans leur plan stratégique. Par ailleurs,

les établissements de santé qui intègrent le partenariat dans leur vision stratégique sont également ceux où la mise en œuvre d’initiatives s’est avérée la plus fréquemment observée. Ceci est encourageant pour la poursuite de l’implémentation de pratiques partenariales. Néanmoins, des obstacles persistent et empêchent la pleine participation des patients. Ceci se reflète dans le décalage observé entre les déclarations comprises dans les politiques des institutions interrogées, qui sont favorables aux patients et aux familles et la participation réelle des patients dans les pratiques des établissements de santé. Le recours aux comités de patients, patients experts, les patients participant à des formations sur les soins de santé ou à la production de ressources, etc. ne sont que trop peu souvent déployés dans les hôpitaux de la GR.

Les résultats de l’étude interrégionale menée en GR4 montrent que les formes de participation des patients ne sont que partiellement utilisées. En effet, peu d’hôpitaux impliquent les patients dans l’amélioration de la qualité, par exemple dans l’élaboration d’un

protocole de qualité ou dans un comité sur la qualité des soins (moins de 25 % le font régulièrement). Des bonnes pratiques peuvent être observées, principalement en Lorraine et en Wallonie, dans la mise en place de comités de patients ou l’implication d’associations de patients à l’hôpital ou dans un comité sur la qualité des soins.

Au regard de ces constats, nous encourageons tous les établissements de santé à se doter d’une charte visant à inscrire dans les pratiques un partenariat davantage orienté vers le patient. Les établissements de santé devraient intégrer la voie du partenariat qu’elles souhaiteraient suivre dans tous leurs documents qui décrivent leur vision, leur stratégie ou leur orientation. Une véritable promotion de l’approche patient partenaire au sein des établissements ne pourra voir le jour que si elle est menée avec tact et sans contrainte au niveau de sa mise œuvre. Les parties prenantes doivent conserver leur liberté d’initiative afin de favoriser l’émergence d’actions adaptées à leur situation ; le but n’étant pas de contraindre, mais d’encourager ce type d’approche.

Les patients disposent de connaissances acquises en vivant avec leur maladie chronique, connaissances inaccessibles aux spécialistes. Reconnaître la valeur de l’expérience vécue par le patient et mettre cette « ressource vitale » à la disposition des autres patients est au cœur du concept de partenariat avec les patients2. Par conséquent, la nécessité pour les établissements de santé d’être ouverts à ces différentes connaissances est cruciale pour améliorer la qualité et l’adéquation des services fournis. En GR, nos observations ont montré que l’expertise des patients peut être entendue à différents niveaux et dans différentes instances. L’inclusion des patients dans la production et l’élaboration de ressources à destination des patients ou l’implication des patients dans la gestion et l’amélioration de la qualité des établissements de santé constituent de réelles opportunités pour développer un partenariat « pratique et expérimenté ».

Il revient à chaque institution de s’interroger sur les raisons de l’absence de patients dans ses organes de décision et d’y remédier. Cette participation peut être intégrée aux activités intrinsèques de l’établissement et ne doit pas uniquement se déployer dans des instances créées à cet effet (comme par exemple dans un comité des patients). En outre, une réflexion doit être engagée concernant les modalités de participation des patients les plus adéquates à chaque situation. Pour ce faire, il pourrait être utile de se référer à un certain continuum de participation des patients2,3.

Un des axes du projet médical soignant 2018-2022 du CHRU Nancy s’intitule « Développer la démocratie sanitaire ». Ce plan liste explicitement comme objectifs : « Impliquer les usagers dans la politique d’amélioration continue de la qualité » et « Expérimenter et déployer les dispositifs de partenariat de soins ». Cette déclaration ouverte offre un cadre favorable, un signal fort, pour le soutien des professionnels de la santé qui souhaiteraient se lancer dans ce type de démarche. Dans la foulée, l’hôpital a développé un projet des usagers, mené de façon participative par les patients utilisateurs eux-mêmes.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Multiplier les formes de participation en différents lieux au sein des établissements de santé de la GR

Recommandation 2.2.

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Les professionnels de la santé montrent une réelle sensibilité et un intérêt marqué pour les initiatives de partenariat avec le patient. Les résultats des entretiens avec les professionnels du secteur des établissements de santé soulignent que la plupart d’entre eux considèrent le partenariat avec les patients comme un aspect essentiel des soins.

La plupart tendent d’ailleurs à le mettre en œuvre dans leur activité professionnelle, avec plus ou moins de succès. Toutefois, cela n’est pas toujours possible. En effet, ils ne sont pas toujours informés de ce qui est mis en œuvre à d’autres niveaux dans les établissements de santé et ne disposent pas non plus nécessairement de temps de travail suffisant pour répondre aux besoins spécifiques liés à la mise en œuvre de ces projets. Ils se retrouvent donc au final limités dans leur élan par des conditions de travail qui ne leur permettent pas de construire un réel partenariat avec les patients ou par des structures institutionnelles qui ne soutiennent pas toujours ces initiatives.Il serait souhaitable que les établissements de santé soient en mesure de soutenir ces professionnels. Premièrement, par l’intermédiaire de points de contact au sein des établissements, de coordinateurs ou de responsables de partenariats avec les patients, qui permettront de maintenir une culture durable de partenariat en stimulant la créativité des acteurs locaux et en assurant la diversité des initiatives proposées, leur cohérence et leur faisabilité. Les résultats des entretiens avec les infirmiers et les médecins indiquent et soulignent également les avantages de tels points de contact pour l’organisation interne et les échanges concernant les pratiques de partenariat avec les patients. Deuxièmement, par l’extension de programmes de formation à tous les professionnels de la santé, à la fois pour les sensibiliser à l’approche de partenariat avec les patients en général et pour leur fournir ou renforcer leurs connaissances, aptitudes et compétences nécessaires pour la pratique du partenariat. Pour de plus amples précisions sur la formation des professionnels, veuillez consulter les recommandations concernant la formation (pp. 49-56).

À Nancy, le CHRU a nommé un Directeur de la gestion des risques de qualité et de la gestion de l’expérience du patient. Ce type de fonction émerge partout en Europe. Les missions de ces directeurs de l’expérience patient sont notamment de développer les relations avec les usagers et les associations d’usagers, proposer une politique d’amélioration de l’expérience patient, évaluer la satisfaction de ses usagers, et d’être un référent ‘expérience patient’ pour les professionnels de l’établissement. Cette nomination souligne la volonté de mettre en œuvre un partenariat dans l’établissement et d’apporter un soutien aux professionnels de santé qui sont des interlocuteurs privilégiés dans cette thématique.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Pour diversifier les formes d’implications des patients, la PAQS propose plusieurs outils, comme le journal du patient ou le shadowing. Pour un aperçu complet, suivre ce lien : https://www.paqs.be/fr-BE/Ressources/Publications/En-lien-avec-les-activites/Participation-du-patient-resident-Apercu-d%e2%80%99outil/PAQS-MRMRS-2018-Outils-et-methodologies-participat

En plus de son comité de patients, le CHR de Liège implique des patients de différentes manières dans le fonctionnement de son hôpital. Ainsi, un patient a été désigné pour participer au Comité sur la Qualité des Soins, et un autre pour s’engager au côté de professionnels de la santé dans un groupe de travail stratégique sur l’hôpital de demain.

En France, au sein des établissements, les patients ou les représentants des usagers sont présents au sein de comités, aux côtés des professionnels de santé et des directions, notamment dans le Conseil de Surveillance des établissements, le Comité de Liaison En Alimentation (CLAN), le Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales (CLIN) et dans le Comité de Lutte contre la Douleur (CLUD).

Accompagner les professionnels de la santé dans le développement d’initiatives relevant d’une culture de partenariat patient

Recommandation 2.3.

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1. Scholtes B, Breinbauer M, Rinnenburger M, Voyen M, Nguyen PL, Ziegler O, Germain L, Böhme Ph, Baumann M, Le Bihan E, Repplinger J-J, Spitz E, Voz B, Ortiz-Halabi I, Dardenne N, Donneau A-F, Guillaume M, Bragard I, Pétré B – Hospital practices for the implementation of patient partnership in a multi-national european region,en cours de soumission

2. Pomey MP, Ghadiri DP, Karazivan P, et al. (2010) — Patients as partners: a qualitative study of patients’ engagement in their health care. PLoS One, 2015, 10, e0122499.

3. Carman KL, Dardess P, Maurer M, et al. (2013) — Patient an family engagement: a framework for understanding the elements and developing interventions and policies. Health Aff (Millwood), 2013, 32, 223- 231.

4. Breinbauer M, Scholtes B (2019) – Analysis of institutional practices for APPS in the Greater Region, Final Report Work package 1, Action 1.2.2, INTERREG Project APPS (032-3-06-013), 2019.

Références

3. PARTENARIAT DANS LA RELATION DE SOINSIntroductionLes conditions qui caractérisent une relation de soins ancrée dans le partenariat commencent à être de mieux en mieux documentées. Notre consortium a mené à ce titre une large revue de la littérature1 qui a tenté une lecture accumulative de ces caractéristiques, telles que rapportées dans la littérature. Elles concernant la nature de la relation patients/ professionnels de santé ainsi que les aptitudes et capacités des patients et professionnels de santé nécessaires à un engagement dans cette voie. Notre revue de littérature suggère qu’une relation de partenariat dans le soin s’organise autour de 6 dimensions :

Prendre le temps pour se connaître dès le début de la relation et à chaque étape. Le professionnel de santé doit prendre le temps nécessaire et s’adapter au « temps » du patient, à son rythme, afin de construire une relation, d’échanger des informations, d’entrer en dialogue et de parvenir à un accord, essentiel pour la « participation du patient ».

Apprendre et développer le niveau de littératie en santé du patient. Cette dimension fait référence à l’éducation des patients par les professionnels de santé afin que les patients acquièrent des connaissances et mobilisent les compétences nécessaires pour les aider à devenir des partenaires actifs des soins.

Partager des informations et des connaissances. Cette phase va un peu plus loin puisque l’échange est bidirectionnel. Cela implique de recueillir les opinions et les expériences des patients et nécessite un dialogue ouvert entre le professionnel de santé et le patient dans une forme de réciprocité. L’objectif est de réduire l’écart de connaissances entre eux.

Partager le leadership, le pouvoir et les responsabilités. Il est également perçu comme une condition préalable à la prise de décision partagée. La « participation du patient » exige que le professionnel de santé travaille « avec » le patient et non plus seulement.

Prendre des décisions partagées. Dans cette dimension, les patients sont initiés à l’idée de pouvoir choisir la manière dont ils gèrent leur état de santé. La prise de décision partagée implique un processus de négociation qui prend en compte les valeurs et les préférences des patients.

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Elargir le partenariat aux familles et à l’environnement social. Ceux-ci fournissent un soutien informel et des ressources pour la gestion quotidienne des questions de santé.

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En 2014, le CHU de Liège a créé son Comité de patients. Celui-ci, initialement constitué d’une petite dizaine de membres patients, a pour mission de participer à l’amélioration de l’information transmise aux patients, à l’amélioration globale de la prise en charge des patients fréquentant le CHU de Liège et être le relai de l’expérience des patients vers les différents départements de l’hôpital. Au fil des années, le Comité a fait face à un nombre grandissant de demandes lui étant adressées, attestant de l’intérêt que les acteurs de la santé trouvent à son travail. Composé d’une majorité de membres patients ou accompagnants, de quelques professionnels et de minimum 2 représentants d’associations de patients, le Comité se réunit au moins une fois par mois, dans l’enceinte de l’hôpital.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Doter tous les établissements de santé de la GR d’un Comité de Patients

Recommandation 2.4.

Les comités de patients représentent une forme de participation fréquemment observés tant en Wallonie qu’en Lorraine. Ils assurent la visibilité de la représentation des patients au sein de l’organigramme des établissements de santé. Leur mise en place au sein des institutions de soins s’avère être une première étape pour améliorer dans la pratique le partenariat avec les patients. Ces initiatives intéressantes montrent qu’il est possible de donner aux patients une voix légitime au niveau institutionnel. Renforcer cette participation aurait, sans nul doute, des effets bénéfiques à d’autres niveaux et permettrait d’impliquer encore davantage les patients en les considérant comme des partenaires à part entière.

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Les soins en partenariat constituent ainsi une relation réciproque caractérisée par la confiance, un dialogue ouvert, une attention mutuelle, un accord sur les objectifs du traitement, un apprentissage collaboratif, un engagement mutuel actif, une compréhension mutuelle des rôles et des responsabilités. Dans les soins en partenariat, le professionnel de santé n’impose pas de traitement, mais propose plutôt une expertise. Nos travaux ont également mis en évidence que la relation de partenariat dans le soin nécessite des attitudes et capacités des professionnels de santé et patients. Du côté professionnel de santé, les attitudes principales identifiées permettant la « participation du patient » sont l’adoption d’une perspective biopsychosociale (implication dans toutes les difficultés que le patient rencontre, et pas seulement dans les problèmes biomédicaux), la prise en compte du patient comme un individu à part entière et unique (capacité à comprendre l’expérience personnelle du patient et la signification de sa maladie) et l’adoption d’une attitude de soins en partenariat et de responsabilisation des patients (engagement dans un processus de partenariat qui nécessite la reconnaissance de la capacité du patient à gérer lui-même sa maladie). Les connaissances et les compétences nécessaires à l’exercice du partenariat sont l’expertise clinique (engagement à une pratique fondée sur des preuves, capacité à prendre des décisions et compétence dans les aspects techniques des soins), les compétences d’écoute et de communication (ensemble de comportements verbaux et non verbaux qui facilitent la communication) et la capacité à fournir un soutien physique et émotionnel (prendre soin du patient en lui prodiguant des soins médicaux et non médicaux).Du côté des patients, les attitudes principales attendues sont celles d’une autonomisation (étapes qu’un patient peut franchir dans le processus de participation de passive à active) et la valorisation de ses connaissances expérientielles (faire valoir son expérience en matière de gestion de la chronicité et du mode de vie associé). Toutefois, ces lignes directrices sont encore loin d’être pleinement intégrées par les acteurs de la relation de soins, comme nous l’avons observé dans l’enquête menée auprès des patients et des professionnels de la santé de la GR (voir encadré).

Afin de donner la parole aux acteurs de terrain, patients et professionnels de santé, sur le thème de l’APPS, un recueil de données qualitatives a été effectué dans chacun des 4 territoires de la GR. Des entretiens individuels semi-directifs ont été

menés auprès des 78 professionnels de santé (médecins, infirmiers) ainsi que des focus groups auprès de 90 patients, avec l’appui d’un guide d’entretien construit de manière collégiale par les partenaires du projet. Les professionnels de santé et les patients de la GR interrogés dans cette étude semblent partager une volonté mutuelle de travailler davantage dans le sens du partenariat dans le soin. Et pour la plupart de ces acteurs, le partenariat est d’ailleurs déjà ce qu’ils déclarent mettre en œuvre dans leurs activités, avec plus ou moins de succès, ce partenariat étant considéré comme difficile à mettre en œuvre dans la pratique. Dans leurs discours se dessine une conceptualisation commune du partenariat qui s’harmonise autour des notions de collaboration, d’entraide, de travail « conjoint », de confiance mutuelle et de co-construction du parcours de soin. Cette définition est sous-tendue par les acteurs par l’idée d’une relation de réciprocité où chacun des acteurs du partenariat aurait quelque chose à apporter à l’autre. Cependant, lorsque l’on approfondit l’analyse des discours, on se rend compte que les représentations qui sous-tendent les discours sur la collaboration entre patients et professionnels de santé ne servent pas les mêmes finalités. Cela s’illustre particulièrement à travers la notion de « proactivité » : le patient acteur de santé. Pour les patients, cette notion se rapproche de la nécessité d’être entendu comme personne unique, d’être informé et guidé afin de réaliser des choix pour leur santé de manière éclairée. La plupart des professionnels de santé interrogés considèrent quant à eux qu’un patient est acteur lorsqu’il est engagé pour respecter les règles thérapeutiques. Soit un patient acteur et obéissant. Par ailleurs, l’approche collaborative ou de partenariat semble ne pas faire l’unanimité parmi tous les professionnels de la santé et patients interrogés. Certains membres de ces deux groupes souhaitent conserver une relation dans laquelle l’expertise du médecin doit primer et où le professionnel de santé reste dans un registre plus injonctif en matière de santé. Finalement, les acteurs n’ont qu’une vision/représentation partielle des caractéristiques que recouvrent le partenariat dans le soin, ce qui les empêche de choisir consciemment dans quel registre d’action ils veulent se situer.

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Le consortium APPS a lancé la création d’une série de vidéos destinées à présenter les différents aspects de l’APPS. Le concept de partenariat de soins y est défini ainsi que les différentes dimensions qui le composent et les niveaux d’implication : micro, méso et macro. Des extraits d’interviews de patients sont diffusés sur la question de l’empowerment du patient pour comprendre notamment comment les patients sont devenus acteur de leur parcours de soins. Leur but est aussi de comprendre comment la reconnaissance du savoir expérientiel du patient permet de changer la relation professionnelle de santé –patient. Ces vidéos pourront être utilisées à la fois dans les formations mais de façon plus large via Internet auprès d’un large public : citoyens, patients et professionnels de santé, …

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

L’analyse qualitative des discours des patients et des professionnels de santé interrogés met en évidence l’existence d’un écart entre la façon dont les patients décrivent le partenariat « idéal » et celle proposée par les professionnels de santé. Cette contradiction existe aussi entre le discours des professionnels et leur possibilité de le mettre en application dans les diverses activités qu’ils mènent au quotidien. Encourager les professionnels de santé à s’interroger sur la réalité de leur implication dans le partenariat dans leur propre contexte professionnel et à prendre en compte le point de vue du patient et/ou de son entourage devient une condition non seulement suffisante, mais nécessaire. Pour approfondir les éléments indispensables au partenariat et ainsi de faire évoluer les pratiques, la création d’espaces de réflexion, incluant des représentants de patient, est recommandée pour faire évoluer une véritable communication professionnelle autour des pratiques. Les propositions issues de ces réflexions entre professionnels de soin et patients testées sur le terrain, et avec l’appui des patients, permettraient au personnel médical et soignant d’avoir plus de temps dédié à cette réflexion constructive d’un partenariat adapté à leur contexte de travail.

Engager les patients et les professionnels de la santé à s’ouvrir au partenariat

Recommandation 3.1.

Selon le modèle de l’APPS, le partenariat dans le soin peut prendre des formes multiples et variées et intégrer différents acteurs. La mise en place d’un partenariat entre plusieurs acteurs peut se révéler délicat à co-animer et parfois très éloigné des principes fondateurs du partenariat. Ainsi, si les discours des patients et des professionnels rencontrés dans la GR permettent de relever des représentations « idéales » du partenariat autour d’un socle de principes-clés (tels que : savoir écouter et partager de manière équitable, échanger en toute confiance et dans un respect mutuel, avoir une attitude ajustée face aux besoins de chacun (patients, professionnels, aidants) en s’appuyant sur une communication temporisée, les divergences de compréhension que nous observons entre les participants devraient les inciter à partager des représentations communes de ce qu’est le partenariat entre professionnels de santé et patients. En conséquence, nous pouvons déjà dire que la mise en œuvre du partenariat sur la GR n’est pas simplement une question de moyens et de conditions. Sa mise en œuvre exige d’abord l’élaboration d’une vision commune de l’horizon à atteindre.Des initiatives comme, par exemple, établir une Charte sur les valeurs-phares du partenariat dans la GR, développer des programmes sur les attitudes qui renforcent le partenariat (fascicule d’aide aux fondements de la communication, initiation aux compétences culturelles d’un partenaire pour les patients ou formation initiale ou formation continue pour les professionnels) peuvent y contribuer.Il n’y a pas de partenariat idéal. Aussi est-il préférable, selon le contexte, d’envisager différents niveaux de participation des patients et différents niveaux de partenariat. L’important est de laisser au patient le choix de son engagement dans le partenariat, tout en l’accompagnant dans un climat de confiance. Il est essentiel que ce choix puisse être réalisé de manière consentie et consciente.A noter qu’il existe un risque, lorsque l’on parle de degrés ou de niveaux de partenariat. Ce risque consisterait à classer les patients dans des catégories « bon » ou « moins bon » patient alors qu’il ne devrait pas y avoir de jugement concernant le degré d’engagement dans le partenariat. Ce sont des étapes interdépendantes que le patient peut atteindre, ou non, en fonction de ses envies, de son contexte et de ses choix. Il est intéressant de connaitre les préférences de chacun des protagonistes en matière de collaboration et de partenariat2. Ainsi, lorsque le patient et son médecin partagent des croyances similaires sur l’importance de la participation du patient, cette congruence est liée à la satisfaction, l’adhésion thérapeutique et une santé auto-déclarée plus favorable. Mais l’essentiel dans un partenariat c’est de maintenir l’équilibre des pouvoirs des acteurs en favorisant une orchestration souple et adaptée aux réajustements constants pour que chacun trouve sa place à tout moment.

Intégrer, dans la pratique professionnelle, une réflexion sur la démarche de partenariat

Recommandation 3.2.

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Souvent les acteurs interrogés n’envisagent le modèle de partenariat que sous l’angle de la dyade patient-professionnel de santé, laissant les autres acteurs (famille, proches, associations de patients) à l’écart de cette dynamique de soin. Le rôle du soutien social, qui n’est plus à démontrer, est largement présent dans les discours que nous avons recueillis aussi bien auprès des professionnels que des patients comme l’un des facteurs les plus importants du processus de soins. La nécessité grandissante du « travail » des aidants, sur les plans administratifs, domestiques, mais également des soins a été fortement soulignée. Ainsi, l’entourage devrait être nécessairement inclus dans le partenariat. Par exemple, il conviendrait d’inciter les patients à être accompagnés, lors des consultations, par une personne de confiance et/ou un patient ayant une expérience de la maladie. Par ailleurs, la divulgation aux aidants d’informations sur les services mis à leur disposition et pouvant favoriser leur qualité de vie devient une priorité du partenariat.

S’il est un domaine qui prend une expansion toujours plus importante aujourd’hui dans le domaine de la santé, c’est bien celui du numérique. Les outils d’e-santé offrent des solutions qui permettent d’assurer la continuité dans la chaine de soins, de renforcer les articulations entre les professionnels de la santé d’un même territoire et de décloisonner les relations ville/hôpital. Les nouvelles technologies ont bouleversé les pratiques dans tous les secteurs de la société. Le domaine de la santé n’échappe pas à cette évolution. L’accès facilité à l’information et le développement de nombreux outils digitaux ont largement modifié les modes de vie et le rapport à la santé. Le développement rapide et significatif de ces technologies de l’information et de la communication (TIC) a participé à l’émergence de la e-santé au sens large, domaine aux multiples facettes correspondant à plusieurs activités en lien avec le soin3. Le dossier de santé électronique, la téléconsultation, la télé-expertise, la télésurveillance, l’assistance médicale et la réponse médicale apportée dans le cadre de la régulation médicale sont les principales composantes de la télémédecine utilisant les TIC. Ces nouvelles pratiques en santé viennent progressivement modifier la relation entre le professionnel de santé et le patient. L’émergence quasi-parallèle de la e-santé et de l’approche patient partenaire de soins est un constat qui n’est pas totalement le fruit du hasard, mais une prise de conscience

Au Luxembourg, depuis l’entrée en vigueur de la réforme de l’assurance dépendance au 1er janvier 2018, des formations sont proposées aux aidants informels. Le but est de conseiller l’aidant afin de le rendre compétent pour l’exécution des aides à fournir à la personne dépendante dans les actes essentiels de la vie en lui transmettant les techniques et le savoir nécessaire. Elle est accordée sous forme d’un forfait annuel correspondant à 6 heures, lorsque l’aidant rencontre des difficultés dans l’aide à fournir dans les actes essentiels de la vie. Par ailleurs, la loi prévoit que la cotisation à l’assurance pension de l’aidant informel (famille ou proche) puisse être prise en charge par l’assurance dépendance.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

En Lorraine, en décembre 2018, au CHRU de Nancy, un groupe de travail nommé « patients partenaires » a été constitué. La finalité de ce groupe est de favoriser la collaboration entre les patients, les aidants, les professionnels et l’établissement hospitalier. Le groupe de travail est composé de 8 patients, de la coordinatrice de France Assos Santé Grand-Est et de 3 professionnels de l’Unité d’Evaluation Médicale du CHRU de Nancy. Ce groupe est investi dans divers projets : la réalisation d’un glossaire reprenant les différents rôles des patients, la préparation et la participation à un forum citoyen ainsi que l’aide à l’élaboration de questionnaires à destination de patients.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Promouvoir et intégrer les différentes formes de soutien social

Recommandation 3.3.

Inscrire l’utilisation des outils d’e-santé dans une perspective de partenariat de soins

Recommandation 3.4.

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Les dossiers électroniques de santé (DES) sont définis comme étant « des carnets de santé numériques » qui réunissent toutes les informations concernant l’état de santé d’un patient et son parcours de soins (traitements, pathologies, historiques des soins, résultats d’examen…)10. Les DES ont attiré beaucoup d’attention au cours des dernières années, certains prétendant qu’ils pourraient « révolutionner la santé en fournissant des outils efficaces pour améliorer les soins personnalisés ». L’accès des patients aux DES contribue à réduire les coûts, à améliorer la qualité et l’efficacité des soins, à renforcer l’autonomie, à informer les patients et à leur donner le contrôle de leur processus de soins de santé4-8. Ils sont donc considérés, tant par les professionnels de santé que par les patients, comme un élément important des soins axés sur le patient et du partenariat avec le patient6, même s’ils mériteraient un certain nombre d’améliorations, tant au niveau du contenu et de la forme que de son utilisation, pour s’inscrire comme outil renforçant le partenariat. Selon les régions, une réflexion éthique doit être poursuivie quant à l’utilisation et l’accès à ce dossier de soins pour déterminer, de façon officielle, qui détient l’accès à ces données et qui a le droit de transmettre les codes de cet accès.A l’échelle de la GR, une réflexion globale des organes législatifs des entités de la GR pourrait également porter sur un projet de dossier médical partagé commun au niveau de la GR.

Cas spécifique du dossier de soins partagé presqu’immédiate que l’électronique ne peut pas remplacer les relations humaines. Les outils de la e-santé doivent être des éléments contribuant, renforçant le partenariat avec le patient4,5,6,7 pour à la fois améliorer la qualité et l’efficacité des soins, et rendre acteurs les patients en leur proposant une plus grande maitrise sur leurs démarches vis-à-vis des soins7,8. Il reste toutefois des efforts à effectuer pour obtenir des recommandations claires sur les caractéristiques de ces e-outils au service de l’approche patient partenaire de soins. Dans le projet APPS, iI nous a ainsi paru pertinent de repérer certains outils existants - de type plateforme d’échanges entre professionnel de santé et patient - et d’étudier comment ils participent au partenariat patient-professionnel de santé au niveau de la GR. Une exploration des perceptions, attentes et besoins des professionnels et des patients en matière de partenariat via ces outils et procédures innovantes de la e-santé a complété l’étude des outils, via une recherche qualitative. Ces travaux débouchent sur une proposition de premières recommandations visant l’optimisation du partenariat via la e-santé.

Dans l’analyse qualitative réalisée au sein du projet revient très souvent la nécessité de développer un outil qui faciliterait avant tout la communication entre le patient, la famille, les professionnels de santé (hospitaliers et extrahospitaliers) et

aussi les autres intervenants qui gravitent autour des soins. Il a souvent été évoqué que la communication entre les différentes personnes impliqués dans le parcours de soin est extrêmement difficile et chronophage à l’heure actuelle, et que le développement d’un outil comme une plateforme qui permettrait à tous les acteurs qui gravitent autour de la prise en charge de communiquer plus aisément ensemble serait plus que bienvenue. Une série d’initiatives privées tentent déjà de répondre à ces attentes. Citons ainsi :

En France, dans la région Grand-Est, la solution « PARCEO », visant la coordination des parcours de soins, ou encore les plateformes MICI Connect (Maladies Inflammatoires Chroniques de l’Intestin) ou My Diabby (Diabètes de type 1 et 2, Diabète gestationnel), conçues et déployées en lien avec des patients experts.

En Wallonie, l’application numérique Comunicare a été développée et est utilisée au sein du service de radiothérapie du CHU de Liège.

En Allemagne, depuis janvier 2020, les mutuelles prennent financièrement en charge les applications de santé prescrites par un médecin (p.ex. : journal du diabète en ligne, outils d’aide aux femmes enceintes…)9. Cette mesure fait partie de la ‘Gesetz zur digitalen Versorgung’ (loi sur les soins de santé numériques), lancée en juillet 2019.

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considèrent comme un outil facilitant la relation patient partenaire de soins. Néanmoins, cette volonté n’est pas unanime et certains freins subsistent tels que la crainte que les informations de santé soient rendues publiques ainsi que le fait de ne pas vouloir partager ses données avec certains acteurs de santé.

Intention d’utilisation du dossier électronique de santé : Plus de la moitié des personnes consultées ont exprimé leur intention d’utiliser le DES sur une base régulière (52.6 %). Néanmoins des disparités sont relevées en fonction des pays. A titre d’exemple au Luxembourg (66,5 %) des personnes sont favorables à son utilisation contre 55,3 % en Allemagne, 48,6 % en France et 45,5 % en Belgique.

Accès aux données médicales de santé : La quasi-totalité de personnes qui ont répondu à l’enquête (94,6 % pour la GR) souhaitent que leurs médecins généralistes (de famille) aient un accès complet à leurs données, ainsi que les médecins spécialistes (84,9 %). Concernant les services d’urgences, les personnes sont plus réservées quant à l’accès à leurs données puisque 76,5 % des personnes sont d’accord pour un accès complet et 30,5 % pour un accès seulement aux résumés des données. Concernant l’accès aux données par les pharmaciens, seulement 22,8 % accordent un accès complet alors que 53,5 % des personnes souhaitent un accès uniquement aux résumés. Enfin concernant le personnel administratif de santé, les services d’aide sociale, les chercheurs universitaires et les membres de la famille, la plupart des participants pensent qu’ils ne devraient pas avoir accès aux données du DES, ou à la rigueur aux données résumées.

Le dossier électronique de santé et la relation patient – professionnel de santé : La majorité des personnes consultées pensent que le DES permettrait d’améliorer tous les aspects du partenariat patient – professionnel de santé. Selon elles, il permettrait d’améliorer la coordination et la continuité des soins (89,4 %), de favoriser une meilleure communication avec les professionnels de santé qui les suivent (84,3 %), la rapidité des soins (82,1 %), la compréhension des pathologies (78,2 %), le sentiment de contrôle sur sa santé (72,3 %) et

Participants (n) 421 61 121 226

La volonté politique de développer le DES est manifeste au plan européen avec la Stratégie Numérique pour l’Europe11. D’ici 2021, l’échange électronique transfrontalier sera progressivement mis en œuvre entre le Luxembourg, la Belgique, la France et l’Allemagne (dans le cadre de la directive 2011/24/UE) et appelle une harmonisation interrégionale. Nous y voyons une opportunité pour que ces systèmes soient orientés « patient partenaire ».

Depuis juin 2019, le Luxembourg s’inscrit en tant que pionnier au sein de l’Europe dans l’échange transfrontalier, pour deux types de document électronique – le résumé patient (dossier médical numérique) et la prescription électronique de médicaments –, facilité par le Connecting Europe Facility (CEF) – eHealth Digital Services Infrastructure (eHDSI) qui relie les Points de Contact National pour la e-santé (National Contact Point for e-Health – NCPeH) des Etats Membres participants. Pour le Luxembourg, c’est l’Agence eSanté qui assume ce rôle de portail technique hautement sécurisé chargé d’opérer ces échanges dénommé NCPeH. Le Dossier de Soins Partagé (DSP) est l’un des services fournis par la plateforme nationale de service eSanté. Tout patient peut bénéficier d’un DSP qu’il soit affilié ou non. En 2019, les modalités et conditions de mises en place du DSP ont été définies dans le règlement grand-ducal.

En 2008, pour soutenir le partenariat avec les patients, le gouvernement fédéral belge a lancé une plateforme numérique – eHealth12, dont la mission principale est de promouvoir et de soutenir la prestation de services et le partage d’informations électroniques entre tous les acteurs du secteur de la santé (Dossier de Santé Électronique). Cela s’est concrétisé par l’adoption de deux plans d’action e-santé (entre 2012 et 2015 et le second entre 2019 et 2021) par la conférence interministérielle de santé (CIM). Depuis le 8 mai 2018, le dossier de santé électronique du patient est accessible via le portail fédéral « Ma santé » ou « personal health viewer ». Pour accéder à ces différentes informations de santé, les citoyens wallons sont invités à passer par le Réseau de Santé Wallon.

Promulgué par la loi française de 2004, le Dossier de Santé Électronique (DES), appelé aussi Dossier Médical Partagé (DMP), est opérationnel depuis 2011 et librement accessible depuis 2018.

En Allemagne, la Carte de Santé Électronique a remplacé la carte d’assurance maladie, dans le cadre de la loi de 2003 sur la modernisation du système d’assurance maladie obligatoire.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-RégionDans le cadre du projet APPS, une étude interrégionale a été réalisée, d’une part, pour identifier et comprendre les expériences et les préférences des patients quant à l’utilisation du DES, et, d’autre part, pour déterminer dans quelle mesure les patients perçoivent le DES comme un instrument permettant d’améliorer l’approche patient partenaire de soins. Dans la GR, une majorité de personnes interrogées souhaitent adopter le DES et le considèrent comme un outil facilitant la relation patient partenaire de soins. Néanmoins, cette volonté n’est pas unanime et certains freins subsistent tels que la crainte que les informations de santé soient rendues publiques ainsi que le fait de ne pas vouloir partager ses données avec certains acteurs de santé.

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4. FORMATION

Introduction

Résultats préliminaires de l’enquête interrégionale

Le développement du partenariat passe par la formation d’une « masse critique de patients capables d’occuper des fonctions d’enseignants et de chercheurs dans le champ des soins en général et de l’éducation thérapeutique en particulier »1 mais aussi des professionnels de santé. Ces formations diplômantes étant encore rares en GR, un effort dans ce domaine est attendu.Notre propos concerne les « patients partenaires formateurs pour autrui » (PPFA) car ce seront eux, dans un proche avenir, les forces vives du partenariat. L’objectif de leur formation est d’accompagner la démarche personnelle qui peut les conduire vers des actions au niveau des soins, de la recherche ou de l’enseignement (ce dernier point qui concerne spécifiquement ce chapitre). Il leur faut en effet aller au-delà de l’acquisition de compétences pédagogiques ou psychosociales (travail sur l’estime de soi, la confiance en soi, la résolution de problèmes, par exemple), prônées dans le cadre de l’éducation thérapeutique. Pour interagir avec les autres, il faut se connaître soi-même. Empowerment et résilience sont au centre de ce processus de transformation personnelle.Les professionnels de santé ont eux aussi des besoins de formation pour être en mesure d’appréhender ce que peut leur apporter le partenariat. Dans ce nouveau paradigme, la maladie devient l’occasion d’un partage d’expériences et de savoirs entre les patients et les professionnels de santé, partage qui permet une relation de réciprocité2.

Dans le cadre du projet APPS, une enquête interrégionale a été menée pour explorer les activités d’apprentissage incluant des patients comme partenaires formateurs dans la formation initiale des étudiants en médecine et en soins infirmiers.

enfin la confiance en son prestataire (66,9 %). Ces tendances générales sont retrouvées dans le différents pays.

Préférences de la population en termes de fonctionnalités du DES : Les fonctionnalités les plus importantes pour les participants sont que le DES soit traduit dans leur langue maternelle (47,4 %) et la possibilité de renouveler une ordonnance de façon répétée (39,6 %). Dans une moindre mesure, les participants veulent recevoir des rappels de rendez-vous médicaux (27 %), pouvoir prendre des rendez-vous médicaux en ligne (25,9 %), avoir la possibilité de fermer le DES à tout moment (27,1 %) et évaluer les soins reçus (27 %). Viennent ensuite la possibilité de masquer certaines informations médicales (21,7 %) et d’insérer leurs propres données de santé (21,1 %). Les trois fonctionnalités considérées comme les moins importantes sont la possibilité de télécharger des données à partir d’appareils électroniques portables, de télécharger des images ou vidéo sur la santé et le fait de recevoir des messages personnalisés de prévention et de promotion de la santé.

1. I. Ortiz Halabi; B. Scholtes; B. Voz; N. Gillain; N. Durieux; A. Odero; M. Baumann; O. Ziegler; R. Gagnayre; M. Guillaume; I. Bragard; B. Pétré (2020) – The APPS Interreg Group – “Patient participation” and related concepts: A scoping review on their dimensional composition. Patient Education and Counseling, 2020, 103 :5-14

2. Jahng, K. H., Martin, L. R., Golin, C. E., & DiMatteo, M. R. (2005) – Preferences for medical collaboration: patient–physician congruence and patient outcomes. Patient education and counseling, 57(3), 308-314.

3. Organisation Mondiale de la Santé, 58ème assemblée mondiale de la santé, Genève, 2005, WHA58/2005/REC/14. Pagliari C, Detmer D, Singleton P.(2007) – Potential of electronic personal health records. BMJ. 2007 Aug

18;335(7615):330–3. Richards T. My Illness (2007) – My Record. BMJ (British Medical Journal). 2007 Mar 10;334(7592):510.

5. Berwick DM (2009) - What ‘patient-centered’ should mean: Confessions of an extremist. Health Affairs. 2009;28(4). 6. Determann D, Lambooij MS, Gyrd-Hansen D, de Bekker-Grob EW, Steyerberg EW, Heldoorn M, et al. (2017) – Personal

health records in the Netherlands: Potential user preferences quantified by a discrete choice experiment. Journal of the American Medical Informatics Association. 2017 Dec 23;24(3):529–36.

7. Tang PC, Ash JS, Bates DW, Overhage JM, Sands DZ. (2006) – Personal health records: Definitions, benefits, and strategies for overcoming barriers to adoption. Vol. 13, Journal of the American Medical Informatics Association. 2006. p. 121–6.

8. Tang PC, Ash JS, Bates DW, Overhage JM, Sands DZ. (2006) – Personal health records: Definitions, benefits, and strategies for overcoming barriers to adoption. Vol. 13, Journal of the American Medical Informatics Association. 2006. p. 121–6.

9. https://www.bundesgesundheitsministerium.de/digitale-versorgung-gesetz.html10. https://www.ameli.fr/assure/sante/dossier-medical-partage/tout-savoir-sur-dossier-medical-partage11. Quaglio G, Dario C, Stafylas P, Tiik M, McCormack S, Zilgalvis P, et al. (2016) – E-Health in Europe: Current situation

and challenges ahead. Health Policy and Technology. 2016;5(4):314– 12. Plan E-Santé Belgium [Internet]. [cited 2018 May 18]. Available from: http://www.plan-esante.be/

Références

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Pour que le partenariat devienne réalité et ne reste pas à l’état de recommandations bien intentionnées, il faudrait pouvoir idéalement inviter l’ensemble des praticiens de santé, de la médecine de proximité comme de l’hôpital, à rencontrer des PPFA. Ainsi, le partenariat pourrait devenir un thème de formation continue, reconnu par les autorités compétentes selon les usages de chaque pays de la GR. La mobilisation des associations de patients est absolument nécessaire, pour répondre à cet enjeu.

b) Au niveau de la formation initiale des professionnels de santé :

Le nombre d’initiatives identifiées est restreint au vu du nombre de filières d’enseignement de la GR.

Les premières initiatives identifiées en GR montrent le caractère varié du type d’activités intégrant le patient comme partenaire formateur : activité isolée et unique dans le cours concerné (le patient vient témoigner sur sa maladie une seule fois dans le cadre du cours concerné), activité faisant partie d’un dispositif reparti sur plusieurs séances (un patient intervient, lors de plusieurs séances d’un même cours, sous différents rôles pour lesquels il a été préalablement préparé). En général, l’implication de patients dans les activités d’apprentissage des étudiants en médecine et en soins infirmiers dépend du bon vouloir de quelques professeurs motivés.

Dans la majorité des initiatives identifiées, le patient participe bénévolement aux différentes activités.

Dans la plupart des cas, le patient est impliqué dans les cours sous la forme d’une « consultation » au sens du Modèle de Montréal : les patients viennent témoigner de leur expérience de vie avec la maladie.

Le degré d’engagement du patient semble être plus avancé dans la formation des acteurs du secteur paramédical que dans celle des médecins.

Cette reconnaissance mutuelle, autour du concept de partenariat est loin d’être acquise dans nos systèmes de soins en GR ou ailleurs ! La création de formations destinées aux futurs acteurs du partenariat est une étape essentielle pour ne pas dire incontournable. Les projets s’adapteront au contextes locorégionaux, très variables dans la GR. Le soutien des tutelles et des associations de patients est absolument nécessaire. Il faudra avancer par étapes, tâtonner, essayer pour convaincre les parties en présence. Chaque équipe pédagogique fera des choix en matière de « contenant et de contenu », en s’appuyant sur l’expérience des précurseurs qui ont montré le chemin. L’évaluation est nécessaire pour documenter les pratiques et évoluer progressivement vers de bonnes pratiques.

Enseigner le partenariat (ses concepts, ses méthodes, ses techniques)

Recommandation 4.1.

Enseigner le partenariat aux futurs professionnels de santé est une étape essentielle pour initier le processus de partenariat avec le patient. Outre les aspects purement théoriques, l’appropriation de ce nouveau type d’approche par les professionnels de santé passe par l’acquisition d’une série de compétences transversales. Ces dernières sont d’ordre pédagogique (apprendre à transmettre), relationnel (travail en équipe), émotionnel (gestion du stress, verbalisation des émotions) et collaboratif (communication, prévention et résolution des conflits)3.En l’absence d’un cadre commun interrégional recensant un ensemble d’attitudes, de savoirs et de savoir-faire, les différents partenaires du projet ont pu identifier toute une série d’initiatives émergeantes dans leur région respective. Il conviendrait de poursuivre la confrontation de ces initiatives et de ses acteurs pour en faire ressortir un consensus sur les fondamentaux de l’enseignement du partenariat. Cela permettrait d’amener les différentes institutions concernées, au sein d’une région et idéalement de la GR, à partager un référentiel commun sur le partenariat reprenant les fondements théoriques et les compétences minimales nécessaires à la compréhension et à la mise en application de cette nouvelle approche. Par ailleurs, l’enseignement du partenariat dans les différents établissements de formation des professionnels de santé peut être facilité lorsqu’il existe un cadre politico-juridique et un contexte culturel favorables (voir cadre politico-juridique). Ainsi, au Royaume-Uni par exemple, au cours des 20 dernières années, le pouvoir en place a produit toute une série de documents politiques mettant l’accent sur la nécessité d’un système de santé orienté par les choix, la participation et le partenariat du patient4. Dans les régions où il n’y a pas de contexte socio-politique favorable aux démarches partenariales, il revient aux seuls professionnels de santé enseignants de prendre des initiatives « avant-gardistes ».

a) Au niveau de la formation initiale des professionnels de santé :

Nombre d’initiatives pédagogiques de partenariat avec le patient identifiées

8 6 2

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Divers travaux montrent que l’implication de patients en tant que PPFA a des effets positifs sur les 3 parties impliquées dans l’enseignement : les professionnels de santé enseignants, les apprenants et les patients8,9,10. En effet, des études11,12,13 montrent que l’implication du patient amène les apprenants à mieux comprendre la personne qu’est le patient, mais aussi améliore le niveau de confiance de l’apprenant ; cela l’incite à parler plus facilement avec les patients notamment de certains aspects intimes. De surcroît, il a été démontré que les futurs soignants apprennent tout aussi bien les aptitudes liées à un examen clinique enseigné par un PPFA que par un professionnel de santé enseignant. En ce sens, chaque futur professionnel de santé devrait être amené à interagir, au cours de sa formation initiale, avec des PPFA. Dans le cadre du projet, les différents partenaires ont pu identifier diverses initiatives pédagogiques de partenariat avec le patient dans leur région respective, qui sont plus abouties au niveau du partenariat.

Former et accompagner les patients partenaires formateurs pour autrui

Recommandation 4.2.

Les objectifs pédagogiques et les compétences devront être clairement définis. Le développement d’un référentiel de compétences est un prérequis pour la formation des PPFA. L’objectif est de favoriser le comportement éthique, la cohérence pédagogique, l’ouverture aux autres, l’écoute et la réflexivité5. La priorité est de permettre aux PPFA d’élaborer et de valoriser leurs savoirs expérientiels, tout en soutenant les processus d’empowerment ou de résilience. En ce qui concerne les méthodes d’enseignement, partir de situations concrètes découlant du contexte de vie des patients permet aux apprenants de raconter les faits, tels qu’ils les ont vécus, puis de les analyser en élaborant ensemble une grille de synthèse identifiant les moments forts et les points communs, pour enfin les conceptualiser. Le but est de se servir des expériences acquises pour construire un processus d’expérimentation active qui se résume en 3 étapes : contextualisation, décontextualisation et recontextualisation6.L’enseignement par les pairs (peer-education), permet la mutualisation des récits biographiques lors des ateliers de discussion. Il a ici toute sa place pour que les patients prennent conscience des ressources qui existent dans leurs expériences mutuelles, mais aussi de la diversité des situations et des expériences vécues par d’autres personnes atteintes de maladies chroniques.L’enseignement traditionnel, vertical, garde cependant sa place lorsqu’il s’agit de travailler sur l’histoire des maladies et de leur prise en charge, l’histoire de la place des malades et leurs relations avec la médecine, les acquis du partenariat, l’organisation du système de soins, la démocratie sanitaire ou encore les concepts de l’éducation thérapeutique. S’agissant des conditions d’admission, la formation des PPFA s’adresse prioritairement aux personnes participant activement à des associations de patients ou à une communauté virtuelle d’usagers de la santé, mais aussi aux personnes dotées d’une certaine culture en santé, celles ayant une expertise dans un domaine particulier de la pathologie et celles prônant une posture de bienveillance5.

Le PPFA a pour fonction d’aider les professionnels de santé à développer des activités pédagogiques de partenariat. Pour jouer ce rôle clef, il a besoin d’une formation spécifique qui devrait être conçue en tenant compte des 2 points suivants :

a) Construire le programme de formation en définissant les objectifs pédagogiques, les méthodes d’enseignement et les conditions d’admission

La formation des PPFA est aussi une démarche de développement personnel qui peut impliquer l’engagement dans un processus de résilience. La résilience désigne cette capacité à pouvoir rebondir après la confrontation à des événement difficiles ou traumatiques. Faire preuve de résilience c’est pouvoir s’appuyer sur des ressources internes (capacité de mentaliser et de verbaliser les affects) ou externes (proches, aidants, soignants, associations de patients, etc.). On peut donc considérer que la résilience est une facette d’un processus d’adaptation complexe, qu’il paraît indispensable de favoriser et d’accompagner, dans ce cadre d’une formation d’un PPFA.L’équipe enseignante, s’appuyant sur un psychologue et/ou un psychiatre, reste un soutien indéfectible, si nécessaire. Pour analyser avec lui le cheminement personnel de chaque étudiant PPFA, des entretiens de débriefing avec un membre de l’équipe pédagogique sont à organiser. Un renforcement dans tel ou tel domaine peut être proposé, en cas de besoin, en cours d’année. Le climat facilitant décrit par Carl Rogers7 permet à chacun de trouver les ressources en lui-même et au sein de son entourage. Le plus important est l’effet catalyseur du groupe. Les échanges entre pairs ont des effets puissants sur la dynamique psychique des membres du groupe, enseignants inclus. Par ailleurs, les réflexions collectives entre PPFA sont indispensables pour améliorer les contenus pédagogiques5.

b) Penser l’accompagnement des PPFA

Enseigner en partenariat

Recommandation 4.3.

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En Belgique, dans une école de soins infirmiers (HELMO), dans le cadre d’un cours intitulé « soins chroniques et éducation thérapeutique », des patients (via les associations de patients) participent avec les enseignants à la construction de saynètes, abordant des situations très concrètes. Les étudiants de 3ème année en Soins généraux sont ainsi amenés à se projeter dans ces situations aux côtés des patients impliqués, acteurs d’un jour. Les principaux sujets abordés dans ces mises en scène sont les suivants : la communication, l’empathie, le lien avec les proches, l’expertise-patient et le partenariat.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

Développer une ingénierie des activités intégrant les patients partenaires formateurs pour autrui

Recommandation 4.4.

L’enseignement en partenariat ne peut se faire qu’après avoir pensé la structure des activités intégrant les patients partenaires formateurs pour autrui (PPFA). Souvent les questions liées au recrutement des PPFA sont perçues comme prioritaires par les acteurs de l’enseignement. Pourtant, cette réflexion sur le recrutement devrait être précédée d’une définition précise des objectifs, des contenus et des méthodes d’apprentissage, ainsi que de l’évaluation. Ainsi, la structure des activités intégrant les PPFA devrait être pensée selon les trois piliers de toute activité éducative:

a) Définir des objectifs pédagogiques, des contenus et des méthodes d’apprentissage

Les objectifs pédagogiques et les rôles de chacun sont définis par l’équipe pédagogique en fonction des besoins pour un enseignement donné et de la formation du PPFA (degré d’habilitation)5. Il est important de définir clairement le niveau d’intervention (consultation, collaboration, partenariat) attendu du PPFA afin que ce dernier remplisse au mieux son rôle et réponde aux objectifs pédagogiques.

Bien que la culture de l’évaluation suscite des craintes pour l’ensemble des parties concernées, l’évaluation des dispositifs pédagogiques mis en œuvre est néanmoins nécessaire. Cette évaluation doit être réalisée de façon systémique, afin de voir l’ensemble des effets générés par les dispositifs mis en place. En effet, il convient de dépasser la simple évaluation des

principaux bénéficiaires (les professionnels de santé apprenant) pour voir en quoi et comment ces dispositifs impactent les autres acteurs concernés. Par ailleurs, la satisfaction des différentes parties prenantes à l’activité doit également être évaluée dans une perspective d’optimisation du bien-être dans l’apprentissage.

b) Définir les modalités d’évaluation du projet

Les patients peuvent être recrutés par différents moyens (par exemple via des associations de patients, via un professionnel de santé enseignant, via des annonces dans les journaux ou sur internet, etc.). Peu importe le canal de recrutement du patient, ce qui est essentiel, c’est le respect des critères d’inclusion prédéfinis5. Ces derniers, librement définis par les recruteurs, devront au moins contenir une série « d’axiomes » communs aux différentes institutions de la GR dans lesquelles des cours impliquant le patient se déroulent. Dans la littérature, un des critères de recrutement le plus répandu consiste en la démonstration de bonnes aptitudes communicationnelles14.

c) Recruter des patients partenaires formateurs pour autrui

Le projet PEPS, partenariat et engagement du patient dans le système de santé, s’appuie sur les besoins des patients d’une part et sur ceux des établissements de santé de la région Lorraine et de la faculté de médecine de Nancy d’autre part, pour créer un Diplôme d’Université (DU) consacré au partenariat. Dans cette formation diplômante « hybride », les professionnels de santé et les patients partageront les mêmes activités d’apprentissage et de formation15. Le principal objet de PEPS est d’aider les futurs partenaires à se connaître eux-mêmes et à travailler ensemble, qu’ils soient patients, professionnels de santé ou personnels administratifs d’un établissement de santé.Le programme PEPS comporte 4 modules formés de 2 Unités d’Enseignement (sensibilisation, approfondissement) avec la possibilité de modules optionnels (Santé publique, éthique / Recherche / Pathologie spécifique : diabète, maladies rénales, maladies neurodégénératives…).

Tronc commun : présentation de l’engagement et du partenariat

Education thérapeutique

Sciences de l’éducation et communication

Démocratie sanitaire - Organisation de l’hôpital et du système de santé

La pédagogie interactive sera privilégiée, d’emblée : récits, jeux de rôle, mises en situation concrètes. Pour faire face aux différences de littératie, il est prévu un suivi attentif du niveau de compréhension et de participation des étudiants. La validation pourrait se faire sur 2 ans, soit sous la forme d’un DU pour le parcours complet, soit sous la forme d’une attestation de formation universitaire pour les parcours comportant un nombre limité d’options.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

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5. RECHERCHE

IntroductionLe projet APPS en atteste : la recherche sur le partenariat se développe de façon conséquente. Plusieurs travaux ont tenté au cours des dernières années d’analyser le flux de publications autour de la thématique du partenariat de soins et nous permettent de tirer quelques constats1,2. Tout d’abord, de récentes publications montrent une intensification des travaux au cours des 20 dernières années. A titre d’exemple, Barrelo et al1 font état d’une multiplication par 12 du nombre d’articles publiés entre 2002 et 2011. La majorité des travaux sont publiés par des équipes nord-américaines suivies des européennes, principalement par des acteurs issus de la médecine et des sciences infirmières. Les approches interdisciplinaires restent marginales en Europe. Les travaux sur l’engagement des patients restent également disproportionnés comparativement à ceux centrés sur l’adhésion thérapeutique des patients, montrant la finalité qui anime de manière toujours prédominante le domaine de la santé.Nos travaux nous permettent de proposer plusieurs recommandations. Celles-ci ne sont pas à proprement parler issues de résultats du projet, « APPS » n’ayant pas investigué le partenariat dans la recherche de façon prioritaire, mais plutôt d’un regard réflexif porté sur les quatre années de vie de ce projet de recherche exploratoire.

Le projet APPS a laissé beaucoup de place à l’exploration dans ses manières d’approcher le partenariat patient. Après quatre années de recherche, cette exploration semble s’être avérée tout à fait nécessaire, et doit être poursuivie. En effet, le partenariat patient tend à être compris de façon diverses et à se traduire de multiples manières selon les contextes ; l’équivocité du partenariat patient entretient la difficulté d’en définir les contours, tout en assurant sa richesse et sa capacité à exister en différents contextes.Constatons d’abord que la littérature, qu’elle soit scientifique ou non, entretient une terminologie hétérogène pour désigner cette participation du patient aux soins : «empowerment», -«engagement», «involvement», «partenariat» sont autant de vocables retrouvés pour désigner une forme de contribution du patient à ses soins ou au service du système de santé. Si tous

1. Tourette-Turgis C, Pereira Paulo L, Vannier MP. (2019) – Quand des malades transforment leur expérience du cancer en expertise disponible pour la collectivité. L’exemple d’un parcours diplômant à l’université des patients. Vie sociale 2019, 25 et 26, 159-177 - https://chaire-philo.fr/wp-content/uploads/2019/05/Art-CTT-VIE-SOCIALE-159-177-massicot%C3%A9.pdf

2. Tourette-Turgis C. (2010) – Savoirs de patients, savoirs de soignants : la place du sujet supposé savoir en éducation thérapeutique. Pratiques de formation 2010 ; 58-59 : 137-153 - http://www.commentdire.fr/wp-content/uploads/2016/groupe2-APHM/3b-13_Tourette-Turgis_PratiquesDeFormation_2010.pdf

3. DCPP et CIO-UdeM (2016) – Référentiel de compétences de la Pratique collaborative et du Partenariat patient en santé et services sociaux. Montréal, Québec : Université de Montréal - https://medfam.umontreal.ca/wp-content/uploads/sites/16/2018/04/Referentiel-pratique_Collaborative-et-partenariatPatient_sss-28-10-2016.pdf

4. Towle, A. & Godolphin, W. (2013) – « Patient involvement in medical education », Oxford University Press.5. Gross, O., Ruelle, Y., Sannié, T., Khau, C., Marchand, C., Mercier, A., Cartier, T. & Gagnayre, R. (2017). Un département

universitaire de médecine générale au défi de la démocratie en santé : la formation d’internes de médecine générale par des patients-enseignants. Revue française des affaires sociales, 61-78. https://doi.org/10.3917/rfas.171.0061

6. Lebrun M. (2015) – L’école de demain : entre MOOC et classe inversée. Economie & management 2015, N° 156, 41-47 - https://cdn.reseau-canope.fr/archivage/valid/N-7625-9355.pdf

7. Rogers CR. (2005) – Le développement de la personne - 2ème édition Dunod-InterEditions, Paris 20058. Jha V., et al. (2009) – « Strategies and interventions for the involvement of real patients in medical education: a

systematic review », Med Educ. 43: 10-20.9. Morgan A, & Jones D., (2009) – « Perceptions of service user and carer involvement in healthcare education and

impact on students’ knowledge and practice: a literature review », Med Teach. 31: 82-9510. Towle A. et al. (2010) – « Active patient involvement in the education of health professionnals », Teach Higher Educ.

16 : 495-504.11. Klein et al. (2000) – « The effects of the participation of patients with cancer in teaching communication skills

tomedical undergraduates : a randomised study with follow-up after 2 years », Eur J Cancer. 36: 273-281.12. Coleman EA, Lord J, Heard J, et al. (2003) – The Delta project: increasing breast cancer screening among rural

minority and older women by targeting rural healthcare providers. Oncol Nurs Forum. 2003;30(4):669-677. doi:10.1188/03.ONF.669-677

13. Cegala DJ (2003) – Patient communication skills training: a review with implications for cancer patients - Patient Educ Couns. 2003 May;50(1):91-4. https://doi.org/10.1016/S0738-3991(03)00087-9

14. Williamson C. (2007) – « How do we find the right patients to consult? », Qual Prim Care. 15: 195-199. 15. Tourette-Turgis C., Thievenaz J. (2012) – Prendre en compte et reconnaître « l’expérience du malade » : un enjeu

pour la formation des adultes. Actes du Colloque international francophone « Expérience 2012 » Expérience et Professionnalisation dans les champs de la formation, de l’éducation et du travail ; état des lieux et nouveaux enjeux – Lille (France) 26, 27, 28 septembre 2012 - http://www.trigone.univ-lille1.fr/experience2012/actes/98.pdf

Références

Situer et distinguer le partenariat dans les démarches d’engagement du patient

Recommandation 5.1.

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Troisièmement, en sus des deux axes précédents qui préconisent de mieux qualifier ce qui est fait et d’en évaluer une certaine performance, qui rencontrent déjà une attention particulière des acteurs, nous souhaitons insister sur le besoin de compréhension du fonctionnement du partenariat patient. En effet, le partenariat patient vient bousculer les rapports sociaux et les institutions, nécessitant de comprendre ce qui est en jeu dans ces pratiques innovantes : Comment les relations de pouvoir et d’identité que l’on dit modifiées sont effectivement modifiées ? Comment les groupes professionnels sont-ils amenés à se repositionner les uns vis-à-vis des autres ? Comment le nouveau rôle du patient modifie la division du travail médical ? Toutes ces questions sont fondamentales pour véritablement saisir ce qui est mis en œuvre. Le projet APPS s’est particulièrement engagé dans cette voie par le biais d’études de cas sur les Comités de patients. Cette proximité avec le terrain a permis de mieux cerner l’activité réelle de ces comités ainsi que les difficultés auxquelles ils étaient confrontés.

Enfin, le modèle de partenariat patient proposé par Montréal ambitionne de faire du patient un acteur de la recherche à part entière. En Europe, les initiatives impliquant les patients dans la recherche sont nombreuses mais manquent de cohérence et d’approche structurée. Si les avancées du projet ont été modestes en ce sens, allant principalement vers de la

ces termes renvoient à une intention de permettre aux patients d’être acteurs de leurs soins, du système de santé, ils sont toutefois rarement combinés dans un même travail de recherche, montrant que les termes ont une signification particulière et renvoient à un champ d’actions spécifiques1,2. Des travaux de clarification existent, notamment ceux d’Halabi et al3, menés dans le cadre du projet APPS, qui proposent une lecture intégrative des concepts et déclinent de manière accumulative les composantes du partenariat de soins. L’effort de clarification conceptuelle ne doit cependant pas s’arrêter là.Le projet APPS a également permis d’observer empiriquement la polysémie des termes de partenariat patient. Les médecins, infirmiers, patients, militants, chercheurs, comprennent la notion de partenariat de diverses manières. Si un consensus peut se dégager autour de quelques mots-clés, la façon de les comprendre, d’en exposer les conséquences, ou de mettre l’accent sur l’un plutôt que l’autre, varie fortement selon les individus rencontrés. Nous avons ainsi relevé un consensus ambigu autour de la notion. Notons que cette variabilité semble s’exprimer individuellement, mais également collectivement. Il se peut donc que l’appartenance à une région, ou la proximité avec une pathologie spécifique, renforce collectivement la vision du partenariat patient. Par exemple, Voyen et al4, dans une des études du projet APPS, indiquent que le concept de partenariat est mal connu des acteurs de l’ETP et que l’ETP est considérée comme un dispositif pédagogique et opérationnel au service du partenariat. Par conséquent, le consortium appelle les chercheurs à poursuivre un travail de clarification des contours et des assises du partenariat. Cela devra permettre à l’avenir de mieux situer le partenariat par rapport à d’autres approches, mais aussi de permettre aux personnes impliquées pour la santé de mieux se situer vis-à-vis de lui.

Évaluer la performance des pratiques et processus de partenariat de soins

Recommandation 5.2.

Les quatre années de recherche nous ont régulièrement mis face à une difficulté majeure : rares sont les évaluations formelles de ces démarches5, amenant à considérer le partenariat avec un niveau de preuve scientifique plutôt « faible ». Dès leur communication sur le Modèle de Montréal, les concepteurs ont pourtant plaidé pour une évaluation systématique des démarches de partenariat6. Pour l’avenir, il nous semble donc essentiel de s’engager plus en avant dans l’évaluation des interventions se déclarant comme relevant du partenariat.Ces évaluations ne devront pas se limiter à l’évaluation des effets et de l’impact du partenariat, mais également se porter sur le processus de développement de ce partenariat7. Il ne s’agit pas seulement de démontrer la preuve d’efficacité, il s’agit aussi de réfléchir aux modèles et formations, aux interventions les plus fécondes. Plusieurs propositions peuvent être formulées aujourd’hui pour mieux comprendre et consolider les pratiques : l’agglomération de l’existant, sous forme de synthèse de type méta-analyse ou revue narrative, recoupant les différentes disciplines, est attendu ; de

nouveaux modèles d’évaluation, dépassant les propositions des disciplines biomédicales, sont appelés. Les démarches de patient partenaire peuvent être caractérisées d’intervention complexe et demandent d’autres standards d’évaluation que les fameux « essais contrôlés randomisés ». Des inspirations dans des méthodes d’évaluation dites « réalistes », largement mobilisées en sciences humaines et sociales, doivent permettre de mieux situer quels contextes, quels mécanismes permettent d’obtenir certains résultats8. Il s’agit également de mieux définir les critères et indicateurs d’évaluation dans une perspective écosystémique du patient partenaire. Les effets sur les patients, sur les professionnels de santé, sur le système de santé lui-même doivent être pris en considération, sans oublier les limites et effets pervers possibles de ces interventions.

Identifier les leviers et les barrières au développement du partenariat de soins

Développer et mettre en œuvre la recherche en partenariat

Recommandation 5.3.

Recommandation 5.4.

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consultation de patients par des focus-group, des pré-tests de questionnaires ou l’une ou l’autre réunion de travail, le chemin reste long pour que, en GR, les patients soient à la place qu’ils peuvent légitiment revendiquer : celle d’un co-constructeur de programmes, de la genèse même des questions de recherche jusqu’à l’analyse des résultats. Des études ont illustré les bénéfices de la co-construction avec les patients. Elle permet, entre autres, de s’assurer que les résultats de recherche répondent à des préoccupations véritables des patients10,11. Cependant, pour permettre le passage à une collaboration durable entre les chercheurs et les patients, il est nécessaire que les parties prenantes reconnaissent et expérimentent la valeur ajoutée du patient impliqué dans la recherche et des avantages de cette collaboration11. À l’avenir, les résultats de la recherche en matière de santé publique devraient être partagés et rendus publics. En outre, les patients devraient également être impliqués dans la planification et la coordination des projets de recherche correspondants. Les défis à relever pour y parvenir sont nombreux. Mais ils sont essentiels pour poursuivre notre route vers un véritable partenariat de soins.

Des institutions de la GR se positionnent en ce sens, comme le Centre fédéral d’expertise des soins de santé en Belgique (KCE). Le KCE rend des avis scientifiques sur des sujets relatifs à l’organisation des soins de santé en Belgique. Il recommande, pour ses recherches comme pour celles d’autres acteurs de la recherche en santé « [d’]impliquer les patients dans toutes les phases de la recherche si cela est pertinent et approprié pour le projet. (...) La pertinence et la nécessité de la participation des patients aux projets de recherche doivent être évaluées projet par projet (...). La participation des patients à la recherche sur les politiques de santé est complémentaire à l’examen des preuves scientifiques et à la collecte de données primaires, et ne s’y substitue pas »9. Par ailleurs, nombre d’hôpitaux belges associent un membre patient à leur comité d’éthique à la recherche.De la même manière, en France, quarante Comités de protection des personnes (CPP) s’assurent que tout projet de recherche biomédicale sur l’être humain respecte diverses mesures visant à assurer la protection des personnes qui participeront. Dans ces comités composés de vingt-huit membres, il faut quatre représentants d’associations agréées de malades et d’usagers du système de santé. Toujours en France, l’Institut National de la Santé et de la Recherche (Inserm) a créé le groupe de réflexion avec les associations de malades (GRAM) qui intervient tout au long des projets de recherche. Le GRAM participe activement aux essais cliniques menés par l’Inserm en mettant en place un collège de relecteurs de protocoles d’essais cliniques et en soutenant les associations qui souhaitent informer /recruter les patients pour de nouveaux essais12.

Bonnes pratiques identifiées en Grande-Région

1. Barello S, Graffigna G, Vegni E. (2012) – Patient engagement as an emerging challenge for healthcare services: mapping the literature. Nurs Res Pract. 2012:905934. doi: 10.1155/2012/905934. Epub 2012 Oct 31

2. Menichetti J, Libreri C, Lozza E, Graffigna G. (2014) – Giving patients a starring role in their own care: a bibliometric analysis of the on-going literature debate. Health Expect. 2014;19:516–26 Mennichetti et al 2014

3. Ortiz Halabi; B. Scholtes; B. Voz; N. Gillain; N. Durieux; A. Odero; M. Baumann; O. Ziegler; R. Gagnayre; M. Guillaume; I. Bragard; B. Pétré; The APPS Interreg Group (2020) – “Patient participation” and related concepts: A scoping review on their dimensional composition. Patient Education and Counseling, 2020, 103 :5-14

4. Voyen M, Böhme P, Germain L, Pétré B, Younsi M, Mathieu J, et al. (2019) – Connaissance, perception et définition du concept « Patient Partenaire de Soins »: Qu’en pensent les acteurs impliqués en éducation thérapeutique ? Résultats d’une enquête nationale. 1er colloque international sur le partenariat de soin avec le patient en France. Nice, 14-15 octobre 2019.

5. Rahimi S, Zomahoun HTV, Légaré F. (2019) – Patient Engagement and its Evaluation Tools- Current Challenges and Future Directions Comment on «Metrics and Evaluation Tools for Patient Engagement in Healthcare Organization- and System-Level Decision-Making: A Systematic Review». Int J Health Policy Manag. 2019;8(6):378-80. doi: 10.15171/ijhpm.2019.16.

6. Karazivan P, Dumez V, Flora L, Pomey MP, Del Grande C, Guadiri S, Fernandez N., Jouet E., Las Vergnas O., Lebel P. (2015) – The patient as-partner approach in health care: a conceptual framework for a necessary transition. Acad Med. 2015;90:437-41.

7. Barello S, Graffigna G, Savarese M, Bosio AC (2014a). – Engaging patients in health management: towards a preliminary theoretical conceptualization. Psicologia Della Salute. 2014;3:11–33 10.3280/PDS2014-003002.

8. Pawson R & Tilley N. (1997) – Realistic Evaluation. London (Angleterre): SAGE, 1997. 36 p.9. Cleemput, I., Dauvrin, M., Kohn, L., Mistiaen, P., Christiaens, W., & Léonard, C. (2019) – Position of KCE on patient

involvement in health care policy research. KCE Reports. Brussels: Belgian Health Care Knowledge Centre (KCE).10. J. Geissler, B. Ryll, S. Leto di Priolo, M. Uhlenhopp (2017) – Improving Patient Involvement in Medicines Research and

Development: A Practical Roadmap Therapeutic - Innovation & Regulatory Science volume 51, pages 612–619(2017) https://doi.org/10.1177/2168479017706405

11. J.A. Wildeboer (2017) – Collaboration between researchers and patients in scientific research. A qualitative study on preconditions for sustainable collaboration between researchers and patients ZONMV 2017 https://disabilitystudies.nl/sites/disabilitystudies.nl/files/research_report_jolijn_wildeboer_-_final_version_-_june_2017.pdf

12. https://www.inserm.fr/gouvernance-organisation/gram

Références

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CONCLUSIONQuatre années se sont écoulées depuis les premiers pas de ce projet de recherche, et les premiers échanges du consortium APPS. À l’heure de refermer ce Livre Blanc, au moment où chaque équipe va reprendre son propre chemin, une conviction nous anime et nous rassure : les valeurs et visions portées depuis le départ transcendent largement nos équipes. Ces idées continueront de faire « bouger les lignes » en Grande Région.

De nombreux acteurs de santé insufflent dans nos territoires une volonté forte d’aller au-delà du paternalisme. Les pouvoirs législatifs semblent prêts à réagir à l’appel des patients ; plusieurs hôpitaux se donnent le partenariat comme horizon stratégique ; les premières lignes de soins ré-envisagent leur organisation pour mieux intégrer citoyens et professionnels de différentes disciplines. Enfin, patients et citoyens se regroupent afin de prendre leur place dans un système qui devrait leur être destiné et qui devrait être pensé avec eux. Tous ces projets menés en matière de partenariat portent en eux-mêmes des germes de changement.

En dépit de leurs différences, ces initiatives se construisent sur des fondations communes. Celles-ci ne sont cependant pas toujours partagées, connues de toutes et tous. Si nous avons voulu faire émerger ce dénominateur commun au cours de notre projet, il nous faut maintenant continuer à nous rencontrer, nous fédérer, et à partager nos expériences du partenariat. Cet enrichissement mutuel contribuera à dessiner le partenariat que nous voulons. Le partage d’un horizon commun sera un puissant catalyseur du changement. Car, si notre objectif est commun, il n’y aura pas de mauvais point de départ.

Il revient à chacun d’avancer vers le partenariat de là où il est, avec opiniâtreté.

Décideurs, invitez patients et citoyens à votre table !

Managers en santé, ouvrez vos réseaux et institutions à de nouvelles voix, repensez les critères qui donnent de la légitimité aux décisions que vous prenez !

Professionnels de santé - dans vos villes, dans vos campagnes, dans vos hôpitaux - redéfinissez les contours des relations qui vous unissent aux patients !

Patients, usagers et citoyens, quelle que soit l’identité qui vous rallie, prenez la place qui est la vôtre, faites valoir vos droits ainsi que la richesse de vos expériences !

Chercheurs en santé, poursuivez votre quête pour mieux appréhender ces nouvelles manières de « concevoir la santé » ! Ces connaissances permettront demain d’accompagner les changements nécessaires de la meilleure des façons.

La voie vers le partenariat ne sera pas celle d’un seul collectif ou d’un groupe isolé d’acteurs mais le fruit d’une « lutte commune ». Seules nos énergies conjuguées, à tous les niveaux du système de santé, permettront à toutes et tous, demain, de devenir partenaires de soins.

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Projet cofinancé par le Fonds européen de développement régional dans le cadre du programme INTERREG V A Grande Région