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SPONSORING ENTRETIEN AVEC H UBERT GENIEYS A côté du financement du sport par l'Etat et les collectivités locales, se développe depuis longtemps une forme de financement privée issu des entreprises. Ce que l'on nom- me, sans trop se soucier de distin- guer les termes, le sponsoring, le parrainage ou encore le partenariat d'entreprise, est aujourd'hui deve- nu une forme incontournable du fi- nancement des grands événements sportifs. Du plus petit club jusqu'aux organi- sateurs de la Coupe du monde de football, toutes les structures spor- tives ont eu recours au sponsoring à un moment ou à un autre de leur existence. De l'entreprise locale qui aida l'équipe de football municipale à la firme Coca-Cola partenaire offi- ciel des J.O. d'Atlanta, c'est tout un réseau de financement du sport qui s'organise, se développe et, surtout, génère de nouveaux savoir-faire, de nouvelles compétences, donc de nouveaux métiers. Nous avons voulu connaître un peu mieux ceux qui apparaissent aux yeux de nombreux dirigeants spor- tifs comme de véritables magiciens capables de résoudre en une déci- sion - à condition de savoir les inté- resser ! - des problèmes financiers qui, sans leur aide resteraient inso- lubles à jamais. Comment décident- ils ? Qu'est-ce qui les motivent lors- qu'ils s'engagent aux côtés d'un club ? Quelles sont leurs compé- tences ? Quelle place prend le spon- soring dans la stratégie globale d'une entreprise ? Quels métiers et donc quelles formations va générer cette activité ? Pour cela, EP.S a interrogé Hubert Genieys qui est le responsable spon- soring de la société Nestlé Sources International (NSI). A travers ses filiales Perrier, Contrex et Vittel, NSI est présent dans l'organisation de nombreux événements sportifs et apporte son soutien à des disci- plines sportives comme le tennis, le volley-ball, l'athlétisme. « Quel budget investit la Société Nestlé Sources International (NSI) pour son sponsoring en France ? » Chez NSI ce budget est une donnée diffici- le à chiffrer. En effet, nos actions sont dé- veloppées en synergie entre différents ser- vices de l'entreprise : Marketing - Commercial - Industriel et Communication Interne. Prenons en exemple le tournoi de Roland Garros. Notre partenariat sur la manifestation mobi- lise : - le site industriel pour la fabrication d'éti- quettes et/ou de conditionnements spé- ciaux. - le marketing pour la définition des actions promotionnelles et la valorisation de notre partenariat vers nos cibles. - les commerciaux pour le montage de pro- motions en points de vente et l'exploitation de l'événement en relations publiques... C'est donc un travail d'équipe qui implique des hommes et des dépenses multiples, dif- ficiles à quantifier. Nous remercions vivement Hu- bert Genieys, d'avoir bien voulu répondre aux questions posées pour EP.S. par Alain Loret et Anne-Marie Waser, membres du Centre d'études et de mana- gement de l'innovation sportive (CEMIS) - Université de Caen - Coordination pour la Revue EP.S : Claudine Leray. EPS N° 253 - MAI-JUIN 1995 9 PHOTOS : MARC BEAUDENON Revue EP.S n°253 Mai-Juin 1995 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

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SPONSORING

ENTRETIEN AVEC HUBERT GENIEYS

A côté du financement du sport par l'Etat et les collectivités locales, se développe depuis longtemps une forme de financement privée issu des entreprises. Ce que l'on nom­me, sans trop se soucier de distin­guer les termes, le sponsoring, le parrainage ou encore le partenariat d'entreprise, est aujourd'hui deve­nu une forme incontournable du fi­nancement des grands événements sportifs. Du plus petit club jusqu'aux organi­sateurs de la Coupe du monde de football, toutes les structures spor­tives ont eu recours au sponsoring à un moment ou à un autre de leur existence. De l'entreprise locale qui aida l'équipe de football municipale à la firme Coca-Cola partenaire offi­ciel des J.O. d'Atlanta, c'est tout un réseau de financement du sport qui s'organise, se développe et, surtout, génère de nouveaux savoir-faire, de nouvelles compétences, donc de nouveaux métiers. Nous avons voulu connaître un peu mieux ceux qui apparaissent aux yeux de nombreux dirigeants spor­tifs comme de véritables magiciens capables de résoudre en une déci­sion - à condition de savoir les inté­resser ! - des problèmes financiers qui, sans leur aide resteraient inso­lubles à jamais. Comment décident-ils ? Qu'est-ce qui les motivent lors­qu'ils s'engagent aux côtés d'un club ? Quelles sont leurs compé­tences ? Quelle place prend le spon­soring dans la stratégie globale d'une entreprise ? Quels métiers et donc quelles formations va générer cette activité ?

Pour cela, EP.S a interrogé Hubert Genieys qui est le responsable spon­soring de la société Nestlé Sources International (NSI). A travers ses filiales Perrier, Contrex et Vittel, NSI est présent dans l'organisation de nombreux événements sportifs et apporte son soutien à des disci­plines sportives comme le tennis, le volley-ball, l'athlétisme.

« Quel budget investit la Société Nestlé Sources International (NSI ) pour son sponsoring en France ? » Chez NSI ce budget est une donnée diffici­le à chiffrer. En effet, nos actions sont dé­veloppées en synergie entre différents ser­vices de l'entreprise : Marketing -Commercial - Industriel et Communication Interne. Prenons en exemple le tournoi de Roland Garros.

Notre partenariat sur la manifestation mobi­lise : - le site industriel pour la fabrication d'éti­quettes et/ou de conditionnements spé­ciaux. - le marketing pour la définition des actions promotionnelles et la valorisation de notre partenariat vers nos cibles. - les commerciaux pour le montage de pro­motions en points de vente et l'exploitation de l'événement en relations publiques... C'est donc un travail d'équipe qui implique des hommes et des dépenses multiples, dif­ficiles à quantifier.

Nous remercions vivement Hu­bert Genieys, d'avoir bien voulu répondre aux questions posées pour EP.S. par Alain Loret et Anne-Marie Waser, membres du Centre d'études et de mana­gement de l'innovation sportive (CEMIS) - Université de Caen -Coordination pour la Revue EP.S : Claudine Leray.

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Toutefois, compte tenu du nombre impor­tant d'actions que nous développons dans le sport et de la large exploitation que nous en faisons en interne, nous pouvons estimer que notre Entreprise se situe au niveau des plus grands groupes français en matière d'investissement sponsoring c'est-à-dire parmi les dix premiers investisseurs, et que les sommes globalement engagées repré­sentent chaque année plusieurs millions de francs.

« Le poids du sponsoring

n'est donc pas négligeable

chez NSI ? »

Il est même impor­tant car si il est fac­teur de preuve et de proximité pour la communication de nos g r a n d e s marques, il est aussi facteur d'apparte­nance en interne. Si le sponsoring est légitime pour un groupe spécialisé

dans l'eau minérale, le sport étant un terri­toire d'expression privilégié pour la miné-ralité de nos produits, il fait également par­tie de la culture de l'Entreprise et donc du patrimoine de nos marques.

NSI a beau être un groupe dont la création est récente, il résulte du rapprochement entre Vittel S.A. et Source Perrier. et a donc hérité des cultures sponsoring existant dans les deux entreprises et des positions privilé­giées occupées dans certaines disciplines par les marques Vittel et Perrier.

« Chaque secteur de l'entreprise

se positionne par rapport à un

projet global. Mais quel est

exactement le rôle du Service

Sponsoring ? »

Chez NSI. le sponsoring dépend au­jourd'hui de la Direction commercia­le et marke­ting. Il ré­pond donc

avant tout à des objectifs de communication externe, définis pour la communication de nos marques et/ou de nos produits. En conséquence, notre rôle consiste à bâtir une politique d'actions adaptée aux préoc­cupations spécifiques de l'univers du sport et de la marque. Il nous faut intégrer les en­jeux de la marque dans un plan d'actions qui respecte l'identité du sport retenu.

« Peut-on parler d'un métier

reposant sur un savoir-faire bien

identifié.... donc sur une ou plu­

sieurs formations spécifiques ? »

Répondant à des objectifs marketing, le sponsoring peut s'appuyer sur un savoir fai­re dans ce domaine. Néanmoins, il nécessite une bonne connais­sance du sport, des événements et de leur organisation. Mieux on connaît le sport, plus facilement on recueille l'information qui permet d'op­timiser la politique de communication mise en place. Enfin, il reste ce que l'on peut appeler l'in­tuition, le feeling qui fait qu'à un moment donné, on va choisir tel sport plutôt que tel autre, alors que les deux répondent identi­quement aux objectifs initialement définis.

« Mais, à un moment, il faut

choisir. Est-ce que cela

s'apprend ? »

Je ne sais pas s'il existe une formation spécifique. Pour ma part j ' a i suivi un cursus universitaire (DESS Bancaire et Finance) qui me destinait plus au contrôle de gestion ou à l'analyse finan­cière qu'au marke­ting.

Dans le domaine du sport, je n'ai jamais eu une « carrière » internationale, même si je pratique le golf (handicap 7) et la boxe à un bon niveau. Je crois que ce qui m'a donné envie de fai­re ce métier c'est une expérience acquise à la Fac, parallèlement à mes études. Avec deux ou trois copains nous avons créé une association pour promouvoir la pratique du golf dans les universités et grandes écoles : l'APGE (Association pour la promotion du golf étudiant). Le rôle de cette association consistait à créer et animer au sein des écoles, un centre d'entraînement (practice) où, pour une somme modique, tout étudiant pouvait s'initier à la pratique du golf. Très vite, l'APGE a fédéré près de 35 écoles et a initié plus de 3000 étudiants. En deux ou trois ans, l'association est deve­nue une véritable petite entreprise. Pour financer nos actions de promotion de la pratique du golf, de plus en plus impor­tante, l'appel aux cotisations ne suffisait plus. Il nous a alors fallu diversifier nos ac­tivités par la création d'événements pour les entreprises. Nous avons ainsi profité pleine­ment de l'engouement pour le golf qui exis­tait au sein des entreprises au milieu des an­nées 80. Séduites par notre motivation, attirées par le golf et les faibles coûts d'or-

NESTLÉ SOURCES INTERNATIONAL

55 marques, 25 filiales, une présence sur les 5 continents dans 140 pays à travers la distribu­tion des marques leaders, tels sont les grands traits qui tracent les contours de l'implantation mondiale du groupe Nestlé Sources International S.A. Regroupant l'ensemble des activités « Eaux » de Nestlé, NSI est aujourd'hui, le numéro 1 mondial sur ce marché.

EN FRANCE • Nestlé Sources International S.A. coiffe l'ensemble des activités du groupe Nestlé dans les eaux minérales au sein des deux principales sociétés françaises qui sont : • Générale de Grandes Sources (ancien Groupe Perrier). • Vittel.

EN EUROPE Certains pays disposent de leur structure propre pour assurer une coordination entre la distri­bution des marques des eaux produites localement et la distribution des marques internatio­nales du groupe : Belgique. Grande-Bretagne. Allemagne, Espagne, Portugal. Italie, Suisse, Grèce. Pologne. • Dans les autres pays, les marques internationales sont distribuées par des agents.

EN AMÉRIQUE • The Perrier Group of America (PGA) assure toute la gestion des activités américaines de Nest­lé Sources International, tant aux Etats-Unis qu'au Canada. DANS LE RESTE DU MONDE Avec les premiers projets locaux, Nestlé Sources International met en œuvre une double stra­tégie à travers, d'une part, le renforcement des marques internationales et, d'autre part, le dé­veloppement mondial de ses implantations.

* * *

Sur un marché mondial de consommation des eaux embouteillées évalué à 42 milliards de litres, Nestlé Sources International produit près de 6 milliards de litres par an, soit 15 % du to­tal. L'Europe est le premier marché avec environ 68 % de la consommation, loin devant les Etats-Unis (21 %), et le reste du monde (11 %). La répartition géographique du chiffre d'affaires de Nestlé Sources International est proche de cette segmentation avec quatre grands marchés, la France, l'Allemagne, l'Italie et les Etats-Unis, qui représentent plus de 90 % du chiffre d'affaires du Groupe.

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ganisation que nous leur proposions, quelques entreprises nous ont fait confiance et nous ont permis de dégager un budget de plusieurs centaines de milliers de francs, fa­cilitant la création des centres d'entraîne­ment. Pour revenir à votre question sur la forma­tion, je ne pense pas qu'on s'engage dans ce métier sans aimer le sport et sans être pas­sionné. Une formation en marketing peut, certes, être un atout, mais il faut surtout être entreprenant et toujours disponible.

« Le sponsoring est-il un outil de

communication incontournable

dans la communication des

marques NSI ? »

Le sponsoring res­te chez NSI un complément à la stratégie de com­munication déve­loppée sur nos grandes marques. Il intervient en consé­quence lorsque le développement commercial de la marque est réalisé et

que celle-ci bénéficie d'un budget de com­munication suffisamment important pour maintenir son positionnement par un dis­cours institutionnel générique tout en déve­loppant des actions adaptées pour chaque cible. En conséquence, il peut apparaître comme « contournable « dans le sens qu'il n'est pas prioritaire en période de crise, où il est es­sentiel de réduire les dépenses considérées comme secondaires. Néanmoins, comme il permet de se rappro­cher des cibles en s'associant à leur pôle d'intérêt privilégié et donc de développer une réelle proximité avec le consommateur, facteur de sympathie, il conserve un rôle prépondérant dans les politiques de com­munication de nos trois principales marques Contrex. Vittel et Perrier. A noter que cette notion du sponsoring ne concerne pas uniquement dans cette ap­proche, le sport. Il n'y a que lorsque la cible est plutôt jeune, dynamique et masculine, que le pôle d'intérêt privilégié considéré est le sport. Notre association au sport qui est déjà légitime devient stratégique lorsque le sport peut constituer un thème de commu­nication et d'animation fort pour la marque, vers une cible jeune.

« Comment se décomposent

vos politiques d'actions

sponsoring ? »

En deux étapes principales. Tout d'abord, il nous faut bien cerner les objectifs marketing :

- comment dynamiser l'image ? - faire consommer le produit ? - vers quelle cible ? Puis, il nous faut trouver le sport qui va per­mettre de développer une politique d'ac­tions, prenant en compte les objectifs mar­keting, mais aussi l'attente de notre cible : et là réside la principale difficulté, car connaître le profil, les motivations et les as­pirations du sport que l'on veut approcher n'est pas forcément un choix facile. A noter toutefois que l'analyse du sport et des spécificités de ses pratiquants donne lieu depuis quelques années à des études de plus en plus pertinentes.

« Dans le cadre de la définition

de votre politique d'actions

sponsoring, comment choisissez-

vous de parrainer et/ou d'organiser

tel ou tel événement ? »

Dès que l'on est intéressé par un sport qui semble être en adéquation avec ce que l'on recherche, on essaie de faire un état des lieux précis pour juger de sa réelle potentia­lité. Cette phase d'analyse peut prendre un certain temps, et s'effectue en relais avec la fédération de tutelle, ou les principaux ani­mateurs de la discipline concernée. On apprend ainsi à mieux connaître l'uni­vers de la discipline, le rôle des hommes qui l'animent et le poids des différents événe­ments. C'est tout ce travail d'approche qui conditionne notre décision et nos choix d'investissement, et qui nous conduit à par­rainer, à organiser, voire à produire tel ou tel événement.

« Parlez-nous du Beach Contrex

Tour ? »

Le Beach Contrex Tour s'inscrit complète­ment dans cette logique. E n 1 9 9 1 , lorsque nous avons décidé

de nous rapprocher de la fédération françai­se de volley-ball (FFVB). c'est parce que nous étions intéressés par le phénomène du Beach Volley. Nous nous sommes dans un premier temps associés à un circuit fédéral intitulé « Internationaux de France » qui regroupait plusieurs événements organisés par des promoteurs locaux. Cette associa­tion nous a permis de mieux comprendre les forces et les faiblesses de ce sport qui restait alors perçu comme une pratique ludique et conviviale et non comme un véritable sport de compétition. Or, pour nous, cette notion de compétition était essentielle car gage de crédibilité et d'attractivité des médias et nécessaire à la reconnaissance des qualités minérales de notre produit.

Comme il n'existait pas dans l'univers du Beach Volley de promoteur capable d'orga­niser un circuit qui réponde à notre attente, nous nous sommes lancés, avec la FFVB. dans l'organisation du Beach Contrex Tour et avons retenu une formule de jeu à 3 contre 3. Ce choix n'était pas innocent car le 3x3 était la seule formule qui nous per­mettait d'attirer sur la plage les meilleurs joueurs professionnels de volley en salle, et ainsi de présenter un spectacle de qualité ré­unissant l'élite du volley français.

« Dans ces conditions, pourquoi

avoir transformé le Beach

Contrex Tour en Beach Perrier

en 1995 ? »

Pour la rai­son que notre souci perma­nent est de g a r a n t i r à nos act ions la meilleure efficacité. Nous devons

toujours contrôler notre passion pour pou­voir faire évoluer au mieux nos actions dans l'intérêt de nos marques. Après trois années d'investissement sur le Beach Contrex Tour, un bilan s'imposait ; l'occasion de faire sans complaisance le point sur les forces et les faiblesses de la manifestation et sur son potentiel de déve­loppement. Si ce bilan confirma l'attractivi-té du Beach Volley pour nos marques, il ré­véla trois freins à la poursuite de l'association de Contrex au Beach. Des obstacles aisément contournés par l'asso­ciation de Perrier.

1. La formule sportive Si, en 1991, le manque d'évolution du Beach nous conduit au développement d'un circuit en 3x3. l'officialisation du 2x2 en 1992 comme discipline olympique aux pro­chains J.O. d'Atlanta impose progressive­ment cette nouvelle formule comme pra­tique sportive de référence internationale, et diminue ainsi l'attractivité du 3x3. Cette évolution internationale du jeu est dif­ficilement compatible avec la dimension essentiellement nationale de notre marque, mais en meilleure adéquation avec celle de Perrier.

2. Le mode de distribution du produit Si le Beach constitue un bon prétexte d'ani­mation de la marque aux points de vente sur nos deux réseaux de distribution en G.M.S. (grandes et moyennes surfaces) et en C.H.R. (cafés - hôtels - restaurants), il n'était utilisé jusqu'alors avec Contrex qu'en G.M.S., le produit n'étant pas com­mercialisé en C.H.R. Or. on observe une forte densité de C.H.R. dans les zones de vacances propices au développement du Beach ; une nouvelle limite parfaitement

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contournée par l'association de Perrier. pré­sente dans les deux circuits de distribution. 3. La cible Enfin, nous nous sommes aperçus, grâce aux résultats de différentes études effec­tuées depuis 1992. que le joueur de Beach Volley. dont l'âge moyen se situe entre 15 et 25 ans. était en trop grand décalage avec le consommateur Contrex, et en meilleure adéquation avec celui de Perrier. Même si. dans le cadre d'une politique d'in­vestissement à long terme, on peut penser que les « Beach Volleyeurs » d'aujourd'hui peuvent être nos consommateurs de Contrex de demain.... il est plus réaliste d'espérer en faire très vite un consomma­teur de Perrier !...

« En fonction de c e que vous

venez de préciser, peut-on

s'attendre à ce que Perrier soit

associé à d'autres disciplines

qui touchent aujourd'hui les

jeunes » ?

Pourquoi pas ? Nous pouvons bien sûr déc l iner des po l i t iques d ' a c ­t ions dans diffé­rents sports qui sont au jourd 'hu i considérés comme pa r t i cu l i è remen t « attirants » pour les jeunes, mais, avant de multiplier nos

partenariats, il nous appartient d'exploiter au mieux les opérations déjà engagées. Je pense en particulier à notre politique d'actions dans le tennis qui inclut Roland Garros. Bercy, les tournois régionaux et également les championnats de France « Trophée Perrier ». Si nous avons su exploiter jusqu'à présent comme il convient notre association aux grands événements auprès du grand public, il nous reste beaucoup à faire pour toucher le bas de la « pyramide tennis » qui repré­sente plusieurs centaines de milliers de pra­tiquants, et optimiser ainsi totalement notre engagement dans ce sport.

« Dans le cadre d'une enveloppe

budgétaire donnée, comment

s'effectuent vos choix ? » Nos choix sont bien sûr fonction de l'intérêt que revêt l'événement dans notre program­me d'actions. Il est évident que plus l'inté­rêt pour une manifestation est grand, plus l'investissement que nous serons prêts à y consacrer sera important !... Dans tous les cas néanmoins, notre offre tiendra compte de notre capacité à exploiter le parrainage en synergie avec les différents

services de l'Entreprise ; autrement dit. de notre capacité à l'intégrer dans le Mix de la marque. De cette intégration naîtront les conditions d'association de la marque à la manifestation qui délimitent les droits et avantages à négocier avec le promoteur ou l'organisateur. C'est après cette approche que nous pouvons débuter, dans les meilleures conditions, notre négociation. Car pour bien acheter, il faut être capable d'estimer le juste prix de l'événement en fonction de son exploitation, de son intégra­tion dans une politique d'actions globale. En conséquence, toute notre approche reste empirique et s 'appuie bien sûr sur la connaissance du monde du sport dont j 'a i précédemment parlé. Elle reste aussi fonc­tion de l'offre et de la demande qui peut dans certains cas venir fortement modifier le coût d'un partenariat, en le survalorisant par rapport aux contreparties proposées.

« Possédez-vous des outils pour

vous aider à estimer le coût d'un

partenariat ? »

Si quelques outils existent, ils concer­nent essentiellement la mesure des objec­tifs d'images et/ou de notoriété d'asso­ciation de la marque à l'événement. En conséquence, ils permettent de quan­tifier et d 'évaluer l'impact de notre as­sociation a postério­

ri, à partir d'une analyse des retombées mé­diatiques, liée à notre présence sur l'événement. Néanmoins, ils sont à manier avec pruden­ce et n'ont d'intérêt que sur une longue pé­riode, car ils permettent alors de juger de l'évolution de la perception de notre asso­ciation par le public et donc de sa réelle ef­ficacité. En effet, la valorisation de la durée d'appa­rition d'une marque ou d'un produit dans un stade, par rapport au coût d'un espace publicitaire équivalent, n'a que peu d'inté­rêt si elle est faite de façon isolée, sans tenir compte de la politique d'actions et si elle est faite ponctuellement, sans possibilité de comparaison sur plusieurs éditions de la manifestation. Car si l'on considère que l'attention que porte le publie à un espace dit « classique » est totale, celle qu'il réser­ve à l'environnement publicitaire installé dans un stade est secondaire, car elle passe après l'action sportive qui s'y déroule. A titre d'exemple, à l'occasion d'un tournoi de tennis, un télespectateur sera beaucoup plus attentif à notre produit ou à notre marque lorsque celle-ci sera présente dans un espace tel que l'aire de repos. En effet, quand le jeu s'arrête, l'attention du specta­teur peut se focaliser sur l'environnement

du joueur ; il existe alors une possibilité de mémorisation du produit. 11 reste néan­moins que nous travaillons avec l'ensemble de ces données : qu'elles soient empiriques, qualitatives, quantitatives ; n'en négligeons aucune.

« Comment mesurez-vous

l'efficacité de vos actions

sponsoring ? »

Le sponso­ring, on l'a vu. n ' e s t pas une ac­tion isolée au sein de la commu­nication des marques.

Il concourt au même titre que les autres ac­tions de communications et/ou de promo­tion des marques à accroître le volume des ventes. Il reste, qu'il est toujours difficile d'isoler l'impact réel du sponsoring car il s'inscrit dans une stratégie globale définie sur le long terme. Il faut bien comprendre que la démarche sponsoring échappera toujours à une lo­gique stricte de quantification des résultats, car le sponsoring s'appuie aussi sur le rêve et la passion et sur la part d'imaginaire et de sympathie, dont il va pouvoir créditer la marque auprès du consommateur. Mais, il est vrai que nous devons nous efforcer de mettre en place des actions dont les effets à court terme doivent être plus facilement quantifiables sur les volumes de vente. Là nous entrons dans une nouvelle évolu­tion de nos actions, que seules les marques associées au sport depuis de nombreuses années vont pouvoir initier. En effet, quand un produit (ou une marque) est devenu partenaire légitime et incontour­nable d'un sport, on peut raisonnablement escompter que les pratiquants de cette dis­cipline se tournent naturellement vers l'achat ou la consommation de ce produit. Il s'agit à terme pour nous de bâtir un dis­positif judicieux de fidélisation et de stimu­lation. En s'appuyant sur la collecte de preuves d'achat placées sur le produit par exemple, on peut ainsi arriver à définir un rapport direct entre le sponsoring et les vo­lumes de vente.

Cela suppose bien sûr la plus grande réacti­vité de tout le réseau des animateurs du sport considéré, constitué par les entraî­neurs, les dirigeants, les responsables de clubs, et bien sûr les pratiquants. Il nous faut développer un discours interactif qui prenne en compte leurs attentes et les sensibilise sur nos aspirations, ce que nous développons actuellement avec le concept du Club Vittel. dans l'athlétisme. En tant que partenaire du Club d'Athlétis­me, Vittel lui apporte et lui propose des ser­vices, des avantages et en retour les clubs

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s'engagent à promouvoir la consommation du produit Vittel auprès de leurs prati­quants. Il s'agit là, d'un véritable échange.

« N'avez-vous pas le sentiment

que, de plus en plus, le sport

échappe au système des

fédérations au bénéfice du

système économique ? »

Aujour­d'hui, la lé­gitimité est celle du sys­tème fédé­ral. Notre action est donc une ac­tion de par­

tenariat avec ce système. En conséquence, nous respectons les règles qu'il nous impo­se et concourons activement à ses côtés à la promotion du sport, une promotion qui conditionne la réussite de la promotion de nos actions dans ce sport... Encore une fois, un partenariat basé sur la réciprocité. Néan­moins, les rapports du sport et de l'argent sont en pleine évolution.

« Comment pensez-vous que va

évoluer ce métier du sponsoring

face à une telle modification des

rapports entre le sport et

l'argent ? »

Le véritable enjeu écono-mique au­jourd'hui dans le sport réside dans l'acquisition des droits de propriété de

l'image du champion, de l'équipe ou d'un sport... Le pouvoir appartient à celui qui détient ces droits.

La plupart des problèmes qui existent au­jourd'hui au niveau de la programmation des sports télévisés sont liés à ces pro­blèmes de droits. A mon sens, les choses doivent à terme se normaliser et le système doit évoluer. Toutes les grandes agences de marketing sportif qui n'appartiennent pas au monde du sport et qui ont servi pendant très long­temps d'intermédiaires entre les fédéra­tions, les organisateurs d'événements, les médias et les annonceurs, sont, à mon avis, appelées à terme à disparaître ou à perdre leur indépendance. Je pense que vont se créer prochainement des centrales de droits, au sein des grandes agences de communication ou des grands médias, qui pourront d'ailleurs être le fruit d'une évolution ou d'un rachat de grandes

agences de marketing sportif. Ces centrales achèteront globalement les droits marketing de tel ou tel événement, ou tel ou tel sport, et iront ensuite les commercialiser à leurs clients annonceurs et/ou diffuseurs en leur proposant des packages complets incluant : garantie de diffusion TV et d'exposition des marques, produits dérivés, dispositifs de re­lations publiques, etc. Dans cette perspective, notre métier va évo­luer pour devenir plus généraliste. Il faudra que nous ayons une bonne connaissance des différents médias, des événements, de leur organisation, pour être en mesure de discu­ter efficacement avec une chaîne ou une centrale propriétaire des droits, afin de bâtir avec elle le meilleur partenariat possible pour répondre aux objectifs de communica­tion de nos marques. En effet, progressive­ment le nombre de nos interlocuteurs va di­minuer. Chez NSI, l'existence d'un service intégré généraliste fonctionne déjà un peu comme cela. Le processus de décision qui débouche sur les actions de sponsoring n'est pas très seg­menté en interne. En externe, aujourd'hui, nous avons trois interlocuteurs principaux : - l'organisateur, - le diffuseur. - la fédération. A terme, je pense que nous n'en aurons plus qu'un qui sera soit l'agence de communica­tion, soit le diffuseur, c'est-à-dire le titulai­re des droits. Il faut insister sur le fait que cette évolution ne se fera pas au détriment des fédérations. Elles bénéficieront au contraire de sources de financement de plus en plus importantes, car les programmes marketing développés seront de plus en plus efficaces et donc d'un coût de plus en plus élevé. Un métier comme le mien a donc un bel avenir chez l'annonceur ou dans une fédé­ration, car il faudra bien entendu que les fé­dérations s'organisent en faisant appel à de véritables professionnels capables de valo­riser leur force pour céder aux meilleures conditions leurs droits marketing aux agences et/ou média, mais aussi capables d'initier des programmes marketing com­plets. Il faut que les fédérations soient en mesure de parler en professionnels avec des professionnels de la communication.

« Est-ce qu'il existe des rapports

de force entre les annonceurs et

les fédérations ? »

Les rapports de force naissent quand cha­cun essaie d'imposer son point de vue à l'autre dans l'univers de prédilection qui n'est pas le sien... Mon métier, c'est de fai­re de la communication, du marketing, voi­re de la promotion d'événements, pas du sport. En conséquence, il m'appartient de ne pas m'immiscer dans l'organisation du sport et dans ses règles de fonctionnement.

car là n'est pas mon rôle. Quand je peux fai­re partager mon idée à mes interlocuteurs sur des points que je pense susceptibles d'être améliorés, je le fais toujours dans un esprit de partenariat. La qualité des rapports humains s'appuie à mon avis sur la franchi­se, le respect de l'expertise de l'autre et de la volonté commune d'avancer pour promou­voir la discipline, l'équipe ou le champion.

« Vittel développe aujourd'hui

tout un programme marketing

avec la Fédération française

d'athlétisme. Ce sport est

largement pratiqué dans les

associations sportives

scolaires. Comment vous

positionnez-vous par rapport

aux rencontres UNSS ? »

Entrer dans le systè­me sportif scolaire est assez complexe. Dans cet univers, la présence d 'une marque, même si sa légitimité est gran­de, reste toujours « tabou ». Nous essayons néanmoins de déve­lopper des actions d'informations sur

la nutrition et l'hydratation et, à travers elles, sur la minéralité de nos produits. Nous avons ainsi récemment organisé une exposition intitulée « Minéraix » sur les bienfaits et les vertus de l'eau minérale et avons diffusé une malette pédagogique. Développer un partenariat avec l'UNSS de­mande une connaissance importante du mi­lieu scolaire, de ses besoins et de ses at­tentes. Il faut bien le comprendre pour ne pas le tromper et ne pas se tromper. En conséquence, cela nécessite la création au sein de notre service d'une véritable cel­lule de spécialistes pour gérer les résultats entre notre entreprise et les différentes ins­tances - Rectorat, UNSS - afin de bâtir des projets d'association intelligents, satisfai­sant à l'attente des écoles, mais aussi à nos objectifs de communication. Nous touchons à un schéma de partenariat difficile à mettre en œuvre car l'enseignant d'EPS est à la frontière entre le sport sco­laire, le sport fédéral, et le sport non organi­sé. De plus, il a ses objectifs propres, ses va­leurs propres et je m'interroge s'il n'y a pas fondamentalement, voire culturellement, d'inadéquation entre les objectifs de l'en­treprise et la culture de l'école. En tout cas, cela mérite réflexion et peut-être de faire l'objet d'une prochaine inter­view dans la Revue EP.S ! ...

EPS N° 2 5 3 - M A I - J U I N 1995 13

Revue EP.S n°253 Mai-Juin 1995 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé