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REVUE TRIMESTRIELLE D’INFORMATION DE LA MTRL – N° 93 – MARS 2017 – 1 ¤ La résistance aux antibiotiques mobilise l’Assemblée générale de l’ONU Mutuelle et Santé LA REVUE DE LA MTRL

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La Revue de la MTRLMutuelle et Santé

n° 93

La Revue de la MTRL - Mutuelle et Santé est la publication officielle de la MTRL, une Mutuelle pour tous,37, avenue Jean-Jaurès 69007 LyonTél. : 04 72 60 13 02. Fax : 04 78 60 87 25Internet : mtrl.fr et mtrl-id.com

e-mail : [email protected]° de CPPAP : 0417 M 05960.23e année – trimestriel – mars 2017 – n° 93Le numéro : 1 ¤, dans tous les bureaux et agences de la MTRL. Abonnement annuel : 4 ¤.Directeur de la publication : Romain Migliorini.Administrateur : Thierry Thévenet.Éditeur délégué : Les Éditions du Chaland.ISSN : 1253-921XImpression : Roto France, 77185 Lognes.

VIE DE LA MTRL• Brèves

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RECHERCHE MÉDICALELa phagothérapie

pourra-t-elle sauverla médecine ?

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ÉCONOMIE DE LA SANTÉL’évolution du financement

de l’assurance maladie8

COMMENTAIRE BIBLIQUEAu commencement était la Sécu

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PRÉVENTIONL’activité physique adaptéesur prescription médicale

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CONNAÎTRELes phyto-œstrogènes

du houblon16

NOUVELLE APPROCHE MÉDICALELa médecine personnalisée

du cancer : d’importants succèset encore un long chemin

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ACCOMPAGNEMENT DES MALADESAgir+ à l’hôpital,

avec la Fondation HospicesCivils de Lyon

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ÉDITORIAL

e titre inquiétant est celui que le Dr Jean-Pierre Thierry place en têted’un long chapitre consacré aux bactéries multirésistantes dans son livreTrop soigner rend malade*, ouvrage dont on ne saurait trop

recommander la lecture. Que ce soit sur les risques de surmédicalisationengendrés par l’abaissement des seuils de dépistage (hypertension artérielle,cholestérol…) ou le dépistage lui-même (cancers du sein, de la prostate) commesur les erreurs médicales et le nombre de décès effarant qu’elles engendrentchaque année en France, la démonstration est éclairante, mais l’alerte qu’illance sur les périls qui se profilent à l’échelle de la planète entière pour cause de résistance de plus en plus forte des affections microbiennes aux antibiotiquesa de quoi angoisser plus encore.

Les autorités sanitaires mondiales ne s’y trompent pas pour lesquelles ce trèsgrave problème devient une priorité absolue. Il a déjà fait l’objet d’une réunionexceptionnelle de l’Assemblée générale de l’ONU fin septembre 2016, et les pouvoirs publics en France s’efforcent de réagir à ce scénario catastrophe en lançant un programme interministériel de lutte contre cette menace.

La déclaration que le ministère de la Santé a publiée en novembre dernierrésume bien la gravité de la situation : « L’antibiorésistance pourrait devenirl’une des principales causes de mortalité dans le monde. Chaque année enFrance, 12 500 décès sont liés à une infection à bactérie résistante auxantibiotiques. À l’échelle mondiale, les résistances microbiennes seraientactuellement responsables de 700 000 morts par an. L’accroissement desrésistances bactériennes et l’émergence de nouveaux mécanismes de résistanceremettent en question la capacité à soigner les infections, même les pluscourantes. Ce phénomène, lié à la surconsommation et le mésusage desantibiotiques, est aggravé par l’arrêt de production de certains anciensantibiotiques et l’absence d’innovation depuis deux décennies, conduisant à une réduction de l’arsenal thérapeutique disponible. »

Suit une série de mesures qui ne peuvent que susciter une adhésion pleineet entière : sensibilisation et communication auprès du grand public et desprofessionnels de santé, formation des professionnels de santé et bon usage desantibiotiques en médecine humaine et vétérinaire, recherche et innovationen matière de maîtrise de l’antibiorésistance…

Dans ce dernier domaine, certains chercheurs évoquent, eux, un changementde paradigme : depuis la Première Guerre mondiale, les phages** constituaientune solution thérapeutique prometteuse dans la lutte antibactérienne, qui futrapidement abandonnée avec la découverte des antibiotiques lors du secondconflit mondial. Pourquoi, disent-ils, ne pas rouvrir ce champ de recherche ?Pierre Lance y souscrit, dans les pages qui suivent, par une autre interrogationinquiète : « La phagothérapie pourra-t-elle sauver la médecine ? »

Le président, Romain Migliorini

C“Un désastre sanitaire programmé”

* Dr Jean-Pierre Thierry et Claude Rambaud, Trop soigner rend malade, Albin Michel, 2016.** Revue MTRL n° 75, sept. 2012.

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La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

Vie de la MTRL

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Santé communale : la Mutuelle Lentilloise MTRLétendue aux communes d’Éveux et Fleurieux-sur-l’Arbresle

Depuis 2015, la MTRL gère la Mutuelle Lentilloise. Il s’agit de l’une de nos premières mutuelles communales et c’est à l’initiativede la Mairie de Lentilly (au nord de Lyon) que ce partenariat dynamique a pu être mis en œuvre.

Une réussite. Ce contrat individuel élaboré avec les avantages d’une offre collective s’adresse auxhabitants de la commune ainsi qu’aux personnes y travaillant.

À l’issue d’un travail riche d’échanges et renforcé par une grande réunion d’information en novembredernier, deux communes voisines de Lentilly et attachées à partager et faire vivre ensemble cette initiativeont souhaité rejoindre la Mutuelle Lentilloise. Il s’agit d’Éveux et de Fleurieux-sur-l’Arbresle.

Une convention de parte-nariat des trois communes aété signée le 17 février dernierà la mairie d’Éveux enprésence de Mmes NicoleVagnier, maire de Lentilly, etKarine Bouchet, vice-prési-dente du CCAS de Fleurieux-sur-l’Arbresle, et deMM. Jean Martinage, maire d’Éveux, et RomainMigliorini, président de la MTRL.

La MTRL partenaire de l’associationCHALL’ANGE contre le mélanome

La MTRL soutient l’action de l’association CHALL’ANGE contre le mélanome. Cetteassociation, située à Jonage (69), se mobilise fortement contre ce cancer redouta-ble qui peut être efficacement combattu grâce à la prévention. CHALL’ANGE contrele mélanome a organisé en 2016 différentes actions et notamment une grande jour-née d’activités sportives, d’animations et d’olympiades qui ont permis de collecter11 000 ¤. Cette somme a été récemment remise à l’Institut Gustave-Roussy (prèsde Paris), un centre de cancérologie très engagé dans la lutte contre le mélanomesous l’autorité du Dr Caroline Robert. Une démarche qui mérite d’être encouragée.

Karine Bouchet, Jean Martinage, Nicole Vagnier et Romain Migliorini.

Des conférences de santé pour tousLa MTRL poursuit en 2017 son programme de conférences de santé grand public

� À Strasbourg : Auditorium du CIC Est, 31 rue Jean Wenger Valentin� “La méditation : mode ou nécessité” avec M. Jacques Kopferschmidt,

professeur de thérapeutique médicale, lundi 21 mars à 18 heures.� “Le sas de décompression, grâce à des exercices pratiques et ludiques

de sophrologie” avec Mme Sandrine Ankaoua, sophrologie caycédienne,mardi 25 avril à 18 heures.

� “Des Fleurs de Bach aux élixirs floraux” avec Mme Cécile Dufour,conseillère en Fleurs de Bach et élixirs floraux contemporains,éducatrice médico-sportive, mardi 13 juin à 18 heures.

� À Lyon : siège de la MTRL, 37 avenue Jean-Jaurès� “Aider nos enfants et petits-enfants à gérer leurs difficultés et stress” avec Mme Alice Bremand,

sophrologue caycédienne en coanimation avec le Dr Fumex, mercredi 22 mars à 18 heures.� “Le dépistage en gynécologie : mammographie, frottis, dépistage des maladies sexuellement transmissibles,

indications et limites”, avec le Dr Christelle Charvet, gynécologue obstétricienne, jeudi 4 mai à 18 heures.� “Ostéopathie : la prise en charge du patient”, avec M. Luc Fournet, ostéopathe, mercredi 17 mai à 18 heures.� “Qi Gong : découvrir une pratique chinoise de qualité” avec M. Jean-Pierre Croutaz,

Médecine traditionnelle chinoise, jeudi 1er juin à 18 heures.� “Les discordances en nutrition”, avec le Dr Philippe Fiévet, médecin nutritionniste,

maître en sciences et biologie médicales, mercredi 28 juin à 18 heures.

Pour toute information : contacter Mme Frédérique Barbier au 01 44 71 52 41 ou par mail : [email protected]

La MTRL réunit toutes ses mutuelles communales

L e 31 janvier dernier, la MTRL avait convié toutes les mutuelles communalesdont elle est le partenaire pour une rencontre de début d’année,un échange d’informations, une présentation de notre Groupe et

notamment des engagements de la MTRL en matière de prévention.La MTRL a en effet réalisé un catalogue proposant de nombreusesactions référentes et originales : conférences de santé sur un ensemblede thèmes touchant tous les grands sujets de santé et les médecinescomplémentaires, des initiatives conciliant la culture et la santé(spectacle de théâtre couplé avec une conférence) et le sport et la santé.

Autour de MM. Romain Migliorini et Étienne Depeyre, présidentet directeur général de la MTRL, les maires et les élus représentant noscommunes partenaires.

La MTRL collabore avec 36 communes dans le cadre de mutuellescommunales entre la Mutuelle des Mornantais, la Mutuelle Jarrézienne,la Mutuelle des Coteaux du Lyonnais, la Mutuelle Lentilloise, la Mutuelledes Monts d’Or, la Mutuelle du Canton de Golbey/Thaon-les-Vosges, lesmutuelles de Saint-Rémy (71) et de Tournus Val-de-Saône (71).

SAINT-RÉMY

MORNANT

CHAMPAGNE-AU-MONT-D’OR

CIVRIEUX-D’AZERGUES

LA TOUR DE SALVAGNYTOURNUS

LENTILLYTHAON-LES-VOSGES

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J e vous ai déjà conté dans cetterevue* la découverte des virusbactériophages faite en 1917

par le médecin franco-canadien Félixd’Hérelle, des virus tueurs de bacté-ries grâce auxquels la médecine rem-porta de nombreux succès thérapeu-tiques jusqu’en 1945, date à laquelleils furent “détrônés” par les antibioti-ques et jetés aux oubliettes. Or,devant les craintes suscitées par ledéveloppement de l’antibiorésistance,certains médecins estiment que l’on

devrait remettre en hon-neur l’utilisation desbactériophages. Parmieux, le Dr Alain Dublan-chet, ancien chef dulaboratoire de microbio-logie du centre hospita-lier de Villeneuve-Saint-Georges, s’est particuliè-

rement investi dans cette tentative derésurrection d’une thérapie oubliée.

Voici ce qu’il écrit sur ce sujet : « EnFrance, Félix d’Hérelle a décrit en1917 un phénomène particulier àpartir des coprocultures de dysentéri-ques évoluant vers la convalescence.Il pressentit la nature corpusculaire etnon chimique de cette manifestationpar la présence de plages claires ausein des nappes bactériennes (Shigelladysenteriae) développées en 24 heuressur les cultures. Il en conclut que laguérison de la maladie est provoquéepar un “microbe invisible doué depropriétés antagonistes vis-à-vis dubacille de Shiga”. Félix d’Hérelleappela ce mangeur de bactéries“bactériophage” (aujourd’hui souventappelé “phage”).

« Dès 1919, il montrait que l’admi-nistration orale d’un phage provoque

la guérison des entérites bactériennes(à shigelle ou salmonelle) aussi bienchez l’homme que chez l’animal. Plusencore, il affirmait que les déjectionsd’un convalescent, par transmissiondirecte, protège les proches contre lamaladie (“immunité” contagieuse).Aujourd’hui, on connaît plusieursmilliers de phages différents, tousexclusivement parasites de bactéries.[...] Tout virus se multiplie dans unecellule vivante qui peut être celle d’unmammifère, d’une plante ou encored'un procaryote (bactérie et archée).Un virus qui a pour hôte une bactérieest nommé bactériophage (phage). Unphage est très généralement spécifiqued’une espèce bactérienne, voireuniquement de quelques souchesd’une espèce. Dans la nature, lesphages sont présents partout où il y ades bactéries, qui sont les hôtes d’aumoins un phage. La thérapeutique quiutilise les phages pour traiter les infec-tions bactériennes est appelée phago-thérapie. [...] Actuellement, environ6 000 phages différents ont été étudiésqui, au mieux, ne représenteraient que10 % de l’ensemble des variétésprésentes sur le globe. Numérique-ment, les phages sont les entités biolo-giques les plus abondantes, estimées àdix fois plus que l’ensemble des bacté-ries. On trouve des phages dans tousles milieux (eaux, sols, individus,plantes, etc.) »

Le Dr Dublanchetnous apprend égale-ment qu’il est possi-ble d’associer desbactériophages etdes antibiotiques(ces derniers étant,comme chacun sait,des champignons)pour obtenir une

efficacité thérapeutique accrue. Nousconnaissons depuis quelques annéesdans les pays occidentaux l’apparitionde bactéries résistantes aux antibio-tiques, du fait de l’utilisation exces-sive de ces derniers. Mais ce quebeaucoup de gens ignorent, c’estqu’une menace plus inquiétanteencore se profile à l’horizon, du faitmême de la fabrication industrielledes antibiotiques, qui se situe désor-mais principalement en Asie.

Un danger qui vient de loinEn effet, on a constaté que des usinesinstallées en Chine et en Inde, et quiproduisent la majeure partie des anti-biotiques utilisés dans le monde,rejettent sans retenue leurs effluents etdéchets dans l’environnement, provo-quant une contamination des coursd’eau et des lacs, ce qui engendre laprolifération de superbactéries résis-tantes. Il faut savoir qu’en Europeseulement environ 25 000 personnesmeurent chaque année d’une infec-tion qui ne peut plus être traitée. Orla perte d’efficacité des antibiotiquesremet en cause les fondements de lamédecine moderne. Outre leur rôleessentiel dans le traitement d’infec-tions potentiellement fatales, denombreuses procédures médicales endépendent, comme les poses deprothèses ou les césariennes.

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Recherche médicale

La phagothérapie pourra-t-elleÉtrange question posée par ce titre, penserez-vous. La médecine, dont la vocation est de

Hélas oui, car son arme principale, les antibiotiques, est en passe de perdre son efficacité,

Même les blocs opératoires les plus modernes ne sont pas à l’abrid’une contamination bactérienne pour cause d’antibiorésistance.

* Revue MTRL n° 75, sept. 2012.

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La France est le deuxième consom-mateur d’antibiotiques en Europe,derrière la Grèce, et l’antibiorésistanceest en augmentation dans notre pays.En 2010 a été instauré un plan natio-nal d’alerte sur les antibiotiquescouvrant la période 2011-2016. Bienque l’on ait constaté une baisse géné-rale sur les dix dernières années, laconsommation des antibiotiques estrepartie à la hausse depuis 2010, et laFrance reste parmi les plus grosconsommateurs européens d’antibio-tiques. La Grande-Bretagne, pour sapart, a mis en place un groupe detravail dénommé Review on Antimi-crobial Resistance et dirigé par l’écono-miste Lord Jim O’Neil. Ce groupe arendu ses conclusions en mai 2016, etil estime que le nombre de décès dus àl’antibiorésistance pourrait passer de700 000 personnes actuellement à10 millions en 2050. Le phénomène leplus inquiétant, c’est la capacité qu’ontdes micro-organismes de voyager à lafaveur des déplacements humains oude marchandises, si bien que la résis-tance peut se propager rapidement àl’échelle mondiale. Par exemple, un

voyageur visitant un paysoù l’antibiorésistance estimportante peut êtreporteur, ou même infecté,par des bactéries résistanteset déclencher alors unecontamination. Cetterésistance est donc unproblème mondial, quelque soit le lieu où elle sedéclare sur la planète. Lamenace est d’autant plussérieuse que la recherche etle développement denouveaux antibiotiquessemble être dans uneimpasse. Les dernières

générations d’antibiotiques ont étédéveloppées au cours des trentedernières années et 3 antibiotiquesseulement sur les 41 en cours de déve-loppement se sont révélés efficaces surles principales souches résistantes.

Le développement des bactériesrésistantes aux antibiotiques résulte àl’évidence de la surconsommationainsi que des abus de prescriptionpour la consommation humaine etvétérinaire. En 2015, le premierrapport sur l’“État des lieux sur lesantibiotiques dans le monde” rédigé

par le Center for Disease Dynamics,Economics and Policy (CDDEP), basé àWashington, faisait état d’uneaugmentation de 30 % de la consom-mation humaine d’antibiotiques entre2000 et 2010, passant de 50 milliardsd’unités vendues à 70 milliards. Et cechiffre devrait encore augmenter dansles décennies à venir, du fait de lacroissance démographique et de lahausse du niveau de vie dans les paysémergents. La consommation pour lesusages vétérinaires devrait, elle aussi,croître rapidement dans les années àvenir. En effet, la consommationactuelle devrait augmenter de 66 %d’ici à 2030. Pour la seule Chine, lesquantités consommées devraientdoubler pour la même période. Laplupart des antibiotiques ne sont pasprescrits pour traiter les maladiesdéclarées des animaux, mais demanière préventive ou comme facteurde croissance, afin de compenser lesconditions malsaines des élevagesindustriels. Ces élevages concentra-tionnaires d’animaux sensibles réduitsà l’état d’objets sont l’une des grandeshontes de l’humanité dite civilisée, etnul doute qu’elle paiera ce forfait parla dégradation de sa propre santé.

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sauver la médecine ?sauver les humains, aurait-elle besoin d’être sauvée elle-même ?

du fait qu’on en use et abuse à tort et à travers.

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

Décès attribués à la résistance aux antimicrobiens chaque année d’ici à 2050

Amérique latine392 000

Amérique du Nord317 000

Europe390 000

Afrique4 150 000

Océanie22 000

Asie4 730 000

Consommation d’antibiotiques en Europe, 2012

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de 15 à 25

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Doses journalières définiespour 1 000 habitants par jour

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Une pollutionpharmaceutique qui s'aggrave

À cela s’ajoute un autre phénomèneaux conséquences gravissimes : lesfabricants émettent des quantités nonnégligeables d’antibiotiques qui finis-sent fréquemment dans les eaux uséeset se mélangent aux effluents des acti-vités agricoles et humaines, formantun environnement propice à la multi-plication des bactéries résistantesdans des milieux où elles peuventéchanger ou partager leurs caractéris-tiques génétiques. Ces échangespeuvent se faire entre différentessouches bactériennes. Les expertsconsidèrent le développement de larésistance bactérienne engendrée parles résidus d’antibiotiques dans l’en-vironnement comme étant « de loin,le risque majeur pour la santéhumaine », ces résidus pouvant trans-former aussi bien des bactéries patho-gènes que des bactéries inoffensivesen vecteurs de résistance.

En 2013, une étude sur la pollutionpharmaceutique dans les pays forte-ment peuplés d’Asie, comme laChine, l’Inde, le Bangladesh et lePakistan, considère la délocalisationde la production d’antibiotiques dansces pays à bas coûts comme une« sérieuse menace pour l’environne-ment ». Il a été mis en évidence que laplupart des sites industriels observésne respectaient pas la réglementationenvironnementale en vigueur et sedébarrassaient des effluents en lesrejetant directement dans le réseaudes eaux usées domestiques, sans trai-tement préalable, exposant ainsi lespopulations et les animaux à desbactéries résistantes par la formationd’aérosols ainsi que par l’eau et lescultures. Ce constat a confirmé lespremières observations de 2007concernant la pollution des eauxobservée aux environs des unités deproduction pharmaceutiques par uneéquipe suédoise à Hyderabad, hautlieu en Inde de la production demasse de médicaments. Ces cher-cheurs ont décrit des émissionsimportantes en provenance des usinesde Patancheru, une zone industrielleproche de la ville. Et, dans un certain

nombre de cas, ils ont relevé desconcentrations d’antibiotiques plusimportantes que ce que l’on peuttrouver dans le sang de personnessubissant un traitement. C’est ainsique la concentration en ciprofloxa-cine, un antibiotique à large spectred’action, était un million de fois plusélevée que la concentration résiduelletrouvée normalement dans les eauxtraitées. La quantité totale de cipro-floxacine rejetée atteignait 44 kg,l’équivalent de la consommationtotale d’un pays comme la Suèdependant cinq jours, soit une quantitésuffisante pour traiter l’ensembled’une ville de 44 000 habitants. Lesétudes qui ont suivi ont révélé unecontamination par les résidus médi-camenteux des sédiments des coursd’eaux, des sols ainsi que des eaux desurface et souterraines à des niveauxinimaginables. En 2014, une autreétude concernant le lac Kazipally,proche de Patancheru, montre l’incu-bation de 81 gènes identifiés de résis-tance contre « la plupart desprincipales classes d’antibiotiques »ainsi que des gènes activant le trans-fert de matériel génétique. Or cettesoupe génétique est 7 000 fois plusimportante que celle prélevée dans unlac suédois, où les chercheurs effec-tuèrent des prélèvements dans un butde comparaison, et où seuls 8 gènesde résistance ont été identifiés.

Les Chinois en première ligneLa pollution aux antibiotiques a aussiété mise en évidence sur plusieurssites en Chine, où la résistance des

bactéries aux antibiotiques est unemenace croissante. Une étude récentea montré la présence du gène de résis-tance appelé New Delhi Metallo-Béta-Lactamase (NDM-1) dansplusieurs sites de traitement des eauxusées dans le nord de la Chine. Lesscientifiques ont démontré que, pourchaque bactérie entrant dans lesystème de traitement des effluents, 4 à 5 bactéries résistantes ensortaient. Le gène NDM-1 rend lesbactéries résistantes à la plupart desantibiotiques. Depuis la découvertede ce gène en 2008, le NDM-1 a étérecensé dans plus de 70 pays dans lemonde, montrant la rapidité detransmission de la résistance bacté-rienne. La découverte récente dugène MCR-1, qui permet aux bacté-ries d’acquérir une immunité à tousles antibiotiques, y compris ceux dedernier recours, a été suivie de près etobservée dans plus de 20 pays,comme le Danemark, la Malaisie, leCanada, l’Afrique du Sud, le Japon,la Thaïlande, la Suisse ou les Etats-Unis. En France, ce gène n’aurait étédétecté que sur des animaux (dindeset cochons) ainsi que des produitsalimentaires, ce qui n’est en rienrassurant. Cela fait craindre unepossible perte de contrôle de la situa-tion si les signaux d’alerte ne mènentpas à une action immédiate. Laréalité brutale qui se dégage de toutesces observations est que nous nefaisons pas suffisamment d’effortspour contrer l’antibiorésistance.Nous devons agir sans délai contre cedanger qui menace toute l’humanité.

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Recherche médicale

Les entreprises pharmaceutiques chinoises impliquées dans le scandalede la pollution de l’eau dans le nord-ouest du pays.

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Et l’on doit mettre en évidence laterrible responsabilité des grandslaboratoires occidentaux, qui ont crupouvoir délocaliser la productiond’antibiotiques dans des pays où lescoûts de fabrication sont bienmoindres mais où le “principe deprécaution” ne figure pas encore dansla culture locale (si tant est qu’ilfigure suffisamment dans la nôtre). Ilfaut en effet prendre conscience quele mondialisme s’est développé trèsrapidement depuis la dernière partiedu XXe siècle, trop rapidement pourque les pays émergents intègrent dansleurs connaissances la dangerositépotentielle des nouvelles techniquesde fabrication. Dans les pays qui ontadopté récemment l’efficacité destechnologies modernes, il existe undécalage dramatique entre leur miseen pratique et l’adaptation psycholo-gique nécessaire aux précautions etaux prudences qu’exige leur emploi.Prenons pour exemple l’entrepriseTUL, qui est l’un des principauxfabricants d’antibiotiques en Chineet qui possède six unités de produc-tion, dont United Laboratories enMongolie-Intérieure et à Chengdudans la Province du Sichuan. L’usinede TUL en Mongolie-Intérieure a faitl’objet de critiques répétées dans lesmédias et de la part des autoritéslocales à cause de sa mauvaise gestiondes déchets. On lui reproche notam-ment le rejet d’effluents dans le lacWuliangsuhai. En 2008, l’usine a dûcesser ses opérations et installer unsystème de traitement après qu’elle aété accusée d’avoir enterré secrète-ment ses déchets dans une déchargesauvage de 50 hectares. Ses effluentsétaient aussi déversés dans des réseauxde canalisations finissant dans lefleuve Jaune. En mai 2014, l’unité deproduction d’United Laboratories aété fermée et ses opérations ont étésuspendues pour plusieurs mois. Ilfaut savoir que la Chine est lechampion de la production de sels depénicilline – un élément fondamentalpour la production de nombreuxantibiotiques – et produit 80 à 90 %des ingrédients pharmaceutiquesactifs pour les antibiotiques.

Le continent indiensévèrement touché

Mais la Chine n’est pas seule en cause.En Inde, les impacts environnemen-taux et sanitaires de la pollutionengendrée par les antibiotiques, où denombreuses matières premièreschinoises sont transformées enproduits finis, sont également unesource de grande inquiétude. L’Inde aune industrie pharmaceutique trèsdéveloppée, avec des centres deproduction disséminés sur tout le

territoire, notamment dans les Étatsd’Andhra Pradesh, de Telangana, deMaharashtra, du Gujarat, de TamilNadu et du Bengale Occidental. Or,comme je l’indiquais plus haut, lesantibiotiques ont contaminé plusieursressources en eau à Hyderabad, dontles habitants subissent constammentles impacts de la pollution depuisplusieurs décennies. Car, bienentendu, ce sont les populations loca-les, indiennes ou chinoises, qui sont etseront les premières victimes del’irresponsabilité coupable de certainsde leurs industriels et de leurs cadres.

En novembre 2015, une ONGindienne, le Center for Science andEnvironment (CSE), a publié uneétude montrant que quinze des fabri-cants de médicaments opérant dans lazone industrielle de Patancheru-Bollaram, aux environs d’Hyderabad,

ne respectent pas les réglementationsenvironnementales. En mars 2016,une importante banque suédoise apublié un rapport examinant les« Impacts de la pollution pharmaceu-tique sur les communautés et l’envi-ronnement indien » à Hyderabad etVisakhapatnam, autre centre deproduction pharmaceutique dansl’État d’Andhra Pradesh. Ce rapport amis en lumière le comportement irres-ponsable des entreprises produisantdans ces deux villes et leurs alentours.

La conclusion de toutes ces étudesn’est que trop claire : le monde entierest sous la menace d’une véritableapocalypse médicale qu’il serait impos-sible d’enrayer si nous ne trouvons pasle moyen de substituer aux antibioti-ques d’autres méthodes thérapeuti-ques. Il est donc extrêmement urgentde remettre en vigueur la phagothéra-pie, laquelle pourrait bien être notreultime recours contre la failliteprogrammée des antibiotiques. Il estmalheureusement habituel auxhumains d’attendre qu’une catastrophese produise pour prendre les mesuresqui eussent pu l’éviter. C’est dès main-tenant qu’il faut développer la produc-tion des bactériophages, afin que nousne soyons pas pris au dépourvu lorsqueles épidémies surgiront ! �

Pierre Lance

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Recherche médicale

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

Mêmes causes de la pollution de l’eau dans certaines régions de l’Inde.

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C ette protection, imaginéeassez tôt dans nos sociétés, aété organisée selon deux

logiques. La “bismarckienne” lieindissolublement la protection santé,comme contre d’autres risques, autravail, et son financement est doncassuré, en tout ou partie, par descotisations sur les salaires payées paremployés et employeurs. C’est lesystème qu’ont adopté aussi laFrance, la Belgique, l’Autriche… Ellea été étendue ensuite, non sans diffi-cultés, aux non-salariés.

L’autre système, dénommé “beve-ridgien”, parce qu’initié en Grande-Bretagne par Lord Beveridge en1942, durant la guerre, ne lie pas laprotection de la santé au travail maisà la citoyenneté, et même à la simplerésidence dans le pays. Son finance-ment est donc assuré par l’impôt.C’est ce système qu’ont adopté aussiles pays scandinaves, Danemark,Suède, Finlande. C’est aussi lesystème Medicare, pour personnesâgées, et Medicaid, pour pauvres ethandicapés, aux Etats-Unis (10 % desdépenses de santé).

Dans les deux cas, comme pour lesretraites, les patients peuvent évidem-ment compléter cette couverture pardes assurances complémentaires,mutuelles ou privées.

Une peu “résistible”augmentation des dépensesde santé

Quelle que soit la philosophie et lemode de financement et de dispensedes soins, tous les systèmes ont étésoumis, depuis trente ans, à unehausse des soins résultant de septfacteurs : 1) augmentation de lapopulation, toujours plus faibletoutefois que l’augmentation des

dépenses ; 2) élargissement de lacouverture comme “demande”sociale permanente ; 3) allongementde l’espérance de vie, qui se traduitpar une proportion de plus en plusgrande de personnes âgées, faisantaugmenter le taux de morbiditémoyen ; 4) accroissement aussi de lamorbidité, due aux pollutions diver-ses ; 5) progrès des techniques médi-cales, mais à coûts élevés ;6) tendance à une offre excessive decertains professionnels, qui y sont

poussés par le paiement à l’acte oupar la tarification hospitalière à l’ac-tivité ; 7) tendance, plus ou moinsbien réfrénée des patients, à une sur-demande de soins.

La part des dépenses de santé dansles PIB des divers pays a donc forte-ment augmenté. D’autant que lerythme de la croissance économiquea ralenti dans les pays développés,s’établissant entre 1 et 2 % par an,alors que les dépenses augmententplutôt de 3 %. Entre 1970 et 2015,

8 La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

L’évolution du financement

Dépensestotales2015

Dépensestotales1970

Dépensespar habitant

Accroiss.population

1970 à 2015

Dépenses de santé en % du PIB (en dollars) – Part du publicPays

États-Unis 16,9 % 6,2 % 9 451 327 55 %

Suisse 11,5 % 4,9 % 6 935 345 30 %

Suède 11,1 % 5,5 % 5 228 266 20 %

33 %Allemagne 11,1 % 5,7 % 5 267 258réunification

Japon 11,2 % 4,4 % 4 150 141 22,5 %

France 11 % 5,2 % 4 407 192 26 %

Pays-Bas 10,6 % 5,7 % 5 343 281 29 %

Danemark 10,6 % 7,8 % 4 943 386 14 %

Belgique 10,4 % 4 611 158 16 %

Royaume-Uni 9,8 % 4 % 4 003 148 13,5 %

Finlande 9,6 % 5 % 3 984 167 17 %

6,7 % 1 075Italie 9,1 %(1988)

3 272(1988)

14,5 %

Espagne 9 % 4,2 % 3 163 89 38 %

Portugal 8,9 % 2,3 % 1 677 45 15,5 %

5,5 % 660Grèce 8,2 %(1988)

2 246(1988)

26 %

OCDE 2014 12,4 % 9,2 % 3 814

Monde 2014 9,9 % 8,5 %

Inde 2014 4,7 % 4 %

Chine 5,5 % 3,5 %

2015 1970

OCDE - Dépenses courantes de santé 2016http://stats.oecd.org/Index.aspx?DatasetCode=ALFS_SUMTABhttp://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SH.XPD.TOTL.ZS

L’annonce par l’un des candidats à la présidence de la République française de mesures

de l’assurance maladie. Ce débat est absolument nécessaire

Économie de la santé

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cette part a doublé voire triplé alorsque l’augmentation de la populationn’a été de 15 à 30 %.

Les gouvernements ont tous couruaprès l’équilibre entre dépenses etrecettes. Sans d’ailleurs parvenir àobtenir cet équilibre, même si l’ac-tuelle ministre en France n’est pasloin de ce “Graal”. Les pays du nordde l’Europe ont mieux réussi, engénéral, que ceux du sud et que laFrance, qui a laissé se constituer unedette abyssale.

Recherche de financementsnouveaux et réductiondes dépenses

Ces réformes se sont organisées toutesautour des deux grands axes suivants :1. Élargissement des ressourcesfinancières par augmentation descotisations ou de l’impôt : en France,Michel Rocard a transgressé lemodèle bismarckien et fait un pasvers le modèle beveridgien, en créantla Contribution sociale généralisée(CSG), puis la Contribution pour leremboursement de la dette sociale(CRDS). Parallèlement, le reste àcharge du patient a été peu à peuaugmenté, comme on l’explique ci-dessous. Le rôle et l’importanced’intervention des assurances com-plémentaires ont été élargis.

Ce premier levier sur les recettes aune évidente limite : l’acceptation parles contribuables et cotisants de cetteaugmentation des prélèvements, oude cette augmentation de leur reste àcharge ; ils diminuent le pouvoird’achat des ménages et/ou pèsentévidemment sur les coûts de produc-tion. C’est pour cette dernière raisonque l’Allemagne, toujours prudenteet sage, dès la signature du traité deMaastricht, puis dans les réformes

Schroeder, pour faire face au défi dela mondialisation, a cherché, par tousles moyens, à réduire les cotisationsversées aux caisses publiques.2. D’où, depuis plusieurs années, unerecherche active de réduction desdépenses, par une multitude demesures utilisées à doses variablesselon les pays :� Non-remboursement ou dérem-boursements partiels de soins etdispositifs : création (Allemagne1996) ou augmentation (Allemagne1997, France, régulièrement, pour lesmédicaments dits “à service médicalrendu insuffisant”) du ticket modéra-teur, notamment sur les médica-ments ; remboursement forfaitairesur la base du médicament le moinscher (Allemagne 1988) ; fixation deforfaits annuels ou franchises à chargedu patient (Allemagne 2003, France2008). Le relais est alors pris par lesassurances complémentaires, maiscelles-ci fonctionnent sur cotisations,ce qui ramène la surcharge financièrevers le patient.� Négociations de tarifs plus bas avecles professionnels de santé, quand

ceux-ci sont payés par l’État ouremboursés par les caisses sur la basede tarifs conventionnés ; plafonne-ment autoritaire des prescriptions etfrais de consultation des médecins(Allemagne 1997-2003) ; rémunéra-tion partielle sous forme de capita-tion (tant par patient et par période),à la place du paiement à l’acte.� Introduction de la concurrence àtous niveaux : ainsi les réformes“thatchériennes” du National HealthService (1991) puis de Tony Blair, en2001, ont réorganisé le NHS enréseaux de soins (Primary Care Trust)regroupant dans un même district tousles professionnels de santé eux-mêmesen concurrence pour y adhérer, ycompris les hôpitaux ; notons qu’enAllemagne aussi les Caisses publiques,depuis 1992, sont en concurrence ; auDanemark, la loi de 2003 a aussiinstallé la concurrence entre établisse-ments de soins ; même réforme enSuède avec l’Adel Act de 1992.� Paiement des hôpitaux à l’activitéou à la pathologie et plus par budgetet responsabilisation/liberté augmen-tée des directions des hôpitaux.

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Économie de la santé

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

de l’assurance maladieassez rigoureuses a redonné une ampleur nouvelle au débat sur le financement

aujourd’hui, compte tenu de l’évolution des modalités du travail.

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� Promotion des médicamentsgénériques et négociations avec leslaboratoires pour des baisses de prixet, pour les médicaments nouveauxcoûteux, notamment anticancéreux,paiement à l’efficacité thérapeutiqueconstatée.

Malgré toutes ces réformes, à desdegrés divers, il est vrai, dans tous lespays à couverture santé obligatoire, lesmêmes maux sont constatés : main-tien, même si réduction, du déficit del’assurance maladie, “déserts médi-caux” avec surcharge des services d’ur-gence, files d’attente pour certainesconsultations et opérations, hôpitauxpublics en déficit, ou en manque depersonnel en raison des revenus plusélevés dans la médecine libérale, avecutilisation d’intérimaires plus chersque les praticiens – la situation estparticulièrement “noire” en Grande-Bretagne1 –, continuation de la dérivedes dépenses, privation de certainssoins pour les moins aisés et inégalitésdevant la santé.

C’est qu’en vérité les logiques quiont présidé à l’organisation des systè-mes de santé et de couverture maladiene sont plus adaptées aujourd’hui,notamment dans les pays à assuranceobligatoire, aux nouvelles modalitésplus flexibles du travail.

Un nécessaire changementde paradigme pour la santé

Ce changement doit s’opérer danscinq directions :1. Il faut d’abord un basculementfort, bien plus fort que tout ce qui aété tenté jusqu’ici, de l’attitude cura-tive vers l’attitude préventive. Il estindispensable d’engager de manièrebeaucoup plus systématique l’évite-ment de la maladie pour la moinssoigner, ce qui conduirait, du mêmecoup, à une charge moindre de l’hô-pital, au profit d’une médecine deville mieux répartie sur le territoire,avec utilisation massive de la télé-

médecine2, et, surtout, une éduca-tion du citoyen, futur patient, à êtreson premier médecin3.

À cette fin, la rémunération d’unnombre de plus en plus grand demédecins, ou cabinets médicauxcollectifs dont il faut favoriser forte-ment la multiplication, doit passer,comme en Scandinavie, du paiementà l’acte à la capitation4. Le médecindevient un “entraîneur” (coach), quiaide le patient conscient et éduqué àcette fin, à se maintenir en bonnesanté, avec, dans son intérêt même, le moins de prescriptions possible.

À cette fin aussi, des réglementa-tions beaucoup plus rigoureusesdoivent être menées, notamment auniveau européen, seul pertinent pourimposer de telles contraintes, sur l’in-dustrie agroalimentaire et, en amont,l’agriculture, et toutes les activitéspolluantes dont on découvre, de plusen plus, la multiplicité et la nocivité àdes doses de plus en plus faibles.Malheureusement, les autorités euro-péennes sont les plus sensibles auxpuissants lobbies de retardement !2. Toutes les dispositions prises pourfreiner la surconsommation médicalerestent évidemment nécessaires. Maisle besoin de médicaments nouveauxou d’exploration de procéduresnouvelles en cancérologie, trèscoûteux aujourd’hui, ne peut qu’aug-menter en raison du vieillissement etexige une modification profonde del’organisation de la recherche et de

fixation du prix des médicaments. Il est urgent de séparer nettementrecherche de production et distribu-tion, afin notamment de bien distin-guer les dépenses de recherche,indispensables, des dépenses mercati-ques, moins utiles, aujourd’huiconfondues dans les comptes d’ex-ploitation des laboratoires. Le prin-cipe en a été décrit dans cette revuedès 20095 et répété à propos du prixdes anticancéreux6.

Une telle réforme est d’autant plusnécessaire que, sous pression légiti-mes des patients, les recherches surles maladies rares vont se développeret constituent de véritables eldoradospour les laboratoires7. Cependant,cette réforme doit intervenir de préfé-rence au niveau européen, ou d’unnombre plus réduit de pays de mêmeniveau de développement. L’autoritésanitaire correspondant à cet ensem-ble lancerait des concours, dans tousles pays du ressort, en vue de trouverde nouvelles molécules, auxquelsrépondraient diverses équipes dechercheurs (privées ou publiques) quiiraient, dans les essais cliniques,jusqu’à la phase 2b sur 100 à300 personnes. C’est l’autorité sani-taire ayant lancé le concours quifinancerait la phase 3, avant de choi-sir la molécule et l’équipe de recher-che, phase 4. La lauréate recevrait unpaiement unique pour cette réussite,puis un paiement complémentairepour l’accompagnement scientifique

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Économie de la santé

1. “La santé britannique au bord de l’asphyxie”, La Croix, 23 janv. 2017.2. Du même auteur : Revue MTRL n° 91, sept. 2016.3. Ibid, n° 92, déc. 2016.4. Ibid, n° 72, oct. 2011.

5. Ibid, n° 64, déc. 2009.6. Ibid, n° 89, mars 2016.7 “Les maladies rares, nouvel eldorado des labos”,

Le Monde, 16 févr. 2016, et “Le débat sur les prix élevés des médicaments continue”, ibid, 26 janv. 2017.

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

Un formatage du monde médical entretenu par la persistance d’un numerus clausus absurde.

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des phases 3 et 4. Elle ne serait doncpas propriétaire des éventuels brevets,lesquels seraient déposés, à son profit,par l’autorité organisatrice duconcours, les redevances étant payéespar les pays non membres qui souhai-teraient utiliser la molécule. Cettemême autorité, dont on comprendl’intérêt qu’elle soit multinationale,fixerait évidemment le prix d’usagede la molécule.3. Mais, au-delà de ces nouvellesformes du maintien des populationsen bonne santé, dans les pays où cettecouverture est actuellement de formeassurantielle, avec cotisations sociales,il convient de délier le financementde l’assurance maladie du salariat.

Les sociétés européennes, forméesd’agriculteurs et petits commerçantsencore au début du XXe siècle, sontdevenues salariales. Celui-ci repré-sente 90 % de la population active,alors qu’en France, par exemple, iln’en représentait encore que 64 % en1954. Ce salariat, basé sur descontrats à durée indéterminée, sanspresque de chômage, est apparucomme une base facile pour préleverdes cotisations et assurer tout le tempsune couverture maladie satisfaisante.

Mais ce salariat est devenu de plusen plus précaire. De plus, avec le chô-mage, mais aussi compte tenu desopportunités liées au numérique, l’en-treprenariat individuel reprendvigueur, notamment ces dernièresannées avec l’auto-entrepreneuriat. Ilrisque d’être encore “boosté” avec lanumérisation-ubérisation. Par ailleurs,chaque citoyen va changer de plus enplus souvent d’emploi, avec des phasesde chômage qui, à l’idéal, seront desphases de “trans-formation”, ce quirend beaucoup plus complexe l’assiettedes cotisations dans les systèmes assu-rantiels. Enfin les robots vont détruirede nombreux emplois, sans plus que lemécanisme schumpétérien dit de “des-truction créatrice” ne crée de nou-veaux emplois de substitution à ceuxqui sont détruits. Il n’est pas exclu quele numérique, en ses diverses compo-santes, ne détruise définitivement 15 à30 % des emplois existants.

Quel avenirpour les mutuelles ?

Face à ces modifications du travail, lemodèle bismarckien n’est plusadapté. Les pays où il est installédoivent donc s’orienter vers l’alterna-tive beveridgienne et envisager unecouverture maladie accordée à tousles résidents, fondée sur l’impôt.C’est partiellement déjà le cas enFrance avec la CSG et la CRDS.Certains envisagent d’ailleurs lamême migration pour la couverturedu chômage.4. Dans un tel modèle de finance-ment de la couverture santé, quedeviennent les mutuelles ? Seront-elles un recours pour seulement lesgens aisés souhaitant une couvertureplus “luxueuse” ? C’est ce qui risqued’arriver si la couverture désormaisfinancée par l’impôt devient ou resteinsuffisante. Dans le cas contraire, lesmutuelles peuvent rester vraimentcomplémentaires et financer, commeaujourd’hui, une partie du reste àcharge qu’il faut conserver. Certainspeuvent préférer s’en passer et pren-dre le risque du reste à charge. D’au-tres plutôt s’assurer !

Elles peuvent aussi se spécialiserdans les dispositifs médicaux, princi-palement lunettes, appareils auditifset implants, en développant alors de

vrais réseaux de soins concurrents, lacouverture générale ne finançant plusces dispositifs. Mais le cas français,avec un maquis de mutuelles auxcoûts d’exploitation éminemmentvariables, montre que, de toute façon,les autorités sanitaires, si elles laissentles assurances complémentaires pour-suivre leur activité, doivent y mettreun peu d’ordre.5. Ne serait-ce qu’à cette fin, maisaussi pour l’organisation de la couver-ture générale, désormais fondée surl’impôt, les exemples de l’Allemagne,de la Suède, du Danemark, de l’Italie,montrent que la décentralisation versles collectivités locales du soin d’orga-niser et de financer la couverturesanté générale est très opportune.Chaque autorité régionale, à laquelleun type d’impôt, ou une part deTVA, serait laissé à cette fin, estmieux à même d’adapter l’organisa-tion et le contenu des soins aux carac-téristiques sanitaires régionales. Lesnouvelles régions françaises, plusproches des Länder allemands, sansen avoir la taille, assumeraient certai-nement très efficacement cetteresponsabilité nouvelle. �

Jean Matoukagrégé de sciences économiques,

professeur des universités

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Au commencement était la Sécu

Au commencement, Dieu créa la Santé et la Maladie, et la Maladie ruinait les pauvres gens, et Dieu dit alors :

“Que la Sécu soit !”

Et la Sécu fut.

Une cotisation fut prélevée sur les salaires pour financer le remboursement des soins, et Dieu vit que la Sécu était bonne.

La Sécu fit naître de nouvelles créatures qu’elle appelaMédecins conventionnés, et elle leur dit :

“Croissez et multipliez, pour mieux nous soigner !”

Mais le Ministre déclara que les Malades allaient abusersi on remboursait la totalité des soins, et il dit :

“Qu’il existe une partie des dépenses qui ne sera pas remboursée !”

Et le Ticket Modérateur fut.

Mais les Malades se soignaient moins à cause du TicketModérateur et la Maladie répandait de nouveau ses ténèbres.

Le Ministre dit alors :

“Qu’il existe des Mutuelles, qui prélèveront des cotisations supplémentaires et qui rembourseront le Ticket Modérateur.”

Et les Mutuelles furent créées par centaines, et les Malades sesoignèrent de nouveau, et le Ministre vit que cela était bon, maisles dépenses augmentaient, et la Sécu dit que ça n’était pas si bon.

Le Ministre dit alors :

“Qu’il existe des franchises que les mutuelles n’auront pas le droit de rembourser et qui dissuaderont les Malades de trop dépenser.”

Et les franchises furent, et la Sécu préleva un euro par-ci par-làpour punir les Malades qui consultaient ou achetaient desmédicaments, et la Sécu dit que ces Franchises étaient bonnespour ses finances, et les Malades les plus pauvres dirent leur colère,mais personne ne les écouta, et ils se soignèrent moins.

La Ministre dit alors :

“Qu’il existe un Tiers Payant Généralisé obligatoire,les Malades ne paieront pas les Médecins,qui se feront rembourser par la Sécu et les Mutuelles.”

Mais les Médecins ne s’étaient pas tant multipliés que ça car lesgouvernements précédents avaient fortement limité leur nombre, et du coup, ils en profitèrent pour répondre à la Ministre qu’elle

pouvait se rouler son Tiers Payant et se le fourrer où elle voulait,et qu’ils avaient autre chose à faire que de la comptabilitéet de courir après les impayés.

Et les Malades dirent que le Tiers Payant Généralisé, c’était bien joli,mais que le problème, c’était surtout les Dépassementsd’honoraires des Spécialistes.

La Ministre dit alors :

“Que les Mutuelles deviennent obligatoires pour tous les salariés et que leurs contrats remboursent moins les dépassementsd’honoraires, ainsi les Spécialistes seront contraints de baisserleurs tarifs.”

Et les Contrats qui remboursent moins qu’avant furent crééset imposés à tous, mais comme c’était un nom qui sonnait mal,la Ministre les appela Contrats Responsables.

Et les Malades commencèrent à dire qu’on se foutait de leur gueule, car ils cotisaient toujours autant pour leur Mutuelle, et les dépassements étaient moins remboursés, et les Spécialistes n’avaient pas baissé leurs tarifs.

Les Assureurs créèrent alors des SurMutuelles, qui remboursaient les dépassements que la Mutuelle n’avait pas le droit de rembourser, et les gens payèrent de nouvellescotisations en plus des cotisations obligatoires de la Sécu et de leur Mutuelle, pour être remboursés comme avant.

Et pendant ce temps, la Sécu dit à la Ministre : “Eh, Chef, on fait comment pour récupérer les Franchises s’il y a le Tiers Payant Généralisé.” Et la Ministre lui répondit : “T’as qu’à les prélever sur leur compte en banque.”

Et la Sécu lui répondit : “Je veux bien, mais les prélèvementscoûteront plus cher que ce que rapportent les franchises”, et la Ministre lui dit : “Démerde-toi et arrête de m’ennuyer avec tes problèmes.”

Et des gens commencèrent à dire : “C’est quoi, ce bordel ? Et si la Sécu gérait tout et supprimait le ticket modérateur et les franchises, on n’aurait plus besoin des Mutuelles et on économiserait 7 milliards de frais de gestion, et on ne garderait que les SurMutuelles pour les Malades qui veulent consulter des Médecins chers.”

Et la Ministre leur répondit :

“Oui, mais on ne saurait pas quoi faire des employés des Mutuelles et il y a assez de chômeurs comme ça.”

Et d’ailleurs, la Ministre était sur le départ, et avant de quitter le ministère, elle tint une conférence de presse pour déclarerqu’elle était très fière d’avoir sauvé la Sécu, et elle fut vivementfélicitée par son Président et par ses collègues pour son excellenttravail, et personne n’osa rigoler tant elle paraissait contente.

Car ce qu’elle voulait dire en fait, c’est que le Trou de la Sécuallait être rebouché en creusant le Trou des Mutuelles.

La Genèse du mille-feuille de l’Assurance maladie françaiseUn article du Dr Dominique Dupagne, sous forme de récit biblique, publié le 7 février 2017sur son site Atoute.org*, dont nous avons déjà reproduit, à plusieurs reprises, des textes par le passé.Point d’outrage ici à la Divinité, l’Éternel en a vu d’autres…

* http://www.atoute.org/n/article351.html12

Commentaire biblique

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

La solidarité nationale face à la maladie s’est

généralisée avec la création de la Sécurité sociale,

et notamment sa branche maladie. L’objectif était

initialement de permettre à tous les malades de se

soigner, mais l’empilement de mesures contradictoires,

tantôt pour faciliter, tantôt pour limiter l’accès aux

soins, est devenu aussi ridicule que coûteux.

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D es bienfaits de l’activité physi-que ne sont plus à démontrer,en particulier dans les domai-

nes des pathologies cardiovasculaireset en oncologie : il est annoncé qu’unquart des cancers seraient provoquéspar la sédentarité ; l’activité physiquemodérée quotidienne de 30 minutesdiminuerait de 30 % la mortalité liéeaux maladies cardiovasculaires et auxcancers du sein chez les femmesménopausées ; cette diminutionatteindrait 40 à 50 % pour la morta-lité liée aux cancers du côlon chezl’homme et la femme.

D’où l’idée d’inciter nos conci-toyens à bouger, et quoi de mieuxqu’un décret autorisant les médecinsà prescrire l’activité physique, aumême titre qu’un médicament.

L’activité physique adaptée (APA)est, comme son nom l’indique, uneactivité physique adaptée aux patientsen fonction de leur pathologie ; elleest définie dans les textes de loiscomme la « pratique dans uncontexte d’activité du quotidien, deloisir, de sport ou d’exercicesprogrammés des mouvements corpo-

rels produits par les muscles squelet-tiques, basée sur les aptitudes et lesmotivations des personnes ayant desbesoins spécifiques ».

HistoriqueLe projet a été porté par la députéeValérie Fourneyron, ancienneministre des Sports ; elle a contribuéà faire adopter, le 27 novembre2015, la mesure appelée “sport surordonnance”.

La prescription sur ordonnance del’activité physique adaptée concerneles patients en ALD (30 affectionslongue durée reconnues), soit quel-que 10 millions de Français.

Les professionnels qui encadrentces activités doivent connaître lesdifférentes pathologies et conseillerles patients dans la pratique d’uneactivité physique adaptée à leur état ;il peut s’agir de masseurs-kinésithéra-peutes, ergothérapeutes, psychomo-triciens ou d’éducateurs sportifsayant fait une formation pour accom-pagner ce type de patients.

Strasbourg, en 2012, a été lapremière ville à lancer ce dispositif

innovant de pres-cription du sport surordonnance. Il y avait en 2016 plus de 1 100 bénéficiairesstrasbourgeois et unnombre de médecinsparticipant à l’opérationen constante hausse(300 médecins stras-bourgeois début 2016).Une quarantaine d’au-tres villes ont suivi.

Le cadre législatifUne affection de longue durée estune maladie dont la gravité et/ou lecaractère chronique nécessitent untraitement prolongé et une thérapeu-tique particulièrement coûteuse.

Une liste établie par décret fixetrente affections (ALD30) ouvrantdroit à une exonération du ticketmodérateur (tumeurs malignes,diabète, maladies psychiatriques delongue durée, maladie coronaire…).

Le décret précise que « la dispensa-tion d’une activité physique adaptée apour but de permettre à une personned’adopter un mode de vie physique-ment actif sur une base régulière afinde réduire les facteurs de risque et leslimitations fonctionnelles liés àl’affection de longue durée dont elleest atteinte. Les techniques mobiliséesrelèvent d’activités physiques etsportives et se distinguent des actes derééducation qui sont réservés auxprofessionnels de santé, dans lerespect de leurs compétences ».

“Le sport sur ordonnance” faitpartie de la loi santé ; la loi du26 janvier 2016 de modernisation denotre système de santé prévoit, dansson article 144, la prescription, par lemédecin traitant, de l’activité physi-que adaptée à la pathologie, aux capa-cités physiques et au risque médicaldu patient, dans le cadre du parcoursde soins des patients atteints d’uneaffection de longue durée. Le décretd’application a été publié le31 décembre 2016 et son applicationentre en vigueur le 1er mars 2017.

Le patient atteint d’une maladie delongue durée inscrite sur la liste des

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Prévention

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

L’activité physique adaptéesur prescription médicale

Une réalité pour la publication du décretmais un mythe pour son application

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pathologies ALD se verra prescriresur ordonnance rédigée par sonmédecin traitant une activité physi-que adaptée. Le décret prévoit que :« Avec l’accord des patients, l’interve-nant transmet périodiquement uncompte rendu sur le déroulement del’activité physique adaptée au méde-cin prescripteur et peut formuler despropositions quant à la poursuite del’activité et aux risques inhérents àcelle-ci. Les patients sont destina-taires de ce compte rendu. »

Les nombreux “mais”L’application du décret est prévue enmars 2017, mais quels patients pourront enbénéficier ? Théoriquement, unique-ment les patients en affections delongue durée (ALD).

La liste des pathologies en ALD esttrès variée : pathologie cancéreuse (à différents stades), pathologiecardiovasculaire, diabète (ces troisaffections représentent 70 % de latotalité des maladies de longuedurée), mais aussi affections pulmo-naires, certaines maladies neurologi-ques (comme la sclérose en plaque),etc. Difficile dans ces conditions deproposer la même activité physiquepour tous et comment faire desgroupes de patients homogènes ?

En tant que médecin, je regrettequ’une fois encore la prévention soitoubliée ; faire bouger un patientdiabétique traité ne le guérira jamaisde son diabète, alors que faire bouger

un patient prédiabétique peut l’em-pêcher de le devenir comme le prou-vent certaines études : c’est un vraibénéfice pour le patient, qui s’éviteraprises médicamenteuses et complica-tions, et pour la société (en termes decoûts futurs).

Mais qui sera habilité à encadrercette activité physique ? Des mas-seurs-kinésithérapeutes ? Des éduca-teurs sportifs spécialisés en APA ?Mais avec quels types de diplôme,combien d’heures de formation ?

D e v r o n t - i l sconnaître tous lesdomaines ouseront-ils spécia-lisés, par exempleen oncologie ?En effet, unpatient qui estatteint d’un can-cer de l’intestinn’a pas la possibi-lité de faire lamême activitéqu’un patient de40 ans, victimed’un infarctus du

myocarde ; une patiente atteinte d’uncancer du sein a accès à beaucoupd’activités par rapport à une autrepatiente hémiplégique dans les suitesd’un accident vasculaire.

Il est précisé dans le décret que :« Pour les patients présentant deslimitations fonctionnelles sévèrestelles que qualifiées par le médecinprescripteur en référence à l’an-nexe 11-7-2, seuls les professionnelsde santé mentionnés au 1° de l’articleD.1172-2 sont habilités à leurdispenser des actes de rééducation ouune activité physique adaptée à lapathologie, aux capacités physiqueset au risque médical. » Qui déciderade la personne la mieux qualifiéepour prendre en charge les patientset des limitations fonctionnellessévères qui imposent le recours à unprofessionnel de santé ; si la patholo-gie est évolutive, quand devra inter-venir le changement d’intervenant etqui le décidera ?

Mais – c’est le nerf de la guerre –qui va payer ?

Il aurait été logique que la Sécuritésociale rembourse tout ou partie desséances puisqu’il s’agit d’une pres-cription médicale ; nous aurions aussipu envisager que les complémentairesde santé soient mises à contribution,mais le texte annonce que le coût seraà la charge du patient et pourra êtrepris en charge par des municipalitésselon des conditions particulières etnon précisées…

La prescription est faite lors d’uneconsultation médicale mais aucunecompensation financière pour letemps passé lors de cette consultationn’est prévue pour le médecin traitant(cotation supplémentaire ou consul-tation dédiée).

À Strasbourg, la municipalitécontribue pour 62 % au finance-ment (budget annuel : 241 000 ¤) ;l’ARS participe pour 17 %, le régimelocal d’assurance maladie 8 %, ladirection régionale de la jeunesse etdes sports et de la cohésion sociale4 %… Le patient doit donc financerentre 20 et 100 ¤ par an, en fonctionde ses revenus.

Et si l’on imagine que les municipa-lités prennent en charge une partie decette activité physique, que paieront-elles : les salles, le matériel, les heuresde travail de l’éducateur sportif ?

ConclusionEncore une idée louable qui risque definir dans les méandres administra-tifs ; la complexité de l’application dudécret, son imprécision risquent dedécourager les médecins à prescrirel’activité physique adaptée et risquentde décourager les patients à faire lesdémarches pour en bénéficier.

Peut-on réellement croire quel’application de ce décret imprécisfera partie des priorités du futurgouvernement ? �

Dr Christelle Charvetgynécologue obstétricienne

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Prévention

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/12/30/2016-1990/.../texte

Activité très faible, moins de 3 METs (voir tableau).

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L e houblon est utilisé depuis dessiècles comme agent aromati-sant – l’amertume – de la bière.

Question adjacente : la bière peut-elle affecter nos hormones ? J’imagineque certains, après lecture, ne vide-ront plus leur chope dans les mêmesprédispositions…

Une grande premièreLa découverte que les plantes conte-naient des composés hormonaux aété faite en 1951 par deux chimistesaustraliens, en charge de déterminerla cause d’une épidémie d’infertilitéchez les moutons qui a littéralementravagé l’industrie de la laine de leurpays. Il leur a fallu dix ans d’achar-nement, mais ils ont finalementtrouvé le coupable : un composévégétal appelé génistéine, présentdans un type de trèfle. C’est lemême phyto-œstrogène que celuiretrouvé dans le soja.

Deux chercheursallemands ont alorspensé que peut-êtrela génistéine retrouvéedans le trèfle et le sojaétait aussi présente dans lehoublon. En cas de positivité,on expliquerait ainsi pourquoi les

ouvrières du houblonavaient des menstruationsplus abondantes et pluslongues (ménométrorrha-gies). Effectivement, ilsont détecté une activitéœstrogénique du houblon.Ils ont donc trouvé destraces de génistéine dans lehoublon, mais en si petitesquantités que, franche-ment, la bière n’étaitquand même pas censéeavoir un effet œstrogéni-que incisif, sur cette basede résultats en tout cas, à l’époque.

L’hopéineC’est alors qu’en 1999 unphyto-œstrogène appelé 8-prenyl-nar ingénine (8-PN ou hopéine – hop,c’est le houblon en

anglais) a été découvert dans lehoublon. En fait, c’est l’œstrogènevégétal le plus puissant connu à cejour : l’hopéine est 50 fois plus puis-sante que la génistéine du soja, dutrèfle et du houblon.

On tenait là du coup une explica-tion rationnelle évidente des trou-bles menstruels chez les travailleusesdu houblon par le passé. Sauf qu’àprésent il existe des machines qui ont remplacé les travailleuses, et la seule exposition de ces femmes relève plus probablementaujourd’hui de la consommation de

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bière, bien que les niveaux d’ho-péine dans la bière soient quandmême bas et qu’ils ne devraient pascauser de préoccupation.

L’hystérie de la féminisationmasculine

On a donc un scoop : des plantesrenferment des hormones, le motterrible est lâché. Par amalgame, on aconfondu trèfle et soja, hormonesanimales et végétales, et haro sur lesoja ! Pourtant, l’humain ne mangepas de trèfle, c’est évident. Rien àcraindre de ce côté dans les annéesqui viennent ! Pourtant, le soja estconsommé depuis 9 000 ans enAsie… et les Asiatiques, réputés glou-tons de soja et donc de génistéine,

n’ont pas le problème de l’infertilitédu mouton ; aux dernières nouvelles,ils se multiplient normalement !Certes, mais d’un point de vue occi-dental, les Asiatiques mangent beau-coup plus de soja que nous, et ils neconnaissent pas encore vraiment lecancer du sein… C’est qu’en réalité

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un Asiatique mange déjà au moinsautant de riz que de soja. Il faut doncrelativiser la dose de génistéine ingé-rée, d’autant plus que celle-ci estfaiblement œstrogénique. Cepen-dant, il se trouve que la Chine estmaintenant le plus gros pays consom-mateur de bière au monde, et là onpourrait s’attendre à des changementsdans les pathologies hormonales, vule houblon qu’elle contient.

Vous pourrez aussi vous informer surcette redoutable maladie du trèfle chezles ovins australiens, mais vous noterezqu’on ne parle jamais de la différencede dose. En effet, pour absorber autantd’œstrogènes que le trèfle en a fournisaux moutons, vous auriez à boire plusde mille briques de lait de soja par jour,

ou manger 8 000 hamburgers de soja,ou encore environ 400 kg de tofu parjour. No comment.

Pourtant, il existe seulement deuxrapports de cas dans la littératuremédicale concernant les effets deféminisation associés à une consom-mation relativement faible de 14 à20 portions d’aliments à base de sojapar jour. Ce qui signifie que pour uneconsommation à dose raisonnable,

ou même sensiblement plus élevéequ’une ou deux portions par jourmangées en moyenne par les hommesasiatiques, les phyto-œstrogènes desoja n’exercent pas d’effets fémini-sants ni sur les hommes, ni sur lesbébés mâles, et ne contribuent aucu-nement au développement despubertés précoces. Contrairement àce qui a été faussement diffusé dansles médias par effet d’annonce sensa-tionnelle, et repris en chœur parnombre de pédiatres qui se sont laisséintoxiquer sans chercher plus loin.Comme pour le gluten…

Le xanthohumolMais bref, revenons… à nosmoutons. C’est alors qu’en 2001 uneétude portant sur un supplémentalimentaire contenant du houblon, etdestiné à “soutenir le sein”, a relancéles débats : un autre phyto-œstrogènedu houblon, appelé xanthohumol,pourrait bien être converti par le foieen hopéine plus puissante – ce quiaugmenterait considérablement lesconcentrations en œstrogènes duhoublon. Mais c’était une étude faitesur des souris, et une étude utilisantdes récepteurs d’œstrogènes humainsn’a pas retrouvé une telle transforma-tion dans le foie. On en restait là.

Tout semblait donc bien allerjusqu’en 2005. On avait l’hopéine, lexanthohumol, et ça ne semblait pasvraiment poser de problèmes desanté. Mais on avait oublié quelquechose dans les études, car on ne savaitpas encore que le foie n’était pas leseul site de transformation à l’inté-rieur du corps humain.

Où l’on retrouve le microbiote intestinal

Le côlon humain contient cent millemilliards de micro-organismes, c’estun organe au potentiel métaboliqueabsolument énorme. Alors mélan-geons de la bière avec des matièresfécales, et voyons ce qui se passe.Jusqu’à 90 % de conversion enhopéine a été réalisée. Jusqu’alors, laconcentration en hopéine dans labière était jugée trop faible pouraffecter la santé humaine. Mais l’acti-vité du microbiote intestinal peutaugmenter la concentration d’exposi-tion de plus de dix fois. Cela expliquevraiment pourquoi on détecte del’hopéine dans l’urine des buveurs debière pendant plusieurs jours : parceque leurs bactéries intestinales conti-nuent à la fabriquer. Clairement, laquantité d’hopéine dans la bière n’estpas la seule source des effets de l’œs-trogène, étant donné cette conver-sion. Ainsi, la question de laféminisation des hommes buvanttrop de bière est résolue.

Car l’alcool de la bière, à lui seul,suffit à réduire la production detestostérone chez les hommes (et àféminiser leur taille…). Ainsi, lorsquela bière a été envisagée comme sourcepossible d’œstrogènes, l’alcool ad’abord été enlevé. On a testé l’effetd’un équivalent d’une canette debière sans alcool par jour pendant unmois sur les niveaux hormonaux defemmes ménopausées (afin de ne pasavoir un facteur confondant avec lesœstrogènes féminins endogènes dansles résultats), et on a constaté desélévations importantes des taux d’œs-trogènes pendant le mois de bière,revenant aux taux de base unesemaine plus tard après le sevrage.Mais cela a-t-il des effets cliniques,bons ou mauvais ?

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Une étude transversale portant surenviron 1 700 femmes a révélé queles buveuses de bière semblaientavoir une meilleure densité osseuse,peut-être en raison des effets pro-œstrogéniques. Les auteurs nerecommandaient pas que les femmescommencent à boire de la bière pourleur santé osseuse, mais ils suggé-raient quand même qu’il peut yavoir des effets osseux bénéfiquespour les traîtresses qui en boiventdéjà goulûment.

Cela dit, les œstrogènes animauxtravaillent aussi. Des millions defemmes ont utilisé des hormoneschevalines (le Prémarin), obtenues àpartir d’urines de juments gravides.Ce qui a amélioré les bouffées dechaleur et réduit l’ostéoporose, mais acausé un effet secondaire plutôtagaçant, appelé… cancer du sein.Heureusement, lorsqu’on a réalisé ledrame, ces millions de femmes ontcessé immédiatement d’en avaler, etles taux de cancer du sein ont chutédans les pays du monde entier.

La question était donc de savoir siles phyto-œstrogènes du houblonétaient davantage similaires auxœstrogènes de jument favorisant lecancer du sein, ou bien aux phyto-œstrogènes du soja prévenant lecancer du sein ?

La clé pour comprendre le poten-tiel de protection de la santé desphyto-œstrogènes du soja, c’est deconnaître la différence entre les deuxtypes de récepteurs aux œstrogènescoexistant dans l’organisme.

Il existe en effet desrécepteurs alpha et bêtaaux œstrogènes dans lesein. Dans le tissumammaire, les œstrogènesanimaux – dont les nôtres– se lient aux récepteursalpha et stimulent la proli-fération des cellulesmammaires, expliquantpourquoi les hormoneschevalines de la pilulePrémarin augmentaient lerisque de cancer du sein.Mais on retrouve aussi desrécepteurs bêta aux œstro-gènes dans le sein, qui euxlient les phyto-œstrogènesdu soja, et s’opposent à laprolifération. Les récep-teurs agissent donc commele yin et le yang.

Alors, les phyto-œstro-gènes du houblon préfè-rent-ils aussi le récepteurbêta ? Eh bien non, carl’hopéine est un activateuralpha sélectif des récep-teurs aux œstrogènes.

Étonnamment, et en clair contrasteavec le soja, l’hopéine du houblon estun liant beaucoup plus faible sur bêtaque sur alpha. C’est donc une molé-cule qui pousse les cellules à se multi-plier et à grossir à l’intérieur du sein.

Cela explique pourquoi le houblonest un ingrédient répandu dans lessuppléments dits de “soutien” dusein, parce qu’il agit davantage à l’ins-tar d’un œstrogène animal. Étantdonné les problèmes de cancer dusein, l’utilisation intempestive de telsproduits devrait être découragée.

Juste boire de la bière expose évidem-ment à l’hopéine (qu’on retrouvedans les suppléments), ce qui pour-rait aider à expliquer pourquoi labière est plus cancérigène pour le seinque certaines autres formes d’alcool.

Pourquoi les hommes alcooliquesdéveloppent-ils leurs seins et d’autrestraits féminins ? Nous savons que lesœstrogènes produisent la féminisa-tion, et que notre foie élimine lesœstrogènes du corps (avec l’aide desreins aussi). La théorie de départ étaitque l’alcool induisant des dégâtshépatiques, il en résulterait unecertaine rétention corporelle d’unexcès d’œstrogènes, donc les tauxdevraient être plus importants chezces hommes.

Pourtant, lorsqu’on a dosé les tauxd’œstrogènes chez les hommes alcoo-lisés, ils n’étaient curieusement pasélevés. Et même les hommes quiavaient une cirrhose semblaientéliminer normalement les œstrogènesdu corps ! De plus, les testicules deshommes ont commencé à se rétrécir,même avant que la cirrhose ne sedéveloppe. Ainsi, d’autres explica-tions ont dû être envisagées. Donc, sice n’est pas dû aux œstrogènes endo-gènes mâles, peut-être que les alcooli-ques sont exposés à des substancesexogènes œstrogéniques provenant desources alimentaires – et peut-être àdes phyto-œstrogènes retrouvés dansles boissons alcoolisées.

Soulager les bouffées de chaleur

Environ la moitié des femmes méno-pausées et péri-ménopausées auxÉtats-Unis (à peu près pareil enFrance) souffrent de bouffées dechaleur, alors que la prévalence auJapon est dix fois moindre, ce qui estsupposé être dû à la consommationde soja. Et le houblon ? Il y a eu quel-ques études montrant un bénéficepotentiel, conduisant à un essai en2013, suggérant que les extraits dehoublon pouvaient être un peu effi-caces dans le traitement des troublesménopausiques.

Mais c’était avant une autre étude,qui a rapporté des résultats extraordi-

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naires avecenviron une demi-cuillère à café defleurs séchées de houblon par jour.Par exemple, les bouffées de chaleur :dans le groupe placebo, les femmesont commencé par une moyenne de23 bouffées de chaleur par semaine,et tout au long de l’étude, qui a durétrois mois, elles ont continué à avoir23 bouffées de chaleur par semaine.Dans le groupe houblon, elles ontcommencé de façon pire encore,mais on est tombé à 19 à la fin dupremier mois, puis à 9, puis juste à1 fois par semaine. Des résultatssimilaires ont été rapportés pour tousles autres symptômes mesurés dans la

ménopause : le houblon faitchuter les symptômes,clairement.

Au bout du compte, lehoublon est mi-angemi-démon. Selon sontaux de consommation,comme toujours.

Les isoflavonesEnfin, il est temps de vivre

avec les découvertes de sontemps, et une fois pour

toutes, les phyto-œstrogènes nedoivent plus s’appeler ainsi. C’est lenom performatif qui tue, pas lachose. Ce sont des isoflavones,comme ceux que l’on retrouve dansle thé, par exemple. Le thé ne tue paset ne féminise pas, ni les hommes niles bébés. Qu’on se le dise, et qu’onarrête de répéter que le soja estdangereux pour le sein. C’est exacte-ment l’inverse, et c’est définitive-ment prouvé sans aucune discussionpossible. Les isoflavones sont bénéfi-ques, un point c’est tout, la sciencel’a démontré, pas la télé. �

Philippe FiévetMédecin nutritionniste

Maître en sciences et biologie médicales

19La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

Quelques références parmi des milliers� J D Pedrera-Zamorano, J M Lavado-Garcia, R Roncero-Martin, J F Calderon-Garcia,

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� A Sierksma, T Sarkola, C J Eriksson, M S van der Gaag, D E Grobbee, H F Hendriks. Effect of moderate alcohol consumption on plasma dehydroepiandrosterone sulfate, testosterone,and estradiol levels in middle-aged men and postmenopausal women: a diet-controlledintervention study. Alcohol Clin Exp Res. 2004 May;28(5):780-5.

� O Schaefer, M Hümpel, K H Fritzemeier, R Bohlmann, W D Schleuning. 8-Prenyl naringenin is a potent ERalpha selective phytoestrogen present in hops and beer. J Steroid Biochem Mol Biol. 2003 Feb;84(2-3):359- 60.

� V Aghamiri, M Mirghafourvand, S Mohammad-Alizadeh-Charandabi, H Nazemiyeh. The effect of Hop (Humulus lupulus L.) on early menopausal symptoms and hot flashes: A randomized placebo-controlled trial. Complement Ther Clin Pract. 2016 May;23:130-5.

Connaître

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D ans le domaine de la cancérolo-gie, la médecine personnalisée– autrement appelée médecine

moléculaire – fait l’objet de toutes lesattentions depuis maintenantplusieurs années. Son principe estd’établir le diagnostic de la maladie àpartir du génome des cellulestumorales, permettant ainsi d’adapterle traitement aux anomalies molécu-laires identifiées ainsi qu’aux caracté-ristiques du patient (âge, état général,traitements) qui conditionnent classi-quement l’efficacité du traitement etsa tolérance.

La cellule devenue cancéreuse est lacause même de la maladie, et l’on saitque l’ADN de ces cellules tumoralesest profondément abîmé. Parmi les3 milliards de bases qui constituentl’ADN de chacune de nos cellules, desdizaines, des centaines, parfois des

centaines de milliers de mutationssont observées dans l’ADN de lacellule tumorale. Ces mutations expli-quent le comportement instable descellules tumorales qui les amène àproliférer sans retenue, pouvant abou-tir à des métastases et au décès dupatient. La compréhension du rôledes mutations dans le comportementde la cellule est la base de la médecinepersonnalisée du cancer. En effet, denombreux médicaments sont désor-mais capables de contrecarrer lesmodifications de l’ADN de la celluletumorale en bloquant les modifica-tions des protéines qu’elles entraînent.

Le séquençage pour guider le traitement

Les progrès de la médecine personna-lisée du cancer accompagnent ainsiles progrès de ce que l’on appelle lagénomique. Il y a maintenant unequinzaine d’années, on établissaitpour la première fois la carte précisedes 3 milliards de bases qui consti-tuent l’ADN d’un être humain. Cetravail colossal avait coûté plus d’unmilliard d’euros. Désormais, il estpossible d’obtenir cette mêmeséquence pour une somme unmillion de fois inférieure, de l’ordrede 2 000 ¤. Il est donc désormaisthéoriquement à notre portée depouvoir obtenir cette analyse pour denombreux patients pour lesquelscette information permettrait deguider le traitement.

Les premiers pas de la médecinepersonnalisée du cancer ont ainsi étéconsacrés au traitement de maladiespour lesquelles on avait identifié unemutation clé pour le développementdu cancer. L’expérience dans lescancers du sein puis dans certainesleucémies, dans certains sarcomes, etplus récemment dans des cancers dupoumon a permis de démontrer quedes médicaments spécifiquementdirigés contre les conséquences de cesmutations de l’ADN de la celluletumorale permettaient d’arrêter, defaire régresser et parfois de guérir unnombre croissant de patients, actuel-lement 20 à 30 % des patients.

On a ainsi pensé que la médecinepersonnalisée du cancer était à portéede main pour la totalité des patients àmoyenne échéance. Comme souventen médecine, la réalité s’est révéléeplus complexe.

Cette carte des anomalies molécu-laires de la cellule tumorale s’estavérée plus compliquée à interpréterque prévu. Pour beaucoup decancers, ce n’est pas une seule, maisplusieurs dizaines de mutations qui

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Nouvelle approche médicale

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

LE GÉNOME, DE QUOI S’AGIT-IL ?

Le génome humain est l’ensemble de l’informa-tion génétique portée par l’ADN sur les23 paires de chromosomes. Il comporte l’en-semble de l’information génétique humaine,dont celle des 20 000 à 25 000 gènes. Sonséquençage complet a été réalisé pour la1re fois en 2003. Depuis lors, différentes techni-ques ont été mises au point pour automatiser leséquençage de l’ADN et le rendre plus accessi-ble financièrement parlant. Aujourd’hui, de puis-santes machines appelées « séquenceurs »sont utilisées dans les laboratoires de recherchecomme celui du Centre Léon Bérard.

La médecine personnaliséed’importants succès et

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sont importantes pour expliquer lesanomalies biologiques de cettecellule. Il faut donc analyser trèsfinement, avec des outils de bio-informatique, ces anomalies pourcomprendre l’ordre, l’importance dechacune d’entre elles. Dans le futur,on proposera aux patients des traite-ments combinés.

Stimuler notre système immunitaire

À cette situation déjà complexe estvenue se surajouter une meilleurecompréhension des relations entre lacellule cancéreuse et les cellules envi-ronnantes dans l’organisme dupatient. La cellule cancéreuse peutainsi inhiber le système immunitaireet neutraliser son action. En effet,certaines mutations permettentparfois à la cellule tumorale d’êtrereconnue par le système immunitairedu patient. Cette reconnaissanceempêche notre système immunitairede jouer son rôle en éliminant l’in-truse. En stimulant celui-ci, onparvient à traiter ces cellules et doncà traiter le cancer.

L’immunothérapie diffère des autrestraitements du cancer par le faitqu’elle ne cible pas directement lescellules cancéreuses mais le systèmeimmunitaire du patient. On peutdésormais, grâce à ces nouveaux trai-tements d’immunothérapie, libérer

ou rétablir l’action développée par lesystème immunitaire du patientcontre sa tumeur. L’arrivée de l’immu-nothérapie est venue compléter notrearsenal thérapeutique.

Nous disposons ainsi aujourd’huid’un nombre croissant de médica-ments, de thérapeutiques ciblées ducancer et d’immunothérapie quipermettent de contrôler la progres-sion de la maladie pour une partiedes patients atteints de cancer.Cependant, pour de nombreuxpatients, la carte exacte des anoma-lies moléculaires, l’importancerespective de chacune des mutations(parfois des dizaines de milliers demutations) dans l’ADN de leurscellules tumorales restent encore àétablir et à comprendre.

Ce sont ici les enjeux de laprochaine médecine personnalisée ducancer, qui va devoir analyser plusfinement, dans le détail, et mieuxcomprendre la signification desmutations de la cellule tumorale.

Demain, les nouveaux enjeuxde la médecine personnalisée

Les prochaines étapes de la médecinepersonnalisée du cancer sont désor-mais plus claires. Demain, il s’agirade comprendre, pour chaque patient,le détail des mutations qui affectentl’ADN de sa cellule tumorale, leurdiversité, parfois leur hétérogénéité,toutes les cellules d’un même patientn’ayant pas les mêmes mutations.Une fois ces éléments identifiés, nouspourrons choisir le traitement quisera le plus adapté au patient et à satumeur. C’est un énorme champ derecherche qui s’ouvre devant lesmédecins et les chercheurs pour lesdix prochaines années. Pour réussir,les plates-formes d’analyse de la géné-tique des cancers, comme celles dontdispose déjà le Centre Léon-Bérard,

auront un rôle croissant à jouer danscette évolution. En somme, la méde-cine personnalisée du cancer, riched’importants progrès lors des quinzedernières années, est encore promiseà des développements considérablesdans les années à venir. Et j’ai bonespoir que ces progrès permettront demieux traiter chaque patient, dedonner le bon traitement au bonmoment à la bonne personne, et sansdoute ainsi d’éviter des traitementsinutiles et empiriques. Enfin, au-delàde cette prise en charge qui sera aufinal ultra-personnalisée et bénéfiquepour nos patients, la médecine dedemain répondra aussi mieux auxenjeux économiques qui se posentaujourd’hui. Ainsi grâce à la sélectiondu meilleur traitement pour le meil-leur patient, la médecine de demains’inscrira dans une démarchevertueuse pour tous. �

Pr Jean-Yves Blaydirecteur général Centre Léon-Bérard

21La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

du cancer :encore un long chemin

MUTATIONS GÉNÉTIQUES

Une mutation est une modification rare,accidentelle ou provoquée, de l'informa-tion génétique (séquence d'ADN oud'ARN) dans le génome. C'est par lebiais des mutations génétiques que lesespèces évoluent (lorsque des cellulesmutées donnent naissance à un nouvelorganisme) mais aussi que les virusdeviennent résistants aux antibiotiquespar exemple.

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Le legs : inscrire votre générosité dans l’avenirVous avez des héritiers en ligne directe, descendants ou ascendants (enfants ou parents), ces héritiers disposent d’un droit sur une partie de votre patrimoine, que l’on appelle la réserve héréditaire. Seul le solde, appelé quotitédisponible, peut être légué à toute personne ou organisme de votre choix.Vous pouvez choisir parmi trois types de legs :� Le legs universelVous léguez par testament la totalité de votre patrimoine (mobilier ou immobilier) à un ou plusieurs bénéficiairesdésignés, sans qu’il soit nécessaire d’énumérer ces biens.� Le legs à titre universelVous choisissez de léguer une partie de vos biens, mobiliers et/ou immobiliers, en désignant les bénéficiaires sur votretestament. Vous pouvez choisir de désigner la Fondation HCL comme votre légataire unique ou partiel.� Le legs à titre particulierVous choisissez précisément le ou les biens mobiliers ou immobiliers que vous souhaitezléguer. Il vous suffit d’indiquer la nature et la répartition de votre legs dans votre testament.

Comment réaliser votre legs ? Il est conseillé de déposer votre testament rédigé chez unnotaire. Vous pouvez aussi en transmettre une copie à la Fondation HCL pour l’informerde votre décision.

Le legs à chargeVous n’avez pas d’enfants, mais vous avez des héritiers en ligne collatérale (neveux,cousins…), ou vous n’avez pas d’héritiers : pensez au legs à charge.

Vous pouvez choisir de gratifier vos héritiers ou un tiers sans lien de parenté, étantentendu que cette gratification donnera lieu à des droits de succession de 55 ou 60 %,selon le lien de parenté, les bénéficiaires ne recevant donc que 45 ou 40 % des actifsmobiliers et immobiliers de la succession.

Le mécanisme du legs à charge permet, tout en préservant les droits des bénéficiairesdésignés, de contribuer à l’action de la Fondation HCL.

Comment réaliser un legs à charge ? Par testament (et toujours de préférence devant notaire), vous désignez laFondation HCL légataire universel de l’intégralité de votre patrimoine, à charge pour la Fondation de remettre, selonle lien de parenté, les 45 ou 40 % de votre succession, nets de tous droits de succession, au bénéficiaire de votre choix.� Pour la Fondation HCL, le legs est exempt de droits du fait de son statut juridique.� Pour le bénéficiaire (parent collatéral ou tiers), l’opération est totalement neutre : il reçoit 40 % de votre succes-

sion comme s’il les avait perçus en direct après versement des droits de 60 %.C’est la Fondation HCL qui devra s’acquitter auprès de l’administration fiscale des droits de 60 % dus sur lessommes remises au bénéficiaire désigné.

L’assurance vie : épargner pour aider à long termeL’assurance vie est un produit d’épargne et de prévoyance que vous pouvez souscrire auprès de votre banque ou de votre assurance. Ce contrat vous permet, à son échéance, de transmettre le capital ainsi constitué sans qu’aucundroit de succession ne soit dû à l’État. Le bénéficiaire peut être une personne, une association, ou une fondation, la Fondation HCL par exemple. Au moment de la souscription, vous choisissez le bénéficiaire. Il est importantd’identifier clairement le bénéficiaire en indiquant son nom, son adresse et de ne pas se limiter à la formule pré-imprimée dans le contrat “mes ayants droit…” Afin d’être assuré du respect de vos volontés, il est souhaitable deprévenir le bénéficiaire, idéalement par courrier.

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Accompagnement des malades

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

Agir+ à l’hôpital,avec la Fondation Hospices Civils de Lyon

Pour mener à bien sa mission au profit des malades et de leurs proches,

la Fondation Hospices Civils de Lyon collecte dons et legs auprès des particuliers

et des entreprises. Rappel des différents dispositifs existant

pour vous permettre de l’aider à poursuivre son action.

TÉMOIGNAGE

« Notre petite-fille a dû subir unegreffe du cœur. Elle a bénéficiéd’une prise en charge et d’unaccompagnement de qualité. Il estdonc naturel pour nous de contri-buer aux efforts de recherche desHCL, sans qui rien n’aurait été pos-sible. Nous avons ouvert une petiteassurance vie et avons désigné laFondation HCL pour en bénéficieraprès notre disparition. » Suzanneet François, 77 et 81 ans,Bourgoin-Jallieu.

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La donation : agir de votre vivantLa donation permet de transmettre la propriété d’un bien ou d’un droit à une personne physique ou morale, commela Fondation HCL. Vous pouvez choisir entre trois formes de donation.� La donation en pleine propriétéC’est la donation pure et simple qui porte sur la pleine propriété d’un bien.Elle est irrévocable et doit impérativement être constatée par acte notarié.� La donation avec réserve d’usufruitElle porte uniquement sur la nue-propriété. Le donateur transmet un bienmais s’en réserve la jouissance et continue ainsi de percevoir les fruits et revenusdu bien donné (loyers, intérêts…), jusqu’à son décès ou celui de son conjoints’il le souhaite.� La donation temporaire d’usufruitConstatée par acte notarié, elle permet de transmettre de façon temporaire, pourune durée déterminée (3 ans minimum), la jouissance et les revenus d’un bienà un organisme reconnu d’utilité publique. Le donateur conserve la nue-propriété de son bien pendant la durée prévue, puis en récupère la pleinepropriété à son terme. Le donateur bénéficie d’une économie d’impôt sur lerevenu (ISF éventuellement) le temps de la donation.

Le don en numéraireLe don financier au profit de la Fondation HCL peut être réalisé à tout moment.

Vous pouvez réaliser ce don en ligne, via notre site internet (www.fondationhcl.fr), ou par courrier en adressantvotre chèque à : Fondation Hospices Civils de Lyon, 3 quai des Célestins, 69002 Lyon.Votre don ouvre droit à une déduction fiscale dans les conditions suivantes :� Au titre de votre impôt sur le revenu (IR) : réduction de 66 % du montant du don (dans la limite de 20 %

de votre revenu imposable. En cas de versements excédentaires par rapport à ce plafond, l’excédent est reportésur les cinq années suivantes).Exemple : un don de 50 ¤ vous revient à 17 ¤ après déduction fiscale (déduction sur votre IR 2017 payé en 2018pour un don réalisé entre le 1/01/2017 et le 31/12/2017).

� Ou au titre de votre impôt sur la fortune (ISF) : réduction de 75 % du montant du don.Exemple : un don de 5 000 ¤ vous revient à 1 250 ¤ après déduction fiscale.

� Ou au titre de votre impôt sur les sociétés : réduction de 60 % du montant du don (dans la limite de 0,5 % du chiffred’affaires. En cas de versements excédentaires par rapport à ce plafond, l’excédent est reporté sur les cinq exercices suivants).Exemple : un don de 10 000 ¤ vous revient à 4 000 ¤ après déduction fiscale.

Dans tous les cas, un reçu fiscal permettant de bénéficier de ces réductions vous est adressé à réception de votre don.La Fondation HCL vous garantit la traçabilité des dons, c’est-à-dire la bonne affectation de votre don vers des projetsidentifiés et portés par les équipes médicales de vos hôpitaux. �

Accompagnement des malades

La Revue de la MTRL � mars 2017 � numéro 93

TRANSMETTRE, POUR PLUS D’ESPOIRS DE GUÉRISON

« Les HCL ont toujours bénéficié de la générositéde bienfaiteurs qui, par leur soutien, témoignentde l’attachement profond des Lyonnais etRhônalpins à leurs hôpitaux publics, expliqueBruno Lacroix, président de la Fondation HCL.Plus que jamais, nous avons besoin du soutien dela population pour relever les défis de la médecinedu futur, au bénéfice des patients. C’est leur géné-rosité qui va nous permettre de continuer à écrirel’histoire de l’hôpital de demain. »

Plus d’informations sur les actionsde la Fondation HCL et dons en lignesur www.fondationhcl.fr

Contact : [email protected]él. : 07 89 83 03 91 23

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Assemblée générale 2017 : posez vos questions !Par e-mail à : [email protected] ou grâce au coupon ci-dessous

La MTRL répondra à toutes les questions. Merci de votre concours.

Nom et prénom: .......................................................................................................................................................................................................................

Adresse : .......................................................................................................................................................................................................................

Question posée : .......................................................................................................................................................................................................................

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À retourner avant le 8 avril 2017 à : MTRL 37, avenue Jean-Jaurès 69007 Lyon

L’assemblée générale de la MTRLest fixée au mercredi 12 avril 2017 à 14 h 30

au Palais de la Bourse, place de la Bourse 69002 Lyon(Métro A ou Bus 13, 3, 14, 5 : arrêt Cordeliers)

Tous les adhérents sont invités à y participer.Lisez bien tous les documents de vote.

Il est important de voter.

Avant et après cette assemblée générale, vous pourrez assister àdeux conférences de santé :

11 h à 12 h :“De l’homme réparé à l’homme augmenté, plaidoyer pour un humanisme numérique”

Pr Guy VALLANCIEN, professeur d’urologie, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie de chirurgie.

16 h 15 à 17 h 30 :“Le cerveau : regards sur l’organe le plus complexe de l’univers et en même temps si proche de nous”

Pr Jean-Didier VINCENT, neuropsychiatre et neurobiologiste, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine.

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11 h à 12 h :“De l’homme réparé à l’homme augmenté, plaidoyer pour un humanisme numérique”

Pr Guy VALLANCIEN, professeur d’urologie, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie de chirurgie.

16 h 15 à 17 h 30 :“Le cerveau : regards sur l’organe le plus complexe de l’univers et en même temps si proche de nous”

Pr Jean-Didier VINCENT, neuropsychiatre et neurobiologiste, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine.

11 h à 12 h :“De l’homme réparé à l’homme augmenté, plaidoyer pour un humanisme numérique”

Pr Guy VALLANCIEN, professeur d’urologie, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie de chirurgie.

16 h 15 à 17 h 30 :“Le cerveau : regards sur l’organe le plus complexe de l’univers et en même temps si proche de nous”

Pr Jean-Didier VINCENT, neuropsychiatre et neurobiologiste, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine.

11 h à 12 h :“De l’homme réparé à l’homme augmenté, plaidoyer pour un humanisme numérique”

Pr Guy VALLANCIEN, professeur d’urologie, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie de chirurgie.

16 h 15 à 17 h 30 :“Le cerveau : regards sur l’organe le plus complexe de l’univers et en même temps si proche de nous”

Pr Jean-Didier VINCENT, neuropsychiatre et neurobiologiste, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine.

11 h à 12 h :“De l’homme réparé à l’homme augmenté, plaidoyer pour un humanisme numérique”

Pr Guy VALLANCIEN, professeur d’urologie, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie de chirurgie.

16 h 15 à 17 h 30 :“Le cerveau : regards sur l’organe le plus complexe de l’univers et en même temps si proche de nous”

Pr Jean-Didier VINCENT, neuropsychiatre et neurobiologiste, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine.

[de 14 h 30 à 16 heures : assemblée générale]