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P our répondre rapidement aux nor- mes de dépollution de plus en plus sévères, la première voie de recherche et de développement s’est concentrée sur l’optimisation des systèmes de dépollu- tion à l’échappement : des procédés qui présentent non seulement un surcoût, mais qui ne sont pas forcément opéra- tionnels dans toutes les configurations d’utilisation de nos véhicules. Le pot cata- lytique par exemple, qui limite les émis- sions d’hydrocarbures imbrûlés, ne fonc- tionne de façon optimale qu’à partir d’une certaine température dans le tuyau d’échappement. D’autres voies de recherche et de déve- loppement ont été initiées sur de nou- veaux modes de combustion. Ainsi la combustion HCCI (homogeneous charge compression ignition) combine les avan- tages du moteur à allumage commandé et du moteur Diesel. La combustion sur- alimentée fortement diluée permet quant à elle l’utilisation des petites cylin- drées à pleine charge, c’est-à-dire là où le rendement est optimum. Ces modes de combustion se déroulent sous des conditions de pression, de température et de mélanges peu documentées jus- qu’à présent. Les bancs d’essais moteurs classiques, même monocylindres « de recherche », ne donnent qu’une infor- mation globale des différents phéno- mènes physiques et ne sont utiles qu’en phase finale du développement du moteur. L’optimisation et le développe- ment des nouveaux modes de combus- tion passent alors par l’utilisation de diagnostics optiques reposant souvent sur l’utilisation d’une source de lumière de type laser, qui offrira une informa- tion fine et résolue dans le temps et dans l’espace. L’équipe Combustion et Moteurs du labo- ratoire PRISME de l’Université d’Orléans, implanté à Polytech’Orléans, a dévelop- pé depuis une dizaine d’années un savoir- faire quant à l’optimisation des moteurs de recherche à accès optique, qui per- mettent la mise en œuvre de ces diag- nostics optiques. Le laboratoire s’est éga- lement spécialisé sur le développement des techniques optiques associées. Une démarche qui a été rendue possible grâce à de nombreuses collaborations avec les constructeurs français d’automobiles. Un exemple de moteur à allumage comman- dé à accès optiques est présenté sur la figure 1. En associant différentes techniques laser (comme, par exemple, la vélocimétrie par imagerie de particules, la fluorescence induite par laser, l’incandescente induite par laser ou tout simplement l’imagerie directe), les différents couplages aéro- 40 CAHIER TECHNIQUE Moteurs Diesel : la LII pour limiter les émissions de particules Améliorant les connaissances sur les phénomènes mis en jeu lors de la combustion, de nouvelles technologies optiques apportent les données indispensables pour valider les modèles nécessaires au développement des moteurs propres. Ainsi, la LII (ou incandescence induite par plan laser), appliquée aux moteurs Diesel, permet de détecter et caractériser les particules de suies générées lors de la combustion, afin d’en réduire les émissions. • 52 • mars/avril 2011 Fenêtres optiques Visualisation directe de la flamme dans le moteur Christine MOUNAÏM-ROUSSELLE Professeur Polytech’Orléans Laboratoire PRISME [email protected] Implantation en cellule avec un diagnostic laser Figure 1. Exemple de moteur optique et son implantation en cellule. Article disponible sur le site http://www.photoniques.com ou http://dx.doi.org/10.1051/photon/20115240

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Pour répondre rapidement aux nor -mes de dépollution de plus en plus

sévères, la première voie de rechercheet de développement s’est concentrée surl’optimisation des systèmes de dépollu-tion à l’échappement : des procédés quiprésentent non seulement un surcoût,mais qui ne sont pas forcément opéra-tionnels dans toutes les configurationsd’utilisation de nos véhicules. Le pot cata-lytique par exemple, qui limite les émis-sions d’hydrocarbures imbrûlés, ne fonc-tionne de façon optimale qu’à partird’une certaine température dans le tuyaud’échappement.D’autres voies de recherche et de déve-loppement ont été initiées sur de nou-

veaux modes de combustion. Ainsi lacombustion HCCI (homogeneous chargecompression ignition) combine les avan-tages du moteur à allumage commandéet du moteur Diesel. La combustion sur -alimentée fortement diluée permetquant à elle l’utilisation des petites cylin-drées à pleine charge, c’est-à-dire là oùle rendement est optimum. Ces modesde combustion se déroulent sous desconditions de pression, de températureet de mélanges peu documentées jus -qu’à présent. Les bancs d’essais moteursclassiques, même monocylindres « derecherche », ne donnent qu’une infor-mation globale des différents phéno-mènes physiques et ne sont utiles qu’enphase finale du développement dumoteur. L’optimisation et le développe-ment des nouveaux modes de combus-tion passent alors par l’utilisation dediagnostics optiques reposant souventsur l’utilisation d’une source de lumièrede type laser, qui offrira une informa-

tion fine et résolue dans le temps et dansl’espace.L’équipe Combustion et Moteurs du labo-ratoire PRISME de l’Université d’Orléans,implanté à Polytech’Orléans, a dévelop -pé depuis une dizaine d’années un savoir-faire quant à l’optimisation des moteursde recherche à accès optique, qui per-mettent la mise en œuvre de ces diag-nostics optiques. Le laboratoire s’est éga-lement spécialisé sur le développementdes techniques optiques associées. Unedémarche qui a été rendue possible grâceà de nombreuses collaborations avec lesconstructeurs français d’automobiles. Unexemple de moteur à allumage comman -dé à accès optiques est présenté sur lafigure 1.En associant différentes techniques laser(comme, par exemple, la vélocimétrie parimagerie de particules, la fluorescenceinduite par laser, l’incandescente induitepar laser ou tout simplement l’imageriedirecte), les différents couplages aéro-

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Moteurs Diesel : la LII pour limiter lesémissions de particulesAméliorant les connaissances sur les phénomènes mis en jeu lors de la combustion, de nouvelles technologiesoptiques apportent les données indispensables pour valider les modèles nécessaires au développement desmoteurs propres. Ainsi, la LII (ou incandescence induite par plan laser), appliquée aux moteurs Diesel, permet dedétecter et caractériser les particules de suies générées lors de la combustion, afin d’en réduire les émissions.

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Fenêtres optiques

Visualisation directe de la flamme dans le moteur

Christine MOUNAÏM-ROUSSELLEProfesseur Polytech’OrléansLaboratoire PRISME

[email protected]

Implantation en cellule avec un diagnostic laser

Figure 1. Exemple de moteur optique et son implantation en cellule.

Article disponible sur le site http://www.photoniques.com ou http://dx.doi.org/10.1051/photon/20115240

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thermochimiques mis en jeu durant lecycle moteur peuvent être étudiés et ana-lysés dans le temps et dans l’espace : dansle temps grâce à la forte résolution tem-porelle de ces diagnostics, dans l’espacepuisque, grâce aux différents accès opti -ques, il est possible d’obtenir des infor-mations 2D. Cela est rendu possible grâceau développement de sources laser adap-tées à l’environnement moteur caracté-risés par leur pulse à haute fréquence.Parallèlement, le développement descaméras haute cadence (de type CMOS)a permis une grande avancée sur le déve-loppement et l’utilisation de ces diag-nostics.Ces techniques s’avèrent particulière-ment prometteuses quant à l’étude dela formation des suies dans les motorisa-tions diesel – l’une des principales pollu-tions émises par ce type de moteur. Pour

limiter la formation des particules desuies dans les moteurs, il est nécessairede mieux quantifier leur quantité dansla chambre de combustion et leur locali-sation (figure 2a) par rapport aux sitesde combustion (figure 2b) ainsi que leurcaractéristique géométrique (diamètreet distribution en taille). Pour cela, latechnique la plus prometteuse mais quidemande encore de nombreuses étudesfondamentales et appliquées est la tech-nique d’incandescence induite par planlaser (LII). Le principe est d’élever la tem-pérature des particules de suies par unapport d’énergie de type laser, les parti-cules vont alors rayonner dans le visiblecomme on peut le voir sur la figure 2b.L’intensité de ce rayonnement et son évo-lution temporelle permettent de remon-ter à la fraction volumique et au diamè-tre de ces particules.

Qu’est-ce qu’une particule de suie….

La suie est une particule solide, résultantde la combustion incomplète des hydro-carbures. Sa formation est le résultat d’unprocessus chimique complexe, dans lesrégions de la flamme où la concentra-tion en oxygène est très réduite. La for-mation des suies dans le moteur Diesel alieu à des températures comprises entre1000 et 2800 K, dans un domaine de pres-sion de 50 à 100 bars. Les suies se pré-sentent sous la forme de chaînes et d’ag-glomérés de dimensions comprises entre10 et 1000 nm composés de particulesplus ou moins sphériques, dont le « dia-mètre » se situe dans un intervalle de 5 à 30 nm. Le processus de leur forma-tion suite à la combustion est un proces-sus extrêmement complexe qui consiste,schématiquement, en une transition desmolécules d’hydrocarbure vers des ag -glomérés contenant des milliers d’atomesde carbone, ce mécanisme se déroulanten plusieurs étapes qui ne sont pas impé-rativement délimitées les unes par lesautres. De la pyrolyse du combustiblejusqu’à la libération des suies dans l’at-mosphère, l’évolution de ce polluant seréalise selon quatre étapes schémati-sées : – La formation d’hydrocarbures aroma-tiques polycycliques (HAP ou PAH, l’abré-viation de « polycyclic aromatic

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Figure 2a. Visualisation de la flamme dans un moteur Diesel, 1 ms après le début de l’injec-tion. 2b. Répartition moyenne de la fraction volumique de suies au même instant dans le cycle.

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après l’apport énergétique du pulse laser.L’amplitude du signal LII est proportion-nelle à la fraction volumique de suie dansle volume de mesure alors que la rapi-dité de décroissance du signal est reliéeà la taille moyenne des particules.– Une approche spatiale, « 2D LII », carac-térisée par une image représentant lessuies incandescentes dans une section de la zone de combustion. Cette imageest obtenue par une caméra intensifiéedurant une courte période du processusd’incandescence induite par laser. Lavariation de l’intensité du signal d’in-candescence est due à la variation desfractions volumiques des suies dans lazone de combustion. Cette approche dela technique est principalement em -ployée pour déterminer des fractionsvolumiques et offre la possibilité d’esti-mer simultanément concentrations desuies et diamètres de particules. La bonnerésolution temporelle constitue un autreatout de la technique LII qui permetd’étendre l’utilisation de cette techniqueà tout système de combustion instation-naire. Le rayonnement de type corps noirémis par les particules chauffées par lefaisceau laser est d’une intensité biensupérieure à celle des particules chauf-fées par la flamme proprement dite, per-mettant de caractériser avec une bonnerésolution spatiale même des particulesde suie situées au centre d’une flamme.Les inconvénients de la technique LII sontcelles spécifiques aux diagnostics opti -ques : la nécessité d’interpréter les résul-tats par l’intermédiaire de modèles qui

hydrocarbon »), connus comme étant lesprécurseurs des suies ; – La formation des premiers « nucleis »suite à la croissance tridimensionnelle desstructures aromatiques ;– La croissance des suies par croissancede la surface, coagulation et agglomé-ration ;– La réduction des suies par oxydation.

Et la LII ?

L’incandescence induite par laser (LII) estune technique non-intrusive permettantla détermination de la fraction volu-mique de suie et l’estimation de la taillemoyenne des particules dans un milieuréactif. Cette technique est basée sur lamesure du rayonnement de type corpsnoir de la suie chauffée par une raie (ouune nap pe) laser, la température des par-ticules est ainsi amenée autour de la tem-pérature de sublimation (vers 4000 K). La technique LII connaît principalementdeux types de développement :– Une approche temporelle, « TiReLII »pour time-resolved LII. Le signal est enre-gistré à l’aide de photomultiplicateurs,un exemple est présenté sur la figure 3.Le volume de mesure doit être suffisam-ment petit pour que le signal soit repré-sentatif de l’évolution du processus LIIdans le temps. Ce signal est caractérisépar un front montant d’une durée dequelques nanosecondes, correspondantà l’échauffement de la suie et d’une dimi-nution progressive du signal, correspon-dant au refroidissement des particules

Le rayonnement de type Planck associé au signal LII émis par une particule dediamètre dp dans un angle solide de 4stéradians et enregistré à une longueurd’onde, est décrit par l’équation ci-des-sous :

LII( ) : signal d’incandescence de la suie[W/m]c = 2,9.108 : vitesse de la lumière [m/s]h = 6,63.10-34 : constante de Planck [J.s]k = 1,38.10-23 : constante de Boltzmann[J/K]dp : diamètre de la particule [m]La dépendance entre le signal LII émis parune particule supposée sphérique et lediamètre de cette particule est évidente,mais l’influence de la taille de la suie seretrouve également dans la températurequ’elle atteint lors de son échauffement.En acceptant l’hypothèse de la sphéricitédes particules, la modélisation des bilansénergétique et massique au niveau dessuies permet de calculer une températureau cours du processus LII et de détermi-ner finalement un signal LII « théorique ».On peut ensuite extraire l’information « diamètre moyen » par la mise au pointd’une routine numérique afin de déter-miner le signal modélisé optimal qui coïn-cide avec le signal expérimental, le dia-mètre considéré dans le modèle étantdans ce cas un paramètre variable.

Figure 3. Signaux LII caractéristiques.

sont souvent constitués de constantesméconnues, comme par exemple l’indicecomplexe de réfraction de la suie.

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fente) on ob tient ce qu’on appelle unedistribution « 1D gaussienne » de l’éner-gie laser ou on peut également filtrer lefaisceau laser à l’aide d’un orifice suffi-samment petit, la distribution énergé-tique au travers du faisceau est alors detype « top-hat ». Évidemment, cette dis-tribution énergétique a une forte influ -ence sur l’échauffement de la suie dansle volume de mesure. Dans le cas de l’uti-lisation d’un faisceau dont le profil est2D gaussien, l’énergie apportée aux par-ticules, situées dans le centre de la raie,est considérablement supérieure à cellequi chauffe les particules situées vers lapériphérie. Une valeur minimale du flux énergétiquelaser est recommandée pendant lesexpériences LII : cette valeur semble êtreautour de 10 MW/cm2 (soit 0,1 J/cm2 pourun pulse d’une durée moyenne de 10 ns).Elle est associée au flux laser minimalpouvant conduire au régime des tem-pératures spécifiques de sublimation dela suie ; toutefois, on trouve plus récem-ment des recherches à des flux

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aussi à la distribution de l’énergie à tra-vers le faisceau laser. Pour une valeurfixée de la puissance laser, l’augmenta-tion de la durée du pulse laser augmentela période d’échauffement des particules,d’où le risque de superposition entrel’échauffement et le refroidissement desparticules. L’utilisation éventuel le d’unlaser pulsé de type Nd:YAG garantit ainsiun pul se d’une durée de quelques nano-secondes, temps suffisamment courtpour que l’hypothèse des phénomènesdistincts soit valable : c’est-à-dire quel’absorption ne se superpose pas aux processus de refroidissement des suies.Différentes études ont mis en évidencel’évolution du signal LII en fonction dela valeur du flux laser, en tenant comptedu profil de la distribution de l’énergielaser à travers le faisceau. Dans une sec-tion transversale du faisceau laser, larépartition énergétique est typique-ment gaussien ne : l’énergie est maxi-male au centre et décroît vers l’extrémité(figure 4). Si le faisceau passe à traversun filtre spatial (comme par exemple une

Contraintes sur la sourced’émission

La mise en place de la LII nécessite toutd’abord l’utilisation d’une source d’exci-tation, afin d’amener les particules à unetempérature bien supérieure à celle dumilieu réactif. Cette source doit être opti-misée à partir des paramètres suivants :– La longueur d’onde d’excitation ;– L’intensité et la durée du pulse laser ; – La distribution de l’énergie au travers

du faisceau laser et éventuellement, laforme de la section transversale du fais-ceau laser.

Le choix de la longueur d’onde d’excita-tion est contraint par le fait qu’il faut évi-ter d’engendrer la fluorescence d’autresespèces comme par exemple les hydro-carbures aromatiques polycycliques etque l’ensemble diamètre de particule/longueur d’onde doit être dans le régimeRayleigh, soit une longueur d’onde supé-rieure à 50 nm environ. L’intensité de l’excitation est un para-mètre lié à la durée du pulse laser, mais

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énergétiques laser inférieurs àcette valeur, dans le but d’évi-ter la vaporisation des particulesde suies.Suite à l’analyse des différentesappro ches théoriques et expé-rimentales de la technique d’in-candescence in duite par laser,l’application de la pyrométriebi-couleur semble être la plusavantageuse, en particulier dansle cas « instationnaire » où il est difficilede reprendre des conditions exactementsimilaires. En effet, la détection d’unsignal LII temporel filtré à deux lon-gueurs d’onde est une bonne solutionpour extraire simultanément des infor-mations relatives aux concentrations dessuies et aux diamètres de particules.Néanmoins, une telle application permetde quantifier la suie dans un petit volu -me de mesure, un aperçu spatial de laformation des suies ne peut être possi-ble que par des mesures en plusieursendroits. Lors d’une thèse en partena-riat avec PSA (A. Boiarciuc, 2008), un dis-positif particulier de cette technique aété mis en place afin d’obtenir une car-

tographie des concentrations des suiesdans une nappe laser simultanémentavec une estimation locale des tailles desparticules. L’excitation des particules estfaite par une nap pe laser et une détec-tion simultanée du signal LII temporel fil-tré à deux longueurs d’onde distincteset du signal LII 2D a été optimisée. L’ima -ge fournit ainsi une information sur ladistribution des particules de suie à tra-vers le milieu investigué, et les cour besdes signaux temporels la fraction volu-mique moyen ne dans un petit volu mede mesure, repérable sur l’image. Dansl’hypothèse d’une relation de propor-tionnalité entre la fraction volumique desuies et l’intensité à travers l’image, on

détermine pour le petit volumede mesure un facteur de conver-sion égal au rapport entre laconcentration de suies déjà esti-mée et l’intensité dans la zonecorrespondante de l’image. Cefacteur est ensuite appliqué à toute l’image LII pour réaliserla conversion de l’intensité enconcentration de suies. Les si -gnaux LII temporels peuventensuite être utilisés pour uneestimation locale des tailles desparticules.Cette approche originale del’application LII permet de réali-

ser des estimations quantitatives de tail -les et de con centrations des suies aussibien dans les flammes que dans desmilieux caractérisés par une combustionturbulente non stationnaire, comme lachambre de combustion d’un moteur.

Exemple d’applications : dans un moteur Diesel « transparent »

Cette approche a été mise en œuvre dansun moteur Diesel « transparent » dont unschéma est proposé sur la figure 5. Sur lecylindre, deux accès optiques latéraux en quartz ont été im plémentés, résistantaux conditions de haute pression et hautetempérature spécifiques à la combustiondiesel. Le piston est, quant à lui, muni detrois accès optiques dont deux latérauxnécessaires au passage d’une nap pe laseret un central pour détecter le signal. Untrou oblong usiné sur la surface cylin-drique du piston re haussé permet d’in-troduire un miroir qui est fixé sur le blocmoteur permettant ainsi l’accès optiquedans la chambre de combustion. La source d’excitation utilisée est un laser pulsé Nd:YAG dont l’énergie maxi-male par pulse est autour de 400 mJ pourune durée du pulse de 10 ns (largeur àmi-hauteur) et une longueur d’onde de1064 nm. L’utilisation de cette longueurd’onde en proche infrarouge évite lafluorescence de certaines espèces commeles hydrocarbures aromatiques polycy-cliques (PAH) et celle du C2 si l’éner giedu pulse est relativement faible.

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Figure 5. Moteur Diesel à accèsoptiques et LII

Figure 4. Schémas des répartitionsénergétiques dans le faisceau laser.Nouvelle approche expérimentaleoriginale de la technique LII.

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Une nappe laser d’une hauteur de 50 mmet d’une largeur d’environ 1 mm estgénérée grâce à un jeu de deux lentillescylindrique et sphérique, le flux laser correspondant est estimé à 0,15 J/cm2

pour un profil spatial gaussien selon lesdeux directions. Une caméra intensifiéede type Princeton avec une résolution de512 x 512 pixels² à une fréquence d’ac-quisition maximale de 16 Hz est placéedevant le miroir du moteur afin de dé -tecter le signal d’incandescence. Un fil-tre passe-bas placé entre la caméra etl’objectif laisse passer le rayonnementd’une longueur d’onde placée dans l’in-tervalle 400 à 450 nm.

Des exemples d’images obtenues en pré-sence ou non d’émission laser (rayonne-ment naturel de la combustion) sont pré-sentés sur la figure 6. On peut noter ladistribution très inhomogène et liée à la zone de combustion. L’analyse statis-tique de ce genre de données est trèscomplexe. Il semble donc qu’une desvoies de développement de la LII soit de faire le suivi temporel en 2D de la LIIafin d’obtenir la répartition spatiale etl’évolution en diamètre simultanément.

Conclusions

L’ensemble des informations obtenues à partir des techniques optiques, dans les moteurs « transparents », permet demieux appréhender les phénomènes physiques mis en jeu lors de la combustiondans les moteurs thermiques. Dans lesmoteurs Diesel en particulier, les déve-loppements de la LII permettent de modé-liser précisément, au moment même dela combustion, la formation des polluantsmajeurs que sont les suies : une techniquesur laquelle le développement des mo -teurs propres ne pourra pas faire l’im-passe…

Références

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A. Boiarciuc, F. Foucher, C. Mounaïm-Rousselle, O.Pajot, Estimate Measurement of Soot Diameter andVolume Fraction Inside the Bowl of a Direct, Injec-tion, Compression, Ignition Engine: Effect of theExhaust Gas Recirculation, Combustion Science andTechnology, 2007, vol. 179, I 8, pp. 1631-1648

H.A. Michelsen, F. Liu, B.F. Kock, H. Bladh, A. Boiar-ciuc, M. Charwath, T. Dreier, R. Hadef, M. Hofmann,J. Reimann, S. Will, P.E. Bengtsson, H. Bockhorn, F. Fou-cher, K.P. Geigle, C. Mounaïm-Rousselle, C. Schulz,R. Stirn, B. Tribalet and R. Suntz, Modelling laser-indu-ced incandescence of soot: a summary and compari-son of LII models, Applied Physics B, 2007, vol. 87, No. 3, pp. 503-521

C. Marchal, J.L. Delfau, C. Vovelle, G. Moréac, C. Mou-naïm-Rousselle, F. Mauss, Modelling of aromatics andsoot formation from large fuel molecules, Procee-dings of the Combustion Institute, 2009, vol. 32, pp. 753-759

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Figure 6. Évolution de la combustion durantle cycle moteur (colonne de gauche) et de larépartition des suies (colonne de droite).