Monz un bas de chez crim

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Un bas de chez Crim

- Collection Romans / Nouvelles -

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Table des matièresUn bas de chez Crim...................................................................................1

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Un bas de chez Crim

Auteur : monzCatégorie : Romans / Nouvelles

Ca n'aurait pas pu se passer plus mal.Quand elle est entrée, j'avais le bas à la main et m'apprêtais à le cachersous le matelas.

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Ca n'aurait pas pu se passer plus mal.

Quand elle est entrée, j'avais le bas à la main et m'apprêtais à le cachersous le matelas. Son regard s'est porté droit dessus, en connaisseuse, un basde chez Crim, le salaud a-t-elle dû penser ! Elle a ouvert la bouche, s'estravisée, m'a lancé au visage ce qu'elle avait à la main, ses clés de voiture,m'a manqué, a juré, a fait demi-tour, me laissant une vague de sonparfum... J'ai entendu la porte de la salle de bain claquer, le clic-clac duverrou et sa douce et tendre voix qui disait :

« Salaud ! Salaud !

Je me sentais stupide, ce bas à la main, et triste, et pourquoi tout n'est-il pasplus facile, et...

Je me relevais, fatigué. Mal à mon aise. Un bas de chez Crim, quelleimbécillité ! Et dans notre chambre encore ! La gaffe ! Comment luiexpliquer ? A quel prix acheter le pardon ? Comprendrait-elle ? L'aveu.C'était la voie la plus raisonnable maintenant, avouer tout, tout avouer ettant pis pour le mal qui nous en découlerait... Depuis le commencement...

« Salaud ! Salaud !

Ma belle n'avait jamais su pleurer en silence.

Je m'approchais de la porte, étourdi. Le commencement, c'était revenir surla douleur, la honte et... Mes forces m'abandonnaient, la tensionaccumulée, le poids de la trahison, l'incertitude des mensonges, leur aciditéau fond de la gorge, pour si peu...

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« Aline, ouvre-moi...

-Salaud ! Salaud !

-Laisse-moi t'expliquer... Ce n'est pas ce que tu crois...

-Salaud ! Salaud !

La variation n'était pas sa tasse de thé. Mais pour ce que ça changeait... -Tu sais, je ne sais plus trop où j'en suis... Tout s'est passé si vite, tucomprends ?-Sal...-Si tu veux ! Si tu veux ! Mais il fallait bien faire quelque chose ! Je n'enpouvais plus d'attendre ! De ne rien faire ! C'était trop dur ! Rester là,quand tu partais travailler pour nous deux ! Me sentir si inutile ! Un poidsmort ! Et tout ces gens, là, autour, calfeutrés dans leur petite vie bienrémunérée... Je n'en pouvais plus ! J'ai craqué ! Tu m'entends ? J'ai craqué !Ca été comme une petite vengeance pour moi !-Hector ?-Oui ?-Salaud ! Salaud ! Tu peux raconter ce que tu veux, je ne t'écoute pas ! Jene veux plus entendre parler de toi ! Jamais ! T'es qu'un pauvre... Unpauvre... Un pauvre vieux... Un pauvre vieux salaud ! Voilà tout ce que tues ! Un salaud ! Salaud !-Aline !-Et elles sont trop faciles tes excuses ! Le chômage ! Les autres ! Ce que tume dois ! Comme si c'était une partie de plaisir pour moi ! Me leverpendant que monsieur roupille d'avoir regardé la télé toute la nuit ! Metaper mes huit heures de travail ! Les courses ! Les trajets ! Et revenir ! Tevoir tirer la gueule, les petites annonces à tes pieds ! L'oeil comme unchien et le désir éteint ! C'est depuis que tu ne travailles plus que je suisdevenue moche ? Elle est comment l'autre sous ses bas de chez Crim ? Ellene sent pas trop la bourgeoise, ta donzelle ? Elle fait pas des manières desfois ?-Aline ! Tu te trompes, ce...

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-Salaud ! Salaud ! C'est toi qui me trompes ! Et avec une grosse richeencore ! Mais si tu voulais bien faire, fallait qu'elle banque ta salope ! Aulieu d'oeuvrer pour le plaisir ! Un bas de chez Crim ! C'est tout ce qu'ellet'a laissé cette morue ?

Eberlué, sonné, je regardais la porte : ça, c'était fort de café ! Aline avaitchangé de marque de thé, ou bien ? Elle s'était tue. Un répit. Réfléchir. Comment parler de ça avec quelqu'unqui ne voulait rien entendre ? Je voyais bien une solution, mais sortirmaintenant faisait un peu trop provocation...

-Aline...

J'étais contre la porte, je murmurais, l'oreille plaquée sur le battant, justedevant son silence. Bon sang, Aline ! Je comprenais qu'elle soit à cran, quece n'était pas le luxe en ce moment dans notre vie, mais... On s'aime, pasvrai ? Et puis nous en avions connu d'autres ! Des trucs bien plus durs !Des déménagements en catastrophe ! Des fins de mois plus que ric-rac !Nous n'allions pas rester sur ce...

-Aline !

Ma toute belle... Tu penses bien que je n'aurais jamais pu... Commentdire ? J'allais pas lui faire un cours sur la honte, le remords, le sentiment deculpabilité ! Sur l'autre côté ! Le bien et le mal ! Le bon et le malhonnête !Qu'est-ce qu'elle croyait ? Je ne pouvais plus rester là, à attendre !Attendre ! Voir le temps passer ! Par paquet d'heures !

-Aline ! Merde !

Un petit geste, je ne demandais pas grand chose... Un truc, un signe devie !

-Aline ? Tu ne fais pas de conneries ? Hein ? On s'aime, pas vrai ? Je veuxdire... Tu sais... Le... Je... Je regrette de... Mais je ne pouvais pas te le dire,

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j'ai essayé, mais... Tu comprends ? C'était trop...

-Salaud ! Salaud !

J'aimais mieux ça... C'était une battante, mon Aline ! Une fois la première impression passée,nous pourrions discuter, mettre les choses à plat, et elle verrait bien qu'iln'y avait pas de quoi fouetter un chat... Enfin, fallait espérer ! Manqueraitplus qu'elle me quitte... Non ? Elle ne ferait jamais ça ! Non ?-Aline ! Tu ne vas pas me quitter ! Dis ? Tu ne vas pas me quitter ! Je t'ensupplie ! Aline !J'avais tout à coup la tête qui me tournait, toute la tension accumulée qui sedéversait d'un trait dans mon cerveau, je voyais noir, je m'écroulais.BONG.Quand j'émergeai, Aline était penchée au-dessus de moi, elle m'épongeaitle front avec un gant froid. Elle ne souriait pas. Je clignai des yeux. Ellearrêta aussi net son geste, se releva, s'éloigna, je tendis le bras, en vain, ilretombait dans le vide.-Aline...-Salaud ! Salaud !Je pris le gant en pleine figure. Elle avait bien visé cette fois.-Aline...Clic-Clac. La salle de bain m'était de nouveau interdite. Que pouvait-ellebien y faire ? Les circonstances ne se prêtaient pourtant pas auremaquillage... Qu'attendait-elle ? Je me levais en vertigeant : le sol étaitrond et j'avais les pieds si plats. Au secours ! Bon sang, Aline ! Respirer.Respirer fort.-Aline !Pas de réponse. Lui dire ? Elle ne me croirait pas. Il n'y avait plus qu'unmoyen... Prendrais-je le risque ? Je marchais jusqu'à la porte d'entrée...J'avais retrouvé mon équilibre. C'était risqué mais au point où j'en étais...Je sortais.***

Cela n'aurait pas pu continuer plus mal.

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Quand je suis revenu, j'ai trouvé la porte de l'immeuble fermée et uninterphone muet. J'ai sonné pourtant ! Plus que de raison. Mais Aline n'estpas raisonnable quand elle pleure. Pas davantage quand elle ne pleure pasd'ailleurs. En fait, sa raisonnabilité s'en tient à son pouvoir d'achat... Voilàpourquoi elle ne s'était jamais acheté de bas de chez Crim et pourquoi ellem'avait fait cette scène ! Voilà ! C'était la seule raison, ce bas ! Enfin,presque la seule... Mais ce qu'elle est belle mon Aline ! Même quand ellecolère... Ca non, je ne veux pas la perdre !J'ai sonné, et re-sonné, et défoncé le bouton de la sonnerie ! Rien ! Pas ungrésillement, pas un mot. J'ai reculé dans la rue et j'ai gueulé aux fenêtres :« Aline ! C'est moi ! Ouvre ! Aline !Et elles m'ont regardé, coincées dans leur façade façadante. Je me suissenti bête au milieu de ma rue, abandonné.Je me suis assis sur le trottoir, les semelles dans le caniveau, plein depensées incompréhensiblement fugitives...« Aline...Bien sûr, elle avait raison, ses griefs, sa colère, ses pleurs, mes fautes, monabattement, mon désengagement, son corps, mes mains, mes retards...Aline, te souviens-tu de notre rencontre ? Dans ce bar d'A. un soir depluie ? De tes cheveux mouillés et de la cigarette que tu ne parvenais pas àallumer ? J'ai si peur maintenant... Dieu du ciel, pourquoi le temps n'est-ilpas réversible ? Pourquoi l'argent ? J'aimerais tant...

Une fenêtre. Une fenêtre venait de s'ouvrir. Je me suis retourné, levant lesyeux vers la façadante : la fenêtre de notre appartement était ouverte !Victoire ! « Aline !

-Salaud ! Salaud !

Une valise a basculé dans la rue, puis un pull en laine, un pantalon, undeuxième, un troisième, un short, des chaussettes de toutes les couleurs,deux livres, une brosse à dent, une couverture rouge et...

« Aline ! Arrête ! Tu es folle ! Aline !

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J'allais à droite, à gauche, à droite, à gauche, récupérant ce que je pouvais,enfournant le tout dans la valise, première atterrie...

« Aline !

Mon livre de photos ! Ma paire de basket ! Ma cravate ! Ma seule cravate !Celle de notre mariage ! Le... Nom de Dieu !

CHUTTT ! BOUM ! DZOING ! PATATRA ! PSHIIIIT ! FUMMM !

« Le téléviseur !

Je m'étais écarté à temps.

La fenêtre s'est refermée sur un dernier « Salaud ! Salaud ! » et je suis restélà, terminant le rassemblement des objets si généreusement expédiés...Mon sac de sport bleu ! Où est-il ? Bon sang ! Non... Ouf ! Il est là... Touty était.

Je regardais le machin cathodique pulvérisé sur le trottoir... Tout ces soirspassés...

« Aline...

On s'aime pourtant.

***

Cela n'aurait pas pu se terminer plus mal.

Après avoir soudoyé le concierge, je suis monté. Il voulait me coller autrain, mais son poids l'a retardé. Les divorces, ça le connaissait, qu'il m'adit ! Pour sûr qu'il en avait vu dans son immeuble ! Même qu'une fois ilavait trouvé un joli petit brin de bonne femme, nue, dans sa loge...

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Elle voulait se venger de son mari, qu'elle lui avait dit, avec le premiervenu... Ca avait le mérite d'être franc et direct, mais il n'en avait pasprofité... C'est qu'il avait une morale notre concierge, nom de Dieu !Je suis donc arrivé devant la porte. Evidemment, elle l'avait fermée etlaissé la clé dans la serrure. J'ai frappé.« Aline ! Ouvre ! Il faut que je te parle !Pas plus de réponse en haut qu'en bas. Et le gros qui allait débarquer...« Aline ! Regarde !Je glissais le billet de 500 sous la porte.« Regarde sous la porte !Le billet ne bougeait pas.« Aline ! Merde ! Reg...Le billet avait disparu d'un coup. Je pensais qu'elle allait m'ouvrir et medemander des comptes, je l'ai entendu hurler :« Tu t'es fait payer en plus ! Tu t'es fait payer ! Salaud ! Salaud !-Aline ! Ce n'est pas ça !-Salaud ! Salaud !-Aline ! Tu m'écoutes, oui ! J'ai braqué une banque...Je parlais bas. Je n'étais pas sûr d'avoir été entendu. J'allais me répéterlorsque la porte s'est entrouverte. Aline me regardait.« Tu as quoi ?-Laisse-moi entrer...-Tu as fait quoi ?-J'ai braqué une banque...-T'es complètement fou !-Y en a pour plus de 200 000 francs !-Fou ! T'es devenu complètement fou !Profitant de son étonnement, je poussai la porte et entrai. Je refermaiderrière moi, non sans avoir jeté un oeil dans le couloir.-Mais alors, l'autre bas...-Quoi, l'autre bas ?-Tu l'as ! Hector ! T'as une paire de bas de chez Crim ! Ô mon Amour !Elle se ruait sur moi et m'embrassait sauvagement.TOC-TOC.Je m'arrachai tant bien que mal à notre baiser et quémandai doucement :

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« Qui c'est ?-C'est le concierge. J'ai tout entendu. Je veux la moitié du magot.Tu parles, qu'il avait une morale celui-là, nom de Dieu !« Tue-le.-Quoi ? : je sursautais, le poil entièrement hérissé.-Fais-le entrer et tue-le !-T'es complètement folle !-On va tout de même pas partager avec ce gros porc !-Mais Aline...Elle m'a bousculé et a ouvert la porte, un sourire carnassier sur les lèvres.Aline, est-ce bien toi ? Ce n'est pas possible, je rêve...Le concierge est entré, tout sourire, lui aussi.« Venez, l'argent est dans la chambre » qu'elle lui a susurré à l'oreille. Lesyeux du gros se sont mis à briller. Il l'a suivie. Elle tortillait des hanches,l'observant en coin, de dessous ses longs cils noirs...Ce n'était pas un rêve, mais un cauchemar...Elle a refermé la porte sur eux.***

Cela n'aurait pas pu mieux se passer.Quand il est entré, j'avais encore le bas à la main, sacrée qualitéd'ailleurs. Le bas, je veux dire... Ses yeux sont allés droit dessus, il nevoulait pas y croire, il n'osait plus bouger. Le cadavre était pourtant bienlà, à mes pieds. Ce gros porc, proprement étranglé. L'en était devenu toutviolet... Je me suis tournée vers Hector et je lui ai dit :« J'ai fait d'un bas deux coups !Il n'a pas ri. Faut dire, l'humour, ce n'est pas son fort à mon Hector ! Lechômage, tout ça... J'avais bien vu qu'il était à cran depuis quelques jours,mais j'ai bon espoir, nous nous sommes tirés de situation plus critique quecelle-la ! Du genre les déménagements en catastrophe...Et puis on s'aime, pas vrai ?

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