MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

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1 MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST SOMMAIRE DE L’HISTORIQUE Première partie : Historique proprement dite Page Origine de la Gendarmerie maritime à BREST 3 Des Prévôtés à la Gendarmerie Impériale Maritime : 3 Les Décrets du 15-VII-1858 et 20-X-1866. Les casernes de gendarmerie maritime : Fautras, Moulin à Poudre, La Pointe, Saint Nicolas. La fin du XIXème siècle et le début du XXème : 8 Le sous-aide major. Le service des gendarmes maritimes de la compagnie de Brest. La recherche des déserteurs et absents illégaux de la Marine de commerce. Les déserteurs et absents illégaux de la Marine de guerre. Le service à l’arsenal. Les surveillants militaires. La grande guerre : 12 Création de la Légion de Gendarmerie Maritime. L’armistice. De 1919 à la guerre mondiale : 14 Les gardiens de prisons. La première fusion de 1926. Réaction de la Marine à la fusion des Gendarmeries. La section maritime de Brest pendant la première fusion. Organisation. Service. Les grèves de 1935. Retour à l’autonomie. Le conflit mondial et la libération : 21 De la déclaration de guerre à l’armistice de juin 1940. Le service à l’arsenal pendant l’occupation. La réforme de 1941. La libération. Le service après la libération. La fin de la guerre. L’après-guerre : 26 Évolution de la Légion de Gendarmerie Maritime. La compagnie de Brest de 1945 à la fusion. Annexe I : Officiers ayant exercé un commandement ou des fonctions à la compagnie de BREST (section Maritime pendant les fusions). Annexe II : Sources de l’historique.

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MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

SOMMAIRE DE L’HISTORIQUE

Première partie : Historique proprement dite Page

Origine de la Gendarmerie maritime à BREST 3

Des Prévôtés à la Gendarmerie Impériale Maritime : 3

Les Décrets du 15-VII-1858 et 20-X-1866. Les casernes de gendarmerie maritime : Fautras, Moulin à

Poudre, La Pointe, Saint Nicolas.

La fin du XIXème siècle et le début du XXème : 8

Le sous-aide major. Le service des gendarmes maritimes de la compagnie de Brest. La recherche des

déserteurs et absents illégaux de la Marine de commerce. Les déserteurs et absents illégaux de la Marine

de guerre. Le service à l’arsenal. Les surveillants militaires.

La grande guerre : 12

Création de la Légion de Gendarmerie Maritime. L’armistice.

De 1919 à la guerre mondiale : 14

Les gardiens de prisons. La première fusion de 1926. Réaction de la Marine à la fusion des

Gendarmeries. La section maritime de Brest pendant la première fusion. Organisation. Service. Les grèves

de 1935. Retour à l’autonomie.

Le conflit mondial et la libération : 21

De la déclaration de guerre à l’armistice de juin 1940. Le service à l’arsenal pendant l’occupation. La

réforme de 1941. La libération. Le service après la libération. La fin de la guerre.

L’après-guerre : 26

Évolution de la Légion de Gendarmerie Maritime. La compagnie de Brest de 1945 à la fusion.

Annexe I :

Officiers ayant exercé un commandement ou des fonctions à la compagnie de BREST (section Maritime

pendant les fusions).

Annexe II :

Sources de l’historique.

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AVANT – PROPOS

Ce document a été réalisé et conté par le Capitaine P. NERRIÈRE en 1951

L’historique de la Gendarmerie Maritime à BREST est difficile à rétablir, en raison des destructions

massives subies par cette ville. Les archives de l’unité ont été entièrement détruites : elles portaient non

seulement sur le Port, mais aussi sur tous les Quartiers d’Inscription Maritime ; la bibliothèque de la

Marine a été également éprouvée. Une partie de ses collections a disparu, les fichiers indispensables à

toute recherche sérieuse ont été dispersés et leur reconstitution ne fait que commencer.

Quelques indications sur des périodes reculées ont été recueillies, au hasard des recherches. Pour

une époque plus récente, les archives des Travaux Maritimes ont livré des procès-verbaux de

commissions immobilières relatifs aux casernes. Enfin, pour le XXe siècle, il a été fait appel à la mémoire

de vieux retraités de la Gendarmerie Maritime comme les adjudants JAMBON (75 ans) et LANNON (65

ans), anciens commandants des brigades de BREST qui ont apporté leur concours avec une bonne

volonté émue.

L’historique des surveillants militaires, corps de création relativement plus récente, est un peu

mieux connu ; quelques archives les concernant ont pu être retrouvées. Mais, là encore, il a fallu faire

appel à la bonne volonté des retraités, et en particulier du Maitre Principal KERSIVIEN, leur dernier chef,

pour essayer de rétablir la continuité des faits.

Ces renseignements n’ont pas toujours pu être recoupés ou même passés au crible de la critique ;

des erreurs peuvent donc subsister dans le présent travail qui mérite d’être repris d’ici quelques années,

alors que les richesses de la bibliothèque de la Marine à BREST, entre autres, auront pu être

systématiquement exploitées.

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ORIGINES DE LA GENDARMERIE MARITIME A BREST

La gendarmerie maritime sous des noms divers, existe certainement depuis des temps reculés. Sa

création doit suivre de peu celle de la Marine Royale organisée car son besoin s’est fait sentir, sans doute,

dès que des ports de guerre, des arsenaux et leurs annexes, les bagnes, ont commencé à être établis et que

de grandes masses d’hommes se sont trouvées rassemblées dans les ports pour l’armement des vaisseaux

ou des galères. Cette présomption se base sur l’insistance avec laquelle, dans tous les actes légaux et

règlementaires antérieurs au XXe siècle, on insiste sur la mission essentielle des gendarmes maritimes : la

recherche des déserteurs, des insoumis, des forçats évadés. Ce souci constant à travers plusieurs siècles

répond sans doute à la facilité avec laquelle les marins, souvent levés de force, reprenaient le chemin du

pays natal, à l’occasion d’une escale ou d’un « coup de cafard ». Les mœurs créent les institutions et il n’est

pas douteux que sous un vocable ou un autre, des forces de police maritime ont existé dans les ports

principaux du royaume : DUNKERQUE, LE HAVRE, ROCHEFORT, MARSEILLE, plus tard BREST, LORIENT,

CHERBOURG et TOULON. Elles ont probablement connu une nouvelle extension après l’institution, par

COLBERT, en 1681, de l’inscription maritime. Les populations maritimes ne montraient pas toujours, en

effet, un enthousiasme exagéré à servir sur les vaisseaux du Roi et il devait être souvent nécessaire de

rechercher et de poursuivre dans les villages de pêcheurs, les déserteurs et les insoumis proprement dits

sans compter les nombreux marins des navires marchands qui avaient oublié au cabaret l’heure de

l’appareillage de leur navire.

Quoiqu’il en soit, les premières indications formelles concernant un corps spécial de police maritime,

ancêtre de l’actuelle Gendarmerie Maritime, remontent à l’Édit Royal d’avril 1704 (enregistré au parlement

le 7 mai) qui « crée et érige une juridiction sous le nom de Prévosté de la Marine dans chacune des villes

de BREST, ROCHEFORT, TOULON, MARSEILLE, DUNKERQUE, LE HAVRE, PORT-LOUIS et BAYONNE, avec

des officiers qui la doivent composer ».

Le préambule de ce texte fait explicitement état de charges antérieures de « Prévost, Lieutenant,

Exempt, Procureur pour Nous, Greffiers et Archers exempts dans nos ports et villes maritimes ». L’Édit

fixe les nouveaux effectifs du Corps : 8 Prévosts « de Marine et des galères », 8 Lieutenants, 8 Exempts, 8

Procureurs du Roi, 8 Greffiers et 100 Archers. Ils ont avant tout des fonctions de police militaire maritime et

sont assermentés devant les Intendants de la Marine.

A la suite de cet Édit, des ordres du Roi, encore conservés à la bibliothèque du Port, nomment des

Archers de la Marine à BREST pour servir sous les ordres du Sieur SALLE, Prévost de la Marine, qui se trouve

être ainsi le premier cité des chefs d’une police maritime locale (Ordre du Roi en date du 3 novembre

1704).

DES PRÉVOTÉS A LA GENDARMERIE IMPÉRIALE MARITIME

L’organisation des Prévôtés de la Marine est emportée dans la tourmente révolutionnaire. Le 12

octobre 1791, elles sont incorporées dans la Gendarmerie Nationale et ne gardent aucune structure

organique propre, si ce n’est que le « Commandant des brigades » affectées à la police du Port et de

l’arsenal et du grade Lieutenant au moins. Dix ans plus tard, le 12 thermidor an IX, elles revoient le jour

sous le nom de compagnie des Ports et Arsenaux. Chacune d’elles est placée directement, comme de nos

jours, sous les ordres d’un Commandant de Légion.

De même qu’aujourd’hui, cet officier supérieur n’intervient que pour la question d’administration, de

discipline et d’organisation générale. Pour tout ce qui concerne le service, la compagnie est à la disposition

du Préfet Maritime.

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A travers ces réformes, l’existence à BREST d’une police militaire, étroitement spécialisée dans le

domaine maritime est attestée par exemple par le « règlement concernant le service de la gendarmerie

maritime affecté au Port de BREST » qui porte, à la date du 1er Primaire an VII, la signature du citoyen

NAJAC, Ordonnateur de la Marine de ce Port. On y voit déjà poindre le service par tiers qui a prévalu de nos

jours et une utilisation des effectifs dont le principe n’a pas varié : garde aux issues, poste chez

l’Ordonnateur (prédécesseur du Préfet Maritime), à la Cour Martiale, rondes en ville et à l’intérieur de

l’Arsenal, police militaire et, service disparu aujourd’hui, surveillance des forçats envoyés en corvée en ville.

Les gendarmes affectés à l’arrondissement maritime sont groupés en une compagnie de 54 hommes

à la tête de laquelle se trouve un chef d’escadron assisté d’un lieutenant. Sa circonscription s’étend sur tout

l’arrondissement maritime de BREST, c’est-à-dire de GRANVILLE à CONCARNEAU. Les règlements sont les

mêmes que ceux de la Gendarmerie Nationale (puis Impériale) dont elle fait partie intégrante. Elle

appartient à la 4ème Légion jusqu’en 1815, à la 5ème Légion ensuite. Elle dépend directement du Préfet

Maritime du 2ème arrondissement, à qui, en tout temps, elle fournit une garde d’honneur.

L’Ordonnance du 29 octobre 1820 portant règlement sur le service de la Gendarmerie consacre une

vingtaine d’articles aux « compagnies de Gendarmerie près des Ports et Arsenaux ». Les grandes lignes de

l’organisation antérieure subsistent : service exclusivement consacré à la police maritime, étroite

subordination aux Intendants, Commissaires Principaux, Officiers de Marine, rattachement aux Légions,

uniquement pour les questions de discipline, de tenue et d’administration.

Malgré ce nom officiel de « Compagnie du Port et de l’Arsenal de BREST », l’usage général maintient

l’appellation de Gendarmerie Maritime comme en fait foi une délibération du Conseil Général du Finistère

en 1829. L’originalité de cette force de police n’échappe à personne et déjà les difficultés nées d’un trop

étroit apparentement à la Gendarmerie Nationale surgissent souvent. Au cours de la délibération à laquelle

il vient d’être fait allusion, le Conseil Général du Finistère, qui semble d’ailleurs peu au courant des besoins

réels de la Marine, souhaite la disparition de la Gendarmerie Maritime (sic) parce que son casernement

« est une charge très forte pour le département ».

Il est probable que le Finistère ne devrait pas être le seul département à se plaindre d’avoir à

supporter les frais d’une Gendarmerie qui, par vocation, était au service exclusif de la Marine. Toujours est-

il que par une ordonnance du 18 juin 1832, le Roi LOUIS-PHILIPPE fait passer, à compter du 1er janvier 1833,

les compagnies des Ports et Arsenaux dans les attributions exclusives du Ministère de la Marine et sous

l’autorité immédiate des Préfets Maritimes.

Cette même ordonnance nous renseigne sur les effectifs de la 2ème compagnie, celle de BREST. Elle

est commandée par un capitaine, assisté d’un Lieutenant trésorier et d’un Lieutenant Commandant

d’arrondissement qui a sous ses ordres trois maréchaux des Logis, huit brigadiers et quarante-quatre

gendarmes. Par son importance, elle se place sur le même pied que celle de TOULON, toutes deux un peu

inférieures à la compagnie de LORIENT.

Les Décrets du 15 juillets 1858 et 20 octobre 1866

L’Ordonnance de 1832 constituait un texte de principe. Dans sa brièveté, elle laissait de côté toute

l’organisation interne et ne posait aucune autre base légale à l’activité spéciale de la Gendarmerie des Ports

et Arsenaux, que les règlements généraux de la Gendarmerie Nationale. La coutume devait bien apporter

certains correctifs à ce qu’avait de trop rigide une telle disposition, mais la nécessité d’un règlement

particulier ne s’en faisait pas moins sentir. Le Décret Impérial du 15 juillet 1858 y pourvut. C’est de cette

décision que l’on peut dater avec exactitude la naissance de la Gendarmerie Maritime.

« Elle est spécialement affectée à la police judiciaire des Ports et Arsenaux, à l’exécution des

services relatifs à l’Inscription Maritime, à la police de la navigation, à la police des pêches, ainsi qu’à

toutes les opérations qui s’y rattachent, soit à l’intérieur des Ports, soit à l’extérieur ». …/…

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C’est sous le régime du Décret Impérial que la Gendarmerie Maritime vécut jusqu’en 1926, car le

Décret du 22 décembre 1917 ne faisait guère que le mettre à jour, sans autre grande modification que la

création d’une Légion. La fusion de 1926, avec toutes ses conséquences nuisibles pour le service ne fut

possible parce que l’on avait perdu de vue que le Décret de 1858 était lui-même l’aboutissement d’une

longue évolution et le fruit de réflexions mûries par l’expérience de deux siècles.

Les effectifs de la compagnie de BREST, tels qu’ils sont fixés par le Décret Impérial, montrent bien le

souci d’harmonie entre les différentes activités de la Gendarmerie Maritime qui animaient alors le

législateur.

Son commandant est un chef d’escadron qui a sous ses ordres, d’une part un Lieutenant trésorier et

son adjoint, d’autre part un Lieutenant, commandant la Lieutenance. Quarante et un gradés et gendarmes

assurent la police de l’Arsenal et des établissements de la Marine à BREST. Vingt-quatre autres sont répartis

tout au long du littoral ; non seulement dans les Quartiers, mais même dans les Sous-Quartiers de

l’inscription Maritime, depuis REGNEVILLE (près de COUTANCE) jusqu’à CONCARNEAU. Nous sommes loin

des six gendarmes qui y sont affectés de nos jours, alors que la vie moderne a compliqué toutes les tâches,

à commencer par celles de la Gendarmerie et de l’Inscription Maritime.

Le 20 août 1866 paraît un nouveau Décret qui ne modifie en rien les principes d’organisation et de

service posés par le texte de 1858, mais qui augmente sensiblement les effectifs de la Gendarmerie

Maritime. Il devenait nécessaire, en effet, de remplacer, pour la garde des Arsenaux, les troupes de la

Marine de plus en plus absorbées par la conquête et l’occupation des nouvelles colonies. A BREST, l’effectif

passe à quatre-vingt-huit gradés et gendarmes. Le nombre des gendarmes mis à la disposition de

l’Inscription Maritime reste fixé à vingt-quatre.

On est stupéfait de constater que dès cette époque, l’effectif est en tous points comparable à celui

prévu quatre-vingts ans plus tard avant la fusion du Corps des surveillants militaires et de la Gendarmerie

Maritime, alors que l’Arsenal a presque doublé d’importance et que s’est créé l’établissement de la

Pyrotechnie (88 en 1866 – 95 en 1946). Même aujourd’hui, l’effectif n’est pas sensiblement supérieur, si

l’on tient compte du fait que la Gendarmerie Maritime assure les fonctions autrefois dévolues aux

surveillants militaires.

Les casernes de Gendarmerie Maritime :

La Gendarmerie Maritime est étroitement associée au développement du Port. Elle a bénéficié des

agrandissements et des améliorations qu’y ont apportés la 2è République et le Second Empire. C’est

l’époque à laquelle furent construites ou achetées les cinq casernes dans lesquelles ses effectifs furent

cantonnés jusqu’au siège de BREST en 1944.

FAUTRAS :

La principale de ces casernes, Fautras, était située sur un terrain appartenant de date immémoriale à

la Marine. Elle s’inscrivait dans le triangle formé par les rues Richer, Basse-Richer et Fautras, à peu de

distance du Bagne et de la porte de la Corderie. Elle fut construite en 1848-1849, dans le goût de l’époque,

caractérisé par l’absence totale de confort. Elle comportait un rez-de-chaussée et trois étages. Elle abritait

les appartements des deux officiers, les bureaux de la compagnie et des brigades et 51 logements

comprenant 93 pièces. La plupart des appartements étaient composés de deux pièces mais, au 3ème étage,

15 n’avaient qu’une seule pièce. Bien entendu, ces logements ne possédaient ni eau, ni tout à l’égout et les

lieux d’aisance étaient situés dans la cour.

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Deux annexes avaient été constituées par l’achat en 1921 et ultérieurement de deux petites maisons

particulières, mitoyennes avec le terrain de la caserne principale et qui ouvraient sur la rue Richer.

L’ensemble de ces bâtiments fut incendié pendant le siège de BREST et subit de tels dommages qu’il ne

peut être question de le réparer.

MOULINS A POUDRE – CARPON – GOYEN :

Les constructeurs de la caserne Fautras avaient en vue la concentration en un seul établissement

d’une force importante de Gendarmerie Maritime groupée sous les ordres de ses chefs directs. En somme,

de la définition « Force Militaire chargée de veiller à l’application des Lois et règlements » ils avaient

surtout retenu le premier terme « Force Militaire ».

C’est une conception opposée qui a présidé la construction des trois petites casernes du Carpon, du

Goyen et du Moulin à Poudre dont les deux premières seules existent encore. Visiblement, on s’est inspiré

du service de la Gendarmerie Départementale et on a voulu rapprocher les brigades des lieux où elles

avaient à exercer leur activité.

Il s’agit là de petits bâtiments à trois étages, comportant douze pièces, dont une sert de bureau. Le

commandant de brigade dispose de trois pièces et les gendarmes de deux, quelles que puissent, d’ailleurs,

être leur charge de famille.

Ce sont des maisons d’aspect sévère, sans aucune élégance et qui, tout comme la caserne principale,

n’ont commencé à connaître quelques commodités qu’après la grande guerre.

La caserne du Moulin à Poudre, aujourd’hui disparue, était probablement la plus ancienne des trois.

Elle fut construite en 1851, à proximité immédiate de la porte de la Brasserie qui, dès cette époque, était

une des plus importante de l’Arsenal.

La date de construction de la caserne du Carpon se situe aux environs de l’année 1867. Son

emplacement a sans doute été choisi pour permettre une surveillance aisée de l’important centre industriel

du plateau des Capucins et de la porte du Carpon qui débouche dans ce quartier de RECOUVRANCE qui fut

pendant des siècles la partie la plus populeuse de la ville de BREST.

La caserne du Goyen a été construite en 1866, à proximité de l’île Factice, annexe de l’Arsenal, et

face aux importants parcs à bois immergé qui s’étendent entre cette île et le bourg de PENFELD. Elle

permet encore une surveillance facile de tout le fond de l’Arsenal dans une région qui, jusqu’à la dernière

guerre, n’était guère fréquentée et où les maraudeurs risquaient peu.

LA POINTE :

A partir de 1865, une sérieuse augmentation des effectifs de la compagnie fut envisagée, qui reçut sa

consécration par le Décret de 1866 dont il a été question plus haut. Par ailleurs, à cette même époque, on

commença à étudier l’extension de l’Arsenal dans la région de LANINON. C’est sous cette double influence

que fut conçue la caserne de la Pointe qui abritait dix-neuf logements, la plupart de 2 pièces. Sa date de

construction se situe aux environs de 1865. Ce bâtiment aujourd’hui disparu s’élevait à l’extrémité

méridionale de la rue de la Pointe, à RECOUVRANCE, sur le terrain que la Marine avait acquis en 1861 pour

y construire primitivement des silos à grains. Il ne le cédait en rien pour l’inconfort aux autres casernes de

Gendarmerie Maritime. Il s’offrait au moins l’avantage de concentrer un effectif important à proximité

d’une des principales portes de l’Arsenal, Jean Bart, et du groupe de constructions qui abritait les magasins,

boulangerie et chais de l’Intendance Maritime.

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SAINT NICOLAS :

La caserne où sont logés les gendarmes maritimes affectés à la garde de la Pyrotechnie fut construite

en 1890 environ pour servir de cantonnement aux détachements du 2ème Régiment d’Infanterie Coloniale et

du 19ème Régiment d’Infanterie Métropolitaine qui fournissaient des sentinelles à l’établissement. Ce n’est

qu’en 1924, que cette caserne fut aménagée pour recevoir des familles.

Partiellement ruinée en 1944 elle vient d’être remise entièrement en état (1951). Elle comprend huit

logements de trois et quatre pièces et elle est complétée par une annexe de deux logements, autrefois

affectés à des surveillants militaires et par un petit bâtiment de deux pièces qui sert de bureau et

d’aubette.

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LA FIN DU XIXème SIÈCLE

Et le

DÉBUT DU XXème SIÈCLE

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Le Sous-Aide Major :

L’organisation instituée par le Décret Impérial du 15 juillet 1858 ne subit qu’une seule modification

importante au cours de cette période, celle qui transforme les Lieutenants ou Capitaines Commandants

d’arrondissement en Sous-Aides Majors de la Marine dans les Ports chefs-lieux (Décret du 17 juillet 1908).

A BREST, ce poste avait été créé dès 1903 et son premier titulaire fut le capitaine LACASSAGNE.

A bien des égards, c’était une sérieuse amélioration et l’on peut déplorer que l’esprit de cette

réforme se soit perdu. Le sous-aide major succédait au commissaire de police qui, jusque-là, était le chef de

la police judiciaire de l’Arsenal et qui, à ce titre, procédait à toutes les enquêtes nécessaires à l’intérieur de

l’établissement militaire, ne laissant aux gendarmes maritimes que la constatation par rapports ou procès-

verbaux des infractions les plus bénignes. L’officier de gendarmerie maritime qui lui succédait héritait de

ses pouvoirs et, même de nos jours, a gardé quelque chose du rôle de Ministère Public auprès de cette

juridiction, sinon judiciaire, du moins disciplinaire, que constitue à lui seul le Major Général pour toutes les

infractions à la police des Arsenaux. La Loi a du reste souligné l’importance du rôle du Sous-Aide Major

lorsqu’elle l’a désigné comme l’officier de police judiciaire maritime par excellence et par préférence à tout

autre à l’intérieur de l’Arsenal.

Si cet aspect de son activité est resté jusqu’à nos jours inchangé dans ses grandes lignes, il n’en est

point de même de sa désignation et de sa subordination. Sous le régime du Décret du 15 juillet 1858 et de

la modification qu’y apportait le Décret du 17 juillet 1908, l’organisation de la compagnie était rationnelle :

un Chef d’Escadron la commandait et se trouvait aux ordres du Préfet Maritime, comme l’ensemble de son

personnel. Il était assisté, d’une part d’un Lieutenant trésorier uniquement chargé de questions

administratives, d’autre part d’un Capitaine ou lieutenant, Sous-Aide Major de l’Arsenal qui se trouvait, lui,

pour emploi, sous les ordres du Major Général, ne s’occupait que de la police à l’intérieur de l’Arsenal et

n’avait sous sa coupe directe que les gendarmes mis à sa disposition par le commandant de compagnie. Ces

principes simples ont été perdus de vue et ont abouti depuis à une organisation hybride dans laquelle le

commandant de compagnie a le titre de Sous-Aide Major et se trouve donc sous les ordres directs de deux

autorités différentes, le Major Général pour tout ce qui intéresse la police de l’Arsenal, le Préfet Maritime

pour les activités extérieures à l’établissement militaire.

La création du poste de Sous-Aide Major entraina la suppression du Commandant de Lieutenance.

L’équilibre jusque-là maintenu entre les attributions de police militaire et de police maritime se trouva

rompu au bénéfice de la première. La construction harmonieuse qui consistait à subordonner à un Chef

d’Escadron, commandant la compagnie, trois officiers : un Sous-Aide Major, un trésorier et un commandant

de Lieutenance ne fut pas réalisée.

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Le service des gendarmes maritimes de la compagnie de BREST :

Que ce soit dans les Quartiers d’Inscription Maritime où la Gendarmerie fut partout présente jusqu’à

la grande guerre, dans l’Arsenal, ou, à une date plus récente (1890), à la Pyrotechnie nouvellement créée,

le service des gendarmes était déjà à cette époque à peu près ce qu’il est resté de nos jours. Il faut

toutefois faire abstraction de la surveillance et de la police du matériel qui étaient de la compétence

exclusive des Gardes Consignes dont il sera question plus loin.

La recherche des déserteurs et absents illégaux de la Marine de commerce :

La recherche des déserteurs et absents illégaux, qu’ils fussent de la Marine de guerre ou de la Marine

marchande, absorbait une part d’activité qui paraît aujourd’hui démesurée. Malgré la précarité des moyens

de transport, les gendarmes en service à SAINT MALO n’hésitaient pas à se rendre jusqu’à RENNES pour y

rechercher les marins de commerce en rupture d’embarquement : un procès-verbal retrouvé dans les

archives de ce poste en fait foi.

Il ne faut se représenter cette chasse aux déserteurs comme une affaire tragique. Beaucoup d’entre

eux pêchaient plus par insouciance ou ignorance que par esprit de rébellion. L’opinion publique maritime

était moins sévère qu’aujourd’hui à leur égard. Le déserteur, généralement, n’éprouvait guère de remords :

depuis les Capitaines des navires marchands jusqu’aux gendarmes maritimes, tout le monde admettait que

le marin du commerce, à l’issue de voyages d’une ou plusieurs années, pût oublier, dans les voluptés que la

terre lui prodiguait, jusqu’au nom du bâtiment où il devait embarquer. Les gendarmes maritimes en

parcourant les auberges à matelots, ne songeaient pas tant à brandir les foudres de la Loi qu’à toucher une

bonne prime (3 francs si le bateau était à quai, 6 francs s’il fallait aller en rade), sur le compte du même

marin qu’ils ramenaient paternellement à son poste.

Roger VERCEL le célèbre écrivain de la mer, nous à, dans quelques pages de son livre récent « Ceux

de la Galatée » fait revivre les incidents parfois comiques, jamais bien tragiques qui accompagnaient cette

chasse au marin qui débutait quelques heures avant l’appareillage. Pas de haine, pas même d’inutile

inimitié entre le « Jean Gouin » et le « Brasse-Carré » ou « Grippe Jésus ». Chacun connaît son rôle : le

gendarme, bonhomme, soutient les pas chancelants de sa prise. Au besoin, il l’affale dans une brouette,

qu’il vient décharger à bord. Écoutons les propos que VERCEL place dans la bouche du brigadier qui, du

bateau qui a demandé son assistance, dirige les opérations de ses gendarmes :

« C’était une partie de cache-cache qui se jouait ce jour-là entre les brasse-carré et les matelots ».

« C’est à toi de me trouver, je te paie pour cela » et ils se cachaient bien les bougres ! ». Mais comme ils

ne pouvaient se défiler que chez les hôtesses et les bistrots, cela simplifiait la besogne ».

Et ce qui montre bien à quel point la haine, si atténuée soit-elle, n’avait nulle place dans cette affaire,

c’est que « chaque matelot déniché par les gendarmes ne manquait jamais d’offrir à boire à ses

poursuivants ».

Il subsiste encore quelque chose de ces mœurs paternalistes dans les rapports qu’entretiennent de

nos jours les pêcheurs et le gendarme maritime des petits ports. Pour les marins pêcheurs, il reste « leur »

gendarme, celui avec lequel on peut parler, qui connait les soucis du métier et sait fermer opportunément

les yeux sur ce qui, pour tout marin, est une peccadille, mais qui vous « coince » bien à propos, ne serait-ce

que par un sérieux avertissement, lorsqu’on plaisance avec les règlements importants. Ainsi, même dans

les ports réputés pour l’esprit frondeur ou belliqueux de leur population, les rapports entre pêcheurs et

gendarmes maritimes restent empreints d’une mutuelle estime et d’une certaine sympathie parce que les

uns comme les autres se sentent inséparables, ont la conviction d’appartenir à la même grande famille.

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Les déserteurs ou absents illégaux de la Marine de Guerre

A BREST aussi, les déserteurs de la Marine Nationale devaient abonder si on en juge par une curieuse

anecdote du livre fameux « La FRÉGATE L’INCOMPRISE » écrit vers 1880 qui est resté le livre de prédilection

des midships. Un brigadier et un gendarme maritime qui venaient d’arrêter deux « Mathurins trop

amoureux de la terre ferme » entreprirent de ramener leur prise en embarcation, en lui faisant jouer le rôle

de chiourme. L’un des deux marins, tout en manœuvrant l’aviron avec vigueur réussit à déboucher le nable,

ouverture qui sert à vider l’embarcation lorsqu’elle est au sec. Naturellement, dans la circonstance, c’est le

contraire qui se produisit et les deux gendarmes qui croyaient au naufrage furent trop heureux de pouvoir

se hisser malgré tous leurs impédimentas sur un coffre d’amarrage. Ils ne s’y étaient pas plus tôt réfugié

que leurs deux lascars poussèrent au large, remirent la bonde en place, écopèrent l’eau et s’en furent.

On ne dit pas ce que devinrent les gendarmes. Cette anecdote illustre montre les inconvénients du

recrutement des gendarmes maritimes de l’époque qui, trop souvent, provenaient de Corps militaires

ignorants de la mer, de ses us et de ses coutumes. Elle nous renseigne aussi sur l’uniforme de ce temps :

chapeau, bottes et sabre. L’illustration du livre nous les montre encore ornés d’aiguillettes, d’épaulettes et

porteurs de moustaches et de la mouche. Cette tenue devait subsister jusqu’aux environs de 1902 pour

céder la place à un uniforme avec képi, de la même coupe et aux mêmes couleurs que celui de la

Gendarmerie Départementale et sur lesquels les grenades furent, en 1908, remplacées par des ancres de

marine.

Le service à l’Arsenal

A BREST, la Gendarmerie Maritime surveillait alors la porte de la Préfecture Maritime et onze issues

de l’Arsenal :

- Parc au Duc : porte aujourd’hui fermée : 1 gendarme

- Grille du Boulevard : aujourd’hui pont Gueydon rive gauche : 1 gendarme

- Porte Tourville : à cette époque-là plus importante de toutes : 1 MD Chef et 4 gendarmes qui assuraient en

outre un service de ronde entre l’avant-port et la tour noire (à hauteur de l’actuel pont de l’Harteloire).

- Porte de la Corderie : gardée jour et nuit : 1 gendarme.

- Porte de la Brasserie : 2 gendarmes qui surveillaient par des rondes fréquentes le fond de l’Arsenal, de la

tour noire à l’Arrière-Garde.

- Les deux issues fortifiées de L’Arrière-Garde et de Quéliverzan occupées par un brigadier et 3 gendarmes

qui ne pouvaient communiquer entre eux que par un youyou qui mit souvent à l’épreuve leurs qualités

nautiques (les deux issues actuelles connues sous les mêmes noms sont situées à 200 mètres en amont).

- Porte du Carpon : Fermée la nuit et gardée dans la journée par un gendarme.

- Porte rouge : soumise au même régime que la précédente.

- Grille de l’Arsenal : aujourd’hui Pont Gueydon rive droite : 1 gendarme

- Jean Bart : La porte la plus importante de la rive droite, confiée à un brigadier et 3 gendarmes qui

assuraient de plus un service de rondes entre la Pointe et Quéliverzan.

Il convient de noter que les gendarmes n’étaient nulle part seuls aux issues, contrairement à ce qui se

passe de nos jours. Les Gardes Consignes, chargé de la police du matériel les aidaient et leur prêtaient au

besoin main-forte, à charge de revanche d’ailleurs.

…/…

Page 11: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

11

Les Surveillants Militaires

La superposition de la même issue de représentants de deux corps militaires bien distincts, tant par

leur tenue que par leurs traditions, leurs missions et leurs chefs paraît à première vue bizarre et l’on

s’étonne qu’il ait fallu attendre 1946 pour que toute la police de l’Arsenal, qu’il s’agisse de celle du

personnel ou de celle du matériel, soit confiée à une seule et unique formation : la Gendarmerie Maritime.

Là encore l’étude du passé permet d’y voir plus clair et de mieux comprendre ce qui, pour un esprit

non averti, peut paraître anormal.

A l’origine du Corps des Surveillants Militaires, on trouve des salariés du Port, c’est-à-dire des

ouvriers de l’Arsenal, ayant des fonctions de gardiennage. Ils existaient certainement avant 1818 mais les

archives de la Marine à Brest n’ont pas permis de déterminer s’ils jouissaient antérieurement à cette date

d’un statut particulier. Une Ordonnance en date du 18 mars de cette année-là nous renseigne du moins sur

leurs emplois : on trouve parmi eux des gardiens de bureau, des gardiens « volants », des gardiens portiers,

des portiers Suisses et des portiers consignes qui ont à leur tête un gardien Major Chef et gardien Major

second. Tous sont voués à la garde du matériel appartenant à la Marine, mais, alors que les emplois de

portier suisse, affecté à l’église et de gardien portier, chargé de la conservation des meubles de l’hôtel du

Commandant de l’arrondissement (Préfecture Maritime) disparaîtront assez vite, que les fonctions de

gardien de bureau continueront à être assurées par des civils, les autres catégories subsisteront jusqu’à nos

jours en se militarisant. En 1872, en effet, un Décret du 8 mai tout en maintenant le statut civil de ce

personnel précise qu’il se recrutera désormais parmi les officiers-mariniers, les sous-officiers et les

militaires de la Gendarmerie. Au bas de l’échelle hiérarchique les gardiens ambulants qui ont succédé aux

gardiens « volants » se recrutent parmi les quartiers-maitres et caporaux.

Le 27 mars 1882, un Décret militarise purement et simplement le corps et lui donne le nom de

« Garde Consigne » qu’il conservera officiellement jusqu’en 1928 et qui survécut jusqu’en 1946 dans le

langage populaire, concurremment avec la dénomination un peu péjorative de « Gardes Grilles ».

Jusqu’en 1928, les pouvoirs des Garde Consignes s’arrêtaient à la police du matériel que la

Gendarmerie Maritime, de son côté, ignorait complètement. Mais Gardes Consignes et gendarmes

représentaient tous l’autorité militaire et se devaient mutuellement main-forte. La présence de deux

agents à chaque issue de l’Arsenal assurait en tout cas une surveillance efficace de l’établissement.

Nous verrons plus loin comment l’évolution du corps des Gardes Consignes, accélérée par une

réaction normale de la Marine à la première fusion des Gendarmeries, prépara son absorption par la

Gendarmerie Maritime.

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Page 12: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

12

L A G R A N D E G U E R R E

Bien que le gros de la Flotte Française ait opéré en Méditerranée pendant toute cette guerre, les

arsenaux du Ponant, en BREST en premier lieu, connurent une intense activité. Non qu’ils fussent voués à

des tâches purement maritimes, mais l’immense effort qu’accomplissait alors la France pour résister à la

marée germanique, la perte de la région du nord, exigeaient que toutes les installations industrielles

tournassent au maximum. A l’Arsenal de BREST, on travailla jour et nuit, sans interruption, et, pour combler

les vides causés par la mobilisation on fit appel non seulement aux femmes mais aussi à des travailleurs

Nord-africains, Indochinois et même aux prisonniers de guerre.

La tâche de la Gendarmerie Maritime s’accrut en conséquence. Pourtant en 1915, le Capitaine

REGNIER, Commandant la Compagnie, et une dizaine de gendarmes de BREST, tous volontaires, furent

envoyés dans les Flandres aux environs du front de l’Yser, tenu par les fusiliers-marins, pour y former une

prévôté sous les ordres du Chef d’Escadron REVOL ancien Commandant de la Compagnie de BREST. En

1917, le Lieutenant BROTHIER, de la Compagnie de BREST, lui aussi fut envoyé, avec une brigade, à la base

navale de SALONIQUE.

Avec de telles amputations, l’effectif de la Gendarmerie Maritime de BREST, n’eut pu faire face à

toutes les missions qui lui incombaient. Ce qui restait fut renforcé par une centaine de gendarmes

réservistes et de gendarmes auxiliaires. Ces derniers étaient des quartiers-maitres et des matelots fusiliers,

généralement de vieilles classes, qui participaient au service de la Gendarmerie, toujours en sous-ordre et

en conservant la tenue des équipages de la Flotte. Ce renfort était logé dans un bâtiment de l’ancienne

Majorité Générale, près de la Porte Tourville.

A cette formation renforcée échut non seulement, la garde, rendu plus sévère par l’état de siège, de

l’Arsenal et de la Pyrotechnie, mais aussi la surveillance d’établissements extérieurs de la Marine :

Intendance Maritime et service de la solde, Buanderie de l’anse Saupin, Polygone de la Marine, réservoirs à

mazout de la Maison Blanche. Une brigade fut détachée au port de commerce où arrivaient de grandes

quantités de matériel et aussi des troupes alliées portugaises, russes, anglaises, américaines.

Durant la première année de la Guerre, la Gendarmerie maritime assura la garde d’un camp

constitué à l’intérieur du Château et destiné à recevoir des officiers prisonniers de guerre et des internés

civils, surtout Autrichiens et Hongrois.

Aux gendarmes maritimes de BREST revient encore le contrôle des trains sanitaires qui ramenaient

du front presque quotidiennement les grands blessés, amis ou ennemis, qui devaient être soignés à

l’Hôpital Maritime. C’est eux aussi qui assurèrent la surveillance de dépôts de munitions Russes qui furent

constitués aux environs de 1916 auprès de l’usine à gaz ; des convois de prisonniers de guerre dirigés sur

les camps de la presqu’île de CROZON et à l’ile Longue. Bien entendu, il fallait en outre assurer une

sérieuse police militaire dans la ville grouillante d’uniformes de toutes nationalités.

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Page 13: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

13

Création de la Légion de Gendarmerie maritime

La guerre avait entraîné, nous l’avons vu, un très fort accroissement des effectifs de la Compagnie. Il

en avait probablement été ainsi dans tous les autres ports et, du reste, des formations entièrement

nouvelles étaient nées pendant les hostilités ou peu avant leur déclanchement : Prévôtés, Compagnie de

BIZERTE, détachement de SALONIQUE. Le besoin se faisait sentir d’unifier le service et le commandement

des compagnies qui, jusque-là, s’administraient séparément. Une Légion de Gendarmerie maritime fut

créée par Décret du 22 décembre 1917 et son premier commandant fut le Lieutenant-colonel REVOL,

ancien commandant de la Compagnie de BREST. Du fait de cette nouvelle organisation le Lieutenant

trésorier de la compagnie disparut, mais la compagnie elle-même continua à être commandée

théoriquement au moins par un Chef d’Escadron, assisté d’un Lieutenant Sous-Aide Major.

Enfin le Décret, sans poser d’autres bases nouvelles reprenait, en les adaptant aux besoins du jour les

principales dispositions du Décret de 1858.

L’Armistice

A BREST, comme partout en France, l’Armistice fut le signal d’un relâchement général des contraintes

de toutes sortes et la Gendarmerie maritime eut à faire face à des tâches d’autant plus lourdes qu’elle fut

très vite réduite à ses effectifs de temps de paix. Les vieux gendarmes se souviennent encore de cohortes

de marins et civils parcourant les rues de la ville drapeau rouge en tête et qu’il fallait disperser avec de

faibles forces.

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Page 14: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

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DE 1919 A LA GUERRE MONDIALE

Peu après l’Armistice, la Gendarmerie maritime, comme toute l’Armée d’ailleurs, connaît la

désaffection de la Nation, lasse de son grand effort militaire. On comprime les cadres, on recherche les

économies. Tout naturellement, porté à cela par la similitude des appellations, ignorant des conditions très

spéciales de son emploi et du milieu dans lequel la Gendarmerie Maritime évolue, le Législateur envisage

de l’incorporer à la Gendarmerie Nationale. Elle fait l’objet d’un rapport de la Commission des Réformes

instituée en 1922 pour : « proposer au Gouvernement les modifications de structures à apporter aux

services publics en vue d’obtenir une meilleure administration et un allègement des charges du Trésor ».

Ce rapport du 10 décembre 1923 ne fut pas immédiatement suivi d’effet, mais il est à la base du

Décret du 10 septembre 1926 dont il sera question plus loin (Fusion). En attendant, et dans le cadre du

budget de la Marine, les crédits affectés à la Gendarmerie s’amenuisent et cela se traduisait, sur le plan

pratique par une diminution des effectifs et la suppression d’un certain nombre de postes d’Inscription

Maritime.

Les Gardiens de Prison

Par Décret du 20 février 1922 le Gouvernement, probablement poussé là encore par un souci

d’économie, réalisa une fusion du corps de Gardiens de Prison et de la Gendarmerie Maritime. Il était

constitué au sein de cette dernière un cadre spécial chargé de la garde des marins détenus dans les prisons

maritimes des ports. Sans probablement, que le Législateur y ait songé, la Gendarmerie Maritime retrouvait

ainsi une part de ses attributions d’antan. Certes, les prisons maritimes ne sont point les Bagnes

d’autrefois, fournisseurs de la chiourme qui armait les galères et de la main d’œuvre servile dont on avait

alors grand besoin. Mais non plus, les gendarmes maritimes n’ont jamais été Gardes chiourmes. Ils ont

toujours eu par contre, un rôle de surveillance à l’égard des condamnés comme en font foi les plus vieux

textes traitant des Archers de la Marine. Cette mesure de fusion n’avait donc pas un caractère aussi hardi

que l’on pourrait croire. Il est même probable qu’elle eût connu une certaine pérennité si la Gendarmerie

Maritime n’avait pas disparu dès 1926. Mais on comprend peut-être mieux aussi pourquoi, le commandant

de la Gendarmerie Maritime assure toujours les fonctions de Commandant de la Prison et que ces fonctions

ont survécu à toutes les mesures de fusion.

La première fusion

C’est par un décret du 10 septembre 1926 que la Gendarmerie Maritime fut rattachée purement est

simplement à la Gendarmerie Départementale. La compagnie de BREST devint section maritime et fut

placée sous les ordres du Chef d’Escadron, Commandant la compagnie du Finistère. Tous les postes

d’Inscription Maritime qui subsistaient encore furent supprimés à l’exception de ceux de SAINT-MALO et

de QUIMPER.

Comme rien ne venait limiter le jeu des mutations, les officiers, gradés et gendarmes maritimes

furent, en peu d’années, dispersés dans des formations du territoire quand ils ne quittaient pas

volontairement le service. Pour les remplacer on désigna des volontaires le plus souvent attirés par la

perspective de servir dans une grande ville et on affecta d’office des gendarmes qui, pour une raison ou

une autre, étaient peu aptes au service des brigades à cheval.

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Page 15: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

15

Ni des uns ni des autres on exigeait qu’ils fussent anciens marins. En fait, la plupart n’avait guère

d’attaches avec la Marine.

L’effectif des officiers resta cependant fixé à deux. Le Capitaine, Commandant la Section conservait

des rapports directs avec la Préfecture Maritime et le Lieutenant était, de droit, Sous-Aide Major de

l’Arsenal, adjoint par conséquent au Chef du Service d’Ordre.

Les Sections de la Marine à la fusion des Gendarmeries

Les inconvénients de la fusion apparurent assez vite à la Marine qui souffrit de ne plus être maîtresse

de son corps de police. A BREST, cependant, il semble que la continuité des traditions maritimes ait pu être

assurée grâce au peu de mutations intervenues chez les officiers.

Néanmoins, la Marine dut, dès le 1er janvier 1927, pour conserver le contrôle de ses propres prisons,

créer au sein du corps des Gardes Consignes, un cadre spécial des Gardiens de prison. La plupart des

gendarmes maritimes de l’ancien cadre spécial optèrent pour cette nouvelle formation. Les autres, suivant

le sort général, furent versés dans la Gendarmerie Départementale.

La réaction la plus importante, de beaucoup, fut le Décret du 28 février 1928 transformant les Gardes

Consignes en Surveillants Militaires des Arsenaux. La réforme va bien plus loin qu’un simple changement

d’appellation. Brusquement, ce corps militaire, voué jusque-là à la simple police du matériel, voit ses

pouvoirs s’étendre à la police du personnel ouvrier et militaire. Seule la police judiciaire proprement dite lui

échappe. Le rapport du Président de la République que signe le grand Ministre que fut Georges LEYGUES

l’explique clairement : « au lieu d’être affectés exclusivement à la surveillance des issues, ces militaires

assureront le service d’ordre et la surveillance du personnel, conjointement avec la Gendarmerie et

auront, à l’intérieur des Arsenaux et des établissements de la Marine des attributions du même ordre que

les gendarmes sauf en ce qui concerne la police judiciaire ».

Ainsi la Marine restait-elle dans une large mesure maîtresse de sa propre police intérieure et se

garantissait-elle en partie contre les maladresses que ne pouvaient manquer de commettre des gendarmes

qui, trop souvent, nous l’avons vu, n’avaient aucune connaissance des milieux et des usages maritimes.

C’était d’ailleurs la seule justification d’une telle mesure. Le jour ou la Gendarmerie maritime fut

enfin reconstituée on comprit mal que deux corps aux attributions si voisines fussent tous deux chargés de

la police de l’Arsenal. On s’achemina alors vers leur fusion qui devint effective en 1946.

Sur le plan local, en tout cas, il est facile, en suivant les fluctuations des effectifs de se rendre compte

que la Marine, plus ou moins bridée dans ses besoins par l’obligation de faire appel pour les satisfaire, à

une direction étrangère, s’attacha davantage à ses surveillants qu’aux gendarmes. Alors qu’au cours des dix

années de fusion l’effectif de la Gendarmerie ne varia pas sensiblement celui des surveillants, suivant

d’ailleurs l’extension progressive de l’Arsenal et de son activité, passa de 29 à 56.

La Section Maritime de BREST pendant la première fusion

Dès 1928 il devint délicat de séparer nettement l’historique de la Section Maritime de celui de la

deuxième compagnie de surveillants militaires. D’ailleurs une division rigoureuse serait arbitraire et injuste

car l’actuelle Gendarmerie Maritime est l’héritière de ces deux corps, non seulement parce que plusieurs

de ses gradés et militaires proviennent des surveillants mais aussi parce que survit chez elle leurs traditions

respectives.

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Page 16: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

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Organisation

La Section Maritime de BREST, qui relevait du Chef d’Escadron, Commandant la compagnie du

Finistère, recevait, comme toutes les autres Sections du département, les circulaires, ordres, notes de

service etc…, diffusés par lui, alors que bien souvent, elle n’avait pas à les appliquer, car son service restait

toujours limité au domaine maritime, qu’il s’agisse du personnel ou des établissements et qu’elle échappait

à l’emprise des autorités administratives. Mais la circonscription de la section avait été largement amputée.

Les postes d’Inscription Maritime avaient été pour la plupart supprimés. Les deux qui subsistaient, SAINT-

MALO et QUIMPER relevaient des Sections Départementales sur le territoire desquelles ils se trouvaient. Le

commandant de la Section Maritime n’avait donc plus sous ses ordres directs que les deux formations

voisines de BREST et de SAINT-NICOLAS (Pyrotechnie). C’est à lui qu’incombait l’instruction, la surveillance

de la tenue, la discipline et l’administration de son personnel. Celui-ci était, pratiquement, au cours de son

service, aux ordres du Lieutenant de Gendarmerie, Sous-Aide Major de l’Arsenal pour la brigade BREST, aux

ordres de l’Adjudant délégué du Major Général pour SAINT-NICOLAS. Dans cet établissement, une brigade

(un MDL chef et quatre gendarmes) assurait la police de la Pyrotechnie conjointement avec un Maître et six

surveillants militaires. L’Adjudant de Gendarmerie coordonnait leur action et jouait, en somme, le rôle de

Sous-Aide Major de l’établissement.

A BREST 13 Maréchaux des Logis Chefs et soixante gendarmes environ (cet effectif a varié quelque

peu d’année en année) étaient groupés, pour le service en un unique ensemble de brigades commandé par

un Adjudant. Chaque gradé se trouvait bien à la tête de 4 à 6 gendarmes, mais mises à part les brigades

casernées au Goyen, au Carpon et au Moulin à Poudre, les Maréchaux des Logis Chefs n’avaient guère de

contacts avec leurs hommes sinon pour l’instruction. Il n’était pas question à cette époque, de commander

un service par brigade et les chefs étaient fréquemment désignés de service à des issues différentes de

celles auxquelles étaient affectés leurs subordonnés. De leur côté les surveillants militaires étaient placés

sous les ordres d’un maître-principal qui relevait du chef du service d’ordre.

Le service

C’est le Sous-Aide Major qui, sur les instructions du Major Général et de l’Officier supérieur de

Marine Aide-Major fixait les besoins de la surveillance ; le maître-principal surveillant d’une part et

l’Adjudant, commandant les brigades d’autre part, au vu de ces désidératas répartissaient le personnel. En

principe celui-ci était interchangeable et il n’existait pas, à proprement parler, de secteurs de surveillance

dans l’Arsenal. Seul Laninon qui, jusqu’en 1936, conserva l’appellation d’Arsenal annexe avait une vie un

peu plus autonome et était le domaine presque exclusif des gendarmes casernés à la Pointe. Les

gendarmes des trois petites casernes du Goyen, du Moulin à Poudre et du Carpon étaient désignés de

préférence pour les portes les plus proches ; mais cette règle n’avait rien d’impératif et elle était bien

souvent transgressée.

Les surveillants militaires, tous logés en ville par leurs propres moyens, étaient désignés à tour de

rôle à chacune des issues de l’Arsenal. Alors que les gendarmes se relevaient en règle générale à

06h30/12h30 et 19h00, les surveillants militaires passaient fréquemment douze voire vingt-quatre heures

d’affilée au poste et prenaient leur repas sur place.

La porte Tourville qui ouvrait sur la rue Pasteur, aujourd’hui disparue était toujours la porte

principale de l’Arsenal et comme de plus elle était voisine des bureaux du service d’ordre, elle constituait

en quelque sorte le poste central de la police du Port.

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Page 17: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

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Les gradés surveillants militaires y avaient leurs bureaux et, de nuit, le Maréchal des Logis Chef qui

était de service, toujours choisi parmi les plus anciens de son grade, représentait le Lieutenant de

Gendarmerie dans ses attributions de Sous-Aide Major.

La circulation entre l’Arsenal et l’extérieur se faisait par vingt et une issues dont deux étaient

uniquement maritimes (Avant-Garde, Amiral) et trois autres exceptionnellement ouvertes (jardin de

Keravel, Rampe aux Bœufs, Poterne du Dépôt). De nuit, cinq portes seulement étaient en fonction et

gardées par des gendarmes et des surveillants : Tourville, Jean Bart, Brasserie, Combarelle et Quéliverzan.

Encore les trois dernières n’étaient-elles ouvertes que sur demande adressée à l’avance au service d’ordre.

De toutes ces issues, la Brasserie, la Corderie et le Carpon étaient les plus fréquentées par le

personnel ouvrier. Les jours fériés, le mouvement y était très réduit. Par contre la porte Jean Bart qui

ouvrait sur le quartier de Recouvrance et desservait l’Artillerie Navale et les Subsistances avait un trafic

bien supérieur à celui qu’elle connait à présent. Le Maréchal des Logis Chef qui y était désigné avait la

responsabilité de la surveillance sur toute la rive droite de la Penfeld.

Le service de nuit ne comportait nulle part, pour les agents du service d’ordre, un quart permanent

comme cela se pratique aujourd’hui. Dès la dernière rentrée des permissionnaires (22 heures en semaine,

24 heures le samedi et le dimanche) le personnel de service se couchait et un seul agent se levait pour

répondre aux coups de sonnette. En compensation les rondes étaient plus fréquentes. Il y en avait

généralement deux par nuit au départ de chacune des portes, de 19 à 22 heures et de 3h30 à 07 heures sur

l’un ou l’autre des 16 itinéraires fixés, désigné par le Sous-Aide Major. Au début du mois surtout, lorsque

les marins venaient de toucher leur solde, toutes ses rondes se retrouvaient à Tourville et à Jean Bart pour

assurer la police de la rentrée des permissionnaires.

De jour, comme nous l’avons déjà vu, la plupart des « Grilles » étaient gardées par au moins deux

agents du service d’ordre. Seules faisaient exception des issues de moindre importance comme l’Amiral

(issue de mer) le Parc au Duc, le front de mer et les portes de l’Hôpital Maritime.

A la Buanderie de l’Anse Saupin logeait un surveillant militaire qui assurait la police du matériel

entrant dans cet établissement ou en sortant et qui, en même temps surveillait l’Ile Factice dans laquelle se

trouvait qu’un simple parc à bois.

Le tunnel des Subsistances qui donnait accès à l’Arsenal annexe de Laninon était gardé alors comme

une véritable issue de l’établissement par un gendarme ou un surveillant militaire qui contrôlaient en outre

les mouvements des embarcations de l’Escadre qui venaient accoster au quai des Subsistances pour y

chercher les vivres.

L’issue dite de l’Avant-Garde, à l’extrémité des quais de la rive droite de la Penfeld était confiée aux

marins de la compagnie de garde dont la mission consistait surtout en une reconnaissance des

embarcations transitant devant eux.

Un tableau résume le service qui était alors en vigueur. Comme il est facile de s’en rendre compte,

les charges des gendarmes et des surveillants militaires étaient légèrement moins fortes que de nos jours.

Elles correspondaient, grosso-modo à un service de nuit toutes les quatre nuits. De jour, les deux tiers du

personnel étaient loin d’être épuisés par la simple garde des issues.

Mais il est juste de noter qu’il n’existait pas à cette époque de brigade judiciaire et que la totalité des

enquêtes incombait aux gendarmes du service général. De leur côté les surveillants militaires avaient la

charge du contrôle de tous les enlèvements de matériel et dans la journée un groupe d’une demi-douzaine

était toujours rassemblé pour cette mission à la porte Tourville.

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Page 18: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

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Les grèves de 1935

En 1935 une série de Décrets Gouvernementaux, que l’opinion ne tarda pas à surnommer « Décrets

LAVAL » décida, dans le but d’amener une diminution du coût de la vie, que les traitements de tous les

fonctionnaires subiraient un abattement de 10 %. Cette mesure était applicable aux ouvriers des Arsenaux.

Elle provoqua une véritable flambée de colère parmi le personnel employé à l’Arsenal de BREST.

Pendant une semaine une agitation désordonnée régna dans l’Arsenal : grèves sur le tas, meeting,

défilé avec drapeau rouge, etc… Pour y mettre fin, le 5 août, l’autorité maritime fit appel aux forces

stationnées à BREST : gardes républicains, infanterie coloniale, gendarmes de la Marine et fit établir un

certain nombre de barrages à l’intérieur de l’Arsenal dans le but de fractionner les mouvements prévus

pour la journée et de tenter de dériver vers les sorties les cortèges qui se formaient. Par ailleurs l’autorité

civile faisait diriger sur BREST de nombreux renforts.

Vers 06 heures du matin les différents barrages étaient mis en place. Les gendarmes maritimes,

formés en peloton sous les ordres du Lieutenant BEILLARD Sous-Aide Major de l’Arsenal, étaient chargés,

avec une compagnie du 2ème Régiment d’Infanterie Coloniale, d’interdire le passage sur la porte du bassin 4

où se trouvait en achèvement le bâtiment de ligne DUNKERQUE.

Les ouvriers rentrèrent dans l’Arsenal comme d’habitude entre 07 heures 30 et 08 heures mais ne

prirent pas le travail. Des groupes importants stationnaient, commentant les évènements avec passion et

entonnant de temps à autre des chants révolutionnaires. Vers 10 heures une troupe de grévistes, venant du

plateau des machines, tenta de descendre vers le bassin du Salou. Elle se heurta dans la rampe Bordenave

à un barrage de gardes républicains. Une bataille rangée éclata alors dans ce coin. Les ouvriers groupés sur

le terreplein du Salou, au nombre de plusieurs centaines voulurent venir à la rescousse de leurs camarades.

Il leur fallait pour cela franchir le barrage organisé par la Gendarmerie. Ils se lancèrent à l’assaut en groupe

massif, armés de madriers dont ils se servaient comme des béliers, ils tentèrent de disloquer le peloton de

gendarmes. Mais la presse était telle qu’ils manœuvraient difficilement. Encore qu’ils n’en eussent pas le

désir, poussés par leurs camarades moins exposés et qui n’y voyaient point malice, les porteurs de béliers

vinrent bientôt en contact avec les premières rangées de gendarmes qui, abattant leurs mousquetons, leur

firent bientôt lâcher prise. La tentative ne se renouvela pas et c’est heureux car c’était un procédé qui,

manié avec sang-froid pouvait faire de grands ravages parmi les défenseurs de l’ordre. Mais les choses n’en

allèrent pas mieux pour cela : l’Arsenal a toujours abondé en pavés, rivets, boulons, déchets de tôle. Ce

sont là projectiles de choix. Les grévistes ne manquèrent pas de s’en aviser et c’est une véritable grêle que

les gendarmes durent subir. De temps à autre, sous le couvert de la mitraille, des petits assauts étaient

donnés. Ils se brisèrent tous sous les coups de crosse. L’instant fut un moment critique : Des ouvriers

étaient montés sur le DUNKERQUE et, de la plage arrière du bâtiment presque achevé, commençaient à

prendre le barrage des gendarmes à revers. Sous l’averse des boulons pesant parfois près d’une livre, le

barrage recula quelque peu. S’il livrait la porte de bassin aux assaillants, la partie était perdue. Elle fut

sauvée par un Lieutenant de l’Infanterie Coloniale. C’était un colosse ; sans attendre d’ordre après s’être

saisi d’un mousqueton il se lança seul sur le DUNKERQUE, à la poursuite des lanceurs de rivets. Les

moulinets que décrivait son mousqueton firent le vide et rétablirent la situation. Puis peu à peu l’excitation

tomba. L’affaire avait été chaude : pas un gendarme qui n’eût son casque plus ou moins cabossé ; pas un

qui n’eût quelque blessure plus ou moins grave ; trois plus sérieusement touchés durent être hospitalisés.

Mais le combat terminé, la trêve fut générale dans le secteur et l’on vit bientôt le curieux spectacle des

gendarmes et des grévistes lavant leurs plaies et se désaltérant, pèle mêle, aux mêmes fontaines.

Vers midi, l’Arsenal se vida de ses ouvriers. L’agitation gagna la ville vers laquelle affluaient, venant

de toute la France, les pelotons de gardes républicains.

…/…

Page 19: MONOGRAPHIE DE LA GENDARMERIE MARITIME DE BREST

19

Mais pour l’heure les grévistes étaient à peu près maîtres de la rue, les forces dont on disposait ayant

déjà fort à faire pour garder les points stratégiques essentiels. Dans l’après-midi ils se signalèrent en

laissant tomber sur le poste de garde du pont Gueydon (Grille du boulevard) les gueuses servant de

contrepoids à la volée du pont national. Gendarme et surveillant militaire ne durent leur salut qu’à une

prompte retraite.

Vers 19 heures ce fut l’assaut de la Préfecture Maritime dans la rue de Siam. Les deux gendarmes

normalement affectés à la garde de cet établissement donnèrent l’alerte à la caserne Fautras où le peloton

reprenait des forces après la sérieuse échauffourée du matin.

Les grévistes, attroupés devant la porte principale, commençaient à s’infiltrer dans la cour de la

Préfecture. L’un d’eux, grimpé sur le mur d’enceinte avec l’intention d’amener le pavillon français pour lui

substituer le drapeau rouge avait été abattu par un officier de marine. Pendant ce temps, les trente

gendarmes, débarqués de camion rue Pasteur, se précipitaient par les escaliers du commandant. Malgré

son excitation la foule fut surprise. Pendant que d’autres troupes, venant de la partie haute de la ville,

l’attaquaient par la rue de Siam, les gendarmes la prenaient de flanc. La bagarre fut chaude. Là encore,

deux gendarmes furent blessés, dont un grièvement. Mais au prix de quelques charges vigoureuses et sans

qu’un coup de feu ne fut tiré, l’hôtel de la Préfecture Maritime put être dégagé.

Les jours suivants, l’agitation fut rapidement contenue par l’important service d’ordre rassemblé

dans la ville. La Section Maritime retourna à ses occupations normales. Mais lorsque le travail eut repris, un

malaise plana longtemps dans les relations entre ouvriers et gendarmes, malaise qui ne se dissipa qu’aux

approches de la guerre mondiale.

Retour à l’autonomie

Devant les réclamations que ne cessaient de formuler les Préfets Maritimes et Majors Généraux qui

se plaignaient de ne pouvoir disposer de la Gendarmerie qu’avec difficulté et aussi de la médiocre aptitude

des gendarmes départementaux à s’adapter aux us et coutumes de la Marine, le Gouvernement finit par

renoncer à la fusion. Par Décret du 30 octobre 1935 la Gendarmerie Maritime fut rétablie dans sa situation

antérieure.

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Elle forma à nouveau une Légion dont le siège était à TOULON.

A BREST, l’unité reprit son appellation de compagnie bien que, faute d’officiers supérieurs, elle resta,

jusqu’en 1937 commandée par le Capitaine LE GUILLOU qui avait été nommé à ce poste en 1935, venant de

la Section départementale de QUIMPER.

Le Décret et l’Arrêté du 6 mai 1936 précisèrent les modalités du service spécial de la Gendarmerie

Maritime. Un tableau annexe fixait les effectifs qui, pour BREST était de un Chef d’Escadron, un Lieutenant,

deux Adjudants (y compris St Nicolas) 12 MDL/Chefs et 64 gendarmes. Un seul poste d’Inscription Maritime

était maintenu, celui de SAINT-SERVAN-SAINT-MALO auquel étaient affectés 1 MDL/Chef et 1 gendarme. Il

faudra attendre le 26 janvier 1937 pour que soient rétablis les postes de BREST, DOUARNENEZ, AUDIERNE,

CAMARET, LE GUIVINEC et CONCARNEAU.

Le retour au sein de la Marine fut en général bien accueilli. A BREST, une douzaine de militaires

seulement demandèrent et obtinrent de retourner dans la Gendarmerie Départementale d’où ils étaient

issus. Ce n’est que peu à peu que le service évolua : La grande majorité du personnel et les deux officiers

eux-mêmes n’avaient connu en effet que les règlements de la Gendarmerie Nationale et les nouveaux

textes organiques ne faisaient guère, en ce qui concerne le service, que consacrer une routine. D’ailleurs il

ne pouvait être question de révolution. Bon gré, mal gré, les nécessité de la surveillance n’avaient pas

changé avec le statut et le service tel qu’il a été décrit plus haut ne connut d’autres modifications que celles

imposées par l’extension de l’Arsenal : construction du Pont de KERVALLON à 200 mètres en amont des

anciens postes de l’Arrière-Garde et de Quéliverzan ; extension en 1936, de l’enceinte de l’Arsenal dans la

région de LANINON ; ouverture des portes de la GRANDE RIVIÈRE et des QUATRE-POMPES ; suppression

de l’issue dite « Tunnel des Subsistances ».

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LE CONFLIT MONDIAL ET LA LIBÈRATION

De la déclaration de guerre à l’Armistice de Juin 1940

La situation de la Gendarmerie Maritime ne fut pas sensiblement affectée par la guerre. En 1939,

trois ans après le retour à l’autonomie, elle disposait encore de peu de réservistes. La compagnie de BREST

n’en reçut qu’une dizaine, nombre suffisant d’ailleurs pour faire face aux quelques aggravations de service

consécutives au déclanchement des hostilités. En fait, l’Arsenal n’ayant pas travaillé à trois postes comme

au cours du précédent conflit la seule surcharge importante vint de l’accroissement du nombre d’enquêtes

de police judiciaire maritime dû au gonflement des effectifs de marins stationnés à BREST. Aucune Prévôté,

cette fois, ne fut formée.

Ce n’est qu’en juin 1940 que les gendarmes maritimes de BREST firent véritablement connaissance

avec la guerre. Quelques bombardements préludèrent à l’arrivée des troupes allemandes qui atteignirent

BREST le 18 juin 1940. A l’Arsenal, évacué par tout ce qui pouvait encore naviguer, l’Amiral BROHAN, Major

Général avait fait procéder aux démolitions nécessaires pour que les installations portuaires et industrielles

ne puissent être immédiatement utilisées par l’ennemi. Selon les ordres de l’autorité maritime, les

gendarmes étaient restés en place. Quelques-uns cependant, avaient tenté sans succès de s’embarquer

pour rejoindre la Grande Bretagne où, avait-on appris, s’organisait la résistance.

Le 19 juin à 09 heures 15, un capitaine allemand, à la tête d’une petite troupe, se présentait à la

porte Tourville et sommait le gradé de service de lui ouvrir les grilles : Les ordres supérieurs étaient tels,

qu’il ne restait plus qu’à s’incliner. Les gendarmes maritimes furent alors retirés de toutes les issues et

rassemblés dans leurs casernes. Quelques-uns furent mis provisoirement à la disposition des autorités

administratives pour renforcer le corps de police urbain et les autres au bout de peu de temps purent

circuler librement en ville, les allemands s’étant désintéressés de ces militaires qu’ils considéraient comme

des policiers.

Le Service à l’Arsenal pendant l’occupation

Une dizaine de jours après l’arrivée des allemands, les autorités maritimes françaises parvinrent à

faire admettre aux occupants la nécessité de réinstaller aux portes de l’Arsenal gendarmes maritimes et

surveillants militaires. Les ouvriers furent rappelés quelques semaines plus tard et il fut vite admis qu’ils

relèveraient uniquement des forces de police françaises.

Le 26 août 1940, un Décret de VICHY « civilisa » les surveillants militaires, comme tous les autres

corps sédentaires de la Marine. En fait, sous la nouvelle dénomination de « surveillants des arsenaux » et

avec des appellations telles que « chef surveillant » au lieu de second-maître leurs attributions restaient

inchangées. Ils continuaient, tout comme les gendarmes maritimes à dépendre d’officiers français et ils

poursuivirent dans l’Arsenal leur service habituel. Leur action évita à bien des ouvriers de connaître les

cruautés de la Gestapo. Plus tard, lorsque fut institué le service obligatoire du travail (S.T.O.) les gendarmes

maritimes, parfaitement conscients de leurs devoirs, purent, grâce à leur connaissance approfondie des

ouvriers du port, épargner à beaucoup d’entre eux d’être pris dans les coups de filets organisés par les

allemands.

Leur rôle n’avait rien d’enviable. D’une part, il fallait préserver les intérêts de l’Etat, donc réprimer les

vols de matériel et d’autre part, éviter d’attirer l’attention des allemands soit par une vigilance trop

relâchée, soit, au contraire, en leur signalant, même involontairement, des français ayant agi non dans un

esprit de lucre mais pour les besoins de la Résistance. Il faut croire qu’ils y réussirent car, lorsqu’en 1942 les

sabotages commencèrent, les enquêtes purent, la plupart du temps, être menées par les gradés de la

Gendarmerie Maritime.

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Il leur fallait déployer des prodiges de diplomatie pour, tout en montrant aux allemands des procès-

verbaux irréprochables, parvenir à mettre les coupables hors de cause : et ceux-ci ne facilitaient guère la

tâche, parfois par un héroïsme irréfléchi, le plus souvent parce qu’ils ne soupçonnaient point quel secours

bienveillant ils pouvaient attendre des gendarmes maritimes. Car pendant toute cette sombre période de

l’occupation, les sentiments comme les actions les plus méritoires se cachaient sous des dehors contraints,

rigides, destinés à donner le change à l’ennemi mais le donnant aussi fréquemment à ceux-là même que

l’on aidait à leur insu.

C’est ainsi qu’en 1943, une organisation de résistance avait fait sauter une machine-outil de grand

prix apportée à BREST par les allemands, pour leurs besoins et sur laquelle ne travaillaient que des ouvriers

allemands. L’explosion avait coûté la vie au conducteur de cette machine et à une sentinelle. L’enquêteur,

l’Adjudant BOURDON, qui, dès le début savait pourtant à quoi s’en tenir, parvint à faire croire aux autorités

allemandes qu’il s’agissait en réalité d’un acte de vengeance perpétré par des ouvriers allemands à

l’encontre de leur camarade décédé, nazi notoire et pour cette raison assez peu aimée.

La réforme de 1941

Dès le mois de novembre 1940 l’attention des autorités maritimes se porta sur la Gendarmerie. Déjà,

pour marquer son appartenance exclusive à la Marine, un Décret du 18 septembre 1940 avait substitué aux

appellations traditionnelles des officiers une hiérarchie dont les dénominations étaient empruntées à celle

en vigueur dans les corps d’officiers assimilés aux officiers de marine : « officier de 3ème, 2ème ou 1ère classe,

officier principal, officier en chef de 2ème ou 1ère classe de la Gendarmerie Maritime ». Les grades des sous-

officiers, devenaient ceux de la Marine (gendarme, maître, premier-maître, maître principal gendarme).

Les projets qui s’élaborèrent à partir de novembre 1940 et reçurent leur consécration par l’acte dit

« Décret du 26 janvier 1941 » avaient de plus larges ambitions. Il s’agissait de se servir de la Gendarmerie

que les allemands toléraient sans trop de difficultés comme d’un paravent pour dissimuler les cadres dont

la Marine savait déjà avoir besoin pour le jour où la France retrouverait sa liberté. A cet effet la nouvelle

Légion comportait deux subdivisions : d’une part des gendarmes sédentaires « affectés plus spécialement

aux missions de surveillance, aux enquêtes de police judiciaire », d’autre part des gendarmes légers,

« affectés plus spécialement aux gardes, patrouilles et aux missions de maintien de l’ordre à terre et dans

les eaux territoriales ». Les unités conservaient le nom de Compagnies pour les gendarmes sédentaires.

L’uniforme d’une coupe nouvelle, inspirée de celle de l’Armée était bleu-marine. Une casquette dont la visière était bordée d’une soutache dorée et un ceinturon fermé par une boucle de bronze frappée de l’emblème de la nouvelle formation, une ancre de marine surchargée d’une grenade, complétaient cette tenue.

Provisoirement, en zone occupée et pour des raisons faciles à comprendre, les gendarmes sédentaires conservaient l’uniforme de la Gendarmerie départementale sur lequel toutefois des ancres câblées étaient substituées aux grenades. En zone non occupée leur tenue était le même que celle des gendarmes légers, les écussons étant brodés sur fond bleu-gendarme au lieu de l’être sur fond bleu-marine.

Cette réforme, si elle atteignit son but en conservant ou en améliorant l’instruction militaire et l’entrainement sportif de nombreux quartiers-maîtres ou officiers-mariniers qui réintégrèrent la Marine en 1944/1945 rendit en même temps un grand service à la Gendarmerie Maritime ; elle en rajeunit les cadres, lui insuffla un allant qu’elle n’avait pas toujours connu et lui procura un recrutement de choix surtout basé

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sur les marins, mais dans lequel trouvaient place un certain nombre de soldat, caporaux ou sergents de l’armée de terre et de l’armée de l’air, soigneusement sélectionnés et aussi des gradés provenant de la Gendarmerie départementale et de la Garde.

Les officiers chargés de l’encadrement de la Gendarmerie Légère étaient presque tous officier de marine dont beaucoup de brevetés fusiliers. La vie des escadrons se déroulait dans une ambiance très sportive, très militaire avec de nombreux exercices en campagne et des déplacements fréquents qui entretenait dans cette troupe d’élite un allant extraordinaire.

La réforme coïncida avec une crise d’effectifs des officiers de Gendarmerie. On recruta alors, pour l’encadrement des gendarmes sédentaires, des officiers de Gendarmerie départementale, des officiers des autres armes et surtout des jeunes officiers de réserve servant dans la Marine en situation d’activité. Tous les officiers après avoir subi d’abord un stage assez long en Gendarmerie Légère étaient envoyés à l’École d’Application de la Gendarmerie Nationale repliée à PAU, puis de là, répartis dans les différentes formations.

La Gendarmerie Légère à BREST

L’accroissement constant des effectifs de la Gendarmerie Maritime Légère posait au commandement le problème de son utilisation. En 1943 on parvint à faire admettre par les allemands l’envoi de pelotons dans les Ports de la zone occupée. Parallèlement, de nouveaux organes de commandement furent mis en place : Secteur Atlantique à NANTES, Groupe à BREST. Ce dernier fut confié au Chef d’Escadron LE GUILLOU à qui succéda, à la tête de la Compagnie, le Capitaine SAUVAGE.

Le Groupe constituait un échelon de commandement dont l’autorité s’étendait à la fois sur la Compagnie de BREST (gendarmes sédentaires) et sur l’Escadron qui allait être stationné dans ce Port.

C’est en octobre 1943 qu’arriva un élément précurseur de Gendarmerie Légère, le 12ème peloton, commandé par l’Enseigne de Vaisseau CONSTANS et composé d’un premier-maître, d’un maître et de 36 gendarmes. De suite, les difficultés commencèrent avec les allemands qui allèrent jusqu’à menacer le commandant de peloton de déportation. Pourtant on arriva à un accord et il fut admis que les gendarmes légers, destinés à surveiller le port de commerce, auraient un service tout à fait indépendant de celui des allemands. Le peloton s’installa dans un immeuble abandonné du port de commerce et prit ses repas au mess de la Marine Française à BREST, rue Conseil.

Le service était très chargé puisqu’il comportait en permanence quatre gendarmes en poste fixe et deux en ronde. Le 12ème peloton ne pouvait y suffire et, vers le 20 décembre 1943 il fut relevé par le 14ème Escadron commandé par le Lieutenant de Vaisseau BOUVET DE LA MAISONNEUVE assisté des Enseignes de Vaisseau BETHENCOURT, JACOLOT et GARRIGUES, qui s’installa dans l’ancien couvent des sœurs de l’Immaculée Conception place Sanquer. Les 112 gradés et gendarmes légers de cet Escadron assurèrent alors non seulement la garde du port de commerce qui fut quelque peu renforcée mais également celle de la centrale électrique de l’Arsenal et de l’usine à oxygène du Stiff.

La Libération Dès le débarquement allié en Normandie, un certain nombre de surveillants militaires et de

gendarmes tant sédentaires que légers rallient les groupements de résistance avec lesquels ils étaient en relation. Les autres continuent leur service tant bien que mal mais avec une nervosité croissante, surtout chez les gendarmes légers en général plus jeunes et souvent moins attachés à la Gendarmerie.

Le 6 août, alors que les américains approchent de BREST, les allemands font donner l’ordre aux gendarmes de cesser toute activité et d’évacuer la ville. Le personnel est alors désarmé et l’Amiral NEGADELLE qui l’a fait rassembler lui adresse une allocution dans laquelle transparait son désir de la voir rallier le maquis individuellement ou par groupes.

Les casernes une fois abandonnées sont pillées puis incendiées par les allemands : FAUTRAS, LA POINTE et LE MOULIN A POUDRE disparaissent ainsi en ensevelissant les archives de la Compagnie et des Brigades.

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Un petit noyau de personnel volontaire, groupé autour du Lieutenant de Vaisseau BOUVET DE LA MAISONNEUVE garde le cantonnement de l’Escadron, au couvent de l’Immaculée Conception. Le 12 août, il en est expulsé par les allemands et rallie sous les bombardements l’Hospice des vieillards rue Conseil qui sert de caserne à l’unité Marine et où l’Amiral NEGADELLE a installé son P.C. Le 20 août, les allemands contraignent les derniers militaires français à quitter la ville.

Le 5 septembre, le rassemblement des gendarmes maritimes commence à GOUESNOU. Un premier détachement d’une douzaine d’hommes équipé avec des armes récupérées, réintègre la ville aux environs du 15 septembre et s’installe 7 rue Kerfautras dans immeuble ayant servi de cantonnement aux allemands.

Le 18 septembre la garnison allemande se rend aux américains. Les gendarmes et les surveillants se regroupent progressivement à Kerfautras, au Carpon, à Saint Nicolas et à l’ex École Navale et reprennent la surveillance de l’Arsenal dans des conditions matérielles extrêmement précaires. L’absence de postes de garde habitables et de porte sur les issues de l’Arsenal, sans compter de nombreuses brèches dans le mur d’enceinte obligent à exercer partout un service de quart continu. De plus les rodeurs et les pillards abondent. Les règles les mieux établies sont transgressées et l’audace des récupérateurs ne connait pas de bornes. Il faudra qu’au cours d’un regrettable incident, le 13 novembre 1944, à la Porte de la Grande Rivière un surveillant fasse usage de son mousqueton et blesse sérieusement un ouvrier pour que les voleurs deviennent plus discrets dans leurs agissements.

Le service après la Libération Au 1er novembre, les forces de police maritime de BREST se montent à 6 officiers dont le Lieutenant-

colonel, commandant de Groupe et 210 hommes se décomposant en 46 surveillants et 164 gendarmes. Parmi ceux-ci, les gendarmes légers récemment baptisés « Gardes mobiles du littoral » sont versés petit à petit dans les Équipages de la Flotte.

La pénurie de logement oblige à regrouper toutes ces forces en un petit nombre de bâtiments assez dispersés. A cela s’ajoute la difficulté des communications dans une ville ravagée par les bombardements et les destructions allemandes. Aussi est-on amené à ne plus faire aucune discrimination entre surveillants et gendarmes et à constituer deux groupements de surveillance, sous le commandement du Lieutenant de Vaisseau BOUVET DE LA MAISONNEUVE (rive droite de la Penfeld) et du Capitaine SAUVAGE (rive gauche).

De nombreux postes provisoires sont créés pour la garde d’ouvrages militaires abandonnés par les allemands ou de dépôts de matériel constitués ou récupérés par la Marine. C’est ainsi que le groupement de la rive gauche détache trois gendarmes à LAVAL, deux à QUIMPER et un à LANDERNEAU et que celui de la rive droite assure le gardiennage des forts de TOULBROCH (3 surveillants militaires) BERTHAUME (2 surveillants) MEMGAM (2 gendarmes) ainsi que du sémaphore de CREACH-MEUR (1 gendarme et 1 surveillant) et des ouvrages situés à proximité du CONQUET (1 maître et 4 gendarmes) et du phare de la Pointe SAINT MATHIEU (2 surveillants).

La pyrotechnie est gardée par un maître, 5 gendarmes et 6 surveillants. Les postes d’Inscription Maritime de SAINT-SERVAN, BREST, CAMARET, DOUARNENEZ, GUILVINEC, AUDIERNE et CONCARNEAU sont armés dès le 1er octobre 1945, ceux de SAINT BRIEUC, TRÉGUIER, LANNION, PAIMPOL et MORLAIX sont à leur tour pourvus d’un titulaire.

La fin de la guerre Une dépêche Ministérielle du 3 février 1945, fixe les buts à atteindre par la Gendarmerie : retour à

un effectif de 1200 hommes par versement dans la Marine du personnel en excédent, encadrement exclusif par des officiers de Gendarmerie Maritime ; abolition de toutes distinction entre gendarmes sédentaires et gardes mobiles du littoral. Toutefois, on conserve dans chaque grand Port une formation mobile d’abord dénommée « peloton » puis « Section motorisée ».

BREST se voit attribuer quatre officiers et 166 gradés ou gendarmes. 16 autres sont répartis dans tous les Quartiers d’Inscription Maritime.

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En fait, au mois de juin 1945, la situation s’établit comme suit : 1 Capitaine, commandant la compagnie et 1 Lieutenant adjoint, commandant la section motorisée, 1 maître principal, 6 premiers maîtres, 22 maîtres et 148 gendarmes à BREST ou SAINT NICOLAS, 1 maître et 14 gendarmes à l’Inscription Maritime.

Mais ces nombres, très excédentaires, sont rapidement ramenés à la normale. De leur côté les surveillants souffrent d’un déficit chronique par rapport aux prévisions et l’effectif primitif de 1 maître principal, 2 premiers maîtres, 4 maîtres et 39 surveillants va s’amenuisant.

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L’ A P R É S G U E R R E

Évolution de la Légion de Gendarmerie Maritime

Dès 1945 la question des missions et la structure de Gendarmerie Maritime se pose dans la réorganisation des Forces Armées à laquelle le Gouvernement s’attaque. Le problème se trouve d’ailleurs compliqué du fait que le seul texte légal régissant cette formation, le Décret de 1936, est devenu en bonne partie caduc par suite de l’importante réforme réalisée par VICHY en 1941 et surtout du rajeunissement général des cadres et de troupe qui en a été la plus remarquable conséquence, avec le recrutement nouveau qui a porté presque exclusivement dans la Marine et a permis une sélection sévère.

Aussi, en 1946, envisage-t-on d’étendre beaucoup de domaine de la Gendarmerie Maritime et de lui adjoindre, à la base, la partie des fusiliers qui sont chargés de la police militaire à bord des bâtiments. Cette réforme, inspirée des Corps de « Marines » anglo-saxons eût, sans aucun doute, apporté à la Gendarmerie Maritime un surcroit de jeunesse et lui aurait assuré un recrutement facile et de qualité. Ses aptitudes maritimes se seraient affirmées et l’on aurait pu négliger dorénavant sa profonde originalité par rapport à l’ensemble de la Gendarmerie Nationale.

Cette réforme échoue. On se contente de prononcer le 20 août 1946 la fusion du Corps des surveillants militaires avec la Gendarmerie, solution envisagée déjà en 1943 et qui, depuis la réforme de 1928 et le retour à l’autonomie de la Gendarmerie Maritime était devenue fatale.

Le 5 août 1947 un Décret organise définitivement le nouveau corps sur des bases qui ne diffèrent pas sensiblement des anciennes dispositions du Décret de 1858. Les effectifs se stabilisent et la Gendarmerie maritime va retrouver son équilibre lorsque, le 18 septembre 1947 un nouveau Décret motivé par des soucis d’économies l’incorpore à la Gendarmerie Nationale.

Mais alors qu’en 1926 la fusion avait été acceptée avec résignation du personnel qui n’avait pas toujours pris conscience de son appartenance à la Marine, ne nouveau Décret est accueilli avec répugnance par l’ensemble des gendarmes issus pour la plupart des Équipages de la Flotte et restés profondément attachés à leur Arme d’origine. Deux sous-officiers portent l’affaire devant le Conseil d’État et, par un arrêt en date du 28 octobre 1949 cette haute juridiction déclare illégal le Décret attaqué. L’affaire est évoquée au Parlement à l’occasion des débats sur le budget de 1951 et, à une forte majorité, l’Assemblée Nationale et le Conseil de la République se prononcent à leur tour pour l’abrogation pure et simple du Décret du 18 septembre 1947.

La Compagnie de BREST de 1945 à la fusion

Peu après la Libération, le Secteur Atlantique et le Groupe de BREST sont dissous et font place à un « Groupe Atlantique » qui englobe la Section de ROCHEFORT et les Compagnies de LORIENT et de BREST. Le commandant de cette nouvelle formation, le Chef d’Escadron SILVE, installe son P.C. à NANTES, quai Magellan.

Le siège de la Compagnie est d’abord fixé au 7 rue Kerfautras dans l’immeuble qui a été occupé, dès la Libération de BREST, par les premiers gendarmes maritimes rentrés dans la ville. En octobre 1946, les bureaux émigrent dans des baraques récemment édifiées dans la vaste cour-jardin de l’immeuble. Ce dernier est rendu à ses propriétaires.

Tout d’abord formée de deux sections à pied et d’un escadron, plus tard dénommé « Section motorisée », la Compagnie évolue vers sa structure définitive. Deux Sections sur la rive gauche de la Penfeld, une sur la rive droite, une brigade à Saint-Nicolas ; postes d’Inscription Maritime d’abord dans tous les Quartiers compris dans la circonscription puis (01/11/1946) seulement à BREST- St-MALO –

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DOUARNENEZ – LE GUIVINEC – CONCARNEAU – PAIMPOL et MORLAIX, ces deux derniers étant d’ailleurs supprimés en 1947 ; création d’une brigade pour la garde de la base aéronavale de LANVEOC-POULMIC (septembre 1946). A part cette dernière formation dont le personnel ne peut être immédiatement logé, les brigades et postes externes donnent peu de soucis au commandement ; très rapidement le service y devient normal, le personnel vit en famille et son nombre peut à la rigueur suffire eu égard aux missions qui lui sont confiées. Il n’en va pas de même à BREST.

A part la caserne du Carpon, tous les bâtiments ayant appartenu à la Gendarmerie Maritime sont en ruines. Il faut faire exception toutefois de la caserne du Goyen qui, jugée trop excentrique, a été abandonnée. Le premier problème qui se pose au commandement, est celui du logement. En 1945 la totalité du personnel de l’unité vit en célibataire, dans des conditions précaires et est réparti entre l’ex École Navale (Section motorisée) la caserne du Carpon (Section à pied et surveillants militaires) et Kerfautras (Section à pied). Seuls quelques gradés et gendarmes ont réussi à se loger en ville, souvent dans des conditions misérables. Pour tous les autres, le service doit être aménagé de telle sorte que les repos puissent être cumulés afin de leur permettre d’aller passer quelques jours par mois dans leurs familles réfugiées aux alentours. Ce régime de « béatitudes », que le maintien d’un bon moral impose au commandement, est onéreux pour le service. Or, nous l’avons vu, les effectifs, progressivement ramenés aux chiffres d’avant-guerre, suffisent à peine à assurer un minimum de surveillance de l’Arsenal qui, au milieu de ses ruines amoncelées, renferme encore un matériel nombreux et d’autant plus précieux que le pays est ruiné et qui tente une foule de récupérateurs et malfaiteurs. Il faut ajouter que la coexistence des gendarmes et des surveillants militaires, dépendant de deux autorités différentes, complique les problèmes d’organisation et de commandement. Aussi comprend-on que le principal souci des officiers de cette époque a été de reloger le personnel, de la regrouper et d’obtenir un commandement unique pour l’ensemble des agents chargés de la surveillance de l’Arsenal.

On envisage divers projets se contentant toujours de solutions provisoires car l’on sait bien qu’il ne peut être question de reconstruire immédiatement des casernes « en dur ». Pourtant, aucun plan d’ensemble n’aboutit, même pas celui qui prévoyait l’installation dans la cour de l’ex Dépôt des Équipages, d’une cité provisoire, en baraques, qui eût permis le regroupement, à peu près au centre de l’établissement militaire de la plus grande partie des effectifs. Mais, au long des années, des progrès partiels s’enregistrent. En 1946 les locaux où était casernée la Section motorisée, à l’ex École Navale, sont transformés en logements et reçoivent 22 familles. La caserne du Carpon, évacuée par les surveillants militaires qui rallient Kerfautras, est rendue à sa destination première et reçoit 6 familles. En juillet de la même année, 14 autres se logent à Pontanézen dans un bâtiment prêté par l’Administration de la guerre à la Marine. Pendant ce temps une quarantaine de gradés et gendarmes parvient à louer en ville des appartements ou des petites maisons. Malgré tout il reste environ deux douzaines de gendarmes casernés à Kerfautras, qui doivent vivre séparés de leurs familles. En 1947, s’armant de truelles, de marteaux, de diamants de vitrier, de fils électriques et surtout de bonne volonté, ces déshérités remettent en état d’habitabilité, deux bâtiments à Pontanézen. A partir de ce moment et grâce à cet effort collectif, le plus gros de la crise du logement est passé, le régime des béatitudes peut être aboli et le service prend son allure normale.

Parallèlement, sur le plan local d’abord, on s’oriente vers l’unification du commandement des surveillants militaires et de la Gendarmerie, sous l’égide du commandant de Compagnie. Le 20 août 1946 cette fusion est légalisée par un Décret Gouvernemental, mais à ce moment les surveillants ne sont plus que 15 et 9 d’entre eux seulement sont absorbés par la Compagnie après un stage de formation à l’école de Gendarmerie Maritime de HYERES.

Malgré les immenses difficultés qu’il lui faut tous les jours surmonter pour la simple exécution de ses missions habituelles de surveillance, malgré le nombre énorme des enquêtes nécessitées par la quantité inusitée de vols au préjudice de la Marine, la Compagnie doit encore faire face à des missions extraordinaires qui imposent, à un personnel déjà surmené, des épreuves supplémentaires. La ville martyre et l’Arsenal reçoivent la visite des plus hautes personnalités ; Président et Ministres du Gouvernement Provisoire de la République, pour la protection desquelles d’importants services d’ordre doivent être organisés.

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En mai 1946, et pour deux mois, un groupement temporaire de Gendarmerie Maritime est envoyé en Allemagne pour protéger le démontage des usines opéré au compte de la Marine et escorter le matériel récupéré. La Compagnie de BREST fournit pour sa part un détachement de 32 gradés et gendarmes sous les ordres du Sous-Lieutenant ALLAIN, officier adjoint. Après cette ponction il ne peut plus être question d’assurer une garde permanente des issues de l’Arsenal et, pour conserver néanmoins un minimum de surveillance, le Préfet Maritime place à la disposition de la Gendarmerie Maritime une vingtaine d’officiers-mariniers du Dépôt.

En août 1946, le Général DE GAULLE vient remettre la croix de la Libération à l’ILE DE SEIN et c’est à la Compagnie de BREST l’honneur de fournir le service d’ordre dans l’Ile. 30 gendarmes y sont débarqués, non sans difficultés en raison du mauvais temps, et passent deux jours dans le petit village en liesse qui a réservé à son illustre visiteur un accueil touchant. Au milieu de cette rude population de pêcheurs, vibrante de patriotisme, la tâche est aisée et les savants déploiements de forces sont vite réduits à néant par la volonté du Général qui encourage les Îliens, du geste et de la voix, à rompre les barrages et à l’approcher.

En février 1947, c’est le lancement du cargo charbonnier « PENLAN » présidé par le Ministre de la Marine qui a tenu à marquer de sa présence l’importance de l’évènement qui symbolise magnifiquement l’immense effort de reconstruction accompli en moins de trois ans par les techniciens et ouvriers de l’Arsenal.

Le 28 juillet 1947 enfin, s’abat sur la ville la terrible catastrophe causée par l’explosion en grande rade du navire norvégien « OCEAN LIBERTY » qui coute la vie d’une trentaine de brestois et accumule les ruines dans la ville en plein essor. La gendarmerie Maritime se dépense pour apporter des secours aux sinistrés, protéger contre le pillage possible les magasins éventrés de la cité Commerciale, rassurer une population affolée par la crainte de nouvelles explosions et dont l’exode rappelle les plus sombres journées de 1940. L’Arsenal et les casernes ont assez peu souffert. Kerfautras cependant reçoit deux gros éclats et la toiture du garage s’effondre sous le souffle de la gigantesque explosion pourtant éloignée de près de 3000 mètres.

Face aux problèmes nouveaux que posent la dispersion du personnel dans la ville ou à ses alentours, l’extension de l’Arsenal et les difficultés de sa surveillance, le commandement cherche les solutions capables d’améliorer le rendement et d’alléger le travail harassant des hommes. L’organisation intérieure sera fatalement fluctuante et les essais se succèdent dont beaucoup devront être abandonnés.

La Compagnie, jusqu’en mars 1947, ne compte plus que deux officiers. Les tâches d’organisation et de commandement les absorbent tous deux au point qu’il est jugé inéluctable de confier le poste de Sous-Aide Major délégué à des premiers maîtres et maîtres principaux (successivement : PM DAVID, MP CORIOU, PM LE GALL). Ceux-ci ont à résoudre de multiples questions d’organisation et la police judiciaire absorbe une part démesurée de leur activité : enquêtes sur le détournement par un équipage de quatre millions en billets de banque découverts à la Base des Sous-Marins (juin 1945) ; sur la mutinerie de l’équipage allemand d’un dragueur de mines (mars 1946) ; sur des vols de matériel, détournements de pneumatiques et d’essence au préjudice de la Marine, etc… Les voleurs sont souvent d’une audace inouïe, encouragés qu’ils sont par les prix très élevés qu’atteignent au « marché noir » les métaux non ferreux, les roues d’automobile ou le carburant.

La reprise de l’instruction s’impose, avec une telle acuité que, sur décision du commandant du Groupe Atlantique, l’année scolaire 1946/1947 est divisée en trois périodes au cours de chacune desquelles un tiers du personnel, distrait de tout service de jour, se consacre unique à l’étude. Cette énergique entraîne bien des difficultés dans le service mais atteint son but : le personnel recouvre sa cohésion, son esprit militaire et refait connaissance avec toute une législation qui, en peu d’années a été bouleversée et qu’au milieu de ses épreuves il n’a pas toujours eu le loisir de suivre.

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L’articulation interne des brigades de BREST devient de plus en plus nécessaire et, en juillet 1947 on tente un premier essai de décentralisation du commandement.

Chacune des trois Sections reçoit en propre une circonscription de l’Arsenal.

Le découpage est réalisé en accord avec la Majorité Générale et l’on obtient ainsi trois secteurs : LANINON, PENFELD-SUD, PENFELD-NORD, confiés aux maîtres principaux ou premiers-maîtres commandants de sections. Néanmoins on n’ose aller immédiatement jusqu’aux dernières conséquences de cette évolution et il subsiste à Kerfautras, aux côtés du commandant de Compagnie, un premier-maître commandant des brigades qui règle le service des gendarmes affectés aux secteurs Penfeld. Seul LANINON connait une véritable autonomie, mais l’attribution d’une circonscription définie à chaque commandant de section a très vite d’heureuses conséquences pour l’efficacité de la surveillance. La multiplicité des enquêtes a d’ailleurs conduit à créer, dès 1945, une brigade des recherches, forte de six gradés et gendarmes qui décharge des enquêtes les plus longues le personnel du service général.

Telle est la situation de la Compagnie BREST lorsque, au 1er novembre 1947, elle est absorbée par la Gendarmerie Nationale et devient « Section Maritime », directement rattachée à la 3ème Légion.

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A N N E X E 1

OFFICIERS AYANT EXERCÉ UN COMMANDEMENT OU DES FONCTIONS

A LA COMPAGNIE DE BREST (section maritime pendant les fusions)

ANNEE Cdt de Compagnie Cdt de Lieutenance Sous-Aide Major Trésoriers

1704 SALLE (Prévot de la Marine)

1870 LT RAPOUZAULT

1878 C.E. DARCOURT S/LT MARCHANDIER

1888 LT LOREAL

1891 Cap GENSOUS

1894 C.E. GENSOUS Cap HOURCADE

LT GERARD

LT LACASSAGNE

1900 Cap LOREAL LT BRICAU

1904 Cap LACASSAGNE S/LT PRIM S/LT ROUX

1906 Cap REVOL LT PRIM -id-

1907 Cap REGNIER -id- -id-

1908 -id- -id- LT CASSAN

1911 -id- -id- -id-

1913 -id- LT BOURDIEC LT BROTHIER

1915 Cap PRIM LT GOSSELIN LT MARGALIN

1917 Cap MOLINARIS

1920 C.E. BROTHIER LT LAMY

1926 Cap LAMY OFFICIERS ADJOINTS

LT LOTTE OFFICIERS DEGENDARMERIE

LEGERE

1932 Cap LOTTE LT BEILLARD

1934 Cap METENS -id-

1935 Cap LE GUILLOU -id-

1937 C.E. LE GUILLOU LT MESMACRE

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ANNEE Cdt de Compagnie Cdt de Lieutenance Sous-Aide Major Trésoriers

1943 C.E. LE GUILLOU LT VALLOT E.V. CONSTANS (12°P)

1944 Cap SAUVAGE -id- L.V. BOUVET DE LA

MAISONNEUVE

1945 Cap VAISSIERE LT DORSEMAINE PM DAVID EV BETHENCOURT –

JACOLOT - GARRIGUES

1945 -id- S/LTALLAIN -id-

1946 -id- LT NERRIERE PM CORIOU

1947 -id- S/LT POISSON LT NERRIERE

1949 Cap NERRIERE Néant

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A N N E X E 2

SOURCES DE L’HISTORIQUE

Archives du Port

Procès-verbaux de Commissions immobilières des Travaux Maritimes

Bulletins officiels de la Marine

Historique de la Gendarmerie Maritime (diffusé par la Légion de Gendarmerie Maritime)

Grand Livre d’Or historique de la Gendarmerie Nationale

Archives de la 2ème Compagnie de Surveillants Militaires (très incomplètes)

Archives du poste d’Inscription Maritime de SAINT-SERVAN

Archives du 14ème Escadron (édition 1943)

Archives de l’unité (depuis 1945)

Souvenirs personnels :

• Adjudants JAMBON – LANNON – LE GALL, retraités

• Maître principal Surveillant KERSIVIEN, retraité

• Adjudants BOURDON – PALLIER – LE GUILLOU – RIVOALEN

• Maréchaux des Logis Chefs DUGOR – BRAMOULLE

• Gendarmes KERDEVEZ – PEN

Sources exploitables ultérieurement :

• Archives de l’inscription Maritime où des indications sur les gendarmes de la Marine peuvent être retrouvées

• Archives du Port dont le classement et le repérage ne sont pas terminés.

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