Magazine Croix-Rouge, Croissant-Rouge, No. 2 - 2013 : Balayer la poliomyélite de la face du monde
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7/29/2019 Magazine Croix-Rouge, Croissant-Rouge, No. 2 - 2013 : Balayer la poliomylite de la face du monde
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Visites domicileDes volontaires frappent aux portes pour vaincre la maladie
Combattre la stigmatisationUn danger mortel pour les personnes malades ou vulnrables
Toujours dans la course 150 ansLe Mouvement clbre 150 ans daction humanitaire
Balayer lapoliomylite
de la facedu monde
La
goutteultime
L E M A G A Z I N E D U M O U V E M E N T I N T E R N A T I O N A L
D E L A C R O I X - R O U G E E T D U C R O I S S A N T - R O U G E
N U M R O 2 . 2 0 1 3
CroixRouge CroissantRouge
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Le Mouvement international de la Croix-Rouge
et du Croissant-Rouge comprend trois composantes:
le Comit international de la Croix-Rouge (CICR), la Fdration
internationale des Socits de la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge (FICR) et les Socits nationales.
Organisation impartiale, neutre et indpendante,
le Comit international de la Croix-Rouge
(CICR) a la mission exclusivement humanitaire
de protger la vie et la dignit des victimes de
conflits arms et dautres situations de violence,et de leur porter assistance. Le CICR sefforce
galement de prvenir la souffrance par la
promotion et le renforcement du droit et des
principes humanitaires universels. Cr en 1863,
le CICR est lorigine des Conventions de Genve
et du Mouvement international de la Croix-Rouge
et du Croissant-Rouge, dont il dirige et coordonne
les activits internationales dans les conflits
arms et les autres situations de violence.
La Fdration internationale des Socits
de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
(FICR) est le plus vaste rseau humanitaire de
volontaires au monde. Il touche chaque anne,
travers ses 187 Socits nationales, 150 millionsde personnes. Ensemble, nous uvrons avant,
pendant et aprs les catastrophes et les urgences
sanitaires pour rpondre aux besoins et amliorer
les conditions dexistence des personnes
vulnrables. La FICR agit de faon impartiale,
sans distinction de nationalit, de race, de sexe,
de croyances religieuses, de classe ou dopinion
politique. Guide par la Stratgie 2020 son plan
daction collectif pour relever les grands dfis
de la dcennie en matire daide humanitaire et
de dveloppement , la FICR est dtermine
sauver des vies et changer les mentalits.
Le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
est guid par sept Principes fondamentaux :
humanit, impartialit, neutralit, indpendance, volontariat, unit et universalit.
Toutes les activits de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge poursuivent le mme objectif :
aider ceux qui souffrent, sans discrimination aucune, et contribuer ainsi la paix dans le monde.
CICR
Fdration internationale des Socitsde la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
Les Socits nationales de la Croix-Rouge et
du Croissant-Rouge mettent en application les
buts et les principes du Mouvement international
de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge dans
188 pays. Elles y assument le rle dauxiliairesdes pouvoirs publics pour tout ce qui concerne
lhumanitaire et y conduisent des activits dans
des domaines tels que les secours en cas de
catastrophe, les services de sant et lassistance
sociale. En temps de guerre, elles fournissent
une assistance la population civile affecte et
apportent leur soutien aux services de sant de
larme, le cas chant.
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Tribune libre
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Porte porte, goutte goutte : btirla confance et balayer la poliomylite
LES VOLONTAIRES qui, deux par deux,se rendent de maison en maison dansdes zones isoles de lAghanistan avecleur vaccin antipoliomylitique ont en
gnral deux impratis lesprit : protger les
enants de moins de 5 ans contre une maladie
mortelle et invalidante et prserver leur propre
scurit. Voici deux mois, un jeune agent de
sant a perdu la vie dans des changes de tirs,
pendant quil efectuait prcisment ce type
de visite. Un autre volontaire de la lutte contre
la poliomylite, g de 19 ans, a t tu alors
quil quittait une zone de troubles, sa tche
quotidienne accomplie.
Ces jeunes gens ont perdu la vie alors quils
participaient une campagne neutre et im-
partiale destine sauver des centaines de
milliers denants. LInitiative dradication
de la poliomylite en Aghanistan a dem-ble proclam clairement sa volont de de-
meurer neutre et impartiale; elle nappuie
aucune action politique et ne choisit pas un
camp contre lautre dans le conit. Le pro-
gramme ne vise quune chose : les enants,
o quils se trouvent et quelle que soit leur
origine.
Le programme a pour objets dinciter les
communauts participer, de raliser des ac-
tivits essentielles et datteindre des objectis
prdnis. Les rsultats sont l : entre janvier
et mai 2013, deux cas peine de poliomylite
ont t dclars, contre 80 en 2011.
Ce succs repose en partie sur lintroduction
de mthodes novatrices qui associent la vac-
cination dautres mesures de sant, comme
la distribution de comprims vermiuges pa-
ralllement limmunisation. L o les com-
munauts sont loignes des tablissements
de sant et dpourvues de moyens de trans-
port, des centres de sant communautairesont t ouverts pour rpondre aux besoins,
en proposant entre autres le vaccin antipo-
liomylitique oral.
Ces mesures ont permis de renorcer la
conance, ladhsion et lacceptation du vac-
cin parmi les communauts les plus dshri-
tes et les plus vulnrables. Le rseau tendu
de systmes de surveillance mis en place pour
dtecter et analyser les cas de poliomylite
a aussi t intgr au suivi dautres maladies
transmissibles. La capacit nouvelle daccder
des zones jusque-l hors datteinte laissera
un acquis permettant dintgrer des onctions
essentielles de lradication dautres pro-grammes de sant publique en cours.
Lest de lAghanistan demeure une rgion
problmatique; si elle ne constitue plus, de-
puis un certain temps, une zone de transmis-
sion de la maladie, des cas de poliomylite
sauvage y sont rapparus dans des sites inac-
cessibles, o il reste quelques enants non
vaccins. Mme si leur nombre est trs rduit,
ils restent exposs au virus. En pareil cas, les
ans et les dirigeants religieux sont les per-
sonnes qui ont lautorit ncessaire pour
permettre aux agents de sant de toucher
les agglomrations et les enants di ciles
atteindre. Ce sont les personnes cls dans la
lutte contre la maladie.
Pour persuader ces acteurs essentiels, nous
avons besoin dun point dentre : des
acteurs qui ont des relations et des racines
dans ces communauts. Cest ici que le
Croissant-Rouge aghan a un rle crucial
jouer. Avec son rseau tendu dans 33 pro-vinces, le Croissant-Rouge mne des activi-
ts grce 47 centres xes et 17 quipes de
sant itinrantes, en rpondant tout parti-
culirement aux besoins des personnes vul-
nrables dans les zones touches par des
situations durgence.
Avec leur prsence sur le terrain et leur neu-
tralit politique, les 20 000 volontaires du
Croissant-Rouge aghan peuvent jouer un
rle des plus concrets : vacciner les enants,
surveiller le bon droulement des cam-
pagnes et susciter la demande chez les pa-
rents dans les rgions les plus dangereuseset inaccessibles. Leur rputation en matire
dactivits communautaires permet desp-
rer un engagement encore plus acti de la
Socit nationale. La cl du maintien de llan
acquis et de lradication de cette maladie
invalidante et atale est entre leurs mains.
Notre exprience en Aghanistan montre que
mme dans un milieu extrmement hostile
(terrain accident, manque dinrastructures,
isolement des communauts, pauvret et
zones dinscurit), un efort concert long
terme peut permettre dliminer, ou peu
sen aut, une maladie qui tait hier encore
un au mortel rpandu. Lobjecti nest pas
encore atteint, mais je suis persuade que
les stratgies novatrices destines crer la
conance sur le terrain et amliorer dura-
blement la sant communautaire nous per-
mettront de relguer la poliomylite au rang
des aux du pass, en Aghanistan et dans
le monde entier.
Suraya Dalil
Ministre de la Sant publique
Rpublique islamique dAghanistan
La cl de lradication de
cette maladie invalidante
et fatale est entre les mains
des 20 000 volontaires du
Croissant-Rouge afghan.Ph
oto
:REUTERS/DenisBalibouse
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Le Mouvement visen AghanistanDeux vnements rcents en
Aghanistan montrent combien les
agents de sant et de secours restent
exposs de graves prils danslexercice de leurs tches dans ce pays
ravag par la guerre.
Le 16 avril, deux employs du
Croissant-Rouge aghan ont t
tus et deux autres blesss dans une
attaque sur la route dans le district
de Khanaqa, au nord du pays, alors
quils se rendaient Shiberghan
avec leur dispensaire mobile du
Croissant-Rouge, clairement marqu
de lemblme.
Sayeed Hazarat, agent de
vaccination de 32 ans, et MohammadNajibullah, le chaufeur g de 45 ans,
apportaient une assistance mdicale
aux personnes vivant dans des zones
isoles, sans accs aux soins.
Six semaines plus tard, le 29 mai, un
employ du CICR, Abdul Bashir Khan,
trouvait la mort dans une attaque
contre les bureaux du CICR Jalalabad.
Trois autres collaborateurs ont t
blesss. Abdul Bashir Khan avait 50 ans
et tait pre de huit enants; il travaillait
pour le CICR comme garde Jalalabad
depuis 2002.
Lattaque tait la premire de cetype contre le CICR dans le pays.
Nous condamnons cette attaque
avec la plus grande ermet, a
dclar Jacques de Maio, che des
oprations du CICR pour lAsie du
Sud.
La FICR plaide pourlaccs aux soinsSelon lOrganisation mondiale de la
Sant, prs dun milliard de personnes
nont toujours pas accs aux services
de sant dont ils ont besoin parcequils ne sont pas disponibles ou
pas abordables. Lors de la
66e Assemble mondiale de la sant,
en mai 2013, la FICR a appel les
gouvernements, le secteur priv
et ses partenaires de la socit
civile collaborer pour nancer et
promouvoir le volontariat titre
de partie intgrante des soins de
sant universels. Selon la FICR,
les volontaires jouent un rle
essentiel en jetant un pont entre
les communauts et les services
de sant, en particulier pour les
populations di ciles daccs et
insu samment desservies. Si
la responsabilit premire de la
couverture universelle des soins de
sant incombe aux gouvernements,
les volontaires peuvent intervenir
lorsque les systmes de sant
manquent des inrastructures ou
du personnel adapts.
Les soins de santsous le euNon moins de 921 attaques ont t
diriges directement contre des
personnels de sant, des structures
mdicales ou des malades et des
blesss en 2012, selon un rapport
rcent, Violent Incidents Afecting
Health Care, publi par le CICR
dans le cadre de sa campagne
Les soins de sant en danger.
Ces attaques taient au cur des
dbats Toluca (Mexique), o la
Croix-Rouge mexicaine, le CICR etdes reprsentants de 19 Socits
nationales ainsi que dautres
prestataires de services dambulance
ont appel au renorcement de
la protection et du respect du
personnel charg des interventions
durgence. La protection de la
mission mdicale ne peut tre
assure par la seule communaut
des soins de sant. Cest aux
gouvernements, aux acteurs
dinuence et la socit civile
quen incombe au premier che la
responsabilit, a dclar Karl Mattli,
che de la dlgation rgionale du
CICR pour le Mexique, lAmrique
centrale et Cuba.
Moulin de lespoir enRpublique de CoreLa Croix-Rouge de la Rpublique
de Core a lanc un nouveau
programme, Moulin de lespoir,
an damliorer la qualit de vie
des jeunes en s ituation di cile,
des personnes ges, des amilles
multiculturelles et des migrants,
dans quatre secteurs : moyens
dexistence, sant, logement et
ducation. Lun des objectis est
dassocier 30 000 volontaires de la
Croix-Rouge des membres de ces
groupes vulnrables dici 2016,
pour aider plus e cacement les
personnes dans le besoin.
La Socit nationale a ainsi
ouvert deux centres mdicaux
dans ses hpitaux Soul et
Incheon, en insistant sur les soins
spcialiss et lappui nancier aux
personnes vulnrables. Les amillesmulticulturelles et les migrants ont
souvent du mal recevoir des soins,
pour des raisons linguistiques et
conomiques.
LEurope centrale inondeLes Socits nationales dEurope
centrale ont ragi aux inondations
parmi les plus graves depuis
des dcennies causes par les
pluies diluviennes dans la rgion.
Dix personnes au moins sont
dcdes en Rpublique tchque
et des milliers de personnes ont t
vacues dans ce pays, mais aussi
en Autriche et dans le sud-est delAllemagne, o leau a endommag
les inrastructures et gravement
perturb des services essentiels et
les transports.
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chosSauver une vie, voir le sourire
dun enfant, a donne de
lnergie pour des mois.
Mohammed, volontaire du CroissantRougearabe syrien, cit dans le New York Times du3 juin 2013
3 : Nombre de pays considrs
endmiques pour la poliomylite
en 2013 (Aghanistan, Nigria et
Pakistan), contre plus de 125 en 1988,
quand ut lance lInitiative mondiale
pour lradication de la poliomylite.
57 : Nombre de pays tombs sous
le seul critique de 2,3 mdecins,
inrmires et sages-emmes pour
1000 habitants gnralement jug
ncessaire pour assurer un niveau
acceptable de couverture
de services de sant essentiels.
223 : Nombre de cas de poliovirus
sauvage signals dans le monde
entier en 2012, contre 350 000 en
1988, grce lInitiative mondiale
pour lradication de la poliomylite.
800 : Nombre de emmes quimeurent chaque jour pour des
raisons lies la grossesse et
laccouchement, principalement
cause dun manque daccs des
soins de sant appropris.
1250 : Nombre darbres plants par
des jeunes dans le cadre dun projet
de la Croix-Rouge de Sri Lanka et par
des coliers de 130 coles de tout
le pays titre de sensibilisation aux
changements climatiques.
700 000 : Nombre de personnes
dans les villes de Gao, Kidal, Mopti et
Tombouctou et dans leurs environs,
au Mali, qui ont reu des vivres et
autres biens de premire ncessit
de la part du CICR et de la Croix-
Rouge malienne en 2012.
1,12 million : Nombre danimaux
soigns grce au programme du CICR
pour la vaccination du btail en 2012.
1 milliard : Nombre de personnes
sans accs des mdicaments
essentiels dans le monde.
Sources : Organisation mondiale de la S ant, FICR, CICR.
Indice humanitaire
Le Bangladesh ace lefondrement dun immeubleLorsquun btiment de huit tages abritant de nombreuses abriques de
textiles sest efondr Savar, banlieue industrielle de la capitale Dacca,
au mois davril, plus de 3000 personnes travaillaient lintrieur.
Les volontaires et le personnel du Croissant-Rouge du Bangladesh,
accourus immdiatement, ont dress un camp de premiers secours pour
soigner les blesss. Les volontaires ont travaill aux cts dautres secouristes
pour sauver les personnes ensevelies sous des amas dacier, de er et de bton.
Tout au long de lopration, 205 volontaires orms de la Socit nationale
ont travaill 24 heures sur 24 en deux quipes. Tandis que certains cherchaient
les survivants, dautres ournissaient les premiers secours, runissaient desamilles ou prtaient main-orte pour la gestion des dpouilles.
Photo
:REUTERS/Khurshed
Rinku
En bref...
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26. Lhumanit ondatrice
24. Une neutralit radicale
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En couverture 4La goutte ultimeLe monde a une occasion sans prcdent dradiquer
la poliomylite. Les eforts coordonns desgouvernements et des organisations internationales,avec les milliards de dollars daide promis, pourraientassurer le plus grand triomphe de sant publiquedepuis lradication de la variole. Ces efort s su rontils ace aux parents qui reusent de vacciner leursenants ou dans des pays ravags par la guerre, auxinrastructures ananties ?
pidmie 10Visites domicileComment les volontaires de la CroixRouge de lIndeapportent des soins personnels et individualiss aux
malades victimes la ois dun mal pernicieux et dela rprobation sociale qui laccompagne.
Focus 14Quand lopprobre tueLopprobre peut prendre bien des ormes. Partoutdans le monde, le Mouvement de la CroixRouge etdu CroissantRouge combat lexclusion, parois pardes campagnes publiques, parois avec discrtion,dans les chambres dhpital ou les cellules de prison.
Conflit 18Sables mouvants
Avec lvolution du conit dans le nord du Mali,le CICR a d tofer ses oprations et sadapter des ralits nouvelles.
Rfugis 20Des htes inattendusCraignant de regagner leur oyer, les personnes dplacesdu nord du Mali trouvent reuge dans les communautsdu sud. Leurs htes assument un lourd ardeau, alors queleur situation nest souvent gure meilleure.
4. La goutte ultime
10. Visites domicile
22. Lhumanit avant tout
Les Principes fondamentaux 22Lhumanit avant toutUne employe des services mdicaux durgence de la
CroixRouge libanaise dcrit le d quotidien duneassistance neutre et impartiale dans un pays touchpar les chos de la guerre qui ait rage de lautre ctde la rontire.
Une neutralit radicale 24Des paroles ortes et des images parlantes quiillustrent la ois les consquences dvastatricesdun conit dont les civils sont les premires victimeset lapplication courageuse de la neutralit, delimpartialit et de lhumanit par les volontaires duCroissantRouge arabe syrien.
Lhumanit ondatrice 26 lheure o le Mouvement clbre son150e anniversaire, voici un regard, par les motset par limage, sur la aon dont sont perus, depar le monde, lhumanit et dautres Principesondamentaux.
150 ans daction humanitaire 28Enfn, jy suis !Des images des maniestations 150 ans et toujoursdans la course qui ont marqu, dans le monde entier,un sicle et demi dhistoire du Mouvement.
Supports dinformation 29Les dernires publications et vidos du Mouvement.
Couverture: Les personnes les plus vulnrables la poliomylitesont les enants de moins de 5 ans. Sur cette image, des agents de
sant administrent le vaccin antipoliomylitique oral un enantdans un village prs dAbuja, la capitale du Nigria.Photo : Heather Murdock/FICR. Photos sur cette page, de haut en bas : Heather
Murdock/FICR; Stephen Ryan/FICR; CroixRouge libanaise; Andrea Bruce/
NOOR; Chantal Lebrat.
SommaireNUMRO 2 . 2013 . www.redcross.int
Veuillez adresser vos articles, demandes de renseignementset toute correspondance :
Croix-Rouge, Croissant-RougeCase po stale 372, CH1211 Genve 19, Suisse.Courrie r lectronique : [email protected] n ISBN 10199349
Rdacteur en cheMalcolm Lucard
Secrtaire de rdactionPaul Lemerise
dition ranaiseDominique Leveill
MaquetteBaseline Arts Ltd., Oxord (RoyaumeUni)
Mise en pagesNew Internationalist, Oxord (RoyaumeUni)
ImpressionSur papier exempt de chlore par IRL Plus SA, Lausanne (Suisse)
Comit de rdactionCICR FICRDorothea Krimitsas Andy ChannelleSophie Orr Susie ChippendaleFlorian Westphal Pierre Kremer
Nous remercions chaleureusement les chercheurs et le personnel dappuidu CICR, de la FICR et des Socits nationales pour leur concours.
Croix-Rouge, Croissant-Rouge parat trois ois par an, en languesanglaise, arabe, chinoise, espagnole, ranaise et russe. Il est tir plus de 70 000 exemplaires et difus dans 188 pays.
Les opinions exprimes nengagent que les auteurs des articles et neretent pas ncessairement lopinion du Mouvement internationalde la CroixRouge et du CroissantRouge. Les articles non sollicitssont les bienvenus, mais ne seront pas renvoys.
La rdaction se rserve le droit de rcrire tous les articles. Les articles et lesphotographies non soumis au droit dauteur peuvent tre reproduits sansautorisation pralable; prire de citer Croix-Rouge, Croissant-Rouge.
Les cartes publies dans ce magazine ont une valeur strictementinormative et sont dnues de toute signication politique.
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1908 Identifcation du
poliovirus
Deux mdecins annoncent
Vienne que la poliomylite
est cause par un virus.
1910 Dcouverte des anticorps
Des chercheurs identient chez le
singe et lhomme des substances
1905 Dcouverte de
la nature contagieuse
de la poliomylite
Les chercheurs dcouvrent aussi
que la maladie peut tre p rsente
chez des personnes qui nesoufrent pas dune orme grave.
EN OUVRANT SA PORTE, dans son village prs
dAbuja, la capitale du Nigria, en ce jour de mai
2013, Hopset Mohammad ne stonne gure de
trouver sur son seuil un groupe dagents de vaccination
antipoliomylitique. Ce nest pas leur premire visite;
elle est toute prte les renvoyer une nouvelle ois.
Jai cinq enants, leur annonce-t-elle rement en
haoussa, sa langue natale, et aucun dentre eux na t
vaccin; pourtant, ils ne sont pas tombs malades.
Lors du dernier passage des agents, Hopset a bien
dit son mari que les gouttes de vaccin ne semblaient
pas aire de mal aux autres enants. Mais son poux artorqu que nul ne pouvait dire ce quil en serait dans
vingt ans, et il sest oppos la vaccination.
Comme la poliomylite touche surtout les enants
de moins de 5 ans, les agents de sant souhaitent sur-
tout vacciner le benjamin. Ils coutent les explications
de la mre, non sans surprise pour certains dentre eux.
Dhabitude, lorsque les parents reusent la vaccination,
cest parce quils ont entendu dire quelle va immdia-
tement nuire aux enants.
Contrari par le reus de Hopset, Rilwanu Moham-
med, secrtaire excuti du conseil rgional de soins de
sant et lun des agents, lui demande le numro de t-
lphone de son mari, et lappelle grce son tlphone
portable pour le convaincre. Ses collgues examinent
les doigts des jeunes enants passant par l; ceux qui
ont t vaccins au cours de la semaine coule portent
une marque indlbile sur un ongle.
Le pre na jamais t vaccin, annonce Rilwanu
Mohammed. Le petit est vulnrable, il aut le vacciner.
Ce risque a beau tre aible par rapport des maladies
mortelles plus courantes comme la dysenterie, le palu-
disme ou la rougeole, explique-t-il, la poliomylite peut
tre totalement prvenue. Elle peut aussi se rpandre
comme une trane de poudre; un seul cas peut provo-
quer une fambe dans la rgion.
Le sprint fnalLa plupart des gens acceptent la vaccination, mais cet
change sur le seuil de la maison de Hopset Moham-
mad est un bon exemple des di cults auxquelles se
heurtent les agents de sant, partout dans le monde,
dans la phase nale de lradication de la poliomylite.
Pour atteindre une immunit collective dans des
zones exposes cette maladie mortelle et invalidante,
le vaccin doit tre administr au moins 90 % des en-
ants, dans des communauts o lhygine est souvent
daillante, o laccs aux soins de sant est limit, et
o mdecine et vaccins se heurtent rquemment
une hostilit proondment ancre.
Pour toucher le cinquime enant comme
disent parois les proessionnels pour dsigner les 20 %
rsiduels denants vivant dans des zones distantes
I Les premiers signes
Cette stle gyptienne du XIVe sicle
av. J.C. montre un prtre avec une
canne et une dormation du pied
caractristique de la poliomylite.
lre moderne, les premirespidmies sont alimentes par
lessor urbain aprs la rvolution
industrielle.
Les agents de sant la rment : il est dsormais possible devaincre la poliomylite et de remporter ainsi le plus grandtriomphe de sant publique depuis lradication de la variole.
La goutte
ultime
Brvehistoirede la
poliomylite
Quest-ce que lapoliomylite?Cest une inection virale trs
contagieuse qui cible surtout les
personnes les plus ragiles : les
enants, les emmes enceintes et les
personnes dont le systme immu
nitaire est afaibli. Le virus apparat
gnralement dans lenvironnement
par les excrments dune personne
inecte et se rpand par leau ou
par la nourriture contamines.
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qui neutralisent les anticorps de la
poliomylite, ce qui signie quun
vaccin pourrait stimuler
la production danticorps an
de combattre la maladie.
1916 pidmie New York
New York est touche : plus
de 9000 malades, 2343 dcs.
Dans le pays entier, on compte
27 000 malades et 6000 morts.
I 1929 Le poumon dacier
Deux mdecins inventent
le poumon dacier, appareildassistance respiratoire pour les
patients atteints de poliomylite
paralytique.
1935 Des Socits nationales
aident les victimes de la
poliomylite de diverses
manires. En NouvelleZlande,
les sections de la CroixRouge se
joignent aux activits du Ro taryClub et dautres organisations
en aveur des malades.
Photo:NationalMuseumo
fHealthandMedicine
ou di ciles daccs cause du manque dinrastruc-
tures, des troubles civils ou des confits , ce type
de communication directe est indispensable. On ne
compte plus que trois pays o la poliomylite est en-
core considre endmique : lAghanistan, le Nigria
et le Pakistan. Les cas sont en gnral isols, dans des
zones bien prcises o linscurit et la violence arme
rendent di cile, voire prilleuse, toute action pour as-
surer la couverture universelle.
Cest ainsi quau Nigria, les combats dans le nord-est
du pays relguent un grand nombre de communau-
ts hors datteinte de presque toutes les initiatives de
sant. Borno et Yobe, deux des trois tats o rgne ltat
durgence, regroupent aujourdhui 69 % des cas de po-
liomylite sauvage (causs par le poliovirus sauvage,
par opposition au virus de souche vaccinale).
En parallle, certains dirigeants communautaires et
religieux connus mnent au Nigria une campagne
active contre de nombreux vaccins, et en particulier le
vaccin antipoliomylitique, a rmant (entre autres) que
la vaccination ait partie dune conspiration trangre
pour striliser les jeunes emmes.
Au Nigria et au Pakistan, les attaques directes
contre les agents de sant se multiplient. En vrier,
neu agents de sant locaux ont t abattus dans
la ville de Kano, au nord du Nigria, alors quils pr-
Les essais de vaccin
provoquent une catastrophe
Une srie dessais raliss sur
10 000 enants aux tatsUnis
cause une catastrophe : plusieurs
enants meurent, de nombreuxautres sont paralyss, tombent
malades ou soufrent de ractions
allergiques.
LLa poliomylite rappe souventles enants et ses efets invalidantspeuvent marquer leur vie toutentire. Les jeunes qui grandissentdans des condit ions dj di cilessont exposs une existencede misre et dpreuves dues la paralysie. Ici, trois jeunespoliomylitiques attendentune sance de thrapie dans un
tablissement de lorganisationStandProud Kinshasa,la capitale de la Rpubliquedmocratique du Congo. Photo :REUTERS/Finbarr OReilly
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paraient des vaccinations contre la poliomylite. Au
Pakistan, une vingtaine de personnes ont perdu la vie
depuis le mois de juillet 2012 dans plusieurs attaques
contre des quipes de vaccination.
Le paradoxe de la poliomyliteIl y a pourtant des motis despoir, malgr ces aits
tragiques. Depuis le lancement, en 1988, de lInitia-
tive mondiale pour lradication de la poliomylite, lenombre de cas a chut de plus de 99 %. On comptait
encore quelque 350 000 cas par an lpoque, alors
quils ntaient plus que 223 signals en 2012. Dans le
mme temps, le nombre de pays o la maladie est end-
mique a pass de 125 3. Aucun cas na t signal dans
lhmisphre occidental depuis vingt ans; lEurope a t
dclare indemne de poliomylite en 2002.
Et pourtant, lradication nest toujours pas au ren-
dez-vous. Des chances et des jalons essentiels ont
t manqus; la volont politique sest mousse. Cer-
tains sinterrogent : pourquoi concentrer les eforts sur
lradication dune maladie qui touche relativement
peu de personnes par rapport dautres grands aux
mortels comme le VIH, la tuberculose, le paludisme et
la dengue ?
Cest entre 2000 et 2010, une priode rustrante
durant laquelle le nombre de cas de poliomylite est
rest stable 1000 par an environ , que les par-
tenaires dans lradication de la maladie ont retenu
des leons essentielles sur cette maladie, explique
le docteur Bruce Aylward, sous-directeur gnral de
lOrganisation mondiale de la Sant (OMS) charg de
la poliomylite, des situations durgence et de la col-laboration avec les pays.
Ces enseignements ont conduit, au cours des annes
rcentes, des progrs importants qui ont relanc les
eforts mondiaux pour lradication de la poliomylite.
Nous sommes un tournant, assure-t-il. Le niveau de
volont politique et le soutien des donateurs sont sans
prcdent.
Plusieurs vnements dterminants se sont produits
depuis 2009. Une amlioration de la comprhension et
du suivi de la difusion de la maladie, la cration dun
comit de suivi indpendant qui contraint lOMS et les
gouvernements rendre compte de leur action, lenga-
gement croissant de la Fondation Bill et Melinda Gates,
la proclamation de la poliomylite comme urgence
programmatique pour la sant mondiale par lAssem-
ble mondiale de la Sant, et des avances notables
concernant les vaccins oraux contre la poliomylite.
En parallle, les eforts dradication sur le terrain
donnent aussi des raisons desprer. Ainsi, lAghanis-
tan a russi (avec laide du Croissant-Rouge aghan)
rduire ortement le nombre de cas de poliomylite
grce des dispensaires mobiles et permanents et aux
journes nationales de vaccination.
LInde est un autre exemple parlant. Lefort gigan-
tesque ralis en Inde, avec des centaines de milliers
dagents de vaccination aisant du porte--porte, a eu
un cho dans le monde entier, assure Bruce Aylward.
Puis [en 2011], lInde a interrompu la transmission de la
poliomylite. Ce ut un vnement de grande porte :
chacun a alors compris que la tche tait possible...
alors que nombreux taient ceux qui pensaient quelInde ny parviendrait jamais.
Llan na cess, depuis, de sampliier. Au mois
davril, des dirigeants du monde entier taient runis
Abou Dhabi, avec des donateurs, loccasion du Som-
met mondial sur les vaccins, pour approuver un plan
de six ans, dot de 5,5 milliards de dollars .-U., qui vise
lradication de la poliomylite dici 2018. Les dona-
teurs se sont dj engags couvrir les trois quarts du
montant prvu; la Fondation Bill et Melinda Gates a
ainsi promis 1,8 milliard de dollars. Bill Gates sest joint
dautres protagonistes dont la FICR pour ap-
peler dautres donateurs couvrir la somme restante
(1,5 milliard de dollars). Michael Bloomberg, magnat de
la presse et maire de New York, sest engag depuis
hauteur de 100 millions de dollars.
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1949 Identifcation de trois
types de poliovirus
1952 Flambes de poliomylite
57 628 cas sont signals aux
tatsUnis, dont plus de 21 000 casde poliomylite paralytique. La
CroixRouge amricaine secourt les
victimes dans divers hpitaux et
1955 Annonce des rsultats
Les essais montrent que le vaccin
a une ef cacit de 80 9 0 %. Il est
largement distribu et utilis.
1957 Test dun vaccin oralau Congo belge
Le pays (lactuelle Rpublique
dmocratique du Congo) entre
Avec un peu
daide, je pourrais
retourner lcole et
cesser de mendier.
Oumar Mahmoud,
poliomylitique g de 20 ans,
qui mendie en se dplaant
sur une planche roulettes de
sa abrication dans un march
bond Abuja (Nigria)
LDans les zones de conit, laneutralit et limpartialit duMouvement sont des atouts cls.Le CroissantRouge aghan, par
exemple, pratique rgulirementla vaccination dans descommunauts dchires par laguerre. Le CICR joue aussi un rleen acilitant laccs aux agents desant. Photo : FICR
Photo:AFPImageFo
rum
centres communautaires.
I 1954 Essais de vaccin
grande chelle aux tats-Unis
Plus de 1,3 million denants y
participent. Cicontre, un enantest vaccin tandis quil regarde le
concepteur du vaccin, Jonas Salk,
vacciner un enant la tlvision.
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ensuite dans une priode de
troubles politiques et sociaux,
ce qui complique le suivi des
personnes vaccines. Aprs une
pidmie en Hongrie, la Ligue
des Socits de la CroixRougelance un appel pour que la
CroixRouge hongroise reoive
en prt des poumons dacier et
autres dispositis dassistance
respiratoire.
1962 Le rle du Mouvement
se renforce
Avec la multiplication descampagnes de vaccination, le rle
des Socits nationales prend
de limportance. La CroixRouge
cubaine, par exemple, participe
une campagne qui touche prs de
1,9 million denants.
1979 radication
de la varioleCette maladie mortelle, qui aurait
ait entre 300 et 500 millions de
morts au XXe sicle, devient la
premire maladie inectieuse
radique grce des campagnes
massives de vaccination.
1985 Proclamation de
lobjectif de lradication dansles Amriques avant 1990
Bien que le programme mondial dradication de
la poliomylite ne soit pas entirement nanc, lra-
dication de la maladie est possible, en croire Carol
Pandak, la directrice du programme PolioPlus de Ro-
tary International, un acteur important et de longue
date de la lutte contre la poliomylite. Il audra plus que
de largent, cependant, pour parachever cette tche,
prvient-elle.
Lorsque des oprations militaires sont en cours, lescampagnes de vaccination sont di ciles, explique-t-
elle. cela sajoutent des questions de gographie : il y
a des communauts rurales trs isoles qui nont pour
ainsi dire jamais bnci dinterventions sanitaires.
Ajoutons cela qu notre poque de grande mobi-
lit, la poliomylite voyage. Quelques semaines aprs
le Sommet mondial sur les vaccins, deux nouvelles
ambes se produisaient au Kenya et en Somalie, dans
des zones do la maladie avait disparu, mais o les ni-
veaux de vaccination taient aibles. La FICR a attribu
la Croix-Rouge du Kenya 147 000 dollars du Fonds
durgence pour les secours lors de catastrophes an
de soutenir la vaccination antipoliomylitique dur-
gence dans cinq districts (y compris dans le camp de
rugis de Dadaab). Plus de 1000 volontaires, rpartis
en quipes de 20, ont ait du porte--porte, visitant
glises, mosques et centres communautaires pour
difuser le message et prenregistrer les enants.
Pour Siddharth Chatterjee, diplomate en che et di-
recteur des partenariats stratgiques la FICR, cette
raction rapide montre comment le rseau de volon-
taires du Mouvement, ortement implant dans les
communauts, peut rapidement toucher des collecti-vits di ciles daccs. La campagne dradication de
la poliomylite peut aussi, selon lui, aider la FICR et les
Socits nationales renorcer les premiers secours
assise communautaire et les systmes de soins destins
aux personnes les plus vulnrables.
En nous associant cet efort, nous pouvons aussi
renorcer la valeur des systmes de sant commu-
nautaires et amliorer le taux de vaccination contre
dautres maladies, ce qui amliorera ltat de sant, les
moyens dexistence et le dveloppement humain de
base des groupes les plus vulnrables.
Oublier la mendicitTout comme les philanthropes denvergure mon-
diale, les organisations de sant et les humanitaires,
les jeunes poliomylitiques des rues dAbuja (Nigria)
lancent aussi, une chelle bien plus modeste, des
appels aux donateurs.
Oumar Mahmoud, 20 ans, circule dans les alles
bondes du march sur une planche roulettes
conectionne par ses soins, des sandales roses aux
mains pour les protger du contact avec le sol, tout en
demandant laumne . Ses jambes, inertes depuis sa
petite enance, sont replies sous son corps. Commebien dautres poliomylitiques, il na pu trouver dautre
occupation que la mendicit. Avec un peu daide, je
pourrais retourner lcole et cesser de mendier.
Certaines victimes de la maladie reoivent un sou-
tien dans des centres orthopdiques (dont certains
administrs par le CICR dans des pays comme lAgha-
nistan, le Pakistan et le Soudan du Sud), mais ces
services sont loin dtre universels. Pour bien des ma-
lades, la poliomylite est une condamnation une vie
de pauvret, de mendicit et dpreuves.
Lradication cote cher, mais nombreux sont ceux
qui voquent les cas tels que celui dOumar pour mon-
trer que le cot de la maladie, long terme, est encore
bien plus lev. En 2010, la revue Vaccine crivait
quen termes conomiques, lradication permettrait
dconomiser entre 40 et 50 milliards de dollars dici
2035, en vitant 8 millions de cas de paralysie. Et le
jour o plus aucun cas ne sera signal, ajoute Bruce
Aylward, ce bnce deviendra permanent.
Dans son bureau dAbuja, Javier Barrera, qui dirige
la dlgation de la FICR au Nigria, explique quen ce
moment, les organisations humanitaires sont galvani-
ses, en partie parce quun rve qui paraissait utopique un monde dlivr de la poliomylite pourrait
maintenant tre porte de main. On sent que le but
est proche et que nous pourrions ranchir un tournant
dans lhistoire de laction humanitaire.
Pourquoi la poliomylite ?Pour que ce rve se ralise, cependant, il audra redou-
bler deforts pour convaincre la population daccepter
la vaccination. La raison la plus courante du reus dans
certaines communauts, explique Javier Barrera, est la
dance lgard des agents de sant qui proposent
un vaccin contre une maladie rare mais ne proposent
pas daide pour des maux courants.
On nous dit : Pourquoi insistez-vous autant sur la
polio alors que mon enant est mort de diarrhe ? Cer-
Lradiquer la poliomylite exigede la persvrance. Contrari parle reus de la mre dautoriser lavaccination de son fls, Rilwanu
Mohammed, le secrtaire excutidun conseil rgional de sant duNigria, appelle le pre de lenantpour obtenir son consentement.Photo : Heather Murdock / FICR
On nous dit :
Pourquoi insistez-
vous autant sur
la polio alors que
mon enfant est
mort de diarrhe ?
Certaines personnes
sindignent. Il
faut tenir compte
des besoins des
communauts.
Javier Barrera, che de la
dlgation de la FICR au Nigria
1988 Lancement de lInitiative
mondiale pour lradication
de la poliomylite
LInitiative appelle lradication de la
maladie avant lan 2000. lpoque,
la poliomylite est endmique dans125 pays, mais a dj disparu aux tats
Unis, au RoyaumeUni, en Australie et
dans une grande partie de lEurope.
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taines personnes sindignent. Il aut tenir compte des
besoins des communauts.
Au rez-de-chausse du bureau de la Croix-Rouge du
Nigria, les agents de sant conrment que sils avaient
les moyens de rpondre dautres problmes de sant
comme le paludisme, qui tue chaque anne des
centaines de milliers de Nigrians , il leur serait plus
acile de combattre la poliomylite.
On peut cependant convaincre les gens daccepterla vaccination, assurent-ils, par des campagnes duca-
tives. Les quipes antipolio sont prcdes, dans les
agglomrations et les villages, par des volontaires de
la Croix-Rouge du Nigria qui sy rendent avec mga-
phones, slogans et photographies denants victimes
de la maladie. Ce nest pas que les villageois
soient vraiment ignorants, explique le docteur
Alatta Ogba Uchenna, qui dirige le dpar-
tement des soins de sant de la Socit
nationale, mais ils ne disposent pas de
ces inormations prcises.
tant donn la dance prsente
dans de nombreuses commu-
nauts, la meilleure manire de
procder, selon certains experts,
serait dintgrer la vaccina-
tion antipoliomylitique
lexpansion et
lamlioration de
1994 radication
de la poliomylite
dans les Amriques
2000 Le nombre de cas rduit
de 99 %On ne compte que 719 cas en
2000 contre 350 000 en 1988.
2001 Lengagement de la
CroixRouge et du Croissant
Rouge ne faiblit pas. La FICR et
le CroissantRouge du Pakistan,
par exemple, uvrent avec
leurs partenaires pour atteindrelobjectif dun Pakistan dlivr de
la poliomylite en 2005.
2002 radication de la
poliomylite en Europe
2009 La CroixRouge du
Nigria participe des journes
nationales de vaccination. Ellemobilise plus de 1600 volontaires
pour vacciner 70 000 enfants dans
22 tats haut risque.
I 2010 Flambe en
Rpublique du Congo
476 cas de paralysie et 179 dcs
sont signals. Une campagne
de vaccination lance avec
lassistance de la FICR touche plusde 2 millions de personnes.
La poliomylite
en chifres La maladie touche principalement les enfants
de moins de 5 ans. Une infection sur 200 aboutit une paralysie
irrversible. 5 10 % des personnes paralyses meurent
lorsque leurs muscles respiratoires sonttouchs.
On distingue trois types de poliovirus sauvage(types 1, 2 et 3). Le virus de type 2 na plus t
signal depuis 1999.Source : Organisation mondiale de la Sant
soins de sant communautaires grande chelle.
Les campagnes dradication sont souvent des pro-
jets ponctuels verticaux, dans lesquels les volontaires
ou les agents de sant vont de maison en maison ou
organisent de grandes maniestations axes exclusi-
vement sur la poliomylite pendant un ou deux jours
dans un village. Cette dmarche a t trs e cace dans
certaines zones, mais les lieux o la maladie persiste
encore exigent sans doute une dmarche difrente,suggre le docteur Terhi Heinsmki, coordonnatrice
de sant de la FICR pour la zone Asie-Pacique, qui en-
globe lAghanistan et le Pakistan.
Les programmes verticaux peuvent porter des
ruits dans un pays comme lInde, pargne par les
conits, dit-elle. En revanche, quand des hostilits
ont rage, ou quand les problmes de scurit ou la
rticence des communauts nous barrent la route, une
dmarche plus globale devient ncessaire.
Avant toute chose, il aut gagner la conance de la
communaut. Pour cela, il aut couter les habitants et
soccuper des autres problmes de sant qui les proc-
cupent; la vaccination antipoliomylitique peut alors
tre incluse dans ces mesures.
Dautres questions mritent rexion, selon cer-
taines des personnes consultes pour cet article. En
consacrant notre temps et nos ressources la tche
coteuse dradiquer la poliomylite, plutt que de la
contenir, nallons-nous pas manquer de moyens pour
combattre des maladies plus meurtrires, compromet-
tant notre impartialit et la priorit due aux personnes
les plus vulnrables, tout cela au nom dun objecti in-
ternational de sant publique ? Par ailleurs, les efortsdradication de la poliomylite ne pourraient-ils pas
contribuer renorcer et tendre les systmes de sant
locaux pour amliorer luniversalit de tous les services
de sant pour les populations vulnrables ?
Ces deux options ne sexcluent pas ncessaire-
ment. Le plan stratgique de lInitiative mondiale pour
Laccs au
cinquime enfant :
voil lacquis de
la lutte antipolio
que nous devons
prserver.
Bruce Aylward, sousdirecteur
gnral de lOMS charg de la
poliomylite, des situations
durgence et de la collaboration
avec les pays
Photo
:FICR
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
Nombredecasde
poliomylite(enmilliers)
radication de
la poliomylite
de type 2
400
300
200
100
0
-
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2011 Campagne massive
en Inde
La CroixRouge de lInde participe
deux journes nationales de
vaccination; prs de 2,5 millions
dagents touchent 172 millionsdenants.Le pays enregistre son
dernier cas de poliovirus sauvage.
I 20122013 Seuls 5 pays ont
signal des cas en 2012, contre 16
en 2011, mais les assassinats
cibls dagents de vaccination
au Pakistan et au Nigria (ainsi
que la multiplication dautresincidents violents) ont peser
de nouvelles menaces sur les
campagnes de vaccination.
Mai 2013 LAssemble mondiale
de la sant adopte un nouveau
plan pour librer le monde de la
poliomylite dici 2018 et lance
un appel pressant sa mise en
uvre et son nancement. Dansle mme temps, une nouvelle
ambe dans la Corne de lArique
(Somalie et Kenya) est conrme.
lradication de la poliomylite voque la ncessit
damliorer la sant communautaire par la vaccination
de routine et par ldifcation de systmes durables de
sant publique.
Bruce Aylward, pourtant, la rme : il ne su t pas
damliorer les services de sant et de maintenir un
programme rgulier de vaccination. Lradication
consiste toucher des enants auxquels personne
dautre na accs, martle-t-il. Et nous devons mettre
dans les mains des communauts les outils qui leur per-
mettront de vacciner leurs enants.
Cest ici que la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge
sont infniment prcieux, poursuit-il en voquant lim-
plantation communautaire du rseau de volontaires du
Mouvement.
Bruce Aylward reconnat que la aon dont cer-
taines campagnes ont t menes a pu, dans certainesrgions, susciter la dfance. Si les thories du com-
plot ont pu prendre racine, il aut y voir un chec du
programme antipoliomylitique de lOMS, dit-il, en
ajoutant quil accepte une critique ormule rcem-
ment par le comit de suivi indpendant de lInitiative
mondiale pour lradication de la poliomylite : les ac-
tivits de lOMS en matire de communication avec les
communauts touches laissent dsirer.
Il admet cependant aussi quil ne su t pas, une ois
vaccin le cinquime enant contre la poliomylite,
de tourner les talons. On ne peut pas, le programme
termin, boucler ses valises et rentrer chez soi. Tout cela
doit dboucher sur autre chose, a rme Bruce Aylward.
Laccs au cinquime enant : voil lacquis de la lutte
antipolio que nous devons prserver.
La dernire ligne droiteAu bureau de la Croix-Rouge du Nigria Kaduna,
Bright Charles, le coordonnateur charg de la gestion
des situations durgence dans ltat, ajoute que les
combats et les catastrophes naturelles psent aussilourdement sur les initiatives sanitaires. Les agents
de sant ne peuvent pas parcourir les villages pour
toucher les enants sous les tirs, sous les bombes ou
pendant les inondations.
Quand survient une catastrophe, explique-t-il, les
tournes de vaccination sont interrompues. Les en-
ants risquent davantage de tomber malades dans des
camps surpeupls et sans hygine aprs avoir ui la ca-
tastrophe. Touteois, ajoute-t-il, ces camps accueillent
souvent des personnes venues de zones priphriques,
et les agents de vaccination ont parois pu saisir loc-
casion pour vacciner des enants en nombre pendant
quils attendaient la dcrue ou la fn des combats.
Cependant, mme dans les zones du nord du Nig-
ria, su samment sres pour pratiquer la vaccination,
lidologie des opposants la vaccination augmente
aussi le nombre de amilles qui sopposent au vaccin.
Il arrive que les habitants enerment les enants cl
dans une pice, raconte Baupme, lun des volontaires
qui stationne devant la maison de Hopset. Nous leur
disons : je sais que vous avez des enants lintrieur.
Rilwanu Mohammed vient dachever sa conversation
tlphonique avec le mari de Hopset, et il rend comptede lchange Hopset, qui lcoute patiemment avant
de parler son mari son tour.
Sa permission obtenue, elle donne son accord;
les agents entourent alors le plus jeune des enants.
Une emme lui tient la bouche ouverte tandis que
Baupme y ait tomber les gouttes de vaccin. Une larme
mouille les yeux de lenant, mais ds que le got
amer sestompe, il retrouve son calme et les adultes le
rendent sa mre.
Heather Murdock
Journaliste indpendante base Abuja (Nigria).
Sources:Collegeof
Physicians,
Philadelphie;
archivesdelOMS,d
elaFICRetduCICR.
LLorsquune ambe depoliomylite sauvage a rapp laSomalie et le Kenya en avril 2013,plus de 1000 volontaires de laCroixRouge du Kenya se sontdploys, par quipes de 20,pour se rendre de maison enmaison ainsi que dans les glises,les mosques et les centrescommunautaires, an de difuserlargement linormation et d eprenregistrer les enants en vuede la vaccination.Photo : CroixRouge du Kenya
Photo:REUTERS/FaisalMahmood
2000
2001
2002
2003
2004
2005
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RAM VIT DANS UN BIDONVILLE URBAIN
dAmritsar, dans ltat du Pendjab, au nord-
ouest de lInde. g de 24 ans, il partage avec
ses parents, sa sur et les deux enants de celle-ci une
pice sans entre, aux murs de brique, o sont aligns
trois lits. Il ait 48 C dans la pice; dans un coin, un ven-
tilateur brasse lair brlant.
Jai attrap la tuberculose en minjectant de la
drogue, explique Ram, qui a par la suite t diagnos-
tiqu sropositi au VIH. En plus, je umais du tabac et
je consommais dubhang [une drogue base de canna-
bis]. Je me suis drogu pendant trs longtemps... Voilsix ou sept mois que jai arrt.
Le pre de Ram a soufert lui aussi de la tuberculose
voici quelques annes, mais il a suivi son traitement
jusquau bout et a guri, alors que Ram na pas termin
son premier cycle de traitement.
Javais limpression que les mdicaments me ai-
saient du mal, quils mafaiblissaient de jour en jour,
dit-il. Son tat saggrava au point quun jour sa amille
lemmena dans un hpital public pour tuberculeux.
Aprs de nouveaux examens, Ram apprit quil tait
porteur du VIH; les mdecins lui prescrivirent alors
un nouveau rgime de pilules, coupl des injections
pour combattre la ois le VIH et la tuberculose.
De nombreuses raisons peuvent pousser les tuber-
culeux interrompre leur traitement. Parois, ds quilscommencent se sentir mieux, ils pensent que les soins
ne sont plus ncessaires. Pour dautres, cest cause
des efets secondaires ou de la di cult de poursuivre
Les volontaires de la Croix-Rouge de lInde aident
combattre une maladie
pernicieuse, mais aussi
lopprobre parfois mortel
qui laccompagne.
Visites domicile
l LGurpreet, volontaire de laCroixRouge de lInde, arpente lesbidonvilles dAmritsar, une villede ltat du Pendjab, pour rendrevisite des tuberculeux commeRam, qui a aussi contract le VIHen sinjectant des stupfants.Photo : Stephen Ryan/FICR
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Gurpreet, un homme dans la trentaine, portant barbe et
moustache bien tailles. Cest lui qui a aid Ram trou-
ver un traitement de substitution lorsque, trop afaibli, il
avait du mal sinjecter les mdicaments.
Je ne pouvais plus subir de piqres, je navais plus
que la peau sur les os, explique Ram. On ma donn
des pilules, avec des instructions sur le moment de les
prendre. Jai aussi reu des repas nourrissants. Gurpreet
ma appris comment viter de transmettre la maladie.
La plupart du temps, je porte un masque; je lenlve
quand je suis seul.
Ram est rle, mais rsolu vaincre sa maladie. PourGurpreet, Ram est consciencieux, il prend ses mdica-
ments et il veut gurir. Cest assez pour mencourager
consacrer du temps ce travail.
les soins lorsque surviennent dautres problmes (ch-
mage, dpendances, manque de nourriture).
Or, interrompre le traitement est extrmement
risqu. Si la bactrie de la tuberculose survit un
traitement partiel, elle peut devenir rsistante aux
mdicaments antituberculeux. Cette souche (dite
tuberculose multirsistante) exige alors deux ans de
traitement et les soins sont 100 ois plus coteux.
Cest ici quinterviennent des personnes comme Gur-
preet, lun des nombreux volontaires de la Croix-Rouge
de lInde qui anime le programme national contre la tu-
berculose, et lun des dix volontaires actis Amritsar.Je rends visite aux patients en principe au moins une
ois par semaine, mais dans le cas de Ram, il arrive que je
passe le voir deux ou trois ois en une semaine, raconte
Lampleur du
problme est
colossale. Prs
de 40 % des
habitants de lInde
sont porteurs de
tuberculose latente,
ce qui signife que
la maladie risque
de se dclarer si
leur immunit
aiblit ou sils sont
atteints dune autre
inection.
S.P. Agarwal, secrtaire
gnral de la CroixRouge
de lInde
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Une visite domicile avec GurpreetJe ne sais jamais lavance combien de temps va durer
une visite, dit Gurpreet. Je commence toujours par
prendre des nouvelles des gens avant de vrifer leurs
fches et leurs plaquettes de pilules. Je suis l comme
un ami; sils ont un problme, ils men parlent.
Gurpreet est originaire dAmritsar. Faire partie de la
communaut est utile, car les gens lui ont confance.
Les volontaires comme lui servent de lien entre les per-sonnes risque et le systme o ciel de sant, explique
Naresh Chawla, responsable de district pour la tubercu-
lose du dpartement de la sant du Pendjab Amritsar.
Si vous appelez un patient par son prnom
lorsque vous arrivez chez lui, il se sent rassur, ex-
plique Naresh Chawla. Ce sont des petites choses qui
sont utiles. Cest ici que la Croix-Rouge a un avantage.
Le patient sent quon soccupe de lui, il a lassurance
que tout ira bien.
Comme le dit Gurpreet, la confance est essentielle.
Certains patients tiennent ce que nul ne sache quils
suivent un traitement, cause de la stigmatisation
quentrane la maladie. Si un patient est absent lors
de ma visite, je ne peux pas demander aux voisins sils
savent o il est ou sil reviendra bientt. Cela soulve-
rait des questions auxquelles je ne peux pas rpondre
sans enreindre mon devoir de confdentialit.
Pour les cas traits par la Croix-Rouge de lInde, le
taux de respect du traitement atteint 93 %. Cest la
preuve que les mesures de la Croix-Rouge, comme les
visites domicile et lorganisation du transport pour
avoir accs aux soins et aux examens en cas de besoin,
ont des rsultats positis.Il arrive aussi que les patients cherchent nous aire
croire quils suivent leur traitement alors que ce nest
pas vrai, ajoute Gurpreet. Cest surtout cause des e-
ets secondaires. Dans ce cas, nous devons motiver le
patient et lui aire comprendre les risques quil encourt.
La motivation peut aiblir, donc nous devons leur parler
rgulirement pour quils tiennent bon.
Le secret de MahiDans le quartier, personne ne sait que jai la tuber-
culose, dit Mahi (23 ans), une jeune flle menue et
rserve.
Ses proches gardent le secret car si la nouvelle se r-
pandait, les perspectives de mariage de Mahi seraient
rduites nant. Depuis que nous avons appris quelle
tait malade, mon ardeau sest alourdi, explique son
pre. Cest une flle, il aut la marier.
Dans une socit o le mariage peut tre crucial
pour la survie de lindividu et de la amille, lopprobre
li la tuberculose a un cot social exorbitant : chaque
anne, plus de 100 000 emmes sont rejetes par leur
amille. Pour une jeune flle en ge de se marier, la tu-
berculose peut avoir des consquences dramatiquessur ses perspectives dunion. Une emme marie peut
se voir chasse de son oyer ou traite rudement par
sa belle-amille.
Cest donc dans un minuscule dispensaire du dis-
trict de Jalandhar, dans ltat du Pendjab, que nous
rencontrons Mahi. Sa amille ne souhaite pas de vi-
sites domicile. Elle vient chercher ses mdicaments
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Dans le Pendjab,
nous avons trois
grands problmes :
la pauvret, la
toxicomanie et le
chmage. Pour
nous, la tuberculose
constitue une grave
menace, mais pour
une personne qui
na rien manger,
une seule chose
compte : trouver
de la nourriture.
Prendre ses
mdicaments ne
deviendra une
priorit pour
elle que si nous
assurons sa scurit
alimentaire.
Naresh Chawla, responsable
de district pour la lutte contre
la tuberculose, Dpartement de
la sant du Pendjab, Amritsar
(Inde)
Un mal quon peut prvenir et soignerPrs de 2 millions de personnes contractent la tuberculose chaque anne en Inde. La plupart dentre elles appartiennent auxgroupes les plus davoriss. La tche est donc colossale. La CroixRouge de lInde a jou un rle modeste, mais important dans le
programme national rvis de lutte contre la tuberculose, en ocalisant les eforts sur les mesures destines encourager le strictrespect du traitement par les patients dits de catgorie II : ceux qui, pour diverses raisons, interrompent leur traitement avant la
gurison ou qui rechutent aprs la n du traitement.La tuberculose est lune des maladies les plus di ciles vaincre car le traitement est long (six huit mois en gnral). Mme dans des
circonstances idales, les malades nobservent pas toujours leur traitement avec diligence. Le risque dinterruption du traitement, qui avorisele dveloppement dune orme multirsistante de la maladie, augmente pour les personnes qui luttent pour survivre jour aprs jour.
Cest pourquoi les volontaires actis dans la communaut se rendent au domicile des patients pour veiller ce quils respectent lesinstructions. Le programme est en cours dlargissement, mais il reste relativement modeste. Au total, la CroixRouge de lInde soutient
1180 tuberculeux dans sept tats (Bijat, Gujarat, Haryana, Karnataka, Odhisa, Pendjab et Uttar Pradesh). Il est di cile de aire plus, car leniveau individuel de soins et dattention accords par les volontaires exige ormation, patience et beaucoup de temps.
Comme lexplique S.P. Agarwal, le secrtaire gnral de la CroixRouge de lInde, il aut absolument tendre ces activits;cest une question de moyens. Les volontaires sont enthousiastes, ils veulent travailler. Lun de nos principaux atouts, ce sont les
personnes qui ont guri grce ce programme : nous les encourageons devenir des volontaires, et elles nous aident.
LPour de nombreuses jeunesemmes comme Mahi, ge de23 ans, la stigmatisation associe la tuberculose peut anantir touteperspective de mariage, mmeaprs une gurison complte.ICest pourquoi la condentialitdes inormations et la discrtiondes volontaires et des agentsde sant sont essentielles. Lespatients prrent souvent serendre dans des dispensaires telsque celuici plutt que de prendrele risque de recevoir domicile desagents de sant.Photos : Stephen Ryan/FICR
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ici chaque semaine avec son pre. Le mdecin est
discret, les autres patients ne savent pas pour quelle
maladie nous venons... Il sagit de lavenir de ma lle,
explique le pre.
La stigmatisation est un ennemi redoutable. En plus
des campagnes menes dans les mdias par le gou-
vernement et par dautres organisations de sant, les
volontaires de la Croix-Rouge de lInde organisent
des maniestations comme des spectacles de magie,du thtre de rue et des assembles communautaires
dans des zones urbaines et suburbaines pour sensibi-
liser la population.
Ces eforts ont un impact indniable, a rme Naresh
Chawla. Grce eux, les attitudes ont volu au cours
des dix dernires annes. Pour les jeunes lles, pour-
tant, le problme demeure. Les amilles ne veulent pas
de soins visibles au seuil de leur maison, explique-t-il.
Elles ne veulent pas que les botes de mdicaments qui
portent leur nom soient amenes aux centres de trai-
tement sous surveillance directe, o les patients sont
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suivis pour vrier quils prennent leurs mdicaments.
Elles ne veulent pas de visite domicile du mdecin
ou du personnel du centre, pour ne pas gcher les
perspectives de mariage.
Pauvret, violence et confdentialitNous avons du mal joindre les deux bouts, explique
Varsha, qui ond en larmes en racontant son histoire.
Ma lle a 18 ans. Elle travaille et ramne un peu
dargent la maison pour que nous puissions manger
et payer le loyer.
Personne dautre, dans la amille, ne gagne de
largent. Le ls de Varsha, qui a 21 ans, est n avec un
seul rein et un seul poumon. Il se atigue trs vite et ne
peut pas travailler. Son mari, qui tirait un rickshaw, est
mort de la tuberculose. Il reusait de porter un masque
ou de protger sa amille par dautres moyens; il a ainsi
transmis le mal Varsha et leur lle. Si je lui disais
quoi que ce soit, il buvait et me disputait. Il a soufertun an ou deux, puis il est mort, explique Varsha. Sa lle
a t soigne et a guri, mais comme lexplique Varsha,
il est beaucoup plus di cile de gurir de la tuberculose
quand on est pauvre.
Les mdicaments que je prends sont trs orts. Pour
les supporter, il aut bien se nourrir. Personne [dans la
amille] na un revenu convenable, comment pour-
rais-je manger correctement ?
Varsha a d en outre aire de gros eforts pour se
protger et pour prserver sa amille de lopprobre.
Cest lune des raisons qui rendent si essentiels la con-
dentialit et le proessionnalisme des volontaires de la
Croix-Rouge. Parmi les volontaires de la Croix-Rouge, il
y a danciens patients tuberculeux, qui comprennent
particulirement bien la ncessit de combattre les
ides ausses et de rduire lopprobre de lentourage
amilial et social.
Personne dans le quartier ne savait que ma lle
[ou moi] avions la tuberculose, dit-elle. Si quelquun
demandait aux volontaires qui ils taient, ils rpon-
daient quils venaient pour la compagnie dlectricit.
Les volontaires de la Croix-Rouge ont prserv la con-
dentialit.
Aradhna Duggal
Auteur et rdactrice indpendante base Genve (Suisse).
Une lutte mene depuis 1930Pour la CroixRouge de lInde, la lutte contre la tuberculose ne date pas dhier. La Socit
nationale combat la maladie depuis 1930, date laquelle un onds, c r pour commmorerla gurison de Sa Majest le Roi Empereur dune grave maladie, lui ut conf pour soutenir des
campagnes dducation contre la tuberculose, comme la relat Norah Hills, la secrtaire de laSocit nationale de lpoque. La premire campagne ut mene par un comit local. Un flm
sur la tuberculose, qui insistait sur les soins prcoces, ut aussi produit. La maladie tait trs
rpandue en Inde en raison de la surpopulation et du manque dhygine dans les habitations.On manquait aussi gravement lpoque de place dans les sanatoriums : en 1930, on comptaitmoins de 1000 lits pour 350 millions dhabitants.
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Focus
La stigmatisation peut revtir bien des visages et peut souvent tuer. Dans certainesrgions, les personnes vivant avec le VIH sont victimes dune vritable exclusionsociale qui les dissuade de se aire soigner. Selon lindicateur de stigmatisationdes personnes vivant avec le VIH, 20 % des personnes sropositives interroges au
Rwanda ont dj subi des violences physiques en raison de leur statut; le chifreatteint 25 % en Colombie. Ailleurs, les personnes qui contractent la tuberculose enprison peuvent tre victimes de discrimination plusieurs titres. leur libration,elles peuvent tre rejetes par leur amille, par des employeurs potentiels, voire pardes agents de sant, cestdire par les structures mmes qui sont censes aiderles malades respecter leur traitement et empcher la difusion de la maladie. LeMouvement de la CroixRouge et du CroissantRouge soppose la stigmatisationde diverses manires : parois haut et ort par des campagnes publiques, paroissilencieusement par des entretiens avec des dirigeants communautaires, desresponsables de prisons ou des parents de personnes malades. Ces photographies
dpeignent certaines des manires dont l opprobre peut tuer, et comment leshumanitaires agissent pour sauver des vies en bousculant les tabous, en difusantlinormation et en combattant lexclusion.
KStigmatis ds la naissance : Ei Ei Phyu, porteur du VIH, dort d ans un hamac suspendu dans un hospice pour sropositis et malades du sida de la banlieue de Yangon (Myanmar),o il vit avec sa mre, elle aussi porteuse du virus. cause du manque dinormation, de la stigmatisation et dautres acteurs, les personnes atteintes du VIH/sida sont souvent isoles dansdes dispensaires et coupes de la socit. Photo : REUTERS/Damir Sagolj
Quandlopprobre
tue
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IDans de nombreuses cultures, laconsommation de drogues par les emmesest particulirement mal vue. Ici, uneemme mdecin aghane explique ungroupe de emmes toxicomanes commentutiliser des prservatis lors dune sancedinormation au centre de rducationpour toxicomanes de Nejat, un organismenanc par les Nations Unies pour ournirdes services de rduction des risques et d esensibilisation au VIH/sida Kaboul. EnAghanistan, les opiacs sont utiliss depuislongtemps des ns mdicales, mais depuisquelques annes, leur usage rcrati est enaugmentation. Photo : REUTERS/Ahmad Masood
JLa rprobation sociale quientoure la consommation destupants rend souvent di cilela rinsertion et un mode devie sain. Him est un ancientoxicomane; il vit maintenantdans un centre de rducation Siem Reap (Cambodge). Ce
centre, soutenu par la CroixRougecambodgienne, ofre un appuipsychologique et des services deormation proessionnelle. Lespensionnaires peuvent suivreun apprentissage de coifeur,pratiquer le sport, la sculpture, lamusique et lartisanat.Photo : Benot MatshaCarpentier/FICR
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IDans le centre de transit Don Bosco, Goma (Rpublique dmocratique duCongo), cette emme sropositive posepour une photographie pendant unemaniestation de sensibilisation au VIH/sida
organise par le CICR en dcembre 2011.Photo : Phil Moore/CICR
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Focus
L Dans de nombreux pays touchs par les conits, les enants qui ont t enlevs par des groupes arms pour devenir des combattants ou des esclaves sont souvent rejets lorsquilsregagnent leur village. Cet ancien enant soldat g de 14 ans pose pour le photographe dans un centre dorientation et de transit pour enants associs des groupes arms Goma, dansle NordKivu (Rpublique dmocratique du Congo). Photo : Phil Moore/CICR
I Dans la province du SudKivu(Rpublique dmocratique duCongo), des emmes prsentent une
pice de thtre pour sensibiliser lepublic aux consquences du viol etdes violences sexuelles. Dans cettescne, les parents dune victimede viol seforcent de rconorterleur lle. Les victimes de violencessexuelles sont doublementvictimes, car elles sont souventrejetes par leur amille et par leurcommunaut. Des reprsentationsde ce genre aident lu tter contrela stigmatisation. Dans ce paysdArique centrale, le CICR soutientaussi plus de 40 maisons dcoute :il sagit de lieux o les emmespeuvent exprimer leur dtresse etrecevoir de laide sans craindre larprobation. Photo : Pedram Yazdi/CICR
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LLes personnes victimes de discrimination et dexclusion sociale cause de maladies telles que leVIH/sida ont besoin, en plus de laide mdicale, de divers types dappui pour rester en bonne sant.Khuyen et son mari Do sont tous deux sropositis. Ils sont membres actis dun groupe qui ofre des
sances dorientation aux personnes vivant avec le VIH lhpital de Hai Phong (Viet Nam). Le groupe,qui bncie de lappui nancier et technique de la CroixRouge du Viet Nam et de la CroixRougeamricaine, dispense aussi des cours de jardinage, de couture et dagriculture aux personnes vivantavec le VIH pour leur permettre de gagner de largent. Photo : Benot MatshaCarpentier/FICR
LCombattre lexclusion et la discrimination exige du courage de la part despersonnes qui prennent publiquement la dense des victimes. Peati Malaki enest un bel exemple. Responsable du VIH au sein de la CroixRouge de Samoa,
elle est la seule personne des Samoa avoir publiquement ait tat de sasropositivit; elle mne des campagnes de sensibilisation dans les coles et lorsde maniestations communautaires. Photo : Benot MatshaCarpentier/FICR
K Le combat contre les prjugs et la maladie commence tt, avec des messages positis destins aux jeunes sur la prvention et le traitement du VIH. En mai 2013, les volontaires de la CroixRouge de Kiribati ont jou des pices de sensibilisation au VIH pour duquer et inormer les communauts. Photo : Benot MatshaCarpentier/FICR
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PLUS DE SIX MOIS aprs la prise de villes et decits cls dans le nord du Mali par les orcesranaises et maliennes, de nombreuses partiesde ce pays ravag par la guerre et la scheresse ont re-
trouv un ragile semblant de stabilit.
Quelque 7000 soldats dune orce rgionale aricaine
se sont joints aux soldats maliens pour combattre les
groupes dopposition arms, tandis quune mission de
maintien de la paix des Nations Unies devait tre d-
ploye en juillet.
La vie, pourtant, est loin dtre revenue la nor-
male. Un nombre limit de personnes dplaces
commencent regagner leurs oyers, mais elles sont
sans ressources, et elles retrouvent parois des maisons
pilles, explique Attaher Maga, che de la sous-dl-
gation du CICR Gao (nord du Mali). La vie renat peu peu; certaines coles, certains marchs, sont ouverts.
Mais les banques et de nombreuses administrations ne
onctionnent toujours pas.
Les rares activits conomiques tournent comme
au ralenti, ajoute-t-il. Le pouvoir dachat des gens est
trs aible et cela limite naturellement leur accs auxservices de base; laide humanitaire demeure donc la
principale source de subsistance.
La nature du conit volue, et la situation demeure
explosive. Des chaufoures violentes clatent encore,
les rappes ariennes se poursuivent, et des menaces
nouvelles surgissent. Nous constatons une multiplica-
tion des attentats suicides dans les zones urbaines et
un recours accru aux bombes daccotement, explique
Yasmine Praz Dessimoz, che des oprations du CICR
pour lArique du Nord et de lOuest, qui voit merger
un conit asymtrique, avec des oprations coup de
poing de style gurilla.
Tout ceci rend trs di cile la vie des habitants de-
meurs dans le nord du Mali. En plus du manque de
revenus, de vivres et dassainissement, les soins de
sant de base sont toujours limits. Laccs aux soins
est di cile car de nombreux centres de sant sont hors
dusage, explique Attaher Maga, mais aussi cause de
labsence de ournisseurs qualis et des distances
parcourir. Tout ceci dans un contexte de scurit pr-
caire qui rend prilleux tout dplacement.
Se prparer et sadapterPour aider les personnes les plus dmunies, le CICR
a d sadapter lvolution du conit. Paradoxale-
ment, la situation est plus di cile quen 2012, lorsque
Avec lvolution de la nature du confit dans le
nord du Mali, le CICR a renorc ses oprationset sest adapt aux ralits nouvelles. Les
immenses besoins humanitaires de la rgion
exigeront une action durable.
L Une jeune flle passe devantun mur cribl dimpacts de ballesaprs les combats intenses dans laville de Gao (Mali) en mars 2013.
Photo : REUTERS/Joe PenneyIDans la municipalit deBourem, prs de Gao, dans le norddu Mali, une personne dplacereoit des vivres distribus par leCICR en avril 2013.Photo : Douma Mahamadou/CICR
Sablesmouvants
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nous a aussi permis de toucher indirectement dautres
couches de la socit et dautres secteurs. Nous avons
ainsi pu redonner un peu doxygne lconomie lo-
cale par des achats locaux et par des contrats avec des
ournisseurs locaux.
Tout au long de lopration, la Croix-Rouge malienne
a aussi jou un rle vital. Grce ses sections et ses
volontaires prsents dans toutes les zones touches,
la Socit nationale a pu distribuer des vivres et desarticles de mnage, reconstituer les stocks de mdica-
ments, prvenir la population des dangers des mines et
des engins explosis, amliorer lapprovisionnement en
eau et lassainissement, inormer sur les questions dhy-
gine, soutenir des activits rmunratrices et aider
runir des amilles spares par les combats.
Pour le CICR, le rseau de volontaires a t un atout
crucial. Lapport des volontaires de la Croix-Rouge
malienne aux activits du CICR est dune valeur ines-
timable, explique Attaher Maga, qui ajoute que bien
souvent, les membres de la Socit nationale sont des
personnalits importantes dans leur localit, ce qui
signie quelles peuvent servir de relais pour le Mou-
vement sur le terrain.
Tous les acteurs prsents dans la rgion sinterrogent
sur la suite des vnements. Nombre dobservateurs
craignent que le climat dinscurit se rpande lorsque
les groupes arms qui ont quitt le Mali commenceront
lancer des attaques dans les pays voisins.
Pendant ce temps, la multitude de personnes dpla-
ces pse lourdement sur les communauts du sud du
pays ainsi que sur les pays voisins, qui connaissent dj
de graves di cults. On estime 168 000 le nombre derugis qui auraient ui vers les pays limitrophes; sur ce
nombre, quelque 50 000 ont gagn le Niger, qui a tou-
jours du mal se relever de son propre conit interne,
conclu voici peine quelques annes, et qui accueille
aussi des rugis du nord du Nigria ainsi que des tra-
vailleurs migrants expulss de Libye.
Mme si lopration de maintien de la paix des Nations
Unies russit dans sa mission et rtablit une certaine
stabilit dans le nord du Mali, les besoins humanitaires
resteront considrables pendant longtemps. Quoi quil
arrive, une action de nature purement humanitaire
reste ncessaire nos yeux dans le nord du Mali et dans
toute la rgion, conclut Jean-Nicolas Marti, le che de
la dlgation du CICR Niamey (Niger).
les villes du nord taient sous lemprise des groupes
arms, explique Yasmine Praz Dessimoz. lpoque,
ils taient prsents et visibles, on pouvait donc entrer
en contact avec eux. Maintenant quils sont parpills,
il est beaucoup plus di cile de les toucher.
Beaucoup de temps et deforts ont t consacrs
maintenir le contact avec tous les acteurs arms, assure-
t-elle. Paralllement, ajoute Attaher Maga, les groupes
arms ont suivi nos dplacements sur le terrain pourviter le blocage des services humanitaires. Les enga-
gements pris par les groupes arms vis--vis du CICR
tiennent toujours, assure-t-il. (Lintgralit de
lentretien avec Attaher Maga est disponible ladresse
www.redcross.int.)
Les dbris de guerre explosis ainsi que les mines po-
ses le long des routes reprsentent aussi une menace
invisible et persistante, tandis que la criminalit et la
violence organise crent dautres problmes de scu-
rit. En outre, dans de nombreuses agglomrations et
villes du nord du pays, la plupart des services de base
ont t anantis.
Les services publics leau, llectricit et les soins
de sant ont cess de onctionner quand la majorit
des personnes qualies charges de leur onctionne-
ment sont parties, explique Abdoule-Karim Diomande,
qui coordonne les activits eau et habitat du CICR dans
la rgion.
Le nord du pays manque aussi dun autre article es-
sentiel : lessence. Sans lectricit pour les stations de
pompage, pas deau, ajoute Abdoule-Karim Diomande.
Le CICR a donc dcid de ournir de lessence pour aire
onctionner les inrastructures.Le carburant a aussi servi approvisionner trois
villes importantes en lectricit, assurant la ourniture
deau potable et permettant aux petites entreprises de
onctionner, ne serait-ce que quelques heures par jour.
Lessence a en outre permis de garder ouverts les ta-
blissements de sant vitaux. Outre les mdicaments,
le matriel mdical et dautres ormes de soutien
lhpital rgional de Gao, le CICR a ourni carburant et
gnrateurs pour que lhpital puisse onctionner in-
dpendamment du rseau lectrique.
Renforcer les oprationsPour aire ace aux besoins normes et pour aider les
personnes qui ont ui les combats, le CICR a doubl la
somme quil prvoit de dpenser pour son opration
au Mali en 2013. Au mois davril, lorganisation a lanc
un appel et accru son budget de prs de 43 millions
de dollars .-U., qui sajoutent aux quelque 40,3 mil-
lions dj prvus pour lanne. Lopration au Mali est
ainsi devenue lune des trois plus importantes dans le
monde pour le CICR.
La difrence est dj notable, dit Attaher Maga.
Une opration dune telle ampleur exige desmoyens considrables, y compris du personnel et des
ressources logistiques, explique-t-il. Mais outre las-
sistance directe aux victimes, [lextension du budget]
Les services publics
leau, llectricit
et les soins de sant
ont cess de
onctionner quand
la majorit des
personnes qualifes
charges de leur
onctionnement
sont parties.Abdoule-Karim Diomande,
qui coordonne les activits eau
et habitat du CICR dans la rgion
Le pouvoir dachat
des gens est trs
aible et cela limite
naturellement
leur accs aux
services de base;
laide humanitaire
demeure donc la
principale source de
subsistance.
Attaher Maga, chef de la
sousdlgation du CICR Gao
(nord du Mali)
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LES PERSONNES QUI SE SONT INSTALLES dans
la rgion de Mopti, au centre du Mali, aprs
avoir ui les violences dans le nord du pays, ont
toutes un parcours difrent, mais partagent un point
commun : toutes ont ui des maisons et des terres aux-
quelles elles taient proondment attaches, sans
rien pouvoir emporter. Si certaines sjournent dans
des camps, la plupart ont choisi de vivre dans des a-
milles daccueil, rparties dans de nombreux districts
et villages.
Partout, la tristesse est palpable; les gens sont trauma-
tiss par ce quils ont subi et ce quils ont vu. Dracins,
ils ignorent sils pourront jamais retrouver leur oyer.
Boubacar Traor a t parmi les premiers sinstaller Mopti. 57 ans, ce technicien quali a t orc de quit-
ter sa ville natale de Hombori, par crainte dtre incorpor
par la orce dans des groupes arms. Il vit maintenant
dans un camp pour personnes dplaces Svar, dans
le quartier de Wailirde, un mot qui signie dcharge.
Boubacar est arriv Mopti avec sa emme et ses
dix enants, puis et sans un sou en poche. Aprs
quelques jours derrance, la amille sest installe dans
le camp, il y aura de cela bientt un an. Il est inacti,
sans possibilit dutiliser ses comptences de mcani-
cien. Ici, je ne ais rien. Mme si je voulais redmarrer
comme mcanicien, ce serait di cile parce que per-
sonne ne me connat. Nous navons que lassistance.
Ce nest pas assez, mais cest mieux que rien.
Pas assez manger
Pour di cile que soit sa situation, elle reste bien meil-leure que celle de nombreuses personnes hberges
par des amilles daccueil, dont bon nombre ne sont
toujours pas remises des efets de la crise alimentaire
Des htes inattendusPhoto:Mous
taphaDiallo/MacinaFilm/FICR
Redoutant de rentrer chezeux, les dplacs du nord du
Mali bnfcient de laide des
communauts du sud. Or, les
personnes qui les accueillent
sont souvent dans une situation
peine meilleure queux.
Ces gens sont
arrivs ici sans unsou; je ne peux pas
les mettre la rue.
Malick Maiga, un camionneur
de Mopti (Mali), qui hberge
plus de 70 personnes alors
quil a dj du mal nourrir sa
femme et ses 13 enfants
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que de nombreuses organisations humanitaires aient
restreint leurs interventions. La Croix-Rouge malienne,
par son rseau de volontaires dans le pays, est l une des
rares qui continue ournir une assistance vitale aux
personnes dans le besoin.
la n du mois davril 2013, le nombre de personnes
dplaces tait estim plus de 300 000, dont plus de
la moiti avaient cherch reuge dans les pays voisins.
Laccs des services de base vivres, eau potable,logement, soins de sant et ducation demeure une
priorit.
Chaque jour, je dois me dbrouiller pour trouver de
quoi manger pour mes htes. Sils tombent malades, je
paie les rais de consultation et les mdicaments, ra-
conte Sidiki Samak, qui hberge plus de 40 personnes
dplaces dans une maison quil loue Mopti, alors
quil est dplac lui-mme.
Nous voulons rentrer chez nous et vivre en paix.
Voyez comme nous vivons ici, sexclame-t-il. Comme lui,
ils sont des milliers, venus du nord, vouloir retrouver
leur oyer, mais dans des circonstances aussi incertaines,
il est trop tt pour dire quand cela sera possible.
Nos