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LIMPACT DES ERP SUR LE CONTRLE DE GESTION: UNE PREMI¨RE VALUATION FINCO, volume 10, annØe 2000 45 LIMPACT DES ERP SUR LE CONTRLE DE GESTION: UNE PREMI¨RE VALUATION Yves de RongØ (Louvain) 1 RØsumØ. Lauteur puise aussi bien dans la littØrature sur les systLmes dinforma- tion et le contrle de gestion que dans ses propres observations. Il y cerne les conditions rØunir et limpact prØvoir dans la firme moderne qui aspire un meilleur contrle via les progiciels intØgrØs de gestion, ces systLmes dits ERP per- mettant lEnterprise Resource Planning. Lauteur analyse de nombreux rapports dimplantation dERP. Il en conclut quun meilleur systLme de contrle a ses exi- gences. Il faut: quil soit adaptØ tant la structure quaux stratØgies de la firme; que celle-ci ait investi dans un ERP sa mesure et rentable; et, que les comptables de gestion possLdent la compØtence (dutilisation et dinterprØtation) nØcessitØe par lERG. I. INTRODUCTION Avec lLre informatique, la firme a connu une rapide Øvolution de ses systLmes dinformation et son contrle de gestion na cessØ den Œtre influencØ. On assiste, ces annØes-ci, des vagues dadoption de progiciels intØgrØs de gestion. Ceux-ci sont au coeur des systLmes dits ERP permettant lEnterprise Resource Planning, comme ceux proposØs par SAP, Baan et PeopleSoft. Or, limportance de leur impact sur la firme commence ressortir des Øtudes rØcentes. Doø l-propos ici den faire une premiLre Øvaluation. Plus prØcisØment, il sagit didentifier les attentes de la firme, de caractØriser les ERP et de cerner leur impact potentiel sur les systLmes de contrle de gestion. Lon verra que trois conclusions simposent. PremiLrement, la firme doit dØfinir avec soin un systLme de contrle bien adaptØ ses choix stratØgiques et structurels, choix qui se voient confirmer lors du processus dimplantation de lERP. Deu- xiLmement, elle doit sassurer de la rentabilitØ de son investissement en ERP. TroisiLmement, elle doit accorder les compØtences de son personnel de gestion aux exigences du bon fonctionnement de son ERP. 1 Lauteur est professeur lUniversitØ Catholique de Louvain, IAG, Place des Doyens, B-1348 Louvain-la-Neuve, Belgique ([email protected]). Il remercie le professeur Maurice Gosselin de lUniversitØ Laval pour ses conseils de mŒme que le Directeur de FinØ- co, le professeur Guy Charest, pour son appui Øditorial.

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L�IMPACT DES ERP SUR LE CONTRÔLE DE GESTION: UNE PREMIÈRE ÉVALUATION

L�IMPACT DES ERP SUR LE CONTRÔLE DE GESTION: UNE PREMIÈRE ÉVALUATION

Yves de Rongé (Louvain)1

Résumé. L�auteur puise aussi bien dans la littérature sur les systèmes d�informa-tion et le contrôle de gestion que dans ses propres observations. Il y cerne lesconditions à réunir et l�impact à prévoir dans la firme moderne qui aspire à unmeilleur contrôle via les progiciels intégrés de gestion, ces systèmes dits ERP per-mettant l�Enterprise Resource Planning. L�auteur analyse de nombreux rapportsd�implantation d�ERP. Il en conclut qu�un meilleur système de contrôle a ses exi-gences. Il faut: qu�il soit adapté tant à la structure qu�aux stratégies de la firme; quecelle-ci ait investi dans un ERP à sa mesure et rentable; et, que les comptables degestion possèdent la compétence (d�utilisation et d�interprétation) nécessitée parl�ERG.I. INTRODUCTION

Avec l�ère informatique, la firme a connu une rapide évolution de sessystèmes d�information et son contrôle de gestion n�a cessé d�en être influencé. Onassiste, ces années-ci, à des vagues d�adoption de progiciels intégrés de gestion.Ceux-ci sont au coeur des systèmes dits ERP permettant l�Enterprise ResourcePlanning, comme ceux proposés par SAP, Baan et PeopleSoft. Or, l�importance deleur impact sur la firme commence à ressortir des études récentes. D�où l�à-proposici d�en faire une première évaluation.

Plus précisément, il s�agit d�identifier les attentes de la firme, de caractériserles ERP et de cerner leur impact potentiel sur les systèmes de contrôle de gestion.L�on verra que trois conclusions s�imposent. Premièrement, la firme doit définiravec soin un système de contrôle bien adapté à ses choix stratégiques et structurels,choix qui se voient confirmer lors du processus d�implantation de l�ERP. Deu-

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xièmement, elle doit s�assurer de la rentabilité de son investissement en ERP.Troisièmement, elle doit accorder les compétences de son personnel de gestion auxexigences du bon fonctionnement de son ERP.

1 L�auteur est professeur à l�Université Catholique de Louvain, IAG, Place des Doyens,B-1348 Louvain-la-Neuve, Belgique ([email protected]). Il remercie le professeurMaurice Gosselin de l�Université Laval pour ses conseils de même que le Directeur de Finé-co, le professeur Guy Charest, pour son appui éditorial.

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Une analyse succincte des attentes de la firme par rapport à ses systèmesd�information est présentée à la section II qui suit. Brièvement, elle couvre l�évo-lution des systèmes d�information depuis les années cinquante et explicite lesbesoins d�aujourd�hui en la matière. Dans la section III, on décrit la nature des ERPet on donne des raisons pour leur adoption. À la section IV, on définit le cadred�analyse d�impact des ERP. La section V décrit l�implantation des ERG avec sesphases et ses exigences pour la firme. Une première synthèse de cas d�implantationd�ERP est donnée à la section VI. On élabore sur les impacts organisationnels desERP à la section VII avant d�en cerner l�impact sur le contrôle de gestion dans lafirme à la section VIII. On conclut à la section IX.

II. SYSTÈMES D�INFORMATION ET ATTENTES DES FIRMES

Le système d�information classique collecte, traite, stocke et communiquel�information aux fins de décision, de coordination, de contrôle et d�analyse au seind�une organisation (Laudon et Laudon, 2002). Par ailleurs, l�information est la ma-tière première du contrôle de gestion2. Or, l�informatisation a eu de profondesrépercussions sur le système d�information de l�organisation. Et ses solutions suc-cessives pour soutenir et organiser ce système ont influé grandement sur le contrôledes organisations. Faisons un peu d�histoire à ce sujet.

Dans les années cinquante, l�informatique servait surtout à automatiser lestâches existantes, y compris le processus de gestion. On cherchait à réduire lescoûts et à traiter avec efficience les tâches routinières (en comptabilité, en gestiondes salaires, etc.). Les gros ordinateurs des années 60 permettaient déjà un contrôlecentralisé de l�information. Selon Nolan et Croson (1995), leur architecture s�ac-cordait aux principes du contrôle hiérarchique d�alors. Les systèmes d�informationreflétaient donc les pratiques de gestion fonctionnelle dans l�organisation. Chaquefonction avait son propre système, souvent peu relié aux autres fonctions. Il fautdire que les systèmes d�information des diverses fonctions (marketing, production,comptabilité-finance, etc.) n�ont pas été conçus dans le but d�échanger l�informa-tion.

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Avec l�évolution radicale de l�environnement économique depuis 20 ans, lafirme attend de ses systèmes d�information qu�ils lui aident à s�adapter aux nou-velles réalités: (1) une concurrence générale accrue (sous l�impulsion des NTIC: lesnouvelles technologies de l�information et de la communication) dans un mondeindustriel où la production de masse devient sur mesure et où la performance sedécompose pour s�exprimer en termes de qualité, de délais, d�innovation, etc., pas

2 Au point que le contrôleur de gestion prend souvent le titre de Chief Information Officer.

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seulement en revenus et coûts; (2) une concurrence accrue aussi via la dérèglemen-tation de pans entiers de l�économie; et (3) un rythme constamment en hausse del�innovation technologique qui raccourcit la durée du cycle de vie des produits etdécloisonnent les industries, les services, voire les technologies.

Les nouvelles réalités juste évoquées ont forcé les structures organisation-nelles à s�adapter, en particulier face à l�orientation client de plus en plus retenue.Child (1987) a bien vu comment les NTIC peuvent aider la firme à relever ses nou-veaux défis stratégiques, les principaux étant: (1) faire face au risque lié à unedemande très fluctuante; (2) gérer un risque d�innovation amplifié par le rythmecroissant des changements technologiques; et (3) contrôler le risque d�inefficiencedû à une concurrence accrue centrée sur le contrôle et la réduction des coûts.

Face à ces défis, les solutions informatiques issues des systèmes d�informa-tion cloisonnés par fonction ont montré leurs limites vers la fin des années 80, dessymptômes majeurs en témoignant. Premièrement, plusieurs grandes firmes per-daient alors le contrôle sur leurs coûts d�informatique. Leur solution provisoire aété d�externaliser, en partie ou totalité, leurs systèmes, voire leur département,d�informatique, ou de mettre ce dernier en concurrence systématique avec dessociétés externes apparentées. Deuxièmement, l�adoption d�une orientation clientet l�accent mis sur les processus de gestion transversaux aux fonctions ont créé desbesoins débordants d�information de gestion. Les systèmes d�information, tropcloisonnés, ne suffisaient pas à les combler, même avec des interfaces nombreuseset complexes. Le réencodage manuel des mêmes données en divers points de lafirme se multipliait en toute inefficience. Troisièmement, la croissance via groupe-ment de bien des firmes multipliait les systèmes informatiques propriétaires et lesdifficultés de communication. Comme exemples, citons Chevron qui, après absorp-tion de Gulf, disposait de 200 systèmes informatiques distincts (Sandoe et al.,2001) et Electrabel, résultat de fusions entre trois producteurs belges d�électricité,qui héritait de 43 systèmes différents. Etc.

En bref, avec les années 90, on voit de nombreux dirigeants exprimer leurinsatisfaction face aux solutions informatiques disponibles. Leurs attentes, toujours

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valides, veulent que les systèmes d�information permettent:

- d�organiser l�intégration des flux d�information entre les unités qui intervien-nent en succession, ou conjointement, dans un même processus transversal degestion; la mise au point d�un système d�information en support du fonction-nement des processus transversaux aux organisations est certainement lapriorité;

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- de définir et de diffuser un langage commun au sein de la firme via une stan-dardisation détaillée de l�information liée aux différentes fonctions;

- de faire fonctionner de nouvelles structures organisationnelles transversales,fussent-elles transitoires comme dans le cas des projets;

- de soutenir les équipes multifonctionnelles dispersées géographiquement;- de définir un juste équilibre entre centralisation et décentralisation selon: a) la

quantité et la qualité de l�information nécessaire aux différents niveaux del�organisation; (b) la fiabilité des canaux de communication; (c) l�efficacité dela saisie de l�information; et (d) les capacités cognitives et interprétatives desacteurs de l�organisation; et,

- d�accorder aux utilisateurs un rôle actif dans le développement des systèmesd�information en fonction de leurs besoins décisionnels et de contrôle.

Notons que le souci informatique immédiat des dirigeants au seuil du nou-veau siècle a été d�échapper au bogue de l�an 2000 et de réussir le passage à l�Euro.Ces deux préoccupations auraient amené plusieurs entreprises à implanter un ERPau coeur de leur système global d�information.

III. NATURE DES ERP ET RAISONS D�ADOPTION

Rappelons que les systèmes ERP (ou Enterprise Resource Planning Systems)visent à contrôler les flux d�information, de matières, d�argent et de personnes dansune organisation. Les ERP ont une architecture informatique client-serveur. Dansle progiciel intégrateur, les données n�entrent qu�une fois, à leur point d�origine.Ses caractéristiques majeures sont la standardisation de l�information et l�intégra-tion des activités constituant un processus de gestion. La figure 1 tirée de Sandaoet al. (2001, p. 124), en explicite l�architecture logique. Sa conception modulairefait qu�on n�a pas à installer tous les modules du progiciel retenu. Par ailleurs,l�ERP typique semble répondre aux attentes manageuriales car (a) il englobe lasolution Euro; (b) il permet d�intégrer des systèmes de gestion vu qu�il gère lesinterdépendances entre les activités de valorisation, quelle que soit leur apparte-nance fonctionnelle; (c) son langage commun à l�ensemble de l�organisationpermet une communication transversale; (d) il offre un support potentiel à l�amélio-ration des décisions de gestion.

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Mabert et al. (2000) indiquent divers motifs derrière le choix d�un ERP, dontles suivants, en ordre décroissant d�importance: (1) le remplacement des systèmespropriétaires fonctionnels; (2) la simplification et la standardisation des systèmes;(3) l�amélioration des interactions et de la communication avec fournisseurs etclients; (4) l�acquisition d�un avantage stratégique; (5) le lien avec les activitésglobales.

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Notons que le souci de réorganisation lié à l�implantation d�un ERP est uneraison peu citée par les firmes répondantes. Selon diverses études (Besson, 1999;Besson et Rowe, 2001), l�implantation d�un ERP se révèle plus complexe queprévu et les résultats attendus se concrétisent difficilement. Notre intérêt ci-dessousest d�y voir plus clair certes, mais également d�entrevoir l�impact que l�implanta-tion d�un ERP peut avoir sur le contrôle de gestion dans la firme.

IV. BASE THÉORIQUE D�ANALYSE D�IMPACT

Dans notre analyse d�impact des ERP, nous avons besoin d�assisesthéoriques. Pour les établir, nous positionnons l�ERP par rapport aux trois niveauxde contrôle classiques adoptés depuis l�apport séminal d�Anthony (1965), à savoir:contrôle ou planification stratégique, contrôle de gestion et contrôle opérationnel.Puis, nous puisons dans les théories concurrentes quant à l�impact sur la firme desNTIC avant d�adopter une perspective d�analyse dite contingente.

a. ERP et niveaux de contrôle

Selon Anthony (1965) et les travaux dans son sillage (Anthony et al., 1985;Anthony et Govindarajan, 1998; etc.), le contrôle organisationnel s�exerce à troisniveaux: la stratégie, la gestion et les opérations. Plus précisément, on a: (1) le pro-cessus de planification stratégique qui consiste à décider des buts de l�organisationet des stratégies pour les atteindre; son orientation est à long terme et centrée surles évolutions dans l�environnement externe; (2) le processus de contrôle de gestionpar lequel les manageurs utilisent leur influence pour mettre en oeuvre les stratégiesde l�organisation; ce processus doit assurer la cohérence entre la stratégie et le quo-tidien des actions du personnel; il définit aussi les modalités pour que le contrôleopérationnel soit cohérent avec les objectifs stratégiques retenus; et (3) le processusde contrôle opérationnel ayant pour effet visé que les tâches spécifiques s�accom-plissent, au jour le jour, avec efficience et efficacité.

Les besoins d�information diffèrent à chaque niveau de contrôle. Certainsauteurs, dont Sandoe et al. (2001), établissent les correspondances entre niveaux de

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contrôle et systèmes d�information, comme on le voit à la figure 2. Le champd�application premier de l�ERP se situe au niveau du contrôle opérationnel dans lesystème d�information sur les transactions de base. Avec l�ERP, on a un change-ment majeur: l�information est partout standardisée, quel que soit le module danslequel on se situe, de sorte qu�un client se définit de la même façon dans tout mo-dule. L�ERP permet aussi d�organiser toutes les transactions qui sont liées à unepremière transaction. Par exemple, si un fabricant est saisi d�une commande pourun article, le système génère la chaîne suivante de transactions: on vérifie si l�article

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est en stock et si oui, on le réserve et organise sa livraison; sinon, on ordonne la fa-brication de l�article, ce qui amène à vérifier si les inputs sont disponibles, à défautde quoi on ordonne de les fabriquer ou de les commander des fournisseurs; etc.,etc., jusqu�à ce qu�on organise le transport, émette la facture et enregistre les écri-tures comptables exigées par le processus.

Cette volonté d�intégration et de standardisation pèse lourd sur la collecte dedonnées et modifie le rôle des opérateurs fonctionnels. Lorsqu�une transaction estsaisie pour la première fois, les données nécessaires à toutes les fonctions doiventl�être aussi. Dans l�exemple précédent, le vendeur à un nouveau client doit ali-menter la base de données avec les informations nécessaires pour la production, lafacturation et la comptabilisation de la transaction. Dans un système non intégré, lacommande initiale entraîne les mêmes opérations mais la saisie se fait dans lesystème de chaque fonction visée selon ses besoins d�information. Ainsi, lesmêmes données se trouvent saisies plusieurs fois, et souvent de façon bien dif-férente, ce qui rend difficile le transfert de données et la communication entrefonctions.

Un deuxième impact important apparaît au niveau du contrôle de gestion.Historiquement, le contrôle de gestion est né dans les années 20 chez les géants endevenir (GM, du Pont, etc.) avec un langage inventif qui déjà permettait de com-parer les performances d�activités différentes au sein des divisions d�une mêmefirme. L�évolution qui a mené à l�ERP, (avec son progiciel intégré de gestion) aproduit au moins deux effets sur le contrôle financier: (1) la standardisation etl�intégration, caractéristiques fondamentales des progiciels, donnent une meilleuretraduction de l�activité des autres fonctions dans la firme en termes financiers, cequi réduit la marge de manoeuvre des fonctions de production et de marketing parexemple; on peut déjà concevoir (voir figure 3) un ERP qui traduirait l�ensembledes processus de l�organisation dans une représentation financière intégrée et stan-dardisée; et, (2) la réduction des délais dans les rapports de contrôle de gestion; parexemple, les rapports comptables mensuels sortaient 15 à 20 jours ouvrables aprèsla clôture, contre 10 jours maintenant, voire 3 ou 4; ainsi, le contrôleur de gestiona le temps de se transformer de �chiffreur� en analyste du business. Les développe-

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ments récents du progiciel semblent aussi influer sur le niveau du contrôlestratégique via le nouveau système, dit de pilotage stratégique, soutenu par unearchitecture d�ERP.

b. Une perspective contingente de la solution ERP

L�impact des technologies de l�information (TI) sur les structures organisa-tionnelles, donc sur le contrôle de gestion, ne fait pas l�unanimité chez les

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théoriciens. Markus et Robey (1988) distinguent trois visions du lien causal entreles TI et le changement organisationnel:

(1) L�impératif technologique. Ici la technologie agirait comme une force exogènequi conditionnerait le comportement des individus et des organisations. Seloncette vision, plus de TI causerait plus de centralisation. Or, l�évidence empiri-que qui s�accumule depuis l�évaluation critique de Robey (1977) ne semble pasbeaucoup soutenir cette prédiction: dans un environnement d�incertitude (etc�est notre monde) les TI favoriseraient plutôt la décentralisation.

(2) L�impératif organisationnel. Ici l�organisation est déterminante. Ses ma-nageurs construisent des systèmes d�information et de contrôle en réponse àses besoins d�information. Dans cette veine, MacIntosh (1985) développe sonmodèle contextuel des systèmes d�information (comptable comprise) où ilassocie les quatre types de technologies selon Perrow (1967) à quatre types desystèmes de contrôle de gestion: (1) un système fermé, adapté à une technolo-gie de routine, avec ses rapports fréquents de données détaillées, spécifiques,définies a priori par la direction générale; (2) un système orienté résultats,adapté à une technologie artisanale, avec ses rapports espacés de donnéesgénérales; (3) un système orienté perspectives, adapté à une technologie derecherche, avec ses rapports espacés peu détaillés, allant de bas en haut dans lafirme; et (4) un dernier système de contrôle de gestion détaillé et complet,adapté à une technologie technico-professionnelle, avec ses rapports plutôtespacés, de type spécifique, ou de statistiques détaillées, le tout accompagnéd�informations budgétaires relativement générales.

(3) La vision d�un impact imprévisible. Ici, selon Markus et Robey (1988: 588),�les usages et les conséquences des technologies de l�information émergent defaçon imprévisible d�interactions sociales complexes�. La technologie peutcréer du changement organisationnel mais, avant de l�implanter, on ne peutprédire sa forme.

Quant à notre perspective, elle est dite contingente. Comme vision, elle

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s�avère assez proche parente de l�impératif organisationnel voulant que lessystèmes de contrôle répondent aux besoins de l�organisation, qu�ils soient straté-giques, structurels, culturels, technologiques ou autres. L�hypothèse est faite queles progiciels de gestion vont influer sur les firmes en fonction de variables contin-gentes comme la stratégie choisie ou la structure organisationnelle mise en place.

En fait, nous reprenons la perspective contingente simplifiée de Chenhall(2001) pour l�étendre au contrôle de gestion. Ici, la variable contingente qu�est la

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stratégie n�est pas, à strictement parler, un élément de contexte. En choisissant unestratégie modifiée ou nouvelle, les dirigeants de l�organisation peuvent influenceraussi bien son environnement externe que ses technologies, sa structure et sesmodalités de contrôle (Fischer, 1995; Chenhall, 2001). Dans cette perspective, onpeut soutenir l�hypothèse suivante: la stratégie, la structure et les modalités de con-trôle mises en place vont infléchir le choix du progiciel de gestion, du nombre deses modules et du mode d�implantation de l�ERP. Avant d�examiner de plus prèsl�articulation ERP-stratégie/structure, il importe de bien savoir ce que signifiel�implantation de l�ERP.

V. L�IMPLANTATION D�UN ERP: PHASES ET PROBLÈMES

Le processus d�implantation de l�ERP a ses phases critiques que nous exa-minons ci-dessous en vue d�en mieux comprendre l�impact possible sur le contrôlede gestion. Certaines illustrations sont empruntées à l�expérience de trois grandesorganisations:

. Une multinationale pétrochimique (35 pays, 15 000 employés)

. Une grosse PME au sein d�un groupe sidérurgique (3 usines dans 3 pays, 415employés, bureaux dans 8 pays)

. Une université (2 campus, 10 facultés, 50 départements, 4 000 employés dont500 professeurs).

L�implantation d�un ERP comprend d�ordinaire les cinq phases suivantes:(1) le choix d�une solution ERP; (2) l�analyse des processus de gestion en place; (3)leur réingénérie; (4) la particularisation de l�ERP (son adaptation à des besoins par-ticuliers); et (5) la mise en place.

(1) Le choix d�une solution ERP

Dans cette phase initiale, la firme précise les besoins à combler par sessystèmes d�information et analyse les solutions offertes sur le marché selon descritères d�adéquation pertinents. On répète que les facteurs problématiques à ce

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stade résident dans:

- une piètre définition des besoins en systèmes d�information et de TI;

- une définition insuffisante des objectifs correspondants de l�organisation;- une méconnaissance de la philosophie derrière les systèmes ERP;- une faible perception du lien entre ERP et réingénérie des processus;

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- une minimisation du coût réel d�implantation de la solution ERP et pareille-ment pour sa grave complexité et les crises qui peuvent en surgir;

- la difficulté d�appliquer les critères classiques de rentabilité à l�évaluation d�unprojet d�ERP;

- le manque d�implanteurs expérimentés dans la firme et chez les consultants;etc.

Dans le premier des trois cas déjà mentionnés, il s�agit, au départ, d�une mul-tinationale décentralisée où les filiales ont l�autonomie de développer leurs systè-mes d�information et de choisir leurs solutions informatiques. La production y estla fonction dominante jusqu�au tournant des années 90, alors qu�une concurrenceaccrue et une crise financière viennent modifier la stratégie de la multinationale etaugmenter l�importance des fonctions marketing et finance. Et avec la stratégiemodifiée s�inscrit l�implantation graduelle d�un ERP commun aux filiales dugroupe. Pour plus ample description, lire de Rongé et Cerrada (1996).

Dans le cas de la PME, sa direction change au milieu des années 90. Uneéquipe rajeunie hérite d�une firme traditionnelle où les systèmes d�information etles solutions informatiques sont peu développées, au point où, par exemple, le cal-cul mensuel des coûts de revient se fait à la main. Ici, l�étude d�implantation d�unERP s�engage dans la perspective de moderniser la gestion de la PME.

Dans le cas de l�université, elle vise au départ à remplacer un logiciel de ges-tion comptable et financière devenu inapte à répondre aux besoins de sesdestinataires. L�université dispose paradoxalement d�une administration très cen-tralisée mais elle abrite en même temps un grand nombre de décideurs dès qu�ils�agit de fonds obtenus par contrats externes.

(2) L�analyse des processus de gestion

Lorsqu�une solution ERP a été retenue, la phase importante qui suit comporteune analyse à double volet des processus de gestion: (1) une analyse visant à com-prendre pleinement le fonctionnement des processus organisationnels et à identifier

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ses problèmes en termes de temps perdu, de duplication des tâches, d�inefficiences,etc.; (2) une analyse détaillée des systèmes d�information en place.

Dans la multinationale déjà décrite (décentralisée, avec autonomie comp-table et informatique pour les filiales), les formats de données et les pratiques bud-gétaires n�étaient pas standardisées et les communications informatiques inter-systèmes impossibles. D�où, par exemple, des réencodages multiples des mêmesdonnées. En Europe, les filiales en étaient fort aise car leurs systèmes produisaient

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�leur� information nécessaire à leurs décisions et à leur contrôle de gestion. Maisla direction européenne déplorait que l�absence de standardisation de l�informationl�empêchait, par exemple, de comparer les performances des filiales.

Pour la PME, l�analyse révéla que la plupart de ses processus (de production,de contrôle de qualité, de ventes, de comptabilité, de finance, etc.) étaient insuf-fisamment documentés, le savoir résidant surtout dans la tête de ses employés.Quant à l�université, pour l�essentiel, l�analyse détaillée n�a pu porter que sur cer-tains processus d�achat et de dépenses.

(3) Le réingénérie des processus

La phase de réingénérie est probablement la plus critique dans l�implantationd�un ERP car elle conditionne fortement les bénéfices à en tirer. Lors d�une telleimplantation, l�organisation se trouve, en matière de réingénérie sur un continuumentre les deux positions suivantes: (1) les processus de gestion, ayant bénéficiéd�une analyse complète, ont été reconfigurés optimalement avant d�entamerl�implantation du ERP; (2) le personnel de l�organisation n�a aucune compréhen-sion de la vision processus qui sous-tend l�ERP.

Dans le cas de notre multinationale, on a confié à une équipe multifiliale de25 personnes, de souche comptable ou informatique, le soin d�élaborer un systèmed�information commun pour les activités de distribution pétrolière. Parallèlement,une équipe de 4 a établi un plan comptable pour toutes les composantes du groupe.Dans le cas de la PME, un an après le début de l�implantation de l�ERP, on ademandé à une firme-conseil de proposer une réingénérie complète des processusde commande, d�achat, de production et de comptabilité-finance. Dans le cas del�université, c�est une équipe alliant département financier et consultants qui a pré-paré la réingénérie de la fonction achats.

(4) La particularisation des modules

La plupart des ERP offrent des solutions concurrentes pour organiser les pro-

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cessus de gestion. Elles correspondent à des pratiques reconnues dans l�industrie.Or, il est crucial que, pour chaque processus à informatiser: (1) l�on sache bienchoisir entre les solutions contenues dans l�ERP; et (2) que l�on puisse particu-lariser les modules en fonction des besoins spécifiques. Il faut préciser, cependant,que cette particularisation est très coûteuse: programmation à langage spécifiquenécessitant des consultants, reprogrammation due à la nécessité, par exemple,d�accéder à de nouvelles fonctionnalités (comme l�accès à l�Internet); etc. Dans lapratique, trois solutions semblent émerger: (a) pour chaque processus de gestion,

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retenir une solution préexistante dans le progiciel retenu, car il est plus économiqued�adapter un processus de l�organisation au progiciel que faire le contraire: (b) dis-tinguer entre les processus compatibles avec une solution standard comprise dansl�ERP et ceux qui nécessitent des particularisations modulaires; (c) catégoriseraussi les processus de gestion entre: (1) ceux qui se conforment à une solution stan-dard de l�ERP; (2) les processus particularisés intégrés au sein de l�ERP; et (3) ceuxqu�on gardera à part par souci stratégique (pour préserver un avantage concurren-tiel, par exemple).

Les solutions proposées, deviennent, au fil de l�implantation, des solutionsfort remaniées. Il ne va pas de soi alors que les organisations avec ERP parviennentà une harmonisation de leurs systèmes d�information. Dans une perspective contin-gente, c�est la stratégie et la structure de l�organisation qui détermineraientl�étendue d�application de l�ERP et son degré de particularisation.

(5) Mise en place

La phase de mise en place de l�ERP poserait de graves difficultés de transi-tion, de formation et de communication.

La transition au système ERP se gère mal, semble-t-il. Les revues profession-nelles ne manquent pas d�exemples où la production a souffert (paralysie d�usine),de même que les clients (confusion entre eux, commandes non livrées) et la factu-ration. Davenport (1998) cite FoxMeyer affirmant que la mise en place d�un ERPa précipité sa faillite.

De plus, la firme sous-estimerait largement l�ampleur de la formation dontson personnel a besoin pour maîtriser l�utilisation du progiciel, ce qu�indiqueraitd�ailleurs son budget irréaliste d�implantation. Et ce manque de formation ren-forcerait la difficulté de gérer la transition.

Enfin, des problèmes de communication découleraient du fait que l�ERPimpose une vision processus de l�organisation plutôt que fonctionnelle classique.

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Or, cette vision est horizontale et transversale aux divisions fonctionnelles etcelles-ci n�ont pas l�habitude de communiquer entre elles.

VI. SYNTHÈSE DE CAS D�IMPLANTATION D�ERP

La décision d�implanter un ERP vient en général du manque de performanceet de la rigidité des systèmes classiques en place. Mais parce que, au moment duchoix de l�ERP, on évalue mal son potentiel, sa logique processus et sa complexité,

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des difficultés majeures tendent à survenir en cours d�implantation. Par exemple,en implantant une solution ERP proposée par SAN, notre PME sidérurgique déjàdécrite s�est trouvée devant le besoin inattendu d�une étude coûteuse de reconfigu-ration de ses processus. La crise a été grave au point d�interrompre l�implantation,de renvoyer les consultants et de subir un long délai avant de pouvoir trouver unenouvelle solution ERP avec d�autres consultants.

Ce qui caractérise aussi les expériences d�implantation d�un ERP, c�estl�implication importante de la direction dans le projet. Ce constat rejoint les résul-tats d�études sur les innovations en contrôle de gestion (comptabilité par activités,tableau de bord équilibré, etc.), comme Shields (1995) en atteste.

Par ailleurs, le degré d�autonomie laissée aux filiales mène à deux formesd�intégration des systèmes d�information: (1) une intégration verticale si l�implan-tation d�un ERP est une décision du groupe comme dans notre cas demultinationale; et (2) une intégration horizontale lorsque c�est une filiale locale quiimplante l�ERP, comme dans notre cas de PME.

L�on observe également que les stratégies d�implantation se différencientsurtout par: (1) le nombre de modules retenus parmi tous ceux que le progiciel ren-ferme; et plus ce nombre s�élève, plus l�effort de standardisation et d�intégrationsera grand; (2) le choix entre l�approche totale (dite �big bang�), où l�on change lesystème d�information en une fois pour tous les modules et toutes les filiales, etl�approche graduelle où l�on commence par une filiale ou par un nombre limité demodules dans quelques filiales; et (3) le degré de particularisation du progiciel,donc de son adaptation aux besoins particuliers, présents et prévus, de l�organi-sation.

Les expériences étudiées indiquent également que pour implanter avec suc-cès un ERP, il faut obtenir le support continu de la direction générale, une forteimplication des utilisateurs des systèmes d�information et l�assurance que l�opéra-tion est menée par des professionnels, tant internes qu�externes. Il faut aussi définirclairement le rôle des consultants en tout équilibre avec celui de l�équipe interne.

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En 2001, vu la nouveauté relative des ERP, il serait prématuré de faire lebilan des implantations connues de nous. Néanmoins, certains constats semblentrécurrents: (1) une fois l�ERP mis en place, il est très difficile d�en mesurer leseffets sur l�efficacité et l�efficience des processus de gestion, y compris ceux deleur réingénérie, et de les dissocier des effets acquis durant la mise en place; (2)l�introduction d�un ERP peut signifier soit une décentralisation régulée, soit (moinsfréquemment) une centralisation renforcée; (3) on peut, dans cerains cas, observer

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une économie d�effectifs (en informatique/finance/contrôle) mais moindre queprévu, alors que ce sont souvent les économies d�effectifs attendues, bien chif-frables, qui ont justifié le projet; et (4) il s�ensuivrait souvent une certaine amélio-ration (sans mesure précise) du fonctionnement transversal de l�organisation.

Dans une perspective contingente, il importe de voir comment la solutionERP s�adapte à l�organisation et vice-versa. Les effets à double sens, simultanés,voire séquentiels, sont inévitables ici et bien malin qui peut en détecter le sens do-minant à court ou moyen terme.

VII. IMPACTS ORGANISATIONNELS

a. ERP et stratégies de la firme

Le choix par la firme d�un ERP comme progiciel pour soutenir son systèmed�information soulève diverses questions sur le plan de ses stratégies. Quel est,pour la firme, l�impact potentiel du progiciel en termes d�avantages concurrentiels(actuels et potentiels) et d�extension de ses capacités stratégiques? Quelle influenceaura-t-il sur sa structure de coûts? Et qu�advient-il des choix des concurrents enmatière d�ERP? Et des solutions informatiques retenues chez les clients et fournis-seurs? Ont-ils implanté une solution ERP avec quel impact sur nos relations d�affai-res? Etc.

La solution informatique qu�est l�ERP exige qu�on standardise l�informationet qu�on y intègre les processus appropriés. Or, dès qu�un vrai processus a été infor-matisé via un module du progiciel, il devient difficile et coûteux de le modifier.D�où l�importance d�identifier les processus peu susceptibles de mutation rapideaprès leur standardisation. Ils sont les plus indiqués pour l�intégration au ERP.L�analyse stratégique permet justement de distinguer entre les processus clés, ouavantageux, c�est-à-dire ceux qui sont les plus créatifs de valeur et d�avantagesconcurrentiels pour la firme, et les autres processus nécessaires, parce que essen-tiels à son bon fonctionnement. Or, comme les processus avantageux ont besoind�être à la fois souples et voilés pour qu�ils le demeurent, souvent on ne les intègre

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pas au ERP. Ce sont plutôt les processus dits nécessaires qu�on y intègre.

Ainsi, la stratégie de la firme dicterait le choix des processus à intégrer auERP, et les processus, dits avantageux en seraient exclus. Son implantation va doncvarier selon la stratégie de la firme et ses avantages concurrentiels (Davenport,1998, 2000).

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b. ERP et structure/culture organisationnelle

L�adoption d�un ERP et du progiciel sous-jacent influe sur l�organisation. Eneffet, le progiciel structure le système d�information, non sans influence de la struc-ture hiérarchique décisionnelle. De plus, dans un progiciel, l�organisation est vuecomme un ensemble de processus plutôt que de fonctions. Par ailleurs, dans la théo-rie sur la firme vue comme une chaîne de valeur (Porter 1980, 1985), un processusse définit comme des activités reliées visant à réaliser un output global au bénéficed�un client interne ou externe. Pour Lorino (1995), il s�agit d�activités, reliées pardes flux d�information, qui produisent un bien défini.

Le progiciel choisi ne peut qu�influer sur le degré de centralisation dans lafirme. Il permet de décentraliser la saisie des données ainsi qu�un accès central etlocal à l�information agrégée à divers niveaux du système. Toujours dans notreexemple de multinationale, avec ses filiales appréciatives de leur autonomie, no-tamment sur les plans comptable et informatique, et où les rapports mensuels versla société-mère n�étaient pas standardisés, l�implantation d�un ERP s�est accompa-gnée d�un plan comptable commun, avec des conséquences, heureuses semble-t-il,pour la direction centrale. D�abord, la maison-mère se déclare fort satisfaite d�unmeilleur contrôle de gestion, les comparaisons de performance interfiliales étantdevenues plus fiables. Elle voit aussi se réduire son fardeau d�encodage, du fait queles comptables des filiales communiquent avec elle en langage standardisé. Égale-ment, elle devient capable de forer à volonté et jusqu�au détail, dans les stratesd�information locales (exemple: l�agence X dans tels pays a encaissé Y hier). Lerevers ici, c�est méfiance et perte d�autonomie pour les filiales. Qui plus est, cer-taines des filiales, étant très spécifiques et donc mal prises en compte dans lesystème standardisé, se retrouvent en manque d�information pour leurs propres finsdécisionnelles ou de contrôle.

Selon Davenport (2000) et sa synthèse de quelque 50 cas d�implantationd�ERP, il y a des firmes qui, au départ du processus, ne spécifient aucun objectiforganisationnel. D�autres s�y engagent après un échec dans leurs efforts d�intégra-tion. Enfin, certaines visent explicitement, via l�ERP, à créer une culture plus

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disciplinée autour de systèmes d�information centrés sur les processus.

On distingue également trois approches dans le choix du progiciel et desapplications au sein des grands groupes: centralisée, fédérale et décentralisée. Dansl�approche centralisée, la maison-mère choisit aussi bien le progiciel que les mo-dules à implanter et les impose aux divisions et filiales. Selon l�approche fédérale(Davenport, 2000: 123-125), les entités ont en commun un sous-ensemble de pro-cessus et d�informations. Dans l�approche décentralisée, toute entité d�une certaine

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taille reste libre de construire son système d�information en fonction de ses besoinsspécifiques.

Il nous reste à résumer l�impact apparent de la solution ERP sur le contrôlede gestion dans les organisations.

VIII. IMPLANTATION D�UN ERP ET ÉVOLUTION DU CON-TRÔLE

Rappelons d�abord quelques auteurs récents sur les innovations en contrôlede gestion. Anderson (1995) adapte le modèle unificateur de Kwon et Zmud (1987)à l�implantation des systèmes d�information pour étudier comment l�innovationABC/ABM, de contrôle par activité de la firme et de ses coûts, s�est répandue chezGeneral Motors. (NB: AB symbolise �activity-based�, C �costing� et M �manage-ment�.) Gosselin (1997) examine, dans une perspective contingente, le rôle jouépar la stratégie et la structure dans l�adoption et l�implantation d�une innovationcomme l�ABC/ABM.

Notre perspective se veut contingente: l�impact des ERP sur le contrôle degestion dépend surtout des deux principales variables contingentes que sont lastratégie et la structure.

Le premier impact important d�un ERP central est qu�il impose une visionprocessus de l�organisation. Il lie, et donc intègre, divers processus et fonctions degestion. L�ampleur de l�intégration dépendra des choix stratégiques quant au nom-bre de processus inclus dans l�ERP et quant à la structure des centres de respon-sabilité. Les modules retenus traduisent la manière dont les firmes rassemblentleurs activités en processus de gestion. L�ERP va donc permettre de mesurer la per-formance des processus et renforce ainsi la vision processus par rappport à la visionfonctionnelle classique.

Notons que cette vision processus de l�ERP semble compatible avec la visionsous-jacente au modèle de contrôle par activité de type ABC. Toutefois, les

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premières versions de l�ERP de SAP, par exemple, ne facilitaient pas l�instaurationd�un contrôle de type ABC. Granlund et Malmi (2000) estiment que les firmesayant adopté l�ABC avant d�implanter un ERP ne l�ont pas intégré dans l�ERP etl�utilisent en parallèle.

Notons aussi que si la firme choisit d�implanter l�ensemble des modules d�unERP, elle en obtient d�ordinaire une intégration essentiellement financière. Eneffet, toutes les transactions liées aux fonctions intégrées dans l�ERP (production,

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achats, ventes, effectifs, etc.) ayant un quelconque impact sur les flux financiersvont se répercuter dans les modules de comptabilité tant financière que de gestion.Et toutes les déviations (erreurs ou inexactitudes) dans la traduction des processusde gestion dans l�ERP vont faire apparaître des déviations dans le module decomptabilité financière. Ainsi, l�information transactionnelle saisie dans les mo-dules et celle traduisant son impact sur les flux financiers se déversent en entonnoirdans le module de comptabilité financière. Il s�ensuit que l�ERP centrée sur lacomptabilité financière a plusieurs conséquences: (1) il permet de traduire avecgrande transparence la performance économique et financière des fonctions qui luisont intégrées; (2) la standardisation et l�intégration y adoptent un langage surtoutcomptable et financier; (3) les financiers et contrôleurs y trouvent plus de pouvoir;etc.

Par ailleurs, l�intégration des modules, en particulier l�intégration entrecomptabilité financière et comptabilité de gestion, limite les jeux et maquillagescomptables, ce qui donne plus de transparence. Elle permet aussi de réduire le délaidans les rapports mensuels à 3 ou 4 jours (contre 15 ou 20 avant).

Même si le métier de contrôleur de gestion en contexte d�ERP reste à pré-ciser, on en voit déjà des éléments d�évolution. Par exemple, la saisie d�une bonnepartie de l�information comptable se fait hors département, dans les fonctions(vente, production, etc.) où les transactions sont initiées et enregistrées. À leur tour,les enregistrements génèrent leur traduction comptable. Par ailleurs, la vitesse desortie des rapports, due aux calculs programmés, laisse du temps au comptable pourdevenir un analyste de gestion. Mais cette évolution de chiffreur vers analystedevrait réduire les effectifs nécessaires en comptabilité de gestion.

Une fois l�ERP implanté, les contrôleurs de gestion jouent d�ordinaire un rôleimportant de maintenance et d�adaptation de l�ERP du fait qu�ils sont en charge desbases de données sous-jacentes. Il apparaît également que leur rôle dépend avanttout de la stratégie d�implantation de l�ERP. En effet, une stratégie centralisatriceappelle naturellement une centralisation complète des fonctions de comptabilité, definance, de contrôle et d�audit au sein d�un centre de services partagés. Une

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stratégie fédéraliste, où seuls quelques processus sont communs aux entités, mèneà une autre organisation en matière de finance et de contrôle, avec à la fois undépartement central et des contrôleurs agissant au niveau des entités.

IX. CONCLUSION

Les études (de cas ou autres) sur le contrôle de gestion en contexte ERP nesont pas très nombreuses. Il en ressort néanmoins quelques conclusions.

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(1) Il est primordial que l�organisation définisse avec soin un système de contrôlebien adapté à ses choix stratégiques et structurels, ceux-ci se voyant confirmésau fil de l�implantation de l�ERP; il résulte de tels choix une certaine diversitéd�implantations ERP dans la pratique; or, cette diversité se manifeste dans lenombre de modules retenus et dans les façons d�adapter des processus ERPstandards ou de les particulariser selon ses besoins.

(2) Il importe d�établir la rentabilité de l�investissement en ERP et donc les éco-nomies à en dériver (en personnel surtout) tout en prévoyant un suivi serré pourqu�elles se réalisent.

(3) Il faut pouvoir compter sur les qualités et compétences qu�exige l�ERP. Lecomptable de gestion va créer de la valeur pour l�entreprise dans la mesure oùson analyse des chiffres produits par le système permet à la firme d�améliorerses décisions, son contrôle et sa gestion des risques.

(4) Il est crucial, en contexte ERP, d�investir suffisamment pour s�assurer que sonpersonnel a la formation requise et peut gérer la transition.

De nombreuses questions restent ouvertes. Avec la nouvelle vague ERP(subséquente aux solutions An 2000 et Euro), on pourra mieux voir comment lesfacteurs de contingence, comme la structure et la stratégie, agissent sur les choix deprogiciels et, en même temps, mieux saisir comment la qualité du contrôle de ges-tion évolue dans les firmes ayant opté pour un ERP.

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SUMMARY THE IMPACT OF ERP SYSTEMS ON MANAGEMENT CONTROL: A FIRST ASSESSMENT

SUMMARY

The Impact of ERP Systems on Management Control: A First Assessment

Yves de Rongé (Université de Louvain)

The author assesses the ongoing impact of Enterprise Resource Planning(ERP) systems. He first recalls the history of information systems, starting withcomputerization in the fifties, and ending with a discussion of today�s needs, suchas: integrated information flows between cross-functional activities belonging tothe same business processes; definition of a common language throughout theorganization; support of new organizational structures and cross-functional teamsdispersed geographically; striking an adequate balance between centralizationand decentralization; etc.

Next, he brings out the main characteristics of ERP systems: standardizationof the information in the firm and the integration of business processes. He typifiesthe various information systems that ERP systems can accommodate. He assessesthe impact of ERP systems on the management control function. To do so, he posi-tions the ERP system with respect to the three classical levels of control (strategy,management, operations). Then, using a contingency approach to the control func-tion, he studies the implementation process of an ERP system within anorganization by looking at the five phases involved: (1) Choice of an ERP solution;(2) Detailed analysis of existing business processes; (3) Process reengineering; (4)Customization of the ERPS; and (5) Test and production.

Finally, the author examines how the strategy and structure of the firm relateto an ERP system. His synthesis of various case studies reveals that the ERP solu-tions chosen by firms evolve during their implementation so as to adapt to boththeir strategy and structure. He finds, namely that: the controlling role within firms

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with an ERP system is gradually changing, from information producer to informa-tion analyst; and the main changes brought to the management control function byan ERP system implementation deserve additional research.