L’impact de la révolution numérique sur l’emploi : Enjeux ...

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SECTION FRANÇAISE COMMISSION DE LA COOPERATION ET DU DEVELOPPEMENT M. Mansour Kamardine, Rapporteur, section française L’impact de la révolution numérique sur l’emploi : Enjeux et perspectives dans l’espace francophone

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SECTION FRANÇAISE

COMMISSION DE LA COOPERATION ET DU DEVELOPPEMENT

M. Mansour Kamardine, Rapporteur, section française

L’impact de la révolution numérique sur l’emploi :

Enjeux et perspectives dans l’espace francophone

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SOMMAIRE

INTRODUCTION .............................................................................. 5 I. QUELS SONT LES TERMES DU DÉBAT ? .................................................... 7

A. LES ACTEURS DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE ....................................... 7

B. LES MÉTIERS DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE ........................................ 8

II. L’IMPACT SUR L’EMPLOI EST SUJET À CONTROVERSES ...................... 9

A. LA GRANDE INCERTITUDE DES DESTRUCTIONS D’EMPLOIS ............. 9

B. LA GRANDE INCONNUE DES CRÉATIONS D’EMPLOIS ....................... 12

1. Les emplois directs ............................................................................................. 13

2. Les emplois indirects .......................................................................................... 13

3. Les futurs nouveaux métiers ............................................................................... 15

C. L’IMPACT SUR LA LOCALISATION DE L’EMPLOI ................................. 15

1. Au plan international........................................................................................... 15

2. Au plan national .................................................................................................. 16

III. L’IMPACT SUR LA « SITUATION DE TRAVAIL » ...................................... 18

B. COMMENT GÉRER LA TRANSITION PERMETTANT LE « REVERSEMENT » DES EMPLOIS MENACÉS VERS D’AUTRES EMPLOIS ? .............................................................................................. 23

1. LA RA. LE CONTENU DE CERTAINS EMPLOIS VA EVOLUER ET DE NOUVELLES COMPÉTENCES SERONT RECHERCHÉES ................... 18

1. Le contenu de certains emplois va évoluer ......................................................... 18

2. Quelles compétences pour demain ? ................................................................... 20

esponsabilité des entreprises ................................................................................... 23

2. La question cruciale de la formation initiale et continue .................................... 24

C. LES RISQUES PSYCHO-SOCIAUX ET LA PROTECTION SOCIALE ..... 25

IV. L’IMPACT DANS L’ESPACE FRANCOPHONE ......................................... 28

A. SI LES ÉCARTS DE NIVEAU ENTRE LES ÉCONOMIES LES PLUS AVANCÉES ET LES ÉCONOMIES LES MOINS AVANCÉES DE L’ESPACE FRANCOPHONE SE RETROUVENT EN MATIÈRE DE

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NUMÉRISATION, TOUTES ONT EN COMMUN LE DÉVELOPPEMENT D’UNE STRATÉGIE NUMÉRIQUE .......................................................... 28

B. L’IMPACT DU NUMÉRIQUE SUR LE VOLUME DE L’EMPLOI ET LES DÉLOCALISATIONS DANS L’ESPACE FRANCOPHONE : DES APPRÉCIATIONS NUANCÉES ............................................................... 33

C. L’IMPACT DU NUMÉRIQUE SUR LA SITUATION DE TRAVAIL EST ENCORE PEU ABORDÉ DANS L’ESPACE FRANCOPHONE ................ 37

D. TOUS LES PAYS DE L’ESPACE FRANCOPHONE SONT CONSCIENTS DES ENJEUX EN MATIÈRE D’ÉDUCATION ET DE FORMATION ......... 38

ANNEXE I : QUESTIONNAIRE ADRESSÉ AUX SECTIONS ............ 45

ANNEXE II : RÉPONSES DES SECTIONS AU QUESTIONNAIRE DU RAPPORTEUR .................................................................................... 47

– Andorre............................................................................................. 47

– Belgique ........................................................................................... 57

– Canada .............................................................................................. 64

– Madagascar ...................................................................................... 74

– Mali .................................................................................................. 77

– Québec .............................................................................................. 83

– Roumanie ......................................................................................... 93

– Sénégal ............................................................................................. 101

– Suisse ................................................................................................ 105

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CHER(E)S COLLEGUES,

En à peine vingt ans, notre monde en est à sa troisième révolution numérique. Après celle de la recherche d’informations (search) engendrée par les moteurs de recherche, puis celle des réseaux sociaux due aux téléphones intelligents (smartphones), la troisième est en cours et connaît une accélération phénoménale avec la convergence des entreprises plateformes, des objets connectés, dont le nombre dépassera 20 milliards en 2020 nous dit-on, de la robotisation, de l’intelligence artificielle, du traitement des données de masse (big data), des imprimantes 3D…

La digitalisation -ou plutôt devrait-on dire la transformation digitale, car il s’agit bien d’une disruption, d’une innovation par la rupture- apparaît irréversible. Elle touche à la fois les personnes physiques, nos concitoyens, et les personnes morales, nos institutions comme nos entreprises, qui les emploient. Elle offre d’innombrables opportunités et perspectives, qui peuvent donner le vertige.

Il s’ensuit un rapport ambivalent au digital, entre attrait et répulsion. Ainsi de nombreuses peurs sont agitées, parfois un peu facilement pour ceux qui estiment qu’il ne faut pas prendre le numérique pour plus qu’il n’est, c’est-à-dire un outil au service de l’homme. A cet égard, il est frappant d’apprendre que l’intelligence artificielle, que l’on présente comme la nouveauté actuelle est en réalité un vieux concept de presque soixante ans. En outre, il n’y a pas de définition intangible de la digitalisation, qui dépend essentiellement des usages que l’on en fait. David Lacombled, auteur de Digital Citizen et président du groupe de réflexion La Villa Numeris, juge par ailleurs que « le numérique n’est pas en lutte contre le réel mais en est au contraire partie intégrante ».

Si les Français considèrent à 65 % que le numérique est davantage une chance qu’une menace, qu’il rend leur vie meilleure, selon Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos, dans de nombreux pays ce taux est supérieur à 80 %. Puisque l’on en est aux comparaisons internationales, ajoutons également qu’en mars 2017, la Commission européenne plaçait la France à la 16e place de l’Union européenne (UE) dans un classement relatif à l’économie et la société numériques, notamment en raison du retard pris par ses entreprises dans l’adoption des outils spécifiques. Selon la Direction générale des entreprises (DGE), le taux d’intégration des technologies numériques-clés dans les entreprises françaises (facturation électronique, informatique en nuage, identification électronique, vente sur Internet…) est inférieur à la moyenne de l’UE. Dans l’UE, trois PME sur quatre sont présentes sur Internet, contre deux sur trois seulement en France.

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Déjà au XVIIe siècle, Jean-Charles Léonard Simonde de Sismondi, économiste genevois, théoricien des crises, annonçait un chômage généralisé provoqué par la multiplication des machines, et prédisait qu’un jour le Roi d’Angleterre pourrait, en tournant une manivelle, produire tout ce dont le pays a besoin. La « manivelle de Sismondi » est ainsi devenue la référence de tous ceux qui associent progrès technique et chômage. Aujourd’hui, le doute cartésien continue d’imprégner la culture française si bien qu’au moment de diffuser des innovations, les Français pèsent les risques. Ainsi, un Français sur deux pense que le numérique va raréfier le travail, 7 % d’entre eux seulement pensent qu’il va en créer ! Ce rapport ambivalent au digital qui s’observe donc également dans le monde du travail traduit un paradoxe entre, d’un côté, la nécessité de la transformation numérique pour que tout un chacun profite des bienfaits du digital, en particulier en matière d’autonomie et de mobilité, et, de l’autre, cette fluidité nouvelle qui oblige plus que jamais à la performance.

Consacrer un rapport à l’étude de l’impact de la révolution numérique sur l’emploi revient in fine à explorer plusieurs pistes. En voici quelques-unes.

Quel est l’impact sur le volume de l’emploi, en termes de disparitions mais aussi de créations ? Quel est l’impact sur la structure de l’emploi ? Quels sont les métiers et les secteurs les plus concernés ? Quels types d’entreprises sont concernés (PME-PMI, TPE-TPI, grands groupes, jeunes pousses ou startups) ?

Quel est l’impact sur la localisation de l’emploi, à l’échelle nationale et internationale ? Quelles pourraient être les zones d’emploi les plus concernées ? Les technologies pourraient-elles favoriser un mouvement de relocalisation géographique des emplois ?

Comment les métiers sont-ils appelés à évoluer ? Quels types de compétences seront à l’avenir privilégiés ? Quels sont les risques psycho-sociaux ? Quels sont les enjeux pour la sphère éducative et de formation ?

Dans l’espace francophone, comment réagissent les autres pays membres ?

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I. QUELS SONT LES TERMES DU DÉBAT ?

A. LES ACTEURS DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

En France, l'Observatoire du numérique souligne que l’économie numérique recouvre des réalités très différentes selon les auteurs et que cette dénomination a évolué au cours des années : nouvelles technologies, nouvelle économie, technologies de l’information et de la communication, économie électronique…

Dans la statistique publique, l’économie numérique est assimilée aux technologies de l’information et de la communication (TIC), et en particulier aux secteurs producteurs. Pour l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), le secteur des TIC regroupe les entreprises qui produisent des biens et services supportant le processus de numérisation de l’économie, c’est-à-dire la transformation des informations utilisées ou fournies en informations numériques (informatique, télécommunications, électronique). L’économie numérique englobe le secteur des « télécommunications, notamment l'Internet, le haut débit et les mobiles, ainsi que la convergence entre les secteurs de radiotélédiffusion et du câble, et les services de télécommunications plus traditionnels ». Pour le syndicat professionnel Syntec numérique, le secteur regroupe les entreprises de services du numérique, les anciennes sociétés de services en ingénierie informatique (SSII), le conseil en technologie, les éditeurs de logiciel et les entreprises du Web. L’Organisation pour la coopération et le développement en Europe (OCDE) y ajoute les fabricants, réparateurs et commerçants de TIC. Pour l’Association de l'économie numérique (ACSEL), la notion d'économie numérique est transversale. L'économie numérique « n'est pas l'apanage de quelques secteurs qui produisent ou qui sont basés sur les TIC, mais aussi les secteurs qui les utilisent. L'économie numérique comprend le secteur des télécommunications, de l'audiovisuel, du logiciel, de l'Internet et les secteurs qui les utilisent en tant que cœur ou support de leur activité ».

Au moment où l’économie numérique connaît une forte expansion, elle ne saurait se limiter à un secteur d’activité en particulier et il convient de prendre en compte l’ensemble des secteurs qui s’appuient sur les TIC, producteurs et utilisateurs. Certains secteurs sont apparus avec le développement technologique et ne recouvrent pas simplement des activités qui utilisent les nouvelles technologies dans le seul but d’accroître leur productivité : il en est ainsi du commerce électronique et des services en ligne qui sont des acteurs centraux de l’économie numérique, mais aussi de l’industrie, le terme « industrie 4.0. » résumant tous les processus permettant de faire fonctionner des usines digitalisées.

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Ainsi on distingue communément les quatre catégories d’acteurs économiques suivants :

1. Les entreprises des secteurs producteurs des TIC au sens de l’OCDE ou de l’INSEE, dont les activités s’exercent dans les domaines de l’informatique, des télécommunications et de l’électronique.

2. Les entreprises dont l’existence est liée à l’émergence des TIC (services en ligne, jeux vidéo, e-commerce, médias et contenus en ligne…).

3. Les entreprises qui utilisent les TIC dans leur activité et gagnent en productivité grâce à elles (banques, assurances, automobile, aéronautique, distribution, administration, tourisme…).

4. Les particuliers et les ménages qui utilisent les TIC dans leurs activités quotidiennes, pour les loisirs, la culture, la santé, l’éducation, la banque, les réseaux sociaux…

B. LES MÉTIERS DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

Si de très nombreux métiers se digitalisent, il faut distinguer les métiers « cœur » du numérique et les métiers qui sont des utilisateurs des technologies. Plusieurs catégories peuvent être constituées :

1. Les métiers « noyau dur » qui produisent les technologies numériques (informatique, télécommunications, électronique).

2. Les nouveaux métiers apparus par et pour le numérique et que l’on retrouve dans tous les secteurs d’activité (community manager, data-scientist, data-analyst…).

3. Les métiers impactés et nécessitant une adaptation des compétences (dans la production audiovisuelle ou industrielle par exemple).

4. Les métiers pour lesquels les technologies numériques constituent de nouveaux outils sans toutefois les bouleverser radicalement.

5. Les métiers qui pourraient disparaître.

Au regard de ces considérations, les perspectives futures oscillent entre création, transformation et destruction d’emplois pour lesquelles différentes projections quantitatives sont proposées.

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II. L’IMPACT SUR L’EMPLOI EST SUJET À CONTROVERSES

Les effets de la digitalisation sur l’emploi, en termes de volume, de structure et de localisation, suscitent de nombreux débats et de fortes inquiétudes dont deux ressortent particulièrement. La première crainte est d’ordre quantitatif et porte sur la réduction de la quantité de travail et d’emplois provoquée par les gains de productivité induits par la numérisation. Il faut le dire, la crainte d’un chômage technologique, d’un futur sans emploi existe bel et bien.

A. LA GRANDE INCERTITUDE DES DESTRUCTIONS D’EMPLOIS

Depuis quelques années, plusieurs études prospectives, essentiellement étrangères, ont tenté d’estimer la part des emplois actuels qui pourraient disparaître avec l’automatisation et conclu à des effets potentiels significatifs, voire massifs, sur le volume de l’emploi. Certains prédisent la fin du travail, d’autres jugent que l’émergence de nouveaux produits et services et leur production nécessiteront un travail de plus en plus qualifié. Nul ne s’accorde sur l’ampleur de ce risque.

En 2013, l’étude menée par les chercheurs Frey et Osborne1 a estimé les effets de l’automatisation sur l’emploi américain sur vingt ans en décomposant les emplois américains en activités élémentaires (connaissances, compétences et capacités requises) et fait apprécier la probabilité d’automatisation de celles-ci par un panel d’experts, à l’aune des tendances technologiques perceptibles à moyen-long terme. Ils ont conclu que deux emplois sur cinq aux Etats-Unis seront « fortement affectés par l’automatisation », sans être forcément tous supprimés. En 2014, le cabinet Roland Berger2 a transposé cette méthode à la structure de l’emploi en France pour arriver à un résultat similaire : deux emplois français sur cinq présentent une probabilité d’automatisation élevée.

D’autres travaux ont suivi, dont les résultats sont moins alarmistes. Tout d’abord, ils ont porté sur des données françaises, ensuite ils ont adopté une analyse individuelle et non plus par métier dans la mesure où les individus eux-mêmes déclarent les tâches qu’ils exercent, alors que dans la méthode adoptée par Frey et Osborne les experts ont raisonné à partir d’une liste de taches prédéterminées pour chaque métier, supposant ainsi que l’ensemble des personnes effectuant le même métier effectuent le même type de tâches. Or, dans la réalité, les tâches sont hétérogènes au sein d’une même profession. La Fabrique de l’Industrie laboratoire d’idées, a publié une synthèse de ces travaux plus récents réalisés par 1 Frey C. B., Osborne M. A., 2013, « The future of employment: How susceptible are jobs to computerisation », Oxford Marin School. 2 Roland Berger, 2014, « Les classes moyennes face à la transformation digitale », octobre.

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l’OCDE en 20161, par France Stratégie en 2016 également2 et par le Conseil d’orientation pour l’emploi (COE) en 2017. Le tableau suivant est tiré de cette synthèse :

Etude Date Niveau

d’analyse retenu

Données Horizon Part des

emplois à risque élevé

Roland Berger 2014 Métiers

Structure de l’emploi française

(Insee 2013)

Moyen à long terme (10-20

ans) 42 %

Arntz, Gregory, Zierahn (OCDEa) 2016 Individus

(tâches) Enquête PIAAC

(2012)

Moyen à long terme (10-20

ans) 9 %

Le Ru (France Stratégie) 2016

Individus (conditions de

travail)

Enquête conditions de travail de la

DARES (2013)

Futur proche 15 %

COE 2017 Individus

(conditions de travail)

Enquête conditions de travail de la

DARES (2013)

Futur proche 10 %

Dans l’étude menée par la DARES pour le compte de France Stratégie (Le Ru), on considère que les emplois exigeant de répondre vite à une demande extérieure avec une certaine marge de manœuvre sont peu automatisables, alors qu’à l’inverse, les travaux bien spécifiés dont le rythme n’est pas déterminé par une demande extérieure aléatoire le seraient. En croisant ces deux critères, on compte, en 2013, 9,1 millions d’emplois peu automatisables en France, et ce nombre a augmenté de 33 % en quinze ans, passant de 6,9 millions en 1998 à 9,1 millions en 2013. Par ailleurs, 3,4 millions d’emplois seraient automatisables, soit 15 % des emplois, avec une tendance décroissante. De 1998 à 2013, on compte 200 000 emplois automatisables de moins. Entre les deux, il y aurait 10,5 millions d’emplois dits « hybrides » qui satisfont un seul des deux critères. En outre, les risques diffèrent entre les secteurs de l’industrie et des services. Une part importante des emplois industriels (25 %) apparaît automatisable contre 13 % pour les métiers de services, parce qu’ils sont plus fréquemment en relation avec le public.

Pour le COE, environ 10 % des emplois, appelés « emplois exposés », présentent un risque élevé d’automatisation, et donc risquent de disparaître, et un emploi sur deux (50 %) verra son contenu évoluer fortement, on parle pour cette dernière catégorie d’« emplois dont le contenu est susceptible d’évoluer ». Parmi les emplois les plus « exposés », les métiers proportionnellement les plus

1 OCDE, 2016a, « Automatisation et travail indépendant dans une économie du numérique ». 2 Le Ru N., 2016, « L’effet de l’automatisation sur l’emploi : ce qu’on sait et ce qu’on ignore », Note d’analyse de France Stratégie.

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représentés par rapport à leur part dans l’emploi salarié total sont le plus souvent des métiers manuels et peu qualifiés, notamment dans les industries de process, la manutention, le second œuvre du bâtiment, la mécanique, les agents d’entretien, les caissiers. Quelques métiers qualifiés peuvent être concernés dans la mécanique et les industries de process. Parmi les emplois les plus « susceptibles d’évoluer », les métiers proportionnellement les plus représentés par rapport à leur part dans l’emploi salarié total sont aussi souvent des métiers manuels peu qualifiés, mais ils relèvent plus du secteur des services que les métiers les plus « exposés » comme conducteurs, caissiers, agents d’exploitation des transports, employés et agents de maîtrise de l’hôtellerie et de la restauration, aides à domicile et aides ménagères… Pour résumer, le COE juge que « le progrès technologique continuerait à favoriser plutôt l’emploi qualifié et très qualifié : parmi les métiers les plus vulnérables, les métiers surreprésentés […] sont souvent des métiers pas ou peu qualifiés ».

D’aucuns considèrent d’ailleurs que la diffusion des TIC contribuera à creuser les inégalités entre les personnes les mieux formées aux emplois hautement qualifiés et dûment rémunérés et les autres, qu’il s’agisse des personnes qui occuperont des emplois peu qualifiés dans les services, à faible productivité et donc mal rémunérés, ou des personnes qui seront de plus en plus menacées par la raréfaction des métiers situés au milieu de la distribution des revenus et les plus touchés par l’automatisation.

Quant à l’OCDE, elle estime que 9 % des emplois en France présentent un « risque élevé de substitution » par des robots, soit 2,4 millions d’emplois. A contrario, France Stratégie, se basant sur des données Destatis, note que l’industrie automobile allemande, l’une des plus robotisées au monde, employait encore plus de 800 000 salariés en 2015, soit autant qu’il y a dix ans et 100 000 de plus qu’il y a vingt ans.

Enfin, la dernière étude publiée par le Forum économique mondial de Davos, à l’occasion de son sommet de Tianjin (Chine), en 2018, et intitulée « Future of Jobs Report »1 se montre optimiste en estimant que l’automatisation ne va pas provoquer plus de chômage mais va créer plus d’emplois qu’elle n’en détruira, du moins dans un avenir proche (moins de dix ans). Cette étude a été menée auprès de plus de 300 entreprises présentes dans vingt pays et totalisant plus de 15 millions d’employés. Elle prévoit la disparition de 75 millions d’emplois d’ici à 2025, particulièrement dans les secteurs de la comptabilité, du secrétariat, des usines d’assemblage, des centres de relation client ou encore des services postaux. Parallèlement, 133 millions d’emplois pourraient être créés 1 https://fr.weforum.org/reports/the-future-of-jobs-report-2018

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grâce à la révolution numérique. Le solde positif serait ainsi de 58 millions d’emplois au total.

Un emploi a priori automatisable n’est pas nécessairement automatisé : l’exemple des caisses automatiques dans la distribution

Les caisses automatiques ont été mises en service en France à partir de 20041, conduisant le client à réaliser lui-même les tâches habituellement dévolues au caissier. En 2012, environ 35 % des terminaux de caisse en grande distribution étaient des caisses libre-service2. L’employé doit dorénavant gérer plusieurs postes de caisses automatiques mais aussi accueillir plusieurs clients ; il est ainsi mobilisé dans plusieurs interactions à la fois3. Au cours des dix dernières années sont également apparus le drive et la livraison à domicile. Et pourtant le nombre d’emplois de caissiers n’a diminué que d’environ 10 % en dix ans, passant de 205 000 à 185 0004. Les caisses automatiques ne sont que l’une des causes de la baisse du nombre de caissiers et ne se sont pas totalement substituées aux emplois de caissiers.

B. LA GRANDE INCONNUE DES CRÉATIONS D’EMPLOIS

Même si de nombreuses études rétrospectives, aux approches et méthodes différentes, ont montré que les progrès technologiques des trente dernières années avaient eu un effet favorable sur l’emploi, dans la mesure où l’introduction d’innovations a été globalement bénéfique à l’emploi, les évaluations chiffrées se révèlent tout aussi difficiles à établir en matière de créations d’emplois.

Deux thèses s’opposent actuellement sur l’ampleur des gains de productivité à attendre des TIC au niveau macroéconomique. Pour certains experts (Erik Brynjolfsson et Andrew McAffee, chercheurs au MIT), le progrès technologique, étant exponentiel, numérique et combinatoire, sera source de forts gains de productivité. Pour Robert Gordon, économiste, l’épuisement des bénéfices des innovations passées comme la machine à vapeur, l’électricité, le moteur à explosion, la chimie, etc., laisse augurer de moindres gains de productivité de la part du numérique, dans la mesure où son développement ne transformera pas aussi profondément l’économie que ne l’ont fait ces innovations.

1 LSA Commerce & Consommation (2014), “ Il y a dix ans, les caisses automatiques arrivaient” . 2 Benoît-Moreau F., Bonnemaizon A., Cadenat S. et Renaudin V., « Le consommateur et les caisses automatiques : pour une

compréhension du processus d’adoption », travaux menés dans le cadre d’un contrat de recherche avec l’enseigne Auchan. 3 Ba A. et Vignon C. (2013), « Mieux gérer les incidences de l’automatisation des services : le cas des caisses libre-servive », Gestion, vol.

38. 4 Source : Insee, enquête Emploi, calculs France Stratégie.

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1. Les emplois directs

L’automatisation est d’abord susceptible de créer des emplois directs : dans la recherche et développement (R&D), la conception, la production, la commercialisation ou la maintenance d’automates. Pour le COE, le potentiel de création d’emplois directs est significatif dans le numérique, secteur où la dynamique devrait rester soutenue dans les prochaines années, et plus mesuré dans la robotique, compte tenu principalement de la faible taille du secteur actuellement en France.

Le syndicat professionnel Syntec numérique prévoyait entre 2013 et 2018 une croissance de 15 800 emplois dans la filière numérique et de 20 900 emplois dans les autres secteurs connexes, soit plus de 36 000 emplois. Or ces prévisions ont été atteintes en deux ans et demi.

La Commission européenne a estimé la pénurie de compétences dans le numérique en Europe à environ 900 000 emplois à l’horizon 20201. Le volume de l’emploi pour ces profils a connu en Europe une augmentation moyenne de 4 % par an, dix fois plus rapide que l’évolution de l’emploi total au cours des années récentes. Une pénurie croissante de compétences expertes dans les nouvelles technologies est évaluée à 80 000 emplois d’ici 2020 pour les seules TIC, hors secteurs liés aux nouvelles technologies. Pour la Commission européenne, le numérique créerait 100 000 nouveaux emplois entre 2012 et 2020 en France.

En 2017, Pôle Emploi chiffre à 58 % les projets d’embauche dans les familles de métiers de l’informatique considérés comme « difficiles » en raison de l’importance des créations d’emplois et de l’offre insuffisante de compétences. En France, on dénombre 310 000 ingénieurs en informatique et télécoms de plus qu’au début des années 1980, alors que la baisse du nombre d’emplois de secrétaire a débuté au milieu des années 1990 avec le déploiement de l’informatique2. Il y a presque autant d’ingénieurs en informatique et télécoms que de secrétaires.

2. Les emplois indirects

Il est généralement admis que les entreprises utilisant les technologies numériques gagnent en compétitivité et accroissent ainsi leur chiffre d’affaires, voire conquièrent de nouveaux marchés, et donc développent l’emploi. Dans les entreprises industrielles par exemple, l’automatisation et la numérisation de la

1 Commission européenne, 2014, « E-skills for jobs in Europe: Measuring Progress and Moving Ahead ». 2 Selon les travaux de Frey et Osborne (2013), le métier de secrétaire et d’assistant administratif a une probabilité de 96 % d’être

automatisé.

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production peuvent, dans un premier temps, supprimer des emplois. Mais dans un second temps, en renforçant sa compétitivité, l’entreprise peut gagner de nouvelles parts de marché, augmenter sa production et embaucher de nouveaux salariés. Selon Bruno Bonnell, député et spécialiste de la robotique, en France 90 % des bénéficiaires des aides RobotStartPME, qui permettent à une PME d’acheter un premier robot, ont vu leur emploi croître dans les trois ans qui ont suivi l’achat du robot.

Cuisines Schmidt : des effectifs multipliés par trois grâce à la robotisation et à la numérisation1

Schmidt groupe est allé très loin dans la robotisation et la numérisation de son activité avec son projet lancé il y a dix ans : une cuisine fabriquée en un jour, livrée au bout de dix jours avec une qualité 100 %. Le vendeur crée virtuellement une cuisine avec les clients, la commande est traitée par échange de données informatiques et la fabrication est robotisée. Une commande standard peut être réalisée presque sans intervention de l’homme et les délais de fabrication sont passés de sept jours à une journée.

Concrètement, l’automatisation a permis de maîtriser la qualité des produits mais aussi de réduire la pénibilité du travail et, surtout, d’éviter la délocalisation. Il est vrai que l’automatisation peut conduire à supprimer certains postes dans un premier temps. Mais Schmidt a conquis de nouveaux clients en France et en Europe, ce qui a créé des emplois malgré un recours de plus en plus important aux robots. En 60 ans, le groupe a construit quatre sites de production, le cinquième ouvrira en 2019. Il y a trois fois plus de salariés qu’avant dans l’entreprise (+ 1 500). Les anciens ouvriers ont été formés, ils se sont convertis en opérateurs et en pilotes d’installations complexes. Schmidt recrute aujourd’hui une centaine de profils qualifiés par an.

Les fournisseurs des entreprises digitalisées peuvent profiter automatiquement de cette croissance d’activité et d’autres acteurs économiques également indirectement, dans d’autres secteurs et d’autres territoires. Certaines études estiment que chaque emploi créé dans le secteur de la haute technologie entraîne la création d’environ cinq emplois complémentaires2. D’autres montrent que pour 100 emplois créés dans le secteur exposé à la concurrence internationale, 64 emplois abrités supplémentaires sont créés dans la même zone d’emploi et 25 dans d’autres entreprises du secteur exposé3. S’agissant des emplois induits, beaucoup peuvent être créés à l’étranger. Il apparaît donc que les effets du numérique sur l’emploi national dépendent de la compétitivité de l’offre française. 1 Extraits de « Automatiser en renforçant le rôle de l’homme », Elisabeth Bourguinat, compte rendu du séminaire « Aventures

industrielles » de l’Ecole de Paris du management consacré au témoignage d’Anne Leitzgen (Cuisines Schmidt), 15/11/2016. 2 Moretti E., 2010 « Local Multipliers », American Economic Review. Papers and Proceedins, No. 100, pp. 1-7 ; Goos, M., J. Konings and

M. Vandeweyer, 2015, « Employment Growth in Europe: The Roles of Innovation, Local Job Multipliers and Institutions», Utrecht School of Economics Discussion Paper Series, Vol. 15, No. 10.

3 Frocrain P., Giraud P.-N., 2016, « Dynamique des emplois exposés et abrités », Les Notes de la Fabrique, n°17, Presses des Mines.

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3. Les futurs nouveaux métiers

La digitalisation permettrait aussi de développer des activités nouvelles (divertissements, voyages, santé, apprentissages…) créant ainsi de nouveaux métiers et donc de nouveaux emplois qui n’existaient pas jusqu’alors. Cette mutation engendre la création d’emplois directs et d’emplois induits. Alfred Sauvy a nommé ce mécanisme le « déversement »1 citant l’exemple des porteurs d’eau à Paris, au XIXe siècle, qui étaient environ 20 000 et dont les emplois ont été détruits par l’installation des canalisations, ce qui a créé des emplois dans d’autres activités. Le COE relève que 149 nouveaux métiers sont apparus depuis 2010, dont 105 appartiennent au domaine du numérique. En 2013, Wagepoint, un cabinet d’études canadien, a noté qu’aucun des dix métiers les plus recherchés en 2010 n’existait en 2004. En extrapolant à partir de ce constat, ses experts ont conclu que 65 à 70 % des métiers que les enfants actuellement scolarisés en maternelle exerceront dans vingt ans n’existent pas encore. Il cite en exemple le cas du smartphone dont les applications spécifiques actuelles ont créé des emplois qui n’existaient pas il y a douze ans, époque où nous utilisions des téléphones mobiles ancienne génération.

Il est certain que la demande d’emploi dans le numérique va croître, selon l’Observatoire des télécommunications qui prévoit « une croissance phénoménale des usages et des besoins du marché des entreprises […] ainsi que sur le marché du grand public ». Les nouvelles technologies qui présentent les plus forts enjeux en termes d’emploi sont les objets connectés et l’Internet des objets, le traitement massif des données, l’informatique en nuage (cloud computing), la cybersécurité et la protection des données personnelles, la réalité virtuelle ou augmentée, la robotique avancée, la fabrication additive, les techniques de communication enrichie comme les formations en ligne ouvertes à tous (FLOT), les biotechnologies et les nanotechnologies.

C. L’IMPACT SUR LA LOCALISATION DE L’EMPLOI

1. Au plan international

En transformant les modes de production ou en réduisant les coûts de coordination d’acteurs éloignés géographiquement, les innovations technologiques peuvent modifier le poids attribué aux différents paramètres qui interviennent dans le choix d’implantation d’une entreprise comme la taille et la croissance du marché local, les coûts de production dont les coûts salariaux et les coûts de transport, la disponibilité en ressources naturelles, en fournisseurs, en travailleurs 1 Sauvy, Alfred (1980), La Machine et le chômage, Dunod.

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aux compétences adéquates, le contexte institutionnel lié à la fiscalité ou à la protection des contrats et de la propriété intellectuelle et enfin l’environnement concurrentiel.

En abaissant les coûts de la distance, les TIC ont pu favoriser des délocalisations de certaines activités routinières industrielles et de services vers des pays où le coût du travail est faible. Cette tendance qui est en cours depuis les années quatre-vingts pourrait s’atténuer voire s’inverser grâce en particulier aux possibilités croissantes d’automatisation.

La diffusion des technologies numériques et robotiques, combinée à des transformations de la demande, des hausses des coûts de production dans les pays émergents et des coûts de transports, pourrait être favorable à des retours d’activités préalablement délocalisés vers les pays émergents. Les nouveaux modes de consommation, tendant à privilégier les circuits courts et plus qualitatifs par exemple, pourraient conduire les entreprises à privilégier une localisation à proximité de ceux-ci. Il faut ajouter à cela les réglementations environnementales plus contraignantes.

Difficile cependant d’anticiper, au stade actuel, un mouvement de relocalisation de grande ampleur, même si, selon les experts, ce sont les entreprises intensives en technologie qui rapatrient le plus leurs activités. Tout aussi difficile d’apprécier les effets de ces choix de localisation des entreprises sur l’emploi domestique, faute notamment d’études existantes.

2. Au plan national

C’est un des paradoxes du numérique : il permet aux gens de travailler à distance, mais en même temps il accentue la migration des travailleurs vers les villes où se concentrent les services de proximité (éducation, santé, hospitalité, services à la personne), qui recrutent le plus de salariés, contrairement aux grandes entreprises fordistes délocalisées hors des villes, en particulier dans l’industrie. La nouvelle économie portée par le numérique est dans les grandes métropoles.

La diffusion actuelle et future des technologies numériques a des effets différents sur l’emploi selon la composition sectorielle et le type de travailleurs de la zone d’emploi considérée. D’une part, les territoires les plus susceptibles de connaître des destructions d’emploi en raison de l’automatisation seraient ceux où les secteurs industriels traditionnels faiblement intensifs en technologie représentent une grande part de l’emploi, en particulier si ces territoires sont spécialisés dans ces secteurs, mais aussi s’ils sont caractérisés par une forte densité en travailleurs peu qualifiés et où les métiers intensifs en tâches routinières

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pèsent beaucoup dans l’emploi local. D’autre part, les territoires qui pourraient bénéficier de la diffusion des technologies seraient d’abord ceux capables d’attirer des relocalisations notamment industrielles, ensuite, les aires urbaines où les entreprises peuvent profiter d’économies d’agglomération et disposer de talents dont les compétences sont complémentaires des nouvelles technologies.

Enfin, des effets plus indirects peuvent se faire sentir sur l’emploi local en favorisant le développement d’emplois induits, notamment en créant des emplois dans les services qualifiés et peu qualifiés au sein de la même économie locale. La valeur de cet effet multiplicateur n’est pas encore précisément établie.

Il semble donc plus aisé d’escompter que les nouvelles technologies contribueront à accroître la tendance à la concentration des activités en particulier dans les grandes villes, ou du moins tant que tous les territoires ne bénéficieront pas d’une couverture numérique de même qualité.

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III. L’IMPACT SUR LA « SITUATION DE TRAVAIL »

Si le développement du numérique fait craindre une réduction des emplois, il engendre également une seconde crainte, d’ordre qualitatif, tant il semble acquis qu’il transforme le travail dans sa nature, ses formes, sa structure, son contenu et son organisation. Le travail indépendant se substituerait au travail salarié, provoquant une « ubérisation » du travail et de la société, notamment avec le développement des plateformes numériques.

Pour beaucoup d’experts, ce n’est donc pas tant le chiffrage des emplois détruits, des emplois préservés et des emplois créés qui est important que la question de l’accompagnement du marché du travail dans la recherche d’un nouvel équilibre dans la division du travail entre humains, robots et algorithmes. Et cette question concerne tout autant les entreprises, les gouvernements et les individus eux-mêmes.

Ursula Huws parle de « cybertariat »1. D’autres évoquent l’avènement du travailleur « assisté » ou « augmenté ». Le COE parle de « situation de travail », concept qui englobe toutes les dimensions de la notion comme les conditions de travail au sens classique du terme, la qualité de vie au travail, le contenu du travail, les compétences nécessaires pour l’effectuer.

En effet, la nouvelle réalité du numérique soulève plusieurs questions cruciales pour les entreprises et les salariées. Comment va évoluer le contenu des emplois ? De quels profils et quelles compétences aura-t-on besoin demain ? Quelles compétences faudra-t-il développer pour évoluer ou faire évoluer en interne ? Comment attirer et retenir les meilleurs talents ? Comment les entreprises vont-elles gérer cette transition ? Quelles formations faudra-t-il suivre pour acquérir ces compétences ? Quels seront les risques psycho-sociaux ? La protection sociale actuelle sera-t-elle adaptée ?

A. LE CONTENU DE CERTAINS EMPLOIS VA EVOLUER ET DE NOUVELLES COMPÉTENCES SERONT RECHERCHÉES

1. Le contenu de certains emplois va évoluer

Le fait d’automatiser et de numériser certaines tâches permet un redéploiement des activités des personnes qui en étaient en charge, celles-ci s’adaptant alors à cette nouvelle activité, allant parfois jusqu’à voir leur travail

1 Huws. U. (2001), « The Making of a cybertariat? Virtual work in a real world », Socialist Register 2001: Working Classes, Global

Realities, vol. 37.

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profondément transformé. Les experts de l’OCDE estiment que près de 30 % des travailleurs en France devront faire face à un changement de la nature de leur travail, alors que le COE évalue à 50 % le pourcentage des emplois français qui pourraient voir leur contenu évoluer de façon importante dans un avenir proche (cf. II. A. supra). Un rééquilibrage va s’opérer dans la mesure où la part effectuée par les humains devrait passer de 71 % à 48 % en 2025, selon certains experts.

L’adaptation continuelle du contenu des emplois parallèlement aux évolutions technologiques : les métiers de la banque, un cas d’école

L’installation des distributeurs automatiques de billets (DAB) a profondément modifié les besoins en main-d’œuvre dans le secteur bancaire, dont les salariés représentent 2,3 % de l’emploi salarié privé en France.

De 5 000 DAB déployés sur le territoire français en 1983 nous sommes passés à près de 60 000 à fin 2013, ce qui a diminué le coût d’exploitation des agences bancaires et augmenté leur nombre. Puis, avec le développement des services de banque en ligne et l’apparition des modes de paiement sans contact, qui limite les besoins en liquidité, le déploiement des DAB a été stoppé et le nombre des agences bancaires a été réduit. Ce n’est qu’à partir des années 1990 que ces évolutions technologiques ont provoqué une baisse des effectifs d’employés de la banque.

Toutefois, les enquêtes sur les conditions de travail révèlent aussi que la nature de ces métiers s’est modifiée. Désormais, 61 % de ces employés déclarent occuper un emploi nécessitant une réponse immédiate à une demande extérieure et ne devant pas toujours appliquer des consignes, contre 35 % en 2005. Ce profil d’emplois peu automatisables a également augmenté parmi les techniciens (62 % contre 47 % en 2005) et, dans une moindre mesure, chez les cadres (48 % contre 43 %).

Les plus récentes technologies numériques en cours et à venir sont susceptibles de modifier une nouvelle fois les activités de services bancaires. Nul n’est en capacité d’en mesurer l’impact exactement à l’heure actuelle.

La Fabrique de l’industrie s’attend à une transformation du travail et de son organisation en créant notamment une demande très forte en profils qualifiés, conformément à ce qui a été observé en France depuis les années 1980. Globalement, les TIC seraient plutôt défavorables à l’emploi des travailleurs qui réalisent des tâches manuelles et cognitives « routinières », en se substituant en quelque sorte à ces employés, tandis qu’elles seraient plutôt favorables à l’emploi des travailleurs qui réalisent des tâches « non routinières », en étant complémentaires en quelque sorte.

La représentation du travail marquée par une séparation des métiers entre « cols bleus » et « cols blancs » est de moins en moins valable et ne correspondra

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bientôt plus à la réalité des emplois. Avec l’introduction des ordinateurs dans les entreprises est apparue une nouvelle catégorie de travailleurs capables de gérer des situations auparavant dévolues aux professions intellectuelles. Ni « cols bleus » ni « cols blancs », ceux que l’on appelle les « cols neufs » vont se multiplier avec la robotisation et les progrès de l’industrie notamment.

2. Quelles compétences pour demain ?

Si les auteurs de l’étude « Future of Jobs Report » s’attendent à « une instabilité croissante des compétences », le COE a identifié les compétences de demain, qui sont en fait déjà celles d’aujourd’hui :

– des compétences expertes dans la « Tech » elle-même et dans tous les secteurs économiques utilisateurs de ces technologies, ces compétences étant liées au développement, au déploiement et à la maintenance des technologies ;

– des compétences professionnelles nouvelles intervenant dans le contexte de la transformation d’environ 50 % des emplois (soit des compétences numériques, soit des compétences professionnelles nouvelles nécessitées par la recomposition des emplois) ;

– et, pour tous les actifs, trois groupes de compétences transversales qui recouvrent des compétences numériques générales dites de base, des compétences sociales et situationnelles et des compétences cognitives liées à la maîtrise de l’usage des chiffres (numératie) et des mots (littératie).

A cet égard, le COE souligne que la France souffre d’une pénurie de compétences « Tech », avec 80 000 emplois vacants en 2020, que 8 % des actifs français n’ont aucune compétence numérique de base et que 27 % d’entre eux devraient progresser pour être plus à l’aise en la matière, que 13 % des actifs en emploi n’ont pas les compétences cognitives de base (numératie et littératie) et que 30 % devraient progresser en la matière. Et c’est sans compter les déficits en nouvelles compétences professionnelles demandées dans le cadre de la transformation des emplois.

Ce bilan est d’autant plus alarmant que les savoirs sont rapidement périmés, y compris et surtout les savoirs numériques. Tout va très vite. On parle d’une obsolescence accélérée des compétences. Dans un monde en perpétuelle évolution, il ne suffit plus de maîtriser les compétences numériques de base dans le mesure où pour près de 90 % des emplois elles constituent des prérequis. Si dans les années soixante-dix on pouvait envisager de faire toute sa carrière à partir de sa formation de base, souvent même dans la même entreprise, aujourd’hui on

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évoque des cycles de trois ans, voire même de six à dix-huit mois dans l’informatique, selon Michel Barabel, professeur à l’Executive Mastère spécialisé en ressources humaines de Sciences Po Paris. Les compétences et les connaissances se périment très vite également pour Sandrine Aboubadra-Pauly, experte à France Stratégie, qui estime que si le contenu des emplois va évoluer vers plus de créativité, d’adaptabilité, de résolution de problèmes, « toutes ces qualités s’appuient sur des compétences techniques de plus en plus pointues ».

Les avis semblent converger sur le fait que toutes les activités impliquant l’interaction entre les individus, de l’encadrement ou de la prise de décision seraient épargnées (jardinier, plombier, garde d’enfants…). Les métiers non routiniers seraient préservés, ceux qui mobilisent les compétences relationnelles et l’empathie (les aidants, les soignants) et qui font preuve de sens artistique et créatif (métiers d’art et d’artisanat). Dans certains secteurs, l’IA prendra de plus en plus en charge les aspects techniques, l’avenir sera aux compétences comportementales (softs skills), les aptitudes relevant du savoir-être, par opposition aux compétences techniques, de la capacité d’adaptation, de la motivation, du sens de l’initiative ou de l’organisation, mais aussi de l’intelligence émotionnelle. Pour Patrick Albert, président du Hub France IA, « le sens de la réalité est le grand absent de l’intelligence artificielle. Conscience et émotion ne peuvent qu’être simulées par les machines ». Ce sont des traits profondément humains. Les compétences sociales de haut niveau deviendront de plus en plus précieuses. Ce sera le cas du secteur tertiaire qui, en France, représente aujourd’hui 77 % des emplois contre 65 % au début des années 1980 ; les services prendront encore plus de place à l’avenir à l’instar des relations commerciales où les compétences relationnelles et l’attachement au client sont susceptibles de voir leur importance croître.

Sont également vantées des compétences résumées sous le sigle de 4 C pour créativité, esprit critique, communication et coopération, selon une classification adoptée par l’OCDE. La grande force de l’IA réside dans sa capacité à trier des millions de données et identifier des modèles répétitifs, mais c’est également sa faiblesse dans la mesure où des biais sont introduits et qu’il n’y a pas d’adaptation aux changements intervenus dans l’environnement entre le moment où l’apprentissage-machine a été réalisé et son utilisation. Seul l’humain sait faire preuve de curiosité, d’adaptabilité et de jugement, comprendre et analyser le « contexte » ou encore la culture de l’entreprise qui ne peuvent être résumés à un algorithme. Dès qu’un poste implique un certain degré de créativité, la machine a du mal à changer les règles du jeu. Il est difficile de traduire les relations humaines en algorithmes, « le dernier kilomètre tactique » a son importance selon Gabe Batstone, dirigeant de Contextere, un spécialiste des logiciels industriels.

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L’exemple des « bots »

On annonce régulièrement que l’IA va révolutionner le travail et remplacer des millions d’emplois pour des tâches de plus en plus complexes. Mais ce n’est pas aussi simple. On a par exemple tenté d’appliquer les « bots » (agents logiciels automatiques ou semi-automatiques) à la gestion des ressources humaines et les résultats ont été plutôt décevants jusqu’à présent.

Certaines entreprises ont par exemple utilisé des recruteurs virtuels pour accélérer le processus de sélection de milliers de candidats sur des postes au profil simple. L’idée était de dégager du temps pour que les responsables des ressources humaines se concentrent sur d’autres tâches. Ces machines d’assistance au recrutement trient les candidats en utilisant des bases de données et en s’appuyant sur des notions subjectives et parfois des a priori négatifs, comme sur les femmes par exemple.

Par ailleurs, à l’instar de Pierre-Henri Tavoillot, président du Collège de philosophie et professeur à la Sorbonne, il faut garder à l’esprit que « sans acceptation sociale, tous les progrès technologiques ne seront pas saisis, même quand ils entraînent un gain par ailleurs ». L’homme est attaché aux relations humaines. Qui souhaite aller au restaurant sans serveurs, au supermarché sans employés, regarder un match arbitré par la seule vidéo ? « Un monde complètement rationnel serait d’un ennui total ». Déjà dans un passé récent, l’arrivée des technologies s’est heurtée à la réalité de certains métiers, à l’instar des salons de coiffure où l’arrivée d’écrans permettant aux clients de choisir coupe et couleur de cheveux n’a pas rencontré le succès escompté. Ce sont les clients qui refuseront le remplacement des vendeurs par des robots dans le prêt-à-porter par exemple.

Néanmoins, difficile de faire plus qu’imaginer les métiers du futur. Pour le World Economic Forum, ils n’existeraient pas encore. Il n’en demeure pas moins que le capital humain reste un atout concurrentiel dans un monde incertain et volatil. La tendance est déjà là : les emplois mono-compétences déclinent, les profils combinant différentes expertises ont la cote. Certaines dérives apparaissent même. Depuis un an ou deux certains profils particuliers, aux « compétences déviantes » (mad skills) sont recherchés. Ces individus sont aussi appelés « corsaires », à distinguer des « rameurs » qui sont des clones, selon Michel Barabel. Ainsi, dans la Silicon Valley, certains tricheraient sur leur CV en se disant autistes, afin de décrocher un emploi.

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B. COMMENT GÉRER LA TRANSITION PERMETTANT LE « REVERSEMENT » DES EMPLOIS MENACÉS VERS D’AUTRES EMPLOIS ?

Une certitude demeure : le progrès technologique n’est pas une option et la rapidité d’adaptation est aussi un critère de succès dans un contexte mondialisé. La grande majorité des actifs, quel que soit leur niveau de qualification, devra suivre des transitions vers des emplois ou s’adapter aux nouvelles compétences demandées, sous peine d’être « déclassés ». On l’a vu, celles-ci sont de différentes natures : des compétences numériques, techniques, sociales (travail en équipe, capacité d’écoute), cognitives (savoir résoudre des problèmes complexes, innover), personnelles (adaptabilité, esprit d’initiative, empathie), selon Bidet-Mayer et Toubal1. Mais les entreprises aussi doivent être actrices de cette transition.

1. La responsabilité des entreprises

Selon le CIGREF, association de grandes entreprises et administrations publiques, il faut adapter les processus de recrutement, les politiques de gestion des carrières, diversifier les facteurs de motivation et de reconnaissance, innover pour faire évoluer les espaces de travail et développer la responsabilisation et l’autonomisation des salariés.

Différents outils et moyens sont proposés comme la gestion prévisionnelle des emplois (GPEC), la mise en place de formations adaptées, le renouvellement des pratiques pédagogiques, l’organisation responsabilisante, plus agile, plus souple, moins en silo et plus horizontale, des entreprises, qui laisse plus d’autonomie aux collaborateurs. Le modèle pyramidal se révèle inadapté ; des organisations dites « agiles » où les employés sont réunis en équipes autonomes et flexibles doivent être privilégiées comme dans ces entreprises où il n’y a pas de cadre dirigeant (manager) et où les employés sont organisés en cercles, animés par des chefs de projets temporaires, à l’instar de Zappos, une entreprise américaine de vente de chaussures en ligne forte de 1 500 employés.

Les entreprises doivent prendre en compte ces évolutions le plus tôt possible si elles veulent pouvoir en tirer le meilleur profit. C’est en s’appuyant justement sur les outils numériques que de nouveaux modèles de production et d’organisation pourront être mis en place par les entreprises. Malheureusement beaucoup d’entreprises sont hésitantes devant la transformation digitale. Plusieurs raisons sont évoquées comme le manque de temps des entrepreneurs et des salariés, le coût de la digitalisation, les mêmes facteurs culturels que l’on retrouve

1 Bidet-Mayer T., Toubal L., 2016, « Travail industriel à l’ère du numérique », Les Notes de La Fabrique, n°16, Presse des Mines.

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chez beaucoup d’individus qui agissent comme un frein, le délai de rentabilité, le manque de compétences digitales. C’est particulièrement le cas des petites et moyennes entreprises (PME) et des très petites entreprises (TPE). Or, selon l’INSEE, entre 2010 et 2014, les 3 millions de TPE françaises ont généré un nouvel emploi sur trois, et, toutes activités confondues, elles génèrent aujourd’hui plus de la moitié du chiffre d’affaires des entreprises françaises. La transformation digitale est un élément de leur croissance, qui elle-même génère des créations d’emplois. L’INSEE révèle que, dans le secteur marchand de l’e-commerce, 49 000 postes ont été créés en 2017 et 56 000 créations sont annoncées pour 2018, soit plus d’un quart des créations d’emplois marchands. C’est d’autant plus intéressant que les TPE et PME s’établissent essentiellement dans les communes de moins de 20 000 habitants.

2. La question cruciale de la formation initiale et continue

Le défi majeur qui se pose aux pouvoirs publics et aux entreprises est d’anticiper et accompagner ces mutations, en particulier en portant une attention accrue à la formation initiale mais aussi continue. Tout l’enjeu est de concevoir une formation initiale et professionnelle qui prenne en compte ce glissement des compétences.

Plutôt que de chercher à économiser sur le coût du travail, les entreprises devraient accompagner leurs collaborateurs lorsque leurs tâches sont modifiées par l’introduction du numérique. Le délai imparti est court dans lequel il faut développer les formations correspondantes qui permettront aux salariés à la fois de maîtriser les nouveaux outils numériques et de répondre aux nouveaux besoins de complémentarité entre l’homme et la machine. Il y aura deux catégories d’activités où l’IA et l’homme créeront de la valeur ajoutée ensemble, selon Paul Daugerthy, directeur technologie et innovation chez Accenture, et auteur avec James Wilson de « Human + Machine. Reimagining work in the Age of AI » (Harvard Business Review Press, 2018) : la catégorie où les humains sont complémentaires des machines, par exemple pour entraîner ou expliquer les systèmes d’IA ; la catégorie où l’IA va donner plus de compétences aux humains, en leur permettant d’être des professionnels plus efficaces.

Ainsi Google assure déjà une montée en compétences permanente de ses ingénieurs. ATT vient d’annoncer que 140 000 personnes seraient formées sur les cinq prochaines années. IBM travaille sur les « new collar jobs ». Selon certains experts, nous disposerions de quinze années pour nous adapter.

Par ailleurs, la responsabilité de l’école aujourd’hui est d’éloigner au plus vite les enfants des tâches qui seront le fait de l’IA pour les orienter vers les

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métiers qui seront complémentaires de l’IA. Selon certains experts, il est de notre devoir de ne pas orienter les enfants vers des métiers à hauts risques demain comme ceux de comptables, juristes, secrétaires, conseillers bancaires… A l’inverse, pour certains métiers, une complémentarité se dessine entre l’homme et l’IA, comme outil à la décision, c’est le cas par exemple en médecine. Enfin il y aura des métiers où l’IA n’aura pas sa place, ce sont les métiers qui « combinent le pouvoir du cœur, de la tête et de la main », selon Luc Ferry (infirmier, puéricultrice…).

Les enjeux pour la sphère éducative sont multiples : il faut éduquer et acculturer la population aux outils numériques et aux mécanismes sous-jacents. Or, pour Roberto Casati, le numérique apparaît actuellement davantage utilisé sur un mode mimétique, pour reproduire l’existant, que pour ses vertus propres comme l’apprentissage du code, la création de contenu ou le partage de données. Il ne faut pas confondre l’éducation aux outils numériques avec les usages. La tâche est immense pour former aux nouvelles technologies tous les enseignants du primaire au supérieure. Le rapport intitulé Jules Ferry 3.0 : bâtir une école créative et juste dans un monde numérique1, publié le 3 octobre 2014 par le Conseil national du numérique, propose de nombreuses recommandations en ce sens.

C. LES RISQUES PSYCHO-SOCIAUX ET LA PROTECTION SOCIALE

La digitalisation peut aussi comporter des risques pour ces nouveaux collaborateurs tels que les troubles psychosociaux, le contrôle et la surveillance, le travail prescrit, l’hyper-connectivité, l’interpénétration entre la vie privée et la vie professionnelle… Comment bénéficier des dispositifs visant à limiter les risques comme les normes, les contrôles des conditions d’hygiène et de sécurité lorsqu’une grande part du travail est effectuée en dehors du cadre de l’entreprise ?

Certains craignent une déshumanisation du travail provoquée par l’IA voire un asservissement des salariés, alors qu’elle devrait être à leur service. Les plus optimistes penchent pour une revanche de l’IE, l’intelligence émotionnelle, sur l’IA, l’intelligence artificielle, et la seule expertise. La complémentarité entre l’homme et la machine est plus que jamais l’un des enjeux de cette révolution numérique.

Par ailleurs, si des changements majeurs sont nécessaires pour profiter pleinement des bénéfices de la révolution numérique plutôt que de la subir, il faudra sans doute aussi adapter le système actuel de protection sociale. 1 https://cnnumerique.fr/files/2017-10/Rapport_CNNum_Education_oct14.pdf

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Pour nombre de ses détracteurs, l’automatisation et la digitalisation vont exclure une part croissante de la population active du marché du travail, et il faut adopter de nouveaux mécanismes de redistribution efficaces, pour éviter l’explosion sociale. Pour Nicolas Colin, auteur de « Hedge. A greater safety net for the entrepreneurial age » (CreateSpace Independent Publishing Platform), l’Etat providence actuel qui a été conçu après-guerre, repose sur trois piliers qui ont assuré le développement de la société de consommation : l’accès au crédit, la protection sociale et des syndicats forts. Dans le modèle fordiste, la grande entreprise permettait de sécuriser les individus, de les protéger contre l’instabilité du marché dans la mesure où l’univers de la protection sociale y était extrêmement réglementé. Avec l’entrepreneuriat numérique, les entreprises créées sont plus fragiles, moins stables, comptent peu d’employés, qui ne bénéficient plus du même système sécurisé. Désormais les travailleurs changent plus souvent d’emplois, certains cumulent plusieurs sources de revenus. On peut escompter que la collecte permanente de données induite par le numérique permettra de construire une protection sociale plus personnalisée. En tout état de cause, la protection sociale devra veiller à offrir une couverture non plus géographique, dans le cadre de l’adresse physique de l’entreprise, mais plus dans le cadre d’une dynamique professionnelle liée à la mobilité des carrières. Un nouveau contrat social doit être envisagé.

Le développement des plateformes de type Uber suscite des inquiétudes sur l’avenir de la qualité de l’emploi à tel point que l’on parle d’une « ubérisation » de la société qui est synonyme de précarisation pour nombre de ses détracteurs. Il est vrai que le principe de ces plateformes consiste à externaliser la production de biens et de services vers les « collaborateurs », et ce faisant sont également externalisés les risques associés. Par exemple, Uber emploie moins de 1 000 salariés mais compte plus d’un million de chauffeurs associés. Avec ce modèle, une part importante de l’activité d’une entreprise est assurée hors du cadre traditionnel de cette dernière mais aussi hors du cadre traditionnel de la relation classique d’emploi. Le statut de salarié subordonné à l’employeur et les nombreuses garanties matérielles qu’il procure n’ont pas cours dans les plateformes. Ce sont les « collaborateurs » des plateformes qui supportent les risques liés à leur activité comme l’investissement dans un véhicule et l’incertitude quant à leurs revenus sans toutefois bénéficier des opportunités de richesse traditionnellement offertes aux chefs d’entreprise. Comment dans ces conditions assurer sa retraite, bénéficier de droits syndicaux, d’une protection contre la rupture abusive du contrat de travail ou encore les discriminations ou le harcèlement, la législation sur le temps de travail, en un mot faire face aux risques sociaux ? Pour certains, cette forme de salariat engendre un « contournement des acquis sociaux » et renoue avec d’anciennes formes de travail qui prédominaient

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aux siècles passés comme le travail à la pièce. En juin 2018, en Espagne, un contrat entre un livreur à vélo et Deliveroo a été requalifié en contrat de travail. Et en France, fin novembre 2018, c’est un ancien livreur de la société Take Eat Easy (TEE), qui avait été liquidée fin août 2016, qui a bénéficié d’une décision de la chambre sociale de la Cour de cassation. Cette dernière a décidé qu’au regard du droit, le livreur auquel avait été imposé le statut de micro-entrepreneur était en réalité un salarié de la plateforme qui a subi des préjudices liés au travail dissimulé. Même s’il avait « la liberté totale de travailler ou non », il existait aussi un dispositif de sanctions en cas de manquement du livreur à ses obligations, ainsi qu’un système de géolocalisation « permettant le suivi en temps réel par la société de la position du coursier », selon les termes de l’arrêt. La plateforme ne peut donc être considérée et traitée comme un simple intermédiaire entre le restaurant, le client et le coursier.

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IV. L’IMPACT DANS L’ESPACE FRANCOPHONE

Les informations relatées dans cette dernière partie sont issues des réponses au questionnaire élaboré par le rapporteur transmises par les différentes sections. Je veux ici chaleureusement remercier les sections d’Andorre, de Belgique, du Canada, du Mali, du Québec, de Roumanie et du Sénégal.

A. SI LES ÉCARTS DE NIVEAU ENTRE LES ÉCONOMIES LES PLUS AVANCÉES ET LES ÉCONOMIES LES MOINS AVANCÉES DE L’ESPACE FRANCOPHONE SE RETROUVENT EN MATIÈRE DE NUMÉRISATION, TOUTES ONT EN COMMUN LE DÉVELOPPEMENT D’UNE STRATÉGIE NUMÉRIQUE

Le déploiement du réseau de fibre optique en Andorre est optimal. L’accès standard offre à l’utilisateur 300 Mbps (foyers et entreprises), loin devant la moyenne de nombreux autres pays européens. La plupart des entreprises sont connectées à 1 Gbps. Conformément à la loi, Andorra Telecom doit offrir une connexion haut débit fixe à tout ménage qui le souhaite, quelle que soit sa situation géographique. L’accès en haut débit moyen est de 190 Mbps. En termes de couverture haut débit mobile (MBB), Andorre est également bien placée par rapport au reste de l'Europe. Le réseau 4G est disponible pour 92 % de la population andorrane, devant la moyenne de l'UE. La connectivité au réseau 3G est disponible pour 99 % de la population andorrane, ce qui correspond à la moyenne de l'UE. S’agissant du niveau d’équipement des ménages, des entreprises et de la capacité des citoyens à se servir des outils numériques, Andorre est également bien placée : 86 % des ménages et des entreprises utilisent les TIC, le taux est de 70 % pour les administrations publiques. Un projet de loi de modification du code de l’administration est en cours d’examen au conseil général (parlement) qui prévoit un délai de deux ans, à compter de l’entrée en vigueur de la loi, pour mettre en place l’utilisation exclusive d’un certificat électronique qualifié par les travailleurs publics dans leur travail quotidien, ainsi qu’une obligation d’utilisation d’un certificat électronique qualifié par les entreprises et les travailleurs indépendants dans leurs relations avec les administrations publiques.

Le gouvernement andorran joue un rôle moteur dans la promotion de la numérisation comme levier majeur de la compétitivité des secteurs économiques existants en Andorre et des nouveaux secteurs émergents. Dès 2011, lors de l’élaboration du plan d’action lancé par le nouveau gouvernement, les TIC ont été identifiées comme un élément potentiel de transformation. En 2012, un Cluster TIC a été lancé dans le cadre de l’initiative Actua qui prévoit une collaboration public-privé autour de trois axes : la diversification économique, l’attrait

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d’investissements étrangers et l’accompagnement des entreprises. En 2015, il a été privatisé et a pris le nom de Actinn, Cluster d’Innovation.

En 2014, le gouvernement a impulsé la création d’une fondation publique, la Fondation ActuaTech, qui regroupe Andorra Telecom, Forces Electriques d’Andorre (FEDA), l’Université d’Andorre, et a pour objectif de dynamiser les initiatives d’innovation.

La Belgique se situe, en 2018, à la cinquième place du classement européen DESI, qui mesure les progrès réalisés par les Etats-membres de l’UE dans la mutation de leur économie et de leur société. La densité et la qualité des infrastructures de télécommunication sont des atouts indéniables. Le point faible reste l’adoption du haut débit en partie en raison du coût des abonnements proposés en Belgique.

Le ministre belge en charge de l’Agenda numérique a mis en place le plan national Digital Belgium pour inciter l’ensemble des parties prenantes à développer et utiliser les applications et services TIC. Ce plan doit également permettre au pays d’atteindre trois objectifs phares en 2020, dont celui de stimuler la création de 50 000 nouveaux emplois dans plusieurs secteurs. Un fonds fédéral doté de 18 millions d’euros sur trois ans a été lancé en avril 2017 pour financer des projets misant sur le développement des compétences numériques chez les enfants, les jeunes et les jeunes adultes socialement vulnérables. Les entités fédérées ont parallèlement adopté des stratégies propres : Digital.Brussels pour la Région de Bruxelles Capitale, Digital Wallonia pour la Région wallone et Vlaanderen Radicaal Digitaal pour la Région flamande.

Au Canada, en 2016, quasiment tous les ménages disposaient d’un téléphone fixe et/ou d’un téléphone mobile : 99,3 % des ménages étaient abonnés à une ligne téléphonique terrestre ou à un service de téléphonie mobile. Plus précisément, ils étaient 67 % à être abonnés à une ligne terrestre, contre 88 % d’abonnés à un service de téléphonie mobile et 87 % d’abonnés à des services Internet. De plus, 26,1 % étaient abonnés à un service de câble à fibres optiques. L’organisme canadien indépendant de réglementation des télécommunications et de la radiodiffusion, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), a déclaré que les tous les Canadiens doivent avoir accès aux services Internet à large bande et a « établi un objectif du service universel afin que les Canadiens, qu’ils vivent en région rurale, en région éloignée ou en milieu urbain, aient accès à des services vocaux et d’Internet à large bande fixes et mobiles sans fil ».

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Le Canada a mis en place diverses initiatives pour accompagner le développement du numérique à l’intérieur du pays mais aussi à l’international. En 2017, le Budget fédéral a présenté le Plan pour l’innovation et les compétences du Canada, dont un élément important est le Fonds stratégique pour l’innovation. Le ministère de l’emploi et du développement social a mis en place le Centre et le Conseil des compétences futures qui étudie les tendances affectant l’économie canadienne et cerne les compétences actuelles et futures. Une initiative de 125 millions de dollars canadiens sur cinq ans a été débloquée dans le cadre de la Stratégie pancanadienne en matière d’intelligence artificielle. En juillet 2018, la Déclaration franco-canadienne sur l’intelligence artificielle appelle à la création d’un groupe international d’études visant à offrir une expertise reconnue internationalement en la matière.

Le Mali a réalisé d’importants travaux en matière d’infrastructures de télécommunication ces dernières années qui viennent compléter les investissements réalisés par les opérateurs dans la fibre optique. L’objectif est de connecter le pays en haut débit avec ses voisins (Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Mauritanie, Sénégal, Algérie, Niger, Guinée) mais aussi d’interconnecter les structures publiques de l’Etat. Des systèmes VSAT (Very Small Aperture Terminal) de télécommunication par satellite sont utilisés, par exemple pour interconnecter des bureaux de poste, ainsi que des générateurs solaires pour les zones sans électricité. La mise en place d’un Point d’échange Internet contribue au développement de l’Internet local et sécurise davantage les échanges entre les usagers dans la mesure où ils ne passent plus par des infrastructures internes. La connexion des communes et des écoles à Internet se poursuit et des télé-centres sont mis en place dans des zones rurales pour développer l’accès à Internet. Les Centres multimédia communautaires (CMC) créés au Mali offrent une chance aux communautés les plus pauvres, souvent implantées dans des zones rurales isolées, pour utiliser pleinement les TIC. Ces CMC associent la radio, la télévision, la presse écrite aux technologies comme l’Internet, les photocopieurs, les différents appareils numériques comme les caméras, les lecteurs audio…

Le développement du téléphone mobile au Mali a favorisé l’émergence de nouveaux services liés aux transactions financières. Ces cinq dernières années ils se sont fortement répandus jouant ainsi un rôle important d’inclusion numérique et financière de la population. Les transferts d’argent, les paiements de factures, le paiement des salaires, l’épargne, l’assurance et bien d’autres actions se font de plus en plus via un téléphone mobile. Apparues en 2010 au Mali ces utilisations ont vu leur taux de pénétration passer à plus de 16 % en 2018. Selon la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest, le Mali occupe la deuxième place en matière de services financiers par téléphonie mobile dans la zone de l’Union

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économique et monétaire ouest-africaine, avec 20 % du volume global des transactions pour une valeur s’élevant à 811 milliards de francs CFA, sur un total de 3 760 milliards de francs CFA. Plusieurs ONG intervenant au Mali dans les secteurs de la santé ou de l’agriculture ont recours aux services Mobile Money pour rémunérer leurs collaborateurs ou aider les agriculteurs à préparer la campagne agricole ou à mettre leurs produits sur le marché.

Pour soutenir et encourager ce mouvement, le Mali a mis en place un cadre juridique et réglementaire propice à l’instauration des TIC et à leur développement. Et, en 2012, le gouvernement malien a lancé le projet TechnoMali, un dispositif visant à délivrer les compétences TIC nécessaires, à générer des projets autour des TIC, à proposer un cadre de développement favorable aux entreprises existantes dans le secteur numérique ou voulant s’y lancer. Ce projet vise à renforcer les capacités humaines en la matière, à créer des emplois dans ce secteur économique très porteur, à renforcer l’infrastructure TIC du pays. Par ailleurs, un ministère de l’économique numérique a été créé et une politique nationale de l’économie numérique vise à renforcer l’utilisation des TIC au service du développement du pays. Créée en 2017, la direction de l’économie numérique veut faire du numérique un vecteur de développement social et une source de productivité et de valeur ajoutée pour l’ensemble des secteurs productifs et des services. Pour ce faire, le gouvernement s’appuie sur des partenariats avec le secteur privé et la société civile.

En 2016, 88 % des ménages québécois avait accès à l’Internet, dont 93 % détenaient une connexion à haute vitesse. Toutefois l’accès à l’Internet haute vitesse est inégalement réparti entre les régions puisque près de 95 % des ménages vivant à Montréal et dans la région métropolitaine y ont accès contre 85 % des ménages hors de la métropole. Cette répartition inégale se retrouve également au niveau sociologique : l’accès à cette technologie est plus répandu chez les personnes aisées et les plus scolarisées. Plusieurs raisons sont invoquées parmi lesquelles l’absence de besoin en connexion pour 79 % des cas, l’inaptitude à utiliser convenablement cet outil pour 47 % des gens et les coûts prohibitifs en équipement à 38 % et en abonnement à 39 %.

S’agissant du secteur public, il dispose d’une infrastructure numérique qui a été déployée dès le tournant du XXIe siècle et qui depuis se développe constamment. La tendance actuelle est d’accroître la transparence de l’administration québécoise grâce notamment à la publication de données ouvertes.

Les entreprises québécoises ont également investi dans le développement des TIC, à 34 % selon les chiffres de 2015.

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En décembre 2017, le gouvernement a dévoilé la stratégie numérique intitulée Le Québec, leader en matière de transformation numérique. Structurée autour de sept orientations et visant un horizon de cinq ans, cette action se déploie aux plans éducationnel, culturel, économique et social. En outre, pour consolider l’Etat à l’ère du numérique, le gouvernement a créé, en partenariat avec l’Université Laval, l’Académie des transformations numériques, un centre de recherche et de formation, doté d’un budget initial de 6 millions de dollars canadiens, dont l’objectif est de préparer et soutenir le perfectionnement de la fonction publique québécoise afin de l’outiller pour prendre le virage numérique déjà amorcé. Le mandat de l’Académie consiste également à étudier les répercussions des transformations numériques sur les emplois de la fonction publique.

En Roumanie, sur 7,47 millions de ménages, 61 % ont accès à Internet dont 48 % bénéficient d’une couverture haut débit. S’agissant de l’Internet à haut débit et à très haut débit, la Roumanie figure en cinquième position mondiale pour la connexion fixe et à la 36e place pour la connexion mobile. Au sein de l’Union européenne, la Roumanie détient la plus grande part d’abonnements à très haut débit avec un taux de 57 % contre 15 % de moyenne dans l’UE et figure à la deuxième place des abonnements à haut débit avec un taux de 70 % à comparer au taux de 37 % pour l’UE. Toutefois, plus de la moitié des ménages ruraux n’ont pas accès à Internet ; en Roumanie 45 % de la population vit en milieu rural.

Le gouvernement roumain a mis en place la Stratégie de la Roumanie pour l’agenda numérique 2020, en convergence avec la Stratégie numérique pour l’Europe 2020.

Dans ses réponses au questionnaire, la section sénégalaise indique que les infrastructures de télécommunication sénégalaises figurent parmi les plus développées et les plus performantes en Afrique de l’Ouest, et que ce résultat a été obtenu grâce à d’importants investissements de modernisation. Selon les statistiques de juin 2016, le taux de pénétration de la téléphonie mobile est de 116,71 % et le taux de pénétration d’Internet s’élève à 60,28 %, en progression constante. Ce dernier taux est calculé sur la base du parc des abonnés à Internet déclarés par les opérateurs et rapporté à la population sénégalaise. Par ailleurs, le taux d’usage des TIC par les entreprises sénégalaises est relativement élevé, toutefois aucun chiffre n’est communiqué. Le coût élevé des services TIC demeure cependant un obstacle majeur à un accès universel à ceux-ci et donc à une plus large utilisation, en particulier s’agissant du haut débit. Les efforts fournis ces dernières années pour réduire les tarifs pratiqués sont restés insuffisants.

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Les autorités sénégalaises ont mis en place une stratégie de long terme, intitulée Sénégal numérique 2025, qui répond à l’ambition du pays de se maintenir comme un leader innovant. Elle est constituée de prérequis et d’axes prioritaires articulés autour du slogan suivant : « le numérique pour tous et pour tous les usages en 2025 au Sénégal avec un secteur privé dynamique et innovant dans un écosystème performant ».

Qu’il s’agisse du taux d’accès des ménages à Internet en général (93 % des ménages) ou de la connexion à large-bande, le niveau de connectivité de la Suisse la place nettement dans le peloton de tête des pays européens. Grâce à d’excellentes infrastructures de base et à sa compétitivité internationale élevée, la transformation digitale de la Suisse est en bonne voie. Les seuls obstacles identifiés sont liés à la difficulté à recruter des travailleurs qualifiés, à la mise en place des dispositifs adaptés de protection des données et à l’instauration d’un environnement favorable aux startups numériques.

B. L’IMPACT DU NUMÉRIQUE SUR LE VOLUME DE L’EMPLOI ET LES DÉLOCALISATIONS DANS L’ESPACE FRANCOPHONE : DES APPRÉCIATIONS NUANCÉES

En Andorre, il n’existe pas d’éléments chiffrés permettant d’évaluer le nombre de créations d’emplois qui seraient directement liées à la numérisation. L’introduction des TIC n’a pas provoqué la disparition de métiers. L’économie andorrane est très concentrée sur le secteur des services, et en particulier le secteur du tourisme ; le secteur agricole et l’élevage ne représentent que 0,46 % de la population active, ce taux est de 3,35 % pour le secteur industriel. L’introduction des TIC dans les secteurs du commerce et des services les contraignent à s’adapter et à se réinventer.La numérisation constitue une véritable opportunité pour le pays qui devrait voir s’implanter de nouvelles activités liées au numérique d’une part et permettre, d’autre part, de maintenir la compétitivité des activités touristiques. En raison du format de son économie, le pays n’a pas eu à faire face à des délocalisations directement ou indirectement liées à la diffusion des TIC.

En Belgique, entre 2000 et 2013, la part des professions moyennement qualifiées a baissé de 3,3 points de pourcentage alors que la part des emplois hautement qualifiés progressait de 3,9 points et que celle des emplois faiblement qualifiés restait relativement stable. 39 % des emplois seraient menacés par une forte probabilité de numérisation totale. Le personnel administratif souffrirait le plus de la numérisation croissante. A contrario, seuls 7 % des emplois disparaitraient à cause de celle-ci. Mais la numérisation entrainera également la

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création de nouveaux types de professions, rendant l’effet total de la numération sur l’emploi difficile à prévoir.

En Belgique, il n’existe pas de statistiques permettant de quantifier l’ampleur du phénomène d’online outsourcing (OO), défini comme un lien contractuel, souvent par-delà les frontières, entre travailleurs et employeurs dans le but de fournir des services ou d’effectuer des tâches en passant par des plateformes sur Internet. Une extrapolation à partir des pourcentages relevés aux Etats-Unis et d’une étude d’Unizo évaluerait à 110 000 le nombre de travailleurs susceptibles d’y recourir. A l’heure actuelle cependant, le marché du travail en Belgique demeure plus traditionnel.

Au Canada, plusieurs études se sont intéressées aux répercussions de l’automatisation sur le marché du travail canadien, dont les conclusions diffèrent quant à l’ampleur des répercussions, allant de faible à considérable.

La section malienne fait observer que, de manière globale, « l’équation TIC/emploi n’est pas destructive » arguant que si l’automatisation de certaines tâches fait parfois disparaître certains métiers, elle en crée d’autres dans le même temps. Au Mali, le numérique est plutôt pourvoyeur d’emplois directs dans le secteur du numérique lui-même et d’emplois indirects dans d’autres secteurs, faisant émerger de nouveaux besoins en compétences. Le développement des services à destination de la population et les projets de construction d’artères de transmission numérique via la fibre optique notamment sont générateurs à la fois d’investissements et d’emplois.

Le Mali ne déplore pas de délocalisations d’activités provoquées par l’avènement des TIC et estime, au contraire, que leur développement est à l’avantage d’un pays aussi vaste.

Depuis 2011, les emplois dans le secteur des TIC ont connu une croissance de 3,6 % au Québec, six fois supérieure à la croissance des emplois dans les autres secteurs de l’économie. Le secteur des TIC est particulièrement tributaire de la main-d’œuvre étrangères avec un taux de 27 % de professionnels des TIC issus de l’immigration. Dans l’ensemble du marché du travail, la part des personnes issues de l’immigration n’est que de 15 %.

Le virage technologique amorcé dans les années soixante-dix au Québec a suscité des craintes s’agissant de la préservation des emplois et du potentiel de conversion de la main-d’œuvre. Ces craintes ont été ravivées avec les récents développements de l’IA. L’Institut Brookfield estime à 42 % le taux de main-d’œuvre canadienne risquant d’être affectée par l’IA d’ici 2030. La Banque

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Royale du Canada, pour sa part, juge que la moitié des emplois seront perturbés par l’avènement de l’IA sur le marché du travail d’ici à la prochaine décennie. Certains secteurs sont plus immédiatement touchés que d’autres. C’est le cas des médias papier qui ont perdu nombre d’emplois en raison de l’accaparement des revenus publicitaires par les géants d’Internet. Le secteur du transport de marchandises est directement menacé par l’arrivée des véhicules autonomes. Les données disponibles actuellement au Québec ne permettent pas de conclure à la disparition récente de métiers précis. Par ailleurs, le taux de chômage au Québec, comme dans le reste du Canada, demeure très bas depuis 2016, autour de 5,5 %. L’Institut C. D. Howe juge « très peu probable que les emplois dans des professions très susceptibles à l’automatisation (35 % des emplois au Canada) soient complètement remplacés par des machines intelligentes au cours des prochaines années ».

Les données disponibles au Québec ne permettent pas de relier les TIC à une cause directe de délocalisation d’emplois.

La section roumaine n’est pas en mesure de répondre à la question de savoir si l’introduction des TIC menace plus les emplois existants qu’elle n’offre de perspectives de créations d’emplois, faute de données statistiques disponibles en la matière. Elle indique, d’une part, que la Roumanie dispose de l’un des taux de chômage les plus bas de l’Union européenne (3,46 % à fin août 2018), et, d’autre part, qu’elle est confrontée à un manque de main-d’œuvre qualifiée lié à la fois au départ des jeunes travailleurs pour d’autres pays et au vieillissement de sa population.

Des métiers ont disparu ou sont en cours de disparition, principalement dans les secteurs de la production (opérateurs et techniciens), en particulier l’industrie textile, du cuir, du bois, l’automobile, la construction électrique, la mécanique, la construction navale et aéronautique, la presse et l’édition, etc.

La plus grande partie des nouveaux métiers apparus au cours des dernières décennies en Roumanie sont liés aux besoins du secteur des TIC lui-même, comme les métiers de stratège Web, de développeur d’applications, d’intégrateur Web, d’administrateur d’infrastructure informatique ou de base de données, d’artiste 3D, d’analyste-programmeur, de spécialiste numérique, de designer graphiste, de consultant systèmes et réseaux, etc.

La Roumanie est confrontée à la problématique de la répartition territoriale des activités liées aux TIC dans la mesure où la capitale Bucarest, concentre plus de 60 % de la valeur ajoutée du secteur des TIC. Trois autres villes, Cluj, Timisoara et Iasi, sont également des centres TIC. Quelques villes moyennes

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sont apparues récemment sur ce secteur comme Brasov, Sibiu, Craiova, Târgu, Mureş et Galati.

La section sénégalaise indique qu’en trois décennies, les nouvelles technologies ont investi le monde du travail engendrant de nouveaux secteurs d’activité, de nouveaux métiers, de nouveaux produits et services, en support au processus de numérisation de l’économie, mais également dans des domaines aussi variés que la santé avec la télémédecine, l’éducation avec l’apprentissage en ligne, le commerce en ligne, etc.. Au Sénégal, l’introduction des TIC a généré un important volume d’emplois directs, chiffrés à plus de 19 000, et indirects, estimés à plus de 57 000. Certains emplois ont aussi disparu au Sénégal.

La délocalisation d’activités et de services favorisée par le développement des nouvelles technologies a profité au Sénégal où le traitement de données et la recherche et développement ont été externalisées dans des entreprises sénégalaises.

Selon la section suisse, le gouvernement (Conseil fédéral) a publié en 2017 un rapport intitulé Conséquences de la numérisation sur l’emploi et les conditions de travail – opportunités et risques, dans lequel il constate que « la peur de voir disparaitre des emplois accompagne immanquablement le progrès technologique rapide ». Ce rapport souligne que 860 000 postes ont été créés durant les vingt dernières années alors que l’automatisation est en marche en Suisse depuis des décennies. La Suisse connaît quasiment le plein-emploi et bénéficie de standards de qualité de vie élevés. Le rapport reconnaît cependant les effets de substitution dus à l’automatisation qui, s’ils sont trop rapides, peuvent engendrer une inadéquation entre les qualifications requises et les emplois proposés. Il souligne que les technologies d’automatisation permettent aussi de compléter des emplois existants en créant de nouveaux postes de travail dans des branches existantes, c’est le cas notamment avec les robots collaboratifs. Si l’évolution technologique provoque aussi un déplacement des emplois vers d’autres secteurs économiques, elle favorise également l’émergence de nouveaux produits, de nouvelles branches et de nouvelles professions, à l’instar des architectes de données et des ingénieurs numériciens.

En Suisse, on préfère parler d’évolution du monde du travail plutôt que de changements, ces vingt dernières années. Entre 1996 et 2015, l’emploi a progressé de 32 % dans le secteur des services alors qu’il a diminué de 30 % dans l’agriculture et de 5 % dans le secteur secondaire (industrie et bâtiment). Ces transferts peuvent être attribués aux changements technologiques mais aussi à l’internationalisation de l’économie. La plus forte progression de l’emploi concerne les métiers d’administration d’entreprise et de l’informatique

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(concepteurs, analystes de logiciels et de multimédia, spécialistes de bases de données et de réseaux…), mais aussi les métiers de la justice, des sciences sociales, les sciences comme la médecine, la physique, la chimie, les mathématiques, l’ingénierie… L’emploi a également connu un développement supérieur à la moyenne dans les domaines de l’enseignement, de l’accompagnement et des soins, toutes professions nécessitant une forte interaction personnelle. Le recul des parts d’emploi a concerné les secteurs de l’agriculture, de la sylviculture, l’industrie et l’artisanat en raison de l’automatisation des tâches liée à leur forte composante répétitive, mais aussi la catégorie des employés de bureau.

En Suisse, alors que la délocalisation de la production a vraisemblablement freiné la croissance de l’emploi dans les branches à technicité faible ou moyenne, le secteur des hautes technologies a enregistré une hausse de la main-d’œuvre en termes relatifs et en valeur absolue.

C. L’IMPACT DU NUMÉRIQUE SUR LA SITUATION DE TRAVAIL EST ENCORE PEU ABORDÉ DANS L’ESPACE FRANCOPHONE

La mise en place en Andorre du certificat électronique qualifié peut faciliter la mise en place du télétravail. Il est prévu d’étendre son utilisation à tous les services, administration, entreprises, agriculture, commerce, développement urbain, santé, éducation, formation, médias, finance…

La section belge fait observer que le morcellement du travail et la mise en concurrence des travailleurs à l’échelle globale représentent d’importants défis pour la concertation sociale et imposent d’adapter les structures de négociations collectives, en particulier avec l’essor des plateformes en ligne qui verra augmenter la part de l’emploi indépendant. La distinction entre salarié et indépendant, ainsi que la subordination juridique et/ou économique sont des questions aigües, tout autant que le développement d’un management digital qui ne prendrait pas en considération les principes d’équilibre entre vie privée et vie professionnelle.

L’impact du développement des TIC sur les conditions de travail reste non évalué pour le moment au Mali. Force est de reconnaître toutefois que les effets des TIC sur le travail doivent avant tout s’apprécier dans le sens d’une complémentarité entre les TIC et les changements organisationnels.

Au Québec, les bouleversements induits par la numérisation de l’économie se manifestent tout d’abord dans le changement du modèle d’affaires. Par exemple, le plus ancien quotidien francophone d’Amérique du Nord et le plus

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populaire au Québec, La Presse, a lancé en 2013 une application offrant du contenu exclusif à ses utilisateurs et abandonné l’édition papier en 2017 pour offrir uniquement du contenu numérique. En 2018, l’entreprise a été convertie en organisation à but non lucratif. Les processus organisationnels des entreprises nécessitent eux aussi d’être transformés pour adapter la répartition de la charge de travail entre les hommes et les outils numériques. Cela engendre une redéfinition de la nature du travail effectué et du rapport du travailleur à celui-ci. Enfin, l’expérience client est aussi transformée du fait de l’usage d’assistants virtuels capables de reproduire les interactions les plus courants des relations avec la clientèle.

D’une manière générale, aussi bien les chefs d’entreprise que les salariés sénégalais estiment que les TIC ont un effet positif sur la qualité de vie au travail des salariés. Ce sentiment est partagé par les employés de l’administration sénégalaise qui estiment que la numérisation, notamment en matière d’archivage, est synonyme de gain de temps et de productivité ce qui permet, au final, de mieux répondre aux demandes de l’usager.

D. TOUS LES PAYS DE L’ESPACE FRANCOPHONE SONT CONSCIENTS DES ENJEUX EN MATIÈRE D’ÉDUCATION ET DE FORMATION

L’Andorre a introduit progressivement les outils et usages numériques dans l’enseignement il y a dix ans. Toutes les écoles des trois systèmes éducatifs, français, espagnol et andorran, sont engagées dans un processus de transformation dans lequel la technologie n’est plus une finalité mais un moyen au service de l’apprentissage et du développement aussi bien des élèves que des enseignants. Le véritable enjeu n’est pas de décider s’il faut utiliser la technologie ou pas, mais de repenser l’éducation à travers elle. Il ne s’agit pas de simplement développer un ensemble de méthodes mais de combiner comportements, connaissances spécifiques et techniques, habitudes de travail et pensée critique, éducation formelle et informelle, etc. Les technologies représentent une vraie opportunité pour passer d’un modèle d’enseignement purement transmissif à un modèle d’apprentissage actif (apprentissage expérimental et coopératif, pédagogies actives et interactives). Le ministère andorran de l’éducation et de l’enseignement supérieur a fait et continuera à faire de gros efforts pour accompagner l’ensemble de la communauté éducative dans ce processus qui vise à repenser et développer de nouvelles formes d’enseignement. Ces efforts ne se limitent pas à prévoir des crédits au budget de l’Etat destinés à financer des infrastructures permettant une bonne connectivité ; ces efforts sont aussi consacrés à définir et exécuter des plans stratégiques intégraux qui accompagnent les centres d’apprentissage dans l’implantation des nouvelles méthodes de travail. Le ministère a signé un accord

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avec le Massachussetts Institute of Technology (MIT) pour reconduire en 2018-2019 l’initiative International Science and Technology Initiatives dans le cadre du programme Global Teaching Lab, Cette initiative, qui a été positive pour l’année 2017-2018, permet aux étudiants de passer trois semaines dans des écoles secondaires à l’étranger où les étudiants collaborent avec les professeurs dans l’enseignement des mathématiques, de la biologie, de la chimie, des sciences, de la technologie, entre autres. Le projet terMIT permet de développer dans les écoles des projets liés à l’efficience énergétique, sur la base de technologies développée par MIT Media Lab. Avec cette approche, les élèves acquièrent des notions de mathématiques et de physique et développent leur sensibilité à l’innovation technologique ainsi qu’aux contingences présentes et futures, liées aux problématiques environnementales et énergétiques. Enfin, le projet Tandem est destiné aux élèves de formation professionnelle auxquels les entreprises andorranes lancent des défis en matière d’innovation comme par exemple créer des applications destinées à fidéliser la clientèle.

En Belgique, 61 % des citoyens possèdent des compétences numériques générales de base ou avancées. Avec le Pacte d’excellence, l’enseignement tente de déployer une éducation à la fois au numérique et par le numérique, afin de développer des comportements adéquats face aux nouvelles technologiques et mettre les équipements numérique au service de nouvelles formes d’apprentissage et adapter davantage ceux-ci à chaque élève. Pour y parvenir, une plateforme de ressources éducatives est proposée pour que les écoles développent leur propre stratégie numérique, de même que des outils pédagogiques numériques sont développés.

En 2017, le gouvernement fédéral du Canada a publié un rapport intitulé Bâtir une main-d’œuvre canadienne hautement qualifiée et résiliente au moyen du laboratoire des compétences futures qui identifie les enjeux en matière d’éducation et de formation des jeunes Canadiens dans le contexte de la révolution numérique. Ce rapport constate tout d’abord qu’il est difficile pour les systèmes d’éducation de s’adapter de manière opportune pour transmettre aux jeunes les compétences adéquates. Plusieurs études font état de nouvelles attentes des employeurs liées aux changements apportés par la révolution numérique. La plupart des grandes entreprises canadiennes affirment rechercher des compétences non techniques comme le travail d’équipe ou la communication. Or il est difficile pour les nouveaux diplômés de démontrer qu’ils possèdent ces compétences dans la mesure où les titres professionnels et les certificats misent sur l’éducation et l’expérience de travail, plutôt que sur ce type de compétences. Le défi consiste donc à adapter la formation des jeunes à ces nouveaux besoins.

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Ce rapport dénonce également le manque de formation offerte par les employeurs. Divers études établissent que les dépenses des employeurs canadiens destinées à la formation de leurs employées ont diminué depuis vingt ans et sont inférieures aux dépenses des autres membres de l’OCDE.

La section canadienne déplore un manque d’informations relatives au marché du travail. Les données liées à l’éducation et aux compétences sont recueillies au niveau des provinces, sans méthodologie ni terminologie standardisées au niveau national qui faciliterait le partage et la compilation des données. L’organisme national de statistique, Statistique Canada, n’a pas de mandat précis pour ce faire. Or cet enjeu est crucial si l’on veut transmettre aux étudiants les compétences recherchées par le marché du travail.

Le Plan pour l’innovation et les compétences du Canada présenté en 2017 vise entre autres à favoriser la formation continue, à aider les adultes à reprendre des études et à enseigner les compétences numériques aux enfants. A cet égard, le gouvernement fédéral investira 50 millions de dollars canadiens sur deux ans pour appuyer la formation des élèves de la maternelle à la douzième année.

En 2018 a été lancé le Programme d’échange en matière de littératie numérique qui bénéficie d’un investissement de 29,5 millions de dollars canadiens pour « soutenir des initiatives de formation sur les compétences numériques de base à l’intention des Canadiens qui auraient avantage à participer à l’économie numérique ».

Enfin, la section canadienne s’inquiète du risque que la croissance économique créée par la révolution numérique ne soit pas inclusive. La majorité des emplois pour lesquels une bonne partie des tâches est répétitive et donc remplaçable par la technologie est occupée par les groupes de population peu qualifiés. Or une partie de ces emplois revient habituellement aux jeunes comme postes d’entrée sur le marché du travail. Par ailleurs, une partie de la population ne possède pas un niveau adéquat de compétences numériques, c’est surtout le cas des Autochtones et des personnes âgées. Enfin, les femmes canadiennes ne représentent que 39 % des diplômés en STEM.

Le gouvernement malien a lancé le projet Doniya (le savoir) dont la première phase est dédiée à instaurer une connexion et une interconnexion entre les universités maliennes (bibliothèques numériques interconnectées, échanges entre les administrations universitaires, sécurisation des données, etc.). La seconde phase a permis de distribuer 13 000 tablettes connectées à Internet aux étudiants, conformément aux objectifs de la Stratégie éducation et renforcement des

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capacités qui est incluse dans la Stratégie nationale d’accès universel aux services des technologies de l’information et de la communication.

Pour le Québec, les enjeux de la transformation numérique portent d’abord sur l’intégration des outils et des pratiques propres à l’univers numérique dans le cursus scolaire, du primaire à l’université, en passant par le secondaire, le collégial, la formation des adultes, la formation professionnelle et la formation continue. Lancé en 2018, le Plan d’action numérique en éducation et en enseignement supérieur mis en place par le gouvernement s’articule autour de trois orientations permettant de relever ce défi.

La première orientation contient des mesures visant à soutenir le développement des compétences numériques des jeunes et des adultes, parmi lesquelles figure la mise en œuvre d’un cadre de référence des compétences numériques appliqué à tous les ordres d’enseignement, l’utilisation de la programmation informatique à des fins pédagogiques dans toutes les écoles du Québec et l’intégration des technologies numériques dans les pratiques pédagogiques et l’accompagnement du personnel enseignant pour ce faire.

La deuxième orientation vise à exploiter la valeur ajoutée offerte par le numérique dans les pratiques d’enseignement. La mesure phare de cette orientation consiste à centraliser l’offre de formation à distance des collèges et universités sur une plateforme nationale permettant aux établissements de mutualiser leurs ressources.

La troisième orientation tend à créer un environnement propice au déploiement du numérique dans l’ensemble du système éducatif. A cette fin, le ministère de l’éducation et de l’enseignement supérieur créera un dossier numérique pour chaque élève, qui le suivra tout au long de son parcours éducatif. Par cette orientation, le gouvernement se propose aussi de mettre en place un réseau de télécommunication fiable et sécuritaire de grande capacité afin de favoriser, notamment, le renforcement de la collaboration entre les intervenants scolaires, les élèves et les parents ainsi que l’utilisation des outils numériques de pointe qui seront introduits dans les établissements.

La Stratégie nationale de la main-d’œuvre, dévoilée en mai 2018, prévoit plusieurs mesures pour développer l’offre de formation continue de manière à soutenir la main-d’œuvre dans l’actualisation de ses connaissances et de ses compétences. Il est proposé de bonifier l’offre de programmes de courte durée au collégial et au professionnel de courte durée tout en facilitant l’accès aux études à temps partiel en formation professionnelle et technique. Une mesure prévoit également développer les compétences numériques des travailleurs et travailleuses

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ainsi que des personnes à la recherche d’un emploi. Enfin, le secteur bioalimentaire connaît lui aussi une transformation rapide de ses infrastructures technologiques qui implique l’adaptation du savoir-faire de sa main-d’œuvre. C’est pourquoi la stratégie engage le ministère de l’agriculture, des pêcheries et de l’alimentation à actualiser son programme de formation continue à distance.

En 2017, les autorités roumaines ont introduit dans le système éducatif (écoles, lycées et universités) des cursus d’utilisation et de programmation de logiciels mais se sont trouvées confrontées à un problème d’enseignants. En effet, bien que le nombre d’étudiants dans les disciplines STEM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques) ait presque doublé au cours des dernières années, le nombre d’enseignants est resté inchangé, voire a diminué. Ce sont les entreprises qui de plus en plus offrent des stages aux étudiants et participent à l’élaboration des cursus universitaires. Sont cités en exemple les établissements Academy+PLUS et Simplon.ro, deux écoles inspirées des modèles français des écoles 42 et Simplon. Autre exemple, IBM propose aux étudiants de l’université Ouest de Timisoara des cours d’analyse de métadonnées. Par ailleurs, les spécialistes d’IBM participent à la révision des cursus universitaires aux niveaux master, doctorat et projets de recherche.

La Roumanie a en outre prévu d’investir massivement dans l’éducation dans les prochaines années afin de fournir en équipements TIC les établissements secondaires, améliorer l’accès à Internet en développant la WIFI dans les campus, en introduisant et développant une culture du numérique dans les processus d’enseignement. Pour ce faire, la Roumanie bénéficie des fonds structurels européens.

Les autorités sénégalaises sont conscientes du défi consistant à adapter à la fois le système éducatif et la formation professionnelle à ces nouveaux enjeux. Le numérique doit être introduit très tôt dans les programmes, dès le cycle primaire, et doit être généralisé dans le cycle supérieur. Pour prendre en compte le fait que de nouveaux métiers apparaissent exigeant de maîtriser des compétences spécifiques, il est envisagé de modifier les méthodologies et les contenus pédagogiques, en y associant notamment les entreprises. Ces dernières sont également sollicitées pour encadrer les futurs diplômés.

Le gouvernement suisse réfléchit à exploiter de manière optimale le développement du numérique en matière d’emploi en préconisant, d’une part, d’axer la formation encore davantage sur les compétences et les connaissances nécessaires à une économie numérique, et, d’autre part, de conserver une certaine flexibilité au marché de l’emploi indigène, en veillant par ailleurs à garantir la couverture des risques sociaux. Il semblerait que la numérisation accélère le

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processus d’adaptation des profils de compétences aux besoins du marché du travail.

La Suisse compte relever le défi qui consiste à faire acquérir dès maintenant des compétences TIC et des compétences transversales aux enfants, aux jeunes et aux adultes. Les trois régions linguistiques ont mis en place chacune leur plan d’études relatif à la scolarité obligatoire. En Suisse alémanique et dans le Tessin, ces programmes incluent des cours d’informatique visant à transmettre aux élèves des connaissances techniques et les principaux concepts liés au traitement automatisé des informations. En Suisse romande, le Plan d’études romand (PER) prévoit que l’apprentissage des outils et de la culture informatiques se fasse dans le cadre de la formation générale aux MITIC (médias, images et TIC). Sont communes aux trois plans régionaux les compétences transversales (collaboration, communication, stratégie d’apprentissage, pensée créatrice ou démarche réflexive).

Dans le secondaire, l’enseignement de l’informatique est une option complémentaire. Mais les autorités évaluent actuellement la possibilité d’en faire une matière obligatoire.

Jusqu’à présent la formation professionnelle a contribué dans une large mesure à la gestion réussie de la transformation numérique. Cela est dû au système mis en place qui confie aux représentants de l’économie, c’est-à-dire aux Organisations du monde du travail (Ortra), la définition et le développement en continu des compétences nécessaires à une profession. La formation professionnelle est orientée vers le marché du travail et les profils professionnels sont développés en permanence dans chaque branche, aussi bien au niveau de la formation professionnelle initiale que supérieure (obtention du brevet). Les filières obsolètes qui ne sont plus demandées sont remplacées régulièrement par des filières correspondant à des professions actuelles et axées sur les besoins du marché du travail. Nombre de professions concernées par la numérisation et l’automatisation ont été regroupées avec des professions apparentées ou remplacées par de nouvelles. C’est le cas par exemple, des professions de l’industrie mécanique et graphique. La profession de polymécanicien CFC pour laquelle chaque année 1 650 nouveaux contrats d’apprentissage sont signés, est née de la fusion de sept formations professionnelles initiales indépendantes (conducteur de machines-outils, opérateur sur machines de câblerie, mécanicien de machines, ajusteur-monteur, mécanicien, outilleur et mécanicien-décolleteur). La nouvelle profession d’interactive media designer CFC a été créée à la suite de la numérisation intervenue dans la branche graphique.

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Les écoles polytechniques fédérales (EPF), les universités cantonales, les hautes écoles spécialisées (HES) et les hautes écoles pédagogiques (HEP) constituent le système suisse de formation supérieure. L’une des missions de ce système consiste à former des spécialistes TIC. Ces hautes écoles développent en permanence et de manière autonome les contenus de leur offre de formation et de formation continue en prenant en compte les développements sociaux, économiques et scientifiques. Elles entretiennent le dialogue avec l’économie et la société, analysent en permanence le besoin et la pertinence pratique de nouvelles offres. Si les compétences numériques tiennent une place importante dans les filières TIC, elles sont amenées à se développer dans l’ensemble des domaines d’études.

Parallèlement existe une offre de formation privée très diversifiée, assurée par des prestataires privés. Cette offre sait faire preuve d’une grande souplesse, se montrant très réactive aux innovations. Ce sont surtout les résidents suisses adultes de plus de 35 ans et les personnes les plus qualifiées qui suivent des cours de formation continue en informatique.

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ANNEXE I : QUESTIONNAIRE ADRESSÉ AUX SECTIONS

La troisième révolution numérique est en cours dans le monde économique avec l’arrivée des plateformes Internet, des objets connectés, de la robotisation, de l’intelligence artificielle, du traitement des données de masse (big data), des imprimantes 3D…

Dans les pays développés, l’économie numérique regroupe trois catégories d’acteurs :

– Les entreprises des secteurs producteurs des technologies de l’information et de la communication (TIC), dont les activités s’exercent dans les domaines de l’informatique, des télécommunications et de l’électronique (les opérateurs de télécoms, les équipementiers télécoms, les équipementiers informatiques, les fabricants d’électronique grand public, les fabricants de composants/systèmes électroniques, les éditeurs de logiciels, de logiciels de jeux, les sociétés de services informatiques).

– La nouvelle économie, c’est-à-dire les entreprises dont l’existence est liée à l’émergence des TIC (commerces et services en ligne, médias et contenus en ligne, Internet à destination des consommateurs finaux –BtoC-…).

– Les entreprises des secteurs usagers, c’est-à-dire qui utilisent les TIC dans leur activité et gagnent en productivité grâce à elles (banques, assurances, automobile, aéronautique, distribution, administration, tourisme…).

Dans ces mêmes pays, une inquiétude se développe s’agissant de l’impact de cette numérisation sur l’emploi et le travail. Au plan quantitatif, les développements technologiques en cours vont-ils réduire la quantité de travail et d’emplois, du fait des gains de productivité qui y sont associés ? Au plan qualitatif, la technologie transforme-t-elle la nature, la structure, l’organisation du travail et des travailleurs ?

1) Quel est le niveau de numérisation de l’économie de votre pays ? Comment est perçue cette numérisation par les populations ?

2) Quels sont les différents acteurs de l’économie numérique dans votre pays ?

3) Quelle est la situation de l’emploi dans votre pays au regard de la numérisation de l’économie en cours ? L’introduction des TIC menace-t-elle les emplois existants ? Ou le numérique offre-t-il plutôt des perspectives de créations d’emplois ? Disposez-vous d’éléments chiffrés ?

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4) L’introduction des TIC a-t-elle provoqué la disparition de certains métiers ? A-t-elle provoqué la création de nouveaux métiers ? Citez des exemples.

5) Les conditions de travail, l’organisation du travail, le contenu du travail, les compétences des travailleurs sont-ils impactés par la numérisation ? Citez des exemples.

6) Quels sont les enjeux pour l’éducation et la formation dans votre pays ?

7) La diffusion des TIC dans les entreprises a-t-elle conduit à des délocalisations, d’un territoire à l’autre au sein de votre pays, à l’extérieur de votre pays ?

8) Les autorités politiques de votre pays ont-elles engagé des mesures particulières pour réagir à ce phénomène, l’accompagner, le réguler ?

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ANNEXE II : RÉPONSES DES SECTIONS AU QUESTIONNAIRE DU RAPPORTEUR

RÉPONSES DE LA SECTION ANDORRANE

La situation de l’Andorre est particulière puisqu’il s’agit d’un pays de montagne de 468 km2, avec une population de 74.794 habitants, dont 43.622 actifs. Le fait que l’économie soit très concentrée sur le secteur des services, et en particulier sur le secteur du tourisme contribue à une certaine résilience, à court terme, du marché du travail actuel face aux possibles effets négatifs de la numérisation.

Le secteur agricole et le secteur de l’élevage, qui ne représentent que 0,46 % de la population active, ne sont pas impactés et il ne semble qu’ils doivent l’être à court et moyen terme.

Le très faible poids du secteur industriel, qui ne représente que 3,35 % de la population active, rend les impacts de la numérisation, notamment ceux liés aux processus d’automatisation, insignifiants.

Pour ce qui est du secteur public, celui-ci a déjà initié, une profonde transformation, comme il en sera fait état dans la réponse à la question 6.

L’Andorre devra faire face à l’impact de la numérisation sur les secteurs existants, mais celui-ci devrait être assez circonscrits, permettant, ainsi, la mise en place de processus d’adaptation au changement, les plus performant et pertinents possibles, aussi bien pour les travailleurs du secteur public que pour ceux du secteur privé.

Mais la numérisation constitue une véritable opportunité pour l’Andorre, elle devrait permettre l’implantation de nouveaux secteurs d’activités liés au numérique, et de maintenir la compétitivité des secteurs existants liés au tourisme face à une concurrence de plus en plus importante.

1) L’enjeu pour votre pays des capacités d’accès universel et abordable au numérique conformément aux objectifs de développement durable :

Quel est le niveau de connectivité de votre pays (accès à l’électricité ; infrastructures de télécommunication, technologie fibre optique/câbles sous-marins/satellites/etc. ; niveau d’équipement des ménages, des entreprises, des administrations ; règlementation favorable au développement numérique économique ; capacité des citoyens à se servir des outils numériques...) ?

Accès à l’électricité :

La totalité du réseau électrique de transport, est géré par « Forces Elèctriques d’Andorra » (Entreprise publique), ainsi que 70% du réseau de distribution. Le reste du réseau appartient à 4 régies qui desservent une partie du territoire.

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La totalité des habitations d’Andorre est raccordée au réseau, et dispose d’un temps de coupure moyen inférieur à 10 minutes par an en moyenne durant ces 10 dernières années.

Le réseau haute tension (110 et 225 kV) est constitué de 58 km de lignes dont 18 km sont souterrains.

Le réseau de distribution de FEDA est constitué de 326 km de câble moyenne tension, desquels 277 sont souterrains et de 337 km de câbles basse tension.

La qualité du service est garantie d’une part per le fait d’une grande partie du réseau est souterraine, ce qui le rend insensible à la foudre et aux intempéries, et d’autre part, grâce au maillage du réseau qui permet de disposer de différentes options en cas de panne pour alimenter les clients. Un important système de téléconduite et d’automatisation des organes de coupure, garantissent une rapidité d’action en cas de défaillance d’une partie du réseau.

Infrastructures de télécommunication, technologie fibre optique/câbles sous-marins/satellites/… :

Déploiement du réseau de fibre optique en Andorre

L’Andorre est à la pointe dans le déploiement de solutions de fibre optique de nouvelle génération grâce aux décisions historiques qui ont permis les premiers investissements dans la technologie FTTH (2007).

L’accès standard offre à l’utilisateur 300 Mbps (Foyers et entreprises), loin devant la moyenne de nombreux autres pays européens. De plus, la plupart des entreprises sont connectées à 1 Gbps.

Conformément à la loi, Andorra Telecom doit offrir une connexion haut débit fixe à tout ménage qui le souhaite, quelle que soit sa situation géographique.

L’accès en haut débit moyen est de 190 Mbps

Déploiement haut débit mobile en Andorre

En termes de couverture MBB, Andorre est également bien placée par rapport au reste de l'Europe.

Le réseau 4G est disponible pour 92% de la population andorrane, devant la moyenne de l'UE.

La connectivité au réseau 3G est disponible pour 99% de la population andorrane, ce qui correspond à la moyenne de l'UE.

Niveau d’équipement des ménages, des entreprises, capacité des citoyens à se servir des outils numériques :

Utilisation des TIC en Andorre

- Mobiles (prépayés et postpayés) : 80 337

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- Utilisation des TIC par les citoyens : 107,4% (en Espagne 110% et en France près de 120%)

- Utilisation nationale de données mobiles : 700 Mo (décembre 2017)

- Accès à Internet : 34 284

- Utilisation des TIC par les ménages + les entreprises : 86%

- Accès moyen à Internet : moyenne de 75 Go (décembre 2017)

- Utilisation des TIC par les Administrations publiques : 70 %

Le Projet de loi de modification du Code de l’Administration, qui se trouve actuellement en procès d’adoption par le Consell General (Le Parlement), établi un délai de deux ans, à compter de l’entrée en vigueur de la loi, pour mettre en place l’utilisation exclusive d’un certificat électronique qualifié par les travailleurs publics dans leur travail quotidien, ainsi qu’une obligation d’utilisation d’un certificat électronique qualifié par les entreprises et les travailleurs indépendants dans leurs relations avec les Administrations publiques.

2) Quels sont les différents acteurs de l’économie numérique dans votre pays au regard de ceux identifiés en page précédente ?

- Les entreprises des secteurs producteurs des technologies de l’information et de la communication (TIC), dont les activités s’exercent dans les domaines de l’informatique, des télécommunications et de l’électronique (les opérateurs de télécoms, les équipementiers télécoms, les équipementiers informatiques, les fabricants d’électronique grand public, les fabricants de composants/systèmes électronique, les éditeurs de logiciels, de logiciels de jeux, les sociétés de services informatiques).

L’Andorre, pour des raisons de taille, ne possède qu’un seul opérateur public de télécommunications, Andorra Telecom.

Il existe des équipementiers télécoms, des équipementiers informatiques et des sociétés de services informatiques qui, au jour d’aujourd’hui, sont orientés au marché andorran.

- La nouvelle économie, c’est-à-dire les entreprises dont l’existence est liée á l’émergence des TIC (commerce et services en ligne, médias et contenus en ligne, Internet à destination des consommateurs finaux BtoC)) .

Il commence á apparaitre des entreprises de créations de logiciels et d’APP’s dirigées aux services publics et, aux services privés liés au commerce (BtoB et BtoC).

Il peut être cité comme exemple, l’installation, en 2017, d’une filiale de l’entreprise espagnole Everis (appartenant au groupe NTT Data), spécialisée dans le consulting et l’outsourcing dans les TIC.

- Les entreprises des secteurs usagers, c’est-à-dire qui utilisent les TIC dans leur activité et gagnent en productivité grâce à elles (banques, assurances, automobile, aéronautique, distribution, administration, tourisme…).

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Toutes les entreprises des secteurs usagers ont incorporé, à différents niveaux, les TIC dans leurs relations BtoB et BtoC. Cela devrait s’intensifier avec la mise en place, par le Gouvernement, depuis 3 ans, d’un certificat électronique qualifié (de citoyen, d’entreprise, de professionnel indépendant, de professionnel libérale…) permettant de réaliser en ligne n’importe quelle démarche, aussi bien sur des plateformes publiques que privées.

3) Le numérique comme secteur économique en forte croissance et créateur d’emplois :

Quelle est la situation de l’emploi dans votre pays au regard de la numérisation de l’économie en cours ?

Le marché du travail est un marché d’occupation pleine, et, concrètement, l’économie numérique, avec son niveau de développement actuel n’y fait pas exception, avec un taux de chômage de 2,4 %, qui peut être qualifié de structurel.

Actuellement, quelques 300 demandeurs d’emplois sont inscrits au service d’occupation et ce service recense plus de 1.000 offres d’emploi.

L’introduction des TIC menace-t-elle les emplois existants ? Ou le numérique offre-t-il plutôt des perspectives de créations d’emplois ? Disposez-vous d’éléments chiffrés ?

En Andorre, l’introduction des TIC constitue une véritable opportunité pour développer de nouveaux secteurs d’activités et consolider les existants face à une concurrence de plus en plus importante.

Depuis 2012, date à laquelle ont été approuvées les réformes législatives qui ont posé les bases pour promouvoir la diversification économique à travers l’attraction d’investisseurs étrangers, la création d’emplois dans le secteur de services non touristiques n’a cessé de croitre. Près de la moitié des emplois créés depuis 2012 le sont dans ce secteur d’activité. Ce secteur est passé de la 4ème à la 2ème place aussi bien du point de vue du nombre d’emplois crées que de la masse salariale engendrée. Là aussi, la numérisation, dans les activités de conseil ou d’entreprenariat, est un élément de compétitivité important.

Il n’existe pas d’éléments chiffrés permettant d’évaluer le nombre de créations d’emplois qui seraient directement liés à la numérisation.

L’introduction des TIC a-t-elle provoqué la disparition de certains métiers ? A-t-elle engendré la création de nouveaux métiers ? Citez des exemples.

Pour l’Andorre, l’introduction des TIC n’a pas provoqué la disparition de métiers. En effet la numérisation n’a pas eu d’impact sur le secteur agricole et de l’élevage. Le secteur industriel, de par sa faible taille, n’a pour l’instant pas ressenti d’effets négatifs liés à la numérisation. Ce qui est sûr est que l’introduction des TICs pour les secteurs du commerce et des services ont eu un impact et font que ces secteurs doivent se réinventer et s’adapter aux nouvelles technologies. Le Gouvernement a lancé des actions pour aider ces entreprises à cette transformation.

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Par contre, la numérisation constitue, sans aucun doute, une véritable opportunité pour l’Andorre, elle devrait permettre l’implantation de nouveaux secteurs d’activités liés au numérique, et le maintien de la compétitivité des secteurs existants liés au tourisme.

Il peut être cité comme exemple le projet de transformation de la centrale de reprographie en centrale de digitalisation authentique de documents publics et privés au sein de l’Administration générale, qui est actuellement á l’étude.

La diffusion des TIC dans les entreprises a-t-elle conduit à des délocalisations, d’un territoire à l’autre au sein de votre pays, à l’extérieur de votre pays ?

L’Andorre n’a pas eu à faire face, notamment due à taille et la dimension de son économie, à des délocalisations liées directement ou indirectement á la diffusion des TIC.

4) Le numérique comme levier pour renforcer les différents secteurs de l’activité humaine (administration, entreprises, agriculture, commerce, développement urbain, santé, éducation, formation, médias, finance, etc.) :

Les conditions de travail, l’organisation du travail, le contenu du travail, les compétences des travailleurs sont-ils impactés par la numérisation ? Comment ? Citez des exemples.

Les Administration publiques et les entreprises ont un niveau très élevé d’informatisation, et par conséquent la dématérialisation des processus de travail n’est pas un phénomène nouveau. Même s’il faut être attentif à certains collectifs biens déterminés et prévoir des processus d’adaptation, la numérisation peut apporter un renouveau dans la relation des travailleurs au travail.

Pour les secteurs du tourisme et du commerce au détail, à eux seuls concentrent 25 % de PIB (16 % pour le secteur de la vente au détail et 9 % pour celui de l’hôtellerie et la restauration), l’impact sur le nombre d’emplois est aujourd’hui assez neutre, bien qu’il puisse commencer à exiger une adaptation des profils requis.

L’évolution du nombre d’emplois stagne en ce qui concerne le secteur commercial (vente au détail) et croît sensiblement dans le secteur hôtelier et restaurateur. Cette croissance est due à l’augmentation, ces 5 dernières années, du nombre de touristes qui visitent l’Andorre. Par contre, paradoxalement, le secteur commercial semble moins impacté par cette augmentation.

Ce faible impact pourrait être attribué á l’augmentation de la vente par internet, qui représente une concurrence très forte face aux modes de vente traditionnels. Sur les 8,3 millions de touristes qui visitent l’Andorre, 5,3 millions sont des “visiteurs d’un jour” qui privilégient les activités d’achats (près de 68% des visiteurs d’un jour citent le “shopping” comme principal motif de visite).

L’Andorre est confrontée, dès aujourd’hui, à un véritable défi, celui de maintenir la compétitivité de son secteur commercial, et les stratégies de numérisation, basées sur l’amélioration de l’expérience d’achat, pré, durant et après la vente, peuvent constituer de véritables axes d’action.

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Être en mesure de mieux séduire de nouveaux clients (aujourd’hui 13% de nouveaux clients par an), de fidéliser les clients actuels (les visiteurs viennent en moyenne 3 fois par an), de rallonger la durée des séjours (3 nuits en moyenne) et d’augmenter la dépense moyenne lors de leurs visites dépendra de la capacité de promouvoir des contenus de qualité mais aussi de les mettre en valeur de façon permanente et performante. L’innovation, et concrètement la numérisation, peut s’appliquer autant à l’amélioration des contenus offerts que sur la capacité de capter de nouveaux clients et de les satisfaire.

Tout cela devrait permettre d’améliorer aussi bien les conditions de travail que les compétences des travailleurs, avec la mise en place, si cela s’avère nécessaire, de processus d’adaptation au changement.

Concrètement la mise en place de l’utilisation du certificat électronique qualifié peut permettre de faciliter la mise en place du télétravail, la présence physique du travailleur à certain poste, n’est plus indispensable. Son utilisation s’étendra à tous les services (administration, entreprises, agriculture, commerce, développement urbain, santé, éducation, formation, médias, finance…)

5) Le numérique comme facteur d’innovation transversale contribuant à transformer les modèles économiques, sociétaux et politiques, en particulier grâce à l’appropriation par la jeunesse des outils et des usages numériques :

Quels sont les enjeux pour l’éducation et la formation des jeunes à d’éventuels nouveaux métiers et de nouvelles conditions de travail dans votre pays ?

Les outils et les usages numériques ont été introduit progressivement dans l’enseignement, il y a de cela 10 ans. Toutes les écoles des trois systèmes éducatifs (français, espagnol et andorran) se trouvent donc dans un procès de transformation dans lequel la technologie n’est plus une finalité mais un moyen au service de l’apprentissage et du développement aussi bien des élèves que des professeurs.

Le véritable enjeu n’est pas de décider s’il faut utiliser la technologie ou pas, mais de repenser l’éducation à travers elle. Les technologies actuelles définissent de nouveaux entourages d’apprentissage qui modifient les relations avec les contenus, et requièrent l’élaboration de nouvelles formes d’apprentissage qui tendent à effacer la frontière entre le centre d’apprentissage et le domicile, entre éducation formelle et informelle. Dans ce sens, il ne s’agit pas simplement de développer un ensemble de méthodes et d’habiletés, sinon de permettre la combinaison de comportements, connaissances spécifiques et techniques, habitudes de travail et pensée critique.

Les technologies représentent une véritable opportunité pour passer d’un modèle d’enseignement purement transmissif à un modèle d’apprentissage actif. Concrètement, elles permettent l’implantation de l’apprentissage expérimental, de pédagogies actives, de l’apprentissage coopératif et de pédagogies interactives.

Le ministère de l’Education et de l’Enseignement Supérieur du Gouvernement de la Principauté d’Andorre a fait, et continuera à faire de gros efforts pour accompagner

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l’ensemble de la communauté éducative dans le défi que suppose repenser et développer de nouvelles formes d’enseigner.

Ces efforts ne se limitent pas à prévoir des crédits au budget de l’Etat destinés à financer des infrastructures qui permettent une bonne connectivité, mais aussi à définir et exécuter des plans stratégiques intégraux qui accompagnent les centres d’apprentissage dans l’implantation de nouvelles méthodes de travail.

Préparer les futurs citoyens à un environnement de plus en plus digital, suppose le développement de compétences afin de mieux comprendre et utiliser les nouvelles technologies. Il s’agit aussi d’effacer l’écart qu’il peut exister entre les enfants et les adolescents pour ce qui est de l’accès aux nouvelles technologies.

Le ministère de l’Education et de l’Enseignement Supérieur a signé un nouvel accord avec la MIT International Science and Technology Initiatives du Massachusetts Institute of Technology, dans la cadre du programme “Global Teaching Lab”, portant sur l’année scolaire 2018-2019.

La première expérience, qui a eu lieu pendant l’année scolaire 2017-2018, a été positive pour tous les participants, et en particuliers pour les élèves.

Le Global Teaching Lab est une initiative du Massachusetts Institute of Technology qui permet á ses étudiants de passer un période 3 semaines dans des écoles de secondaire a l’estranger. Les étudiants y collaborent conjointement avec les professeurs, dans l’enseignement des mathématiques, de la biologie, de la chimie, des sciences, de la technologie ou de n’importe quelle autre matière.

Le projet terMIT est un autre projet lié au MIT Media Lab. Il s’agit de développer à l’école des projets liées á l’efficience énergétique, sur la base de technologies développées par MIT Media Lab. Cette approche permet de combiner l’acquisition de notions mathématiques et physiques, mais aussi de développer la sensibilité des élèves á l’innovation technologique, mais aussi aux contingences présentes et futures, liées aux problématiques environnementales et énergétiques.

Le projet Tandem est un projet destiné aux élèves de formation professionnelle. Les entreprises andorranes leurs lancent des défis liés à l’innovation (par exemple des applications destinées à la fidélisation de leurs clients). Ce projet intègre, cette année, les élèves du système d’enseignement andorran mais aussi les élèves du système d’enseignement français.

6) L’intégration des enjeux du numérique par les autorités politiques de votre pays :

Ont-elles engagé des mesures particulières pour accompagner le développement du numérique auprès des citoyens, des administrations, des entreprises, le réguler ?

Le Gouvernement exerce un rôle moteur afin de mettre en avant la numérisation comme un levier majeur de la compétitivité des secteurs existants et de l’émergence de nouveaux secteurs. Dès 2011, lors de l’élaboration du plan d’action lancé par le nouveau Gouvernement, les TIC ont été identifiées comme pouvant être un potentiel élément de

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transformation. Dès 2012, un Cluster TIC a été lancé dans le cadre de l’Initiative Actua, initiative de collaboration public-privé autour de trois axes : la diversification économique, l’attrait d’investissements étrangers, et l’accompagnement des entreprises.

Aujourd’hui il compte plus de 60 membres et a été privatisé en 2015, devenant ActInn, le Cluster d’Innovation.

En 2014, le Gouvernement a impulsé la création d’une fondation publique, la Fondation ActuaTech, qui regroupe Andorra Telecom, FEDA, l’Université d’Andorre afin de dynamiser les initiatives d’innovation.

La Fondation ActuaTech a signé, en 2015, un accord de collaboration avec le MIT Media Lab à Boston, concrètement avec le City Sciences, afin de créer un écosystème d’innovation ouvert. Un premier projet de création d’un Big Data d’informations liées au tourisme a été lancé. Sur cette base, d’autres projets ont été lancés portant sur l’environnement et l’énergie (cadastre photovoltaïque), sur la mobilité et le véhicules autonomes (véhicules électriques autonomes capables de transporter aussi bien des passagers que des marchandises dans une aire prédéterminée).

Dès 2016, dans ce cadre, une collaboration a été établie avec le groupe de recherche andorran : l’Observatoire pour le développement durable (OBSA).

Depuis 2015, l’Andorre est présente au Smart City Congres à Barcelone, pour y présenter les projets qui ont été évoqués ultérieurement et leurs avancements.

Dans cette ligne stratégique, l’Andorre a organisé récemment la réunion de l’assemblée parlementaire de la Francophonie Région Europe sous le thème du tourisme durable, et a été désignée cette semaine pour organiser le XXVII sommet ibéroaméricain en 2020 avec pour thématique centrale : L’innovation pour le développement durable.

L’établissement par le Gouvernement, à compter de l’année 2016, d’un certificat électronique qualifié, destiné aux citoyens et entreprises, a permis de promouvoir l’établissement de services électroniques basés sur les TIC, (accès aux plateformes publiques et privés avec une seule identité électronique).

Pour l’année 2018, le certificat électronique qualifié destiné aux citoyens est gratuit, il continuera à l’être pour l’année 2019. Pour ce qui est des entreprises, des professions libérales et des professionnels indépendants, le certificat électronique sera également gratuit pour l’année 2019.

Le Projet de loi de modification du Code de l’Administration, qui se trouve actuellement en procès d’adoption par le Consell General (Le Parlement), établit un cadre légal pour réguler l’Administration électronique et promouvoir ainsi le développement de services publics basés sur les TIC. Il s’agit, en finalité, d’améliorer les conditions de travail des travailleurs publics et, surtout d’améliorer la qualité des services publics offerts aux citoyens et aux entreprises. Les canaux traditionnels de relations des Administrations publiques avec leurs administrés sont maintenus.

Concrètement le Projet de modification du Code de l’Administration régule :

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- Les moyens d’identification électronique admis dans les relations avec l’Administration ;

- La notification administrative électronique ;

- La interconnectivité i interopérabilité des registres publics ;

- Le portail d’authentification des citoyens et des entreprises

- L’adresse électronique qui permet de réaliser les procédures administratives a ligne.

Son déploiement supposera la mise en place de processus d’adaptation au changement pour les travailleurs publics.

Pour ce qui est de la santé, le Consell General (Le Parlement) a adopté, le 27 octobre 2017, le Projet de loi des droits et devoirs des utilisateurs et des professionnels du système de santé et sur l’histore clinique, qui permet de réguler, en autres, l’établissement de procédures électroniques dans le secteur sanitaire, et de promouvoir le développement de services publics basés sur les TIC. Il s’agit, ici aussi, d’améliorer les conditions de travail des travailleurs publics et, surtout d’améliorer la qualité des services publics offerts aux citoyens et aux entreprises. Cette innovation s’appuie sur le certificat électronique qualifié mis en place par le Gouvernement, pour en identifier les utilisateurs.

Le ministère des Affaires Sociales, de la Justice et de l’Intérieur est en train d’élaborer un projet de loi pour permettre l’établissement de nombreuses procédures en ligne. Cette innovation s’appuie sur le certificat électronique qualifié mis en place par le Gouvernement, pour en identifier les utilisateurs.

Le Consell General (Le Parlement) a adopté, le 16 octobre 2014, le Projet de loi qui régule la contractualisation électronique et les opérateurs qui développent leur activité en ligne.

Dans le cadre des négociations d’un Accord d’association avec l’Union européenne, l’Andorre est actuellement en phase d’analyse de la reprise de l’acquis communautaire de l’Union européenne.

En ce qui concerne les services de la société de l’information, l’annexe XI de l’Accord d’association reprend les directives et règlements suivants, qui seront d’application par l’Andorre dès l’entrée en vigueur de l’Accord d’association :

Normes numériques et commerce électronique :

- Directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public.

- Règlement (CE) 733/2002 du Parlement européen et du Conseil du 22 avril 2002 concernant la mise en œuvre du domaine de premier niveau .eu.

- Règlement (CE) 874/2004 de la Commission du 28 avril 2004 établissant des règles de politique d’intérêt général relatives à la mise en œuvre et aux fonctions du domaine de premier niveau .eu et les principes applicables en matière d’enregistrement.

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- 2014/207/UE : Décision d’exécution de la Commission du 11 avril 2014 relative à la désignation du registre du domaine de premier niveau .eu.

- Règlement (UE) 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE. (e-IDAS Regulation).

- Directive (UE) 2016/2102 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2016 relative à l’accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public.

- Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (directive sur le commerce électronique).

Protection des données et des enfants :

- Décision 1351/2008/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 instituant un programme communautaire pluriannuel visant à protéger les enfants lors de l’utilisation de l’internet et d’autres technologies de communication.

Cybercriminalité :

- Directive (UE) 2016/1148 du Parlement européen et du Conseil du 6 juillet 2016 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de sécurité des réseaux et des systèmes d’information dans l’Union.

- Directive 98/84/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 1998 concernant la protection juridique des services à accès conditionnel et des services d’accès conditionnel.

En ce qui concerne l’application des traités internationaux, ces dernières années l’Andorre a signé et ratifié les traités du Conseil de l’Europe, suivants :

- Convention sur la cybercriminalité, en vigueur depuis le 1er mars 2017.

- Protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité, relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques, en vigueur depuis le 1er mars 2017.

- Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, en vigueur depuis le 1er août 2014.

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RÉPONSES DE LA SECTION BELGE

1) L’enjeu pour votre pays des capacités d’accès universel et abordable au numérique conformément aux objectifs de développement durable :

Quel est le niveau de connectivité de votre pays :

La Belgique se classe en 5e position en matière de connectivité dans le classement DESI 2018. Elle perd une place par rapport au classement de 2017. Les points forts de la Belgique concernent la couverture NGA du haut débit rapide (deuxième position) et son adoption (deuxième position), la couverture en haut débit ultrarapide (troisième position) et son adoption (troisième position). Il convient d’épingler deux points faibles : l’adoption du haut débit mobile pour laquelle nous nous classons à une modeste 24e position de l’UE 28. Bien que notre performance s’améliore constamment depuis plusieurs années, nous ne parvenons pas à résorber notre retard par rapport aux autres pays de l’UE. L’indice de prix du haut débit constitue notre second point d’attention puisque nous occupons la 19e place de l’UE 28. Sur ce dernier point, notre performance est probablement affectée par le fait que les opérateurs belges ne proposent pas d’abonnement internet offrant des débits inférieurs à 30 Mbps, ce qui a tendance à surévaluer le prix moyen de la large bande dans notre pays par rapport à ceux où ce type d’abonnement existe.

− accès à l’électricité : 100% de la population belge a accès à l’électricité (https ://donnees.banquemondiale.org/indicateur/EG.ELC.ACCS.ZS?end=2016&locations=BE&start=1990&view=chart)

− infrastructures de télécommunication : On comptait en 2016 37.567 entreprises de télécommunication en Belgique (file:///C:/Users/DinvernoA/Downloads/Barometre-de-la-societe-de-l-information-2018.pdf)

− technologie fibre optique/câbles sous-marins/satellites/etc. : Selon les chiffres du FTTH Council Europe, le taux de pénétration du réseau de fibre optique en Belgique est inférieur à 1%. Attendu pour 2020, un câble sous-marin quatre fibres devrait relier le Data center de Google situé en Virginie à celui présent en Belgique. Construit par la société TE SubCom, il mesurera un peu plus de 6437 km de long.

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− niveau d’équipement des ménages, des entreprises, des administrations : 86 % des ménages disposent d’une connexion internet en 2017. 99,6 % des entreprises belges ont accès à internet. 55 % des citoyens ont utilisé internet pour leurs relations avec les services publics.

− règlementation favorable au développement numérique économique : La Belgique présente des atouts indéniables, notamment en matière de densité et de qualité des infrastructures de télécommunications. Cette situation favorable doit inciter l’ensemble des parties prenantes à développer et utiliser des applications et services TIC. Dans ce cadre, le plan national « Digital Belgium » devrait également contribuer à renforcer le développement des TIC en Belgique. Celles-ci constituent un facteur déterminant pour la compétitivité de notre économie et contribuent dans une large mesure à sa croissance par l’effet d’entrainement qu’elles produisent sur l’ensemble de ses secteurs.

− capacité des citoyens à se servir des outils numériques : En Belgique, en 2017, 30 % (femmes 31 %, hommes 28 %) des individus (16-74 ans) ont des compétences numériques générales de base, 27 % (femmes 28 %, hommes 26 %) ont de faibles compétences et 31 % (femmes 28 %, hommes 34 %) ont des compétences plus avancées (https://economie.fgov.be/fr/themes/line/les-tic-en-belgique/les-tic-en-chiffres).

2) Quels sont les différents acteurs de l’économie numérique dans votre pays au regard de ceux identifiés en page précédente ?

(1) Les entreprises actives dans les différentes branches d'activité du secteur TIC en Belgique étaient au nombre de 37.567 en 2016 (cfr. Baromètre de la société de l'information 2018). Celles-ci sont très majoritairement des entreprises de services (94%). Plus de 72% des entreprises du secteur TIC relèvent de la branche NACE BEL 62: Programmation, Conseil et autres activités informatiques.

(2) 13 % des particuliers ont organisé la réservation/location de l’hébergement d’un particulier à l’aide d’une application spécifique ou d’un site internet prévu à cet effet, tandis que 7 % l’ont fait au moyen d’un site internet ou d’une autre application. 5 % des particuliers ont organisé l’utilisation du service de transport proposé par un particulier à l’aide d’une application spécifique ou

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d’un site internet prévu à cet effet, tandis que 2 % l’ont fait au moyen d’un site internet ou d’une autre application.

(3) La plupart des entreprises utilisent des outils TIC plus ou moins élaborés dont la raison d'être est les gains de productivité.

3) Le numérique comme secteur économique en forte croissance et créateur d’emplois :

Quelle est la situation de l’emploi dans votre pays au regard de la numérisation de l’économie en cours ?

La Belgique se classe à la 12e place pour ce qui concerne le capital humain au classement DESI 2018, elle perd une place par rapport au DESI 2017. Notre score global sur ce critère a connu une très légère augmentation par rapport à l’année passée. Notre pays occupe une honorable sixième place pour le pourcentage des spécialistes en TIC dans l’emploi total et obtient de bons résultats pour le pourcentage d’utilisateurs d’internet (9e position) et le pourcentage d’individus qui disposent SPF Economie - Baromètre - Digital Belgium 12 des compétences numériques de base (9e position). La principale faiblesse de la Belgique réside dans le taux de diplômés dans les filières STEM pour lequel notre pays se situe nettement en dessous de la moyenne de l’UE 28 et notre performance s’inscrit à la baisse par rapport à 2017.

Le nombre de postes de travail dans le secteur TIC en Belgique s’établit à 102.142 unités en 2017, en hausse de 3,8 % par rapport à 2016. Sur l’ensemble de la période d’observation, le nombre de postes de travail a connu une croissance de 9,5 %. Il est intéressant de noter la diminution constante des effectifs dans les « Télécommunications » qui reflète la consolidation de la branche depuis plusieurs années.

L’introduction des TIC menace-t-elle les emplois existants ? Ou le numérique offre-t-il plutôt des perspectives de créations d’emplois ? Disposez-vous d’éléments chiffrés ?

Selon le plan « Digital Belgium », la Belgique doit pouvoir atteindre trois objectifs phares à l’horizon 2020, dont celui de stimuler la création de 50.000 nouveaux emplois dans tout un éventail de secteurs. Dans un monde où les technologies jouent un rôle sans cesse croissant, la maitrise des compétences numériques revêt une importance cruciale. Un fonds fédéral doté de 18 millions d’euros sur 3 ans a été lancé en avril 2017. Le « Digital Belgium Skills Fund »

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finance des projets misant sur le développement des compétences numériques chez les enfants, les jeunes et les jeunes adultes socialement vulnérables.

L’introduction des TIC a-t-elle provoqué la disparition de certains métiers ? A-t-elle engendré la création de nouveaux métiers ? Citez des exemples.

La numérisation au sens large c’est-à-dire y compris des phénomènes tels que le big data, la robotisation, l’internet des objets et l’intelligence artificielle débouche sur l’apparition et la disparition de professions, mais également sur une adaptation de l’éventail des tâches de nombreux métiers.

Pour la période 2000-2013, la part des professions moyennement qualifiées a en effet baissé de 3,3 points de pourcentage en Belgique, alors que la part d’emplois hautement qualifiés progressait de 3,9 points de pourcentage et que celle des emplois faiblement qualifiés restait relativement stable (file:///C:/Users/DinvernoA/Downloads/CSE%202016.pdf).

39 % des emplois seraient menacés par une forte probabilité de numérisation totale. Le personnel administratif souffrirait le plus de la numérisation croissante. Par contre, seuls 7 % des emplois disparaitraient à cause de la numérisation. La décision de numériser ou non un métier dépend de bien plus de facteurs autres que les seuls moyens technologiques. Ainsi, le coût du travail (en particulier par rapport au coût d’investissement en capital), les institutions du marché du travail et l’incidence de la règlementation en général ont un rôle important à jouer. En outre, la numérisation entrainera dans son sillage la création de nouveaux types de professions, ce qui rend l’effet total de la numérisation sur l’emploi difficile à prévoir.

La diffusion des TIC dans les entreprises a-t-elle conduit à des délocalisations, d’un territoire à l’autre au sein de votre pays, à l’extérieur de votre pays ?

La numérisation croissante a donné naissance au phénomène d’online outsourcing (OO), qui se définit comme un lien contractuel (souvent par-delà les frontières) entre travailleurs et employeurs dans le but de fournir des services ou d’effectuer des tâches en passant par des plateformes sur internet. Ces canaux, qui sont le fait de la technologie, permettent à des commanditaires de sous-traiter leur travail rémunéré à une équipe de travailleurs à distance localisés dans le monde entier, qui peuvent assurer en ligne la mise en œuvre, la coordination, le contrôle de qualité, la livraison et le paiement de services. Il n’existe pas de statistiques permettant de quantifier l’ampleur du phénomène en Belgique. Une extrapolation

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basée sur les pourcentages relevés aux États-Unis et sur une étude d’Unizo montrerait que quelque 110 000 travailleurs pourraient y prendre part. Cela dit, il semble fort peu probable qu’un si grand nombre de travailleurs en Belgique recourent à l’online outsourcing sur un marché du travail nettement plus traditionnel reposant sur des institutions plus fortes qu’aux Etats-Unis. Pour autant, ce mouvement pourrait entrainer une révolution pour les emplois qui se prêtent à ce type de sous-traitance, dans la mesure où le processus d’appariement entre l’offre et la demande pourrait alors s’opérer à bien plus grande échelle. (file:///C:/Users/DinvernoA/Downloads/CSE%202016.pdf).

4) Le numérique comme levier pour renforcer les différents secteurs de l’activité humaine (administration, entreprises, agriculture, commerce, développement urbain, santé, éducation, formation, médias, finance, etc.) :

− Les conditions de travail :

Le morcellement du travail et la mise en concurrence des travailleurs à l'échelle globale représentent d'importants défis pour la concertation sociale. Ils imposent de moderniser les structures des négociations collectives pour qu'elles conservent leur efficacité. Il est par ailleurs très probable qu'avec l'impact du numérique et en particulier l'essor des plateformes en ligne, la part de l'emploi indépendant continuera d'augmenter. Les questions de la distinction entre salarié et indépendant ou de la subordination juridique et/ou économique se poseront avec d'autant plus d'acuité. Ces nouvelles formes d'emplois devront être mieux intégrées dans notre droit du travail et dans le système de sécurité sociale.

− l’organisation du travail :

Il faut veiller à ne pas développer une forme de management digital qui détermine le programme d'activité des travailleurs sur la base d'un processus d'optimisation des ressources (en fonction notamment de la demande) sans considération de principes d'équilibre entre vie privée et vie professionnelle, en mettant l'accent sur une approche du travail faisable. Les interlocuteurs sociaux ont là un rôle à jouer, en concertation avec les autres acteurs que sont les opérateurs des plateformes et les autorités, à tous niveaux de pouvoir, pour éviter les effets de concurrence réglementaire.

− le contenu du travail :

La question de la qualité du travail dans une économie numérique est tout aussi centrale qu'aujourd'hui. Dans les meilleurs cas, l'automatisation et la robotisation ont été utilisées pour remplacer l'homme dans l'exercice des tâches les plus pénibles (lourdes, répétitives, dangereuses); dans l'avenir des tâches plus

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complexes seront aussi effectuées par des robots. En misant sur la complémentarité entre l'homme et la machine on peut parvenir à revaloriser certaines fonctions de base. Il ne faut en tout cas pas que cela se traduise par une subordination du premier à la seconde.

− les compétences des travailleurs :

Les connaissances évoluent en permanence, tout comme les compétences requises par les employeurs, la formation continue doit autant que possible anticiper ces nouveaux besoins et être plus que jamais encouragée et valorisée. Encouragée par les pouvoirs publics car il s'agit du meilleur moyen d'assurer l'employabilité et la mobilité des travailleurs et des demandeurs d’emploi, mais aussi par les entreprises pour disposer en interne des ressources nécessaires à leur développement. La valorisation passe par l'organisation de procédures de certification qui garantissent la qualité des formations et permettent à leurs bénéficiaires de s'en prévaloir auprès de leur éventuel employeur.

5) Le numérique comme facteur d’innovation transversale contribuant à transformer les modèles économiques, sociétaux et politiques, en particulier grâce à l’appropriation par la jeunesse des outils et des usages numériques :

Quels sont les enjeux pour l’éducation et la formation des jeunes à d’éventuels nouveaux métiers et de nouvelles conditions de travail dans votre pays ?

Afin d’assurer à la nouvelle génération l’acquisition des compétences numériques et des soft skills, l’école doit adapter ses méthodes, les contenus des programmes scolaires ainsi que les processus d’évaluation. Les mesures entreprises en ce sens doivent faire l’objet d’une évaluation permanente et impliquer tous les partenaires (pouvoirs publics, enseignants, formateurs, parents, étudiants, etc.).

61 % des Belges possèdent des compétences numériques générales de base ou avancées, soit quatre points de pourcentage au-dessus de la moyenne européenne (57 %).

L'école a un rôle de premier ordre à jouer dans le développement des compétences nouvelles induites par la transition numérique et la perspective des nouveaux métiers. Au travers de son Pacte d'excellence, l'enseignement tente de déployer une éducation à la fois au numérique et par le numérique. L'éducation au numérique permet de développer des comportements adéquats face aux nouvelles

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technologies. De son côté, l’éducation par le numérique permet de mettre les équipements numériques (ordinateurs, tableaux interactifs, tablettes, etc) au service de nouvelles formes d'apprentissages et d'adapter davantage ceux-ci à chaque élève. Pour y parvenir, il est primordial que les écoles développent leur propre stratégie numérique, une plateforme de ressources éducatives est en cours, et le développement des outils pédagogiques numériques sera favorisé. Le numérique facilitera également la communication entre les écoles et l'administration, ainsi qu'entre les écoles et les parents.

Voir aussi le dossier consacré à l'entrée du numérique dans l'école : http://www.pactedexcellence.be/index.php/2017/04/10/le-numerique-a-lecole/

6) L’intégration des enjeux du numérique par les autorités politiques de votre pays :

Ont-elles engagé des mesures particulières pour accompagner le développement du numérique auprès des citoyens, des administrations, des entreprises, le réguler ?

Le ministre en charge de l'Agenda numérique a mis en place le plan « Digital Belgium » en 2015 (http://digitalbelgium.be/). Il vise à faire de la Belgique un pays moteur en matière d'économie et de société numériques à l'horizon 2020. Les entités fédérées ont également des stratégies propres pour le numérique : Digital.Brussels pour la Région de Bruxelles Capitale, Digital Wallonia pour la Région wallonne, Vlaanderen Radicaal Digitaal pour la Région flamande.

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RÉPONSES DE LA SECTION CANADIENNE

ACCESSIBILITE AUX TELECOMMUNICATIONS

A. PRESENTATION GENERALE

Au Canada, les télécommunications et la radiodiffusion sont régies par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), un organisme de réglementation indépendant dont les pouvoirs sont établis par la Loi sur les télécommunications1. D’après le Rapport de surveillance des communications 2018 du CRTC, en 2016, 98 % des ménages canadiens avaient accès à des services Internet et 84,1 % possédaient un ordinateur2. Le rapport donne aussi les statistiques suivantes pour l’année 2016 : • 99,3 % des ménages canadiens étaient abonnés à une ligne téléphonique terrestre ou à un

service de téléphonie mobile;

• 67 % des ménages étaient abonnés à une ligne téléphonique terrestre, ce qui représente une baisse de 7,1 % par rapport à 2015;

• 88 % des ménages étaient abonnés à un service de téléphonie mobile, ce qui représente une hausse de 2,1 % par rapport à 2015;

• 87 % des ménages étaient abonnés à des services Internet, ce qui représente une hausse de 0,6 % par rapport à 20153.

De plus, en 2016, 26,1 % des ménages étaient abonnés à un service de câble à fibres optiques offert par un grand fournisseur bien établi du secteur des télécommunications4. De l’ensemble des revenus que les fournisseurs de services Internet ont tirés en 2016 des ménages canadiens, 54 % provenaient des services par câble, 32 % des services par ligne numérique d’abonné (LAN), 10 % des services par câble à fibres optiques et 5 % des services par satellite ou par une autre technologie5. Quant aux revenus que les fournisseurs de services Internet ont tirés en 2016 des entreprises canadiennes, 40 % provenaient des services par ligne numérique d’abonné (DSL), 28 % des services par câble à fibres optiques, 25 % des services par câble et 7 % des services offerts par une autre technologie6.

1 Conseil de la radiodifusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), À propos de nous; et Loi sur

les télécommunications (L.C. 1993, ch. 38). 2 CRTC, « Abonnements Internet et possession d’ordinateurs », Rapport de surveillance des communications

2018. 3 Ibid., Infographie 1.1. 4 CRTC, Rapport de surveillance des communications 2017 : Aperçu du secteur des services de

télécommunication, Graphique 5.1.6. 5 Ibid., Graphique 5.3.12. 6 Ibid., Graphique 5.3.11.

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B. UNE REGLEMENTATION FAVORABLE AU DEVELOPPEMENT DE L’ECONOMIE NUMERIQUE

À propos du contexte de réglementation, le CRTC affirme qu’ « il est important que tous les Canadiens puissent avoir du choix, profiter de l’innovation et échanger librement leurs idées ». Il adhère donc au principe de la neutralité du Net (le fait, par exemple, de ne pas imposer des prix différents selon les types de contenu)1. Le CRTC a aussi déclaré que les services Internet à large bande sont essentiels (c’est-à-dire que tous les Canadiens doivent y avoir accès) et il a « établi un objectif du service universel afin que les Canadiens – qu’ils vivent en région rurale, en région éloignée ou en milieu urbain – aient accès à des services vocaux et d’Internet à large bande fixes et mobiles sans fil. Le CRTC a établi de nouveaux objectifs pour ces services :

Des vitesses de 50 Mbps en téléchargement et de 10 Mbps en téléversement pour les services à large bande fixe.

Une option de forfait de données illimitées pour les services à large bande fixe.

Un accès à la technologie mobile sans fil la plus récente, non seulement pour tous les domiciles et entreprises, mais aussi sur les routes principales canadiennes2.

ACTEURS DE L’ECONOMIE NUMERIQUE

Il y a de nombreux acteurs de l’économie numérique au Canada au regard des entreprises des secteurs producteurs des technologies de l’information et des communications (TIC), de la nouvelle économie et des entreprises des secteurs usagers utilisant les TIC dans leurs activités. Le secteur des TIC au Canada compte près de 39 000 entreprises. Le ministère d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), divise le secteur des TIC en quatre sous-secteurs soit les logiciels et services informatiques, le commerce de gros des TIC, la fabrication des TIC et les services de communications. Le sous-secteur des logiciels et services informatiques occupe une partie importante du secteur canadien des TIC. Près de 90 % des entreprises du secteur des TIC (plus de 34 000) font partie de ce sous-secteur3. Le secteur des TIC a enregistré des recettes de 181 milliards de dollars canadiens en 2016, une hausse de plus de 20 % par rapport à 2011. Le sous-secteur des logiciels et services informatiques y a contribué le plus avec 37 % des recettes. Le sous-secteur de la fabrication des TIC est le seul à avoir enregistré une baisse, soit une diminution de 18 % entre 2011 et 20164. Vous pouvez obtenir d’avantage d’information sur le secteur canadien des TIC et ses acteurs sur le Profil du secteur canadien des TIC 2016. Il y a de nombreuses entreprises importantes dans le secteur canadien des TIC. Tel que susmentionné, il y a plusieurs éditeurs de logiciels, notamment Ubisoft et Beenox (filiale d’Activision depuis 2005). On compte aussi d’importantes entreprises en

1 CRTC, Renforcer la neutralité du Net au Canada. 2 CRTC, Internet à large bande : Combler l’écart. 3 Gouvernement du Canada, Profil du secteur canadien des TIC 2016, 12 octobre 2017. 4 Ibid.

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télécommunications, notamment BCE Inc., TELUS, Rogers Communication, Vidéotron, et BlackBerry. D’autres entreprises notoires dans le secteur des TIC sont CGI et OpenText. Le rapport provisoire de la Table sur les industries numériques fournit aussi des données intéressantes sur le secteur canadien des TIC. D’autres acteurs dans l’économie numérique canadienne en lien avec les catégories que vous avez nommées sont, entre autres, Shopify, importante compagnie de commerce en ligne, ainsi que Crave et Illico, entreprises de contenu en ligne. Il y a aussi de nombreux instituts notoires de recherche et d’entreprises en intelligence artificielle, notamment l’Institut Vecteur [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT], le Alberta Machine Intelligence Institute [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] et l’Institut des algorithmes d’apprentissage (MILA). Différentes compagnies font une compilation des plus importantes compagnies canadiennes dans divers secteurs. Le Branham Group Inc. a compilé un tableau des 250 meilleures entreprises canadiennes en TIC [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] pour 2016 et 2017 et Brand Finance a compilé un tableau des 100 compagnies les plus déterminantes au Canada [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] en 2015. Ce classement peut être séparé par secteur, ce qui donne un aperçu des compagnies d’importance pour chaque groupe.

IMPACT DE LA CROISSANCE DU NUMERIQUE SUR LA MAIN-D’ŒUVRE

Au Canada, bon nombre des outils, des techniques et des compétences qui sont associées au secteur des technologies large : le secteur technologique. C’est dans cette optique que le Brookfield Institute a créé un moyen novateur d’appréhender, pour la première fois, le secteur technologique du Canada. L’étude The State of Canada’s Tech Sector, 2016 [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] mesure notamment la part du produit intérieur brut du Canada et de la main-d’œuvre canadienne qui correspond au secteur technologique (et plus particulièrement au secteur des technologies de l’information et des télécommunications). Il divise aussi le secteur technologique en ses composantes et présente la concentration de ce secteur dans l’ensemble du Canada. Depuis quelques années, le lien entre l’innovation technologique et l’automatisation des processus commence à susciter des inquiétudes. Dernièrement, de nombreux auteurs se sont intéressés aux répercussions de l’automatisation sur le marché du travail canadien. Les conclusions de ces études diffèrent grandement. Selon les méthodologies et les hypothèses employées, l’ampleur des répercussions varie de faible à considérable. J’ai choisi trois rapports (voir les documents PDF ci-joints) qui couvrent toute la gamme de ces répercussions. Voici donc un résumé de ces rapports ainsi que des commentaires précisant ce qui fait l’intérêt de chacun de ces rapports.

A. MATTHIAS OSCHINSKI ET ROSALIE WYONCH, « FUTURE SHOCK? THE IMPACT OF AUTOMATION ON CANADA’S LABOUR MARKET », C.D. HOWE INSTITUTE, COMMENTAIRE NO 472, 2017, P. 1

1. Principales conclusions

Les auteurs de ce rapport évaluent les répercussions des changements technologiques qui se sont produits depuis 30 ans au Canada sur la main-d’œuvre canadienne. Ils soulignent aussi les conséquences prochaines de ces changements :

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On peut s’attendre à ce que les changements graduels dans la demande en travailleurs qualifiés se poursuivent […] Il est peu probable que la situation de l’emploi change radicalement à court terme en raison de l’automatisation, mais certains secteurs et certains types d’emplois seront plus touchés que d’autres1.

2. Les répercussions sur le marché du travail

Le rapport présente le degré de vulnérabilité des emplois de 35 industries canadiennes par rapport à l’automatisation. On peut y lire ceci :

Au Canada, les emplois se concentrent dans les industries dont le risque d’automatisation est faible. Les industries où moins du quart des emplois sont susceptibles d’être automatisés représentent 27,5 % de la main-d’œuvre totale (c’est-à-dire 4,9 millions d’emplois). Les industries où plus de trois emplois sur quatre risquent fortement d’être automatisés ne représentent que 1,7 % de la main-d’œuvre (c’est-à-dire 310 000 emplois). C’est donc dire que l’économie et la main-d’œuvre diversifiées du Canada sont très susceptibles de bien s’adapter aux changements technologiques rapides. 2

L’étude A future that works: Automation, Employment and Productivity [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] de McKinsey & Company corrobore d’ailleurs cette conclusion : « [L’économie canadienne] a donc tout intérêt à embrasser rapidement l’automatisation. »3

3. Les incidences sur les politiques

Les auteurs du rapport estiment que les politiques publiques peuvent contribuer, à bien des égards, à atténuer les effets des changements technologiques sur le marché du travail :

Premièrement, […] on devrait chercher d’abord à enseigner très tôt dans la vie la pensée critique et les compétences interpersonnelles pour que les étudiants qui entrent sur le marché du travail aient les compétences nécessaires pour réussir […] Deuxièmement, il s’avère de plus en plus important de développer l’esprit d’entreprise des gens qui entreront sur le marché du travail […] Enfin, […] on doit favoriser davantage la formation et l’apprentissage continus4.

Dans le même ordre d’idées, les auteurs disent que la Subvention canadienne pour l’emploi, qui accorde des incitatifs financiers aux employeurs pour qu’ils offrent de la formation à leurs employés et favorisent ainsi le développement de leurs compétences, pourrait permettre aux employés de mieux s’adapter aux bouleversements du marché du travail.

1 Matthias Oschinski et Rosalie Wyonch, « Future Shock? The Impact of Automation on Canada’s Labour

Market », C. D. Howe Institute, commentaire no 472, 2017, p. 1 [TRADUCTION]. 2 Ibid. [TRADUCTION]. 3 McKinsey&Company, « A future that works: Automation, Employment and Productivity », Mckinsey

Global Institute, 2017, p.15 [TRADUCTION]. 4 Mattias Oschinski et Rosalie Wyonch, « Future Shock? The Impact of Automation on Canada’s Labour

Market », C. D. Howe Institute, commentaire no 472, 2017, p. 15 [TRADUCTION].

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B. CREIG LAMB, « THE TALENTED MR. ROBOT: THE IMPACT OF AUTOMATION ON CANADA’S WORKFORCE », BROOKFIELD INSTITUTE, 2016

1. Principales conclusions

L’auteur se sert de méthodologies développées par d’autres auteurs et les applique aux données canadiennes. Il tire la conclusion suivante : « Il se créera probablement des emplois dans certains domaines, mais dans d’autres, les tâches devront sans doute être entièrement restructurées, et des emplois pourraient disparaître dans certains cas1. »

2. Les répercussions sur le marché du travail

Le rapport parle du risque d’automatisation associé à plusieurs emplois canadiens. On peut y lire ceci :

Près de 42 % de la main-d’œuvre canadienne risque fort d’être touchée par l’automatisation au cours des prochaines décennies. Les gens qui occupent ces emplois gagnent moins et sont moins scolarisés que les autres travailleurs canadiens. Les études donnent à penser que ces emplois ne disparaîtront pas nécessairement […] mais il faudra fort probablement les restructurer entièrement à cause des nouvelles technologies. En appliquant une autre méthodologie, on arrive à la conclusion que près de 42 % des tâches qu’accomplissent actuellement les Canadiens et pour lesquelles ils sont payés pourraient être automatisées au moyen des technologies actuelles. Toutefois, le tableau n’est pas complètement noir […] : on prévoit que, de 2014 à 2024, près de 712 000 emplois seront créés, net, parmi les professions qui risquent le moins d’être touchées par l’automatisation2.

On peut trouver ici [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] un tableau interactif détaillé des domaines d’emploi.

3. Les incidences sur les politiques

L’auteur du rapport estime que les secteurs public et privé du Canada peuvent contribuer à atténuer les possibles effets négatifs de l’automatisation des emplois. Voici certaines des mesures à prendre : 1. faire davantage de recherche; 2. se concentrer sur les points forts du Canada; 3. miser sur l’éducation et la formation.

1 Creig Lamb, « The Talented Mr. Robot: The impact of automation on Canada’s workforce », Brookfield

institute, 2016, p. 4 [TRADUCTION]. 2 Creig Lamb, « The Talented Mr. Robot: The impact of automation on Canada’s workforce », Brookfield

institute, 2016, p. 3 [TRADUCTION].

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C. SUNIL JOHAL ET JORDANN THIRGOOD, « WORKING WITHOUT A NET : RETHINKING CANADA’S SOCIAL POLICY IN THE NEW AGE OF 1. WORK », MOWAT CENTRE, RECHERCHE MOWAT NO 132, 2016

Principales conclusions

Dans ce rapport, on s’intéresse aux répercussions des nouvelles technologies sur l’économie et le marché de l’emploi du Canada, ainsi qu’à la pertinence des politiques et des programmes sociaux actuels qui aident les travailleurs. Les auteurs tirent la conclusion suivante : « Inévitablement, les changements qui, depuis quelques années, bouleversent le marché du travail du Canada se poursuivront et s’accéléreront. De plus en plus de gens risqueront de perdre leur emploi ou d’occuper un emploi précaire1. »

2. Les incidences sur le marché du travail

À partir des données publiées dans Lamb (2016) et dans Arntz, Gregory et Zierahn (2016), les auteurs donnent une estimation du nombre d’emplois que l’automatisation fera disparaître. Dans Lamb (2016), on peut lire que « près de 42 % de la main-d’œuvre canadienne risque fortement d’être touchée par l’automatisation au cours de la prochaine décennie. Dans Arntz, Gregory et Zierahn (2016), il est dit que, « dans 21 pays membres de l’OCDE, 9 % des emplois, en moyenne, pourraient être automatisés2 ». Les auteurs du rapport appliquent ces pourcentages à la main-d’œuvre canadienne et lancent l’hypothèse que 7,5 millions d’emplois pourraient disparaître si tout ce qui pourrait être automatisé l’était complètement.

3. Les incidences sur les politiques

Les auteurs du rapport estiment que les décideurs canadiens pourraient tirer des leçons des autres pays où les façons de faire sont radicalement différentes et qui adoptent des mesures novatrices, quoique non testées. Voici quelques propositions : 1. s’inspirer du modèle danois axé sur la « flexisécurité » en ce qui concerne les

politiques sur le marché du travail; 2. instaurer les « prestations transférables » pour les travailleurs de l’économie des petits

boulots; 3. instaurer des mesures de partage de l’emploi, comme le concept allemand du

« chômage partiel » (Kurzarbeit); 4. envisager l’adoption du revenu annuel garanti dans certains segments de la population.

LE NUMERIQUE ET LA FORMATION DE LA MAIN-D’ŒUVRE

Un rapport du gouvernement fédéral datant de 2017 et s’intitulant Bâtir une main-d’œuvre canadienne hautement qualifiée et résiliente au moyen du laboratoire des compétences 1 Sunil Johal et Jordann Thirgood, « Working without a Net: Rethinking Canada’s social policy in the new

age of work », Mowat Centre, recherche Mowat no 132, 2016, p. 53 [TRADUCTION]. 2 M. Arntz, T. Gregory et U. Zierahn, « The Risk of Automation for Jobs in OECD Countries: A Comparative

Analysis », OECD Social, Employment and Migration Working Papers, no 189, 2016, p. 4 [TRADUCTION].

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futures traite de plusieurs enjeux en matière d’éducation et de formation des jeunes au Canada dans le contexte de la révolution numérique. Un premier enjeu est lié au rythme accéléré des changements technologiques. Il est difficile pour les systèmes d’éducation de s’adapter de manière opportune pour former les jeunes avec les compétences adéquates. Une étude de 2016 du Business Council of Canada [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] révèle que la plupart des employeurs canadiens jugent que les diplômés n’ont pas les compétences nécessaires pour faire face au développement technologique dans le milieu du travail. Ceci est aussi un enjeu pour toute la main-d’œuvre, car beaucoup de travailleurs déjà sur le marché du travail n’ont pas les connaissances nécessaires en matière de technologie numérique pour s’adapter aux changements causés par les avancements technologiques. Un autre enjeu est le manque de formation offerte par les employeurs. Selon diverses études, les dépenses des employeurs canadiens pour la formation de leurs employés ont diminué depuis 20 ans et sont inférieures aux dépenses des autres membres de l’OCDE. Pourtant, considérant l’enjeu précédent, il est de plus en plus important pour un travailleur d’être formé tout au long de sa carrière. Les changements apportés par la révolution numérique mènent aussi à un changement dans les attentes des employeurs. C’est donc un défi d’adapter la formation des jeunes aux nouveaux besoins des employeurs. Par exemple, selon de nombreuses études, notamment une étude de 2016 du Business Council of Canada, la plupart des grandes entreprises canadiennes ont affirmé rechercher des compétences non techniques telles que le travail d’équipe ou la communication. Or, il est difficile pour les nouveaux diplômés de démontrer qu’ils possèdent les compétences non techniques recherchées, puisque les titres professionnels et les certificats misent sur l’éducation et l’expérience de travail, plutôt que sur ce type de compétences, tel que souligné dans un rapport datant de 2016 du Conference Board du Canada, une organisation de recherche appliquée sans but lucratif au Canada. Le risque que la croissance économique créée par la révolution numérique ne soit pas inclusive représente un autre enjeu. Les groupes de la population peu qualifiés et à faibles revenus sont le plus à risque, puisque la majorité occupe des emplois pour lesquels une bonne partie des tâches est répétitive et donc potentiellement remplaçable par la technologie. Il y a un risque que les postes d’entrée occupés habituellement par les jeunes ne soient plus disponibles. Plus encore, bien que la majeure partie des Canadiens possèdent un niveau adéquat de compétences numériques, une partie de la population a un niveau de compétences plus bas, notamment les Autochtones et les personnes âgées1. Enfin, bien qu’au Canada les femmes représentent 66 % des récents diplômés dans d’autres domaines que les science, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM), elles ne représentent que 39 % des diplômés en STIM2. Finalement, il y a un manque d’information au sujet du marché du travail. Les données quant à l’éducation et aux compétences sont recueillies au niveau des provinces au Canada, mais il n’y a pas de méthodologie ou de terminologie standardisée au niveau national pour faciliter le partage et la compilation des données. Statistique Canada, organisme national de statistique, n’a pas de mandat précis à ce niveau à l’heure actuelle3. Certains employeurs 1 Gouvernement du Canada, Bâtir une main-d’œuvre canadienne hautement qualifiée et résiliente au moyen

du laboratoires des compétences futures, février 2017. 2 Brookfield Institute, Future-proof : Preparing young Canadians for the future of work, mars 2017. 3 Gouvernement du Canada, Bâtir une main-d’œuvre canadienne hautement qualifiée et résiliente au moyen

du laboratoires des compétences futures, février 2017.

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collectent des données, mais cela est de plus en plus difficile dû au changement rapide de l’économie, affectant le marché du travail et les compétences recherchées. Cet enjeu est crucial, car si les étudiants n’ont pas de données sur les compétences recherchées, ils ne peuvent pas prendre une décision conséquente1. Voici d’autres rapports explorant des pistes intéressantes quant aux enjeux liés à la révolution numérique et l’éducation : • Future-proof: Preparing young Canadians for the future of work [DISPONIBLE EN ANGLAIS

SEULEMENT] : Ce rapport préparé par Brookfield Institute, explore directement les enjeux liés à la formation des jeunes dans un contexte de révolution numérique et présente plusieurs figures pertinentes.

• Generation innovation: The talent Canada needs for the new economy [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] : Ce rapport préparé par la Chambre de commerce du Canada présente les compétences jugées nécessaires dans la main-d’œuvre pour que le Canada soit à l’avant plan de la révolution numérique. Il décrit aussi le rôle à jouer par différents groupes dans ce contexte (éducation, entreprises, gouvernements).

• The intelligence Revolution: Future-proofing Canada’s workforce [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] : Ce rapport préparé par Deloitte affirme que le milieu du travail va être fondamentalement changé par un nouveau type de révolution, soit la Révolution intelligente, où les machines vont être plus efficaces pour accomplir plusieurs tâches et la nature fondamentale du travail changera. Le rapport propose des pistes pour développer des compétences nécessaires à ces transformations.

LE NUMERIQUE ET LES POLITIQUES PUBLIQUES

A. INITIATIVES POUR ACCOMPAGNER LE DEVELOPPEMENT DU NUMERIQUE

Le Canada a mis en place diverses initiatives pour accompagner le développement du numérique à l’intérieur du pays et à l’international. Voici une sélection d’initiatives : • Le gouvernement canadien a mis en place des outils pour faire face à ces enjeux. Le

Budget fédéral 2017 a présenté le Plan pour l’innovation et les compétences du Canada. Ce plan vise entre autres à favoriser la formation continue, aider les adultes à retourner aux études et enseigner les compétences numériques aux enfants. Pour cette dernière initiative, le gouvernement fédéral investira 50 millions de dollars sur deux ans pour appuyer la formation des élèves de la maternelle à la douzième année. Le Fonds stratégique pour l’innovation est un élément important du Plan pour

l’innovation et les compétences. Il est offert à tous les secteurs de l’économie à travers le Canada. Il vise à stimuler l’innovation au Canada en simplifiant le processus d’application et en fournissant une aide plus adaptée aux besoins des entreprises et des particuliers. Depuis février 2018, le Fonds offre seulement du soutien aux initiatives de grande envergure (i.e., demandant une contribution d’au moins 10 millions de dollars).

• Le gouvernement a aussi mis en place, via le ministère d’Emploi et Développement social Canada, le Centre et le Conseil des Compétences futures pour notamment examiner les tendances affectant l’économie canadienne, cerner les compétences primordiales aujourd’hui et dans le futur et communiquer les résultats obtenus lors des diverses recherches.

1 Aon Hewitt et Business Council of Canada, Developing Canada’s future workforce : a survey of large

private-sector employers, mars 2016.

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• Le gouvernement canadien a annoncé dans le Budget fédéral de 2017 la Stratégie pancanadienne en matière d’intelligence artificielle, une initiative de 125 millions de dollars canadiens s’échelonnant sur 5 ans. Cette stratégie vise à améliorer les compétences du Canada, à plusieurs niveaux, en intelligence artificielle (IA).

• En juillet 2018, le Canada et la France ont émis la Déclaration franco-canadienne sur l’intelligence artificielle dans laquelle ils appellent à la création d’un groupe international d’études qui offrira une expertise reconnue internationalement en matière d’IA. Ce groupe réunira des experts gouvernementaux ainsi que des scientifiques et des experts issus de la société civile. La France et le Canada mettront en place un comité pour préparer la mise en place de ce groupe.

• L’Initiative des supergrappes d’innovation est une approche fédérale conçue au Canada, tenant compte des forces et des défis industriels, géographiques et technologiques du pays. Cette initiative a un budget de 950 millions de dollars et sur cinq ans et supportera cinq supergrappes. Les partenaires de l’industrie devront investir un montant égal aux contributions du programme. Voici les cinq supergrappes choisies : supergrappe des technologies numériques;

supergrappe des industries des protéines; supergrappe de la fabrication de pointe;

supergrappe des chaînes d’approvisionnement axées sur l’IA (SCALE.AI); supergrappe de l’économie océanique.

• Via l’Institut canadien de recherches avancées (CIFAR), le gouvernement fédéral soutient de grands instituts de recherche canadiens notamment l’Institut Vecteur [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT], l’Alberta Machine Intelligence Institute [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] et l’Institut des algorithmes d’apprentissage (MILA).

B. LITTERATIE NUMERIQUE : LA CAPACITE DES CITOYENS A UTILISER DES OUTILS NUMERIQUES

En 2018, le gouvernement du Canada a lancé le Programme d’échange en matière de littératie numérique. Dans le cadre de ce programme, 29,5 millions de dollars seront investis pour « pour soutenir des initiatives de formation sur les compétences numériques de base à l’intention des Canadiens qui auraient avantage à participer à l’économie numérique1 ». Sur la page du programme, on trouve l’explication suivante :

Bien que 83 % des Canadiens utilisent Internet (Enquête canadienne sur l’utilisation de l’Internet de 2012), certains groupes viennent tout juste de découvrir ou n’ont pas encore découvert tous les avantages qu’offrent les activités en ligne. Il est important de soutenir ces groupes pour faire en sorte que personne n’est laissé de côté dans l’économie numérique2.

N’oublions pas qu’il est difficile de définir ce qu’est la « littératie numérique » et de la mesurer; voici par exemple ce que dit une étude [DISPONIBLE EN ANGLAIS SEULEMENT] de 2017 :

Les théoriciens, les décideurs et les enseignants ne s’entendent pas sur une définition commune de la littératie numérique, et il n’existe

1 Gouvernement du Canada, Programme d’échange en matière de littératie numérique. 2 Ibid.

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pas de méthode uniforme pour la mesurer. Il est donc difficile de parler avec certitude de la littératie numérique chez les Canadiens. Les études qui concluent que la littératie numérique est faible au Canada se fondent sur d’autres indices, comme l’absence de mesures institutionnelles visant à répondre aux besoins des établissements d’enseignement en matière littératie numérique, l’absence de stratégie nationale et, selon certains, le faible nombre de diplômés universitaires dans [le domaine des technologies de l’information et des communications] ainsi qu’[en science, en technologie, en ingénierie et en mathématique]1.

Un rapport de Brookfield Institute datant de juin 2018 : Levelling Up: The Quest for Digital Literacy étudie la formation liée à la littératie numérique au Canada, tout au long du parcours scolaire des étudiants et les enjeux s’y rattachant.

1 Brookfield Institute for Innovation + Entrepreneurship, The State of Digital Literacy in Canada: A

Literature Review, p. 5 [TRADUCTION].

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RÉPONSES DE LA SECTION MALGACHE

1) L’enjeu pour votre pays des capacités d’accès universel et abordable au numérique conformément aux objectifs de développement durable :

Quel est le niveau de connectivité de votre pays (accès à l’électricité ; infrastructures de télécommunication, technologie fibre optique/câbles sous-marins/satellites/etc. ; niveau d’équipement des ménages, des entreprises, des administrations ; règlementation favorable au développement numérique économique ; capacité des citoyens à se servir des outils numériques...) ?

Dans son rapport d’activité de 2017, l’Autorité de Régulation des Technologies de Communication (ARTEC) de Madagascar affiche une couverture de ligne fixe de 10,33%, autrement dit de 175 communes sur les 1693 communes, ainsi que 226 communes concernés par les couvertures mobiles avec la répartition suivante :

2G : 145 communes

2G-3G : 69 communes

2G-3G-4G : 12 communes

Le taux de couverture électrique est de 14% sur tout le territoire.

2) Quels sont les différents acteurs de l’économie numérique dans votre pays au regard de ceux identifiés en page précédente ?

Au niveau local, ils sont de trois ordres : l’ARTEC (ou l’autorité de régulation des technologies de communications), le Ministère des Postes, des Télécommunications et du Développement Numérique, et enfin les différents établissements d’enseignement supérieur nationaux.

3) Le numérique comme secteur économique en forte croissance et créateur d’emplois :

Quelle est la situation de l’emploi dans votre pays au regard de la numérisation de l’économie en cours ?

Sur l’année 2017, le nombre total d’emplois permanents dans le secteur des télécommunications est estimé à 2702 (Source : ARTEC)

L’introduction des TIC menace-t-elle les emplois existants ? Ou le numérique offre-t-il plutôt des perspectives de créations d’emplois ? Disposez-vous d’éléments chiffrés ?

L’introduction des TIC a contribué à la création d’emplois. Elle permet une cohabitation de plusieurs métiers ( exemple la vente, le journalisme avec support papier et support numérique...).

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L’introduction des TIC a-t-elle provoqué la disparition de certains métiers ? A-t-elle engendré la création de nouveaux métiers ? Citez des exemples.

Son introduction a contribué à créer de nouveaux métiers. Un exemple représentatif est le concept d’externalisation des services liés au numérique qui se développe à Madagascar.

La diffusion des TIC dans les entreprises a-t-elle conduit à des délocalisations, d’un territoire à l’autre au sein de votre pays, à l’extérieur de votre pays ?

On peut répondre par l’affirmative. Mais cette délocalisation se fait au bénéfice de Madagascar. En effet, plusieurs grandes entreprises européennes (Air France …), délocalise leurs compétences dans notre pays.

4) Le numérique comme levier pour renforcer les différents secteurs de l’activité humaine (administration, entreprises, agriculture, commerce, développement urbain, santé, éducation, formation, médias, finance, etc.) :

Les conditions de travail, l’organisation du travail, le contenu du travail, les compétences des travailleurs sont-ils impactés par la numérisation ? Comment ? Citez des exemples.

Le contexte du travail a fortement évolué. Outre la mobilité qui en découle, il est de fait devenu nécessaire de disposer d’une compétence minimale sur l’utilisation des ordinateurs.

Par ailleurs, la plupart des administrations, qu’elles soient privées ou publiques se sont mises dans une phase de dématérialisation de leurs procédures. Ces procédures bénéficient à l’Assemblée nationale de Madagascar par exemple. Outre l’économie de papier, elle permet l’accès en tout temps à tout document utile.

5) Le numérique comme facteur d’innovation transversale contribuant à transformer les modèles économiques, sociétaux et politiques, en particulier grâce à l’appropriation par la jeunesse des outils et des usages numériques :

Quels sont les enjeux pour l’éducation et la formation des jeunes à d’éventuels nouveaux métiers et de nouvelles conditions de travail dans votre pays ?

Les enjeux sont multiples. Le Ministère des postes, des télécommunications et du développement numérique a lancé un programme intitulé : Digital Native. Ce programme permet aux jeunes d’avoir accès à des nouvelles techniques éducatives sur la base de nouvelles pratiques pédagogiques, de faciliter le déploiement de formations ouvertes et de consolider les formations actuelles.

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6) L’intégration des enjeux du numérique par les autorités politiques de votre pays :

Ont-elles engagé des mesures particulières pour accompagner le développement du numérique auprès des citoyens, des administrations, des entreprises, le réguler ?

Il a été observé des efforts allant dans ce sens. Des systèmes de télédéclarations d’impôts par exemple ont été mis en place. Chaque institution ou organisme d’Etat dispose d’un site internet ou encore fait montre d’une présence dans les réseaux sociaux pour plus de transparence et de proximité avec les citoyens.

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RÉPONSES DE LA SECTION MALIENNE

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RÉPONSES DE LA SECTION QUÉBÉCOISE 1) L’enjeu pour votre pays des capacités d’accès universel et abordable au numérique conformément aux objectifs de développement durable : Quel est le niveau de connectivité de votre pays (accès à l’électricité ; infrastructures de télécommunication, technologie fibre optique/câbles sous-marins/satellites/etc. ; niveau d’équipement des ménages, des entreprises, des administrations ; règlementation favorable au développement numérique économique ; capacité des citoyens à se servir des outils numériques...) ? Accès à l’électricité Au Québec, la vaste majorité des ménages et la plupart des entreprises sont raccordés au réseau d’électricité. Bien que plusieurs entreprises privées particulièrement énergivores produisent leur propre électricité, la société d’État Hydro-Québec exerce un quasi-monopole sur la production et la distribution de l’énergie électrique. En 2011, 97 % de l’électricité produite au Québec provenait de ses sources hydrauliques1. Niveau d’équipement des ménages En 2016, environ 88 % des ménages québécois avaient accès à Internet. Parmi ceux-ci, 93 % détenaient une connexion à haute vitesse. L’accès à Internet haute vitesse était toutefois inégalement réparti entre les régions : dans la région métropolitaine de Montréal, près de la totalité des ménages (95 %) y étaient branchés tandis que seuls 85 % des ménages hors de la métropole y avaient accès. En outre, l’accès à cette technologie était plus répandu chez les personnes plus aisées et plus scolarisées. Ainsi, 87 % des ménages dont le revenu s’établissait entre 0 et 30 000 $ étaient branchés tandis que ce taux s’établissait à 93 % pour les ménages de 55 000 $ et plus. De la même manière, seuls 71 % des ménages sans aucun diplôme avaient accès à Internet haute vitesse contre 95 % des ménages au sein desquels au moins une personne détenait un diplôme universitaire2. Plusieurs raisons expliquent le non-branchement Internet d’un ménage. Le motif le plus fréquemment invoqué est l’absence de besoin d’une connexion (79 %), mais on remarque aussi que plusieurs personnes s’estiment elles-mêmes inaptes à l’utiliser convenablement (47 %). Enfin, plusieurs jugent aussi les coûts en équipement (38 %) en abonnement (39 %) prohibitifs3. Propulsée par la prolifération d’objets branchés aux réseaux numériques, la connectivité des ménages québécois est en hausse. En 2017, 62 % détenaient un téléphone intelligent4, 68 % possédaient un ordinateur portable et 44 % un poste informatique fixe. Par ailleurs, 86 % des

1 Ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, Production d’électricité, 2013.

https://mern.gouv.qc.ca/energie/statistiques/statistiques-production-electricite.jsp. 2 Institut de la statistique du Québec, L’accès des ménages à Internet, novembre 2017, p. 2-3.

http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/science-technologie-innovation/bulletins/sti-bref-201711-1.pdf. 3 Ibid, p. 2. Plusieurs raisons pouvaient être invoquées par une même personne interrogée. 4 Centre facilitant la recherche et l’innovation dans les organisations (CEFRIO), À quelle fréquence les adultes

québécois utilisent-ils leur téléphone intelligent pour aller sur le Web?, 31 août 2018. https://cefrio.qc.ca/fr/enquetes-et-donnees/frequence-adultes-quebecois-telephone-web/.

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foyers possédaient un téléviseur haute définition et 53 % étaient abonnés à un service de visionnement de film en ligne. Enfin, 60 % des ménages comptaient un enregistreur numérique et 46 %, une console de jeux vidéo1. Littératie numérique Bien qu’ils soient de plus en plus connectés aux réseaux informatiques, plusieurs Québécois et Québécoises demeurent limités dans l’usage qu’ils peuvent faire des outils à leur disposition. La plus récente enquête du Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PEICA), réalisée entre 2011 et 2012, a révélé qu’un grand nombre éprouve des difficultés à résoudre des problèmes simples dans un environnement numérique. En effet, 51 % des répondants se classaient au niveau 1 ou inférieur en résolution de problèmes dans des environnements technologiques, soit 32 % de niveau 1 et 19 % inférieur au niveau 12. Intensité numérique du secteur public L’ensemble du secteur public fonctionne grâce à une infrastructure numérique en développement constant. Des efforts considérables ont été déployés depuis le tournant du XXIe siècle afin de faciliter l’accès de la population aux services étatiques grâce aux technologies de l’information. En 2017, 56 % des Québécois et des Québécoises estimaient qu’Internet constituait le moyen le plus approprié pour faire des démarches avec l’État lors d’un événement de vie important (déménagement, naissance, décès), une proportion largement plus élevée que le téléphone (36 %)3. En outre, plus d’une personne sur deux a interagi avec l’appareil étatique à travers le Web en 2017 et la plupart des gens de 54 ans et moins estiment sécuritaire de traiter avec l’État par voie informatique4. Aussi la tendance actuelle est-elle d’accroître la transparence de l’Administration québécoise grâce, notamment, à la publication de données ouvertes5. C’est dans cet esprit que le gouvernement du Québec et quelques municipalités ont inauguré, en avril 2016, le portail Données Québec, qui propose de centraliser en son sein les données de l’administration publique afin de les rendre accessibles à la population. Niveau d’équipement des entreprises En 2015, 34 % des entreprises avaient effectué des dépenses pour l’acquisition ou le développement de technologies de l’information et de la communication (TIC). Plus la taille de l’entreprise augmente, plus ses dirigeants sont susceptibles d’avoir effectué de tels investissements.

1 CEFRIO, Quel est le portrait numérique des foyers québécois en 2017?, 11 septembre 2018.

https://cefrio.qc.ca/fr/enquetes-et-donnees/netendances2017-portrait-numerique-foyers-quebecois/. 2 Institut de la statistique du Québec, Les compétences en littératie, en numératie et en résolution de

problèmes dans des environnements technologiques : des clefs pour relever les défis du XXIe siècle, décembre 2015, p. 71. http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/education/alphabetisation-litteratie/peica.pdf.

3 CEFRIO, Quels modes de communications les Québécois privilégient-ils dans leurs interactions avec le gouvernement?, 7 septembre 2018. https://cefrio.qc.ca/fr/enquetes-et-donnees/adultes-quebecois-sites-gouvernementaux/.

4 Ibid. 5 CEFRIO, Quel impact a eu l’ouverture des données gouvernementales au Québec ?, 10 septembre 2018.

https://cefrio.qc.ca/fr/realisations-et-publications/netgouv-donnes-ouvertes-gouvernement-quebec/

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Ainsi, en 2015, 81 % des entreprises de 250 employés et plus avaient dépensé pour améliorer leurs ressources informationnelles1. Pour beaucoup d’entreprises, toutefois, la numérisation des services de vente, en particulier, s’avère de plus en plus urgente. En 2017 cependant, 39 % des adultes ont réalisé au moins un achat en ligne par mois, une augmentation de sept points de pourcentage par rapport à l’année précédente. Une large part de ces achats était effectuée sur Amazon2. De l’autre côté du cycle de consommation, la plupart des entreprises vendent elles-mêmes leurs produits en ligne. Seul 27 % emploient un service tiers comme Amazon3. Selon une étude de 2017, 76 % des entreprises des secteurs de la fabrication, du commerce de gros et de détail ont investi dans les technologies informationnelles au cours de l’année précédente4. Pourtant, seulement 16 % d’entre elles se disaient plutôt ou très satisfaites du rendement des investissements consentis5. Politiques favorables au développement de l’économie numérique En décembre 2017, le gouvernement québécois a dévoilé la Stratégie numérique – Le Québec, leader en matière de transformation numérique. Structurée autour de sept orientations, l’action du gouvernement se déploie sur un horizon de cinq ans sur les plans éducationnel, culturel, économique et social. Elle vise principalement à :

• rendre Internet accessible à l’ensemble de la population;

• améliorer les compétences de celle-ci dans l’environnement numérique;

• rendre l’administration publique plus transparente et plus en phase avec l’expérience citoyenne;

• poursuivre le virage numérique amorcé par les villes et territoires;

• rehausser l’intensité numérique des entreprises;

• numériser les services offerts par le réseau de la santé;

• rendre la culture québécoise plus accessible dans l’univers numérique.

À terme, cette stratégie, dotée d’un budget de 1,3 milliard réparti sur cinq ans, vise à développer non seulement les infrastructures numériques, mais leur utilisation par la population de manière à accroître la prospérité collective et la participation citoyenne.

1 Institut de la statistique du Québec, Part des entreprises qui ont effectué des dépenses pour l’acquisition ou le

développement de TIC, Québec, 20 décembre 2017. http://www.bdso.gouv.qc.ca/pls/ken/ken213_afich_tabl.page_tabl?p_iden_tran=REPERQNWP0N23-173383674846Q;fW&p_lang=1&p_m_o=ISQ&p_id_sectr=473&p_id_raprt=3570

2 CEFRIO, Portrait de la logistique en commerce électronique au Québec, octobre 2018, p. 15. https://cefrio.qc.ca/media/1906/cefrio_portrait_logistique_commerce_electronique_au_quebec.pdf.

3 Ibid., p. 21. 4 Ibid. p. 42. Précisons que l’échantillon retenu pour les fins de cette étude comprenait 989 entreprises qui

réalisaient du commerce en ligne et 313 qui n’en faisaient pas encore. Ibid., p. 18. 5 Ibid., p. 43.

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L’action du Québec en matière de développement numérique s’est aussi manifestée par des investissements en vue de coaliser les forces productrices de ce secteur. En mai 2017, par exemple, le gouvernement a annoncé un investissement de 100 millions de dollars pour la création d’une grappe québécoise en intelligence artificielle à Montréal. Ce centre d’excellence vise à rapprocher les différents acteurs de la chaîne de production de l’innovation, des chercheurs occupés par la recherche fondamentale jusqu’aux entreprises intéressées par les applications concrètes, en passant par les entreprises génératrices d’innovations technologiques et les investisseurs. Cette initiative s’ajoute aux centaines de millions en incitatifs fiscaux et en subvention de recherche dont bénéficient les chercheurs qui travaillent dans le domaine du numérique. 2) Quels sont les différents acteurs de l’économie numérique dans votre pays au regard de ceux identifiés en page précédente ? Comme l’illustre bien la réponse à la question précédente, les acteurs de l’économie numérique au Québec ne se limitent pas aux entreprises. Certes, l’économie numérique concerne au premier chef les entreprises productrices de biens et services numériques et celles qui intègrent les services dans leur processus de production, de distribution et de vente. Cependant, le secteur du numérique englobe plus largement les citoyens et les citoyennes qui consomment et utilisent les produits et services de l’économie numérique, les instances chargées de surveiller l’évolution de ce secteur, tant d’un point de vue économétrique qu’éthique, les institutions financières, de même que les ordres gouvernementaux, à la fois créanciers et régulateurs de cet écosystème. Le développement de l’intelligence artificielle au Québec offre un bel exemple de la complexité de ce système. Les avancées en ce domaine ont d’abord été rendues possibles par l’accessibilité des établissements d’enseignement supérieur et des fonds de recherche des grands organismes subventionnaires canadiens et québécois. Depuis la fin des années 2000, sous l’effet de l’amélioration des processeurs informatiques et de la massification des données, les chercheurs dans ce domaine ont obtenu d’éclatants succès, attirant d’un même élan créanciers privés, pourvoyeurs de données et jeunes chercheurs de partout dans le monde. Les recherches en intelligence artificielle ont ainsi débouché sur des applications commercialisables et généré de jeunes pousses, dont la naissance est facilitée par les centres de transferts technologiques et le financement privé et public. Non content de compter parmi les chefs de file du développement technologique de l’intelligence artificielle, le Québec a récemment pris les devants de la réflexion sur les enjeux éthiques inhérents avec la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle. Au nombre des acteurs de cet écosystème s’ajoutent donc les chercheurs en philosophie éthique et autres praticiens des sciences humaines et sociales intéressés par les effets du développement technologique la vie privée, sur le cadre légal, sur les relations interpersonnelles, sur le rapport individuel à la connaissance du monde, etc. Sur le plan gouvernemental, la Commission de l’éthique en science et en technologie réfléchit elle aussi aux incidences du numérique sur la société.

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Ainsi, à l’instar du secteur de l’intelligence artificielle, l’économie numérique au Québec ne concerne pas uniquement les entreprises productrices et usagères de services informationnels, mais tisse un réseau complexe et évolutif d’acteurs aux intérêts convergents. 3) Le numérique comme secteur économique en forte croissance et créateur d’emplois : Quelle est la situation de l’emploi dans votre pays au regard de la numérisation de l’économie en cours ? En 2017, le Québec comptait 7 830 entreprises en technologies de l’information et de la communication, soit une augmentation de plus de 28 % par rapport à 2007. Quelque 95 % de ces entreprises comptaient moins de 50 effectifs et 70 % en avaient 5 ou moins. Ensemble, elles ont généré des revenus de 32 milliards de dollars1. Au total, le Québec comptait environ 210 000 professionnels des technologies de l’information et de la communication, dont un peu moins de la moitié travaillaient directement au sein d’une entreprise spécialisée dans ce domaine2. Les emplois en technologies de l’information et de la communication ont connu une croissance de 3,6 % depuis 2011, soit six fois plus que la croissance des emplois dans le reste de l’économie. En 2016, le salaire moyen de ce secteur était de 71 000 $, soit environ 25 000 $ de plus que le salaire moyen, tous domaines confondus3. La main-d’œuvre professionnelle du secteur des TIC est largement scolarisée : 89 % détiennent un diplôme d’études collégiales et 43 % sont titulaires d’un diplôme universitaire4. Le développement de cette branche de l’économie est aussi particulièrement tributaire de la main-d’œuvre étrangère puisque 27 % des professionnels en technologies de l’information et de la communication sont des personnes issues de l’immigration. La part de cette catégorie sociale dans l’ensemble du marché du travail est d’environ 15 %. Les femmes jouent elles aussi un rôle de plus en plus grand dans ce domaine d’activités. Si elles n’occupent encore que 20 % des emplois, le nombre d’inscrites aux programmes d’études de premier cycle liés aux technologies de l’information de la communication a augmenté de 110 % entre 2011 et 20165.

1 TECHNOCompétences, Diagnostic sectoriel de la main-d’œuvre dans le secteur des technologies de

l’information et des communications au Québec, 2018, p. 7. 2 Ibid., p. 8. À lui seul, le secteur des technologies de l’information et de la communication comptait environ

151 000 emplois et employait à peu près 102 000 professionnels. Ibid., p. 12. Ces données sont toutefois sujettes à précautions, puisque les calculs peuvent varier selon les catégories de main-d’œuvre et d’industries que l’on inclut dans le secteur des technologies de l’information et de la communication. L’Institut Brookfield, par exemple, dénombre plus de 220 000 travailleurs en haute technologie à Montréal seulement. Ce secteur recouvre aussi bien l’intelligence artificielle que la robotique, l’informatique, les jeux vidéo, etc. Stéphane Parent, « Montréal confirmée comme cerveau mondial de l’intelligence artificielle et profonde », Radio-Canada international, 16 janvier 2018, en ligne : http://www.rcinet.ca/fr/2018/01/16/montreal-confirmee-cerveau-mondial-de-intelligence-artificielle-profonde/.

3 TECHNOCompétences, Diagnostic..., p. 8. 4 Ibid., p. 47. 5 Ibid., p. 50.

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L’introduction des TIC menace-t-elle les emplois existants ? Ou le numérique offre-t-il plutôt des perspectives de créations d’emplois ? Disposez-vous d’éléments chiffrés ? Le virage technologique amorcé depuis les années 1970 au Québec a certes suscité des craintes quant à la préservation des emplois et au potentiel de conversion de la main-d’œuvre. Les récentes percées en intelligence artificielle ravivent les inquiétudes, particulièrement au sein de centres de recherche privés spécialisés en économie. Au Canada l’Institut Brookfield estime à 42 % le taux de la main-d’œuvre canadienne à risque d’être affectée par l’intelligence artificielle d’ici 20301. Un récent rapport de la Banque Royale du Canada évalue pour sa part que la moitié des emplois seront perturbés par l’avènement de l’intelligence artificielle sur le marché du travail d’ici la fin de la prochaine décennie2. Ces recherches font écho au Forum économique de Davos qui, en 2016, prédisait la perte nette de cinq millions d’emplois dans les principales économies mondiales de 2015 à 2020 par la faute de la « quatrième révolution industrielle »3. De fait, bien que les données à ce sujet soient encore parcellaires, certains secteurs sont plus immédiatement touchés par l’introduction de technologies émergentes. Ainsi, le virage numérique et l’accaparement des revenus publicitaires par les géants d’Internet a provoqué des pertes d’emplois considérables dans les médias papier. Le secteur du transport de marchandises, lui, est directement menacé par l’arrivée des véhicules autonomes sur les routes. Dans l’ensemble, toutefois, les discours alarmistes ne trouvent pas de prise sur le réel: depuis 2016, le taux de chômage au Québec, comme dans le reste du Canada, demeure très bas, à 5,5 %4, tandis que le secteur des technologies de l’information et de la communication génère une croissance d’emploi supérieure au reste de l’économie5. Aussi l’Institut C.D. Howe juge-t-il « très peu probable que les emplois dans des professions très susceptibles à l’automatisation (35 % des emplois au Canada) soient complètement remplacés par des machines intelligentes au cours des prochaines années6 ». D’ailleurs, le rapport 2018 du Forum économique mondial prédit maintenant un gain net de quelques centaines de milliers d’emplois au sein des pays les plus avancés d’ici 20227.

1 Creig Lamb, The Talented Mr. Robot. The impact of automation on Canada’s workforce, Brookfield’s

Institute, juin 2016, p. 5. https://brookfieldinstitute.ca/wp-content/uploads/TalentedMrRobot_BIIE-1.pdf 2 Banque Royale du Canada, Humains recherchés. Facteurs de réussite pour les jeunes Canadiens à l’ère des

grandes perturbations, 2018, p. 3. http://images.transcontinentalmedia.com/LAF/lacom/humains_recherches_RBC2018.pdf

3 Forum économique mondial, The Future of Jobs Report. Employment, Skills and Workforce Strategy for the Fourth Industrial Revolution: Executive summary, janvier 2016, p. 1. http://www3.weforum.org/docs/WEF_FOJ_Executive_Summary_Jobs.pdf

4 Institut de la statistique du Québec, Principaux indicateurs économiques désaisonnalisés, 17 octobre 2018. http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/economie/indicnm.htm

5 Voir réponse précédente. 6 Matthias Oschinski et Rosalie Wyonch, Le choc du futur? Les répercussions de l’automatisation sur le marché

du travail au Canada, Institut C.D. Howe, mars 2017, p. 1. https://www.cdhowe.org/sites/default/files/attachments/research_papers/mixed/Commentary_472%20French%20web_0.pdf

7 Centre for the New Economy and Society, The Future of Jobs Report, Forum économique mondial, 2018, p. viii. http://www3.weforum.org/docs/WEF_Future_of_Jobs_2018.pdf.

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L’introduction des TIC a-t-elle provoqué la disparition de certains métiers ? A-t-elle engendré la création de nouveaux métiers ? Citez des exemples. Les données dont nous disposons sur les effets réels des TIC ne nous permettent pas de conclure à la disparition récente de métiers précis. La diffusion des TIC dans les entreprises a-t-elle conduit à des délocalisations, d’un territoire à l’autre au sein de votre pays, à l’extérieur de votre pays ? Les données dont nous disposons ne nous permettent pas relier les TIC à une cause directe de délocalisation d’emplois. 4) Le numérique comme levier pour renforcer les différents secteurs de l’activité humaine (administration, entreprises, agriculture, commerce, développement urbain, santé, éducation, formation, médias, finance, etc.) : Les conditions de travail, l’organisation du travail, le contenu du travail, les compétences des travailleurs sont-ils impactés par la numérisation ? Comment ? Citez des exemples. En l’état actuel des données, il nous est difficile de nous prononcer avec certitude sur cette question. Toutefois, les experts s’entendent généralement pour articuler autour de trois axes principaux les changements opérés par la numérisation sur les modes d’organisation du travail : le modèle d’affaires, les processus organisationnels et l’expérience de la clientèle. Le bouleversement se manifeste souvent dans la transformation, parfois radicale, du modèle d’affaires qui elle-même engendre une mutation de l’offre des produits et des services. Un exemple particulièrement frappant de changement dans le modèle d’affaires nous a été donné par le quotidien La Presse, l’un des plus anciens journaux francophones en Amérique du Nord et l’un des plus populaires au Québec. En 2013, ce journal a accéléré son virage numérique avec le lancement d’une application offrant du contenu exclusif à ses utilisateurs. En 2017, il achevait ce virage en abandonnant l’édition papier pour offrir uniquement du contenu numérique. En 2018, l’entreprise a été convertie en organisation à but non lucratif. Les processus organisationnels sont eux aussi transformés sous l’effet des gestionnaires de tâches informatisés et d’outils numériques dont les capacités sont décuplées par le traitement informatique des données massives. Confier ne serait-ce que partiellement la charge de la gestion de la performance à une technologie numérique n’est pas sans conséquence. En effet, lorsque les données président à la gestion de la performance, une nouvelle conception de l’organisation s’impose, et avec elle une redéfinition de la nature du travail effectué et du rapport du travailleur à celui-ci. Les praticiens du droit et de la comptabilité, par exemple, se voient aujourd’hui confrontés à l’expansion exponentielle du volume de données qu’ils sont à même de traiter dans le cadre de recherches juridiques et d’audits comptables. Un tel accroissement de leurs capacités de travail n’est pas sans conséquence sur l’affectation des ressources auparavant imparties à ces tâches. De même, la plupart des entreprises de moyenne ou de grande taille s’appuient aujourd’hui sur des

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logiciels performants pour optimiser les processus organisationnels et administrer les ressources humaines, financières et informationnelles. Enfin, l’expérience client subit elle aussi une transformation majeure sous l’effet du traitement des données fournies, consciemment ou non, par leur clientèle et grâce à des assistants virtuels capables de reconnaître la voix et le texte et, bien souvent, de reproduire les interactions les plus courantes des relations avec la clientèle. Ces changements tendent non seulement à raffiner la compréhension que se font les entreprises de leur clientèle, mais elles modifient aussi les mécanismes de vente et les interfaces de contact entre fournisseurs et clients. 5) Le numérique comme facteur d’innovation transversale contribuant à transformer les modèles économiques, sociétaux et politiques, en particulier grâce à l’appropriation par la jeunesse des outils et des usages numériques : Quels sont les enjeux pour l’éducation et la formation des jeunes à d’éventuels nouveaux métiers et de nouvelles conditions de travail dans votre pays ? Les enjeux éducationnels de la transition numérique portent d’abord sur l’intégration des outils et pratiques propres à l’univers numérique dans le cursus scolaire, du primaire à l’université, en passant par le secondaire, le collégial, la formation des adultes, la formation professionnelle et la formation continue. Les trois orientations du Plan d’action numérique en éducation et en enseignement supérieur s’articulent toutes autour de ce défi1. Dévoilé au printemps 2018, ce plan découle de la Stratégie numérique et se trouve au cœur de la Politique de réussite éducative du Québec. L’orientation 1 propose des mesures pour soutenir le développement des compétences numériques des jeunes et des adultes : un cadre de référence des compétences numériques appliqué à tous les ordres d’enseignement ; l’utilisation de la programmation informatique à des fins pédagogiques dans toutes les écoles du Québec ; l’intégration des technologies numériques dans les pratiques pédagogiques et l’accompagnement du personnel enseignant pour ce faire. L’orientation 2 vise à exploiter la valeur ajoutée offerte par le numérique dans les pratiques d’enseignement. La mesure phare de cette orientation consiste à centraliser l’offre de formation à distance des collèges et universités sur une plateforme nationale permettant aux établissements de mutualiser leurs ressources. L’orientation 3 tend à créer un environnement propice au déploiement du numérique dans l’ensemble du système éducatif. À cette fin, le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur créera un dossier numérique pour chaque élève, qui le suivra tout au long de son parcours éducatif. Par cette orientation, le gouvernement se propose aussi de mettre en place un réseau de télécommunication fiable et sécuritaire de grande capacité afin de favoriser, notamment,

1 Ministère de l’Éduction et de l’Enseignement supérieur, Plan d’action numérique en éducation et en

enseignement supérieur, 2017. http://www.education.gouv.qc.ca/dossiers-thematiques/plan-daction-numerique/.

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le renforcement de la collaboration entre les intervenants scolaires, les élèves et les parents ainsi que l’utilisation des outils numériques de pointe qui seront introduits dans les établissements. La stratégie nationale de la main-d’œuvre, dévoilée en mai 2018, prévoit plusieurs mesures pour développer l’offre de formation continue de manière à soutenir la main-d’œuvre dans l’actualisation de ses connaissances et de ses compétences1. Cette mise à jour est un condition nécessaire au maintien de la performance de l’économie québécoise dans plusieurs secteurs. Aussi la stratégie propose-t-elle de bonifier l’offre de programmes de courte durée au collégial et au professionnel de courte durée tout en facilitant l’accès aux études à temps partiel en formation professionnelle et technique. La Stratégie nationale de la main-d’œuvre prévoit aussi une mesure pour développer les compétences numériques des travailleurs et travailleuses ainsi que des personnes à la recherche d’un emploi. Enfin, le secteur bioalimentaire connaît lui aussi une transformation rapide de ses infrastructures technologiques qui implique l’adaptation du savoir-faire de sa main-d’œuvre. C’est pourquoi la stratégie engage le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation à actualiser son programme de formation continue à distance. Ainsi, le gouvernement prépare-t-il les jeunes et les adultes à maîtriser les outils numériques et à s’adapter aux besoins du marché de l’emploi afin de suivre la cadence imposée par les changements induits par la numérisation. 6) L’intégration des enjeux du numérique par les autorités politiques de votre pays : Ont-elles engagé des mesures particulières pour accompagner le développement du numérique auprès des citoyens, des administrations, des entreprises, le réguler ? La Stratégie numérique constitue le principal levier d’action gouvernemental en la matière. Voir les réponses aux questions 1) et 5) à ce sujet. Elle fait suite à la Stratégie gouvernementale en technologies de l’information, qui, depuis son adoption en 2015, oriente la gestion des ressources informationnelles de l’appareil étatique2. Adoptée en 2017, la Stratégie d’optimisation des communications numériques et des présences Web gouvernementales découle des précédentes initiatives gouvernementales en matière de numérisation3. Elle vise à rationaliser, à intensifier, et à harmoniser la présence de l’État dans l’espace numérique de manière à rapprocher l’État des citoyens et des citoyennes en rendant leurs interactions plus simples, plus directes et plus faciles. Elle place le Secrétariat à la communication gouvernementale au coeur de l’évolution des modes de communication numériques. Plus particulièrement, la stratégie préconise une approche numérique unifiée dans les communications

1 Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Stratégie nationale de la main-d’œuvre 2018-

2023. Le Québec à l’ère du plein emploi, 2018. https://www.mtess.gouv.qc.ca/publications/pdf/Strat-nationale_mo.PDF

2 Secrétariat du Conseil du trésor, Stratégie gouvernementale en technologies de l’information, 2015. https://www.tresor.gouv.qc.ca/fileadmin/PDF/ressources_informationnelles/strategie_ti/strategie_ti.pdf

3 Secrétariat à la communication gouvernementale, Stratégie d’optimisation des communications numériques et des présences Web gouvernementales, 2017. http://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/bs2754094

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gouvernementales et les services publics ainsi qu’une attitude plus proactive de l’État sur les réseaux sociaux et dans ses communications numériques en général. Cependant, tous et toutes ne sont pas adéquatement préparés à assumer les responsabilités qui viennent avec de tels changements. Aussi, pour consolider l’expertise de l’État à l’ère du numérique, le gouvernement a récemment créé, en partenariat avec l’Université Laval, l’Académie des transformations numériques1. Doté d’un budget initial de six millions de dollars, ce centre de recherche et de formation a pour objectif de préparer et soutenir le perfectionnement de la fonction publique québécoise afin de l’outiller pour prendre le virage numérique déjà amorcé. L’Académie a aussi pour mandat d’étudier les répercussions des transformations numériques sur les emplois de la fonction publique.

1 Gouvernement du Québec, « Création de l’Académie des transformations numériques – Québec s’allie à

l’Université Laval pour relever le défi de la transformation numérique », 11 juin 2018. http://www.fil-information.gouv.qc.ca/Pages/Article.aspx?idArticle=2606113309

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RÉPONSES DE LA SECTION ROUMAINE 1) L’enjeu pour votre pays des capacités d’accès universel et

abordable au numérique conformément aux objectifs de développement durable :

Quel est le niveau de connectivité de votre pays (accès à l’électricité; infrastructures de télécommunication, technologie fibre optique/câbles sous-marins/satellites/etc.; niveau d’équipement des ménages, des entreprises, des administrations; règlementation favorable au développement numérique économique; capacité des citoyens à se servir des outils numériques...) ? Les plus récentes statistiques indiquent que d’un total de 7.47 millions de ménages roumains:

• 65.6% détiennent un ordinateur dont 75% en milieu urbain; • 61% ont un accès à Internet dont 48 % bénéficient d’une

couverture haut débit; • 42% utilisent Internet quotidiennement; • 72,5% personnes âgées de 16 à 74 ans ont utilisé un ordinateur.

La Roumanie est très bien placée en plan mondial pour la diffusion et l’adoption de l’internet à haut débit et à très haut débit, sur la 5éme place pour la connexion fixe et sur la 36émé place en ce qui concerne la connexion mobile. En effet, au sein de l’UE, la Roumanie compte la plus importante proportion d’abonnements à très haut débit - 57%, comparé à 15% dans l’UE, et la deuxième plus importante proportion des abonnements à haut débit - 70%, comparé à 37 % dans l’UE. Malheureusement, le fait que plus de la moitié des ménages ruraux1 n’ont pas un accès à l’internet place la Roumanie parmi les pays de l’UE en retard en ce qui concerne la connectivité.2 Les objectifs de la Roumanie pour 2020 sont: -100 % couverture haut débit et 80 % haut débit avec une vitesse supérieure à 30Mbps; - 45 % des connexions à très haut débit (vitesse supérieure à 100 Mbps); - 60 % des Roumains qui utilisent l’internet de manière régulière; 1 Le milieu rural, qui représente 45% de la population, demeure insuffisamment connecté, comptant seulement 26 % des connexions haut débit. De plus, la proportion des utilisateurs réguliers d’internet est la plus faible (56%, comparé à 79% dans l’UE). 2 Digital Economy and Society Index de l’Union Européenne qui est obtenu à partir de 5 indicateurs – connectivité, capital humain, utilisation de l’internet par les citoyens, degré de numérisation des entreprises, services publics -, propose une moyenne par pays variant entre 0 et 1,1. D’âpres cet index, la Roumanie occupe la dernière place avec un score de 0.35.

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- 30 % des Roumains qui font des achats sur internet de manière régulière; - 35 % des Roumains qui utilisent des systèmes d’e-gouvernement; Les investissements nécessaires pour l’implémentation des objectifs mentionnés sont estimés à 3963 M Euro.

2) Quels sont les différents acteurs de l’économie numérique dans votre pays au regard de ceux identifiés en page précédente ? Á Bucarest et dans d’autres villes de la Roumanie sont implantés grand acteurs mondiaux du domaine TIC tels que Dell, Adobe, Endava, Google, IBM, Intel, Microsoft et Oracle, HP, Continental Automotive etc. La présence française est aussi très forte - Atos, Pentalog, Gameloft, Ubisoft etc. Á cette forte présence internationale s’ajoute un tissu épais d’entreprises roumaines, parmi lesquelles certaines sont considérées déjà de succès. Pour exemplifier, la compagnie roumaine Bitdefender se trouve parmi les 30 plus grandes entreprises de logiciel du monde en chiffre d’affaires (produits de cyber sécurité). De plus, les startups se dynamisent grâce aux incubateurs d’affaires et aux accélérateurs d’entreprises qui facilitent le contact direct entre les startups et les investisseurs. Plusieurs incubateurs d’affaires et accélérateurs d’entreprises dans le domaine des TIC ont été crées au cours des dernières années à Cluj, à Timisoara et à Brasov. Le Cluster de Cluj, fondé en 2012, regroupe 36 membres dont 23 entreprises du secteur TIC et 3 universités et bénéficie du fort soutien de la part des collectivités locales. Certaines startups roumaines ont été achetées par des grands acteurs mondiaux du numérique - Liverail par Facebook, VectorWatch par Fitbit etc. En janvier 2017, la startup Parking+PLUS a été sélectionnée par le programme «French Tech Ticket», qui a permis à Parking+PLUS d’être accueilli et de se développer au sein d’un incubateur parisien. Le secteur privé a déjà lancé des initiatives qui encouragent le développement des startups roumaines. Pour exemplifier, le Program Innovation Labs - un programme de pré-accélération qui compte parmi les partenaires principaux de l’édition de 2017 Orange, Carrefour et Société Générale. Par ailleurs, des projets lauréats des dernières éditions ont été intégrés dans le projet pilot d’Orange - Alba Iulia Smart City 2018.

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En ce qui concerne la troisième catégorie d’acteurs - les entreprises des secteurs usagers -, c’est difficile à identifier un secteur de l’administration ou de l’économie qui n’utilise pas les nouvelles technologies.

3) Le numérique comme secteur économique en forte croissance et créateur d’emplois :

Quelle est la situation de l’emploi dans votre pays au regard de la

numérisation de l’économie en cours ?

Année 2000 2010 2017 2020

Employés 13000 56000 100000 115000

chiffre d’affaires 253 millions USD

2,4 milliards USD

plus de 4 milliards euro

environ 6.3 milliards euro

Productivité/employé

19.000 USD 42.000 USD 45.000 euro 55.000 euro

L’introduction des TIC menace-t-elle les emplois existants ? Ou le

numérique offre-t-il plutôt des perspectives de créations d’emplois ? Disposez-vous d’éléments chiffrés ?

Nous ne détenons pas des données statistiques sur ce thème. Ce qu’on peut commenter à ce sujet c’est que le chômage en Roumanie

est un des plus bas de l’Union européenne - 3,46% en aout 2018 -, et que la Roumanie se confronte avec un manque de main d’œuvre qualifiée, situation déterminée, d’une part, par la migration des jeunes travailleurs et, d’autre part, par le vieillissement de la population.

L’introduction des TIC a-t-elle provoqué la disparition de certains

métiers ? A-t-elle engendré la création de nouveaux métiers ? Citez des exemples.

Métiers disparus ou en cours de disparition: operateurs/techniciens dans

des diverses secteurs de production, en spécial dans l’industrie légère - textile, de l’habilement, industrie du cuir, industrie du bois, presse-édition, dans l’industrie automobile, construction électrique, construction mécanique, construction navale et aéronautique et dans le secteur des services – téléphonie, télégraphie etc.

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La plus grande partie des nouvelles métiers qui ont été reconnues dans les dernières décennies par le nomenclateur de métiers sont liée aux besoins du secteur des TIC: stratège web, développeur d’applications, intégrateur web, administrateur d’infrastructure, administrateur base de données, artiste 3D, technicien TIC, analyste programmeur, spécialiste numérique, designer graphique, consultant systèmes et réseaux, ingénieur d’affaires etc.

La diffusion des TIC dans les entreprises a-t-elle conduit à des

délocalisations, d’un territoire à l’autre au sein de votre pays, à l’extérieur de votre pays ?

S’appuyant sur plus de 200 entreprises - dont la moitié fonctionne avec plus de 200 employés -, et sur environ 80.000 informaticiens, le secteur TIC constitue un vecteur important de la croissance économique de la Roumanie et présente la plus élevée contribution au PIB en comparaison avec les autres pays membres de l’UE.

Le volume du marché de l’industrie de software est estimé à 3616 M Euro en 2016. Bien que plus de 60% de la valeur ajoutée du secteur TIC reste concentrée à Bucarest, les villes de Cluj, Timisoara et Iasi sont devenues également des importants centres TIC. Récemment, d’autres villes, y compris de taille moyenne ont émergé comme des centres d’activité pour le secteur TIC (Brasov, Sibiu, Craiova, Târgu Mureş et Galati).

4) Le numérique comme levier pour renforcer les différents secteurs de l’activité humaine (administration, entreprises, agriculture, commerce, développement urbain, santé, éducation, formation, médias, finance, etc.) :

Les conditions de travail, l’organisation du travail, le contenu du

travail, les compétences des travailleurs sont-ils impactés par la numérisation ? Comment ? Citez des exemples.

En ce qui concerne l’administration publique, la Roumanie soutienne par

le biais des programmes de la politique de cohésion européenne, les investissements dans le domaine de l’e-gouvernance. Avant la fin de 2023, les autorités roumaines envisagent d’informatiser:

• les activités des institutions et des structures de l’administration centrale et locale et d’augmenter le nombre des services publics disponibles en ligne;

• les activités des agents économiques (création/ vente /modification du statut d’une entreprise, l’identification des sources de financement, payement des taxes, la conclusion des transactions etc.);

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• droits et responsabilités des citoyens - délivrance des documents d’identité/passeports/permis conduire véhicule, allocations enfants, achat/enregistrement véhicule, achat maison, assurances obligatoires et volontaires etc.;

• la recherche d’emploi ; • les formalités liées à la retraite/accident du travaille; • affaires étrangères - immigration en Roumanie, citoyenneté

roumaine, visa; • parcours éducationnel classes

primaires/lycée/université/bibliothèque; • services médicaux - programmations consultation médicale;

services de télémédecine dans des zones éloignées; • la promotion du tourisme (guides et informations voyage).

5) Le numérique comme facteur d’innovation transversale

contribuant à transformer les modèles économiques, sociétaux et politiques, en particulier grâce à l’appropriation par la jeunesse des outils et des usages numériques :

Quels sont les enjeux pour l’éducation et la formation des jeunes à

d’éventuels nouveaux métiers et de nouvelles conditions de travail dans votre pays ? L’offre annuelle de spécialistes IT n’est pas suffisante pour répondre aux besoins d’expansion du secteur. Pour répondre à ce défi les autorités de l’état et le secteur privé travaillent main en main pour rendre les spécialisations IT plus attractives, pour harmoniser la formation offerte par les universités avec les besoins des entreprises et pour faciliter l’insertion professionnelle des étudiants. De plus, en 2017, les autorités roumaines ont modifié les curricula scolaires pour introduire des cursus d’utilisation/programmation de logiciels. Cette mesure a crée une importante pression au niveau des écoles et des lycées et surtout au niveau universitaire, parce qu’au dépit du fait que le nombre des étudiants des disciplines STEM s’est presque doublé au cours des dernières années, le nombre des cadres didactiques a resté inchangé et parfois s’est diminué. En conséquence, préoccupées par le manque de la main d’œuvre les grand compagnies sont de plus en plus présentes dans le milieu universitaire pour offrir aux étudiants des stages et participent à l’élaboration des cursus universitaires adaptée à leurs besoins de développement. Pour exemplifier :

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• l’établissement de l’Academy+PLUS et Simplon.ro, deux écoles d’inspiration française ayant comme modèle l’Ecole 42 et Simplon.co;

• la manque des spécialistes dans l’analyse de métadonnées à déterminé IBM d’offrir aux étudiants de l’Université de Ouest de Timisoara des cours de formations en domaine. De plus, les spécialistes de l’IBM participent à la révision des curricula universitaire pour les études de master, doctorales et des projets de recherche.

Les autorités roumaines vont soutenir dans les années à venir les investissements massifs dans l’éducation, en principal, pour soutenir:

• les achats d’équipements TIC pour les écoles secondaires; • l’amélioration de l’accès à l’Internet par la création des campus wireless; • la création d’une culture du numérique dans le processus d’enseignement. • accroitre les compétences digitales des citoyens.

L’Union Européenne a déjà lancé dans ce but, un programme plus vaste pour un meilleur renforcement des compétences, pour l’anticipation de la demande et pour la mise en concordance de l'offre avec la demande de compétences. Afin d’augmenter le nombre de spécialistes des TIC, la Commission européenne a lancé des coalitions pour les compétences et les emplois numériques - des partenariats à l’échelle de l’UE dont la Roumanie fait partie, qui visent à utiliser les Fonds structurels et d'investissement européens pour pallier les difficultés rencontrées lors du recrutement de spécialistes des TIC.

6) L’intégration des enjeux du numérique par les autorités politiques de votre pays :

Ont - elles engagé des mesures particulières pour accompagner le

développement du numérique auprès des citoyens, des administrations, des entreprises, le réguler ?

La priorité des autorités politiques de la Roumanie est de continuer à mettre en œuvre les objectifs énoncés dans la Stratégie de la Roumanie pour l’Agenda numérique 2020, tout en réalisant la convergence avec les dispositions et les cibles stratégiques de la Stratégie numérique pour l’Europe 2020.

La Stratégie roumaine adoptée en 2015 prévoit les suivant quatre axes d’intervention:

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- la modernisation et la réduction des couts de l’administration publique à travers l’e-gouvernement, l’interopérabilité, le cyber sécurité et le cloud;

- la promotion des TIC dans l’éducation, la santé et la culture; - la promotion de l’e-commerce, de l’innovation et de la RD pour faciliter

la croissance du secteur privé; - l’inclusion sociale à travers le déploiement des infrastructures haut débit

pour les services numériques. Sont en cours d’implémentation des mesures menées à assurer les synergies entre la réforme administrative et l’e-gouvernement; le développement des infrastructures pour les services numériques; la sécurité des activités TIC, l'utilisation des TIC dans tous les domaines en réduisant l'écart par rapport à d'autres pays, le développement des entreprises, en particulier dans le domaine de la production de logiciel. Plus concrètement, on envisage à :

• accroître le pourcentage du secteur des TIC à plus de 10% du PIB d'ici 2022: stimuler les incubateurs d’affaires en fournissant un programme de subventions - «Start-up nation»; stimuler les investissements publics et privés dans l'infrastructure; support: large bande (fibre optique et 5G) et infrastructure intelligente (les services informatiques hébergés, l’internet des objets, la sécurité cybernétique) par des simplification administrative et de la règlementation, stimuler les modèles entrepreneuriaux collectifs dans le domaine des TIC, établir un system de taxation prévisible sur 20 ans;

• augmenter le pourcentage de personnel des TIC au total des employés, par des mesures dédiées au secteur informatique;

• augmenter la valeur ajoutée dans le secteur des TIC: programme national d’établissement des partenariats (gouvernement, autorités publiques locales, universités techniques et entreprises privées) pour la mise en place des parcs technologiques; encourager les investissements du milieu privé (garanties d'État et des incitations fiscales) dans la recherche en technologie numérique: cloud, big-data, l'intelligence artificielle, l'Internet des choses, block-chain, la sécurité cybernétique, voitures électriques et transport autonome (drone); encourager la coopération dans la région de l'Europe du Sud - Est pour créer un marché zonale solide de l'informatique et de la technologie (tronçons de grande capacité de transport d'informations transfrontalier, négociation de tarifs avantageux de transit et de transport, l'initiation de projets de recherche TIC conjoints, accès aux fonds communautaires sur les projets transfrontières);

- réduire le pourcentage de personnes qui n'ont jamais utilisé l'Internet, jusqu'à 25% en 4 ans: encourager l'alphabétisation

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numérique de tous les citoyens roumains jusqu'en 2030; encourager l'apprentissage tout au long de la vie dans le domaine des TIC; assurer l'acquisition et l'utilisation dans la vie quotidienne des instruments TIC par de plus larges catégories de population, quel que soit l'âge, l`éducation, le statut social, le genre etc.; accorder des facilités fiscales pour la cooptation dans le processus éducatif des jeunes qui travaillent dans le domaine des TIC;

- renforcer la confiance dans les services numériques grâce à la cyber-sécurité: renforcer le rôle de la Roumanie en tant que leader régional de la sécurité, harmoniser la législation nationale sur la cyber-sécurité avec le cadre législatif européen et internationale en domaine, la mise en place du système de sécurité cybernétique nationale;

- développer les systèmes de données ouvertes, grandes données, informatique en nuage et médias sociaux etc.

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RÉPONSES DE LA SECTION SÉNÉGALAISE

Impact de la révolution numérique sur l’emploi

1-

L’industrie des Télécommunications au Sénégal constitue la locomotion actuelle de l’économie numérique et représente le socle sur lequel va s’élaborer la transition numérique de toute l’économie. L’analyse du secteur du numérique indique que les infrastructures des télécommunications demeurent parmi les plus développées et performantes en Afrique de l’Ouest grâce à d’importants investissements consentis en termes de capacités et de modernisation. Les principales infrastructures de fibre optique sont détenues par cinq (5) acteurs majeurs, dont trois opérateurs : SONATEL, TIGO et EXPRESSO, l’Agence de l’Informatique de l’Etat (ADIE) et la Société Nationale d’ Electricité du Sénégal (SENELEC). Environ neuf mille (9000) kilomètres de câbles interurbains sont opérationnels et les investissements se poursuivent chaque année. Les dernières statistiques publiées en fin juin 2016 par l’ARTP montrent que la téléphonie mobile a atteint un taux de pénétration de 116,71 %, alors que celui de l’Internet poursuit sa progression et s’élève à 60,28%. Ce taux est calculé sur la base du parc des abonnés internet déclaré par les opérateurs et rapporté à la population. Notre pays dispose cependant d’un taux d’usage relativement élevé des TIC par les entreprises. Cet avantage peut être exploité pour développer une économie numérique compétitive sur le plan régional et international. La compétitivité par le coût des services TIC demeure un facteur déterminant pour l’universalité de l’accès. La réduction des tarifs au cours des dernières années reste insuffisante et le niveau élevé constitue un obstacle majeur àl’utilisation des TIC, en particulier pour le haut débit. 2- Le secteur de l’Economie numérique au Sénégal est essentiellement composé d’acteurs privés. Il s’agit :

• De trois opérateurs de télécommunications titulaires de licence globale : Sonatel (Orange) du Groupe France Télécom ; Sentel (Tigo) du Groupe Millicom Internationale ; Sudatel (Expresso) de l’opérateur soudanais ;

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• D’un opérateur titulaire d’une licence de service universel des télécommunications : Consortium du Service Universel (CSU) SA (HAYO) ;

• De deux fournisseurs de services internet : Orange Arc informatique

• De 300 PME en TIC • Et de toutes les structures et opérateurs évoluant dans le domaine de

l’audiovisuel.

3- • Comme on le voit, en trois décennies, les nouvelles technologies se sont

progressivement incrustées au cœur des métiers créant ainsi de nouveaux secteurs, métiers, produits et services supportant le processus de numérisation de l’économieet qui constituent autant d’opportunités qui s’offrent à tous les acteurs de l’économie mondiale et leur permet de conquérir les marchés clés du futur et de répondre ainsi adéquatement aux grands défis qui se posent. Cette « nouvelle économie » exige des acteurs économiques (Etats, entreprise et autres usagers) une nouvelle manière de faire des affaires et créer de la valeur pour laquelle Internet et ses outils et services sont à la fois le vecteur et le symbole.

• Suite au déploiement de nouvelles technologies, certains emplois ont disparu ; cependant beaucoup d’autres sont créés en parallèle. Au Sénégal, l’introduction de TIC a généré un volume important d’emplois directs (plus de 19000) et indirects (plus de 57000).

• L’introduction des TIC a provoqué un bouleversement radical dans les modes de vie et de communication, les usages professionnels, les habitudes…la progression des technologies numériques vient modifier le contenu des métiers.De nouveaux besoins, suscités par une offre de plus en plus agressive, subliminale et diversifiée, sont ainsi nés dans des domaines aussi variés que la santé (télémédecine), l’éducation (e-learning), l’énergie et l’environnement, la culture (contenus numériques), le commerce (e-commerce) les médias et les loisirs (site web, blogs, tweet, etc.), la sécurité, la défense (réseaux fermés de télécommunication), les transports, les administrations et le secteur public (e-administration, open data), les services (e-services), les modes de production et l’industrie, l’informatisation et le management des entreprises (ERP, e-management)… Or le progrès technologique continuerait à favoriser plutôt l’emploi qualifié et très qualifié : parmi les métiers les plus vulnérables, les métiers surreprésentés sont souvent des métiers pas ou peu qualifiés.

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• La diffusion des TIC dans les entreprises favorise la délocalisation (externalisation ou offshorting) de certaines activités et services comme le traitement des données, la recherche et développement au profit des entreprises sénégalaises, et les processus de création d’entreprises dans les parties du monde où les coûts sont plus bas.

4- Les TIC contribuent très largement à l’essor des entreprises en favorisant une plus grande productivité, grâce à l’innovation de la vente électronique qui offre l’avantage de la rapidité et permet aux entreprises d’accroitre le volume des échanges avec la réduction des intermédiaires. Le numérique induit deux grands types de transformation : sur l’organisation du travail, d’une part, et sur les compétences attendues des salariés, d’autre part. De ce fait, au Sénégal des salariés estiment que l’usage des technologies numériques a eu un effet positif sur leur qualité de vie au travail, et des chefs d’entreprise que cet usage a eu des conséquences positives sur la qualité de vie au travail des salariés de leur entreprise.

Par exemple, dans l’administration, l’archivage classique des papiers était tel qu’il leur fallait un temps de recherche et parfois même certains documents restaient introuvables. Mais, la numérisation leur permet de gagner du temps et de l’énergie et en même temps satisfaire la clientèle. 5- Le défi consiste à renforcer la formation professionnelle et rendre opérationnelles les compétences requises pour impulser la créativité et les innovations, facteurs déterminants dans le développement de l’économie numérique, notamment avec la réalisation d’applications numériques adaptées aux besoins et à la demande locale, ainsi que pour participer à la compétition internationale. Pour disposer des capacités d’adaptation et atteindre les performances attendues du secteur, il convient d’introduire très tôt le numérique comme objet d’apprentissage dans les curricula de formation à partir du cycle primaire et de le généraliser au cycle supérieur.Afin de prendre en compte l’apparition de nouveaux métiers et l’évolution de la demande en compétences spécialisées des entreprises TIC, il est envisagé d’opérer des mutations dans les démarches méthodologiques et les contenus pédagogiques, par une participation plus marquée des entreprises dans la définition des contenus et unencadrement des futurs diplômés.

6-

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L’Etat du Sénégal a élaborée la stratégie "Sénégal numérique 2025" qui incarne l’ambition du Sénégal de maintenir une position de pays leader innovant. Cette stratégie est une vision à long terme; elle est constituée de pré requis et axes prioritaires articulés autour du slogan « le numérique pour tous et pour tous les usages en 2025 au Sénégal avec un secteur privé dynamique et innovant dans un écosystème performant ». Au-delà des infrastructures, l’enjeu de l’économie numérique est aussi de permettre à tous les citoyens, quel que soit leur âge, leur parcours et leur lieu de vie, d’accéder et de se familiariser aux possibilités offertes par les technologies numériques, pour mieux participer à la vie sociale, collaborer, entreprendre, réaliser des projets, agir en consommateur responsable. C’est également la modernisation des usages et des services publics dans les territoires : e-santé, e-éducation, e-administration sont des réponses permettant de compléter l’aménagement numérique des territoires par les infrastructures et de donner un véritable rôle aux territoires dans la diffusion du numérique. A ce propos, la mission originelle de l’ADIE est capitale : moderniser l’administration sénégalaise et rendre accessibles, en développant les applications adéquates, les services publics aux citoyens. La réalisation de cette mission est fondamentale pour l’édification d’une « Economie numérique ».

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RÉPONSES DE LA SECTION SUISSE

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