Lhuillier 2007 Phytochimie de 4 Plantes Malgaches

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N dordre : 2467

THESEprsente pour obtenir LE TITRE DE DOCTEUR DE LINSTITUT NATIONAL POLYTECHNIQUE DE TOULOUSE cole doctorale : Transferts, Dynamique des Fluides, Energie et Procds Spcialit : Sciences des Agroressources

Par Melle Amlie LHUILLIER

CONTRIBUTION A LETUDE PHYTOCHIMIQUE DE QUATRE PLANTES MALGACHES : AGAURIA SALICIFOLIA HOOK.F EX OLIVER, AGAURIA POLYPHYLLA BAKER (ERICACEAE), TAMBOURISSA TRICHOPHYLLA BAKER (MONIMIACEAE) ET EMBELIA CONCINNA BAKER (MYRSINACEAE)

Soutenue le 20 avril 2007 devant le jury compos de : M. M. M. Mme M. M. Antoine GASET Salvador CAIGUERAL Bernard BODO Isabelle FOURAST Claude MOULIS Kurt HOSTETTMANN Prsident Rapporteur Rapporteur Directeur de thse Directeur de thse Membre

A Domie A mes parents et mes frres Pierre-Emile, Louis et Vincent A mon mari Alex A mes amis et tous les membres de ma famille

Remerciements

Jai eu la chance et le plaisir deffectuer ce travail de recherche dans le Laboratoire de Pharmacognosie de la Facult de Pharmacie de Toulouse (UMR 152 IRD UPS - Pharmacochimie des Substances Naturelles et Pharmacophores Redox) sous la direction respective des professeurs Isabelle Fourast et Claude Moulis.

Tout dabord, je tiens particulirement remercier Madame le Professeur Isabelle Fourast pour mavoir accueilli au sein du Laboratoire de Pharmacognosie, pour mavoir fait confiance, mavoir encourag et conseill tout en me laissant une grande libert. Pour son soutien et sa grande gnrosit, quelle soit assure de ma profonde gratitude.

Je remercie sincrement Monsieur le professeur Claude Moulis, quil trouve ici lexpression de ma profonde reconnaissance tant pour mavoir accord sa confiance que pour mavoir guid dans mon travail tout au long de ces annes. Ses conseils et ses commentaires mais aussi sa bienveillance et son humour auront t fort utiles.

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Mes remerciements vont galement Monsieur le Professeur Antoine Gaset de lENSIACET de Toulouse davoir accept de prsider le jury de ma soutenance de thse.

Jaimerais galement remercier Monsieur le Professeur Bernard Bodo du Musum Nationnal dHistoire Naturelle de Paris ainsi que Monsieur le Professeur Salvador Caigueral de la Facult de Pharmacie de Barcelone pour avoir accept de faire partie de mon jury de thse, pour avoir accept den tre rapporteurs et surtout pour lintrt quils ont port mon travail. Jai apprci notre interaction et leurs remarques avises lors de ma soutenance de thse.

Jadresse galement mes remerciements Monsieur le Professeur Kurt Hostettmann de lUniversit de Lausanne pour avoir accept de juger ce travail.

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Cette thse est le fruit dune collaboration avec la division SERDEX des Laboratoires Bayer Consumer Care. Je tiens donc remercier Monsieur Grard Sen pour la confiance quil ma accorde en me confiant ce travail.

Mes remerciements vont galement Alain Loiseau pour son aide et pour les discussions enrichissantes qui ont contribues ce travail, ainsi qu Eric, Virginie, Caroline et tous les autres membres de lquipe pour mavoir trs fortement soutenu et impliqu dans leurs projets. Malgr lloignement gographique, je me suis toujours sentie intgre lquipe R & D.

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Je remercie tous ceux sans qui cette thse ne serait pas ce qu'elle est : aussi bien par les discussions que j'ai eu la chance d'avoir avec eux, leurs suggestions ou contributions.

Un trs grand merci Nicolas Fabre qui a jou un rle fondamental dans ma formation. Tout au long de ces trois annes, il a su maider orienter mes recherches. Je le remercie pour son amiti, son aide, sa confiance et ses conseils si prcieux tout le long de mon travail de thse.

Jadresse de sincres remerciements Monsieur le Professeur Edouard Stanislas pour sa bienveillance et sa gentillesse et ses encouragements.

Mes plus vifs remerciements pour leur accueil et leur disponibilit Cathy Claparols et Nathalie Martins du service commun de spectromtrie de masse de lUPS de Toulouse.

Merci aussi tous mes collgues et amis du laboratoire : ceux den haut Valrie et Fahtia, Lucia, Sverine, Alexis et Valrieet les autres, et tous ceux den bas Florence, Mohamed, Bndicte, Vincent, sans oublier mes super stagiaires Florian et Elose ! Merci tous pour leur amiti et pour leur aide prcieuse.

Je tiens enfin redire le plaisir que j'ai eu travailler au sein de lUMR 152, et j'en remercie ici tous les membres.

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Enfin, pour leur soutien sans faille et permanent, je tiens remercier de tout cur mes parents, mes frres et mes grands-parents ainsi quAlex pour son amour et sa comprhension.

Abrviations et symbolesLes abrviations ont gnralement t indiques sous la forme la plus couramment utilise dans la littrature, elles sont donc souvent issues de terminologie anglo-saxonne.

(1), (2), (3), 1-1, 1-2, 2-1, 2-2, []D A, B, C, AcOEt APCI

: dsignation des composs mentionns dans la partie bibliographique : dsignation des composs identifies par LC-MS dans Agauria polyphylla : dsignation des composs identifies par LC-MS dans Agauria salicifolia : pouvoir rotatoire : dsignation des composs naturels isols dans le prsent travail : actate dthyle : ionisation chimique pression atmosphrique (Atmospheric Pressure Chemical Ionization)

APG APY Ara ASA br s CC CCM CDCl3 c-Hex CI CID COSY CPC C H d Da DCI DCM dd ddd DMSO-d6 ECC EDL EI ESI EtOH

: Angiosperm Phylogeny Group : Agauria polyphylla Baker : arabinose : Agauria salicifolia Hook.f. ex Oliver : singulet largi (broad singulet) : Chromatographie sur Colonne ouverte : Chromatographie sur Couche Mince : chloroforme deutri : cyclohexane : ionisation chimique (Chemical Ionisation) : dissociation induite par collision (Collision Induced Dissociation) : COrrelated SpectroscopY : Chromatographie de Partage Centrifuge : dplacement chimique du carbone (en ppm) : dplacement chimique du proton (en ppm) : doublet : Dalton (unit de masse molculaire) : ionisation chimique par dsorption (Desorption Chemical Ionisation) : dichloromthane : doublet ddoubl : doublet ddoubl ddoubl : dimthylsulfoxyde deutri : Embelia concinna Baker : Equivalent de Double Liaison : ionisation par impact lectronique (Electron Impact ionization) : ionisation par lectrospray (ElectroSpray Ionization) : thanol

i

FAB FD Gal GC-MS

: ionisation par bombardement datomes rapides (Fast Atom Bombardment) : dsorption de champ (Field Desorption) : galactose : chromatographie en phase gazeuse couple la spectromtrie de masse (Gaz Chromatography-Mass Spectrometry)

Glc Gluc IT H2O HCCl3 Hex HMBC HPLC

: glucose : glucuronide : spectromtre trappe dions (Ion trap) : eau distille : chloroforme : hexane : Heteronuclear Multiple Bond Correlation : chromatographie liquide haute performance (High Performance Liquid Chromatography)

HSQC Hz J LC-MS

: Heteronuclear Single Quantum Coherence : Hertz : constante de couplage : chromatographie liquide haute performance couple la spectroscopie de masse (Liquid chromatography-Mass spectrometry)

LDL m m/z MeCN MeOH MeOH-d4 MPLC

: (Low Density Lipoprotein) : multiplet : masse / charge atomique : actonitrile : mthanol : mthanol ttradeutri (RMN) : chromatographie liquide moyenne pression (Medium Presure Liquid Chromatography)

MS NOESY ppm q q.s.p. Q-TOF RDA Rf Rha RMN RMN- H (Jmod) RMN- H ROS s semi-prep.1 13

: spectromtrie de masse (Mass Spectroscopy) : Nuclear Overhauser Enhancement SpectroscopY : partie par million : quintuplet : quantit suffisante pour : spectromtre hybride quadriples-temps de vol (Quadrupole-Time of flight) : Rtro Diels-Alder : rapport frontal (CCM) : rhamnose : rsonance magntique nuclaire : rsonance magntique nuclaire du carbone (en mode J modul) : rsonance magntique nuclaire du proton : drivs ractifs de loxygne (Reactive Oxygen Species) : singulet : semi-prparative (HPLC)ii

sh SiO2 spp t TQ Tol tR TTI u UV UV(DAD) V/V Xyl

: shoulder, dsigne un paulement sur un pic : silice : espces : triplet : spectromtre Triple Quadriples : tolune : temps de rtention : Tambourissa trichophylla Baker : unit de masse atomique : ultraviolet : dtecteur ultraviolet barrettes de diodes (Diode Array Detector) : rapport volume / volume : xylose

iii

iv

Table des matiresAbrviations Table des matires Introduction i v 1

I. SELECTION DES PLANTES DE LETUDE1. Critres de slection des plantes 1.1. Une origine gographique commune : Madagascar Les atouts de Madagascar. Des ressources prserver. 1.2. Utilisation des plantes en mdecine traditionnelle 1.3. Aspects botaniques et chimiotaxonomiques 1.4. Les apports de la littrature 2. Slection des extraits : criblage biologique

4 5 5 5 5 7 8 8 9

II. SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE1. Prsentation de Tambourissa trichophylla Baker (Monimiaceae) 1.1. La famille des Monimiaceae Juss. Position systmatique. Caractristiques botaniques des Monimiaceae. Utilisations traditionnelles des Monimiaceae. 1.2. Genre Tambourissa Sonn. et T. trichophylla Baker 1.3. Principaux mtabolites secondaires des Monimiaceae Alcalodes. Huiles essentielles. Flavonodes. Polyphnols au sens large. 1.4. Travaux antrieurs sur le genre Tambourissa 2. Prsentation dAgauria salicifolia Hook.f. ex Oliver et Agauria polyphylla Baker (Ericaceae) 2.1. La famille des Ericaceae Juss. Position systmatique. Caractristiques botaniques des Ericaceae. Utilisations traditionnelles des Ericaceae. 2.2. Genre Agauria Benth. & Hook.f. 2.3. Principaux mtabolites secondaires des Ericaceae Juss. Tanins. Flavonodes. Autres drivs phnols et htrosides phnoliques. Huiles essentielles. Diterpnes toxiques. Triterpnes. 2.4. Travaux antrieurs sur le genre Agauria 3. Prsentation dEmbelia concinna Baker (Myrsinaceae) 3.1. La famille des Myrsinaceae R. Brown

11 12 12 12 14 14 15 18 18 19 20 20 21 22 22 22 23 24 25 28 28 28 28 29 30 31 32 34 34v

Position systmatique. Caractristiques botaniques des Myrsinaceae. Utilisations traditionnelles des Myrsinaceae. 3.2. Genre Embelia Burm. f. et E. concinna Baker 3.3. Principaux mtabolites secondaires des Myrsinaceae Benzoquinones. Saponosides triterpniques et triterpnes sensu stricto. Autres substances. 3.4. Travaux antrieurs sur le genre Embelia 4. Flavonodes et spectromtrie de masse 4.1. Gnralits sur les flavonodes Chimie des flavonodes. Biosynthse des flavonodes. Classes de flavonodes. Distribution dans les plantes et le rgne vgtal. Rle dans les plantes. Importance dans lalimentation. Proprits chimiques et activits biologiques. 4.2. Analyse structurale des flavonodes par spectromtrie de masse 4.2.1. Les diffrentes techniques dionisation en spectromtrie de masse 4.2.2. Le couplage chromatographie-spectromtrie de masse 4.2.3. Elments didentification des flavonodes par spectromtrie de masse 4.2.3.1. Etude des gnines de flavonodes par MS Fragmentation de la gnine en mode positif. Fragmentation de la gnine en mode ngatif Flavonodes mthoxyls et autres substituants. 4.2.3.2. Apports de la MS ltude des flavonodes O-glycosyls Clivage htrolytique : formation des ions Yn. Clivage homolytique : formation du radical Y0. Position de la liaison osidique sur la gnine. Flavonodes di-O-glycosyls et O-diglycosyls. Flavonodes di-, tri-, tetra-glucosyls. Identification du sucre terminal. 4.2.4. Conclusion

34 34 35 36 38 38 38 39 41 43 43 43 43 44 45 46 46 46 49 49 50 50 51 52 54 56 57 57 57 58 59 61 61 61

III. RESULTATS1. Screening chimique gnral prliminaire par CCM 1.1. Interprtation des CCM prliminaires de Agauria salicifolia et Agauria polyphylla 1.2. Interprtation des CCM prliminaires de Tambourissa trichophylla 1.3. Interprtation des CCM prliminaires de Embelia concinna 2. Etude phytochimique des feuilles dAgauria polyphylla (APY) et dAgauria salicifolia (ASA) 2.1. Agauria polyphylla (APY) 2.1.1. Travaux prliminaires au fractionnement 2.1.2. Fractionnement de lextrait APY F3 et isolement des composs A C 2.2. Fractionnement de lextrait APY F2 et isolement du compos C 2.2.1. Dtermination de structure des composs A, B et C dAgauria polyphylla 2.2.1.1. Dtermination de structure du compos A

62 63 63 66 66 67 67 67 67 70 72 72vi

2.2.1.2. Dtermination de structure du compos B 2.2.1.3. Dtermination de structure du compos C 2.3. Agauria salicifolia (ASA) 2.3.1. Fractionnement de lextrait ASA F1 et isolement du compos D 2.3.2. Dtermination de structure du compos D dAgauria salicifolia 2.4. Comparaison des fractions flavonodiques dASA et dAPY par LC-MS 2.4.1. Obtention des fractions flavonodiques : sparation des tanins condenss par prcipitation 2.4.2. LC-MS compare des fractions flavonodiques de ASA et APY 2.4.2.1. Profil HPLC des deux fractions flavonodiques. 2.4.2.2. Identification des composs des fractions flavonodiques par LC-MS. 2.4.3. Conclusion 2.5. Conclusions de ltude phytochimique dAgauria salicifolia et Agauria polyphylla 3. Etude phytochimique des feuilles de Tambourissa trichophylla (TTI) 3.1. Fractionnement de lextrait TTI F3 et isolement des composs E, F et G 3.1.1. Dtermination de structures des composs E, F et G de Tambourissa trichophylla 3.1.1.1. Dtermination de structure du compos E 3.1.1.2. Dtermination de structure du compos F 3.1.1.3. Dtermination de structure du compos G 3.1.2. Fractionnement du lot pilote TTI PL002 et isolement du compos H 3.1.3. Dtermination de structure du compos H de Tambourissa trichophylla 3.2. Conclusion de ltude phytochimique de Tambourissa trichophylla 3.3. Mthode analytique de TTI 4. Etude phytochimique des feuilles dEmbelia concinna (ECC) 4.1. Fractionnement de lextrait ECC F3 et isolement des composs I S 4.2. Dtermination de structures des composs I L isols des sous-fractions apolaires de ECC F3 4.2.1. Dtermination de structure du compos I 4.2.2. Dtermination de structure du compos J 4.2.3. Dtermination de structure du compos K 4.3. Dtermination de structures des composs L et M par LC-MS. 4.4. Dtermination de structure du compos N 4.5. Dtermination de structures des composs O R isols des sous-fractions polaires de ECC F3 4.5.1. Dtermination de structure du compos O 4.5.2. Dtermination de structure du compos P 4.5.3. Dtermination de structure du compos Q 4.5.4. Dtermination de structure du compos R 4.6. Conclusion de ltude phytochimique de Embelia concinna

76 80 84 85 86 89 89 91 91 92 96 96 98 98 99 99 104 107 108 109 112 112 114 114 118 118 123 128 130 133 135 135 137 140 142 144

IV. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES V. MATERIELS ET METHODES1. Matriel vgtal et extraction 2. Mthodes chromatographiques analytiques 2.1. Chromatographie sur couche mince (CCM) Ractif la Vanilline sulfurique (Rvlateur polyvalent). Ractif de Neu ou NP/PEG (Rvlateur des flavonodes). Ractif de Dragendorff (Rvlateur dalcalodes).

145

150 151 152 152 153 153 153vii

Ractif au Thymol sulfurique (Ractif des sucres). Ractif au sel de Bleu solide B (pour la dtection des phnols et des tanins). Ractif de Liebermann et Burchard (Ractif des strols, strodes et triterpnes). 2.2. Chromatographie liquide haute performance (HPLC/DAD-UV) 2.3. Chromatographie liquide couple la spectromtrie de masse (LC-MS) 3. Mthodes chromatographiques prparatives 3.1. Chromatographie sur colonne ouverte (CC) 3.2. Chromatographie liquide moyenne pression (MPLC) 3.3. Chromatographie sur cartouches de silice C18 (VAC ELUT) 3.4. Chromatographie prparative sur couche mince 3.5. Chromatographie de partage centrifuge (CPC) 3.6. Chromatographie liquide haute performance semi-prparative (HPLC semi-prp.) 4. Mthodes physico-chimiques 4.1. Pouvoir rotatoire 4.2. Spectromtrie Ultraviolet (UV) 4.3. Spectromtrie Infra-rouge (IR) 4.4. Spectromtrie de masse (MS) 4.5. Spectromtrie de rsonance magntique nuclaire (RMN)

153 153 153 154 154 155 155 155 155 156 156 156 157 157 157 157 157 158

VI. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES VII. ANNEXESConstantes physiques et donnes spectrales des composs isols Publication et poster Lexique de botanique

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172 173 190 200

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Introduction

Au travers des ges, lhomme a pu compter sur la nature pour subvenir ses besoins de base : nourriture, abris, vtements et galement pour ses besoins mdicaux. Lutilisation thrapeutique des extraordinaires vertus des plantes pour le traitement de toutes les maladies de lhomme est trs ancienne et volue avec lhistoire de lhumanit. Bien quune grande partie du XXme sicle ait t consacre la mise au point de molcules de synthse, la recherche de nouveaux agents pharmacologiques actifs via le screening de sources naturelles a rsult dans la dcouverte dun grand nombre de mdicaments utiles qui commencent jouer un rle majeur dans le traitement de nombreuses maladies humaines [Gurib-Fakim, 2006]. Dan le monde, 80% des populations ont recours des plantes mdicinales pour se soigner, par manque daccs aux mdicaments prescrits par la mdecine moderne mais aussi parce que ces plantes ont souvent une relle efficacit. Aujourdhui, le savoir des tradipraticiens est de moins en moins transmis et tend disparatre. Cest pour cela que lethnobotanique et lethnopharmacologie semploient recenser, partout dans le monde, des plantes rputes actives et dont il appartient la recherche moderne de prciser les proprits et valider les usages [Pelt, 2001]. La recherche de nouvelles molcules doit tre entreprise au sein de la biodiversit vgtale en se servant de donnes ethnopharmacologiques. Cette approche permet de slectionner des plantes potentiellement actives et daugmenter significativement le nombre de dcouvertes de nouveaux actifs. Madagascar dispose dune grande diversit floristique laquelle sajoute une tradition sculaire dutilisation traditionnelle des plantes. Sappuyant sur ces deux aspects, la socit Serdex, division du groupe Bayer Health Care Consumer Care dveloppe, fabrique et commercialise des extraits de plantes actives provenant pour lessentiel de Madagascar, cibls pour les industries pharmaceutiques et cosmtiques. Ce travail, fruit dune collaboration entre Serdex et le Laboratoire de Pharmacochimie des Substances Naturelles et Pharmacophores Redox (UMR-152) de la Facult des Sciences Pharmaceutiques de Toulouse, sinscrit dans le cadre de la recherche de nouveaux composs qui peuvent trouver une application thrapeutique ou cosmtique. Ce mmoire est consacr ltude phytochimique de quatre plantes malgaches, Agauria salicifolia Hook.f. ex Oliver, Agauria polyphylla Baker, Tambourissa trichophylla Baker et Embelia concinna Baker issues du screening de plantes traditionnellement utilises Madagascar. Le but de cette tude consiste renforcer la connaissance phytochimique de ces extraits de plantes et mettre en vidence de traceurs spcifiques pour chacune des plantes en vue de lutilisation ultrieure de leurs extraits dans lindustrie.1

Dans un premier chapitre, nous aborderons les diffrents critres, de lutilisation en mdecine traditionnelle au criblage biologique, qui ont conduit et orient le choix des plantes de cette tude. Ltat des connaissances bibliographiques botaniques et phytochimiques sur ces quatre plantes et leurs familles botaniques respectives sera prsent dans un second chapitre. Nous dvelopperons galement lutilisation de la spectromtrie de masse comme outil danalyse pour lidentification de composs naturels frquemment utiliss comme traceurs dans les prparations base de plantes : les flavonodes. Le troisime chapitre sera consacr aux rsultats de ltude phytochimique de Agauria salicifolia Hook.f. ex Oliver, Agauria polyphylla Baker, Tambourissa trichophylla Baker et Embelia concinna Baker. Pour chaque plante, nous dtaillerons les tapes de fractionnement et dcrirons lidentification de composs isols. Nous prsenterons galement lapplication de la chromatographie liquide couple la spectromtrie de masse (LC-MS et LC-MSn ) la comparaison phytochimique des plantes Agauria salicifolia Hook.f. ex Oliver et Agauria polyphylla Baker. Enfin, nous utiliserons tous ces rsultats pour dfinir quels traceurs employer pour les extraits de ces plantes

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I. SELECTION DES PLANTES DE LETUDE

I. Slection des plantes de ltude

1. Critres de slection des plantesAfin disoler des substances nouvelles de plantes et de trouver de ce fait de nouvelles voies dapplications tant dans les domaines de la pharmacie que de la cosmtique et afin de rendre la stratgie disolement le plus efficace, il convient de slectionner avec soin les plantes tudier. Dans cette optique, un certain nombre de critres ont t pris en compte pour slectionner les plantes de cette tude.

1.1. Une origine gographique commune : MadagascarLes atouts de Madagascar. Lle de Madagascar, situe dans lOcan Indien, prsente tous les caractres dun petit continent dot dune nature extraordinairement varie. Sa flore prsente un intrt scientifique tout particulier en raison de sa diversit, de son anciennet et de sa trs grande richesse. La flore malgache actuelle est marque par la persistance de genres et despces trs archaques appartenant des familles seulement connues ltat de fossiles sur les autres continents. Lestimation du nombre total de taxons des plantes vasculaires de Madagascar varie de 10 000 12 000 espces selon les auteurs, rparties en 1 200 1 600 genres appartenant 200 familles environ et dont le niveau dendmisme est suprieur 80 % [Rajeriarison, 1996]. Ce taux dendmisme est dailleurs lev tous les niveaux taxonomiques, 8 familles sont considres comme tant entirement endmiques de lle. Tous ces facteurs contribuent faire de Madagascar une zone de choix pour la mise en lumire de nouvelles molcules. Les forts primaires et secondaires de lle (figure I 1) sont de vastes rservoirs despces qui peuvent fournir de nouveaux composs naturels aux chimistes et/ou qui sont le point de dpart pour le dveloppement de nouveaux mdicaments. Cette existence de matriel thrapeutique non dcouvert est une des raisons les plus importantes qui militent en faveur de la protection des forts tropicales et de la biodiversit en gnral. En travaillant sur des plantes endmiques, aux caractristiques potentiellement uniques, la probabilit est plus grande de trouver de nouvelles molcules (et ainsi de nouvelles voies thrapeutiques) largissant dautant la connaissance de la biodiversit de ce pays insulaire. Des ressources prserver. La socit Serdex, cre par les Laboratoires Laroche-Navarron et aujourdhui devenue division de Bayer Consumer Care, a, dans les annes 60 et sur proposition des Professeurs Ratsimamanga et Boiteau, mis sur le march des cicatrisants, les triterpnes de Centella asiatica sous le nom de Madcassol. Ds lors, une relation troite sest noue entre Serdex et Madagascar qui demeure ce jour.

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I. Slection des plantes de ltude

LEGENDE EST : 0 - 800 m Fort dense humide sempervirente Formation secondaire (savoka) Savane boise Savane Mosaque fort - cultures - plantations EST : 800 - 1 800 m Fort dense humide sempervirente Formation secondaire Savane Mosaque fort - savane et Eucalyptus SAMBIRANO : 0 - 800 m Fort dense humide sempervirente Formation secondaire Savane (boise ou non) Mosaque savane - cultures - fort secondaire HAUTES ALTITUDES : + 1 800 m Fort dense humide sempervirenteMORAMANGA

Fourr Philippia et savane daltitude OUEST : 800 - 1 800 m Fort sclrophylle basse dgrade Savane OUEST : 0 - 800 m Fort dense sche et formation secondaire Savane boise Savane Mangroves SUD : 0 300 m Fort dense sche Didieraceae et Euphorbiaceae Fourr dense sec Formation secondaire Savane Mosaque fourr - sol nu AUTRES Marcages et rizires Plantations

Figure I 1. Carte des formations vgtales de Madagascar.

Les objectifs de cette troite collaboration sont de valoriser la ressource vgtale pour la sauvegarder, de contribuer ainsi son exploitation dans le respect de la diversit des espces et de faire prendre conscience aux populations des risques encourus du fait de la dforestation (toujours en cours Madagascar bien que de nombreuses rsolutions internationales ou nationales aient t adoptes). Les plantes exploites Madagascar proviennent de rcoltes et de collectes effectues dans la nature. La rgnration naturelle qui assure la production narriverait pas faire face des prlvements irrationnels et non contrls. Lobjectif de Serdex est de contribuer prserver la ressource par une concertation troite avec les institutions malgaches et par une politique de prise en compte du6

I. Slection des plantes de ltude

dveloppement durable et du commerce quitable, contreparties indispensables la satisfaction des besoins industriels en plantes (qualitatifs et quantitatifs). Dans cette optique, des bonnes pratiques de collecte ont t dfinies et mises en place Madagascar par Serdex pour les acteurs locaux de la filire : les paysans collecteurs et Sotramex, la socit malgache qui centralise la collecte et ralise une partie des extraits de plantes. Ce contrat moral reposant sur lapplication des bonnes pratiques permet dassurer un revenu rgulier aux collecteurs, dveloppe un volet social en faveur des communauts locales (programme de scolarisation) et assure la prennit des ressources, principes fondamentaux du dveloppement durable. En outre, les plantes des programmes de recherche et dveloppement de Serdex proviennent des forts secondaires daltitude de lEst de lle, dans la rgion de Moramanga (Figure I 1), aucun prlvement nest effectu dans les forts primaires dj extrmement menaces.

1.2. Utilisation des plantes en mdecine traditionnelleDepuis 150 ans, les plantes mdicinales ont fourni la pharmacie des mdicaments trs efficaces. Aujourd'hui, de nombreux travaux mens dans le domaine de l'ethnopharmacologie, nous montrent que les plantes utilises en mdecine traditionnelle et qui ont t testes sont souvent d'une part, des plantes efficaces dans les modles pharmacologiques et d'autre part seraient quasiment dpourvues de toxicit [Gurib-Fakim, 2006]. Lethnobotanique et lethnopharmacologie mettent en relation les savoirs ancestraux des mdecins traditionnels et les connaissances scientifiques actuelles. Ce sont avant tout des domaines de recherche interdisciplinaire l'interface des sciences de l'Homme, comme l'ethnologie, l'histoire, la linguistique, et des sciences de la nature, comme la botanique, la pharmacologie, la pharmacognosie, la mdecine. Les informations de terrain recueillies auprs des populations (les vritables tradipraticiens ne subsistent plus que dans des zones recules) sont le reflet dune approche culturelle de la maladie qui, Madagascar comme dans dautres mdecines traditionnelles, est fonde sur la symptomatologie. Tel mlange de plantes est indiqu pour une douleur ou un symptme donn et non pour soigner une maladie. La traduction de ces donnes symptomatiques brutes en termes de mdecine tiologique est dlicate et le recours dun mdecin est souvent indispensable la caractrisation de la maladie. Le traitement varie selon le comportement du malade, ses dires, le rang social avec la prise en compte de son histoire familiale. De plus, le tryptique aliment-mdicament-poison rend difficile la catgorisation entre actifs et toxiques qui peuvent tre employs, dessein, simultanment. Il est galement ncessaire davoir lesprit que lutilisation mdicinale des plantes est souvent associe des concepts irrationnels qui font appel au mystique. La difficult vient ainsi de la ncessit de dceler, dans les mlanges traditionnellement employs, les plantes dont la prsence frquente fait penser quelles sont susceptibles de traiter un aspect donn de la maladie.

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I. Slection des plantes de ltude

L'ethnopharmacologie et lethnobotanique ont donc pour finalit la comprhension des pratiques et des reprsentations relatives la sant, la maladie, et la description, l'valuation thrapeutique des plantes utilises dans les pharmacopes traditionnelles. Lusage empirique des diffrentes prparations traditionnelles plantes est donc extrmement important pour une slection efficace de plantes puisque la plupart des mtabolites secondaires de plantes employes en mdecine moderne ont t dcouverts par lintermdiaire dinvestigations ethnobotaniques [Gurib-Fakim, 2006]. Les enqutes ethnobotaniques, menes de 1973 1990, en collaboration avec lInstitut Malgache de Recherches Appliques (IMRA) ont t effectues par linstauration de relations quotidiennes avec les populations, notamment dans les gradins Est de lle aux confins de la fort primaire daltitude et ont permis le recueil de nombreuses informations quant lemploi des ressources vgtales environnantes.

1.3. Aspects botaniques et chimiotaxonomiquesDans un second temps, la connaissance des plantes choisies au travers des enqutes ethnobotaniques peut tre enrichie par la connaissance botanique des espces cites. Les plantes appartenant aux mmes familles ou des familles voisines et/ou qui poussent dans les mmes biotopes sont susceptibles de synthtiser les mmes molcules chimiques. La chimiotaxonimie, ou classification des plantes en fonction des leurs mtabolites secondaires complte les classifications botaniques bases sur des critres morphologiques et molculaires (gntiques par exemple) [Grayer et al., 1999]. Elle permet, si des substances sont particulirement connues pour leur potentiel thrapeutique, de choisir des plantes chimiotaxonomiquement proches de celles dans laquelle la substance a t dtecte et tudie. Par ailleurs, connatre la raret ventuelle dune espce, son poque de floraison et sa disponibilit en terme de quantit peuvent galement constituer des critres de choix.

1.4. Les apports de la littratureLes critres que nous venons dvoquer ayant permis dtablir une liste prliminaire de plantes potentiellement intressantes, nous avons ralis une bibliographie dtaille des connaissances phytochimiques des espces et de leurs genres dappartenance. Dans loptique de la dcouverte de nouvelles molcules et/ou de nouvelles voies dapplication thrapeutiques (ou cosmtiques), il est plus judicieux de choisir des plantes qui ont t peu ou pas travailles chimiquement. Cependant, si la famille ou le genre a dj t tudi, il sera plus facile de trouver des procds analytiques, didentifier rapidement les composs dj connus et de trouver des

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I. Slection des plantes de ltude

traceurs qualitatifs et quantitatifs. Cela permet galement dliminer les genres et/ou les espces connues pour leur toxicit.

2. Slection des extraits : criblage biologiqueQuand les causalits des traitements, les principes thrapeutiques et en particulier les modes dutilisations traditionnels sont tablis, un protocole dtude pharmacologique peut tre mis en place. Les travaux de laboratoire, guids par les usages vernaculaires, ont pour double but de constater le bien-fond de lusage dune plante donne en dmontrant les effets biologiques par des techniques pharmacologiques et dorienter les travaux chimiques ultrieurs vers une certaine fraction chimique de la plante. Ainsi, pour cette tude, une recherche dactivit pralable sur une liste despces endmiques (tablie grce aux critres que nous avons voqus prcdemment) a t effectue, avec pour rsultat des rponses parfois diffrentes des usages recenss sur le terrain. En effet, il nexiste pas toujours de cible biologique correspondant exactement une allgation traditionnelle et de la mme manire, il peut en exister plusieurs. De plus, comme nous lavons vu prcdemment, la mdecine traditionnelle repose souvent sur des bases mystiques donc invrifiables. La collaboration entre Serdex et lIMRA a servi en partie ltude et la mise au point de mdicaments de substitution bas cot pour le march malgache, dvelopps, fabriqus et distribus dans un contexte conomique difficile. Il y a donc eu des retombes pratiques et locales rsultant des recherches effectues, en terme de sant publique. Le savoir a t, ce jour, largement restitu. Les criblages pharmacologique et biologique mens par Serdex ont permis, pour un certain nombre de plantes pr-slectionnes, de confirmer ou dinfirmer leur activit prsume et le cas chant, dindiquer quel est lextrait actif. Pour des raisons de confidentialits, les rsultats de ce criblage ne seront pas prsents ici.

Pour le prsent travail, en tenant compte de tous ces critres, nous avons slectionn trois plantes endmiques de Madagascar ayant un fort potentiel dactivit du fait de leurs usages traditionnels largement rpandus : Tambourissa trichophylla Baker (Monimiaceae), Agauria polyphylla Baker (Ericaceae) et Embelia concinna Baker (Myrsinaceae). Nous avons choisi dtudier une quatrime plante : Agauria salicifolia Hook.f ex Oliver bien que les tudes pharmacologiques menes par Serdex naient pas dmontr dactivit pour cette plante. En effet, comme nous le dvelopperons dans le chapitre suivant, une confusion botanique peut tre faite avec Agauria polyphylla et nous allons tenter de faire une distinction phytochimique entre ces espces.9

I. Slection des plantes de ltude

Une synthse des connaissances bibliographiques la fois botaniques et phytochimiques de ces plantes et des familles auxquelles elles appartiennent est prsente au chapitre suivant.

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II. SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

II. Synthse bibliographique

1. Prsentation de Tambourissa trichophylla Baker (Monimiaceae)1.1. La famille des Monimiaceae Juss.La famille des Monimiaceae est une famille de paloarbres dicotyldoniens de divergence ancienne comprenant environ 200 espces rparties dans 22 genres [Spichiger et al., 2000]. Ce sont de petits arbres, des arbustes, producteurs dhuiles essentielles, feuilles persistantes prsents dans les rgions sub-tropicales tropicales de lhmisphre sud, particulirement en Asie australe [Philipson, 1993].

Figure II 1. Rpartition mondiale des Monimiaceae selon Stevens [Stevens, 2001].

Position systmatique. Selon les classifications botaniques classiques pr-molculaires, les Monimiaceae sont des dicotyldones appartenant lordre des Laurales (Tableau II 1), ordre qui comprend galement les Amborellaceae, Trimeniaceae, Gomortegaceae, Calycanthaceae,

Idiospermaceae, Lauraceae et Hernandiaceae [Cronquist, 1988].

Tableau II 1. Taxonomie des Monimiaceae selon Cronquist [Cronquist, 1988]. Plantae, Tracheobionta (Plantes vasculaires) Embranchement : Spermatophyta (Plantes graines) Sous-Embranchement : Angiospermae (Plantes fleurs) Classe : Magnolopsida (Dycotyldones) Sous-classe : Magnoliideae Ordre : Laurales Famille : Monimiaceae

Parmi ces classifications bases essentiellement sur des critres morphologiques et anatomiques, celle de Cronquist est la plus utilise. Cependant, les apports rcents de la biologie molculaire, avec le dveloppement de la cladistique moderne ou de la systmatique molculaire base sur lanalyse des squences de gnes, ont boulevers les classifications usuelles et ont donn naissance en 1998 une nouvelle classification ordinale des plantes fleurs [APG, 1998]. La classification APG est la classification scientifique des angiospermes la plus rcente tablie selon les travaux dun groupe de chercheurs : the Angiosperm Phylogeny Group. Reflet d'un consensus sur les connaissances acquises12

II. Synthse bibliographique

lors de sa publication en 1998, cette classification a t rvise en 2003 [APG, 2003]1. Elle traduit les efforts faits en systmatique pour que les systmes de classification refltent au mieux la phylognie des familles mise en lumire par les avances constantes de la gntique [Spichiger et al., 2000]. Aujourdhui, lappartenance des Monimiaceae aux Laurales est indiscutablement admise (figure II 2). La classification infrafamiliale des Monimiaceae a fait lobjet de nombreuses investigations dans les annes 70 et au dbut des annes 80 avec les travaux de Phillipson [Philipson, 1993]. Certains taxonomistes prfraient alors mettre laccent sur la diversit des schmas floraux prsents dans la famille en la divisant en plusieurs petites familles, alors que dautres soulignaient la cohrence globale de la famille [Philipson, 1987]. Ce dernier point de vue en faveur de la reconnaissance des Monimiaceae comme une seule famille a finalement t adopt, choix justifi non seulement par la cohrence morphologique de la famille mais galement par les carts qui la sparent des autres familles des Laurales.

Figure II 2. Position systmatique des Monimiaceae selon lAngiosperm Phylogeny Group [Stevens, 2001].

En 1987, Phillipson rpartissait 32 genres de Monimiaceae en 6 sous-familles et 8 tribus (figure II 3). Cependant, ltude de la phylognie des Laurales par Renner, en 1999, partir de certaines squences de gnes, a tabli que les Monimiaceae taient clairement polyphyltiques si on y incluait les Atherospermatoideae et les Siparunoideae. Ces sous-familles ont donc t leves au rang de famille, respectivement les Atherospermataceae et les Siparunaceae (figure II 2) [Renner, 1999].

Cest pourquoi la classification de Cronquist est encore utilise comme rfrence dans de nombreux ouvrages dans un souci pragmatique de disposer doutils de classement stables pour permettre, entre autres, la communication entre botanistes.13

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II. Synthse bibliographique

Sous-famille 1. Hortonoideae Genre : Hortonia Sous-famille 2. Atherospermatoideae Tribu 1. Atherospermateae Genres : Aterosperma, Laureliopsis Tribu 2. Laurelieae Genres : Daphnandra, Dryadodaphne, Doryphora, Laurelia, Nemuaron Sous-famille 3. Siparunoideae Genre : Siparuna Sous-famille 4. Glossocalycoideae Genre : Glossocalyx

Sous-famille 5. Mollinedioideae Tribu 1. Hedycaryeae Genres : Tambourissa, Hedycarya, Levieria, Ephippiandra, Decarydedron Tribu 2. Mollinedieae Genres : Mollinedia, Kibara, Wilkiea, Matthaea, Keiroa Tribu 3. Hennecartieae Genre : Hennecartia Sous-famille 6. Monimioideae Tribu 1. Palmerieae Genre : Palmeria Tribu 2. Monimieae Genre : Monimia Tribu 3. Peumiaea Genre : Peumus

Figure II 3. Synopsis des sous-familles et tribus des Monimiaceae daprs Philipson [Philipson, 1987].

Caractristiques botaniques des Monimiaceae. Les Monimiaceae sont des arbres ou arbrisseaux, parfois grimpants, sempervirents, huiles essentielles et souvent accumulateurs daluminium. Les feuilles sont opposes, simples, marge dente ou entire et contiennent des cellules sphriques huile essentielle dans le limbe. Certaines ponctuations du limbe peuvent tre laticifres. Les branches sont souvent aplaties au niveau des nuds. Linflorescence peut tre axillaire (racmes) ou terminale (rarement une fleur solitaire). Les fleurs, de petite taille, sont actinomorphes, bisexues ou unisexues le plus souvent et prsentent un rceptacle gnralement trs dvelopp. Le prianthe est gnralement peu visible et compos de tpales spalodes ou ptalodes. Dans les fleurs mles, de nombreuses tamines sont arranges en spirale ou en verticille, les filaments courts peuvent tre nectarifres la base et les anthres sont dresses et dhiscence longitudinale ou valvulaire. Les fleurs femelles possdent de nombreux carpelles (jusqu plus de 2000) 1-ovuls, sessiles et libres ou insrs dans le rceptacle. Les fruits sont des drupes spares ou des aknes plumeux, soit inclus dans le rceptacle charnu et persistant, soit exposs par de nombreux modes de fendage. Les graines sont endosperme huileux [Maberley, 1987 ; Philipson, 1993]. Utilisations traditionnelles des Monimiaceae. De nombreux genres de cette famille produisent du bois de coupe ou du bois duvre dintrt local (genres Hedycarya, Doryphora, Peumus), dautres sont cultivs comme plantes ornementales (Peumus, Hedycarya, Siparuna). Certains genres ont des fruits comestibles (Peumus). Quelques espces produisent des huiles essentielles utilises localement en parfumerie. Lcorce de Peumus boldus Molina est utilise pour le tannage du cuir et la teinture des textiles [Watson et Dallwitz, 1992]. Certaines espces sont utilises localement par les tradipraticiens. En Amrique du Sud, Mollinedia brasilensis Schott ex Tul. est rpute pour tre un puissant antispasmodique et tre utile contre les crampes [Leito et al., 1999]. Peumus boldus est utilis comme cholagogue et cholrtique [Bruneton, 1999] et apparat dans de nombreuses pharmacopes. Les Monimiaceae sont des plantes considres comme toniques, stimulantes, digestives ou carminatives.14

II. Synthse bibliographique

1.2. Genre Tambourissa Sonn. et T. trichophylla BakerLe genre Tambourissa Sonn. est reprsent par environ 43 espces exclusivement distribues sur les les de louest de locan indien : Madagascar pour la plupart (26 spp.), aux Comores (5 spp.) et sur les les Mascareignes : lle Maurice (10 spp.) et lle de la Runion (2 spp.) [Lorence, 1985]. Ces espces montrent un fort degr dendmisme, chacune tant restreinte une le donne et frquemment un habitat donn sur lle en question. Dans ces zones gographiques, les Tambourissa sont occasionnellement prsents ou plus communs localement sur lensemble de la fort et du fourr sempervirents, humides et sub-humides de montagne depuis le niveau de la mer jusqu plus de 2 000 mtres daltitude [Lorence, 1985]. Les Tambourissa ont atteint le plus haut niveau de spcialisation de morphologie florale de toutes les Monimiaceae malgaches de la sous-famille des Mollinedioideae. Ces espces sont gnralement remarquables en raison de la particularit de leurs rceptacles floraux et de leurs fruits (reprsents figure II 4). On peut reconnatre ce genre ses fleurs femelles au rceptacle cupuliforme sphrique, aux carpelles enfouis dans le rceptacle et en particulier son grand rceptacle fructifre ligeux ligneux qui se fend pour rvler des fruits rouge-orange [Schatz, 2001].

Figure II 4. Fleurs et fruits de Tambourissa masoalensis ( gauche) et fruits de T. nicolliae ( droite) (source : site Internet du Missouri Botanical Garden).

Les Tambourissa (appels bois tambour ou bois de bombarde Madagascar et Maurice) sont utiliss comme bois de construction. A Madagascar, le tronc de Tambourissa religiosa A.DC., qui produit une gomme-rsine odorante, est utilis pour la fabrication de cercueils, qui, dit-on, empchent la putrfaction du corps. Les Tambourissa sont connus en Anjouan et sur lle de la Grande Comore pour lutilisation de leurs feuilles en infusion calmant et soulageant la douleur [Lorence, 1985].

Tambourissa trichophylla Baker est une espce endmique de Madagascar o elle a pour noms vernaculaires Amborahasa ou Ambura [Cavaco et Humbert, 1957]. Cette espce est dcrite dans la flore de Madagascar et des Comores.15

II. Synthse bibliographique

T. tambourissa Baker : Arbre de 5-12 m de haut ; jeunes rameaux densment tomenteux. Feuilles opposes, oblongues oblongues lancoles, de 8-20 cm de long et de 2.5-5.8 cm de large, brivement acumines au sommet, apex aigu, arrondies la base, dentes au tiers suprieur dents espaces, subcoriaces, poils pars au-dessus, densment tomenteuses en dessous, ptiole de 3 12 mm de long, pais, poilu (figures II 5 et II 6). Fleurs mles de 5-6 mm de diamtre, pdicelle de 5 mm de long, densment tomenteuses, solitaires ou en inflorescences racmiformes, axillaires ou terminales, de 1.5-3 cm de long ; bractes et bractoles ovales lancoles, de 5 mm de long, densment poilues ; rceptacle globuleux, densment poilu extrieurement, pais ; tamines nombreuses, plurisries ; anthres ovales, loges latrales, dhiscentes par une fente longitudinale ; filets larges, glabres, sessiles. Fleur femelle de 0.6 cm de diamtre, globuleuse, densment poilue, solitaire, brivement pdoncule, carpelles nombreux. Fruits globuleux, dprims, de 4.5 cm de diamtre, pricarpe coriace, renfermant de nombreuses drupes [Cavaco et Humbert, 1957].

Figure II 5. Feuilles de Tambourissa trichophylla (source : Laboratoires Bayer Consumer Care division Serdex).

La planche botanique de T. trichophylla tire de cette mme flore est prsente figure II 6.

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II. Synthse bibliographique

Figure II 6. Planche botanique de quelques espces du genre Tambourissa [Cavaco et Humbert, 1957].

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II. Synthse bibliographique

1.3. Principaux mtabolites secondaires des MonimiaceaeDans cette partie, nous aborderons la phytochimie des Monimiaceae au sens le plus rcent, c'est--dire en excluant les genres qui appartiennent dsormais aux Atherospermataceae et aux Siparunaceae. Alcalodes. Les alcalodes, de type benzylttrahydroisoquinoline, constituent une classe chimique importante de la famille des Monimiaceae. Les diffrents alcalodes de ce groupe sont caractristiques dun certain nombre de familles de lordre des Magnoliales (sensu Cronquist), des Laurales ou de Papaverales. Au sein des benzylttrahydroisoquinolines, les aporphinodes (proaporphines, aporphines, oxoaporphinodes et leurs drivs) forment le plus grand groupe dalcalodes isols des Monimiaceae [Hegnauer, 1990 ; Leito et al., 1999]. Il sagit dun vaste groupe de plus de 500 composs surtout frquents dans certaines familles assez archaques comme les Monimiaceae [Bruneton, 1999]. Le tableau II 2 recense une cinquantaine dalcalodes isols de la famille des Monimiaceae et la figure II 7 rassemble les structures de ces alcalodes.

Tableau II 2. Alcalodes isols de Monimiaceae daprs Leito [Leito et al., 1999 ; DNP, 2006].GenreHedycarya(H. angustifolia A.Cunn., H. baudounii Baill.)

Alcalodes

a

boldine (1), laurline (2), cinnamolaurine (3), isosvanine (4), calycotomine (5), hdycarine (6)

Laurelia(L. philipiana Looser, L. novaezelandiae A.Cunn, L.sempervirens Tul.)

4-hydroxyanonane, 4-hydroxynornantnine, 4-hydroxynornantnine, anonane (7), athroline (8), boldine, corydine (9), isoboldine , isolaurline, laurline, laurpukine, laurpukine-N-oxyde, laurolitsine , laurottanine, liriodnine, mcambroline (10), michelalbine, nantnine (11), norcorydine, norioscorydine, nornantnine, nornucifrine, norushinsunine, obabrine, obovanine, oxolaurline, oxonantnine, oxoputrine, oxyacantine, pukatine (12), pukatine-N-oxyde, pukatin-mthylther, rticuline (13), roemrine (14), romnine, secoisottrandrine, stpharine (15), talbugosine,4S-hydroxy-nornantnine, assimilobine

Mollinedia(M. costaricensis Donn.SM.)

mollindine (19)

Monimia(M. rotundifolia Thou.)

athroline, boldine, laurolitsine (16), laurottanine, N-mthyllaurottanine, norglaucine

Palmeria(P. arfakiana Becc. et A.C.Sm., P. gracilis Perkins)

laurottanine (17), laurolitsine, N-mthyllaurottanine

Peumus(P. boldus Molina)a

boldine, isoboldine, isocorydine, isocorydine-N-oxyde, laurolitsine, laurottanine, N-mthyllaurottanine, norisocorydine, rticuline, sinoacutine (18)

Les numros entre parenthses renvoient aux structures prsentes la figure II 7.

A lheure actuelle, seulement deux aporphines sont incluses dans des spcialits pharmaceutiques disponibles sur le march franais dont lune, la boldine (1) (figure II 7) est extraite des feuilles et de lcorce dune Monimiaceae : le boldo (Peumus boldus Molina) et entre dans la composition de

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II. Synthse bibliographique

spcialits proposes dans le traitement dappoint des troubles dyspepsiques et des brlures oesophagiennes. Lautre aporphine est un produit de synthse [Bruneton, 1999].R1 O R2 N O N R1 R2 N

O R3 O R4

O

O R3 O OH (8) O R4

(9) R1=Me, R2=H, R3=OMe, R4=H (1) R1=H, R2=Me, R3=H, R4=OH R O NH O

(3) R1=R2= -O-CH2-O-, R3=H, R4=H (13) R1=OMe, R2=OH, R3=Me, R4=OH

O N O R2 R3 O (12) R1=Me, R2=OH, R3=H (11) (7) R1=R2=R3=H (14) R1=Me, R2=R3=H N R1

O

O

O OH (16) R=H (17) R= Me

O

O (2) R1=Me, R2=H, R3=OMe O R1 N O HO (6) R1=Me, R2=H (5) R1=H, R2=Me R2 R1 R2 (19) R1=R2= -O-CH2-O(4) R1=OMe, R2=OH O N (10) R1=Me, R2=H, R3=OH

Figure II 7. Exemples daporphinodes extraits de Monimiaceae daprs Leito et Bruneton [Bruneton, 1999 ; Leito et al., 1999].

Huiles essentielles. La composition gnrale de lhuile essentielle des reprsentants de la famille des Monimiaceae est un mlange de terpnes et de drivs phnylpropanodes [Hegnauer, 1990 ; Leito et al., 1999]. Les principaux composants des huiles essentielles de quelques espces de Monimiaceae ont t recenss dans le tableau II 3 [DNP, 2006].

Tableau II 3. Composants des huiles essentielles de quelques espces de Monimiaceae [Hegnauer, 1969 ; Hegnauer, 1990 ; DNP, 2006]. EspcesHedycarya angustifolia A.Cunn Hedycarya arborea Forst. Kibara rigidifolia A.C.Sm. Sitostrol, stigmastrol, campestrol, hexacosan-1-ol -ocimne (formes Z et E), -copane, -caryophyllne, [Brophy et al., 2005] [Brophy et al., 1998]

Principaux constituants de lhuile essentielleElmol, hdycaryol, -eudesmol, -eudesmol, -eudesmol

Rfrences[Brophy et al., 2005]

19

II. Synthse bibliographiquearomadendrne, viridiflorne, bicyclogermacrne, germacrne B, guaiol, spathulnol, globulol, lmicine Laurelia philippiana Looser Laurelia sempervirens Tul. Levieria acuminata Perk. Cinole, linalool 3-(3,4-methylendioxyphenyl) propen-2-en-1-ol 3-carne, terpinolne, -cadinne, calamnne, viridiflorne, cadina1,4-dine, spathulnol, n-dodecanal, n-dodecanol, n-undecanal, tridcan-2-one Mollinedia gilgiana Perk., M.marliae Peixoto & V.Peireira Peumus boldus Molina Ascaridol, cinole, -fenchol, -pinne, -pinne, -terpinol, camphne, camphor, fenchne, -terpinne, limonne, linaloo, pcymne, p-cymol, terpinn-4-ol, terpinolne, eucalyptol Tambourissa leptophylla A.DC. Limonne, cis--bergamotne, -3-carne, curcumne, trans-bergamotne, -copane, -pinne, p-cymne, bicyclogermacrne [Gallori et al., 2001] [Kretmair, 1952] Phytol, sitostrol, stigmastrol [Claros et al., 2000] [Hegnauer, 1990] [Hegnauer, 1990] [Brophy et al., 1998]

Flavonodes. Les flavonodes dcrits ce jour pour les Monimiaceae sont quasiment toujours des flavonols, trs rarement des flavones, substitus par des groupements hydroxyles et/ou O-glycosyls, trs peu tant mthoxyls. Des gnines de type querctine, isorhamntine ont t isoles des feuilles de diffrentes espces de Monimiaceae mais il est intressant de noter la prsence marque de drivs du kaempfrol (20) dans les flavonodes de cette famille [Hegnauer, 1990].OH HO O

OH OH O

(20)

Polyphnols au sens large. Les composs phnoliques ont t peu dcrits dans la famille, on peut citer des drivs dacides cinnamiques comme le moupinamide (21) dcrits dans les bourgeons de Mollinedia gilgiana [Claros et al., 2000].O HO HN (21) O

OH

20

II. Synthse bibliographique

1.4. Travaux antrieurs sur le genre TambourissaLe genre Tambourissa est connu pour produire des huiles essentielles. Les travaux de Gallori et al. sur un extrait theroptrolique de tguments de fruits de T. leptophylla A.DC. ont permis didentifier une quarantaine de composs parmi lesquels le limonne (24 %) (29), bergamotne (23 %) (22), le -3carne (8 %) (23), le curcumne (6 %) (26), l-copane (4 %) (24), l-pinne (4 %) (28), le pcymne (4 %) (25) et le bicyclogermacrne (3 %) (27) sont les plus abondants (figure II 8). Cette huile essentielle sest rvle active in vitro contre le champignon microscopique pathogne responsable de la cladosporiose des Cucurbitaceae : Cladosporium cucumerinum [Gallori et al., 2001].

(22) bergamotne

(23) -3-carne

(24) -copane

(25) p-cymne

(26) -curcumne

(27) bicyclogermacrne

(28) -pinne

(29) limonne

Figure II 8. Constituants principaux de lhuile essentielle de T. leptophylla [Gallori et al., 2001].

A notre connaissance, il nexiste aucune donne sur lespce T. trichophylla.

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II. Synthse bibliographique

2. Prsentation de Agauria salicifolia Hook.f. ex Oliver et Agauria polyphylla Baker (Ericaceae)2.1. La famille des Ericaceae Juss.Grande famille cosmopolite reprsente par 124 genres (dont Arbutus (arbousier), Calluna (calune), Erica (bruyre), Rhododendron) et environ 4 100 espces [Maberley, 1987], les Ericaceae prdominent en Arctique, dans les rgions tempres et dans les montagnes tropicales et extratropicales du sud-est de lAsie et dAmrique avec une forte concentration dans lHimalaya, en Nouvelle-Guine et dans les Andes (figure II 9). En gnral, la plus grande densit ainsi que la plus grande diversit des Ericaceae se retrouve sous les climats mditerranens notamment en Australie et en Afrique du Sud [Stevens et al., 2004].

Figure II 9. Rpartition mondiale des Ericaceae selon Stevens [Stevens, 2001].

Ce sont souvent des plantes mycorhizes prfrant les sols pauvres et acides. Leur habitat est gnralement caractris par une faible disponibilit en nutriments, un faible taux de matires organiques et souvent une priode de scheresse [Stevens et al., 2004]. Position systmatique. Du point de vue des classifications systmatiques anciennes, la famille des Ericaceae fait partie des Dicotyldones et appartient lordre des Ericales (tableau II 4) [Cronquist, 1988].

Tableau II 4. Taxonomie des Ericaceae selon Cronquist [Cronquist, 1988]. Plantae, Tracheobionta Embranchement : Spermatophyta Sous-Embranchement : Angiospermae Classe : Magnolopsida Sous-classe : Dilleniideae Ordre : Ericales Famille : Ericaceae

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II. Synthse bibliographique

Bien que les limites de la famille des Ericaceae soient bien dfinies, il existe de nombreuses subdivisions en sous-familles et en tribus tablies en 1971 puis rvises par les travaux de Stevens en 2004 [Stevens, 1971 ; Stevens et al., 2004]. Les relations phylogntiques au sein des Ericaceae ont t tudies au moyen danalyses cladistiques bases sur la combinaison de caractres phnotypiques (morphologie, anatomie, nombre de chromosomes et mtabolites secondaires) et de caractres molculaires (squences de nuclotides) [Kron et al., 1986 ; Stevens et al., 2004]. Les Ericaceae se rpartissent en 8 sous-familles (figure II 10), elles-mmes subdivises en tribus.

Figure II 10. Position systmatique et classification infra-familiale des Ericaceae selon lAngiosperm Phylogeny Group [Stevens, 2001].

Caractristiques botaniques des Ericaceae. Famille de plantes sempervirentes ou caduques, les Ericaceae sont des arbustes, parfois trs petits ou subherbaces, des arbres (parfois pachycaules), plus rarement des lianes ou des piphytes. Les feuilles des Ericaceae sont alternes subopposes ou verticilles, entires ou dentes ou souvent en aiguilles appeles ricodes (adaptations des rgimes hydriques dfavorables). Elles sont penninerves et dpourvues de stipules. Linflorescence, trs variable, peut tre terminale ou axillaire, souvent racmeuse ou panicule, parfois rduite une fleur solitaire. Les fleurs, petites, sont actinomorphes pentamres et hermaphrodites. Le calice possde 4-523

II. Synthse bibliographique

spales plus ou moins souds la base ; il est parfois rduit un anneau ; il peut tre persistant et plus ou moins accrescent. Les ptales sont gnralement souds en tube. La corolle est campanule, en forme durne ou sphrique, aux lobes gnralement petits et distincts. Landroce, 8-10 tamines libres, est obdiplostmone par avortement, les filets sont libres et souds sur le rceptacle, les anthres sont dhiscence poricide, souvent avec appendices bicornes. Un disque nectarifre intrastaminal est parfois prsent. Lovaire est souvent supre. Le fruit est une petite baie charnue et indhiscente ou une capsule sche dhiscence loculicide parfois enferme dans une corolle persistante. La graine est trs petite, souvent aile albumen charnu [Maberley, 1987 ; Spichiger et al., 2000]. Utilisations traditionnelles des Ericaceae. Les reprsentants de la famille des Ericaceae produisant de nombreuses baies comestibles telles que la myrtille (Vaccinium myrtillus L.), la canneberge (V. macrocarpum Aiton, V. oxycoccos L.), lairelle rouge (V. vitis-idaea L.), larbouse (Arbutus unedo L.) qui peuvent tre cultives [Spichiger et al., 2000]. Dautres au contraire sont des poisons violents (genres Kalmia et Gaultheria). Des genres, comme Kalmia ou Rhododendron, contiennent des grayanotoxines (ou andromedotoxines) qui peuvent tre fatales ou causer des empoisonnements car elles peuvent passer dans le miel labor partir de ces plantes [Scott et al., 1971 ; Bruneton, 1999]). De nombreux genres et espces dEricaceae sont cultivs comme plantes ornementales (Rhododendron, Calluna, Erica). Il existe de nombreuses utilisations mineures despces dEricaceae, par exemple, les loupes de racines de bruyres (Erica arborea L. ou E. scoparia L.) sont utilise pour la fabrication de pipes [Watson et Dallwitz, 1992]. Il est galement fait mention de nombreuses utilisations dEricaceae dans les pharmacopes traditionnelles. Les infusions de feuilles de Rhododendron sect. Ledum, Vaccinium arctostaphylos L. et Gaultheria procumbens L. reprsentaient une importante source dacide salicylique avant sa production par synthse. On peut citer galement Arbutus unedo L., anti-diarrhique et antiinflammatoire, Calluna vulgaris (L.) Hull et Arctostaphylos uva-ursi Spreng, plantes astringentes et antiseptiques urinaires [Spichiger et al., 2000].

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II. Synthse bibliographique

2.2. Genre Agauria Benth. & Hook.f.Le genre Agauria appartient la plus grande sous-famille des Ericaceae : les Vaccinioideae et la tribu des Lyoniae (figure II 11) [Kron et al., 1999]. Agauria est un genre dAfrique tropicale trs reprsent Madagascar (de 3 10 espces selon les auteurs) et aux Mascareignes. Bien que de nombreuses espces et sous-espces aient t dcrites, certains auteurs ne reconnaissent quune seule espce variable sur le continent africain, ce grand polymorphisme tant encore plus marqu Madagascar [Schatz, 2001].

Sous-famille VIII. Vaccinoideae Tribu.1 Oxydendreae Genre : Oxydendrum Tribu. 2 Lyonieae Genres : Craibiodendron, Pieris, Agarista (dont Agarista sect. Agauria) Tribu 3. Andromedeae Genres : Andromeda, Zenobia Tribu 4. Gaultherieae Genre : Chamaedaphne

Figure II 11. Position systmatique du genre Agauria au sein des Vaccinioideae [Kron et al., 1999 ; Stevens et al., 2004].

Les espces du genre Agauria ont t incluses dans le genre Agarista, genre du Nouveau Monde en raison dimportantes similitudes de caractres morphologiques et anatomiques : cest un des rares exemples de division tropicale transatlantique chez les Angiospermes. En effet, Agarista, genre dune trentaine despces, est localis dans les rgions tropicales du continent sud-amricain et en particulier dans lest du Brsil. Les deux groupes Agauria et Agarista affectionnent les mmes types dhabitat : les zones de montagnes tropicales. Ceci explique la grande dispersion de Agauria sur le continent africain o la ceinture tropicale ne compte pas densemble montagneux continu [Stevens, 1970]. Kron et Judd, en 1997, dans une tude sur la cladistique de certains genres des Vaccinoideae, concluent que les groupes despces amricaines et africaines forment un unit phntique et phylogntique et doivent tre considrs comme un seul genre : Agarista. Les espces amricaines dAgarista sont places dans la section Agarista et les espces africaines dans la section Agauria [Kron et Judd, 1997]. On peut reconnatre le genre Agauria ses feuilles gnralement entires qui sont souvent glauques sur leur face infrieure et ses inflorescences en grappe portant des fleurs quelque peu charnues, blanches roses ou rouges [Schatz, 2001].

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II. Synthse bibliographique

Agauria salicifolia Hook.f. ex Oliver est une espce dAfrique centrale, dAfrique du sud et de Madagascar, rpandue dans les forts et prairies des hauts plateaux (1 300 - 3 000 m daltitude) (figure II 12). Cest un des bois pionniers des coules de lave. A Madagascar, cette espce a pour noms vernaculaires Angavodiana, Avogandia, Ankavodiana, Angavodianandrano, Aavodiana, Kavodia et Bois de rempart ou Bois de gale La Runion. Cette espce est dcrite dans la flore des Mascareignes : A. salicifolia Hook.f. ex Oliver : Arbuste ou arbre (souvent petit arbre tortueux) denviron 10-20 m de haut tiges ramifies et bourgeons foliaires de couleur rougetre. Lcorce est gristre fissure en long. Le bois de cur est rougetre. Les feuilles sont nervure principale saillante, trs denses au sommet des rameaux, les jeunes feuilles sont rougetres. Le limbe est coriace elliptique ou lancol, acumin au sommet, tomenteux ltat jeune. La marge foliaire est replie vers le dessous. Linflorescence est en grappe de fleurs en clochettes crme rouges, terminales ou axillaires pluriflores. Les fruits capsulaires portent de petites graines disperses par le vent [Bosser et al., 1981].

Figure II 12. Rameau fleuri dA. salicifolia (source : Site Internet de la banque de donnes Prelude : utilisation de plantes en mdecine traditionnelle vtrinaire et humaine en Afrique sub-saharienne).

Le trs grand polymorphisme de cette espce a t soulign par de nombreux botanistes lors de sa dcouverte aussi bien par H. Perrier de la Bthie Madagascar, que par Baker lle Maurice et par J. de Cordemoy la Runion [Bosser et al., 1981]. De nombreuses publications font tat dA. salicifolia var. salicifolia originaire de lle Maurice et qui y porte le nom de Bois cabri [Ewane-Nyambi et al., 1993b]. En Afrique centrale, la sve des feuilles coupes dA. salicifolia ou A. salicifolia var. salicifolia est applique sur les plaies causes par les scarifications. Les feuilles ont des proprits analgsiques. La plante est galement utilise comme insecticide et comme antidote contre les flches empoisonnes. Lcorce broye est additionne deau frache puis bue au Kenya par les Massa comme aide la26

II. Synthse bibliographique

digestion ou aprs un excs de viande [Burkill, 1994]. A Madagascar, la plante grille est rduite en poudre et applique sur les plaies ulcreuses [Boiteau et al., 1959]. Elle est galement utilise pour traiter la syphilis et les nvralgies. En usage externe, les feuilles sont galement utilises comme traitement contre la gale. Les feuilles sont mortellement toxiques pour les hommes et le btail, mme les feuilles mortes peuvent provoquer vomissements, convulsions, difficults respiratoires et comas. Les racines sont galement toxiques [Loriaux et al., 1973]. En 2005, Martinet et al. ont rapport le cas dun empoisonnement par A. salicifolia. Une femme qui avait consomm par erreur cette plante en infusion a t sujette des vomissements, une hypotension artrielle et une bradycardie et a guri en quelques heures sous surveillance mdicale [Martinet et al., 2005].

Agauria polyphylla Baker est une espce endmique de Madagascar. Cest un arbre commun de la rgion centrale o il est appel Angavodiana ou Angavodianantanety (figure II 13).

Figure II 13. Agauria polyphylla (source : Laboratoires Bayer Consumer Care division Serdex)

La description botanique de cette espce se trouvant dans un volume non dit de la Flore de Madagascar et des Comores nest pas disponible. Certains botanistes considrent A. polyphylla comme une simple forme adapte la savane et aux milieux arides dA. salicifolia [Loriaux et al., 1973]. Comme celles dA. salicifolia, les feuilles de A. polyphylla sont utilises contre les ruptions et en cas de gale, on les utilise galement pour le traitement de rhumatismes et pour soigner les plaies. La plante provoque des accidents mortels sur le btail qui en consomme les feuilles [Boiteau, 1986]. Cette plante fournit un bois de construction de qualit mdiocre, utilis dans la fabrication de charbon de bois.

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II. Synthse bibliographique

2.3. Principaux mtabolites secondaires des Ericaceae Juss.Tanins. Les tanins sont des constituants abondants des Ericaceae. Les reprsentants de cette famille produisent des tanins galliques, des tanins ellagiques et des tanins condenss et ce, essentiellement dans les feuilles. On connat peu de choses sur les structures exactes des tanins des Ericaceae cependant de nombreux lments constitutifs des tanins (ainsi que leurs polymres) ont t isols. Le plus rpandu est lacide gallique (30) mais on peut galement citer lacide o-protocatchique (31), lacide gentisinique (32) et le sparassol (33) ainsi que la catchine et lpicatchine parmi les plus rpandus (figure II 14) [Hegnauer, 1966 ; Hegnauer, 1989].O OH COOH OH HO OH OH O O O COOH

HO OH

OH

OH

(30) acide gallique

(31) acide o-protocatchique

(32) acide gentisique

(33) sparassol

Figure II 14. Structures de base des tanins des Ericaceae.

Flavonodes. Les composs flavonodiques sont largement rpandus dans les feuilles et les fleurs dEricaceae. Ce sont surtout des flavonols, drivs O-glycosyls de querctine (34) mais aussi de kaempfrol et de myrictine. Quelques genres (Pieris, Kalmia) produisent des flavanones et des dihydrochalcones la place des flavonols ((39) (42)). Les pigments rouges et bleus des fleurs et fruits dEricaceae sont des anthocyanes et des flavanones. Ils ont t principalement tudis dans le genre Rhododendron dont deux flavones sont caractristiques : lazaline (37) et la 5-hydroxyazaline (figure II 15) [Hegnauer, 1966]. Autres drivs phnols et htrosides phnoliques. Certains htrosides phnoliques sont caractristiques des Ericaceae (figure II 16). On peut citer les drivs de diphnols qui sont reprsents par larbutine (48) et ses drivs, mthylarbutine (49), homoarbutine (50) et pyroside (51). Les feuilles de busserole (Arctostaphylos uva-ursi Spreng) contiennent 6-10 % darbutine qui, par hydrolyse, libre un diphnol qui soxyde immdiatement en hydroquinone. Cette plante, cite dans la Pharmacope europenne est utilise pour le traitement des infections des voies urinaires [Bruneton, 1999]. Les genres Chimaphila et Rhododendron sont connus pour produire, en plus de larbutine, des composs caractristiques : la pyrolatine (52) et la chimaphiline (53) (figure II 16). Dautres htrosides phnoliques, comme le monotropitoside (54) (ou gaulthrine) ont t caractriss dans les genres Gaultheria ou Monotropa. Le genre Rhododendron produit des drivs phnoliques (par exemple le rhododendrol (55)) qui sont le plus souvent monoglycosyls ; cest le cas de la

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II. Synthse bibliographique

rhododendrine (56). Quelques lignanes dont le lyonoside (57) ont t identifis dans le genre Lyonia [Hegnauer, 1989].OH HO O

R1 = R2 = OH : Querctine (34) R1 = OH, R2 = O-galactose : Hyproside (35) R1 = OH, R2 = O-glucuronide : Miqulianine (36)R HO O

OH

OH R2

OH

R1

O

R = O-Rhamnose : Astilbine (38)

R1 = O-Me, R2 = O-rhamnose : Azaline (37)

OH

O

OH O OH

R1 = H, R2 = OH : Phlortine (39) R1 = Me, R2 = OH : Asebognine (40) R1 = Me, R2 = O-glucose : Asbotine (41)HO O OR1

R1

R1 = H : Farrerol (43) R1 = CH3 : Matteucinol (44)

R2

O R1 OH

R1 = OH, R2 = O-glucose : Phlorizine (42)OH O

R1 = R2 = R3 = R4 = OH : Delphinidine (45) R1 = O-Me, R2 = R3 = R4 = OH : Ptunidine (46) R1 = O-Me, R2 = O-Me, R3 = R4 = Glucose : Malvine (47)

HO

O

R2 R4

R3

Figure II 15. Flavonodes communs isols des Ericaceae daprs [Hegnauer, 1966]

OMe CH2OR O O OH OH OH OR Me OH

OMe

R O-Glu

(48) R = H : Arbutine (51) R = Ac : Pyroside

R = H : Mthylhydroquinone (49) R = Glu : Mthylarbutine

(50) R = H : Homoarbutine

OH COOCH3 OR OR O O

(58) R = H : Salicilate de Mthyle (54) R = Xyl -Glu : Monotropitoside

(55) R = H : Rhododendrol (56) R = Glu : Rhododendrine

(53) Chimaphiline

OH O O O OH Xyl HO Glu

HO

O OH

O

O

(57) Lyonoside

(52) Pyrolatine

Figure II 16. Htrosides phnoliques et drivs quinoniques caractristiques des Ericeceae daprs Hegnauer [Hegnauer, 1989].

Huiles essentielles. Le genre des Ericaceae le plus tudi pour son huile essentielle est le genre Ledum avec pour composants majoritaires le pinne (28), le bornol (59), l-phellandrne (60), l29

II. Synthse bibliographique

caryophyllne (61) et le carvacrol (62) [Hegnauer, 1966] (figure II 17). Le salicylate de mthyle (58) est le composant principal de lessence de Wintergreen, huile essentielle obtenue dun arbuste nordamricain, Gaultheria procumbens L., dans laquelle il existe sous la forme de monotropitoside (figure II 16) [Bruneton, 1999].

HO OH

bornol (59)

-phellandrne (60)

-caryophyllne (61)

carvacrol (62)

Figure II 17. Composants majoritaires des huiles essentielles du genre Ledum [Hegnauer, 1966].

Diterpnes toxiques. Des diterpnes ont t isols en trs grand nombre dans certains genres Rhododendron, Lyonia, Leucothoe, Pieris et Agauria et leur confrent leurs proprits toxiques. Quelques exemples de ces diterpnes dEricaceae sont prsents figure II 18 [Hegnauer, 1966 ; Hegnauer, 1989]. Ces molcules, prsentes dans le pollen des fleurs de Rhododendron et Kalmia par exemple, peuvent passer dans le miel labor partir de ces plantes et sont lorigine de nombreuses intoxications notamment en Turquie [Scott et al., 1971 ; Bruneton, 1999].OH O OH HO OH O OH OH OH OH OH HO grayanotoxine XIX (65) O OH OH HO OH OH HO

leucothol A (63)

piristoxine G (64)

grayanol A (71)

HO HO HO HO O HO grayanotoxine XV (66) O HO HO HO O OH O HO HO O rhodojaponine VII (70) lyoniol B (73) O OH OH OH OH OH HO OH OH OH OH O O O Asebotoxine V (68) OH OH O HO rhodomoside (69) OH Glu O OH OHOH

kalmanol (67)

Figure II 18. Quelque exemples de molcules diterpniques isoles dEricaceae daprs Hegnauer [Hegnauer, 1966 ; Hegnauer, 1989].

30

II. Synthse bibliographique

Triterpnes. Lacide ursolique (74), le taraxrol (75), la -amyrine (76), le -sitostrol (77), la friedline (78) et le lupol (79) sont les triterpnes les plus frquemment cits dans la littrature pour les Ericaceae (figure II 19). Lacide ursolique, considr comme caractristique des Ericaceae, a ensuite t dcouvert dans de nombreuses autres familles [Hegnauer, 1966].

OH O O friedline (78) HO HO

acide ursolique (74)

-amyrine (76)

HO

taraxrol (75)

HO

lupol (79)

HO

-sitostrol (77)

Figure II 19. Triterpnes frquents dans les Ericaceae daprs Hegnauer [Hegnauer, 1966 ; Hegnauer, 1989].

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II. Synthse bibliographique

2.4. Travaux antrieurs sur le genre AgauriaLes travaux de Sosa et Dussy, en 1951, sur Agauria salicifolia, ont permis de montrer que les feuilles et lcorce contiennent dabondantes quantits de tanins catchiques et disoler des extraits alcooliques dcorce huit substances triterpniques que ces auteurs ont nommes : agaurol A, agaurol B, agaurol C, agaurol D, agaurol , agaurol , agaurilol et acide agauriolique [Dussy et Sosa, 1951]. Lidentification de lpoque navait abouti qu des hypothses quant la formule brute de ces composs. Ils montrrent un peu plus tard que lacide agauriolique est en fait lacide morolique (80) [Sosa et Dussy, 1951]. En 1959, Boiteau et al. ont tudi A. salicifolia et plus particulirement une forme considre comme la plus toxique de cette espce pour en trouver le principe actif toxique. En effet laction curarisante de cet arbuste a t mise en vidence en 1911 par Radais et Sartory par injection intra pritonale dextrait alcoolique des rats leur provoquant une paralysie complte du train postrieur, des tremblements et convulsions et une dyspne intense prcdant la mort. Boiteau et al. ont ainsi isol de lacide actylmorolique (81) et les agauriols et agaurols prcdemment isols ainsi quun acide triterpnique dicarboxylique nomm acide agaurique et dont lagaurate double de glucose et de sodium serait responsable de laction curarisante dA. salicifolia [Boiteau et al., 1959]. En 1973, Loriaux et al. ont isol et identifi, des feuilles de Agauria polyphylla cette fois, trois diterpnes : les grayanotoxine I (82), grayanotoxine II (83) et grayanotoxine III (84). Pour ces auteurs, ces composs sont responsables de la toxicit de cette plante et leur teneur est infrieur 50 mg/kg de feuilles sches [Loriaux et al., 1973]. Grgoire et Nyembo ont ensuite contribu ltude de lespce variable A. salicifolia en tudiant un lot dA. salicifolia var. salicifolia du Zare. Des extraits dcorces sches, ils ont isol des triterpnes qui sont lacide actyl-3-morolique (85), le -sitostrol (77), lactyl-3-moradiol (86), le taraxrol (75), lagauriastrone (87), la taraxrone (88) et lactyl-4-moraldhyde (89). Ces auteurs mentionnent quils nont pas retrouv les substances inconnues qui accompagnaient lacide actyl-3morolique dans les prcdentes tudes sur A. salicifolia [Grgoire et Nyembo, 1977]. Comme les grayanotoxines taient prsumes responsables des effets curarisants des Agauria, EwaneNyambi et al. ont tudi les effets dextraits de feuilles dA. salicifolia sur la permabilit au sodium de cellules isoles de muscles squelettiques et cardiaques de grenouilles. Ils ont montr que lextrait exerce un effet antagoniste sur les canaux sodium en agissant sur un seul site qui est diffrent du site habituel dinhibition [Ewane-Nyambi et al., 1993b ; Ewane-Nyambi et Raymond, 1993]. Cet effet inhibiteur ne serait pas d aux seules grayanotoxines [Ewane-Nyambi et al., 1993a].

32

II. Synthse bibliographique

OH O R R=OH : acide morolique (80) R= OAc : acide 3-actylmorolique (85) O O

R

R=OH : 3-actylmoradiol (86)

O agauriastrone (87)

R=CHO : 3-actylmoraldhyde (89)

OH HO3 14

OH HO HO

HO HO O taraxrone (88)

6

OAc

OH

HO HO

OH

OH

HO HO

OH

OH

grayanotoxine I (82)

grayanotoxine II (83)

grayanotoxine III (84)

Figure II 20. Molcules isoles du genre Agauria [Boiteau et al., 1959 ; Loriaux et al., 1973 ; Grgoire et Nyembo, 1977].

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II. Synthse bibliographique

3. Prsentation de Embelia concinna Baker (Myrsinaceae)3.1. La famille des Myrsinaceae R. BrownFamille comprenant environ un millier despces [Perrier de la Bthie et Humbert, 1953], les Myrsinaceae ont une distribution mondiale stendant au nord jusquau Japon, au Mexique et au nord de la Floride et au sud jusquen Afrique du Sud et en Nouvelle Zlande [Watson et Dallwitz, 1992]. Les genres herbacs sont distribus principalement dans les rgions tempres (chaudes) alors que les genres arborescents ou ligneux sont essentiellement tropicaux. Les genres principaux, Ardisia et Rapanea sont pantropicaux, occupant tant les basses terres que les zones montagneuses [Stahl et Anderberg, 2004]. Position systmatique. Les trois familles Theophrastaceae, Primulaceae et, la plus grande des trois, Myrsinaceae, gnralement traites comme appartenant aux Primulales dans les classifications anciennes (tableau II 5) forment un petit groupe reclass dans lordre des Ericales, un des principaux clade de la sous-classe des Asteridae [APG, 1998] (voir figure II 10 page 23). Ces familles sont considres comme formant un groupe monophyltique par les analyses cladistiques morphologiques ainsi quau niveau des donnes molculaires mais un ralignement taxonomique au sein de ce groupe a t men par Kallersjo et al. en 2000. Les interrelations phylogntiques de Primulaceae, Myrsinaceae et Theophrastaceae ont t tudies au travers des squences de gnes chloroplastiques. Il en a rsult llvation du genre Maesa (anciennement appartenant aux Myrsinaceae) au rang de famille : les Maesaceae et de nombreux transferts pour rendre les familles monophyltiques (les genres Lysimachia, Anagallis, Glaux, Asterolinon, Coris, Ardisiandra et Cyclamen et Pelletiera ont t dplacs chez les Myrsinaceae) [Kallersjo et al., 2000]. La dlimitation actuelle des Myrsinaceae est due Stahl et Andenberg : les Myrsinaceae comptent un millier despces rparties dans 49 genres sans autre subdivision infrafamiliale [Stahl et Anderberg, 2004].

Tableau II 5. Taxonomie des Myrsinaceae selon Cronquist [Cronquist, 1988]. Plantae, Tracheobionta Embranchement : Spermatophyta Sous-Embranchement : Angiospermae Classe : Magnolopsida Sous-classe : Dilleniideae Ordre : Primulales Famille : Myrsinaceae

Caractristiques botaniques des Myrsinaceae. Les Myrsinaceae sont des arbres ou arbustes, parfois grimpants, presque toujours feuillage persistant (certains genres peuvent tre herbacs). Les34

II. Synthse bibliographique

fleurs et les feuilles ont un aspect charnu et brillant. Les feuilles sont alternes, simples, entires ou dentes, coriaces, sans stipules et souvent groupes au sommet du rameau. Le limbe est marqu de cellules scrtrices (poches schyzognes) plus ou moins apparentes en forme de petits btonnets ou de ponctuations glanduleuses obscures (linoles) galement prsentes sur les autres organes. Linflorescence peut tre cymeuse, racmeuse ou panicule, parfois ramiflore. La fleur, gamoptale, ttra- ou pentamre, est actinomorphe, hypogyne, bisexue. Ses spales sont plus ou moins souds et les ptales, souds en entonnoir ou libres. Landroce est isostmone opposiptale, les tamines filets courts sont plus ou moins unies la corolle, parfois souds en tube ; les anthres sont souvent sagittes et connes et dhiscence introrse, longitudinale ou plus rarement par pores apicaux. Lovaire supre est uniloculaire et prsente de nombreux ovules. Le fruit peut tre une baie ou une drupe avec gnralement une petite graine noire albumen huileux [Perrier de la Bthie et Humbert, 1953 ; Spichiger et al., 2000]. Utilisations traditionnelles des Myrsinaceae. Certains genres de Myrsinaceae (Ardisia ou Cyclamen) sont cultivs comme plantes ornementales. Le feuillage persistant de certaines espces dArdisia est apprci au Japon o de nombreux cultivars ont t mis au point [Kobayashi et de Mejia, 2005]. Certaines espces de Myrsinaceae sont comestibles (baies de Ardisia elliptica Thunb. ou A. macrocarpa Wall.) mais cest surtout pour ses applications mdicales que cette famille est connue. En Inde et en Afrique, les Myrsinaceae sont largement utilises en mdecine traditionnelle en tant que remdes anthelminthiques et antibactriens [Ogweno Midiwo et al., 2002]). Plus sporadiquement, leurs proprits mdicales traditionnelles incluent le traitement de diarrhes, de cancers, dhpatites, de rhumatismes, de la tuberculose, des dmences ou de certaines affections virales [Burkill, 1994].

35

II. Synthse bibliographique

3.2. Genre Embelia Burm. f. et E. concinna BakerLe genre Embelia Burm. f. comprend une trentaine despces dont laire stend de lAfrique au Pacifique. Les 8 espces prsentes Madagascar sont toutes endmiques [Perrier de la Bthie et Humbert, 1953]. Les Embelia sont utilises par lhomme en mdecine traditionnelle. Embelia ribes Burm.f. est connue en mdecine ayurvdique ancienne pour ses proprits contraceptives [Chaudhury et al., 2001 ; Kumara Swamy et al., 2007]. Les fruits de cette plante ont galement des proprits carminatives, stomachiques, anti-diarrhiques et anthelminthiques [Prashanth et al., 2001]. Cette dernire proprit est partage par de nombreuses espces dEmbelia. Les fruits de E. schimperi Vatke constituent lanthelminthique le plus populaire dAfrique de lEst et dAfrique centrale, en particulier contre le tnia. Plante traditionnellement employe par les Massa de Tanzanie et du Kenya [Boegh et al., 1996], on la trouve dsormais facilement sur les marchs. Les activits biologiques de cette plante, confirmes par de nombreuses tudes, ont t recenses par Machocho et al. [Machocho et al., 2003]. Dautres espces comme E. guineensis Baker ou E. rowlandii Gilg, semblent partager les mmes applications et sont des succdanes dE. schimperi dans de nombreuses pharmacopes traditionnelles [Burkill, 1994]. E. angustifolia A.DC. est utilise La Runion dans le traitement traditionnel des dsordres urinaires, des nphrites, des cystites et des rhumatismes [Lund et al., 1997].

Embelia concinna Baker est endmique de Madagascar (figure II 21) o elle porte les noms de Tanterakala, Takasina, Kasiana, ou encore Sirahazo. La plante est commune dans les forts de cimes entre 1 200 et 2 000 m daltitude et fleurit doctobre janvier.

Figure II 21. Rameau fleuri de Embelia concinna (source : site internet de la Facult de Pharmacie de Greifswald).

La description botanique dE. concinna se trouve dans la Flore de Madagascar et des Comores.36

II. Synthse bibliographique

E. concinna Baker : Lianes toujours vertes, parfois, dans les lieux dnuds, arbustes rameaux plus ou moins sarmenteux (pyromorphose). Feuilles nombreuses, densment disposes, coriaces, dun brun sombre en herbier, ptiole grle (2-8 cm) ; limbe elliptique ou lancol (1.6-3.5 x 0.8-1.5 cm) ; par transparence, ltat adulte opaque, ltat jeune trs petits points rouges irrguliers sur fond rougetre et trame peu visible de rseau hyroglyphorme . Panicule terminal plus ou moins ramifi, de 1 5 cm de long ; axe et pdicelles portant des poils bruns et courts ; bractes troites, galant le tiers ou les deux tiers des pdicelles ; pdicelles de 2-3 mm de long ; petites fleurs (2.5 mm de long) quadra ou pentamres. Spales triangulaires aigus, de moins de 1 mm, portant quelques poils lextrieur, manifestement cilis, avec, au milieu, 4-5 points peu visibles. Ptales obovales, troitement obtus, papilleux, obscurment ponctue au milieu. Etamines plus courtes que les ptales ; anthres dorsalement ponctues. Ovaire glabre, ovode ; style cylindrique, de 1 mm ; stigmate discode, presque deux fois plus large que le sommet du style [Perrier de la Bthie et Humbert, 1953].

Figure II 22. Feuilles de Embelia concinna (source : Laboratoires Bayer Consumer Care division Serdex).

Deux sous-espces sont galement prsentes Madagascar : E. concinna var sclerophylla H. Perrier diffrant par des feuilles encore plus coriaces et des inflorescences en grappe simple et E. concinna var ericophila H. Perrier, forme altitudinaire feuilles trs petites [Perrier de la Bthie et Humbert, 1953]. E. concinna possde des proprits anthelminthiques, tnifuges et antihmorragiques

traditionnellement utilises par les populations malgaches [Heitz et Billet, 1973].

37

II. Synthse bibliographique

3.3. Principaux mtabolites secondaires des MyrsinaceaeLes benzoquinones de type embline et les saponosides constituent les caractristiques phytochimiques de la famille de Myrsinaceae. Benzoquinones. Les benzoquinones constituent un trait caractristique de la famille des Myrsinaceae. Parmi les plus frquemment rencontres (voir figure II 23), citons lembline (90), la rapanone (91) et la vilangine (92) que lon retrouve quasi systmatiquement dans les genres les plus tudis : Ardisia, Rapanea, Myrsine, Aegiceras et Embelia. Ces composs sont prsents dans les feuilles, lcorce, mais surtout dans les fruits et le bois des Myrsinaceae [Hegnauer, 1969]. Les benzoquinones sont des composs anti-apptants, antimicrobiens, acaricides, insecticides et nmaticides et sont souvent les principes actifs des Myrsinaceae qui prsentent ce type dactivits. Lembline est souvent considre comme le principe actif des espces anthelminthique [Ogweno Midiwo et al., 2002]. Certains genres (Rapanea, Ardisia) peuvent galement renfermer des alkyl-rsorcinols ou des alkenylrsorcinols qui sont probablement des prcurseurs des benzoquinones [Hegnauer, 1990 ; Kozubek et Tyman, 1999].O OH HO O O OH O OH

HO O Embline (90)

(CH2)10 O

OH HO O Vilangine (92)

(CH2)10

HO O

(CH2)n

(91) Rapanone, n=12 (93) Homorapanone, n=14

O O O O (94) Ardisianone, n=13 O (CH2)n O

OAc O OAc (CH2)13 OH (96) Ardisianol HO O (97) Ardisiaquinone (CH2)7 O (CH2)7 HO

O

O O

(95 Cornudentatone, n=11

OH

OH

HO

(CH2)7

(CH2)5

HO (99) Ardisine

(98) Alkenylresorcinol (Rapanea)

Figure II 23. Quelques exemples de benzoquinones et alkenylrsorcinols isols de Myrsinaceae [Hegnauer, 1969 ; Hegnauer, 1990].

Saponosides triterpniques et triterpnes sensu stricto. Comme les autres familles appartenant anciennement aux Primulales, la plupart des Myrsinaceae produisent des saponosides au niveau des racines, des branches, des feuilles et des graines [Stahl et Anderberg, 2004].38

II. Synthse bibliographique

Plus dune centaine de composs de ce type ont t extraits des genres les plus tudis des Myrsinaceae : Ardisia, Myrsine, Rapanea et Embelia [DNP, 2006]. Quelques exemples de triterpnes (qui peuvent se trouver sous forme libre ou en tant que gnines des saponosides) et de saponosides, isols despces de Myrsinaceae, sont prsents sur la figure II 24.

CHO O OH O OH HO (100) agiceradinol HO (101) acide chinocystique HO (102) ardisiogenine (Ardisia) OH

OH O O HO (103) agicrine OHC O (107) ardisiacrispine A, R= OH glu R (108) ardisiacrispine B, R= rha glu ara HO HO

(104) agiceradiol

(105) ilexol

glu xyl glu ara

(106) cyclamirtine A (Ardisia sp., Myrsine, Cyclamen)

Figure II 24. Exemples de triterpnes et saponosides des Myrsinaceae [DNP, 2006].

Autres substances. Peu de publications font tat des types de phnols que lon peut trouver dans les Myrsinaceae. Les principales gnines de flavonodes dcrites pour cette famille sont principalement les classiques myrictine (109), querctine, leucocyanidine (110), leucidelphinidine (111) ou cyanidine (112). Le genre Ardisia produit galement de lacide ardisique B (113) ou bergnine [Hegnauer, 1969 ; Hegnauer, 1990]. Le genre Myrsine produit des acides terpnobenzoques appels acides myrsinoques ((114) (117)) aux proprits anti-inflammatoires (figure II 25) [Hirota et al., 2002 ; Makabe et al., 2003].

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II. Synthse bibliographiqueOH OH HO O HO OH OH OH OH myrictine (109) OH OH cyanidine (112) OH OH OH O+ OH OH HO O OH OH

R R=H : leucocyanidine (110) R=OH : leucodelphinidine (111)

HO OH O OH O O Acide ardisique B (113) HO (114) myrsinionoside D (Myrsine seguini) HO O OH OH

OH O

O

OH

HO

OH OH O OH

O

HO HO O (115) acide myrsinoque C (Myrsine)

O

HO

O

(116) acide myrsinoque B (Myrsine, Rapanea)

(117) acide myrsinoque A (Myrsine)

Figure II 25. Exemples de la diversit des structures observes chez les Myrsinaceae daprs Hegnauer et DNP [Hegnauer, 1969 ; Hegnauer, 1990 ; DNP, 2006].

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II. Synthse bibliographique

3.4. Travaux antrieurs sur le genre EmbeliaLa composition phytochimique des plantes du genre Embelia est tudie de longue date en raison de son abondante utilisation en mdecine traditionnelle et de lintrt que cela suscite. En 1950, la prsence de strols, de tanins, de saponines et de quinones (embline (90)) a t mise en vidence dans Embelia barbayena Mez. En dpit de sa forte toxicit, cette plante est couramment utilise comme vermifuge et purgatif [Paris et Rabenoro, 1950]. Lespce du genre Embelia la plus tudie est sans doute E. ribes Burm.f. pour ses proprits contraceptives [Krishnaswamy et Purushothaman, 1980 ; Seth et al., 1982]. Ces effets seraient dus la prsence dembline en grande quantit dans les fruits et les graines. Cette molcule a, outre ses proprits contraceptives, des proprits analgsiques, anti-inflammatoires, antioxydantes, antitumorales et antibactriennes [Chitra et al., 2003]. Lembline est galement le composant majoritaire des graines de nombreuses autres espces de Embelia (E. scandens Mez, E. robusta Roxb., E. kilimandscharica Gilg). De nombreuses autres quinones et benzoquinones ont t isoles des Embelia, dont E. angustifolia A.DC. notamment [Haq et al., 2005 ; DNP, 2006] (figure II 26).O OH HO O OH O O OH (119) OH (120) embline (90) O OH O (118) O OH

HO

O

Figure II 26. Exemples de benzoquinones du genre Embelia [DNP, 2006].

Ltude, en 1973, dE. concinna Baker par Heitz et Billet a conduit lidentification de deux triterpnes pentacycliques : la primulagnine A (121) et lembliagnine (122) [Heitz et Billet, 1973]. Une autre reprsentante des Embelia trs tudie est E. schimperi Vatke, utilise en mdecine traditionnelle comme dpuratif et anthelminthique. Lefficacit de cette plante contre Taenia saginata a t confirme par des tudes in vitro [Boegh et al., 1996]. Comme les autres Embelia, cette plante renferme des benzoquinones substitues par de longues chanes alkyle (de type embline) ainsi que des anthraquinones (vilangine (92)) et des triterpnes pentacycliques (emblinone (123), schimprinone (124), agicrine (103), protoprimulagnine A (126) et primulagnine A (121)) (figure II 27) [Machocho et al., 2003].

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II. Synthse bibliographiqueOH OH OH O HO (121) primulagnine A

OH OH HO HO OH

(122) embeliagnine

(124) schimprinone

O R2 R1 R4 R3

R1=R2=O,R3=R4=H : emblinone (123) R1=OH, R2=H, R3=R4=O : agicrine (103) R1=R3=OH, R2=R4=H : protoprimulagnine A (126)

Figure II 27. Triterpnes pentacycliques isols du genre Embelia [Heitz et Billet, 1973 ; Boegh et al., 1996 ; Machocho et al., 2003].

Des flavonols ont t isols en grand nombre dans le genre Embelia, par exemple des drivs des gnines myrictine, querctine et kaempfrol : querctine-3-O-rutinoside, querctine-3-O-rhamnoside, querctine-3-O-galactoside et querctine-3-O-galactosyl(1 2)rhamnoside (E. schimperi Vatke) [Arot et Williams, 1997], ou de syringtine : syringtine-3-O-rhamnoside-7-O-glucoside, syringtine-3-Orhamnoside-7,4'-di-O-glucoside et de myrictine : myrictine-3-O-rhamnoside, myrictine-3-Oglucoside, myrictine-3-O-rhamnosyl(1 3)galactoside, myrictine-3-O-glucosyl(1 2)glucoside-7-Oglucosyl(1 4)rhamnoside, querctine-7-O-galactosyl(1 4)galactoside (des feuilles dE. keniensis R.E.Fr.) [Manguro et Williams, 1996].

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II. Synthse bibliographique

4. Flavonodes et spectromtrie de masse4.1. Gnralits sur les flavonodesOccupant une place prpondrante dans le groupe des phnols, les flavonodes sont des mtabolites secondaires ubiquistes des plantes. A ce jour, plus de 4000 flavonodes naturels ont t dcrits. On estime que 2 % environ du carbone organique photosynthtis par les plantes, soit quelques 109 tonnes par an, est converti en flavonodes [Agrawal et Markham, 1989]. Chimie des flavonodes. Flavonodes (de flavus, jaune en latin) est le terme gnrique pour des composs bass sur un squelette 15 carbones, qui son niveau le plus simple, consiste en deux cycles phnyles, les cycles A et B, connects par un pont trois c