Lettre écoPRG n°7 Vers une mobilité durable

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La Lettre Eco-citoyen PRG N°7 Février 2011 Vers une mobilité durable dans le 13 ème à Paris Séminaire du 10 février 2011 Mairie du 13 ème Edito Le point de départ est une démarche éco-citoyenne qui vise à faire de PRG et du13 ème en général, un quartier exemplaire en termes de développement durable et de citoyenneté. Une double opportunité a permis d’engager le 13 ème dans une recherche-action visant à construire un modèle collaboratif, global et évolutif de mobilité durable à l’échelle territoriale (Programme PREDIT) et dans l’élaboration d’un Plan de Déplacement Inter Entreprises (Ademe et Conseil régional IDF). Pourquoi le 13 ème ? On y trouve un fort potentiel scientifique, économique, culturel et social. Un quartier en mutation ouvert à l’innovation. La volonté des entreprises, des collectivités, des institutions et des habitants. Un défi : recoudre un quartier neuf (PRG) avec le vieux quartier, lui-même en mutation. Le questionnement. Comment mieux et moins se déplacer ? Comment apporter cohérence et efficacité dans le grand nombre de pratiques innovantes menées de façon individuelle ? Comment articuler les différents modes de déplacement ? Quels nouveaux lieux et services inventer pour réduire les déplacements ? Comment changer de comportement, de paradigme ? Comment rendre le voyageur organisateur de ses déplacements ? Quelles sont les composantes d’une mobilité durable ? Comment passer d’une mobilité contrainte à une mobilité désirable ? Les enseignements 1. Penser globalement les enjeux de mobilité. Articuler des niveaux d’intervention très différents dans une logique d’ensemble. Prendre en compte les infrastructures, le fonctionnement de réseaux (horaire, fréquence, fiabilité, etc.) ; les aménagements urbains ; les multiples offres de services à la mobilité (covoiturage, auto-partage, vélib, etc. 2. Assurer un accompagnement professionnel, interactif et continu : développer un système d’informations lié aux déplacements (info sur l’existant, en temps réel, réseaux sociaux permettant échanges et conseils entre pairs). Mettre en place un accompagnement au changement (formation, animation) en liaison avec un référent dans chaque entreprise ou institution. Faute de quoi le passage à l’acte est difficile. 3. Mutualiser et coordonner les actions. Exemples : mettre en commun les ressources de plusieurs entreprises autour d’actions concrètes tel que le covoiturage et ainsi […] Serge Blisko, Député de Paris, Maire adjoint du 13 ème : L’utilisation accrue des voitures ou deux roues à moteur thermique pour des déplacements qui pourraient être envisagés autrement augmente les nuisances. L’enjeu principal est avant tout territorial. La richesse des entreprises et le bien-être des habitants, des salariés, des étudiants, des visiteurs, le développement du territoire sont en grande partie conditionnés par une meilleure organisation des mobilités et des alternatives à la mobilité. La question de la mobilité s’insère dans une réflexion plus large sur les enjeux de la ville durable. Une ville durable, c’est une ville où il fait bon vivre, où l’on peut renforcer le lien social, où la solidarité s’en trouve accrue, où le plaisir à se rencontrer est encouragé. Pour faire de Paris une ville durable, l’aménagement de l’espace public doit être densifié, les dessertes par les transports en communs doivent être étendues, et notre rôle est de promouvoir l’extension de tous les modes de circulation dits "doux". De la marche à pied au covoiturage, en passant par l’utilisation de la bicyclette et en renforçant l’autopartage. […]réduire les coûts d’un site. Ou encore, élaborer une « carte d’accessibilité » qui permet d’accéder, à pied ou en vélo, aux différentes aménités du quartier. 4. Prendre en compte les alternatives aux déplacements physiques de façon à « moins se déplacer ». Développer un réseau de « bouquets de services », à partir de lieux existants, on enrichit l’offre culturelle, sociale et marchande tout en renforçant le lien social. Développer le travail à distance afin de réduire les temps de déplacements, diminuer le stress, améliorer la productivité. Et toujours s’appuyer sur les expériences existantes… Le déroulement L’état de l’art a permis de recenser les tendances lourdes (voiture-service, développement des modes actifs, développement du « management de la mobilité », etc.), un état des lieux a été réalisé à partir de l’analyse de documents existants sur les flux, d’une quarantaine d’entretiens individuels avec des responsables d’entreprises publiques et privées génératrices de flux, d’un questionnaire minute auprès de 600 usagers, et de journaux de bord permettant de suivre les parcours individuels d’usagers. Suite à cela, trois « séminaires de créativité », regroupant de 40 à 100 acteurs locaux et experts chacun, ont permis d’engager un échange constructif sur trois questions clé : le séminaire « éco-mobilité et télécentre » a précisé les enjeux (mobilité, productivité, mieux être des salariés),

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La Lettre Eco-citoyen PRG N°7 – Février 2011

Vers une mobilité durable dans le 13ème

à Paris Séminaire du 10 février 2011 – Mairie du 13

ème

Edito

Le point de départ est une démarche éco-citoyenne qui vise à faire de PRG et du13ème en général, un quartier exemplaire en termes de développement durable et de citoyenneté. Une double opportunité a permis d’engager le 13ème dans une recherche-action visant à construire un modèle collaboratif, global et évolutif de mobilité durable à l’échelle territoriale (Programme PREDIT) et dans l’élaboration d’un Plan de Déplacement Inter Entreprises (Ademe et Conseil régional IDF).

Pourquoi le 13ème ? On y trouve un fort potentiel scientifique, économique, culturel et social. Un quartier en mutation ouvert à l’innovation. La volonté des entreprises, des collectivités, des institutions et des habitants. Un défi : recoudre un quartier neuf (PRG) avec le vieux quartier, lui-même en mutation.

Le questionnement.

Comment mieux et moins se déplacer ? Comment apporter cohérence et efficacité dans le grand nombre de pratiques innovantes menées de façon individuelle ? Comment articuler les différents modes de déplacement ? Quels nouveaux lieux et services inventer pour réduire les déplacements ?

Comment changer de comportement, de paradigme ? Comment rendre le voyageur organisateur de ses déplacements ? Quelles sont les composantes d’une mobilité durable ? Comment passer d’une mobilité contrainte à une mobilité désirable ?

Les enseignements

1. Penser globalement les enjeux de mobilité. Articuler des niveaux d’intervention très différents dans une logique d’ensemble. Prendre en compte les infrastructures, le fonctionnement de réseaux (horaire, fréquence, fiabilité, etc.) ; les aménagements urbains ; les multiples offres de services à la mobilité (covoiturage, auto-partage, vélib, etc.

2. Assurer un accompagnement professionnel, interactif et continu : développer un système d’informations lié aux déplacements (info sur l’existant, en temps réel, réseaux sociaux permettant échanges et conseils entre pairs). Mettre en place un accompagnement au changement (formation, animation) en liaison avec un référent dans chaque entreprise ou institution. Faute de quoi le passage à l’acte est difficile.

3. Mutualiser et coordonner les actions. Exemples : mettre en commun les ressources de plusieurs entreprises autour d’actions concrètes tel que le covoiturage et ainsi […]

Serge Blisko, Député de Paris, Maire adjoint du 13ème :

L’utilisation accrue des voitures ou deux roues à moteur thermique pour des déplacements qui pourraient être envisagés autrement augmente les nuisances. L’enjeu principal est avant tout territorial. La richesse des entreprises et le bien-être des habitants, des salariés, des étudiants, des visiteurs, le développement du territoire sont en grande partie conditionnés par une meilleure organisation des mobilités et des alternatives à la mobilité.

La question de la mobilité s’insère dans une réflexion plus large sur les enjeux de la ville durable. Une ville durable, c’est une ville où il fait bon vivre, où l’on peut renforcer le lien social, où la solidarité s’en trouve accrue, où le plaisir à se rencontrer est encouragé.

Pour faire de Paris une ville durable, l’aménagement de l’espace public doit être densifié, les dessertes par les transports en communs doivent être étendues, et notre rôle est de promouvoir l’extension de tous les modes de circulation dits "doux". De la marche à pied au covoiturage, en passant par l’utilisation de la bicyclette et en renforçant l’autopartage.

[…]réduire les coûts d’un site. Ou encore, élaborer une « carte d’accessibilité » qui permet d’accéder, à pied ou en vélo, aux différentes aménités du quartier.

4. Prendre en compte les alternatives aux déplacements physiques de façon à « moins se déplacer ». Développer un réseau de « bouquets de services », à partir de lieux existants, où on enrichit l’offre culturelle, sociale et marchande – tout en renforçant le lien social. Développer le travail à distance afin de réduire les temps de déplacements, diminuer le stress, améliorer la productivité.

Et toujours s’appuyer sur les expériences existantes…

Le déroulement

L’état de l’art a permis de recenser les tendances lourdes (voiture-service, développement des modes actifs, développement du « management de la mobilité », etc.), un état des lieux a été réalisé à partir de l’analyse de documents existants sur les flux, d’une quarantaine d’entretiens individuels avec des responsables d’entreprises publiques et privées génératrices de flux, d’un questionnaire minute auprès de 600 usagers, et de journaux de bord permettant de suivre les parcours individuels d’usagers.

Suite à cela, trois « séminaires de créativité », regroupant de 40 à 100 acteurs locaux et experts chacun, ont permis d’engager un échange constructif sur trois questions clé : le séminaire « éco-mobilité et télécentre » a précisé les enjeux (mobilité, productivité, mieux être des salariés),

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Vers une mobilité durable dans le 13ème

les freins (plus culturels que techniques) et le bouillonnement d’expériences un peu partout en France. Le séminaire sur « les mobilités durables » a esquissé une dizaine de pistes reprises dans les fiches-actions. Le séminaire « Bouquet de services » a été l’occasion de mettre une quinzaine d’acteurs en réseaux et de faire émerger 9 projets dans le 13ème sur des sites identifiés.

Les résultats obtenus

Les quatre enseignements évoqués ci-dessus. Leur traduction concrète sous forme de 12 fiches-action (Cf. p. 4). Le projet de création d’une Maison des Mobilités à Paris qui aura pour fonction de former et d’accompagner les usagers dans leur pratique d’une mobilité durable. La création d’un Groupement d’Intérêt Public – « GIP éco-citoyen Paris-Ile-de-France – qui développera les synergies entre les acteurs locaux.

Pierre Dommergues

De la mobilité durable à la mobilité désirable

Aujourd'hui, nous franchissons une nouvelle étape pour parler de la "mobilité désirable" – c'est-à-dire celle qui serait en phase avec les aspirations des voyageurs. La mobilité n'est pas qu'une affaire « d'offre », mais c'est aussi une question de "demandes", « d‟imaginaires » et de « désirs » - non seulement pour la qualité de la mobilité, mais aussi pour des quantités de déplacements. Ceci ne doit pas masquer que nous parlons aussi d'une mobilité productive – c'est-à-dire qui répondrait aux exigences d'efficacité. Nous voilà face à trois défis conjoints – mobilités durable, désirable et productive à la fois – mais dont la conciliation est loin d'être impossible. Comment peut-on à la fois satisfaire aux exigences du développement durable, à celles des voyageurs et des citadins et aux contraintes des entreprises et des collectivités territoriales ?

Jusqu'ici, tant que la puissance publique assurait la capacité de transport, elle s'estimait quitte vis-à-vis de ses administrés. Les autres acteurs ne se sentaient pas concernés. Désormais, tout change. Non seulement, cette capacité n‟est plus assurée partout correctement, mais nous atteignons dans le même temps les limites des mobilités.

Le jeu des acteurs concernés par cette transformation des mobilités en volume et en portée ne cesse de s'étendre. La mobilité "désirable" n'est pas l'affaire des seuls usagers mais celle des villes qui entreprennent de maîtriser leurs flux et l'extension de leur territoire dans ce contexte d'inflation, de la collectivité qui doit satisfaire aux exigences du développement durable, de l'emboîtement des territoires qui doivent penser l'inter-territorialité pour assurer le jeu des échelles, des entreprises qui ont le souci d'une certaine productivité du travail, des commerces qui doivent se préoccuper des accessibilités à leur offre, etc. La mobilité, c'est donc d'abord une affaire de dialogues et de concertations dans un jeu d'acteurs élargi. D'un autre côté, les valeurs de la mobilité sont en train de se modifier. Nous étions dans une logique de modernité qui en appelait à la croissance et à la vitesse. Elle s'accompagnait d'une augmentation constante des infrastructures pour répondre à l'augmentation des trafics bien plus rapide que celle des populations. Nous en trouvons la traduction dans les écarts énormes entre, d'une part, la réduction attendue de la place de la voiture en ville et l'augmentation de la pratique de la marche.

Les usagers se déclarent prêts à transformer leurs pratiques. Ce qui signifie qu'ils cessent de croire aux vertus de la vitesse et de l'extension illimitée des territoires. Ils recherchent – en tout cas une large partie d'entre eux - une mobilité apaisée, une ville vivable. 21% déclarent avoir marché plus au cours des 12 derniers mois et 81% privilégient la marche dès qu'ils en ont la possibilité et 53% considèrent le développement des infrastructures vélo et marche comme la première priorité.

Cela révèle le désir d'une autre ville, donc d'une autre mobilité. Formulons les constats suivants : les solutions techniques d'amélioration des offres de mobilité ne sauraient précéder une sensibilisation de tous les acteurs – la pédagogie doit précéder les réponses techniques. Et justement, le constat doit être fait que cette sensibilité est faible : les entreprises ne sont pas tout à fait conscientes que le "déplacement" s'inscrit pleinement dans le temps du travail ou, pour le dire autrement, que sa pénibilité retentit à la fois sur la qualité de vie des salariés et sur la productivité de l'entreprise. La mutualisation des moyens – les modes, des places de marché, les informations, les services – est un passage obligé qui n'est ni dans la tête des entreprises ni celle des autres acteurs. En d'autres termes, les acteurs ne font ni le lien entre mobilité productive et mobilité durable et encore moins avec la mobilité désirable

Ce constat quelque peu brutal change les perspectives. Il faut accompagner pas à pas la suite de l'histoire, il faut une Maison des Mobilités pour mutualiser les moyens et permettre d'avancer dans le bon ordre et faire du 13e une vitrine des mobilités désirables.

Bruno Marzloff

Quand les entreprises du 13ème innovent… Atelier animé par Patrice Vuidel et Jean-François Périllat. Natixis. Agnes Guiral. L’amélioration des déplacements s’inscrit dans une démarche de développement durable, car 20% des émissions de Gaz à effet de serre en proviennent. Il est important de procéder à une mesure pour faire prendre conscience de l’impact. Une panoplie d’actions ont été inscrites dans le PDE. Elles connaissent des réussites inégales, ce n’est pas une raison pour se décourager car les marges de progrès restent très fortes et les possibilités des les actionner nombreuses. Le co-voiturage et le parking à vélos sont faiblement utilisés. Ceci s’explique par l’attractivité de la voiture qui en tant qu’espace privatif et confortable reste perçu comme agréable malgré les encombrements routiers. Pour faire mieux, il serait intéressant de disposer de bouquets de services, de pouvoir mettre en œuvre des navettes partagées, mais aussi peut-être encore un peu plus de coercition.

SNCF. Alexandre Richardot. La même culture, le même culte de la voiture individuelle qu’ailleurs chez les salariés de l’entreprise même s’ils bénéficient de tarifs préférentiels sur le train Ceci dit, ils font un usage fréquent des moyens de transport de l’entreprise. Donc, la gratuité des transports collectifs est sans nul doute un facteur incitatif à leur utilisation. Pour assurer les liaisons entre les sites de la région parisienne a été lancée une expérimentation de vélo à assistance électrique (VAE). Elle concerne un millier d’agents. Ce n’est pas quelque chose de simple à mettre en œuvre car il faut régler le rééquilibrage du nombre de vélo disponible par site. Mais c’est une réussite. Pas d’augmentation des accidents et 15% des personnels l’utilisent fréquemment. Les enseignements c’est qu’il faut être exemplaire, permettre d’expérimenter, communiquer en continu. L’approche que nous avons adoptée est en passe de s’étendre aux autres entreprises de notre bâtiment.

Accenture. Sophie Doumas. Dans les solutions de maîtrise des déplacements, l’entreprise s’est orientée vers le télétravail à domicile. C’est une politique de bien-être des collaborateurs qui a incité à choisir cette voie. Il est en place depuis 2010 et c’est un vrai succès. Les salariés peuvent le pratiquer jusqu’à trois jours par semaine. A 70%, ils le pratiquent deux jours par semaine. Parmi les facteurs qui en ont permis le succès sont : une technologie adaptée, un projet d’entreprise couplé à une action de réaménagement des locaux et à une stratégie de travail collaboratif et de création d’espaces de rencontre. C’est également la compréhension préalable de ces enjeux et impacts

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sur l’entreprise et ses modes d’organisation. La motivation première était de réduire les déplacements pour éviter les problèmes générés par les saturations et les retards.

Décathlon. Julien Capusano. La logistique (marchandises) et la mobilité (l’accessibilité) pour les clients constituent les principaux axes. Ce sont potentiellement les 500.000 habitants qui peuvent accéder au magasin en moins de dix minutes. Ils viennent en voiture ou à pied car en vélo c’est encore la galère. Des équipements existent mais ils sont mal entretenus et sont monopolisés par les vélomoteurs. L’entreprise a une politique de recrutement local de ses employés qui répond à des objectifs qui sont réellement durables : une plus forte intégration sociale dans le quartier, plus de proximité dans les relations avec les clients et bien entendu une limitation des déplacements domicile-travail. Autre facteur d’amélioration, la plate-forme de déchargement nécessite d'être redimensionnée. Elle n’est pas adaptée aux grands véhicules, ce qui oblige le magasin à en faire circuler deux de plus petite taille au lieu d'un.

La Poste. Susan Vranich Les entreprises sont interpellées et leur premier réflexe est de créer des réponses internes. Elles ne vont pas naturellement rechercher l’entrée territoriale, ni la mise en commun externe avec d’autres entreprises. Et pourtant ce que La Poste a réussi à réaliser en utilisant ces autres leviers est exemplaire. Ce qu’il faut en retenir : (1) partage de prise de conscience = affichage des diagnostics, échanges des bonnes pratiques mais aussi des soutiens. (2) Partage des solutions = partage des moyens et allongement de l’échelle du temps sur les résultats à obtenir. (3) Partage des enjeux = être efficace et innovant. La démarche interentreprises a pour vertu d’éviter la suspicion de visée masquée d’objectifs purement économiques : télétravail = moins de bureaux ; co-voiturage ou vélo = moins de parkings.

Pourquoi et comment mobiliser les entreprises sur les questions de mobilité ?

Pour les entreprises, au-delà de la sensibilisation à des dimensions environnementales, une prise en compte plus forte des enjeux de mobilité, en particulier par rapport aux déplacements domicile/travail suppose une progression des dispositifs d‟évaluation des conséquences de la mobilité des salariés tant sur des aspects de santé que plus directement de performance. Cela ne concerne pas seulement le foncier (places de parking) mais également les questions de fatigue, de retard, de stress de turn-over, d‟implication… Or, les entreprises sont assez peu outillées pour analyser l‟impact de la mobilité sur les conditions de mobilisation des salariés comme ressource.

A un autre niveau, agir sur les mobilités en promouvant les transports collectifs, le covoiturage, les déplacements doux… suppose d„agir directement sur la sphère privée des individus. Deux limites ici : agir sur la sphère privée n‟est pas traditionnel pour les entreprises et oblige à des innovations dans les dispositifs internes, ou à des incitations financières, pour dépasser la seule sensibilisation. De plus, les motivations des

personnes à utiliser tel ou tel mode de transport répondent à des formes de rationalité et de cohérence dans les trajets dans la mesure où cela renvoie à d‟autres dimensions de la vie personnelle sur lesquelles les entreprises ne peuvent pas agir, comme par exemple les trajets avec les enfants, la pratique de loisirs… Ces éléments valent également pour la prise en compte des déplacements des usagers/clients. Dans ce cas, la réponse ne peut être que territoriale, pour résoudre des problèmes de déplacements au regard des besoins des individus dans l‟articulation entre temps au travail et temps hors travail. Cela suppose alors de mettre en place de nouvelles gouvernances territoriales à même de traiter ces questions. Cela suppose également que ces questions soient traitées non seulement par les directions du développement durable des entreprises, mais également par les directions des ressources humaines dans la mesure où il s‟agit bien là de politiques internes visant à considérer les salariés et leur santé comme une ressource à préserver. Olivier Blandin.

En quoi la démarche du PDIE dans le 13ème est-elle singulière ?

La démarche de PDIE conduite dans le 13ème arrondissement diffère fortement d‟un grand nombre d‟expériences, maintenant bien connues, comme le PDIE de Montrouge, introduit par Susan Vranich.

L‟historique même de la démarche : le PDIE s‟ancre dans une dynamique de concertation initiée par le projet éco-citoyen Paris Rive Gauche. Le territoire du projet : un arrondissement parisien, donc une échelle importante (l‟arrondissement), une offre de transports dense et un maillage territorial satisfaisant, qui s‟inscrit dans un écosystème régional également dense. Enfin, les porteurs du projet. Compte tenu de l‟offre relativement satisfaisante de transports dans l‟arrondissement, ce n‟est probablement pas un hasard si la démarche de PDIE a été initiée par des acteurs extérieurs aux entreprises locales, lesquelles étaient peu averties il y a 18 mois des enjeux de “mobilités durables”. Or l‟entreprise a un rôle moteur à jouer.

Qu‟avons-nous appris de cette démarche singulière ? Il est important de remettre en perspective cette situation initiale car elle a fortement marqué l‟ensemble de la démarche. En effet, la focale de ce chantier s‟est déplacée dés lors que nous avons perçu qu‟avant de décliner des solutions en termes d‟actions il fallait passer par la case acculturation.

En effet, l‟étape préalable à la mise en place d‟un PDIE consiste à créer un discours et des outils de dialogue pour sensibiliser les entreprises et leurs salariés. Pour cela, les entreprises et acteurs locaux ont été rencontrés à plusieurs reprises et dans des cadres différents : des entretiens individuels pour appréhender leur compréhension des enjeux de mobilités durables et partager nos connaissances de la question ; des séminaires thématiques pour partager des retours d‟expériences entre acteurs ; des ateliers de travail pour réfléchir à la mise en place d‟actions concrètes ; des rencontres entre les entreprises et les représentants de la Ville.

La création de ces différents espaces de dialogue et de travail permet de favoriser des processus de mutualisation et d‟échanges d‟expériences entre les entreprises et ce, de manière horizontale. La dernière étape, gage du succès de cette démarche, de sa transformation en actions et clef de sa pérennisation, concerne l‟autonomisation des entreprises locales. C‟est le sens de la mise en place du Groupement d‟Intérêt Public et de la Maison des Mobilités.

Caroline de Francqueville

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Vers une mobilité durable dans le 13ème

Actions à venir Les deux conditions de la réussite. Les fiches-action ci-contre constituent le plan d‟action à mettre en place dans le projet de « mobilité durable du 13ème ». Mais leur réussite – c‟est l‟un des fils rouges de notre travail - dépend de deux conditions clé qui, l‟une et l‟autre, garantissent l‟accompagnement professionnel des actions et le renforcement de la synergie entre les acteurs. 1. La création de la « Maison des Mobilités du 13ème » (et de Paris). La définition des actions à mener et des moyens techniques pour y parvenir doit en effet s‟accompagner, pour maximiser les chances de les mener à bien, de la définition d‟une politique d‟animation. Tel est le rôle de la Maison des Mobilités, un opérateur qui offre de l‟expertise-conseil et des solutions en matière de mobilité durable aux entreprises du territoire et, plus largement, aux habitants, salariés, visiteurs et étudiants de l‟arrondissement. Elle s‟incarne physiquement dans un lieu mais s‟inscrit également dans un réseau d‟autres lieux et va à la rencontre de ses publics. De plus, elle connaît une dimension numérique affirmée en développant une plate-forme numérique, support d‟un réseau social orienté mobilité. Sans référent dans chaque entreprise, sans une structure d‟accompagnement de ce type, le passage à l‟action est difficile.

Une matinée ordinaire à la Maison des Mobilités

9h : Hélène ouvre la Maison des Mobilités. 9h15 : 4 salariés d‟une grande entreprise du 13ème viennent suivre leur cours de vélo. Ils n‟ont jamais appris à faire du vélo et depuis 3 semaines, ils viennent une fois par semaine afin de pouvoir se rendre au travail en deux-roues. 10h30 : Hélène reçoit un salarié venu effectuer un conseil en mobilité. A l‟issue d‟un entretien d‟une vingtaine de minutes, elle remet au salarié une clé USB sur laquelle figure un livret de mobilité, qui récapitule les éléments du conseil en mobilité. Ce dernier permettra au salarié d‟économiser 700 € par an et de rejeter 300 kilos de CO2 en moins dans l‟atmosphère. 11h : Hélène se connecte sur la plate-forme numérique de la Maison des Mobilités, et constate que 6 nouveaux équipages de covoiturage se sont formés depuis la veille. Elle prend soin de les inviter au prochain apéritif bimensuel des covoitureurs. 11h30 : Hélène part animer la balade mensuelle à vélo dans le quartier. Une trentaine de cyclistes, travaillant dans 7 entreprises, y participent et découvrent des quartiers qu‟ils connaissent mal, bien qu‟ils travaillent à proximité.

Nathalie Granès, chef du service écomobilité du Conseil régional d’Ile-de-France, souligne que le PDIE du 13ème constitue une démarche innovante, qui a du mal à “rentrer dans les cases”, ce qui explique la difficulté rencontrée au départ à financer ce projet. La Région est très intéressée par les propositions de GIP et de Maison des Mobilités. Ce sont des outils pour construire une gouvernance partagée d’un territoire de vie, permettant de pérenniser la démarche engagée. Au-delà, ce que la Région souhaite, c’est un plan d’action qui soit autre chose que la somme des PDE, tout en étant cohérent avec les actions des PDE existants. L’équipe de projet du PDIE est incitée à continuer dans la voie suivie et à présenter son plan d’action en précisant pour chacune l’échéancier et les objectifs à atteindre. Il importe en particulier d’évaluer l’impact des actions sur le report modal, et de préciser les indicateurs de suivi retenus. Il est également essentiel d’identifier des référents PDIE dans chaque entreprise. 2. La mise en place du Groupement d’Intérêt Public – le « GIP éco-citoyen Paris Ile-de-France. Le GIP est l‟autre condition de réussite du PDIE et des autres projets de

développement durable initiés dans l'arrondissement. C‟est un investissement des acteurs du quartier pour valoriser et mutualiser les ressources de chaque partenaire et pour renforcer le « vivre ensemble » et l‟attractivité du territoire. Il s‟appuie sur le travail réalisé au cours des trois dernières années par l‟Afet dans le cadre du projet « éco-citoyen Paris-Rive gauche ». Une douzaine de projets ont été lancés : mobilité et déplacements, mais aussi économies d‟énergie, gestion collective de déchet, espaces verts, rythmes de vie individuels et collectifs, pauses méridiennes, etc. Le GIP prévoit de mettre en place une gouvernance partagée où les différents partenaires publics, privés et associatifs seront représentés à travers leurs collège respectifs. Les apports de chacun se feront sous forme de cotisation, mais aussi de prêt de personnel, de mise à disposition de locaux et de logistique. Ses missions ? Une mission de mise en relation, d‟échanges et de réflexion prospective, d‟animation et de développement de réseaux. Une mission de porteur ou d‟incitateur de projets innovants (tels que la mobilité durable dans le 13ème). Une mission de maîtrise d‟ouvrage plutôt que de maîtrise d‟œuvre.

Les 12 fiches actions

Mutualiser des services d’animation, d’accompagnement au changement (Maison des mobilités) 1. Mettre en place une plate-forme de conseil en mobilité pour les entreprises et développer et animer un réseau social numérique orienté vers la mobilité dans le 13

ème arrondissement

Favoriser la pratique de la marche 2. Organiser des marches exploratoires dans l‟arrondissement avec les salariés 3. Concevoir des plans dédiés aux piétons

Favoriser la pratique du vélo 4. Organiser des journées de sensibilisation et d‟essai de vélos dans l‟arrondissement 5. Inciter les entreprises à développer des services dédiés aux vélos

Favoriser les offres de déplacement et de livraison non motorisées 6. Favoriser les déplacements dans Paris en vélo-taxi électrique 7. Favoriser les livraisons de colis en vélo-taxi électrique

Favoriser la voiture-service 8. Mettre en place le covoiturage inter-entreprises 9. Réduire sa flotte de véhicules 10. Adhérer à un service d‟auto-partage

Favoriser les alternatives aux déplacements 11. S‟intégrer dans un bouquet de services en réseau à l‟échelle de l‟arrondissement. / Favoriser la mise en réseau de services dans l'arrondissement 12. Mieux identifier et formaliser / accompagner les pratiques de travail à distance

Benoît Lepesant, Ingénieur Transport et Mobilité - Qualité de l'air de l’Ademe. La mobilité domicile-travail reste la priorité importante de l’Ademe. L’utilisation de la voiture particulière pour ces déplacements contribue fortement aux émissions de CO2. La démarche éco-citoyenne présente un caractère innovant et précurseur. L’Ademe aide et suit ce projet. Par ailleurs, l’Ademe est pleinement partie prenante de Pro’mobilité. Le programme Prédit-Ademe-Conseil Régional a été animé par : Olivier Blandin (Atémis) ; Ingrid Cressy (Voiture & Co) ; Pierre Dommergues (Afet) ; Caroline De Francqueville (Chronos) ; Joël Gombin (Voiture & Co) ; Jean-François Pérrillat (Atos Origin) ; Patrice Vuidel (Afet)

Sont intervenus lors du séminaire : Quentin Bakhtiari (Prédit), Julien Capusano (Décathlon) ; Stéphane Cherrier (Velotaccie) ; Pierre-Henry Colombier (BnF) ; Sophie Doumas (Accenture) ; Agnès Guiral (Natixis) ; Alexandre Richardot (SNCF) ; Susan Vranich (La Poste).

Afet Editions / février 2011

Association française de l‟excellence territoriale (Afet) 165 rue Jean-Jacques Rousseau 92130 Issy-les-Moulineaux

Tél. : 01 46 48 00 39 ; e-mail : [email protected] http://ecocitoyen-parisrivegauche.org/