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Master II Economie Sociale et Solidaire Université Lumière Lyon II
Mémoire de Stage 31Août 2009
Les structures d’insertion par l’activité économique et l’évolution de leur environnement
le défi d’une double problématique, développer une situation économique viable au profit d’un projet social.
Sous la direction de Monsieur Jérôme BLANC
Tutrice de stage : Madame Armelle MARTIN / directrice de RDI.
Date de Soutenance : Mardi 8 Septembre 2009
Auteur : Fabien LIANZON
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AAVVAANNTT PPRROOPPOOSS
Ce travail est issu de ma mission de stage d’une durée de 5 mois, réalisée au sein de
l’Association Rhône Développement Initiative. En réalisant le suivi d’une 40aine de
structures appartenant à l’Economie Sociale et Solidaire et ayant été financées par RDI, j’ai
pris conscience des enjeux qui traversent ce secteur aujourd’hui. J’ai donc progressivement
muri mon sujet de mémoire en cherchant à rendre de compte de la contribution de RDI, et du
réseau France Active dans son ensemble, auprès des acteurs de l’ESS.
J’ai donc décidé de me concentrer sur les structures de l’Insertion par l’Activité Economique
et plus particulièrement sur leur particularité de devoir se positionner à la fois sur un plan
économique et sur un plan social. Mon choix de traiter uniquement des SIAE s’explique pour
plusieurs raisons. Tout d’abord je suis particulièrement sensibilisé à ce secteur, mais au-delà,
il me fallait cibler davantage les structures concernées, tant l’ESS regroupe des cas divers et
variés. De plus, parmi les structures que j’ai rencontrées dans le cadre de ma mission, la
moitié appartiennent au monde de l’IAE. Pour autant bon nombre de remarques figurant dans
ce travail peuvent être aisément généralisées au monde de l’ESS dans son ensemble.
Ce mémoire vise donc à comprendre plus précisément le monde des SIAE et le rôle d’acteurs
tels que RDI auprès des structures concernées. L’enjeu est de comprendre pourquoi les SIAE
se retrouvent face à un tel défi, à savoir se développer économiquement pour accomplir leur
mission sociale d’insertion. Il s’agit également de comprendre par quels moyens les SIAE
peuvent y parvenir et ainsi, d’analyser le rôle d’acteurs tels que RDI dans une telle démarche.
Ce travail se base sur une large bibliographie, essentiellement tirée d’articles de revues
spécialisées, de quelques ouvrages mais également de comptes rendus de séminaires,
d’ateliers thématiques et d’études réalisées par les acteurs de l’IAE, les têtes de réseau
notamment. La documentation produite par le réseau France Active m’a également été très
précieuse. Ce travail tient également beaucoup de l’expérience du terrain et de l’analyse de la
réalité des SIAE, tant dans leurs difficultés que dans leurs succès.
A ce titre, je souhaiterais remercier Messieurs Charrassin, Abdellaoui, Weber et Faucher, pour
avoir accepté que leurs structures soient citées dans ce travail, tant elles représentent des
exemples pertinents. Je tiens également à remercier mon tuteur universitaire, M. Blanc, pour
sa présence et ses précieux conseils. Enfin, un grand merci à Mlle Martin, ma tutrice de stage
et directrice de RDI, ainsi qu’à l’ensemble de l’équipe de l’association, pour m’avoir permis
de réaliser une mission captivante, et ce, en m’assurant un soutien et un accueil exemplaires.
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TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIEERREESS
AAVVAANNTT PPRROOPPOOSS .............................................................................................................................................. 2
TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIEERREESS ..................................................................................................................................... 3
IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN ............................................................................................................................................... 5
PPAARRTTIIEE 11 :: LLEESS SSIIAAEE FFAACCEE AA DDOOUUBBLLEE DDEEFFII :: UUNN DDEEVVEELLOOPPPPEEMMEENNTT EECCOONNOOMMIIQQUUEE NNEECCEESSSSAAIIRREE AA LLAA
CCOONNDDUUIITTEE DDUU PPRROOJJEETT SSOOCCIIAALL.. .................................................................................................................... 11
I. UN CONTEXTE EN MUTATION POUR ORIGINE. .................................................................................................... 11
AA.. LL’’éévvoolluuttiioonn dduu ccaaddrree rréégglleemmeennttaaiirree :: ddééffiinniittiioonn eett ccoonnssééqquueenncceess ddeess nnoouuvveelllleess mmooddaalliittééss ddee
ccoonnvveennttiioonnnneemmeenntt.. .............................................................................................................................................................................................................................................................. 1111
A.1 Les nouvelles modalités de conventionnement et la dynamique de réforme profonde des politiques publiques.
.................................................................................................................................................................................. 11 A.2 Les nouvelles modalités de conventionnement et leurs conséquences pour les SIAE. ...................................... 13
BB.. LLee ffiinnaanncceemmeenntt ddeess SSIIAAEE :: àà nnoouuvveelllleess llooggiiqquueess,, nnéécceessssiittéé ddee nnoouuvveelllleess ssttrraattééggiieess.. ............................................ 1155
B.1 Des logiques de financement public toujours plus contraignantes… ................................................................. 15 B.2 … qui impliquent le développement de nouvelles stratégies. ............................................................................ 17
CC.. LL’’IIAAEE ffaaccee aauu pprriinncciippee ddee ccoonnccuurrrreennccee eett aauuxx llooggiiqquueess eennttrreepprreenneeuurriiaalleess :: eennttrree ccoonnttrraaiinntteess eett
ooppppoorrttuunniittééss.. ................................................................................................................................................................................................................................................................................ 1188
C.1 Le défi du principe de concurrence : quel avenir de l’IAE dans le contexte communautaire ? .......................... 18 C.2 SIAE et commande publique : à la recherche d’un « juste milieu ».................................................................... 20
II. DES DIFFICULTES AVEREES COMME RESULTAT. ................................................................................................... 23
AA.. LLeess SSIIAAEE eett lleeuurr iinnssccrriippttiioonn ddaannss ll’’ééccoonnoommiiee :: ddeess aacctteeuurrss mmééccoonnnnuuss ssoouummiiss aauuxx aallééaass ddee llaa
ccoonnjjoonnccttuurree.. .................................................................................................................................................................................................................................................................................... 2233
A.1 Un manque de reconnaissance et une connotation encore péjorative de «l’insertion». .................................. 23 A.2 Les SIAE face à la réalité économique : concurrence et conjoncture. ................................................................ 24
BB.. LLeess SSIIAAEE aauu sseeiinn dd’’uunn eennvviirroonnnneemmeenntt ppoolliittiiqquuee mmoouuvvaanntt eett iinncceerrttaaiinn...................................................................................... 2266
B.1 L’évaluation des résultats et le développement de stratégies de court terme. ................................................. 26 B.2 Frilosité des acteurs publics et hétérogénéité de leur implication. .................................................................... 26
CC.. DDeess oouuttiillss eett ccoommppéétteenncceess ddee ggeessttiioonn eennccoorree ffrraaggiilleess.. .................................................................................................................................... 2288
C.1 Une maîtrise du cycle d’exploitation à perfectionner. ....................................................................................... 28 C.2 L’épineuse question de la gestion des ressources humaines. ............................................................................ 30
PPAARRTTIIEE 22 :: LLEESS SSOOLLUUTTIIOONNSS PPEERRMMEETTTTAANNTT DDEE RREENNDDRREE CCEE DDEEFFII PPOOSSSSIIBBLLEE.. ................................................. 32
I. REUNIR LES FACTEURS CLES : LA DEFINITION D’UN PROJET D’INSERTION, UN DEVELOPPEMENT ECONOMIQUEMENT VIABLE. 32
AA.. AAssssuurreerr uunn ddéévveellooppppeemmeenntt ééccoonnoommiiqquuee aaddaappttéé àà uunn tteerrrriittooiirree.. ...................................................................................................... 3322
A.1 Prendre en compte la spécificité/réalité du territoire. ...................................................................................... 32 A.2 La professionnalisation, garant du développement économique. ..................................................................... 33
BB.. NNee ppaass oouubblliieerr ll’’eesssseennttiieell :: ddééffiinniirr ssoonn pprroojjeett dd’’iinnsseerrttiioonn.. .......................................................................................................................... 3366
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B.1 Des démarches d’évaluation de plus en plus nombreuses : quels enjeux ? ....................................................... 36 B.2 La définition de critères pour mesurer l’utilité sociale : une question délicate. ................................................ 39
CC.. LLaa mmiissee eenn œœuuvvrree ddeess ffaacctteeuurrss ddee rrééuussssiittee :: qquueelllleess ppeerrssppeeccttiivveess ?? .............................................................................................. 4433
C.1 Le développement durable : de fortes opportunités et « une orientation naturelle » pour les SIAE................. 43 C.2 Les clauses d’insertion dans les marchés publics : une grande opportunité pour les SIAE de mettre en
cohérence leur « multi dimensionnalité ». ............................................................................................................... 44
¤ LA REUNION DES FACTEURS CLE : LE RESEAU ENVIE, UN EXEMPLE PERTINENT AU REGARD DES STRUCTURES ENVIE
RHONE ET ENVIE SUD EST.................................................................................................................. 46
II. L’EXISTENCE D’ACTEURS POUR L’ACCOMPAGNEMENT ET LE FINANCEMENT DES SIAE : L’ACTION ET LE POSITIONNEMENT DE
RHONE DEVELOPPEMENT INITIATIVE. ........................................................................................................................ 51
AA.. LL’’eexxiisstteennccee ddee nnoommbbrreeuuxx aacctteeuurrss ppoouurr rrééppoonnddrree aauuxx bbeessooiinnss ddeess SSIIAAEE.. ................................................................................ 5511
A.1 Présentation des différents acteurs pouvant intervenir. ................................................................................... 51 A.2 RDI et France Active: une intervention au plus près des acteurs de l’IAE. ......................................................... 53
BB.. LLeess oouuttiillss mmoobbiilliissééss ppaarr RRDDII :: uunn llaarrggee ppaanneell aaddaappttéé aauuxx ddiifffféérreenntteess pprroobblléémmaattiiqquueess rreennccoonnttrrééeess..
5555
B.1 Les outils de financement et le suivi des structures. .......................................................................................... 55 B.2 Le Dispositif Local d’Accompagnement comme soutien au développement du monde associatif. ................... 58
CC.. UUnnee iinntteerrvveennttiioonn aayyaanntt ffaaiitt sseess pprreeuuvveess eett ppoouuvvaanntt aalllleerr pplluuss llooiinn.. ............................................................................................ 5599
C.1 Exemples d’interventions révélatrices. ............................................................................................................... 59
¤ ENVIE RHONE ET ENVIE SUD EST : PLUSIEURS INTERVENTIONS EN REPONSE A DES BESOINS DIVERS. ..................................... 59 ¤ LA MOBILISATION DU DLA ET D’OUTILS FINANCIERS AU SERVICE D’UNE JEUNE EI : LE CAS ALTEV. ....................................... 60 ¤ UNE PRISE DE RISQUE DE RDI AYANT CONTRIBUE AU « SAUVETAGE » DE MENAGES SERVICES. ........................................... 63
C.2 Préconisations et recommandations. ................................................................................................................. 64 ¤ DEVELOPPER UNE PEDAGOGIE ECONOMIQUE ET UN SUIVI PLUS RENFORCE EN DIRECTION DES SIAE. .................................... 65 ¤ UNE PRESENCE PLUS FORTE SUR LE TERRITOIRE. ........................................................................................................ 66 ¤ UNE MEILLEURE COORDINATION DES ACTEURS. ......................................................................................................... 67
CCOONNCCLLUUSSIIOONN ................................................................................................................................................. 68
BBIIBBLLIIOOGGRRAAPPHHIIEE ............................................................................................................................................. 71
LLIISSTTEE DDEESS SSIIGGLLEESS ........................................................................................................................................... 74
AANNNNEEXXEESS ....................................................................................................................................................... 75
ANNEXE 1 : LES 4 AXES DU « PROJET D’INSERTION » QUE DOIVENT FORMALISER LES SIAE – (CNAR-IAE, JANVIER 2009,26-27).
.......................................................................................................................................................................... 75 ANNEXE 2 : LES SIAE – CADRE JURIDIQUE (DARES, 2008,12). .................................................................................... 76 ANNEXE 3 : VERS UN CONTRAT UNIQUE D’INSERTION. ................................................................................................. 77 ANNEXE 4 : LES OUTILS D’ANALYSE FINANCIERE (DETAIL DE LA PAGE N°33. ....................................................................... 78 ANNEXE 5 : LES DOMAINES SUR LESQUELS LE RESEAU FRANCE ACTIVE EST SUSCEPTIBLE D’INTERVENIR. .................................. 80 ANNEXE 6 : LES OUTILS D’INTERVENTION FINANCIERE DE RDI ET FRANCE ACTIVE. .............................................................. 81
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IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN
« L'économie sociale et solidaire désigne un ensemble d'initiatives économiques à
finalité sociale qui participent à la construction d'une nouvelle façon de vivre et de penser
l'économie […]. Elle place la personne humaine au centre du développement économique et
social.». De cette définition de l’Economie Sociale et Solidaire, issue de la 2nde rencontre
internationale sur la globalisation de la solidarité qui s’est déroulée en 2001, plusieurs
éléments attirent particulièrement l’attention. « Initiatives économiques à finalité sociale »
plaçant « la personne humaine au centre du développement », telle semble être la
caractéristique même de l’ESS mais aussi le point de départ à notre réflexion. Avant de
poursuivre l’analyse, il convient de revenir brièvement sur cette notion d’ESS, dont le rôle
économique représente 11% du PIB et 12% de l’emploi, bien qu’elle souffre d’un relatif
manque de notoriété et de reconnaissance (Seghers, Allemand, 2007, 11). L’appellation
Economie Sociale réunit l’ensemble des structures sous forme de coopératives, mutuelles,
associations et fondations regroupant des traits communs qui les différencient des entreprises
« classique » à savoir la libre adhésion, la démocratie (une personne = une voix), la non-
lucrativité (ou lucrativité limitée), une utilité sociale, la primauté de l’homme sur le capital
etc. L’ensemble de ces principes se retrouve bien évidemment dans les structures de
l’Economie Solidaire, la distinction entre les deux provenant davantage de considérations
statutaires et de « public cible ». L’Economie Solidaire est apparue dans un contexte de
délitement de l’Etat Providence ne parvenant plus à assurer le plein emploi et à prendre en
charge un nombre d’exclus ne cessant de s’accroître. Elle regroupe les secteurs de l’Insertion
par l’Activité Economique (IAE), l’épargne solidaire, le commerce équitable. Il est donc
certain et reconnu de manière unanime que l’ESS fait d’abord référence à des valeurs et
principes censés être respectés tant dans la mission des structures que dans leur
fonctionnement.
Une des principales tensions qui traverse l’ensemble des acteurs de l’ESS aujourd’hui
provient de leur spécificité même à devoir gérer la conjonction d’une activité marchande avec
un service rendu à un public, autrement dit à se situer « entre valeurs et logique de marché ».
L’objet de ce travail vise à s’interroger plus particulièrement sur le monde de l’IAE et sur la
manière dont les structures concernées font face et parviennent ou non à relever ce paradoxe.
A la fois placées dans une logique économique et dans une logique sociale, ces organisations
de l’IAE mettent en relation deux mondes généralement reconnus comme étant difficiles à
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assembler (Boncler & Hlady-Rispal, 2003, 50). Avant d’étudier les modalités d’une telle mise
en relation, revenons sur ce que l’on associe à l’IAE.
D’après la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre l’exclusion « L’IAE a pour mission
de permettre aux personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles d’accéder
à un emploi en leur proposant des mesures d’accueil et d’accompagnement. Le passage dans
les structures de ce secteur est considéré comme une première étape pour faciliter le retour
des personnes les plus en difficulté sur le marché de l’emploi classique. Les structures
concernées sont les associations intermédiaires (AI), les entreprises d’insertion (EI), les
entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI) et les ateliers et chantiers d’insertion
(ACI) » (DARES, 2008, 12). Ainsi, les organisations de l’IAE assurent simultanément, un
accompagnement social individualisé des personnes travaillant en insertion ainsi qu’une
activité économique dans l’optique de leur permettre d’acquérir des compétences pouvant leur
donner, par la suite, accès au marché du travail.
C’est à partir des années 70, dans un contexte nouveau d’élévation du chômage, que les
premières initiatives ont vu le jour, avec pour but premier le renouvellement des politiques
sociales traditionnelles face à un phénomène en développement, à savoir l’exclusion. En
termes de lutte contre le chômage, ce type d’innovations a marqué le début des politiques
sociales « actives » se donnant pour mission la réinsertion socioprofessionnelle des publics
exclus de l’emploi. 1965, marque la date du premier atelier de travail informel. Dès 1970 sont
ensuite créées les premières entreprises sociales liées aux Centre d’Hébergement et de
Réadaptation Sociale (CHRS) qui ne visent pas l’emploi des publics mais bien leur autonomie
par le travail. Dénonçant le travail social comme moyen de contrôle des populations en
difficulté, rejetant le concept de « handicap social » qui permit un temps de justifier
l’insertion, et souhaitant proposer une alternative à la domination d’une économie libérale et
de marchés, des travailleurs sociaux inventèrent des entreprises d’insertion fonctionnant en
autogestion via notamment la participation des publics en insertion à son organisation (Eme,
2007). Ainsi l’insertion est rapidement apparue comme le pendant de l’assistance en prônant
des valeurs et principes de responsabilisation et d’autonomisation (Eme, 2007). Il fallut dès
lors attendre 1979 et une circulaire de la Direction Générale de la l’Action Sociale pour
encourager la démultiplication de telles initiatives. Au cours de la décennie 80, les différentes
formes de SIAE ont été petit à petit reconnues : en 1983 la première association
intermédiaire (AI) est créée avec pour mission, la mise à disposition de demandeurs
d’emploi à des particuliers, entreprises et associations; une circulaire d’Avril 1985 est venue
légitimer les « PME d’insertion », soit les Entreprises d’Insertion (dont l’appellation date de
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la circulaire de 1989), étant soumise aux contraintes concurrentielles et se devant
d’embaucher des jeunes en difficulté. L’ère 1990 marque la période de l’institutionnalisation
du monde de l’IAE avec la promulgation des Entreprises de Travail Temporaire
d’Insertion (ETTI) en 1991. Dans un contexte particulièrement difficile, avec le durcissement
des processus d’exclusion ayant marqué les années 1993-1996, les EI ne sont plus parvenues à
prendre en charge les plus vulnérables, si bien que les Ateliers Chantiers d’Insertion (ACI)
se sont à cette période multipliés, proposant des actions plus encadrées, plus ponctuelles et
moins formalisées. Il faut attendre 1998 et la loi de lutte contre les exclusions pour voir le
statut des SIAE figuré au Code du Travail (depuis 2005 seulement pour les ACI). Cette loi du
29 juillet 1998, outre la définition qu’elle apporte à l’IAE, marque également une étape
fondamentale dans sa reconnaissance et sa clarification. Un cadre juridique général est dès
lors posé et définit 3 principes : un conventionnement systématique avec l’État déterminant
notamment les modalités et conditions de l’aide financière attribuée à chaque structure, un
agrément Pôle Emploi des publics accueillis dans les SIAE et la création d’un organe
gestionnaire gérant le dispositif sur chaque département, à savoir le conseil départemental de
l’insertion par l’activité économique (CDIAE).
Il est important de souligner que les structures que l’on associe généralement au secteur de
l’IAE sont cependant loin d’être homogènes, d’autant plus dans le cadre de notre sujet. Tandis
que les EI voient en moyenne leur produit d’exploitation être assuré à 80% par leur activité
économique et à 20% par des aides financières de type subventions, la répartition est inverse
pour les ACI. On comprend aisément que la nécessité de développer une activité économique
viable est beaucoup plus pressante sur les EI. Toutefois, les ACI se doivent et développent
également des activités économiques. Il est cependant vrai que les ACI, du fait du profil des
publics qu’elles accueillent, s’orientent souvent vers des activités peu rentables. En gardant
bien cette distinction et les nuances qui peuvent exister entre SIAE à l’esprit, ce travail
s’intéressera au monde de l’IAE dans son ensemble.
La loi de programmation de cohésion sociale, est venue, en date du 18 janvier 2005,
réaffirmer la place de l’IAE dans la lutte contre le chômage et l’exclusion. Pour permettre aux
structures de mener à bien une telle mission, des moyens renforcés sont mis à leur
disposition à savoir une aide à l’accompagnement, dont le versement mensuel est confié à un
unique payeur depuis 2005, le Centre National pour l’Aménagement des Structures des
Exploitations Agricoles (DARES, 2008, 12). Cette dernière loi de 2005 semble avoir impulsé
un réel dynamisme au sein de l’IAE. Ce secteur apparaît comme un véritable acteur de lutte
contre le chômage et l’exclusion et poursuit, non sans encombres, son essor. Les données de
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2003 identifiaient pas loin de 2100 structures (Jeantet, 2006, 87). En 2006, 250 000 salariés en
insertion ont été pris en charge par les quelques 5300 SIAE existantes1. En 2007, à l’exception
des AI, (la Dares ne disposant pas de données suffisantes), on estime à 108 000 le nombre de
personnes ayant été embauchées ou mises à disposition par les SIAE (EI, ETTI et ACI), soit
une hausse de 23% par rapport à 2006 (Jeanneau, Mai 2009). Depuis quelques années, grâce à
un cadre réglementaire évolutif et lui apportant davantage de légitimité, le secteur de l’IAE se
développe mais fait toujours face à de nombreux enjeux et de fortes incertitudes quant à son
avenir.
Concilier initiative économique au service d’un projet social, tel semble être l’enjeu
actuel de l’IAE. Cette idée fait référence à la notion d’entreprenariat social. D’après Boncler
et Hlady-Rispal, l’entreprenariat en économie sociale et solidaire souligne la primauté de la
dimension sociale, autrement dit de la création d’une valeur sociale : « protection de
l’environnement, dynamisation de quartiers défavorisés, aide à des personnes en difficulté…»
(Boncler & Hlady-Rispal, 2003, 30). L’entrepreneuriat social souligne également une
ambivalence, à savoir, la conjonction d’activités et logiques économiques à la création d’une
plus value sociale. Dès lors, la recherche d’une création de valeur au profit des actionnaires
n’est pas transposable aux structures de l’ESS si bien que les entrepreneurs sociaux
s’orientent vers la formule associative et/ou des statuts juridiques sous forme coopératif
comme une alternative à l’entreprise traditionnelle qui leur apparaît comme un «anti modèle».
Il apparaît cependant que ces entrepreneurs « rêvant d’autonomie », font face à une tâche loin
d’être aisée. Outre les difficultés que peuvent poser la réponse à des logiques tant
économiques que sociales, ils font parfois preuve d’une relative méconnaissance de
l’entreprise, de son fonctionnement, de ses outils, des relations partenariales à développer et
d’une attitude envers le marché à adopter. Or, de tels projets nécessitent autre chose que de
l’énergie et de la bonne volonté : autrement dit, de réelles compétences managériales. Il s’agit
bien ici de mettre l’économie et ses rouages au service d’un projet social (Seghers,
Allemand, 2007, 5-6).
L’activité développée par Rhône Développement Initiative, à savoir l’accompagnement et
surtout le financement des structures de l’ESS, place l’association en plein cœur des tensions
qui traversent le secteur aujourd’hui. Apporter un réel soutien aux entreprises sociales et
solidaires qui cherchent à développer une activité économique au service de leur projet social,
tel est l’une des missions phares de RDI. Toutefois, la décision d’intervenir nécessitera
1 http://www.dgefp.bercy.gouv.fr/contrats/insertion_activite_eco/chiffres_cles_iae.pdf
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forcément que la structure ait d’une part pris conscience d’une telle nécessité mais également
qu’elle démontre un certain savoir faire et/ou une volonté à s’inscrire dans cette dynamique.
L’intervention de RDI apportera dès lors un soutien financier ou un accompagnement qui
permettra à la structure de l’aider à « passer un cap », à mieux maîtriser l’ajustement entre le
volet économique de son activité et la poursuite de son objet social. A ce titre, la mission de
suivi consiste à vérifier annuellement si les structures ayant bénéficié d’un financement seront
en mesure d’honorer les remboursements prévus. Au-delà de cet objectif, le suivi s’inscrit
dans une dynamique d’aide et d’accompagnement post financement ; il s’agit pour RDI d’être
en mesure de suivre l’évolution de la structure, d’être force de proposition en cas de difficulté.
Parmi les 40 structures concernées par le suivi 2009, environ la moitié sont agréées structures
de l’IAE. Ceci nous a permis d’avoir une visibilité quant à leur situation dans un
environnement évolutif, leurs forces et difficultés ainsi que leur positionnement quant à la
nécessité d’harmoniser au mieux volet social et économique.
Car les SIAE sont bien évidemment traversées par un tel paradoxe. En parallèle, et/ou
complémentairement à leur objet social, les structures d’insertion exercent tout ou une partie
de leur activité sur des segments du secteur marchand. Il en va d’ailleurs de la pérennité de la
structure qui passe nécessairement par le développement de son activité, la conquête de
nouveaux marchés et débouchés, la diversification de son activité, le gonflement du chiffre
d’affaires et ainsi la réalisation de bénéfices source de sécurisation et d’élévation du niveau de
fonds propres (Boncler & Hlady-Rispal, 2003, 51). De plus, cette présence des structures de
l’IAE au sein du secteur marchand est bien souvent perçue tantôt avec suspicion, tantôt avec
scepticisme. Les financements de l’Etat obtenus par les SIAE en font communément une
image de concurrent déloyal. Or, cette position, à défaut d’être vérifiée, relève plus
précisément d’un positionnement avant tout idéologique (Boncler & Hlady-Rispal, 2003, 53-
54).
Ce qui ressort donc de ces propos, est l’idée forte selon laquelle les SIAE font face à la
nécessité, qu’elle soit volontaire ou imposée, de s’articuler au mieux entre logique
économique et leur projet social. Ainsi il s’agit bien d’un des enjeux majeurs actuel qui
s’impose aux SIAE : développer une situation économique viable au profit d’un projet social.
Dans cette optique, nous nous interrogerons sur la manière dont les SIAE peuvent parvenir
à relever le défi de la mise en adéquation d’une viabilité économique au service de leur
projet/utilité social(e) ?
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Pour répondre à cette problématique, nous étudierons dans une première partie le contexte
actuel dans lequel évoluent les SIAE. Si la nécessité des SIAE de devoir composer entre des
impératifs d’ordre économique et la poursuite de leur objet social n’est pas nouvelle, nous
verrons en quoi le contexte actuel peut en partie précipiter le processus, imposant aux SIAE
de s’engager dans des démarches spécifiques à l’économie. Au regard de l’ensemble des ces
mutations (mouvement général de réforme des politiques publiques, relations évolutives des
SIAE avec leurs financeurs, position de l’IAE vis-à-vis du principe de concurrence) et en
appui sur la mission de suivi, nous analyserons les difficultés que rencontrent aujourd’hui les
SIAE évolutions. Au travers d’une seconde partie, nous tenterons d’examiner comment les
SIAE peuvent faire face à ce défi épineux. Nous analyserons, sur la base d’exemples
notamment, l’ensemble des facteurs clés de succès permettant aux SIAE de répondre aux
enjeux auxquels elles font face. Puis nous tâcherons de démontrer qu’il existe, à l’image du
réseau France Active notamment, de nombreux outils d’accompagnement et de financement
pouvant être mobilisés en vue de soutenir les SIAE dans cette démarche. Un focus particulier
sera réalisé sur RDI et le réseau France Active, en tentant d’analyser et comprendre leur
positionnement tout en proposant des recommandations pour l’avenir.
11
PPAARRTTIIEE 11 :: LLEESS SSIIAAEE FFAACCEE AA DDOOUUBBLLEE DDEEFFII :: UUNN DDEEVVEELLOOPPPPEEMMEENNTT
EECCOONNOOMMIIQQUUEE NNEECCEESSSSAAIIRREE AA LLAA CCOONNDDUUIITTEE DDUU PPRROOJJEETT SSOOCCIIAALL..
Dans cette première partie, nous analyserons le contexte fortement mouvant qui
encadre le secteur de l’IAE afin de montrer en quoi, les SIAE se doivent aujourd’hui de
prendre en compte et de gérer au mieux leur positionnement au plan économique et social,
puis nous étudierons les principales difficultés qu’elles rencontrent actuellement face à une
telle problématique.
II.. UUnn ccoonntteexxttee eenn mmuuttaattiioonn ppoouurr oorriiggiinnee..
L’environnement de l’IAE a connu ces derniers temps de nombreuses réformes et
mutations qui expliquent le défi qui s’impose aujourd’hui aux SIAE. Ces évolutions méritent
d’être présentées et il incombe d’en analyser les conséquences sur le monde de l’IAE.
A. L’évolution du cadre réglementaire : définition et conséquences des
nouvelles modalités de conventionnement.
AA..11 LLeess nnoouuvveell lleess mmooddaall ii ttééss ddee ccoonnvveennttiioonnnneemmeenntt eett llaa ddyynnaammiiqquuee ddee rrééffoorrmmee pprrooffoonnddee ddeess ppooll ii ttiiqquueess ppuubbll iiqquueess..
En Juillet 2007, le gouvernement a lancé un vaste programme destiné à poursuivre
l’objectif de diminution des dépenses publiques en renforçant simultanément la qualité et
l’efficacité de l’action publique dans son ensemble. Ce chantier mieux connu sous le nom de
« Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) » s’inscrit dans la suite logique de
réformes déjà amorcées en la matière. L’esprit de ce programme entend mettre en place un
dispositif complet de réexamen des dépenses étatiques en étudiant la pertinence des missions
engagées, le niveau des moyens à mobiliser qu’elles nécessitent ainsi que l’évaluation de leurs
résultats. Un dossier de presse des services du Premier Ministre stipulait dès lors que « la
révision vise à identifier les réformes qui permettront de réduire les dépenses de l’État, tout
en améliorant l’efficacité des politiques publiques. Les économies qui pourront être dégagées
grâce aux réorganisations et à la diminution des effectifs permettront de financer le
renforcement de certaines politiques et les grandes priorités du gouvernement2 ». Une telle
démarche prévoit notamment une révision exhaustive appliquée à chaque ministère. En ce qui
concerne le Ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi (MEIE), la modernisation
2 http://www.vie-publique.fr/actualite/dossier/rgpp/revision-generale-politiques-publiques-coup-accelerateur-pour-reforme-etat.html
12
s’articule autour de 4 principaux axes, dont le « recentrage de la politique de l’emploi sur ses
priorités pour la rendre plus efficace ». Dans ce cadre, deux principales mesures ont été
définies et devront être rapidement mises en place (MEIE, mai 2009):
- la réforme des aides à l’emploi avec la fusion des contrats existants en un contrat
unique d’insertion.
- la responsabilité du Pôle Emploi3 d’opérer un accompagnement plus rapproché sur
ces types de contrats.
De son côté, la « Loi Organique relative aux Lois de Finances » (LOLF), votée en 2001 et
appliquée depuis 2006, établit le cadre juridique d’élaboration du budget de l’Etat. Avec pour
principes fondamentaux, la recherche de transparence et d’efficacité des politiques mises en
œuvre par l’Etat. Cette loi divise le budget étatique en 34 missions pour lesquelles divers
programmes et actions sont déclinés. Passant d’une logique de moyens à une logique de
résultat, les budgets sont dorénavant attribués chaque année en fonction des résultats obtenus
précédemment. On est donc sorti d’une dynamique de reconduction relativement automatique
des budgets (CNAR-IAE, Janvier 2009,8). Dans un tel contexte évolutif, les SIAE sont
forcément concernées par les nouvelles modalités d’attribution des budgets publics. Recevant
des financements publics au titre des politiques publiques de l’emploi, l’IAE est intégrée
depuis 2006 dans le cadre du programme « accès et retour à l’emploi » de la mission Travail.
Ainsi, le passage d’une logique de moyens à une logique de résultat impacte inéluctablement
le monde de l’IAE. Les financements qui leur sont accordés dépendent désormais des résultats
affichés par chaque structure, résultats qui sont évalués au regard des retours à l’emploi que la
structure permet (CNAR-IAE, Janvier 2009,9).
L’analyse de l’IAE révèle la prépondérance de l’Etat et des acteurs déconcentrés dans le
fonctionnement du secteur. Le cadre politique, fortement influent, se trouve aujourd’hui en
perpétuelle mouvance. Dans le secteur de l’IAE, l’Etat et les acteurs déconcentrés occupent
une place primordiale dans l’interaction : le Pôle Emploi et la DDTEFP notamment. Rien ne
semble pouvoir être fait sans son intervention et il est en mesure, via ces deux entités de
bloquer ou impulser la dynamique de l’IAE. On se trouve actuellement dans une période où
l’Etat tend à vouloir transférer les compétences aux acteurs locaux sans pour autant distribuer
et/ou définir encore clairement la répartition des rôles, compétences et outils. La définition
des nouvelles modalités relatives à l’IAE illustre un environnement politique encore incertain.
De même, les perspectives de disparition prochaine des DDTEFP posent de nombreuses
3 issu de la fusion de l’ANPE et de l’UNEDIC
13
interrogations lorsque l’on considère l’importance de cet acteur au sein du fonctionnement
départemental de l’IAE (Centre Ain Actif, 2008, 7). Par conséquent, Dorival identifie un
pilotage du secteur trop complexe, car réparti au sein d’un nombre d’acteurs trop important.
En la matière, il serait bénéfique d’opérer à une clarification des compétences et qu’un acteur
public du territoire soit nommé « chef de file » de l’IAE (Dorival, 2007).
AA..22 LLeess nnoouuvveell lleess mmooddaall ii ttééss ddee ccoonnvveennttiioonnnneemmeenntt eett lleeuurrss ccoonnssééqquueenncceess ppoouurr lleess SSIIAAEE..
Le plan de modernisation de l’IAE s’inscrit donc dans une perspective d’adaptation à
ces évolutions de l’environnement des politiques publiques. Ainsi ce plan de modernisation,
outre la redynamisation des CDIAE4, vise à définir de nouvelles modalités de
conventionnement (négociation entre l’Etat et les SIAE des objectifs opérationnels au regard
des besoins d’un territoire spécifique) ainsi que de nouvelles modalités de financement, dont
les premières expérimentations devraient voir le jour courant 2009. Un groupe de travail5
réfléchit actuellement sur les nouvelles modalités de financement de l’IAE qui suivront les
nouvelles modalités de conventionnement. Les points principaux de la négociation portent sur
le montant des aides aux postes. Un débat important consacre notamment la volonté
d’introduire une aide modulable et encadrée, qui « viserait à fixer le montant de l’aide aux
postes selon les objectifs économiques et d’insertion des structures » (France Active, Avril
2009 14). La loi du 1er Décembre 2008 marque la refonte des politiques d’insertion avec
notamment la création du contrat unique d’insertion. Dans un souci de simplification des
divers contrats aidés existants aujourd’hui, d’amélioration de l’insertion professionnelle
durable (via le développement de l’accompagnement, du tutorat et de la formation) et de
facilitation de la médiation des acteurs, le contrat unique d’insertion est créé et sera mis en
vigueur le 1er Janvier 2010 (France Active, Avril 2009, 19). D’après ses modalités, deux types
de contrats seront mis en place : le CAE (Contrat d’Accompagnement dans l’Emploi)
concernera le secteur non marchand et le CIE (Contrat Initiative Emploi) s’appliquera sur le
secteur marchand (cf annexe 3).
Concernant les nouvelles modalités de conventionnement, une négociation entre SIAE et
l’Etat est prévue et vise à fonder le financement pour une période de 1 ou 3 ans sur un plan
d’action et des résultats à atteindre. Les SIAE, en vue de préparer ces périodes de négociation,
doivent veiller à réaliser au préalable un propre diagnostic. L’annexe 4 de la circulaire
4 Conseil Départemental de l’Insertion par l’Activité Economique 5 Conduit par la DGEFP et composé des réseaux de l’IAE, du CNIAE, de l’AVISE, du CNAR financement et de représentants des collectivités.
14
DGEFP n°2008-21 du 10 Décembre 2008, propose un référentiel structuré en 4 axes qui sert
uniquement d’appui. Chaque référentiel se décline en fonctions, actions, compétences et outils
que la SIAE doit maîtriser. Ces quatre axes permettant de dresser son autodiagnostic sont :
� l’accueil et l’intégration en milieu de
travail,
� l’accompagnement social et professionnel,
� la formation des salariés en insertion,
� la contribution à l’activité économique
et au développement territorial
On identifie clairement la nécessité pour chaque SIAE de mettre en valeur à la fois ses
réalisations en termes d’insertion (vocation sociale) et son équilibre économique. La structure
doit donc s’inscrire dans des secteurs d’activité lui permettant de concilier logique d’insertion
et impératif économique afin de maîtriser au mieux les négociations avec l’Etat et ainsi
bénéficier des conventionnements et soutiens escomptés. La définition du conventionnement
prendra en compte les indicateurs « emploi » reflétant l’efficience/efficacité de la structure
concernée. Ces indicateurs correspondent à 3 catégories que l’on appelle « sorties
dynamiques » (CNAR-IAE, Janvier 2009,22).
¤ Les sorties vers l’emploi durable : CDI, CDD ou intérim de plus de 6 mois,
création d’entreprise, stage ou titularisation dans la fonction publique.
¤ Les sorties vers « un emploi de transition » : CDD ou période d’intérim de moins
de 6 mois, contrat aidé chez un employeur de droit commun.
¤ Les sorties positives : formation qualifiante ou pré-qualifiante, embauche dans une
autre SIAE.
Bien que les indicateurs «emploi» soient négociés entre la SIAE et l’Etat, il existe des valeurs
de référence à atteindre sous 3ans : un taux minimum de sorties dynamiques de 60% et un
taux de sorties vers l’emploi durable (CDI, CDD, intérim de plus de 6 mois, création
d’entreprise) de 25%.
Une telle définition des critères de conventionnement ne va pas sans poser de problèmes aux
SIAE. Tout d’abord, ces nouvelles logiques imposent aux acteurs la poursuite d’objectifs
négociés avec l’Etat et une évaluation des résultats au regard de critères définis bien souvent
en leur absence. L’un des problèmes majeurs soulignés par les acteurs, est que dans le cadre
de la RGPP et de la LOLF, la concertation des acteurs est trop souvent réduite en peau de
chagrin, si bien que cela mène à penser et constater que ces réformes sont « une affaire
d’Etat » (CPCA, Septembre 2008, 27). Ce n’est donc pas la réforme de l’Etat qui est
questionnée en France, mais bien l’absence de concertation avec les divers acteurs (CPCA,
15
Septembre 2008, 28). Par ailleurs, il peut apparaître contradictoire d’appliquer des critères
quantitatifs de performance par rapport aux méthodes, objectifs et contraintes de
l’intervention sociale, fondée davantage sur une démarche qualitative. La création
d’externalités positives sur la collectivité, l’insertion et la formation de personnes éloignées de
l’emploi, l’aide à la résolution de problèmes annexes, sont autant d’objectifs spécifiques aux
SIAE et qui s’inscrivent sur le long terme, nécessitant à fortiori des outils d’évaluation
adaptés rendant précisément compte de leur véritable contribution (Bouchard, Bourque,
Lévesque, 2000, 4). Il serait donc préférable de laisser une place plus importante à
l'élaboration de critères qualitatifs de performance. Un risque important résultant de la
nécessité des structures de se conformer aux exigences de rendement en termes de volume, de
temps et de rationalité est de voir les associations s’inscrire dans des « logiques de tri entre les
bénéficiaires au détriment des situations les plus difficiles et des personnes les plus
défavorisées » (UNIOPSS, Février 2009). On comprend dès lors que l’évolution du cadre
réglementaire qui régit l’IAE rappelle inéluctablement la tension qui traverse de nombreuses
SIAE, à savoir l’harmonisation d’une logique économique à une logique sociale, sans se
détourner de l’un ou l’autre de ces aspects.
B. Le financement des SIAE : à nouvelles logiques, nécessité de nouvelles
stratégies.
BB..11 DDeess llooggiiqquueess ddee ffiinnaanncceemmeenntt ppuubbll iicc ttoouujjoouurrss pplluuss ccoonnttrraaiiggnnaanntteess……
Afin de compenser la moindre productivité des salariés embauchés au sein des SIAE,
ces dernières bénéficient d’aides à l’emploi selon le conventionnement qui est déterminé et en
fonction du nombre d’heures en insertion effectivement réalisé. Or, une remarque générale
émane de l’ensemble des structures de l’IAE, à savoir que depuis maintenant 7 ans, le
montant de cette aide de poste qui correspond à 9681€ par ETP en insertion pour un an, n’a
pas évolué. De nombreux directeurs de SIAE nous ont confié que cette aide ne suit pas les
évolutions annuelles du SMIC, si bien qu’au fil des années, le coût relatif du personnel en
insertion s’accroît naturellement.
En sus de ces aides, les SIAE bénéficient dans bien des cas, de financements
complémentaires selon leur activité. A la source de ces financements, on retrouve notamment
les Conseils Généraux et Régionaux, les Plans Locaux pour l’Insertion et l’Emploi (PLIE),
l’Etat, l’Agefiph ou encore les communes (DARES, 2009, 10). Toutefois, on remarque une
tendance générale à l’évolution des modalités d’obtention de ces aides. Le monde de l’IAE
16
fait aujourd’hui face à une double tendance en ce qui concerne ces modes de financement :
l’éparpillement des sources de financement -d’autant plus que chaque financeur dispose de sa
propre logique- ainsi que leur tarissement (Seghers, Allemand, 2007, 33).
D’après un diagnostic mené par un groupe d’experts et reporté par C. Alphandéry, une
insuffisance des financements publics, doublée d’une complexité et d’une instabilité est
constatée par les acteurs de l’IAE (Dorival, Septembre 2007).
Ces financements imposent aux structures qui en font la demande d’être en mesure de
présenter des dossiers complets, contenant une multitude d’informations (les comptes
financiers de l’année écoulée ; un budget de l’année en cours, le montant des ressources
propres, un état des lieux de la situation fiscale etc). L’obtention de tels financements
imposent aux structures d’être à même de pouvoir présenter une certaine rigueur et capacité
d’organisation, de gestion et d’anticipation de son activité. De même, l’obtention d’un
financement ne signifie en rien un renouvellement assuré. Les efforts fournis par la structure
en vue d’obtenir un tel soutien doivent donc être permanents. Qui plus est, chaque financeur
dispose de sa propre démarche en vue d’accorder des subventions. Les dossiers sont souvent
longs et pointilleux à remplir, les décisions se prennent bien souvent sur des échéances de
plus en plus importantes.
La tendance actuelle mène également à une relative contraction des subventions, ce qui place
de nombreuses structures dans des situations délicates. Ce cas s’illustre lorsqu’une structure,
qui recevait de manière régulière un financement de la part d’un acteur public, perd
soudainement cet apport d’une année sur l’autre. Dans le cas où cette aide publique concernait
une somme relativement importante, lorsque la structure avait peu de sources de financement
autres ou qu’elle ne présente pas une activité propre et autonome lui permettant de dégager du
résultat, alors elle risque de se retrouver brusquement dans des situations inconfortables
(Jeantet, 2006, 115).
Autre point qui tend de plus en plus à pénaliser les structures d’insertion, les délais de
versement de ces subventions. Bien souvent, ces derniers sont si longs qu’ils engendrent pour
les structures des tensions fortes de trésorerie. Il existe bien des solutions auprès des banques
pour remédier à une telle situation mais elles impliquent des frais financiers de court terme.
L’analyse des éléments financiers des structures de l’IAE révèle bien souvent l’existence de
ces lignes de crédit court terme du fait des retards et reports de l’octroi des subventions
publiques, les fonds européens étant les plus longs à arriver.
17
Ainsi, d’après une enquête menée par la CPCA, le monde associatif semble unanime sur
l’idée que l’accès et la gestion des financements représentent un travail à part entière qui
nécessite du temps, des compétences et des moyens. A cette tendance, un dirigeant de SIAE
témoigne : « Le temps passé à constituer le dossier et à justifier des dépenses est totalement
inadapté à nos structures. On finit par passer plus de temps dans le travail administratif
qu'en opérationnel sur les projets ! » (CPCA, Septembre 2008, 24). Ces dérives laissent
planer une menace : à croire que la réponse à des exigences toujours plus fortes détourne le
monde associatif, faute de temps, de son utilité sociale, de son cœur d’activité.
BB..22 …… qquuii iimmppll iiqquueenntt llee ddéévveellooppppeemmeenntt ddee nnoouuvveell lleess ssttrraattééggiieess..
Le monde de l’IAE fait donc aujourd’hui face à une redéfinition des modalités de son
financement ce qui le pousse à repenser et développer de nouvelles stratégies de
développement. La première voie consiste à faire de plus en plus appel à une gamme très
diversifiée de sources de financement. De la création de partenariats public-privé, au recours à
des subventions publiques, en passant par le mécénat, les structures de l’IAE doivent
« ratisser large » afin d’assurer le développement et la pérennisation de leur activité. Cette
relative dépendance aux moyens de financement externes amène les structures à s’engager
dans une dynamique de gestion proche de ce qui se passe dans le secteur marchand et à
s’inscrire de plus en plus dans des logiques concurrentielles (Seghers, Allemand, 2007, 16).
La seconde solution face à la problématique de recherche de financements consiste à
rechercher une autonomie financière toujours plus forte. A titre d’illustration, le monde
associatif s’inscrit toujours plus dans une logique de professionnalisation tel que nous
l’indique ce témoignage de Jean-Guy Henckel, président et fondateur en 1991 des Jardins de
Cocagne : « Il y a trente ans, j’étais considéré comme un bricoleur fou, je suis désormais un
entrepreneur social » (Seghers, Allemand, 2007, 19). En effet, d’un stade de bricolage, de
nombreux entrepreneurs sont désormais passés à la professionnalisation, à la modélisation de
leur projet. Travailleur social d’origine, Jean-Guy Henckel a rapidement pris conscience de la
nécessité d’apprendre à manager et se familiariser avec les outils de marketing, gestion,
communication etc. « Autant de techniques qui manquaient cruellement au travailleur social
pour gérer une entreprise d’insertion » témoigne t-il (Seghers, Allemand, 2007, 28). M. Clair,
fondateur de l’Association Intermédiaire Lotoise (AIL46) insiste également sur la nécessité de
se « comporter en chef d’entreprise, non pas en quête de profit, mais attentif aux comptes de
son activité » (Seghers, Allemand, 2007, 97). Selon lui, il en va de la pérennité des structures :
« Une petite association se gère comme une petite entreprise » poursuit M. Clair.
18
C. L’IAE face au principe de concurrence et aux logiques
entrepreneuriales : entre contraintes et opportunités.
CC..11 LLee ddééffii dduu pprr iinncciippee ddee ccoonnccuurrrreennccee :: qquueell aavveennii rr ddee ll ’’ IIAAEE ddaannss llee ccoonntteexxttee ccoommmmuunnaauuttaaii rree ??
Depuis 2000, l’Union Européenne (UE) s’est dotée d’une stratégie économique et
sociale (dite « stratégie de Lisbonne ») qui vise à la coordination de l’ensemble des politiques
de l’emploi des Etats membres. Des orientations sont donc définies tous les trois ans, puis
déclinées par chaque Etat membre, dans le cadre d’un programme national de Réforme
(PNR). Le PNR français (2005-2008) indiquait priorité qui nous concerne particulièrement à
savoir, « créer des marchés du travail qui favorisent l’insertion des demandeurs d’emploi et
des personnes défavorisées ». Au travers d’une telle stratégie, l’UE intervient comme appui
des Etats dans un souci de mutualiser et diffuser les bonnes pratiques et de faire converger les
conceptions nationales en matière d’insertion via la notion « d’inclusion sociale active ».
L’inclusion sociale active est perçue comme un moyen efficace en vue de la promotion de
l’insertion et de l’intégration sociale sur le marché du travail des personnes qui en sont le plus
éloignées. Objet d’une consultation publique en 2004, il est ressorti que les structures de
l’IAE jouent un rôle important dans le processus de retour à l’emploi et apparaît comme un
outil d’inclusion sociale par excellence. Toutefois, il semble qu’il reste bien difficile de faire
prendre en compte les spécificités de l’IAE au niveau européen.
En effet, l’intervention des pouvoirs publics des Etats membres afin de soutenir les opérateurs
économiques apparaît comme contraire au principe de libre concurrence. Autrement dit, la
commission a pour objet de veiller à ce que les aides publiques accordées aux « entreprises »
nationales, dès lors qu’elles exercent une activité économique, ne nuisent pas aux règles du
commerce entre les Etats membres. Les SIAE sont inclues dans cette catégorie d’entreprises
nationales (CNIAE, 2007). Néanmoins, la Commission peut considérer des finalités de nature
économique et sociale afin d’exempter certaines aides d’un tel contrôle : cela concerne les
aides dont bénéficient les « entreprises chargées de la gestion d’un service économique
d’intérêt général » (art86 Traité des Communautés Européennes). D’autre part, il existe des
règlements généraux d’exemption des aides destinées aux PME dont la finalité est la création
d’emplois et/ou de financer des investissements tangibles ou non. Parmi ces acteurs
économiques spécifiques, les SIAE peuvent compter (CNIAE, 2007).
Dès lors, un des enjeux fondamental pour l’IAE est d’être reconnu comme relevant des
activités de la catégorie des Services Sociaux d’Intérêt Général (SSIG) ce qui l’exclurait par
conséquent du champ de la directive « Services » européenne devant être transposée d’ici la
19
fin 2009 en droit français. Les activités qui seront reconnus comme faisant partie intégrante de
la catégorie des SSIG seront exclues du champ de cette directive, les autres devront se plier
aux règles du marché établies par l’UE et voir ainsi leurs financements publics
considérablement réduits. De plus, ces activités ne pourront plus bénéficier des dérogations au
code des marchés publics et devront y répondre dans le cadre d’une mise en concurrence
(Jeanneau, Avril 2009). L’enjeu est considérable pour l’IAE. On comprend dès lors que la
question reste de savoir si l’IAE peut être considérée comme un SSIG (Jeanneau, 2009).
Malgré des avis favorables, l’IAE et son intégration dans le cadre des SSIG n’est pas acquise.
Le caractère hybride de l’IAE semble aujourd’hui poser problème : son inscription sur le volet
tant économique que social ne correspond pas à la logique du droit communautaire qui oppose
systématiquement action économique ne relevant que de la concurrence et action purement
sociale, considérée comme un service d’intérêt général. La pérennité des SIAE fait donc face
à la menace d’une application extensive de la directive visant à libéraliser le marché des
services. L’IAE se retrouve face à un imbroglio juridique ; la directive Services décrit dans
son article 2.2.j les domaines d’activité qui échappent à son champ à savoir (Jeanneau, Avril
2009): «les services sociaux relatifs au logement social, à l'aide à l'enfance et à l'aide aux
familles et aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une
situation de besoin, qui sont assurés par l'Etat, par des prestataires mandatés par l'Etat ou
par des associations caritatives reconnues comme telles par l'Etat » [souligné par l'auteur].
Le blocage semble provenir de la notion de « mandatement » qui d’une part n’existe pas
vraiment en France et d’autre part connaît une définition plutôt restrictive au niveau européen.
Appartenir au champ des SSIG nécessite d’être mandaté par l’Etat qui doit préciser
l’obligation, la mission du service, sa durée et sa compensation. Dans le cas où l’Etat ne se
conforme pas à une telle procédure, le financement accordé aux prestataires sociaux risque
d’être reconnu illégal par la Commission et la Cour de Justice des Communautés
Européennes. Un point d’ambiguïté supplémentaire vient couvrir ce débat, à savoir qu’il
existe une définition du mandatement « relative au financement des opérateurs sociaux par
des aides d'Etat » (Jeanneau, Avril 2009). « Or les « mandats » au sens de la directive
Services et au sens du droit communautaire des aides d'Etat ne recouvrent pas
nécessairement la même chose », souligne Jeanneau. Un rapport6 a donc été rendu par Michel
Thierry7, en charge d’animer un groupe de travail interministériel en vue de sécuriser
juridiquement les SSIG et ainsi clarifier la situation. Pourtant, l’analyse du rapport fait 6 Janvier 2009 7 inspecteur général des affaires sociales,
20
apparaître un sérieux paradoxe selon la définition du « mandatement » que l’on envisage.
D’une part, le rapport cite l’IAE comme étant bien bénéficiaire d’un mandatement d’intérêt
général au titre des aides publiques étatiques, ce qui laisse à penser que « le financement des
structures de l'IAE est donc sécurisé»8. Pour autant, en aucun cas, le rapport ne cite que le
mandat de l’IAE est constitué au sens de la Directive Services (Jeanneau, 2007). Le rapport
interprète la notion de mandatement au nom de la directive comme un « régime administratif
de mandat allant au-delà d’une simple autorisation de fonctionner ». Or, dans un avis rendu
par le CNIAE en Mai 2008, il semble que le régime dans lequel se trouve l’IAE dépasse
largement « la simple autorisation de fonctionner » :
« La réglementation nationale de l'IAE issue des lois du 29 juillet 1998 et du
18 janvier 2005 comprend en effet un régime d'encadrement de la mission d'insertion,
reposant sur une convention avec l'Etat sans laquelle le financement public de la mission
d'insertion n'est pas assuré. De plus, pour les EI, ETTI et partiellement pour les AI et ACI, un
agrément-diagnostic de la situation des personnes par l'agence locale de l'emploi conditionne
l'attribution de l'aide de la puissance publique et complète ce régime d'encadrement ».
Autrement dit, les SIAE sont bel et bien contraints de remplir des missions déterminées et
définies sous peine d’une résiliation de leur convention contractée avec le préfet. Cette
convention fait par ailleurs l’objet d’un contrôle annuel. L’IAE semble donc soumise à un
régime qui dépasse « la simple autorisation de fonctionner », il conviendrait donc de l’exclure
du champ d’application de cette directive Services (Jeanneau, 2009).
L’enjeu pour l’IAE, repris par les réseaux (FNARS, CNIAE, UNIOPSS), consiste donc à
militer pour l’adoption d’une directive sur « les services sociaux et de santé d’intérêt
général » en vue d’aboutir à la constitution d’un cadre légal reconnaissant la spécificité de
l’activité proposée par les SIAE. Ce débat est encore loin d’être clos et il convient à présent
d’attendre l’horizon fin 2009/début 2010 afin de considérer l’avenir de l’IAE dans le contexte
communautaire.
CC..22 SSIIAAEE eett ccoommmmaannddee ppuubbll iiqquuee :: àà llaa rreecchheerrcchhee dd’’ uunn «« jjuussttee mmii ll iieeuu »»..
Dans le cadre de la RGPP et de la LOLF, visant à mettre en place une logique non plus
de moyens mais de résultat, assortie d’un processus d’évaluation de l’utilisation des fonds
publics, on identifie une dynamique de mise en concurrence qui tend à transformer la relation
pouvoirs publics/associations d’une logique de partenariat en une logique de prestation de
8 Samuel Le Floch, chargé de mission pour les affaires européennes à la Fnars
21
services. Cette tendance s’illustre notamment par le recours de plus en plus systématique aux
procédures des appels d’offre plaçant les SIAE en concurrence non seulement entre elles mais
également vis-à-vis des structures du secteur lucratif qui s’inscrivent de manière croissante
sur des domaines qu’ils délaissaient auparavant : secteurs de la petite enfance, du service à la
personne et de l’insertion (Uniopss, 2009). L’inscription des SIAE dans un environnement
concurrentiel assure de moins en moins aux associations de financements stables et pérennes.
Cette tendance a pour effet de placer les structures dans des situations délicates dès lors
qu’elles perdent un financement ou un marché qui représentait une part importante de la
constitution de son produit d’exploitation. L’Uniopss9, perçoit d’un mauvais œil cette
situation et met en garde contre le fait que « les logiques de mise en concurrence placent les
associations uniquement comme prestataires des pouvoirs publics sur la base d'un cahier des
charges élaboré de façon unilatérale et ne leur permettent pas d'exercer leur capacité
d'initiative et de repérage des besoins » 10 (Uniopss, 2009). Un constat largement repris dans
le monde de l’IAE souligne le fait que l’exigence de démarches administratives de plus en
plus forte ainsi que la réponse nécessaire et régulière aux appels d’offre diminuent
sérieusement le temps qu’elles peuvent consacrer à leur cœur de métier, à l’évolution de leur
activité et la mise en œuvre de diverses expériences innovantes. En outre, un positionnement
systématique des associations sur les appels d’offre, risquerait de bouleverser le maillage
associatif et le développement d’initiatives locales de proximité au profit de la constitution de
groupes importants faisant preuve d’une forte technicité en vue de répondre à la commande
publique. Un tel processus nuirait indéniablement aux petites associations étant dès lors
insuffisamment armées pour se positionner.
Toutefois, il ne s’agit pas de critiquer à outrance le principe de concurrence auquel
doivent aujourd’hui faire face les SIAE mais d’en pointer les risques de dérives. La mise en
concurrence semble tout d’abord inciter de manière positive les structures à développer des
outils de gestion et de développement économique pertinents (Uniopss, 2009). D’autre part,
les SIAE semblent plus à même d’apporter une réponse personnalisée et spécifique aux
besoins constatés sur le terrain dans le cadre des appels d’offre. Les règles de concurrence,
principe phare porté par l’UE, permettrait également d’assurer une transparence dans les
relations associations/pouvoirs publics, de supprimer toute « rente de monopole » et de
permettre des gains en termes de rapport qualité/prix. Si certaines vertus de la concurrence
9 Union Nationale Interfédérale des Œuvres et Organismes Privés Sanitaires et Sociaux 10 http://www.uniopss.asso.fr/resources/trco/pdfs/2009/02_fevrier_2009//positionconcurrence.pdf
22
sont avérées, il s’agit de ne pas tomber dans le « tout-marché ». A l’inverse, le « tout-
subventionnement » est loin d’être une solution, notamment dans le contexte actuel.
L’enjeu consiste donc à trouver un juste milieu, ce à quoi peut répondre le
développement de l’introduction des clauses d’insertion dans les marchés publics. Une telle
dynamique permet une réelle reconnaissance de l’utilité sociale des SIAE et éventuellement,
de bien prendre en compte certains critères qualitatifs qui les caractérisent. La mise en œuvre
de ces clauses d’insertion semble apparaître comme une solution optimale. Incitant les
structures d’insertion à développer des outils pertinents et efficaces de gestion en vue de
pouvoir remporter des appels d’offre, l’inclusion des clauses d’insertion dans la commande
publique marque une réelle volonté politique de reconnaître les SIAE pour leur objet social
qui doit rester avant tout leur cœur de métier. Un tel processus permettrait ainsi d’éviter aux
SIAE de tomber dans bien des écueils, mettre de coté leur objectif d’insertion par exemple. A
défaut d’une généralisation systématique des appels d’offre, l’Uniopss préconise une
« commande publique socialement responsable et transparente » mettant l’accent sur le
recours aux clauses sociales et environnementales prévues par le Code des Marchés Publics.
Toutefois, nous y reviendrons, les clauses d’insertion sont encore loin d’être un processus
largement répandu et leur généralisation nécessite la réunion de nombreuses conditions.
L’IAE doit aujourd’hui s’adapter à un environnement particulièrement mouvant. Alors
que des nouvelles modalités de conventionnement et de financement sont actuellement
définies et mises en place, les SIAE doivent également composer avec l’évolution des
relations avec leurs financeurs traditionnels et faire face à leur exposition croissante à des
situations concurrentielles. Ces mutations imposent de plus en plus aux SIAE la nécessité de
s’interroger sur la manière la plus pertinente de se positionner entre des impératifs
économiques et l’accomplissement de leur projet social. Ces transformations du monde de
l’IAE ne vont pas sans poser de difficultés, que nous allons à présent aborder.
23
IIII.. DDeess ddiiffffiiccuullttééss aavvéérrééeess ccoommmmee rrééssuullttaatt..
L’environnement évolutif dans lequel se trouvent les structures de l’IAE leur impose
sans cesse de s’adapter. Devant relever le défi de l’impératif économique, les SIAE ne doivent
pas pour autant en oublier leur objet social : l’insertion. Cette double problématique, pouvant
sembler paradoxale ne va pas sans créer de nombreuses tensions pour les SIAE. En s’inspirant
d’un Etat des Lieux de l’IAE réalisé sur le bassin d’emploi de Bourg en Bresse, de la mission
de suivi des structures financées par RDI et en reprenant une typologie des « maux » qui
traversent le plus souvent le monde associatif (Bigourdan, Tcherkachine, 2004, 146), cette
partie s’attache à identifier les tensions et difficultés auxquelles font aujourd’hui face les
SIAE. Les analyses réalisées dans le cadre de l’Etat des Lieux sont, pour la plupart,
transposables au niveau national. Dans le cadre de la mission de suivi d’une quarantaine de
structures de l’ESS, on dénombre 20 SIAE réparties de la manière suivante : 8 EI, 4 ETTI, 5
ACI, 2 AI11 et 1 régie de quartier. Un tel échantillon semble intéressant pour dégager certaines
grandes tendances.
A. Les SIAE et leur inscription dans l’économie : des acteurs méconnus
soumis aux aléas de la conjoncture.
AA..11 UUnn mmaannqquuee ddee rreeccoonnnnaaiissssaannccee eett uunnee ccoonnnnoottaattiioonn eennccoorree ppééjjoorraattiivvee ddee ««ll ’’ iinnsseerr ttiioonn»»..
Une de premières difficultés que rencontrent les SIAE dans la poursuite de leur
mission est issue d’un état de fait. Le terme « d’insertion » reste encore connoté
péjorativement auprès de nombreux individus. Les publics éloignés de l’emploi tendent à être
déconsidérés et perçus comme ayant tendance à tomber/se conforter dans l’assistanat. Aux
yeux de certains, les SIAE ne rempliraient pas leur mission, n’assurant pas le retour à l’emploi
des publics en difficulté. L’insertion serait dès lors marginalisée, stigmatisée et considérée
comme un domaine « à part » (Centre Ain Actif, 2008, 3). Ce constat est tel que de nombreux
responsables de structures le ressentent et se refusent de mettre en avant le facteur insertion.
Ainsi, au cours d’un entretien de suivi avec une EI spécialisée sur le secteur du nettoyage, la
responsable nous confortait dans cette idée. Sur un secteur aussi concurrentiel, insister auprès
des clients sur la mission d’insertion que se donne la structure ne représente en aucun cas un
quelconque avantage concurrentiel, au contraire. Nombreuses sont les SIAE qui se refusent à
11 A noter que deux structures concernées, initialement répertoriées comme AI ont également développé parmi leurs activités, une activité ACI. Ainsi, 18 structures sont réellement concernées.
24
communiquer ainsi et préfèrent apparaître comme des acteurs économiques à part entière sur
le secteur concerné. Une telle situation résulte du manque de (re)connaissance du secteur de
l’IAE, de son objet, ses principes et modalités de fonctionnement.
Pourtant d’après un sondage mené par l’Institut Opinionway12, l’un de principaux
enseignements à retenir est la légitimité accordée aux acteurs de l’IAE pour traiter des
problématiques relatives à l’insertion sociale et professionnelle. A ce titre, les SIAE arrivent
juste derrière les collectivités territoriales. Pour autant, il est important de souligner que 60%
seulement des personnes interrogées ont déjà entendu parler des SIAE, ce qui reste
relativement faible si l’on considère que la moitié ne connaît pas réellement les différences et
spécificités de ces structures. Un élément encore plus révélateur correspond aux 81% des
personnes interrogées qui affirment ne connaître aucune SIAE, que ce soit directement ou
indirectement.
Par ailleurs, de nombreux diagnostics réalisés sur le fonctionnement de l’IAE révèlent que les
SIAE et les entreprises de l’économie classique se connaissent peu, se comprennent
faiblement, allant même parfois jusqu’à s’ignorer (Centre Ain Actif, 2008, 12). Une telle
situation tend à distinguer « deux mondes » alors même que l’IAE est censée apparaître
comme un tremplin vers le marché du travail. L’IAE manque encore cruellement de lisibilité.
De la rencontre avec plusieurs acteurs plus ou moins impliqués dans l’IAE sur le bassin
d’emploi de Bourg en Bresse, cet élément constant ressort avec des qualificatifs tels que
« méconnu, flou, peu lisible, imperceptible, opaque » etc. (Centre Ain Actif, 2008, 12).
L’absence de connaissance du secteur de l’IAE est donc flagrante et peut permettre de
comprendre les incohérences et à priori qui peuvent graviter autour de la notion d’insertion.
AA..22 LLeess SSIIAAEE ffaaccee àà llaa rrééaall ii ttéé ééccoonnoommiiqquuee :: ccoonnccuurrrreennccee eett ccoonnjjoonnccttuurree..
L’activité des SIAE fait souvent l’objet d’une concurrence forte qui devient de plus en
plus pressante au fil des années. Les SIAE évoluant sur des secteurs tels que le service à la
personne, les espaces verts, le BTP, le nettoyage etc. sont largement exposées aux contraintes
concurrentielles qui leur sont imposées par des entreprises dites « classiques ». Depuis,
quelques années, certaines entreprises ont investis des secteurs qui ne les attiraient ou ne les
intéressaient pas auparavant et notamment le service à la personne. Une telle situation impose
aux SIAE de se comporter comme de réels acteurs économiques, capables de rivaliser avec
ces entreprises et ce, sur la politique de fixation des prix, la qualité de produits/services, la
12 Pour le compte de l’Agence de Valorisation des Initiatives Socio-économiques (AVISE).
25
démarche commerciale etc. Afin de trouver « une échappatoire » à une concurrence devenant
parfois trop forte, les structures décident soit d’insister sur leur savoir faire et la qualité de
service qu’elles proposent, soit d’investir sur des niches innovantes ayant le vent en poupe et
pour lesquelles elles disposent d’une légitimité et d’un réel savoir faire : l’isolation, l’éco
construction, les marchés biologiques, les activités de recyclage. Toutefois ces nouvelles
niches attirent bien évidemment la concurrence.
L’année 2008 et le début de l’année 2009 ont également été marqués par la crise économique.
Un tel contexte n’a bien évidemment pas épargné les SIAE. L’impact de la crise s’est fait
ressentir à partir du second semestre 2008 ou devrait se manifester au cours de l’année 2009.
Dans un contexte économique incertain et fragile, de nombreuses structures ont revu leur
prévisionnel d’activité à la baisse. Cependant, selon les secteurs d’activité, les effets se font
plus ou moins ressentir, et certaines SIAE n’ont pas été touchées. Les structures les plus
affectées par ce contexte restent les ETTI, qui suivent les tendances du secteur du travail
temporaire dans son ensemble. Sur le premier trimestre 2009, l’activité d’intérim a
effectivement enregistré une récession de l’ordre de 35 à 40% (Dorival, mai 2009). Ce secteur
est connu pour réagir fortement aux fluctuations de la conjoncture économique et de l’activité
des secteurs de l’industrie et du bâtiment (Tröge, Novembre 2008, 17). Ainsi les quatre ETTI
concernées par le suivi, en dépit de leurs différences, ont toutes connu des diminutions
d’activités, notamment à partir du début de l’année 2009. Comparativement à l’année
dernière, une des ETTI a connu une réduction de son activité de l’ordre de 46% sur le début
2009, tandis qu’une autre affiche une diminution de son activité avoisinant les 20%. Une
troisième a senti les effets de la crise dès 2008, avec une réduction du CA de 28%. Dans ce
cas, d’autres facteurs viennent toutefois expliquer cette évolution. Globalement, les 4 ETTI
prévoient une année 2009 difficile.
Enfin, l’inscription progressive dans la sphère économique nous renvoie à la première
typologie des maux du monde associatif, à savoir la « croissance sauvage ». Cela renvoie aux
structures prospères et dynamiques qui ont connu une croissance trop rapide. Développer son
activité, nous l’avons vu, est certes vivement recommandée aux SIAE et sans nul doute gage
de pérennité. Cependant, une telle croissance doit être maîtrisée au risque de se retrouver
confronté à des complications : mauvaise maîtrise des charges, insatisfaction de la demande,
amoindrissement de la qualité du produits/service proposé etc.
26
B. Les SIAE au sein d’un environnement politique mouvant et incertain.
BB..11 LL’’ éévvaalluuaattiioonn ddeess rrééssuull ttaattss eett llee ddéévveellooppppeemmeenntt ddee ssttrraattééggiieess ddee ccoouurr tt tteerrmmee..
Dans un environnement qui leur impose d’articuler logique économique et logique
sociale, nombreuses sont les SIAE qui rencontrent des difficultés à définir la juste adéquation
entre les deux volets. Tout d’abord, les SIAE détiennent un savoir faire en terme
d’accompagnement et de parcours d’insertion qui reste cependant difficilement évaluable.
Dans un contexte de généralisation des pratiques d’évaluation des politiques publiques
répondant à une culture du résultat, les acteurs et opérateurs de l’IAE soulignent la difficulté
qu’ils ont à faire reconnaître leurs résultats. Les acteurs publics utilisent des outils
d’évaluation quantitatifs (sorties positives vers l’emploi) alors que les effets de l’activité des
SIAE sont davantage qualitatifs. Le travail des SIAE avec les publics en difficulté s’inscrit
dans une logique de parcours et d’accompagnement et en appelle à des aspects qualitatifs
d’aide, de suivi et de protection. A ce titre, les SIAE démontrent de réelles capacités et
compétences, qui leur semblent toutefois isolées et non reconnues par les acteurs, du fait
notamment du manque d’outils adéquats d’évaluation (Centre Ain Actif, 2008, 9).
Estimant dès lors que la reconnaissance des autres acteurs proviendra de leur capacité à
démontrer de bons résultats économiques, les SIAE pourraient être tentées de privilégier
l’aspect économique et le retour à l’emploi plutôt que leurs réelles compétences en matière
d’accompagnement, de construction et suivi de parcours. Par conséquent, à défaut de
s’inscrire dans des perspectives de long terme, les SIAE risquent de développer des stratégies
de court terme. De telles orientations amènent certaines SIAE à dériver de leur objet initial,
opérant des choix dans les personnels qu’elles recrutent et qu’elles souhaitent conserver. De
tels choix leur permettraient de mieux envisager la réponse qu’elles apporteraient aux critères
quantitatifs qui leur sont demandés (Centre Ain Actif, 2008, 10).
BB..22 FFrr ii lloossii ttéé ddeess aacctteeuurrss ppuubbll iiccss eett hhééttéérrooggéénnééii ttéé ddee lleeuurr iimmppll iiccaattiioonn..
L'IAE, renvoie à un ensemble d’initiatives émergeant d’un territoire ; par conséquent,
elle est un maillon essentiel des politiques publiques territorialisées. Les collectivités
territoriales en tant qu’acteurs majeurs de soutien à l’IAE se déclarent généralement prêtes à
œuvrer pour l’IAE. Cependant dans un contexte de répartition floue des compétences et des
outils, elles avouent avoir parfois du mal à se positionner et à jouer le jeu de l’IAE, qu’il
s’agisse de prendre des risques (au niveau des financements notamment) ou de montrer
l’exemple en ayant recours aux services et publics des SIAE (Centre Ain Actif, 2008, 9). Or
27
l’engagement de chaque type d’acteur, qu’il soit décentralisé ou déconcentré, dépend en
premier lieu des compétences lui étant assignées. Pour autant, cette répartition, telle qu’elle
existe aujourd’hui, entraîne une relative frilosité de chacun, afin d’éviter de marcher sur les
plates bandes des autres. Ainsi, Nathalie Hanet Kania13 illustre cette idée en expliquant que
« sur le territoire, on se retrouve au confluent de différentes politiques publiques, à la merci
de la concurrence entre équipes de couleurs politiques différentes, et on est parfois obligés de
concilier des objectifs inconciliables ». C’est pourquoi, "le degré d'implication des
collectivités territoriales reste très hétérogène, cela va de l'ignorance au vrai soutien, en
passant par l'instrumentalisation" explique-t-elle (Jeanneau L., Septembre 2007). En
définitive le réel problème vient d’une absence d’un réel pilotage et des logiques diverses qui
s’établissent selon le choix de l’échelon prédominant en matière d’IAE : « donner la priorité
aux régions en matière d'IAE reviendrait à insister sur l'aspect économique; privilégier les
départements, c'est se focaliser sur le volet insertion; tandis que réaffirmer le rôle central de
l'Etat, c'est souligner l'importance de la solidarité nationale» (Jeanneau L., Septembre 2007).
D’après B. Schwartz, l’IAE n’innove pas suffisamment. Ceci résulte du constat selon
lequel tant les pouvoirs publics que les acteurs de l’insertion semblent frileux en matière
d’innovation. B. Schwartz poursuit en dressant un bilan du fonctionnement de l’IAE
aujourd’hui et insiste sur l’idée que « l'insertion marche mal. Non pas que les acteurs de
l'insertion fassent du mauvais travail. Mais les pouvoirs publics leur ont imposé d'obtenir des
résultats uniquement quantitatifs, et ils n'ont plus le temps de s'attarder sur le qualitatif, de
réfléchir à ce qu'ils font » (Dorival, Septembre 2007).
Malgré cet imbroglio dans la répartition des compétences, il existe de réelles marges de
manœuvre permettant aux collectivités de jouer le jeu à condition qu’elles en aient la volonté
politique. Bien que les communes ne disposent pas de compétences propres en la matière,
elles peuvent accorder des subventions, créer des ACI via leurs CCAS (Centres Communaux
d’Action Sociale), s’impliquer via les Plie et les Maisons de l’Emploi etc. Les différences
d’implication des acteurs locaux d’un territoire à l’autre, s’expliquent-elles par l’absence
d’une répartition claire des compétences et du pilotage, du manque de volonté politique, ou de
ces deux raisons combinées ? Difficile de trancher tant la réalité semble varier selon les cas
(Jeanneau L., Septembre 2007).
Un dernier élément relatif à l’influence de la sphère politique et publique sur le
fonctionnement de l’IAE, renvoie aux modalités de financement. La « Famine », seconde
13 Secrétaire générale du réseau Coorace
28
typologie des maux associatifs est à ce titre parfaitement révélateur de la situation puisqu’elle
résulte directement de l’évolution du type de financement des SIAE. Cette difficulté tend à se
généraliser et est fortement liée aux diminutions des subventions. D’une année sur l’autre,
nous avons pu constater combien la perte d’une subvention pouvait avoir des conséquences
dramatiques pour les structures. Parmi les nombreux problèmes relatifs à ce sujet, nous avons
aussi brièvement abordé les délais d’obtention des subventions qui sont particulièrement
longs. Sur les 18 structures suivies, une douzaine témoigne des difficultés qu’elles rencontrent
du fait de délais qui s’allongent. Ainsi, en moyenne, les SIAE du suivi perçoivent leurs
subventions sur une durée allant de 90 jours à 105 jours, avec des cas extrêmes à 6 mois.
En outre, ces problèmes liés aux subventions sont d’autant plus fort pour les ACI. Rappelons
que les ACI sont limités concernant le Chiffre d’Affaire qu’elles dégagent de part la
commercialisation de leurs charges d’exploitation : ce taux communément à 20% de leurs
ressources d’exploitation peut s’élever à 50% de manière exceptionnelle et sur avis du
CDIAE. Si ce plafond est dépassé, la structure doit alors se transformer en EI. Ainsi ces
structures sont fortement dépendantes des subventions qu’elles perçoivent (Blazy, Septembre
2006). Les ACI rencontrés nous indiquaient tous des délais de versement très importants (108
jours en moyenne pour les 5 structures concernées). A titre illustratif, un des responsables
d’ACI que nous avons rencontré, nous indiquait qu’au 31/12/2008, seuls 62% des subventions
prévues pour 2008 avaient été perçus et qu’à fin Avril 2009, seulement 10% des subventions
2009 ont été obtenues tandis qu’il restait 17% de celles de 2008 à percevoir. Parmi les plus
mauvais élèves au regard des délais de versement des subventions, les fonds européens se
démarquent largement, si bien que les SIAE sont contraints de réfléchir à des solutions
nouvelles en vue de réduire leur dépendance à de tels financements.
C. Des outils et compétences de gestion encore fragiles.
CC..11 UUnnee mmaaîîttrr iissee dduu ccyyccllee dd’’ eexxppllooii ttaattiioonn àà ppeerr ffeeccttiioonnnneerr ..
Le cycle d’exploitation renvoie à l’activité même d’une structure. Il correspond à
l’ensemble des opérations qu’elles réalisent : consommation, vente, stockage etc. Il se traduit
notamment en termes de trésorerie. Ainsi, les subventions représentent pour les SIAE une part
très importante de leur situation de trésorerie, tout comme les paiements réalisées par les
clients. Une des difficultés commune à l’ensemble des SIAE, renvoie justement à la gestion
des délais de paiement des clients. Bien que ces modalités de paiement dépendent de l’activité
considérée, on remarque bien souvent des délais trop longs. A titre illustratif, le risque client
est une menace avérée pour les ETTI. Bien souvent les clients ont un pouvoir excessif, surtout
29
si la structure dépend trop fortement d’un ou plusieurs clients spécifiques. De plus, les délais
de règlement de leurs créances s’allongent sur plusieurs mois avec une moyenne à 90 jours
(Tröge, Novembre 2008, 19). Si un effort de diversification n’est pas mené ainsi qu’un suivi
des créances, l’ETTI peut rapidement être fragilisée. Or, des délais clients et de perception de
subventions qui s’allongent entraînent forcément des tensions de trésorerie. Un constat
récurrent du suivi révèle que la plupart des SIAE rencontrent au cours de l’année, des
périodes très difficiles en termes de trésorerie, ce qui les place dans des situations délicates,
pouvant même sérieusement les menacer. Afin de remédier à de tels difficultés, bon nombre
de structures sont obligées d’avoir recours à des outils financiers de court terme (lignes
Dailly, autorisation de découvert, emprunt de court terme) qui leur coûtent très cher. La loi
« Dailly », datant du 2 Janvier 1981, correspond à une cession de créances dont la structure
dispose sur ses clients ou financeurs publics qui vise à pouvoir financer le cycle
d’exploitation. En d’autres termes, cette loi permet de céder une créance à la banque qui
avance le montant correspondant et permet ainsi à la structure de reconstituer sa trésorerie
dans le temps imparti pour les règlements des clients ou l’obtention des subventions. Or ce
procédé est rémunérateur pour les banques et représente donc un coût pour les structures qui
les fait rentrer dans un certain « cercle vicieux ».
La bonne maîtrise du cycle d’exploitation est un élément fondamental dans la gestion
pertinente d’une structure. Bien que tous les torts ne reviennent pas aux SIAE, surtout dans le
cas de l’obtention des subventions, ces difficultés renvoient forcément à un manque cruel de
rigueur et d’outils en matière d’organisation et de gestion dont font preuve les SIAE. Si ce
constat semble moins vrai en ce qui concerne les structures concernées par le suivi, cela peut
s’expliquer par le fait que l’engagement financier de France Active dépend fortement de la
capacité de la structure à développer et utiliser de tels outils. La plupart des SIAE suivies par
RDI semblent avoir pris conscience de l’importance du volet économique pour assurer la
pérennité de leur activité et bon nombre d’entre elles n’ont rien à envier aux autres acteurs
économiques évoluant sur les mêmes secteurs. Mais globalement, nombreuses sont les
structures n’ayant pas encore franchi le pas de s’engager dans la recherche de bénéfices leur
permettant de pérenniser leur activité, autrement dit d’utiliser le volet économique comme
moyen d’atteindre leurs objectifs sociaux en matière d’insertion (Centre Ain Actif, 2008, 10).
De telles difficultés sont souvent identifiées auprès des structures récentes et de petite taille,
qui se caractérisent bien souvent par l’absence d’une démarche commerciale efficace, d’outils
de gestion économique et financière etc. Ces lacunes s’expliquent par un manque flagrant de
temps, de moyens et parfois de compétences. Les ACI souffrent souvent de lacunes en termes
30
de développement d’outils de gestion. Les principaux réseaux représentant se mobilisent sur
cette problématique en vue d’apporter des compétences en matière de comptabilité analytique,
d’outils de pilotage (suivi de trésorerie) et de construction de prévisionnels d’activité et de
plans de financement pertinents en vue de mobiliser efficacement les financeurs.
Bigourdan et Tcherkachine catégorisent deux autres maux que l’on peut aisément lier à ces
lacunes. La « Parkinsonite » fait référence au cas où les frais généraux des organismes
croissent d’une manière plus intense que les missions qu’ils ont à accomplir. Ceci est souvent
du à une mauvaise gestion des charges. Bien souvent, les structures n’ont pas les moyens, les
compétences et le temps de mettre en place des outils de gestion efficaces permettant de
rendre adéquat leurs charges en fonction du volume et de la spécificité de leur activité. La
structure aura beau développer un chiffre d’affaires important, elle ne pourra dégager un
résultat positif de son activité. Tout l’enjeu pour les structures réside dans la mise en place
d’une comptabilité analytique permettant de rapprocher chaque produit de ses coûts, de
scinder le résultat par lignes d’activité, afin de faciliter un suivi rigoureux et pertinent de
l’activité dans son ensemble. L’Epidémie peut être assimilée à l’effet domino, lorsqu’une
structure est trop dépendante d’un financeur/commanditaire et que ce dernier connaît une
défaillance. Lorsque l’on examine la répartition du chiffre d’affaires ou autres produits
d’exploitation (subventions par exemple), on remarque que certaines structures sont fortement
dépendantes d’un client, d’un commanditaire public ou privé. En cas de retrait ou défaillance
soudaine de ce partenaire, les conséquences peuvent être irrémédiables (Bigourdan,
Tcherkachine, 2004, 146).
CC..22 LL’’ ééppiinneeuussee qquueessttiioonn ddee llaa ggeessttiioonn ddeess rreessssoouurrcceess hhuummaaiinneess..
La mission de suivi a également permis de mettre en exergue les difficultés que
peuvent rencontrer les structures dans la gestion des ressources humaines et la maîtrise des
frais de personnel. Il est bien connu que les charges qui prennent le plus d’importance au sein
de l’IAE sont les charges de personnel. Rappelons que les EI déplorent la non-réévaluation
des aides au poste depuis plusieurs années, si bien comme nous l’avons remarqué, que la part
des charges de personnel dans le budget des SIAE est naturellement plus élevée d’une année
sur l’autre. L’analyse de l’évolution de l’EBE14 est un excellent indicateur de la manière dont
la structure parvient à gérer ses ressources humaines. Au cours de l’année 2008, plusieurs
structures ont rencontré des difficultés tant avec les permanents qu’avec les personnels en
14 Excédent Brut d’Exploitation.
31
insertion. Au niveau des effectifs en insertion, les problèmes qui reviennent souvent sont liés
à l’absentéisme, à l’importance du turn-over et aux obstacles plus personnels, récurrents chez
les publics en insertion. Ces problématiques ont des répercussions sur l’activité même de la
structure qui se caractérisent par des retards dans la réalisation des travaux/prestations, une
situation de sous-effectif, la perte de clientèle etc. En ce qui concerne les permanents, les
problèmes sont liés au management, à des tensions d’intérêts et de personnes. Certaines SIAE,
pour des raisons diverses et variées, ont même du recourir à des licenciements, ce qui
engendre des charges importantes. Ces éléments révèlent la relative fragilité de certaines
SIAE qui se retrouvent en grosses difficultés dès l’irruption d’un problème au niveau des
Ressources Humaines : licenciement, arrêt maladie, absentéisme. De même, de tels problèmes
arrivent bien souvent dans des structures n’ayant pas forcément les moyens de consacrer
davantage de temps, de compétences et d’outils à la gestion du facteur humain. La gestion du
personnel et la maîtrise des charges associées représentent pourtant un enjeu important pour
l’IAE, et une tendance croissante à la professionnalisation des équipes permanentes, se fait
ressentir et devient même nécessaire.
L’environnement évolutif qui cadre le secteur de l’IAE place progressivement les
structures d’insertion face à l’obligation de penser et d’adapter leur fonctionnement afin de
développer et consolider une situation économique viable au service de leur projet social. Un
tel défi ne va pas sans poser de problèmes et des difficultés aux structures. Il convient dès
lors, dans une seconde partie, de partir à la recherche des solutions et moyens dont disposent
les SIAE pour relever un tel défi. Après avoir identifié un certain nombre de facteurs clé de
succès illustrés par des exemples pertinents, nous nous pencherons sur le rôle de RDI et son
positionnement en vue d’accompagner au mieux les SIAE à relever leur défi.
32
PPAARRTTIIEE 22 :: LLEESS SSOOLLUUTTIIOONNSS PPEERRMMEETTTTAANNTT DDEE RREENNDDRREE CCEE DDEEFFII PPOOSSSSIIBBLLEE..
A partir des difficultés que rencontrent les SIAE pour se positionner de façon efficace
et pérenne tant sur le volet économique que sur le volet social, cette partie vise à identifier les
moyens dont elles disposent et attitudes à prendre pour relever un tel défi. Dans un premier,
temps nous dresserons un panel de facteurs clés permettant aux SIAE de passer outre les
difficultés que nous avons analysées. En appui d’exemples révélateurs, nous présenterons
ainsi la marche à suivre. Dans un second temps, nous verrons qu’il existe un certain nombre
d’acteurs disposés à accompagner, financer et aider les SIAE sur la voie de l’accomplissement
de leur projet social. A ce titre, nous nous pencherons sur l’action de RDI et du réseau France
Active, en nous interrogeant sur la manière et l’efficacité avec lesquelles ils se positionnent
vis-à-vis de ce défi.
II.. RRééuunniirr lleess ffaacctteeuurrss ccllééss :: llaa ddééffiinniittiioonn dd’’uunn pprroojjeett dd’’iinnsseerrttiioonn,,
uunn ddéévveellooppppeemmeenntt ééccoonnoommiiqquueemmeenntt vviiaabbllee..
Promouvoir une activité économique qui soit adaptée et pérenne sur un territoire, ne
pas se détourner de sa mission première qu’est l’insertion et se positionner sur des
opportunités existantes, tels semblent être les points clés à respecter pour les SIAE : une tâche
complexe mais possible…
A. Assurer un développement économique adapté à un territoire.
AA..11 PPrreennddrree eenn ccoommppttee llaa ssppééccii ffiiccii ttéé//rrééaall ii ttéé dduu tteerrrr ii ttooii rree..
Dans le cadre des nouvelles modalités de conventionnement et donc de la négociation
que chaque structure doit réaliser avec l’Etat, cette dernière doit être en mesure de bien définir
son projet d’insertion en identifiant bien son identité (statut, localisation), son projet, son
savoir faire, son public cible, le tout par rapport à un territoire donné. Il s’agit de bien prendre
en compte les caractéristiques de ce territoire en insistant sur la structure de la demande et de
l’offre d’emploi, la délimitation géographique etc. (CNAR-IAE, Janvier 2009,74). Tout
d’abord il incombe à la structure de rechercher une adéquation entre, d’une part les attentes
des entreprises du territoire en termes de main d’œuvre et compétences et d’autre part les
publics en insertion qu’elle accueille en insistant sur les types de postes qu’elle propose et les
compétences qu’elle leur permet de développer, via la formation par exemple. Il est
intéressant pour la structure de s’interroger sur la « mise en adéquation » des compétences de
ses employés en insertion par rapport aux secteurs en tension notamment. Rappelons que
33
l’objet premier du secteur de l’IAE est de créer des passerelles, sur un territoire spécifique,
entre le monde économique et les personnes exclues de l’emploi en proposant de réels
parcours de réinsertion professionnelle qui soient formateurs.
Afin d’illustrer l’importance pour une SIAE de se positionner et se développer en réponse à
un territoire dans toutes ses spécificités, nous pouvons faire référence aux propos de Sami
Yacoubi, directeur de l’EI CATM de sous-traitance industrielle sur Chambéry qui indiquait
qu’un tel diagnostic vise « à identifier un besoin spécifique sur un territoire spécifique »15.
Ayant en projet la création d’une structure similaire à CATM sur un autre territoire, cet
entrepreneur social témoigne que cet objectif est né de l’identification d’un besoin sur le
terrain. Le tissu économique de la région concernée se caractérise par de grosses difficultés
des entreprises à recruter sur certains métiers en tension. Pourtant, sur ce même territoire, des
publics se trouvent en situation d’exclusion de l’emploi. Ainsi la création de l’EI s’inscrit
dans une dynamique qui vise à proposer une instance intermédiaire entre ces entreprises en
mal de main d’œuvre et ces individus en mal d’emploi.
AA..22 LLaa pprrooffeessssiioonnnnaall iissaattiioonn,, ggaarraanntt dduu ddéévveellooppppeemmeenntt ééccoonnoommiiqquuee..
Les experts du secteur de l’IAE s’accordent aujourd’hui à affirmer que les SIAE sont
entrées dans une démarche de professionnalisation. La recherche d’une utilisation optimale
des ressources humaines et financières, les processus de formation des équipes d’encadrant et
des personnels en insertion, le développement de prospections commerciales sont autant
d’éléments qui montrent que les SIAE sont au cœur de la rencontre entre logique économique
et logique sociale. L’observatoire 2007, à travers l’étude de l’évolution des types de statuts
adoptés par les EI, révèle un choix croissant en direction des formes commerciales. Cette
évolution traduit les changements qui s’opèrent dans le positionnement même des EI : les EI
historiquement ancrées dans le secteur social semblent petit à petit faire le choix de s’intégrer
dans la sphère économique (CNEI, 2008, 19). M. Consigny16, secrétaire général de l’UREI17
Rhône Alpes, rappelle qu’« une entreprise d’insertion marche sur deux pieds : un pied
économique et un pied social ». Il souligne ainsi l’absolue nécessité d’être en mesure de
développer une activité économique viable qui s’accompagne nécessairement d’un processus
15 UREI Rhône Alpes, Atelier « Entreprendre dans l’insertion : mettez votre esprit d’entreprendre au profit des personnes en difficulté », organisé dans le cadre du Salon des Entrepreneurs, 17 – 18 Juin 2009. 16 UREI Rhône Alpes, Atelier « Entreprendre dans l’insertion : mettez votre esprit d’entreprendre au profit des personnes en difficulté », organisé dans le cadre du Salon des Entrepreneurs, 17 – 18 Juin 2009. 17 Union Régional des Entreprises d’Insertion
34
de professionnalisation. Hughes Sibille18 insiste sur le projet économique comme élément
fondamental à toute structure de l’ESS. En effet, elle doit être en mesure de réaliser, via la
vente de biens et/ou services, un minimum de chiffre d’affaires, source de création de fonds
propres (Seghers, Allemand, 2007, 106). Parmi les axes considérés dans les nouvelles
modalités de conventionnement, la structure se doit de mettre en avant son volet économique
à l’échelle du territoire. Dans l’optique d’une professionnalisation de nombreux éléments
sont à prendre en considération et de nombreuses compétences à développer.
• La structure doit tout d’abord bien définir le type d’offre qu’elle entend proposer. La
structure doit être en mesure de développer une stratégie commerciale, des compétences
nécessaires pour répondre à la commande publique dans le cadre notamment des clauses
d’insertion, de percer sur des niches nouvelles et/ou développer des réponses à des besoins
non satisfaits par les collectivités publiques. La structure doit bien arbitrer entre activités
« intensives en capital » et activités « intensives en travail ». La seconde option semble plus à
même de correspondre aux SIAE dans la mesure où l’individu reste placé au cœur du process
de production dans une logique de parcours et de qualification.
• Le développement d’une viabilité économique pérenne passe également par la mise en
place d’outils financiers et analytiques. Au plan financier, un éclairage précis est nécessaire
quant à la situation de l’exploitation, la structure financière, la capacité d’autofinancement, la
capacité d’endettement. De même, les compétences en matière comptable, en gestion et en
analyse financière sont essentielles19 (Bigourdan, Tcherkachine, 2004, 49). Tous ces éléments,
à condition qu’ils soient l’objet d’un suivi précis et d’une gestion rigoureuse, sont gages de
solidité pour la structure, ce qui lui permet d’envisager son avenir économique et la réalisation
de ses objectifs sociaux sur le plus long terme. S. Yacoubi met en garde contre certains
pièges. Il s’agit de ne pas miser sur le « tout social » et apprendre à être rentable. La structure
doit être en mesure de gagner de l’argent, non pas pour rémunérer des intérêts personnels,
mais bel et bien au service de l’insertion. Autrement dit, développer une activité rentable,
revient à donner une dynamique positive aux salariés en insertion vis-à-vis d’eux-mêmes et de
l’avenir. Laisser de côté cet aspect économique en dérivant sur de l’assistanat, telle est la
recette allant par excellence à l’encontre du projet d’insertion.
• Les SIAE doivent également fournir d’importants efforts en termes de communication.
Tout d’abord, elles se doivent d’insister sur la communication interne en attachant une grande
18 Président de l’AVISE et directeur délégué du Crédit Coopératif 19 Cf annexe 4.
35
importance au management des équipes : participation des salariés, mobilisation de l’équipe
sur les différents axes, l’organisation de la structure…
La communication externe est tout aussi importante et multidimensionnelle. A priori, il est
vrai que tout ce qui se réfère au marketing, autrement dit à la mise en place de stratégies de
commercialisation et de communication, semble étranger aux enjeux des SIAE. Elles ont en
effet du mal à opter pour des pratiques qui ne leur paraissent pas être du ressort de leur
éthique, qui risqueraient de mettre l’accent sur l’efficacité économique et pour lesquelles elles
n’ont pas forcément les compétences. D’après A. Pillet, les SIAE ont pourtant « tout à y
gagner, à condition que les techniques de marketing mises en œuvre soient adaptées à leurs
problématiques spécifiques ». L’auteur explique que s’engager sur la voie d’une telle
démarche permet de se rapprocher des futurs usagers, des divers partenaires, autrement dit
d’apporter à la structure une visibilité et une image positive dans son environnement. Ainsi,
les SIAE auraient tout intérêt à s’investir sur ce champ à condition de promouvoir et valoriser
leur « vocation sociale et solidaire », la spécificité de leur action et les valeurs et principes qui
les guident (Pillet, 2006).
• Le monde de l’IAE se doit également de développer des partenariats sur le territoire. Il
s’agit tout d’abord de créer des passerelles pertinentes avec le monde de l’économie
« classique » et donc de développer des partenariats avec les entreprises. La raison même de
l’existence d’une SIAE est de permettre à des personnes exclues de l’emploi de pouvoir, à
terme, intégrer le marché du travail et donc le monde de l’entreprise. Ainsi, une SIAE qui
parvient à développer des partenariats avec une entreprise, rendra plus aisé le passage des
individus du processus d’insertion vers l’entreprise.
Les SIAE doivent également apprendre à se fédérer, via notamment les têtes de réseaux mais
aussi à travers la création d’ensembliers d’insertion. Les SIAE se rassemblent au sein de
divers réseaux qui les soutiennent et les défendent auprès des pouvoirs publics. Parmi ces
têtes de réseaux, qui pour la plupart s’organisent à l’échelon national, régional et
départemental on retrouve notamment le CNIAE (Comité National de l’IAE), le CNEI
(Comité National des Entreprises d’Insertion), le COORACE (fédération des Comités et
organismes d'aide aux chômeurs par l'emploi) etc. Les réseaux entendent défendre les intérêts
de leurs adhérents auprès des décideurs publics et ainsi participer à l’élaboration des
politiques publiques. Par ailleurs, ils proposent un large panel de services à destination de
leurs adhérents en termes de formations, d’aide à la création d’activité, de labellisation,
d’assistance juridique et réglementaire etc. Les ensembliers d’insertion ont pour but de réunir
36
plusieurs structures d’insertion au sein d’une même association et ainsi de pouvoir coordonner
les parcours des salariés en insertion, tout en mutualisant leurs moyens.
Enfin, toute structure doit veiller à la qualité des relations institutionnelles qu’elle entretient,
tant on connait l’influence de la sphère politique. Toute structure doit forcément avoir l’appui
des partenaires institutionnels présents sur le territoire et concernés par son activité. Chaque
structure doit ainsi veiller à la recherche et à la diversification de ses sources de financement
auprès de partenaires financiers publics et privés (fondations, entreprises, mécénat etc.). Un
tel développement communicationnel et partenarial mènera l’IAE sur la voie d’une meilleure
reconnaissance, qualité qui lui manque encore cruellement.
Aujourd’hui en réponse à leur environnement et aux contraintes qu’il impose, il est clair
qu’une proportion croissante de SIAE s’est engagée sur la voie de la professionnalisation.
Pour autant, il s’agit de ne pas tomber dans la banalisation et de veiller à conserver et
valoriser sa spécificité ; « parvenir à rester pleinement social, un équilibre qu’il n’est pas
évident de maintenir » (CNEI, 2008, 20).
B. Ne pas oublier l’essentiel : définir son projet d’insertion.
Une des inquiétudes relatives aux transformations de l’environnement des SIAE est la
difficile reconnaissance du projet social des structures. Basées essentiellement sur la mesure
de données quantitatives, nous avons identifié que les méthodes d’évaluation des SIAE
pouvaient amener les structures vers certaines dérives. Or Sami Yacoubi rappelle bien que
« l’objectif n’est pas de faire de l’argent mais la problématique majeure consiste à ramener
des personnes à l’employabilité sur une durée de deux ans »20. Ainsi, la nécessité de ne pas
oublier son objet social est ici réaffirmée. Dès lors, comment ne pas oublier son objet social ?
Quels outils existe-t-il pour le faire reconnaître ? Quelle est la place de la notion d’utilité
sociale ? Comment évaluer celle des SIAE ?
BB..11 DDeess ddéémmaarrcchheess dd’’ éévvaalluuaattiioonn ddee pplluuss eenn pplluuss nnoommbbrreeuusseess :: qquueellss eennjjeeuuxx ??
Lorsque l’on part à la recherche d’une définition de l’utilité sociale, on se retrouve
souvent face à un « flou artistique » qui mêle de nombreux indicateurs dès qu’il s’agit de
l’évaluer. Gadrey, en s’appuyant sur une série de rapports traitant du sujet, a tenté d’identifier
une définition et une manière d’évaluer l’utilité sociale des structures de l’ESS. Il semble bien
difficile de déterminer un contenu concret à cette notion ainsi que des critères et méthodes
20 UREI Rhône Alpes, Atelier « Entreprendre dans l’insertion : mettez votre esprit d’entreprendre au profit des personnes en difficulté », organisé dans le cadre du Salon des Entrepreneurs, 17 – 18 Juin 2009.
37
permettant de l’évaluer. On comprend dès lors toute la difficulté des SIAE, dans le cadre des
modalités de conventionnement mais également de leurs relations partenariales, de justifier de
leur utilité en trouvant des critères d’évaluation qualitatifs pertinents et reconnus de tous.
Une ambiguïté se fait d’emblée sentir lorsqu’il s’agit de réfléchir à l’élaboration de critères. Il
convient tout d’abord de définir ce que l’on place concrètement derrière la notion d’utilité
sociale. En s’appuyant sur un avis du Conseil National de la Vie Associative (CNVA) de
1995, 10 critères d’utilité sociale sont identifiés pouvant être répertoriés en deux groupes. Le
premier, « l’utilité sociale interne », renvoie aux spécificités de gouvernance, aux valeurs
internes et au statut des organisations de l’ESS, tandis que le second comprend les critères
d’utilité sociale dits « externe » (Gadrey, 2004, 63). Quoiqu’il en soit, Gadrey rappelle la
nécessité de passer de « l’évaluation sociale affichée » par l’objet même de l’activité, à
l’évaluation de « l’utilité sociale effective », autrement dit, des effets concrets sur la
collectivité et les personnes ciblées (Gadrey, 2004, 111). Il insiste également sur la distinction
entre dimension interne et externe de l’évaluation. Dans un environnement évolutif où les
politiques publiques se fondent sur une logique de résultat et d’évaluation, les structures de
l’ESS sont et seront de plus en plus amenées à réfléchir sur la nécessité d’évaluer leur
production d’utilité sociale, que ce soit dans une logique externe et souvent imposée par les
partenaires ou bien dans une logique interne en vue de s’interroger sur ses propres pratiques
(Gadrey, 2004, 110).
La démarche interne provient d’une réflexion des membres de la structure qui
s’interrogent sur les actions qu’ils proposent, leur impact sur les bénéficiaires et le territoire,
la corrélation entre apports souhaités et apports réels ainsi que les sources d’amélioration de
l’action. Une telle démarche permet de débattre ou revenir sur le projet associatif et de définir
le meilleur compromis possible selon les attentes de chacun.
En réponse à ces besoins, des labels ont été développés par les réseaux. Ainsi le CNEI s’est
lancé en 2000 dans un processus de labellisation des pratiques sociales de ses adhérents. Ce
label QUALIREI21 garantit les SIAE concernées, quant à la qualité de leur travail et de leurs
pratiques sociales, sur leur savoir faire, à savoir l’insertion. Le processus de labellisation
s’étend sur un laps de temps allant de 12 à 18 mois et prend la forme de réponses à un
référentiel doublé d’un audit sur site. Si la labellisation QUALIREI est un outil indispensable
de communication externe auprès de l’ensemble des partenaires, en leur prouvant la
cohérence de l’accompagnement social qu’ils mettent en place, s’inscrire dans une telle 21 http://www.cnei.org
38
démarche leur permet également de prendre du recul sur leurs propres pratiques en examinant
l’ensemble de leur fonctionnement. Le label Qualirei représente donc un outil interne
pertinent « de management et de progrès » permettant de constater et corriger d’éventuels
écarts (CNEI, 2008, 19). Depuis 2007 et face au mouvement de professionnalisation des EI, le
label QUALIREI se révèle plus nécessaire que jamais si bien que le CNEI s’est engagé dans
un plan d’amélioration qui vise à faire de ce label le révélateur de la plus-value des EI par
excellence. A titre illustratif, au cours de la mission de stage, une SIAE a témoigné de sa
démarche QUALIREI. Le bilan que les dirigeants ont pu retirer est très positif. S’inscrire dans
un tel processus a permis d’analyser les pratiques en vigueur et d’opérer de nombreuses
améliorations en termes de sécurité (mise en place de tests de sécurité, port d’équipements
obligatoires, une attention particulière au respect des normes de sécurité sur les postes de
travail…), en termes de gestion administrative (nouvelle organisation des effectifs
permanents, simplification des procédures, réalisation de tableaux de bord etc.). La démarche
QUALIREI a donc permis à la SIAE de réaliser d’importants progrès sur le fonctionnement
interne global, si bien que les dirigeants affirment que « la démarche qualité oblige à être plus
rigoureux et à ne pas remettre au lendemain ».
La fédération COORACE22 développe également depuis 1996 un processus de certification
dit « CEDRE » qui s’adresse à « l’ensemble des entreprises de l’ESS agissant pour l’emploi et
l’insertion ». L’obtention d’une telle labellisation atteste de ses aptitudes en termes d’insertion
des publics : rendre la personne pleinement active dans son parcours d’insertion et prendre en
compte sur son territoire les personnes en mal d’emploi et les entreprises en mal de personnel
en vue de les rapprocher. La COORACE propose à ses adhérents une « formation-action »
d’une durée de 18 mois pour les accompagner dans leur démarche qualité. D’autres
démarches qualité existent au sein de l’IAE parmi lesquelles, celle du réseau Cocagne (datant
de 2002) qui vise pour chaque Jardin à s’interroger sur le projet associatif en associant toutes
les parties prenantes de la structure. L’ensemble des pratiques sont analysées en vue de définir
collectivement des axes d’amélioration.
Outre les démarches qualité mises en place par les réseaux, les SIAE ont également la
possibilité d’obtenir des certifications ISO. Les normes de la famille ISO 9000 ont pour rôle
de certifier les bonnes pratiques menées en termes de management de la qualité de leur offre
envers les clients. La famille ISO 14000 valide quant à elles les « comportements »
environnementaux des structures (Jeanneau, Septembre 2007).
22 http://www.coorace.org
39
La démarche externe est gage de valorisation, de reconnaissance et constitue une
bonne base de négociation avec les partenaires. La demande externe d’évaluation de son
utilité sociale provient en effet des relations partenariales de la structure qui doit rendre des
comptes auprès des financeurs, élus, administrations etc. Dans la logique externe, l’évaluation
de l’utilité sociale des SIAE serait un bon outil de communication, comme une réponse au
manque de reconnaissance dont souffre encore ce secteur. Idéalement les critères d’évaluation
doivent être co-définis. A ce titre, la difficulté rencontrée par les acteurs de l’IAE est de se
retrouver confronté à des acteurs n’ayant qu’une vision partielle de « l’utilité sociale »
résultant de leur activité. L’inquiétude actuelle qui ressort largement des commentaires et
témoignages de SIAE est la tendance à penser l’utilité sociale uniquement à l’aune du taux de
retour à l’emploi des personnes accueillies. Ainsi, la dérive de passer à côté de bien d’autres
bénéfices collectifs est forte. On peut notamment penser à l’amélioration du rapport au travail,
des conditions de vie, de la santé, de l’image de soi, etc. Ainsi l’un des risques majeurs est de
voir les SIAE soit continuer à accueillir les personnes les plus éloignées de l’emploi au risque
de ne pas voir son utilité reconnue ou bien de procéder à une sélection des profils accueillis.
L’évaluation des performances des SIAE est donc un nouveau facteur inhérent à leur
environnement avec lequel les structures doivent composer. Bien au-delà, l’enjeu crucial pour
l’IAE est d’être à même de pouvoir rendre appréciable, via des critères pertinents, l’utilité
sociale des structures. Les démarches d’évaluation interne et externe sont donc indispensables
aujourd’hui. Toutefois, le chemin paraît encore long avant de pouvoir mettre les acteurs
d’accord quant à la définition de critères de référence qui seront pris en compte.
BB..22 LLaa ddééffiinnii ttiioonn ddee ccrr ii ttèèrreess ppoouurr mmeessuurreerr ll ’’ uuttii ll ii ttéé ssoocciiaallee :: uunnee qquueessttiioonn ddééll iiccaattee..
Les mesures de performance essentiellement quantitatives, fixées dans le cadre des
nouvelles modalités de conventionnement, engendrent plusieurs effets pervers : le seul critère
du taux de retour à l’emploi est valorisé, laissant de coté bien d’autres aspects inhérents aux
SIAE tout en plaçant l’ensemble des SIAE sur un même référentiel d’analyse sans prendre en
compte leurs spécificités, telles que « le lien social, l'estime de soi et l'autonomie existentielle,
la sociabilité, la qualité de vie, la démocratie locale et l'innovation sociale». Or, comme nous
le rappelle Gadrey, « si la quantification est souvent un atout précieux, elle ne doit pas être
considérée comme fournissant toujours les "preuves" les plus convaincantes » (Gadrey, 2004,
116). Gadrey justifie son positionnement en affirmant qu’à condition de bien veiller à
relativiser l’aspect subjectif que peuvent revêtir ce type d’évaluation, « la description
"qualitative" […] de certaines actions et de ce qu'elles ont produit aux yeux des bénéficiaires
40
et des prestataires peut s'avérer un indice aussi convaincant que bien des tableaux
statistiques, qui ne pourront pas intégrer toute la richesse de ce qui se passe dans l’action et
dans la relation » (Gadrey, 2004, 116).
Les nouvelles modalités offrent une opportunité unique de faire évoluer le pilotage du
secteur de l’IAE dans la mesure où elles permettent de définir des critères d’évaluation
partagés. Afin de saisir une telle opportunité, l’enjeu pour les SIAE et leurs réseaux est de
proposer et se doter d’outils permettant de valoriser l’ensemble de leurs actions et impacts.
Selon Gadrey, l’idée serait que les structures soient en mesure d’expliquer en quoi leur
activité est socialement utile sur la base de méthodes flexibles, fiables et demeurant
relativement simples (Gadrey, 2006, 253). Une telle évaluation peut devenir un réel outil de
consolidation et d’évolution des conventions passées avec les partenaires, à condition qu’elle
prenne la forme d’une démarche périodique et volontaire, visant à vérifier que leurs actions et
valeurs coïncident avec leur vision de l’utilité sociale. Toutefois, une fois ce constat accepté,
reste à définir des critères et méthodes permettant d’en vérifier l’existence.
Afin de mener une évaluation pertinente de l’utilité sociale, la principale difficulté, renvoie à
la construction et définition de critères et d’indicateurs. Il convient dès lors de définir des
dimensions de l’utilité sociale qui seront par la suite déclinées en critères auxquels on
applique des indicateurs. Un indicateur pertinent et efficace doit être significatif du critère
qu’il mesure, compris de la même manière par tous, simple et communicatif, précis et fiable.
Une fois les critères et indicateurs définis, il convient de les classer et prioriser, le but étant de
limiter leur nombre.
Ainsi, suite à la mobilisation d’universitaires, de professionnels de l’IAE et de l’ESS, de
bureaux d’études, de techniciens publics (état et collectivités), il a été évoqué la possibilité
d’évaluer une partie de l’utilité sociale des SIAE sur la base du degré d’éloignement à
l’emploi des individus. A ce titre, trois éléments sont pris en compte à savoir la santé
(psychique, physique, addiction etc.), le social (logement, transport, justice, isolement) et le
professionnel (formation, expérience, projet). L’évaluation de la situation de la personne au
début de son parcours d’insertion, permet au regard de ces critères d’identifier son degré
d’éloignement à l’emploi. L’analyse de la situation en fin de parcours permet d’appréhender
son évolution. Cette démarche renvoie à la volonté de Gadrey, de mixer démarche
qualitative et démarche quantitative dans ce processus d’évaluation. Il s’agit comme le
préconise l’auteur de "quantifier le qualitatif"(Gadrey, 2004, 116). L’idée par exemple serait
de recueillir des témoignages de bénéficiaires quant à leur situation au début et en fin de
41
parcours d’insertion et d’apprécier de quelle manière le passage dans une SIAE a amélioré
leur situation en réduisant leur exclusion, en enrichissant leurs liens sociaux. En attribuant une
cotation générale (de 1 à 5) de l’état d’éloignement de chaque salarié en insertion et en
compilant ces informations pour donner un « capital humain de la SIAE », cette proposition
d’évaluation correspond à ce que propose Gadrey. Cette prise en compte des « productions de
la SIAE » via la notation permet de corréler les résultats à des taux envisageables de retour à
l’emploi, ce qui permettrait de répondre aux critères déjà mis en place par les partenaires
publics.
Notation de la distance
à l’emploi 1 2 3 4 5
Durée moyenne de retour à
l’emploi
Plus de 2
ans
De 24 à
18 mois
De 18 à
12 mois
De 12 à
6 mois
Moins de
6 mois
Notation de la distance
à l’emploi 1 2 3 4 5
Durée moyenne de retour à
l’emploi
Plus de 2
ans
De 24 à
18 mois
De 18 à
12 mois
De 12 à
6 mois
Moins de
6 mois
Source : CNIAE, Mesure de l’éloignement à l’emploi à partir d’un outil de mesure de l’utilité sociale des SIAE, Assises nationales des CDIAE, 28 Avril 2009
Niveau de distance à l’emploi 1 2 3 4 5
Proba. moyenne de retour à l’emploi dans l’année
Moins de 20 %
20 à 40 %
40 à 60 %
De 60 à 80 % Plus de 80 %
Notation du potentiel des bassins pour la SIAE
1 2 3 4 5
Probabilité moyenne de retour à l’emploi
Moins de 20 %
De 20 à 40 %
De 40 à 60 %
De 60 à 80 %
Plus de 80 %
Notation du « défi » de la SIAE
Fort Assez fort
Moyen Assez faible
Faible
Objectif de retour à l’emploi sur l’année
Moins de 4 %
De 4 à 16 %
De 16 à 36 %
De 36 à 64 %
Plus de 64 %
Notation de la distance
à l’emploi 1 2 3 4 5
Proba. moyenne de retour
àl’emploi dans l’année
Moins
de 10 %
10% à
30 %
30%
à50%
50%
à80 %
Plus de
80 %
Notation de la distance
à l’emploi 1 2 3 4 5
Proba. moyenne de retour
àl’emploi dans l’année
Moins
de 10 %
10% à
30 %
30%
à50%
50%
à80 %
Plus de
80 %
42
L’utilisation de ces tableaux permet de disposer d’outils d’évaluation du temps nécessaire
avant retour à l’emploi, et ainsi d’avoir des arguments en vue de la négociation prévue avec
les partenaires publics concernant les objectifs à définir. Cette méthode de croisement des
données permet également d’appréhender de manière raisonnable des objectifs de retour à
l’emploi. Cette étude propose, en complément de la prise en compte des « productions » de la
SIAE, de mesurer son utilité sociale sur la base de trois principaux angles : un aspect socio-
économique (effet sur la situation des individus hors emploi et impact sur le territoire) ; un
aspect environnemental (mesurer son impact environnemental et/ou la qualité de ses
produits/services) et un aspect sociétal (innovation, ancrage territorial, qualité de sa
gouvernance).
Ainsi, il apparaît fondamental de parvenir à combiner des indicateurs quantitatifs et
qualitatifs. L’idée consiste à ne pas opposer ces deux types d’indicateurs mais plutôt de
pouvoir quantifier des appréciations qualitatives (CNIAE, Avril 2009). Par ailleurs, il serait
aussi pertinent d’associer des indicateurs de contexte afin de mettre en relief l’action de la
structure à l’aune de sa situation sur son territoire d’intervention. Ainsi, l’impact réel de la
SIAE pourra être mieux apprécié et la prise en compte du territoire permettra également de
relativiser les résultats et objectifs de départ. En tenant compte du fait que le retour à l’emploi
ne dépend pas uniquement des performances des SIAE, il serait aussi intéressant de prendre
en compte la conjoncture économique générale (d’autant plus vraie dans le contexte actuel)
ainsi que l’importance des recrutements nets des employeurs selon les secteurs concernés.
Pour pousser l’analyse du réel impact des SIAE, on parle de plus en plus d’une
comptabilisation en termes de « bonheur » : le PIB d’un territoire se trouve accru du fait de
l’ensemble des effets bénéfiques non marchands issus d’une situation de croissance
économique et diminué au gré des évènements négatifs (pollution, stress etc.). Comme le
spécifie D. Clerc, « loin de réduire les effets positifs des SIAE, il est probable que des
démarches de ce type en accentueraient l’ampleur par rapport aux indicateurs aujourd’hui
retenus » (Clerc, 2007).
Les acteurs de l’IAE, et en partie les réseaux se sont largement lancés dans la définition de
grilles d’évaluation cherchant à mesurer et valoriser l’utilité sociale des SIAE. L’idéal serait
de parvenir à mettre l’ensemble des acteurs d’accord sur un processus de « quantification du
qualitatif ». L’enjeu actuel se situe bien à ce niveau, le processus est loin d’être achevé et les
débats loin d’être clos.
43
C. La mise en œuvre des facteurs de réussite : quelles perspectives ?
Après avoir dressé une typologie des points essentiels qui semblent représenter des
facteurs de réussite pour les SIAE dans leur pérennisation, il est important d’illustrer la
mobilisation de ces recommandations à travers des perspectives de développement pour les
SIAE.
CC..11 LLee ddéévveellooppppeemmeenntt dduurraabbllee :: ddee ffoorr tteess ooppppoorr ttuunnii ttééss eett «« uunnee oorr iieennttaattiioonn nnaattuurreell llee »» ppoouurr lleess SSIIAAEE..
Précédemment, nous avons évoqué l’importance du choix de l’offre que souhaite
proposer une SIAE ainsi qu’une certaine frilosité de se positionner sur des secteurs innovants.
Or, une des clés du succès pour une structure est de trouver des niches innovantes, de se
positionner dans une dynamique de réponse à des besoins non satisfaits. Nous pouvons dès
lors nous arrêter sur un créneau très en vogue à l’heure actuelle et sur lequel les SIAE
semblent de plus en plus s’orienter à savoir, le développement durable. Cette notion aussi
vague que populaire, renvoie principalement à toute activité qui entend s’articuler sur un
triple volet : le volet économique, le volet social, et le volet environnemental. On peut
cependant s’interroger sur l’opportunité pour une SIAE de s’orienter dans une telle voie,
sachant que bon nombre d’entreprises « standard » ont d’ores et déjà compris les retombées
que cela peut représenter. A quoi bon s’orienter sur un secteur où la concurrence est déjà ou
sera féroce ? Or, est il nécessaire de rappeler que l’IAE, de part son positionnement sur un
pied économique et sur un pied social peut naturellement et légitimement tendre vers un 3ème
volet environnemental qui sera satisfait par son activité même.
Progressivement, plusieurs initiatives ont évolué et combiné des objectifs divers et variés, si
bien qu’aujourd’hui les SIAE s’inscrivent de plus en plus dans une démarche de
développement durable qui répond à ce besoin de trouver de nouvelles niches d’activités et de
développement. On peut penser notamment aux activités de recyclage et récupération des
déchets qui œuvrent donc tout à fait sur un volet social (réinsertion), environnemental
(recyclage) et économique (Nahapétian, 2007). Bien qu’il soit nécessaire de rester vigilant
« aux effets de modes et de communication » comme le rappelle Jean-François Connan23, les
SIAE se doivent d’investir ce champ « parce que c'est l'avenir, et parce qu'elles ont une réelle
capacité d'innovation » (Coq-Chodorge C., 2009). A l’échelle nationale, plusieurs structures
d’insertion se sont déjà engagées sur ce secteur en relevant le pari des trois piliers du
23 Responsable du développement et de l'insertion chez Adecco et membre du Conseil national de l'insertion par l'activité économique (CNIAE)
44
développement durable. Parmi les nombreux exemples de SIAE s’étant engagées dans une
telle démarche, on peut faire référence à l’Entreprise d’Insertion « Extramuros ».
« Récupérer auprès de grandes entreprises des matériaux destinés au rebut, pour les
transformer en objets de design haut de gamme, ensuite rachetés par l'entreprise qui s'en sert
comme support de communication interne et externe » tel est l’objet de son activité (Coq-
Chodorge C., 2009). Coté environnemental, l’initiative se veut exemplaire dans la mesure où
elle valorise des biens performants en termes tant de valeur que d’éthique. Coté social, la
structure répond ainsi à ses objectifs d’insertion en faisant participer des personnes en
situation d’exclusion à la revalorisation de matières ayant perdu leur utilité première. Enfin,
coté économique, l’expérience est novatrice tant elle séduit les grandes entreprises : « nos
objets […] sont un support de communication. D’ailleurs nos interlocuteurs au sein des
entreprises sont ceux du développement durable ou de la communication » explique N.
Mangione, responsable du développement de l’EI (Coq-Chodorge C., 2009). La structure a en
effet trouvé une niche économiquement pertinente pour se développer, démontrant une
véritable intelligence de marché.
CC..22 LLeess ccllaauusseess dd’’ iinnsseerr ttiioonn ddaannss lleess mmaarrcchhééss ppuubbll iiccss :: uunnee ggrraannddee ooppppoorr ttuunnii ttéé ppoouurr lleess SSIIAAEE ddee mmeettttrree eenn ccoohhéérreennccee lleeuurr «« mmuull ttii ddiimmeennssiioonnnnaall ii ttéé »»..
Introduire les clauses d’insertion dans les marchés publics présente également une
grande opportunité pour les SIAE de relever le défi du social et de l’économique. Le Code des
Marchés Publics, dont la dernière remise à jour date de 2006, permet aux pouvoirs
adjudicateurs qui le désirent, d’introduire dans leur passation de marché, des clauses
favorables aux SIAE. La mise en œuvre de ces clauses, imposant dans le choix de l’exécutant,
des exigences en matière d’insertion des publics en difficulté, permet de faciliter de manière
considérable l’accès des SIAE à la commande publique. On peut dès lors se demander en
quoi, la généralisation de telles pratiques serait un moyen pour les SIAE de relever le défi
auquel elles font face. Tout d’abord, il est bon de rappeler que l’article 5 du code des marchés
publics, émet l’obligation que toute commande publique prenne en compte des objectifs de
développement durable, autrement dit, que le pouvoir adjudicateur recherche à la fois
l’efficacité économique, l’équité sociale et le développement écologique. De plus, sur le plan
économique, répondre aux appels d’offre présente différents points positifs pour les SIAE.
Elles doivent en effet apprendre à se professionnaliser, à développer une certaine rigueur et
une bonne capacité d’organisation, et développer divers partenariats en vue de pouvoir
remporter de tels marchés. Qui plus est, tout marché public représente pour la structure
d’excellentes perspectives en termes de retombées économiques, d’expérience et de
45
développement. Enfin, les clauses d’insertion obligent inévitablement de prendre en compte
des qualités en termes d’insertion des publics éloignés de l’emploi. Les SIAE sont donc
parfaitement positionnées sur ce sujet. Les clauses d’insertion leur permettent non seulement
de jouir d’une reconnaissance de leur mission d’insertion, mais également de pouvoir mettre
leur savoir faire en avant, en vue de trouver de nouveaux marchés et opportunités de
développement (Béasse, Danjean, Lianzon, 2009, 5). Bien souvent, la réponse aux appels
d’offre permet à des SIAE de nouer des partenariats avec d’autres acteurs (de l’IAE ou non) et
de développer des relations « gagnant-gagnants ».
En 1993, la ville de Bourg en Bresse, à la suite d’un appel d’offre, avait confié le lot « accueil
de déchetterie » à Ainter’services, EI de l’ensemblier AG2i et le lot « transport » à
l’entreprise Quinson Fonlupt. Au début des années 2000, après environ une dizaine d’années
de travail en collaboration sur la gestion d’une déchetterie, l’entreprise Quinson Fonlupt entre
dans une période de forte croissance, passant de 20 salariés en 2000 à une centaine en 2008.
La structure se retrouve donc face à la nécessité de recruter une main d’œuvre de première
qualification. Or, le temps passé par Ainter’services et Quinson Fonlupt à travailler ensemble
sur la gestion de la déchetterie, a permis de lever de nombreux à priori et même de générer un
climat de confiance mutuelle. Dès lors pour répondre aux besoins de main d’œuvre, Quinson
Fonlupt fait directement appel à du personnel intérimaire de l’ETTI « Ainterim’air » qui n’est
autre qu’une structure appartenant à AG2i et en charge de placer les salariés sortant de l’EI
Ainter’services. Ces salariés ayant été formés durant 24 mois en tant qu’agents de tri par l’EI
sont donc placer par l’ETTI au sein d’entreprises telles que Quinson Fonlupt. En 2007, un tel
partenariat, a permis une délégation de 13 000 heures et l’embauche directe de 8 personnes
par Quinson Fonlupt. Cet exemple, en sus de montrer en quoi la commande publique a permis
de créer de l’activité pour AG2i, révèle comment une SIAE et un entreprise classique ont pu
mutualiser leurs moyens pour répondre à l’appel d’offre et ainsi entrer dans une relation
« gagnant-gagnant ».
Un autre exemple permet de révéler l’intérêt des clauses d’insertion pour les SIAE. Afin de
répondre à un marché public, et de se donner les moyens d’être retenues sur des appels
d’offre, certaines SIAE peuvent collaborer ensemble et ainsi nourrir un partenariat très
bénéfique. En effet, pour la rénovation du quartier de la Grande Reyssouze à Bourg-en-
Bresse, les partenaires institutionnels ont activé les clauses d’insertion dans leur appel d’offre.
Dans l’optique de se donner les moyens matériels et humains nécessaires pour répondre au
marché de destruction des logements, deux SIAE se sont rapprochées : Urgences Emploi (EI
46
et ETTI) et l’Agence de Développement Local 01 (ACI). Elles ont été retenues pour réaliser
une part de la déconstruction. Outre l’obtention du marché et donc l’accroissement de leur
activité, ce partenariat a permis de créer une passerelle entre les deux structures leur assurant
une mutualisation des moyens matériels et un échange de bonnes pratiques. Dans le cadre
de marchés importants, comme ceux de l’ANRU, cette démarche de partenariat est
nécessaire pour les SIAE.
A l’image de ces deux exemples, la commande publique, dès lors qu’elle intègre les
clauses d’insertion, représente une opportunité considérable pour l’avenir des SIAE et leur
réussite à modéliser un développement basé sur l’économique et le social. Par ailleurs, les
clauses mettent en valeur le rôle d’accompagnement et d’accès à l’emploi qu’assurent les
SIAE. Toutefois, si le Code des Marchés Publics semble offrir de réelles opportunités pour les
acteurs de l’IAE, JB Foucauld24 indiquait « j’ai aussi constaté un écart considérable entre les
possibilités offertes par le Code des marchés publics, en France, et l’utilisation concrète de
ses dispositions » (Béasse, Danjean, Lianzon, 2009, 35). Un tel constat sous-entend
l’existence de difficultés et/ou blocages dans la mise en œuvre de ces clauses. Ainsi, en appui
sur un travail effectué par l’IRIAE25 de Rhône-Alpes, le développement du recours aux
clauses d’insertion nécessite la combinaison de plusieurs facteurs à savoir, une réelle volonté
politique des décideurs de favoriser l’insertion via la commande publique, une adhésion des
services techniques en charge de la mise en œuvre des marchés publics, la présence d’un
« facilitateur » dont la mission revient à mettre en réseau l’ensemble des acteurs concernés, la
constitution de partenariats permanents entre les entreprises et les SIAE et enfin un
mécanisme efficient d’évaluation quantitatif et qualitatif des résultats permettant de valoriser
des exemples pouvant faire « tâche d’huile ».
¤¤ LLaa rrééuunniioonn ddeess ffaacctteeuurrss cclléé :: llee rréésseeaauu EEnnvviiee,, uunn eexxeemmppllee ppeerrttiinneenntt aauu rreeggaarrdd ddeess
ssttrruuccttuurreess EEnnvviiee RRhhôônnee eett EEnnvviiee SSuudd EEsstt..
L’objet de cette sous-partie consiste à identifier deux structures d’insertion Envie
Rhône et Envie Sud-Est rencontrées dans le cadre du suivi 2009 au sein de RDI, toutes deux
liées et affiliées à un réseau national ENVIE, en vue d’analyser les facteurs les ayant
conduites à la réussite qu’elles connaissent aujourd’hui. Envie est un réseau national
d’entreprises d’insertion qui comptait, en 2007, 44 entreprises sociales spécialisées sur deux
activités économiques distinctes : l’activité de réemploi et de recyclage des appareils
24 Inspecteur Général des Finances. 25 Inter-réseau de l’Insertion par l’Activité Economique.
47
électroménagers et l’activité de collecte, tri, dépollution et traitement des Déchets des
Equipements Electriques et Electroniques (DEEE). Présentation d’un réseau de SIAE, ayant
réussi à réunir les facteurs clés en vue d’harmoniser développement économique et projet
social.
Le secteur des déchets est « sans doute un laboratoire des évolutions futures de l’IAE » (Coq-
Chodorge, 2009). Inclu pleinement dans une dynamique de développement durable, ce
marché est devenu très porteur et voit affluer des entreprises privées très offensives : une
contrainte forte pour l’insertion qui l’oblige à se défendre et s’adapter. Le 17 décembre 2008,
au cours de la dernière table ronde organisée par la Fédérec26, Richard Debeauve27, rappelait
aux chefs d’entreprises présents « Nous sommes parfois présentés comme des concurrents
déloyaux. Mais nos subventions représentent moins de 25 % de nos besoins, et ne couvrent
pas les surcoûts liés à l'encadrement de nos salariés en insertion. Nous sommes vos
concurrents, certes, mais nous sommes loyaux. Et nous pouvons aussi être des partenaires,
car nos activités peuvent s'avérer complémentaires des vôtres. » (Coq-Chodorge, 2009). Un
double enseignement peut être retiré. Voulant tout d’abord lever les suspicions qui sont
alimentées autour des acteurs de l’insertion, ces derniers souhaitent aller au-delà, en
soulignant les perspectives de complémentarité qui peuvent se tisser entre d’une part les
acteurs de l’insertion et les entreprises privées d’autre part.
L’essor que connaît ce secteur est notamment lié au décret du 20 Juillet 2005 concernant la
collecte et le traitement des déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE). Ce
décret a considérablement réorganisé la filière. Producteurs et distributeurs paient à présent
des contributions aux éco-organismes en charge du prélèvement et de l’enlèvement des
DEEE, via des prestataires extérieurs retenus sur appels d’offre incluant des clauses
d’insertion. Des structures comme Envie Sud Est se sont positionnées, avec succès, sur les
appels d’offre des éco-organismes. Se positionner sur un tel secteur connaissant une
croissance exponentielle nécessite une professionnalisation des pratiques, des investissements,
un encadrement des personnes en insertion, des anticipations sur de nouvelles filières de
recyclages etc. Face à ces contraintes, qui se rapprochent de plus en plus des structures
industrielles classiques, la question d’une éventuelle contradiction entre le projet économique
et le projet social d’insertion des SIAE se pose inéluctablement. Pourtant, loin de ce constat,
la fédération Envie, affiche un taux de sortie vers l’emploi ou une formation de 60%, résultat
bien supérieur à la moyenne des EI du secteur (43.7% d’après le CNEI). 26 Fédération des entreprises de recyclage, table ronde consacrée à l’emploi, la formation et l’insertion. 27 Président du groupe Envie
48
Ainsi pour éviter de tomber dans un tel penchant, Jean-Luc Tissier28 rappelle que le réseau
Envie n’a pas vocation à devenir un « industriel à part entière ». C’est pourquoi, « nous ne
nous positionnerons pas sur des filières qui réclament beaucoup d'investissements techniques
et créent peu d'emplois », explique t-il (Coq-Chodorge, 2009). En effet la priorité des SIAE
étant leur projet social, il convient de ne pas tomber dans les travers de la recherche d’une
rentabilité industrielle tous azimuts, qui risquerait de voir la priorité mise sur les machines
plutôt que sur le facteur humain. Face à la concurrence soutenue que leur impose les grands
industriels, les SIAE cherchent à nouer des partenariats plutôt qu’à s’engager dans une
dynamique concurrentielle où elles ont peu de chance de tirer leur épingle du jeu. Ainsi la
carte de la sous-traitance au profit des grands groupes semblent beaucoup plus pertinente et
bénéfique pour l’IAE, et ce, à plusieurs égards. Outre le fait de détourner la concurrence, ces
expériences apportent de nombreux aspects positifs aux SIAE. « Ce sont des partenariats
intéressants d'un point de vue économique, mais surtout social, car le salarié en insertion se
familiarise ainsi avec de grands groupes industriels » explique Jean-Luc Tissier (Coq-
Chodorge, 2009).
Envie Rhône (ER), créée en 1992 a pour principale activité de récupérer, rénover et
commercialiser des électroménagers d’occasion. Après avoir connu des années difficiles,
l’enjeu sur 2008 a été de reconsidérer ses orientations en termes de gestion économique de
son activité. Tout d’abord ER a mis en place un système de commande entre le magasin et
l’atelier. Jusqu’à présent, c’est l’atelier qui « imposait » le type de produits mis à disposition
du magasin et donc des clients. Or, la structure s’est rapidement rendue compte des difficultés
en matière de gestion des stocks et du type d’offre qu’elle proposait à la revente. Désormais, il
s’agit pour le magasin de toujours disposer d’une offre diversifiée, selon le type et la qualité
des produits offerts et par conséquent de pouvoir élargir sa clientèle. En outre, tous produits
concernés, la structure a réalisé qu’elle proposait un prix de vente moyen de 20 à 30€ en
dessous de ce qui était en place sur l’ensemble du réseau. Dès lors, la structure a souhaité
développer davantage de produits « moyen et haut de gamme » dans une optique de
diversification de son offre et d’élargissement de la clientèle. Une réflexion a également été
menée sur le type de biens proposé en relation avec le coût de production associé. Ainsi, ER a
pris conscience de la nécessité de limiter la vente d’appareils de cuisson dont le temps de
préparation relativement long est peu compensé par un prix de vente restant relativement
faible ou moyen. Enfin, au niveau de la gestion interne, un tableau de bord a été mis en place
28 Délégué général d’Envie
49
début 2009 permettant de calculer quotidiennement le nombre d’appareils produits par jour et
par opérateur et d’assurer un suivi quotidien des ventes.
Envie Sud-Est (ESE) est une EI sous forme de SAS œuvrant dans le secteur des
DEEE. L’association ER est à l’origine de la création de la société en 2006. Elle réalise
aujourd’hui différents types de prestations telles que la collecte des DEEE auprès des
déchetteries et des plateformes des distributeurs, le regroupement en fonction du type de
déchets (cheminement, logistique et traçabilité des déchets), le démantèlement sur les
plateformes de regroupement, ainsi qu’une activité de revente de matière premières ou de
produits résiduels récupérés sur les déchets. ESE a pris l’initiative de coordonner l’ensemble
des réponses des EI de la région Rhône Alpes voulant se positionner sur les appels d’offre
concernant le traitement des DEEE. ESE a fait le choix d’opérer en sous-traitance avec les
groupes industriels pour des opérations de pré-démantèlement ou de dépollution. Il s’agissait
donc pour ESE d’adapter sa structure insérante, à une offre industrielle qui nécessite une
structure financière et productive des plus performantes. ESE est parvenu à réunir ces
éléments et ainsi obtenir le traitement des écrans, segment à forte plus-value.
La structure illustre également tout l’enjeu des SIAE en termes de création de relations
partenariales. Adhérent aux réseaux Envie et UREI, Envie Sud Est représente toutes les EI de
la région Sud Est pour les appels d’offre concernant les DEEE. Ses relations avec la DDTEFP
sont très favorables. En effet, ESE affiche des résultats d’insertion satisfaisant mais diversifie
également l’offre d’insertion du territoire sur des métiers particulièrement intéressants aux
yeux de la DDTEFP. Quant aux relations bancaires, elles sont dignes de confiance.
La structure démontre des résultats d’insertion particulièrement intéressants. Passant de 19
ETP en insertion en 2006 à 57 ETP en insertion en 2008 avec un taux de sorties dynamiques
(CDD/CDI/Formation) évoluant de 41% en 2006 à 52% en 2008, ESE fait preuve de progrès
remarquables. A partir 2009, une partie du volume de traitement des écrans est directement
traitée sur le site du partenaire SITA à Feyzin. Cette démarche s’inscrit une logique de
parcours d’insertion des salariés, riche de débouchés pour les personnes en insertion à l’issue
de leur contrat. Au sein de l’EI, une chargée d’insertion concoure en partenariat avec les
partenaires (PLIE, RSA…) à élaborer des parcours d’insertion et en assurer le suivi (bilan
intermédiaires, réajustements des parcours etc.). L’accent est également mis sur la formation
en fonction des besoins et problématiques individuels (Module Livreur Installateur, Langues,
permis C etc.). Par ailleurs, l’entreprise veille à assurer un certain Turn-Over au sein des
salariés en insertion. Ainsi, une logique de parcours interne est mise en place si bien que
50
chacun sortira avec une expérience sur les différents postes : logistique, manutention,
réception etc.
ESE s’est engagée au cours de l’année 2009 dans la démarche de labellisation QUALIREI de
ses pratiques sociales. Outre l’intérêt de communication externe, cette démarche permet avant
tout d’insister sur l’animation d’équipe, les conditions de travail, le dialogue et la
communication interne. Suite à un diagnostic réalisé avec l'aide de la CRAM29 sur les postes
de travail, un programme de réorganisation de la chaîne de démantèlement a donc été conduit
courant 2009. Les objectifs visaient une diversification des tâches, une meilleure
responsabilisation du salarié sur l'ensemble des opérations de démantèlement, un souci
ergonomique de chaque poste. Avec la mise en place de la nouvelle chaîne, la structure a
installé des petits chauffages individuels à la place de la chaudière à mazout qui générait un
gaspillage d’énergie très important.
A travers ces exemples, plusieurs éléments sont à retirer. Engagées sur le secteur
industriel, les deux structures se sont orientées sur des niches permettant d’œuvrer en faveur
de la protection de l’environnement. Elles développent une réelle logique économique en tant
qu’opérateur agréé sur les DEEE et comme un des leaders de la vente d’appareils
électroménagers rénovés et garantis. Il convient de souligner la dimension sociale de cette
activité économique, qui vise à permettre l’accès des ménages à des appareils électroménagers
à bas prix. La volonté de donner une seconde vie à des appareils qui génèrent de nombreux
déchets inscrit l’activité dans une démarche environnementale. Les deux EI ont pour mission
principale de permettre à des personnes exclues de l’emploi, de s’en rapprocher, d’acquérir
une expérience et des compétences. La démarche QUALIREI, le souci des conditions de
travail, le travail fourni sur les parcours d’insertion et l’importance de la formation des
salariés attestent de l’engagement des structures sur le volet social.
Développer une viabilité et une autonomie économique au service du projet social,
telle est la recette irrémédiable de la réussite d’une structure dans la poursuite de son projet.
Si l’on peut identifier les facteurs clés de réussite, leur mise en œuvre n’est cependant pas si
aisée et beaucoup trop échouent encore. Il existe néanmoins toute une gamme d’outils à
destination des structures d’insertion, et de l’ESS, qui vise à les accompagner dans leur
démarche. Dans ce cadre, nous allons étudier plus précisément les outils pouvant être mis à
disposition par RDI et France Active, leur positionnement vis-à-vis du défi des SIAE et voir
en quoi la mission de stage s’inscrit dans cette optique. A ce titre, ER et ESE ont fortement
bénéficié du partenariat noué avec RDI.
29 Caisse Régionale d’Assurance Maladie
51
IIII.. LL’’eexxiisstteennccee dd’’aacctteeuurrss ppoouurr ll’’aaccccoommppaaggnneemmeenntt eett llee ffiinnaanncceemmeenntt
ddeess SSIIAAEE :: ll’’aaccttiioonn eett llee ppoossiittiioonnnneemmeenntt ddee RRhhôônnee
DDéévveellooppppeemmeenntt IInniittiiaattiivvee..
Nous avons longuement abordé la question de l’évolution des modalités de
financements des SIAE en relevant un enjeu important, celui de veiller au caractère hybride
de ses sources de financement. En réponse à l’idée de « ratisser large », nous allons décrire la
diversité des outils financiers existant au profit des SIAE, ainsi que des outils
d’accompagnement. Ces moyens d’appui visent essentiellement à les épauler sur le volet
économique dans la perspective de consolider et/ou d’impulser leur développement de
manière viable et pérenne.
A. L’existence de nombreux acteurs pour répondre aux besoins des SIAE.
AA..11 PPrréésseennttaattiioonn ddeess ddii fffféérreennttss aacctteeuurrss ppoouuvvaanntt iinntteerrvveennii rr ..
Depuis plusieurs années, de nombreux acteurs ont émergé dont la mission principale
mission est d’accompagner les acteurs de l’ESS et répondre aux besoins qu’ils émettent.
Partant du constat qu’un travail important devait être réalisé quant à l’évaluation des besoins
des SIAE, l’AVISE s’est lancée dans une étude visant à dresser un état des lieux des besoins
de financement des SIAE en vue de développer des modalités d’offre financière les mieux
adaptées (AVISE, 2004, 4). Un premier élément souligne la relative sous-capitalisation des
SIAE comme frein à leur développement et comme élément déstabilisateur. Ainsi, parmi les
structures concernées par l’étude de l’AVISE, 2/3 déclaraient avoir un niveau de fonds
propres insuffisant. Ensuite, comme nous l’avons identifié précédemment, bon nombre de
SIAE témoignent de difficultés avérées de trésorerie. Pour preuve, les structures ont souvent
tendance à recourir aux crédits de court terme (découvert, loi Dailly etc.) : 1/3 des structures
interrogées disent y avoir recours. L’analyse du recours à ces outils apparaît comme un
« pendant de la problématique fonds propres » (AVISE, 2004, 15). Enfin, le besoin
d’investissement est lié à des stratégies de développement de l’activité. L’étude de l’AVISE
indique d’ailleurs, au regard de la nature du recours des SIAE au réseau France Active, que
38% des demandes renvoient à un besoin d’investissement, 1/3 à un financement du Besoin
en Fonds de Roulement puis la restructuration du haut de bilan, la transformation juridique de
la structure et enfin la création d’une entité.
En réponse à ces besoins, plusieurs types d’outils ont vu le jour tandis que d’autres
existaient déjà. Sans aucune prétention d’exhaustivité, nous allons faire un tour d’horizon de
52
la diversité des moyens existants, financiers notamment, à destination des SIAE pour leur
permettre de se développer de manière pérenne.
Outre les financements accordés par l’état en termes d’aides au poste, les SIAE peuvent
solliciter d’autres partenaires publics. L’UE s’est aussi dotée de moyens financiers pour
soutenir des projets. Le Fonds Social Européen s’inscrit donc dans cette dynamique et vise,
pour la période 2007-2013, à « renforcer la cohésion sociale, favoriser l'inclusion sociale et
lutter contre les discriminations ». Pour autant sur cette période, le montant alloué est en
diminution de 34% par rapport à 2000-2006. Par conséquent, on comprend l’inquiétude
ambiante des Plie, des missions locales dont les financements dépendent largement d’apports
européens. Au titre du FSE, il existe également un dispositif d’appui aux microprojets
associatifs, la mesure 42330, qui soutient la création d’activités dans le secteur de l’ESS à
condition qu’elles soient positionnées sur de nouveaux gisements d’emploi (Loquet,
Septembre 2007). La Commission européenne a quant à elle lancé un nouveau programme,
« le programme Progress » qui permet dans les domaines de « l'emploi, l'insertion, la
protection sociale, les conditions de travail, l'égalité des sexes et la non-discrimination », de
financer des études, des actions d’apprentissage et autres campagnes de sensibilisation.
Fonctionnant sur un principe d’appels d’offre, ce programme concerne les SIAE ou autres
acteurs en mesure de porter de tels projets (Loquet, Septembre 2007).
La loi du 29 Juillet 1998 a créé, à l’échelle de chaque département un Fond Départemental
pour l’Insertion (FDI) dont l’objet est de financer toute initiative locale en matière d’IAE. Cet
outil est destiné à financer le développement et la consolidation d’initiatives en matière
d’IAE. 2 principaux types de financement peuvent être identifiés (Jeanneau, Septembre 2007).
Une mission d’aide et de conseil à destination des organismes qui ont pour projet la création
d’une SIAE (aide à la définition d’un projet économique, social et financier, réalisation d’une
étude de marché financement d’expertises en vue du développement commercial, de
l’organisation de la production, la gestion financière etc.) Une aide au démarrage, au
développement et parfois, à la consolidation en direction des SIAE.
Parallèlement au développement du secteur de l’IAE, les années 70-80 ont vu émerger de
nouvelles aides proposées par la société civile. Divers outils sont à ce titre
mobilisés (Nahapétian, Dorival, Beauvieux, Septembre 2007). On retrouve tout d’abord
divers organismes de capital-risque solidaire, tels que « Autonomie et Solidarité » ou encore
« les Cigales », ou encore la Société de Financement des Entreprises d’Insertion (SOFINEI)
créée en 2006, qui avec les moyens que lui allouent les épargnants, prend des parts dans le 30 Anciennement mesure 10B
53
capital d’une EI et lui permet ainsi de renforcer ses fonds propres. Globalement, le principe de
tels organismes consiste à mobiliser de l'épargne destinée à la création et au développement
de petites entreprises locales, telles que les SIAE. Les sommes ainsi épargnées, appartenant
toujours aux épargnants, sont investies dans le capital de sociétés, permettant ainsi d’élargir
leur champ et leur capacité d’action (Jeanneau, Septembre 2007). Autre outil que l’on peut
identifier, les fonds solidaires31 qui réutilisent l’argent investi par les épargnants afin
d’apporter du capital aux SIAE en achetant des actions non cotées. En outre, il existe des
produits d’investissement plus directs, tels que les financements de la Caisse d’Epargne à
destination de Projets d’Economie Locale et Sociale (Pels) pour des projets très précis portés
par des structures sans but lucratif œuvrant en faveur de personnes fragilisées et en recherche
d’autonomie sur des domaines qui sont l’emploi, l’autonomie, le lien social (la culture, le
sport, la lutte contre l’exclusion etc.).
En sus de ces nombreux outils, il convient également d’aborder l’activité de mécénat32 à
destination des SIAE pouvant prendre la forme d’apport financier, de compétence, en nature.
La Fape, créée en 1995 intervient en vue d’apporter une aide à la professionnalisation et au
développement de liens avec les entreprises du secteur marchand. Outre l’accompagnement et
l’apport financier qu’elle propose, la fondation Crédit Coopératif distribue des prix et trophées
à destinations de structures de l’ESS. La Fondation de France quant à elle, apporte un soutien
via des appels à projets spécifiques. La Fondation Kronenbourg intervient en faveur des cafés
sociaux et restaurants traiteurs d’insertion via le mécénat de compétences ou l’octroi de
subventions. Dans la même logique de spécialisation par secteur, la fondation Décathlon
favorise des projets d’insertion par le sport.
AA..22 RRDDII eett FFrraannccee AAccttiivvee:: uunnee iinntteerrvveennttiioonn aauu pplluuss pprrèèss ddeess aacctteeuurrss ddee ll ’’ IIAAEE..
C’est par le biais de la forte croissance de l’épargne solidaire que l’association France
Active est progressivement devenue l’un des premiers réseaux de financement de l’IAE. Créé
en 198833, le réseau dispose de deux sociétés financières et d’une 40aine de fonds territoriaux
(parmi lesquels on retrouve RDI), auxquels il donne pour mission d’expertiser des projets
d’IAE, de mobiliser des partenariats publics et privés et d’apporter une aide financière en
tentant de rassembler les acteurs bancaires. Association créée en 1993, RDI œuvre pour
l’accompagnement et le financement à la création ou à la reprise d’entreprise « classique »
31 Le FCPIE par exemple (Fond Commun de Placement Insertion Emplois) 32 Parmi les fondations les plus actives en faveur de l’IAE, on retrouve la Fondation Agir pour l’Emploi (FAPE), la fondation Caisse d’Epargne, la Fondation de France, la Fondation Macif etc. 33 A l’initiative conjointe de la Fondation de France, de la Caisse des Dépôts et Consignations, de la Fondation MACIF, du Crédit Coopératif et d’autres organisations caritatives
54
d’une part et à destination des entreprises de l’ESS d’autre part. RDI a pour vocation le
développement de l’emploi dans les structures de l’ESS et donc de l’IAE. Les SIAE
représentent d’ailleurs une part considérable des structures étant accompagnées par RDI et le
réseau France Active. A titre indicatif, rappelons que près de la moitié des structures
concernées par la campagne de suivi 2009, sont des SIAE. Du fait de leur vocation sociale,
bon nombre de dirigeants de structures ne peuvent s’appuyer uniquement sur leurs propres
apports ou se porter caution en tant que personne physique. Comme nous l’indique l’étude de
l’AVISE, les SIAE émettent des besoins afin de consolider leurs fonds propres, de financer
leur BFR et d’être en mesure d’investir. Face à ces difficultés financières spécifiques, la
mission de RDI est d’accompagner et trouver des voies de financement en vue de lever des
fonds supplémentaires, voués à rendre viable économiquement des projets d’utilité sociale
(Vitel & Le Berre, Juin 2009). Les outils financiers que proposent France Active évoluent et
s’adaptent sans cesse en fonction des besoins des structures.
Afin d’être éligible à une intervention de RDI, toute structure doit répondre à trois principaux
critères : elle doit démontrer une utilité sociale34, exercer une activité économique et
participer à la création ou consolidation d’emplois. Toute intervention du réseau France
Active se fera à destination de structures capables de démontrer des conditions de pérennité
économique et une professionnalisation adéquate. L’association est en mesure d’accompagner
une grande diversité de projets en adaptant sa réponse à la taille, au statut juridique, à la phase
de développement et au projet précis de la structure. Par conséquent, le niveau de risque pris
dépendra de tous ces éléments et de fait, l’origine de la ressource mobilisée évoluera en
conséquence. De plus, un effet levier pour des prêts bancaires sera dans de nombreux cas
recherché. Il convient d’insister sur les rôles des banques auprès des structures de l’ESS. On
remarque souvent une relative réticence de certains organismes bancaires à s’engager auprès
des structures de l’ESS, ce qui s’explique essentiellement par le manque de connaissance de
ce secteur. Pour autant, les banques ont un rôle fondamental à jouer auprès de l’ESS. C’est
pourquoi, RDI s’attache de manière quasi systématique à mobiliser les banques et à les inciter
à jouer le jeu. Une complémentarité de divers financements est souvent recherchée, avec pour
objectif, de lever les réticences et amener les banques à faire davantage confiance aux
structures. RDI est donc un acteur très actif dans l’organisation d’un tour de table financier et
dans la mobilisation d’une diversité de partenaires.
34 Cf annexe 5 : les différents domaines sur lesquels France Active est susceptible d’intervenir.
55
B. Les outils mobilisés par RDI : un large panel adapté aux différentes
problématiques rencontrées.
Il convient de présenter plus précisément d’une part les outils que RDI et France
Active sont à même de mobiliser et d’autre part d’étudier pour quels types de besoins et sous
quelles conditions une intervention peut être mise en place. Si l’on se concentre sur l’activité
de RDI, on distingue 2 principaux modes d’actions possibles en direction des acteurs de
l’insertion : d’une part un large panel d’outils financiers et d’autre part un outil plus qualitatif,
à savoir le Dispositif Local d’Accompagnement.
BB..11 LLeess oouuttii llss ddee ffiinnaanncceemmeenntt eett llee ssuuiivvii ddeess ssttrruuccttuurreess..
RDI, dans le cadre de son affiliation au réseau France Active est un acteur de
financement par excellence. L’association dispose d’un large panel d’outils lui permettant
ainsi de pouvoir intervenir en prenant en compte la diversité des problématiques des
structures. Ainsi le choix de l’outil mobilisé dépendra du type de besoin sollicité par la
structure (création, développement, consolidation voire même restructuration), ainsi que de
l’importance de la structure, les montants mobilisés tous outils confondus pouvant aller de
10k€ à 1500k€35. Les solutions ainsi proposées peuvent soit prendre la forme de garanties
d’emprunt bancaire ou d’apport en fonds propres/quasi fonds propres.
Les garanties d’emprunt bancaire visent à opérer un effet levier auprès des prêts bancaires
qui ne seraient débloqués sans de telles garanties. Les prêts ainsi couverts sont destinés soit à
financer un besoin en fonds de roulement soit à financer des investissements. France Active
Garantie (FAG) est une société financière et filiale de l’association France Active. Les
garanties de crédits bancaires qu’elle propose, sont destinées soit aux personnes sans emploi
ou en situation économique précaire, souhaitant créer leur entreprise, ainsi qu’aux entreprises
solidaires et associations d’utilité sociale. La caution professionnelle aux ETTI répond aux
exigences de la législation sur l'activité des ces SIAE leur imposant qu’elles disposent d'une
garantie financière afin de couvrir le paiement des salaires, des indemnités et des cotisations
dues au titre de ces salaires. Seuls une société de caution mutuelle, un organisme de garantie
collective, une assurance, une banque ou un établissement financier peuvent apporter une telle
garantie qui s’élève à 8% du CA de l’ETTI. Le Fonds de Garantie pour les Structures
d’Insertion par l’Economique (FGIE) s’adresse spécifiquement aux SIAE et couvre, comme
nous l’avons indiqué, des prêts destinés soit à financer un investissement ou bien le BFR.
35 Le tableau en annexe 6 représente l’ensemble des interventions financières dont dispose le réseau France Active et les Fonds Territoriaux.
56
Dans le premier cas, le prêt doit financer des investissements amortissables, de type
immobilier, véhicule, recherche et développement etc. Dans le second cas, les prêts doivent
s’intégrer dans un plan de financement pour le démarrage ou le développement de la SIAE.
Les interventions en quasi fonds propres peuvent être considérées comme des « créances de
dernier rang », autrement dit des fonds qui seront les derniers à sortir en cas de difficulté de la
structure. C’est pourquoi, on les considère comme des quasi-fonds propres, car ils permettent
réellement à la structure de se renforcer financièrement. Les interventions en Fonds
d’Amorçage Associatif, en Contrat d’Apport Associatif, au titre de la Société
d’Investissement France Active (SIFA) ou du Fond Commun de Placement Insertion Emploi
(FCPIE) entendent donc intervenir auprès des SIAE en vue de renforcer leur assise financière,
de les rendre plus solvables. Ceci permet de remédier en partie au recours quasi permanent à
des outils financiers de court terme (découvert, Dailly), qui représentent un coût élevé pour
les structures. Dans une logique de développement de l’activité, l’intervention en quasi fonds
propres permet également de couvrir l’accroissement du BFR qui souvent, engendre de gros
problèmes de trésorerie. Enfin, ces outils financiers peuvent être sollicités en vue d’assurer et
contribuer au financement d’un plan d’investissement. Il convient également de noter que la
SIFA est une société d’investissement solidaire, ayant pour actionnaire autre que France
Active, des établissements financiers, des grandes entreprises, des fonds communs de
placement d’entreprises solidaires. Son intervention se fait en prêt participatif ou en capital
compte courant. La SIFA dispose également d’un dispositif régional, qui mobilise
régionalement son capital. Le FCPIE détient le label FINANSOL, garantissant aux
épargnants, solidarité et transparence. 10% des fonds collectés sont investis dans des titres
non cotés. Ces 10% sont orientés par France Active en direction des entreprises ou
associations créateurs d’emplois en particulier pour des personnes en situation économique et
sociale précaire.
Depuis peu, France Active semble avoir pris conscience d’un nouvel élément
indispensable dans sa mission d’aide aux SIAE : le suivi. France Active souhaite en effet
fortement développer cette activité, qui représente à notre sens un enjeu fondamental dans la
pérennité des partenariats qui sont engagés avec les différentes structures. La mission de stage
m’a donc placé en charge du suivi de l’ensemble des structures ayant bénéficié d’un
financement de la part du réseau France Active. Il s’agit, dans le cadre du contrat d’objectifs
fixé avec le responsable de la structure, d’établir chaque année un bilan économique, financier
et social de l’année écoulée. L’aspect économique est un des points fondamental de cette
mission car il est gage pour la structure, d’une consolidation et d’une pérennisation de son
57
activité. Une situation économique saine, lui permet effectivement de pouvoir tendre, de façon
plus sereine vers son objet social. Pour autant il est également primordial, dans le cadre du
suivi, de porter une attention toute particulière à l’environnement de la structure dans toute sa
globalité : évolution de l’emploi, réseaux partenariaux et rapports aux divers financeurs,
composition du Conseil d’Administration, évolution du contexte lié au secteur d’activité etc.
Ici repose tout l’intérêt du suivi, à savoir d’être en mesure de développer une connaissance
fine et précise de la structure dans son ensemble et de pouvoir envisager de manière pertinente
sa situation et ses perspectives d’avenir. Le suivi est donc une mission d’appui et
d’accompagnement durant toute la durée du financement. Le suivi est annuel mais peut aussi
avoir lieu de manière plus fréquente en cas de difficulté de la structure. Le suivi vise, dans la
mesure du possible, à instaurer un climat de confiance avec la structure, d’où l’importance de
réaliser des visites sur place afin de nouer des relations plus « poussées » et de confiance avec
les dirigeants de la structure et de se rendre compte de leur environnement de travail. Le suivi
vise à réaliser un « état des lieux » de la situation de la structure, de l’orienter, de la conseiller
et d’envisager conjointement ses perspectives d’avenir et de développement, en s’interdisant
absolument tout acte de gestion.
Dans le cas où une structure rencontre des difficultés, il s’agit de fixer et d’ajuster avec elle de
nouveaux objectifs et de lui proposer un soutien, en ayant recours à des outils adaptés. De
même, lorsque les perspectives de remboursement semblent risquées et incertaines, la mise en
œuvre de nouvelles modalités est possible. Le suivi doit se faire dans un souci de percevoir le
remboursement à terme sans pour autant mettre en difficulté la structure de manière
irrémédiable. Ainsi, le réseau France Active propose des possibilités de rééchelonnement des
remboursements. Par exemple, à défaut d’un échéancier de 3 versements sur trois ans, une
mensualisation peut être envisagée. Cette flexibilité permet à la structure, confrontée à une
situation délicate, de bénéficier d’un laps de temps supplémentaire afin de développer et
pérenniser son activité. Elle lui permet aussi d’avoir des échéances certes plus fréquentes mais
beaucoup moins importantes, réduisant ainsi les risques de trésorerie. Toutefois, il incombe de
ne pas tomber dans l’effet inverse qui serait de repousser indéfiniment le remboursement,
situation qui ne serait profitable ni à RDI ni à l’association. C’est pourquoi, la concertation et
la définition conjointe des réorientations est indispensable au bon fonctionnement du
partenariat.
58
BB..22 LLee DDiissppoossii ttii ff LLooccaall dd’’ AAccccoommppaaggnneemmeenntt ccoommmmee ssoouuttiieenn aauu ddéévveellooppppeemmeenntt dduu mmoonnddee aassssoocciiaattii ff..
Initialement destinés à pérenniser les dispositifs emplois-jeunes au sein des
associations, les DLA ont été créés en 2001, sous l’égide de l'Etat et de la CDC. Avec pour
objectif premier, le soutien de l'activité et de l'emploi dans le secteur associatif, ces dispositifs
ont rapidement vu leur champ d’intervention élargi. Désormais, les DLA ont pour enjeu
d’apporter un soutien à l’ensemble des structures employeuses du tiers secteur (associations,
coopératives, et SIAE). Leur rôle vise donc à « intervenir dans les structures pour les aider à
se consolider économiquement » (Jeanneau, 2007). Le dispositif DLA se déroule en plusieurs
phases. Il convient dans un premier temps de dresser un diagnostic général et partagé avec la
structure de son activité afin de définir les pistes sur lesquelles il est possible et utile d’agir. A
partir de ce diagnostic, le DLA finance l’intervention d’experts sur une problématique
clairement identifiée, visant à accompagner la structure dans ses objectifs de pérennisation.
Parmi les types d’accompagnement que propose le DLA, on retrouve pour l’année 2008 les
thématiques suivantes : appui au projet et stratégie de consolidation (41%) ; organisation
interne/ressources humaines (22%) ; aspects économiques et financiers (21%) ;
communication et prospection commerciale (9%) (AVISE, 2009, 7).
En 2007, le territoire français comptait 104 DLA coordonnés à l’échelon régional –via les 17
C2RA- et complétés depuis 2005 par la création des Cnar (Centre Nationaux d’Appui et de
Ressources) dont l’objet est d’apporter une expertise sectorielle. Depuis l’année 2002, pas
moins de 9000 structures ont bénéficié d’un appui du DLA. Ces structures employaient au
total 71 000 salariés. Pour l’année 2005, c’est 600 SIAE qui ont été accompagnées soit plus
du double par rapport à 2004. L’IAE est un des domaines concernés qui marque l’une des plus
importantes progressions (Jeanneau, 2007). En 2008, les DLA sont intervenus auprès des
SIAE qui représentent 14% de l’ensemble des accompagnements réalisés (AVISE, 2009, 6).
La DRTEFP de Poitou Charente a réalisé une étude sur l’apport des DLA, en direction
des ACI notamment. Face à l’évolution de leur environnement certaines tendances se font
ressentir: dispersion territoriale, taille moyenne réduite, fréquente fragilité financière et
difficulté à développer des stratégies commerciales. Dans un tel contexte, la question de leur
survie se pose avec acuité et passe nécessairement par des questionnements quant aux modes
de management internes, leurs aptitudes à diversifier et développer leurs débouchés
économiques (DRTEFP, 2008, 1). Si l’on ajoute à cela la tendance au tarissement des
subventions ainsi que l’imposition par les nouvelles modalités de conventionnement
d’objectifs quantitatifs de retour à l’emploi plus serrés, « les ACI sont confrontés au double
59
impératif consistant à rationaliser leurs modèles de gestion, à innover dans les domaines
économiques et commerciaux, tout en améliorant leur efficacité en termes de sortie vers
l’emploi de publics » (DRTEFP, 2008, 1). C’est donc sur ces thématiques que les
accompagnements DLA sont organisés : l’appui au développement économique d’une part
(développement de nouvelles structures, recherche de financements hybrides, accès aux
marchés publics) et l’appui à la professionnalisation des équipes permanentes (Gestion des
Ressources Humaines, la gestion comptable et financière, mise en place de tableaux de bord)
d’autre part (DRETFP, 2008,2).
En termes d’incidence on peut distinguer les effets directs, davantage structurels et liés aux
objectifs fixés dès le départ : mise en œuvre d’outils, d’actions stratégiques, de projets
stratégiques. Par ailleurs, on identifie des effets induits, moins perceptibles et agissant plus sur
le long terme mais tout aussi cruciaux. Il s’agit de la dynamique générale du DLA qui permet
aux structures d’opérer un changement d’approche et de comportement et d’être moins
réticentes aux logiques suivantes : introduction d’outils de gestions, préférence pour les
financements par subventions plutôt qu’aux outils bancaires, mutualisation inter-structures
plus envisageables etc. En permettant de poser un diagnostic neutre, technique et prospectif
sur le fonctionnement et l’évolution des SIAE, les DLA ont démontré avoir des effets notoires
quant à la consolidation et au développement de ces structures. L’impact des DLA se fait
ressentir sur les structures concernées dans le sens où ils les amènent à affiner leurs modalités
d’organisation, d’orientation stratégique, de gestion etc.
D’une intervention davantage qualitative via le DLA, à un accompagnement et suivi
réguliers des structures en passant par toute une gamme d’outils financiers destinés à répondre
à des problématiques diverses et variées, il apparaît que des acteurs comme RDI sont
réellement prêts à aider et soutenir les SIAE en vue de faire face aux nouveaux défis,
économiques notamment, qui se dressent devant eux.
C. Une intervention ayant fait ses preuves et pouvant aller plus loin.
CC..11 EExxeemmpplleess dd’’ iinntteerrvveennttiioonnss rréévvééllaattrr iicceess..
¤¤ EEnnvviiee RRhhôônnee eett EEnnvviiee SSuudd EEsstt :: pplluussiieeuurrss iinntteerrvveennttiioonnss eenn rrééppoonnssee àà ddeess bbeessooiinnss ddiivveerrss..
Nous avons longuement évoqué le cas d’Envie Sud Est et d’Envie Rhône afin de
montrer comment ces deux structures parviennent à maîtriser le développement d’activités
économiques viables, sur des niches respectueuses de l’environnement, tout en insistant sur
l’importance de leur mission d’insertion. Ces deux structures sont engagées depuis plusieurs
60
années déjà dans un partenariat avec RDI et ont bénéficié de nombreuses interventions. Ces
deux exemples montrent la dynamique partenariale qui se crée entre RDI et les SIAE en vue
de pérenniser le plus longtemps possible ces coopérations.
En évoquant les relations entretenues entre RDI et Envie Sud Est, M. Charrassin, directeur
d’ESE et d’Envie Rhône constate qu’« avec RDI, les relations sont très satisfaisantes et nous
souhaitons continuer ce partenariat ». En 2007, ESE a bénéficié d’un premier financement de
15k€ de SIFA, complété d’un apport de 15k€ du FCP IE ayant pour objet la consolidation du
Fond de Roulement et ainsi de favoriser le développement de l’activité. A ce titre, M.
Charrassin indique que « RDI nous a permis de monter le financement qui assure le
développement d’Envie Sud Est. La maison mère Envie Rhône était trop fragile pour
supporter seule la création de cette filière ». En 2009, une garantie FAG de 50% sur un prêt
bancaire de 60k€ a été attribuée, en vue du renouvellement de la chaîne de production. En sus
d’être destiné à accroître la productivité, cet investissement a également été consenti dans un
souci d’amélioration des conditions de travail et d’économies d’énergies. Depuis sa création
en 2006, ESE a quadruplé son Chiffre d’Affaires, voyant ainsi passer son personnel en
insertion de 10ETP à 34ETP en 2009.
Envie Rhône a également bénéficié d’un double soutien de RDI : en 2003, une garantie à
hauteur de 75% a été consentie sur un emprunt de 70k€. En 2007, Envie Rhône a été
accompagné dans le cadre du DLA sur la problématique de l’organisation interne et du
processus de production. Enfin, au cours de l’année 2009, une nouvelle intervention
financière de RDI a été décidée afin de contribuer au financement du Besoin en Fonds de
Roulement liée aux nouveaux projets de développement de la structure.
¤¤ LLaa mmoobbiilliissaattiioonn dduu DDLLAA eett dd’’oouuttiillss ffiinnaanncciieerrss aauu sseerrvviiccee dd’’uunnee jjeeuunnee EEII :: llee ccaass AAlltteevv..
RDI, fond territorial France Active et structure porteuse du DLA du Rhône présente
l’avantage de regrouper en son sein une mission d’accompagnement et de financement des
SIAE. Selon les départements, le fond territorial France Active n’est pas toujours porteur du
DLA. Au cours de mon stage, j’ai pu me rendre compte de tout l’intérêt d’avoir une structure
capable de mobiliser des outils de financement et des outils d’accompagnement. Néanmoins,
cela ne signifie en aucun cas que, lorsque les outils France Active et le DLA ne sont pas
réunis, l’action soit moins efficace. Les SIAE qui présentent des besoins ou problématiques
particuliers ont parfois du mal à évaluer le type d’intervention nécessaire. Dès lors, RDI est en
mesure de mobiliser soit un financement soit un accompagnement de manière plus efficace.
De nombreuses structures ont pu ainsi bénéficier d’un DLA, suivi ou précédé d’un
financement. Les SIAE bénéficient donc, grâce à RDI, d’un partenaire polyvalent. Ainsi
61
parmi les structures concernées dans le cadre du suivi 2009, bon nombre d’entre elles avaient
d’ores et déjà bénéficié d’un DLA. D’autres qui ont bénéficié d’un financement font
actuellement l’objet d’un accompagnement.
Afin d’illustrer comment le DLA et le financement peuvent intervenir auprès d’une même
structure, arrêtons nous quelques instants sur le cas d’Altev, EI créée en 2006 sous forme de
SARL, et conventionnée pour 2ETP en insertion. Son cœur de métier correspond
essentiellement à l’entretien d’espaces verts avec pour principaux clients des bailleurs
sociaux, des régies d’immeubles, d’autres SIAE et des entreprises privées. RDI est intervenu
une première fois dans le cadre de la création de la structure. Cet apport fut destiné à
contribuer au financement de l’ensemble des besoins engendrés par la création. Parmi les
éléments déterminants dans la décision d’intervenir, on identifie tout d’abord la qualité d’un
partenariat noué avec une autre EI. Ce partenariat découlant des expériences antérieures du
gérant, allait permettre à Altev de bénéficier d’une mise à disposition d’un bureau, de l’accès
à du matériel ainsi qu’une partie de la clientèle du partenaire déjà en demande de services
d’entretien des espaces verts. Suite à une étude de marché menée par le gérant et grâce à un
réseau solide qu’il ne manquera pas d’actionner, Altev bénéficiera dès sa création d’un
portefeuille clients. Autre facteur déterminant, le profil du gérant qui semblait être idéal pour
mener à bien ce projet. Ses expériences, tant dans le domaine de l’insertion que dans le
secteur des espaces verts, sont apparus comme des facteurs sécurisant tandis que sa récente
formation en gestion laissait supposer des compétences de direction de SIAE. Par ailleurs, le
territoire d’implantation de la structure ne présentait pas de concurrent en termes d’offre
d’insertion. Cette décision d’installation a été longuement murie et le gérant a pris le soin de
rencontrer au préalable l’ensemble des acteurs institutionnels. La prise en compte du
territoire, un des facteurs clés que nous avons identifié, a donc été correctement menée. Enfin,
la faible dépendance de la structure à des financements extérieurs, dont les problèmes de
délais de versement ont déjà été largement décrits, est apparue comme un autre point positif.
Malgré la réunion de bon nombre de « facteurs clés », en 2009, la structure a repris contact
avec RDI présentant une relative fragilité liée à plusieurs facteurs. Bien que la structure soit
parvenue dès sa création à développer son chiffre d’affaires, ceci s’est fait sans réelle
démarche commerciale. Or, il s’agissait précisément d’un des points de vigilance identifié au
moment du financement ; l’avenir de la structure dépendrait rapidement de la capacité du
gérant à mener une politique commerciale efficace. L’essentiel des marchés ont au départ été
captés du fait de partenariats solides noués par le dirigeant lors d’expériences professionnelles
62
antérieures. Toutefois, l’année 2009 s’annonce difficile pour développer le CA. Les nouveaux
marchés acquis viennent en effet principalement compenser la perte de deux marchés
existants (1 marché de sous-traitance qui a pris fin pour le titulaire et un marché s’appuyant
sur une convention avec un bailleur social qui a dû formalisé ce type de marché dans le cadre
d’appels d’offre). Or ALTEV, du fait notamment de sa taille, rencontre de nombreuses
difficultés à remporter des appels d’offre. Bien que la structure dispose d’un plan stratégique
de développement, les moyens pour le mettre en œuvre (stratégie commerciale, moyen
humains, logistique, etc.) sont occultés, le gérant ne sachant réellement comment les mettre en
œuvre. Un réel besoin est ici identifié. Une autre problématique renvoie à des problèmes de
gestion interne des ressources humaines: rotation importante du poste d’encadrant, difficultés
à fidéliser les salariés en insertion. Ces difficultés qui entrainent une sous-utilisation des
postes en insertion, risquent d’aboutir à la révision des modalités de conventionnement.
Conscient de ces difficultés, le gérant a décidé de mutualiser son action d’insertion avec une
autre EI sur le volet recrutement et mise en œuvre des parcours d’insertion. Cette nouvelle
organisation permettra au dirigeant de se libérer du temps pour l’aspect commercial
notamment. A l’heure actuelle, un accompagnement DLA est en cours afin d’épauler la
structure en lui apportant des outils nécessaires à la mise en œuvre de son plan de
développement. Ces méthodes intègrent les éléments suivants : le développement de la
stratégie commerciale, l’élaboration du marketing-mix (produit – prix – distribution –
communication), la gestion des RH (appui à la fonction de dirigeant) ainsi que le
développement d’outils logistiques (dimensionnement de l’outil de production, organisation
administrative).
Cet exemple concret d’intervention de RDI est intéressant sous deux aspects. Tout
d’abord, en analysant l’intervention financière consentie par RDI, nous avons pu envisager
certains éléments essentiels que doit développer la structure : partenariats, adéquation au
territoire, étude et recherche de marché, profil du porteur de projet etc. En ce qui concerne
l’accompagnement DLA, on réalise que les SIAE disposent de partenaires prêts à les
accompagner sur leurs problématiques spécifiques : gestion des ressources humaines et
démarches commerciales dans ce cas. Ainsi l’exemple d’Altev révèle à nouveau les difficultés
que peuvent rencontrer les SIAE dans la mise en adéquation de leur projet d’insertion (gestion
des RH) et d’un développement économique (difficultés de mise en œuvre d’une démarche
commerciale) et l’importance à cet effet, de la présence d’acteurs tels que RDI.
63
¤¤ UUnnee pprriissee ddee rriissqquuee ddee RRDDII aayyaanntt ccoonnttrriibbuuéé aauu «« ssaauuvveettaaggee »» ddee MMéénnaaggeess SSeerrvviicceess..
Ménage Services est une association créée en Décembre 1996 sous l’égide de l’Hôtel
Social et conventionnée EI depuis 1997. A l’origine, sa vocation consiste à créer des postes
d’insertion pour des femmes en situation d’exclusion dans le domaine des services à la
personne et à domicile. L’association a donc obtenu depuis plusieurs années les agréments
« simple et qualité », nécessaires à ce type d’activité. Cependant, le public que l’association
reçoit ne lui permet pas de développer des activités plus complexes. Par conséquent des
efforts importants de formation sont réalisés afin de permettre à celles en ayant le potentiel
d’évoluer dans ces métiers. Pendant plusieurs années, au terme des contrats d’insertion, les
femmes étaient embauchées par l’association sur des contrats de travail de droit commun en
CDI. Or, ce qui pouvait passer pour des sorties positives à l’emploi est rapidement devenu le
problème le plus important de l’association. En 2002, Ménage Services a du faire face à de
grosses difficultés étant donné que la moitié des heures facturées étaient réalisées par du
personnel non insertion dont le coût est plus important. Parallèlement, l’association affichait
un prix de vente de l’heure identique pour tous les clients et calculé sur la base du coût de la
main d’œuvre insertion. Dès lors, constatant qu’en 2002, sur 25 ETP réalisés, seuls 13.64
correspondaient à des postes en insertion, la DDTEFP a alerté et mis un ultimatum à la
direction de l’association afin de faire évoluer cette situation.
Une telle situation ne pouvait effectivement plus durer car salarier en CDI et CDD les
personnes en fin de parcours d’insertion posait non seulement de graves problèmes de
rentabilité mais se faisait également au détriment des personnes en poste d’insertion pour
lesquelles les heures proposées n’étaient plus suffisantes. Dès lors, la direction de
l’association à imaginer de créer et d’assurer le portage d’une Association de Services à la
Personne (ASP) ayant pour vocation de porter les postes de travail relevant du droit commun,
pérennisés sur Ménage Services. Un tel projet permettait également d’envisager des parcours
d’insertion cohérents avec à la clé, de bonnes perspectives d’insertion professionnelle dans le
cadre du droit commun.
En 2003, Ménage Services a donc sollicité RDI en vue de trouver un soutien. Alors à la limite
du dépôt de bilan, l’intervention en Contrat d’Apport Associatif de 15k€ ainsi qu’en garantie
sur un prêt bancaire d’un même montant, a permis de « donner l’air suffisant pour mobiliser
l’énergie ailleurs, sur d’autres projets » affirme M. Abdellaoui, directeur de Ménage
Services. A ce titre, il reconnaît qu’« il fallait réellement y croire à l’époque ». En 2006, RDI
intervient de nouveau en faveur de MS DOM, l’ASP imaginée par Ménage Services,
réellement créée en 2004 mais dont l’activité n’a démarré qu’en 2006. Ce financement est
64
venu contribuer à la constitution du fond de roulement nécessaire au démarrage ainsi qu’au
financement des investissements nécessaires.
Depuis, Ménage Services a développé son Chiffre d’Affaires de l’ordre de 60% et a vu son
personnel en insertion passer de 13ETP à 35ETP. MS Dom propose une offre de services
complémentaire de celle de l’association Ménage Services, et permet à des nombreuses
salariées en insertion de poursuivre, en tant que salariée de droit commun.
Aujourd’hui l’association Groupe MS a été créée en vue de mutualiser les moyens entre
Ménages Services, MS Dom, Autrement chez vous et MS Ressources. L’idée est de partager
des ressources transversales : management, administration, gestion, développement.
Autrement chez vous, assure depuis Avril 2008 des prestations de services et bénéficie de
l’agrément simple et qualité. MS Ressources association a été créée en Mars 2008 et
constitue un centre de formation et de ressources internes sur les métiers du service à la
personne. Fort d’un partenariat vieux de 7 ans, RDI est toujours en contact avec la structure et
des perspectives d’une nouvelle intervention sont envisagées : un exemple de collaboration
pérenne.
A nouveau, des tensions entre activité économique (baisse de la rentabilité) et projet
d’insertion (volonté de pérenniser des contrats en insertion) ont été à l’origine des difficultés
rencontrées par l’association. RDI est ici intervenu en soutien à un projet imaginé par les
dirigeants afin de sauver la structure. Aujourd’hui, l’activité se porte bien, combinant
parfaitement une activité économique au service d’un projet d’insertion, qui ne cesse, au
regard de la constitution du groupe MS, de se pérenniser.
A l’image de ces quelques exemples, l’action proposée par RDI, que ce soit dans le
cadre du DLA et de ses outils de financements, semble efficace dans l’accompagnement des
SIAE à se positionner sur le volet économique et social. Toutefois, certaines
recommandations peuvent être formulées en vue de rendre ces interventions encore plus
pertinentes.
CC..22 PPrrééccoonniissaattiioonnss eett rreeccoommmmaannddaattiioonnss..
Il convient également de prendre un peu de recul quant à l’intervention que propose
RDI et d’en identifier quelques limites ou recommandations. Si depuis sa création,
l’association et le réseau France Active ont fait leur preuve et connaissent un fort
développement, certains aspects de leur contribution restent à souligner.
65
¤¤ DDéévveellooppppeerr uunnee ppééddaaggooggiiee ééccoonnoommiiqquuee eett uunn ssuuiivvii pplluuss rreennffoorrccéé eenn ddiirreeccttiioonn ddeess SSIIAAEE..
De nombreuses SIAE rencontrent des difficultés pour bénéficier d’une intervention de
France Active. La mobilisation d’outils financiers nécessite que toute SIAE réponde à certains
critères. Ainsi, les exigences en termes de gestion et suivi économique sont fortes. Toute
SIAE qui souhaite obtenir un appui doit démontrer de réelles capacités économiques et faire
preuve de professionnalisme. Si ces conditions peuvent sembler trop contraignantes, elles
n’en sont pas moins indispensables, tant pour l’association France Active que pour les SIAE.
D’ailleurs, l’étude de l’AVISE révèle une capacité significativement croissante des structures
à être en mesure d’exprimer et formuler leurs besoins de financement, et ce, en distinguant
court, moyen et long terme. Il semble que les structures intègrent dorénavant la nécessité de
mener des analyses financières fines quant à leur activité. Ce facteur est un signe de
maturation croissante, de la part des acteurs : « Cela ne nous semble pas banal, car la maîtrise
par les SIAE des raisonnements financiers de type bancaire n’est pas une évidence » explique
l’AVISE (AVISE, 2004, 43). Une telle tendance résulte sans aucun doute de l’évolution de
l’environnement qui pousse et impose aux SIAE de développer une activité économique
viable. De même, on peut penser que des acteurs comme France Active, de par les effets
avérés de leur intervention et des critères qu’elle nécessite, les incite d’autant plus à s’engager
dans une telle démarche.
L’enjeu, selon l’AVISE, revient donc à développer toute une pédagogie auprès des SIAE, leur
permettant d’acquérir les capacités nécessaires à l’évaluation objective de leurs risques et
leurs capacités de rembourser les concours auxquels elles souscrivent etc. (AVISE, 2004, 44).
Une telle démarche leur permettrait d’être plus à même et plus rapidement de bénéficier de
l’apport de RDI. La mission de suivi des structures financées peut être un des éléments
assurant la continuité d’une telle pédagogie. La campagne de suivi semble encore trop
souvent rétrogradée comme une « mission de second ordre ». Plusieurs témoignages recueillis
nous font part d’un certain regret ; à savoir qu’une fois l’intervention financière réalisée, RDI
se fait relativement discret, excepté lorsque des difficultés se présentent. Une relative prise de
conscience semble toutefois avoir eu lieu à l’image de la volonté, à l’échelon national, de
réellement formaliser et instituer cette mission. Au cours de la mission de suivi, nous avons
pu nous rendre compte combien une rencontre avec les dirigeants était importante pour les
structures. Elle permet en effet, au cours d’une demi-journée de pouvoir « mettre sur la table »
les évolutions de la structure, interpréter les éléments passés tout en présentant les
perspectives futures. Pour RDI cela permet d’anticiper sur les besoins à venir de la structure et
ainsi de réellement s’inscrire dans une démarche partenariale de long terme. Bien souvent, le
66
temps manque aux chargés de suivi de mener à bien cette mission et de pouvoir aller à la
rencontre d’un maximum de structures. Le suivi est encore loin d’être généralisé mais son
importance est en voie d’être réellement reconnue : de bonnes perspectives d’avenir.
¤¤ UUnnee pprréésseennccee pplluuss ffoorrttee ssuurr llee tteerrrriittooiirree..
D’après l’étude de l’AVISE, les structures identifient un manque d’information
disponible et un défaut de reconnaissance de l’action des Fonds Territoriaux sur le territoire.
L’AVISE nous rappelle qu’en 2004, le taux de pénétration au sein de l’IAE était faible, de
l’ordre de 10% et de 20% pour les EI (AVISE, 2004, 27). Bien qu’en 5 ans et au regard de la
croissance du réseau, on puisse imaginer que ce taux ait fortement évolué, il est vrai que
d’importants efforts sont encore à faire en termes de communication. Cette demande émane
des SIAE qui souhaiteraient avoir une meilleure connaissance et information quant à
l’existence de ces acteurs et des outils qu’ils proposent : « la demande d’information est
récurrente pour toutes les structures, quelle que soit leur taille » (AVISE, 2004, 66).
Ainsi, l’exemple de RDI est révélateur : si l’association est particulièrement bien identifiée
par les SIAE de Lyon et de son agglomération, il n’en est pas de même sur des territoires plus
excentrés du département (Tarare, le Beaujolais etc.). A ce titre, des actions de
communication (articles de presse, participations à des réunions de présentation sur
l’ensemble du territoire etc.) sont réalisées par RDI afin d’être mieux identifiée et de pouvoir
davantage contribuer au développement des SIAE. Avec un territoire différent,
particulièrement rural et étalé, le fond territorial du département de l’Ain rencontre les mêmes
problématiques. Une meilleure communication sur le territoire passe nécessairement par une
mobilisation de l’ensemble des partenaires (acteurs publics, têtes de réseaux de l’IAE, acteurs
de la création et de l’accompagnement) pour qu’ils puissent renseigner et orienter
correctement les structures concernées par l’action du réseau.
Enfin, d’après l’AVISE, au-delà de la présence territoriale des outils de financement via les
fonds territoriaux, il convient d’aller plus loin et d’intégrer ces outils dans les processus
mêmes de pilotage de l’IAE. Ainsi l’idée serait que les fonds se positionnent comme membres
à part entière des CDIAE, par exemple, en tant qu’«expert et accompagnateur financier»
(AVISE, Février 2004, 65). Outre la réduction des risques éventuels liés à des prises de
décision et orientations pouvant avoir des conséquences fâcheuses sur des SIAE encore
fragiles, une telle implication des acteurs financiers permettrait un couplage plus efficace avec
les financements publics.
67
¤¤ UUnnee mmeeiilllleeuurree ccoooorrddiinnaattiioonn ddeess aacctteeuurrss..
Face à la multitude des acteurs d’accompagnement et de financement qui se sont
développés ces dernières années, il est parfois difficile de s’y retrouver. De même, d’un
territoire à l’autre, il est parfois délicat de bien comprendre quelles sont les prérogatives
précises de chacun. Un travail important reste donc à fournir en vue de rendre le panel d’outils
déjà existants et leur fonctionnement davantage lisible et surtout d’éviter que les différents
acteurs rentrent dans des logiques « de concurrence » quant au type d’intervention qu’ils
proposent.
Ainsi, à l’image du DLA, chaque dispositif est nécessairement cantonné aux outils dont il est
doté. Ainsi, une des faiblesses du système se fait encore ressentir sur la coordination avec les
autres outils d’accompagnement et de financement. Le DLA reste limité dans la mesure où il
ne détient pas les « outils opérationnels de changement » de type fonds financiers pour
l’investissement, crédits de formation etc. (DRETFP, 2008, 9). Dès lors il semble crucial,
pour une meilleure cohérence et efficacité des DLA, que ces derniers s’intègrent dans une
dynamique partenariale cohérente et qu’ils entretiennent des partenariats privilégiés avec tous
les acteurs.
• Avec les CDIAE, sur l’aspect diagnostic, connaissance des problématiques des SIAE
sur le territoire et définition des orientations à adopter.
• Avec les réseaux, en évitant absolument des dérives concurrentielles où les deux
acteurs investissent le champ d’action de l’autre. A ce titre, dans le cas de l’EI Altev,
l’UREI a largement été sollicitée dans l’identification et la définition du besoin et de la
problématique même de la structure.
• Avec les partenaires portants les instruments de financement solidaire. D’où l’intérêt
pour RDI, nous l’avons abordé, de gérer tant les outils financiers que ce dispositif
d’accompagnement.
• Avec les différentes collectivités locales du territoire, ne serait-ce que pour l’aspect
financement mais aussi l’importance du soutien politique et leur vision des
problématiques des structures etc.
Les pistes d’amélioration de l’action proposée par le réseau France Active et les DLA
sont des enjeux essentiels afin de perfectionner le soutien proposé aux SIAE. Ceci leur
permettrait de pouvoir envisager de façon plus sereine le défi auquel elles font face, qui plus
est dans un environnement particulièrement mouvant et somme toute, incertain.
68
CCOONNCCLLUUSSIIOONN
En pleine période d’évolution et de transformation, le monde de l’IAE présente cette
particularité de devoir composer entre l’impératif économique et l’objet social de son activité.
Un tel défi, certes pas nouveau, mais dont la prégnance est de plus en plus intense, résulte en
grande partie d’un environnement mouvant, caractérisé par un cadre législatif évolutif, des
modalités de financement toujours plus ténues et des pressions concurrentielles toujours plus
fortes. Concilier le volet économique et le volet social, nous l’avons bien compris, place
inéluctablement les SIAE dans des situations pouvant vite devenir paradoxales (De
Jonckheere C., Mezzena S., Molnarfi C, 2008, 213). Cette nouvelle donne ne va donc pas sans
poser de problèmes aux SIAE, rencontrant bien souvent bon nombre de difficultés
d’adaptation, de communication, de professionnalisation, de développement économique, de
relations partenariales, etc.
Pour autant, il serait bien imprudent de croire que ce défi relève d’une mission impossible. En
réunissant des facteurs clés et en respectant certains principes phares, les SIAE semblent les
mieux placer pour se positionner sur les deux tableaux et ainsi, proposer des activités
économiques viables et pérennes au service d’un projet d’insertion, voire même
environnemental. A ce titre, les exemples de succès sont nombreux, comme autant de voies à
suivre et de comportements à adopter pour l’ensemble des SIAE.
Qui plus est, ces structures ne se retrouvent pas esseulées pour relever ce défi. En réponse au
diagnostic de leurs besoins et aux attentes des SIAE, de nombreux acteurs spécialisés dans
l’accompagnement et le financement de telles activités ont émergé. L’association France
Active représente un des financeurs par excellence du monde de l’IAE, en proposant toute une
gamme d’outils adaptables selon la taille, le besoin et la phase de vie de chaque structure. En
veille permanente sur l’évolution du monde de l’IAE, et plus généralement de l’ESS, France
Active tente d’adapter son offre en fonction des besoins identifiés. A ce sujet, la mission de
suivi, encore aux prémices de sa formalisation, ainsi que le positionnement de certains fonds
territoriaux pour le portage du Dispositif Local d’Accompagnement, témoignent de cette
volonté d’adaptation et de diversification des prestations proposées à destination des SIAE.
Cependant, afin de mener à bien leur mission de soutien au monde de l’IAE, ces acteurs se
doivent de veiller à poursuivre l’amélioration de leur action via une coordination pertinente,
une implication territoriale plus forte et plus égalitaire et le développement d’une réelle
pédagogie quant aux enjeux économiques qui se dressent devant les SIAE.
69
La mission de stage au sein de RDI a permis de comprendre les enjeux relatifs au monde de
l’ESS. Si ce travail a été consacré aux SIAE, bon nombre de difficultés, de réussites, de
perspectives et d’opportunités sont communes aux deux secteurs. Dans le contexte de crise
que nous connaissons actuellement, les maux économiques et sociaux tels que la hausse du
chômage, l’extension de la pauvreté et de l’exclusion, l’urgence écologique sont amplifiés. La
crise engendre des conséquences beaucoup plus inquiétantes notamment pour ceux qui se
trouvaient dans des positions déjà vulnérables, notamment du fait de leur éloignement à
l’emploi. Bien que la tâche semble loin d’être aisée, cela semble justifier le rôle des SIAE
(Clerc, Janvier 2009). Cependant, sur la base de ce travail, des références bibliographiques et
au regard de réflexions recueillies auprès de divers acteurs du secteur, on peut identifier de
forts enjeux et souhaiter certaines évolutions pour l’IAE.
• Dans ce contexte de crise, une relance du volume de contrats aidés permettra sans
doute aux SIAE d’avoir « une bouffée d’oxygène ». En revanche, il faudra redoubler
d’attention face au risque de sélectivité des publics recrutés. L’afflux de nouveaux chômeurs
pourrait amener les SIAE sur la voie de pratiques de recrutement plus sélectives, laissant
ainsi de côté les personnes les plus vulnérables. Enfin, d’après D. Clerc, ce contexte de crise
pourrait brutalement interrompre l’embellie constatée des les Zones Urbaines Sensibles36.
Or, une nouvelle logique de sélectivité dans les embauches, pourrait de nouveau creuser
l’écart entre les publics au regard de leur origine géographique (Clerc, 2009).
• L’avènement d’un Contrat Unique d’Insertion semble être relativement bien accueilli
par les acteurs37, à condition qu’il soit simplifié, ouvert à tous publics, souple en termes
d’horaires et gage de stabilité et visibilité pour le salarié. En outre la mise en place d’un tel
dispositif nécessiterait d’instaurer des instances représentatives du personnel et de bien
appliquer les conventions collectives pour les salariés (Clerc & Dorival, Septembre 2007).
• Un enjeu très important relève également des financements du secteur. L’hybridation
des ressources et le montant de ces contributions financières sont deux questions brûlantes
(Boncler &Hlady Rispal, 2003, 105). Des efforts importants doivent être fournis en vue de la
mise en adéquation des financements publics et privés et ce, en fonction des besoins du
36 selon une étude de l’ANPE, entre 2006 et 2007, l’écart entre le taux de retour à l’emploi pour les publics issus de ZUS et celui des publics hors ZUS, s’est considérablement réduit, grâce notamment aux efforts réalisés en termes d’accès aux contrats aidés (CLERC D., Crise économique : l’IAE plus nécessaire que jamais, La lettre de l'insertion - n°6 - Janvier 2009). 37 Cf. CLERC D. & DORIVAL C., Quel avenir pour l’IAE, Alternatives Economiques - Pratique n°30 - Septembre 2007
70
territoire et du projet social des structures (Clerc & Dorival, Septembre 2007). Quant au
montant des financements, si l’impact de la collecte d’épargne solidaire se fait
progressivement ressentir, ce mode de financement reste encore relativement marginal et
surtout insuffisant pour compenser la réduction des ressources allouées sous formes de
subventions publiques (Boncler &Hlady Rispal, 2003, 106).
• Enfin, la plupart des acteurs reconnaissent qu’en dépit des différences existant entre
SIAE, il est nécessaire que ces acteurs parviennent à conjuguer leurs moyens et capitaliser les
pratiques en vue de proposer de réels parcours d’insertion. Les SIAE doivent valoriser au
regard des autres acteurs, leurs savoir-faire et ainsi étendre le dialogue avec le monde
économique, avec lequel un réel échange réciproque peut s’opérer (Clerc & Dorival,
Septembre 2007). La constitution de partenariats doit également s’opérer avec l’ensemble des
acteurs du territoire dans un souci de confiance, d’interdépendance, de complémentarité et de
répartition claire et efficace des compétences et ressources nécessaires à leur mobilisation.
L’IAE est donc aujourd’hui traversée par de forts enjeux : l’évolution de son
environnement et les capacités d’adaptation dont feront preuve les structures seront
déterminantes pour l’avenir. D’après de nombreux observateurs, l’ampleur de la crise et son
caractère systémique font que les efforts de relance ne parviendront sans doute pas à enrayer
son extension et son approfondissement. « S’attaquer frontalement aux déséquilibres
structurels du système » tel semble être la voie la plus efficace (Alphandéry C., Fraisse L. &
Ghezali, Avril 2009, 3). L’IAE, mais de façon plus générale l’ESS, pourrait apparaître comme
une réponse à de tels enjeux fondamentaux appelant de nouveaux modèles de développement.
Un « livre blanc pour une économie plurielle, responsable et solidaire38 », est en cours de
rédaction avec pour objet de démontrer toute l’utilité de l’ESS dans ses spécificités et sa
pertinence. Car l’ESS ne constitue-t-elle pas une réponse à la crise et ses pratiques, ses
principes et valeurs ne pourraient-ils pas inspirer les réformes nécessaires et inciter les acteurs
à adopter des lignes de conduite similaires ?
38 Claude Alphandéry, Christiane Bouchart (RTES), Eve Chiapello (HEC), Laurent Fraisse (Crida), Tarik hezali, Marie-Hélène Gillig (Ceges), Jean-Guy Henckel (Jardins de Cocagne), Madeleine Hersent (Mes), Isabelle Laudier (CDC), Jean-Louis Laville (Cnam), Jean-Michel Lécuyer (Sifa), Christian Sautter (France Active), Hugues Sibille (Avise, Ides), Jean-Luc Tissier (Envie).
71
BBIIBBLLIIOOGGRRAAPPHHIIEE Ouvrages. ¤ ADJERAD S., BALLET J., L’insertion dans tous ses états, l’Harmattan, Paris, 2004. ¤ AVISE, Evaluer l'utilité sociale de son activité. Conduire une démarche d'autoévaluation. Les cahiers de l'Avise, n°5, Avise et Culture & promotion, Paris, septembre 2007, 120p.
¤ BIGOURDAN B., TCHERKACHINE D., Evaluer et optimiser le projet associatif : diagnostic stratégique de l’association, éditions Juris Associations, 2004
¤ BONCLER J., HLADY RISPAL M., Caractérisation de l’entrepreneuriat en économie solidaire, les éditions de l’ADREG, Décembre 2003.
¤ BOUCHARD M., BOURQUE G., LEVESQUE B., L'évaluation de l'économie sociale dans la perspective des nouvelles formes de régulation socio-économique de l'intérêt général Cahiers du CRISES, Collection Études théoriques No ET0013, octobre 2000.
¤ GADREY J., 2006, L’utilité sociale en question: à la recherche de conventions, de critères et de méthodes d’évaluation, in: J-N. Chopart, G. Neyret, D. Rault (dir.), Les dynamiques de l’économie sociale et solidaire, Paris: La Découverte (Recherches), pp. 236-279.
¤ SEGHERS V., ALLEMAND S., L’audace des entrepreneurs sociaux : concilier efficacité économique et innovation sociale, Ed. Autrement, Paris, 2007.
Articles.
¤ AVISE, Notoriété et perception de l’IAE, sondage réalisé par Opinionway, Avril 2009.
¤ AVISE, En amont de l’évaluation de l’utilité sociale : clarifier les enjeux, Extrait du point de vue de Jean Gadrey, dans "Evaluer l’utilité sociale de son activité", Cahier de l’Avise N°5, Octobre 2007, http://www.avise.org/spip.php?article782.
¤ AVISE, « Etude des besoins de financement en fonds propres des SIAE, des ateliers protégés et des GEIQ », Paris, Février 2004.
¤ BLAZY C., note sectorielle : chantiers d’insertion, France Active, 13/09/2006.
¤ Centre d’Etudes et de recherche sur les qualifications (Céreq), La professionnalisation de l’emploi associatif : l’exemple des Associations Intermédiaires, Bref n°180, Décembre 2001.
¤ CLERC D., Spécial « Grenelle de l’insertion » (1) - Comment mesurer la performance des SIAE ? » La lettre de l'insertion - n°142 - Décembre 2007.
¤ CLERC D., Crise économique : l’IAE plus nécessaire que jamais, La lettre de l'insertion - n°6 - Janvier 2009
¤ CLERC D. & DORIVAL C., Quel avenir pour l’IAE39, Alternatives Economiques - Pratique n°30 - Septembre 2007
¤ COQ-CHODORGE C., Quand l’insertion se met au vert, La lettre de l'insertion - n°7 - Février 2009
39Entretiens réalisés avec D. Piard (Fnars), P. Louveau (délégué de l’association nationale des acteurs du Chantier-école), JG Henckel (directeur réseau Cocagne), N. Hanet-Kania (secrétaire générale COORACE), M. Grosset (CNEI) et A. Farhi (secrétaire général CNCE-Geiq),
72
¤ COQ-CHODORGE C., « Déchets : l’insertion à l’épreuve », La lettre de l'insertion - n°6 - Janvier 2009
¤ CPCA, Financement des associations : trop de contrôle ? La vie associative N°11, Septembre 2008.
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¤ DARES, L’Insertion par l’Activité Economique en 2007, Premières Synthèses Informations, n°17-2, Avril 2009.
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¤ DORIVAL C., Vice et vertus de la concurrence, La lettre de l'insertion - n°7 - Février 2009
¤ DORIVAL C., L’intérim dans la tourmente, La lettre de l'insertion - n°10 - Mai 2009
¤ DORIVAL C., Une frilosité envers les actions d’innovation sociale, Entretien avec Bertrand Schwartz : fondateur des missions locales et de l'association Moderniser sans exclure, Alternatives Economiques - Pratique n°30 - Septembre 2007.
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¤ EME B., Une histoire de l’insertion par l’économique, Alternatives Economiques - Pratique n°30 Septembre 2007
¤ GADREY, J., L’utilité sociale des organisations de l’Economie Sociale et Solidaire : une mise en perspective sur la base de travaux récents, Février 2004.
¤ JEANTET T. Economie sociale : la solidarité au défi de l’efficacité, la Documentation Française, Janvier 2006.
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¤ JEANNEAU L., 2007, une année faste pour l’IAE, La lettre de l'insertion - n°10 - Mai 2009
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¤ JEANNEAU L., Les DLA soutiennent les structures d’utilité sociale, La lettre de l'insertion - n°136 - Mai 2007
¤ JEANNEAU L., L’IAE va-t-elle être soumise aux règles de la concurrence européenne ?, la lettre de l’insertion, n°9, Avril 2009.
¤ JEANNEAU L., L'implication aléatoire des collectivités territoriales, Alternatives Economiques - Pratique n°30 - Septembre 2007
¤ LOQUET, P. Les structures d'insertion et l'Europe, Alternatives Economiques - Pratique n°30 - Septembre 2007
¤ NAHAPETIAN, L'IAE doit être reconnue comme l'une des composantes d'une économie plurielle, La lettre de l’Insertion, n°138, Juillet 2007.
73
¤ PILLET A., Le marketing social et solidaire, éd. L'AMI, 2006, www.lami.org.
¤ TRÖGE V., note sectorielle : les ETTI, France Active, Novembre 2008.
¤ VITAL B. & LE BERRE F., Dossier de presse, Rhône Développement Initiative 2009, Juin 2009.
¤ UNIOPSS (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux), Les associations de solidarité face aux logiques de mise en concurrence, Février 2009.
Sites Internet.
¤ http://www.cnei.org
¤ http://www.coorace.org
¤ Révision générale des politiques publiques : un "coup d’accélérateur" pour la réforme de l’Etat, 24/09/2007 http://www.vie-publique.fr/actualite/dossier/rgpp/revision-generale-politiques-publiques-coup-accelerateur-pour-reforme-etat.html
Autres.
¤ AVISE, DLA, Bilan consolidé - année 2008, Mars 2009.
¤ ALPHANDERY C., FRAISSE L. & GHEZALI T., L’économie sociale et solidaire : une réponse entrepreneuriale et politique à la crise, Texte d’orientation pour un livre blanc en cours d’élaboration (avril 2009).
¤ Béasse E., Danjean F., Lianzon F., Les clauses d’insertion dans les marchés publics : une opportunité pour les Structures d’Insertion par l’Activité Economique, Master Economie Sociale et Solidaire, Université Lyon II, Janvier 2009.
¤ Centre Ain Actif, Etat des lieux de l’IAE sur le bassin d’emploi de Bourg en Bresse, Eté 2008.
¤ CNIAE, L’inclusion active en Europe : quelles perspectives pour l’IAE ?, Séminaire, Octobre 2007, Paris.
¤ CNIAE, Mesure de l’éloignement à l’emploi à partir d’un outil de mesure de l’utilité sociale des SIAE, Assises nationales des CDIAE, 28 Avril 2009.
¤ CNAR-IAE, Guide des nouvelles modalités de conventionnement IAE – Etat 2009, Janvier 2009.
¤ FRANCE ACTIVE, Note sur les réformes de l’IAE 2009, Avril 2009.
¤ IRIAE, Commande publique socialement responsable : donner du sens aux marchés publics, Novembre 2008.
¤ Ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi, RGPP : deuxième rapport d’étape, Mai 2009.
¤ UREI Rhône Alpes, Atelier Entreprendre dans l’insertion : mettez votre esprit d’entreprendre au profit des personnes en difficulté, organisé dans le cadre du Salon des Entrepreneurs, 17 – 18 Juin 2009.
74
LLIISSTTEE DDEESS SSIIGGLLEESS ACI : Atelier Chantier d’Insertion
AI : Association Intermédiaire.
AGEFIPH : Agence pour la gestion des fonds pour l’insertion des personnes handicapées
CCAS : Centre Communaux d’Action Sociale
CDC : Caisse des Dépôts et Consignations.
CDIAE : conseil départemental de l’insertion par l’activité économique
CHRS : Centre d’Hébergement et de Réadaptation Sociale
CNAR : Centre Nationaux d’Appui et de Ressources
CNASEA : Centre National pour l’Aménagement des Structures des Exploitations Agricoles
CPCA : Conférence Permanente des Coordinations Associatives.
DARES : Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques
DDTEFP : Direction Départementale du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle.
DLA : Dispositif Local d’Accompagnement
ETTI : Entreprises de travail Temporaire d’Insertion
EI : Entreprise d’Insertion
EPCI : Etablissements Publics de Coopération Intercommunale
EBE : Excédent Brut d’Exploitation
ESS : Economie Sociale et Solidaire
FSE : Fond Social Européen
GEIQ : Groupements d’Employeurs pour l’Insertion et la Qualification
IAE : Insertion par l’Activité Economique
LOLF : Loi Organique relative aux Lois de Finance
MEIE : Ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi
PIB : Produit Intérieur Brut.
PLIE : Plans Locaux pour l’Insertion et l’Emploi
RGPP : Réforme Générale des Politiques Publiques.
RDI : Rhône Développement Initiative
SIAE : Structure de l’Insertion par l’Activité Economique
SSIG : Services Sociaux d’Intérêt Général.
UREI : Union Régionale des Entreprises d’Insertion.
UNIOPSS : Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux
75
AANNNNEEXXEESS
AAnnnneexxee 11 :: LLeess 44 aaxxeess dduu «« pprroojjeett dd’’iinnsseerrttiioonn »» qquuee ddooiivveenntt ffoorrmmaalliisseerr lleess SSIIAAEE –– ((CCNNAARR--
IIAAEE,, JJaannvviieerr 22000099,,2266--2277))..
Les 4 axes :
- l’accueil et l’intégration en milieu de travail. Il s’agit pour la structure de bien veiller à ce que les personnes qui sont reçues correspondent aux profils qu’elle entend accueillir. Sur ce volet, la structure se doit également d’informer le nouveau salarié du fonctionnement de la structure et de réaliser un diagnostic précis quant à sa situation socioprofessionnelle.
- L’accompagnement social et professionnel. Ce second axe aborde différentes problématiques tels que l’accompagnement sur des questions sociales, l’encadrement sur les postes de travail, la préparation et l’accompagnement de la sortie vers l’emploi, la création de liens en situation de travail…
- La formation des salariés en insertion. Cela concerne l’ensemble des actions relevant de la formation et la mise en œuvre d’un plan de formation qui amène à s’interroger sur diverses problématiques : l’acquisition des compétences est elle formalisée, l’évaluation des compétences, les formations ont-elles lieu dans ou hors temps de travail… ?
- La contribution à l’activité économique et au développement territorial. Il convient sous cet axe de démontrer l’apport de la SIAE sur son territoire, comme acteur social et économique. Ainsi la structure se doit d’identifier ses partenariats sous un double aspect : sa contribution en relation avec d’autres acteurs à la réalisation de véritables parcours d’insertion sociale et professionnelle et d’autre part elle doit insister sur les partenariats contractés sur le plan économique avec d’autres SIAE, structures de l’ESS, et entreprises de l’économie lucrative. On identifie clairement la nécessité pour chaque SIAE de mettre en valeur à la fois ses réalisations en termes d’insertion (vocation sociale) et son équilibre économique. La structure doit donc s’inscrire dans des secteurs d’activité lui permettant de concilier logique d’insertion et impératif économique.
76
AAnnnneexxee 22 :: LLeess SSIIAAEE –– ccaaddrree jjuurriiddiiqquuee ((DDAARREESS,, 22000088,,1122))..
77
AAnnnneexxee 33 :: VVeerrss uunn CCoonnttrraatt UUnniiqquuee dd’’IInnsseerrttiioonn..
Source: (France Active, Avril 2009, 20)
78
AAnnnneexxee 44 :: lleess oouuttiillss dd’’aannaallyyssee ffiinnaanncciièèrree :: ddééttaaiill ddee llaa ppaaggee nn°°3344..
Le plan de financement : il s’agit de la traduction chiffrée et formalisée de la stratégie et des
plans d’action sur 3 ans en général. Afin de vérifier et valider la faisabilité financière des
orientations, cette étape est primordiale non seulement pour la structure mais également pour
donner une visibilité aux partenaires. Elle apporte également un surplus de légitimité à la
structure qui prouve ainsi une certaine capacité de rigueur dans son fonctionnement
(Bigourdan, Tcherkachine, 2004, 57).
Les outils d’analyse financière :
¤ Le compte de résultat permet de représenter l’ensemble des emplois et ressources
d’exploitation sur une période donnée, en faisant apparaître les marges et le résultat de la
structure. Afin d’apprécier la réalité de l’évolution et de la rentabilité de l’activité, une
présentation comparée par rapport aux exercices précédents est nécessaire. Dans le cas des
structures de l’IAE, différents aspects ressortent et sont essentiels pour l’analyse : le poids
dans le budget global de l’association des subventions perçues ; la variation des différentes
ressources d’exploitation et leur part relative ; l’importance relative des différents postes de
charges (charges sociales et salaires, charges de structure…) ; l’évolution des différents
Soldes Intermédiaires de Gestion et du résultat net.
¤ Le Bilan permet d’obtenir une vision de la situation financière de la structure à un moment
donné en analysant au Passif, d’où proviennent les ressources de la structure (capital, résultats
successifs, dettes et emprunts) et à l’Actif, ce que possède la structure (immobilisations,
créances clients, subventions à recevoir, trésorerie). 3 principaux indicateurs sont également
appréciés à savoir le Fonds de Roulement, le Besoin en Fonds de Roulement et la trésorerie
nette.
¤ Le cycle d’exploitation.
- le fonds de roulement (FR) renvoie à l’excédent (ou déficit) des ressources durables,
autrement appelées les capitaux permanents, par rapport aux emplois durables. Un fond de
roulement positif permet de dégager des ressources en vue de financer les besoins financiers
qui sont liés à l’exploitation (BFR) et dans le cas des structures de l’IAE, de financer les
délais de versement des subventions.
- le besoin en fonds de roulement (BFR) doit être réduit au maximum. Une structure
dont le BFR est supérieur au FR sera en situation de difficulté de trésorerie. Toutefois, il
reste important de considérer le secteur d’activité de la structure en vue de bien apprécier le
79
BFR dont l’évolution va fortement dépendre des délais de perception des créances
(subventions, créances clients etc.) ainsi que des délais de paiement des dettes (fournisseurs,
dettes fiscales et sociales).
- la situation de trésorerie nette s’apprécie au regard de son origine. La situation sera
saine lorsque le FR positif permet de couvrir l’intégralité du BFR et ainsi de dégager une
trésorerie nette.
¤ En complément de l’étude des indicateurs révélateurs de l’équilibre financier, il convient
également de se concentrer sur l’autonomie financière de la structure en vue d’apprécier dans
quelle mesure cette dernière parvient à limiter son risque financier, autrement dit à éviter de
se retrouver dans une situation de cessation de paiement (Bigourdan, Tcherkachine, 2004,
143). Pour ce faire, plusieurs ratios sont calculés.
- Ratio d’autonomie financière : Capitaux propres/ capitaux permanents.
Il s’agit avec ce ratio d’envisager la cohérence du rapport entre d’une part les fonds propres
de l’association et d’autre part l’endettement à moyen et long termes. Le résultat de ce rapport
devient satisfaisant lorsqu’il atteint 50%. Plus le rapport est faible, plus l’association se
retrouve dans une situation de dépendance vis-à-vis des banques et par conséquent plus
l’association a du mal à recourir à de nouveaux emprunts.
- Ratio de solvabilité : Fonds Propres/Total Bilanciel.
Ce ratio indique le degré d’autonomie financière de la structure. Plus ce ratio est élevé, plus la
structure affiche une structure économique saine. Le seuil acceptable communément reconnu
est atteint lorsque les fonds propres (capitaux propres + Réserves + Provisions + Dettes à plus
d’un an et emprunts) représentent 30% du passif total.
- Capacité de remboursement des emprunts : Emprunt MLT / CAF40
Le résultat exprime un nombre d’années de remboursement et apprécie également la capacité
d’endettement supplémentaire que l’association peut assurer. Dans l’idéal, ce ratio ne doit pas
excéder 5 années.
40 Capacité d’autofinancement = résultat net + dotations aux amortissements et provisions – reprise sur amortissement et provisions.
80
AAnnnneexxee 55 :: LLeess ddoommaaiinneess ssuurr lleessqquueellss llee rréésseeaauu FFrraannccee AAccttiivvee eesstt ssuusscceeppttiibbllee
dd’’iinntteerrvveenniirr..
Source : http://www.aquitaineactive.org
81
AAnnnneexxee 66 :: lleess oouuttiillss dd’’iinntteerrvveennttiioonn ffiinnaanncciièèrree ddee RRDDII eett FFrraannccee AAccttiivvee..
Nom de l'outil Public Montant
(jusqu'à…) Durée Coût
GARANTIE D'EMPRUNT BANCAIRE
FRANCE ACTIVE
GARANTIE
Toute entreprise solidaire
ou association 30 500€ garantis
5 ans
maximum
2% du montant
garanti
FGIF
Femmes souhaitant créer,
reprendre ou développer
une entreprise
27 000 € de
garantie 2 à 7 ans
2.5% du montant
garanti
FGIE SIAE 60 000 €
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ans
2.5% du montant
garanti
FGAP Entreprises Adaptées 250 000 € de
garantie
Entre 2 et 15
ans
2 à 2.5% du montant
garanti
FGES Entreprises Solidaires 50 000 € de
garantie
5 ans
maximum
2% du montant
garanti
Impul'sio Petite et Moyenne
Association 20 000 € Entre 2 et 5 ans 2% par an
Caution
Professionnelle EITT ETTI
114 337 €
maximum / /
APPORT EN FONDS PROPRES OU QUASI FONDS PROPRES
Contrat d'Amorçage
Associatif Petite Association 10 000 €
Entre 1 an et 1
an 1/2 Aucun
Contrat d'Apport
Associatif Toute association 30 000 € Entre 2 et 5 ans Aucun
Fonds Régional
d'Investissement
Solidaire (FRIS) Entreprise solidaire ou
association 1 500 000 €
5ans ( 7ans
dans certains
cas)
2% par an
SIFA / FCP IE
AUTRES
Le Fonds de
Confiance
Entreprise solidaire
souhaitant créer une
nouvelle entreprise sociale.
20 000 € / /
Source : http://www.franceactive.org/upload/uploads/File/113443_solutions_financement_franceactive.pdf