LES SIX COMMANDEMENTS DE L’E-COMMERCE FAMILIAL€¦ · facilement son retard.» DEUXIÈME...

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AVEC LA COLLABORATION DE : www.trends.be — P915914 — septembre 2017 — N° 31 Publication mensuelle LES SIX COMMANDEMENTS DE L’E-COMMERCE FAMILIAL DOSSIER

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Page 1: LES SIX COMMANDEMENTS DE L’E-COMMERCE FAMILIAL€¦ · facilement son retard.» DEUXIÈME COMMANDEMENT. L’E-COMMERCE N’EST PAS UNE FIN EN SOI En tant que concurrent des détaillants

AVEC LA COLLABORATION DE :

www.trends.be — P915914 — septembre 2017 — N° 31 — Publication mensuelle

LES SIX COMMANDEMENTS DE L’E-COMMERCE FAMILIAL

DOSSIER

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ses tâtonnements successifs.»Les entreprises familiales peuvent aussisupprimer d’entrée de jeu la différence pourle client et mettre sur le même plan les activités en ligne et hors ligne. Elles doiventalors faire unanimement le choix du numé-rique. Le fournisseur de pneus Deldo, quiappartient à la famille Delcroix (lire l’encadré«Sans l’e-commerce, on peut fermer boutique»),a inauguré sa cyberboutique en 2002. D’em-blée, il a mis à disposition l’ensemble de sonstock en ligne. En outre, Deldo a fait son ap-parition sur les plateformes externes. «Mesparents ont créé l’entreprise en 1973, expliquePhilip Delcroix, son directeur général. Pen-dant des années, nous étions à la traîne surle plan informatique. Mes parents étaientcontre l’automatisation et les ordinateurs. Il y a 18 ans, je suis entré dans la société avecma sœur. Nous avons alors amorcé le mou-vement de rattrapage nécessaire. Heureuse-ment, ce n’est pas très sorcier : la famille a le pouvoir de décision et peut rattraper assezfacilement son retard.»

DEUXIÈME COMMANDEMENT. L’E-COMMERCE N’EST PAS UNE FIN EN SOI En tant que concurrent des détaillants familiaux, Zalando a une stratégie claire : larentabilité n’est pas indispensable immé-

ont du mal à trouver un intérêt financier àse lancer dans l’aventure.» Dans la pratique,le stimulant financier est souvent détermi-nant. Cette attitude plutôt défensive n’estpas un problème pour autant, mais il im-porte que la famille ne s’engage pas sur laToile en tirant le frein à main. Quels sontdonc les écueils à éviter ?

PREMIER COMMANDEMENT. SUSCITEZ UNE ADHÉSION SUFFISANTE AU SEIN DE LA FAMILLE«Si vous vous lancez dans l’e-commerce,vous avez tout intérêt à laisser les scepti -ques sur la ligne de touche», conseilleSteve Muylle, academic director online MBAà la Vlerick Business School. Ce spécialistede la question observe que les familles quipassent au commerce électronique procè-dent souvent par étapes. «La plupart dutemps, elles créent une unité distincte pourdévelopper le commerce en ligne. On retrouve cette piste dans les entreprises oùla nouvelle génération croit dur comme ferà l’e-commerce. Les jeunes développent lanouvelle activité, mais c’est encore l’anciennegénération qui tire les ficelles. Souvent, ces entreprises commencent par offrir unegamme limitée, histoire de voir si l’activitéélectronique ne cannibalise pas l’activité classique. L’entreprise familiale apprend de

cE n’ESt pAS unhASARD SI LES fAMILLEStORfS Et vAnAuDEnhOvE OntMASSIvEMEnt InvEStIDAnS L’E-cOMMERcEEn 2012, Au MOMEntOù ZALAnDO ARRIvAItEn BELGIQuE.

ZALANDO

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N° 31 › septembre 2017 ‹ Trends Family Business www.trends.be/family-business 3

S’OUVRIR AUX BOUTIQUES EN LIGNELES SIX COMMANDEMENTS DE L’E-COMMERCE FAMILIAL

SOMMAIRE�01�DOSSIER : S’OUVRIR AUX BOUTIQUES EN LIGNELES SIXCOMMANDEMENTS DE L’E-COMMERCE FAMILIAL

�07�PAROLE D’EXPERT• CONCURRENCEQuel potentiel offre l’e-commerce à nos entreprises ?

�08�PORTRAIT : TENTES DE HALLEUXL’exception, du produit à la transmission

�10�PORTRAIT : FAMILLE GALLERpassionnés de père en fille

��12�PAROLE D’EXPERT• TVALa complexité fiscale etjuridique de l’e-commerce

phOtO DE cOuvERtuRE : IStOck

a vente de chaussures estun excellent exemple d’activité métamorphoséepar l’avènement du com-merce en ligne. Pendantlongtemps, l’achat et sur-tout l’essayage de chaus-

sures ont semblé être le privilège exclusifdes magasins physiques. Puis, Zalando estapparue, avec sa soif de conquête. D’origineallemande, cette cyberboutique de chaus-sures, de vêtements et d’accessoires demode est arrivée en Belgique en 2012. Zalando permet d’essayer chez soi leschaussures achetées en ligne. Elles serrentun peu ? Il suffit de les renvoyer.On ne peut pas dire que les entreprisesfamiliales belges spécialisées dans lavente de chaussures soient restées à bâil-ler aux corneilles. Ce n’est pas un hasardsi les familles Torfs (Schoenen Torfs) etVan Audenhove (Euro Shoe Group) ontmassivement investi dans l’e-commerceen 2012, au moment où Zalando arrivaiten Belgique. La famille Brantegem (pro-priétaire de Brantano jusqu’en 2008) avaitfait le pas bien plus tôt, dès le début desannées 2000. Plus d’une décennie séparedonc ceux qui ont cru les premiers aucommerce électronique de ceux qui lesont suivis. Or, pour Kurt Moons, CEO

d’Euro Shoe Group et précédemment deBrantano, c’est précisément là le dilemmeque le commerce électronique pose auxentreprises familiales. «Elles sont souventenfermées dans leur modèle commercial, ex-plique-t-il. Les familles ont investi pendant longtemps dans cet ancien modèle,qui est d’ailleurs toujours rentable. Elles ontdu mal à évaluer la rapidité d’expansion dunouveau modèle et ses chances de succès.»Pour le patron, ces doutes expliquent engrande partie l’attentisme des entreprisesfamiliales face au commerce en ligne.«Elles ont peur parce qu’investir rapide-ment implique de faire des choix et de délaisser leur modèle traditionnel. Si ellesn’investissent pas du tout, la concurrenceravira le marché. La grande difficultéconsiste à injecter des moyens financiersfamiliaux dans un modèle encore incertain.Les nouveaux acteurs qui n’investissentque dans l’e-commerce peuvent plus faci-lement partir de zéro.» Une tendancequ’observe également Jean-Pol Boone, cofondateur d’Inoopa, un outil de diagnos-tic e-commerce : «Passer d’un modèle his-torique rentable à un marché doté deconcurrents surcapitalisés visant la prisede part de marché au détriment de la ren-tabilité n’est pas simple. Nous observonsque beaucoup d’entre eux sont perdus et

Le commerce électronique pose souvent un dilemme aux entreprises familiales. S’il est risqué d’attendre et de ne pas investir, il l’est tout autant de faire le pas trop tôt. Et lorsque la famille se décide, toute une série de nouveaux défisl’attendent. WOUTER TEMMERMAN ET C.C.

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«SANS L’E-COMMERCE, ON PEUT FERMER LA BOUTIQUE»DELDO EST LE PLUS

GRAND GROSSISTE

DE PNEUS DE BELGIQUE.

La société a été créée

à la suite du mariage

de Jozef Delcroix avec

une fille de Donckers,

un marchand anversois

de pneus pour voiture.

Sous l’impulsion de la

deuxième génération,

représentée par le direc-

teur général philip Del-

croix et la cfO kathleen

Delcroix, Deldo s’est lan-

cée dans l’e-commerce.

Ainsi, depuis 2002, elle

possède un site de vente,

remanié de fond en com-

ble en 2012 et en 2017.

L’entreprise y offre toute

sa gamme de pneus en

ligne. La cyberboutique,

conçue comme une alter-

native à la procédure de

commande classique, fa-

cilite la vente aux clients

situés par exemple à hong

kong, Singapour ou Dubaï.

par ailleurs, Deldo est actif

sur les plateformes exter -

nes d’achat et de vente

qui font fureur, surtout

en Allemagne. «tous

les garages, petits, moyens

et grands, s’y fournissent,

indique philip Delcroix.

Il s’agit par définition

de petits achats. La trans-

parence des prix suscite

une âpre concurrence.

Mais c’est une activité

importante où nous pou-

vons jouer un rôle parce

que nous avons beaucoup

de stocks.»

Deldo est également actif

sur les plateformes de

consommateurs, fût-ce

par l’intermédiaire

de partenaires. par ailleurs,

il crée aussi des sites

de vente pour des tiers.

«La famille a misé trop

tard sur l’automatisation et

les logiciels, admet philip

Delcroix. Au début du siè-

cle, nous avons raté quel -

ques occasions, mais nous

les avons saisies depuis lors.

En témoigne notre chiffre

d’affaires de 313 millions

d’euros en 2016. comme

le pouvoir de décision est

aux mains de quelques

personnes, nous pouvons

embrayer rapidement.

Et nous continuons à tra-

vailler dans le cadre d’une

structure assez plane.»

Les concurrents peuvent

tout aussi bien jouer l’atout

de la rapidité des livraisons,

par exemple. c’est pour-

quoi Deldo mise sur

la convivialité des sites

de vente et la fluidité

des flux de données.

«parallèlement à l’e-com-

merce, nous avons encore

nos propres marques qui

génèrent de la croissance,

détaille le directeur géné-

ral. Malgré cela, le com-

merce en ligne est devenu

capital. Si notre site de

vente ne devait pas fonc-

tionner pendant un mois,

nous devrions fermer

la boutique. Le numérique

a déjà chamboulé

beaucoup de secteurs

et cela devrait continuer.

chaque entreprise fami-

liale devra un jour faire

le pas du numérique.»

Le cofondateur de la firme Inoopa soulignel’agilité qu’impliquent les changements technologiques nécessités par l’e-commerce :«Dans les années 1990 ou 2000, on pouvaitpasser des mois à développer des plate-formes IT avant de lancer finalement le pro-jet sur le marché. Aujourd’hui, on tend à ra-pidement lancer ces produits afin de les éva-luer, de tester leur prix et suivre les concur-rents. Sur base des données collectées, on affine. Cette méthodologie doit être réac-tive, avec des cycles de décision rapide, etavec des gens qui s’y connaissent.»

QUATRIÈME COMMANDEMENT.RÉPANDEZ LA CULTURE NUMÉRIQUE DANS LA FAMILLEBien sûr, l’e-commerce ne se résume pas àune informatique performante. Il ne fautpas sous-estimer l’importance de bienconnaître le phénomène, faute de quoi celapeut freiner les ambitions des entreprisesfamiliales. Si celles-ci excellent souvent dansune activité traditionnelle, le talent numé-rique ne va pas de soi, ni parmi leurs membres, ni parmi leur personnel. Cettedifficulté peut notamment être surmontéesi les nouvelles recrues familiales acquiè-rent d’abord une expérience en dehors de l’entreprise en se focalisant sur la trans-formation numérique.Mais ce n’est pas tout : «Même si vous avezles personnes compétentes, la famille doitencore suivre, prévient Steven Muylle. Ilfaut changer la culture familiale. Comment ?Invitez des experts, ou faites-les siéger auconseil en tant qu’administrateurs indépen-dants. Suivez des formations destinées auxentreprises familiales. Les entrepreneursfamiliaux perçoivent d’ailleurs bien le potentiel de l’e-commerce. La numérisationfait ressortir l’entrepreneur qui est en eux.»Le plan d’affaires numérique est unedeuxième solution structurelle pour com -bler le déficit de connaissances numériques.Kurt Moons en a fait sa lecture de chevet.On y trouve une énumération de toutes les expertises permettant à Euro ShoeGroup de mettre en œuvre sa stratégie. «Les entreprises familiales sous-estimentsouvent ce point, explique le professeur.L’e-commerce, ce n’est pas que de la tech-nologie. Il s’agit aussi de logistique, de ges-tion des clients et de communication.D’après moi, on sous-estime surtout ce der-nier facteur. Avec le commerce en ligne,

il faut démarcher une nouvelle générationde clients et adapter la communication àleur univers mental. Quand le champ d’ac-tion de l’entreprise familiale s’élargit, elledoit rajeunir sa communication. Si l’an-cienne génération ne sait que faire de Snap-chat et d’Instagram, elle doit recourir à uneexpertise externe.» Car le développementde l’e-commerce dans une entreprise fami-liale traditionnelle s’accompagne de l’appa-rition de nouveaux métiers. En effet, au-jourd’hui le commerce électronique ne selimite plus à une transformation tech-

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diatement. Les premières années, elle vou-lait avant tout attirer le plus possible deconsommateurs grâce à son modèle basésur l’essayage à domicile. «Il est évidentqu’une entreprise familiale ne doit pas copier ce modèle, prévient Steve Muyllede la Vlerick Business School. Elle tient à savoir ce que cela rapportera et quandelle aura ces recettes. Vous pouvez mêmeintroduire un modèle qui éduque le client.Soyez clair sur les valeurs de votre entre-prise familiale : pourquoi ne pas souligner,par exemple, la qualité de la livraison et la fiabilité ? Si vous n’y arrivez vraiment pasparce que les starters perturbent énormé-ment le marché, vous devez vous poser laquestion fondamentale de savoir si vousvoulez vous lancer.»Euro Shoe Group s’est doté d’un modèlestratégique clair en 2015. L’e-commercen’est pas une fin en soi. Au contraire : les ma-gasins en briques restent l’activité principalede la famille Van Audenhove, propriétairede la chaîne. Les ventes en ligne sont cen-sées soutenir les boutiques, ce qui expliquepourquoi la société insiste tellement sur le retrait des commandes en magasin. «Lesentreprises familiales pensent à long terme,estime Kurt Moons. Elles peuvent donc faireévoluer progressivement leur positionne-ment en ligne. D’abord mettre en place tousles éléments constitutifs, puis passer à la vitesse supérieure si le marché le demande.»

TROISIÈME COMMANDEMENT.UNE INFORMATIQUE PERFORMANTE EST ESSENTIELLEA cet égard, l’élément constitutif essentielest un système informatique performant.Et le département informatique n’a pas pourseule tâche de résoudre les problèmes d’ordinateurs. Il contribue à la réflexion stra-tégique sur le commerce électronique etparticipe à l’adoption des bonnes décisions.«Un sérieux investissement attend l’entre-prise familiale, analyse le professeur de laVlerick Business School. Elle peut choisirparmi un grand nombre de fournisseurs. Il vaut mieux qu’elle se fasse conseiller surce qui est vraiment nécessaire. Elle doitfixer ses priorités. Collecter des tas de don-nées au travers de son site de vente, c’estfantastique. Mais en a-t-elle réellement besoin ? Demandez-vous jusqu’à quel pointvous voulez suivre le mouvement et gardezbien les pieds sur terre.»En 2012, Euro Shoe Group a mis l’accentsur le lien entre les ventes en ligne et la ges-tion des stocks. La famille voulait tenircompte de l’ensemble des canaux de venteet a mis le paquet sur le plan technique.«Nous investissons énormément dans lestechniques qui relient l’e-boutique et leSAP, précise Kurt Moons. C’est pourquoinous avons développé plus que les autresles systèmes de support sous-jacents. Cen’est qu’à ce prix que l’on peut vraiment seprétendre actif dans tous les canaux devente possibles.»

«SI vOuS vOuSLAncEZ DAnS L’E-cOMMERcE,vOuS AvEZ tOut IntéRêt à LAISSER LES ScEptIQuES SuR LA LIGnE DE tOuchE.»

STEVE MUYLLE(VLERICK BUSINESS SCHOOL)

PHILIP DELCROIXPAULA DONCKERS

JOS DELCROIXKATLEEN DELCROIX

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LE COMMERCE NUMÉRIQUE OUVRE LES FRONTIÈRES.

«nOuS InvEStISSOnS énORMéMEnt DAnS LES tEchnIQuES QuI RELIEnt

L’E-BOutIQuE Et LE SAp»

(CEO EURO SHOE GROUP)KURT MOONS

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se sent menacé par les activités numé-riques. Pour les entreprises familiales, quidéfendent souvent leurs employés, c’estun point sensible. «Soyez clair à ce sujet,conseille Steve Muylle. Expliquez lesconséquences du changement numérique.Et indiquez par la même occasion que voussouhaitez associer vos collaborateurs auprocessus, et de quelle manière. Démon-trez qu’il s’agit d’un choix à long terme etévitez absolument toute ambiance néga-tive. La numérisation ne peut être syno-nyme d’incertitude pour les travailleurs.Dissipez les craintes. Une entreprise fami-liale est suffisamment proche de son person-nel pour faire le pas de manière crédible.»

SIXIÈME COMMANDEMENT. EVALUEZ BIEN LES NOUVEAUXMARCHÉS ÉMERGENTSLe commerce numérique ouvre les fron-tières. D’un coup, les produits peuvent sevendre assez facilement sur d’autres mar-chés. «Cela pose de nouveaux défis, analysele patron d’Europ Shoe Group. Votre marqueest-elle suffisamment connue sur ces nou-veaux marchés émergents ? Comment or-ganiser la logistique ? Quelles sont les diffé-rences dont il faut tenir compte sur ces mar-chés ? Dans les entreprises familiales, lesnouvelles générations s’investissent volon-tiers dans tout cela. Elles travaillent d’uneautre manière, apprennent à gérer les clientsqui arrivent un peu de nulle part sur le siteweb et nouent des contacts sur Skype. Onpeut en tirer des leçons très intéressantes.»Deldo vend 90 % de ses pneus à l’étranger.Grâce aux plateformes de vente externes,qui gagnent en importance, il compte déjà20.000 acheteurs rien qu’en Allemagne,par exemple. La nouvelle situation sur lemarché impose toutefois la vigilance, pré-vient Philip Delcroix, directeur général dufournisseur de pneus. «De très petites en-treprises peuvent désormais faire concur-rence à des grossistes comme nous, in-dique-t-il. L’organisation doit alors être plusrapide et plus intelligente. L’exercice enligne d’une activité de volumes impliqued’augmenter les capacités, les performanceset l’efficience. Cela devrait donner lieu à uneconsolidation, car de nombreuses entre-prises de taille moyenne auront du mal à suivre. Sous l’influence d’Internet, le com-merce change très rapidement. Et nous n’ensommes encore qu’à mi-course.»

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nique et logistique : «Il évolue rapidementvers d’autres métiers tels que les data scien-tists ou encore l’inbound marketing, préciseJean-Pol Boone d’Inoopa. Et on voit à quelpoint il est périlleux de manœuvrer dans cesens. Trouver le personnel qualifié, le conser-ver, et surtout le rentabiliser est un vrai chal-lenge en soi, surtout quand on est confrontéà une génération de travailleurs différente.Dans beaucoup de cas, nous observons qu’ilest plus rentable d’externaliser certaines ex-pertises plutôt que de tenter de le faire en in-terne».Et Jean-Pol Boone d’insister également,en marge du plan d’affaires numérique,sur la «nécessité de suivre les chiffres clésdes concurrents, fournissant ainsi des don-nées qui peuvent aider à la décision pourla PME familiale». Ainsi outillée, elle seraà même de pouvoir évoluer en toute con -naissance de cause. Peu le font et pourtantc’est nécessaire : au même titre qu’un bud-get est fait annuellement, une revue de l’e-commerce et des chiffres des concur-rents semble plutôt une approche pragma-tique et recommandée pour garder le capde la rentabilité.»

CINQUIÈME COMMANDEMENT.ASSOCIEZ VOS COLLABORATEURSAU PROCESSUSQu’implique le commerce électronique pourles travailleurs ? Souvent, le personnel

« pASSER D’un MODèLEhIStORIQuEREntABLE à un MARché DOtéDE cOncuRREntSSuRcApItALISéSvISAnt LA pRISE DEpARt DE MARché AuDétRIMEnt DE LAREntABILIté n’EStpAS SIMpLE.»»

JEAN-POL BOONECOFONDATEUR D’INOOPA

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En Belgique, les dépenses en ligne représen-taient au deuxième trimestre 2016 près de 8,7milliards d’euros en glissement annuel, soit 2,1 %du PIB, selon BeCommerce Market Monitor,une enquête réalisée par GfK. Du côté desconsommateurs belges, 64 % ont effectué aumoins un achat en ligne l’année passée selon unsondage réalisé par Comeos (Fédération belgedu commerce et des services) alors qu’ilsn’étaient que 45 % en 2010. De plus, le montantmensuel dépensé en moyenne a aussi aug-menté : de 130 euros en 2011 à 199 euros en 2016.Ceci étant, l’élan semble s’essouffler ces deuxdernières années et en 2016 peu de nouveauxutilisateurs sont entrés sur le marché, en partieen raison de la difficulté àtester ou essayer un pro-duit avant de l’acheter. Celareste la barrière principaleà l’achat.Du coté des entreprisesbelges, une entité non fi-nancière sur quatre a réa-lisé en 2015 au moins 1 %de son chiffre d’affairesgrâce aux ventes en ligne,selon Eurostat. Au niveaueuropéen, c’est compara-ble aux résultats suédoisou allemands et seule l’Irlande dépasse sensi-blement notre pays avec un taux de 32 %. Alorsque la Belgique semblait en avance face aux au-tres pays européens il y a quatre ou cinq ans, unrattrapage semble se dessiner depuis lors et laconcurrence européenne est désormais plus im-portante. Des barrières souvent citées par lesacteurs de l’e-commerce affectant le développe-ment sont le manque de flexibilité au niveau del’emploi, des législations trop contraignantes etun retard technologique notamment au niveaudu paiement électronique.Une succincte analyse de l’e-commerce en Bel-gique nous dévoile donc des entreprises belgesrattrapées par la concurrence européenne et unnombre d’e-consommateurs stagnant. Malgréce constat, il reste, selon nous, en Belgique unpotentiel de développement important. La ten-

dance du consommateur belge au niveau del’adoption des technologies liées à Internet suitde près celle des Pays-Bas mais avec un retardde quatre à sept ans. En extrapolant cette ten-dance, on peut donc imaginer une augmentationde l’accès à Internet et des achats en ligne de 5 à10 points d’ici 2018. En d’autres termes, en 2018,entre 295.000 et 590.000 Belges (de plus de 18ans) supplémentaires effectueraient au moinsun achat durant l’année écoulée. En supposantque le montant des dépenses par consommateurreste stable, cela représenterait pour l’ensemblede l’année 2018 une demande supplémentairepour le secteur située entre 700 millions d’euroset 1,4 milliard d’euros. Toutefois, une partie de

ce montant serait dirigévers des entreprises si-tuées à l’étranger. De plus,si ce mouvement n’est pasaccompagné d’une haussede la consommation, alorscette hausse des ventes enligne aurait un impact né-gatif sur le chiffre d’affairesdes entreprises qui n’ontpas d’offre sur Internet.Reste que l’avènement del’e-commerce induit néces-sairement une transforma-

tion au niveau du marché du travail et même sil’e-commerce devait créer un nombre significatifd’emplois dans les prochaines années, il ne fautpas oublier que cela se ferait aussi aux dépensd’emplois dans le secteur de la vente de détaildit traditionnel. C’est le concept, bien connu, de«création destructrice» dû à l’économiste autri-chien Schumpeter en 1942.En définitive, le secteur de l’e-commerce, qui asubi un développement soutenu ces dernièresannées, paraît quelque peu plafonner et les en-treprises belges semblent rattrapées par leursconcurrents européens. Ceci étant dit, la Bel-gique regorge encore d’un important potentielde croissance à exploiter tout en sachant quecela pourrait avoir comme impact une profonderefonte de l’emploi dans le secteur de la ventede détail.

LE SECTEUR DE L’E-COMMERCE

QUI A SUBI UN DÉVELOPPEMENT

SOUTENU CES DERNIÈRES ANNÉES PARAÎT QUELQUE PEU PLAFONNER.

QUEL POTENTIEL OFFRE L’E-COMMERCEÀ NOS ENTREPRISES ?

cOncuRREncE

GEOFFREY MINNE

Economiste chez InG [email protected]

pAROLES D’ExpERtS

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SA, c’est tout naturellement que Jean-Luc etAnne-Michèle l’aident. «C’est grâce à eux quej’ai pu me lancer, reconnaît-il. Ils m’ont amenédes clients, mis un véhicule à disposition, etc.Eux levaient doucement le pied.» Car oncle ettante commencent à imaginer que leur neveupuisse un jour reprendre l’affaire familiale. «S’ilmordait à l’hameçon», précisent-ils.«Reprendre seul était impossible, à la fois phy-siquement et financièrement», reconnaîtAlexis de Halleux. S’associer, pourquoi pas ?Mais encore fallait-il trouver la perle rare, quiconnaisse ce secteur si particulier. C’est AlainEnglebert, fondateur et administrateur de TheFamily House, spécialiste des cessions dePME, qui tirera finalement un lapin de son cha-peau, ou plutôt un candidat sur mesure : Benjamin de Sauvage. Il est «hyper débrouil-lard» et «connaît le marché» pour s’y être frottépendant six ans chez un concurrent. Et, sur-tout, il est partant pour l’aventure. Entre Alexisde Halleux et Benjamin de Sauvage, le courantpasse d’emblée et ils se proposent de repren-dre l’affaire, chacun à 50 %.

FIXER LE JUSTE PRIXAlexis de Halleux se rappelle avoir trouvé «trèsdélicat» de négocier avec sa famille : «Ils sontpartis de rien pour monter tout ça, c’est leurbébé. Evidemment, on veut donner tout cequ’ils demandent. On est prêt à tout accepter.Mais on ne peut pas». C’est là qu’un associéexterne, ayant du recul, vient bien à point, jugeAlexis de Halleux.Vendeurs et acheteurs s’accordent en effetsur un prix selon une science qui «connaît au-tant de méthodes que d’experts», admet AlainEnglebert, qui a accompagné la transmission :on peut calculer les cash-flows libres et lesmultiplier par un coefficient lié entre autres àla pérennité de l’entreprise. «Ce coefficient,pour le moment, se trouve entre 6 et 7», aprèsavoir connu une descente jusqu’à 4 en 2007,retrace Alain Englebert.En décembre 2016, l’affaire est bouclée, auterme de près d’un an de négociations. Le sonde cloche est le même de tous côtés : le pas-sage de flambeau laisse chacun serein. On ar-riverait presque à croire qu’une telle transmis-sion intra-familiale n’est après tout qu’un jeud’enfant.Fort de son regard extérieur, Alain Englebertremarque que, dans ce cas-ci, «les proprié-taires avaient bien mûri leur projet. Leur dé-cision n’était pas précipitée par des circons-tances extérieures ou un coup du sort comme

une maladie. Ils avaient vérifié que leurs en-fants n’étaient pas intéressés par la reprise etils avaient un neveu dans l’équipe depuis unmoment.»En effet, lorsque la génération des repreneursest déjà dans l’entreprise, la transmission s’ac-célère. Par contre, s’il faut former des nou-veaux venus à des fonctions exécutives, le délaide transmission peut prendre jusqu’à plusieursannées. Alain Englebert souligne encore quedes procédures bien claires, bien codifiéesvont donner de la crédibilité à l’entreprise etde la confiance à l’acquéreur.

ASSURER LA PÉRENNITÉCe qu’Alexis de Halleux et Benjamin de Sauvage ont acheté, c’est aussi «l’artisan dela tente sur mesure, un carnet de clients, 25 an-nés d’expérience et de développement ainsiqu’une réputation à toute épreuve». Sans parlerdes «meilleurs consultants du marché», rap-pellent les repreneurs : Anne-Michèle et Jean-Luc de Halleux resteront en effet à bord commeconsultants externes pour trois ans. «Cela ras-sure les clients», estiment-ils en choeur, et al-lège la charge des nouveaux pilotes. Côté fon-dateurs, c’est aussi une façon de lever le pieden douceur. Du coup, les deux associés ont puaccepter cette année un peu plus de chantiersque d’habitude. «Mais nous avons tout de même dû refuser desprojets, précise Alexis de Halleux. Nous en-tendons en effet être présents de A à Z et limi-tons pour ce faire les événements». Ensemble,ils passent quatre à 10 jours sur un projet. Ilsy installent ce qui ressemble plus à une maisonqu’à une tente, avec ses cuisines, toilettes, an-nexes, rideaux et autres décorations. L’équipese fait fort de réaliser des prouesses techniques,de la tente montée sur un plan d’eau à l’arbrelaissé au milieu de la structure. A quel prix ? «Cela commence à une dizainede milliers d’euros et peut monter jusqu’à descentaines de milliers d’euros», calcule Alexisde Halleux. Un marché peu commun donc, desdéfis particuliers chaque fois, mais c’est bienlà ce qui enthousiasme les deux repreneurs.Entre-temps, ils ont déjà apposé leur griffedans leurs locaux : l’entrepôt-bureau en bor-dure du canal à Vilvorde a été décoré de ma-tériaux de tentes, dans la philosophie de l’en-treprise. Et Alexis de Halleux et Benjamin de Sauvageentendent bien rester dans l’esprit familial :proche du client, créateur de produits origi-naux, inédits et sur mesure.

ANNE-MICHÈLE ET JEAN-LUC DE HALLEUX

RESTERONT À BORD COMME CONSULTANTS

EXTERNES POUR TROIS ANS. POUR RASSURER LES CLIENTS ET

ALLÉGER LA CHARGEDES NOUVEAUX

PILOTES.

ALEXIS, ANNE-MICHELE,JEAN-LUC DE HALLEUX ETBENJAMIN DE SAUVAGE

n 1989, Anne-Michèle deHalleux est commercialedans une société de loca-tion de tentes. Son mariJean-Luc s’occupe de la lo-gistique pour un distribu-teur de vin. Il est manuel.

Elle est douée pour la décoration. Et entrepre-neuse dans l’âme. Du haut de ses 35 ans etmère de trois enfants, elle achète deux tentesqu’elle loue à des particuliers. «On les montaità deux, se rappelle-t-elle. Nous nous sommesauto-financés petit à petit. C’est comme celaque nous avons commencé. En partant de rien.»Près de 30 ans plus tard, la société de HalleuxSA compte une trentaine de projets par an. Et quand le couple, approchant la soixantaine,a commencé à penser tout doucement à passerla main, «les choses sont tombées du ciel», se réjouit Anne-Michèle de Halleux.

TROUVER CHAUSSURE À SON PIEDCe n’est pourtant pas parmi leurs trois fillesqu’Anne-Michèle et Jean-Luc de Halleux onttrouvé leur successeur : celles-ci avaient «tou-jours vu leurs parents travailler beaucoup, ex-plique Anne-Michèle. Aussi, elles avaient faitcarrière ailleurs». Mais le couple n’a pas pourautant dû aller chercher trop loin. Car leur ne-veu et filleul, Alexis de Halleux, travaillait déjàdans les murs depuis cinq ans. Ce qu’il aimedans ce métier ? «Le côté bricoleur. Devoirfaire toujours plus vite et mieux», précise-t-il.Etudiant déjà, Alexis «plantait des piquets, agra-fait du velum et plaçait les tapis» pour son oncleet sa tante.C’est pourtant dans une autre société qu’il com-mence sa vie professionnelle. Mais l’événe-mentiel le rattrape et, quand il achète deux voi-turettes de golf pour convoyer les invités auxévénements abrités notamment par de Halleux

Une toile en suspens sur l’eau, un pavillon au look africain ou encore un chalet qui semble sorti tout droit des montagnes suisses. La société de Halleux ne loue pas de tentes. Elle propose «un lieuéphémère d’exception pour y célébrer un mariage, un anniversaire des événements corporate». Du coup, quand Anne-Michèle et Jean-Luc de Halleux ont commencé à penser «transmission», il leur fallait rester dans ce segment haut de gamme. SIBYLLE GREINDL

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PORTRAIT

TENTES DE HALLEUX

L’EXCEPTION, DU PRODUIT À LA TRANSMISSION

E

CE QU’ILS ONT ACHETÉ,

C’EST AUSSI «L’ARTISAN

DE LA TENTE SUR MESURE,

UN CARNET DE CLIENTS,

25 ANNÉSD’EXPÉRIENCE

ET DE DÉVELOPPEMENT

AINSI QU’UNERÉPUTATION

À TOUTE ÉPREUVE».

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sa vie de famille. Elle se sent en outre intéresséepar l’écologie. Fin des années 2000, elle démis-sionne. A la même époque, Jean Galler com-mence à planter ses vignes, réalisant ainsi unrêve vieux de 30 ans. «Il a toujours suivi descours d’œnologie, explique Justine Galler. C’estsa deuxième passion. Il a fait analyser le sol etil se fait qu’il se prêtait parfaitement à la vigne.Il n’imaginait toutefois pas que cela prenait au-tant de temps et il m’a alors demandé de le re-joindre. Je suis tout de suite tombée amoureusedu contact avec la terre. De plus, le vignobleest proche de chez moi et je peux ainsi m’oc-cuper de ma petite fille qui a aujourd’hui 7 ans.»

PROGRESSION DE LA CHOCOLATERIEAujourd’hui, Justine Galler se consacre à lavigne. Son père, tout en passant chaque matindans le vignoble, est pour sa part actif à 100 %dans la chocolaterie, où travaille son beau-fils,Quentin Laezza. «Il abat un travail formidable,intervient Jean Galler. Il est revenu dans l’en-treprise il y a trois ans. Outre la gestion qu’ilmaîtrise parfaitement, il est passé par la qua-lité, la R&D et la production et lancé un ERP(progiciel de gestion intégré, Ndlr). Nous fai-sons partie des 5 % d’entreprises en Belgiquequi tiennent leurs délais et leurs budgets, c’estun succès colossal. L’objectif, c’est qu’un jour,il me remplace.» Parallèlement au vignoblenaissant, la chocolaterie, qui emploie 180 per-sonnes pour un CA de l’ordre de 30 millionsd’euros, continue à se développer. Sur les 18derniers mois, elle a ainsi ouvert quatre bou-tiques en Belgique (Anvers, Gand, Charleroiet Bruxelles). Ses premiers marchés à l’exportsont la France, le Moyen-Orient et le Japon.A l’image de son chocolat dans lequel il n’y apas une goutte d’huile de palme, la famille Galler est également très attentive à la qualitédu vin qu’elle produit et a opté dès le débutpour le bio.Au départ, d’autres vignerons belges étaientdubitatifs mais certains se sont convertis aubio et ont délaissé le conventionnel. Le vin estpar ailleurs le seul produit alimentaire sur le-quel le consommateur ne trouvera pas de com-position indiquée. «C’est un scandale, ajouteJean Galler. Il faut savoir qu’il peut y avoir dansun vin non bio jusqu’à 800 molécules diffé-rentes.» Même si c’est encore une goutte d’eaudans la production viticole, le bio commencedoucement à émerger. En France, certainesrégions comme l’Alsace et le Languedoc sontpionnières alors que d’autres sont plus réfrac-taires comme le Bordelais ou la Champagne.

Mais même dans cette dernière, cela évoluediscrètement. A Vaux-sous-Chèvremont, le choix a été clairement fait et s’inscrit dansle respect de la nature.

VIN BIO ET HAUT DE GAMMEUn choix qui nécessite davantage de travail etd’implication comme en témoigne Justine Gal-ler : «Au début, je travaillais toute seule. Quandnous avions 2.000 pieds de vigne, c’était encorepossible. Maintenant qu’il y en a 9.000, je bé-néficie de l’aide ponctuelle de personnes quiviennent effectuer les multiples tâches que re-quiert le vignoble. Chaque année, on ajoute500 pieds.» Le vignoble compte cinq principauxcépages : chardonnay et pinot blanc (blanc) etpinot noir, gamay et cabernet franc (rouge)ainsi que 27 autres cépages qui sont testés pourvoir ceux qui s’épanouissent le mieux sous leclimat liégeois. Outre ses crus mono-cépages,Septem Triones propose également un blancà 10 cépages et un rouge à cinq cépages.Cette année, Justine et Jean Galler s’attendentà une production de l’ordre de 800 bouteilles.Une production encore limitée, très sujette auxaléas climatiques – le millésime 2016 a ainsiété catastrophique avec seulement une qua-rantaine de bouteilles – avec un prix qui oscilleentre 35 à 80 euros. Un prix qui s’explique parle soin apporté à la terre et aux vignes. Tout estfait à la main. En outre, l’absence de pesticideset autres produits chimiques a donné au terroirde Septem Triones une remarquable biodiver-sité qui contribue à la qualité du vin et a mêmeétonné l’agronome français Claude Bourgui-gnon, fondateur du LAMS (Laboratoire d’ ana-lyse microbiologiques des sols). Les bouteillesdont les étiquettes ont été dessinées parl’épouse de Jean Galler sont numérotées ets’adressent «à des passionnés qui ont envie defaire des découvertes et qui sont prêts à mettrele prix pour autant que l’on ne se moque pasd’eux», concluent Justine et Jean Galler.

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Le nom Galler est aujourd’hui une référence en chocolaterie mais Jean Galler, fondateur de l’entreprise éponyme, et sa fille, Justine,se sont lancés en 2010 avec Septem Triones dans un autre défi : la vigne.Un mariage entre chocolat et vin qui ne peut que ravir les amateurs de produits du terroir. GUY VAN DEN NOORTGATE

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PORTRAIT

FAMILLE GALLER

PASSIONNÉS DE PÈRE EN FILLE

vol d’oiseau, un kilomè-tre à peine sépare la cho-colaterie Galler des vi -gnes de Septem Triones,situées à Vaux-sous-Chè-vremont. C’est dans cecadre champêtre que Jean

Galler et sa fille Justine se sont lancés dans laproduction de vin bio. Mais avant de passerau vin, revenons brièvement au chocolat quia valu à Jean Galler la notoriété et le succèsnotamment récompensé par le titre de Mana-ger de l’Année (1994). En quatre décennies– la chocolaterie a été fondée en 1976 –, Gallers’est imposée sur le marché et est devenueune référence dans le métier. Tant en Belgiquequ’à l’international.L’entreprise liégeoise dispose encore de bellespotentialités de croissance. D’autant qu’ellepeut s’appuyer sur la famille royale du Qatarqui est présente depuis 10 ans dans son capital.Elle en détiendrait aujourd’hui la majorité via

Galler Holding dont Jean Galler est adminis-trateur délégué. Dans cette dernière, lui-mêmedispose de 13 % via Septem Triones, nom queporte le vignoble de Justine et Jean Galler. Laboucle est bouclée, nous voilà de retour dansles vignes.

VIGNOBLE LIÉGEOISUn retour qui s’inscrit dans une tendance pluslarge que l’on observe en Belgique depuismaintenant quelques années avec la créationde multiples vignobles. Rien qu’en provincede Liège, on en compte une petite dizaine.«L’aventure de la vigne était en nous depuistoujours. A l’origine, nous l’imaginions dansle Rhône, mais nos racines sont de plus enplus profondément ancrées en terre lié-geoise… Cette terre se prêtant merveilleuse-ment à la vigne, c’est là que nous avons décidéde réaliser nos rêves, soulignent Justine etJean Galler sur le site de Septem Triones. Cestermes sont à l’origine du mot septentrional.En latin, cela signifie «les sept bœufs de la-bour» qui ne sont autres que les sept étoilesde la Grande Ourse. Cette constellation,comme on le sait, indique le nord. Notre vignoble est situé en région septentrionale,il est géré selon les rythmes planétaires etstellaires, son appellation devient alors uneévidence.»Tombée toute petite dans la chocolaterie, Justine Galler s’y est naturellement retrouvéeen 2004 après ses études de gestion à l’ULg.«Pour tout le monde, il semblait évident qu’ilfallait que je reprenne la chocolaterie même simes parents m’ont toujours dit que je ne devaispas me sentir obligée et que je pouvais faire ceque je voulais. J’y ai créé le service marketinget me suis occupée des relations presse.» Aufil des mois, elle s’aperçoit qu’elle n’est pas car-riériste et qu’elle souhaite davantage privilégier

AEN QUATRE

DÉCENNIES, LACHOCOLATERIE

S’EST IMPOSÉESUR LE MARCHÉET EST DEVENUE UNE RÉFÉRENCEDANS LE MÉTIER.

TANT EN BELGIQUE QU’À L’INTERNA -

TIONAL.

JEAN GALLER

A L’IMAGE DE SON CHOCOLAT

DANS LEQUEL IL N’Y A PAS UNE GOUTTE

D’HUILE DE PALME, LA FAMILLE GALLER EST ÉGALEMENT TRÈS ATTENTIVE À LA QUALITÉ

DU VIN QU’ELLE PRODUIT

ET A OPTÉ DÈS LE DÉBUT POUR LE BIO.

CETTE ANNÉE, ILS S’ATTENDENTÀ UNEPRODUCTION DE L’ORDRE DE 800 BOUTEILLES.

JEAN GALLERET SA FILLE JUSTINE

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Les transactions commerciales sont de plus enplus nombreuses à se passer en ligne. Bien quel’e-commerce présente de sérieux avantages,il reste compliqué dans le dédale de règles fis-cales et juridiques.

TVACitons avant tout les règles dites de localisationpour la TVA fixées au niveau européen afind’éviter la distorsion de la concurrence.Pour ce qu’on appelle les «ventes à distance»,au cours desquelles des biens sont vendus à des particuliers résidant dans d’autres Etatsmembres de l’UE, c’est en effet la TVA localequi est due dans le pays de destination desbiens si un certain seuil de ventes est dépassédans cet Etat membre. Ce seuil diffère cepen-dant d’un pays à l’autre. La vente de biens viaun webshop requiert donc une certaine organi-sation administrative puisque une fois le seuildépassé, le commerçant doit demander un nu-méro de TVA local et doit satisfaire aux forma-lités locales relatives à la TVA dans l’Etat mem-bre concerné.L’utilisation de plateformes internet existantesqui proposent leur page web (ou une partie decelle-ci) aux (petits) commerçants afin qu’ilspuissent proposer leurs biens à la vente augrand public ne résout pas forcément ce pro-blème. D’une part, parce que le (petit) com-merçant demeure responsable du suivi et del’accomplissement des formalités prescrites.D’autre part, parce que certains Etats membresont adopté une législation selon laquelle la res-ponsabilité solidaire de ces plateformes peutaussi être engagée pour le paiement de la TVAdue lorsqu’elles auraient pu/dû savoir que lecommerçant ne remplissait pas ses obligations.En ce qui concerne la prestation de services élec-troniques, toutes les prestations sont dans tousles cas, et sans qu’un seuil doive pour autant êtredépassé, imposables immédiatement là où estétabli le bénéficiaire de ces services. A cet égard,la législation européenne a, il est vrai, mis enplace un système MOSS (Mini One Stop Shop),dans le but de réduire les charges administra-tives, permettant de régler la TVA due dans dif-

férents Etats membres en une déclarationunique et en un seul paiement.

CADRE JURIDIQUED’un point de vue juridique, le commerce surInternet équivaut à une vente à distance. Etantdonné que le consommateur n’a pas de contactphysique avec le vendeur en ligne, ce dernierest dans l’obligation de fournir une série d’infor-mations de manière claire et le consommateura toujours la possibilité de révoquer le contrat.En outre, le commerce en ligne donne automa-tiquement lieu au traitement de donnéesà caractère personnel. Ce qui implique dès lorsla nécessité de respecter, à partir du 25 mai2018, le règlement général sur la protectiondes données (également appelé GDPR), quicontraint les commerçants sur Internet à dres-ser un inventaire des données à caractère per-sonnel qu’ils traitent ainsi qu’à déclarer surquelles bases ils le font et à quelles fins. De ce point de vue, de strictes obligations enmatière d’information sont prévues et la res-ponsabilité peut être engagée à défaut de four-niture d’informations correctes.

TENDANCESDans le cadre de la lutte à l’échelle internationalepour des impôts plus justes, les administrationsconcernées réfléchissent à une nouvelle inter-prétation de la notion d’«établissement stable»(par exemple : la présence d’un webshop est-ellesuffisante pour disposer d’un tel établissementstable ? ). Si cette tendance devait se poursuivre,le commerce international via Internet pourraitdevenir bien plus complexe encore.Par ailleurs, nous observons déjà un nombrecroissant de contrôles ciblés sur le commerceinternational, exercés par diverses adminis-trations fiscales chez nous et à l’étranger. Enfin, les compétences de la Commissionbelge de la protection de la vie privée quipourra dans un avenir proche infliger desamendes colossales en cas de violation de laréglementation GDPR conduiront encore à renforcer la prise de conscience relative à la législation sur le commerce en ligne.

PAROLES D’EXPERTS

LA COMPLEXITÉ FISCALE ET JURIDIQUE DE L’E-COMMERCE

TVA

ERWIN BOUMANS

partner tax chez [email protected]

Envoyez vos questions à [email protected]

D’UN POINT DE VUE JURIDIQUE,

LE COMMERCE SUR INTERNET

ÉQUIVAUT À UNE VENTE À DISTANCE.