Les promesses - Frareg · logiciel de CAO. Avec le concours de l’association Clarté (2),fondée...

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Travail & Sécurité 01 - 06 29 Les promesses de la réalité virtuelle Après un détour par l’univers des loisirs, la réalité virtuelle, sous ses formes les plus simples comme les plus sophistiquées, est entrée dans le monde de l’entreprise. Elle est même en passe de devenir un outil de travail parmi d’autres. Des jeux vidéo, elle est passée à la formation, au bureau d’études, au pilotage d’installations et à la maintenance… Pour les professionnels de la prévention des risques et de la formation à la sécurité, ces outils offrent un potentiel auquel ils ne peuvent rester indifférents. Que ce soit à l’INRS depuis 2003, ou dans de grandes entreprises telles que PSA Peugeot Citroën, EDF… des applications témoignent de la maturité de cette technologie.

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Les promessesde la

réalité virtuelleAprès un détour par l’univers des loisirs,

la réalité virtuelle, sous ses formes les plussimples comme les plus sophistiquées, est

entrée dans le monde de l’entreprise.Elle est même en passe de devenir

un outil de travail parmi d’autres. Des jeux vidéo, elle est passée à la formation,

au bureau d’études, au pilotage d’installations et à la maintenance…

Pour les professionnels de la prévention des risques et de la formation à la sécurité,ces outils offrent un potentiel auquel ils ne peuvent rester indifférents. Que ce soit à l’INRS depuis 2003, ou dans de grandes entreprises telles que PSA Peugeot Citroën, EDF… des applications témoignent de la maturité de cette technologie.

L ’expression «réalité vir-tuelle» est une traductionéquivoque de l’anglo-saxon

virtual reality… La réalité virtuelle est un prolon-gement de la simulation. Elledésigne de fait toutes les tech-niques permettant de se rap-procher de la réalité. C’est unéventail d’outils qui va del’image tridimensionnelle surécran à la cabine d’immersiondans laquelle se déplace l’utili-

sateur, équipé de lunettes sté-réoscopiques, de gants de don-nées et d’autres capteurs… « Laréalité virtuelle recouvre touteforme de simulation en tempsréel dans laquelle l’utilisateurpeut s’immerger et agir, résumeJacques Marsot, ingénieur (1) àl’INRS. Il s’agit en premier lieu de simulation visuelle mais l’onvoit aussi se développer la simu-lation sonore et la simulationtactile. Cette dernière permet

par exemple de saisir, manipulerdes objets et de ressentir lesefforts de contact. »On escompte, dans les pro-chaines années, des progrèsrapides de la réalité virtuelle en liaison avec le perfectionne-ment des mannequins numéri-ques, des équipements de visua-lisation (projecteurs, écrans…) etdes interfaces sensitives ou àretour d’effort. Mais il ne fautpas pour autant assimiler la réa-lité virtuelle à l’emploi d’unvisiocasque ou d’une cabined’immersion.

Au-delà de la CAO

« La plupart des systèmes actuelss’en tiennent à l’emploi d’unécran à une ou plusieurs facescomme interface visuelle», pré-vient Joseph Ciccotelli, adjointau chef de département IET (1),qui ajoute : « L'intérêt de la RVn'est pas tant de reproduire laréalité, que de la dépasser. »

Chaque gamme d’applications a une manière propre d’utiliser la réalité virtuelle. Les premiè-res applications en entrepriseconcernent la conception de ma-chines. Les bureaux d’études dis-socient de moins en moins ce quirelève de la conception assistéepar ordinateur (CAO) propre-ment dite de ce qui relève de laréalité virtuelle.

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La réalité virtuelle, sous ses formes les plus simplescomme les plus sophistiquées, est en passe de devenir un outil de travail parmi d’autres, dans les bureaux d’études ou encore dans les organismes de formation. Les professionnels concernés par la sécurité, la prévention des risques, la conduite d’engins, la maintenance et le diagnostic sont parmi les plus attentifs à ses atouts. Les deux principauxsont la faculté d’anticiper les défauts d’un systèmeavant sa réalisation et la simulation de situationslimites.

• Cabine d’immersion ou visiocubeEnsemble composé d'une stationgraphique et d'un ensemble de vidéo-projecteurs permettant l'affichage à l’échelle humaine d'unvéhicule, d'un poste de travail ou d'une cabine de conduite surtrois à six faces d'un cube. L’utilisateur, qui se trouve à l'intérieur du cube, peut se mouvoir et interagir dans cet environnement virtuel.

• Gant de données ou gant numérique ou “dataglove”Interface motrice qui mesure entemps réel les mouvements relatifs(ou absolus lorsqu'il est associé à un système de capture de mou-vement) des doigts de la main.

• Interface «haptique» ou à retour d’effortInterface sensori-motrice, qui stimule le sens kinesthésiquede l'utilisateur.

• Sens kinesthésiqueSens qui permet à l'homme de res-sentir la position de ses membreset les efforts exercés sur eux.

• Lunettes stéréoscopiques oucasque immersif ou visiocasqueDispositif portable permettant defournir une visualisation stéréosco-pique d'un environnement virtuel.

• Réalité virtuelleTraduction équivoque de l’anglais«virtual reality» (quasi-réalité),

désignant un ensemble de techniques d’interaction en tempsréel avec un monde fictif, à l’aided’interfaces comportementalespermettant l’immersion de l’utilisa-teur dans cet environnement.

• Réalité augmentéeEnsemble des méthodes destinéesà améliorer la perception d'unepersonne vis-à-vis de son environ-nement réel, généralement parsuperposition d'images de synthèsesur des images réelles ou vidéo.

• Agent virtuel ou humanoïde virtuelReprésentation d'une personne fictive dans un environnement virtuel.

1. Jacques Marsot est responsable dulaboratoire Ingénierie de conceptionde systèmes sûrs (ICS) dans le dépar-tement Ingénierie des Équipementsde Travail (IET) de l’Institut nationalde recherche et de sécurité.

CONCEPTION DES ÉQUIPEMENTS

Anticiper les risques par la simulation

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À Laval, Gruau, carrossier spé-cialisé dans la transformationde véhicules utilitaires à des finsprofessionnelles, emploie la réa-lité virtuelle comme outil decommunication et d’échangesans plus de difficulté qu’unlogiciel de CAO. Avec le concoursde l’association Clarté (2), fondéeà Laval pour promouvoir lesoutils de réalité virtuelle, Gruaua commencé par présenter uneanimation interactive tridimen-sionnelle au Mondial de l’auto-mobile 2000, à Paris. L’annéesuivante, le carrossier a utilisécette technologie pour valider

en un temps record une modifi-cation de véhicule. Ayant plustard à réaménager un Trafic© deRenault en vue des loisirs, lestechniciens de Gruau ont ima-giné de transformer les siègesen couchettes en les pliant versl’avant et non vers l’arrièrecomme à l’accoutumée. Ils ont convaincu leurs interlo-cuteurs de la pertinence del’idée en présentant la séquenceanimée de mise en œuvre de cecouchage, depuis lors disponiblesur une mini-série de véhicules.«Les images de synthèse et l’ani-mation n’apportent pas d’infor-

mation supplémentaire auxconcepteurs, qui ont l’habitudede l’image 2D, mais elles faci-litent la représentation d’un pro-jet par des non-spécialistes etmettent en évidence de façonréaliste les défauts éventuels, enparticulier en ergonomie », pré-cise Christian Lelièvre, respon-sable du bureau d’études deGruau.

Pour concevoir sans risques

À l’INRS, on intègre la préven-tion des risques à la conceptiondes machines par le biais de laréalité virtuelle. « Nous souhai-tons que les concepteurs puis-sent dès le début prendre encompte la prévention des risqueset la sécurité pour ne pas êtrecontraints à de coûteux retoursen arrière », déclare JacquesMarsot. Dans cette perspective,trois départements (3) de l’INRS,

dont IET, ont lancé un projet plu-ridisciplinaire. « Notre projetprend exemple sur la conceptiond’une presse-plieuse, machineparticulièrement dangereuse,mais ses résultats seront généra-lisables à la conception d’unéquipement quelconque », pré-cise Joseph Ciccotelli. L’INRSs’est doté à cet effet d’une plate-forme d’immersion virtuelle,avec interface à retour d’effort,projection stéréoscopique surgrand écran, son spatialisé… Laplate-forme permet de repré-senter une machine à l’échelle 1et de manipuler des objets vir-tuels à l’aide des deux mains.Elle rend possibles la simulationdu fonctionnement de la presse-plieuse et le pliage virtuel, d’une

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2. www.clarte.asso.fr3. Les trois départements associéssont : Ingénierie des Équipements deTravail (IET), Homme au travail (HT)et Formation (FOR).

graphes derisques

Ces deux photos présentent l’interface haptique de la presse virtuelle développée à l’INRS. L’utilisateur peut réaliser le pliage virtuel d’une tôle avec une grandeimpression de réalisme… Une aide à la conception sans risques.

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pièce de tôle. « Ainsi les concep-teurs pourront-ils à l’avenir éva-luer en termes de risques la per-tinence de leurs choix sansattendre le stade de la réalisa-tion, note Joseph Ciccotelli. Quiplus est, ils pourront ainsi éva-luer des situations limites, cequi est impossible ou très diffi-cile en réel. »Pour obtenir une représenta-tion réaliste en temps réel dumembre supérieur de l’opéra-teur (main et avant-bras), les chercheurs de l’INRS ont collaboré sur ce projet avec le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et l’Institut derecherche en communication et cybernétique de Nantes (IRCCyN). Ces travaux pourrontà terme être récupérés et adap-tés en tout ou partie par les déve-loppeurs d’outils CAO. La réalité

virtuelle est un atout pour la for-mation à la prévention desrisques… «Mais pas question de l’employercomme un gadget en faisant ducopier-coller sur un stage conven-tionnel, prévient Jacques Marsot.Elle doit être employée à bonescient dans des études de cas.»Pour en faire la démonstration,l’INRS a choisi de lancer un projetpilote et a retenu comme casd'application la formation à laprévention des risques chimi-ques. Un atelier de vernissage en trois dimensions a donc étémodélisé sur des ordinateurs detype PC. À l'aide du clavier et dela souris, les apprenants se dépla-cent dans l’atelier virtuel etobservent sur l'écran l'activitéd’un opérateur représenté par un agent virtuel qu’ils peuventinterroger. Ils peuvent égale-

ment identifier et évaluer lesrisques chimiques chroniques et accidentels, proposer desmesures de prévention, simulerleur mise en application et enévaluer la pertinence.

Le module a été testé enmars 2005, à l'INRS, lors d’unstage de formation d'agentsdes caisses régionales d’assu-rance maladie (CRAM). Lesrésultats ont été analysés etune nouvelle session seraorganisée début 2006. « La simulation sur écran, venanten complément des autres outilsde formation, a permis aux sta-giaires de mieux appréhender lesrisques chimiques dans un atelieret de visualiser les solutions deprévention associées », constateJoseph Ciccotelli.

Formationprofessionnelle

Autre créneau de prédilectionde la réalité virtuelle : la forma-tion professionnelle. Celle-ci ne

Système de projection stéréoscopique.

L’agent virtuel représente l’opérateur sur sonlieu de travail virtuel. Il est un élément dumodule de formation à la prévention du risquechimique mis au point par l’INRS.

Le stagiaire observe l’agent virtuel et décompose son activité. Pour chaque phase del’activité, il doit identifier les agents chimiquesmis en œuvre ou produits par l’activité.

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va pas de soi quand elleconcerne des adultes qui n’ontjamais acquis les réflexes debase. Il arrive que beaucoup sedécouragent et renoncentavant d’arriver au bout de leurformation. C’est le cas en parti-culier dans la soudure. «Le gestedu soudeur est très complexe,d’autant plus difficile à acquérirque les élèves, en soudant nor-malement, ne peuvent pasprendre des repères visuels àcause des étincelles et des pous-sières », explique Daniel Melletd’Huart, chef de projet à l’unitéde veille sur la réalité virtuelle del’AFPA (Association nationalepour la formation profession-nelle des adultes). Celle-ci adonc mis au point un poste desoudage virtuel qui facilitel’acquisition de ce geste profes-sionnel et la concentration de

l’élève. « Il ne s’agit en aucunefaçon de remplacer les forma-tions existantes, mais de lescompléter », souligne DanielMellet d’Huart. Les élèves travaillent avec unetorche désactivée (procédésMAG ou SAEE), sans étincelles,dirigée vers un écran où estfigurée la plaque à souder. Ilspeuvent ainsi voir la formationdu cordon de soudure surl’écran. Au cours des stages, l’exerciceest renouvelé régulièrement, encomplément d’autres exercicesen situation réelle. Le poste misau point par l’AFPA est commer-cialisé par la société Communi-cation et Systèmes et déjà opé-rationnel dans une dizaine decentres en France.

Simulation de conduite

L’application de la réalité vir-tuelle est déjà pratiquée depuisde longues années dans lescompagnies aériennes ou ferro-viaires pour la formation deleurs pilotes et machinistes surdes simulateurs de conduite. Ces derniers permettent deconfronter les élèves à dessituations à risques, sans dan-ger pour eux-mêmes et sansbris de matériel. De tels simula-teurs mettent en œuvre unecabine de pilotage associée à unou plusieurs écrans, ainsi que depuissants logiciels temps réel etdes manettes de pilotage oujoysticks. L’INRS ne pouvait res-ter indifférent à ces outils de for-mation. L’institut est en contactavec ses homologues (4) polo-nais, le CIOP, et finlandais, leFIOH, à propos d’un simulateurde conduite des chariots éléva-teurs. L'instruction est pilotéepar Pierre Lemerle, ingénieur àl’INRS (5). « Les caristes manientdes engins coûteux dans unenvironnement périlleux ; leurformation est un souci impor-

tant pour les entreprises», dit-il. Un poste de simulation, compre-nant une cabine de chariot et ungrand écran figurant son envi-ronnement en temps réel, pour-rait être développé. L’opérateuragirait sur celui-ci en maniantson volant. L’enjeu serait dereconstituer un modèle phy-sique proche de la réalité et d’y intégrer des situations dedanger…En ingénierie industrielle, laconception des lignes de mon-tage commence à faire usagede la réalité virtuelle associée àdes interfaces à retour d’effort.Le groupe PSA Peugeot Citroënest très engagé dans cette voie(voir encadré), de même que leLaboratoire d’intégration dessystèmes et des technologies(LIST) du CEA. Ce dernier a conçuavec Renault un poste virtuel demontage et démontage d’unlève-vitre électrique sur une por-tière de voiture. Dans cette ins-tallation pilote, l’opérateur estéquipé d’un cybercasque qui luipermet de s’immerger dansl’image qui lui fait face.

Ergonomie et montage

Il simule les opérations de mon-tage et démontage avec deuxorganes haptiques (à retourd’effort) à 6 degrés de liberté.Pendant ce temps, des camérascapturent son mouvement aumoyen de cibles réfléchissantesfixées sur son corps. Le systèmedétecte les collisions virtuellesentre les objets, en mesure laforce et en restitue même leson. Les bureaux d’études n’ontpas besoin d’atteindre ce niveaude sophistication pour optimiserun poste de travail. Ils peuvent

recourir à des mannequinsnumériques qui figurent desopérateurs ou des utilisateurs et les intégrer à leur projet. Ilspeuvent ainsi évaluer la visibi-lité, l’accessibilité et l’encombre-ment sur un poste de travail oudans une voiture. De grands éditeurs de logiciels, tels queDassault Systèmes ou UGS,conçoivent de tels mannequinspour les besoins des concepteurs.

Maintenance et analyse

L’INRS évalue un mannequin decette sorte pour améliorer, avecl'association technique du com-merce et de la distribution (Per-ifem), les postes d'encaissement.«La tâche n’est pas aisée car cesmannequins gèrent essentiel-lement des contraintes angu-laires et ne prennent pas encompte les efforts musculaires »,reconnaît Jacques Marsot.La réalité virtuelle et, mieux que ça, la réalité «augmentée»contribuent à améliorer la main-tenance des installations. Onappelle réalité « augmentée »une information qui enrichit laréalité au lieu de seulement lasimuler. « Parmi ses applicationspotentielles, un technicien demaintenance peut diriger unPDA vers la partie d’une machine

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« Pas question d’employer la CAO comme un gadget en faisant du copier-coller sur un stage

conventionnel », prévient Jacques Marsot.

Des boules réfléchissantes,fixées sur le gant porté par

l’utilisateur, renseignent le sys-tème de traitement des don-nées sur les mouvements des

mains de l’opérateur. En retour,l’interface sensori-motrice va

fournir un stimulus analogue àcelui de la situation réelle.

4. CIOP = Centralny Instytut OchronyPracy (institut central pour la protection du travail, Pologne)http://www.ciop.waw.plFIOH = Finnish Institute of Occupatio-nal Health (institut finnois de santéau travail, Finlande)http://www.occuphealth.fi5. Pierre Lemerle est responsable dulaboratoire MSMP, modélisation dessystèmes mécaniques et de préven-tion, du département ingénierie deséquipements de travail à l’INRS.

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Qui fait quoi dans le monde

virtuel

De nombreux pôles de recherche français travail-

lent sur la réalité virtuelle. Ils sont regroupés au sein de la «Plate-forme françaisede réalité virtuelle – Bureaud’étude du futur» (PERF-RV),un projet national né en 2000et soutenu par le ministère dela Recherche, avec pour objec-tif de promouvoir la réalité virtuelle et les systèmes immersifs dans les applica-tions industrielles (automobi-le, défense, recherche pétro-lière). Il a concouru à la miseau point de périphériques intégrant le geste et le retourd’effort, l’amélioration de l’ergonomie et de l’interfacehomme-machine, le travail coopératif sur un même projet entre des utilisateursdistants… Il a aussi participé à la mise sur orbite de jeunesentreprises comme Haption,issue du CEA et spécialiséedans la fabrication de bras à retour d’effort. Parmi les acteurs de la plate-forme figurent le Commissariat àl’énergie atomique, l’Institutfrançais du pétrole, l’Institutnational de la recherche en informatique et en automa-tique, l’école des Mines de Paris, l’école nationale supérieure des arts et métiers,l’Aérospatiale, Renault, PSAPeugeot Citroën, DassaultAviation, EADS, l’AFPA, EDF,Clarté et, bien sûr, l’INRS. PERF-RV a dressé le bilan deses travaux en octobre 2004.Le relais a été pris par le réseau d’excellence Intuition,qui rassemble environ 70 partenaires européens.

Sites web:www.perfrv.org www.intuition-eunetwork.net

qui l’intéresse et obtenir instan-tanément toutes les informa-tions utiles sur cette partie… etrien que cela, note Jacques Marsot. Il évite d’avoir à cher-cher ces informations dans unegrosse masse de documentspapier ou sur un CD-Rom ».Dans son établissement deSophia-Antipolis, le Centrescientifique et technique dubâtiment (CSTB) applique lestechniques de la réalité vir-tuelle à l’analyse environne-mentale (bruit, lumière, vent…).Une salle avec écran hémi-sphérique de 12 mètres et desfauteuils d’immersion acous-tique qui reproduisent lesbruits d’ambiance ont été ins-tallés. Les personnes concer-nées par un projet d’équipe-ment peuvent en vérifier aupréalable les conséquences,qu’il s’agisse de l’éclairage nocturne, des courants d’air ou du bruit ambiant. « Notreinstallation reproduit par anti-cipation le confort climatiqued’un grand équipement et per-met d’en corriger les défauts »,explique Jacques Martin, experten réalité virtuelle au CSTB. Onretrouve dans cette applicationce qui fait l’un des principauxintérêts de la réalité virtuelle :la faculté de détecter les incon-vénients d’un projet avant qu’ilne soit trop tard.

André Larané

L’acquisition et le traitement des données concernant les mouvements de l’opérateur sont confiés à une séried’outils informatiques.

Étude d’un poste de caissière.

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Le groupe PSA Peugeot Citroën s’intéresse depuis plusieurs années

aux applications de la réalité virtuelle. En mars 2002, il a installé à titre expéri-mental une plate-forme immersive dénommée Move près de son usine d’assemblage de Poissy, destinée à repré-senter en relief des modèles de véhiculesou des éléments de lignes d’assemblage.L’installation a été testée par des stylisteset des designers, pour juger de la qualitéesthétique d’un futur véhicule, aussi bienque par des ergonomes, pour juger del’ergonomie d’un poste de travail ou d’un élément de véhicule.Fort de l’expérience acquise, le construc-teur a installé une nouvelle cabine d’immersion dans son centre de res-sources en conception, baptisé ADN(Automotive design network) et inauguré

en octobre 2004 à Vélizy-Villacoublay. Cecentre dispose en sus d’une table de réali-té virtuelle avec systèmes à retour d’effortet d’un écran stéréoscopique destiné à vi-sualiser des véhicules à l’échelle 1. « Noustravaillons quotidiennement pour deuxfamilles d’applications, la conception denouveaux modèles de véhicules et la miseau point des nouvelles lignes de montage »,explique Jean Lorisson, responsable de laréalité virtuelle chez PSA Peugeot Citroën.Six ingénieurs gèrent les équipements dela plate-forme. Ils reçoivent les donnéesnumériques des bureaux d’études et desbureaux de style et les convertissent enmaquettes virtuelles visibles sur l’un oul’autre des équipements de l’ADN. Lesconcepteurs peuvent ensuite considérer lerésultat de leur travail soit sur écran, soiten cabine d’immersion. Sur les nouveaux

modèles de véhicules, ils peuvent parexemple vérifier l’accessibilité de la boîteà gants. « La représentation virtuelle des modèles constitue pour nous une alternative économique aux maquettesen résine, avec l’avantage d’une mise enœuvre très rapide », note Jean Lorisson.Concernant les lignes de montage, les préparateurs peuvent simuler la faisabilitéet la pénibilité des opérations. «Nousorientons nos recherches vers les techno-logies dites haptiques, qui permettent de simuler le retour d’effort, précise JeanLorisson. Ces technologies nous seront très utiles en particulier pour optimiser lespostes de travail en reproduisant les gestesdes opérateurs de façon réaliste. » Leconstructeur coopère sur les technologieshaptiques avec les chercheurs du CEA etde l’école des Mines.

La réalité virtuelle appliquée à la construction automobile

L’INRS a engagé une réflexion sur l’apport de la réalité virtuelle, du moins des éléments y participant,au champ de la prévention. La conception sûre d’équipements et la formation à la prévention des risques professionnels notamment peuvent en bénéficier.

L’action de l’INRS

Que peut-on attendre de ces techniques ? Leur emploi ne peut-il présenter un risque pour l’homme ?Dans la mesure où la RV implique une interaction homme-RV, il est possible d’envisager une influence de l’environnement virtuel et de ses supports techniques sur l’utilisateur. Une analysebibliographique sur l’influence des environnements virtuels a relevé différents types de symptômes : mal des simulateurs,troubles de la vision, charge mentale, désocialisation… Il faut effectivement mieux connaître les conséquences physiologiqueset comportementales qui peuvent découler de la dissociationréel/virtuel ou de la nature des informations sensorielles auxquelles est soumis l’utilisateur immergé. À l’heure actuelle, divers organismes sont engagés dans ces voies dont les résultatspourront encore améliorer la pertinence des systèmes de réalitévirtuelle.

Pensez-vous qu’il faille encore démystifier les applica-tions de la réalité virtuelle ?Pendant des années, la RV a été associée à l’univers du jeu ou plussimplement à la simulation de conduite ou de pilotage. Elle ad’abord été accaparée par les spécialistes des sciences de l’infor-mation. Mais elle suscite aujourd’hui un engouement croissant de

la part des sciences du comportement et des spécialistes enpsychologie ergonomique. Ceux-ci perçoivent de nouvelles ma-nières de conduire des études expérimentales sur la sensori-motricité par exemple. Par ailleurs les spécialistes de la préventiondes risques professionnels ont perçu l’intérêt que présentaient cesoutils pour améliorer et mieux intégrer la prévention des risques.Pour l’instant, ces applications en sont encore pour la plupart austade du laboratoire : expériences sur la manutention ou le travailen hauteur, analyse de risque, application de mesures de préven-tion sur des installations industrielles, recherches sur le comporte-ment sensorimoteur et cognitif de l’homme, analyse de situationsde travail…

Quelles sont les prochaines étapes de vos propres travaux?L’organisation d’un chantier BTP, l’intervention en présence derisque biologique, la simulation de conduite d’engins de chantiersont en attente d’outils d’assistance et de simulation. Et, pour quedes applications pratiques de ces techniques soient mises en œuvresur le terrain, il nous faudra nous appuyer sur nos contacts privilé-giés dans le monde industriel aussi bien qu’activer les réseaux d’acteurs de la prévention tant sur le plan national qu’européen.D’après J. Ciccotelli et J. Marsot, IET, INRS.

C omment monter un pro-jet industriel en ayant entête une vision globale et

précise de ce que sera l’activitésur le site de production ? À laquestion que tous les entre-preneurs se posent, Novalys apporte une réponse virtuelle…Mais pas si virtuelle que ça.Grâce à des techniques desimulation des processus deproduction par reproductionfidèle et dynamique, l’entre-prise étudie, en amont du pro-jet, la situation de travail telleque prédéfinie. La méthode : utiliser la 3D pourmettre virtuellement en jeu les outils, les hommes et lesmachines, puis former, enquelque sorte, un calque de la

situation réelle présupposée.« Simuler, c’est imposer les ques-tions du travail réel, commenteBertrand Evain, responsabledes activités simulation/ergo-nomie chez Novalys. Pour êtrejuste, la simulation englobe leproduit, le processus et les res-sources. Nous travaillons à par-tir d’une bibliothèque outils/machines et, au besoin, en colla-boration avec les fournisseurs.L’opérateur, quant à lui, estreprésenté par un mannequindont toutes les articulationssont paramétrables. Cela per-met d’adapter certaines situa-tions à des cas particuliers,comme celui des personnes enrestriction d’aptitude. » Le logi-ciel qu’utilise Novalys va mêmejusqu’à l’analyse du champ devision, monoculaire ou binocu-laire, des « opérateurs virtuels ».

Tester ses propressolutions

Il intègre les normes ergono-miques et établit des analysesde confort. « Un code couleurfort permet d’évaluer l’exposi-tion à un risque physique enfonction des postures, des mou-vements, de leur intensité et deleur fréquence. Un récent travailpour un équipementier auto-mobile nous a permis, par exem-ple, de montrer que l’outil utilisé

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L’intégration des aspects santé et sécurité au travailen amont de tout projet industriel présage de sa bonne santé future. En simulant les processus de production, l’entreprise Novalys offre aux entrepreneurs une visualisation a priori des activités, des contraintes et des risques pouvantêtre rencontrés aux différents postes de travail. Ses objectifs : donner une vision anticipatoire du projet pour bien faire du premier coup.

Novalys :simuler et sécuriser

Activité : simulation 3D/ergonomie

Domaines d’intervention :• les avant-projets (sécurité intégrée, communication, sensibilisation,

formation, ergonomie prévisionnelle, prototypage numérique, fiche de poste 3D) ;

• les projets de vie série (réaménagement, recherche d’amélioration, investissements).

Secteurs d’activité : automobile, équipementier, textile, industrie pharmaceutique, manufacturière, sidérurgie…

Travail en 3D

Simuler pour mieux se porter

générait des situations d’in-confort et un risque de troubles musculo-squelettiques. Nousavons proposé un nouvel outil,mieux adapté au poste. »La simulation est un outil deglobalisation qui n’est spéci-fique ni à la sécurité ni à l’ergo-nomie. Flux, process, temps decycle, ergonomie, sécurité, fai-sabilité, implantation, pointsdur : tous les aspects sont pas-sés au crible. « Le roboticiencomme le responsable qualité yvoient leur intérêt, ce qui faciliteles échanges. En outre, l’optimi-sation a priori du process auraun impact certain sur la produc-tivité. » Car c’est bien là queNovalys souhaite atteindre sonobjectif : faciliter le dialogue etla collaboration à tous niveauxde manière à ce que les difficul-tés soient anticipées dans la

concertation. Cette démarcheintervient principalement lorsde l’avant-projet, lorsqu’uneentreprise souhaite faire évoluerou corriger des situations de tra-vail, ainsi que dans le cadre de larédaction de fiches de poste 3D.Bien concevoir, dans le souci desaspects sécurité et conditions detravail, est un atout si l’on neveut pas avoir à traiter «au fil del’eau » des dysfonctionnementsplus ou moins graves auxquelspersonne n’aurait pensé.Novalys souhaite faire de la 3Dun outil pédagogique. Concrète-ment, il détermine deux niveauxd’action. Le client donne le plantel qu’il l’a pensé, et la simula-tion permet de relever les pointstechniquement inadaptés – unevisseuse placée à 1,70 mètre dusol par exemple – ainsi que lespoints d’organisation générale.

Sur ces bases, Novalys affine leprojet, présente un préprojetaux responsables fabrication etméthodes, puis, après concerta-tion, aux membres du CHSCT.En fonction des contraintesobservées, les solutions préconi-sées sont variables – du nouveloutil à une réorganisation de la

tâche – et sont à leur tour tes-tées par simulation. C’est peut-être là le point essentiel et leplus pédagogique en vue d’uneacceptation franche et massivepar les salariés des aménage-ments proposés.

Grégory Brasseur

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