LES MÉCANISMES PHYSIOLOGIQUES RESPONSABLES DE L ...
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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT
Année 2017
LES MÉCANISMES PHYSIOLOGIQUES
RESPONSABLES DE L’HOMOCHROMIE
VARIABLE DANS LE RÈGNE ANIMAL
THÈSE
Pour le
DOCTORAT VÉTÉRINAIRE
Présentée et soutenue publiquement devant
LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL
par
Pierre-Louis FISZMAN
Né le 31 décembre 1991 à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines)
JURY
Président : Pr
Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL
Membres
Directeur : Dr PILOT-STORCK Fanny
Maître de conférences à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort
Assesseur : Dr GILBERT Caroline
Maître de conférences à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort
Liste des membres du corps enseignant
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* responsable d’unité pédagogique
REMERCIEMENTS
Au Président du jury
Professeur à la Faculté de Médecine de Créteil,
Qui a bien voulu nous faire l’honneur de présider notre Jury de Thèse.
Hommage respectueux.
Au Docteur Fanny Pilot-Storck,
Maître de Conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
Pour avoir accepté la direction de cette thèse,
Pour le temps passé à la correction de ce manuscrit et ses précieux conseils,
Pour sa disponibilité, ses encouragements et sa gentillesse,
Sincères remerciements.
Au Docteur Caroline Gilbert,
Maître de Conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
Qui nous a fait l’honneur d’accepter d’être l’assesseur de cette thèse,
Sincères remerciements.
À ma famille et à mes amis,
Merci pour tout !
1
SOMMAIRE
LISTE DES FIGURES ...................................................................................................................................................... 5
LISTE DES TABLEAUX ................................................................................................................................................... 9
TABLE DES ABRÉVIATIONS ........................................................................................................................................ 11
INTRODUCTION ......................................................................................................................................................... 13
PREMIÈRE PARTIE : PRÉSENTATION DES STRUCTURES INTERVENANT DANS L’HOMOCHROMIE VARIABLE ............... 15
1. Quelques définitions ........................................................................................................................................... 15
1.1. Les différents types d’homochromie ........................................................................................................ 15
1.2. L’homochromie variable ........................................................................................................................... 16
2. Présentation phylogénétique des espèces douées d’homochromie variable .................................................... 16
2.1. Espèces connues et étudiées pour leur capacité d’homochromie variable .............................................. 16
2.2. Principales fonctions du changement de couleur ..................................................................................... 19
2.2.1. Intérêts chez les squamates ................................................................................................................................... 20
2.2.2. Intérêts chez les amphibiens .................................................................................................................................. 21
2.2.3. Intérêts chez les céphalopodes .............................................................................................................................. 22
2.2.4. Intérêts chez les poissons ....................................................................................................................................... 24
2.2.5. Intérêts chez les crustacés ..................................................................................................................................... 25
3. Le tégument, support de l’homochromie variable ............................................................................................. 25
3.1. L’épiderme ................................................................................................................................................ 26
3.2. Le derme ................................................................................................................................................... 26
4. Description des différents chromatophores ....................................................................................................... 26
4.1. Classification des chromatophores ........................................................................................................... 28
4.1.1. Mélanophore ......................................................................................................................................................... 28
4.1.2. Iridophore .............................................................................................................................................................. 30
4.1.3. Leucophore ............................................................................................................................................................ 32
2
4.1.4. Lipophore .............................................................................................................................................................. 33
4.1.5. Cyanophore ........................................................................................................................................................... 35
4.1.6. Chromatophores mixtes ........................................................................................................................................ 36
4.2. Les pigments des chromatophores ........................................................................................................... 36
4.2.1. Mélanines .............................................................................................................................................................. 36
4.2.2. Ommochromes ...................................................................................................................................................... 38
4.2.3. Purines et ptéridines .............................................................................................................................................. 39
4.2.4. Caroténoïdes ......................................................................................................................................................... 40
4.2.5. Pigments bleus ...................................................................................................................................................... 42
4.3. Associations cellulaires ............................................................................................................................. 42
4.3.1. Epidermal Melanin Unit, unité fonctionnelle des mélanophores épidermiques .................................................... 42
4.3.2. Dermal Chromatophore Unit, unité fonctionnelle des chromatophores dermiques .............................................. 43
4.3.3. L’organe chromatophore des céphalopodes ......................................................................................................... 48
DEUXIÈME PARTIE : MÉCANISMES CELLULAIRES RESPONSABLES DES CHANGEMENTS DE COULEURS ....................... 51
1. Coloration pigmentaire et coloration structurelle ............................................................................................. 51
1.1. Description de la synthèse additive et soustractive des couleurs ............................................................ 51
1.2. Biochromes, supports de la couleur pigmentaire ..................................................................................... 51
1.3. Schémochromes, supports de la couleur structurelle .............................................................................. 52
1.3.1. Effet Tyndall .......................................................................................................................................................... 53
1.3.2. Principe d’interférence .......................................................................................................................................... 53
1.3.2.1. Réseau unidimensionnel ............................................................................................................................. 54
1.3.2.2. Réseau tridimensionnel .............................................................................................................................. 55
1.4. Couleur résultant de l’association des différents chromatophores .......................................................... 56
2. Critères d’évaluation de la réponse des chromatophores à un stimulus ........................................................... 57
3. Changement de couleur dit « morphologique » ................................................................................................ 59
4. Changement de couleur dit « physiologique » ................................................................................................... 60
5. Migrations des organites pigmentaires au sein des mélanophores, des lipophores et des cyanophores ................................................................................................................................................................. 60
6. Variations des structures réfléchissantes au sein des iridophores..................................................................... 63
3
6.1. Particularités des iridophores des céphalopodes ..................................................................................... 63
6.2. Particularités des iridophores des caméléons .......................................................................................... 67
TROISIÈME PARTIE : LE CONTRÔLE PHYSIOLOGIQUE, DE L’INTÉGRATION DES STIMULI À LA RÉPONSE
PHYSIQUE.................................................................................................................................................................. 75
1. Intégration des stimuli environnementaux ........................................................................................................ 75
1.1. Rôle de la vision ........................................................................................................................................ 75
1.2. Photorécepteurs cutanés .......................................................................................................................... 75
1.3. Effets de la température ........................................................................................................................... 76
2. Les voies effectrices ............................................................................................................................................ 76
2.1. Le contrôle hormonal ................................................................................................................................ 77
2.1.1. Les hormones des vertébrés .................................................................................................................................. 77
2.1.1.1. Les hormones hypophysaires et épiphysaires ............................................................................................ 77
2.1.1.1.1. Relation entre hypophyse et teintes de l’environnement .......................................................................... 77
2.1.1.1.1.1. La mélanocortine ........................................................................................................................................ 77
2.1.1.1.1.2. Implication de la pars intermedia dans le contrôle des mélanophores ...................................................... 79
2.1.1.1.1.3. Rôle de la mélanocortine dans le contrôle des autres chromatophores .................................................... 80
2.1.1.1.1.4. Rétrocontrôle de l'hypothalamus sur l'hypophyse ..................................................................................... 81
2.1.1.1.1.5. Mécanisme d'action de la mélanocortine sur ses récepteurs ..................................................................... 83
2.1.1.1.1.6. Second messager intracellulaire ................................................................................................................. 83
2.1.1.1.2. Relation entre épiphyse et luminosité de l’environnement ....................................................................... 84
2.1.1.1.2.1. La mélatonine ............................................................................................................................................. 85
2.1.1.1.2.2. Rôle de l’épiphyse ....................................................................................................................................... 86
2.1.1.2. Les hormones surrénaliennes ..................................................................................................................... 87
2.1.1.2.1. Effets des catécholamines sur les chromatophores .................................................................................... 87
2.1.1.2.2. Mécanisme d'action des catécholamines ................................................................................................... 90
2.1.1.2.3. Second messager intracellulaire ................................................................................................................. 91
2.1.2. Les hormones des invertébrés ............................................................................................................................... 91
2.1.3. Contrôle hormonal et conséquences ioniques ....................................................................................................... 92
4
2.2. Le contrôle nerveux .................................................................................................................................. 93
2.2.1. Contrôle nerveux des vertébrés ............................................................................................................................. 93
2.2.2. Contrôle nerveux des invertébrés .......................................................................................................................... 94
2.3. Implication des deux voies de contrôle selon les espèces ........................................................................ 94
2.3.1. Contrôle majoritairement hormonal ou nerveux ................................................................................................... 94
2.3.1.1. Chez les amphibiens ................................................................................................................................... 94
2.3.1.2. Chez les crustacés ....................................................................................................................................... 94
2.3.1.3. Chez les céphalopodes................................................................................................................................ 95
2.3.2. Contrôle mixte ....................................................................................................................................................... 95
2.3.2.1. Chez les poissons téléostéens..................................................................................................................... 95
2.3.2.2. Chez les squamates .................................................................................................................................... 95
3. Activation des protéines motrices dans les chromatophores des vertébrés ..................................................... 96
4. Contrôle physiologique des iridophores, particularités de certaines espèces ................................................... 97
4.1. Chez les caméléons ................................................................................................................................... 97
4.2. Chez les céphalopodes .............................................................................................................................. 98
CONCLUSION........................................................................................................................................................... 101
BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................................................... 103
5
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Exemples d'espèces douées d'homochromie variable. .......................................... 18
Figure 2 : Principaux contextes et facteurs prépondérants dans l'évolution de l'homochromie
variable (d'après Rudh et Qvarnström, 2013). ....................................................................... 19
Figure 3 : Évolution de la couleur d’un caméléon panthère mâle Furcifer pardalis lors d’une
rencontre avec un autre mâle (d'après Teyssier et al., 2015). ............................................... 21
Figure 4 : Grenouilles des champs Rana arvalis pendant la période de reproduction
(Sztatecsny et al., 2012). ....................................................................................................... 22
Figure 5 : Les trois motifs utilisés par les seiches Sepia officinalis pour se camoufler
(Hanlon, 2007)....................................................................................................................... 23
Figure 6 : Seiche Sepia plangon mâle arborant simultanément un motif de séduction vers
une femelle et une coloration trompeuse vers un autre mâle rival (Brown et al., 2012). ..... 24
Figure 7 : Mélanophores d'un têtard Xenopus laevis et d'une grenouille Rana pipiens
(d'après Bagnara et Matsumoto, 2006). ................................................................................. 29
Figure 8 : Iridophores d'une grenouille Rana pipiens, d'un anole Anolis carolinensis et d'une
pieuvre Octopus vulgaris (d'après Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Messenger, 2001 ; Taylor
et Hadley, 1970). ................................................................................................................... 31
Figure 9 : Leucophore et iridophore d'une seiche commune Sepia officinalis (Mäthger et al.,
2009). ..................................................................................................................................... 32
Figure 10 : Érythrophore d'une salamandre cendrée Plethodon cinereus (d'après Bagnara et
Taylor, 1970). ........................................................................................................................ 33
Figure 11 : Xanthophores présents dans le derme d’une grenouille Rana pipiens (d'après
Bagnara, 1966). ..................................................................................................................... 34
Figure 12 : Cyanophores d'un poisson mandarin Synchiropus splendidus (d'après Goda et
Fujii, 1995). ........................................................................................................................... 35
Figure 13 : Biosynthèse de l'eumélanine et de la phéomélanine chez l'homme (Ito et
Wakamatsu, 2011b). .............................................................................................................. 37
Figure 14 : Formule topologique de la xanthommatine (d'après Goodwin, 2014). .............. 38
Figure 15 : Formules topologiques de la guanine, de la sépiaptérine et de la riboflavine
(d'après Bagnara et Hadley, 1973). ....................................................................................... 40
Figure 16 : Formules topologiques d’un carotène et de deux xanthophylles (d'après Bagnara
et Hadley, 1973). ................................................................................................................... 41
6
Figure 17 : Unité fonctionnelle de mélanophores épidermiques chez une grenouille Rana
pipiens observée au microscope optique (d'après Bagnara et Matsumoto, 2006). ................ 43
Figure 18 : Représentation schématique de l'unité fonctionnelle de chromatophores
dermiques chez les amphibiens de l’ordre des anoures (Bagnara et al., 1968). .................... 44
Figure 19 : Représentation schématique de l'unité fonctionnelle de chromatophores
dermiques chez les lézards du genre Anolis (Taylor et Hadley, 1970). ................................ 45
Figure 20 : Coupe transversale de la peau dorsale d'une grenouille Hyla cinerea adaptée à un
environnement clair (×9700) (Bagnara et al., 1968). ............................................................ 46
Figure 21 : Coupe transversale de la peau dorsale d'une grenouille Hyla cinerea adaptée à un
environnement sombre (×7300) (Bagnara et al., 1968). ....................................................... 47
Figure 22 : Représentation schématique de l'organe chromatophore de calmar à l'état rétracté
(d'après Cloney et Florey, 1968) ........................................................................................... 48
Figure 23 : Spectres d’absorption de trois pigments présents dans les lipophores (d'après
Grether et al., 2004). ............................................................................................................. 52
Figure 24 : Phénomènes d'interférences constructives et destructives des ondes
électromagnétiques. ............................................................................................................... 53
Figure 25 : Les différentes dimensions des structures interférentielles, exemple des réseaux
photoniques (d'après Lacour, 2005). ..................................................................................... 54
Figure 26 : Réseau interférentiel unidimensionnel (Lafait et Berthier, 2016). ..................... 55
Figure 27 : Interprétation schématique de la couleur verte des vertébrés, exemple d’une
grenouille verte (d'après Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Grether et al., 2004). .................... 56
Figure 28 : Présentation des cinq états de dispersion pigmentaire dans les mélanophores
selon la méthode de Hogben et Slome (d'après Bagnara et Hadley, 1973 et Darnell et
Rittschof, 2010). .................................................................................................................... 57
Figure 29 : Mesure de la réflectance cutanée de grenouilles du désert Litoria rubella
(Withers, 1995). ..................................................................................................................... 58
Figure 30 : Implication du cytosquelette et des protéines motrices dans la translocation des
mélanosomes chez les téléostéens et les amphibiens (Bagnara et Matsumoto, 2006). ......... 63
Figure 31 : Iridophores de calmar de Californie Doryteuthis opalescens observés à différents
grossissements (DeMartini et al., 2013, 2015). ..................................................................... 64
Figure 32 : Filtre interférentiel unidimensionnel formé par la succession de rubans
lamellaires et d’espaces extracellulaires dans un iridophore de calmar Doryteuthis
opalescens (Tao et al., 2010). ................................................................................................ 65
7
Figure 33 : Effets de l’épaisseur des rubans lamellaires et de la concentration en réflectine
sur la réflectance et la couleur des iridophores (d'après Tao et al., 2010). ........................... 66
Figure 34 : Effets de l’acétylcholine sur la couleur des iridophores de calmars Doryteuthis
opalescens (d'après Tao et al., 2010). ................................................................................... 67
Figure 35 : Coupe transversale de la peau d’un caméléon panthère Furcifer pardalis (d'après
Teyssier et al., 2015). ............................................................................................................ 68
Figure 36 : Modélisation du réseau de nanocristaux de guanine dans les S-iridophores d’un
caméléon Furcifer pardalis (d'après Teyssier et al., 2015). .................................................. 69
Figure 37 : Réseau de nanocristaux de guanine dans les S-iridophores à l’état de repos et à
l’état stimulé (d'après Teyssier et al., 2015). ......................................................................... 70
Figure 38 : Variation de la couleur de la peau d’un caméléon Furcifer pardalis en fonction
de la distance entre les cristaux de guanine dans les S-iridophores (d'après Teyssier et al.,
2015). ..................................................................................................................................... 71
Figure 39 : Évolution de la couleur d’un S-iridophore de caméléon Furcifer pardalis à l’état
stimulé soumis à une solution hypertonique (d'après Teyssier et al., 2015). ........................ 72
Figure 40 : Séquence heptapeptidique commune entre de l’α-MSH, la β-MSH et l'ACTH
(d'après Bagnara et Hadley, 1973). ....................................................................................... 78
Figure 41 : Régulation de la sécrétion hypophysaire de MSH par l'hypothalamus chez les
amphibiens (d'après Bagnara et Hadley, 1973). .................................................................... 82
Figure 42 : Réponse des mélanophores de têtards de Xenopus laevis à des variations de
luminosité, exprimée selon la méthode de Hogben et Slome (d'après Bagnara et Hadley,
1973). ..................................................................................................................................... 85
Figure 43 : Formule topologique de la mélatonine (Hardeland et al., 2006). ....................... 85
Figure 44 : Effet de l'amplexus et d'une injection d'adrénaline sur la couleur d'une grenouille
Litoria wilcoxii mâle (Kindermann et al., 2014). .................................................................. 88
Figure 45 : Action de l’adrénaline sur l’état des mélanophores de Xenopus laevis. ............. 89
Figure 46 : Transport bidirectionnel des mélanosomes le long des microtubules (d'après
Reese et Haimo, 2000). ......................................................................................................... 97
Figure 47 : Mécanismes intracellulaires induits par l'acétylcholine dans les iridophores de
céphalopodes (DeMartini et al., 2013). ................................................................................. 99
8
9
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Classification des chromatophores (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Schartl et al.,
2016). ..................................................................................................................................... 27
10
11
TABLE DES ABRÉVIATIONS
EMU : Unité fonctionnelle de mélanophores épidermiques (Epidermal Mélanophore Unit).
DCU : Unité fonctionnelle de chromatophores dermiques (Dermal Chromatophore Unit).
MSH : Mélanocortine, hormone mélanotrope (Melanocyte Stimulating Hormone).
MCH : Récepteur membranaire à la mélanocortine (Melanin concentrating Hormone).
ACTH : Corticotropine (Adenocorticotropic Hormone).
ATP : Adénosine triphosphate.
AMPc : Adénosine 3',5'-monophosphate cyclique.
RPDH : Hormone de dispersion des pigments rouges des crustacés (Red Pigment
Dispersing Hormone).
RPCH : Hormone d’agrégation des pigments rouges des crustacés (Red Pigment
Concentrating Hormone).
PK : Protéine kinase.
PKA : Protéine kinase AMPc-dépendante.
PKC : Protéine kinase calcium-dépendante.
PP : Protéine phosphatase.
PP2A : Protéine phosphatase 2A.
ACh : Acétylcholine.
DAG : Diacylglycérol.
PLC : Phospholipase C.
PIP2 : Phosphatidylinositol biphosphate.
IP3 : Inositol triphosphate.
CaM : Calmoduline.
CIE : Commission internationale de l’éclairage.
12
13
INTRODUCTION
L’homochromie variable désigne la capacité d’un animal à changer de couleur rapidement
et réversiblement en quelques secondes à quelques heures. L’intérêt scientifique pour les
changements de couleur a débuté il y a plus de deux mille ans et l’une des premières traces
écrites traite des caméléons et date de l’Histoire Des Animaux, œuvre rédigée par Aristote
en 350 av. J.-C. L’auteur explique alors que « les changements de couleur du caméléon se
produisent quand l'animal se gonfle. Il a parfois la couleur d'un noir assez rapproché du
crocodile ; parfois il a la couleur jaune d'un lézard, mêlée à du noir, comme dans la
panthère » (Aristote, 1883).
L’homochromie variable est étonnamment répandue dans le règne animal. Elle a
évolué dans de nombreuses lignées de vertébrés et d'invertébrés ectothermes, y compris les
poissons, les amphibiens, les squamates, les crustacés et les céphalopodes. Cette aptitude
permet à l’animal de se camoufler activement dans des environnements différents. Depuis
peu, les changements de couleur sont aussi étudiés pour leurs autres rôles, par exemple pour
la communication entre les individus d’une même espèce ou la thermorégulation (Ligon et
Mccartney, 2016).
Les changements de couleur de certaines espèces se limitent principalement à des
variations d’intensité et de nuances (par exemple de brun clair à foncé), tandis que d'autres
subissent des changements chromatiques remarquables. Les motifs cutanés sont parfois
complètement modifiés (Bagnara et Matsumoto, 2006).
L’objectif de cette thèse est de présenter les différents mécanismes physiologiques
intervenant lors des changements de couleur des espèces douées d’homochromie variable.
Dans une première partie nous traiterons des structures anatomiques, cellulaires et
moléculaires qui participent à la couleur tégumentaire de ces espèces. Nous nous
intéresserons dans une deuxième partie aux mécanismes physiques et biologiques qui
permettent aux animaux de changer leurs couleurs de façon réversible. Nous développerons
dans une troisième partie les contrôles physiologiques qui participent aux changements de
couleur ainsi que le degré d’implication du système hormonal et du système nerveux parmi
les différents clades.
14
15
PREMIÈRE PARTIE : PRÉSENTATION DES
STRUCTURES INTERVENANT DANS
L’HOMOCHROMIE VARIABLE
1. Quelques définitions
1.1. Les différents types d’homochromie
L’homochromie est l’aptitude d’un animal à harmoniser ses couleurs avec celles de son
environnement, de façon temporaire ou permanente. Lorsqu’elle permet à l’animal de se
dissimuler dans son milieu d’origine et de passer inaperçu aux yeux de ses prédateurs ou de
ses proies, la coloration adoptée est dite cryptique. Les couleurs et les motifs peuvent aussi
intervenir dans la thermorégulation, les interactions interspécifiques et la communication
intraspécifique (Larousse, 2016).
L’homochromie est à différencier du mimétisme vrai qui correspond à la
ressemblance extérieure et généralement permanente entre deux espèces appartenant à des
clades plus ou moins éloignés. Il existe trois catégories majeures de mimétisme. Le
mimétisme est dit batésien lorsqu’une espèce inoffensive adopte l’apparence physique et les
couleurs d’une espèce nocive. Le mimétisme mullérien caractérise la ressemblance entre
deux espèces nocives. Enfin, le mimétisme est dit mertensien lorsqu’une espèce mortelle
pour ses prédateurs imite une espèce moins dangereuse. Leurs prédateurs apprennent ainsi à
reconnaître les couleurs d’avertissement et évitent les deux espèces semblables (Larousse,
1976).
Il existe plusieurs types d’homochromie. Un animal peut évoluer sur un support de
teinte similaire à la sienne. Cette homochromie est dite simple ou passive. C’est le cas par
exemple de la majorité des insectes qui arborent une teinte dominante verte, similaire à celle
des herbes et des feuillages. Les animaux sauvages vivant dans les déserts présentent
fréquemment une couleur isabelle qui rappelle la teinte des sables, variant du jaune pâle au
jaune orangé. Les poissons d’eau douce sont généralement plus foncés lorsqu’ils évoluent
dans des étangs à fond vaseux que dans des eaux claires. La faune des neiges est aussi un
exemple d’homochromie passive. Le faucon gerfaut (Falco rusticolus), l’ours blanc (Ursus
maritimus) et le lièvre arctique (Lepus arcticus) sont des animaux gardant une couleur
blanche toute leur vie. Celle-ci leur permet de se dissimuler dans des environnements
couverts de neige et de glace quel que soit le mois de l’année. Cependant, lorsqu’un animal
présente un pelage blanc en hiver mais prend une coloration plus foncée le reste de l’année,
on parle d’homochromie saisonnière. C’est le cas de l’hermine (Mustela erminea), du
renard arctique (Vulpes lagopus), ou encore du lièvre variable (Lepus timidus) (Larousse,
2016, 1976).
Certains mollusques carnassiers appartenant à l’ordre Nudibranchia vivent sur des
éponges de couleurs vives et s’en nourrissent. Ces animaux absorbent avec leur nourriture
des substances colorantes qui se répandent dans leur organisme. Ils arborent alors les mêmes
16
couleurs dans leur tégument, mais aussi dans leur masse viscérale. Cette homochromie
passive, dite « nutriciale », a été décrite par le biologiste Lucien Cuénot (Larousse, 1976).
D’autres espèces animales peuvent changer la couleur de leur tégument en un laps de
temps très réduit, en quelques secondes à quelques minutes. Cette homochromie est dite
changeante, active ou encore variable (Larousse, 2016 ; Mills et Marchant-Forde, 2010).
1.2. L’homochromie variable
L’homochromie variable se caractérise par l’aptitude d’un animal à changer la couleur de
son tégument de manière réversible et en un laps de temps court de quelques secondes à
quelques heures en réaction à des stimuli externes. Elle nécessite la présence de cellules
pigmentaires appelées chromatophores. Celles-ci sont présentes chez la plupart des
amphibiens, des poissons osseux, des squamates, des céphalopodes et des crustacés
(Larousse, 2016, 1976).
2. Présentation phylogénétique des espèces douées d’homochromie
variable
2.1. Espèces connues et étudiées pour leur capacité d’homochromie variable
Il existe plusieurs groupes d’espèces capables de modifier leur couleur à la fois chez les
vertébrés et les invertébrés. Cinq grands clades phylogénétiques regroupent la majorité des
espèces douées d’homochromie variable. Parmi l’embranchement des vertébrés, trois
classes rassemblent ces espèces : les poissons osseux, les amphibiens et les squamates.
Parmi les invertébrés, les crustacés et les céphalopodes sont les deux clades qui regroupent
la majorité des espèces capables de modifier leur apparence. Les crustacés appartiennent à
l’embranchement des arthropodes alors que les céphalopodes appartiennent à
l’embranchement des mollusques (Lecointre et LeGuyader, 2006).
Les squamates forment un ordre regroupant les reptiles à écailles qui muent
régulièrement. Cet ordre comprend les geckos, les lézards, les serpents, les iguanes et les
caméléons. Certains lézards tels que l’anole vert Anolis carolinensis ou les iguanes tels que
l’agame barbu Pogona vitticeps sont bien étudiés pour leur capacité d’homochromie
variable (Smith et al., 2016 ; Taylor et Hadley, 1970). La famille des Chameleonidae
regroupe des reptiles qui arborent de nombreuses couleurs dont plus de 200 espèces de
caméléons connus pour leur capacité remarquable à changer de couleur en quelques minutes
seulement. Certaines espèces font l’objet d’animaux de compagnie, telles que le caméléon
panthère Furcifer pardalis ou encore le caméléon casqué du Yémen Chamaeleo calyptratus
(Teyssier et al., 2015).
Les poissons osseux ou ostéichtyens regroupent aussi de nombreuses espèces
capables de modifier leur apparence mais de façon moins spectaculaire que les reptiles.
Certaines espèces telles que l’Oryzias latipes, l’Odontobutis obscura, l’Oreochromis
17
niloticus et d’autres encore peuvent s’assombrir ou s’éclaircir en quelques heures et
présentent parfois des variations de teintes (Fujii, 2000 ; Goda et al., 2013).
Les amphibiens forment une classe de vertébrés tétrapodes non-amniotes. Ils
débutent généralement leur vie sous la forme d’une larve aquatique, le têtard, qui se
métamorphose plus tard en forme adulte définitive. Selon les espèces, c’est la larve ou
l’adulte qui peut changer de couleur (Bagnara et Hadley, 1973 ; Bagnara et Matsumoto,
2006). Les têtards peuvent assombrir ou éclaircir leur tégument. La forme adulte peut en
plus changer de couleur, parfois de façon spectaculaire, en passant du marron foncé au bleu
éclatant pour la grenouille des champs Rana arvalis ou au jaune vif pour l’anoure Litoria
wilcoxii (Kindermann et al., 2014 ; Sztatecsny et al., 2012).
Les crustacés regroupent des animaux qui sont pour la plupart aquatiques et qui
possèdent un exosquelette. Des espèces de crabes et de crevettes peuvent changer de teintes
en quelques minutes à quelques heures. Le crabe vert Carcinus maenas et la crevette
Palaemonetes vulgaris sont deux exemples de crustacés pouvant modifier leur teinte
plusieurs fois par jour (Brown, 1935 ; Stevens, 2016).
Les céphalopodes forment une classe appartenant à l’embranchement des
mollusques. La sous-classe Nautiloidea comprend des animaux qui se reconnaissent à leur
coquille externe protégeant le corps de l’animal. La présence de la coquille est corrélée à
l’absence de développement de structures anatomiques à la base de l’homochromie variable
chez les nautiloïdes. La sous-classe Coleoidea regroupe un très large éventail d’espèces
douées d’homochromie variable. Les principaux ordres sont les Teuthida, appelés
couramment calmars, les Sepiida, connus principalement sous le nom de seiches, et les
Octopoda, ordre désignant l’ensemble des pieuvres. Les animaux des deux premiers ordres
appartiennent au super-ordre des Décapodiformes car ils sont pourvus de huit bras et deux
tentacules. L’ordre des Octopoda appartient au super-ordre des Octopodiformes, les espèces
qu’il contient ont uniquement huit bras (Larousse, 2016, 1976). Les seiches, les pieuvres et
les calmars sont les invertébrés qui modifient leur apparence de la façon la plus
spectaculaire, jusqu’à plusieurs fois par seconde (Mäthger et al., 2009 ; Tao et al., 2010).
Certaines espèces douées d’homochromie variable n’appartiennent pas à l’un de ces
cinq groupes et sont des cas isolés au sein de leur clade (Umbers et al., 2014). Par exemple,
l’araignée Misumena vatia peut modifier réversiblement sa couleur du jaune pâle au noir en
quelques jours seulement (Théry et Casas, 2009). Certains insectes coléoptères sont
capables de changer de couleur en moins d’une minute. La casside dorée Charidotella
sexpunctata bicolor perd sa couleur dorée lorsqu’elle est dérangée et devient vert, bleu ou
parfois violet (Jolivet, 1992). Cependant ces espèces sont encore peu étudiées et les
mécanismes physiologiques intervenant dans leur changement de couleur sont mal compris
(Umbers et al., 2014). Ces exceptions ne seront donc pas développées dans cette thèse.
La figure 1 présente plusieurs exemples d’espèces douées d’homochromie variable.
18
Figure 1 : Exemples d'espèces douées d'homochromie variable.
(a) Hanlon, 2007 ; (b) Mäthger et al., 2003 ; (e) Rudh et Qvarnström, 2013 ; (f) Smith et al., 2016 ;
(d) Teyssier et al., 2015 ; (c) et (g) Umbers et al., 2014
En (a), pieuvre Octopus vulgaris réagissant à la vue d’un prédateur. En (b), variations chromatiques des bandes réfléchissantes d’un poisson Pentapodus paradiseus.
En (c), passage de la phase claire à la phase sombre d’un crabe Ocypode ceratophthalmus. En (d), changement de couleur d’un caméléon Furcifer pardalis lors de la rencontre avec un autre mâle.
En (e), éclaircissement de la peau d’un grenouille Bokermannohyla alvarengai exposée à la lumière. En (f), évolution de la couleur d’un lézard Pogona vitticeps lorsque la température de son environnement
augmente de 15°C à 40°C. En (g), différence entre les phases rouge et dorée d’un coléoptère Charidotella egregia.
0 s 0,3 s 2,0 s
a
b c
d e
f g
0 s
19
2.2. Principales fonctions du changement de couleur
L’homochromie variable est une aptitude qui peut intervenir lors d’interactions entre proie
et prédateur, lors de comportements relatifs à la reproduction (parade nuptiale, territorialité,
intimidation et concurrence entre deux individus), ou encore lors de variations de
température ou d’ensoleillement du milieu. Les trois fonctions les plus importantes sont le
camouflage, la communication et la thermorégulation (Ligon et Mccartney, 2016 ; Stuart-
Fox et Moussalli, 2009). La figure 2 présente les différents intérêts de l’homochromie
variable.
Figure 2 : Principaux contextes et facteurs prépondérants dans l'évolution de l'homochromie variable
(d'après Rudh et Qvarnström, 2013).
Les changements de couleur sont majoritairement utilisés par les animaux pour
imiter leur environnement. Ces animaux peuvent employer différentes stratégies de
camouflage afin d’échapper à la vue de leurs prédateurs ou de leurs proies. Les couleurs et
les motifs cutanés permettent de mimer des objets proches et rendent l’animal peu visible
(Stevens, 2016).
A l’inverse du camouflage, la sélection sociale favorise des colorations bien visibles.
Les animaux susceptibles de communiquer avec leurs congénères utilisent des variations de
couleur rapides et transitoires. Ces changements de couleur sont utilisés pour la
communication intraspécifique. Ils peuvent intervenir lors de parades nuptiales ou lors
d’interactions compétitives entre deux individus de la même espèce (Ligon et McGraw,
2013).
Écologie
Communication intraspécifique
Protection
aux UV Thermo-
régulation Prédation
Choix du
partenaire Agression,
territorialité
Développement
Environnement Gènes
Sélection
sexuelle Sélection
naturelle
Individu
20
L’homochromie variable peut également servir à l’homéostasie. Les vertébrés doués
d’homochromie variable sont généralement ectothermes. Ils sont donc dépendants de
sources externes de chaleur et la thermorégulation est un facteur primordial. Les
ectothermes peuvent réguler leur température grâce à des comportements spécifiques (par
exemple en variant leur exposition au soleil) ou grâce à des variations physiologiques (en
contrôlant les flux de chaleur). L’assombrissement de la peau augmente la quantité de
lumière et de chaleur absorbée tandis qu'un éclaircissement de la peau augmente la réflexion
de la lumière et diminue l’absorption de chaleur (Stuart-Fox et Moussalli, 2009).
Le camouflage et la communication intraspécifique sont les deux facteurs
prépondérants dans l'évolution de l’homochromie variable. En effet, la sélection naturelle
est en faveur du camouflage le plus efficace contre la prédation et la sélection sexuelle est
en faveur des parades nuptiales les mieux codifiées (Stuart-Fox et Moussalli, 2009).
2.2.1. Intérêts chez les squamates
Les squamates regroupent des espèces qui utilisent les changements de couleur pour les trois
fonctions classiques. Les lézards arborent des couleurs brunes ou grises lorsqu’ils évoluent
sur de la roche ou de la terre. Ils exhibent des couleurs jaunes ou vertes dans des milieux
denses en végétation. De même, les caméléons utilisent leurs couleurs pour se camoufler des
prédateurs tels que les oiseaux ou les serpents. Par exemple, le caméléon nain Bradypodion
prend les couleurs de son support à la vue d’un oiseau ou d’un serpent (Stuart-Fox et
Moussalli, 2009). La thermorégulation intervient aussi dans l’assombrissement ou
l’éclaircissement de la peau des lézards et des caméléons. Le lézard Pogona vitticeps passe
du marron foncé au beige clair la journée lorsque la température de son environnement
augmente (Smith et al., 2016). La peau des lézards Anolis s’éclaircit également lors de
fortes chaleurs (Hadley et Goldman, 1969). Les changements de couleur les plus
impressionnants se produisent lors de la rencontre entre deux mâles caméléons, en
particulier chez les caméléons panthères Furcifer pardalis. Lors de la rencontre d’un
concurrent mâle ou d’une femelle potentiellement réceptive, un caméléon panthère mâle
adulte peut changer la couleur de sa peau tandis que les motifs (taches et rayures)
deviennent plus visibles et lumineux. Ce processus se produit en quelques minutes et il est
entièrement réversible. Afin d’impressionner un autre mâle, le caméléon adopte une posture
particulière en gonflant son corps et ses couleurs changent selon des motifs bien précis,
allant du bleu au rouge et du vert au jaune (Teyssier et al., 2015). La figure 3 présente les
couleurs d’un caméléon panthère mâle passant d’un état de repos vers un état stimulé à la
vue d’un autre mâle.
21
Figure 3 : Évolution de la couleur d’un caméléon panthère mâle Furcifer pardalis lors d’une rencontre
avec un autre mâle (d'après Teyssier et al., 2015).
2.2.2. Intérêts chez les amphibiens
L’homochromie variable est principalement utilisée par les amphibiens pour éviter la
prédation, mais elle leur permet aussi d’interagir avec leurs congénères. Les couleurs
cryptiques servent au camouflage alors que les couleurs vives sont utilisées pour avertir les
prédateurs de leur toxicité. De plus, les amphibiens sont exposés à de nombreux facteurs de
stress. L’éclaircissement de leur peau a une fonction de régulation thermique alors que
l’assombrissement de celle-ci peut servir de protection contre les dommages induits par les
rayonnements UV (Rudh et Qvarnström, 2013). Pour les amphibiens dont la peau est
fortement perméable à l'eau, l'augmentation de la réflexion de la lumière diminue également
les pertes hydriques. Par conséquent, la capacité à varier leur teinte permet de réguler leur
température corporelle mais aussi de contrôler leur équilibre hydrique (Stegen et al., 2004 ;
Withers, 1995).
L’homochromie variable est impliquée dans la communication intraspécifique. Lors
de l’amplexus, c’est-à-dire lorsqu’un mâle s’accroche sur le dos d’une femelle pour se
reproduire, celui-ci peut changer de couleur en quelques minutes seulement (Kindermann et
al., 2014). Par exemple, la coloration nuptiale bleue des grenouilles des champs Rana
arvalis agit comme signal visuel pour favoriser la reconnaissance entre les mâles. Chez cette
espèce d’amphibien, la couleur du mâle n’intervient pas dans le choix de la femelle mais
elle permet aux mâles de se déplacer rapidement entre leurs rivaux vers les femelles. En
effet, malgré le fait que toutes les grenouilles soient des rivaux dans la recherche d’une
État de repos État stimulé Stimulus :
Rencontre avec un autre mâle
22
partenaire, il est dans l'intérêt de tous les mâles de ne pas manquer une occasion de
s’accoupler car le nombre de femelle est limité et la période de reproduction est courte, de 2
à 3 jours par an (Sztatecsny et al., 2012). La figure 4 présente des grenouilles des champs
Rana arvalis mâles qui arborent une couleur bleue pendant leur période de reproduction.
Figure 4 : Grenouilles des champs Rana arvalis pendant la période de reproduction (Sztatecsny et al.,
2012).
2.2.3. Intérêts chez les céphalopodes
De nombreux prédateurs des céphalopodes ont la vision des couleurs, ainsi la possibilité de
faire correspondre efficacement leur couleur à celle de l’environnement est un atout majeur
(Mäthger et Hanlon, 2007). Les seiches s’éclaircissent lorsqu’elles passent d’un fond marin
foncé à un fond clair. Elles font alors preuve d’une anticipation admirable. En effet, une
seiche qui se déplace d’un sol rocheux foncé vers un sol sableux plus clair est capable
d’estimer à l’avance la couleur et la réflectance du nouvel environnement. Elle débute son
éclaircissement tégumentaire avant de franchir la limite entre les deux sols. Le changement
de réflectance est alors progressif et leur évite d’attirer l’attention indésirable de potentiels
prédateurs (Josef et al., 2015 ; Mäthger et al., 2009 ; Tao et al., 2010).
En (a), rassemblement de grenouilles des champs Rana arvalis lors de la période de reproduction. Les mâles arborent une couleur bleue vive.
En (b), différence de couleur entre un mâle bleu et une femelle marron lors de l’amplexus.
23
Les seiches peuvent présenter trois grands types de motifs pour se camoufler :
uniforme, tacheté ou disruptif. Le motif qu’elles arborent est choisi en fonction de plusieurs
caractéristiques de leur environnement dont l’hétérogénéité de taille et de forme de ses
composants ainsi que le contraste et l’intensité lumineuse du milieu. Par exemple, une
seiche Sepia officinalis présente un motif uniforme sur un sol de sable fin, un motif tacheté
sur un sol couvert de graviers et un motif disruptif sur un sol de pierres plus larges et au
contraste élevé (Hanlon, 2007). Ces trois motifs sont présentés sur la figure 5.
Figure 5 : Les trois motifs utilisés par les seiches Sepia officinalis pour se camoufler (Hanlon, 2007).
De plus, la modulation de leur apparence joue aussi un rôle important dans la
signalisation et la communication intraspécifique. Lors de la parade nuptiale, une seiche
mâle arbore des motifs très précis au contact d’une seiche femelle. Cependant, si un autre
mâle est présent, le premier mâle trompe son concurrent. Il se place entre les deux individus
en affichant des motifs de séduction à la femelle et des motifs qui imitent une seiche femelle
vers son concurrent l’empêchant ainsi de perturber la parade nuptiale (Brown et al., 2012).
La figure 6 présente une seiche mâle ayant recours à cette stratégie lors d’une période de
reproduction.
Motif uniforme Motif disruptif Motif tacheté
24
Figure 6 : Seiche Sepia plangon mâle arborant simultanément un motif de séduction vers une femelle et
une coloration trompeuse vers un autre mâle rival (Brown et al., 2012).
Les pieuvres utilisent le plus fréquemment les changements de couleur pour se
camoufler. Une pieuvre camouflée évite ainsi de se faire repérer par un grand nombre de
prédateurs mais aussi par ses proies. La pieuvre mimétique Thaumoctopus mimicus est une
espèce connue pour ses capacités remarquables en matière de mimétisme. Elle est capable
d’échapper à ses prédateurs en imitant différentes espèces toxiques comme la rascasse
volante, poisson réputé pour son épine venimeuse, ou des serpents de mer en se
contorsionnant et en changeant de couleur (Hanlon, 2007).
2.2.4. Intérêts chez les poissons
De même que les amphibiens, les squamates et les céphalopodes, beaucoup de poissons
s’assombrissent pour s’adapter à des milieux sombres et s’éclaircissent dans des
environnements clairs. Cette fonction a pour but de réduire le risque de prédation (Rodgers
et al., 2013). Certaines espèces utilisent aussi des motifs particuliers qui varient pour
communiquer avec leurs congénères. Par exemple, le poisson Pentapodus paradiseus peut
changer la couleur de plusieurs bandes réfléchissantes rostrales en moins d’une seconde
(Figure 1(b)). Cependant la signification exacte de ce comportement entre plusieurs
individus n’est pas encore comprise (Mäthger et al., 2003).
La thermorégulation et la protection contre les UV ont une faible importance chez les
animaux aquatiques, la température variant peu sur de longues durées et l’énergie du
rayonnement solaire étant en partie réfléchie à la surface de l’eau (Rodgers et al., 2013).
M : seiche mâle arborant deux types de motifs lors d’une parade nuptiale. F : seiche femelle.
A : seiche mâle concurrent.
25
2.2.5. Intérêts chez les crustacés
L’homochromie variable a deux rôles principaux chez les crustacés : éviter la prédation par
camouflage et réguler leur température corporelle. De nombreux crabes changent de couleur
en suivant un rythme circadien. Par exemple, le crabe fantôme du genre Ocypode est plus
clair la journée et plus sombre la nuit. Cela permet de limiter l’absorption du rayonnement
solaire le jour et de se camoufler la nuit (Stevens et al., 2013). En plus de ces variations
régulières, les crabes peuvent adapter leurs teintes et leurs motifs à leur environnement. Ils
améliorent leur camouflage afin d’éviter au mieux leurs prédateurs. L’utilisation de
l’homochromie variable dans la communication intraspécifique n’a pas encore été
démontrée chez les crustacés (Stevens, 2016).
3. Le tégument, support de l’homochromie variable
Le tégument, c’est-à-dire l’enveloppe externe du corps comprend la peau, ses annexes et les
phanères. La peau a une fonction de protection, d’échanges hydriques, de régulation
thermique, de perception tactile, d’adhérence au substrat et elle intervient dans les
interactions inter- et intra-spécifiques grâce à un assortiment de capacités de signalisation
(Quay, 1972 ; Reyes-Gomez, 2013). Elle est constituée de deux couches principales :
l’épiderme qui forme la couche superficielle, et le derme, plus en profondeur (Reyes-
Gomez, 2013). En particulier, des signaux peuvent être émis par des changements de
couleur et de motifs de la peau et sont à la base de comportements tels que la reconnaissance
d’espèce, le choix du partenaire sexuel, ou encore les interactions agonistiques (Hanlon et
Messenger, 1998 ; Smith et al., 2016).
La structure de la peau varie selon les espèces car elle correspond à des besoins
spécifiques très diversifiés. Chez les amphibiens, la peau est souple et toujours humide.
L’épiderme est simple, les couches profondes renouvellent les cellules qui s’exfolient. Leur
derme est riche en fibres élastiques et en glandes sécrétrices. Chez les poissons, l’épiderme
est un épithélium pluristratifié et le derme est composé de faisceaux conjonctifs qui
s’insèrent sur les muscles sous-jacents. Les écailles sont formées par des petites plaques
rigides qui émergent du derme pour renforcer la solidité du tégument. Les chromatophores
sont des cellules pigmentaires ramifiées présentes en quantité dans le derme (Quay, 1972).
Chez les squamates, la peau est fortement kératinisée. La couche cornée est très épaisse et la
peau est majoritairement sèche. Les épaississements cutanés forment des écailles bien
délimitées. Le derme possède de nombreuses cellules pigmentaires et les glandes cutanées
sont rares. La peau desquame en mue ou par lambeaux (Nissar et al., 2016 ; Quay, 1972).
Le tégument des crustacés est constitué d’un épiderme formé d’une couche de cellules et
d’une cuticule épaisse et complexe contenant de la chitine imprégnée de calcaire. La rigidité
qui résulte de ce dépôt minéral fait jouer au tégument les rôles d’un squelette externe, tels
que la protection et l’insertion des muscles. La coloration superficielle est due à des
pigments placés dans la cuticule. Une coloration plus profonde est due à la présence de
pigments dans des chromatophores sous-épidermiques (Larousse, 1976).
L’anatomie de la peau des caméléons est détaillée ci-dessous comme exemple. Les
particularités tégumentaires intervenant dans la fonction d’homochromie variable varient
selon les clades et les espèces. Elles sont cependant majoritairement supportées par le derme
(Ligon et Mccartney, 2016).
26
3.1. L’épiderme
La grande majorité de la peau des caméléons est couverte d’écailles kératinisées qui en
général ne se superposent pas. Ces écailles sont de formes et de tailles très variées selon les
espèces et sont appelées « écailles tuberculées ». Elles constituent une fine couche
superficielle qui recouvre la peau et qui lui assure une grande rigidité (Ducrotté-Tassel,
2013 ; Quay, 1972).
Les squamates renouvellent leur peau grâce à une desquamation périodique de
l’épiderme. Ce phénomène, appelé mue, entraîne des modifications physiologiques dans la
structure du tégument uniquement au niveau de l’épiderme. Les capacités d’homochromie
variable sont supportées par le derme et ne sont donc pas modifiées par ces événements
physiologiques (Nissar et al., 2016).
3.2. Le derme
Le derme est un tissu conjonctif dense riche en fibres de collagène, en vaisseaux sanguins,
en récepteurs sensoriels, en nerfs et comprenant divers types de cellules : fibroblastes,
histiocytes, plasmocytes, réticulocytes et chromatophores. Il assure la nutrition de
l’épiderme qui est avasculaire (Reyes-Gomez, 2013).
Chez les caméléons, l’aptitude à changer de couleur est médiée par plusieurs types
de chromatophores dermiques. C’est le derme qui supporte l’homochromie variable par le
biais de ces cellules très spécialisées, et ce chez la totalité des espèces présentant cette
capacité (Nissar et al., 2016).
4. Description des différents chromatophores
Les chromatophores sont des cellules dites pigmentaires car elles sont à la base de la
coloration de la peau des animaux ectothermes, même si certains types de chromatophore ne
contiennent pas de pigments vrais mais uniquement des structures réfléchissant certaines
longueurs d’onde (Bagnara et Matsumoto, 2006). On distingue dans le monde du vivant
plusieurs familles de chromatophores.
Le tableau 1 présente la classification des chromatophores, les organites
intracellulaires et les pigments qu’ils contiennent et enfin leurs couleurs.
27
Tableau 1 : Classification des chromatophores (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Schartl et al., 2016).
Chromatophore Organite Pigment Couleur Origine
Mélanophore
Mélanosome Mélanine Marron, noir Vertébrés et
invertébrés
Organite
granulaire
Ommochrome Jaune, rouge,
marron, noir
Invertébrés,
dont les
céphalopodes
Iridophore
Plaquette
réfléchissante
Purine
(principalement
de la guanine)
Couleur
structurelle
selon
l’iridescence
Vertébrés, en
particulier
ectothermes
Ruban
lamellaire
Réflectine Couleur
structurelle
selon
l’iridescence
Céphalopodes
Leucophore
Réfractosome Purine
(principalement
de l’acide
urique)
Couleur
structurelle,
blanc, argenté,
doré
Poissons
téléostéens,
céphalopodes
Xanthophore
(Lipophore)
Ptérinosome Ptéridine Jaune,
orange clair
Ectothermes,
(majoritairement
au stade
larvaire)
Vésicule
lipidique de
caroténoïdes
Caroténoïde Jaune, orange Ectothermes,
(majoritairement
au stade adulte)
Érythrophore
(Lipophore)
Ptérinosome Ptéridine Rouge,
orange foncé
Ectothermes,
(majoritairement
au stade
larvaire)
Vésicule
lipidique de
caroténoïdes
Caroténoïde Rouge, orange Ectothermes,
(majoritairement
au stade adulte)
Cyanophore
Cyanosome Sandercyanine Bleu Poissons
mandarins
Synchiropus,
perche Sander
vitreus.
28
4.1. Classification des chromatophores
4.1.1. Mélanophore
Les mélanophores sont des chromatophores marron ou noirs. Ce sont les mieux étudiés
parmi toutes les cellules pigmentaires et les plus actifs lors des changements de couleur
(Schartl et al., 2016). Parmi les vertébrés, au moins deux types de mélanophores diffèrent
nettement l’un de l’autre, non seulement par leur localisation mais aussi pas leur apparence
générale et leurs réponses aux stimuli physiologiques.
Les mélanophores épidermiques, majoritairement désignés sous le nom de
mélanocytes, sont présents dans l’épiderme des vertébrés. Ce sont des cellules pigmentées,
de forme étoilée, fusiforme, parfois arrondie ou ovalisée, à noyau central. Chez les
ectothermes, ces cellules pigmentaires se situent juste en dessous de la couche germinative
de l’épiderme et forment une couche relativement uniforme. Les dendrites de ces
mélanophores s’étendent entre les cellules épidermiques adjacentes. La mélanine produite
par les mélanophores épidermiques est transférée dans les kératinocytes environnants par
l’intermédiaire des prolongements dendritiques (Seiberg, 2001). Plusieurs hypothèses ont
été formulées pour expliquer le transfert de grains de mélanine vers les kératinocytes :
cytophagocytose, relargage dans l’espace extracellulaire de la mélanine dans des vésicules
puis endocytose par les kératinocytes, ou encore voie de communication directe entre les
deux types cellulaires. L’hypothèse retenue est la suivante : le transfert de mélanine est
réalisé par phagocytose des mélanosomes en faisant intervenir un récepteur membranaire
présent sur les kératinocytes nommé PAR-2 (Seiberg, 2001). Afin de nommer aisément ces
transferts, ceux-ci sont dits cytocrines (Schiaffino, 2010).
Le dépôt de mélanine dans les kératinocytes est relativement lent. Par conséquent,
les mélanophores épidermiques n’ont pas un grand rôle dans le changement de couleur
rapide des vertébrés. La stimulation prolongée des mélanophores épidermiques entraîne
l’accumulation progressive d’une grande quantité de mélanine dans l’épiderme, ce qui
assombrit l’animal. Ces pigments disparaissent lentement lorsque les couches épidermiques
sont éliminées, par exemple lors de la mue des squamates (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Les mélanophores dermiques se situent dans l’épaisseur du derme à des distances
variables et existent sous la forme de cellules relativement aplaties possédant des
prolongements du corps cellulaire dirigés soit radialement, soit vers les couches supérieures
du derme depuis le plan médian de la cellule. Ces mélanophores sont des cellules de grande
taille qui peuvent atteindre plusieurs centaines de microns de diamètre. La structure des
mélanophores dermiques n’a pas été systématiquement étudiée chez tous les ectothermes.
Cependant, les observations sur divers poissons, amphibiens et squamates semblent
compatibles avec celles qui ont été faites sur les mélanophores épidermiques des
mammifères. Les différences fonctionnelles sont liées aux différences structurelles. Les
mélanophores dermiques sont fortement impliqués dans le changement rapide de couleur
contrairement aux mélanophores épidermiques (Bagnara et Matsumoto, 2006). Deux
exemples de mélanophores chez les amphibiens sont présentés sur la figure 7.
29
Figure 7 : Mélanophores d'un têtard Xenopus laevis et d'une grenouille Rana pipiens (d'après Bagnara
et Matsumoto, 2006).
L’une des caractéristiques fondamentales de tous les mélanophores est qu’ils
produisent tous leur propre pigment, la mélanine. La synthèse de mélanine à l’intérieur des
mélanophores implique, au moins chez les vertébrés, la présence d’organites intracellulaires,
les mélanosomes, dans lesquels ce pigment se dépose. La mélanine est un polymère
complexe de métabolites de tyrosine (Ito et Wakamatsu, 2011a). Ces métabolites sont les
résultats de l’action d’une enzyme, la tyrosinase, sur la tyrosine. Cette enzyme se trouve
dans les pré-mélanosomes, vésicules destinées à devenir des mélanosomes une fois la
formation de mélanine achevée. Les pré-mélanosomes contiennent une matrice de fibres
protéiques sur lesquelles les polymères de mélanine sont déposés. Ils sont formés à partir de
vésicules du réticulum endoplasmique et de l’appareil de Golgi, d’environ 0,5 µm de
diamètre, et prennent au fur et à mesure du développement de leur réseau protéique une
forme elliptique (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Seiji et al., 1963).
En (a), la coupe longitudinale du derme d’une larve de Xenopus laevis présente de nombreux
mélanophores dermiques, chromatophores larges et de forme aplatie. En (b), la coupe transversale du tégument d’une grenouille Rana pipiens présente un mélanophore
épidermique ainsi que des mélanophores dermiques et leurs prolongements dendritiques.
a
b
Mélanophore
épidermique
Mélanophore
dermique
Épiderme
Derme
Mélanophore
dermique
30
Les mélanophores dermiques des céphalopodes sont différents de ceux des vertébrés.
Ce sont des chromatophores de couleur brun-noir dont les pigments sont des ommochromes
contenus dans des organites granulaires (Goodwin, 2014).
4.1.2. Iridophore
La réflexion de la lumière sur la peau des animaux est souvent facilitée par la
présence de chromatophores appelés iridophores. Ces cellules contiennent des organites
spécifiques qui sont orientés de manière à réfléchir la lumière le plus efficacement possible.
Chez les vertébrés, ces organites sont appelés plaquettes réfléchissantes (Taylor, 1969). Les
iridophores apparaissent souvent iridescents. L’iridescence n’est pas toujours le résultat de
structures cellulaires. Par exemple, les propriétés iridescentes des plumes sont dues à leur
structure physique et non à la présence de chromatophores. Ce phénomène est cependant
majoritairement supporté par des iridophores chez les ectothermes et c’est le cas des
animaux doués d’homochromie variable (Schartl et al., 2016). Les iridophores ne
comportent pas d’éléments colorés tels que des pigments mais uniquement des structures
réfléchissantes. Ces cellules sont classées parmi les chromatophores car elles sont capables
de sélectionner certaines longueurs d’onde et de participer à la teinte finale du tégument,
mais ne sont pas des cellules pigmentaires au sens strict (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Grâce aux iridophores, la couleur réfléchie sur les poissons, les amphibiens et les
squamates apparaît argentée, voire dorée. Ils sont responsables des reflets métalliques
zébrés, tachetés ou piquetés de ces animaux et de zones plus larges parfois observées sur la
partie ventrale. Lorsqu’elles sont éclairées par une lumière blanche, les structures
réfléchissantes présentent des couleurs structurelles allant du vert au bleu et parfois même à
des nuances de rose ou de rouge. La localisation des iridophores est limitée au derme. Ils
sont d’apparence variable selon l’espèce et leur position anatomique. Chez les vertébrés, les
structures réfléchissantes des iridophores sont formées de purines, c’est-à-dire de molécules
azotées hétérocycliques constituées d’un cycle pyrimidine fusionné à un cycle imidazole. La
principale purine rencontrée dans ces chromatophores est la guanine (Ligon et Mccartney,
2016). Chez les céphalopodes, les structures réfléchissantes sont des rubans lamellaires
composés d’une forte concentration en protéines appelées réflectines. Cette protéine peut
subir un changement de conformation qui provoque secondairement la modification de la
couleur réfléchie par la cellule (Kaplan, 2016 ; Mäthger et Hanlon, 2007).
L’hypoxanthine, l’adénine et l’acide urique sont d’autres purines rencontrées
comme réflecteurs au sein de ces cellules, mais en plus faible quantité. Chez les poissons,
les amphibiens et les squamates, ces molécules sont contenues librement dans de larges
organites qui ont la forme de plaquettes aplaties. Ces organites sont donc nommés
plaquettes réfléchissantes. Ils sont généralement disposés en piles orientées dans le même
sens au sein d’un iridophore (Bagnara et al., 1969 ; Schartl et al., 2016 ; Taylor, 1969). Cet
arrangement ordonné de plaquettes est à la base des propriétés réfléchissantes des
iridophores. Chez les céphalopodes, les iridophores contiennent des organites comparables
qui sont dérivés de l’appareil de Golgi et qui font saillie vers le milieu extracellulaire par
des excroissances de la cellule. Ces organites forment une succession de surfaces
réfléchissantes et sont appelés rubans lamellaires (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; DeMartini
et al., 2013).
31
Trois exemples d’iridophores sont présentés sur la figure 8.
Figure 8 : Iridophores d'une grenouille Rana pipiens, d'un anole Anolis carolinensis et d'une pieuvre
Octopus vulgaris (d'après Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Messenger, 2001 ; Taylor et Hadley, 1970).
Chez la majorité des ectothermes, les iridophores permettent d’augmenter
passivement l’intensité lumineuse réfléchie sur leur tégument. Cependant, les iridophores
peuvent intervenir activement lors des changements de couleur de certaines espèces. En
effet, les plaquettes réfléchissantes dans les iridophores des caméléons et les rubans
lamellaires dans les iridophores des céphalopodes ont la capacité de réfléchir certaines
longueurs d’onde selon leur positionnement (DeMartini et al., 2013 ; Teyssier et al., 2015).
En (a), iridophore d’une grenouille léopard Rana pipiens. En (b), iridophore d’un anole vert Anolis carolinensis.
En (c), iridophore d’une pieuvre commune Octopus vulgaris. Dans les trois cas, les organites pigmentaires des iridophores sont organisés et orientés dans une même
direction. Leurs formes et leurs structures varient selon l’espèce.
a
Plaquettes
réfléchissantes
Noyau
cellulaire
b
c
1 µm
5 µm
× 8,600
Rubans
lamellaires
32
4.1.3. Leucophore
Les leucophores sont des chromatophores qui réfléchissent passivement la quasi-totalité du
spectre de la lumière visible. Ils ont une structure proche de celle des iridophores et
contiennent aussi des purines (Aspengren et al., 2008). Ces deux types de chromatophores
diffèrent par les caractéristiques suivantes. Premièrement, les leucophores reflètent toute la
de la lumière blanche alors que les iridophores peuvent sélectionner une partie du spectre
visible du violet (400 nm) au rouge (650 nm) (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Fujii, 2000).
Deuxièmement, les iridophores ont tendance à être situés au-dessus des mélanophores,
tandis que les leucophores se trouvent généralement en dessous de la couche de
mélanophores (Bagnara et Hadley, 1973). Troisièmement, les iridophores et les leucophores
diffèrent par la façon dont ils interviennent dans le changement de couleur. Les plaquettes
réfléchissantes au sein des iridophores réfléchissent certaines longueurs d’onde selon leur
espacement ou leur orientation, alors que les leucophores ont une structure cellulaire et un
fonctionnement analogues à ceux des mélanophores. Ils possèdent des processus
dendritiques dans lesquels leurs organites pigmentaires, nommés réfractosomes, peuvent se
déplacer. Les leucophores ne sont présents que chez un ensemble restreint de vertébrés
pouvant changer de couleur, surtout parmi les poissons téléostéens et les céphalopodes. De
plus, ils ne leur permettent que d’augmenter ou de diminuer l’intensité de la réflexion de la
lumière sur leur tégument sans favoriser la réflexion de certaines longueurs d’onde (Ligon et
Mccartney, 2016 ; Mäthger et al., 2009). Par la suite, la discussion portera donc sur les
iridophores.
Les différences entre un iridophore et un leucophore sont visibles sur la figure 9.
Figure 9 : Leucophore et iridophore d'une seiche commune Sepia officinalis (Mäthger et al., 2009).
Leucophore
composé de
réfractosomes
1 µm
Iridophore
composé de
rubans
lamellaires
33
4.1.4. Lipophore
Les lipophores sont des cellules pigmentaires de couleur intense, jaune, orange ou rouge
Leur nom est en rapport avec la nature liposoluble des pigments, les caroténoïdes, qu’elles
contiennent. Ces cellules sont étroitement liées morphologiquement les unes aux autres,
mais il existe une terminologie distincte pour désigner les cellules selon leur couleur : les
lipophores d’apparence jaune sont nommés xanthophores alors que ceux d’apparence rouge
sont appelés érythrophores. Un lipophore orange peut se référer aux deux types précédents.
Dans tous les cas, un lipophore contient généralement les deux types de pigments. C’est le
rapport quantitatif entre les pigments qui définit la couleur finale et donc la catégorie de
lipophore (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Schartl et al., 2016). Un érythrophore observé au
microscope électronique est présenté sur la figure 10. Un xanthophore observé au
microscope optique est présenté sur la figure 11.
Figure 10 : Érythrophore d'une salamandre cendrée Plethodon cinereus (d'après Bagnara et Taylor,
1970).
Le rôle de ces cellules pigmentaires dans le changement de couleur est très variable
selon les animaux. Par exemple, la migration des pigments à l’intérieur des xanthophores et
des érythrophores est possible chez certains crustacées et certains poissons, alors que chez la
plupart des amphibiens et des squamates, les lipophores jouent un rôle passif. Leur
morphologie est plus ou moins constante et n’intervient que peu dans le changement de
couleur physiologique. Ils peuvent être trouvés dans l’épiderme sur des zones vivement
colorées et délimitées, par exemple chez le triton Notophthalmus viridescens, mais sont plus
généralement localisés dans le derme (Bagnara et Hadley, 1973).
Ptérinosomes
× 25 000
Portion d'un érythrophore présent dans la bande rouge dorsale d’une salamandre cendrée Plethodon cinereus. De nombreux ptérinosomes sont présents. En raison de la variabilité de leur apparence, ils
ne peuvent pas être regroupés en classes distinctes.
34
Figure 11 : Xanthophores présents dans le derme d’une grenouille Rana pipiens (d'après Bagnara,
1966).
Parmi les invertébrés, les caroténoïdes sont considérés comme étant les principaux
pigments au sein des lipophores. À l’inverse, chez les poissons, les amphibiens et les
squamates, les ptéridines constituent une grande partie des pigments de couleurs vives et de
mêmes teintes jaune-orangé. Certaines espèces concentrent presque exclusivement des
ptéridines dans leurs lipophores. C’est le cas de la salamandre cendrée Plethodon cinereus
(chez qui les érythrophores prédominent) ou encore de la grenouille Hyla arenicolor (où les
lipophores sont majoritairement des xanthophores). De même, chez les espèces dont les
adultes possèdent des lipophores qui concentrent principalement des caroténoïdes ou chez
les animaux qui utilisent à la fois des ptéridines et des caroténoïdes, les premiers pigments
accumulés dans les stades de développement des xanthophores et des érythrophores sont les
ptéridines (Obika, 1963 ; Schartl et al., 2016).
Les caroténoïdes sont concentrés dans des vésicules lipidiques, alors que les
ptéridines sont contenues dans de discrets organites nommés ptérinosomes. Ces derniers
prennent la forme de granules sphériques ou ellipsoïdes d’environ 0,5 µm de diamètre et
d’une série de nombreuses lamelles concentriques. Les vésicules de caroténoïdes sont de
forme et de taille très variables, de 0,1 µm à plusieurs dizaines de microns. Les
ptérinosomes ont été observés à la fois dans les xanthophores et dans les érythrophores de
poissons, d’amphibiens et de squamates, et ils sont distribués plus ou moins uniformément
dans le cytoplasme, bien que dans certains cas, par exemple chez les poissons du genre
Xiphophorus, ces organites soient concentrés à la périphérie des érythrophores alors que le
centre de la cellule est occupé par des vésicules de caroténoïdes. Un grand nombre
d’espèces d’amphibiens forme un exemple différent pour lequel les vésicules de
caroténoïdes sont distribuées uniformément entre les ptérinosomes. L’origine cellulaire de
ces vésicules est inconnue mais il est supposé qu’elles dérivent du réticulum endoplasmique
lisse (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Xanthophores
× 500
35
4.1.5. Cyanophore
La coloration bleutée du tégument des poissons téléostéens est habituellement générée par
les iridophores qui réfléchissent les longueurs d’ondes de 450 nm à 480 nm grâce à leurs
plaquettes réfléchissantes. Il existe cependant chez de rares espèces de poissons des
chromatophores contenant des pigments protéiques bleus encore peu étudiés. Ces
chromatophores sont appelés cyanophores et ils affichent une couleur bleue qui n’est pas
une couleur structurelle mais une couleur pigmentaire (Goda et Fujii, 1995). Des
cyanophores d’un poisson mandarin sont présentés sur la figure 12, observés au microscope
optique puis au microscope électronique à transmission.
Figure 12 : Cyanophores d'un poisson mandarin Synchiropus splendidus (d'après Goda et Fujii, 1995).
Cyanophore
× 48,000
En (a), cyanophores et mélanophores d’un poisson mandarin Synchiropus splendidus observés au
microscope optique présentent leurs couleurs caractéristiques. En (b), portion d’un cyanophore présent dans le derme de la nageoire abdominale d’un poisson
mandarin observé au microscope électronique à transmission. CS : cyanosomes ; ES : ptérinosomes
dans un érythrophore adjacent ; CF : fibrilles de collagène dans la matrice extracellulaire.
× 300
a
b
Mélanophore
36
Les pigments bleus sont contenus dans des organites nommés cyanosomes. L’un de
ces pigments a été isolé et a été nommé sandercyanine (Yu et al., 2008). Les cyanophores
ont été observés chez les poissons mandarins Synchiropus splendidus et Synchiropus
picturatus, et les perches Sander vitreus (Goda et Fujii, 1995 ; Schaefer et al., 2015). Ces
poissons présentent aussi des chromatophores dichromatiques contenant à la fois des
pigments rouges dans des ptérinosomes et des pigments bleus dans des cyanosomes. Lors
des changements de couleur de ces poissons, les cyanophores et les chromatophores
dichromatiques possèdent une motilité, de même que les mélanophores et les lipophores
(Goda et al., 2013). Les cyanophores contribuent donc aux changements de couleur
observés en réponse à divers signaux environnementaux, mais ces chromatophores sont
rares et ils sont encore peu étudiés (Schaefer et al., 2015).
4.1.6. Chromatophores mixtes
La séparation des chromatophores en différents groupes est nécessaire pour faciliter la
description mais il est possible de rencontrer des chromatophores d’un groupe qui
contiennent des organites pigmentaires spécifiques d’un autre groupe. Par exemple, chez la
salamandre cendrée Plethodon cinereus, des ptérinosomes et des mélanosomes ont été
observés dans certains mélanophores ; à l’inverse, ces deux types d’organites ont été aussi
observés dans quelques xanthophores de cette espèce (Bagnara et Taylor, 1970). De même,
des mélanophores possédant des plaquettes réfléchissantes, des iridophores contenant des
ptérinosomes, ou encore des chromatophores ayant les trois types de pigments ont été
observés. Cependant, ces chromatophores hybrides sont rares et leur formation inconnue,
aucun groupe n’a donc encore été défini pour les classer (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Les chromatophores mixtes peuvent exposer plusieurs couleurs. Des chromatophores
dichromatiques ont été observés chez les perches Synchiropus splendidus et apparaissent
rouge et bleu. Ils contiennent à la fois des ptérinosomes et des cyanosomes (Goda et al.,
2013).
4.2. Les pigments des chromatophores
4.2.1. Mélanines
De melanos qui signifie noir, « mélanine » est un terme générique utilisé pour désigner les
pigments azotés dérivés de la tyrosine, ceux-ci ayant un poids moléculaire élevé et une
grande stabilité chimique. Bien que la majorité soit de couleur foncée, des mélanines de
couleur claire sont fréquemment rencontrées. Les pigments noirs ou marron font
généralement référence à l’eumélanine, alors que les mélanines de couleur jaune et orange
sont appelées phéomélanines.
L’enzyme à la base de la synthèse de mélanine est la tyrosinase (Ito et Wakamatsu,
2011a). Elle oxyde son substrat, la tyrosine. Le schéma général de la synthèse de mélanine
est variable selon les espèces étudiées. Celui présenté en figure 13 correspond aux
principales voies de synthèse de l’eumélanine et de la phéomélanine chez l’homme.
37
Figure 13 : Biosynthèse de l'eumélanine et de la phéomélanine chez l'homme (Ito et Wakamatsu, 2011b).
L’eumélanine est un hétéropolymère constitué d’unités d’indole à différents niveaux
d’oxydation associées à d’autres métabolites dérivés de la tyrosine. La conformation
chimique est difficile à étudier à cause de sa grande stabilité, celle-ci ne rendant la
dégradation du polymère possible que par des réactions chimiques radicales, ce qui ne
permet pas d’obtenir des résultats concluants (Wilczek et al., 1996).
Des analyses de phéomélanines ont révélé la présence de soufre. Les phéomélanines
sont formées par des altérations au sein de la chaîne synthétique de l’eumélanine. Celles-ci
impliquent une interaction de cystéines avec les quinones dérivées de l’oxydation de 3,4-
dihydroxyphénylalanines (dopa) pour former du 5S-cysteinyldopa et du 2S-cysteinyldopa
dans un ratio 95/5. Ces deux produits sont ensuite oxydés pour créer de la phéomélanine.
Un autre groupe de pigments appartenant aux phéomélanines est connu sous le nom de
trichosidérine. Il est plus largement représenté parmi les mammifères et les oiseaux
Chez l’homme, les activités de la tyrosinase et des enzymes Tyrp1 et Tyrp2 (associées à
la tyrosine comme précurseur) sont impliquées dans la production de l’eumélanine, alors
que seule la tyrosinase (associée à la tyrosine et à la cystéine comme précurseurs) est
nécessaire à la production de la phéomélanine, les autres réactions étant spontanées en
présence de cystéine.
Eumélanine Phéomélanine
38
possédant des poils ou des plumes jaunes, oranges ou rouges, même si ces couleurs ne sont
pas nécessairement dues à ce type de pigment (Ito et Wakamatsu, 2011a).
Un mélanophore peut posséder la capacité de synthétiser à la fois de l’eumélanine et
de la phéomélanine selon les stimuli qui lui sont appliqués. Les poils agoutis chez les
mammifères en sont un exemple. Il est possible qu’une conversion de l’une des deux voies
de synthèse en l’autre existe chez certaines espèces.
4.2.2. Ommochromes
Le nom « ommochrome » est dérivé du terme « ommatidie », structure unitaire des yeux des
arthropodes présentant ce type de pigments (Théry et Casas, 2009). Les ommochromes
constituent un groupe de pigments marron, jaunes ou rouges et sont souvent confondus avec
les mélanines. Ces pigments ne se trouvent pas chez les vertébrés et la majorité semble
restreinte aux arthropodes et aux mollusques. Les céphalopodes présentent donc ce type de
pigments au sein de leurs chromatophores.
Dans les cellules, ils se présentent dans des granules qui ressemblent aux
mélanosomes, tant par la taille que par l’apparence générale. Ils sont relativement stables,
insolubles dans l’eau, et sont souvent trouvés chez les animaux qui produisent aussi de la
mélanine. La différence majeure est qu’ils sont formés à partir de l’oxydation du
tryptophane.
Les ommochromes peuvent être séparés en deux groupes, les ommatines et les
ommines qui dérivent tous deux du tryptophane (Deravi et al., 2014). Les ommatines sont
de faible poids moléculaire, instables en milieu alcalin et peuvent facilement traverser les
membranes semi-perméables, contrairement aux ommines qui sont de plus grand poids
moléculaire, hydrophiles et stables en milieu alcalin. Les ommatines sont représentées par
trois pigments : la rhodommatine, rouge, la xanthommatine, jaune, et l’ommatine D, brun-
rouge. Les ommochromes sont, comme les mélanines, liés à des protéines dans les cellules
(Williams et al., 2016). La structure de ces pigments peut cependant être illustrée par la
xanthommatine, présentée sur la figure 14 (Goodwin, 2014).
Figure 14 : Formule topologique de la xanthommatine (d'après Goodwin, 2014).
Groupe fonctionnel de la
xanthommatine Radical : groupe alkyle R
39
Les pigments dans les chromatophores marron des céphalopodes ont été identifiés
comme des ommochromes. En fonction de leur état d'oxydation, les ommochromes peuvent
avoir une couleur brun-noir, atteindre une absorption maximale pour une longueur d'onde de
525 nm et une absorption minimale entre 450 et 475 nm (Deravi et al., 2014). La nature des
ommochromes et leur participation à la couleur globale de ces animaux ne sont pas encore
bien définies (Goodwin, 2014).
4.2.3. Purines et ptéridines
Les purines et les ptéridines sont des pigments qui diffèrent par leur localisation chez les
ectothermes, les premières se trouvant dans les iridophores et les leucophores alors que les
secondes sont des pigments de lipophores mais elles sont très proches biochimiquement les
unes des autres. Les purines et les ptéridines contiennent deux cycles, l’un d’eux étant une
pyrimidine. Le second cycle des purines est un cycle imidazole à trois atomes de carbone et
deux atomes d’azote, alors que celui des ptéridines est un noyau de pyrazine composé de
quatre atomes de carbone et de deux atomes d’azote (Ligon et Mccartney, 2016).
La biosynthèse des purines est bien connue, elle conduit à plusieurs molécules
chimiquement proches. Même si l’acide urique, l’hypoxanthine et l’adénine sont
fréquemment rencontrés dans le groupe des purines, la guanine est certainement la purine la
plus largement distribuée au sein des iridophores. Les purines sont spécifiques des
iridophores et de leucophores (Bagnara et Hadley, 1973).
La biosynthèse des ptéridines est moins connue mais il est supposé que les ptéridines
sont synthétisées à partir d’un précurseur des purines (Hutzenlaub et al., 1969). Il semble
probable que chez les organismes synthétisant activement les deux types de pigments, une
compétition pour les substrats existe. C’est possiblement le cas chez les têtards de Xenopus
laevis chez qui les conditions favorisant la synthèse de ptéridines sont accompagnées d’une
réduction des concentrations en purines (Bagnara, 1961).
Les deux principaux composants appartenant aux ptéridines sont les leucoptérines et
les xanthoptérines. Les ptéridines jouent un rôle conséquent dans les couleurs vives des
ectothermes, et d’une façon plus générale, les ptéridines sont les seuls composants
pigmentaires que les lipophores de ces animaux peuvent synthétiser. Certaines autres
ptéridines découvertes en tant que pigments des yeux de diptères constituent maintenant un
large groupe de pigments chez les poissons, les amphibiens et les squamates. Ce sont les
drosoptérines et les sépiaptérines (Bagnara et Hadley, 1973).
Les riboflavines, synonymes des vitamines B2 sont fréquemment observées dans la
pigmentation orange ou jaune des amphibiens. Par exemple, de hautes concentrations en
riboflavines sont présentes dans les lipophores ventraux des tritons adultes et offrent une
couleur orange vive. Ces riboflavines peuvent être dérivées de sources alimentaires,
cependant la forte ressemblance biochimique avec les ptéridines et les purines laisse
supposer qu’il existe une relation entre les voies métaboliques de ces trois groupes de
pigments. L’existence d’une voie de synthèse des riboflavines est renforcée par le constat
suivant : lorsque la concentration en ptéridines de la peau de tritons diminue lors de leur
40
métamorphose, la concentration en riboflavine augmente. Les ptéridines et les riboflavines
sont les pigments des lipophores (Bagnara et Obika, 1965).
La structure biochimique d’une purine (la guanine), d’une ptéridine (la sépiaptérine),
et de la riboflavine est présentée sur la figure 15.
Figure 15 : Formules topologiques de la guanine, de la sépiaptérine et de la riboflavine (d'après Bagnara
et Hadley, 1973).
4.2.4. Caroténoïdes
Les caroténoïdes forment le groupe de pigments le plus largement distribué parmi les
animaux et les végétaux ; ils sont de couleur jaune, orange, rouge ou violet. Ce groupe très
général est divisé en deux principales catégories : les carotènes et les xanthophylles. Les
molécules de ces deux groupes sont formées de quatre unités d’isoprène (2-méthylbuta-1,3-
diène) constituant une chaîne d’atomes de carbone liés entre eux par une alternance de
liaisons simples et doubles et formant ainsi un système conjugué. Habituellement, un cycle
ionone est présent à chaque extrémité de la chaîne carbonée. Le nombre de liaisons doubles
est variable et c’est le degré d’insaturation de la molécule qui détermine la couleur
spécifique de chaque caroténoïde (Bagnara et Hadley, 1973 ; Zollinger, 2003). Les
structures biochimiques de quelques caroténoïdes sont présentées sur la figure 16.
Sépiaptérine Guanine
Riboflavine
41
Figure 16 : Formules topologiques d’un carotène et de deux xanthophylles (d'après Bagnara et Hadley,
1973).
Les carotènes ne contiennent que des hydrocarbones, alors que les xanthophylles
contiennent des atomes d’oxygène en supplément, ce qui différencie les deux catégories.
Ces deux types de pigments sont fortement hydrophobes et lipophiles et ils sont par
conséquent nommés lipochromes. Cependant, les caroténoïdes ne sont pas automatiquement
dissous dans des gouttelettes lipidiques. Ils peuvent aussi exister sous la forme de molécules
libres et sont parfois liés à des protéines. Ces complexes lipoprotéiques peuvent être bleus,
violets, verts ou encore marron (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Malgré le fait que de très nombreux animaux présentent des caroténoïdes, il est
intéressant de noter qu’ils ne peuvent pas synthétiser de tels pigments et dépendent des
apports alimentaires. Ils peuvent cependant modifier les caroténoïdes qu’ils ont ingérés. Par
exemple, des petits crustacés du genre Daphnia sont capables de synthétiser dans l’ordre
suivant des échinénones, puis des canthaxanthines et enfin des astaxanthines à partir du β-
carotène (Herring, 1968). Ainsi, comme les caroténoïdes sont obtenus par l’alimentation et
non pas synthétisés, contrairement aux ptéridines, les formes immatures de certaines espèces
possèdent uniquement des ptéridines au sein de leurs lipophores et n’obtiendront des
caroténoïdes que plus tard.
Astaxanthine
(Xanthophylle)
β-carotène (Carotène)
Canthaxanthine
(Xanthophylle)
42
Les études menées chez l’homme montrent que l’absorption intestinale se produit
par diffusion passive, celle-ci étant déterminée par un gradient de concentration entre les
membranes entérocytaires et les micelles lipidiques dans lesquelles sont émulsifiés les
caroténoïdes sous l’action des sels biliaires (Faure et al., 1999). Il est possible que
l’absorption des caroténoïdes par la majorité des espèces concernées se produise par
diffusion passive, mais leur transport et leur translocation dans les lipophores restent encore
à comprendre.
4.2.5. Pigments bleus
Un pigment protéique bleu présent dans les cyanophores de la perche Sander vitreus a été
purifié par chromatographie (Yu et al., 2008). La protéine purifiée a une masse moléculaire
de 87 850 kDa et elle est composée de quatre sous-unités identiques ayant une masse
moléculaire de 21 836 kDa. Une solution de cette protéine apparaît de couleur bleu foncé et
a une absorbance maximale à 383 nm et 633 nm et minimale de 450 nm à 500 nm. Le
traitement de la protéine à l’acétone libère un chromophore bleu qui a les caractéristiques
spectrales de la biliverdine, pigment biliaire de couleur bleu-vert résultant de la dégradation
de l’hème. Cette protéine bleue est appelée sandercyanine. L’analyse de la séquence
d'acides aminés suggère que la sandercyanine appartient à la famille des lipocalines,
protéines servant de transport à des petites molécules hydrophobes telles que les stéroïdes,
les sels biliaires et les lipides. La sandercyanine a un rôle de colorant cutané, mais ses autres
fonctions sont encore inconnues (Schaefer et al., 2015 ; Yu et al., 2008).
4.3. Associations cellulaires
4.3.1. Epidermal Melanin Unit, unité fonctionnelle des mélanophores
épidermiques
L'Unité fonctionnelle des Mélanophores Épidermiques (notée EMU pour Epidermal
Melanin Unit) est, comme son nom l’indique, limitée à l’épiderme. Les mélanophores
épidermiques sont les cellules pigmentaires les plus largement rencontrées chez les
vertébrés, leur morphologie globale et leur fonction étant similaires quelle que soit l’espèce
étudiée. La plus grande particularité de ces cellules est qu’elles réalisent leur fonction de
pigmentation en association avec d’autres types cellulaires. Une EMU est l’association entre
un mélanophore épidermique et les kératinocytes adjacents qui reçoivent la mélanine
synthétisée. Chez les mammifères par exemple, un mélanocyte est associé à une trentaine de
kératinocytes environ (Seiberg, 2001).
La figure 17 présente des EMU chez des amphibiens adultes Rana pipiens (Bagnara
et Hadley, 1973 ; Bagnara et Matsumoto, 2006).
43
Figure 17 : Unité fonctionnelle de mélanophores épidermiques chez une grenouille Rana pipiens
observée au microscope optique (d'après Bagnara et Matsumoto, 2006).
La question sur la communication physiologique entre ces deux types cellulaires
épidermiques n’a pas encore reçu de réponse précise. Des hypothèses ont cependant été
formulées : il semble possible que les hormones stimulant les cellules pigmentaires et
agissant au niveau des mélanophores puissent affecter les autres cellules épidermiques, ce
qui permettrait aux kératinocytes d’établir une liaison avec ces mélanophores et de
déclencher la synthèse et le dépôt de mélanine dans l’épiderme (Bagnara et Hadley, 1973 ;
Bagnara et Matsumoto, 2006).
4.3.2. Dermal Chromatophore Unit, unité fonctionnelle des chromatophores
dermiques
L’Unité fonctionnelle des Chromatophores Dermiques (notée DCU pour Dermal
Chromatophore Unit) prend en compte tous les types de chromatophores. Les
chromatophores dermiques sont les cellules à la base du changement de couleur rapide des
vertébrés. Dans le derme de ces animaux, il existe une localisation spécifique pour chacun
des trois types de chromatophore (Bagnara et Hadley, 1973). Les lipophores forment la
couche cellulaire supérieure et se situent juste au-dessous de la lame basale et du collagène
associé. Les iridophores constituent une ou plusieurs couches de cellules sous les
lipophores. Enfin, les mélanophores sont les cellules pigmentaires les plus basales. Ces
derniers peuvent être en association très étroite avec les iridophores les recouvrant, ou situés
plus profondément dans le derme. La figure 18 est la représentation théorique d’une coupe
cutanée d’anoure, ordre choisi en exemple des amphibiens (Bagnara et al., 1968). Dans tous
Chaque mélanophore épidermique est entouré de cellules épidermiques (kératinocytes)
contenant de la mélanine. Ensemble, ces cellules forment une Unité fonctionnelle de Mélanophore Épidermique
(notée EMU).
E
M
U
Mélanophore
épidermique
Kératinocytes
44
les cas, il est fondamental que les excroissances dendritiques des mélanophores s’étendent
vers les couches supérieures pour couvrir a minima les iridophores. Ensemble, ces trois
types cellulaires constituent une unité fonctionnelle, la DCU, qui est responsable des
changements de couleur rapides (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Figure 18 : Représentation schématique de l'unité fonctionnelle de chromatophores dermiques chez les
amphibiens de l’ordre des anoures (Bagnara et al., 1968).
Il existe des particularités selon les espèces étudiées. Par exemple, chez les
amphibiens, la couche d’iridophores n’est composée que d’une cellule d’épaisseur et les
excroissances dendritiques des mélanophores se terminent au-dessus de celle-ci, mais sous
la couche de lipophores sus-jacente (Bagnara et al., 1969). La conformation de la DCU chez
les lézards est légèrement différente : les dendrites des mélanophores recouvrent à la fois
une couche de lipophores et plusieurs couches d’iridophores. La figure 19 présente une
coupe théorique de la peau d’un lézard du genre Anolis (Taylor et Hadley, 1970). Ainsi, l’un
des types cellulaires peut être plus ou moins abondant qu’un autre au sein de la DCU selon
les espèces considérées. Par exemple, la grenouille léopard Rana pipiens présente un derme
contenant peu de mélanophores par rapport au nombre d’iridophores et de xanthophores. En
revanche, la DCU de la grenouille Hyla arenicolor présente très peu de xanthophores
comparé aux autres types de chromatophores.
45
Figure 19 : Représentation schématique de l'unité fonctionnelle de chromatophores dermiques chez les
lézards du genre Anolis (Taylor et Hadley, 1970).
Une coupe transversale de peau dorsale de grenouille adulte Hyla cinerea adaptée à
un environnement clair met en évidence des mélanosomes uniformément répartis dans les
mélanophores, excepté dans l’espace au-dessus des iridophores (figure 20). Lorsque la
grenouille est exposée à un environnement aux teintes foncées, les mélanosomes se
redistribuent dans les mélanophores et recouvrent les iridophores (figure 21).
Les DCU sont particulièrement importantes dans l’expression de la couleur verte des
amphibiens et des squamates, puisque le vert résulte de l’association entre la couleur
structurelle bleue réfléchie par les iridophores et la couleur pigmentaire jaune réfléchie par
les lipophores (Bagnara et Matsumoto, 2006).
46
Figure 20 : Coupe transversale de la peau dorsale d'une grenouille Hyla cinerea adaptée à un
environnement clair (×9700) (Bagnara et al., 1968).
M : mélanophore ; I : iridophore ; X : xanthophore ; MS : mélanosomes ; BL : lame basale ;
RP : plaquettes réfléchissantes ; CV : vésicules de caroténoïdes ; PT : ptérinosomes ; C : collagène.
Les mélanosomes sont uniformément répartis dans les excroissances dendritiques du mélanophore
autour de l’iridophore, mais l’espace (noté F) au-dessus de l’iridophore est dénué de mélanosomes.
I
M
X
MS
BL
RP
CV PT
C
F
47
Figure 21 : Coupe transversale de la peau dorsale d'une grenouille Hyla cinerea adaptée à un
environnement sombre (×7300) (Bagnara et al., 1968).
Les examens histologiques révèlent que les associations de types DCU et EMU se
situent souvent à des distances considérables les unes des autres. Un exemple
particulièrement clair se manifeste par la comparaison de la distribution relative des DCU et
des EMU chez la grenouille léopard Rana pipiens qui a un motif tégumentaire bien défini,
fait de taches marron et noires sur fond vert (Bagnara et Hadley, 1973). Au niveau des
larges taches noires de l’animal, les EMU sont à la fois nombreuses et bien développées,
alors que dans le derme, les DCU ne sont pas complètement formées. Les bords de ces
taches sont précisément définis par une absence d’EMU qui va de pair avec l’apparition de
DCU bien développées. Au niveau des zones tégumentaires entre les taches, une
Ici, les mélanosomes sont répartis dans les extrémités des excroissances dendritiques du mélanophore
et remplissent ainsi l’espace au-dessus de l’iridophore.
Mélanosomes
Iridophore
48
correspondance existe entre l’absence d’EMU et la présence de DCU. Ce schéma
d’alternance entre les DCU et les EMU semble assez commun. Un autre exemple de ces
associations entre le derme et l’épiderme se présente au niveau des taches du triton vert à
points rouges Notophthalmus viridescens. Les points rouges sont formés d’érythrophores
épidermiques contenant des caroténoïdes qui sont répartis en corrélation directe et
systématique avec de discrètes zones dermiques composées d’iridophores. L’association
entre des cellules pigmentaires du derme et de l’épiderme est un phénomène fréquent chez
les animaux qui présentent des motifs en points ou en taches.
4.3.3. L’organe chromatophore des céphalopodes
Le changement de couleur chez les céphalopodes est médié par des structures complexes qui
sont considérées comme étant des organes microscopiques à part entière. En effet, les
mélanophores, les érythrophores et les xanthophores sont composées de cinq types
cellulaires différents : le chromatophore primitif, des fibres musculaires radiales, des
axones, des cellules gliales et des cellules de la gaine (Figure 22). L’ensemble de ces
structures est aussi appelé chromatophore (Cloney et Florey, 1968 ; Kaplan, 2016).
Figure 22 : Représentation schématique de l'organe chromatophore de calmar à l'état rétracté (d'après
Cloney et Florey, 1968)
Noyau du
chromatophore
Fibres
musculaires
radiales
Jonction
myo-musculaire Axone
Replis de la
membrane
cytoplasmique
Compartiment pigmenté Saccule
cytoélastique
Cellule
gliale
Chromatophore associé à des fibres nerveuses et à des fibres musculaires chez un calmar. Ici le chromatophore est à
l’état rétracté, sa membrane cytoplasmique se repliant autour du compartiment pigmenté. Seules quelques fibres
musculaires sont représentées.
49
Bien que la couleur des différentes unités de chromatophores varie selon la couleur
des pigments qu’elles contiennent, leur morphologie reste semblable. Notons que les
mélanophores aux pigments marron sont généralement plus larges que les lipophores aux
pigments jaunes ou rouges. Les aspects microscopiques des granules pigmentaires dans les
différents types de chromatophores sont comparables (Messenger, 2001). Les céphalopodes
possèdent des milliers de chromatophores contenant chacun un type de pigment, rouge,
jaune ou orange.
Les leucophores et les iridophores des céphalopodes ne contiennent pas de pigments
vrais, mais des protéines comme la réflectine, concentrées dans les rubans lamellaires. Ces
cellules réfléchissent la lumière en sélectionnant des gammes de longueurs d’onde bien
précises. Elles ne sont pas associés à des fibres musculaires (Kaplan, 2016).
50
51
DEUXIÈME PARTIE : MÉCANISMES
CELLULAIRES RESPONSABLES DES
CHANGEMENTS DE COULEURS
1. Coloration pigmentaire et coloration structurelle
1.1. Description de la synthèse additive et soustractive des couleurs
La couleur est la perception visuelle des ondes électromagnétiques appartenant au domaine
de la lumière visible et dont la longueur d'onde est comprise entre 380 nm et 780 nm pour
les hommes. Ces bornes peuvent légèrement varier d'une espèce à l'autre. Les ondes
électromagnétiques sont caractérisées par plusieurs paramètres. La couleur d'une onde est
définie par la valeur de sa longueur d'onde. L'intensité lumineuse d'une onde est définie par
la valeur de son amplitude (Lafait et Berthier, 2016).
La synthèse additive résulte du mélange d’émissions lumineuses colorées. L’addition
de trois couleurs primaires, le rouge, le bleu et le vert en proportions égales donne de la
lumière blanche. La synthèse soustractive résulte de l’absorption d’une partie du spectre
lumineux par un filtre, par exemple un colorant. L’addition de trois filtres de couleurs
primaires, le cyan, le jaune et le magenta en proportions égales absorbe la totalité du spectre
lumineux. En synthèse additive, le mélange de deux couleurs aboutit toujours à une couleur
plus lumineuse alors qu’en synthèse soustractive, la couleur obtenue est moins lumineuse
que les couleurs initiales (Larousse, 2016).
Il existe plusieurs mécanismes d'interaction entre la lumière et la matière produisant
des couleurs. La couleur pigmentaire correspond à l'absorption de certaines longueurs
d'onde par les pigments et la réflexion des autres longueurs d'onde. Les longueurs d'onde les
moins absorbées et les plus réfléchies définissent la couleur du pigment (Lafait et Berthier,
2016). Les pigments interagissent avec la lumière selon le principe de synthèse soustractive.
A l’inverse, la couleur structurelle n’est pas produite par absorption de certaines
longueurs d’onde mais elle est le résultat de la réflexion, de la diffusion ou de l’interférence
de celles-ci. Les ondes réfléchies et diffusées interagissent selon le principe de synthèse
additive (Parker et Martini, 2006).
1.2. Biochromes, supports de la couleur pigmentaire
Les pigments biologiques, aussi connus sous le nom de biochromes, sont des substances
produites par des organismes vivants dont la couleur résulte de l’absorption sélective des
ondes appartenant au spectre de la lumière visible. La partie d’une molécule responsable de
sa couleur est appelée chromophore. Un chromophore est un groupement d’atomes
comportant une alternance de simples et de doubles liaisons, c’est-à-dire une séquence de
doubles liaisons conjuguées. Les électrons d’une telle séquence forment un nuage
électronique qui entre en résonance au passage d’un rayonnement lumineux et absorbe une
52
certaine gamme de longueurs d’onde. Les longueurs d’onde qui ne sont pas absorbées sont
diffusées et définissent la couleur de la molécule. Par exemple, le β-carotène possède onze
doubles liaisons conjuguées. Cette séquence forme un chromophore qui absorbe
principalement les longueurs d’onde entre 400 nm et 500 nm. Ce pigment diffuse les
longueurs d’onde entre 500 nm et 700 nm, ce qui lui confère sa couleur orange (Zollinger,
2003). Les spectres d’absorption de deux xanthophylles et d’une ptéridine sont présentés sur
la figure 23.
Figure 23 : Spectres d’absorption de trois pigments présents dans les lipophores (d'après Grether et al.,
2004).
1.3. Schémochromes, supports de la couleur structurelle
Au cours du vingtième siècle, il a été démontré que l’aspect physique des structures
biologiques avait une importance dans la coloration de l’animal et le concept de « couleur
structurelle » a émergé. Les schémochromes sont des structures microscopiques en
multicouche dont la couleur résulte de la réflexion sélective de plusieurs longueurs d’onde
de la lumière et de la transmission des autres. Il est progressivement apparu que les
propriétés iridescentes spectaculaires de nombreux insectes et oiseaux n’étaient pas dues à
la présence de pigments bleus ou verts mais à des schémochromes et qu’elles étaient
attribuables à deux phénomènes physiques principaux (Kinoshita et al., 2008). Le premier
phénomène est l’interférence des ondes composant la lumière. Il se produit quand des
structures biologiques, telles que des fibrilles ou des lamelles sont arrangées de façon
ordonnée et forment un réseau de diffraction. Le second phénomène intervenant dans la
formation de la couleur structurelle est appelé effet Tyndall. Il traduit la diffusion, c’est-à-
dire la dispersion dans diverses directions des ondes lumineuses incidentes sur des
particules de matière de dimensions comparables à leur longueur d’onde. La couleur
structurelle comporte donc deux principales origines physiques : l’effet Tyndall et les
interférences entre les ondes lumineuses (Parker et Martini, 2006).
La tunaxanthine (Tx), l’astaxanthine (Ax) et la drosoptérine (Dr) sont des pigments respectivement jaune,
orange et rouge présents dans les xanthophores et les érythrophores de nombreux vertébrés. Ils absorbent
les longueurs d’onde entre 400 nm et 550 nm et diffusent le reste du spectre de la lumière visible.
Longueur d’onde (nm)
53
1.3.1. Effet Tyndall
La couleur structurelle est principalement responsable de la coloration bleue ou verte
observée chez les amphibiens et les lézards. La couleur bleue obtenue par l’effet Tyndall
résulte de la diffusion de la lumière réfléchie par les iridophores. Lorsque la lumière blanche
entre en contact avec les plaquettes réfléchissantes au sein de ces cellules, il se produit une
diffusion différentielle de la lumière. L’intensité de la diffusion de la lumière par des
structures de dimensions comparables aux longueurs d’onde est proportionnelle à la
fréquence de l’onde (et inversement proportionnelle à la longue d’onde). En conséquence la
lumière de couleur bleue est plus diffusée que la lumière de couleur rouge. Les courtes
longueurs d'onde sont diffractées tandis que les grandes longueurs d'onde passent au travers.
De ce fait, les iridophores peuvent apparaître bleuâtre à la lumière réfléchie, excepté
lorsqu'ils sont recouverts par des cellules pigmentaires, jaunes par exemple, qui agissent
comme des filtres et donnent une coloration finale verte. La densité et l'orientation des
plaquettes réfléchissantes de certains iridophores sont telles que la coloration bleutée
résultant de l'effet Tyndall est remplacée par la couleur blanche de la lumière qui est
totalement réfléchie. L'aspect verdâtre obtenu lorsque les iridophores sont recouverts par des
xanthophores est alors remplacé par un aspect bronzé, voir doré (Bagnara et Matsumoto,
2006 ; Parker et Martini, 2006).
1.3.2. Principe d’interférence
Lorsque deux ondes lumineuses de même longueur d'onde se rencontrent, elles interagissent
l'une avec l'autre. Cette interaction est nommée interférence et elle dépend du déphasage
entre les deux ondes (Lacour, 2005). La figure 24 présente les deux cas extrêmes
d’interférence.
Figure 24 : Phénomènes d'interférences constructives et destructives des ondes électromagnétiques.
Ondes en phase : Ondes en opposition de phase :
Interférences
constructives
Interférences
destructives
Longueur
d’onde
Amplitude
54
Si les ondes se rencontrent et se superposent en phase, l'amplitude de l'onde
résultante augmente, c'est une interférence constructive. A l'inverse, si les ondes se
superposent en opposition de phase, l'amplitude résultante diminue, c'est une interférence
destructive. Entre ces deux extrêmes, l’amplitude de l’onde résultante peut prendre toutes
les valeurs intermédiaires (Lacour, 2005).
Un filtre interférentiel, aussi appelé filtre dichroïque est une structure qui entraîne
des phénomènes d'interférence entre les ondes réfléchies à sa surface. Tous les filtres
interférentiels sont constitués d'un motif qui se répète de façon régulière et qui sépare deux
matériaux dont les indices de réfraction sont différents. Ils possèdent donc une périodicité
spatiale. Pour que les ondes appartenant au domaine de la lumière visible puissent
s'interférer, la période de base de la structure doit être de l'ordre de grandeur de la longueur
d'onde du rayonnement visible. Les filtres ou réseaux interférentiels sont à la base des
couleurs structurelles et peuvent être de différentes dimensions : unidimensionnels,
bidimensionnels ou tridimensionnels. La modélisation d’une structure interférentielle
parfaite est le cristal photonique, c’est-à-dire une structure photonique périodique de taille
inférieure à la longueur d’onde. La figure 25 présente les trois dimensions possibles d’un
réseau photonique (Lacour, 2005).
Figure 25 : Les différentes dimensions des structures interférentielles, exemple des réseaux photoniques
(d'après Lacour, 2005).
1.3.2.1. Réseau unidimensionnel
La figure 26 présente le réseau unidimensionnel le plus simple, c’est-à-dire une structure
composée de deux surfaces réfléchissantes délimitant un espace dont l’indice de réfraction
diffère de l’indice de réfraction du milieu. Un rayon lumineux d'une longueur d'onde donnée
est réfléchi par les deux surfaces en deux autres rayons de même longueur d'onde. Ces deux
rayons peuvent donc interférer entre eux. Cette interférence dépend du déphasage entre les
deux ondes. Pour une longueur d'onde donnée, le type d'interférence est fonction de deux
paramètres : la distance entre les deux surfaces réfléchissantes et l'angle d'incidence du
rayon lumineux sur ces surfaces. La géométrie de la structure détermine que, à certains
angles d'incidence, les rayons réfléchis par les deux surfaces superposées interfèrent de
façon constructive ou destructive selon leur longueur d'onde (Lafait et Berthier, 2016).
Réseau unidimensionnel Réseau bidimensionnel Réseau tridimensionnel
1D 3D 2D
55
Figure 26 : Réseau interférentiel unidimensionnel (Lafait et Berthier, 2016).
Plus la structure est composée d’un grand nombre de surfaces identiques parallèles et
à la même distance les unes des autres, plus l'amplitude des ondes en opposition de phase
diminue et plus l'amplitude des ondes en phase augmente. La couleur résultante est donc
définie par les longueurs d'onde les plus amplifiées (Lacour, 2005).
Les iridophores dermiques des céphalopodes sont formés de réseaux
unidimensionnels appelés réseaux de Bragg (DeMartini et al., 2013). Les mécanismes
cellulaires sont détaillés dans les parties suivantes.
1.3.2.2. Réseau tridimensionnel
Un réseau tridimensionnel est un arrangement périodique de matériaux dans les trois
dimensions de l’espace. Ces structures présentent des gammes de longueurs d'onde pour
lesquelles les ondes ne peuvent pas se propager et sont intégralement réfléchies quelles que
soient leurs incidences. Lorsqu’une onde atteint une telle structure, elle est diffractée, c'est-
à-dire réfléchie dans toutes les directions par les constituants qui agissent comme des
sources secondaires, de telle sorte que les ondes réfléchies peuvent interférer entre elles.
Pour une longueur d’onde donnée, ces ondes sont en phase dans certaines directions et
Ondes en phase : Interférences
constructives
Ondes en opposition de phase :
Interférences destructives
La couleur d’un réseau interférentiel dépend de son épaisseur D et de l’angle d’incidence de la
lumière θ. En (a) les ondes rouges sont en phase alors que les bleues sont en opposition de phase et
s’annulent. La structure interférentielle apparaît rouge. Pour que les ondes bleues interfèrent de manière constructive, il faut augmenter l’angle d’incidence
θ, en (b), ou diminuer l’épaisseur d, en (c). La structure interférentielle apparaît bleue.
D’après l’INSP / Jacques LAFAIT
56
produisent des interférences constructives ; elles sont en opposition de phase dans d’autres
directions et produisent des interférences destructives. Ces directions ne dépendent que du
pas du réseau (distance entre les constituants), de l’angle d’incidence de la lumière et de
l’indice de réfraction des différents matériaux (Lacour, 2005).
Une partie des iridophores dermiques des caméléons sont des structures
tridimensionnelles formées d'un arrangement périodique de nanocristaux de guanine. Les
iridophores présentant de telles structures sont nommés S-iridophores (Teyssier et al.,
2015). Les mécanismes cellulaires sont détaillés dans les parties suivantes.
1.4. Couleur résultant de l’association des différents chromatophores
Lorsque la lumière blanche frappe la surface d’un animal tel qu’une grenouille verte, le
rayonnement de courtes longueurs d’onde (violet à bleu) est en grande partie absorbé par les
pigments jaunes et rouges des lipophores. Le rayonnement de grandes longueurs d’onde
(orange à rouge) traverse en grande partie les lipophores sans être absorbé, les iridophores
sans être réfléchi puis est absorbé par la mélanine des mélanophores. Le rayonnement de
longueurs d’ondes intermédiaires (jaune à vert) traverse la couche de lipophores puis est
réfléchi par les iridophores. Ainsi, le rayonnement réfléchi sur la peau d’une grenouille
contient une proportion élevée d’ondes de longueur intermédiaire. La couleur globale de
l’animal apparaît verte. Le passage de la lumière à travers les différentes couches de
chromatophores dermiques d’une grenouille d’apparence verte est présenté sur la figure 27.
Figure 27 : Interprétation schématique de la couleur verte des vertébrés, exemple d’une grenouille verte
(d'après Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Grether et al., 2004).
Les lignes ondulées représentent les trajets des rayonnements de différentes longueurs d’onde à
travers les couches cellulaires dermiques d’une grenouille verte. La couleur verte est le résultat
de l’association entre les différents chromatophores dermiques.
Couche filtrante
Couche réfléchissante
Couche absorbante
Iridophores Leucophores
Mélanophores Fascia sous-
jacent Xanthophores Érythrophores
57
2. Critères d’évaluation de la réponse des chromatophores à un
stimulus
En raison du grand nombre d'agents physiologiques qui conditionnent la réponse des
chromatophores, il est nécessaire d'avoir certains critères afin d'évaluer le degré de cette
réponse.
La méthode de Hogben et Slome est intéressante à utiliser car même si elle est
subjective, elle reste quantitative, simple et efficace (Fingerman et al., 1967). Cette méthode
associe des indices aux mélanophores selon leur état parmi cinq états distincts représentant
les différents degrés de dispersion pigmentaire dans la cellule. L'état 1 désigne la plus forte
agrégation pigmentaire et l'état 5 la plus forte dispersion pigmentaire possible. Les états 2, 3
et 4 représentent des dispersions pigmentaires intermédiaires. Ces indices cellulaires
peuvent être étendus aux différents chromatophores (Darnell et Rittschof, 2010). Selon l'état
de dispersion pigmentaire, le chromatophore est dit ponctué, étoilé ou réticulé :
– état 1 : chromatophore ponctué,
– état 2 : chromatophore ponctué-étoilé,
– état 3 : chromatophore étoilé,
– état 4 : chromatophore étoilé-réticulé,
– état 5 : chromatophore réticulé.
Ces différents états sont présentés sur la figure 28.
Figure 28 : Présentation des cinq états de dispersion pigmentaire dans les mélanophores selon la
méthode de Hogben et Slome (d'après Bagnara et Hadley, 1973 et Darnell et Rittschof, 2010).
Cinq états de dispersion des mélanosomes dans les mélanophores sont définis par
la méthode de Hogben et Slome pour faciliter les observations. Cependant, tous les
états intermédiaires existent.
Ponctué Ponctué-étoilé Étoilé Étoilé-réticulé Réticulé
58
Une seconde méthode s'est développée pour son aspect plus objectif lors de
l'évaluation de la réponse des chromatophores à un stimulus. Elle implique la mesure
photoélectrique de la fraction de lumière incidente qui est réfléchie sur une surface donnée
de peau pigmentée, c'est-à-dire la mesure de la réflectance du tégument. La réflectance est
également nommée facteur de réflexion, elle représente la proportion de lumière réfléchie
par la surface d'un matériau (Tao et al., 2010). En outre, étant donné que cette méthode est
la plus largement utilisée in vitro, le problème lié à la mesure indirecte de la réponse
pigmentaire est évité et il devient possible d'étudier l'action de substances qui pourraient être
toxiques si elles étaient administrées in vivo. De plus, ces techniques in vitro permettent de
tester l'action de plusieurs substances administrées simultanément ou séquentiellement.
Malheureusement, elles ne permettent pas de vérifier les effets de ces substances à l'échelle
de l'individu. Ce dernier point représente une véritable limite lorsque l'on considère que la
réflectance d'une lumière incidente sur la peau d'un individu est le résultat de l'association
des différentes couches de chromatophores. En effet, tant que les différentes couches
cellulaires sont affectées d'une façon similaire par une action ou une substance, il n'y a pas
de véritables différences mais dès lors que l'un des types de chromatophores est stimulé et
que les autres ne le sont pas, les interprétations peuvent être erronées (Bagnara et Hadley,
1973). La figure 29 présente des mesures de la réflectance in vivo de la peau de deux
grenouilles Litoria rubella, l’une arborant une couleur foncée et l’autre une couleur claire.
Figure 29 : Mesure de la réflectance cutanée de grenouilles du désert Litoria rubella (Withers, 1995).
La réflectance de la peau dorsale d’une grenouille du désert Litoria rubella
sombre (indice de Hogben & Slome de 5) et d’une grenouille claire (indice
de Hogben & Slome de 2) mesurée in vivo.
Longueur d’onde (nm)
59
C'est en fonction des caractéristiques d'une étude donnée que le choix de la
technique est réalisé, les différentes méthodes se révélant plus ou moins fiables selon les
critères d'évaluation de la réponse pigmentaire (Bagnara et Hadley, 1973 ; Withers, 1995).
3. Changement de couleur dit « morphologique »
Les changements de couleur ont été divisés en deux catégories, changements
morphologiques et physiologiques. La première catégorie implique une variation de la
quantité de pigment dans l’organisme qui est lente mais durable. À l’inverse, les
changements de couleur physiologiques participent au degré de dispersion des granules
pigmentaires au sein des chromatophores par des stimuli appropriés. Ceux-ci sont rapides et
réversibles en quelques secondes à quelques heures (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Le changement de couleur chez de nombreuses espèces peut être dû à l’accumulation
ou la réduction de pigments contenus dans les cellules du tégument, c’est-à-dire à une
variation de concentration de ces cellules en pigments. Prenons l’exemple de deux individus
adultes de grenouilles Xenopus laevis placés respectivement dans un environnement noir et
un environnement blanc pendant six semaines : ils présentent des couleurs bien différentes,
le premier étant de couleur claire alors que le second est particulièrement foncé, marron à
noir (Bagnara et Hadley, 1973). L’observation microscopique de leur tégument montre que
la grenouille de couleur claire ne possède que peu de mélanophores épidermiques alors que
celle de couleur sombre possède un très grand nombre de ces mélanophores.
L’accumulation de pigments résulte de la synthèse de ces pigments et de leur dépôt par voie
cytocrine. Durant l’adaptation de ces grenouilles à un environnement de teinte foncée, les
mélanophores épidermiques déposent tellement de mélanine dans les cellules épidermiques
adjacentes que la superposition des différentes couches aboutit à une teinte complètement
noire de leur peau dorsale.
Ces variations de couleur sont médiées en parallèle par l’augmentation ou la
diminution par apoptose du nombre total de mélanophores épidermiques dans la peau de
l’animal. De telles augmentations sont imputables à une prolifération de mélanophores
existants ou à la mélanisation de mélanoblastes, c’est-à-dire de mélanophores indifférenciés
latents (Bagnara et Hadley, 1973).
Les autres types de chromatophores sont aussi actifs dans ce phénomène. Leurs
activités peuvent compléter celles des mélanophores. Ceci a bien été démontré chez certains
poissons tels que le Girella nigricans : lorsqu’ils sont maintenus dans un environnement
clair, la quantité de mélanine dans les mélanophores diminue de façon concomitante avec
une augmentation de guanine au sein des iridophores (Sumner, 1944). À l’inverse, un
environnement sombre entraîne une diminution de la quantité de guanine et une
augmentation de la concentration en mélanine. Des observations similaires ont été faites
chez les amphibiens (Bagnara et Hadley, 1973).
Ces changements de couleur sont relativement lents (plusieurs jours à plusieurs
semaines selon les espèces) et nécessitent une variation tissulaire ou cellulaire. C’est la
forme d’homochromie variable la plus lente car elle résulte d’une adaptation de longue
durée dans des environnements globalement foncés ou clairs. Afin de les différencier des
variations de couleur plus rapides qui ne modifient pas la composition chimique des cellules
60
et du tégument, certains auteurs parlent de changement de couleur morphologique dans le
premier cas et de changement de couleur physiologique dans le second cas, malgré le fait
que tous ces phénomènes soient physiologiques (Bagnara et Matsumoto, 2006). Le premier
type d’homochromie variable est observé chez les ectothermes et se rapproche de
l’homochromie dite saisonnière chez les homéothermes par les mécanismes qui sont mis en
œuvre. En effet, les modifications saisonnières de couleur chez les mammifères et les
oiseaux sont basées sur la quantité relative de mélanine qui est déposée dans les poils et les
plumes en croissance.
4. Changement de couleur dit « physiologique »
Le changement de couleur dit « physiologique » est en partie lié au déploiement des
pigments sur une surface tégumentaire plus ou moins large. Ce déploiement peut être réalisé
par extension et contraction des différents chromatophores, mais aussi par dispersion et
agrégation des granules pigmentaires dans le cytoplasme de ces cellules. Dans la majorité
des cas, et en particulier pour les mélanophores, les modifications physiologiques
impliquent la migration des granules de pigments dans des cellules dont les frontières
cytoplasmiques restent fixes (Novales et Novales, 1961). Cependant, l’extension et la
contraction des chromatophores est aussi une méthode employée par certaines espèces, en
particulier par les céphalopodes qui utilisent des fibres musculaires afin d’étendre leurs
cellules pigmentaires. Ces variations de couleur sont rapides, de quelques secondes à
quelques minutes, et nécessitent un contrôle bien précis (Bagnara et Matsumoto, 2006).
5. Migrations des organites pigmentaires au sein des mélanophores,
des lipophores et des cyanophores
Comme toutes les cellules eucaryotes, les chromatophores possèdent un cytosquelette, c’est-
à-dire un réseau structurel organisé de polymères intracellulaires. Le cytosquelette confère
classiquement les propriétés architecturales et mécaniques des cellules. Il est composé de
trois grands types de polymères protéiques : les filaments d’actine, les filaments
intermédiaires et les microtubules. Ces composants sont constamment renouvelés par des
phénomènes de polymérisation et dépolarisation. C’est un système dynamique qui a donc un
rôle structurel mais aussi fonctionnel (Wickstead et Gull, 2011).
La microscopie électronique révèle que les chromatophores des poissons, des reptiles
et des amphibiens contiennent une abondance de microtubules et de filaments d'actine bien
organisés, avec relativement peu de filaments intermédiaires. Leur densité et leur
arrangement spatial dans la cellule sont variables selon les espèces (Ligon et Mccartney,
2016 ; Murphy et Tilney, 1974 ; Obika et Negishi, 1985). Cependant, leur structure varie
peu (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Les microtubules sont les constituants les plus rigides du cytosquelette. Ce sont des
structures cylindriques creuses d’un diamètre de 25 nm et constituées d’unités de 13
61
protofilaments protéiques disposés en couronne et de longueur très variable. Ces
protofilaments sont formés par la polymérisation de dimères de tubulines (tubuline α et β).
Les microtubules sont polarisés : leur réseau cellulaire a pour centre le centrosome d’où ils
irradient, les extrémités proches du centre étant négatives et les extrémités éloignées
positives. Leur dynamique est très rapide (Wickstead et Gull, 2011).
Les microfilaments (ou filaments d’actine) sont de longues fibres de 7 nm de
diamètre composées d’unités de deux chaînes polypeptidiques flexibles et disposées en
double hélice. Ces chaînes sont formées par la polymérisation de protéines globulaires
d’actine. Le réseau de microfilaments se situe principalement en périphérie du cytoplasme.
Les filaments d’actine sont également polarisés et forment un réseau cellulaire dynamique
(Wickstead et Gull, 2011).
Les filaments intermédiaires sont les composants les plus stables du cytosquelette,
formés d’un entrelacement résistant de protéines de 8 à 10 nm. Ils participent notamment à
la structure du noyau. Les filaments intermédiaires ne sont pas polarisés (Wickstead et Gull,
2011).
Lorsque les chromatophores d’amphibiens sont exposées à des agents causant la
dépolymérisation des microtubules (tels que la colchicine, la vinblastine, le nocodazole),
l'agrégation des organites pigmentaires est totalement bloquée, le plus souvent de façon
irréversible (Obika et Negishi, 1985).
Lorsque ces cellules sont traitées avec des molécules agissant sur les filaments
d'actine en se liant aux extrémités positives et en empêchant leur polymérisation (telles que
la cytochalasine), les résultats diffèrent selon les espèces. Chez les amphibiens Xenopus et
Rana pipiens, la dispersion des mélanosomes dans les mélanophores traités avec la
cytochalasine est inhibée alors que dans des mélanophores de poisson exposés à la
cytochalasine, la migration des pigments ne semble pas affectée (Bagnara et Matsumoto,
2006 ; Schliwa et Bereiter-Hahn, 1974). Les microtubules et les microfilaments sont donc
impliqués dans la translocation des organites pigmentaires, même s’il existe une certaine
diversification dans le rôle des filaments d'actine selon les espèces étudiées. La polarité du
cytosquelette offre une double motilité avec une possibilité de migrations centripètes ou
centrifuges des organites pigmentaires (Wickstead et Gull, 2011).
Les filaments intermédiaires sont peu impliqués dans les mouvements d’organites
intracellulaires et ne semblent pas intervenir dans la translocation des organites pigmentaires
(Bagnara et Matsumoto, 2006).
Les protéines responsables des mouvements des organites le long du cytosquelette
sont des protéines motrices principalement représentées par les myosines sur les
microfilaments d’actine et par les dynéines et les kinésines sur les microtubules (Bagnara et
Matsumoto, 2006).
Les myosines utilisent l’énergie fournie par l’hydrolyse de l’ATP pour se déplacer le
long des microfilaments d’actine. Dans les mélanocytes des mammifères, la myosine V
diffère des myosines musculaires classiques. Elle est impliquée dans le transport des
mélanosomes du centre de la cellule vers la périphérie où les pigments sont transférés aux
kératinocytes adjacents. La myosine V a un rôle similaire chez les amphibiens Xenopus et
62
elle coexiste avec les dynéines et les kinésines sur les mélanosomes (Rogers et Gelfand,
1998).
Les dynéines et les kynésines utilisent respectivement l’énergie de l’hydrolyse du
GTP et de l’ATP pour se déplacer le long des microtubules. Les dynéines entraînent les
organites de l’extrémité positive vers l’extrémité négative des microtubules, c’est-à-dire
vers le centre de la cellule. Elles permettent l’agrégation des organites pigmentaires. En
effet, l’injection d’anticorps anti-dynéine inhibe l’agrégation pigmentaire dans les
mélanophores de poissons et d’amphibiens (Bagnara et Matsumoto, 2006). A l’inverse, les
kinésines permettent le déplacement des organites de l’extrémité négative vers l’extrémité
positive des microtubules, soit vers la périphérie de la cellule. Elles permettent donc la
dispersion des organites pigmentaires. Des injections d’anticorps anti-kinésine II dans des
mélanophores d’amphibiens empêchent la dispersion pigmentaire sans affecter l’agrégation
(Tuma et al., 1998). Ces résultats confirment la participation de différentes protéines
motrices dans les deux phases de dispersion et d’agrégation (Aspengren et al., 2008).
Au cours de l'agrégation et de la dispersion, les mélanosomes se déplacent de
manière synchrone le long des microtubules à une vitesse de 0,5 à 1,5 µm/s (Zaliapin et al.,
2005).
Les protéines motrices liées aux microtubules interviennent lors des déplacements
des organites pigmentaires sur de longues distances. Les dynéines permettent leur
agrégation et la kinésine II permet leur dispersion. La myosine V liée aux filaments d’actine
agit sur de plus courtes distances (Wu et al., 1998). Lors d’une agrégation, les organites
pigmentaires à la périphérie de la cellule sont déplacés le long des filaments d’actine
jusqu’aux microtubules grâce à la myosine V. Cela permet ensuite leur transport par les
dynéines vers le centre de la cellule. Lors de la dispersion, les organites pigmentaires sont
transportés par la kinésine II le long des microtubules du centre vers la périphérie de la
cellule, puis sont répartis de façon uniforme dans tout le cytoplasme par la myosine V
(Tuma et Gelfand, 1999). Ce système associant deux types de transport est appelé
« transport vésiculaire à double filament » (Gross et al., 2002). La relation entre ces deux
systèmes de motilité est représentée dans la figure 30.
63
Figure 30 : Implication du cytosquelette et des protéines motrices dans la translocation des mélanosomes
chez les téléostéens et les amphibiens (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Les mécanismes intervenant dans la translocation pigmentaire sont relativement
similaires parmi les différents clades. Le cytosquelette des chromatophores joue un rôle
majeur dans le transport des organites pigmentaires au sein des chromatophores des
squamates, des amphibiens, des poissons et des crustacés. Les céphalopodes diffèrent des
autres clades car la dispersion des pigments est passive dans la cellule. L’état d’extension du
chromatophore et donc des pigments qu’il contient dépend de la contraction des fibres
musculaires radiales qui lui sont associées (Ligon et Mccartney, 2016).
6. Variations des structures réfléchissantes au sein des iridophores
6.1. Particularités des iridophores des céphalopodes
Les céphalopodes sont capables de modifier réversiblement leur apparence en quelques
secondes. L’aptitude de leurs chromatophores à modifier la concentration de leurs pigments
et la capacité de leurs iridophores à altérer la réflexion de la lumière leur permettent de
produire des couleurs couvrant tout le spectre de la lumière visible (DeMartini et al., 2015).
Les iridophores permettent aux céphalopodes de réfléchir la lumière en sélectionnant
certaines longueurs d’onde grâce au principe d'interférence. La modification des structures
Modèle illustrant l’implication de trois protéines motrices, des microtubules et des
filaments d’actine dans la translocation des mélanosomes de poissons ou d’amphibiens. La myosine V et les filaments d’actine permettent la dispersion complète et uniforme des
mélanosomes dans le mélanophore.
Dynéine
Kinésine II
Myosine V
Agrégation Dispersion
64
microscopiques au sein de leurs rubans lamellaires peut entraîner des interférences
constructives ou destructives des ondes (Tao et al., 2010).
Pour réfléchir la lumière de façon sélective, deux critères sont indispensables : d’une
part, la distance entre les rubans lamellaires doit être de l’ordre de la longueur d’onde de la
lumière réfléchie, et d’autre part l’indice de réfraction des rubans lamellaires doit différer de
celui de l’espace présent entre ces organites (Mäthger et Hanlon, 2007). Ces deux critères
sont garantis par la structure cellulaire très particulière des iridophores. Ces cellules
possèdent de nombreuses invaginations de leur membrane cytoplasmique. La membrane
cytoplasmique s’invagine profondément dans la cellule entre les rubans lamellaires présents
dans le cytoplasme, les séparant les uns des autres par un espace extracellulaire. De plus, les
rubans lamellaires sont composés d’une accumulation de protéines, les réflectines, dont
l’indice de réfraction est plus élevé que celui du milieu extracellulaire et peut varier selon
leur conformation (Crookes, 2004 ; DeMartini et al., 2013). La figure 31 présente des
iridophores de calmar observés à l’œil nu, au microscope optique, au microscope
électronique en transmission et au microscope électronique à balayage.
Figure 31 : Iridophores de calmar de Californie Doryteuthis opalescens observés à différents
grossissements (DeMartini et al., 2013, 2015).
En (a), calmar de Californie Doryteuthis opalescens présentant des taches iridescentes rouges formées
par des iridophores. En (b), observation au microscope optique de larges chromatophores bruns et d’iridophores rouges,
oranges et jaunes. En (c), observation au microscope optique d’iridophores à un plus fort grossissement. La zone noire au
centre des cellules correspond à l’emplacement de leur noyau. La ligne blanche en pointillés représente
la section d’un iridophore observée au microscope électronique en transmission, présentée en (f). En (d), observation au microscope électronique à balayage d’un iridophore isolé. Deux sections ont été
réalisées dans la cellule afin d’exposer les replis de la membrane cytoplasmique. L’une des sections est
présentée à plus fort grossissement en (e). À chaque repli correspond un ruban lamellaire. En (f), les rubans lamellaires parallèles les uns aux autres contiennent de la réflectine condensée.
b a c
d e f
10 µm 1 µm
65
Au sein des iridophores, la succession de rubans lamellaires et d’espaces
extracellulaires forme un filtre interférentiel unidimensionnel. En effet, cette structure est
composée d'une alternance de couches protéiques de haut indice de réfraction, les rubans de
réflectines, et d’espaces de faible indice de réfraction, le milieu extracellulaire (DeMartini et
al., 2013 ; Mäthger et Hanlon, 2007 ; Tao et al., 2010). La structure du filtre interférentiel
unidimensionnel formé par les rubans lamellaires est présentée sur la figure 32.
Figure 32 : Filtre interférentiel unidimensionnel formé par la succession de rubans lamellaires et
d’espaces extracellulaires dans un iridophore de calmar Doryteuthis opalescens (Tao et al., 2010).
Lors du changement de couleur, le système nerveux central envoie un signal
électrique le long des fibres nerveuses jusqu’aux iridophores où de l'acétylcholine est
libérée. La transduction du signal conduit à la modification de la conformation de la
réflectine qui devient hydrophobe. En conséquence, il se produit un passage de l’eau
intracellulaire vers le milieu extracellulaire. La concentration en réflectine augmente et
l’épaisseur des rubans lamellaires diminue. Les invaginations membranaires permettent aux
cellules d’échanger rapidement l'eau entre le milieu intracellulaire et le milieu
extracellulaire lors de ce changement de conformation. Ainsi, le flux d’eau entre l'espace
extracellulaire et le réseau de réflectines ne perturbe pas les concentrations des autres
éléments cytoplasmiques. Les processus métaboliques ne sont donc pas modifiés (DeMartini
et al., 2013).
Lorsque les réflectines se condensent, l’indice de réfraction des rubans lamellaires
augmente, passant de 1,343 pour une concentration en réflectine de 10 mg/mL jusqu’à 1,356
pour une concentration de 50 mg/mL (Kaplan, 2016). De plus, le flux d’eau intracellulaire
vers le milieu extracellulaire cause une diminution de l’épaisseur des rubans lamellaires. A
une concentration en réflectine fixe, il existe une relation directe entre l'épaisseur des rubans
lamellaire et la longueur d'onde de la lumière réfléchie. Selon leur longueur d’onde, les
En (a), succession de rubans lamellaires (sombres) et d’espaces extracellulaires (clairs) dans un
iridophore de calmar Doryteuthis opalescens en microscopie électronique. En (b), la structure en multicouches se comporte comme un filtre interférentiel unidimensionnel
grâce à la différence entre les indices de réfraction de la réflectine (n > 1,34) et du milieu
extracellulaire (n = 1,34). Les rayons lumineux (flèches rouges) se réfléchissent à la surface des
rubans lamellaires en subissant des interférences constructives.
b a
200 nm
Ruban lamellaire
composé de
réflectines
Milieu
extracellulaire
Membrane
cytoplasmique
66
ondes réfléchies sur les différentes couches sont amplifiées par interférence constructive ou
réduites par interférence destructive. La diminution de l’épaisseur des rubans lamellaires et
l’augmentation de leur indice de réfraction sont responsables du changement de couleur des
iridophores (DeMartini et al., 2015 ; Tao et al., 2010). Enfin, la réflectance est aussi liée à la
concentration en réflectine. L’augmentation de cette concentration augmente le pourcentage
de lumière qui est réfléchie (Kaplan, 2016 ; Tao et al., 2010). Les effets d’une variation de
l’épaisseur des rubans lamellaires ou d’une variation de la concentration en réflectine sont
présentés sur la figure 33.
Figure 33 : Effets de l’épaisseur des rubans lamellaires et de la concentration en réflectine sur la
réflectance et la couleur des iridophores (d'après Tao et al., 2010).
L’application d’acétylcholine a donc deux effets sur la couleur des iridophores. Leur
couleur varie du rouge vers le bleu grâce à la réduction de l’épaisseur des rubans lamellaires
et varie d’intensité grâce à l’augmentation de leur indice de réfraction (Kaplan, 2016 ; Tao
et al., 2010). La figure 34 présente l’effet de l’acétylcholine sur la couleur des iridophores
de calmars Doryteuthis opalescens.
En (a), pour une épaisseur des rubans lamellaires constante (120 nm) lorsque la concentration en
réflectine augmente (nombres indiqués en-dessous des courbes, de 10 à 50 mg/mL) la réflectance des
rubans lamellaires augmente.
En (b), pour une concentration en réflectine constante (40 mg/mL), lorsque l’épaisseur des rubans
lamellaires augmente (nombres indiqués au-dessus des courbes, de 20 à 160 nm) la longueur d'onde
de la lumière réfléchie augmente.
b a
Longueur d’onde (nm) Longueur d’onde (nm)
Épaisseur des rubans
lamellaires (nm)
67
Figure 34 : Effets de l’acétylcholine sur la couleur des iridophores de calmars Doryteuthis opalescens
(d'après Tao et al., 2010).
6.2. Particularités des iridophores des caméléons
Les caméléons changent de couleur en partie grâce aux phénomènes de dispersion et
d'agrégation des organites pigmentaires dans leurs chromatophores dermiques. Cependant,
les variations de couleur sont aussi permises par le réglage actif d'un réseau de nanocristaux
de guanine présent dans une épaisse couche superficielle d'iridophores dermiques, notés S-
iridophores. De plus, les caméléons présentent une couche plus profonde d'iridophores
dermiques, notés D-iridophores. Ceux-ci possèdent de larges cristaux de guanine
désorganisés qui réfléchissent une proportion importante de la lumière du soleil, en
particulier dans le domaine des infrarouges. L'organisation de ces iridophores en deux
couches dermiques superposées bien distinctes constitue une nouveauté évolutive parmi les
squamates. Elle permet à certaines espèces de caméléons telles que les caméléons panthères
Furcifer pardalis de combiner un camouflage efficace par des changements rapides et
spectaculaires de couleurs et une protection thermique passive contre les rayonnements
infrarouges du soleil (Teyssier et al., 2015).
En (a), représentation schématique de la diminution de l’épaisseur des rubans lamellaires de
plusieurs iridophores de calmar lors de l’ajout d’acétylcholine sur un fragment de tégument (Ach).
En (b), le changement de couleur du rouge vers le bleu a lieu en moins de 10 minutes. Les réactions
cellulaires dépendent de l’épaisseur de l’échantillon de tissu sur lequel est appliqué l’acétylcholine.
Toutes les mesures ont été réalisées à un même angle d’incidence.
b
a
Longueur d’onde (en nm)
Durée (t) en
secondes
160 nm
20 nm
68
Une coupe transversale de la peau d’un caméléon Furcifer pardalis et l’organisation
des cristaux de guanine au sein des deux types d’iridophores rencontrés dans le derme sont
présentés sur la figure 35.
Figure 35 : Coupe transversale de la peau d’un caméléon panthère Furcifer pardalis (d'après Teyssier et
al., 2015).
L’excitation d’un caméléon panthère mâle en présence d’un autre mâle entraîne un
changement de couleur de sa peau du bleu au vert puis au rouge. Ce changement d’état a été
présenté sur la figure 3. L’évolution de la couleur de la peau est difficilement explicable
lorsque l’on considère uniquement les simples phénomènes de dispersion et d’agrégation
des pigments dans les chromatophores à cause de l’absence de pigments bleus dans les
chromatophores. Il est donc certain qu’un mécanisme de réglage de la couleur structurelle
est utilisé (Teyssier et al., 2015).
Cristaux de guanine
organisés, de tailles et
de formes similaires
En (a), coupe transversale de la peau d’un caméléon panthère observée au microscope optique. En (b), image
par microscopie électronique à transmission des nanocristaux de guanine présents dans les S-iridophores et
les D-iridophores. ep : épiderme. S-irid : couche dermique superficielle de S-iridophores. D-irid : Couche dermique profonde de
D-iridophores.
20 µm 200 nm
a b
Cristaux de guanine
désorganisés, de
tailles et de formes
différentes
69
La couche supérieure du derme se développe totalement chez les caméléons mâles
adultes, elle est réduite chez les femelles et les juvéniles. Elle contient des S-iridophores
contenant des agrégats de petits cristaux de guanine tous semblables, de diamètre d’environ
127 nm (127,4 +/- 17,8 nm). Ces nanocristaux sont organisés en un arrangement périodique
répété dans ces cellules. L’indice de réfraction des cristaux de guanine est de 1,83, alors
que celui du cytoplasme est de 1,33 (Morrison et al., 1996). Cet agencement périodique
entre les nanocristaux de guanine de haut indice de réfraction et le cytoplasme de faible
indice de réfraction forme un réseau similaire à une structure interférentielle
tridimensionnelle, c’est-à-dire à un cristal photonique (Vukusic et Sambles, 2003). Le
réseau de cristaux de guanine constitue un cristal dit cubique à faces centrées, modélisé sur
la figure 36.
Figure 36 : Modélisation du réseau de nanocristaux de guanine dans les S-iridophores d’un caméléon
Furcifer pardalis (d'après Teyssier et al., 2015).
En (a), image par microscopie électronique à transmission des nanocristaux de guanines présents dans
les S-iridophores.
En (b), modélisation en trois dimensions d’un réseau cubique à faces centrées. Un même réseau apparaît différemment selon l’axe du plan de coupe.
200 nm
a b Distance entre
deux sommets
d’un cube centré
70
Sur la figure 37, il est possible de comparer une image de microscopie électronique
obtenue sur un échantillon de peau bleu-vert d’un caméléon panthère Furcifer pardalis à
l’état de repos avec une seconde image d’un échantillon de peau jaune-orange du même
caméléon à l’état stimulé. La taille des cristaux de guanine dans les S-iridophores ne varie
pas, mais la distance entre ces cristaux est en moyenne supérieure de 30% lorsque la peau
du caméléon est à l’état stimulé par rapport à l’état de repos (Teyssier et al., 2015).
Figure 37 : Réseau de nanocristaux de guanine dans les S-iridophores à l’état de repos et à l’état stimulé
(d'après Teyssier et al., 2015).
Étant donné que même de légères modifications de la géométrie dans un cristal
photonique peuvent générer des changements considérables de couleur, il est supposé que
les caméléons panthères passent d'une couleur vive à une autre en modifiant l'espacement
des cristaux de guanine dans leurs S-iridophores (Vukusic et Sambles, 2003). Par
conséquent, il semble que ce soit l'augmentation de la distance moyenne entre les
nanocristaux chez les caméléons panthères mâles stimulés qui entraîne un changement de
réflectivité sélective des S-iridophores, des courtes longueurs d’ondes (bleu) aux longues
(rouge), provoquant ainsi le changement de couleur de la peau, du vert au jaune-orangé.
Dans certaines zones de leur peau, la couche supérieure du derme est bien développée, mais
une grande partie des S-iridophores est remplacée par des lipophores contenant des
pigments rouges. Cela explique que la peau teintée de rouge à l’état de repos ne change pas
de façon spectaculaire lors de l'excitation, mais que sa luminosité et son éclat augmentent
(Teyssier et al., 2015).
Afin de mesurer les variations de couleur, le diagramme de chromaticité de la
Commission Internationale de l’Éclairage (CIE) est utilisé. Ce diagramme permet de
représenter toutes les chromaticités perceptibles dans un plan, c’est-à-dire toutes les
couleurs en fonction de trois couleurs primaires sans tenir compte de l’intensité lumineuse.
Lors du passage de l’état de repos à l’état stimulé, la distance entre les
nanocristaux de guanine augmente.
État de repos État stimulé
200 nm
71
L’évolution de la couleur de la peau d’un caméléon mâle passant de l’état de repos à l’état
stimulé est similaire à celle d’un cristal cubique à faces centrées dont la distance entre ses
composants augmente (Teyssier et al., 2015). Ces variations sont présentées sur la figure 38.
Figure 38 : Variation de la couleur de la peau d’un caméléon Furcifer pardalis en fonction de la distance
entre les cristaux de guanine dans les S-iridophores (d'après Teyssier et al., 2015).
La figure 39a présente l’évolution de la couleur d’un échantillon de peau stimulé, de
couleur jaune-orangé, exposé à une solution hypertonique. La pression osmotique provoque
le rétrécissement du réseau de cristaux de guanine en diminuant la distance entre les
cristaux. Ce traitement entraîne un décalage de la réflectivité des S-iridophores de
l’échantillon du rouge-orangé vers le bleu, en mimant le passage du réseau de guanine d’un
état stimulé vers un état de repos. La couleur d’un S-iridophore subissant une augmentation
d’osmolarité extracellulaire évolue progressivement sur l'ensemble du spectre visible, du
rouge vers le bleu. La réflectance obtenue pour les différentes valeurs de distance entre les
cristaux de guanine correspond étroitement à celle observée in vivo. Par conséquent,
l'expansion et la contraction du réseau cristallin dans les S-iridophores sont deux
phénomènes qui suffisent à expliquer les changements réversibles de couleurs observées in
vivo. Comme aucune orientation préférentielle des cristaux de guanine par rapport à la
surface de la peau n’a été observée dans la couche de S-iridophores, la couleur globale d’un
Espace colorimétrique CIE
Sur ce diagramme colorimétrique de la Commission Internationale de l’Éclairage (CIE), les points
rouges représentent l’évolution temporelle de la couleur d’un caméléon Furcifer pardalis mâle passant
de l’état de repos à l’état stimulé. La ligne blanche en pointillés correspond à la simulation de la réponse
optique d’un cube à faces centrées de nanocristaux de guanine, dont les distances (a) entre les cristaux
sont indiquées par les chiffres et les flèches noires.
(a)
72
S-iridophore est la couleur moyenne générée par l’ensemble des directions possibles des
ondes électromagnétiques réfléchies au sein du réseau de guanine (Teyssier et al., 2015).
Elle est présentée sur la figure 39b.
Figure 39 : Évolution de la couleur d’un S-iridophore de caméléon Furcifer pardalis à l’état stimulé
soumis à une solution hypertonique (d'après Teyssier et al., 2015).
Les iridophores présents dans les couches plus profondes du derme, notés D-
iridophores, contiennent des cristaux de guanine désorganisés, de diamètres variables, plus
larges et plus aplatis que ceux des S-iridophores (200 à 600 nm de longueur, 90 à 150 nm de
hauteur) (Figure 35). Ces cristaux réfléchissent une certaine proportion du rayonnement du
soleil, spécialement dans le proche infrarouge (longueur d’onde allant de 750 nm à 1400
nm). L’épaisse couche de D-iridophores a donc le potentiel pour jouer chez certaines
espèces telles que le caméléon panthère un rôle important dans la protection thermique. Les
En (a), évolution de la couleur d’un S-iridophore à l’état stimulé dans un diagramme colorimétrique de la
Commission Internationale de l’Éclairage (CIE) lorsque celui-ci est soumis à une solution hypertonique.
La pression osmotique entraîne une diminution de la distance entre les cristaux de guanine et donc un
changement de couleur. En (b), la couleur moyenne est représentée pour certaines valeurs de distance entre les cristaux de
guanine, notée a.
b
a
Passage de
l’état stimulé
à l’état de
repos (en seconde)
Espace colorimétrique CIE
(a)
Passage de l’état stimulé à l’état de repos en fonction de la
distance ‘a’ entre les cristaux de guanine
73
D-iridophores sont présents chez tous les caméléons (Chamaeleo calytratus, Rhampholeon
spectrum, Kinyongia matschiei) quels que soient leur âge ou leur sexe (Teyssier et al.,
2015).
L’absorption de la lumière du soleil dans le proche infrarouge est diminuée
d’environ 45% grâce aux D-iridophores chez les espèces telles que le caméléon casqué
(Chamaeleo calyptratus) et le caméléon panthère (Furcifer pardalis), qui se trouvent
respectivement au nord de Madagascar et au Yémen, c’est-à-dire dans des environnements
chauds, secs et fortement exposés au soleil (Teyssier et al., 2015).
74
75
TROISIÈME PARTIE : LE CONTRÔLE
PHYSIOLOGIQUE, DE L’INTÉGRATION DES
STIMULI À LA RÉPONSE PHYSIQUE
1. Intégration des stimuli environnementaux
1.1. Rôle de la vision
Un animal doué d’homochromie variable doit nécessairement percevoir la lumière et les
couleurs de son environnement. La plupart des vertébrés présentent deux types de
photorécepteurs dans leur rétine : des bâtonnets pour la vision en faible luminosité et des
cônes pour la lumière vive et colorée (Bowmaker, 1998 ; Olsson et al., 2013).
Chez les squamates le système visuel privilégie les cônes. Cinq types de cônes sont
décrits chez les lézards diurnes et quatre d’entre eux sont utilisés pour la vision des
couleurs, chacun contenant un photo-pigment spécifique. Les lézards sont capables de
percevoir un large spectre de la lumière ainsi qu’une partie des ultraviolets (de 300 à 700
nm environ) (Olsson et al., 2013). Les poissons téléostéens ont une grande diversité de
pigments visuels. Les espèces diurnes en particulier possèdent quatre types de cônes. Ainsi
de nombreuses espèces de poissons téléostéens perçoivent les couleurs et une faible partie
des ultraviolets. Les amphibiens ont aussi la vision des couleurs, en particulier du jaune et
du vert (Bowmaker, 1998).
Les céphalopodes ont des yeux comparables à ceux des vertébrés. Leurs rétines
possèdent des composants communs de la phototransduction tels que la rhodopsine, pigment
protéique photosensible présent dans les bâtonnets des vertébrés. Cependant ils ne disposent
pas de la vision des couleurs (Mäthger et Hanlon, 2007). Même si les céphalopodes sont
incapables de détecter les couleurs, ils peuvent différencier les polarisations des ondes
lumineuses. L’agencement orthogonal des photorécepteurs offre une sensibilité optimale à
la polarisation (Kaplan, 2016). La vision de la polarisation de la lumière est plus
intéressante que la vision des couleurs pour des animaux évoluant dans un environnement
aquatique. Le spectre lumineux disponible diminue lorsque la profondeur de l'eau augmente.
De plus, lorsque la lumière pénètre dans l'eau la réflexion sur la surface polarise une grande
partie des ondes horizontalement. Dans cet environnement, une vision de la polarisation
permet de mieux détecter les objets (Mäthger et Hanlon, 2007 ; Talbot et Marshall, 2011).
1.2. Photorécepteurs cutanés
Les chromatophores répondent à divers signaux lumineux. Les yeux jouent un rôle
prépondérant dans la perception de l’environnement, mais il existe aussi des réponses non
visuelles lorsque le chromatophore est associé à des photorécepteurs. En effet, des pigments
photosensibles comme la rhodopsine ont été trouvés dans la peau de certaines espèces, au
niveau du derme et liés aux chromatophores. Les photorécepteurs cutanés utilisent une voie
de phototransduction similaire à ceux de la rétine. Ils sont couplés aux protéines G et sont
incorporés dans la membrane des cellules photoréceptrices (Kingston et al., 2015 ; Oshima,
2001).
76
Des morceaux de peau isolés de lézards du genre Anolis deviennent bruns exposés au
soleil alors qu’ils restent verts à la lumière diffuse ordinaire. La sensibilité des
chromatophores chez les amphibiens est particulièrement présente dans les stades larvaires.
Par exemple les mélanophores sur la queue de têtards du genre Xenopus sont à l’état
dispersé à l’obscurité et ils concentrent leurs mélanosomes lors d’une exposition directe à la
lumière. Enfin, des érythrophores de poissons tilapia du Nil Oreochromis niloticus cultivés
in vitro dispersent leurs pigments en quelques minutes seulement lorsqu’ils sont éclairés, le
degré de la réponse dépendant de l’intensité lumineuse (Oshima, 2001).
Chez les céphalopodes des pigments photosensibles sont présents dans les
chromatophores et sont absents dans les iridophores (Kingston et al., 2015).
La sensibilité des chromatophores à la lumière est donc présente chez certaines
espèces. Cependant, le rôle des chromatophores en tant que photorécepteurs est
généralement limité. La photosensibilité des chromatophores est souvent masquée par les
contrôles hormonaux et nerveux qui sont liés au système visuel (Oshima, 2001).
1.3. Effets de la température
Chez les lézards Anolis, le froid cause un assombrissement de leur peau, alors que les fortes
chaleurs entraînent un éclaircissement de leur peau. En considérant une valeur de
réflectance de la peau de 100% à température classique de 24°C, cette valeur augmente
jusqu'à un plateau de 115% en 15 minutes à 50°C, signe d'un éclaircissement léger, alors
qu'à une température de 4°C, elle diminue dans le même laps de temps jusqu'à un plateau de
85% correspondant à un faible assombrissement cutané (Hadley et Goldman, 1969).
A 4°C, l'effet de la MSH sur le tégument est plus lent mais il est toujours présent. La
noradrénaline, qui entraîne normalement un éclaircissement rapide d'une peau traitée à la
MSH, n'a pas d'effet à de faibles températures. Sous des conditions de basses températures,
la dispersion des organites pigmentaires peut ainsi se produire malgré une faible
température, alors que l'agrégation de ces organites est impossible. Les mécanismes
aboutissant à l'agrégation des organites pigmentaires nécessitent donc un besoin énergétique
supérieur par rapport à ceux provoquant leur dispersion (Hadley et Goldman, 1969).
De même chez les amphibiens, la température a un effet sur leur couleur. Par
exemple, une grenouille Bokermannohyla alvarengai s’éclaircit lorsqu’elle est exposée à
une forte chaleur (Figure 1(e)). Dans des conditions froides et humides, la peau de l’anoure
Chiromantis xerampelina est plus sombre que lors d'une journée chaude et sèche. Cette
espèce d’amphibien est capable de devenir entièrement blanche pour limiter au maximum
les risques de chaleur excessive et de pertes hydriques délétères (Kaul et Shoemaker, 1989 ;
Rudh et Qvarnström, 2013).
2. Les voies effectrices
Les chromatophores peuvent être affectés par le système hormonal, le système nerveux ou
par l’action directe de l’environnement (Bagnara et Matsumoto, 2006).
77
2.1. Le contrôle hormonal
2.1.1. Les hormones des vertébrés
Le contrôle hormonal existe chez la plupart des amphibiens, des squamates et des poissons
osseux. Un certain nombre de glandes endocrines libèrent des hormones qui peuvent agir
directement sur les cellules pigmentaires ou indirectement en inhibant la sécrétion d’autres
hormones qui ont une action sur ces cellules. Classiquement, les hormones sont produites
selon les couleurs (ou teintes) de l’environnement de l’animal, spécialement à des fins de
camouflage pour la fuite ou la prédation (Aspengren et al., 2008). Cependant, certaines
hormones sont aussi sécrétées en fonction de l’illumination de l’environnement. Les
chromatophores peuvent aussi être directement sensibles à des facteurs environnementaux
tels que la température ou la luminosité. Les effets directs et indirects des hormones et des
autres stimuli peuvent agir de façon simultanée, et certains chromatophores répondent
différemment à un même stimulus. La régulation de la sécrétion des hormones peut même
changer avec l’âge de certains animaux (Stuart-Fox et Moussalli, 2009).
2.1.1.1. Les hormones hypophysaires et épiphysaires
2.1.1.1.1. Relation entre hypophyse et teintes de l’environnement
2.1.1.1.1.1. La mélanocortine
La glande pituitaire, aussi appelée hypophyse est impliquée dans le contrôle de la coloration
du tégument chez les amphibiens par le biais d’hormones qu’elle sécrète. En effet,
l’implantation d’un lobe intermédiaire isolé de grenouille chez un têtard ayant subi une
hypophysectomie assombrit celui-ci. Cette expérience est la preuve de l’existence d’une
hormone stimulant les chromatophores, nommée mélanocortine ou mélanotropine ou MSH
(melanophore-stimulating hormone) (Swingle, 1921). Chez les amphibiens, cette hormone
disperse les mélanosomes au sein des mélanophores, mais elle entraîne aussi une agrégation
des plaquettes réfléchissantes au sein des iridophores et une dispersion des organites
pigmentaires dans certains lipophores (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Les chaînes peptidiques de MSH provenant de l’hypophyse de différents
mammifères présentent une même séquence d’acides aminés. Cette séquence est un
heptapeptide, c’est-à-dire qu’elle est constituée de sept acides aminés liés entre eux toujours
dans le même ordre, de l’extrémité N-terminale vers l’extrémité C-terminale : méthionine,
acide glutamique, histidine, phénylalanine, arginine, tryptophane, glycine. Cette séquence
joue un rôle important et efficace dans la mobilisation des granules pigmentaires
(Aspengren et al., 2008). L’intégralité de la séquence en acides aminés de la MSH est
présente dans la corticotropine (ou ACTH, adrenal corticotropic hormone). La présence de
la structure heptapeptidique dans l’ACTH explique l’activité stimulante de celle-ci sur les
chromatophores. De nombreuses hormones hypophysaires possèdent cette structure
heptapeptidique telles que l’α-MSH, la β-MSH, l’α2-CRF, la β-lipotropine, et l’ACTH.
Toutes ces hormones ont donc à partir d’un certain seuil de concentration sérique une
activité sur les chromatophores (Bagnara et Matsumoto, 2006). Les structures primaires de
l’α-MSH, la β-MSH et l’ACTH sont présentées sur la figure 40.
78
Figure 40 : Séquence heptapeptidique commune entre de l’α-MSH, la β-MSH et l'ACTH (d'après
Bagnara et Hadley, 1973).
L’effet des hormones sur les chromatophores est quantifiable par la méthode in vitro
de réflectance photométrique. La stimulation hormonale sur des morceaux de peau
d’amphibien entraîne le mouvement des organites pigmentaires dans les chromatophores
dermiques. Cela aboutit à un éclaircissement ou un assombrissement de la peau quantifié
grâce aux variations de réflectance sur la surface épidermique. Chez la grenouille Rana
pipiens, les variations de réflectance résultent à la fois des mouvements des mélanosomes
dans les mélanophores et des plaquettes réfléchissantes dans les iridophores (Bagnara et al.,
1968 ; Bagnara et Matsumoto, 2006).
Chez les amphibiens, la MSH entraîne une dispersion rapide des mélanosomes dans
les mélanophores épidermiques. Cette variation de distribution des organites pigmentaires
cause des changements de couleur mesurables aussi bien qualitativement à l’œil nu que par
des mesures quantitatives de réflectance. En ce qui concerne cette hormone, la réponse des
mélanophores épidermiques est très proche de celle des mélanophores dermiques. La grande
taille de ces derniers est responsable de leur forte implication dans les changements
physiologiques de couleur des vertébrés ectothermes. D’un autre côté, les mélanophores
épidermiques jouent principalement un rôle dans les changements morphologiques de
couleur, que ce soit chez les amphibiens, les reptiles, les oiseaux ou les mammifères
(Bagnara et Hadley, 1973).
L’α-MSH, la β-MSH et l’α-ACTH possèdent une même séquence de 7 acides aminés qui dispose
d’une activité sur les chromatophores.
α-MSH
α-ACTH
β-MSH
Chromatophores
Mobilisation des granules
pigmentaires
79
Chez le lézard Anolis carolinensis, les variations de réflectance mesurées lors de
l’application de MSH sur des morceaux de peau sont entièrement dues au mouvement des
mélanosomes. Ces résultats in vitro correspondent à ce qui se produit normalement chez ces
animaux in vivo. La fine sensibilité de la mesure de réflectance permet de mettre en
évidence un assombrissement de la peau de grenouille ou de lézard par la stimulation par la
MSH à une concentration de 10-11
mol/L (Carter et Shuster, 1982).
2.1.1.1.1.2. Implication de la pars intermedia dans le contrôle des
mélanophores
L’hypophyse des grenouilles est clairement délimitée en trois lobes principaux : la pars
nervosa, de la post-hypophyse, la pars intermedia et la pars distalis appartenant toutes deux
à l’anté-hypophyse (Schreibman, 2012). L’assombrissement de la peau est à la fois stimulé
par la pars intermedia et la pars distalis. La seconde est bien plus grande que la première,
mais lorsqu’elles sont utilisées à des dilutions similaires, la fraction de pars intermedia est
encore plus efficace dans le brunissement de la peau des amphibiens que la pars distalis.
Une fraction de 1/4000 de pars intermedia suffit à modifier la réflectance à la surface de
morceaux de peau. Les variations de résultat entre les utilisations des deux parties de l’anté-
hypophyse impliquent une différence qualitative ou quantitative entre les hormones
sécrétées par celles-ci. L'hypothèse retenue est la suivante : la pars distalis contient une
partie des hormones (dont la MSH) sécrétées par la pars intermedia ce qui explique que son
action soit plus faible que celle de la pars intermedia. Contrairement aux hormones de
l’anté-hypophyse, celles de la pars nervosa n’entraînent pas de variation de la réflectance
(Bagnara et Hadley, 1973).
L’ablation de la pars intermedia chez les amphibiens entraîne une défaillance dans le
contrôle des chromatophores, ce qui confirme clairement le rôle du lobe intermédiaire de
l’hypophyse et de la MSH dans la régulation de la coloration tégumentaire. L’interruption
du développement de la pars intermedia chez des larves argentées de Hyla regilla provoque
ensuite chez les grenouilles adultes l’apparition d’un tégument de couleur claire et celles-ci
sont incapables de s’adapter à un environnement de teinte foncée. Les pars distalis et
nervosa sont présentes et normalement développées chez ces individus, ce qui exclut leur
implication dans la production de MSH. Cette donnée permet de supposer que le rôle de ces
lobes hypophysaires dans le contrôle des chromatophores est minimal, voire absent (Eakin
et Bush, 1957). Toutes les hormones sécrétées par la glande anté-hypophysaire qui ont une
action sur les mélanocytes appartiennent au groupe des intermédines. La MSH appartient
évidemment à ce groupe. Les intermédines sont les hormones majoritairement responsables
de la régulation des changements de couleur chez les vertébrés (Bagnara et Matsumoto,
2006).
80
2.1.1.1.1.3. Rôle de la mélanocortine dans le contrôle des autres
chromatophores
Les iridophores qui participent au changement physiologique de couleur chez certains
amphibiens et poissons téléostéens sont sous contrôle hormonal. Dans un environnement de
couleurs foncées, ces cellules sont contractées et ont une forme sphérique, alors que dans un
environnement clair (ou lorsque l’animal est hypophysectomisé), elles s’étendent et
prennent une forme étoilée. Ce sont des intermédines qui causent l’agrégation des plaquettes
réfléchissantes autour du noyau dans les iridophores, et ces organites se redispersent dans
tout le cytoplasme en absence de ces hormones. La réponse des iridophores aux
intermédines est similaire quel que soit le stade de développement des amphibiens,
contrairement à la réponse des mélanophores qui est modifiée lors de la métamorphose du
têtard en grenouille adulte (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Tous les chromatophores d’un individu ne répondent pas à la stimulation
endocrinienne. Les iridophores, comme les mélanophores, montrent un gradient dans leur
réponse physiologique selon un axe ventro-dorsal. Les mélanophores et les iridophores sur
la partie dorsale de la peau des grenouilles répondent complètement et plus rapidement à
une injection de MSH (ou dans à un environnement aux couleurs foncées) que ceux de la
zone ventrale. A l’inverse, les effets de la MSH se dissipent plus rapidement sur les
chromatophores ventraux. Lorsque les iridophores ne sont associés à aucun mélanophore
(sur des zones ventrales), ils ne répondent à aucune stimulation endocrinienne. Cela
implique qu’il existe un seuil concernant les effets des hormones sur les chromatophores et
qu’il est déterminé au niveau cellulaire (Bagnara et Hadley, 1973).
Chez la plupart des amphibiens, les lipophores sont peu impliqués dans les
changements physiologiques de couleur. Ces chromatophores présentent majoritairement
leurs organites pigmentaires de façon dispersés. L’état de dispersion de ces organites est
faiblement modifié par la MSH. Cette hormone peut cependant provoquer une légère
dispersion des organites pigmentaires dans les xanthophores et les érythrophores (Bagnara
et Matsumoto, 2006).
Parmi les reptiles, le lézard Anolis présente des xanthophores et des iridophores qui
ne répondent à aucune stimulation hormonale (Bagnara et Hadley, 1973). De même, les
iridophores du lézard Urosaurus ornatus ne répondent pas à une administration de MSH.
Seuls les mélanophores de ces lézards sont sensibles à l’action de la MSH (Morrison et al.,
1996).
Chez les poissons, plusieurs espèces présentent des xanthophores et des
érythrophores qui dispersent leurs organites pigmentaires sous l’action d’hormones
hypophysaires (Fujii, 2000).
Les actions hormonales sur les chromatophores dépendent donc fortement de
l’espèce considérée, et la relation entre la MSH et les déplacements des organites
pigmentaires ou des plaquettes réfléchissantes n’est pas universelle (Ligon et Mccartney,
2016).
81
2.1.1.1.1.4. Rétrocontrôle de l'hypothalamus sur l'hypophyse
Le contrôle de la sécrétion d’intermédines, tout comme celui de la sécrétion des autres
hormones hypophysaires réside au niveau de l’hypothalamus. Des lésions de
l’hypothalamus entraînent un noircissement de nombreuses espèces d’amphibiens, ce qui
suggère que les fibres nerveuses hypothalamo-hypophysaires sont responsables de
l’inhibition de la pars intermedia (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Etkin, 1941 ; Guardabassi,
1961).
Un plexus, c'est-à-dire une organisation fonctionnelle et spatiale de nerfs, est présent
dans la pars intermedia de la grenouille Rana temporaria. Ces nerfs sont noradrénergiques
et sont entrelacés avec les cellules du lobe intermédiaire de l'hypophyse. Chez le crapaud
Bufo arenarum, la microscopie électronique réalisées sur les extrémités synaptiques des
nerfs dans la pars intermedia met en évidence la présence de nombreuses vésicules
contenant la noradrénaline. Le contrôle de la pars intermedia par l'hypothalamus est réalisé
par des fibres nerveuses noradrénergiques non neurosécrétantes, car la noradrénaline (aussi
appelée norépinephrine et appartenant à la famille des catécholamines) est libérée en tant
que neurotransmetteur et non en tant que neurohormone (Bagnara et Hadley, 1969 ; Iturriza,
1964).
Chez les amphibiens, le contrôle de la pars intermedia est réalisé par des nerfs
« classiques » sécrétant des neurotransmetteurs, du moins en partie, car il n'est pas exclu que
des nerfs neurosécréteurs interviennent par le biais de neurohormones (Barker Jørgensen et
Larsen, 1963). Des voies nerveuses noradrénergiques et cholinergiques interviennent dans
l’inhibition de la sécrétion de MSH. L’acétylcholine stimule de manière très efficace la
sécrétion de MSH (Dierst-Davies et al., 1966). Pour cela, la voie cholinergique inhibe une
seconde voie nerveuse noradrénergique qui est inhibitrice de la sécrétion de MSH.
L'acétylcholine libérée par les axones cholinergiques de l'hypothalamus inhibe donc les
neurones noradrénergiques qui, lorsqu'ils sont actifs, sécrètent de la noradrénaline au niveau
de l'hypophyse qui a pour fonction d'inhiber la sécrétion de MSH (Bagnara et Matsumoto,
2006).
La régulation de l’hypophyse par l’hypothalamus chez les amphibiens est présentée
sur la figure 41.
82
Figure 41 : Régulation de la sécrétion hypophysaire de MSH par l'hypothalamus chez les amphibiens
(d'après Bagnara et Hadley, 1973).
L'hypothalamus régule l'hypophyse et la sécrétion de MSH à la fois par un système
inhibiteur et un système stimulateur de la pars intermedia chez les autres vertébrés (Bagnara
et Matsumoto, 2006).
Chez les poissons, les deux catégories de synapses, neurosécrétantes et
noradrénergiques sont présentes dans la pars intermedia. Il est supposé que les neurones
sécrétant des neurohormones régulent la synthèse de MSH alors que les neurones
noradrénergiques contrôlent l'exocytose de la MSH. Une double innervation de ce type dans
le lobe intermédiaire des amphibiens est possible mais n'est pas encore démontrée (Bagnara
et Hadley, 1973).
Il est actuellement difficile d'évaluer les rôles relatifs des neurones noradrénergiques,
cholinergiques et neurosécréteurs dans la régulation de la fonction sécrétoire de la pars
intermedia. Cependant, il est probable que la majorité des vertébrés ectothermes utilisent
principalement les voies nerveuses noradrénergiques pour changer rapidement de couleur en
fonction de leur environnement (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Ligon et Mccartney, 2016).
Hypophyse
Les neurones noradrénergiques de l’hypothalamus sécrète de la noradrénaline qui inhibe la
sécrétion de MSH au niveau de la pars intermedia. La levée de cette inhibition est permise par les
neurones cholinergiques qui sécrètent de l’acétylcholine et inhibe les neurones noradrénergiques.
MSH
Pars intermedia
Hypothalamus
-
-
Acétylcholine Neurones
adrénergiques
Noradrénaline
Voie inhibitrice
Neurones
cholinergiques
Sécrétion
83
2.1.1.1.1.5. Mécanisme d'action de la mélanocortine sur ses
récepteurs
La MSH est l'hormone la plus efficace dans la dispersion des mélanosomes, mais
l'intégralité de sa séquence peptidique n'est pas nécessaire pour garantir son activité. Le
noircissement de la peau de grenouille peut être provoqué in vitro par la séquence
pentapeptidique suivante : His-Phe-Arg-Try-Gly. La séquence peptidique nécessaire à la
réponse des iridophores est identique. Ces résultats impliquent que cette séquence est
impliquée dans l'action de la MSH à la fois sur les mélanophores et les iridophores
(Bagnara, 1964a).
Les iridophores et les mélanophores possèdent des récepteurs à la MSH qui sont
identiques, ou du moins similaires. La différence de réponse entre ces deux types de
chromatophores soumis à une même stimulation par la MSH est attribuable à l'interaction du
second messager avec les éléments fonctionnels spécifiques à chaque type cellulaire. La
MSH provoque la dispersion des mélanosomes dans les mélanophores et l’agrégation des
plaquettes réfléchissantes dans les iridophores, ce qui conduit à un assombrissement global
du tégument (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Il existe des récepteurs membranaires spécifiques aux intermédines (MSH, ACTH)
sur les mélanophores et les iridophores. Ces récepteurs sont activés par la séquence
heptapeptidique spécifique aux intermédines. Au moins cinq récepteurs à la MSH sont
décrits chez les mammifères. L’utilisation de divers antagonistes spécifiques à l’α-MSH sur
des mélanophores de grenouille confirme la présence d’au moins un de ces récepteurs, noté
MCR-1 (Bagnara et Matsumoto, 2006). Les récepteurs à la MSH appartiennent à la famille
des récepteurs couplés aux protéines G. La fixation de l’hormone sur son récepteur entraîne
l’activation intracellulaire de la protéine G qui active à son tour une enzyme membranaire,
l’adénylate cyclase. Celle-ci produit de l'adénosine 3',5'-monophosphate cyclique, autrement
appelée AMPc, à partir d’ATP. L’AMPc intervient dans la chaîne de réaction en tant que
second messager (Kobayashi et al., 2016).
2.1.1.1.1.6. Second messager intracellulaire
L'AMPc est un nucléotide cyclique qui agit souvent comme intermédiaire dans l'action des
hormones ou des neurotransmetteurs (Kobayashi et al., 2016). Dans le cas de l'action de la
MSH, la production d'AMPc entraîne la dispersion des mélanosomes dans les
mélanophores. En effet, l'ajout d'AMPc sur des fragments de peau de grenouille in vitro
provoque un assombrissement et mime l'action de la MSH. La réponse est lente et minime,
mais cela s'explique par la pénétration difficile de ce nucléotide dans les cellules (Bagnara et
Hadley, 1969 ; Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Bitensky et Burstein, 1965 ; Novales et Davis,
1967).
84
En présence de MSH, seule la partie dorsale du tégument des grenouilles Rana
pipiens s'assombrit, alors que la partie ventrale ne change pas de couleur. Les mesures de
concentration d'AMPc dans le tégument de ces mêmes grenouilles après une injection de
MSH correspondent à ces observations : la concentration d'AMPc en partie dorsale
augmente alors que la concentration en partie ventrale reste stable (Abe et al., 1969).
L'ACTH, de même que la MSH, cause une augmentation de concentration
tégumentaire en AMPc d'autant plus forte que la peau s'assombrit. Les intermédines (MSH,
ACTH) agissent sur les iridophores grâce au même messager secondaire. De même que
pour les mélanophores, la présence de MSH entraîne une augmentation en AMPc
intracellulaire, uniquement dans les iridophores dorsaux. Il en résulte une agrégation des
plaquettes réfléchissantes dans ces iridophores (Bagnara et Hadley, 1969 ; Kobayashi et al.,
2016).
Le facteur dominant la régulation des mouvements pigmentaires chez les vertébrés
est la présence ou l'absence de MSH circulante dans le sang. Il existe cependant d'autres
hormones qui agissent sur les cellules pigmentaires (Ligon et Mccartney, 2016).
2.1.1.1.2. Relation entre épiphyse et luminosité de l’environnement
Alors que les environnements de teintes foncées provoquent un assombrissement de la
majorité des amphibiens, et ceux de teintes claires un éclaircissement, l’effet de la lumière à
court terme semble opposé. En effet, la lumière entraîne l’assombrissement de nombreux
amphibiens par dispersion de leurs mélanosomes alors que l’obscurité provoque leur
éclaircissement (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Des études montrent que des têtards de grenouille Xenopus laevis aveugles et placés
dans le noir s’éclaircissent de la même façon que des têtards normaux (Bagnara, 1960 ;
Laurens, 1915). Cette observation permet de suspecter l’existence d’un système
photochimique régulant l’état des mélanophores dermiques. Cependant, lorsque les larves
de grenouille sont placées dans le noir, leur éclaircissement temporaire ne semble pas être en
relation directe avec un contrôle photochimique au niveau des mélanophores mais plutôt par
un système endocrinien. En effet, la rapidité d’agrégation des mélanosomes dans le noir est
concordante avec une sécrétion hormonale dans la circulation générale. Elle va de pair avec
le plus lent rétablissement de la dispersion des organites pigmentaires qui correspond à la
diminution progressive de la concentration en hormones circulantes. Par conséquent,
l’hypothèse retenue est qu’il existe une glande qui joue à la fois le rôle de photorécepteur et
de glande endocrinienne chez les amphibiens (Bagnara, 1960). La réponse des
mélanophores de têtards de Xenopus laevis à des variations de luminosité est présentée sur
la figure 42.
85
Figure 42 : Réponse des mélanophores de têtards de Xenopus laevis à des variations de luminosité,
exprimée selon la méthode de Hogben et Slome (d'après Bagnara et Hadley, 1973).
2.1.1.1.2.1. La mélatonine
La mélatonine (ou N-acétyl-5-méthoxytryptamine) est connue pour être l’hormone centrale
de la régulation des rythmes biologiques synthétisée surtout la nuit chez les mammifères
(Hardeland et al., 2006). Sa structure biochimique est présentée sur la figure 43.
Figure 43 : Formule topologique de la mélatonine (Hardeland et al., 2006).
Les têtards s’éclaircissent durant les 28 minutes d’exposition à l’obscurité. La rapidité d’agrégation des
mélanosomes à l’obscurité et le plus lent rétablissement vers leur état initial à la lumière concordent avec
une action hormonale.
Mélanophores superficiels
Mélanophores profonds
Note sur
l’indice de
Hogben et
Slome : État de
dispersion des
mélanosomes
dans les
mélanophores
Durée d’exposition (en minutes)
Obscurité Lumière
86
C’est une neurohormone sécrétée en absence de lumière par l’épiphyse, autrement appelée
glande pinéale (ou encore organe frontal chez les amphibiens). La mélatonine provoque
l’agrégation des mélanosomes au sein des mélanophores chez les adultes et les larves de
Xenopus laevis. En présence de lumière, l’épiphyse est inhibée ce qui diminue la sécrétion
de mélatonine et entraîne la dispersion des mélanosomes dans les mélanophores et donc
l’assombrissement de l’animal. A l’inverse, l’absence de lumière stimule l’épiphyse qui
sécrète la mélatonine. Il en résulte une agrégation des mélanosomes et un éclaircissement du
tégument (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Bors et Ralston, 1951).
L’action de la mélatonine causant l’agrégation des mélanosomes est restreinte aux
mélanophores dermiques. Les mélanophores épidermiques et les iridophores ne répondent
pas à l’action directe de cette hormone (Bagnara et Matsumoto, 2006).
2.1.1.1.2.2. Rôle de l’épiphyse
Des structures photoréceptrices sont présentes dans l’épiphyse des amphibiens. Elles sont
semblables à celles trouvées dans les organes homologues chez les lézards (œil pariétal) et
chez les poissons (organe parapinéal) ou encore à celles présentes dans la rétine des yeux
des vertébrés. L’épiphyse des amphibiens est donc capable de capter une large gamme de
longueurs d’ondes et de sécréter des hormones en conséquence. Cette glande est contrôlée
directement par les variations de lumière, contrairement à l’épiphyse des mammifères qui ne
présente aucune structure photoréceptrice mais qui est régulée par une voie nerveuse activée
depuis les photorécepteurs oculaires. L’épiphyse des amphibiens est stimulée par l’absence
de lumière. Cela s’explique par les décharges spontanées de potentiels d’action au niveau de
la glande. Dans le noir, la tige épiphysaire présente une excitation périodique spontanée
sinusale qui est inhibée lorsque les photorécepteurs sont stimulés par la lumière (Bagnara et
Matsumoto, 2006).
Des études sur des têtards hypophysectomisés de Rana pipiens et de Hyla arenicolor
montrent clairement que le contrôle du blanchiment dans le noir n’est pas médié par
l’hypophyse, mais bien par l’épiphyse (Bagnara, 1964b). L’absence de MSH et des autres
intermédines chez de telles larves entraîne une contraction des mélanophores et une
extension des iridophores. Placées dans le noir, les mélanosomes qui sont déjà agrégés le
deviennent encore plus. De plus, chez ces têtards hypophysectomisés et traités avec de la
MSH, les mélanosomes se dispersent au sein des mélanophores, mais une fois placés dans le
noir, il se produit une agrégation des mélanosomes malgré la présence de MSH. Le
mécanisme intervenant dans le blanchiment à l’obscurité ne fait pas intervenir une inhibition
de l’hypophyse puisqu’il est présent chez les têtards hypophysectomisés. La mélatonine
outrepasse la dispersion des mélanosomes réalisée par les intermédines au niveau du
mélanophore et a une action prioritaire (Bagnara et Hadley, 1973).
La mélatonine n’a cependant aucun effet sur les iridophores ou sur les mélanophores
épidermiques. Elle agit uniquement sur les mélanophores dermiques. C’est un agent efficace
sur les mélanophores des têtards mais son action est très limitée sur les chromatophores des
amphibiens adultes, une fois la métamorphose des larves terminée. C’est donc une hormone
qui intervient majoritairement dans le blanchiment de ces animaux mais uniquement dans
87
leurs premiers stades de développement (Bagnara, 1964b ; Bagnara et Matsumoto, 2006).
Certains poissons ont aussi la capacité de s’assombrir en présence de lumière et de
s’éclaircir à l’obscurité. Des photorécepteurs sont bien présents dans la glande parapinéale.
Cependant, la réponse n’est pas due à la libération d’hormone circulante telle que la
mélatonine comme chez les larves d’amphibiens. Les variations de teintes selon la
luminosité sont permises par un contrôle nerveux (Fujii, 2000).
Comme la plupart des amphibiens et des poissons, quelques reptiles blanchissent à
l’obscurité. Le lézard Anolis carolinensis est de couleur marron foncé dans un
environnement de teintes foncées et fortement illuminé. Il devient vert clair lorsqu’il est
placé à l’obscurité sans changer d’environnement de la même façon que lorsqu’il est
déplacé dans un environnement aux teintes plus claires mais toujours illuminé. La différence
avec les espèces précédentes est que chez les lézards, c’est l’hypophyse qui permet le
changement de couleur lorsque celui-ci est secondaire à une variation d’intensité lumineuse
de l’environnement. En effet, l’épiphyse et la mélatonine ne semblent avoir aucun rôle
direct dans la réponse cutanée des lézards au degré d’illumination (Kleinholz, 1938a). Il
existe probablement des photorécepteurs responsables de la régulation des sécrétions de
MSH par l’hypophyse mais ceux-ci ne sont pas dans les yeux car des lézards aveugles
peuvent aussi bien blanchir à l’obscurité. Ces photorécepteurs semblent être tégumentaires.
C’est l’hypothèse la plus probable mais elle reste à démontrer (Bagnara et Matsumoto,
2006).
Toutes ces observations révèlent que de nombreuses espèces s’éclaircissent
lorsqu’elles sont placées à l’obscurité. Les mécanismes physiologiques associés à ces
variations mettent en jeu différents organes et différentes hormones selon les stades de
développement de l’animal et l’espèce concernée ; ils ne sont cependant pas encore tous
compris et détaillés (Ligon et Mccartney, 2016).
2.1.1.2. Les hormones surrénaliennes
2.1.1.2.1. Effets des catécholamines sur les chromatophores
La réponse au stress chez les vertébrés dépend à la fois du système nerveux autonome et du
système endocrinien. L'hypothalamus, l'hypophyse et les glandes surrénales sont les
premiers organes impliqués. L'activation de la partie médullaire des glandes surrénales
conduit à la libération de catécholamines, c'est-à-dire d'adrénaline, et éventuellement de
noradrénaline dans le sang. Ces molécules provoquent une réponse très rapide qui induit des
changements physiologiques permettant de faire face à la cause du stress (Natelson et al.,
1981 ; Ottaviani et Malagoli, 2009). Sous certaines conditions de stress, les variations de
couleur chez les téléostéens, les amphibiens et les squamates peuvent être médiées par
l'action des catécholamines (Bagnara et Matsumoto, 2006).
Des études in vitro sur des mélanophores de poisson, d'amphibien et de reptile ont
montré que les catécholamines entraînent par leur action directe l'agrégation des organites
pigmentaires, mais aussi leur dispersion. La capacité de ces molécules à provoquer une
agrégation ou une dispersion des mélanosomes dépend de la nature des récepteurs
88
adrénergiques présents sur les mélanophores (Horowitz, 1958 ; Kleinholz, 1938b ; Novales
et Davis, 1969). Par exemple, la grenouille mâle Litoria wilcoxii change rapidement de
couleur lors de l’amplexus, c’est-à-dire lors de l’accouplement. Le mâle s’accroche sur le
dos de la femelle et sa peau passe du marron au jaune en moins de dix minutes. Ce
changement de couleur est reproduit in vitro en injectant de l’adrénaline à une grenouille
mâle (Kindermann et al., 2014). La figure 44 compare l’effet d’une injection d’adrénaline et
celui de l’amplexus sur un individu mâle.
Figure 44 : Effet de l'amplexus et d'une injection d'adrénaline sur la couleur d'une grenouille Litoria
wilcoxii mâle (Kindermann et al., 2014).
Les catécholamines ont deux actions, l'une directe, sur les récepteurs des
chromatophores, l'autre indirecte sur l'axe hypothalamo-hypophysaire. Chez certaines
espèces d'amphibiens, l'action directe des catécholamines sur les chromatophores entraîne
un éclaircissement tégumentaire in vitro. Celle-ci est alors renforcée par leur action indirecte
inhibitrice de la sécrétion de MSH par l’hypophyse. Chez d'autres espèces d'amphibiens,
l'action directe des catécholamines entraînent une dispersion des mélanosomes et donc un
assombrissement de leur tégument. Cependant, l'action indirecte des catécholamines sur
l’hypophyse peut causer l'éclaircissement de la peau lorsque le tégument est déjà sombre,
malgré leur action directe qui tend à disperser les mélanosomes (Bagnara et Hadley, 1973).
C’est le cas des amphibiens Xenopus laevis présenté sur la figure 45.
Lors de l’amplexus, une grenouille Litoria wilcoxii mâle passe du marron au jaune
en 10 minutes. L’injection d’adrénaline provoque les mêmes variations de couleur.
Injection
d’adrénaline
Amplexus
10 min
89
Figure 45 : Action de l’adrénaline sur l’état des mélanophores de Xenopus laevis.
Lorsque de l'adrénaline est injectée à des amphibiens Xenopus laevis
hypophysectomisés ou évoluant dans un environnement à teinte claire (note tégumentaire de
1 sur l'indice de Hogben & Slome), elle provoque un assombrissement de leur tégument,
l'indice de Hogben & Slome augmentant de 1 à 3. Dans ce premier cas, l'adrénaline cause la
dispersion des mélanosomes par son action directe sur les mélanophores. Cependant, chez
des individus de la même espèce évoluant dans un environnement à teinte foncée (note
tégumentaire de 5 sur l'indice de Hogben & Slome), l'adrénaline entraîne un éclaircissement
du tégument en moins d'une heure, l'indice de Hogben & Slome diminuant de 5 à 3. La
couleur initiale est par la suite récupérée en quelques heures. Alors que l'action directe de
l'adrénaline a pour cause une dispersion des mélanosomes, l'observation in vivo montre un
éclaircissement de leur peau. Ceci s'explique par l'action indirecte de l'adrénaline sur l'axe
hypothalamo-hypophysaire. Cette molécule, par son action inhibitrice sur la sécrétion de
MSH entraîne l'agrégation partielle des mélanosomes et donc l'éclaircissement partiel du
tégument (Bagnara et Hadley, 1973).
Chez les amphibiens, les poissons et certains squamates, l'adrénaline et la
noradrénaline peuvent aussi induire une agrégation ou une dispersion des plaquettes
réfléchissantes au sein des iridophores (Fujii, 2000 ; Ligon et Mccartney, 2016).
Adrénaline
Action directe
sur les
mélanophores
Action directe
sur les
mélanophores
Action indirecte
sur l’hypophyse
Hypophyse
Diminution du
taux de MSH
circulante
-
Adrénaline
Ponctués Étoilés Réticulés Réticulés Étoilés
Environnement à teinte claire
Ou larves hypophysectomisées
Environnement à teinte foncée
90
2.1.1.2.2. Mécanisme d'action des catécholamines
Chez un lézard Anolis carolinensis au tégument assombri par la MSH, les catécholamines
causent un éclaircissement rapide in vivo et in vitro. La couleur marron foncé évolue alors
vers une couleur vert clair. Ces molécules agissent en se fixant sur des récepteurs
adrénergiques (Goldman et Hadley, 1969a ; Horowitz, 1958).
Il existe deux types de récepteurs adrénergiques : les récepteurs alpha et les
récepteurs bêta, chacun contrôlant classiquement des réponses opposées (Ligon et
Mccartney, 2016).
La présence des récepteurs alpha-2 sur les mélanophores d'Anolis carolinensis
explique l'éclaircissement tégumentaire observé en cas d'injection de catécholamines malgré
une concentration élevée en MSH. Les mélanophores de cette espèce n'étant pas innervés, la
sécrétion de catécholamines ne peut avoir lieu qu'au niveau de la glande médullosurrénale et
ces molécules doivent atteindre les récepteurs adrénergiques par voie sanguine. Dans la
nature, un stress provoque cette sécrétion et cause donc l'éclaircissement rapide de la peau
de ces lézards (Kleinholz, 1938b).
Les mélanophores d'Anolis carolinensis possèdent aussi des récepteurs bêta-
adrénergiques. Si les récepteurs alpha-adrénergiques sont bloqués, l'action de la
noradrénaline sur les récepteurs bêta-adrénergiques provoque un assombrissement de la
peau. Cependant, pour une même concentration en noradrénaline, les récepteurs alpha-
adrénergiques ont une plus forte action que les récepteurs bêta-adrénergiques sur l'état
d'agrégation des mélanosomes, ce qui explique l'éclaircissement global de la peau malgré
l'activation en parallèle des deux types de récepteurs (Goldman et Hadley, 1969a).
Il existe une grande variété de mélanophores chez les lézards Anolis carolinensis.
Certaines populations cellulaires possèdent à la fois les récepteurs alpha et bêta-
adrénergiques. D'autres possèdent uniquement des récepteurs bêta-adrénergiques, ou du
moins en grande majorité. Ces différences expliquent pourquoi les catécholamines peuvent
éclaircir ou assombrir certaines zones tégumentaires chez un même individu. Par exemple,
lors d'un stress, ces lézards s'éclaircissent de façon globale car la majorité de leurs
mélanophores possèdent des récepteurs alpha-adrénergiques en grand nombre. Néanmoins,
si ces lézards sont initialement de couleur vert clair (par exemple dans un environnement
clair), un stress peut causer l'apparition de taches plus foncées sur leur peau. Cela est dû à la
présence de mélanophores localisés et limités à ces taches. Ceux-ci ne possèdent que des
récepteurs bêta-adrénergiques. La stimulation adrénergique cause donc la dispersion de
leurs mélanosomes et l'assombrissement de certaines zones cutanées bien précises (Hadley
et Goldman, 1969).
Chez la plupart des amphibiens, les mélanophores possèdent aussi des récepteurs
alpha-adrénergiques qui peuvent entraîner un éclaircissement de leur peau. Cependant, leur
action est en général moins intense que chez les squamates. De plus, les iridophores des
amphibiens disposent de récepteurs alpha-adrénergiques. Leur stimulation par des
catécholamines provoque la dispersion de leurs plaquettes réfléchissantes, ce qui contribue à
91
l'éclaircissement de la peau (Hadley et Goldman, 1970). Il existe certaines espèces
d'amphibiens telles que les Scaphiopus couchi qui ne possèdent pas de récepteurs alpha-
adrénergiques mais qui possèdent des récepteurs bêta-adrénergiques en grand nombre. Les
catécholamines ne peuvent agir qu'en assombrissant la peau de ces amphibiens (Goldman et
Hadley, 1969b). Il existe parfois des différences au sein d'une même espèce entre des
populations de zones géographiques différentes. Par exemple, les grenouilles léopards Rana
pipiens prélevées au Mexique ont un déficit en récepteurs alpha-adrénergiques,
contrairement à celles évoluant dans le nord des États-Unis. Il en résulte des différences
chromatiques lors de certaines conditions de stress (Hadley et Goldman, 1970).
Les iridophores et les mélanophores associés pour former des DCU possèdent des
récepteurs adrénergiques qui, lorsqu'ils sont stimulés, produisent des effets chromatiques
complémentaires. La stimulation des récepteurs alpha-adrénergiques provoque l'agrégation
des mélanosomes et la dispersion des plaquettes réfléchissantes. Il en résulte un
éclaircissement global au niveau du DCU. La stimulation des récepteurs bêta-adrénergiques
entraîne la situation inverse (Bagnara et al., 1968 ; Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Ligon et
Mccartney, 2016).
2.1.1.2.3. Second messager intracellulaire
Les récepteurs bêta-1 sont connus pour activer l'adényl-cyclase par l’intermédiaire d’une
protéine G et augmenter ainsi la concentration intracellulaire en AMPc. A l'inverse, les
récepteurs alpha-2 inhibent l'adényl-cyclase et diminuent alors la concentration en AMPc.
Cette molécule est le second messager intracellulaire des catécholamines. L'augmentation de
la concentration intracellulaire en AMPc entraîne un assombrissement tégumentaire alors
que la diminution de la concentration provoque un éclaircissement. La concentration
intracellulaire en AMPc est liée à l'état d'agrégation et de dispersion des différents
chromatophores. Cette concentration est donc régulée par au moins trois types de récepteurs
: les récepteurs à la MSH, les récepteurs alpha-adrénergiques et les récepteurs bêta-
adrénergiques (Bagnara et Matsumoto, 2006).
2.1.2. Les hormones des invertébrés
Un contrôle hormonal existe chez les crustacés mais il est totalement absent chez les
céphalopodes.
Il existe 2 hormones principales régulant l'agrégation et la dispersion des organites
pigmentaires au sein des érythrophores des crustacés. L'hormone stimulant l'agrégation de
ces organites est appelée RPCH (Red Pigment-Concentrating Hormone). L'hormone
stimulant leur dispersion est nommée RPDH (Red Pigment-Dispersing Hormone). Dans un
environnement à teinte claire, l'hormone majoritaire est la RPCH. Inversement, l'hormone
majoritaire dans un environnement à teinte foncée est la RPDH (Bagnara et Hadley, 1973 ;
Rao, 2001).
92
Chez les crevettes Palaemonetes vulgaris, les deux ions mis en jeu lors de la réponse
des érythrophores à ces hormones sont le sodium et le calcium. La RPCH a une plus grande
efficacité en présence de sodium, alors que la présence de calcium entraîne une plus grande
action de la RPDH (Brown, 1935). Le sodium et le calcium interviennent dans les
mécanismes d'action de ces hormones. La RPDH provoquent une entrée de calcium dans la
cellule par des canaux calciques présents dans la membrane cytoplasmique. L'augmentation
de la concentration intracellulaire en calcium active l'adényl-cyclase qui transforme de
l'ATP en AMPc. Ce second messager cause alors la dispersion des organites pigmentaires.
En ce qui concerne la RPCH, une concentration extracellulaire élevée en sodium est
nécessaire à son action sur la cellule. Cette hormone active des pompes Na+/K
+ présentes au
niveau de la membrane cytoplasmique. L'augmentation du rapport [K+]/[Na
+] entraîne une
hyperpolarisation membranaire. L'intensité de cette hyperpolarisation est en relation directe
avec le degré d'agrégation des organites pigmentaires (Fingerman, 1969 ; Freeman et al.,
1968).
2.1.3. Contrôle hormonal et conséquences ioniques
Les hormones font varier par leur action la perméabilité ionique de la membrane cellulaire
et entraînent des mouvements ioniques. Cela a pour conséquence l'activation de certaines
enzymes et l'initiation des événements cellulaires.
Chez les lézards Anolis, l'absence d'ions Ca2+
dans le milieu extracellulaire limite
l'action de la MSH sur les mélanophores. La MSH agit sur la membrane cellulaire en
provoquant une augmentation de la concentration intracellulaire en ion Ca2+
. La dispersion
des mélanosomes est déclenchée par l'entrée des ions Ca2+
dans la cellule et elle est
proportionnelle à la quantité d'ions Ca2+
entrant dans celle-ci (Bagnara et Hadley, 1973).
De même chez les grenouilles Hyla arborea, la dispersion des mélanosomes est
régulée par l'augmentation de la concentration intracellulaire en calcium, accompagnée
simultanément d'une diminution de la concentration intracellulaire en potassium (Bagnara
et Hadley, 1973).
93
2.2. Le contrôle nerveux
2.2.1. Contrôle nerveux des vertébrés
Les mélanophores des poissons téléostéens sont en partie contrôlés par le système nerveux
autonome. Il existe chez les poissons des réseaux de fibres nerveuses associées aux
mélanophores dermiques. L’injection d’adrénaline entraîne une contraction rapide et
maximale des mélanophores. Il en est de même pour les autres catécholamines telles que la
noradrénaline. Ces observations soutiennent la présence de neurones noradrénergiques qui
agissent par le biais d’un stock de catécholamines ou directement sur les sites effecteurs des
mélanophores. Ces nerfs peuvent concentrer de la noradrénaline. Les fibres nerveuses ne
sont pas myélinisées et forment des synapses avec les mélanophores dermiques en jonctions
« neurone-chromatophores ». La stimulation électrique de ces nerfs provoque la contraction
de ces mélanophores in vitro. Cette réponse n’est pas de type « tout ou rien » ce qui
implique que plusieurs neurones contrôlent chaque mélanophore. Enfin, il semble que la
réponse des mélanophores ne soit pas causée par la propagation d’un potentiel électrique
généralisé au niveau des cellules pigmentaires mais qu’elle soit entièrement due à
l’excitation nerveuse par le biais de neurotransmetteurs (Bagnara et Matsumoto, 2006 ; Fujii
et Novales, 1969).
Le système nerveux sympathique provoque généralement l'agrégation des organites
pigmentaires par l'activation de récepteurs alpha-adrénergiques et leur dispersion par
l'activation de récepteurs bêta-adrénergiques. Chez certains poissons, grâce à l'activation
immédiate des récepteurs alpha-adrénergiques, la variation de couleur causée par un
changement de teinte dans l'environnement se produit en quelques minutes seulement (Fujii,
2000).
Chez les amphibiens, le contrôle nerveux des chromatophores est minoritaire, voire
inexistant. Les fluctuations d’intermédines circulantes suffisent à expliquer leurs
changements de couleur. Cependant, chez certaines espèces telles que la grenouille léopard
Rana pipiens, les chromatophores dermiques qui offrent une couleur particulière au niveau
de points, de taches ou de rayures sont innervés et contrôlés séparément des autres
chromatophores. Les mélanophores de ces points de couleur restent étendus en absence
d’intermédines grâce à une stimulation nerveuse directe, ce qui explique que la grenouille
placée dans un environnement clair passe du marron au vert sans modification de la couleur
de ses taches brunâtres (Bagnara et Hadley, 1973).
Les chromatophores des squamates sont en partie contrôlés par le système nerveux
autonome. Les fibres du système sympathique peuvent libérer des neurotransmetteurs au
niveau des récepteurs alpha et bêta-adrénergiques présents sur les chromatophores. Les
mécanismes d’action du système nerveux chez les squamates n’ont pas été étudiés pour de
nombreuses espèces. Cependant, il semble que l’adrénaline libérée par les fibres du système
sympathique sur les récepteurs alpha-adrénergiques inhibe l’adénylate cyclase et active la
phospholipase C. La concentration en AMPc diminue alors que la concentration en calcium
ionisé augmente ce qui entraîne l’agrégation des organites pigmentaires. L’action de
l’acétylcholine sur les récepteurs muscariniques des chromatophores a les mêmes effets. À
l’inverse, les récepteurs bêta-adrénergiques activent l’adénylate cyclase et inhibent la
phospholipase C (Ligon et Mccartney, 2016).
94
2.2.2. Contrôle nerveux des invertébrés
Les adaptations chromatiques des invertébrés sont similaires à celles des vertébrés et
résultent des mouvements d'organites pigmentaires dans les chromatophores tégumentaires.
Chez les crustacés, ces mouvements sont uniquement régulés par le système hormonal alors
que chez les céphalopodes, le contrôle des chromatophores est uniquement nerveux
(Fingerman, 1969 ; Messenger, 2001).
Un chromatophore de céphalopode est composé d’une cellule pigmentaire associée à
plusieurs autres types cellulaires. Le mouvement des pigments au sein de ces
chromatophores est géré par des fibres musculaires qui sont attachées à la cellule
pigmentaire centrale. La contraction ou la relaxation de ces fibres musculaires définit la
forme de la cellule pigmentaire et par conséquent les motifs tégumentaires. Le contrôle de la
cellule pigmentaire est donc régulé par l'innervation des muscles au sein du chromatophore.
Les chromatophores des céphalopodes sont donc entièrement sous le contrôle du système
nerveux (Messenger, 2001).
De l’acétylcholine est libéré au niveau des synapses neuromusculaires et entraîne la
contraction musculaire. Il en résulte l'expansion du chromatophore. Inversement, sans influx
nerveux, les muscles sont décontractés et le chromatophore est contracté. Chaque
chromatophore est innervé par plus d'un motoneurone, et chaque motoneurone peut activer
plusieurs fibres musculaires associées à une même cellule pigmentaire. L'activation
sélective de chacune des fibres musculaires permet de contrôler précisément la coloration
tégumentaire grâce à une expansion progressive et bien définie des chromatophores (Ligon
et Mccartney, 2016 ; Messenger, 2001).
2.3. Implication des deux voies de contrôle selon les espèces
2.3.1. Contrôle majoritairement hormonal ou nerveux
2.3.1.1. Chez les amphibiens
Les chromatophores des amphibiens sont en majorité contrôlés par le système hormonal.
Seuls les chromatophores des taches ou des rayures de quelques espèces telles que les
grenouilles Rana pipiens sont régulés par le système hormonal et le système nerveux
(Bagnara et Matsumoto, 2006).
2.3.1.2. Chez les crustacés
Les chromatophores des crustacés sont uniquement régulés par le système hormonal
(Fingerman et al., 1967 ; Fingerman, 1969).
95
2.3.1.3. Chez les céphalopodes
À l’inverse des amphibiens et des crustacés, les céphalopodes possèdent des
chromatophores uniquement contrôlés par le système nerveux. Aucune hormone
n’intervient dans leurs changements de couleur (Messenger, 2001).
2.3.2. Contrôle mixte
2.3.2.1. Chez les poissons téléostéens
Chez les poissons tels que le Cyprin doré Carassius auratus, l’anté-hypophyse est composée
de trois lobes : la pars distalis, la pars intermedia, et la pars tuberalis. L’ablation de la pars
intermedia qui contient des hormones MSH-like n’a aucun effet sur la synthèse de mélanine
alors que l’ablation de la pars tuberculis et de la pars distalis, et donc la suppression de
sécrétion d’ACTH rend la mise en place de la mélanogenèse impossible. Cela laisse
supposer que chez certaines espèces, en particulier chez les poissons, l’hormone majoritaire
dans le contrôle morphologique des chromatophores est l’ACTH et non la MSH. Cependant,
certains poissons s’assombrissent avec une injection de MSH, et d’autre s’éclaircissent. Les
poissons présentent donc une large diversité de leur sécrétion hypophysaire et il existe
probablement des différences au sein d’une même espèce.
De plus, les différentes réponses des mélanophores à la MSH ou aux autres
hormones sont potentiellement dépendantes de l’innervation de ces cellules. En effet, un
mélanophore dénervé de poissons Fundulus disperse ses mélanosomes en réponse à un
traitement à la MSH, alors que cette hormone n’a pas d’effet visible sur les mélanophores
innervés. Même après une hypophysectomie, ces poissons peuvent rapidement s’adapter à
un environnement de couleur foncée en brunissant. Cela indique que la dispersion des
mélanosomes chez certains poissons est médiée non seulement par la MSH mais aussi par
des nerfs spécifiques qui innervent les mélanophores. Lors des rapides adaptations à des
environnements de couleur foncée, ces nerfs agissent avant que les sécrétions hypophysaires
n’entrent en jeu, mais ces stimuli nerveux sont moins efficaces que la MSH (Kleinholz,
1935).
De même que pour les mélanophores, les iridophores des poissons présentent une
réponse mixte. Les iridophores semblent principalement régulés par le système nerveux,
mais il est probable que certaines hormones aient une action annexe sur ces cellules.
2.3.2.2. Chez les squamates
Parmi les squamates, les variations de couleurs sont régulées différemment selon les
espèces. Le contrôle peut être majoritairement hormonal ou nerveux, ou mixte (Ligon et
Mccartney, 2016).
Chez les reptiles, le contrôle nerveux dépend largement de l’espèce étudiée. La
contraction des mélanophores du caméléon Chameleo pumilus est clairement régulée par le
système nerveux central et par des voies sympathiques (Hogben et Mirvish, 1928). Chez
cette espèce de caméléon, le contrôle par le système nerveux prédomine largement, mais il
96
n’est pas exclu que le système hormonal puisse jouer un rôle mineur par le biais
d’intermédines. Une autre espèce de caméléon (Trioceros jacksonii) possède un contrôle
hormonal notable puisque la MSH et l’ACTH provoquent un assombrissement tégumentaire
par dispersion des mélanosomes. Chez les lézards du genre Phrynosoma, le contrôle des
chromatophores se réalise à la fois par le biais de nerfs et d’hormones. D’un autre côté,
l’anole vert Anolis carolinensis ne présente aucun contrôle nerveux de ses chromatophores.
Ceux-ci sont uniquement régulés par le système hormonal (Bagnara et Hadley, 1973 ;
Kleinholz, 1936).
L’hypophyse peut aussi avoir un rôle majeur dans le contrôle des chromatophores.
L’assombrissement de la peau des lézards Anolis est contrôlé par le lobe intermédiaire de
l’hypophyse et la MSH qu’il sécrète. En effet, une injection de MSH chez un Anolis
hypophysectomisé ou chez un Anolis non modifié provoque dans les deux cas un
assombrissement rapide de leur peau. Ce noircissement est complet en seulement quelques
minutes, la peau de ces lézards passant alors du vert au marron. Le contrôle hormonal offre
donc à lui seul une capacité d’homochromie variable rapide et efficace (Kleinholz, 1938a,
1938b). La MSH n’est pas la seule intermédine régulant la réponse des mélanophores chez
d'autres reptiles. La MSH et l’ACTH permettent toutes deux d’assombrir la peau du
caméléon de Jackson Trioceros jacksonii, même si le contrôle hormonal est minoritaire
comparé au contrôle nerveux chez ces animaux qui possèdent un contrôle multimodal
(Ligon et Mccartney, 2016).
3. Activation des protéines motrices dans les chromatophores des
vertébrés
Les protéines kinases AMPc-dépendantes (les PKA), les protéines kinases calcium-
dépendantes (les PKC) et les protéines phosphatases sont fortement impliquées dans la
translocation pigmentaire au sein des chromatophores (Gross et al., 2002). Cela explique le
rôle majeur de la concentration intracellulaire en AMPc et en calcium dans les déplacements
pigmentaires (Aspengren et al., 2008).
Les protéines phosphatases sont des enzymes capables d’enlever un groupe
phosphate à certaines protéines par déphosphorylation, alors que les protéines kinases sont
des enzymes qui peuvent ajouter un groupe phosphate à ces mêmes molécules par
phosphorylation. Les phosphatases entraînent une agrégation pigmentaire alors que les
protéines kinases permettent la dispersion pigmentaire grâce à des phénomènes de
déphosphorylation et de phosphorylation des protéines motrices du cytosquelette. Ces
protéines permettent donc la régulation des transports bidirectionnels des organites
pigmentaires (Reese et Haimo, 2000). En effet, le degré de phosphorylation des protéines
motrices contrôle la direction des organites pigmentaires en modifiant les capacités de la
dynéine et de la kinésine II à interagir avec les microtubules. La kinésine II est activée
lorsqu’elle est phosphorylée par les protéines kinases PKA et elle est inactivée lorsqu’elle
est déphosphorylée par les protéines phosphatases PP2A. A l’inverse, la dynéine est inhibée
lorsqu’elle est phosphorylée par les PKA et elle est activée lorsqu’elle est déphosphorylée
par les PP2A (Bagnara et Matsumoto, 2006). Les phénomènes d’activation et d’inactivation
des protéines motrices sur les microtubules sont présentés sur la figure 46.
97
Figure 46 : Transport bidirectionnel des mélanosomes le long des microtubules (d'après Reese et Haimo,
2000).
4. Contrôle physiologique des iridophores, particularités de certaines
espèces
4.1. Chez les caméléons
Les contrôles neuronaux et hormonaux des iridophores des caméléons sont encore à
explorer. Il existe plusieurs hypothèses à ce sujet (Ligon et Mccartney, 2016).
Les iridophores ayant la même origine embryonnaire que les autres chromatophores
au niveau de la crête neurale, la première hypothèse suppose que les mécanismes de
contrôle soient relativement similaires. Le système nerveux dominerait donc dans le
contrôle de tous les chromatophores chez les caméléons, ce qui expliquerait la rapidité du
changement de leur couleur. La modification de la distance entre les nanocristaux de
guanine pourrait faire intervenir le cytosquelette et le déplacement d’organites pigmentaires
dans les iridophores. La seconde hypothèse impliquerait des mouvements ioniques
susceptibles de modifier l’osmolarité des iridophores et d’entraîner une diminution ou une
augmentation de la quantité d’eau dans ces cellules. La distance entre les nanocristaux serait
alors modifiée (Teyssier et al., 2015).
La phosphorylation et la déphosphorylation des protéines motrices (respectivement réalisées par les
protéines kinases A (PKA) et les protéines phosphatases 2A (PP2A)) contrôlent la direction du
transport des mélanosomes dans les mélanophores. Un organite pigmentaire est lié au microtubule par les formes actives des protéines motrices (têtes
remplies), alors que les protéines inactivées (têtes vides) sont incapables de se lier au microtubule.
98
4.2. Chez les céphalopodes
Les iridophores des céphalopodes sont uniquement régulés par le système nerveux central
(Wardill et al., 2012).
Les axones de cellules nerveuses marqués avec des colorants fluorescents ont été
observés au contact des iridophores. Lorsque des nerfs liés à des iridophores sont stimulés
électriquement, la couleur du tégument change. La stimulation électrique provoque une
augmentation de la réflectance des iridophores ainsi qu’une diminution de la longueur
d'onde de la lumière réfléchie. Ce processus se produit rapidement et en moins de trente
secondes (Wardill et al., 2012). La stimulation électrique des fibres nerveuses du système
nerveux central déclenche une libération d’acétylcholine au niveau des iridophores. Cette
molécule initie la transduction du signal (Kaplan, 2016).
Il existe une relation directe entre la quantité d'acétylcholine libérée au niveau des
iridophores et les variations de couleur. À des doses faibles (10-7
mol/L), les tissus
apparaissent rouges, tandis qu'à des doses plus élevées (10-6
mol/L) les tissus acquièrent une
couleur dorée, verte ou bleue. Cependant, toute concentration supérieure à 10-6
mol/L en
acétylcholine ne semble avoir aucun autre effet sur la couleur des iridophores. C’est donc la
dose d'acétylcholine minimale nécessaire pour provoquer l'activation complète des
iridophores. L’application d’acétylcholine modifie la structure des rubans lamellaires dans
les iridophores. Lorsque l'acétylcholine est ajoutée sur des iridophores, l'épaisseur des
rubans lamellaires diminue. L'espace entre les rubans lamellaires augmente également
(Kaplan, 2016).
Les iridophores possèdent des récepteurs muscariniques et nicotiniques.
L’acétylcholine peut se lier à la fois sur ces deux types de récepteurs cholinergiques.
Cependant, c’est l’activation des récepteurs muscariniques qui provoque la transduction du
signal et qui amorce le changement de couleur des iridophores (Kaplan, 2016 ; Mäthger et
al., 2009).
Le récepteur muscarinique est un récepteur couplé aux protéines de type G
(Kingston et al., 2015). Cette protéine G active une enzyme transmembranaire, la
phospholipase C, qui clive le phosphatidylinositol (PIP2) en inositol triphosphate (IP3) et en
diacylglycérol (DAG). L’IP3 se lie au réticulum endoplasmique ce qui provoque une
libération de calcium dans le cytoplasme et la formation de complexes calcium-calmoduline
(DeMartini et al., 2013). Le calcium intracellulaire est bien nécessaire à la transduction du
signal car lorsque les canaux calciques sont bloquées avec du vérapamil, l'activation des
iridophores est inhibée. Le calcium agit donc comme messager secondaire en se fixant sur la
calmoduline. L'une des fonctions de la calmoduline est l’activation de protéines kinases et
de protéines phosphatases (Kaplan, 2016).
La phosphorylation de la réflectine par les protéines kinases induit un changement de
sa conformation (Tao et al., 2010). En effet, la réflectine est une protéine chargée
positivement. L'ajout de groupements phosphate chargés négativement réduit les forces
électrostatiques impliquées dans le maintien de la conformation tertiaire de cette protéine.
La conformation de la réflectine est alors modifiée en faveur d’une augmentation de son
caractère hydrophobe. Les forces hydrophobes à courte portée conduisent à la condensation
de la réflectine. Cela entraîne une augmentation de la concentration protéique et de l'indice
99
de réfraction des rubans lamellaires. Le flux d’eau vers le milieu extracellulaire cause une
diminution de l’épaisseur des rubans lamellaires (DeMartini et al., 2015 ; Tao et al., 2010).
Ces modifications permettent aux iridophores de changer de couleur en quelques secondes à
quelques minutes. La longueur d’onde de la lumière réfléchie par les iridophores diminue
lorsque la concentration en acétylcholine augmente (Kaplan, 2016).
Enfin, les phosphatases qui sont également activées par la calmoduline permettent à
la réflectine de retrouver sa conformation initiale (DeMartini et al., 2013). La figure 47
résume les mécanismes cellulaires intervenant lors de l’action de l’acétylcholine sur les
iridophores.
Figure 47 : Mécanismes intracellulaires induits par l'acétylcholine dans les iridophores de céphalopodes
(DeMartini et al., 2013).
L’acétylcholine se lie aux récepteurs muscariniques et initie la voie des protéines G. La sous-unité Gα
active une enzyme membranaire, la phospholipase C qui clive le phosphatidylinositol-diphosphate
(PIP2) en inositol-triphosphate (IP3) et en diacylglycérol (DAG). L’inositol-triphosphate se lie à des
canaux calciques du réticulum endoplasmique ce qui provoque la libération d’ions calcium Ca2+
. Il se
forme alors des complexes calcium-calmoduline qui activent les protéines kinases. La phosphorylation
de la réflectine entraîne un changement de conformation de la protéine et un flux d’eau vers le milieu
extracellulaire à travers les invaginations de la membrane cytoplasmique.
Ach : acétylcholine ; mAChR : récepteur muscarinique à l’acétycholine ; Gα-ß-γ : sous-unités de la
protéine G ; PLC : phospholipase C ; DAG : diacylglycérol ; PIP2 : phosphatidylinositol biphosphate ;
IP3 : inositol triphosphate ; CaM : calmoduline ; PK : protéine kinase ; PP : protéine phosphatase.
100
101
CONCLUSION
Le changement de couleur chez les vertébrés est le résultat de mouvements dynamiques des
pigments contenus dans les chromatophores et de leurs interactions au sein des unités de
chromatophores dermiques. Régulés par des hormones, des neurotransmetteurs et des
facteurs environnementaux comme la lumière et la température, les chromatophores
subissent une réorganisation rapide de leurs organites afin de produire un large éventail
chromatique. Selon le stimulus, les différents types de chromatophores répondent en
augmentant ou en diminuant leur participation relative à la couleur finale en dispersant ou
en agrégeant leurs organites pigmentaires.
Déterminer les raisons pour lesquelles les organismes subissent un changement de
couleur physiologique est une étape cruciale vers la compréhension de l’ensemble des
processus de contrôle et de fonctionnement des chromatophores. Les trois fonctions les plus
importantes de l’homochromie variable sont le camouflage, la communication et la
thermorégulation. Alors que l’objectif du camouflage est d’éviter la détection par les
prédateurs ou par les proies grâce à une coloration cryptique, la sélection naturelle dans un
contexte social et la sélection sexuelle favorisent des colorations bien visibles pour la
communication intraspécifique. Les animaux doués d’homochromie variable ont l’avantage
de pouvoir communiquer à l’aide de signaux chromatiques tout en présentant un risque de
prédation réduit par rapport aux espèces qui arborent une coloration et des motifs statiques à
long terme. Ainsi un changement rapide de couleur peut faciliter les parades nuptiales ou les
interactions intraspécifiques agonistiques sans sacrifier la capacité de se camoufler le reste
du temps. Des compromis sont potentiellement réalisés pour gérer les besoins
physiologiques lorsque ceux-ci sont incompatibles.
Les mécanismes et les systèmes de contrôle impliqués dans l’homochromie variable
semblent très fortement corrélés à la rapidité des changements de couleur. La couleur des
amphibiens varie généralement en plusieurs minutes à plusieurs heures, principalement
grâce aux translocations des organites pigmentaires au sein de leurs mélanophores,
érythrophores et xanthophores. Les déplacements de ces organites nécessitent l’intervention
du cytosquelette dans les chromatophores et ils sont principalement régulés par le système
hormonal. À l’inverse, les couleurs des céphalopodes peuvent varier plusieurs fois par
seconde. Leurs chromatophores s’étirent ou se contractent par l’action de fibres musculaires
radiales, ce qui entraîne un étalement ou une agrégation très rapide des pigments contenus
dans leur saccule cytoélastique. Le spectre de réflexion de leurs iridophores peut varier très
rapidement grâce à des flux d’eau entre les milieux intra- et extracellulaires. Toutes ces
modifications sont contrôlées par le système nerveux.
Quel que soit le système contrôlant les chromatophores, la majorité des études
convergent vers des voies de signalisation cellulaire similaires. Une hormone circulante ou
un neurotransmetteur agit sur les chromatophores via des récepteurs spécifiques. La
transduction du signal provoque l’activation ou l’inhibition de l’adénylate cyclase ou de la
phospholipase C. L’adénylate cyclase produit de l’AMPc qui agit sur des protéines kinases
AMPc-dépendantes. La phospholipase C entraîne indirectement une libération de calcium
ionique dans la cellule qui agit sur des protéines kinases calcium-dépendantes. Les réactions
de phosphorylation au sein des chromatophores sont à la base de leurs modifications
morphologiques et des variations de couleur.
102
103
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LES MÉCANISMES PHYSIOLOGIQUES
RESPONSABLES DE L’HOMOCHROMIE
VARIABLE DANS LE RÈGNE ANIMAL
NOM et Prénom : FISZMAN Pierre-Louis
Résumé
L’homochromie variable caractérise l’aptitude d’un animal à changer les couleurs de son
tégument en un laps de temps court et de manière réversible. Cette capacité a plusieurs
fonctions dont les principales sont le camouflage, la communication intraspécifique et la
thermorégulation. Elle est principalement rencontrée chez les amphibiens, les squamates, les
poissons osseux, les céphalopodes et les crustacés. Ces cinq clades regroupent des espèces
possédant des cellules pigmentaires dermiques appelées chromatophores et classées en
plusieurs catégories. Les mélanophores (brun à noir), les xanthophores (jaune), les
érythrophores (rouge) et les cyanophores (bleu) sont des cellules qui présentent de fortes
concentrations en pigments dans des organites spécialisés. Les iridophores et les
leucophores sont des cellules qui réfléchissent une partie du spectre de la lumière visible
grâce à des structures particulières. Ces différents types de chromatophores sont
régulièrement associés les uns avec les autres pour former des unités dermiques
fonctionnelles. Les changements de couleur sont effectués par la dispersion ou l’agrégation
des organites pigmentaires et par la modification des structures réfléchissantes. Selon les
espèces, le contrôle peut être uniquement nerveux ou hormonal, ou mixte. Les principales
molécules qui agissent sur les chromatophores sont la mélanocortine (MSH), la mélatonine
et les catécholamines. Le contrôle par le système nerveux sympathique se fait via des
récepteurs adrénergiques et cholinergiques.
Mots clés
MIMETISME – PHYSIOLOGIE – COULEUR – PIGMENTATION – TEGUMENT –
CAMELEON – SQUAMATE – CEPHALOPODE – AMPHIBIEN
Jury :
Président : Pr
Directeur : Dr PILOT-STORCK Fanny
Assesseur : Dr GILBERT Caroline
PHYSIOLOGICAL MECHANISMS IN CHARGE
OF DYNAMIC COLOR CHANGES IN ANIMAL
KINGDOM
SURNAME : FISZMAN
Given name : Pierre-Louis
Summary
Physiological color change is the ability of an animal to modify the colors of its integument
in a short time and in a reversible way. This ability has several functions such as
camouflage, intraspecific communication and thermoregulation. It is mainly encountered in
amphibians, scaled reptiles, teleosts fishes, cephalopods and crustaceans. These five clades
include species with dermal pigment-containing and light-reflecting cells called
chromatophores which are classified into several categories. Melanophores (brown to
black), xanthophores (yellow), erythrophores (red) and cyanophores (blue) are cells
presenting high concentrations of pigments in specialized organelles. Iridophores and
leucophores are cells that reflect part of the visible spectrum through special structures.
These different types of chromatophores are often associated with each other to form a
morphologically and physiologically distinct structure, the dermal chromatophore unit.
Color changes are created by the dispersion or aggregation of pigmented organelles and by
changes in reflecting structures. Depending on the species, controls may be nervous,
hormonal or mixed. The major molecules that act on chromatophores are melanocyte-
stimulating hormone (MSH), melatonin and catecholamines. Chromatophores are also
regulated by the sympathetic nervous system, through adrenergic and cholinergic receptors.
Keywords
MIMICRY – CAMOUFLAGE – PHYSIOLOGY – COLOR – PIGMENTATION –
INTEGUMENT – CHAMELEON – SQUAMATA – CEPHALOPOD – AMPHIBIAN
Jury :
President : Pr.
Director : Dr. PILOT-STORCK Fanny
Assessor : Dr. GILBERT Caroline