Les echos capital-risque français

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Tous droits réservés - Les Echos 201010/12/2010P.15Idées

Auriez-vous investi dans une sociétédont le fondateur de vingt-neuf ans

se présente en caleçon sur son profilTwitter ? Le « gamin » en question, c’estAndrew Mason, le fondateur de lasociété Groupon, qui vient de refuserune offre de rachat par Google pour…5 milliards d’euros, selon le site Tech-Crunch. Pourquoi un tel prix pour unesociété de deux ans d’existence ? Saréussite est tout simplement excep-tionnelle : Groupon est présent surtrois continents et emploie 1.600 sala-riés. Mais surtout il a atteint 1 milliardd’euros de chiffre d’affaires en rythmeannuel et serait profitable depuis unan !

Andrew Mason a vingt-sept ans lors-qu’il décide de quitter l’université deChicago pour créer Groupon. Ayantétudié les différentes tentatives de sitesd’achats groupés qui ont toutes été deséchecs, il décide d’appliquer ce con-cept, non plus à des produits, mais àdes services.

Lancé en novembre 2008, le site con-naît un succès immédiat. Son prin-cipe : offrir des discounts élevés sur desprestations de types hôtels, restau-rants, clubs de sport, coiffeurs, centresde soins… Les remises vont de 40% à90% du prix normal. Si suffisammentde personnes achètent, tous le mondebénéficie de l’offre. S’il n’y a pas unnombre suffisant d’acheteurs, per-sonne ne peut profiter de l’offre. Grou-pon collecte les paiements et reverseensuite les sommes aux commerçants,moins sa commission.

Groupon est le dernier exemple endate d’une lignée de sociétés qui ontconnu des croissances encore jamaisvues. Comme Facebook, qui a été crééen 2004 par Mark Zuckerberg, alorsqu’il avait vingt ans et qui compteaujourd’hui plus de 500 millions d’uti-lisateurs dans le monde. Son chiffred’affaires est estimé par les experts

autour de 800 millions de dollars. Maissurtout sa valorisation a atteint les 50milliards de dollars lors des récentestransactions secondaires. On pourraitégalement parler de Zynga, dans ledomaine des jeux sur réseaux sociaux,

qui a été créé en 2007 et compte déjà215 millions d’utilisateurs. Ou encoreTwitter, qui a atteint 175 millions d’uti-lisateurs seulement quatre annéesaprès sa création.

Ces « turbo-réussites » ont toutes encommun qu’elles ont été financées pardes fonds de capital-risque et ce dèsleur démarrage. Elles l’ont été malgréles caractéristiques suivantes : premiè-rement, leurs fondateurs étaient trèsjeunes et sans expérience ; deuxième-ment, elles n’avaient à la date de leurspremiers financements encore aucunchiffre d’affaires ; troisièmement, leursactivités reposaient sur de nouveauxmodèles économiques, totalementinnovants et non encore prouvés.

En France, il suffit (sauf à de très raresexceptions) d’une seule de ces caracté-ristiques pour ne pas être financé parune société de capital-risque. Alorsquand les trois sont réunies ! Ainsi, àtitre d’exemple, aucune des trois trèsbelles réussites de l’Internet françaisque sont Vente-privée, PriceMinister etMeetic, n’a été financée à son démar-rage par un capital-risqueur français.

Or, ces « turbo-réussites » sont les seu-les à même de procurer aux investis-seurs qui les ont accompagnées lesretours sur investissements attenduspar leurs bailleurs de fonds, institu-tionnels ou particuliers. C’est ainsi que

le premier investisseur dans Facebook,le fonds américain Accel Partners,vient de revendre pour un demi-mil-liard de dollars une partie (20 %) des12,7 millions de dollars qu’il avaitinvestis en 2005, multipliant ainsi samise initiale par 200 en cinq ans !

Au moment ou la profession du capi-tal-risque s’interroge sur son modèleéconomique face à l’absence de résul-tats, puissent ces exemples faire bou-ger les choses !

C’est en tout cas l’opportunité qu’ontdécidé de saisir nos Andrew Mason ouMark Zuckerberg français en créant àleur tour leur société de capital-risque.Les douze derniers mois ont ainsi suc-cessivement vu la création du fondsJaina par Marc Simoncini, puis KimaVentures par Xavier Niel et enfin Ker-nel par Pierre Kosciusko-Morizet.

Coïncidence, ces trois fonds ont tousdécidé d’investir dans des entreprisesqui ont le fameux profil décrit plushaut.

Christophe Chaussonest président de Chausson Finance.

LE POINT DE VUE DE CHRISTOPHE CHAUSSON

Lettre ouverte aux capital-risqueursfrançais : et vous, l’auriez-vous fait ?

Aucune des trois très belles réussites de l’Internetfrançais que sont Vente-privée, PriceMinisteret Meetic, n’a été financée à son démarragepar un capital-risqueur français.