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Guide managérial Connaître et reconnaître l’encadrement intermédiaire dans la fonction publique territoriale LES CAHIERS de N°9 juin 2O13 En partenariat avec :

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Guide managérial

Connaître et reconnaître l’encadrement intermédiaire dans la fonction publique territoriale

Les Cahiersde

N°9 juin 2O13

En partenariat avec :

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Les auteurs de cette étude et les personnes citées sont seuls responsables des opinions exprimées dans ce cahier. L’étude a été réalisée à la demande de l’Observatoire social ter-ritorial de la MNT en partenariat avec l’INET et avec l’AATF. Ces opinions ne reflètent pas nécessairement les vues des commanditaires, mais ont pour objet de nourrir un débat jugé nécessaire par l’Observatoire, illustré par l’atelier dont les travaux sont reproduits dans la publication du cahier.

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Connaître et reconnaître l’encadrement intermédiaire dans la fonction publique territoriale

Etude réalisée par des élèves-administrateurs territoriaux

de la promotion Paul ELUARD

Emilie AGNOUX

Marin BOURGADE

Thierry COLLETTE

Sandra DAHER

Siham EL BOUKILI

Claire EPAILLARD

Géraldine MALATIER

Renaud MOUTARDE

Pour l’Observatoire social territorial

de la Mutuelle nationale territoriale (MNT)

en partenariat avec l’Institut national des études territoriales (INET)

et l’association des Administrateurs territoriaux de France (AATF)

Juin 2013

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Sommaire

« Intermédiaire mais central pour la bonne marche des collectivités », par Jean-René MOREAU 7

« Accompagner le changement auprès des cadres », par Marie-Francine FRANÇOIS 9

Préambule 11

Remerciements 13

Introduction : au carrefour des hommes et des idées, les cadres intermédiaires en collectivité 15

1re partie : une définition renouvelée des cadres intermédiaires en réponse à l’hétérogénéité des collectivités 19

A. Des situations hétérogènes selon les collectivités 191. L’hétérogénéité des appellations et représentations du cadre intermédiaire 19

2. Diversité des collectivités territoriales, des filières et du management 21

B. Le choix d’une définition renouvelée des cadres intermédiaires 231. Deux critères cumulatifs de définition : le positionnement et les missions 23

2. S’affranchir des catégories usuelles 24

3. S’identifier prioritairement par ses missions 26

4. Un périmètre des missions déterminé par la configuration des équipes 27

2e partie : des difficultés avérées mais une absence de malaise généralisé 29

A. Pivot de l’organisation, supportant des attentes croissantes 291. Des pressions croissantes, sources d’une montée en compétence managériale insuffisamment reconnue 29

2. Le défi de la circulation de l’information entre direction générale et équipes 35

B. Autonomie limitée et manque d’identification dans l’organisation 40

1. Un potentiel souvent sous-exploité 40

2. Une recherche contrainte de marges de manœuvre 46

C. Tableau de synthèse des principales difficultés identifiées 53

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Sommaire

3e partie : vingt-trois préconisations pour donner aux cadres intermédiaires les moyens de jouer pleinement leur rôle 55

Préconisation n° 1 : identifier les cadres intermédiaires sur la base de leurs missions et de leur positionnement 55

A. Valoriser la dimension managériale de leurs missions 56Préconisation n° 2 : intégrer systématiquement la fonction de management dans les fiches de postes 56

Préconisation n° 3 : recruter en tenant compte des compétences managériales 57

Préconisation n° 4 : repérer et accompagner les cadres intermédiaires potentiels 58

Préconisation n° 5 : améliorer la reconnaissance indemnitaire et symbolique des encadrants 59

B. Les accompagner dans l’exercice de leurs fonctions 61Préconisation n° 6 : favoriser le dialogue sur les attentes du supérieur hiérarchique et les marges de manœuvre 61

Préconisation n° 7 : assurer les cadres intermédiaires du soutien explicite de leur hiérarchie 61

Préconisation n° 8 : les former au management et aux méthodes d’accompagnement du changement 62

Préconisation n° 9 : proposer des dispositifs individualisés de suivi des cadres managers 64

Préconisation n° 10 : prioriser les urgences pour favoriser l’existence d’un temps managérial 64

Préconisation n° 11 : les inciter à déléguer 65

Préconisation n° 12 : formaliser et diffuser les procédures des fonctions supports 66

Préconisation n° 13 : développer leur autonomie de gestion des ressources humaines et financières 67

Préconisation n° 14 : favoriser la remontée d’information lors des réunions 68

C. Leur faire prendre du recul par rapport à leurs propres pratiques managériales 69Préconisation n° 15 : prévoir des temps de réflexion sur les pratiques managériales entre cadres intermédiaires 69

Préconisation n° 16 : développer les collaborations entre cadres intermédiaires sur des projets transversaux 72

Préconisation n° 17 : les inciter à mener une réflexion avec leur équipe sur l’organisation du travail 72

Préconisation n° 18 : discuter des pratiques managériales lors de l’entretien d’évaluation 73

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D. Permettre un meilleur accès à la stratégie pour favoriser le partage du sens 74

Préconisation n° 19 : élargir l’accès à l’information stratégique 74

Préconisation n° 20 : décliner les orientations stratégiques à chaque échelon de la chaîne hiérarchique 75

Préconisation n° 21 : communiquer sur les décisions stratégiques et leur impact en termes de moyens 75

Préconisation n° 22 : les associer aux réflexions sur la mise en œuvre de la stratégie 76

Préconisation n° 23 : développer des occasions d’échanges avec la direction générale 78

Synthèse des préconisations 79

Synthèse de l’étude 81

Méthodologie 811. La définition : qu’est-ce qu’un cadre intermédiaire ? 81

2. Le diagnostic : une absence de malaise généralisé mais des facteurs de difficulté 83

3. Vingt-trois propositions pour mieux reconnaître les cadres intermédiaires dans les collectivités 85

4e partie : atelier de l’Observatoire social territorial 87

A. Participants à l’atelier du 29 avril 2013 87

B. Présentation de l’étude 881. Introduction de l’étude 88

2. Définir le cadre intermédiaire 90

3. Diagnostic de la situation : un malaise des cadres intermédiaires ? 91

4. Vingt-trois préconisations pour conforter les cadres intermédiaires 94

C. Débat 98

Bibliographie 108

Conseil scientifique et conseil d’orientation 110

Sommaire

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Le statut de la fonction publique n’aborde pas l’encadre-ment intermédiaire pourtant incontournable dans les orga-nisations : ni catégorie, ni échelon, ni même définition. Avec 76 % d’agents de catégorie C et 13 % d’agents de

catégorie B, l’encadrement « supérieur » ne peut fonctionner seul, y compris parmi les 9 % de catégorie A.

L’une de nos précédentes études sur la motivation, intitulée Dans la peau des agents territoriaux, pointe un constat particulièrement alar-mant. Les trois sociologues y montrent une « paralysie managériale ». Faute de moyens et de compréhension des primes notamment, les agents témoignent d’un sentiment d’injustice et de manque de reconnaissance individuelle du travail. Le seul recours des encadrants pour les motiver ne tient alors plus qu’aux (bonnes) relations interpersonnelles. Autrement dit, négocier, amadouer, tolérer, user de son influence pour diriger une équipe ou un service. Or, faire reposer le management sur un aspect purement individuel paraît bien « léger » en termes de fonctionnement collectif et bien lourd pour chaque individu concerné.

Plus généralement, un malaise semble bien présent chez des agents ayant le sentiment d’agir au quotidien sans lien avec l’autorité territoriale, élus ou directeurs. Ainsi, apparaît le rôle encore alourdi de l’encadrement, de redonner du sens au travail en le reliant à la politique de la collectivité.

Enfin, dans nos différentes études qui visent à analyser mais surtout à suggérer des pistes d’action, ces dernières s’adressent régulièrement à l’encadrement intermédiaire ou de proximité. Par exemple, pour lutter contre les précarités ou encore pour gérer et anticiper les fins de carrière. Ainsi, quel que soit son niveau, le manager est invité à motiver, soute-nir, dialoguer, détecter les difficultés professionnelles, sociales, et même dans les métiers pénibles, les risques et troubles de santé.

La tâche paraît immense et lourde de responsabilité. Cependant, la fonction publique ter-ritoriale, c’est aussi (et encore…) la possibilité d’évolution professionnelle, de formation, de carrière et, bien qu’il paraisse ne pas monter très haut ni très vite, d’ascenseur social : pourquoi, alors, ne pas envisager de devenir soi-même l’un de ces encadrants ? Comment aider ceux-ci dans leur tâche ? Comment vivent-ils eux-mêmes leur rôle dans les collecti-vités territoriales ?

C’est ce que nous avons proposé d’étudier aux élèves-administrateurs territoriaux de la promotion Paul ELUARD, en partenariat et avec l’appui de l’INET et de l’AATF. Il nous semblait particulièrement intéressant d’amener à ce niveau hiérarchique et organisationnel des jeunes gens qui débuteront ou poursuivront leur carrière dans l’encadrement supérieur. Cette proposition a rencontré chez eux un vif intérêt et une réflexion riche, fournie ici en un « guide managérial ».

Jean-René MOREAUPrésident de l’Observatoire social territorial

DGS San Ouest ProvenceDirecteur du Master 2 Administration publique –

Gestion des collectivités locales à l’UPEC.

L

Intermédiaire mais central pour la bonne marche des collectivités

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Accompagner le changement auprès des cadres

Le partenariat entre l’AATF et la MNT s’inscrit dans la durée, et nous portons ensemble à travers l’Observatoire social territorial une ré-flexion sur les questions de management public, dans ses dimensions humaines et organisationnelles. C’est, cette année encore, le sens de l’étude confiée aux élèves-administrateurs de la promotion Paul ELUARD, dans le cadre de leur formation à l’INET.

Nous savons tous le rôle essentiel que jouent dans nos organisations les cadres intermédiaires, pour la mise en œuvre au quotidien des politiques et du service public. Dans le contexte de plus en plus contraint que connaissent les collectivités depuis quelques années, nous pouvions légitimement nous interroger sur la manière dont ils per-cevaient ce changement et dont celui-ci impactait leurs relations avec leurs équipes et avec leur hiérarchie.

Par leur travail, les élèves-administrateurs nous éclairent sur cette question, et nous sug-gèrent, à partir des expériences menées dans les collectivités rencontrées, de nombreuses pistes de travail pour nous permettre d’accompagner le changement auprès des cadres dont nous avons la responsabilité. En soutenant cette démarche, l’INET contribue aussi à la construction de cet espace de capitalisation et d’échange d’expériences que l’AATF appelle depuis longtemps de ses vœux.

Je suis persuadée que nous serons nombreux à nous saisir de ce travail de grande qualité pour enrichir nos pratiques et susciter l’échange et la discussion autour de nous.

Marie-Francine FRANÇOISPrésidente de l’AATF

Directrice générale des services, Pays de Montbéliard Agglomération

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Fruit d’une commande conjointe de l’Observatoire social territorial de la Mutuelle nationale territoriale (MNT) et de l’Association des administrateurs territoriaux de France (AATF), cette étude a été réalisée par huit élèves-administrateurs territoriaux de la promotion Paul ELUARD actuellement en formation à l’Institut national des études territoriales (INET).C’est le constat d’une multiplicité des contraintes et injonctions adressées aux cadres intermédiaires qui est à l’origine de la commande. La question d’un éventuel malaise des cadres intermédiaires avait en effet été évoquée lors de précédentes études. Il s’agit donc de mieux connaître une catégorie mal délimitée, afin d’identifier les leviers à activer pour lui permettre d’exercer pleinement ses missions. Rouages de l’organisation, vecteurs du changement, référents ressources humaines de proximité, garants de la qualité du service public, les cadres intermédiaires sont porteurs de larges potentialités dont l’organisation peut se saisir dans sa recherche de marges de manœuvre.

Conduite de septembre 2012 à mars 2013, l’étude repose sur les 67 entretiens de type semi-directif réalisés auprès d’agents de la fonction publique territoriale – titulaires ou contractuels – et de personnalités qualifiées – consultants, dirigeants de réseaux profes-sionnels et organisations syndicales. Les différents niveaux de collectivités ont été tour à tour explorés. Les agents interrogés appartiennent à différentes filières et catégories A, B et C. Les entretiens ont ainsi été réalisés auprès d’agents de terrain, de cadres intermé-diaires, de directeurs des ressources humaines (DRH), de directeurs généraux adjoints (DGA) et de directeurs généraux des services (DGS).

De dimension purement qualitative, la présente étude n’entend pas offrir d’éléments sta-tistiques de compréhension de l’encadrement intermédiaire. Le traitement qualitatif nous a permis d’effectuer des éclairages sur certains points particuliers. L’étude s’attache donc avant tout à définir les contours de la notion d’encadrement intermédiaire et à identifier les principaux enjeux qui la caractérisent.

Préambule

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Remerciements

Nous remercions en premier lieu toutes les personnes que nous avons rencontrées ou contactées dans le cadre de cette étude et qui ont bien voulu nous faire part de leur point de vue, de leur expérience et de leur expertise. Ces précieuses contributions constituent la matière première indispensable au rapport ; elles ont permis d’alimenter tant le diagnostic que les préconisations que nous formulons.

Nous tenons également à remercier l’Observatoire social territorial de la MNT et l’AATF, pour nous avoir donné l’occasion de travailler sur une thématique si importante pour les collectivités territoriales, ainsi que pour leur suivi tout au long de cette étude. Nous adres-sons en particulier nos plus sincères remerciements à Monsieur Jean-Marc JOUSSEN, directeur-adjoint de la MNT chargé des relations publiques institutionnelles et à Madame Jeanne BALLOT, animatrice de l’Observatoire social territorial, qui nous ont apporté un cadrage méthodologique précieux.

Enfin, nous sommes très reconnaissants à l’équipe pédagogique de l’INET pour leur accom-pagnement, en particulier Madame Françoise ANNE-BRAUN, responsable pédagogique de la promotion Paul ELUARD.

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Introduction : au carrefour des hommes et des idées, les cadres intermédiaires en collectivité

Contexte

Positionnés entre les équipes opérationnelles et les équipes de direction chargées de définir les orientations stratégiques en lien avec le programme des élus, les cadres intermédiaires jouent un rôle d’interface dans les collectivités territoriales. Au terme de plus de trente années de décentralisation ayant conduit à une complexification et à une stratification des collectivités, les cadres intermédiaires ont aujourd’hui largement investi les différents échelons de collectivités.

Présents dans l’ensemble des services, ils collaborent avec toutes les catégories d’agents. En ce sens, ils sont au carrefour des hommes. Les cadres intermédiaires sont aussi au carre-four des idées : qu’il s’agisse de concevoir ou de mettre en œuvre des politiques publiques, leur concours s’avère souvent incontournable. À la jonction des hommes et des idées, le cadre intermédiaire occupe donc une position clef dans les collectivités. Néanmoins, cette position demeure assez mal identifiée dans l’univers territorial.

Si elle reste largement impensée, en dépit de l’existence de quelques travaux académiques, la catégorie de l’encadrement intermédiaire fait pourtant l’objet d’une attention croissante de la part des collectivités territoriales, conscientes des enjeux qui lui sont liés. Tandis que les évolutions sociétales modifient et accroissent les attentes des usagers, des agents et de la collectivité envers les cadres intermédiaires, la contrainte financière tend à réduire les moyens disponibles pour offrir un service public de qualité. À la croisée de ces injonctions multiples et dans un contexte de réorganisations internes des collectivités territoriales, les cadres intermédiaires se trouvent souvent positionnés « entre le marteau et l’enclume ».

Certains dirigeants territoriaux identifient donc un potentiel « malaise », qui a parfois jus-tifié le déploiement de dispositifs et d’outils spécifiques au sein de collectivités. Force est pourtant de constater qu’il n’existe que très rarement des démarches globales permettant de répondre à l’ensemble des enjeux et attentes de l’encadrement intermédiaire.

Méthodologie

Les 67 entretiens réalisés au sein de 29 collectivités territoriales nous ont révélé des situations contrastées sur le territoire dans la prise en compte de la catégorie des cadres intermédiaires. Des problématiques communes ont toutefois émergé.

La liste des collectivités contactées pour mener à bien cette étude qualitative a été délimi-tée en fonction de deux critères déterminants :

- D’une part, nous avons profité de nos lieux respectifs d’affectation de stage dans le cadre de notre formation à l’INET pour rencontrer les acteurs des collectivités d’ac-cueil. La diversité des missions, collectivités et territoires nous a ainsi permis d’explo-rer un panel varié.

- D’autre part, nous avons tenté de repérer certaines collectivités présentant des spé-cificités – par exemple celles ayant récemment mené une réorganisation interne ou

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encore une territorialisation des politiques publiques – ou ayant déployé des pratiques innovantes en direction des cadres intermédiaires.

S’il s’avérait impossible de prétendre à l’exhaustivité, nous nous sommes particulièrement attachés à disposer d’un nombre représentatif de collectivités, en délimitant les collectivi-tés en différentes strates de populations.

Cartographie des entretiens et collectivités

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Entretiens réalisés par type de collectivité et d’agents territoriaux

Ville EPCI

Conseils généraux

Conseils régionaux

CIG ou

autreTotalmoins de

20 000 habitants

entre 20 000

et 100 000 habitants

plus de 100 000

habitants

moins de 20 000

habitants

entre 20 000

et 100 000 habitants

plus de 100 000

habitants

Direction Générale 1 2 1 2 2 4 1 13

Cadres intermédiaires 7 5 2 4 10 3 31

Agents 2 1 3

Représentants syndicaux 1 1 2

DRH 1 1 2 2 6

Personnes Ressources 1 1 2 3 2 2 1 12

Total 2 13 8 4 5 11 16 7 1 67

Entretiens réalisés par filière et catégorie

Agents interrogés Catégorie A + Catégorie A Catégorie B Catégorie C Total

Administrative 15 20 3 1 39

Technique 5 3 4 12

Culturelle 1 1

Médico-sociale 3 3

Sportive

Animation

Police municipale

Sapeurs-pompiers

Total 15 28 6 6 55

N.B. : le nombre de personnes interrogées au sein des collectivités diffère légèrement du nombre d’entretiens menés auprès d’agents de collectivités. Cette différence s’explique par le fait que certains entretiens ont été menés auprès de plusieurs personnes en simultané.

Par ailleurs, nous n’avons pas souhaité nous limiter à des échanges avec des cadres inter-médiaires, bien qu’ils aient alimenté la majorité des entretiens. Nous nous sommes égale-ment attachés à rencontrer des agents encadrés ainsi que des cadres supérieurs apparte-nant à la direction générale afin de comprendre leur perception des cadres intermédiaires, leurs attentes et les relations qu’ils entretiennent avec eux. D’autres interlocuteurs définis comme « personnes ressources » ont également été sollicités pour nous apporter un éclai-rage théorique et pratique : experts, consultants, syndicats, dirigeants territoriaux…

Pour l’ensemble des entretiens menés, cinq grandes thématiques ont structuré notre ques-tionnement, visant à appréhender le profil, les missions, l’environnement ainsi que la re-connaissance et les sources de légitimité du cadre intermédiaire.

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Une définition large

Face à l’hétérogénéité des configurations locales et à l’absence d’une définition commune partagée de l’encadrement intermédiaire au sein des collectivités territoriales, nous avons fait le choix d’adopter une définition large de cette catégorie d’analyse. Ce parti pris a pour ambition d’embrasser la diversité des situations existantes, en s’affranchissant des caté-gories usuelles. Pour autant, la distinction opérée dans le répertoire des métiers du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) entre encadrement supérieur, inter-médiaire et de proximité, se trouve recoupée par la définition retenue. Ces recoupements apparaissent clairement dès la première partie du rapport consacrée à la définition de la catégorie des cadres intermédiaires.

Cette définition se fonde sur deux caractéristiques principales qui délimitent le champ de l’étude :

- la nature des missions exercées (expertise et management) ; - le positionnement hiérarchique (entre cadres supérieurs participant à la définition de la stratégie, et agents non encadrants).

De fait, la catégorie de l’encadrement intermédiaire recouvre l’ensemble des agents d’une collectivité, cadres d’encadrants ou cadres de non encadrants, placés dans une double pos-ture d’expert et de manager, et situés entre équipes opérationnelles et équipe de direction chargée de la définition de la stratégie.

Enjeux et plan de l’étude

Cette étude a donc une double vocation. D’une part, elle s’attache à dresser un état des lieux de la situation de l’encadrement intermédiaire. D’autre part, elle identifie les outils et modes de fonctionnement visant à accompagner, soutenir et valoriser l’encadrement intermédiaire.

L’analyse des entretiens réalisés et des ressources documentaires rassemblées confirme tout d’abord la très grande diversité des situations présentes au sein des collectivités et la difficulté à construire une définition harmonisée d’une catégorie hétérogène.

D’une manière générale, il en ressort un constat largement partagé sur l’absence de malaise généralisé de l’encadrement intermédiaire. Certains facteurs de malaise peuvent toutefois être identifiés. L’analyse confirme les attentes croissantes qui pèsent sur cette catégorie d’agents et le rôle “pivot” qu’ils jouent au sein des collectivités territoriales, notamment en matière de transmission de l’information. Sont mis en regard de ces évolutions structurelles la faible identification et les marges de manœuvre limitées dont les cadres intermédiaires disposent.

Enfin, ce travail d’exploration a permis de recenser un certain nombre de pratiques visant à faire des cadres intermédiaires de véritables leviers au service de la performance globale de la collectivité, tout en sécurisant leur positionnement. Les pistes d’actions proposées par le groupe d’étude répondent aux éléments du diagnostic établi et ont été repérées au sein des collectivités étudiées.

Comprendre pour mieux agir, telle est donc l’ambition de cette étude, qui invite l’ensemble des dirigeants et cadres intermédiaires de collectivités territoriales à interroger leurs pra-tiques managériales.

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1re partie : une définition renouvelée des cadres intermédiaires en réponse à l’hétérogénéité des collectivités

Les entretiens ont fait apparaître une grande diversité au sein des collectivités dans la ma-nière de définir les cadres intermédiaires, ce qui nous a conduits à proposer une définition élargie de cette catégorie d’agents. Cette diversité n’a pas pour autant empêché d’identifier un certain nombre de missions communes à l’ensemble des cadres intermédiaires.

A. Des situations hétérogènes selon les collectivités

Dans un premier temps, nous avons voulu comprendre comment les agents rencontrés – directeurs généraux et directeurs des ressources humaines, cadres et non cadres – définissent la notion de cadre intermédiaire et se positionnent par rapport à elle, en ayant à l’esprit qu’il pouvait s’agir d’une réflexion nouvelle pour eux. Nous avons constaté que les définitions sont diverses et nous avons essayé d’expliquer cet état de fait par plusieurs facteurs.

1. L’hétérogénéité des appellations et représentations du cadre intermédiaire

a. Différents degrés d’identification

Les collectivités appréhendent de manière variée la catégorie des cadres intermédiaires. L’observation de leurs pratiques montre :

- une absence de différenciation entre les cadres : la collectivité identifie et emploie la notion générique de cadre, sans la préciser ;

- une différenciation sommaire entre les cadres : la collectivité différencie les cadres, mais ne décompose pas les catégories au point d’isoler spécifiquement la catégorie des cadres intermédiaires ;

- une suppression des niveaux intermédiaires dans l’organigramme : la collectivité s’ap-puie sur les cadres supérieurs et de terrain en supprimant les niveaux occupés par les cadres intermédiaires. Pour autant, elle constate le besoin d’une coordination inter-médiaire ;

- une identification de la notion de cadre intermédiaire, qui peut aller jusqu’à la création de nouveaux niveaux. Cela permet tant à la direction générale qu’aux équipes de dis-poser à chaque échelon d’un interlocuteur clairement identifié et avec lequel ils sont en contact régulier.

b. Une catégorie d’amplitude variable, entre le niveau stratégique et celui de la mise en œuvre sur le terrain

Les personnes rencontrées ont tendance à positionner le cadre intermédiaire à la jonction entre le niveau stratégique et le niveau opérationnel. En revanche, elles divergent sur la délimitation de ces niveaux.

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Selon les différentes conceptions des personnes rencontrées, le niveau stratégique intègre : - seulement les emplois fonctionnels, ce qui revient à inclure le niveau des directeurs dans la notion de cadre intermédiaire ;

- jusqu’aux directeurs et directeurs adjoints, ce qui revient à l’inverse à exclure le niveau des directeurs de la notion de cadre intermédiaire ;

- plus rarement jusqu’aux chefs de service.

De même, le niveau opérationnel peut-il intégrer : - jusqu’au premier niveau d’encadrement des équipes, ce qui revient à l’exclure de la catégorie des cadres intermédiaires. Dans ce cas, le nombre de niveaux hiérarchiques entre le cadre intermédiaire et les équipes est variable ;

- seulement les non cadres, ce qui revient à l’inverse à inclure le premier niveau d’enca-drement des équipes dans la notion de cadre intermédiaire.

Cette diversité emporte plusieurs implications : - Les cadres qui se définissent ou sont définis comme des cadres intermédiaires sont appelés indifféremment : « directeur », « directeur adjoint », « chef de service », « chef de pôle », « chef de bureau », « chef de secteur », « coordinateur », etc.

- Ils sont de toutes les catégories (A, B ou C), bien qu’ils soient fréquemment associés à une catégorie particulière selon les interlocuteurs ou les collectivités concernés.

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- Ils encadrent des agents de toutes les catégories (A, B ou C), y compris parfois de catégories supérieures à la leur, et entretiennent des rapports différents avec eux : ils les considèrent comme des personnels encadrés ou des « collègues ».

- Des agents ayant la même appellation ou exerçant les mêmes missions ne se classent pas ou ne sont pas classés dans la même catégorie de cadres. Ainsi, certains agents appelés directeurs se rattachent à la catégorie des cadres intermédiaires, tandis que les autres se rattachent à celle des cadres supérieurs. En revanche, certains agents ont des missions d’encadrement, mais ne sont pas qualifiés de cadres.

c. La multiplicité des formes de la mission d’encadrement

Toutes les personnes rencontrées s’accordent sur les missions d’encadrement et de proxi-mité du cadre intermédiaire. En revanche, la nature et l’ampleur de ces missions divergent :

- l’encadrement est classiquement hiérarchique, mais il peut aussi être fonctionnel à des postes de coordination ;

- il concerne une équipe plus ou moins importante en nombre ; - la mission d’encadrement a bien sûr une dimension pratique, mais elle peut égale-ment avoir une dimension théorique. Ainsi, certains directeurs adjoints peuvent avoir une expertise en matière de management mais ne pas l’appliquer au quotidien. En revanche, certains agents de catégorie A exercent des postes de chargé de mission où leur vocation à manager ne s’exerce pas.

Les personnes rencontrées distinguent différents degrés d’association du cadre intermé-diaire à la stratégie : soit il n’a pas de responsabilité en la matière, soit il est « au cœur de la stratégie et des politiques publiques ». Cette dernière position explique que certains cadres s’excluent de la catégorie des cadres intermédiaires et s’incluent dans celle des cadres supérieurs en raison de la dimension stratégique de leurs missions qui s’ajoute à leur dimension de proximité.

2. Diversité des collectivités territoriales, des filières et du management

a. Des différences liées aux caractéristiques des collectivités

L’échelon de la collectivité

L’échelon de la collectivité a une influence sur la manière d’appréhender la catégorie des cadres intermédiaires et des agents qu’ils encadrent. Par exemple, au sein des régions, les directeurs s’excluent souvent ou sont exclus de la catégorie des cadres intermédiaires. De même, les cadres intermédiaires et les agents qu’ils encadrent sont souvent essentiellement de catégorie A.

La taille de la collectivité et la longueur de la chaîne hiérarchique

Plus une collectivité est grande, plus elle a tendance à être structurée, ce qui a pour consé-quence d’augmenter le nombre de niveaux intermédiaires :

- en termes de positionnement, cela peut se traduire par un recul des limites des ni-veaux stratégique et opérationnel et une diversification des catégories des cadres inter-médiaires (cf. schéma sur le positionnement) ;

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- en termes de missions, la participation à la prise de décision stratégique est souvent conditionnée au positionnement en haut de la chaîne hiérarchique.

L’organisation

Le mode de fonctionnement de la collectivité influence le nombre, la catégorie et les missions des cadres intermédiaires. Par exemple, plus la délégation est importante, plus les cadres intermédiaires ont une possibilité accrue d’appartenir à toutes les catégories et d’exercer des missions stratégiques.

Des cadres supérieurs peuvent exercer leurs missions dans des conditions proches de celles d’un cadre intermédiaire, notamment en raison des modalités de circulation de l’information.

Exemple d’une situation observée : un directeur de régie nous a ainsi indiqué se considérer comme un encadrant supérieur, mais connaît une difficulté particulière qui ressemble à celle des cadres intermédiaires. Il est éloigné de la direction générale, de l’information, des grandes orientations stratégiques, des procédures ou encore de la politique de ressources humaines de la collectivité.

Enfin, l’organisation territorialisée de la collectivité tend à accroître le nombre de niveaux intermédiaires nécessaires, du fait de la plus forte dispersion des agents sur le territoire et de l’éloignement avec la structure centrale.

L’histoire et la culture de la collectivité

Les différentes modalités d’identification de la notion de cadre intermédiaire, ainsi que les différences de traitement des agents aux appellations ou aux situations similaires, s’ex-pliquent par l’histoire et la culture de chaque collectivité. Ces dernières sont elles-mêmes influencées par l’existence d’une direction générale et d’une direction des ressources hu-maines sensibilisées aux problématiques managériales.

Un DGS d’une ville : « Pour parvenir à détecter les cadres intermédiaires, il faut étudier l’or-ganigramme de la collectivité, ses niveaux hiérarchiques pertinents, tenir compte de l’his-torique, des désirs des élus, et de l’organigramme rêvé face à celui, réel, des compromis ».

b. Le poids de la filière d’appartenance

La filière d’appartenance tend à influencer la nature de l’encadrement. La filière technique, en particulier, semble plus hiérarchisée que les autres filières, notamment la filière admi-nistrative. Par conséquent, le nombre de niveaux intermédiaires et la taille des équipes encadrées y sont plus importants. Le nombre de personnels encadrés détermine directe-ment le pouvoir prêté au cadre intermédiaire.

Une coordinatrice d’une intercommunalité à propos des services techniques : « Le cadre intermédiaire est reconnu en fonction du nombre de personnes qu’il encadre, de son âge et de son sexe, et pas en fonction de la qualité de son management. »

c. Les évolutions du management

Les évolutions managériales expliquent la diversité d’appréciation de la mission d’enca-drement. L’encadrement n’est plus seulement lié à l’autorité hiérarchique, il peut recouvrir

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une autorité fonctionnelle. Dans ce cas, bien que le cadre ne soit pas le supérieur hiérar-chique direct des personnels, il les encadre ce qui se traduit par l’organisation du temps de travail, l’animation de réunions, le suivi des équipes, etc. Cela explique que des coordina-teurs se définissent ou soient définis comme des cadres intermédiaires.

Exemple d’une situation observée : une coordinatrice des crèches d’une ville se définit comme un cadre intermédiaire et déplore que sa fiche de poste ne mentionne pas ses missions d’encadrement.

À l’inverse, la notion de cadre se dissocie de la notion d’encadrement. En effet, tous les cadres de catégorie A n’encadrent pas d’équipe. Cette évolution est liée à l’importance de l’expertise dans des postes de chargés de mission ou de la transversalité dans des postes nécessitant de travailler en mode projet.

Ainsi, les appellations et représentations sont si diverses entre les collectivités, comme entre les personnes rencontrées, qu’il semble hasardeux de fonder une définition des cadres intermédiaires sur cette base. De plus, au cours de nos entretiens, nous avons constaté la difficulté pour nos interlocuteurs à s’extraire de ces représentations personnelles ou col-lectives. Cette hétérogénéité nous a conduits à élaborer notre propre définition. En effet, au-delà des appellations et des représentations, le cadre intermédiaire peut être caractérisé par son positionnement et ses missions dans l’organisation.

B. Le choix d’une définition renouvelée des cadres intermédiaires

L’absence de définition communément admise de la catégorie des « cadres intermédiaires » invite à en délimiter les contours par une approche empirique. Le large panel d’entretiens réalisés auprès d’agents de proximité, de cadres à l’autorité hiérarchique ou fonctionnelle et de membres des directions générales a permis d’isoler une catégorie d’agents caractéri-sés par des problématiques communes et de tenir compte de la diversité des collectivités. Cette catégorie ne se limite pas aux cadres de proximité. Cette définition implique de s’affranchir des catégories usuelles.

1. Deux critères cumulatifs de définition : le positionnement et les missions

a. Un positionnement entre la prise de décision stratégique et le niveau de l’exécution

Le premier critère de différenciation des cadres intermédiaires a trait à leur positionnement au sein de l’organisation. Le parti a été pris d’intégrer à cette catégorie le segment de la ligne hiérarchique situé entre les agents de terrain et le niveau de la prise de décision stra-tégique. Le premier niveau d’encadrement des équipes y est donc inclus. En revanche, en fonction des organisations et de leurs rôles, on y inclura ou non le niveau des directeurs.

Un des postulats consiste donc à distinguer les cadres intermédiaires de l’encadrement supérieur pourvoyeur d’orientations stratégiques en lien avec le projet politique. Cette dis-tinction permet d’identifier une première série de problématiques atteignant les agents

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hors du cercle de la décision et relatives au manque de vision globale et d’adhésion au sens de l’action publique.

Un chef de service d’une intercommunalité : « Le cadre intermédiaire est celui qui fait la relation entre le personnel exécutant et les cadres dirigeants qui définissent les orientations stratégiques. »

Un directeur d’une intercommunalité : « Le cadre intermédiaire fait le lien entre la gouver-nance stratégique de l’institution et les équipes opérationnelles (en-dessous du niveau direc-teur). Il est un intermédiaire vertical et horizontal, il assure la transversalité. La spécificité du cadre intermédiaire par rapport aux postes de direction générale et direction, c’est que le cadre intermédiaire est à la croisée du management stratégique et de l’opérationnel. ».

Une directrice d’une intercommunalité : « Je m’inclus dans cette catégorie. Mais je trouve que les directeurs et les DGA n’en font pas partie, car ils déterminent avec les élus les orientations de la collectivité. Les cadres intermédiaires sont plus dans un rôle de mise en œuvre et de proposition ».

À l’autre bout de la chaîne hiérarchique, les cadres intermédiaires sont distincts des agents non encadrants. C’est la mission même du cadre qui le caractérise, indépendamment de sa quali-fication par la collectivité. Des coordinateurs de projets dont l’autorité n’est pas hiérarchique mais fonctionnelle, et qui encadrent de fait des équipes, ont été inclus dans la catégorie des cadres intermédiaires. À l’inverse, les agents non encadrants, y compris de catégorie A, en ont été exclus. Cette distinction permet d’identifier une deuxième série de problématiques attei-gnant les agents encadrants et relatives à l’exercice des fonctions de management.

b. Une dimension duale des missions, entre compétence managériale et expertise métier

Le second critère de définition des cadres intermédiaires repose sur le caractère dual de leurs missions, entre animation d’équipe et expertise métier.

Cette dualité, bien que commune à tous, donne lieu à des répartitions du temps de tra-vail variables entre l’une ou l’autre des missions. Elle détermine largement les marges de manœuvre et les sources de légitimité des cadres intermédiaires. Elle constitue par ailleurs la principale source de complexité pour identifier, indépendamment de leur cœur de métier, ce qui fait des cadres intermédiaires un ensemble à part entière dans la collectivité.

Cette dualité des missions constitue un levier utile pour préciser le sens de la fonction du cadre intermédiaire par une approche affranchie des spécificités métiers. C’est à cette condition qu’il jouera son rôle de maillon incontournable de la collectivité, indispensable à toute conduite du changement.

2. S’affranchir des catégories usuelles

La définition proposée est fondée sur le positionnement du cadre intermédiaire, non sur son appartenance à un cadre d’emploi et à une catégorie (A, B, C). En effet, bien que les per-sonnes rencontrées tendent à associer les cadres intermédiaires de manière privilégiée à une catégorie et bien que la terminologie du CNFPT elle-même les associe de manière privilégiée à la catégorie B, les cadres intermédiaires peuvent appartenir à toutes les catégories.

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Notre définition ne reprend pas strictement la terminologie du CNFPT,1 qui opère tradition-nellement une distinction entre :

- Le management supérieur : il « comprend les niveaux de direction en relation directe avec les élus et les instances de décision. Les activités du management supérieur concourent à la définition et à la mise en œuvre des orientations stratégiques de la collectivité et des modes de gestion dans une finalité de service public. Elles visent à superviser, arbitrer, organiser les moyens et ressources, à piloter et à adapter le projet d’organisation de la collectivité en déclinant les objectifs par directions et services. »

- Le management intermédiaire : il « comprend les niveaux de direction des services fonctionnels et opérationnels. En relation et en cohérence avec les objectifs fixés par la direction générale, les activités de management intermédiaire concourent à décliner les politiques publiques en planifiant les différentes ressources allouées, en pilotant des projets et opérations. Elles visent à optimiser les procédures, à contrôler et à évaluer l’emploi des ressources, à mobiliser et à faire évoluer sur un plan collectif les compétences professionnelles des agents. »

- Et le management de proximité : « Les activités de management de proximité consistent à conduire et à contrôler conformément à une commande, à des prescriptions tech-niques, aux règles de santé et de sécurité au travail, un processus technique de réa-lisation d’une opération ou d’une procédure. Elles visent à planifier les tâches des équipes et des agents et à s’assurer de la qualité des services faits. »

La définition proposée repose sur une acception plus large de la catégorie des cadres inter-médiaires, qui inclut les cadres de terrain et peut inclure les directeurs. Toutefois, cette définition recoupe en partie les définitions proposées par le CNFPT du management supé-rieur et du management de proximité. En particulier, elle exclut les cadres supérieurs de la catégorie des cadres intermédiaires, mais reconnaît la spécificité des cadres de proximité au sein de la catégorie des cadres intermédiaires : il s’agit des agents que nous identifions comme faisant partie des « cadres de non encadrants ».

1 Cf. site Internet du CNFPT : http://www.cnfpt.fr/content/repertoire-metiers

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Par ailleurs, cette définition appréhende les cadres intermédiaires comme une catégorie autonome, indépendamment de leur expertise métier.

Enfin, la définition retenue pour l’analyse s’est affranchie des appellations des collectivités. Ces dernières peuvent apparaître en décalage avec la réalité du positionnement et des mis-sions exprimées par les cadres intermédiaires. De plus, elles sont hétérogènes, en partie en raison du principe de libre administration qui régit les collectivités.

Il convient désormais de caractériser plus précisément les missions du cadre intermédiaire et les facteurs susceptibles de les influencer.

c. Un socle commun de missions au périmètre variable selon la configuration des équipes

Les cadres interrogés ne se qualifient pas tous spontanément d’« intermédiaires ». En re-vanche, ils identifient tous clairement un socle de missions communes. Toutefois, la part de chacune de ces missions peut varier en fonction de la configuration de leurs équipes.

3. S’identifier prioritairement par ses missions

Malgré la précision du répertoire des métiers du CNFPT, la catégorie « encadrement inter-médiaire » semble peu visible dans les collectivités. Parmi les encadrants interrogés (direc-teurs, chefs de service, chefs d’équipe, responsables de pôle, etc.), aucun ne s’y inclut spontanément. Cependant, un certain nombre de missions et tâches ont été régulièrement citées. Elles semblent devoir constituer un corpus commun qui se recoupe pour une bonne part avec le répertoire des métiers du CNFPT.

Ainsi, les cadres intermédiaires s’identifient eux-mêmes prioritairement par leurs missions. Tous ne les exercent pas nécessairement toutes. Les missions les plus communément citées sont les suivantes :

> Expertise :

- Connaître le métier, être capable de conseiller, former, juger de la qualité du travail. - Participer aux activités opérationnelles du service.

> Mise en œuvre :

- Faire exécuter par une équipe les missions confiées par les supérieurs hiérarchiques et les élus.

- Atteindre les objectifs fixés par les supérieurs hiérarchiques et les élus. - Rendre compte et tenir à jour des indicateurs de suivi. - Donner du sens à l’action. - Alerter les supérieurs hiérarchiques des réalités de terrain.

> Organisation du travail :

- Assurer la logistique et répartir les tâches au sein de l’équipe. - Sécuriser les procédures. - Gérer le planning (délais, congés, etc.). - Remplacer les agents absents, pallier les surcharges de travail. - Transmettre l’information ascendante et descendante.

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> Gestion des ressources financières :

- Participer à l’élaboration du budget. - Gérer et suivre le budget. - Allouer le budget par action ou projet.

> Gestion des ressources humaines :

- Recruter : élaboration des profils de poste, participation aux jurys de recrutement. - Encadrer et animer les équipes. - Suivre les équipes : évaluations individuelles, décision ou avis sur le déroulement de carrière, décision ou avis sur le régime indemnitaire, sanctions.

- Favoriser la montée en compétence des agents.

> Conduite du changement :

- Faire changer les pratiques professionnelles. - Gérer les conséquences d’une réorganisation ou d’une réforme sur le fonctionnement du service et les agents.

À ces missions s’ajoute parfois le contact avec les usagers, les élus, ou les partenaires de la collectivité (comme les prestataires, les associations subventionnées, d’autres institutions, etc.).

4. Un périmètre des missions déterminé par la configuration des équipes

Il apparaît que les fonctions des agents encadrés déterminent le temps que le cadre inter-médiaire consacre à chacune des missions décrites ci-dessus.

Deux situations peuvent être distinguées :

- Les cadres d’encadrants sont intermédiaires entre deux cadres. Certains d’entre eux peuvent être particulièrement proches de la stratégie en raison de leur positionnement dans la partie supérieure de la chaîne hiérarchique.

- Les cadres de non encadrants sont intermédiaires entre la hiérarchie et les agents.

Dans cette dernière catégorie, on peut distinguer tout un spectre de situations, allant du cas des cadres intermédiaires encadrant des agents de catégorie A, de type « chargés de mission » (qui n’encadrent pas malgré la possibilité offerte par leur cadre d’emploi), au cas des cadres encadrant essentiellement des agents d’exécution. Ces nuances modifient le degré d’association à la prise de décision et la part de management d’équipe assumés dans les tâches du cadre.

Il est à noter que certaines de ces situations peuvent poser des questions spécifiques : par exemple, parmi les encadrants de non cadres, la part des cadres issus du rang est plus importante – à l’instar des agents de maîtrise souvent en position d’encadrer d’anciens collègues. Or, cette situation peut soulever des questions spécifiques de légitimité et de formation, avec des réponses adaptées à trouver.

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À l’issue des entretiens, la définition proposée de la catégorie des cadres intermédiaires est donc la suivante : « l’ensemble des agents d’une collectivité, cadres d’encadrants et cadres de non encadrants, placés dans une double posture d’experts et de managers, entre équipes opérationnelles et équipe de direction chargée de la définition de la stratégie ».

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2e partie : des difficultés avérées mais une absence de malaise généralisé

Les entretiens réalisés conduisent à diagnostiquer des facteurs certains de difficultés plu-tôt qu’un malaise généralisé chez les cadres intermédiaires. Ce diagnostic repose sur une approche à la fois individuelle des cadres intermédiaires, en tant qu’agents d’une organisa-tion, et collective, en tant que groupe homogène au sein d’une collectivité.

A. Pivot de l’organisation, supportant des attentes croissantes

De manière croissante, il est demandé aux cadres intermédiaires des compétences mana-gériales pour faire face aux mutations organisationnelles affectant les collectivités et aux multiples attentes qui se portent sur eux (gestion de projet, gestion des ressources, attentes des équipes, etc.).

Ainsi, il apparaît clairement que le cadre intermédiaire ne peut plus seulement se canton-ner dans un rôle d’expert métier, même si celui-ci est toujours exigé. Son positionnement reste néanmoins difficile, puisque caractérisé par un tiraillement entre équipe de direc-tion et équipes opérationnelles. Enfin, son rôle central de transmetteur de l’information semble incomplet, en particulier dans le sens « ascendant » (des équipes vers l’équipe de direction).

1. Des pressions croissantes, sources d’une montée en compétence managériale insuffisamment reconnue

a. Des attentes plus nombreuses à l’égard des cadres intermédiaires

Le cadre oscille en permanence entre son cœur de métier technique – son domaine d’exper-tise – et l’animation d’équipes – sa mission managériale. Si la répartition de ces missions varie d’un agent à l’autre, la gestion des activités quotidiennes, l’organisation et l’anima-tion des équipes occupent une part croissante de l’activité des cadres intermédiaires. Cette évolution est à lier aux demandes multiples exprimées par les agents et l’encadrement supérieur à l’égard des cadres intermédiaires.

En matière managériale

Plusieurs qualités semblent unanimement considérées comme indispensables au cadre intermédiaire. Il s’agit de l’écoute, de la disponibilité, de l’ouverture, de la franchise, de l’empathie, de la pédagogie, du respect, de la reconnaissance envers les agents, de la diplomatie, de la proximité avec les équipes, de la fermeté, de la capacité à sanctionner si nécessaire, de la justice, de l’exemplarité, de la capacité à motiver et à développer les potentiels des agents, de la prise de recul et de la délégation – notamment pour que chaque agent puisse créer son espace d’autonomie. Plusieurs directeurs généraux souhaitent éga-lement que le cadre intermédiaire travaille en autonomie, sache décider et assume ses responsabilités avec courage.

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Ces attentes font écho aux valeurs exprimées par les cadres intermédiaires interrogés :

En matière d’expertise

Il apparaît important que le cadre intermédiaire soit un bon expert dans son domaine. Cela lui permet non seulement de réaliser ses missions propres, mais également d’être légitime vis-à-vis de ses équipes.

Les directeurs généraux interrogés attendent également du cadre intermédiaire qu’il porte pleinement auprès de ses équipes la stratégie de la collectivité et apporte, si besoin, des éléments techniques d’expertise à la direction pour qu’elle étaye cette même stratégie. Pour cela, on demande au cadre intermédiaire de comprendre rapidement la commande et d’être en mesure de la décliner et de la promouvoir, tout en prenant de la hauteur si nécessaire.

Un responsable de service d’une intercommunalité : « le cadre intermédiaire est d’abord un expert : il se doit de maîtriser l’ensemble des contenus. Sa “ compétence bis ” est le mana-gement des équipes, le management des ressources humaines, matérielles et financières ».

Convergence des attentes de l’encadrement supérieur et des agents

De manière générale, on observe que les attentes exprimées vis-à-vis des cadres intermé-diaires diffèrent peu, qu’elles proviennent de la direction générale ou des équipes enca-drées. C’est plutôt l’ordre de classement des qualités attendues qui diffère que les qualités elles-mêmes.

Ainsi, les directions générales sont plus attentives à la capacité du cadre à travailler en autonomie et à retransmettre aux agents les informations, alors que les équipes attendent plutôt une grande disponibilité de leurs encadrants et de la justice dans le traitement des situations individuelles.

Tous reconnaissent au cadre intermédiaire sa capacité à créer du lien au sein de la collec-tivité, à servir d’intermédiaire entre niveaux hiérarchiques, voire à masquer certaines fai-blesses de l’organisation en servant de « tampon » et de pacificateur. Tous s’accordent aussi

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sur l’importance grandissante des qualités managériales attendues du cadre intermédiaire, dont les cadres sont eux-mêmes conscients.

Un DGA d’un conseil général : « Le cadre intermédiaire est essentiel dans la colonne verté-brale hiérarchique d’une collectivité. »

Néanmoins, la grande diversité des attentes à l’égard des cadres intermédiaires n’est pas sans occasionner une certaine pression sur eux. Confrontés à des objectifs qui peuvent parfois entrer en contradiction, les cadres intermédiaires éprouvent un grand sentiment de responsabilité. Ils se savent obligés, ne serait-ce que pour la bonne marche quotidienne du service. Cela les conduit à s’impliquer très fortement dans la vie de leurs équipes, y compris pour pallier l’absence ou l’erreur d’un agent, ou encore une carence du service.

Une directrice d’une ville : « En cas de désaccord, on le dit, on l’écrit mais on suit. […] Il faut que le service tourne. Ainsi, lors du dernier déménagement, j’ai porté les cartons. »

b. La montée en compétence managériale des cadres intermédiaires

L’approfondissement de la dynamique décentralisatrice a entraîné l’intégration de nou-veaux personnels dans les collectivités et un besoin renouvelé de montée en compétence des cadres destinés à encadrer l’activité des personnels d’exécution. Ces évolutions se sont déroulées dans un contexte de contraintes normatives et budgétaires croissantes. Aussi, la plupart des cadres intermédiaires considèrent qu’ils doivent s’efforcer de sécuriser juridi-quement et budgétairement l’activité de leurs services.

La propension à investir le champ du management d’équipe liée au parcours

Le profil du cadre intermédiaire renvoie à deux parcours types : - le cadre intermédiaire « issu du rang », - le cadre intermédiaire extérieur à la collectivité et à l’équipe.

Le profil des cadres intermédiaires pourrait ainsi avoir une influence sur la manière qu’ont ceux-ci de se positionner face aux évolutions qui les concernent.

Les cadres « issus du rang »Conduits à encadrer d’anciens collègues dans un métier qu’ils ont exercé, ces cadres semblent plus susceptibles de se reposer sur leur légitimité technique. En effet, générale-ment, les cadres intermédiaires « issus du rang » connaissent une promotion interne après un certain temps passé au sein d’une direction de la collectivité. Cette promotion s’appa-rente alors à une forme de reconnaissance par la collectivité.

Elle présente toutefois le risque de confier des fonctions managériales importantes – exi-geantes en temps et en capacité à gérer des moyens – sans que le cadre n’ait pu systéma-tiquement bénéficier d’un accompagnement personnalisé et d’une formation approfondie aux techniques et outils du management. Dans ce cas, le cadre intermédiaire se voit pro-pulsé encadrant sans disposer pour autant d’un référentiel, écrit ou observé, de bonnes pratiques managériales. Cette situation le conduit dès lors à se former « sur le tas » et « au contact de son équipe ».

Un DGA ressources d’un conseil régional : « La qualité du cadre intermédiaire qui sort du rang est qu’il connaît son métier, c’est très important pour un cadre. Le problème est que

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les collectivités territoriales ont tendance à mettre en position d’encadrement des agents issus du rang, et qui de ce fait défendent avant tout leur culture professionnelle. Or, le cadre est régulateur d’un groupe. Il doit porter les objectifs de la collectivité ».

Les cadres extérieurs à l’équipeÀ l’inverse, un cadre externe à l’équipe, voire au métier ou à la fonction publique terri-toriale qu’il appréhende depuis peu, peut être amené à investir davantage la dimension managériale. Il est conduit à se saisir des techniques managériales pour compenser sa méconnaissance de l’équipe qu’il encadre. Cette tendance est accentuée par le fait que certains cadres intermédiaires recrutés en dehors de la collectivité sont beaucoup plus jeunes et diplômés. Ils sont alors sensibilisés aux enjeux et techniques managériaux, mal-gré un possible manque d’expérience d’encadrement. II en résulte une professionnalisation grandissante des cadres managers.

Des évolutions structurelles des collectivités porteuses de professionnalisation

Le contexte financier contraint amène les collectivités à rationaliser leurs dépenses. Les cadres sont mobilisés au service de cet objectif. Le développement et la généralisation d’outils organisationnels à forte composante technique – logiciels métiers spécialisés, ou-tils de reporting et tableaux de bord – entraînent une professionnalisation grandissante des cadres intermédiaires en tant que managers. Il en découle une remise en cause de leurs pratiques et de leur identité par atténuation de la dimension métier.

Les cadres intermédiaires prennent eux-mêmes conscience des attentes croissantes à l’égard de leurs fonctions de management et de reporting. Le degré d’adhésion à ces nou-veaux objectifs n’en est pas moins variable, d’une adhésion pleine et entière, à la crainte, voire au refus d’utiliser de tels outils, par principe ou par manque de compétences.

Une implication managériale fonction des configurations locales

L’autonomie des agents encadrés et leur nombreCes facteurs influent largement sur le mode de management. Plus l’autonomie des agents est développée, plus le cadre peut consacrer du temps à ses missions propres : manage-ment de l’équipe, pilotage de l’activité et traitement de ses dossiers.

Un responsable d’équipe d’une intercommunalité, qui encadre essentiellement des agents de catégorie A, de type chargé de mission : il leur fait pleinement confiance sur le fond des dossiers, et se concentre sur des dossiers transversaux et les tâches de pilotage et de reporting.

Le degré d’autonomie des agents dépend non seulement de leur catégorie (A, B ou C), mais aussi de leurs habitudes de travail et de la nature de leur mission. Cela conduit le manager à adapter ses modes d’encadrement en fonction des agents.

Une responsable de service d’une ville fait le choix de rattacher directement à elle plutôt qu’à un de ses N-1 un agent très soucieux de son autonomie pour établir une relation pri-vilégiée avec lui.

Le contexte organisationnel de la collectivitéLes organisations s’appuient de manière variable sur leurs cadres intermédiaires. Chaque type d’organigramme les fait apparaître de façon spécifique et chaque organisation les

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sollicite à sa manière pour conduire le changement : ils ne sont pas toujours considérés comme les premiers vecteurs du changement.

Une adjointe au chef de service d’un conseil général : « L’impulsion au management peut venir d’un nouveau DRH, de l’arrivée de cadres formés au management, d’outils comme les formations et l’entretien d’évaluation ».

Un chef de service d’un conseil général : « L’encadrement d’agents de filières différentes ou d’un service issu d’une réorganisation complexifie le management ».

ZOOM

Au milieu des contraintes, la construction incertaine d’un style managérial personnel

Dans la plupart des cas, le style managérial du cadre intermédiaire se construit per-sonnellement, en référence à des modèles de management, à un corpus de repères académiques ou professionnels.

Certains cadres intermédiaires indiquent que lors de leur prise de poste, ils ont adopté un style de management construit en référence à leur environnement immédiat. Cela les conduit parfois à construire leur management en opposition avec celui auquel ils sont eux-mêmes soumis par leur management supérieur, ou au contraire à reproduire les méthodes managériales de leurs supérieurs hiérarchiques qu’ils jugent positives.

C’est donc souvent « sur le tas » que le « moi managérial » du cadre intermédiaire émerge. Comme souligné précédemment, la répartition du temps entre missions opé-rationnelles et de management est clairement établie par le cadre intermédiaire qui a pleinement conscience de l’importance des deux. Cela semble renforcé lorsque le cadre est géographiquement situé sur le lieu des équipes qu’il dirige. À défaut, il éprouve généralement plus de difficultés à occuper ses fonctions managériales avec des équipes éloignées et en ressent d’autant plus les limites.

c. Une légitimité certaine mais une reconnaissance insuffisante

Nous avons interrogé les cadres intermédiaires sur la question de leur légitimité. Elle est bien sûr en bonne partie une affaire de perception. D’où la difficulté, dans une étude comme celle-ci, à faire la part des choses. Elle fait se rejoindre des éléments objectifs – une position hiérarchique, une mission, des moyens – et des éléments subjectifs : les aspects relationnels, des marques de respect et de confiance.

La légitimité conférée par l’organisation

La position hiérarchique constitue un élément cité presque systématiquement à la source de l’autorité formelle du cadre.

Le parti a été pris de ne pas limiter la définition du cadre au lien hiérarchique et de tenir compte de toutes les formes d’encadrement incluant l’autorité fonctionnelle. Or, on remarque un sentiment de manque de légitimité du manager coordinateur sur des théma-tiques transversales.

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Ainsi, sa position hiérarchique permet au cadre intermédiaire de créer un lien ou de faire tampon avec la hiérarchie.

Une légitimité duale fondée sur l’expertise technique et les qualités managériales

La légitimation par la compétence métierAu-delà de la consécration par l’organisation de leur position hiérarchique, les cadres inter-rogés estiment qu’ils tirent leur légitimité essentiellement de leur compétence technique et de leur expérience : ils connaissent le métier et le service.

Il apparaît ainsi que la maîtrise d’une compétence métier offre un espace de repli aux managers en difficulté. Les cadres mettent souvent en avant leur préoccupation principale pour le travail de terrain. Cette connaissance et cette expertise assoient leur légitimité puisqu’elles leur permettent de sécuriser les agents et les supérieurs hiérarchiques.

Un DGA d’une ville : « Ce sont les premiers encadrants des personnels de terrain. Ils doivent maitriser les enjeux des politiques portées : ce sont les capteurs de la mise en œuvre opé-rationnelle des politiques avec préconisations pratiques sur les métiers ».

La légitimation par les qualités humaines du managerCette dimension experte est complémentaire des qualités humaines largement mises en avant par les personnes interrogées pour identifier les sources de légitimité des cadres intermédiaires. Les capacités à « trancher avec justice et équité », à « communiquer », ou le fait de se rendre sur le terrain pour connaître la réalité des agents sont autant d’illustrations de leurs fonctions managériales.

Un chef de secteur d’une ville : « Le fait d’être juste et franc garantit sinon le respect, du moins le fait de ne pas avoir à s’en soucier car on a la conscience tranquille. La proximité au terrain donne de la crédibilité ».

Des valeurs qui reflètent ces deux sources de légitimitéÀ l’instar des résultats de l’étude Dans la peau des territoriaux1, les personnes interrogées ressentent un très fort attachement au service public ; ceci semble être leur principal vec-teur de reconnaissance. Les autres valeurs principalement citées lors des entretiens portent invariablement sur les deux aspects d’expertise et de management. Le premier recoupe « le sens du travail bien fait » dans une perspective métier, qui varie en fonction de la filière, par exemple de l’entretien des espaces verts à la bonne gestion des dossiers RH. Le second a trait à la proximité avec l’équipe impliquant écoute, explication, pédagogie, bienveillance ou encore rigueur.

Un chef de secteur parcs et jardins d’une ville répond ainsi à la question « à quoi êtes-vous le plus attaché dans votre travail ? » : « que les massifs soient beaux ».

L’importance du soutien et de la reconnaissance de leur hiérarchie et de leurs agents

Cette légitimation, souvent publique, revêt une charge symbolique essentielle pour asseoir le positionnement des cadres intermédiaires. Ils attachent donc de l’importance au soutien de leur hiérarchie et de leurs agents.

1 Dans la peau des agents territoriaux, Les cahiers de l’observatoire social territorial, n° 4, janvier 2012

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Au quotidien, les cadres intermédiaires se sentent proches de leurs équipes et de leurs encadrants directs, et également soutenus par eux. En revanche, ils se sentent plus éloi-gnés de leur encadrement supérieur, ce qui pourrait expliquer le déficit de soutien qu’ils peuvent parfois ressentir face à des situations difficiles. Ainsi, ils regrettent de devoir gérer seuls certains cas de conflits disciplinaires avec leurs agents.

Au-delà de la question du soutien, se pose celle de la reconnaissance des cadres intermé-diaires par l’organisation. Celle-ci revêt une double dimension :

- Sur le plan de leurs missions, les fonctions d’encadrement de certains cadres ne sont pas reconnues dans leur fiche de poste. Lorsqu’elles sont reconnues, cela ne s’accom-pagne pas nécessairement d’une valorisation de leurs missions managériales.

- Sur le plan financier, la reconnaissance de leur responsabilité d’encadrant est presque toujours vécue comme déficiente. Sans qu’il s’agisse d’une forte revendication, celle-ci laisse le sentiment généralisé, malgré les contraintes budgétaires et les restrictions juridiques sur les régimes indemnitaires, de « travailler plus pour pas grand-chose ».

Au final, les entretiens menés permettent de dégager une triple autorité du cadre vis-à-vis de ses équipes :

- autorité structurelle liée à son positionnement hiérarchique dans l’organigramme, - autorité sapientale liée à son savoir et à ses compétences, - autorité personnelle liée à son charisme et à sa capacité naturelle à fédérer une équipe.

D’où l’expression parfois utilisée de « boule à facettes » du cadre intermédiaire qui tour à tour contrôle, sévit, regarde, accompagne, écoute, persévère, etc.

2. Le défi de la circulation de l’information entre direction générale et équipes

a. Le difficile positionnement des cadres intermédiaires : une proximité de tous qui n’em-pêche pas un sentiment d’isolement

La proximité avec les équipes et le supérieur direct

Tout à la fois experts encadrants et managers de proximité, les cadres intermédiaires se caractérisent fortement par le lien qu’ils tissent entre plusieurs catégories ou groupes d’agents. Si le terme de « cadre de proximité » n’a pas été retenu dans cette étude, il semble opportun d’insister sur la proximité qui caractérise le rapport du cadre intermédiaire avec son environnement. En raison de sa situation d’« intermédiaire », cette proximité peut être entendue de deux manières différentes : proximité envers les agents et proximité avec la direction, induisant un potentiel tiraillement entre les deux.

Cette proximité est, bien sûr, fonction de l’organigramme de la collectivité et du nombre de niveaux hiérarchiques au-dessus et en-dessous du cadre intermédiaire. Le positionnement hiérarchique tel qu’il résulte de l’organigramme diffère parfois du positionnement ressenti par l’agent, selon son vécu professionnel et la nature de ses relations de travail avec ses supérieurs hiérarchiques et ses équipes.

Souvent, le cadre intermédiaire se représente comme positionné près de ses équipes avec lesquelles il entretient même parfois une identification fusionnelle. Plus le cadre est

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positionné au bas de l’organigramme, plus il semble avoir tendance à se sentir proche de ses agents et, partant, conçoit son rôle comme celui d’un régulateur ou catalyseur, n’hési-tant pas à se faire le porte-voix de son équipe.

À l’occasion de leurs échanges avec leur encadrement supérieur, les cadres intermédiaires n’hésitent pas à faire remonter l’attachement au service public de leurs équipes. Ceci s’explique en grande partie par le fait que le cadre intermédiaire se situe très souvent sur le lieu de ses équipes.

Situation particulière, pour les services opérationnels se déplaçant sur le territoire, le cadre intermédiaire doit trouver un mode de communication spécifique. Par exemple, pour un cadre dirigeant d’un service technique, il peut s’agir de réunir chaque matin ses agents à l’entrepôt dédié au stockage du matériel et de se rendre régulièrement sur les sites d’inter-vention de ses agents.

À l’inverse, plus le cadre intermédiaire est positionné dans le haut de l’organigramme, plus il a tendance à se sentir proche de la direction. De manière générale, ces éléments qui traduisent une relative difficulté de positionnement se retrouvent aussi dans d’autres types d’organisations, notamment dans les entreprises privées.

En fait, tout dépend de la position institutionnelle dans laquelle se trouve le cadre inter-médiaire à un instant donné. S’il a tendance à se sentir plus proche de ses équipes dans le travail quotidien, il peut se sentir plus proche de la direction à d’autres moments, par exemple au sein d’instances de représentation de la collectivité.

Dans le cas de l’encadrement intermédiaire en charge de services en contact avec les usagers, le cadre tend plus systématiquement à rendre visite à ses équipes, à montrer son implication à leur côté, à traiter personnellement certaines demandes complexes et à veiller à ne pas perdre le sens des réalités. Cette attitude est à mettre en parallèle avec le principe de satisfaction de l’usager auquel les cadres et leurs agents sont attachés.

La relation à l’élu

Le positionnement des cadres intermédiaires peut également être lié aux relations qu’ils entretiennent avec les élus. Celles-ci sont hétérogènes. Les cadres intermédiaires qui tra-vaillent en relation avec eux le font en bonne harmonie et apprécient leur reconnaissance. Les autres ont des appréciations divergentes : certains y trouvent une forme de reconnais-sance, tandis que d’autres estiment qu’elles relèvent des missions de leurs supérieurs hiérarchiques.

L’isolement du cadre intermédiaire

L’isolement et le manque de mise en réseau des cadres intermédiaires au sein de la col-lectivité expliquent en partie leur difficile positionnement. Cet isolement semble double :

- l’isolement « vertical » des cadres fait référence à leur difficulté de positionnement dans l’organigramme, entre équipes opérationnelles et équipe de direction chargée de la définition de la stratégie. Plusieurs cadres regrettent ainsi que les comités de direction n’offrent que l’occasion d’échanges entre pairs trop limités.

- l’isolement « horizontal » provient quant à lui de la non-identification des cadres inter-médiaires comme catégorie à part entière ou, lorsque des instances communes de

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dialogue entre cadres existent, du manque de liberté de la parole. Les différences de cultures métiers peuvent aussi expliquer ces difficultés à dialoguer pour des cadres intermédiaires de directions différentes.

Cette organisation peut renforcer la solitude du cadre intermédiaire, parfois tiraillé par des injonctions qu’il estime contradictoires, entre accession aux demandes de ses équipes et mise en œuvre des projets de la direction.

Ce manque de mise en réseau ne leur permet pas de prendre conscience des probléma-tiques communes auxquelles ils sont confrontés, en matière de management (difficulté à motiver les équipes, à faire comprendre les contraintes), au-delà de l’expertise métier.

Par ailleurs, le brouillage des frontières entre vie privée et vie professionnelle tend à impor-ter les difficultés personnelles des agents sur leur lieu de travail et à faire du cadre un médiateur social (alcoolisme, précarité, problèmes matrimoniaux…).

b. Un rôle de « courroie de transmission de l’information » plus difficile à tenir qu’il n’y paraît

La fonction de courroie de transmission des cadres intermédiaires est particulièrement ressortie des entretiens réalisés. Pour illustrer ce rôle, les personnes interrogées ont fré-quemment évoqué les termes de « rouage essentiel », de « transmetteur », voire « traduc-teur » des instructions et des informations. Positivement connoté, le terme de « courroie de transmission » s’entend aussi bien dans le sens ascendant que dans le sens descendant.

Une courroie de transmission ayant un sens unique de rotation, ce terme traduit également une réalité contrastée. Si la transmission descendante de l’information est relativement fluide, nombre de cadres intermédiaires ne sont pas véritablement en position de faire remonter de l’information aux échelons supérieurs.

Il ressort en effet des entretiens menés qu’une grande partie de l’activité des cadres inter-médiaires a trait à la gestion de l’information. Ils ont pour rôle de retransmettre à leurs équipes les informations communiquées par la direction générale dans un sens, et de faciliter le reporting d’activité et la remontée d’informations de la part des équipes en sens inverse.

Ils doivent donc successivement retraiter l’information, la reformuler et la transmettre à leurs agents ou leur direction. Le terme d’intermédiaire lui-même – intermediare – ne signifie-t-il d’ailleurs pas « s’interposer » ? S’interposer, c’est permettre de mieux donner corps aux idées et les incarner pleinement. Dans cet esprit, certains cadres se voient aussi comme des « catalyseurs de contenu ».

Il apparaît toutefois que les cadres intermédiaires pâtissent de certaines pratiques consis-tant notamment à s’adresser directement aux agents sans passer par le canal hiérarchique. L’usage intensif des technologies et la rapidité des modes de communication rendent par-fois difficile pour le cadre la maîtrise de l’information à destination de ses équipes.

Un DGS d’une ville : « Ils sont un relais de la collectivité auprès des agents, mais aussi des habitants et des partenaires. Aussi doivent-ils être informés de l’action de la municipalité dans sa globalité. »

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Le rôle de « courroie de transmission » du cadre intermédiaire provient également de son rôle d’animation de l’équipe. La plupart des cadres intermédiaires développent des mé-thodes similaires d’animation d’équipe : réunions de direction ou de pôle, rencontres à intervalles réguliers de chaque équipe, pratique de la « porte ouverte » pour répondre aux questions quotidiennes des agents.

Néanmoins, le rôle de transmetteur de l’information ascendante est moins valorisé que celui de transmetteur de l’information descendante : les lieux existants de transmission de l’information sont en effet peu utilisés pour faire remonter de l’information.

c. La primauté du rôle de traducteur : donner du sens et le transmettre

Le rôle du cadre intermédiaire en tant que « courroie de transmission » va donc bien au-delà de la gestion de l’information. Ce rôle n’est pas passif, mais actif. Il implique de traduire l’information à destination des équipes. Il n’est pas vécu comme celui d’un subalterne, mais comme une fonction aussi valorisante qu’exigeante. Celle-ci demande implication et sens des relations humaines. En effet, il s’agit de faciliter, canaliser et organiser l’expres-sion des agents, afin d’en faire un élément d’alerte factuel et précis, permettant à la direc-tion générale d’engager des actions correctives.

Une directrice de régie municipale d’une ville : « Ma fonction est certes de transmettre les instructions de la direction ainsi que de remonter les informations du terrain, mais aussi d’apporter un éclairage technique et de faire preuve d’initiative et de créativité. Je dois aussi susciter l’implication des équipes et donc favoriser leur propre initiative. »

Le terme de courroie de transmission est un terme générique perçu positivement par les cadres lorsqu’il leur confère un rôle actif dans la transmission de l’information. À l’inverse, lorsqu’il décrit uniquement un rôle passif, les cadres intermédiaires le rejettent.

Un responsable d’antenne territoriale d’un conseil général : « Je ne suis pas un subalterne, ni un exécutant. Courroie de transmission c’est péjoratif, car une courroie c’est inerte. Je me considère plutôt comme un fidèle lieutenant. Le système peut fonctionner sans moi, mais il fonctionnera moins bien. »

Le contenu du rôle de traducteur

Le rôle de traducteur des cadres intermédiaires se situe à deux niveaux : - D’une part, ils donnent à leurs équipes une traduction opérationnelle des objectifs fixés par la direction, en fonction de contraintes de moyens. Ils ont donc un rôle essen-tiel dans la conduite de l’action publique par la collectivité.

Un directeur des ressources humaines d’une ville : « A la suite d’un arbitrage budgétaire, le rôle d’un cadre n’est certainement pas de dire « notre budget a été réduit de 10 % par la direction générale ! » mais de traduire l’orientation budgétaire en projet de service cohérent et motivant, voire même d’être partie prenante de cette réduction en ayant aidé à son juste chiffrage. »

- D’autre part, il s’agit pour les cadres intermédiaires de s’approprier le projet politique, le projet d‘administration ou une orientation stratégique, afin d’en faire un facteur de motivation pour les équipes. Les cadres intermédiaires sont investis d’une responsa-bilité toute particulière puisqu’ils montrent à leurs collaborateurs comment une ligne de conduite opérationnelle, qui se décline en actions et objectifs précis, constitue la

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traduction d’un projet politique. Leur rôle est donc capital dans l’organisation de la collectivité, notamment en ce qui concerne la conduite du changement.

Un DGA d’un conseil général : « Les cadres intermédiaires sont la colonne vertébrale de la chaîne hiérarchique. Il est important qu’ils aient la flamme pour la transmettre à leurs équipes. »

Les défis du rôle de traducteur : fluidité, transversalité et transmission du sens

En raison de ce rôle fondamental, les cadres intermédiaires sont en mesure de bloquer la transmission de l’information.

Un DGS d’une ville : « Le cadre intermédiaire a un rôle très important, car selon qu’on arrive à l’impliquer ou pas, il peut bloquer les évolutions. Son rôle est de passer l’information auprès des agents tout comme à la direction générale. Les agents de base ont besoin qu’on leur parle et cela passe forcément par les cadres. Le cadre intermédiaire doit faire de la médiation, reformuler les propos de la direction générale en les adaptant au terrain. Il doit s’impliquer, prendre son rôle avec volontarisme et sérieux. C’est un échelon qui peut tout réussir ou tout bloquer. »

En outre, ce rôle de courroie de transmission ne se limite pas aux relations ascendantes et descendantes. Certains membres de direction générale interrogés attendent des cadres intermédiaires qu’ils établissent des relations transversales entre différents services ou directions. L’encadrement intermédiaire peut ainsi améliorer les coopérations et l’efficacité globale de l’organisation.

Une directrice des ressources humaines d’une ville : « Le cadre intermédiaire est un cadre de proximité, de maîtrise : il possède le métier et la connaissance technique et a développé de la transversalité, de l’agilité pour mettre les choses en lien. Il est capable de faire la synthèse entre les spécialités, d’anticiper les changements technologiques, de rechercher l’information sur les nouvelles techniques et métiers tout en étant un manager. »

Cependant, au-delà de la simple gestion des flux, l’amoncellement de l’information peut conduire à une perte de sens et de cohérence. Il est alors plus difficile pour les cadres

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intermédiaires de traduire cette information aux équipes de terrain, de la hiérarchiser et de l’inscrire dans un sens plus global. Certains écarts peuvent dès lors être ressentis entre une vision « théorique » ou éloignée du terrain des directions générales et une vision plus opérationnelle des équipes chargées de la mise en œuvre.

Pour conclure sur ce rôle de passeur d’information et « catalyseur de contenus », le cadre intermédiaire occupe une place centrale dans le bon fonctionnement des collectivités. Pour l’équipe de direction comme pour les agents, il est l’interlocuteur idoine.

Pourtant, son positionnement tant hiérarchique que symbolique semble brouillé, les cadres intermédiaires ne constituant pas une catégorie à part entière dans les collectivités. Une meilleure prise en compte des cadres intermédiaires suppose donc d’identifier et de prendre conscience des problématiques communes auxquelles ils sont confrontés, indé-pendamment de leurs métiers.

B. Autonomie limitée et manque d’identification dans l’organisation

La faible identification de la catégorie des cadres intermédiaires par les collectivités en-traîne deux conséquences majeures. La première est que le potentiel des cadres, vecteurs de performance pour l’organisation, est souvent sous-exploité. La seconde a trait au poids des contraintes qui pèsent sur les cadres. Celles-ci constituent des charges de travail trop mal connues qui compliquent la recherche de marges de manœuvre.

1. Un potentiel souvent sous-exploité

Au sein des collectivités, le cadre intermédiaire n’appartient pas à une entité ou une catégorie homogène. L’ensemble des cadres intermédiaires semble mal identifié : rares sont les dispositifs qui s’adressent directement à eux et on emploie davantage le métier ou le grade pour les qualifier.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette identification insuffisante des cadres intermé-diaires comme catégorie à part entière. Les agents présentent tout d’abord des parcours divers, faiblement homogénéisés par des actions spécifiques de formation au moment des prises de poste ou au cours des carrières. Les missions des cadres intermédiaires oscillent par ailleurs entre propositions stratégiques et décisions opérationnelles, diluant ainsi la visibilité du niveau de responsabilité de chacun.

a. Une implication variable dans la prise de décision

Au-delà de son rôle de transmission et de traduction d’information, le cadre intermédiaire est au cœur de la mise en œuvre concrète et opérationnelle des décisions de la collectivité. Mais selon les collectivités et les individus qui exercent une même fonction de différentes manières, le degré de responsabilité vis-à-vis de la décision est extrêmement variable.

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Des avis divergents quant à l’opportunité d’associer les cadres intermédiaires à la décision stratégique

Dans certaines collectivités, il semble que la direction générale fasse le choix de consulter étroitement les cadres intermédiaires, voire même d’en faire des acteurs à part entière de la prise de décision stratégique. Ici, l’encadrement intermédiaire est force de proposition, placé au cœur de l’élaboration de la stratégie et des politiques publiques de la collectivité.

Un DGS d’un conseil général : « Les cadres intermédiaires sont associés à la réflexion stra-tégique. Ils sont impliqués en amont des orientations. Tous les schémas sont élaborés de façon participative avec les cadres intermédiaires. »

Un chef de service d’un conseil régional : « La position de cadre intermédiaire est très inté-ressante, car il est au cœur de la stratégie et de la mise en œuvre des politiques publiques. C’est même lui qui est le plus à même de mener ces stratégies. »

Un directeur des ressources humaines d’une ville : « Le cadre intermédiaire ne doit pas subir le changement et y résister. Il doit au contraire y participer en tant qu’acteur. C’est-à-dire l’impulser et l’animer. Il ne fait pas que décliner, il est aussi à l’origine. »

Cette participation des cadres intermédiaires à la prise de décision stratégique n’a toutefois pas été décrite comme systématique ou absolue. Elle concerne plutôt des champs ou des moments précis : par exemple, l’élaboration d’un projet d’administration, où la démarche de concertation interne est plus facilement mise en avant.

En revanche, d’autres dirigeants territoriaux considèrent qu’il n’est ni possible ni souhai-table de coproduire les orientations stratégiques de la collectivité avec les cadres intermé-diaires. Ces derniers se voient alors cantonnés à un rôle de mise en œuvre des politiques publiques. De même, certains cadres intermédiaires ont déclaré au cours des entretiens qu’une participation à la prise de décision stratégique excèderait leur rôle.

Ces points de vue divergents sont en partie influencés par la position du cadre intermé-diaire dans l’organigramme : on peut penser que plus il est éloigné de la direction générale, moins il aurait vocation à participer à la stratégie.

Un DGA ressources humaines d’un conseil général : « Associer les cadres intermédiaires à la stratégie ? On ne peut pas tout partager avec les maillons de la chaîne. Si on demande le point de vue de chacun, on perd le sens. Je considère qu’on donne un objectif à chacun. Puis, c’est à chacun de définir les moyens d’y arriver. »

Plusieurs degrés d’association à la prise de décision stratégique

Le rôle du cadre intermédiaire est rarement cantonné à l’application stricte de consignes précises. L’encadrant intermédiaire prend des décisions sans outrepasser son champ. Il conseille et aide à la décision concernant la gestion de son équipe et demeure un expert dans son métier, capable d’apporter un éclairage technique pointu.

Deux chefs de secteur d’une ville : « Nous sommes consultés sur les objectifs de notre direction, mais nous ne participons pas à la prise de décision. En revanche, nous avons une responsabilité importante dans l’évitement des conflits et l’exécution des tâches. »

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Le cadre intermédiaire semble ainsi positionné entre la prise de décision stratégique – dont il n’est pas totalement exclu – et sa mise en œuvre opérationnelle.

L’autonomie dans la mise en œuvre

Le choix autonome des voies et moyens pour remplir un objectif fixé est souvent reconnu au cadre, voire considéré comme indispensable. Au cours des entretiens menés, cette faculté semblait à la fois valorisante – car elle confère une certaine autonomie – et exigeante – en ce qu’elle nécessite la pleine solidarité managériale avec la direction générale.

Un chef d’équipe dans la direction des parcs et jardins d’une ville : « Je suis très attaché à mon autonomie, à la prospective. Je suis acteur du paysage urbain et garant de sa qualité. Mon poste me permet de dessiner le paysage urbain selon le thème défini par la direction. »

Il arrive aussi que, pour décliner les orientations stratégiques, les cadres intermédiaires ne respectent pas toujours les procédures internes.

Un DGA ressources d’un conseil régional : « Ce qui est difficile à partager avec les cadres intermédiaires, ce sont les procédures fonctionnelles. Ils les considèrent comme gênantes, perturbant la production. »

b. Un accompagnement insuffisant à la prise de poste et des formations peu adaptées

Les cadres intermédiaires disposent généralement d’une expertise métier très forte dès leur prise de poste mais rarement d’outil pouvant servir de référentiel pour l’encadrement. De manière générale, les entretiens montrent que leurs recrutement et formation présentent d’importantes carences conduisant à des facteurs de malaise ou un sentiment de manque d’accompagnement.

Une directrice d’une ville : « Il faut accompagner davantage les nouveaux managers, notam-ment à l’occasion des prises de poste. Il faut être attentif aux jeunes surdiplômés qui encadrent des agents de catégorie C parfois rétifs au changement. »

Des recrutements centrés sur l’expertise technique au détriment des facultés managériales

Lors du recrutement d’un cadre intermédiaire, les deux dimensions qui le caractérisent – l’expertise métier et la capacité managériale – sont prises en compte de manière variable.

Les déclarations des DRH, DGA et DGS interrogés tendent à indiquer que la plupart des recrutements sont avant tout orientés vers l’expertise technique : quand on recrute à ces postes, on recherche avant tout un expert. Les capacités managériales ne sont néanmoins pas négligées : elles sont en général mentionnées dans la fiche de poste ou le descriptif d’emploi. Mais à l’heure du choix entre les candidats, c’est bien la dimension d’expertise qui prime. Ce mécanisme semble s’appliquer aussi bien lors d’un recrutement qu’à l’occa-sion d’une mobilité interne.

Même pour un recrutement externe sur un poste ayant une responsabilité d’encadrement, il apparaît que l’expertise métier prime sur les capacités managériales. Il faut reconnaître qu’il est plus facile, sur la base d’un CV et d’un entretien de recrutement, de présumer de l’expertise métier d’un candidat – qui se déduit avant tout de ses expériences profes-sionnelles passées – que de ses capacités managériales. En effet, sur ce dernier point, on

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peut facilement constater que la personne a déjà encadré, mais plus difficilement qu’elle a bien encadré.

Pour les recruteurs des collectivités, il est donc moins risqué de faire le pari d’une expertise métier présumée que le pari de capacités managériales. En privilégiant l’expertise métier pour leurs recrutements externes, les collectivités limitent en quelque sorte le risque de se tromper. S’agissant de recrutements de cadres A – attachés par exemple – qui n’auront pas de responsabilité hiérarchique immédiate mais en auront dans le futur, certains DRH interrogés nous ont indiqué que les capacités managériales futures du candidat ne sont pas prises en compte lors de la phase de recrutement. Dans ce mécanisme, la personne est donc recrutée sur la base de son expertise métier et à partir de sa capacité à répondre aux exigences du premier poste occupé. Très souvent, on recrute pour un premier poste et pas dans la perspective d’un parcours.

Dans le cas de recrutements internes, notamment lorsqu’un agent du service est recruté comme encadrant de ce service, la pratique couramment observée est de faire monter en grade le meilleur technicien (primus inter pares), privilégiant ainsi très clairement l’exper-tise technique sur les capacités managériales. On pourrait pourtant imaginer faire monter en grade celui qui a les meilleures capacités managériales même si ses compétences techniques sont moins pointues, plutôt que le meilleur technicien même s’il a des capa-cités managériales quelconques. Nos entretiens tendent à infirmer cette hypothèse, peu courante dans la réalité.

De la difficulté à évaluer les compétences managériales

La préférence plus ou moins consciente des recruteurs des collectivités pour l’expert peut être mise en relation avec les sources observées de légitimité des cadres intermédiaires. En effet, comme décrit plus haut, la compétence technique semble être la source principale de légitimité des cadres intermédiaires, comme eux-mêmes, les agents et les équipes de direction interrogés le déclarent.

Ceci s’explique aussi par le fait que dans certaines collectivités, la promotion sur un poste de manager d’un bon agent est la seule façon de le valoriser financièrement. L’accession à ce statut n’est pas sans poser de difficultés lorsqu’elle ne s’accompagne pas de formations spécifiques. En devenant encadrant, le cadre « issu du rang » change de métier. Son rôle, son positionnement et son métier-même évoluent du seul fait qu’il encadre ses anciens collègues.

Si le système de l’évaluation des agents a été décrit par de nombreux cadres intermédiaires comme une évolution forte du métier et qui va dans le bon sens, l’évaluation de la qualité du management des cadres est restée un sujet quasi-oublié.

D’une part, il n’existe en général pas ou peu de critères d’évaluation des capacités managé-riales sur lesquels pourraient s’appuyer les supérieurs hiérarchiques évaluateurs.

D’autre part, les cadres eux-mêmes sont pour l’essentiel évalués à l’aune de la « production collective », de l’équipe, du service ou de la direction encadrée. La qualité du manage-ment, certes plus difficile par nature à évaluer, est souvent laissée de côté. On peut faire le parallèle avec les concours de la fonction publique territoriale, dans lesquels les capacités managériales ne sont pas vraiment prises en compte.

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Certaines collectivités ont adopté des pratiques dont on pourrait s’inspirer à ce sujet : les chartes du management qui y sont établies sont, pour certaines d’entre elles, pensées comme des « guides du bon manager ». D’autres mettent en place des évaluations des capacités managériales par le biais de mises en situation managériale ; il s’agit d’éprouver les réactions du cadre face à telle ou telle difficulté ou situation. Ceci peut se rapprocher d’entretiens lors d’examens professionnels dans la fonction publique territoriale. Des tests de personnalité sont également parfois mis en place lors des recrutements, pour mieux apprécier les aptitudes à l’encadrement.

Un recours encore limité aux formations

Le développement de formations au managementQu’il s’agisse de formations au management lors de la prise de poste, ou en formation « continue », la formation est un volet relativement répandu dans les collectivités. Pour autant, son efficacité en matière de management et d’influence des pratiques des cadres intermédiaires semble limitée.

Lors de la prise de poste, qu’il s’agisse de recrutements internes ou externes, de nom-breuses collectivités ont aujourd’hui développé un « kit de formations », parfois obliga-toires : conduite de réunion, prise de parole en public, projet de service, conduite du changement, gestion de projet, etc. Ces outils ont pour partie été développés pour pallier la diminution de la formation initiale de certains cadres d’emplois, principalement des attachés territoriaux depuis 2008, qui abordait initialement ces sujets en dehors de tout contexte précis de collectivité.

L’avantage de ces formations est d’être, en théorie du moins, adaptées au contexte et à la culture de la collectivité, parfois même à la culture métier des agents concernés. Pour la grande majorité des personnes interrogées, il s’agit d’une évolution positive dans la prise en compte des compétences managériales nécessaires à l’encadrant. C’est aussi la conséquence des attentes croissantes à l’égard de la posture de manager des cadres intermédiaires.

Il faut noter que ces formations ont en général été mises en place trop récemment pour qu’on dispose aujourd’hui d’un recul suffisant sur leur utilisation. Elles pourraient consti-tuer des outils de formation réellement « continue », c’est-à-dire suivie à intervalles régu-liers et selon une logique d’accompagnement des cadres tout au long de leur carrière. Mais encore faut-il que ces outils soient véritablement adaptés au cadre intermédiaire et/ou effectivement utilisés.

Des formations trop peu utilisées ou inadaptéesCertains cadres interrogés indiquent que lors d’une prise de poste impliquant une nouvelle responsabilité hiérarchique, de telles formations ne leur ont pas été proposées. D’autres ne vont pas à ces formations, considérant qu’ils « n’ont rien à y apprendre », ou qu’ils n’ont pas de problèmes dans leur équipe et que dès lors ces formations ne leur sont « pas utiles ».

La perception de l’utilité de ces formations apparaît très hétérogène. Certains cadres inter-médiaires ne s’y impliquent pas pleinement. Ce manque d’implication peut s’expliquer par la conduite des formations elles-mêmes : elles sont souvent décrites comme trop généra-listes, pas assez adaptées à la diversité des situations vécues par les cadres intermédiaires. Les cadres préféreront, lorsqu’elles existent, des opérations de mise en réseau des cadres,

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à l’intérieur de la collectivité. En effet, elles ont pour avantage d’être opérationnelles et directement liées à leurs pratiques.

Les cadres intermédiaires invoquent en outre le manque de temps pour se rendre à ces formations. Ils n’y trouvent pas forcément les éléments de réponse aux questions pratiques sur des situations vécues au quotidien dont ils pensent avoir besoin.

La définition du public visé par ces dispositifs de formation constitue par ailleurs une vraie limite. D’une part, ces formations s’adressent parfois à des catégories statutaires précises, se limitant aux catégories A ou B. Ainsi elles peuvent exclure les agents de catégorie C qui ont des responsabilités d’encadrement. Ces agents en situation d’encadrement se retrouvent alors obligés d’apprendre la composante managériale de leur poste « sur le tas ». D’autre part, la composition des groupes lors de chaque session de formation relève de la gageure : si on peut dans l’absolu recommander des groupes de métiers et de catégories statutaires très variées (catégories A, B et C mélangées), il peut aussi arriver que cette variété débouche sur une formation inopérante, les attentes et situations des uns et des autres n’ayant que trop peu à voir.

Ainsi, les limites identifiées des dispositifs de formations actuels sont : - des formations managériales souvent proposées prioritairement à la direction générale. Elles ne sont pas proposées à tous les encadrants, les directions des res-sources humaines ne disposant pas des informations nécessaires pour identifier clai-rement lesquels de ces agents assurent ce type de fonctions ;

- des formations souvent trop théoriques et peu opérationnelles, qui ne répondent pas aux difficultés quotidiennes des cadres ;

- une faible mobilisation des cadres intermédiaires pour assister à ces formations, par un phénomène d’autocensure, manque de temps ou d’intérêt ;

- une réticence de certains cadres qui ont des difficultés, à l’écrit, à intégrer ces forma-tions jugées scolaires.

On pourrait imaginer pour les cadres intermédiaires – au stade de leur prise de poste ou au cours de leur carrière – un parcours de formations managériales à la carte, doublé d’un suivi spécifique au niveau de la DRH. Ce système existe peut-être dans certaines collecti-vités sans que nous les ayions identifiées.

Le développement de modalités innovantes d’accompagnement des managers

Certaines collectivités ont développé des moments d’échanges transversaux entre les cadres intermédiaires, en général pour des cadres aux métiers proches ou similaires et à des niveaux hiérarchiques différents. Des « midis des managers » ou « petits-déjeuners » sont organisés ici et là. Le nombre de ces collectivités semble tout de même encore res-treint, selon l’inventaire que nous avons pu faire.

Ces événements sont l’occasion d’un brassage entre les cadres représentant différents mé-tiers de la collectivité. Ils peuvent aussi avoir un intérêt à l’intérieur de périmètres métiers ayant impliqué un transfert de personnels de l’État – routes, secteur social, établissements scolaires, par exemple. L’intérêt est alors d’aborder des points spécifiques à ces métiers et non transposables aux autres compétences de la collectivité.

Pour une approche personnalisée du management, certaines collectivités ont développé un système de coaching. D’après les expériences identifiées auprès d’un conseil régional et

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d’une communauté urbaine, ce coaching peut être, selon les cas, assuré par un intervenant extérieur, ou s’apparenter davantage à un parrainage d’un cadre par un de ses pairs volon-taires de la collectivité.

Une autre forme d’accompagnement personnalisé est développée par certaines collectivi-tés sous la forme d’une cellule d’écoute ou de hotline. Ce système a plutôt une vocation d’information RH – statut, procédures internes de RH, et n’est pas forcément dédié aux cadres. Il peut néanmoins servir de mécanisme d’alerte dans des situations qui n’auraient pas été relayées normalement.

De manière générale, les dispositifs de formation semblent insuffisamment déployés au sein des collectivités selon les cadres interrogés. D’où l’évocation de carences dans l’ac-compagnement, au moment de la prise de poste et tout au long de la carrière du cadre.

Ainsi, les potentiels certains des cadres semblent souvent sous-exploités par la hiérarchie, dans un environnement de plus en plus contraint qui réduit leurs marges d’autonomie dans le travail.

2. Une recherche contrainte de marges de manœuvre

a. L’alourdissement des procédures

Un sentiment pesant

Lors de nos échanges, les cadres intermédiaires ont rendu compte d’un certain renfor-cement du formalisme dans la culture organisationnelle des collectivités avec lequel ils doivent composer dans leur travail quotidien.

Le passage d’un modèle bureaucratique à de nouvelles démarches de qualité du service, d’efficacité de l’action publique et d’ouverture aux enjeux externes implique un niveau d’encadrement renforcé et recentré sur le pilotage1. Cette évolution s’accompagne de la dif-fusion de nouveaux outils de gestion (tableaux de bord, évaluation, etc.), décentralisés au niveau du cadre intermédiaire, et de politiques transversales mobilisant des compétences relationnelles, de négociation et de communication.

On constate aussi une diffusion au secteur public de la culture des normes et certifications ISO. Celles-ci impliquent une traçabilité des activités, ainsi que l’édification de procé-dures, instructions et consignes dont la bonne exécution est contrôlée. Même dans les col-lectivités où cette certification n’est pas recherchée ou seulement partiellement déployée, on constate malgré tout un accroissement des rédactions de procédures. Si ces dernières clarifient certains processus ou relations, elles tendent également à rigidifier les actions des cadres ou de leurs agents.

Les directions ont également besoin de suivre les activités de la collectivité. Ce suivi du quotidien, de données de ressources humaines et des grands projets passe le plus souvent par la mise en place d’outils de reporting, notamment des tableaux de bord mesurant l’évo-lution des grands indicateurs.

1 RFAP, Céline Desmarais

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Ces systèmes très administratifs impliquent un renforcement de l’écrit, que ce soit par des notes ou des mails. Cette culture n’est pas nécessairement répandue de manière uniforme chez les cadres, en particulier chez les cadres « issus du rang ».

De par leur positionnement dans la chaîne hiérarchique et leur rôle de responsable du fonc-tionnement conforme du service, les cadres intermédiaires constituent le premier maillon sur lequel repose le bon déroulement de ces procédures formalisées, qu’elles portent sur la production du service, l’organisation des relations verticales et transversales ou le rendu-compte aux directions.

Des sollicitations multiples et peu hiérarchisées

Outre un alourdissement des obligations administratives, les cadres intermédiaires dé-plorent d’être sur-sollicités par les services ressources et la direction générale. Souvent, l’encadrement supérieur formule de multiples commandes, parfois contradictoires, peu hiérarchisées et à réaliser dans un temps très court. Cela complique la mission de priori-sation des tâches du cadre intermédiaire et la répartition du travail au sein de l’équipe. Le cadre est alors contraint de réaliser les tâches par lui-même pour respecter les échéances.

Les difficultés occasionnées par une charge de travail supplémentaire

S’ils reconnaissent l’utilité et la nécessité du reporting, les cadres intermédiaires regrettent pour beaucoup sa sur-formalisation. Pour eux, la restitution lors de rencontres avec la hié-rarchie semble plus adaptée afin de rendre compte mais aussi d’expliquer plus finement et de replacer des chiffres bruts dans un contexte.

Pour une part minoritaire des cadres interrogés, le reporting s’apparente à un système de surveillance généralisée du travail mis en place par la hiérarchie. Certains cadres parlent à ce propos de « flicage ». Ceci est notamment le cas lorsque les indicateurs choisis portent sur l’atteinte d’un objectif fixé plutôt que sur le suivi d’une activité sous la forme d’un outil neutre.

Mais le reproche le plus souvent formulé par les cadres porte sur le manque de partage au-tour des indicateurs. Ces derniers sont trop nombreux et peu co-construits, avec des retours et échanges insuffisants. Ceci est d’autant plus paradoxal que l’on s’attache à reconnaître l’importance de l’expertise chez ces cadres. Selon eux, cette expertise permettrait de pré-voir des indicateurs plus pertinents et peut-être aussi moins nombreux.

Lorsque ces outils ne sont pas pleinement partagés, voire lorsqu’ils sont considérés comme une contrainte imposée par la direction, les cadres intermédiaires peuvent être réticents à participer pleinement à l’activité de reporting. En effet, cette dernière tend à prendre du temps sur le reste de leurs missions. Certains cadres déclarent mettre alors en place des stratégies d’évitement pour diminuer le temps passé à respecter ces procédures et remplir ces indicateurs.

Un chef d’équipe d’une intercommunalité : « Les normes me semblent une invention libé-rale venue des pays anglo-saxons. Il y a des tâches qu’elles exigent que je ne fais pas car j’estime que c’est au détriment du temps consacré au fond de mes missions. Ce sont les excès du parapluie et du principe de précaution qui vont de pair avec une société procédurière ».

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Les cadres intermédiaires ont assimilé l’alourdissement des procédures comme une modi-fication de leur cadre de travail à laquelle ils doivent s’adapter. Les charges de travail qui en découlent constituent une forme de travail invisible et ne sont pas quantifiées par l’organisation.

Un DGS : « La pression de la raréfaction des ressources conduit à une exigence de repor-ting de la part de la direction générale et de transparence de la part des usagers. Il faut donc reporter dans des outils et tableaux de bord de plus en plus nombreux et complexes, expliquer et justifier auprès des usagers (courrier, notes pour un élu, etc.). Cela crée une charge de travail en constant accroissement que les cadres intermédiaires assument de plus en plus pour délester leurs équipes en saturation. On ne connaît pas le travail réel, et on pensait qu’il y avait des temps « morts ». On a donc rajouté du travail sans en évaluer la charge. L’arbitrage des priorités n’est pas réalisé totalement ; ça repose donc sur les cadres intermédiaires ».

b. Un manque de leviers RH pour remplir leur rôle de DRH de proximité

Egalement intégrée dans l’exercice de leurs fonctions, la contrainte portant sur la ressource humaine semble néanmoins l’une des moins bien acceptées par les cadres intermédiaires. Une part importante de ces derniers souligne les manques en nombre d’agents dans leurs équipes, même si tous admettent que la pression financière qui pèse sur les collectivités se reporte plus ou moins mécaniquement sur les effectifs et/ou la masse salariale.

Le point d’insatisfaction porte également sur la fonction ressources humaines proprement dite, telle qu’exercée par le cadre intermédiaire. En tant que premier niveau hiérarchique, les cadres intermédiaires jouent en effet un rôle important de DRH de proximité. La plupart d’entre eux participe aux jurys de recrutement de leurs agents, les évalue, en effectue la notation et se prononce sur leur évolution. Les rares cadres intermédiaires ne disposant pas de cette autorité le regrettent fortement, à quelques exceptions près de cadres qui ne sont pas à l’aise avec leurs fonctions managériales et préfèrent que ces missions soient exercées par leur supérieur hiérarchique.

Un manque de leviers d’accompagnement des agents

Les cadres intermédiaires soulignent leurs difficultés à répondre aux attentes précises de leurs agents en matière de ressources humaines. Ils déplorent un manque d’outils et de leviers disponibles. Pour leur accorder un suivi professionnel de qualité, les guider dans les démarches nécessaires à l’obtention de formations ou répondre à leurs interrogations rela-tives à leur évolution par exemple, les cadres intermédiaires ne se considèrent globalement pas suffisamment formés, voire informés. Le statut de la fonction publique territoriale leur semble ainsi particulièrement opaque, tout comme les procédures internes à la collectivité. Ceci est néanmoins à mettre en regard du faible investissement de certains cadres intermé-diaires dans les formations internes proposées lorsqu’elles existent.

Les cadres intermédiaires regrettent également de ne pas pouvoir mieux valoriser le travail des agents les plus méritants, qui mettent en œuvre concrètement les politiques publiques et sont donc les premiers concernés par la diminution des moyens et la réduction des effec-tifs. Le gel du point d’indice et la restriction des promotions dans certaines collectivités constituent autant de facteurs de démotivation des agents dans leur travail, phénomène face auquel les cadres se sentent démunis.

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Dans des secteurs jugés sensibles, ils sont parfois confrontés à des taux d’absentéisme importants et permanents, et n’ont pas la capacité d’y apporter seuls une solution. Malgré le développement des formations relatives aux risques psychosociaux, les cadres ne se sentent pas armés pour répondre à ces situations et attendent un appui fort de leur DRH. Ce sentiment de solitude dans la gestion des ressources humaines se manifeste particu-lièrement lorsqu’ils abordent leurs difficultés à gérer des cas individuels « à problème ».

Les outils que sont l’entretien annuel et l’évaluation semblent peu suivis d’effet, que ce soit dans le sens de la valorisation de l’agent ou dans celui de la recherche de correctifs s’ils s’avèrent nécessaires. En effet, la plupart des collectivités fonctionnent automatiquement à l’avancement d’échelon le plus court, ce qui diminue le caractère incitatif du dispositif. Surtout, les cadres regrettent l’opacité du traitement de ces évaluations et des promotions.

Un manque de soutien de l’encadrement supérieur

Lorsqu’ils font part de leurs difficultés managériales, les cadres intermédiaires se sentent peu soutenus par leur encadrement hiérarchique (hiérarchie directe ou DRH). C’est une des principales sources de leur mal-être dans l’exercice de leurs fonctions.

En particulier, les cadres souhaitent que leurs supérieurs prennent leurs responsabilités de N + 2 et les soutiennent pleinement dans les procédures disciplinaires. Les sanctions ne doivent pas être rattachées au seul N + 1 et les conséquences qui suivent ces procédures disciplinaires doivent permettre de préserver les agents autant que les cadres – mobilité, soutien de la hiérarchie, etc. Le même courage que celui qui est attendu des cadres inter-médiaires est demandé par ces derniers à leurs supérieurs et aux directions des ressources humaines.

Dans le domaine des moyens humains, des bonnes pratiques semblent néanmoins émer-ger, même si elles paraissent quantitativement limitées. Certains cadres intermédiaires peuvent être amenés à gérer des enveloppes de masse salariale. C’est ainsi le cas à la ville de Saint-Herblain, qui a mis en place une enveloppe pour le recours à des remplaçants non titulaires. La responsabilisation des cadres a permis de diviser par deux le recours aux remplaçants au cours de la première année de cette expérimentation, depuis pérennisée.

c. La difficulté à gérer la raréfaction des ressources financières à objectif constant

Ces derniers temps, les collectivités ont dû faire face à une raréfaction de leurs ressources financières et fiscales, tout en cherchant à maintenir leur niveau d’action locale. Afin de dégager des moyens suffisants, elles ont été conduites à rechercher des mesures d’optimi-sation des dépenses, tant en fonctionnement qu’en investissement.

Contributeurs dans ces exercices de recherches d’économies, les cadres intermédiaires sont unanimes pour reconnaître les difficultés financières auxquelles leurs institutions sont confrontées. Ils sont globalement solidaires des décisions des élus et de la direction et admettent que cette réduction de moyens puisse se répercuter sur le fonctionnement de leur propre service, à leur niveau. Ils modifient leur mode de fonctionnement pour réaliser leurs missions et proposent des pistes d’augmentation de l’efficience des dépenses.

Il convient toutefois de nuancer ce constat en fonction de la position du cadre dans la hié-rarchie. Plus les cadres sont proches de la direction générale, plus ils sont solidaires de ces décisions. À l’inverse, plus ils sont proches de l’opérationnel, plus ce manque de moyens

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complique l’exercice de leurs missions. En effet, l’optimisation n’étant ni infinie ni toujours réalisable, cette baisse de moyens financiers sans dégradation du niveau de service est le principal exemple d’injonction contradictoire débouchant sur des situations d’inconfort au travail, voire de tiraillement, pour les cadres intermédiaires.

Une solution mise en place dans certaines collectivités consiste à instaurer des enveloppes financières, ciblées ou plus larges, et à les confier aux cadres intermédiaires. Cela permet non seulement une responsabilisation des cadres intermédiaires, mais aussi un dégage-ment de marges de souplesse dans leur fonctionnement. Les retours des cadres sur la mise en place de ces outils semblent très positifs.

Les cadres intermédiaires apparaissent plus ou moins consultés et mis à contribution dans le cadre de l’élaboration budgétaire. Leurs propositions, même si elles ne sont pas toujours retenues, sont également un moyen pour eux de s’approprier les contraintes financières et d’arbitrer les actions de leur service.

Au final, la rigidification croissante de l’environnement de travail des cadres intermédiaires observée au travers de cette étude semble avoir pour conséquence la perte de marges de manœuvre ou d’espaces d’autonomie dans la prise de décision. Pour la plupart, les cadres intermédiaires l’acceptent et participent aux évolutions, voulues ou subies, de leur collecti-vité. Néanmoins, conscients des nécessités de faire circuler l’information par un reporting régulier et de limiter les dépenses et recrutements dans un contexte financier difficile, ils souffrent de certaines carences organisationnelles qui aboutissent à des facteurs de malaise. Ils sont donc dans le même temps en demande de marges de souplesse, afin que leur autonomie soit maintenue dans les limites d’un environnement contraint.

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Cadre intermédiaire et heureux de l’être… malgré les contraintes

Une mission d’encadrement vécue comme une source d’épanouissement

Nous avons demandé aux cadres intermédiaires interrogés de qualifier ce que repré-sente pour eux le management. La réponse la plus fréquente à cette question a été la source de plaisir. La proximité avec leurs agents, leur bien-être au travail ou encore la possibilité de les aider à évoluer dans leur carrière est une réelle source d’épanouisse-ment et d’enrichissement. En contrepartie, c’est aussi leur principale préoccupation et donc source de stress éventuel. Le management constitue selon eux une activité exigeante qui requiert une forte disponibilité.

Ainsi, ce n’est pas la contrainte que les cadres intermédiaires citent en premier lorsqu’ils souhaitent parler de leur situation, mais le plaisir dans leur travail, la satisfaction de déployer leur expertise et l’enrichissement dans l’interaction avec leurs agents. De ce fait, il ne semble pas y avoir de malaise généralisé des cadres intermédiaires, même si des facteurs de malaise et des sources de tensions peuvent bien entendu se conjuguer et se traduire par des cas individuels de souffrance.

Une prise en compte des difficultés particulières de ces cadres semble émerger dans la plupart des collectivités, le choix du sujet de cette étude traduisant cette préoccupa-tion légitime qui vise à préserver un maillon essentiel de la chaîne de commandement des institutions. On notera cependant une différence de perception sur ces difficultés selon le niveau hiérarchique interrogé : ainsi la direction générale comme les DRH apparaissent beaucoup plus inquiets de la situation vécue par les cadres intermédiaires que les cadres eux-mêmes.

Ces derniers ne se considèrent pas comme soumis à des difficultés insurmontables. Le malaise du cadre intermédiaire se résume à une pression sur les agents publics en général et à des cas particuliers dont ils ont connaissance mais qui portent surtout sur des situations très spécifiques. Toutefois, leur positionnement entre la direction géné-rale et les équipes les y expose davantage. Selon eux, l’acceptation de ces tensions est d’ailleurs une des caractéristiques des missions des cadres intermédiaires.

Un sentiment d’accumulation des difficultés

En l’absence de malaise, des causes de difficultés sont cependant identifiées par les cadres intermédiaires, causes qui ont pu être exposées dans les paragraphes précédents.

- Tout d’abord, ces cadres sont préoccupés par la raréfaction des ressources, qu’ils doivent concilier avec le maintien du niveau de service. Afin de préserver leurs équipes, ils tentent d’absorber une charge de travail croissante afin de ne pas faire reposer tout l’effort sur les agents. Cette capacité à faire autant avec moins n’est pas infinie et certains cadres signalent l’approche du point de rupture.

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- Les cadres intermédiaires peuvent également souffrir dans leurs relations inter-personnelles, avec des agents « à problème » comme avec certains supérieurs hié-rarchiques. Ainsi les cadres demandent à leurs N + 1 une réelle écoute, en retour de l’écoute que l’on attend d’eux. De plus, ils ne se sentent pas suffisamment soutenus dans leurs difficultés managériales, notamment en cas de conflit avec les agents.

- Enfin, la question de la reconnaissance se pose principalement sur la valorisation de la fonction d’encadrement, qui doit s’accompagner d’une meilleure visibilité dans l’évolution professionnelle.

Un désir d’évolution professionnelle

Nous avons enfin interrogé les cadres sur la manière dont ils se projettent à 5 ans. À cet horizon, la plupart, à l’exception de ceux en fin de carrière, prévoient de changer de poste ou de collectivité avec une promotion afin de « monter en compétences » et de répondre à ses aspirations professionnelles nouvelles. Certains se voient directeurs ou DGA. À l’inverse, d’autres – qui ont moins d’appétence pour le management d’équipe – souhaiteraient que leur évolution professionnelle n’implique pas nécessairement des fonctions d’encadrement. D’autres encore estiment qu’il ne leur sera pas possible d’ac-céder à une mobilité en raison de contraintes fortes, notamment la lenteur de la mobi-lité interne. Dans tous les cas, on ressent l’imminence d’une transition générationnelle chez les cadres intermédiaires en raison de l’accession à la retraite d’un grand nombre d’entre eux d’ici 5 à 10 ans.

L’anticipation par la plupart des cadres intermédiaires d’un mouvement de remise en cause forte du service public et de ses valeurs, en raison principalement du contexte économique et social dégradé, ne les empêche donc pas de se projeter.

Si le diagnostic n’est pas alarmiste, il convient cependant d’apporter des réponses aux difficultés mises en évidence, afin de préserver le bon fonctionnement de la « courroie de transmission ascendante et descendante » de l’organisation. La difficulté réside alors dans l’hétérogénéité de la catégorie des cadres intermédiaires, comme dans la multiplicité des collectivités et des réalités territoriales. Ainsi, celles-ci n’appellent pas une réponse uniforme et globalisante, mais une mise en œuvre adaptée de différents outils et bonnes pratiques.

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C. Tableau de synthèse des principales difficultés identifiées

Absence de dispositifs spécifiques destinés aux cadres intermédiaires

• Manque de formation• Manque de préparation à la prise de responsabilité• Manque d’accompagnement et de soutien de l’encadrement supérieur• Reconnaissance financière et symbolique insuffisante

Attentes croissantes des collectivités envers les cadres

intermédiaires

• Maintien de la demande d’expertise dans le cœur de métier• Elargissement du spectre des missions managériales• Mutation des collectivités, demandant une meilleure expertise de la conduite du

changement• Position de garant du bon fonctionnement du service, dans un système qui se

complexifie• Gestion quotidienne qui prend le pas sur la dimension managériale

Difficultés liées au positionnement

• Non identification de la catégorie des cadres intermédiaires• Difficultés à trouver sa place, obtenir une légitimité• Tiraillement entre équipe encadrée et équipe de direction• Isolement vertical et horizontal• Difficultés de transmission de l’information• Difficulté de transmission du sens

Autonomie limitée du cadre intermédiaire

• Pression du reporting• Contraintes normatives• Contraintes budgétaires• Manque d’outils support• Faible implication dans la prise de décision stratégique

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3e partie : vingt-trois préconisations pour donner aux cadres intermédiaires les moyens de jouer pleinement leur rôle

Si le diagnostic ne révèle pas de malaise généralisé, de nombreux leviers peuvent être utilisés pour améliorer la situation des cadres intermédiaires et le fonctionnement des collectivités territoriales.

Préconisation n° 1 : identifier les cadres intermédiaires sur la base de leurs missions et de leur positionnement

Le faible usage du terme « cadre intermédiaire » reflète le peu de visibilité dont ces agents disposent dans les collectivités territoriales. Ils ne sont pas identifiés comme tels au sein de ces organisations, en dépit du rôle particulier qu’ils y jouent. La spécificité des fonctions qu’ils assument et des contraintes auxquelles ils sont soumis semble imparfaitement prise en compte.

La première étape de cette identification consiste à clarifier la terminologie adoptée dans la politique de ressources humaines et à repérer précisément les cadres intermédiaires et leurs missions communes.

Il s’agit d’élaborer une typologie des cadres qui permette d’identifier les spécificités des cadres intermédiaires par rapport à l’encadrement supérieur. Au sein de l’encadrement intermédiaire, on peut distinguer des sous-catégories en fonction :

- des agents encadrés : on parlera de cadres d’encadrants et de cadres de non enca-drants (dont les cadres de proximité) ;

- de l’importance des missions managériales par rapport à l’expertise métier ; - de la plus ou moins grande proximité avec les équipes opérationnelles ou les équipes chargées de la prise de décision stratégique.

Cela permettra aux directions des ressources humaines d’adapter leurs outils aux publics de cadres : cibler les niveaux d’encadrement à associer à la stratégie et inviter des cadres aux séminaires, cibler les formations de management, etc. Lors de la mise en place d’une charte de management ou d’un nouveau régime indemnitaire (de type prime de fonction et de résultat – PFR) les missions et responsabilités de chaque niveau d’encadrement sont reprécisées.

Les agents se reconnaîtront d’autant plus facilement dans le vocable utilisé qu’ils auront été associés à l’étape de la définition, par exemple par un travail de co-construction du référentiel métier. Concernant les cadres intermédiaires, la constitution de groupes de travail permet d’aboutir à une définition mieux partagée et reflétant plus justement leur position et leurs missions.

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La communauté urbaine du Grand Lyon s’est lancée dans une typologie des cadres intermédiaires par l’évaluation du niveau de responsabilité dans le cadre de la PFR. La catégorie A de la filière administrative, regroupe 4 niveaux de responsabilité :

- Niveau 1 = responsabilité de la direction générale. - Niveau 2 = responsabilité stratégique. - Niveau 3 = responsabilité d’encadrement d’une équipe d’au moins 5 personnes. - Niveau 4 = chef de projet.

Cette étape de définition constitue un préalable indispensable au développement d’une politique spécifique de ressources humaines à destination des cadres intermédiaires.

A. Valoriser la dimension managériale de leurs missions

Diagnostic

La dimension managériale du rôle du cadre intermédiaire est souvent insuffisamment valo-risée. Il ressort en effet des entretiens que les missions managériales sont souvent sous-estimées, voire que les enjeux de management sont absents de la politique des ressources humaines et de ses outils.

Objectif

Permettre au cadre intermédiaire d’assurer pleinement ses missions et compléter son profil de manager en plus de son expertise métier.

Préconisation n° 2 : intégrer systématiquement la fonction de management dans les fiches de postes

Les fiches de postes, si elles existent, présentent souvent un décalage avec la réalité des missions exercées. Ce décalage est sensible concernant les cadres intermédiaires, dont les missions sont peu visibles et peu analysées.

Plusieurs situations peuvent se présenter : - Survalorisation de l’expertise métier et sous-évaluation des missions et enjeux liés au management (absence d’indication sur le nombre d’agents à encadrer, la conduite d’évaluation, de notation et de promotion des équipes, la gestion des équipes…).

- Valorisation de missions managériales qui n’existent pas dans les faits. Cette situation se produit souvent lorsque la collectivité a confié un titre de manager à un agent afin de le valoriser. Soit il n’exerce pas réellement de fonctions d’encadrement, soit l’exis-tence du service qu’il encadre ne répond pas à un besoin de l’organisation.

- Absence totale de mention relative au management alors que l’agent concerné assure une mission de coordination. Il s’agit de missions de management fonctionnel. Cela provoque des difficultés de positionnement, voire un sentiment de sous-valorisation.

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Ce hiatus entre l’outil RH et la réalité quotidienne des agents est préjudiciable au bon fonctionnement de la collectivité. Cette situation implique un manque de connaissance par les agents du périmètre de leur poste ainsi que des difficultés de positionnement.

Pour constituer un outil RH efficace et partagé, les fiches de postes doivent donc être complètes et réalistes.

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La refonte des fiches de postes au conseil régional du Nord-Pas-de-Calais

Le conseil régional du Nord-Pas-de-Calais s’est engagé dans un travail de refonte des fiches de postes. La direction des ressources humaines s’est constituée comme pilote de ce projet, dont l’ambition était d’aboutir à une description objective des missions réellement exercées sur le poste.

Des fiches de postes génériques ont été élaborées, puis complétées par des lettres de missions pour les tâches plus spécifiques. Ces outils sont régulièrement remis à jour, notamment durant les campagnes d’évaluation, afin d’assurer leur adéquation avec la réalité.

Cette démarche a permis à chaque agent de se situer dans un cadre commun et par-tagé. Elle s’est conclue par une meilleure reconnaissance de la diversité des missions des cadres intermédiaires.

Préconisation n° 3 : recruter en tenant compte des compétences managériales

Dès lors que la collectivité dispose d’une fiche de poste complète, la procédure de recrute-ment peut évoluer pour garantir la meilleure adéquation possible entre le profil recherché et le candidat retenu. Les jurys, préalablement formés aux techniques de recrutement, seront incités à prendre en compte les compétences managériales dans l’analyse des profils qui leur seront présentés. Cela permettrait de dépasser une logique de valorisation de l’exper-tise technique jusque-là prédominante.

Il s’agit bien de recruter un cadre intermédiaire pour son potentiel managérial plutôt que pour ses seules compétences techniques. La politique de recrutement des collectivités peut évoluer pour :

- s’assurer que les agents nommés possèdent bien les compétences et/ou le potentiel managériaux requis ;

- mettre en place des moyens de valorisation alternatifs à la nomination sur des postes d’encadrant pour les agents qui ne présentent pas un profil de manager.

L’analyse préalable des compétences des candidats ainsi que l’appel aux candidatures externes constituent une garantie de bonne gestion des ressources humaines.

Lors du recrutement, on peut déceler le potentiel managérial d’un candidat par le biais :

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- d’outils : tests psychotechniques, mises en situations managériales. - de critères : appétence pour l’encadrement, expériences d’animation d’équipe, recul sur les pratiques managériales, éventuelles formations au management, etc.

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Le conseil régional des Pays de la Loire tient compte dans le dispositif de recrutement de l’expérience managériale des candidats. Il utilise des tests psychotechniques pour mieux cerner leur personnalité et leur type de management.

Dans ses réflexions sur le schéma directeur des ressources humaines, le conseil général de l’Aude souhaite que les fiches de postes fassent systématiquement le lien entre compétences managériales et possibilités de promotion interne.

Les compétences managériales seront ainsi valorisées lors des entretiens annuels d’éva-luation afin que les qualités managériales soient aussi déterminantes que les compétences techniques pour l’obtention d’une promotion.

Préconisation n° 4 : repérer et accompagner les cadres intermédiaires potentiels

Nombre de collectivités s’engagent dans la voie, complexe, de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Cette ambition implique plusieurs actions concernant les cadres intermédiaires : un repérage des agents qui peuvent devenir des cadres intermé-diaires, parce qu’ils ont les compétences ou pourront les acquérir, et qui en expriment la volonté. Ce repérage pourrait s’accompagner d’un dispositif d’accompagnement individua-lisé (formation, bilan de compétences…) afin de permettre à l’agent, en collaboration avec la DRH, d’anticiper ses perspectives d’évolution fonctionnelle et hiérarchique.

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La politique d’accompagnement à la mobilité interne au conseil général de Seine-Saint-Denis

Une éducatrice de jeunes enfants du conseil général de la Seine-Saint-Denis a béné-ficié pendant plusieurs mois d’un accompagnement spécifique (formation et affecta-tion transitoire sur un poste de manager) avant d’être nommée directrice adjointe de crèche. Cet accompagnement lui a permis d’acquérir des compétences managériales tout en s’appropriant sa nouvelle position de manager.

Un accompagnement à la mobilité des agents qui deviennent des cadres intermédiaires pourrait être mis en place. Changer de position hiérarchique au sein d’une même collecti-vité n’est pas simple, surtout lorsqu’il s’agit d’encadrer l’équipe dont on est issu. Il appar-tient à la DRH d’accompagner l’agent tant sur le plan des compétences que pour l’aider à trouver sa nouvelle place dans l’organisation. Il peut s’agir de :

- formations pour compléter son profil d’expert ;

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- entretiens avec un conseiller en ressources humaines pour l’amener à réfléchir à sa nouvelle position d’encadrant ;

- rencontres avec des cadres qui ont été dans sa situation, voire parrainages par des pairs ;

- chartes de management pouvant servir lors du recrutement, et plus largement tout au long de la carrière pour formaliser les valeurs et les objectifs du management que la collectivité souhaite promouvoir.

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La charte managériale de la communauté urbaine du Grand Lyon

Elle présente les valeurs des managers de la collectivité : écoute, exigence, loyauté, courage, équité, transparence, reconnaissance. Un groupe de travail est à l’origine de son élaboration.

L’objectif est de permettre aux cadres de prendre de la hauteur et d’accompagner les agents vers plus d’autonomie. Elle repose sur le principe d’exemplarité managériale, qui consiste à manager comme on souhaite se voir managé. La direction générale escompte d’une telle charte une harmonisation des pratiques managériales, ainsi que l’émergence d’une communauté des managers de la collectivité.

Des actions de communication visant à faire évoluer les mentalités professionnelles per-mettraient de renforcer la cohérence de la politique de mobilité interne. En effet, le lien établi entre promotion professionnelle et accès aux fonctions d’encadrement est contes-table. Pourquoi juger de l’évolution d’une carrière en fonction du nombre d’agents encadrés alors que certaines compétences, notamment d’expertise, peuvent être valorisées ? Des ac-tions de communication sur les parcours professionnels des non encadrants permettraient de montrer par exemple qu’un poste de chargé de mission peut être aussi valorisant qu’un poste de manager. Forums du personnel ou articles dans le journal interne pourraient être des moyens adéquats de présentation de la diversité des parcours.

Préconisation n° 5 : améliorer la reconnaissance indemnitaire et symbolique des encadrants

La politique de rémunération actuelle des collectivités ne valorise pas toujours suffisam-ment les cadres intermédiaires. Or plusieurs leviers existent pour accroître leur motivation :

- se saisir des nombreuses modalités de rémunération offertes par la réglementation : nBI (nouvelle bonification indiciaire), IFTS (indemnités forfaitaires pour travaux sup-plémentaires), prime d’encadrement, IAT (indemnité d’administration et de techni-cité), etc. La reconnaissance des missions managériales dans les fiches de postes est souvent la condition de l’accès à ces modes de rémunération ;

- mettre en place une politique d’attribution de la NBI transparente et équitable.

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À la communauté urbaine du Grand Lyon, une prime de fonctions et de résultats (PFR) a été instituée, distinguant quatre niveaux de responsabilité dans la filière administra-tive (direction générale, niveau stratégique, encadrant, chef de projet) et trois niveaux dans la filière technique (niveau stratégique, encadrant, chef de projet).

Le schéma directeur des ressources humaines du conseil général de l’Aude conditionne la PFR à des critères de qualité managériale.

En complément, d’autres leviers de reconnaissance et de motivation peuvent être activés. Ceux-ci sont :

- Des leviers matériels : attribuer au cadre un bureau personnel, un téléphone mobile, un ordinateur portable avec accès au réseau et connexion Internet, voire un véhicule de ser-vice ou de fonction ne relève pas seulement de la reconnaissance symbolique, mais est surtout la condition de l’exercice de ses missions expertes et managériales. De tels moyens sont attribués en fonction des responsabilités à exercer et des tâches à accomplir.

- Des leviers symboliques : le contact avec les élus ou la présence du DGS et des DGA dans les services. La reconnaissance symbolique est un élément essentiel de motiva-tion des cadres intermédiaires, comme de leur visibilité auprès de leurs agents ou des partenaires extérieurs.

La politique de délégation de signature est un autre moyen de valorisation des encadrants, qui a toutefois des conséquences en termes de partage des pouvoirs et responsabilités au-delà de la stricte reconnaissance.

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La politique de délégation de signature du conseil général d’Ille-et-VilaineAu conseil général d’Ille-et-Vilaine, les délégations de signature sont diffusées dans l’administration au-delà du haut de la chaîne hiérarchique. Elles sont confiées en fonc-tion, non seulement d’une vision du partage du pouvoir et des responsabilités, mais aussi d’une vision managériale : la signature étant un attribut du pouvoir, ces déléga-tions sont un moyen de distinction et de reconnaissance des cadres intermédiaires au sein de l’administration.

Ainsi, le conseil général a pris le parti de faire en sorte que tous les encadrants mana-gers aient des délégations les plus homogènes possibles par niveau d’encadrement (tout en tenant compte des spécificités techniques liées à leur champ d’intervention). Pour ce faire, le découpage DGA/directeur/chef de service ne suffisait pas, d’autant plus dans le contexte de la territorialisation.

Une catégorie a donc été distinguée de manière informelle : les « responsables de mis-sion », à la tête de micro-équipes de terrain (au moins cinq agents). Le conseil général a souhaité leur reconnaître une part de pouvoir rendue visible par le biais de délégations de signature calibrées pour leur permettre de signer des actes de pure gestion administrative (mandatement, certains actes de gestion du personnel ou ordres de service par exemple).

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B. Les accompagner dans l’exercice de leurs fonctions

Diagnostic

Les cadres intermédiaires évoluent dans un environnement incertain. D’une part, ils ne savent souvent qu’imparfaitement ce que leur supérieur hiérarchique attend d’eux. D’autre part, leurs attentes vis-à-vis de leur supérieur hiérarchique en termes de soutien ou de précision et de hiérarchisation des commandes ne sont pas toujours satisfaites. En outre, ils ne disposent pas toujours d’outils à la hauteur des enjeux managériaux qu’ils doivent relever.

Objectifs

- Sécuriser l’environnement du cadre intermédiaire en précisant les attentes à son égard et son rôle dans l’organisation.

- Former le cadre intermédiaire aux techniques de management.

Préconisation n° 6 : favoriser le dialogue sur les attentes du supérieur hiérarchique et les marges de manœuvre

Il paraît important de clarifier les missions et marges de manœuvre du cadre intermédiaire, pour qu’il puisse exercer pleinement ses fonctions.

Il est essentiel que le supérieur hiérarchique explicite ses attentes en général peu forma-lisées, par écrit ou par oral. Ce faisant, il fixe le cap. Cette clarification des attentes ne saurait pour autant supprimer toute marge d’autonomie du cadre intermédiaire dans son travail.

Cet éclaircissement des attentes serait régulièrement effectué par le N + 1, a minima lors du recrutement et des entretiens annuels d’évaluation. À l’issue de ces entretiens, le cadre et son supérieur formaliseraient par écrit leurs attentes réciproques et les marges de manœuvre nécessaires pour les réaliser. À ces occasions, le cadre intermédiaire pourrait confirmer ses marges de manœuvre, co-construire ses délégations, et fixer avec son supé-rieur hiérarchique des modalités d’échanges réguliers. Ce serait l’occasion d’identifier un potentiel hiatus entre les commandes et les marges de manœuvre et de décision dont il dispose.

Préconisation n° 7 : assurer les cadres intermédiaires du soutien explicite de leur hiérarchie

Si l’encadrement intermédiaire s’estime globalement soutenu par sa hiérarchie, certaines si-tuations de tension peuvent susciter un sentiment d’isolement. Or, le cadre intermédiaire doit assumer devant ses équipes les conséquences de décisions prises à des niveaux supérieurs.

La solidarité entre les différents niveaux hiérarchiques est essentielle pour garantir la mise en œuvre des décisions dont certaines sont parfois mal vécues par les agents.

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Ainsi, il paraît important de soutenir les cadres intermédiaires dans le processus de déci-sion et leur mise en œuvre. Cela concerne notamment :

- les décisions au quotidien : lorsque la direction générale est appelée à arbitrer dans certains dossiers, il est important que ses choix soient expliqués et assumés face aux agents ;

- les changements organisationnels : les réorganisations, souvent sources de tensions dans les collectivités car elles bouleversent les conditions de travail des agents, doivent être portées conjointement par l’encadrement stratégique et l’encadrement intermédiaire ;

- la prise de poste : le cadre intermédiaire pourrait être accompagné par son supérieur hiérarchique, pour trouver sa légitimité et communiquer sur sa « feuille de route ». Le supérieur hiérarchique peut par exemple présenter le cadre nouvellement recruté à son équipe lors d’une réunion de service et exposer ses attentes et les missions confiées. Cette démarche légitime le cadre.

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À la ville de Bagneux, la prise de poste du directeur général des services a été accom-pagnée d’une lettre de mandat du maire, qui lui a permis d’être pleinement légitime auprès des agents. On pourrait imaginer un tel dispositif pour les cadres intermédiaires qui arrivent en fonction, avec une lettre signée par leurs supérieurs hiérarchiques.

À la ville de Saint-Herblain, l’organisation de réunions et de prises de décisions en cascade permet d’éviter les doubles commandes entre les niveaux hiérarchiques. Des rencontres formalisées et cadencées ont lieu sur les projets structurants, en un mou-vement de va-et-vient de validation. Cette organisation est rendue possible par la taille moyenne de la collectivité (1 000 agents).

Préconisation n° 8 : les former au management et aux méthodes d’accompagnement du changement

Les dispositifs de formation proposés par les directions des ressources humaines sont souvent peu adaptés aux défis auxquels sont confrontés les cadres intermédiaires. Ceux-ci ne sont pas toujours formés à l’animation d’équipes, l’évaluation des collaborateurs ou la conduite du changement.

Il convient, pour mobiliser et renforcer les compétences des cadres : - de rendre accessibles aux cadres intermédiaires les formations en communiquant sur l’offre de formation ;

- de mettre en place des formations dédiées à l’encadrement intermédiaire, notamment en diversifiant les formats et les modes de formation, et sur le long terme (exemple d’une intervention du CNFPT qui se déroule sur une année, pour former au manage-ment et à la conduite du changement) ;

- d’orienter chaque cadre vers une formation adaptée à ses besoins.

Le contenu même de la formation doit être revu afin d’assurer une adéquation avec les besoins. La définition des contenus des formations peut faire l’objet d’une participation des

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cadres afin de mieux cibler leurs attentes, par exemple dans la conduite du changement, en termes de techniques managériales ou pour favoriser l’autonomie de leurs agents.

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Une école de la maîtrise à Reims

Un premier cycle de management a été lancé en septembre 2011 pour les cadres de catégorie A, d’une durée de 10 jours. Un nouveau cycle est en phase de lancement à destination des agents de maîtrise.

Les remontées des agents, syndicats et cadres ont en effet révélé les difficultés des agents de maîtrise, souvent issus du rang, en termes de légitimité vis-à-vis d’anciens collègues, d’animation d’équipe et d’appropriation des outils informatiques ou de pilo-tage et de reporting.

Le CNFPT est en charge de la conception de ce cycle de formation, co-construit avec le directeur général des services techniques, les directeurs et les agents. L’ensemble des agents de maîtrise pourra bénéficier de la formation, de trois fois deux jours. Des stages optionnels viendront la compléter.

Par le biais de formations à l’entretien professionnel et de ce nouveau cycle de for-mation, la politique des ressources humaines est donc spécifiquement adressée à la catégorie des cadres intermédiaires.

En outre, l’évaluation régulière des dispositifs de formation permet de faire évoluer leur contenu. Cette évaluation sera d’autant plus exploitable qu’elle sera assurée dès la fin de la formation puis quelques semaines après (évaluation à chaud et à froid).

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Le parcours de développement des compétences managériales au Grand Lyon

La communauté urbaine du Grand Lyon a construit, avec le CNFPT, un parcours de développement des compétences managériales. Ces dernières ont été répertoriées en quatre strates, qui font, chacune, l’objet d’une offre de formation spécifique. L’agent est orienté vers le dispositif correspondant à ses besoins individuels.

Un « aiguilleur » de la DRH identifie les points forts et les points faibles de l’agent à l’issue d’un entretien avec lui. Un second entretien permet de préciser le projet pro-fessionnel. Enfin, un troisième entretien est conduit en présence du supérieur hiérar-chique, visant à préciser les objectifs de la hiérarchie. Cette démarche aboutit à une offre de formation adaptée au diagnostic établi avec l’agent.

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La formation au management au conseil général de l’Ardèche

Une large campagne de formation est en cours auprès des cadres de cette collectivité. En l’espace de 18 mois, 250 cadres assisteront à cette formation qui se déroule en trois sessions :

- une session de construction d’un socle commun de valeurs et de pratiques mana-gériales ;

- une session de travail sur les postures d’encadrement et les relations interperson-nelles ;

- une session d’échanges sur les outils managériaux.

Ensuite, la collectivité organise des journées managériales afin de permettre aux diffé-rents niveaux hiérarchiques de croiser leurs problématiques managériales et capitaliser leurs expériences.

Préconisation n° 9 : proposer des dispositifs individualisés de suivi des cadres managers

Dans l’exercice de leurs missions de DRH de proximité, les cadres intermédiaires peuvent se trouver confrontés à des difficultés dans leurs relations individuelles ou collectives avec leurs agents.

Leur apporter, à la demande, des réponses sur mesure adaptées aux cas qu’ils rencontrent, semble alors opportun.

Deux modalités d’appui aux cadres managers peuvent par exemple être envisagées : - La désignation d’un référent dédié aux cadres intermédiaires au sein de la direction des ressources humaines. Les cadres intermédiaires auraient un interlocuteur identifié au sein de la DRH, en mesure de les accompagner et les conseiller pour la gestion de cas difficiles, en lien avec leur supérieur hiérarchique.

- L’offre de coaching individualisé pour les cadres qui en font la demande. Un tel ac-compagnement pourrait être assuré par un autre cadre de la collectivité, ou par un intervenant extérieur.

Préconisation n° 10 : prioriser les urgences pour favoriser l’existence d’un temps managérial

De nombreux cadres intermédiaires interrogés estiment travailler dans l’urgence et ne pas avoir suffisamment de temps pour assurer pleinement leurs missions d’encadrement. L’objectif est donc, pour le cadre et son supérieur hiérarchique, de penser ensemble une gestion des commandes et des missions qui laisse au cadre le temps nécessaire au management.

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Cette question de la temporalité a un sens si elle fait l’objet d’une politique claire et cohé-rente de la part de la direction générale. Il appartient avant tout aux cadres intermédiaires et à leur supérieur hiérarchique de relativiser l’urgence de certaines commandes d’une part, et de valoriser le temps managérial comme du temps productif pour l’organisation d’autre part.

La « gestion raisonnée » des urgences peut ainsi passer par : - le repérage explicite des projets stratégiques dans chaque direction ou service, et du niveau de priorité qui leur est accordé ;

- la limitation du nombre de projets qu’il est raisonnable de mener en même temps au vu du plan de charge d’une organisation ;

- la planification, par semestre ou trimestre, des jalons clés qu’il convient d’anticiper pour chaque projet jugé prioritaire ;

- la prise en compte du temps d’appropriation, de la mise en œuvre et de la consolida-tion des réformes dans la conduite du changement. Cela permet aux cadres intermé-diaires d’agir dans un environnement plus stable et aux collaborateurs d’intégrer le changement.

Par ailleurs, la valorisation du temps managérial peut passer notamment par : - La prise en compte du temps managérial dans le rythme des commandes adressées aux cadres intermédiaires : travail de co-construction en équipe, association d’autres services ou directions.

- L’organisation de « temps déconnectés de l’urgence » comme les jours (ou demi-jour-nées) sans réunions. De nombreuses collectivités s’engagent ainsi dans une réflexion sur le poids des réunions et la possibilité d’en limiter le nombre.

- Une recherche de restriction ciblée de l’usage de la messagerie électronique, sur des temps spécifiques ou des objets particuliers : limitation du « répondre à tous », limita-tion de la copie systématique au supérieur hiérarchique, limitation du message « pour information », par exemple.

- Le développement d’outils collaboratifs au sein d’un service ou d’une direction, qui constituent un socle favorable à l’animation d’équipe : espaces intranet mutualisés, par exemple.

Préconisation n° 11 : les inciter à déléguer

Le temps managérial doit aussi être intégré comme une priorité par les cadres intermé-diaires, souvent obligés d’arbitrer entre plusieurs missions et demandes urgentes.

Or, la double mission d’expert manager peut inciter les cadres intermédiaires à s’emparer de dossiers qu’ils pourraient déléguer et se surcharger de travail expert. Il semble donc nécessaire d’inciter les cadres intermédiaires à déléguer afin qu’ils puissent investir leurs fonctions managériales, et de les accompagner dans cette démarche.

Certes, la délégation implique une relation de confiance entre les niveaux hiérarchiques. Les collectivités peuvent mettre en œuvre des actions pour la favoriser :

- échanges ciblés avec les cadres intermédiaires, les incitant à se poser la question : « sur quel dossier ai-je gardé la main sans que cela ne se justifie réellement ? » Ce sujet peut être porté par l’éventuelle cellule « organisation » de la DRH ;

- formations spécifiques à la délégation des tâches au sein d’une direction ou d’un service ;

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- incitation des cadres intermédiaires à évoquer la question de la délégation et du par-tage des tâches avec leur N + 1 et leur N - 1, soit lors de l’entretien d’évaluation, soit lors d’un moment dédié.

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Le conseil général de la Seine-Saint-Denis a organisé, dans le cadre du dispositif « les vendredis du management » un atelier intitulé « comment déléguer ». Cette formation avait pour objectif de permettre aux cadres d’identifier leurs missions propres ainsi que de disposer d’outils et de méthodes de délégation.

La ville de Pessac a mis en place un système d’« auto-évaluation » des politiques pu-bliques par ses cadres. À cette occasion, les pratiques et la culture managériales com-munes sont réinterrogées par les cadres, notamment s’agissant des circuits de décision et du management.

Préconisation n° 12 : formaliser et diffuser les procédures des fonctions supports

Le cadre intermédiaire est un levier essentiel, non seulement pour la conduite du change-ment mais aussi pour l’application au quotidien de procédures indispensables à la sécurité juridique et au pilotage des ressources de l’organisation.

Les directions ressources pourraient mettre à la disposition des cadres ces procédures, dans un format clarifié et détaillé : ressources humaines, finances, marchés publics, infor-matique, juridique notamment.

Cela favoriserait : - Une meilleure réponse des cadres aux demandes des agents. Ils seraient en mesure de jouer pleinement leur rôle en matière de « fonctions supports de proximité » – par exemple sur l’octroi de congés ou le repérage des risques psychosociaux.

- Une meilleure acceptation par les agents de décisions prises de façon transparente et harmonisée.

- Le développement des relations entre cadres intermédiaires et fonctions supports pro-pice à une meilleure remontée de l’information aux directions ressources.

C’est surtout pour la fonction RH que cela semble nécessaire. Il ne s’agit pas de créer de nouvelles procédures – la multiplication des procédures venant alourdir le travail des cadres intermédiaires – mais d’améliorer la lisibilité et l’appropriation de celles-ci pour chaque acteur de la collectivité.

Une communication de la DRH et de la direction des finances spécifiquement dédiée aux cadres intermédiaires peut être organisée. Il s’agit de leur présenter de façon opérationnelle les procédures qu’ils peuvent utiliser et de les resituer dans une stratégie globale. Divers supports peuvent être utilisés comme des référentiels de procédures, une lettre d’informa-tion à destination des managers ou encore l’Intranet.

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La ville et la communauté urbaine de Nantes ont instauré des contrats de services entre la direction des ressources humaines et les directions opérationnelles. Ces contrats permettent de formaliser les objectifs que les services opérationnels souhaitent assi-gner à la direction support dans le cadre de ses activités. Ils permettent en retour une acculturation des services opérationnels aux spécificités de la gestion des res-sources humaines de la collectivité. Cet engagement réciproque court jusqu’à l’atteinte conjointe des objectifs.

La ville de Toulouse a conçu un document de formalisation du fonctionnement du logi-ciel financier, qui explique sa mécanique globale, son articulation avec la procédure comptable de la collectivité et indique l’emplacement des informations importantes pour le quotidien du cadre.

La déconcentration des fonctions supports – qui consiste à identifier dans chaque direc-tion des référents RH et finances – permet de faire partager la stratégie en matière de ressources aux directions métiers et de mobiliser les cadres intermédiaires sur des sujets spécifiques. À condition que la direction ressource anime véritablement le réseau de ses référents dans les directions opérationnelles, ceux-ci sont en mesure de repérer et accom-pagner les cadres dans leur appropriation et leur mise en œuvre des procédures. Le lance-ment d’une campagne de sensibilisation sur les risques psychosociaux par la DRH pourrait ainsi être relayé dans les directions par les référents RH qui répercuteraient les objectifs et moyens aux cadres intermédiaires tout au long de la chaîne hiérarchique.

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Le rapprochement de la fonction RH à la ville de Mérignac

La ville de Mérignac a récemment procédé à une réorganisation de sa direction des ressources humaines, y intégrant un poste de chargé de communication interne dont l’une des missions est de créer des points de convergence entre la direction générale des services, la DRH et les cadres.

Préconisation n° 13 : développer leur autonomie de gestion des ressources humaines et financières

Les cadres intermédiaires ont à décliner les décisions stratégiques de manière opération-nelle. Leur connaissance du terrain peut être utilisée pour dégager de nouvelles marges de manœuvre en faisant coïncider précisément l’action publique aux besoins ou en privilégiant des modes de faire à l’efficacité éprouvée. Pour valoriser cette connaissance du terrain, il peut être pertinent d’augmenter certaines marges de manœuvre notamment sur la gestion des ressources humaines et des finances.

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Différentes modalités peuvent être envisagées : - les impliquer pleinement dans le processus de recrutement de leurs équipes ; - leur faire porter les choix de promotion et d’avancement dans le cadre des orientations générales de la collectivité ;

- leur allouer des budgets globaux avec une part de fongibilité, pour leur permettre d’arbitrer sur l’allocation des moyens humains et financiers ;

- les associer au processus de remontée des besoins vers les directions supports, et éventuellement aux négociations dans le cadre de la procédure budgétaire.

La déconcentration des fonctions supports permet aussi de faire partager la stratégie en matière de ressources aux directions métiers et d’adapter les choix aux réalités de terrain. Elle peut être l’occasion d’une mobilisation des cadres, en ménageant des marges d’autonomie dans la gestion des ressources et en facilitant la remontée d’informations à des fins de pilotage.

Il ne s’agit nullement d’accroître les moyens alloués mais de permettre d’exploiter au mieux la créativité des cadres à moyens constants et de leur confier les missions qui sont censées leur être dévolues.

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L’autonomie dans la gestion des ressources humaines et financières

Au conseil général de l’Isère, les directions disposent d’une enveloppe « formation » qu’elles ont la liberté de répartir entre leurs services. Le risque est toutefois que le fractionnement successif de l’enveloppe entre les services conduise à un volume final de crédits insuffisant pour réaliser les formations.

Au conseil général de l’Hérault, ont été mis en place des centres de responsabilité par direction avec déconcentration et suivi de certaines enveloppes (frais de déplacement ou formation).

La communauté urbaine du Grand Lyon a déconcentré la gestion des ressources hu-maines au sein de six unités dans les directions. Ces unités sont les premiers relais de remontée de l’information et des alertes RH. La gestion des enveloppes de masse salariale se fait au niveau des directions.

Préconisation n° 14 : favoriser la remontée d’information lors des réunions

Le rôle des cadres intermédiaires de transmission ascendante de l’information doit être effectif pour permettre l’expression des réalités et difficultés opérationnelles, ainsi que la connaissance du climat social au sein de la collectivité.

Au sein des instances de réunion existantes, plusieurs modes d’association des cadres intermédiaires sont possibles :

- les réunions de service ou de direction peuvent être exploitées comme des lieux et des temps d’échange d’informations ascendantes et descendantes entre les niveaux hiérarchiques ;

- la parole peut être redonnée aux cadres intermédiaires sur les sujets qu’ils maîtrisent.

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Les ateliers au conseil général du Gard

Au conseil général du Gard, lors des réunions d’encadrement, il existe un temps de par-tage d’informations entre cadres sous la forme d’ateliers au cours desquels les cadres peuvent faire une présentation d’une thématique qu’ils maîtrisent.

Des tables rondes sont organisées pour permettre l’expression des cadres, comme par exemple une récente table ronde sur l’usage de la messagerie électronique (ses atouts, ses inconvénients, les règles à poser, etc.). Le conseil général du Gard utilise aussi, à l’occasion, le système de vote électronique qui permet à chacun de s’exprimer sur une problématique collective.

C. Leur faire prendre du recul par rapport à leurs propres pratiques managériales

Diagnostic

Les missions du cadre intermédiaire conduisent souvent à un exercice solitaire. Cela est ren-forcé par le fait qu’il n’existe pas de lieux spécifiques, formels ou informels, au sein desquels les cadres intermédiaires pourraient se retrouver et échanger. Souvent happés par la gestion quotidienne, ils ne sont pas incités à prendre de la distance vis-à-vis de leurs pratiques.

Objectifs

- Favoriser une prise de conscience par les cadres intermédiaires de problématiques communes au-delà de la spécificité des métiers.

- Permettre le partage d’expériences et la résolution de problèmes en commun. - Améliorer leurs pratiques par la réalisation de bilans réguliers.

Préconisation n° 15 : prévoir des temps de réflexion sur les pratiques managériales entre cadres intermédiaires

La gestion quotidienne des équipes permet difficilement aux cadres de prendre de la dis-tance par rapport à leurs pratiques managériales. Il semble pourtant indispensable de permettre aux cadres intermédiaires de réfléchir à leur position, leur manière de l’occuper et leur action1. Il revient donc à la collectivité de créer l’occasion pour les cadres intermé-diaires d’établir un bilan de leurs modes de management, de leurs évolutions et de leurs difficultés, au regard des attendus initiaux figurant dans leur fiche de poste.

Ces temps de réflexion peuvent aussi permettre d’aborder des thématiques managé-riales à l’aune des évolutions sociétales auxquelles les cadres sont également confrontés : montée de la précarité sensible chez certains agents, ou questionnement des autorités

1 Laurent Barbe, Cabinet CRESS et Christophe Couratin, consultant-formateur.

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traditionnelles par exemple. Ces évolutions, ainsi que les changements dans l’organisation, peuvent induire de nouveaux modes relationnels et nécessiter une adaptation du mode de management au contexte. La réalisation de bilans réguliers permettrait à certains cadres de s’interroger sur leurs pratiques managériales : « Quelles limites dois-je me fixer dans l’accompagnement des agents ? Suis-je assez constant dans mon suivi ? »

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Le forum des cadres intermédiaires au conseil général des Vosges

Au conseil général des Vosges, un « forum des cadres intermédiaires » a été mis en place. Il prend la forme de groupes de travail qui réunissent une vingtaine de cadres issus de domaines et de métiers différents. Cela permet d’identifier une fonction mana-gériale commune. Il a été au fondement d’un code des managers.

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Les groupes d’analyse de la pratique au Grand Lyon

À la communauté urbaine du Grand Lyon, la mise en réseau des cadres se fait au moyen de groupes d’analyse de la pratique. Ces groupes, réunis plusieurs fois par an, permettent aux cadres de partager leurs difficultés et de résoudre en commun leurs problèmes. Il est même envisagé de mettre à disposition sur Intranet les bonnes pra-tiques repérées à l’occasion de ces échanges.

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La réflexion sur la mise en relation des cadres intermédiaires à la délégation sociale du conseil général de l’Eure

Chaque unité territoriale est composée de responsables thématiques (service social, PMI, etc.). Ces responsables de tous les sites sont réunis par thématique une fois par mois. L’objectif initial était de garantir une mise en œuvre harmonisée des politiques départementales sur les différents sites. Rapidement, les cadres intermédiaires ont cependant exprimé le désir de dépasser la stricte question de l’organisation du tra-vail et la descente d’information. Il s’agirait d’avoir des échanges plus libres sur des situations difficiles et de créer les conditions d’une meilleure remontée d’informa-tion. La réflexion est en cours, intégrée aux problématiques relatives à la démarche de territorialisation.

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Les formats et les contenus de ces moments de réflexion peuvent varier en fonction de la taille de la collectivité :

- séminaires des cadres intermédiaires à l’échelle de la direction ou de l’ensemble de la collectivité, réunis à échéance régulière ;

- groupes de réflexion transversaux composés d’une quinzaine de personnes, réunis une fois par trimestre.

La plupart du temps, ces instances sont l’occasion pour les cadres intermédiaires d’échan-ger sur leurs pratiques en matière d’évaluation des agents, de participer à des mises en situation et de bénéficier du retour d’expériences de collègues.

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Les dispositifs de valorisation du management mis en place par le conseil général de Seine-Saint-Denis

Depuis quelques années, le conseil Général de la Seine-Saint-Denis développe une politique ambitieuse d’accompagnement et de valorisation des managers.

- La journée managériale commune ou atelier de compétence managériale permet de présenter aux cadres les différentes positions managériales dans la collectivité et leurs enjeux. Chaque cadre procède ensuite à une évaluation de sa situation managériale pouvant aboutir, in fine, à une action de coaching ou de formation au management.

- Les vendredis du management, organisés régulièrement par la direction générale des ressources humaines, sont l’occasion d’entendre un intervenant sur une thé-matique, et de partager des outils afin que chaque manager procède à une autoé-valuation de ses pratiques.

- Le cycle de management est une formation dont le contenu a été défini après l’éva-luation d’une première session. Chaque encadrant du département devra y assister pour remettre à jour ses connaissances en management.

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À la communauté urbaine de Bordeaux, les cadres sont invités à échanger lors de rencontres dédiées :

- Ateliers : groupes de 10 personnes sur une ou une demi-journée. Par exemple, « communiquer, mission impossible ? ».

- Cafés : groupes de 5 personnes réunies pendant deux heures pour évoquer des techniques de communication. Par exemple, « savoir dire non ».

- Conférences : interventions d’un expert extérieur sur une thématique managériale. Par exemple, « manager par la confiance ».

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Préconisation n° 16 : développer les collaborations entre cadres intermédiaires sur des projets transversaux

Parfois peu en contact avec ses homologues des autres services de la collectivité, le cadre intermédiaire peut ressentir un isolement dans l’exercice de ses fonctions.

Pour rompre ce sentiment, la direction générale peut profiter du besoin de la collectivité d’approfondir des thématiques transversales pour susciter une dynamique de management en mode projet sur des sujets intéressant plusieurs cadres intermédiaires : fonctions res-sources exercées en directions opérationnelles ou prise en charge de publics spécifiques par exemple.

Le management en mode projet constitue une démarche propice pour rapprocher des cadres intermédiaires évoluant dans des champs de compétences différents. Ceux-ci peuvent ainsi collaborer sur des projets transversaux mobilisant plusieurs directions ressources et/ou opé-rationnelles, ce qui replace leur action au sein d’un collectif de travail et leur fait prendre conscience de problématiques conjointes.

Il revient à la direction générale de repérer les sujets transversaux susceptibles de faire l’objet d’une telle approche pour une équipe resserrée de cadres intermédiaires (3 ou 4 personnes).

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La mise en réseau de cadres intermédiaires sur des sujets transversaux

Un tel mode de fonctionnement est en phase d’expérimentation à la ville de Bordeaux où trois cadres ont été réunis par la DRH sur le thème de la prise en compte des per-sonnes âgées dans les politiques qu’ils traitent.

La communauté d’agglomération de Nîmes métropole a adopté un fonctionnement en mode projet. Chaque projet transversal est piloté par un ou plusieurs chefs de projets, avec un mode d’animation souvent fonctionnel qui dépasse les relations strictement hiérarchiques. Ce fonctionnement permet de fait une mise en réseau au moins infor-melle des cadres à l’occasion des réunions de chefs de projet.

Préconisation n° 17 : les inciter à mener une réflexion avec leur équipe sur l’organisation du travail

Le travail quotidien des services et les multiples urgences à gérer n’offrent pas l’opportu-nité de temps suspendus permettant de réfléchir collectivement sur le travail en équipe pour en faire ressortir les points de force et de faiblesse.

Il peut être profitable, au cadre comme à ses agents, d’organiser une réflexion collective sur le fonctionnement de l’équipe et l’organisation du travail. Ce temps dédié serait l’occasion de recenser les attentes de chacun et permettrait au cadre intermédiaire de réfléchir sur ses pratiques managériales. L’objectif est ainsi de créer une ambiance propice à la formulation

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de propositions par les agents sur les modalités d’animation d’équipe. Il s’agit d’améliorer le fonctionnement du collectif de travail, sans remettre en cause le style de management du cadre intermédiaire.

Ce dispositif n’a pas vocation à s’adresser à l’ensemble des situations d’encadrement. Il semble particulièrement adapté aux cadres intermédiaires positionnés en tant que chefs d’équipes opérationnelles ou proches du terrain. Il peut prendre la forme :

- de moments d’échange : réunions dédiées, une à plusieurs fois par an ; - de questionnaires anonymes recueillant le point de vue des agents.

Préconisation n° 18 : discuter des pratiques managériales lors de l’entretien d’évaluation

Le temps et la qualité du management doivent être intégrés dans la politique d’évaluation individuelle. Celle-ci constitue un levier important de motivation des cadres intermédiaires pour l’exercice de leurs missions managériales.

Il est important de ne pas limiter l’évaluation des cadres intermédiaires à leur capacité à remplir des objectifs techniques ou opérationnels. L’entretien d’évaluation, qui repose notam-ment sur une analyse de la fiche de poste et l’établissement d’un bilan de l’année écou-lée, est l’occasion de valoriser le temps et les outils managériaux mobilisés par le cadre intermédiaire.

Ce temps d’échange a vocation à permettre au cadre de réfléchir sur le mode de fonctionne-ment qu’il a instauré dans son service et d’identifier des marges de progression potentielles dans ses missions d’animation d’équipe.

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Le dispositif d’évaluation des compétences managériales au conseil régional des Pays de la Loire

Le conseil régional des Pays de la Loire s’est engagé depuis un an dans un dispositif particulier d’évaluation des compétences managériales. Une grille d’évaluation incluant une partie managériale a été conçue par un groupe de travail participatif. Elle a vocation à faire connaître au supérieur hiérarchique direct les éventuelles difficultés managériales du cadre intermédiaire afin de l’aider à les résoudre et lui apporter un soutien clair.

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D. Permettre un meilleur accès à la stratégie pour favoriser le partage du sens

Diagnostic

Le plus souvent, les cadres intermédiaires sont mobilisés pour la mise en œuvre de la stratégie mais ne sont pas associés à son élaboration. La stratégie peut dès lors paraître déconnectée des réalités quotidiennes de la collectivité.

Objectifs

- Partager la stratégie à tous les échelons. - Donner du sens à l’action publique et favoriser la transversalité. - Définir une stratégie réaliste et garantir la faisabilité des décisions.

Préconisation n° 19 : élargir l’accès à l’information stratégique

Les cadres intermédiaires ont parfois l’impression que tout ou partie de l’information stra-tégique reste l’apanage des niveaux hiérarchiques supérieurs et ne leur est pas transmise.

Plusieurs outils peuvent contribuer à leur en accroître l’accès : - l’élargissement de la diffusion des comptes rendus de réunions des comités de direction ou de direction générale : accès libre sur Intranet ou diffusion par messagerie Internet ;

- l’élargissement de l’accès aux séminaires des cadres : ainsi, la caractéristique de mana-ger intermédiaire, et non la fonction dans l’organigramme, pourrait présider au choix des participants.

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Trois formats de séminaires des cadres au Grand Lyon

À la communauté urbaine du Grand Lyon, trois formats différents de séminaires sont organisés.

Au-delà d’un séminaire pour les agents de catégorie A et d’un séminaire stratégique autour de la direction générale, est prévu un séminaire dédié aux encadrants auquel participent également les agents de catégorie B qui encadrent.

L’information ne saurait être diffusée telle quelle : il revient à la hiérarchie de la rendre accessible aux cadres intermédiaires et de donner du sens aux directives.

De telles démarches sont déjà mises en œuvre dans les collectivités, à l’image des villes de Mérignac et de Quimper.

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Préconisation n° 20 : décliner les orientations stratégiques à chaque échelon de la chaîne hiérarchique

Occupé par ses activités quotidiennes, le cadre intermédiaire a parfois du mal à situer son action dans le contexte plus global de la collectivité. La stratégie reste souvent peu parta-gée en-dessous du niveau direction générale. Il peut être opportun de décliner les orienta-tions stratégiques en objectifs pour chaque échelon de la chaîne hiérarchique.

Cela permettrait de donner au cadre intermédiaire les moyens de resituer l’action de son équipe dans la cohérence globale de l’action publique, de motiver ses équipes et de sélec-tionner les informations pertinentes à faire remonter aux échelons supérieurs.

Cette déclinaison peut prendre des formats divers : projet d’administration, projet de service, ou encore arbre à objectifs. Ce dernier permet de détailler de plus en plus finement la mise en œuvre opérationnelle par les directions, les services, voire les agents, du projet politique.

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La feuille de route au conseil régional du Centre

Le conseil régional du Centre dispose d’une feuille de route dans laquelle chaque objectif stratégique de la mandature se décline en objectifs spécifiques, objectifs opé-rationnels et actions à mettre en œuvre.

Chaque objectif opérationnel est rattaché à une direction générale et une direction. Pour chaque action à mettre en œuvre, les livrables, délais, indicateurs, acteurs et moyens sont précisés.

L’élaboration de ces documents représentant souvent un travail d’analyse et de mise en perspective important pour les services, ils n’ont d’intérêt que s’ils sont l’occasion d’une réflexion partagée et régulièrement actualisée sur les objectifs de la collectivité.

Préconisation n° 21 : communiquer sur les décisions stratégiques et leur impact en termes de moyens

Le cadre intermédiaire constitue un relais essentiel des fonctions supports, notamment la politique et la stratégie en matière de ressources humaines et financières. Cependant il ne remplit que partiellement ce rôle.

En effet, souvent ses liens avec les directions fonctionnelles sont peu développés. Celles-ci ne parviennent pas à faire partager suffisamment aux cadres leurs enjeux, par exemple en matière de sécurisation juridique ou de maîtrise du coût des achats. Les agents comme les cadres dits « de proximité » ont l’intuition que leur collectivité doit gérer des ressources devenues rares ; mais dans quelles proportions ? D’où part-on et où va-t-on ?

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Une politique de communication sur la stratégie de la direction des ressources humaines et de la direction du budget spécifiquement dédiée aux cadres intermédiaires permettrait d’une part de leur faire partager les stratégies des directions supports et d’autre part de prendre en compte les contraintes de moyens dans leurs décisions opérationnelles.

Cette communication est une étape préalable et complémentaire à l’utilisation par les cadres intermédiaires d’outils de gestion autonome en matière de resources humaines et financières (cf. préconisation 15).

Elle peut prendre la forme de notes internes précisant les objectifs en matière de res-sources à court et moyen termes, déclinés par direction et adaptés aux cadres intermé-diaires. Elles viendraient compléter les communications plus générales effectuées lors des différents séminaires de cadres ou par le biais de lettres d’information.

Préconisation n° 22 : les associer aux réflexions sur la mise en œuvre de la stratégie

Les cadres intermédiaires n’ont pas vocation à être associés à la définition de la stratégie pro-prement dite. Mais ils peuvent apporter une expertise précieuse sur les conséquences pratiques des décisions stratégiques, en termes de moyens humains et matériels, et sur les risques pesant sur la mise en œuvre effective. Cette implication des cadres intermédiaires peut favoriser en outre leur adhésion à la stratégie et leur capacité à la porter auprès de leurs équipes.

Différentes modalités peuvent être envisagées : - séances ciblées de travail prospectif entre direction générale et cadres intermédiaires sur la mise en œuvre d’une stratégie (par politique publique), notamment la co-construction des objectifs intermédiaires ;

- contribution directe d’un cadre intermédiaire à ses supérieurs hiérarchiques sur la mise en œuvre d’une décision qui concerne son secteur.

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La communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise a ainsi organisé la participation de ses cadres à l’élaboration de l’Agenda 21. Ils ont été force de proposition pour les ob-jectifs de leurs services en termes de responsabilité sociale et environnementale (RSE).

Constatant les difficultés d’appropriation des projets d’administration, la direction gé-nérale du conseil général de l’Ardèche s’est engagée dans une démarche participative pour l’élaboration du projet 2012-2015.

- Six axes transversaux ont été définis et font l’objet d’une concertation pilotée par six chefs de projet : vivre ensemble au travail, développement durable, mana-gement, accueil, évolution de la collectivité, approfondissement du dialogue de gestion.

- La première étape de la concertation vise à aboutir à un diagnostic pour définir ensuite des actions collectives autour de ces axes. Par exemple, s’agissant de la question du vivre ensemble, la totalité des agents pourra s’exprimer puisqu’un questionnaire leur sera adressé.

- Dans un second temps, chaque axe sera approfondi par une collaboration trans-versale entre les agents. Par exemple, il est envisagé de mettre en place un ob-servatoire de la collectivité pour alimenter la réflexion sur l‘axe « évolution de la collectivité ». Pour l’axe « approfondissement du dialogue de gestion », un groupe de travail sera constitué afin de dresser une cartographie des outils mobilisés par les directions et favoriser les échanges de bonnes pratiques.

À la communauté urbaine de Bordeaux, une délibération de 2011 prévoit la mise en place de matinales du projet d’administration. L’objectif est de « susciter l’innovation et des initiatives sur les manières de travailler et de faire la CUB au quotidien ».

Sur la question du suivi de l’activité, on peut préconiser une co-construction des outils de reporting et de pilotage :

- une implication des cadres intermédiaires, pour chaque secteur, dans la conception des tableaux de bord stratégiques de direction générale ;

- un accompagnement méthodologique des cadres intermédiaires dans l’élaboration d’outils de suivi de leur activité et de reporting ;

- des moments d’échanges entre les cadres intermédiaires et leurs équipes d’une part, leur supérieur hiérarchique d’autre part, autour des éléments qualitatifs opérationnels qui constituent les indicateurs suivis, pour matérialiser le lien entre l’activité quoti-dienne et le reporting ;

- une attention particulière à la non-prolifération de ces outils, à leur simplification et à la cohérence des tableaux de bord des différents niveaux hiérarchiques.

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Préconisation n° 23 : développer des occasions d’échanges avec la direction générale

Les cadres intermédiaires dressent souvent le constat d’un écart grandissant avec la direc-tion générale. La préoccupation gestionnaire de la direction générale est souvent perçue comme un signe d’éloignement et de faible prise en compte des réalités de terrain, ceci du fait d’un partage insuffisant de la stratégie.

Il serait donc opportun d’expliquer les contraintes qui pèsent sur la collectivité – en matière de ressources notamment – et de partager les options choisies pour garantir cohérence et adhésion dans la mise en œuvre des décisions. Or les cadres intermédiaires sont un puis-sant relais pour diffuser la stratégie de la collectivité et donner du sens à l’action, à tous les niveaux de la chaîne hiérarchique. Par ailleurs, la fine connaissance du terrain dont ils disposent permet parfois de repérer des marges de manœuvre invisibles à l’échelle de l’encadrement supérieur.

On peut dès lors imaginer que le contact avec la direction générale ne se limite pas au niveau des directeurs, mais que des rencontres soient organisées pour créer l’interface entre cadres et direction générale. Différents formats peuvent être envisagés :

- une présentation par le DGS une ou deux fois par an de l’état de la collectivité, des objectifs, des moyens d’y parvenir et des implications de tels choix pour les directions ;

- plusieurs rencontres annuelles entre le directeur général, ses directeurs et les cadres intermédiaires du pôle ou de la direction.

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Au conseil général de l’Isère, le DGS se rend dans toutes les directions territoriali-sées ou centrales une fois par an. Il prévoit à cette occasion un temps systématique d’échange avec les cadres intermédiaires de la direction : après avoir présenté succin-tement les actualités de la collectivité, un temps d’échange libre permet aux cadres de faire remonter leurs préoccupations.

Au conseil général de l’Ardèche, se tient un comité de direction élargi aux chefs de ser-vices tous les deux mois. En outre, il est demandé explicitement aux cadres d’organiser des réunions régulières avec leurs services.

La ville de Pessac met en œuvre des « revues de projets » entre la direction générale, les élus et les services pour faire le point sur l’état d’avancement des projets gérés de manière transversale par des équipes. Cela facilite l’appropriation du mode projet par l’ensemble de la collectivité.

Il apparaît que la limitation du nombre de niveaux hiérarchiques, qui constitue un axe de réflexion dans les collectivités aujourd’hui, assure une meilleure visibilité aux cadres intermédiaires et fluidifie la transmission d’informations par le rapprochement entre les différents échelons.

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Synthèse des préconisations

Un préalable… 1 - Identifier les cadres intermédiaires sur la base de leurs missions et de leur positionnement

Valoriser la dimension managériale des missions des cadres intermédiaires

DiagnosticLe rôle managérial du cadre intermédiaire est souvent insuffisamment valorisé.

ObjectifPermettre au cadre intermédiaire d’assurer pleinement ses missions managériales en plus de son profil d’expert.

2 - Intégrer systématiquement la fonction de management dans les fiches de postes3 - Recruter en tenant compte des compétences managériales4 - Repérer et accompagner les cadres intermédiaires potentiels5 - Améliorer la reconnaissance indemnitaire et symbolique des encadrants

Les accompagner dans l’exercice de leurs

fonctions

DiagnosticLes cadres intermédiaires évoluent dans un environnement incertain :- les attentes à leur égard, de la part de leur

supérieur hiérarchique et de l’organisation en général, sont peu claires ;

- ils ne disposent pas toujours d’outils à la hauteur des enjeux managériaux qu’ils doivent relever.

Objectifs- Sécuriser l’environnement du cadre

intermédiaire.- Donner au cadre intermédiaire les moyens

d’exercer ses fonctions managériales.

6 - Favoriser le dialogue sur les attentes du supérieur hiérarchique et les marges de manœuvre7 - Assurer le cadre intermédiaire du soutien explicite de leur hiérarchie8 - Les former au management et aux méthodes d’accompagnement du changement9 - Proposer des dispositifs individualisés de suivi des cadres managers10 - Prioriser les urgences pour favoriser l’existence d’un temps managérial11 - Les inciter à déléguer12 - Formaliser et diffuser les procédures des fonctions supports13 - Développer leur autonomie de gestion des ressources humaines et financières14 - Favoriser la remontée d’information par lors des réunions

Leur faire prendre du recul par rapport à leurs pratiques managériales

DiagnosticLes missions du cadre intermédiaire conduisent souvent à un exercice solitaire. En outre, il n’existe pas de lieux spécifiques au sein desquels les cadres intermédiaires pourraient se retrouver et échanger.Souvent happés par la gestion quotidienne, ils ne sont pas incités à prendre de la distance vis-à-vis de leurs pratiques managériales.

Objectifs- Favoriser une prise de conscience par les cadres

intermédiaires des problématiques qui leur sont communes, au-delà de la spécificité des métiers.

- Permettre le partage d’expérience et la résolution de problèmes en commun.

- Améliorer leurs pratiques par la réalisation de bilans réguliers.

15 - Prévoir des temps de réflexion sur les pratiques managériales entre cadres intermédiaires16 - Développer les collaborations entre cadres intermédiaires sur des projets transversaux17 - Les inciter à mener une réflexion avec leur équipe sur l’organisation du travail18- Discuter des pratiques managériales lors de l’entretien d’évaluation

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Permettre un meilleur accès à la stratégie pour favoriser le partage du

sens

DiagnosticLes cadres intermédiaires sont mobilisés pour la mise en œuvre de la stratégie mais ne sont souvent pas associés à son élaboration. Leur rôle est alors réduit à la transmission descendante de l’information et ils éprouvent des difficultés à faire remonter les réalités de terrain.

Objectifs- Partager la stratégie à tous les échelons.- Donner du sens à l’action publique et favoriser la

transversalité.- Définir une stratégie réaliste et garantir la

faisabilité des décisions.

19 - Elargir l’accès à l’information stratégique20 - Décliner les orientations stratégiques à chaque échelon de la chaîne hiérarchique21 - Communiquer sur les décisions stratégiques et leur impact en termes de moyens22 - Les associer aux réflexions sur la mise en œuvre de la stratégie23 - Développer des occasions d’échanges avec la direction générale

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Synthèse de l’étude

Cette étude s’attache à définir les contours de la notion d’encadrement intermédiaire, éta-blir un diagnostic et formuler des propositions opérationnelles.

Premier constat : la définition et la connaissance insuffisantes de l’encadrement intermé-diaire empêchent de prendre en compte ses enjeux spécifiques.

L’encadrement intermédiaire recouvre l’ensemble des agents d’une collectivité, « cadres d’encadrants » ou « cadres de non encadrants ». De plus, les cadres intermédiaires sont placés dans une double posture d’expert et de manager. Enfin, ils se situent entre les équipes opérationnelles et la direction chargée de la définition de la stratégie.

Cette définition à géométrie variable dépend des modalités de répartition de la prise de décision stratégique dans les collectivités. Différents titres sont donnés aux cadres intermédiaires. Ainsi, un directeur est tantôt inclus dans cette catégorie, tantôt dans celle de l’encadrement supérieur de la collectivité.

Second constat : les cadres intermédiaires ne semblent pas souffrir d’une situation de malaise généralisé. Ils sont toutefois confrontés à des difficultés. D’une part, leur posi-tionnement est à la croisée d’injonctions et d’interlocuteurs multiples. D’autre part, ils soulignent leur autonomie limitée et la sous-évaluation de leur potentiel.

Il s’agit donc pour les collectivités de délimiter la catégorie des cadres intermédiaires afin de clarifier les attentes de l’organisation à leur égard et de les sécuriser dans leur positionnement. Cette identification constitue un prérequis indispensable au déploiement de mesures d’accompagnement, de reconnaissance, de mise en réseau ou de partage de la stratégie pour leur permettre de jouer pleinement leur rôle dans l’organisation.

Méthodologie

L’étude repose sur un travail documentaire et 67 entretiens auprès de : - 55 agents de toutes catégories et filières, dans 29 collectivités territoriales de toute taille etréparties sur tout le territoire ;

- 12 personnes ressources. L’approche retenue est donc qualitative avec un échantillon varié et signaficatif ; l’étude ne se veut ni exhaustive ni statistique.

1. La définition : qu’est-ce qu’un cadre intermédiaire ?

a. Au carrefour des hommes et des idées : un rôle de « pivot »

Les cadres intermédiaires joue un rôle clef d’interface dans les collectivités territoriales, bien qu’ils forment un ensemble hétérogène. Positionné entre les équipes opérationnelles et la direction, l’encadrement intermédiaire participe à de nombreux aspects de l’élabora-tion et la mise en œuvre des services publics locaux, très souvent en lien avec le terrain.

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Les cadres intermédiaires sont donc au carrefour des hommes et des idées. Présents dans l’ensemble des services, ils collaborent avec toutes les catégories d’agents et leur concours s’avère souvent incontournable, qu’il s’agisse de concevoir ou de mettre en œuvre des politiques publiques.

b. Une catégorie encore trop largement impensée

Paradoxalement, les cadres intermédiaires sont peu visibles dans les collectivités et dans leur organisation.

On y constate une grande diversité d’appellations et de représentations. De fait, les cadres intermédiaires demeurrent une catégorie encore trop impensée.

Plusieurs facteurs concourent à cette faible identification aujourd’hui : - diversité des collectivités ; - taille variable de la chaîne hiérarchique ; - filières d’origine variées ; - faible conscience des enjeux communs.

c. Un socle commun de missions, malgré la diversité des situations

L’étude met en avant le socle commun de missions réalisées par les cadres intermédiaires : - expertise métier ; - mise en œuvre opérationnelle de politiques publiques ; - organisation du travail ; - gestion des ressources financières et humaines ; - gestion de projets et conduite du changement.

Ces missions sont similaires quelle que soit l’origine du cadre. Deux parcours-types de cadres intermédiaires ont ainsi pu être identifiés :

- le cadre « issu du rang », bénéficiaire d’une promotion interne après un certain temps passé au sein d’une direction de la collectivité ;

- le cadre issu d’un parcours extérieur à la collectivité et à son équipe.

d. Le choix d’une délimitation fondée sur la nature des missions et le positionnement hiérarchique

La définition large retenue dans cette étude prend appui sur deux caractéristiques communes :

- la nature des missions exercées (expertise et management) ; - le positionnement hiérarchique entre cadres supérieurs participant à la définition de la stratégie, et agents non encadrants.

Cette définition tient également compte de la variété des équipes encadrées doit aussi être prise en compte, en distinguant les « cadres d’encadrants » et les « cadres de non enca-drants » (que ces derniers soient opérationnels ou experts).

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DéfinitionLa catégorie de l’encadrement intermédiaire recouvre donc l’ensemble des agents d’une collectivité, cadres d’encadrants ou cadres de non encadrants, placés dans une double posture d’expert et de manager, et situés entre équipes opérationnelles et équipe de direction chargée de la définition de la stratégie.

Cette définition s’affranchit du critère des catégories A, B et C. Elle recoupe de manière indirecte la classification du CNFPT sur le management de proximité, intermédiaire, ou supérieur (et indiquée entre parenthèses dans le schéma).

2. Le diagnostic : une absence de malaise généralisé mais des facteurs de difficulté

a. Un positionnement « entre le marteau et l’enclume »

Les cadres intermédiaires sont à la croisée d’injonctions multiples, parfois contradictoires. Les attentes des agents et encadrants supérieurs envers eux se modifient et s’accroissent. Dans la répartition de leurs missions entre expertise et management, l’organisation et l’animation des équipes occupent une part grandissante. Ainsi, ils doivent développer de nombreuses qualités parmi lesquelles l’écoute, la pédagogie, la fermeté, le courage, la patience, etc. Ils doivent aussi être acteurs du changement.

En même temps, leur métier requiert un degré toujours plus fort d’expertise et une capacité à décrypter les enjeux politiques des commandes. Or, ces attentes interviennent dans un contexte de réorganisation interne et de contrainte financière des collectivités dans lequel ils s’inscrivent. Cela conduit à une professionnalisation grandissante des cadres intermé-diaires en tant que managers. La dimension « métier » de leur rôle s’ en trouve atténuée et leur identité modifiée.

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Les cadres intermédiaires sont proches de tous mais se sentent isolés à double titre. « Verticalement », ils sont tiraillés entre les équipes opérationnelles et l’équipe de direction chargée de la définition de la stratégie. « Horizontalement », comme ils ne sont pas iden-tifiés comme une catégorie à part entière, ils ont peu de contacts avec leurs homologues.

Les cadres intermédiaires sont enfin au cœur de la circulation de l’information entre l’éche-lon de terrain et l’échelon stratégique. Ils assument une fonction de « courroie de transmis-sion » de l’information ascendante et descendante pour les retraiter, reformuler et diffuser. Mais ils sont avant tout des « traducteurs » chargés de donner aux équipes le sens du projet politique de la collectivité et la traduction opérationnelle des objectifs fixés par la direction.

L’encadrement intermédiaire reste pourtant mal identifié et il existe rarement des démarches globales permettant de prendre en compte l’ensemble de ces enjeux.

b. Des marges de manœuvre limitées

Le fort attachement des cadres intermédiaires à leur travail et leurs équipes semble unani-mement reconnu mais leurs marges de manœuvre semblent toutefois réduites. Conscients des contraintes et enjeux des collectivités (tensions financières, alourdissement de procé-dures et outils de gestion à maîtriser), ils disposent de peu de leviers pour adapter leur travail aux circonstances. Ils jugent globalement insuffisant leur accompagnement, notam-ment lors de la prise de poste.

Par ailleurs, plusieurs facteurs de difficulté ou de malaise des cadres intermédiaires existent : potentiel sous-exploité, faible association à la stratégie, manque de prise en compte des qualités managériales lors du recrutement et de formations adaptées au mana-gement tout au long de la carrière, sollicitations nombreuses et peu hiérarchisées de la part des équipes et de la direction générale, soutien parfois insuffisant de la hiérarchie, notamment en cas de difficultés managériales etc.

Leur autonomie, variable selon les situations rencontrées, s’exprime lors de la phase de mise en œuvre de la stratégie. Il apparaît néanmoins un manque de leviers RH pour remplir leur rôle de DRH de proximité et une difficulté à gérer la raréfaction des ressources finan-cières à objectifs constants.

Cadre intermédiaire et heureux de l’être… malgré les contraintesSi les cadres intermédiaires se sentent globalement légitimes, ils regrettent souvent un manque de reconnaissance par la collectivité, financière notamment. Ils vivent en géné-ral leur mission d’encadrement comme une source d’épanouissement. Cependant ils rap-portent un sentiment d’accumulation des difficultés.

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3. Vingt-trois propositions pour mieux reconnaître les cadres intermédiaires dans les collectivités

Les solutions proposées se veulent avant tout opérationnelles. Elles s’inspirent de pratiques locales observées et s’adressent à tous les acteurs locaux. Si la première est un préalable général, quatre axes se dégagent :

1 Identifier les cadres intermédiaires sur la base de leurs missions et de leur positionnement

Axe 1 : valoriser la dimension managériale de leurs missions2 Intégrer systématiquement la fonction de management dans les fiches de postes

3 Recruter en tenant compte des compétences managériales

4 Repérer et accompagner les cadres intermédiaires potentiels

5 Améliorer la reconnaissance indemnitaire et symbolique des encadrants

Axe 2 : les accompagner dans l’exercice de leurs fonctions6 Favoriser le dialogue sur les attentes du supérieur hiérarchique et les marges de manœuvre

7 Assurer les cadres intermédiaires du soutien explicite de leur hiérarchie

8 Les former au management et aux méthodes d’accompagnement du changement

9 Proposer des dispositifs individualisés de suivi des cadres managers

10 Prioriser les urgences pour favoriser l’existence d’un temps managérial

11 Les inciter à déléguer

12 Formaliser et diffuser les procédures des fonctions supports

13 Développer leur autonomie de gestion des ressources humaines et financières

14 Favoriser la remontée d’information lors des réunions

Axe 3 : leur faire prendre du recul par rapport à leurs propres pratiques managériales15 Prévoir des temps de réflexion sur les pratiques managériales entre cadres intermédiaires

16 Développer les collaborations entre cadres intermédiaires sur des projets transversaux

17 Les inciter à mener une réflexion avec leur équipe sur l’organisation du travail

18 Discuter des pratiques managériales lors de l’entretien d’évaluation

Axe 4 : permettre un meilleur accès à la stratégie pour favoriser le partage du sens19 Élargir l’accès à l’information stratégique

20 Décliner les orientations stratégiques à chaque échelon de la chaîne hiérarchique

21 Communiquer sur les décisions stratégiques et leur impact en termes de moyens

22 Les associer aux réflexions sur la mise en œuvre de la stratégie

23 Développer des occasions d’échanges avec la direction générale

ConclusionEn identifiant mieux leurs cadres intermédiaires et en adaptant les dispositifs qui leur sont destinés, les collectivités peuvent ainsi apporter des réponses aux sources de malaise de cette catégorie. C’est aussi pour elles l’opportunité de mobiliser tout le potentiel managé-rial de leurs cadres, dans un contexte de raréfaction des ressources.

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4e partie : atelier de l’Observatoire social territorial

A. Participants à l’atelier du 29 avril 2013

Marie-Manuelle AFONSO, Directrice des ressources humaines, mairie du Plessis-PâtéFrançoise ANNE-BRAUN, Responsable de promotion d’élèves-administrateurs, CNFPT INETFlorence BACO-AMBRASS, Directrice générale des services de la ville de Crosne, membre du bureau national du SNDGCTJeanne BALLOT, Animatrice de l’OST, MNTSandrine BELLEINGUER-THILIE, Conseiller formation, CNFPT Grande CouronneJacques BILLET, Président de l’union régionale Nord-Pas-de-Calais du SNDGCT, membre du bureau national du SNDGCTNijola BLANCHARD, Conseillère municipale déléguée à la petite enfance, Tremblay-en-FranceFrédéric BODO, Conseiller technique, UNCCASMarine BOYER, Chef de projet emploi et RH, CHORUM-CIDESJacques BRIDE, Secrétaire fédéral adjoint, Fédération des services publics et de santé Force ouvrièreCharles CHAILLOU, Directeur général délégué aux ressources humaines, conseil régional du CentreBruno COLLIGNON, Président, FA-FPTCaroline DESAIGUES, Directeur général adjoint ressources, pôle ressources ville de MérignacJean DUMONTEIL, Directeur Axe Image, membre du conseil scientifique de l’OSTClaire EDEY GAMASSOU, Maîtresse de conférence, conseil scientifique de l’OST, UPECDanielle ESCOUBES, Directrice de l’action sociale, CCAS de la ville de MérignacSimon Fortel, Directeur territorial de la ville de Rouen, CFE CGCMarie-Francine FRANCOIS, Directrice générale des services, Pays de Montbélliard agglo-mération, Présidente de l’AATFMonique GRESSET, Chargée d’études auprès du président, CSFPTJérôme GROLLEAU, SociologueJosiane GRUBER NICOLLE, FP Territoriale SNT CFE CGC,Ange HELMRICH, Secrétaire général de l’UD -UNSA 66, membre du CSFPT et du CCFP, UNSACarine HERTEL, Responsable du pôle de compétences management et domaine commu-nication, CNFPT INETSylvie JEGOU DELVINCOURT, Chef de service santé, conditions de travail, retraites, mairie d’EvryJean-Marc JOUSSEN, Conseiller partenariats institutionnels et expertise territoriale, MNTJean-Marc LEGRAND, Directeur général adjoint du CNFPT, Directeur de l’INET, CNFPT INETNicolas MALKI, Directeur de l’état civil et des cimetières, ville de LilleJean-René MOREAU, Directeur général des services San Ouest Provence, Président de l’OSTRichard RONDEL, Coaching et accompagnement RH, PuisVers

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Céline THIEBAULT, Responsable prévention et action sociale, MNTJean-François TOMÉ, Directeur général adjoint affaires institutionnelles et politiques de santé, MNTDaniel VINET, Directeur des ressources humaines, MNT

B. Présentation de l’étude

Jean DUMONTEILBonjour à tous. Nous allons essayer de ne pas prendre trop de retard, car nous avons nombre de choses à dire et à partager. Le thème choisi aujourd’hui, l’encadrement intermé-diaire, intéresse toutes les collectivités. Comment construire une collaboration fructueuse ? Cette étude a été menée par un groupe d’étudiants de l’INET. Dans un premier temps, je vais céder la parole à Jean-René MOREAU, président de l’Observatoire social territorial.

Jean-René MOREAUJe vous souhaite la bienvenue à la MNT et me joins aux remerciements faits par Jean DUMONTEIL. L’Observatoire social territorial de la MNT a été créé pour consolider le socle social territorial. Il a pour but d’observer, d’évaluer et d’agir au bénéfice des agents territo-riaux. Il a pour mission d’assurer une réflexion de qualité, la plus impartiale et la plus indé-pendante. Il s’agit de se focaliser sur les problématiques de la santé et de la prévention. L’institution s’appuie sur un conseil scientifique de l’Observatoire social territorial, dont le rôle est de choisir les thèmes susceptibles d’être engagés et de suivre les études.

L’étude présentée aujourd’hui fait partie de cette démarche. D’autres études ont par ail-leurs été entreprises (étude sur les agents territoriaux, étude sur les jardiniers…), dans le souci d’évoluer sur les questions qui se posent au sein de la Fonction publique territoriale. Nous essayons ainsi d’examiner les pratiques managériales qui peuvent exister en son sein. Je ne vais pas entrer davantage dans les détails et préfère laisser le maximum de temps à la présentation et aux échanges.

Jean DUMONTEILLe principe de ces ateliers est que la parole est libre. Nous allons d’abord écouter les auteurs de l’étude, afin de prendre connaissance des constats et des propositions qu’ils formulent, puis nous en débattrons. Je vais maintenant céder la parole aux élèves-adminis-trateurs qui ont conduit cette étude.

1. Introduction de l’étude

Siham EL BOUKILIMerci de vous être déplacés pour participer à cette rencontre. Nous sommes très heureux de vous présenter le fruit d’un travail de plusieurs mois. Cette étude sur l’encadrement territorial intermédiaire a été réalisée par les étudiants de l’INET, en collaboration avec l’Observatoire social territorial de la MNT. Elle part d’un questionnement sur l’existence d’un malaise au sein de cette catégorie, qui apparaît en filigrane dans les travaux pré-cédents de la MNT, et notamment dans l’étude sur les précarités au sein de la Fonction publique territoriale ou dans l’étude « Dans la peau des agents territoriaux ».

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À la suite d’un premier travail bibliographique, nous avons constaté que les cadres terri-toriaux intermédiaires en tant que catégorie constituent un angle de réflexion peu souvent étudié par les organismes de recherche de la Fonction publique. Toutefois, au cours de ces derniers mois, des publications et des articles sont parus sur le sujet, traduisant une prise de conscience de l’importance de l’encadrement intermédiaire. Les collectivités ter-ritoriales recherchent des marges de manœuvre, dans l’idée de concilier l’optimisation de l’organisation de la Fonction publique avec le bien-être au travail. J’espère que notre réflexion y contribuera.

Dans le cadre de notre travail, des allers-retours ont été réalisés avec le terrain, notamment dans le cadre d’entretiens entrepris auprès de directeurs généraux, de DRH, de cadres intermédiaires et de délégués syndicaux. Nous avons ensuite entrepris un travail de recul et de prise de distance. Ce que nous vous présentons est une approche qualitative, qui n’a pas vocation à être représentative sur le plan statistique. Il faut également évoquer le caractère déterminant des grilles d’entretien sur l’analyse menée par la suite. Nous avons choisi de ne pas seulement traiter du parcours et du rôle des cadres intermédiaires au sein de l’organisation, mais également d’aller sur le terrain pour prendre connaissance de l’environnement de travail, des sources de légitimité et de reconnaissance, mais aussi des attentes des cadres intermédiaires.

La première supposition, celle d’un malaise généralisé au sein des cadres intermédiaires, n’a pas été vérifiée. Nous avons plutôt constaté l’existence de facteurs multiples de difficul-tés. Cela permet de citer autant de leviers à mobiliser pour donner pleinement les moyens à l’encadrement intermédiaire de jouer son rôle au sein des collectivités. Ce rôle n’est pas seulement celui d’une courroie de transmission entre le marteau et l’enclume, puisque les cadres intermédiaires sont également des DRH de proximité. Ils relaient le sens de l’action publique et sont vecteurs d’une meilleure adaptation des dispositifs et des politiques aux besoins des citoyens.

Il convient dès lors d’identifier ces facteurs de difficultés, afin de proposer aux cadres intermédiaires des leviers d’action leur permettant de se saisir de ces notions. Nous présen-terons donc 23 préconisations, constituant en quelque sorte une boîte à outils.

L’utilisation de ces leviers repose sur un préalable, à savoir l’identification des cadres inter-médiaires en tant que catégorie à part entière. Cette démarche s’avère d’autant plus com-plexe que les collectivités ont des pratiques très hétérogènes en la matière. Dans le cadre de notre étude, nous nous sommes affranchis des définitions usuelles et avons préféré nous baser sur les missions réelles des cadres intermédiaires, indépendamment du titre qui leur est octroyé par les collectivités.

La première partie de notre travail, relative à ce travail de définition, sera présentée par Sandra. La deuxième partie portant sur les difficultés sera présentée par Emilie, Marin et Claire. Enfin, la troisième partie dévoilant les 23 préconisations sera présentée par Renaud, Géraldine et Thierry.

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2. Définir le cadre intermédiaire

Sandra DAHERJe vais commencer par vous présenter et vous expliquer notre choix de définition. Les entre-tiens réalisés ont démontré l’existence d’une véritable hétérogénéité entre les collectivités territoriales lorsqu’il s’agit de définir ou d’identifier le cadre intermédiaire. Cette hétérogé-néité réside dans l’identification-même du cadre intermédiaire, mais aussi dans son posi-tionnement. Si la majorité des personnels situe la catégorie des cadres intermédiaires entre l’échelon opérationnel et l’échelon stratégique, il existe une différence sur la définition de ces échelons. Ainsi, dans certaines collectivités, le directeur est intégré dans la catégorie des cadres intermédiaires, alors qu’il ne l’est pas dans d’autres.

Nous avons également constaté cette hétérogénéité au niveau de la conception de la mis-sion des cadres intermédiaires, notamment dans la conception de la mission d’encadre-ment, qui revêt parfois une dimension plus théorique aux yeux de certains acteurs. Enfin, nous avons noté une différence de conception de la mission lorsqu’il s’agit d’être associé à l’élaboration de la stratégie. Pour certains représentants des collectivités, il est normal que les cadres intermédiaires y participent, alors que d’autres pensent le contraire.

Sur la base de ce constat, nous avons essayé de trouver des facteurs explicatifs à cette hétérogénéité, qui peuvent différer en fonction de la taille de la collectivité, de la longueur de la chaîne hiérarchique, et de l’histoire et de la culture de la collectivité. D’autres fac-teurs peuvent être pris en compte, comme la filière d’appartenance (selon que le cadre intermédiaire appartienne à la filière administrative, technique ou sociale) et les évolutions du management au cours des dernières années. Sur ce constat d’une hétérogénéité et considérant cette difficulté d’établir une définition du cadre intermédiaire, nous avons fait le choix d’avoir notre propre définition du cadre intermédiaire, qui se veut suffisamment large pour englober l’ensemble des réalités que nous avons constatées sur le terrain. Nous avons cependant voulu éviter qu’elle devienne une définition « fourre-tout ». Elle devait être affinée afin de correspondre à la diversité des collectivités.

Selon nous, le cadre intermédiaire représente l’ensemble des agents d’une collectivité terri-toriale, cadres d’encadrants ou cadres de non encadrants, placés dans une double posture d’expert et de manager, entre équipes opérationnelles et équipe de direction chargée de la définition de la stratégie. Cette définition repose sur deux critères cumulatifs de définition : un positionnement entre niveau d’exécution et niveau de la prise de décision stratégique et des missions duales d’expert et de manager.

Le premier critère a plusieurs conséquences, et notamment le choix d’intégrer le premier niveau d’encadrement dans la catégorie des cadres intermédiaires. Par ailleurs, les directeurs peuvent intégrer cette définition, selon qu’ils participent ou non à l’élaboration de la stratégie.

Quant aux missions, le cadre intermédiaire est à la fois un expert et un manager. Cela signifie qu’un agent de catégorie A, mais ne manageant aucune équipe, ne serait pas intégré dans la catégorie des cadres intermédiaires. Il existe cependant un facteur de différenciation : la configuration des équipes, à savoir le distinguo entre les cadres intermé-diaires manageant des agents eux-mêmes encadrants et les cadres d’agents non encadrants opérationnels ou d’experts. L’on peut faire une différence entre les agents plus proches de l’opérationnel et les agents plus proches de l’aspect stratégique. Prendre en compte ces deux dimensions reflète au mieux la réalité et la diversité des situations constatées.

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Cette définition s’affranchit des catégories, mais aussi des appellations données par les collectivités, des filières d’appartenance et de la terminologie du CNFPT, qui distingue les managers de proximité, les managers intermédiaires et les managers supérieurs. Notre définition recoupe toutefois celle du CNFPT. En effet, lorsque nous envisageons de situer le cadre intermédiaire entre l’opérationnel et le niveau chargé de l’élaboration de la stratégie, ce dernier niveau, celui de la stratégie, inclut effectivement les cadres supérieurs. Par ail-leurs, lorsque nous évoquons les non encadrants opérationnels, plutôt proches de l’exécu-tion, nous nous approchons de cette notion de cadres de proximité ou de cadres de terrain.

3. Diagnostic de la situation : un malaise des cadres intermédiaires ?

Claire EPAILLARDAprès ces éléments de définition absolument nécessaires pour introduire cette étude, nous nous sommes attachés à établir un diagnostic de la situation des cadres intermédiaires, afin notamment de répondre à cette question du malaise de cette catégorie. Au cours des entretiens, nous nous sommes rapidement aperçus qu’il n’existait pas de véritable malaise, mais plutôt une somme de difficultés et d’attentes croissantes susceptibles d’avoir une conséquence sur le travail.

Le cadre intermédiaire se caractérise par cette double casquette expert/manager. Or les évolutions conduisent à un renforcement de la casquette de manager et à un rééquilibrage au profit des fonctions d’encadrement. Cela se traduit, lorsque l’on interroge les dirigeants, les agents et les cadres sur les qualités nécessaires à un bon cadre, à évoquer la part impor-tante des qualités humaines, et notamment l’écoute. Les personnes interrogées, quelle que soit leur catégorie, évoquent les mêmes attentes, mais selon une hiérarchie différente, ce qui peut conduire à des contradictions. La situation de tension qui en résulte peut se trouver renforcée par ce sentiment de responsabilité du cadre intermédiaire, pour qui le fonctionnement du service est fondamental. Cela peut l’amener à pallier les manques de l’organisation et de ses agents.

Les évolutions des collectivités, et notamment les mouvements de décentralisation, ont conduit à l’intégration de nouveaux personnels d’exploitation, qu’il a fallu encadrer. Ces évolutions ont également induit une modification des attentes de l’encadrement supérieur s’agissant des cadres intermédiaires, en particulier en termes de professionnalisation des pratiques d’encadrement. Le cadre intermédiaire va répondre plus ou moins fortement à cette attente, surtout en fonction de son origine. Nous avons constaté au cours des entre-tiens que les cadres « issus du rang », promus parmi leurs pairs après de longues années de service resteront attachés à cette casquette d’experts, peut-être par manque de formation aux outils et à la politique managériale, alors que les cadres issus de l’extérieur et dépour-vus de cette expertise « métier » vont plus vite s’approprier ces outils managériaux.

En matière de légitimité dans leurs pratiques managériales, les cadres se sentent légitimes dans leur rôle, mais pas toujours suffisamment reconnus par la collectivité dans l’exercice de leurs fonctions. C’est toutefois un constat subjectif, qui nécessite de conserver une cer-taine prudence. La légitimité du cadre repose en premier lieu sur la position hiérarchique qu’il occupe au sein de l’organigramme. Les cadres occupant des fonctions de coordination ne se sentent ainsi pas toujours légitimés dans leur rôle de cadre.

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Le soutien de la hiérarchie et des agents est de surcroît important pour les cadres inter-médiaires. Il semble assuré dans la majorité des cas. Se sentant parfois plus proche des agents que de sa hiérarchie, le cadre intermédiaire peut toutefois se sentir isolé lorsqu’il rencontre un conflit avec des agents et estime ne pas être suffisamment soutenu par son supérieur hiérarchique.

L’organisation légitime le cadre intermédiaire dans son rôle par la formalisation de ses mis-sions d’encadrement dans les fiches de postes. Elle peut également le reconnaître financiè-rement. Si cette revendication n’est pas apparue fortement au cours des entretiens, nous avons néanmoins constaté que certains cadres ont le sentiment de faire beaucoup pour un faible retour sur le plan financier.

Marin BOURGADELes cadres intermédiaires font l’objet d’une attente croissante. Un autre élément de dia-gnostic que nous avons pu établir lors des entretiens est qu’ils doivent en outre faire face à la circulation croissante de l’information, notamment entre la direction générale et les équipes opérationnelles. Cela induit une difficulté de positionnement des cadres inter-médiaires, proches de tous les agents au sein de la collectivité, mais qui peuvent parado-xalement ressentir une forme d’isolement. Ils jouent en quelque sorte le rôle de courroie de transmission de l’information, plus difficile à tenir dans ces circonstances. Leur rôle est celui d’un traducteur, puisqu’ils doivent transmettre l’information, mais également lui donner du sens.

S’agissant de leur positionnement difficile, ils sont proches de nombreux agents et même de tous les groupes d’agents. Ils ont une double proximité vis-à-vis de la direction générale et de leurs agents, avec qui ils sont en contact régulier, ce qui peut induire un certain tiraillement.

Il peut parfois en résulter une identification quasi fusionnelle avec leurs équipes. Certains cadres intermédiaires se considéraient ainsi comme les porte-parole de leurs équipes. Quant aux cadres intermédiaires travaillant dans des directions, sans contact avec les usa-gers, l’on a ressenti chez eux un fort attachement avec la proximité du terrain, car ils sou-haitent rester proches des réalités. Ils sont donc fortement en relation avec le terrain. Ils sont également proches des élus, mais de manière plus hétérogène, quoiqu’ils apprécient la reconnaissance émanant des élus.

En matière de transmission de l’information, leur rôle s’apparente à celui d’une courroie de transmission, aussi bien ascendante que descendante. L’on constate un double mouvement des équipes vers les directions générales et des directions générales vers les équipes. Les cadres estiment être des transmetteurs et des traducteurs, c’est-à-dire un rouage indis-pensable en matière de gestion de l’information, car ils sont aussi bien une courroie de transmission qu’un traducteur. Intermédiaire signifie en effet s’interposer ; leur rôle est également de donner du sens à l’information pour mieux la transmettre et donner corps aux idées.

La transmission d’information est conçue comme liée à l’animation de leurs équipes, en lien avec les réunions de direction et de pôle auxquelles ils assistent. Cependant, ils regrettent que la transmission d’information ascendante soit moins valorisée et l’absence d’instance dédiée à la remontée des informations. Ils regrettent par ailleurs que les instances idoines ne soient pas suffisamment utilisées. Ils se considèrent comme des traducteurs qui s’ef-forcent de donner du sens et de transmettre. C’est à ce niveau que se situe leur plus-value

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à leurs yeux. Ils essaient de canaliser et de traduire les attentes des agents, avant de les transmettre aux directions générales, en soumettant des éléments d’information factuels et précis. Ils traduisent de manière opérationnelle les objectifs déterminés par les directions, mais le font également pour eux-mêmes, afin de mieux s’approprier les projets politiques.

Emilie AGNOUXEn dépit du rôle joué par les cadres intermédiaires au sein des collectivités et des attentes croissantes dont ils sont l’objet, ils restent faiblement identifiés par les collectivités, car ils ne constituent pas une catégorie homogène. Ils disposent en outre d’une autonomie limitée. Du fait de cette faible identification, le potentiel des cadres intermédiaires est souvent sous-exploité, en dépit des dispositifs spécifiques qui leur sont dédiés, mais encore peu généralisés : la question de l’accompagnement et de la formation des cadres se pose. La recherche de marges de manœuvre est rendue difficile par de multiples contraintes, et notamment la question de la participation du cadre intermédiaire à la décision stratégique. Certains cadres intermédiaires y participent, d’autres non. Plus le cadre intermédiaire se positionne haut dans l’organigramme, plus il aura l’occasion de participer à la décision stratégique. Les directions générales comme les cadres eux-mêmes divergent sur l’opportu-nité de faire participer les cadres à la décision stratégique. Cela ne relève pas toujours de leur rôle ou de leur mission. De surcroît, les collectivités hésitent à associer tous les cadres intermédiaires à l’élaboration de leur stratégie.

Un certain consensus se dégage néanmoins sur la nécessité de doter les cadres inter-médiaires d’une autonomie dans la mise en œuvre opérationnelle de cette stratégie. Ces derniers y sont d’ailleurs très attachés.

Comme nous l’avons vu, les cadres intermédiaires bénéficient de fait d’un accompagne-ment perfectible à la prise de poste, alors que les promotions qui leur sont proposées sont parfois peu adaptées à leurs besoins. Ils disposent d’une expertise « métier » très forte, ce qui est reconnu par leurs équipes et par les collectivités, mais la dimension managériale est moins bien prise en compte. Elle souffre encore d’une insuffisante prise de conscience des collectivités de l’importance grandissante de cette dimension managériale.

Lors du recrutement ou de la nomination d’un agent sur un poste d’encadrement, la di-mension expertise technique semble primer, même si la dimension managériale n’est pas totalement oubliée. Il est certes plus difficile d’évaluer les compétences managériales d’un candidat, même si les collectivités ont mis en place des outils (tests de personnalité, mises en situation). Cette situation n’est pas sans poser des difficultés par la suite, notam-ment lorsque le cadre intermédiaire est issu des équipes qu’il est censé encadrer. Il est intéressant de noter que les cadres intermédiaires concernés ont tendance à identifier les membres de l’équipe comme « collègues ». Ils n’ont pas intégré leur changement de posi-tion et de métier en devenant cadres intermédiaires.

Conscientes des lacunes managériales de leurs cadres intermédiaires et des enjeux crois-sants liés au fait de disposer de bons managers, et pas seulement de bons techniciens, certaines collectivités développent des dispositifs de formation spécifiquement dédiés à leurs cadres, qui présentent néanmoins quelques lacunes, si l’on en croit les constats induits par les entretiens réalisés.

D’une part, tous les cadres concernés par ce changement de responsabilités ne bénéficient pas de ces formations. D’autre part, parmi ceux qui en bénéficient, certains estiment ne pas en avoir besoin (par exemple des agents proches de la retraite ou occupant le poste

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depuis un certain temps). Certains cadres considèrent que ces formations ne sont pas forcément utiles, car elles ne répondent pas à leurs préoccupations quotidiennes. Souvent, les cadres estiment qu’ils n’ont pas de temps à consacrer à ces formations. Cela fait écho aux sollicitations croissantes dont ils sont l’objet de la part des agents et de la hié-rarchie. Les collectivités souhaitant mettre en place des formations spécifiques pour leurs cadres peinent à déterminer le bon public cible et oscillent entre la volonté de pratiquer la transversalité et le brassage de ces cadres, intermédiaires, au risque que les formations apparaissent trop théoriques, et la volonté de proposer des formations adaptées aux cadres intermédiaires, qui nécessitent de prendre en considération les exigences du métier.

Au vu de ces constats, il serait utile de proposer aux cadres intermédiaires des parcours de formation managériale, à la carte, aussi bien au moment de la prise de poste que tout au long de la carrière. Certaines collectivités proposent des pratiques d’accompagnement adaptées (coaching, cellules d’écoute…), mais elles restent encore peu développées. Cela pose d’autant plus de difficulté dans le contexte actuel de réduction des marges d’autono-mie des cadres intermédiaires.

4. Vingt-trois préconisations pour conforter les cadres intermédiaires

Renaud MOUTARDEUne des grandes difficultés soulevées au cours des entretiens a trait à ce manque d’auto-nomie, lié à l’alourdissement des procédures et au manque de moyens financiers des res-sources humaines. Les difficultés financières des collectivités accroissent les exigences en termes de pilotage de la part des directeurs généraux et de transparence de la part des élus et des citoyens. Or les cadres intermédiaires sont souvent chargés de mettre en place ces procédures, aussi bien en termes de reporting et de tableaux de bord qu’en matière de démarche qualité.

Face à ces évolutions, nous avons constaté trois types de réaction, de réticence, voire de rejet. Ces dispositifs sont identifiés comme provenant du privé, donc par nature incompa-tibles avec le service public ou s’apparentant à du « flicage ». Il ressort également un sen-timent de perplexité vis-à-vis de ces outils, considérés comme de la « surformalisation » et face auxquels certains cadres ne se sentent pas à l’aise. Enfin, ces outils et ces procédures ne sont pas transparents et induisent un travail supplémentaire, pas toujours bien mesuré et parfois au détriment de la production directe du service public.

Le manque de levier en termes de ressources est fondamental, puisque les cadres intermé-diaires sont des DRH de proximité. Ils participent directement à la rédaction des fiches de poste, au recrutement des agents, effectuent leur notation et leur évaluation et émettent des avis sur leur promotion interne. Ils sont sollicités sur les questions statutaires et sur les problématiques relatives aux conditions de travail. Face à cela, les cadres intermédiaires estiment manquer d’information et de formation sur le statut et sur le management, notam-ment lorsqu’il s’agit de valoriser les agents concernés. Les cadres intermédiaires s’estiment démunis et isolés, par exemple lorsqu’ils sont confrontés à des situations difficiles (absen-téisme excessif, conflit important au sein de l’équipe…).

Quant au levier financier, qui concerne aussi bien les directeurs généraux que les cadres intermédiaires, il est demandé aux collectivités de faire autant, voire plus, avec moins, ce

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qui place les cadres intermédiaires dans la situation paradoxale de devoir gérer la raréfac-tion de la ressource tout en augmentant le service. Lors des entretiens, il est apparu que le modèle semblait atteindre ses limites, quel que soit le niveau d’encadrement.

Face à ces difficultés, nous avons pu formuler 23 propositions, que l’on peut répartir en quatre familles : valorisation de la fonction managériale des cadres intermédiaires, leur accompagnement dans la fonction des cadres intermédiaires, la prise de recul par rapport aux pratiques et l’accès à la stratégie.

Au préalable, il convient d’identifier les cadres intermédiaires, sur la base des missions communes et du positionnement particulier entre décision stratégique et application opé-rationnelle. Cette cartographie permettra d’adapter et de cibler ses outils (formation, dispo-sitif d’accompagnement, régime indemnitaire…).

Il s’agit d’une fonction centrale à conforter. Il convient notamment de valoriser la dimen-sion managériale des missions et des cadres intermédiaires :

- en intégrant systématiquement la fonction de management dans les fiches de poste : de nombreuses collectivités le font. Au conseil régional du Nord-Pas-de-Calais, un travail important a été réalisé sur le répertoire des métiers et sur la mise en place de fiches de postes génériques. L’objectif était d’intégrer cette fonction de management ;

- en recrutant en tenant compte des compétences managériales via des tests de per-sonnalité ou des mises en situation managériales. Il s’agit d’anticiper le parcours d’un agent appelé à occuper une fonction d’encadrement dans sa carrière ;

- en repérant et en accompagnant les cadres intermédiaires potentiels, et particuliè-rement ceux qui sont amenés à le devenir. À titre d’exemple, au conseil général de Seine-Saint-Denis, une directrice adjointe de crèche a été formée et accompagnée avant d’être effectivement nommée sur le poste ;

- en améliorant la reconnaissance indemnitaire et symbolique des encadrants. Le fait d’avoir des responsabilités doit se percevoir sur le plan financier, dans le but d’une plus grande cohérence au sein de la collectivité. Sur le plan symbolique, il s’agit de mettre en valeur les responsabilités et le métier, mais aussi de donner la possibilité de l’exercice.

Géraldine MALATIERIl faut accompagner les cadres intermédiaires dans l’exercice de leurs fonctions, afin de créer un environnement stable et favorable et de proposer des dispositifs leur permettant d’acquérir et de développer leurs compétences. Les deux premières préconisations de cette catégorie rappellent la nécessité de manager les cadres intermédiaires :

- en favorisant un dialogue régulier sur les attentes du supérieur hiérarchique et les marges de manœuvre du cadre intermédiaire. Il faut donc manager les cadres intermé-diaires pour clarifier leur situation ;

- en assurant le cadre intermédiaire du soutien explicite de sa hiérarchie dans les dif-férentes étapes de la vie de la collectivité, dans la prise de poste. Il est important que le supérieur hiérarchique prépare l’arrivée du cadre intermédiaire et favorise son posi-tionnement et sa légitimation. Il convient également d’associer le cadre intermédiaire aux décisions prises au quotidien. Enfin, il s’agit de soutenir les cadres intermédiaires dans les démarches de réorganisation puisqu’ils en sont les leviers essentiels.

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Les préconisations suivantes mettent en exergue l’importance de la formation et du déve-loppement des compétences des cadres intermédiaires. Comme nous l’avons dit, les collec-tivités innovent sur les dispositifs de formation, ce qui nous paraît être un levier important :

- en formant les cadres intermédiaires au management et à l’accompagnement au chan-gement. Ainsi, le conseil général de l’Ardèche a mis en place une session obligatoire de formation des cadres, qui se déroule sur 18 mois, via trois sessions successives. Elle permettra aux différents cadres de la collectivité de réfléchir sur un socle com-mun de valeurs managériales et de définir cette posture managériale. Enfin, les cadres pourront échanger entre eux sur les outils dont ils peuvent disposer dans le cadre de cette fonction managériale ;

- en proposant des dispositifs individualisés de suivi des cadres intermédiaires, notam-ment pour les situations les plus difficiles. Certains cadres intermédiaires se trouvent en situation d’échec managérial. Charge à la direction et à la direction des ressources humaines de leur proposer un suivi individuel, sous forme de coaching ou de référent RH, dans le cadre d’un accompagnement sur mesure pour leur permettre de dépasser cette situation de difficultés, source de malaise au travail (même si ces situations sont marginales).

Concernant la gestion du temps dans les collectivités, il convient de rationaliser cette gestion et de prioriser les urgences imposées aux cadres intermédiaires, mais aussi d’inci-ter les cadres intermédiaires à déléguer. Il s’agit d’instituer des temps déconnectés de l’urgence et de réfléchir sur le poids des réunions dans l’agenda des cadres intermédiaires, qui ne leur permet pas toujours de se consacrer pleinement à leur mission managériale.

Les préconisations suivantes visent à faciliter l’appropriation par les cadres intermédiaires des fonctions supports, parce qu’ils sont en premier lieu des leviers de proximité quant à leur mise en œuvre. Or il est indispensable de diffuser et de formaliser les procédures liées à ces fonctions, parce que les cadres intermédiaires les maîtrisent peu et les connaissent mal. De surcroît, il semble opportun de développer l’autonomie des cadres intermédiaires dans la gestion des fonctions supports et des ressources. La mise en place d’une enveloppe globale permettrait aux cadres intermédiaires de procéder eux-mêmes à un arbitrage dans le cadre de la gestion de leur budget et de participer au processus de recrutement de leurs propres équipes et ainsi s’approprier les procédures et les valeurs supports que la direction générale peut porter.

Enfin, il est proposé de favoriser la remontée d’informations par les cadres intermédiaires lors des réunions, qui se limitent la plupart du temps à une démarche descendante. Elles doivent devenir de véritables lieux d’échange et permettre aux cadres intermédiaires de prendre la parole pour faciliter cette remontée du terrain. Puisque l’on parle de réunionite aiguë, il ne s’agit donc pas de créer une instance supplémentaire.

Thierry COLETTELe troisième axe de préconisations invite les cadres à prendre du recul par rapport à leurs pratiques managériales et à s’extraire de leur quotidien pour penser et repenser leur mé-thode de management. Or il convient de trouver des lieux idoines dans cette optique. Les préconisations 15 et 16 portent sur ces temps de réflexion sur les pratiques managériales entre cadres intermédiaires.

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La 16e préconisation vise à créer des groupes de travail entre les cadres intermédiaires, mais aussi à développer des collaborations transversales entre cadres intermédiaires. Il convient d’inciter les cadres intermédiaires à mener une réflexion avec leur équipe sur l’organisation collective du travail. Cela constituerait un outil important pour le cadre inter-médiaire, puisqu’il l’aiderait à repenser son mode de management.

Ces méthodes de management sont trop souvent absentes des entretiens d’évaluation. Discuter des pratiques managériales au cours de ces entretiens entre le cadre intermédiaire et son responsable hiérarchique direct permet d’avoir un échange sur la manière de faire, sur l’évaluation et sur les attentes de la hiérarchie.

Enfin, le quatrième axe propose d’améliorer l’accès des cadres intermédiaires à la stratégie pour en favoriser le partage du sens. Il s’agit en premier lieu d’élargir l’accès du cadre inter-médiaire à l’information stratégique, par exemple en élargissant la diffusion des comptes rendus de direction ou l’accès au séminaire des cadres. Il convient également de décliner les orientations stratégiques à chaque échelon de la chaîne hiérarchique vers le cadre intermédiaire, afin de lui permettre de relier son action opérationnelle dans son périmètre à des axes stratégiques de la collectivité. Le cadre peut ainsi en faire état à ses équipes.

La proposition suivante suggère de communiquer auprès des cadres intermédiaires sur les décisions stratégiques et leur impact en termes de moyens, dans le souci d’une meilleure compréhension, mais aussi d’associer les cadres intermédiaires aux réflexions sur la mise en œuvre de la stratégie. Enfin, il est proposé de développer les occasions d’échanges entre les cadres intermédiaires et la direction générale pour éviter l’écart grandissant entre ces deux échelons hiérarchiques.

En conclusion, cette étude a été pour nous une expérience passionnante et une aventure enrichissante, nous plongeant au cœur de la réalité des collectivités. Nous remercions la MNT de nous l’avoir confiée, mais aussi les personnes que nous avons rencontrées, qui nous ont fourni la matière première de cette étude. Il reste beaucoup à faire pour l’enca-drement intermédiaire, même si l’on ne part pas de zéro. Les actions à développer reposent à la fois sur les directions générales, qui peuvent impulser la prise en compte par les ins-titutions des cadres intermédiaires, sur les cadres intermédiaires eux-mêmes, invités à se saisir de leur rôle, mais aussi sur les responsables hiérarchiques directs.

Nous avons mis en exergue l’importance de l’encadrement des cadres et du management des managers. Nous sommes tous le cadre de quelqu’un, ce qui incite à relativiser ces préconisations, mais aussi à rappeler l’imbrication à plusieurs niveaux de la question de l’encadrement intermédiaire. La réflexion s’en trouve complexifiée, mais l’effet et l’impact des actions mises en place pourraient s’en trouver démultipliés. Merci beaucoup pour votre attention : nous sommes maintenant à votre écoute pour la phase de débat.

Jean DUMONTEILC’est nous qui vous remercions. Merci à ces huit élèves-administrateurs dont le groupe a bien fonctionné. Le résultat est tout à fait à la hauteur, comme le contenu de votre étude le démontre. Le groupe a bien compris l’esprit des enquêtes produites chaque année et dans lequel travaille l’Observatoire social territorial.

Les problématiques managériales retiennent toujours l’attention de ces études menées en partenariat avec l’Association des administrateurs territoriaux et avec l’INET. Il s’agit, dans la recherche produite, de travailler à l’efficience du service public local, mais aussi

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de prendre conscience du rôle et du bien-être des hommes et des femmes qui y travaillent. Les cadres intermédiaires doivent être plus heureux dans l’exercice de leur métier, comme le souligne l’étude que vous avez réalisée. Les 23 propositions y contribuent.

Nous allons maintenant ouvrir un temps d’échange. Dans ce cadre, je souhaite donner la parole à la présidente de l’AATF, Marie-Francine FRANÇOIS.

C. Débat

Marie-Francine FRANÇOISJe vous remercie de me donner la parole et de souligner le partenariat existant avec notre association. À mon sens, le travail fourni par les élèves de l’INET est excellent. Le rôle de l’encadrement intermédiaire est une question que nous avons soulevée il y a presqu’un an : que font les cadres intermédiaires dans cette situation ? Comment peut-on faire évoluer leur rôle ? Vous avez mis en exergue des pistes intéressantes, et notamment les thématiques du recrutement des nouveaux cadres intermédiaires, de leur positionnement, de leur forma-tion et du travail à accomplir pour faire évoluer les cadres intermédiaires présents depuis longtemps. Il faut également traiter la problématique de la valorisation financière. Enfin, il convient de préciser que la formation n’intègre pas toujours la dimension managériale. Il en ressort des problématiques d’animation d’équipe et d’organisation des ressources humaines.

Je voudrais réagir sur deux ou trois petits points de détail. Je pense en premier lieu à l’ob-servation soulevée sur le poids des procédures liées à la démarche qualité. Nous constatons que la mise en œuvre de ces démarches est assez procédurale, mais qu’avec la maturation, les pratiques se décantent, et l’on arrive à des procédures qui s’allègent. C’est pourquoi je ne jetterai donc pas le bébé avec l’eau du bain s’agissant de la démarche qualité.

Par ailleurs, la formation constitue une vraie difficulté : de nombreux agents n’ont aucune connaissance du statut et du minimum des règles y afférant. La déconcentration de la fonc-tion RH est une véritable difficulté. En effet, donner de la marge de manœuvre aux enca-drants suppose de leur part la connaissance du cadre générique dans lequel ils évoluent. Il en ressort un enjeu collectif de formation initiale des agents. Des agents ont entrepris un parcours dans le privé et n’ont pas forcément intégré le fait que le statut ne correspond pas tout à fait au code du travail.

Jean-Marc LEGRANDBonjour à toutes et à tous. Je me félicite du partenariat existant entre la MNT, l’AATF et l’INET. Cela permet de faire connaître les travaux de notre observatoire. Je souhaite remer-cier les élèves qui se sont impliqués, appuyés par Françoise ANNE-BRAUN. Nous les avons suivis pendant cette étude, comme pendant leur formation.

Ce n’est pas étonnant, mais j’ai été surpris par l’expression selon laquelle les cadres inter-médiaires se trouveraient « entre le marteau et l’enclume ». In fine, je trouve intéressant de constater que les cadres intermédiaires sont fortement impliqués et responsables, comme le rappelle la synthèse. Cela me semble un enseignement fondamental de cette analyse, laquelle a couvert une quarantaine de collectivités. Cet état de fait me semble porteur pour l’avenir. J’ai entendu les préconisations relatives à la formation de l’ensemble des agents territoriaux et des cadres, dont le CNFPT est également responsable.

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Jean DUMONTEILPlusieurs mots reviennent dans l’étude : traducteur, animateur d’équipe, courroie de trans-mission, fonctions de DRH de proximité, responsabilité.

Jean-René MOREAUJe souhaite remercier les partenaires de l’INET et les administrateurs. Cette étude conforte certaines observations déjà formulées.

Je suis également très satisfait, car nous avions entrepris au niveau de la MNT une étude « dans la peau des agents territoriaux » relative à cette problématique, qui avait mis en exergue une forme de paralysie au niveau du management. Je suis en outre très attaché à cette problématique, car je souhaitais que nous entreprenions une étude sur l’encadrement intermédiaire. J’ai toujours considéré que l’enjeu majeur d’une collectivité est de s’appuyer sur une bonne équipe de cadres intermédiaires dans son sens large. Dans cette optique, la formation de base est essentielle, et doit s’appuyer sur quatre éléments fondamentaux : la connaissance du statut (régime de prime indemnitaire) et de l’environnement pour avoir une bonne pratique de repérage et d’évaluation et un bon référentiel des métiers, l’appren-tissage de la gestion des conflits, l’apprentissage du sens de la négociation et l’utilisation d’un langage commun et d’une sémantique correspondant au fonctionnement et à l’histoire de la collectivité. Cela permet de mieux diffuser les messages auprès des équipes de la collectivité. Ces quatre formations de base me semblent essentielles pour la formation de l’encadrement intermédiaire. Avec du temps et de la pugnacité, cette ambition peut être réalisée, car il s’agit d’une démarche fondamentale. Le CNFPT s’est d’ailleurs engagé dans cette voie.

Comme vous êtes de futurs encadrants, il était important que vous réalisiez cette étude, parce que vous exercerez plus tard de telles responsabilités. Vous aurez l’avantage d’avoir pris conscience de ces problématiques par le biais de l’étude que vous avez entreprise. Vous avez notamment évoqué l’hétérogénéité des collectivités, ce qui fait également leur richesse. Elles constituent en quelque sorte une forme de laboratoire. Je crois, encore une fois, que les cadres intermédiaires constituent un véritable gage de réussite et de bonne gestion des collectivités.

Jean DUMONTEILSur ces questions de formation (gestion des conflits, négociation), l’un des étudiants sou-haite-t-il intervenir ?

Claire EPAILLARDJe ne vais pas intervenir sur le contenu de la formation, mais sur l’une des principales dif-ficultés mises en exergue lors des entretiens : la situation de conflit des cadres avec leurs agents, et notamment la situation de conflit individuel avec un agent en particulier. Les cadres intermédiaires se sentent alors isolés et souffrent du manque de soutien des res-sources humaines et de la direction générale lorsqu’ils doivent faire face à une telle situation.

Jean DUMONTEILLors d’une précédente étude de l’Observatoire dans les services techniques sur la culture de la sécurité, le fait de sanctionner des collègues est une démarche parfois difficile à mettre en œuvre.

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Sandrine BELLEINGUER-THILIEAu niveau du pôle RH du CNFPT, nous travaillons sur ces questions. Pour ma part, je partage ce qui a été dit. Au sein des conseil généraux, nous élaborons certains dispositifs pour accompagner la prise de poste des agents de proximité, mais je me pose une question relative au temps. Ces encadrants de proximité sont contraints de se former à des éléments législatifs avant de se former au management. Il est cependant difficile de construire ces formations, car leur temps devient alors contraint et ils ne disposent plus du temps néces-saire à leur formation. Je le ressens encore plus cette année.

Jean DUMONTEILQui fixe les priorités ? Comment les ressent-on ?

Nijola BLANCHARDVous évoquiez le soutien des ressources humaines. J’ai le sentiment que depuis quelques années, les collectivités territoriales, comme Tremblay, sont confrontées à la prise de conscience de l’importance de la gestion des ressources humaines, mais le poids de ce poste est lourd dans le budget de fonctionnement. Il en ressort certaines contraintes. Il a d’abord fallu légitimer et organiser le service des RH. Il n’était pas possible d’essayer de donner de manière forte, pérenne et durable. Cette prise de conscience a induit la mise en place de dispositifs idoines.

Nous avons été concernés par l’étude sur la petite enfance. C’est alors que nous avons com-mencé une réorganisation du service petite enfance, mais nous ne sommes pas au bout du chemin. Il est vrai que cette étude intervient au bon moment, car nous parvenons à prendre connaissance du positionnement des éducatrices de jeunes enfants. Nous les avons remis dans leur rôle d’encadrant. Les directrices de structure ont pris conscience de leur rôle de direction et du relais qu’elles représentent. Ce sont de véritables chefs de service, qui connaissent la législation et leur métier, donc à même d’assumer leur rôle. Il faut donc com-mencer par les ressources humaines, avant de décliner ces dispositions.

Concernant la connaissance du statut, nous organisons des sessions de formation sur la culture territoriale. Les agents étaient en manque d’informations sur cette thématique, alors que cette question est importante et doit porter ses fruits. Quant à la rémunération, je me suis battue sur ce sujet. Que pouvons-nous faire ? Les agents fournissent énormément d’efforts, mais nous n’avons pas la faculté de les récompenser à la hauteur de leur inves-tissement. Il reste à répondre à cette question.

Par ailleurs, vous avez interviewé des syndicalistes. Quel a été leur retour sur cette problé-matique ? Je fais partie du CTP et il est parfois difficile de résoudre certains problèmes, car je peine parfois à comprendre les positions des syndicats, qui posent certains freins aux évolutions. Quant au poids des élus, il diffère selon les collectivités, selon les services et selon leur présence. Or la relation avec l’élu est fondamentale, mais elle évolue selon les collectivités. Toutefois, il ne faut pas confondre le rôle d’élu et celui de directeur.

Siham EL BOUKILIIl existe un véritable enjeu de formation au long cours, sur la base de formats connus (plusieurs jours d’affilée). En introduction, nous précisions que les préconisations consti-tuaient une boîte à outils. Sur cette question de la formation, l’enjeu de l’accompagnement par la RH et de la prise de distance est fondamental. Il faut également s’interroger sur la nécessité de reconstituer des groupes de travail pour les cadres parfois isolés. Cet enjeu est

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manifeste, mais il se pose un problème de temps. Il est toutefois possible d’agir dans les collectivités pour constituer des collectifs de travail.

Pour reprendre vos propos, sur la question des syndicats, la problématique reste l’identi-fication des cadres intermédiaires comme catégorie. Cette démarche est toujours difficile. Nous ne sommes pas les porte-paroles d’une catégorie, laquelle est encore mal identifiée dans les collectivités et n’apparaît pas comme porteuse de revendications propres. Lorsque l’on abordait cette question avec les représentants syndicaux, cela les amenait à réfléchir, mais ces derniers ne faisaient pas état d’un champ de revendications. Toute une réflexion doit être menée par les DRH, par les représentants syndicaux et par les cadres intermé-diaires eux-mêmes sur ce que représentent ces derniers, peut-être sur la base de cette étude. Quels instruments pourrait-on mettre en œuvre au profit de cette catégorie ?

Jean DUMONTEILIl peut également se produire une mise en cause de cette catégorie. Il peut en résulter une problématique relationnelle susceptible d’être difficile à résoudre.

Géraldine MALATIERJ’aimerais apporter un témoignage sur la formation et sur la gestion du temps. Les collec-tivités sont confrontées à cette problématique. Comment former les cadres intermédiaires ? Comment les accompagner sur le plan de la fonction de management ? Les collectivités s’efforcent d’y répondre ; ainsi, ces formations de management deviennent obligatoires. Les managers sachant manager viennent à ces formations, alors que ceux ne le sachant pas n’y viennent pas, justement parce qu’ils sont en difficulté. C’est pourquoi le conseil général de la Seine-Saint-Denis a rendu une session de formation obligatoire, qui est assurée par la direction générale. Cette dernière souhaite valoriser les compétences managériales des cadres intermédiaires en poste depuis longtemps et tendant parfois à sous-estimer les enjeux liés à leurs compétences managériales.

Jean DUMONTEILEst-ce une 24e proposition ?

Géraldine MALATIERC’est également un renversement de culture. Investir en temps de formation sur le plan managérial permet de gagner du temps dans la gestion quotidienne des affaires. Un cadre intermédiaire qui sait manager devient de facto plus efficace.

Jean DUMONTEILNous avons évoqué les syndicats. Quid des élus ?

Renaud MOUTARDELa situation est très variable. À l’échelon local, le rapport avec l’élu est beaucoup plus proche, ce qui est moins le cas au sein d’un conseil régional ou d’un conseil général. Le rapport à l’élu se construit alors plutôt à partir du haut de l’échelon (directeur…). Néanmoins, les cadres intermédiaires se trouvant en relation directe avec l’élu n’évoquent pas de demande peu appropriée de ce dernier. À chaque fois, l’élu est bien à sa place. Il était possible de lui parler, de dialoguer et d’évoquer les contraintes. Cette relation avec l’élu est perçue comme extrêmement valorisante.

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Jean DUMONTEILQu’en est-il de la relation avec l’usager ? Est-ce apparu dans vos entretiens ? Comment est-elle ressentie ?

Renaud MOUTARDECe point est effectivement apparu dans les entretiens. Certains cadres intermédiaires res-ponsables de service assumant l’accueil du public tiennent à passer quelques heures à l’accueil du public pour faire corps avec leur équipe et ne pas perdre le sens des réalités et de l’usager. Ce rapport à l’usager est perçu comme valorisant et important et apparaît comme le sens de la mission du cadre, mais cet usager devient de plus en plus exigeant. Il tend à envoyer de plus en plus de courriers, à poser davantage de questions, ce qui prend du temps. Pour ne pas surcharger leurs équipes, certains cadres leur enjoignent de continuer à produire le service, prenant pour leur part en charge la réponse à ces usagers.

Carine HERTELJe vous remercie pour cette étude, qui est très intéressante. Vous avez évoqué la dimen-sion managériale, qui devient de plus en plus en prégnante, et avez utilisé le terme « bon manager ». Qu’est-ce qu’un bon manager ? Avez-vous posé cette question aux personnes interrogées ? Merci beaucoup.

Sandra DAHEREffectivement, nous avons posé la question, qui apparaissait dans le questionnaire éla-boré. Nous avons obtenu des réponses dont nous parlons dans l’étude. Nous avons ainsi regroupé les différentes qualités qui ressortaient. L’écoute, la bienveillance remontent par-ticulièrement, de même que la fermeté et la nécessité de distinguer ce qui relève de la vie professionnelle de ce qui relève de la vie privée, aussi bien du cadre intermédiaire que des agents. En effet, certains cadres sont amenés à gérer des aspects sociaux, dans la mesure où certains agents sont confrontés à une précarité croissante. Globalement, l’idée est celle que le manager doit maîtriser plusieurs manières d’exercer son rôle de manager. Le terme « boule à facette » est ressorti à plusieurs reprises, puisque le manager doit accompagner, sanctionner et être à l’écoute.

Siham EL BOUKILIUne DRH indiquait que le manager doit être bienveillant avec les personnes qu’il encadre pour révéler les pépites autour de lui. Comment sécuriser ces managers pour révéler ces pépites ? Comment les former et les informer de la stratégie de la collectivité et de son action publique ? C’est aussi une question que nous avons soulevée. Elle dessine en creux les préconisations que nous avons énumérées pour permettre aux cadres d’exercer leur mission managériale.

Emilie AGNOUXSi l’on considère les attentes de l’encadrement supérieur et des agents, nous avons consta-té que des qualités similaires étaient attendues de la part de l’encadrement supérieur et de la part des agents : disponibilité, écoute, savoir prendre des décisions, relayer des informations en provenance de la direction générale et du terrain. Il s’agit de s’appuyer sur un manager prenant des décisions avec justice et en toute transparence. Il en résulte une dimension extrêmement exigeante de la mission managériale du cadre intermédiaire, qui essaie de concilier toutes ces qualités, ce qui peut compliquer son positionnement. Il peut craindre de ne pas être à la hauteur de ce qui est attendu de lui. Le bon manager est également un bon expert dans son métier. Il doit pouvoir répondre aux sollicitations de son équipe dans son domaine d’expertise. Ces deux dimensions englobent des compétences relationnelles et humaines.

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Simon FORTELMerci pour cette étude. Depuis quelques années, nous sommes confrontés à une demande d’identification des cadres intermédiaires qui, souvent, sont isolés et ressentent un besoin de représentativité encore latent. Ce besoin s’exprime avec la création de nombreuses sec-tions syndicales de la CFE-CGC. En l’occurrence, il s’agit de capter ces besoins d’expres-sion de la part de cadres intermédiaires. Certains agents ont progressé par ancienneté. Plusieurs jeunes encadrants disposent de ce niveau intermédiaire et souffrent d’un manque de reconnaissance.

Richard RONDELJe vais porter un regard transverse, car je ne fais pas partie de votre corps, puisque je tra-vaille pour les entreprises. Votre exposé recoupe ce que l’on constate dans les entreprises. L’on retrouve ainsi la disparition de ce corps intermédiaire, au profit d’un management de proximité. Parallèlement, il se produit un chemin inverse, parce qu’il existe pourtant un besoin de sens, que l’on l’attribue au management intermédiaire, qui joue le rôle de cour-roie de transmission, de compréhension et d’apport de sens. Il en ressort un mouvement de va-et-vient. On retrouve également cinq points similaires avec les entreprises. Quel sens donner à mon activité (notion de service, notion de contribution, notion d’écoute) ? Quelle identité le manager a-t-il de lui-même au sein d’une organisation ? Cette identité se définit aussi bien face au représentant des collectivités qu’en face du citoyen ou face à sa hié-rarchie. Qu’en est-il de la valeur ajoutée ? S’agit-il de l’expertise ou du management ? Il fau-drait à mon sens creuser cette question. Quels besoins de reconnaissance ? Enfin, comment gérer les conflits et la médiation ? Pour conclure, le coaching, ce n’est pas uniquement de la thérapie, mais aussi de l’accompagnement au sens professionnel.

Nicolas MALKIJe suis pour ma part cadre intermédiaire. Je constate que ce travail va se poursuivre. L’étude de l’Observatoire va ainsi déboucher sur des démarches de formation. Toutefois, même s’il existe parfois un manque de reconnaissance, je suis heureux d’être un encadrant intermédiaire. Je me retrouve pleinement dans la définition qui a été produite aujourd’hui, et j’ajoute que je m’épanouis pleinement dans ma mission.

Jacques BILLETAvec Florence BACO-AMBRASS, nous représentons le Syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales. En premier lieu, je souhaite vous remercier, notam-ment Jean-René MOREAU pour nous avoir invités à participer à cette excellente présenta-tion, ainsi que les huit élèves-administrateurs qui ont produit une étude très détaillée et très complexe. L’on retrouve sur le terrain ce que vous avez dit. Je remarque aussi que vous êtes des élèves-administrateurs un peu flatteurs envers votre directeur. En effet, on peut résumer cette étude et les préconisations en quatre thèmes : Information, Normalisation, facilité d’Entretien et Transfert dans les deux sens. Vous obtenez alors l’INET. Je pense que vous l’avez fait exprès pour remercier Monsieur LEGRAND de son accompagnement.

Il faut évoquer l’espoir. Dans ce cadre, je m’attarderai sur la GPEC, que vous jugez com-plexe à mettre en œuvre, mais qui facilitera pourtant le travail dans les différentes direc-tions et au sein des DRH. Nos collectivités gèrent des métiers difficiles, par exemple celui d’auxiliaire de puériculture. J’ai déjà vu une auxiliaire de puériculture exerçant ce métier depuis plusieurs années pleurer dans mon bureau, car elle ne pouvait plus assumer sa fonction, ne pouvant plus se baisser. La médecine du travail lui avait demandé de ne plus s’occuper d’enfants, ce qui avait créé une dépression. Nous l’avons accompagnée et elle est devenue responsable d’accueil dans les crèches.

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Par ailleurs, on ne procédera plus à une notation, mais à une évaluation. La différence est importante, car ce dispositif repose sur un meilleur échange et une meilleure compréhen-sion entre des personnes travaillant ensemble.

Enfin, je considère que l’on recrute de mieux en mieux. À mon sens, les personnes ayant peu de qualification rencontreront davantage de difficultés pour trouver un emploi.

Florence BACO-AMBRASSJe suis directrice générale des services de la ville de Crosne dans l’Essonne. Pour évoquer le rôle de la direction générale lorsqu’il s’agit de mener ce genre de démarches auprès des cadres intermédiaires, vous avez indiqué que nous avions, en tant que directeurs généraux, un rôle fondamental d’impulsion et d’intervention. Il me semble fondamental de veiller à respecter une certaine équité entre les cadres intermédiaires et à ne pas laisser au res-ponsable hiérarchique seul le droit de mener la valorisation et la légitimation du cadre intermédiaire. Il en résulte à mon sens le rôle important des DRH.

Il convient de positionner stratégiquement la DRH, de sorte qu’elle diffuse à égalité entre tous les cadres intermédiaires, une culture des ressources humaines. Vous l’avez compris au cours de votre enquête, le dossier RH est fondamental. Cela relève de notre rôle de directeur général des services de faire en sorte que la DRH occupe un rôle stratégique. Par ailleurs, il faut s’interroger sur l’organisation du partage de la fonction RH au sein de la collectivité. Vous avez rappelé l’adage « tous DRH ». Tous les cadres intermédiaires doivent-ils accomplir cette mission ? Je n’en suis absolument pas convaincue. Néanmoins, il existe des éléments RH à partager et à diffuser auprès des différents cadres intermédiaires. C’est notre rôle de directeurs généraux.

Jean-René MOREAUJe vais rebondir sur ce que vous venez de dire. Il est vrai que le positionnement du DRH est im-portant au sein d’une organisation. Dans ce que vous avez évoqué, il est important de réfléchir sur le positionnement du cadre intermédiaire, sur le type de management choisi par le manager et sur le positionnement du directeur général dans l’organisation. Quelle est la stratégie choisie par la collectivité ? Selon le cas, il n’est pas évident de trouver un positionnement de cadre in-termédiaire. S’il est possible de travailler en mode projet, une grande partie des problématiques se trouve résolue. Tout dépend de la typologie de la collectivité concernée, de l’organisation, du mode managérial et du rôle de l’élu. En fonction de cette dimension, de nombreuses réponses peuvent être apportées concernant le rôle des cadres intermédiaires.

Par ailleurs, le langage est important au sein d’une collectivité. Le DRH est un métier à part, mais il peut déléguer certaines fonctions aux cadres intermédiaires qui peuvent jouer le rôle de correspondant.

Lorsque l’on évoque les cadres intermédiaires, l’on pense à un cadre qui s’interpose. La formule veut que « l’on se pose en s’opposant ». Cela ne signifie pas pour autant que l’on soit en conflit avec quelqu’un. Il faut être en mesure de gérer la contradiction.

Le cadre intermédiaire doit pratiquer l’intermédiation. Il joue le rôle de traducteur, mais aussi de rapporteur, dans le bon sens du terme. Il rapporte en effet la réalité du terrain aux échelons supérieurs. C’est un rôle que l’on doit davantage prendre en compte au niveau des directions générales. Le cadre intermédiaire se pose dans l’entre-deux, ce qui lui permet de trouver le juste milieu et d’être le garant de l’équité de fonctionnement au sein d’une collectivité, à condition qu’il soit bien formé.

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Il est possible de produire de nombreuses théories en matière de management, mais le rôle des cadres intermédiaires est fondamental au sein d’une collectivité. Il convient donc de prendre le temps nécessaire à la formation des cadres intermédiaires, de leur apprendre à gérer leur temps et de les insérer dans l’organisation. C’est pourquoi cette étude est importante. Elle se situe dans le prolongement de l’étude sur les territoriaux et en lien avec les études réalisées sur les DRH. Il en ressort des bases solides de formation, qui serviront notamment au CNFPT et à l’INET. L’objectif est que les agents ressentent du bien-être dans le travail qu’ils font. Cette exigence permet d’éviter les problèmes de santé et d’engendrer de l’économie et du bon fonctionnement, ce qui fera la différence à l’avenir du fait de la raréfaction des ressources budgétaires.

Marin BOURGADEOn pourrait rebondir sur le point évoqué par la représentante du SNDGCT en matière de recrutement. Non seulement on recrute mieux qu’avant, mais il apparaît que les agents recrutés sont davantage diplômés, en particulier ceux qui ne sont pas issus du rang. Cette évolution induit la nécessité d’une formation au management. C’est un point qui a été sou-levé par les cadres intermédiaires eux-mêmes et qui me semble important.

Bruno COLLIGNONJe fais partie de la Fédération autonome de la Fonction publique territoriale. J’appartiens au monde du syndicalisme, parfois perçu comme un frein par certains employeurs territo-riaux. Les rencontres que vous organisez sont l’occasion de confronter nos pratiques et de s’aider mutuellement sur différentes thématiques de la Fonction publique territoriale. Vos études sont nombreuses, et sont toujours très appréciées, eu égard au travail accompli en amont. Cette étude n’a pas à rougir en comparaison avec les précédentes.

J’avais deux réflexions, sous forme de questions. Dans le cadre de l’agenda social, la ministre chargée de la Fonction publique, faute d’apporter satisfaction aux organisations syndicales sur la revalorisation du point, propose une refonte globale des grilles, voire une refonte glo-bale de l’architecture de la Fonction publique territoriale. Il pourrait en résulter une refonte des catégories A, B et C. Selon les filières, les encadrants intermédiaires pourraient être des fonctionnaires appartenant à la catégorie B, mais aussi aux catégories C ou A. Votre étude ne plaide-t-elle pas en faveur d’une remise à plat de l’organisation de la Fonction publique territoriale ? J’ai la faiblesse de penser que vos travaux vont plutôt en ce sens. Quant à la problématique du vieillissement de la population de fonctionnaires, qui est inéluctable, la promotion interne au sein de l’encadrement intermédiaire ne constitue-t-elle pas l’une des réponses possibles pour accueillir des agents confrontés à la pénibilité de leur poste ? Il s’agit de permettre à ces agents de quitter un emploi difficile et de jouer un autre rôle au sein de la collectivité, au sein de l’encadrement intermédiaire. Votre avis m’intéresse.

Nijola BLANCHARDEffectivement, la qualité du recrutement est vitale. Désormais, l’on ne recrute pas par dé-faut. On prend le temps nécessaire, mais il s’agit de recruter la personne idoine. Il convient cependant de prendre en compte une dimension spécifique : les collectivités territoriales représentent le dernier rempart pour une catégorie de population à la limite de l’exclusion sociale et professionnelle. Malheureusement, nous constituons cette dernière barrière. Il faut dès lors que les cadres soient correctement préparés, car c’est une population très difficile à gérer. Certains cadres indiquent qu’ils préféreraient ne pas avoir ce personnel. À leurs yeux, au mieux, ils ne font rien, au pire, ils sèment la discorde au sein des équipes. Considérant la mission de management des cadres intermédiaires, cet état de fait constitue un élément fondamental de la formation au management.

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Thierry COLETTESur la question des catégories et des refontes éventuelles, il est vrai que notre travail de définition a été relativement sensible. Au cours des entretiens, nous avons constaté l’extra-ordinaire diversité des situations. Malgré nous, nous avons peut-être sous-valorisé les col-lectivités de petite taille, qui évoluent dans des univers différents. Ce travail de définition a été délicat et a abouti à la segmentation présentée, qui n’en fait pas pour autant une catégorie autonome. Cette définition ne constitue donc pas forcément un axe majeur dans la perspective d’une éventuelle refonte.

Il me semble que la piste de développement se focalise sur la meilleure valorisation fi-nancière de la responsabilité d’encadrement, dans le but de reconnaître la mission de management de l’encadrant. C’est une vraie particularité d’organisation, que les grilles des agents B et C ne prennent pas en compte. Une refonte sur le prisme de l’encadrement ne permettrait pas forcément de répondre de manière unificatrice à la diversité des situations, y compris d’encadrement.

Quant au vieillissement de la population et aux recrutements induits, dans notre étude, nous avons distingué les cas différents d’un recrutement interne et d’un recrutement ex-terne. On constate qu’il ne faut pas sous-estimer l’accompagnement nécessaire. Ce sont des situations à exploiter, mais il ne faut pas sous-estimer l’accompagnement nécessaire et la spécificité de chaque situation.

Renaud MOUTARDESur ce dernier point, il convient de poser la question des parcours au sein des collectivités. Nous ne serons peut-être pas amenés à rester au même poste pendant 14 ans. Globalement, le recrutement, qui pouvait être pratiqué antérieurement en valorisant un parcours ou une ex-pertise dans une logique de carrière, était susceptible de mal se passer, car cette évolution ne correspondait ni au service, ni à l’encadrant. Il convient de prendre garde aux enjeux induits par le poste en termes d’expertise métier et de management. Dès lors, le recrutement et le dispositif d’accompagnement en découlent. On revient aux enjeux liés à la GPEC : comment évaluer les métiers et faire évoluer la cartographie des métiers et des besoins ? Dès lors, toute la réflexion autour du style de management et de l’autonomie du poste en découle.

En l’occurrence, les catégories A, B et C ne permettent pas de définir la fonction de cadre intermédiaire. Les collectivités s’en affranchissent et se focalisent plutôt sur une approche métier. Cela renvoie à d’autres débats sur la conception de la Fonction publique.

Jérôme GROLLEAUJe suis heureux que le travail entrepris permette d’avancer et de fouiller les questions, en donnant un éclairage sur cette fonction. J’ai notamment été intéressé par la définition proposée de l’encadrement intermédiaire. Lorsque j’examine les mots utilisés, il devient difficile de construire une identité du cadre intermédiaire, puisqu’elle induit un caractère « double » et un caractère « entre ». Un espace se dessine, nécessitant de régler un certain nombre de problématiques liées à cette définition du rôle du cadre intermédiaire. Il faut poursuivre ce type de travail, mais aussi voir ce qu’ils font, plutôt que de définir simplement ce que l’on attend d’eux, en s’appuyant sur l’existence du potentiel que vous avez évoqué. On y découvrirait tout un ensemble de pratiques, susceptibles d’enrichir cette identité et de lui donner de la consistance. Par ailleurs, le terme « courroie de transmission » que vous avez utilisé me gêne. Je pense même qu’il serait susceptible de gêner tout un chacun.

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Ces mots reviennent pourtant souvent. Je pense que les cadres intermédiaires sont extrê-mement actifs. Or nous n’en avons pas encore la cartographie ni la palette des modalités qu’ils mettent en œuvre. Il s’agit à mes yeux d’une piste de travail à explorer.

Pour conclure, je souhaite vous poser une question. Vous avez évoqué le fait qu’il s’agissait d’une expérience forte susceptible de vous transformer. En tant que futurs managers, en quoi allez-vous évoluer ? Comment cela vous amène-t-il à repenser votre expérience ?

Siham EL BOUKILIAu-delà de la définition donnée de cette catégorie des cadres intermédiaires, nous avons constaté qu’il existait de nombreuses stratégies de contournement ou de manipulations des règles pour faire aboutir des projets, sans jugement de valeur aucun. Les cadres sont actifs dans la manière dont l’organisation fonctionne. Au niveau de la rédaction, nous avions pris le parti de ne pas utiliser le terme « courroie de transmission », car il nous semblait trop péjoratif. En l’occurrence, le cadre intermédiaire joue un rôle de transmetteur de l’infor-mation, mais de transmetteur actif. Le sens de nos propositions est de rappeler que les cadres intermédiaires sont actifs. Dès lors, comment optimiser leur action au sein d’une organisation efficiente ?

Marin BOURGADEEffectivement, le terme de courroie de transmission permettait de conceptualiser l’idée d’échange. Nous avons voulu intégrer la dimension ascendante et descendante de cet échange, ce qui ne suffit pas à traduire l’interactivité de ce flux d’informations.

Jean DUMONTEILEn tout état de cause, on constate une définition beaucoup plus riche du cadre intermédiaire.

Emilie AGNOUXJe vais répondre à la question posée en dernier lieu sur la façon dont l’étude nous a « transformés ». Je pense que cette étude nous a permis de prendre conscience du rôle des cadres intermédiaires. En tant que futurs cadres de collectivité, cette expérience est très précieuse. Nous disposons ainsi d’outils pour accompagner ces cadres intermédiaires et faciliter leur mission au quotidien. Nous avons également pu prendre conscience de notre positionnement vis-à-vis de l’encadrement supérieur et des équipes. En effet, nous avons pu sonder les directions générales et les équipes quant à leurs attentes vis-à-vis des cadres et aux qualités qu’elles en attendaient. Nous avons pu prendre conscience de l’importance d’agir avec équité, avec justice et d’être présent auprès de nos équipes, même si ce n’est pas toujours évident. Il convient de garder ce lien avec nos équipes. Enfin, nous avons pris conscience de l’importance de toujours donner du sens à l’action et aux missions des équipes, dans un contexte global, pour éviter les situations de mal-être au travail.

Jean DUMONTEILLa boule à facettes n’existe que dans sa relation avec la lumière. Pour faire écho à ce que disait Marie-Francine FRANÇOIS, présidente de l’AATF au début de l’échange, qui faisait référence à la culture de l’organisation, cette boule à facettes va refléter ce qui constitue la culture de l’organisation. Un grand merci pour le travail réalisé.

Jean-René MOREAUEncore une fois merci pour le travail réalisé par les élèves de l’INET. Je vous invite mainte-nant à un pot de l’amitié. Bonne fin de journée à toutes et à tous.

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Bibliographie

Articles

RFAP 2008 n°4 p. 659-854 - L’encadrement intermédiaire à l’épreuve du management public (dont l’article « encadrer sous la contrainte dans la FP » par Céline Desmarais ; p. 6)

Humanisme et entreprise n° 292, 2009/04, p. 17-43 - Le management au cœur des en-jeux de changement au sein de la FPT : le cas du CCAS d’une grande ville (par Christophe Falcoz)

TEBOURBI Nadia et SAID Karim - Les rôles des cadres intermédiaires dans l’apprentissage organisationnel : une étude exploratrice au sein d’un cabinet de conseil, Management et avenir, 2010/6, n° 36, p. 54-76

RAZZANO David - Du cadre territorial au manager territorial, La lettre du cadre territorial, n° 451, 15 octobre 2012, p. 40-41

Ouvrages

BARABEL Michel et MEIER Olivier, Manageor ; les meilleures pratiques du management, Livres en Or, Dunod, 2010

BOYER Luc, Management des hommes, éditions d’organisation, nota bene.

CLOT Yves, Le travail à cœur ; pour en finir avec les risques psychosociaux, Découverte, 2010

DUSEHU Bertrand, Le manager de proximité, au cœur de la performance de l’entreprise, Gereso éditions

LE SAOUT Rémy, SAULNIER Jean-Pierre, L’encadrement intermédiaire, les contraintes d’une position ambivalente, Logiques sociales, Harmattan, 2002, 188 p.

MANUEL SANTO Viriato et VERRIER Pierre Eric, Le management public, PUF, que sais-je ?, 2007

P. TROUVE (dir), Le devenir de l’encadrant intermédiaire, Paris, La documentation fran-çaise, Cahier travail et emploi, 1998, p. 9 (DARES ; ISBN 2-11-004035-1)

Divers

BOYER Luc, l’encadrement intermédiaire, article sur son blog personnel (http://lucboyer.free.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=108&Itmid=29)

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Articles généralistes et non académiques en anglais

http://www.guardianpublic.co.uk/middle-managers-change-public-sector

http://vovworld.vn/en-US/Current-Affairs/New-way-of-promoting-middle-managers-in-public-sector/81632.vov

http://www.managementheaven.com/middle-leaders-managements-role/

http://www.publicservice.co.uk/feature_story.asp?id=19880

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Conseil scientifique et conseil d’orientation

Conseil scientifique

Président du conseil scientifique

Laurent RÉGNÉ, DGA Ville d’Avignon, Chargé d’enseignement à l’université de Nîmes.

Membres du conseil scientifique :

Michel BORGETTO, Professeur de droit de la protection sociale à l’université de Paris 2, membre du Haut conseil du financement de la protection sociale

Jean DUMONTEIL, Directeur des Éditions du secteur public

Claire EDEY-GAMASSOU, Maître de conférences en sciences de gestion à l’université Paris Est Créteil (UPEC)

Dr Gilles ERRIEAU, Responsable du service médical de la MNT

Michel GOMEZ, membre de l’association ResPect, réseau des préventeurs et ergonomes, responsable de service ergonomie et prévention des risques professionnels à Paris Habitat

Dominique LAGRANGE, Directeur-adjoint de l’INET, directeur des formations

Marie-Francine FRANÇOIS, Présidente de l’Association des administrateurs territoriaux de France, Directrice générale des services, Pays de Montbéliard Agglomération

Conseil d’orientation de l’Observatoire social territorial

Membres de la commission « relations institutionnelles professionnelles » de la MNT

Jean-Pierre BERNARD, Dominique BLOT, Laurent BRANCHU, Christian BRIEL, Patrick DOS, François FIGUERAS, Jean-René MOREAU (président de la Commission), Louis OUDART, Laurent RÉGNÉ.

Membres extérieurs en tant que personnalités qualifiées

Alain ANANOS, Ufict-CGT des services publics, Directeur général adjoint du département citoyenneté et développement de la personne, ville de Pantin

Didier JEAN-PIERRE, Professeur agrégé de droit public à l’université d’Aix-en-Provence, directeur scientifique de la Semaine juridique administrations et collectivités territoriales

Nathalie MARTIN-PAPINEAU, Maître de conférences et directrice de l’Institut de droit social et sanitaire de l’université de Poitiers

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Philippe MOUTON, Directeur de la direction de l’observation prospective de l’emploi, des métiers et des compétences de la Fonction publique territoriale, CNFPT

Michel PASTOR, ancien chef de l’Inspection générale et ancien conseiller spécial du pré-sident du CNFPT

Membres extérieurs en tant que partenaires institutionnels de la MNT

Patrick ATLAS, Président de « Méditoriales », l’association nationale des médecins territoriaux

Jean-Christophe BAUDOUIN, ancien Président de l’Association des administrateurs terri-toriaux de France

Vanik BERBERIAN, Président de l’Association des maires ruraux de France

Évelyne BOURET et Yann RICHARD, Co-présidents du Syndicat national des secrétaires de mairie

Daniel DELAVEAU, Président de l’Association des communautés de France

Michel DESTOT, Président de l’Association des maires des grandes villes de France

Michel DINET, Président de l’Observatoire national de l’action sociale décentralisée (ODAS)

Pascal FORTOUL, Président de l’Association des directeurs généraux des communautés de France

Denis GUIHOMAT, Président de l’Association nationale des cadres communaux d’action sociale

Patrick KANNER, Président de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale

Claudy LEBRETON, Président de l’Assemblée des départements de France

Martin MALVY, Président de l’Association des petites villes de France

Élie MAROGLOU, Président de l’Association « ResPECT » (Réseau des préventeurs et ergo-nomes territoriaux)

Dominique MICHEL, Président de l’Association des techniciens territoriaux de France

Christian PIERRET, Présent de la Fédération des villes moyennes

Stéphane PINTRE, Président du Syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales

Alain ROUSSET, Président de l’Association des régions de France

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MR

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Cahiers déjà parus :L’intercommunalité vécue par ceux qui y travaillent.Cahier n° 1. Territorial sondages pour la MNT en partenariat avec l’aDGCF, l’aDCF et l’aaTF. Décembre 2O1O.

Les précarités dans la Fonction publique territoriale : quelles réponses managériales ?Cahier n° 2. Élèves-administrateurs de l’iNeT, promotion robert schuman, pour la MNT en partenariat avec le CNFPT et l’aaTF. Juin 2O11.

Les risques sanitaires des métiers de la petite enfance : auxiliaires de puériculture, un groupe professionnel sous tension.Cahier n° 3. axe image pour la MNT. Novembre 2O11.

Dans la peau des agents territoriaux.Cahier n° 4. P. Guibert, J. Grolleau et a. Mergier pour la MNT, en partenariat avec l’aaTF et l’iNeT. Janvier 2O12.

Gérer et anticiper les fins de carrière. Les seniors dans la Fonction publique territoriale.Cahier n°5. Élèves-administrateurs de l’iNeT, promotion salvador aLLeNDe, pour la MNT en partenariat avec CNFPT-iNeT et aaTF. Juin 2O12

Jardinier, un métier en mutation. Mieux vivre au travail, mieux vivre la ville.Cahier n°6. axe image pour la MNT en partenariat avec hortis. Novembre 2O12

L’impact des technologies numériques de l’information et de la communication sur le travail dans la Fonction publique territoriale.Cahier n°7. C. edey Gamassou pour la MNT. Juin 2O13

Le directeur des ressources humaines dans la Fonction publique territoriale.Cahier n°8. a. Grillon pour la MNT. Juin 2O13.

Pour consulter l’ensemble des publications, rendez-vous sur :www.observatoire-social-territorial.fr

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La MNT est également Le partenaire Protection sociale de 16 OOO collectivités territoriales qu’elle accompagne avec des conseils experts et des solutions durables pour la protection sociale complémentaire et la santé au travail des agents territoriaux.