L'Eglise catholique et les temps modernes

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Une étude théologique de Paul Gauguin

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Autoportrait près du Golgotha, 1896, Museu de Arte, Sao Paulo

Gauguin a réalisé cet autoportrait peu de temps avant d’entamer larédaction de

L’Eglise Catholique et les temps moderneset de peindre le tableau

D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?Ce portrait restitue admirablement l’état physique et psychique

de l’artiste en cette année 1896

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D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?1897-1898 ; 139 x 374 ; Museum of Fine Arts, Boston

Lettre à Daniel de Monfreid, février 1898«Il faut vous dire que ma résolution était bien prise pour le mois de

décembre. Alors j'ai voulu avant de mourir peindre une grande toile que j'avais en tête, etdurant tout le mois j'ai travaillé jour et nuit dans une fièvre inouïe… je crois que, nonseulement cette toile dépasse en valeur toutes les précédentes, mais encore que je n’en feraijamais une meilleure ni une semblable. J’y ai mis là avant de mourir toute mon énergie, unetelle passion douloureuse dans des circonstances terribles, et une vision tellement nettesans corrections, que le hâtif disparaît, et que la vie en surgit.

…C'est une toile de 4,50 m sur 1,70 m de haut. Les deux coins du haut sont jaune dechrome avec l'inscription à gauche et ma signature à droite telle une fresque abîmée auxcoins et appliquée sur un mur or. A droite et en bas, un bébé endormi, puis trois femmesaccroupies. Deux figures habillées de pourpre se confient leurs réflexions ; une figureénorme volontairement et malgré la perspective, accroupie, lève les bras en l'air et regarde,étonnée, ces deux personnages qui osent penser à leur destinée. Une figure du milieu cueilleun fruit. Deux chats près d'un enfant. Une chèvre blanche. L'idole, les deux bras levésmystérieusement et avec rythme semble indiquer l'au-delà. La figure accroupie sembleécouter l'idole; puis enfin une vieille près de la mort semble accepter, se résigner … ; à sespieds, un étrange oiseau blanc tenant en sa patte un lézard, représente l'inutilité desvaines paroles. Tout se passe au bord d'un ruisseau sous bois. Dans le fond, la mer puis lesmontagnes de l'île voisine. Malgré les passages de ton, l'aspect du paysage estconstamment d'un bout à l'autre bleu et vert Véronèse. Là-dessus toutes les figures nues sedétachent en hardi orangé. Si on disait aux élèves des Beaux-Arts pour le concours deRome : Le tableau que vous avez à faire représentera : D'où venons-nous ? que sommes-nous ? oùallons-nous ? que feraient-ils ? »

Croquis préparatoire pourD’où venons-nous…Musée Gauguin de Tahiti

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Mon Dieu, que c’est difficile lapeinture quand on veut exprimer sapensée avec des moyens picturaux etnon littéraires.Paul Gauguin, Diverses Choses, folio 130 verso

Au même titre que son célèbre tableau, les pages intitulées L’Eglise catholique et lestemps modernes ont revêtu aux yeux de Gauguin non seulement une grandeimportance, elles constituent véritablement l’expression littéraire de son « testamentspirituel ».1

Dans une lettre expédiée de Tahiti et datée de novembre 1897, adressée à son ami, lepoète symboliste Charles Morice, le peintre écrit :

« …si j'en ai la force, je recopierai et t’enverrai un travail que j'ai fait, ces dernierstemps (depuis six mois, je ne peins plus), sur l’Art, l'Eglise catholique et l'Espritmoderne. C'est peut-être au point de vue philosophique ce que j'ai exprimé de mieuxdans ma vie. » 2

Ce message, assez souvent mentionné par les biographes de Gauguin, est en fait lepost scriptum d’un courrier émouvant dont il convient de citer quelques lignes :

« …mes jours étant comptés, Dieu a enfin entendu ma voix implorant, non unchangement, mais la délivrance totale : le cœur, toujours battu, malmené par dessecousses réitérées est devenu très malade ; par ailleurs, étouffements et vomissementsde sang tous les jours. La carcasse résiste, mais il faudra bien qu’elle craque. Ce quivaut mieux du reste que de se tuer. »3

Dans un autre courrier, adressé à son ami Daniel de Monfreid, daté de février 1898,Gauguin écrit en conclusion :« J’ai terminé un ouvrage philosophique sur ce thème [D’où venons-nous ? quesommes-nous ? où allons-nous ?] comparé à l’Evangile : je crois que c’est bien : sij’ai la force de le recopier je vous l’enverrai. »

Ici encore, il importe de se référer au contenu de la lettre.« …ma santé, tout à coup presque rétablie c'est-à-dire sans plus de chance de mourir

naturellement, j’ai voulu me tuer. Je suis parti me cacher dans la montagne où moncadavre aurait été dévoré par les fourmis. Je n'avais pas de revolver, mais j'avais del'arsenic que j'avais thésaurisé durant ma maladie d'eczéma : est-ce la dose qui étaittrop forte, ou bien le fait des vomissements qui ont annulé l'action du poison en lerejetant ? Je ne sais. Enfin, après une nuit de terribles souffrances, je suis rentré aulogis.

1 Nous avons trouvé l’expression chez Bengt Danielsson, Gauguin à Tahiti et aux îles Marquises, Editions du Pacifique, 1988 p. 238.2 Extrait de lettre publié par Daniel Guérin : Paul Gauguin, Oviri, Ecrits d’un sauvage, Editions Gallimard, 1974, p. 193.3 Cité par Philippe Verdier Un manuscrit de Gauguin : l’Esprit moderne et le catholicisme. Wallraf-Richartz-Jahrbuch,Westdeutsches Jahrbuch für Kunstgeschichte, Cologne, n° 46, 1985, p. 280.

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Durant tout ce mois j'ai été tracassé par des pressions aux tempes, puis desétourdissements, des nausées à mes repas minimes…Il faut dire que ma résolutionétait bien prise pour le mois de décembre

Alors j’ai voulu avant de mourir peindre une grande toile… »4

Suit une description de ce testament pictural de Gauguin que représente le célèbretableau : D’où venons-nous, que sommes-nous, où allons nous, conservé au Muséumof Fine Arts de Boston.

Diverses ChosesL’ « ouvrage philosophique » dont Gauguin parle dans les deux lettres que nous

venons d’évoquer se trouve consigné dans un manuscrit que le peintre a intituléDiverses Choses.

Le titre de la page initiale, écrit à l’encre bleue, comporte, écrit à l’encre noire, unsous-titre qui indique le sens que l’artiste veut donner à son texte :

Notes éparses, sans suite comme les Rêves,comme la vie toute faite de morceaux :

Et de ce fait que plusieurs ycollaborent : l'amour des belles choses aperçues

dans la maison du prochain.

Sur cette page de garde on note encore une référence chronologique :« 1896. 97… »

En 1896, Gauguin séjourne pour la seconde fois à Tahiti. Il habite dans le district dePunaauia, à quelques kilomètres de Papeete, la capitale, avec Paura, une jeune tahitienne de 14ans dont il aura deux enfants. En bons termes avec Maître Goupil, avocat et chef du partiprotestant de l’île, il a de graves démêlés avec le curé Michel. Celui-ci ne supportait pas lessculptures très osées qui ornaient le jardin de l’artiste.

Son état de santé est acceptable.En 1897, changement de décor. Obligé de quitter sa case, il se fait construire une nouvelle

demeure, plus spacieuse mais qui lui revient fort cher. Aux soucis financiers, s’ajoute une rechutesur le plan de la santé. « Après avoir eu un mieux sensible, la maladie a repris avec fureur uneextension très grande…Depuis mon enfance le malheur s’abat sur moi. Jamais une chance,jamais une joie…Mon Dieu, si vous existez, je vous accuse d’injustice, de méchanceté…A lanouvelle de la mort de cette pauvre Aline (la fille de Gauguin) j’ai douté de tout, j’ai ri comme undéfi… » 5

Il est aussi particulièrement seul. Les quelques amis qu’il pouvait avoir le fuient, le bruit ayantcouru que les plaies de ses jambes étaient des symptômes de lèpre. Or, à l’époque, la maladieétait réputée fort contagieuse.

Tel est le décor dans lequel l’écrit de Gauguin a vu le jour.La page de garde est encore illustrée par un dessin collé, réalisé à la plume et à

l'encre noire, reprenant un tableau bien connu de Van Gogh, La Mousmé dans unfauteuil.

4 Oviri, opus cité p. 193.5 Lettre à William Molard expédiée en août 1897 et publiée par Danielsson, opus cité p. 234.

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Si le coin supérieur gauche du dessin a été arraché, on arrive néanmoins à lire cesmots, écrits à l’encre bleue mais soulignés en noir :

…du regretté Vincent Van GoghFace à son propre désespoir, Gauguin pense bien sûr au suicide de Vincent Van Gogh. Dans

« Diverses Choses », il a consacré deux pages à son ami qui éclairent, à notre avis, une part despropos qu’il tiendra dans L’Eglise catholique et les temps modernes.

Gauguin raconte sa rencontre à Arles avec Vincent « qui voulait fonder l’atelier du Midi dontje serais le chef…Nous travaillâmes quelques mois avec ardeur. Ce fût peu. Ce fût beaucoup » .

Lorsqu’un jour Gauguin demanda à Van Gogh pourquoi il gardait, telle « une vieille relique »,une paire de sabots, dont il avait d’ailleurs peint une nature morte, le hollandais lui fit cetteconfession : « Mon père, dit-il, était pasteur et je fis mes études théologiques pour suivre lavocation que sur ses instances je devais avoir.

Jeune pasteur je partis un beau matin, sans prévenir ma famille, pour aller en Belgique, dansles mines, prêcher l'Évangile, non comme on me l'avait enseigné, mais comme je l'avais compris.Ces chaussures, comme vous le voyez, ont bravement supporté les fatigues de ce voyage !

…Mes paroles enseignaient la sagesse, l'obéissance aux lois de la raison, de la conscience,puis aussi les devoirs de l'homme libre…».

Puis Van Gogh raconta à Gauguin la survenue d’«une terrible catastrophe de feu grisou dansune mine…. Les médecins secouraient les blessés considérés comme viables, puis débordés par labesogne, abandonnaient à leurs souffrances ceux qui devaient mourir. Un de ceux-là gémissaitdans un coin, la figure inondée de sang, le crâne labouré par des éclats de charbon. J'auraisvoulu le sauver, moi médecin de l’âme. Inutile s'écria le médecin du corps, cet homme est perdu àmoins qu'on puisse lui donner des soins de chaque minute pendant 40 jours, et la Compagnien’est pas assez riche pour un tel luxe.

À son chevet je veillais constamment, tout un mois, lavant ses plaies, le priant de vivre. Il futguéri.

Et avant de quitter la Belgique, j’eus la vision devant cet homme portant sur son front unesérie de cicatrices, telle la couronne d'épines : j’eus la vision de Jésus ressuscité.

Et Vincent reprit la palette ; en silence il travailla. À côté de lui, ma toile blanche : jecommençais son portrait. J’eus aussi la vision d'un Jésus, prêchant la bonté et l'humilité ».

Les «Diverses Choses» sont insérées dans un album intitulé Noa Noa. Il s’agitdu célèbre récit relatant le premier séjour de Gauguin en Polynésie et que le peintreprojetait de publier avec son ami, le poète Charles Morice.6

Alors que Noa Noa est aujourd'hui accessible dans trois versions et à travers demultiples éditions, Diverses Choses n'a été - sauf erreur de notre part - publié dansson intégralité que dans un seul document : un Cd-rom intitulé GAUGUIN

ECRIVAIN : NOA NOA, DIVERSES CHOSES, ANCIEN CULTE MAHORIE. 7

Cette entreprise magnifique permet de découvrir Gauguin « tel qu'en lui-même », lelecteur étant invité à lire les trois livres sous forme de fac-similé de l'oeuvre

6 L’album contenant Noa Noa et Diverses Choses appartient au Musée d’Orsay. Il est conservé au Département des Arts graphiquesdu Musée du Louvre.7 Publié en 2003 sous la direction d'Isabelle Cahn, cette édition, dont les commentaires sont bilingues, français-anglais, a été initiéepar le musée d’Orsay avec l’appui de la Réunion des musées nationaux.

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originale. Sur son écran d'ordinateur il suit, avec émerveillement, l'écriture régulière,le plus souvent parfaitement lisible, du célèbre peintre. Il notera aussi les libertés queGauguin prend avec la ponctuation des phrases, voire avec l'orthographe. Il verraencore que certaines pages - rares il est vrai - sont plus difficiles à décrypter. Nuldoute qu’à ces moments Gauguin était encore plus souffrant qu'à l’accoutumée. 8

Cependant, malgré ces avantages, en voulant étudier dans le détail le chapitre deDiverses Choses intitulé L’Eglise catholique et les temps modernes, nous avons étéconfrontés à nos propres limites, à savoir : capter le sens d’un texte à la lecture dumanuscrit sur écran d'ordinateur et, dans le cas particulier, découvrir l’argumentationderrière les propos souvent si polémiques de Gauguin. Afin de surmonter la difficulténous avons, à notre usage personnel, imprimé les pages du CD-Rom.

Hélas, la qualité de notre texte imprimé est médiocre, comparée au script zoomé del’écran ou aux belles éditions des pages de Gauguin parues ailleurs en fac-similé.9 Cetravail nous a cependant permis de dactylographier le texte.

Nous l'avons fait en respectant, outre les éléments déjà cités, l'usage variable desmajuscules ou des minuscules pour écrire un même mot et aussi la manie desouligner de l’artiste.

Par ailleurs, pour ne pas perdre la spontanéité irremplaçable du manuscrit, nousavons juxtaposé, page après page, le manuscrit et le tapuscrit.

Ce travail achevé, nous avons pu apprécier toutes les richesses, mais aussi lesfaiblesses, de cette réflexion théologique à laquelle Gauguin accordait tantd’importance.

Les spécialistes de Gauguin savent que le peintre a repris, en 1902 aux IlesMarquises, l’étude réalisée à Tahiti en 1897. Il en a modifié le titre, l’intitulantL’Esprit moderne et le catholicisme. La disposition des paragraphes a changé ;plusieurs éléments nouveaux ont été ajoutés ; d’autres ont été supprimés. Par ailleurs,la présentation a été revue, notamment la disposition des paragraphes, et la reliurerehaussée de plusieurs dessins et gravures.

Le contenu de cette dernière version est un peu plus connu que la première, mêmesi elle reste difficilement accessible dans son intégralité.10 En attendant qu’elle soitmise à disposition d’un public plus large, il nous a semblé intéressant deprésenter la première version indépendamment de la seconde.

A la lecture suivie de ce texte, il nous est apparu que le « premier testament »théologique de Gauguin recèle une histoire, un sens et une valeur propre qui éclairent

8 Outre les conséquences d’un alcoolo tabagisme marqué, et sans doute quelques complications d’une syphilis, Gauguin souffrait à cemoment d’une plaie eczématisée de la jambe, suite d’une fracture ouverte, mal cicatrisée, survenue en 1893.9 On peut mentionner, parmi d’autres, l’édition de la première version de Noa Noa, de l’Association des Amis du Musée Gauguin àTahiti et la « Gauguin and Oceania Foundation » à New York, publiée en 1987. On peut encore citer le fac-similé Avant et après,publié en 1951 par Scripta aux Editions Paul Carit Andersen à Copenhague.10 Beaucoup d’études consacrées à Gauguin comportent des citations de L’Esprit moderne et le catholicisme. Elles proviennentessentiellement des pages 196 à 216 d’Oviri de Daniel Guérin.

La seule édition du texte entier a été entreprise par Philippe Verdier et publiée comme complément d’un article portant comme titre :Un manuscrit de Gauguin : l’Esprit moderne et le catholicisme.

Ce travail - mentionné plus haut - est inséré dans la revue allemande Wallraf-Richartz-Jahrbuch, Westdeutsches Jahrbuch fürKunstgeschichte, Cologne, n° 46, 1985. Les pages 273 à 298 se rapportent à l’article de Verdier. Les pages 299 à 328 reproduisent letexte de Gauguin accompagné de 169 notes explicatives. Cette remarquable étude aurait mérité une publication plus accessible.

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certes le « second testament » mais sans que le « frère cadet » ne se substitue au« frère aîné »…

Un court et brutal préambule…Avant de rédiger son texte consacré à L’Eglise Catholique et les temps modernes,

Gauguin a fourni un aperçu sur ce que l’on peut appeler les prolégomènes et le« déclic » de son entreprise.

De longue date le peintre s’intéressait à une problématique très en vogue à la findu XIXème et au tout début du XXème siècle, à savoir les Vies de Jésus.

Lecteur assidu de Renan, qu’il évoquera à plusieurs reprises dans DiversesChoses, mais aussi dans sa correspondance, Gauguin a néanmoins pris une positioncritique vis à vis de l’auteur de la célèbre « Vie de Jésus ». Ecoutons-le à travers uncourrier adressé à Charles Morice, daté de novembre 1897.11

« Cette oeuvre purement littéraire et sans aucune attache philosophique, si on l'examineattentivement, n'a rien en soi qui puisse attaquer l'Église. Le successeur de Pie IX, Léon XIII, nela renierait pas pour être, d'apparence, au niveau de l'esprit moderne. On commençait beaucoupà tiédir : l'ancien Jésus était ma foi par trop fabuleux, tandis que le nouveau Christ, si bien décritpar Renan, mais toujours incompréhensible, devenait possible pour les amateurs du dimanche,pour la foule

L'Eglise l'a bien compris plus tard, lorsqu'elle a réfléchi et elle lui a vite pardonné sonescapade. Je suis tout à fait convaincu qu'elle a puissamment aidé Ernest Renan à devenir cequ'il est devenu. « Voyez comme nous les élevons », peut-elle dire. « Encore un qui est sorti denos institutions. »

Tandis qu'un Renan qui aurait mis son érudition, sa vaste intelligence, son talent, au serviced'une belle cause, la vraie cause de Dieu, c'est-à-dire la sagesse, le bien de l'humanité, ce Renandevenu apôtre laïque, débarrassé de tout pharisaïsme, combattant l'Eglise en homme qui connaîtson iniquité et ses mensonges…ce Renan, prenant Jésus lui-même comme modèle, aurait été unhomme dangereux pour l'Église. Or, l'Église ne pardonne jamais.

Et Renan aurait vécu martyr, peut-être obscur ; Renan a préféré la vie mondaine, lesjouissances d'un honnête citoyen, restant malgré tout un obéissant séminariste… ».

Le « déclic » qui a conduit Gauguin à insérer son manifeste dans Diverses Choses,a été provoqué par la lecture d’une brochure publiée par Jules Soury sous le titre LeJésus historique. Quoique rédigé en français, cet écrit a été publié à San Francisco en1896. La relative proximité géographique avec Tahiti explique sans doute pourquoiGauguin en prendra très rapidement connaissance.12

Jules Soury (1842-1915) était à la fois historien des religions et professeur de neurosciences.A l’Ecole Pratique des Hautes Etudes il eut comme élève Maurice Barrès. Dans ses Cahiers,celui-ci taxa son professeur de « fou sublime » et le caricatura « les yeux fermés », son attitudefavorite pour enseigner.

Sur le plan de la recherche médicale, il publia en 1892 un ouvrage, remarquable pourl’époque, intitulé Les fonctions du cerveau, doctrines de l’école de Strasbourg, doctrines del’école italienne.

11 Ce texte repris, pour l’essentiel dans Diverses Choses.12 La brochure lui a été prêtée par Jean Souvy qui habitait alors une maison proche de la case de Gauguin (Verdier, opuscité p. 296 note 64). La proximité phonétique des noms Souvy et Soury a conduit Gauguin à quelques fantaisiesorthographiques : Souvi, Souri, Sourie…

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Sur le plan philosophique et théologique nous connaissons de lui un Bréviaire de l’histoire dumatérialisme (1881) et, le plus important de ses livres, Jésus et les Evangiles (1878)

Dans sa célèbre Histoire des Recherches sur la Vie de Jésus, Albert Schweitzer le cite parmiles auteurs qui ont cru déceler des traits pathologiques dans le comportement du Christ. Soury fitle diagnostic de « paralysie progressive » et publia son travail dans un ouvrage intitulé Essai depsychologie morbide. Un peu plus tard, note Schweitzer, il transforma son Essai en « une insipideVie de Jésus ». En 1898 parut une troisième édition de l’ouvrage intitulé Jésus et la religiond’Israël. Dans la préface, toujours d’après Schweitzer , « il formula des regrets au sujet de sonentreprise ayant pu choquer bien des convictions religieuses ».

Notons encore que, selon Schweitzer, Soury était dans ses jeunes années le secrétaire d’ErnestRenan.13

La publication de Jules Soury, parvenue entre les mains de Gauguin, comportait,outre quelques remarques de l’auteur, essentiellement la traduction d’une partie d’unlivre de Gérald Massey (1828-1907), poète, théologien et égyptologue anglais,intitulé The Natural Genesis. Ecoutons quelques lignes du résumé qu’ElisabethChilds donne de cet ouvrage: « Gerald Massey réfute notamment la réalité historiquedu personnage du Christ…et arrive à la conclusion que toutes les religions ont prisleur source en Afrique avant de se développer en Egypte. D’après lui, l’AncienTestament ne serait qu’une compilation de mythes que les juifs ont hérités decivilisations plus anciennes. Le personnage de Jésus lui-même ne serait qu’unevariante du dieu égyptien Horus ».14

Gauguin a inséré dans son cahier quelques extraits du texte de Massey traduit parJules Soury. Il a aussi recopié plusieurs commentaires de ce dernier. Voici unexemple : « Et le traducteur de s’écrier : En réduisant à néant l’authenticité desEcritures dites Saintes, tout l’échafaudage chrétien s’écroule, de même que lestentacules de la Pieuvre se détachèrent du corps de Gilliat, le héros des Travailleursde la Mer, lorsqu’il eut frappé le monstre à la tête. C’est à quoi tend l’œuvreimmense de M. Gerald Massey, et le but visé est complètement atteint ».

Les jugements personnels que le peintre lui-même nous livre en conclusion, avantd’entamer la rédaction de son essai sur L’Eglise Catholique et les temps modernes,sont à nos yeux, bien plus importants que ses recopiages de Soury et de Massey.Ecoutons-le : « En ce court et brutal préambule, je viens de terminer cette acerbe controverse de l'ouvragede G. Massey suivi des notes de son traducteur Mr. Souvi, par un singulier aphorisme, ‘ il faut tuer Dieu ‘.

Et le lecteur de fermer les yeux, en droit de me demander raison de mon sacrilège. Qu'il se rassure. Par lecommentaire qui va suivre il verra que mon âme n’est pas irréligieuse, que je ne parle pas à la légère en ignorantles choses sacrées…

Je gagnais à cette étude une certaine compréhension de mon coeur, de ses aspirations, de ses joies et de sesdouleurs. Mais le cerveau resta comme avant dans le chaos, le désordre. Ce fut alors que je me livrais à l'étude del'Évangile cherchant à en pénétrer le sens. Et j'y trouvais satisfaction. Non point que j'y découvris l'insondablemystère, mais ses formes fabuleuses, surnaturelles plaisaient à mon imagination d’Artiste. Puis enfin ces énigmesétablis par des hommes supérieurs pourraient être lus par un homme aussi, si mystérieux qu’ils soient. Et j'avoue

13 Albert Schweitzer, Geschichte der Leben-Jesu Forschung, Tübingen, Edition de 1951, p 36314

Elisabeth Childs « L’Esprit moderne et le catholicisme : le peintre écrivain dans les dernières années », in Gauguin, l'atelier des

tropiques, sous la dir. de Claire Frèches-Thory et George T.M. Shackelford, Paris : Réunion des musées nationaux, 2003, p. 278.

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que lorsque je les ai cru comprendre j'ai toujours trouvé la sagesse, l'élévation de la pensée à son état le plusnoble. J'ai aimé Dieu sans savoir, sans le définir, sans comprendre ».15

A la fin de ce « court et brutal préambule », et juste avant le début de L’EgliseCatholique et les temps modernes, le manuscrit comporte ces quelques mots « Etquand Monsieur Gerald Massey… » doublement barrés par Gauguin.

La suite de ce début de phrase se trouve reléguée à la fin de son essai. Aussi, nous

a-t-il paru logique de la replacer au bon endroit. Voici ce texte :Il me reste quelque chose à dire sur l'ouvrage de Monsieur Massey. Quand il dit : « Les Christolâtres

laissent aux communistes et aux nihilistes la tâche de faire entrer dans la sphère de la politique pratique ladiscussion des réformes qui sont à opérer pour tirer l'humanité de l'ornière où elle se traîne si péniblement. »

Et il dit précédemment : « L'autre monde a été présenté comme une amorce au devant de cette bête desomme, le Producteur, afin que l'odeur de la nourriture future dans une autre vie lui fasse oublier son droit aupâturage commun dans ce monde ci. »

Ev. St Mathieu. Jésus dit : Quand vous verrez l'abomination de la désolation………. : Alors après cetemps viendra l'avènement du fils de l'homme comme un éclair qui sort de l’Orient, paraît, illumine jusqu'àl'Occident. Ainsi sera l'avènement du fils de l'homme.

Je crois que nous sommes à ce moment prédit (de l'abomination), moment qui durera longtemps, malnécessaire pour arriver au bien, temps logique du reste de la vie humaine. Je crois aussi que les communistes et lesnihilistes précipiteront le mouvement par le mal qu'ils feront. Que tout le monde ait droit au pâturage, soit ;pâturage matériel, pâturage de la : (ce dernier pâturage compte cependant un peu dans le bonheur de l'humanité,et je ne crois pas que les communistes et les nihilistes pas plus que leurs prédécesseurs en soient un instantpréoccupé.) Eh bien ce pâturage matériel tant désiré, pour lequel bien intentionnés d'ailleurs ces hommes deprogrès ont lutté et vont lutter, faire entrer dans la sphère de la politique des réformes qui sont à opérer pourtirer l'humanité de l'ornière où elle se traîne si péniblement, en faveur de quelle classe de la société sera-t-ilobtenu pleinement (plus de la moitié du chemin est fait) ?

En faveur de la classe qui ne pense pas, la mieux armée pour trouver cet or qui donne le pâturage de luxe,toutes les satisfactions viles, tandis que le philosophe, le savant, le poète, l'artiste sans défense contre l'astucecommerciale, seront esclaves du Producteur, deviendront de plus en plus la bête de somme. La matière monte, laPensée descend. Nivellement, partages, égalité, sont des contresens (en logique) de la création toute entière, qui ades degrés, des forces différentes. Un temps viendra où seule la Raison fera les réformes qui sont à opérer pourtirer l'humanité de l’ornière où elle se traîne si péniblement.

Quelles conclusions peut-on tirer de ces interférences?Manifestement une part importante du texte de L’Eglise Catholique et les temps

modernes a été conçue, voire rédigée avant que Gauguin ne transcrive son écrit dans

15 Diverses Choses, folio 140 recto et verso.

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les Diverses Choses. Peut-être même certaines notes sont-elles antérieures à laconfrontation de l'artiste avec la traduction de Massey, présentée et commentée parJules Soury.

Le lecteur découvrira en effet que dans le corpus même de l'écrit de Gauguin, lesnoms de Soury et de Massey ne sont cités qu'une seule fois,16 en une sorte deparenthèse que le peintre conclut par la mention… « suite du commentaire ».

Ainsi - que l'on nous pardonne de recourir aux métaphores obstétricales - il noussemble bien que la réception de l'écrit de Soury a bien déclenché l'accouchement dutexte de Gauguin mais que sa gestation remonte bien plus loin.

Cet écrit est le fruit de beaucoup de discussions et de nombreuses lecturesthéologiques. Citons parmi les rencontres déterminantes celles avec Meyer de Haanen Bretagne et avec Vincent Van Gogh à Arles.

Quant aux lectures, Gauguin connaissait bien, nous l’avons vu, la Vie de Jésus deRenan. Il a eu connaissance du contenu de Sartor Resartus de Thomas Carlyle et duParadis Perdu de John Milton. Nous avons montré ailleurs que ces écrits, truffés decitations bibliques, ont alimenté les connaissances de Gauguin.17

Par ailleurs, son éducation au petit séminaire près d'Orléans a été souvent évoquéepar les commentateurs pour comprendre certains aspects de l’œuvre de Gauguin.Cette formation a incontestablement joué un rôle, mais il convient, à notre avis, de nepas surévaluer ce que l'élève a pu acquérir entre 11 et 14 ans en connaissancesbibliques.

Nous avons pu consulter les programmes de l'enseignement donné au PetitSéminaire de La Chapelle-Saint-Mesmin dans les années 1859 à 1862. Il s'agissaitd'éléments de catéchisme bien loin des connaissances théologiques que le lecteurdécouvrira dans l’écrit qui suit.

Par contre, nous sommes persuadés que l'évêque d'Orléans, professeur de religionde Gauguin au séminaire, a su créer chez l'enfant un réel goût pour les récitsbibliques.18

Et c’est cet intérêt, acquis dans sa jeunesse, qui l’a conduit à devenir un lecteurassidu des Ecritures pour amener plus tard - selon la propre expression de Gauguin -« l’auteur de cet écrit à insister tellement sur les textes de l’Evangile, les répétantsans cesse, s’efforçant de les comprendre, dans l’esprit d’un monde meilleur ».

16 Voir folios 144 verso et 145 recto17 Othon Printz, Gauguin et le Protestantisme, Rencontre avec des hommes et…des femmes, Jérôme Do Bentzinger,Colmar, 2008.18 L’évêque était Monseigneur Dupanloup. « L’établissement est alors au cœur de la réforme de l’enseignementcatholique, sous la houlette du plus éminent des ecclésiastiques libéraux…Réformateur national en matièred’enseignement religieux, il crée au petit Séminaire un nouveau programme d’étude…Il essaie de concilier la foichrétienne avec les progrès de la connaissance, en particulier des sciences ». Citation extraite d’un document intituléPaul Gauguin, collégien au Petit-Séminaire à La Chapelle-Saint-Mesmin publié par Valérie Baudrier (G.H.L. n° 15) etaimablement communiqué par les Archives de La Chapelle-Saint-Mesmin.

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Lucas van Leyde, Crucifixion, 1521Reproduction découpée par Gauguin et collée en Folio 130 recto

de Diverses Choses

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L’original du texte que nous présentons est contenu dans un album relié d’un cuir brun tabac.L’ensemble est constitué de 177 feuillets paginés jusqu’à 345, dont 141 feuillets de papier vergé

blanc, un cahier de 7 feuillets de papier ligné inséré entre les feuillets 266 et 267 et un cahier de 29feuillets de papier ligné, inséré à la fin de l’album et numéroté de la page 289 à 345.19

L’Eglise Catholique et les temps modernes occupe les pages 273 à 310 auxquelles il faut ajouter,selon les indications de Gauguin lui-même la page 328.

Ainsi les pages 273 (folio 141 recto) à 288 (folio 148 verso) font partie intégrante de l’album alorsque les pages 289 (folio 149 recto) à 310 (folio 159 verso), de même que la page 328 (folio 168verso) sont écrites sur les feuillets de papier ligné collés dans l’album d’origine.

Nous avons essayé de respecter les dimensions des pages à savoir 31,5 X 24 cm pour pagesoriginales et 29,5 X 21 pour les pages supplémentaires

L'Eglise catholique, autrement dit la corporation sacerdotale composée de prêtresrecrutés, les nouveaux par la consécration des anciens, l’église Catholique s'attribue uneautorité dogmatique soi-disant divinement inspirée, infaillible, à elle donnée par le Christ,par cette parole à saint Pierre, « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon église et lesportes de l'Enfer ne prévaudront pas contre elle ».

Et cette autorité infaillible que l’Eglise s'attribue, elle prétend l’avoir pour déciderdogmatiquement, contrairement à la raison de chacun, du sens vrai, définitivement arrêté,de tous les textes de la bible ; pour dogmatiser toute doctrine religieuse ;

- entre autres la présence réelle du corps et de l'âme du Christ dans l'Eucharistie,- l'enfantement surnaturel de la Vierge Marie, les miracles des reliques,

etc... ; pour condamner toute doctrine philosophique ou d'apparence scientifique necadrant pas avec son appréciation infaillible, souveraine, telle que la rotation de la terresur elle-même, doctrine qu'elle a forcé Galilée de désavouer à genoux par l'intervention duPape représentant infaillible de cette autorité dogmatique _

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19 Voir Isabelle Cahn, Gauguin Ecrivain, cahier accompagnant le Cd-rom, page 12.

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Et cette condamnation de doctrines scientifiques, philosophiques, religieuses, elle prétendavoir le droit supérieur, non seulement de la formuler théoriquement par une déclarationdu concile en corps ou du pape en personne, mais même de la consacrer dans la pratique,quand elle en a le pouvoir, par une exécution pénale sur la personne de ceux qu'ellecondamne et qualifie ainsi d'hérétiques. Ainsi la condamnation citée plus haut deGalilée, les croisades contre les albigeois, les tortures et bûchers de l'inquisition, lacondamnation de Jean Huss et Jérôme de Prague à être brûlés vifs sur l'ordre du Concilede Constance.

Toutefois avant de supplanter la raison par la suprématie qu'elle prétend avoir surelle, l'Eglise lui concède, lui reconnaît un droit d'antériorité, de vérification, de contrôle,auquel elle se subordonne d'abord en lui soumettant l'examen du texte biblique : Pierretu es pierre, - texte sur lequel elle base la justification de l'autorité suprême qu'elles'attribue.

Sans abdiquer l'intégralité du droit de notre raison dont l'enseignement, lesprescriptions, s'imposent du reste à nous quand même, nous pouvons donc à ce point devue même où l'Eglise est entraînée à se mettre pour légitimer son autorité, examiner ceque vaut cette base, sur laquelle elle prétend l'asseoir. Il suffit donc d'abord d'un peu deréflexion pour voir que cette prétendue autorité ne s'appuie sur rien de sérieux, derationnel, que sa base est un trompe-l’œil qui s'évanouit au premier examen. Cetteprétendue autorité s'appuie en réalité sur ce qu'en philosophie on appelle vulgairementun cercle vicieux = de deux choses l'une : ou notre raison est incapable, comme le prétendl'Eglise, de comprendre le sens de la doctrine énoncée dans les textes de la Bible, et alorselle est par là même incapable aussi de comprendre ce texte biblique de Pierre, tu espierre, etc... et il est clair ainsi que ce texte n'a plus de valeur rationnelle pour légitimercette…

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…. autorité de l'Eglise. Ou notre raison est capable de la comprendre. Par là même elleest apte à comprendre tous les autres ; et dans ces conditions cette prétendue autoritédogmatique de l’Eglise n'a plus de raison d'être ; notre raison n'a qu'à passer outre, ellereste la seule autorité naturelle légitime.

En procédant de ce principe, si nous relions ce texte invoqué à tous les autres, notreraison peut (et seulement ainsi) comprendre le véritable sens que ce texte implique dans saconciliation et son sens explicite avec les autres. Or il se trouve que ce texte ainsi examinédans son vrai sens, dit justement tout le contraire de ce que l'Eglise lui fait dire. Pour peuqu'on étudie la bible, on peut voir que la doctrine qu'elle renferme en général et celleconcernant le Christ en particulier, s'énoncent sous une forme symbolique, présentant undouble aspect, une forme qui d'abord matérialise l'Idée pure pour la rendre le plus sensible,affectant l'allure du surnaturalisme ; c'est le sens littéral, superficiel, figuratif, mystérieuxd'une parabole ; et puis - le second aspect donnant l'Esprit de celle-ci. C'est le sens au plusfiguratif, mais figuré, explicite de cette parabole, c’est le fond, non plus énigmatique, maisnaturel, rationnel, compréhensif, de la doctrine énoncée, devenue ainsi scientifique. Et ilest des textes précis dans la Bible qui énoncent ce double aspect de la doctrine etrecommandent d'en chercher le véritable sens voilé, dissimulé, secret. Citons-en quelques-uns.-

Et toutes les visions des vrais prophètes seront comme les paraboles d'un livre ferméavec des sceaux qu'on donnera à un homme qui sait lire en lui disant, Lisez ce livre, et ilrépondra « Je ne le puis parce qu'il est cacheté.Ecclésiastique - Le sage cherchera à entrer dans le secret des proverbes à pénétrer, dans lemystère des paraboles, à se nourrir de ce qu'elles ont d’énigmatique.

Les Proverbes -Là où il n'y a pas de science, il n’y a aucun bien à l'âme.

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Ev. St Marc –Et il ne parlait point sans paraboles, mais en particulier il expliquait tout à ses disciples…Epître de St Paul aux hébreuxOr quiconque est encore allaité est incapable d'entendre les discours de la parfaite justice, comme

étant encore enfant v 16 Mais la nourriture solide est pour les parfaits, pour ceux qui par un longusage ont l'esprit exercé à discerner le bien d'avec le mal.

Epître aux Corinthiens _ Pour moi mes frères je n'ai pu vous parler comme à des personnesspirituelles, mais comme à des enfants en J.C. je ne vous ai nourris que de lait et non pas de viandessolides, parce que vous n'en étiez pas encore capables.Ev. St Luc - Ses disciples lui demandèrent ce que voulait dire cette parabole du semeur et il leur dit :pour vous il vous a été donné de connaître le mystère du royaume de Dieu, mais pour les autres il neleur est proposé qu'en paraboles, afin qu'en voyant ils ne voient pas, et qu'entendant ils necomprennent pas, désignant ainsi ceux qu'il juge indignes par leurs dispositions corrompues, hostiles,et qu'il vise encore quand il dit d'autre part : Ne jetez pas vos perles aux pourceaux.

Ces citations suffisent déjà pour démontrer que dans les textes bibliques sous la forme littérale,superficielle, figurative des paraboles affectant le surnaturalisme énigmatique, irrationnel, il fautchercher le sens figuré, fondamental, rationnel, compréhensif, scientifique, de la doctrine secrète ; (Ettoutes les fois que les textes méconnaissent en apparence les lois de la nature, il y a paraboles à coupsûr). - Voilà d'abord, dissimulée, mais offerte à la pénétration de l'intelligence humaine,compréhensive du sage, l'enseignement biblique, évangélique tendant à y amener graduellement lescoeurs, les esprits ; mais que les plus aptes pénétraient, comprenaient d'eux-mêmes, comme l'indique lavision de St Paul sur le chemin de Damas, comme en témoigne la confession du Christ comme fils deDieu par St Pierre, que le Christ signale, caractérise en ce sens dans cette réponse remarquable : tu esbien heureux Simon fils de Jean, (St Mathieu) parce que ce n'est point la chair et le sang qui t'ontrévélé ceci, mais mon père qui est dans le ciel.

Et comme Dieu ne nous révèle quelque chose que par l'intelligence, le Christ semble dire à Pierre :Tu me confesses ainsi, non parce que tu l'admets en croyance, sur la simple énonciation, sur le simpledire d'une parole charnelle qui te l'as dit sans te l'expliquer, mais parce que ta raison, ton intelligence,te l’as fait comprendre : distinguant sa confession de celle des autres, il semble lui dire : tu m'ascompris. Et alors c'est sur cette confession de Pierre ainsi définie que Jésus ajoute : tu es Pierre etc'est sur cette pierre que je bâtirai mon église (sur cette base de la compréhension scientifique peut-ondire) et les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle. Sous entendant par là, à l'inverse, que cesportes de l'enfer, par une conséquence logique fatale prévaudraient dans une église fondée seulementsur la révélation purement charnelle dogmatique de la…

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doctrine sans compréhension, n'offrant que le sens littéral, superficiellement surnaturalisé,irrationnel, énigmatique, du symbole, de la parabole, prescrit comme dogme à la foi aveugle, à la foibéate, ouvrant ainsi la voie à toutes les superstitions possibles, à toutes les déviations.

Conformément à cette maxime de l'Ev. St Matthieu. Un aveugle conduisant un autre aveugle, ilstombent tous les deux dans la fosse appliqué aux pharisiens.

Tous ces textes établissent donc déjà tout le contraire de ce que l'Eglise revendique pour elle, commejustification de l'autorité dogmatique qu'elle s’attribue, et l'excluent absolument du privilège del'Eglise fondée par Pierre tant elle s’en caractérise comme le Contresens ; et montrent que lesprophètes, le Christ et St Paul assurément d' accord avec les autres apôtres entendaient soumettre àla raison de tous, à la pénétration sage de tous, le fond de la doctrine biblique, la faire de plus en pluscomprendre par une initiation progressive, au lieu se restreindre au sens purement littéral, prescritdogmatiquement, au lieu d'ériger en principe ce dogmatique autoritaire. Ces paroles de St Paul ledisent encore avec précision : « Toute l'écriture divinement inspirée est utile pour instruire de lavérité, corriger des erreurs. Et quand St Ambroise dans son livre sur la pénitence dit : celui-là n'a pasla succession de Pierre, qui n'a pas la foi de Pierre : n'est-ce pas conforme à ce double sens du Christ àPierre? Il y a plus, quand le Concile de Constance condamnait Jean Huss au bûcher, en consécrationpratique de ce principe exorbitant déjà du dogmatisme autoritaire, ce concile représentait l’église encorps, agissait en sens diamétralement opposé à la doctrine du Christ qui sur la Croix disait à StPierre voulant le défendre par l'épée : remets l'épée au fourreau. Celui qui se servira de l'épée périrapar l'épée, montrant par là qu'il voulait enseigner sa doctrine par la mansuétude poussée jusqu'aumartyre et non par la violence. Ce dogmatisme violent contre tout contradicteur, qui impose, sinon lebûcher à la foi aveugle ce sens purement littéral, irrationnel de la parabole, de la doctrine biblique,sans le sens compréhensif vivifiant, qu'elle contient en secret, pour être dévoilé, expliqué à mesure dudéveloppement intellectuel, n'autorise-t-il pas à appliquer à l’église catholique ces paroles del’Evangile selon St Luc.

Malheur à vous docteurs qui vous êtes emparés des clefs de la science, et qui, sans y avoir pénétrévous-mêmes, empêchez les autres d'y entrer. - Et celles-ci du prophète Osée au pharisaïsme de sontemps : Les prêtres sont devenus comme des pièges aux oiseaux, à l'égard de ceux sur lesquels ilsétaient obligés de veiller. Mon peuple périra parce qu'il est destitué de science : ô prêtres : comme vousavez rejeté la science, je vous rejetterai des fonctions de mon sacerdoce.

Et quand on pense aussi à cette exubérance de formes sous prétexte de culte , de cérémonies quiabsorbent le fond, le font perdre de vue, et lui substituent un détail inouï de pratiques dévotes,supplantant ce fond véritablement religieux, consistant dans la recherche et la pratique deprescriptions du sentiment, de la conscience, de la raison, - ne trouve-t-on pas là aussi cepharisaïsme…

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…hypocrite, servant à tromper, asservir et exploiter les simples, contre lequel déjà les prophètes etle Christ ont lancé tant d'invectives. Déjà nous avons cité Osée, citons aussi Isaïe. Dieu dit : qu'ai-jeà faire de toutes vos obligations, l'encens m'est en abomination, je ne puis souffrir vos nouvelleslunes, vos sabbats, et vos autres fêtes ; tout cela n'est qu'iniquité et fainéantise ; assistez l'opprimé,faites justice à l'orphelin, défendez la veuve, et après cela venez et entrons en discussion, quand vospéchés seraient comme l'écarlate, ils deviendraient blancs comme neige. Citons Ezéchiel – « Ilsécoutent vos paroles et ils n'en font rien, parce qu'ils les changent en des cantiques qu'ils repassentdans leur bouche pendant que leur coeur suit leur avarice ; vous êtes à leur égard comme un air demusique qui se chante d'une manière douce et agréable ; c'est ainsi qu'ils entendent vos paroles avecplaisir sans faire néanmoins ce que vous dites.

Et aussi St Paul aux Colossiens. Que personne donc ne vous condamne pour le boire et le manger,ou sur le sujet des jours de fêtes, des nouvelles lunes et du sabbat ; puisque toutes ces choses ne sontqu'une ombre de celles qui devaient arriver, et que le corps et la vérité ne se trouvent qu'en J.C. prenezgarde que quelqu'un ne vous séduise et ne vous fasse perdre le fruit de votre course, par une humilitéaffectée et par un culte superstitieux des anges, s'ingérant de parler avec faste des choses qu'ils n'ontpoint vues, étant enflées par les imaginations d'un esprit humain et charnel _ du même, à Timothée _Enjoignez à certaines personnes de ne point enseigner une doctrine différente de la nôtre, quis'amusent à des fables, etc. . . . au lieu de pratiquer la charité qui naît d'un coeur pur et d'une foisincère, d'une bonne conscience, devoirs d'où quelques-uns s'étant écartés se sont jetés en de vainsdiscours, prétendant être docteurs de la loi, quoi qu'ils n'entendent ni ce qu'ils disent, ni sur quoi ilsdécident… Du même à Timothée. Or l’Esprit dit expressément que dans les temps à venir, quelquesuns abandonneront la foi en suivant des esprits imposteurs et des doctrines diaboliques séduits parl’hypocrisie de certains imposteurs dont la conscience sera noircie de crimes qui interdiront le mariageet l’usage des viandes que Dieu a créées pour être mangées. Fuyez les fables profanes et semblables àdes contes de vieilles.

Citons encore ces paroles de Jésus: - "Aimez votre prochain comme vous-mêmes et Dieu par dessustout. ( C'est à dire le bon, le juste, le beau, le vrai qu'il représente - ( Toute la vie est là. - et à cespropagateurs et exploiteurs de la forme soi-disant religieuse Jésus dit encore : malheur à vous,pharisiens, hypocrites, sépulcres blanchis, beaux au dehors et au dedans pleins de pourriture, lestraitant de race de vipères.

Au fond cet enseignement de la doctrine des prophètes, du Christ, des apôtres, que l'EgliseCatholique prétend donner, continuer, quel est-il ? il se réduit par le fait au pur dogmatisme du senssimplement littéral, figuratif des paraboles, d'une doctrine mystérieuse, secrète, exposée, comme en unlivre cacheté, selon Isaïe, que cette église ne comprend pas elle-même, ce qu'elle avoue naïvementquand elle parle des saints mystères de la religion, au dessus de la raison dit-elle; et qu'en lesdogmatisant elle offre à l'adhésion de la foi aveugle, de la foi seule, béate, sens littéral, superficielpourtant, dont la signification figurée, rationnelle, compréhensive, scientifique, est recommandée parles prophètes à la recherche, à la pénétration du Sage. Le Christ les expliquait en secret à…

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ses apôtres, c'est l'Evangile même qui le dit, ajoutant comme commentaire que la lettre tue quandelle est seule, que c'est l'Esprit qui vivifie. St Paul et naturellement tous les autres apôtres lesexpliquaient aussi graduellement,à leurs adeptes, les initiant par ce que saint Paul appelle du laitd'abord, puis par une nourriture intellectuelle plus solide, les développant progressivement au sensmoral, compréhensif de ce qu’ils appellent le corps spirituel de Jésus.

Cet enseignement purement littéral de la parabole formant doctrine imposée comme dogme parl'Eglise Catholique à des esprits que caractérise le Credo quia absurdium, formulé dans son sein,présente toute la doctrine biblique, toute la doctrine du Christ à contresens, n'inculque dans l'espritqu'un surnaturalisme doctrinal en contradiction avec la raison, avec la science (sans laquelle, disentles proverbes, il n'y a aucun bien à l’âme) mettant même les textes bibliques en contradiction entreeux, faute de les comprendre, en les interprétant. Dans ces conditions de textes introduits, isolés,hiéroglyphiques, comme le dit Isaïe, le livre est cacheté.

Le surnaturalisme de miracles que l'Eglise consacre, veut justifier, en l'extrayant du sens littéraldes paraboles bibliques, a dans la bible même son correctif, dans ce sens naturel explicite que lestextes eux-mêmes indiquant, précisent suffisamment pour qui sait le chercher - ainsi, dans cepassage où l'on montre Jésus dans la barque avec ses disciples, commandant aux vents, arrêtant latempête, il est dit : et ses apôtres étaient émerveillés, parce qu'ils n'avaient pas compris le miracledes pains. Mais un miracle au sens surnaturel n'a pas à être compris, il frappe le sens, on le voit. Cemiracle des pains n'avait donc rien de surnaturel, et il en était de même plus que vraisemblablementdes aveugles, des muets, des paralytiques guéris : au lieu du sens matériel, c'était le sens moral qu'ilfallait entendre, en tenant compte du Langage habituel des paraboles. Et on s'explique alors que lesJuifs qui en étaient témoins, n'y voyant rien de surnaturel, et ne les comprenant pas plus que lesdisciples n'avaient compris celui des pains, en venaient à dire au Christ, « mais comment croire quevous êtes le fils de Dieu ; que faites-vous d'extraordinaire? quel prodige faites-vous ? montrez-nousen un. Et sa réponse est simplement celle-ci : vous demandez un prodige, vous n'en aurez qu'un.Comme Jonas a été 3 jours dans le ventre d'une baleine, le fils de l’homme sera mis à mort et 3 joursaprès il ressuscitera. Et remarquons que cette résurrection exprimée en son langage mystique n'amême pas été montrée physiquement à cette masse de Juifs, car il est dit que Jésus ressuscité ne s'estmanifesté qu'à ses apôtres, ce qui continue le sens mystique des paraboles. Dirons nous encore queJésus en réalité ne se posait nullement comme être surnaturel, car dans ce texte seulement où il parlede la fin des temps, du règne de Dieu à venir, il dit : « quant à la date précise, nul ne le sait, ni lesanges, pas même le fils, mais mon père seul. » Ev. St Marc.

Si le Christ, que l'Eglise présente comme la seconde personne de la trinité, égale à Dieu le Père,avait ce sens surnaturel, au dessus de la nature humaine, à ce titre il devrait donc avoir la scienceabsolue, et la conclusion de ses paroles est qu'il ne l'avait pas, qu'il n'avait alors, comme l'homme,qu'une science progressive, une science de prévision comme la nature humaine le comporte purementet simplement. En déduction du même principe, …

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s’il n’avait pas la science absolue, il n'avait pas non plus la puissance absolue, la puissance desmiracles au sens surnaturel ; sa parole même en témoigne. Et ce passage d'un autre évangile, St Luc,confirme encore qu'il ne se posait pas comme un être surnaturel, au-dessus de ce que la naturehumaine comporte. Ce passage dit : et Jésus croissait en âge, en sagesse, et en grâce devant Dieu etdevant les hommes. - n'est-il pas dit aussi (Ep. St Paul aux hébreux) : que Jésus nous était en toutsemblable, mais sans aucun péché : il n'avait donc, d'après sa propre doctrine, que la perfectionprogressive comme le comporte la simple nature humaine. Remarquons encore que Jésus dans le fondde sa doctrine se posait comme un type de réalisation idéale, de perfection acquise, nous identifiant deplus en plus avec la nature divine, comme sentiment, morale, intelligence, sagesse, selon ce quecomporte cette nature humaine comme modèle à suivre alors, et vouloir en faire un être surnaturel,c'est détruire ce principe de fond en comble, car alors on est entraîné à lui dire : - mais pour être ce quevous êtes, vous avez une force surnaturelle que nous n'avons pas, nous ne pouvons alors vous imiter,nous restons ce que nous sommes ; tandis que Jésus modèle à suivre, étant absolument homme commenous et comme il le disait simplement, le premier entre plusieurs frères, l'objection tombe d'elle- même.

Du reste dégagée de ce surnaturalisme hors de la réalité vraie, et qui amoindrirait encore son mérite,la grande figure du Christ n'en reste pas moins magnifique de beauté, de grandeur, comme le plus beautype historique d'idéal réalisé, d'idéal de réalisation progressive, indéfinie, en identification de lanature divine, indiqué, affirmé, offert en destinée aux aspirations de la nature humaine. Qu’importequ’il soit Jésus du mythos né 150 ans après le Jehoshua talmudique, ou ce Jehoshua lui-même.

Cette erreur ou ce Mensonge de date et de nom n’enlève rien au texte biblique.Le traducteur du livre G. Massey, Mr Souri, s’écrie – citons le-

Il résulte du précédent examen que le Jésus des Evangiles est introuvable historiquement.Au lieu d’un fils de Dieu, d’un Dieu même, on trouve un mage sorcier, Jehoshua, fils de Paudira,

qui a été lapidé, puis étalé sur un arbre, vers l’an 70 avant notre ère, et que les récits légendaires surces faits et gestes ont fait amalgamer avec les mythes égyptiens d’Osiris et d’Horus pendant lesannées troublées qui ont précédé et suivi la chute de Jérusalem.

La déchéance est considérable et d’une portée qui va loin »Où est la déchéance, qu’elle en est sa portée ? Je répondrai bravement et

insolemment. Il n’y a pas de déchéance, et la portée en est tout à fait nulle.En effet. J’ai devant moi un superbe tableau la Ronde de nuit. Des imposteurs l’attribuent à

Rembrandt.Surgit un Egyptologue (Ô les critiques, ô les savants !)…

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… qui nous prouve par A+B que Rembrandt de telle époque n’existe pas, qu’il est unmythe et que l’auteur du tableau serait un Tartenpion quelconque né 150 ans avant. Etque ce Tartenpion n’était pas peintre mais tout simplement un Grec faisant des toursde carte à Amsterdam dans les cafés et les lupanars. Et le tableau du coup devient uneaffreuse croûte inférieure à celle du Pecq, parce que……la portée de cette découverteest considérable...... ! !Cette seule comparaison grotesque, ridicule, suffira pour détruire de fond en comble cetaffirmatif jugement de monsieur Souvie, jugement qui serait spécialement RidiKule s’iln’était irréfléchi « je pense ». Car j’estime ses bonnes intentions. - Je vois ce qu’il vise –moi aussi je vise quelque chose –Lui vise le masque, tandis que je vise l’acteur qui se cache derrière.

Suite du commentaire.Si par ces textes, ces raisons, nous pouvons déjà apercevoir que le Christ ne doit pas êtreconsidéré comme un être surnaturel, même comme il se présente lui même, et que ce quel'on appelle ses miracles, ne doivent être entendus qu'au sens moral et non pas matériel,eu égard au langage des paraboles usité dans la bible ; il est cependant des textes,comme celui de St Mathieu énonçant l'enfantement de Jésus par sa mère vierge, quisemblent affirmer catégoriquement ce caractère surnaturel, que notre raison cependant,se fondant sur les lois de la nature, se refuse à admettre. Ce texte au premier abord, enadmettant la bonne foi de l'Evangéliste, semble difficile à expliquer, mais comme il enest des autres textes de même nature, on trouve à côté dans la bible même le correctif,l’indication du vrai sens rationnel alors. Ainsi tout d'abord, si Jésus est né d’une viergesans cohabitation de celle-ci avec son mari, comment de ci - de là appelle-t-onfréquemment Jésus le fils de l’homme ? et lui même aussi se désigne ainsi. S'il est néd'une vierge, il ne peut être le fils de l’Homme, c'est contradictoire. Le type de l'hommesi l'on veut…

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…mais fils de l’homme a un autre sens et intentionnel ; on peut le croire. -Et quand on parle également dans les évangiles, de ses frères, de ses sœurs, de ses frères mêmes

(à ce que dit l'Ev St Jean) qui ne croyaient point en lui : cela donne déjà à réfléchir. Comment samère qui pour garder sa virginité ne cohabitait pas avec son mari, a-t-elle néanmoins cohabitésuffisamment avec lui pour avoir après tous ses autres enfants ? comment ayant enfanté Jésusd'une façon surnaturelle, initiée par le St Esprit à sa destinée prodigieuse, n'ait-elle pas initié sesautres enfants à cette destinée, de façon à leur inspirer cette croyance en lui qu'ils n'avaient pas.Selon St Jean ? - Ce n'est pas tout - Qu'est-ce que cette parole de Jésus quand on lui annonce : voilàvotre mère et vos frères « Qui appelez-vous ma mère et mes frères » dit-il ? Et montrant sesdisciples, il ajoute : voilà ma mère et mes frères. Comment renierait-il ses frères, non pas seulementceux-ci, mais sa mère elle-même, s'il entendait qu'au sens spirituel, comme il le dit, quiconque fait lavolonté de Dieu est par là même son frère, sa soeur et sa mère, et qu'en ce sens ses apôtres sont samère et ses frères ; cela ne doit pas exclure la filiation au sens surnaturel divin de sa mère. Et cettematernité surnaturelle de Marie à l'égard de Jésus n'est-elle pas contredite par ces paroles que celui-ci lui adresse (Ev St Jean) - Femme, qu'y a-t-il de commun entre vous et moi ? est-ce qu'il n'y a paslà une indication manifeste que le texte de St Mathieu sur cet enfantement surnaturel de Jésusimplique encore, comme tant d'autres un sens caché de parabole ? dont il faut chercher lasignification mystérieuse, comme y engage en général l'ecclésiastique, et justement on trouve d'autrestextes qui mettent sur la voie du véritable sens, mais alors naturel, rationnel –

Par ex : quand Jésus dit à Nicodème (Ev St Jean). Nul ne verra le royaume des Cieux s'il nenaît de nouveau. Celui-ci lui répond: « Comment un homme déjà né peut-il rentrer dans le ventre desa mère pour renaître ensuite ? et Jésus réplique _Vous êtes docteur et vous ignorez ces choses? noussavons ce que nous disons, nul ne verra le royaume des Cieux s'il ne naît de nouveau. Ce qui est néde la chair est chair, ce qui est né de l'Esprit est Esprit » et alors ce qui Esprit n'est pas né de lachair, c'est clair. II y a donc selon Jésus deux naissances, celle du corps qui naît de la chair, et celledu moral, de l'intellectuel qui naît de l'Esprit ; celle qui naît de la chair et qui fait l'enfantement ducorps avec pur instinct animal, et celle qui naît de l'Esprit, qui fait l'enfantement moral, spiritueldu fils de Dieu. Et c'est en ce sens qu'il dit que ses apôtres étaient sa mère et ses frères. C'est dureste ce que St Paul dit aux corinthiens. Ce qui se met en terre comme une semence, c'est un corpsanimal, mais il y a aussi un corps spirituel, comme il est écrit : le premier adam a été créé avec uneâme vivante, le second adam a été rempli d'un esprit vivifiant (aux éphésiens) Si vous êtes lesdisciples du Christ dépouillez-vous du vieil homme, renouvelez-vous dans l'intérieur de votre âme,…

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…revêtez-vous de l’homme nouveau qui a été créé selon Dieu dans une justice et une saintetéfondées sur la vérité.

Cette loi qui fait qu'après l'enfantement du corps animal, naissant de la chair, vientl'enfantement naissant de l'esprit, qui fait la transformation de l'âme humaine par le moral, lesentiment, l'intelligence, la sagesse, en l'Etre nouveau qui est le fils de Dieu, cette loi doits'appliquer à tout, à Jésus lui-même, et alors comme corps primitivement animal, il est né de lachair par la cohabitation de sa mère avec son mari. Mais comme être moral, bon, juste,intelligentrempli de Sagesse il est né de nouveau, d'une naissance effectuée au sein de son âme ; il est né àcette nature de fils de Dieu, qui est le fond de cette doctrine.

A cette nature énoncée déjà par Moïse disant dans la genèse : Dieu créa l'homme à sonimage, non corporelle évidemment, disant encore qu'après le déluge, les fils de Seth qui suivaientDieu, furent appelés les enfants de Dieu, les autres, enfants des hommes, ajoutant : Et les fils deDieu s'étant unis aux filles des hommes, engendrèrent les géants (au sens spirituel, bien entendu) -c'est encore dans ce sens que Jésus disait aux Juifs qui lui reprochaient, étant homme, de s'appelerfils de Dieu : n'est-il pas écrit dans votre loi : j'ai dit que vous êtes des Dieux : Si donc elle appelleDieux ceux à qui cette parole s'adressait, direz-vous que je blasphème, moi que mon père asanctifié. Ev de St Jean –

Et c'est au cours de cet enfantement nouveau qu'il est dit (St Luc) Et Jésus croissait en âge ensagesse et en grâce devant Dieu et devant les hommes. - Jésus donc, en se disant fils de Dieu, nel'entendait nullement au sens surnaturel, mais à ce sens moral intellectuel, sage, comme pour tousles hommes appelés à être comme lui enfants de Dieu ( note marginale : Et tous les hommespeuvent devenir des Boudas) et toute sa doctrine, comme enseignement, et en se donnant commemodèle, comme type réalisé par lui était de faire naître et développer cette nature supérieure nousidentifiant avec Dieu, comme la nature humaine le comporte, au sens indéfiniment progressif, et sesubstituant à notre nature primitive de pur instinct animal.

Et alors quand il est dit qu'il est né d'une vierge et du St Esprit, ce n'est pas dans le seinmatériel d'une femme que cet enfantement s'est produit, c'est à cette seconde naissance, dans l'âmehumaine, que s'est réalisé l’enfantement du fils de Dieu, engendré alors en prenant l'enfantementcorporel comme symbole matériel, par l'accouplement combiné d'une âme vierge de toute influenceviciée du dehors, d'une âme inspirée du sentiment primitivement instinctif du bon, du juste, dubeau, du vrai, de l'idéal dans toute sa pureté, avec le St Esprit fécondant de l’intelligence danstoute sa pureté aussi, dans son inspiration éminemment pénétrée du sens scientifique des choses,du bon sens judicieux, de l'intelligence compréhensive remplie de Sagesse.

Et ce sens n'est-il pas confirmé par le prophète Zacharie disant - Ils boiront et seront enivrésde son Esprit comme du vin, car qu'est-ce que le Seigneur a de bon et d'excellent à donner à Sonpeuple, sinon le froment des élus et le vin qui fait germer les vierges, non pas une, mais les vierges.

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… Et encore l'Ecclésiastique : écoutez germes divins, enfants qui êtes saints.Ce langage figuré, symbolique, de paraboles, matérialisant l'idée pour la rendre plus sensible,

usité dans la bible, a parfois une forme exagérée, affectant un surnaturalisme qui déroute, comme onle voit dans le récit par St Mathieu de l'enfantement du Christ; mais alors il y a intention de voilerle fond de la pensée jusqu'à la dissimuler, comme l'énoncent clairement ces paroles du Christ auxapôtres lui demandant le sens d'une parabole : pour vous il est donné de connaître le mystère duRoyaume de Dieu mais pour les autres, il ne leur est proposé qu'en paraboles, afin qu'en voyant ilsne voient pas, et qu'en entendant ils ne comprennent pas comme l'indiquent en outre les textesavoisinants, la déclaration d'Isaïe, que les paroles des vrais prophètes seront comme les paroles d'unlivre cacheté, et qui en sont le commentaire _ Ne dites pas vous autres, ajoute-t-il, c’est ici uneconspiration, car c'est de ce peuple qu'elle vient : que le Seigneur soit votre terreur et votre crainte,et il deviendra votre sanctification, au lieu qu'il sera une pierre d'achoppement pour les deuxmaisons d'Israël, un piège et un sujet de ruine pour ceux qui habitent dans Jérusalem. Plusieursd'entre eux se heurteront contre cette pierre et ils tomberont et se briseront, ils s'engageront dans lefilet et y seront pris. Tenez secret cet avertissement, mettez le sceau sur ce que je vous ordonne enfaveur de mes disciples : n'est-ce pas ce même Esprit qui inspire le prophète X disant : voici ce quedit le Seigneur contre ceux qui séduisent mon peuple et le déchirent à belles dents ; ils prêchent lapaix et si quelqu'un ne leur donne à manger, ils se préparent à lui faire la guerre ; c'est pourquoi ilsn'auront qu'une nuit sombre au lieu des visions, et que des ténèbres au lieu des révélations : ceux quiavaient des visions seront confus et couverts de honte, ils se cacheront le visage lorsqu'il paraîtraque Dieu aura été muet pour eux. On bâtit Sion du sang des innocents et Jérusalem du fruit del'iniquité: les arrêts sont rendus pour des présents, c'est par intérêt, pour de l'argent, que ses prêtresenseignent, que ses prophètes devinent, et après celà ils se reposent en disant : le Seigneur n'est-ilpas au milieu de nous, nous serons à couvert de tous maux : c'est pour cela que vous serez cause queJérusalem sera réduite en un monceau de pierres. _ La dissimulation du fond de la doctrine dans lemystère de la parabole semble indiquée là comme une précaution pour n'en laisser la révélation qu'àla pénétration ou à l'initiation privilégiée de ceux qui en sont dignes, aux vrais disciples et pour lagarantir contre l 'exploitation des faux docteurs , des pharisiens hypocrites, qui sans souci du vraisens des choses, se contentant de la surface favorable à leurs visées intéressées, s'enferment dans lesens littéral, de surnaturalisme absurde de cette parabole, s'y empêtrent comme dans un filet jusqu'àce que l'heure de les démasquer et couvrir de confusion arrive. - Ce que le Christ a fait déjà en sontemps lorsqu’il chassa les marchands…

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…de religion du temple ; qui est prévu, annoncé aussi pour les temps à venir, lors de larégénération ou résurrection générale de l’Esprit du Christ mis à mort, quand les vrais disciplesdécimés, disparus, reparaîtront, faisant revivre la vraie doctrine dénaturée en leur absence, etprépareront, inaugureront par elle, selon la bible , le règne de Dieu définitif.

Mais cet usage de la parabole, pour peu qu'on s'y habitue en se pénétrant de l'Esprit général dela bible et en s'inspirant toujours du sens vrai, juste, philosophique, rationnel des choses, qui est lefond de son enseignement véritable, mais dont ont peu de souci les exploiteurs de religion ; cet usagede la parabole tel qu'il est pratiqué avec clairvoyance dans son ensemble, laisse facilement deviner lapensée véritable qu'elle exprime.

A part ces textes mystérieux, vraiment énigmatiques, il en est bien que sous forme symbolique,de suffisamment clairs pour qu'à première vue on en saisisse le véritable sens : ainsi ceux quiexpriment la parabole de la cène, assurément au dessus de toute ambiguïté. Le Christ dit souventdans son enseignement : soyez parfaits comme votre père céleste est parfait : il se pose comme le typeréalisé, expressif, de ces perfections qui nous assimilent progressivement à la nature divine. Senommant aussi fils de Dieu, il dit : « Je suis le pain de vie ; qui me mange aura la vie éternelle » etpour que le sens soit bien saisi, la bible fait dire aux apôtres « Cela est difficile de vous manger », cequi le met à même de répondre « La chair ne sert de rien, ce que je vous dis est esprit et vie ; ce quiexplique bien que c'est dans les sens de l'esprit qu'il faut l'entendre, que ce sont ces perfections qu’ilreprésente comme type de réalisation dans l’âme humaine, réalisées par lui comme exemple, qu’ilfaut réaliser en soi et qui sont le pain divin de la vie. Quand il fait la cène avec ses disciples,symbolisant le pain, le vin, qui mangé, bu ensemble en réunion de convives forment une même chair,un même sang ; symbolisant cette formation charnelle de nous-mêmes avec cette formationspirituelle des qualités des perfections morales, intellectuelles, sages, divines, de notre âme.

Quand Christ et apôtres en réunion pascale, inspirés des mêmes sentiments, des mêmes idées,des mêmes tendances qu’il leur inculque, mangent ainsi spirituellement la même nourriture, il dit enprenant le pain et le vin comme symbole « mangez ceci comme ma chair, buvez ceci comme mon sangen mémoire de moi », avec ce sens « Je serai en vous et vous en moi._

Tout ceci n'est-il pas éminemment rationnel, compréhensif, Antisurnaturel ?Pendant les premiers siècles le monde chrétien, ses docteurs les plus éminents, les plus autorisés

l'ont ainsi compris. Quand quelques-uns, d'esprit toujours porté, habitué à ne voir dans les chosesque le sens matériel littéral, s'avisaient de formuler ce sens, l'ensemble général, y compris un papemême (le pape Gélase de la fin du 5ème siècle), affirmait le caractère seulement symbolique du painet du vin dans la communion pascale.

Comment aujourd'hui l'Eglise catholique a-t-elle modifié, dénaturé ce sens si simple, sicompréhensif ? en lui substituant ce dogme irrationnel, d'un surnaturalisme absurde, de latranssubstantiation par la vertu transsubstantiatrice du prêtre, dans la consécration en vertu dequoi le pain, le vin consommés par le prêtre, l'hostie absorbée par les communiants, lors de lacommunion, ont changé de substance, sont devenus en réalité la chair, le sang, le corps et l'âme duChrist ; toute sa personnalité corporelle et divine.

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Si quelqu'un, dit le concile de trente, (Canon 1 - en 1545) Si quelqu'un nie que le sacrement del’eucharistie ne contient vraiment, réellement et substantiellement le corps, le sang avec l'âme, ladivinité de notre Seigneur J.C., et par conséquent le Christ tout entier, mais dit qu'il n'y estprésent qu'en figure ou en puissance, (Qu'il soit anathème).

Et quand, à l'objection formulée, (comment le Christ peut-il être ainsi multiplié en personnepar le nombre incalculable des communiants ?) des théologiens subtils viennent ensuite répondreque cela s'effectue par irradiation, irradiation intégrale, contenant la substance du Christ, saforme, sa vie, toute sa véritable chair, pleine de son âme et du verbe divin, on pourrait répondredéjà que cette irradiation pourrait s'entendre dans le sens des symbolistes, le pain, l'hostieentendus comme figures, avec la réalisation des qualités morales, spirituelles du Christ, irradiéesainsi dans l'âme des communiants, mais non dans le sens du corps et de l'âme du Christ, absorbéesen substance, comme le formule l'Eglise.

Mais devant cette interprétation irrationnelle dogmatique, subtile mais absurde, des textessi compréhensifs d’eux mêmes, on se demande si c'est l'infatuation inepte, ou l'astuce pharisaïquevoulant asservir des esprits déformés _ qui l'inspire : on pense aussi forcément à ces conseils de StPaul : d'avoir à nous garder des prétendus docteurs cherchant à nous séduire par une humilitéaffectée et un culte superstitieux des anges, qui s'amusent à des fables, au lieu de pratiquer lacharité avec un coeur pur, une foi sincère, et une bonne conscience, et qui se jettent en de vainsdiscours, parlant avec faste des choses qu'ils n'ont point vues, prétendant être docteurs de la loi,quoiqu'ils n'entendent ni ce qu'ils disent ni sur quoi ils décident. Mais ce surnaturalisme,irrationnel, dogmatique, qui au fond est complètement en dehors de la vraie doctrine du Christ, quila dénature et annihile, et que ne la comprenant pas, l'église adopte, développe à outrance ; cesurnaturalisme favorisait trop toutes les perfidies, toutes les influences abusives, toutes lestendances de maîtrise, d’asservissement et d'exploitation du pharisaïsme sur les Simples pour nepas être conservé, consacré définitivement et exploité dans toute sa portée ; et alors à mesure quele pharisaïsme s'infiltrant dans l'église chrétienne primitive l'a envahie, absorbée, cesurnaturalisme dogmatique, débordant de miracles, inculqué aux ignorantscrédules timorés, adéveloppé en eux toutes les superstitions, établi le culte idolâtre des reliques, le culte pharisaïquedes pratiques dévotes supplantant le vrai culte intérieur et fécond de la conscience et de l’Espritintelligent du sage, et a puissamment contribué à fonder cette théocratie catholique, faited'hypocrisie, d'ambition, d'orgueil, d'astuce, d’ineptie, d'impostures et de violences, qui a su mêmeséduire et fasciner les meilleurs, les plus intelligents, les élus, pour utiliser leur prestige et quidepuis si longtemps trône impérieusement sur les peuples, les rois, les empereurs, asservis,exploités, se donnant même la vaniteuse satisfaction de les tenir humiliés à ses pieds, dans lebaisement de la pantoufle, à la façon des pachas, des potentats païens, et on pourrait…..

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… dire en moquerie du Christ lavant lui-même les pieds de ses apôtres en leur disant : « Quecelui d'entre vous qui voudra être le premier soit votre serviteur, agisse ainsi fraternellement.

Qu'importe que certaines bonnes natures, plus ou moins supérieures même, abusées ou parfaiblesse, se soient incorporées, adaptées dans cette Eglise, si son caractère vicié, malfaisant,prédomine toujours en principe et en fait, cette union du reste ne faisant que lui donner uneconsécration d'apparence, mais illégitime, comme lorsqu'elle s'identifie avec les premiers apôtres dontelle est l'antipode.

Cette théocratie affectant sans cesse et toujours le simulacre du Christ, alors qu’en réalité ellen’enseigne et pratique qu’à rebours la doctrine qu’elle ne comprend même pas, n’y voyant que le senslittéral de la parabole, qu’importe son allure de surnaturalisme irrationnel, antiscientifique,absurde, qu’alors elle est entraînée à prescrire en dogme à la simple foi aveugle au lieu d’y chercher,pénétrer, le sens scientifique, figuré, rationnel, le seul vrai, l’esprit explicite, vivifiant, commel’Ecclésiastique y invite le sage, qu’alors elle pourrait expliquer à l’intelligence de ses adeptes commedoctrine scientifique ce qui serait tenir compte du texte biblique : « Là où il n’y a pas de science, iln’ y a aucun bien à l’âme » ce qui était du reste la pratique des apôtres ; son procédé à ellel’assimilant en somme à qui ignorent une langue, latine ou grecque par ex. prétendaient l’enseignernéanmoins par prononciation seule des mots, du sens verbal des livres de cette langue, sans donnerla traduction. Cette théocratie audacieuse arrête la controverse en dogmatisant à tort et à travers,s'imposant violemment, se disant interprète autorisé, privilégié, infaillible de Dieu, en dissimulationimpudente de son ignorance, de son usurpation de fonctions, de l'injustification de ses titres.

- Examinée de près, elle se caractérise suffisamment comme appréciation de faitssignificatifs - Par cette prétention à la fois hautaine et naïve, mise en relief par la prétendueinfaillibilité du pape condamnant comme hérésie le mouvement de la terre sur elle-même et autourdu Soleil, démontré par Galilée et reconnu aujourd'hui partout.

- Elle se dévoile de même par le culte pharisaïque des pratiques dévotes et idolâtriquesdes reliques, et l'abus des croyances superstitieuses, dont un ex saillant (en marge Exemple saillant)

est l'hostie devenue le corps et l'âme du Christ par la vertu transubstantiatrice et surnaturelle duprêtre, ce corps et cette âme multipliés ainsi par le nombre indéfini des communiants.

- Elle se fait apprécier encore par l'exemple des crimes et moeurs inavouables d'un Borgiapape, pour ne citer que celui-là.

- Par la fainéantise et la saleté pouilleuse volontaire d'un saint Labre, donné en ex.d'abnégation sainte, canonisé par l'Eglise, qu’importe en précepte d’autorité supérieure de la bible ;ne soyez pas plus sage qu’il ne faut de peur que vous n’en deveniez stupide, mais évitez de faire lemal. (Ecclésiaste) -

- De même par le cynisme impudent d'un concile condamnant Jean Huss au bûcher, aunom du Christ qui cependant réprouvait la violence en prêchant d'exemple jusqu'au martyre.

- Par les massacres des croisades, des albigeois, les violences sans nom de l’inquisition,ses cent mille bûchers, et le régime diabolique du ….

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….du moyen âge duquel la société moderne s'est échappée, affranchie avec tant de peine, sansoublier la vente scandaleuse des indulgences d'où est sorti d'indignation le protestantisme.

Et à la suite de cet enfer du moyen âge on peut citer comme arrière fait, comme dernier nécaractéristique de cette matière immonde et survivance, le Jésuitisme dont Pascal en sesprovinciales a si bien dévoilé et flétri les doctrines artificieuses, immorales; le Jésuitisme dominantaujourd'hui tout le clergé jusqu'à Rome même, et dont la formule d'asservissement toujours couvé,d'obéissance sicut ac cadaver au supérieur (ou confesseur, directeur en soutane en espérance) est ences temps modernes encore enseignée dans les séminaires, tous envahis par la corporation,enseignée non à des enfants mais à des hommes appelés à diriger comme prêtres, - avec cecommentaire, à qui objecte que ce supérieur peut nous entraîner à faire le mal : « Vous devez obéirau Supérieur dans tout ce qu'il vous semblerait contraire à votre raison, parce qu'alors vous neseriez pas responsable, mais lui seul. - Le dogmatisme prétendu infaillible s'imposant à la foiaveugle, béate, se terminant par l'obéissance sicut ac cadaver au directeur en soutane, avec cetteirresponsabilité prétendue de l'obéissant, voilà qui résume l'enseignement de l'Eglise catholique.

Mais ce rôle pharisaïque de l'Eglise Catholique est prévu, signalé, caractérisé par les textesbibliques, évangéliques mêmes. - Daniel déjà à l'avance annonce pour l'avenir cette puissancemalfaisante qui, dit-il, profanera le sanctuaire du Dieu fort, le souillera par un culte profane, feracesser le sacrifice perpétuel, mettra dans le temple l'abomination de la désolation, tourmentera patl'épée, par les flammes, par la captivité, par des brigandages, ceux qui seront savants parmi lepeuple et l'instruiront.

Citons maintenant St Pierre : « Or sachez, dit-il, que dans la suite des temps, il viendra destemps fâcheux, car il y aura des hommes, traîtres, enflés d'orgueil, qui auront les dehors de la piétésans ce qu'elle a de solide ; or, comme il y a eu de faux prophètes , il y aura aussi parmi vous defaux docteurs ; l' avarice les portera à vous séduire par des paroles artificieuses pour faire de vousune espèce de trafic, mais leur condamnation prédite depuis longtemps s'avance à grand pas –

St Paul : « Ne croyez pas que le jour du Seigneur soit proche, il faut qu'avant l'apostasie soitarrivée à son comble, et qu'on voie paraître l'homme de péché qui ira jusqu'à s'asseoir dans letemple de Dieu, comme s'il était Dieu, voulant lui-même passer pour Dieu ; et le mystère d'iniquitése forme dès à présent, attendant seulement que celui qui empêche maintenant que cet homme nevienne soit lui-même ôté de ce monde, alors se découvrira l'impie qui viendra accompagné de lapuissance de Satan, avec toutes sortes de signes et de prodiges trompeurs, jusque-là séduire les élusmêmes, avec toutes les illusions qui peuvent porter à l'iniquité ceux qui n’ont pas dans le cœurl’amour de la vérité. - Et dans l'Ev. de St Mathieu, Jésus….

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Ici débute le cahier supplémentaire collé dans « Noa Noa » et « Diverses Choses »

…..parlant sur le même sujet ajoute : « Quand vous verrez l'abomination de la désolation préditepar le prophète Daniel, être dans le lieu saint, que celui qui lit entende bien ce qu'il lit, que celui quisera sur le toit ne descende pas pour emporter quelque chose de sa maison, et que celui qui sera dansles champs ne retourne point prendre sa robe, que celui qui sera dans la Judée fuit sur lesmontagnes, l'affliction de ce temps sera si grande qu'il n'y en a pas eu de pareille depuis lecommencement du monde. - alors, après ce temps viendra l'avènement du fils de l'homme comme unéclair qui sort de l'Orient, paraît, illumine jusqu'à l'Occident, - ainsi sera l »avènement du fils del'homme.

- Remarquons à ce sujet ce que dit St Luc Ev.- Le Royaume de Dieu ne viendra pas avec unéclat qui le fasse remarquer et on ne dira pas, il est ici, ou il est là, car dès à présent le royaume deDieu est au milieu de vous. - Ce qui indique encore que cette résurrection du Fils de l'homme, cetterésurrection des morts sortant de leurs sépultures énoncée comme devant venir à la fin des temps, nedoit pas arriver avec ce sens théâtral, surnaturel, frappant les sens, qu'enseigne toujours de mêmed'après le sens littéral, l'Eglise catholique, mais doit être entendue dans ce sens moral, naturel,rationnel, expliquant tant d'autres textes.

- L’Eglise catholique comme doctrine, comme pratique représente cette apostasie pharisaïquesignalée par la bible, comme l'expression significative de l'antéchrist, dans la fausse voie desurnaturalisme d'abord et la suite où elle s'est engagée, où elle se trouve enveloppée, empêtrée, prisecomme dans un filet, et selon l'expression biblique qui semble employée à son intention, dont elle nepourra sortir qu'à sa confusion dévoilée, démasquée à son heure, conspuée par tous. Lorsqu'au sortirde cette nuit horrible du moyen âge, d'abomination de désolation, les penseurs inspirés du bon, dujuste, du beau, du vrai, se sont d'entraînement éloignés, sans vouloir retourner, regarder en arrière,sans vouloir même garder une forme, un vêtement de cette église empestée ; faisant table rase detoute tradition antérieure, d'où qu'elle vînt, résolus à tout soumettre désormais au contrôlesupérieur de la raison pure, de la compréhension, de la science ; ils ne faisaient que suivre d'instinctce conseil biblique de fuir sur les montagnes et s'asseoir ainsi sur les principes les plus éminents, del'intelligence, de la science. Et c'est alors que s'est produit d'eux cette étincelle, cette propagationlumineuse, immense de la science qui aujourd'hui d'occident en orient, illumine tout le mondemoderne d'une façon déjà si saisissante, si prodigieuse d'effets, annonçant à l'avance par ce signeéclatant l'avènement prochain du fils de l'homme, l'humanité nouvelle en régénération, enrésurrection.

C'est là un signe des temps qu'on peut interpréter dans le sens du texte biblique.mais ce n'est pas encore l'avènement du fils de l'homme, du fils de Dieu dans sa gloire.

Pour que l'humanité nouvelle sorte régénérée de sa tombe , de sa barbarie animale, que lessépulcres se brisent, la résurrection humaine s'accomplisse en témoignages sensibles, visibles,palpables, indéniables, attestant l'avènement triomphant,……

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….définitif, plein de gloire et de majesté du fils de l'homme, du fils de Dieu, comme type idéalréalisé dans l'humanité toute entière, il faut que les conditions de cette régénération entière, de cetterésurrection s'accomplissent aussi.

Pour qu'un enfantement se produise, il ne suffit pas d'un homme ici, là une femme, il faut commeon dit vulgairement se marier. De même, pour que la régénération, la résurrection humaine,humanitaire s'accomplisse, il faut que l'être nouveau, qui transforme la nature animale primitive dufils de l'homme en nature divine du fils de Dieu, soit produit, engendré dans l'âme humaine, dansson intégralité de spiritualité organique, ne fut-ce que comme germe simple, germe divin, n'ayantplus qu'à s'évoluer progressivement en perfections comme le comporte la nature humaine il faut quecet être nouveau se produise, s’engendre dans l'âme humaine en conformité de sa conditionnécessaire, de sa loi, par l’union de combinaison coopérative, de fécondation mutuelle des élémentsféminin et masculin en caractérisant spécialement la spiritualité organique de l’âme humaine commeelle se comporte intimement il faut que l’âme humaine en sa virginité de sentiment naturel, de bonnevolonté, d'inspiration pure du bon, du juste, du beau, du vrai, soit fécondée par le saint esprit dubon sens, judicieux, compréhensif, scientifique, sage, de l'intelligence purement inspirée aussi, et quecette fécondation réciproque du sentiment et de l'intelligence, en sa simplicité vulgaire de germe, ouen son développement accentué de forte nature, réalise en l'intimité de l'âme cet être nouveau despiritualité organique, cette naissance nouvelle sans laquelle, disait le Christ, « Nul ne verra leroyaume de Dieu, nul ne sortira, peut-on dire, de sa condition inférieure plus ou moins expressive denature animale : énonçant ainsi la loi générale régissant la nature humaine toute entière, luicompris.

Il ne suffit pas, d'une part, d'être des hommes de bonne volonté, de bon sentiment, portés aubien, mais inéclairés du bon sens, de la science compréhensive, de la sagesse philosophique ; ou,d'autre part, des hommes intelligents, plus ou moins érudits, savants, mais insouciants du bon, dujuste, de cette inspiration supérieure, philosophique du sage ; en ces deux conditions inverses,d'inspiration isolée en divorce, la stérilisation s'effectue des deux parts, les déviations mortelles del'âme se développent et l'enfantement de spiritualité organique de l'être divin, de perfectionintégrale de ce que la nature humaine comporte et peut développer indéfiniment, avorte.

L'inaptitude et l'indifférence mutuelle, pour concourir solidairement aux prescriptions justes etscientifiques de rénovation sociale, de régénération humanitaire, correspondant aux fins de notredestinée, s'accentuent en leur sens mortel et peuvent retarder plus ou moins longtemps, faire avortercette régénération humanitaire prévue par les hommes bibliques, qualifiée par eux de règne de Dieuet……

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…..qu'appellent toutes nos aspirations de progrès et d'idéal.Qu'à cette époque de transformation humanitaire nous soyons à une phase de transitionassimilable quelque peu à la situation de Jacob fuyant Esaü et combattant l'ange qu'il nereconnaît pas. Nous - fuyant le pharisaïsme catholique et combattant dans les ténèbresinsuffisamment dissipés, le Christ méconnu, inapprécié dans son vrai sens par défigurationantérieure; il n'en est pas moins vrai, que notre régénération complète, notre résurrection d'entreles morts a besoin pour s'accomplir d'apprécier dans son vrai sens naturel, rationnel le Christ et sadoctrine correspondant si exactement et d'un façon grandiose même, aux inspirations idéales etscientifiques de notre nature, altérée de progrès indéfinis, correspondant aux conceptions les plusélevées de notre destinée ; a besoin d'en suivre la voie ainsi reconnue comme régénération,transformation progressive pour tous sur ce type individuel de réalisation historique étincelantd'idéal.

La force naturelle des choses en sa logique, nous y entraîne du reste, nous y amèneinévitablement par la compréhension scientifique, philosophique, des choses, de plus en plusdéveloppée par l'amour du progrès et l’appréciation de ses avantages de plus en plusprépondérants.

Nous sommes sans doute à ces temps d'évolution scientifique prévus par la bible lorsqu'elle dit :rien de ce qui est dissimulé ne restera caché et ce qui se dit aujourd'hui en secret à l'oreille sera unjour prêché sur les toits. (Ev. St Luc) En face de ce problème toujours posé Qui sommes-nous, d'oùvenons-nous, où allons-nous? Quelle est notre destinée idéale, naturelle, rationnelle? et quelles ensont les conditions de réalisation ou la loi, le régime d'accomplissement en sens individuel ethumanitaire? problème qu'en ces temps modernes, l'esprit humain a quand même besoin de résoudrepour voir clair dans sa voie, marcher d'un pas sûr vers l'avenir et ne pas trébucher, dévier, reculeren arrière; sans nous départir de ce principe sage de faire table rase de toute tradition antérieure,de tout soumettre au contrôle compréhensif, scientifique, philosophique, de sonder, envisager enface pour la comprendre, la nature entière, dans tout ce qu’elle comporte, sans restrictionquelconque ; il importe pour ne rien négliger de ce qu'implique ce problème de la nature et de nousmêmes, de considérer sérieusement, ne serait-ce qu'à titre d'indication, cette doctrine du Christ enson sens naturel et rationnel qui, ainsi dégagée des voiles qui la masquaient, dénaturaient,apparaît dans sa simplicité vraie, mais aussi pleine de grandeur, avec une projection de lumière siintense sur la solution du problème de notre nature et de notre destinée _ (Ceux qui se sontignoramment dévoués aux seules cérémonies de la religion, dit le Véda, sont tombés dans d'épaissesténèbres.

Ce texte indique que déjà dès la plus haute antiquité dans la religion brahmanique des hindous,comme dans celle des Juifs, il y avait en contradiction le fond rationnel, philosophique, vraimentreligieux, bienfaisant, avec la forme et les pratiques dévotes, décevantes, exploitées par leshypocrites de religion, qui, se contentant de la surface….

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…. des choses suffisantes pour eux, se préoccupaient peu du fond philosophiqueincompris d'eux, qu'à coup sûr, en leur ignorance, ils enseignaient à leur manière en sensdénaturé.- Exploiteurs de religion d'alors, pharisiens, jésuites, c'est tout un, sous desnoms différents, ce sont les mêmes hommes qui sans convictions aucunes, avec lesmêmes appétits, les mêmes ambitions, les mêmes passions égoïstes, changent de masquesselon les temps, les circonstances, le besoin. Mais la science moderne, en évoquant lesconceptions philosophiques des anciens, n'a pas à tenir compte des interprétationssuspectes de ces représentants illégitimes des vieilles religions, elle doit scruter le fondvéritable des doctrines vraiment philosophiques qu'elles contiennent, plus ou moinsdissimulé, voilé ; et cela au même titre pour toutes, pour la religion du Christ aussi bienque pour celle des hindous, des Egyptiens.- La Société moderne après s'être soustraite avec peines infinies aux oppressions, à

l'avilissement, l'abêtissement du régime théocratique du prêtre, de la caste sacerdotalequi se nomme l'Eglise catholique, a confondu, c'est indéniable, dans une même répulsionle christianisme avec celle-ci qui s'en disait l'identification, l'interprète traditionnel,privilégié, infaillible, alors que, nous l'avons vu ci-dessus, elle n'en était que lecontresens doctrinal et ne le pratiquait qu'à rebours.

Son surnaturalisme absurde, irrationnel, son dogmatisme autoritaire injustifié, sonrégime théocratique violemment oppressif ; son culte profane de pratiques dévotes,pharisaïques, superstitieuses, idolâtriques, signalé, caractérisé à l'avance par lesprophètes, par Isaïe, Ezéchiel, Osée, Daniel, par les apôtres et le Christ lui-même, nepouvant être confondu avec le Christianisme véritable, le divorce entre la sociétémoderne et celui-ci ne repose donc que sur un malentendu provenant de la falsificationet de l'imposture audacieuse de l'Eglise catholique, dont il importe de faire justice,d'autant que la vraie doctrine du Christ a tant d'affinités, correspond si bien avec lesprincipes et les aspirations de la société moderne, qu'elle est appelée à faire corps avecelle dans une fusion complète d’identification supérieure.

Au fond, quand la société moderne procède du libre examen, de la libre pensée, faittable rase de toute tradition antérieure, pour n'admettre que ce qu'elle trouve bon, juste,en conscience, que ce qu ‘elle comprend en raison, que ce qui est conforme auxmanifestations, aux lois de la nature observées, démonstratives, affirmatives par lefait ; en quoi le christianisme vrai dégagé de son enveloppe catholique qui le dénature,se trouve-t-il en opposition avec ces principes?n’est-ce pas l’inspiration de ces mêmes principes qui fait…

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… dire aux prophètes dans la bible, dans les textes cités plus haut, qu'il n'y a aucunbien à l'âme là où il n'y a pas de science, que le peuple périra parce qu'il est dénué descience, que le sacerdoce sera ôté au prêtre parce qu'il aura renié la sciences?

- En présence de ces paraboles exprimées, de surnaturalisme apparent, superficiel,matériellement significatif, n'est-ce pas la même bible qui met en garde contre ce sens desurface, et qui conseille au sage d'en chercher le sens énigmatique, figuré, signifiénaturellement, l'esprit vivifiant ? ce qu'elle met en lumière dans d'autres textesexplicites, comme nous l’avons fait voir, en cherchant bien qui fait dire encore à StPaul, par allusion à ces paraboles, qu'il ne donne d'abord aux ignorants, qu'unenourriture assimilable à du lait comme à des enfants puis après, une nourriture plussolide, un enseignement d'alimentation intellectuelle, adapté à mesure audéveloppement d'intelligence de l'initié ? qui fait dire du Christ qu'il expliquait cesparaboles à ses disciples ? dans un sens alors qui ne pouvait être que rationnellementcompréhensif.- Et ce que disent Isaïe, Ezéchiel, Daniel, le Christ et les apôtres aussi, comme nousl’avons vu ci-dessus sur ce culte profane, pharisaïque, qui se substitue au culte vrai,n'est-il pas conforme aux appréciations, aux antipathies de la société moderne à l'égardde ces pratiques pharisaïques?- Ce principe du Christ que tous les hommes sont frères, que celui qui voudra être lepremier soit le serviteur de tous, ce qu'il consacrait dans la pratique sous une formeprimitive d'appréciation sensible en lavant lui-même les pieds de ses apôtres, en sedonnant comme le premier né de la régénération humaine, comme le premier entreplusieurs frères, poussant l'extension de ce sentiment dans la conception d'idéalismejusqu'au martyre, avec pardon pour ceux qui le victimaient, ce principe n'est-il pasl'assise primitive, la plus essentielle de toute constitution sociale, d'union en concordevivifiante, conciliatrice, dévouée, familiale, patriotique, humanitaire ? impliquant tousles développements ultérieurs d'organisation conforme ; n'est-il pas le principe deconsécration de l'homme libre constitué socialement comme citoyen, en démocratiesouveraine, avec égalité de droits pour tous, se gouvernant par le suffrage universel,sous le régime d'intelligence conciliatrice de l'arbitrage des majorités électives etparlementaires à décisions toujours temporaires, pour consacrer le droit en appel desminorités dans des élections nouvelles, pour correspondre aux…..

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…. manières de voir de tous, aux conceptions progressives des idées, des réformes, de l'idéal àréaliser, à mesure qu'il est de mieux en mieux compris, le sentiment d'inspiration de fraternité. Entreces principes de fraternité chrétienne et de démocratie moderne, de citoyens libres régis par la mêmeloi d'égalité, n'y a-t-il pas affinités, entente, accord naturel, en évitement de dissidences, conflits;fusion, identification, comme éléments complémentaires d'organisation ?

Et quand la société moderne formule timidement toutes ses aspirations d'idéal à réaliser, sous lenom caractéristique, mais vague encore du progrès au sens moral, intellectuel, de bien aise personnel,humanitaire et d'adaptation matérielle du globe, soumis de plus en plus à l'action transformatrice,intelligente de l'homme : cette conception vague de progrès, pleine d'obscurités et de réticencesencore, n'est-elle pas dépassée par cette doctrine du Christ plaçant l'idéal à réaliser par l'humanité,dans les perfections incommensurables de la nature divine, avec puissance d'assimilation conformede la nature humaine à mesure qu'elle les conçoit ; le Christ se posant lui-même comme typeindividuel de ces perfections acquises déjà, non surnaturelles, progressives, en voie indéfinied'agrandissement, en toute leur portée, au sens rationnel de compréhension, philosophique :absolues, au sens dogmatique catholique, mais naturelles, progressives………..démonstrative par lefait, en germe encore mais suffisamment caractérisée pour se croire en droit de se nommer fils deDieu expressif du père à ses degrés acquis : en exemple à suivre pour tous, ouvrant ainsi un horizonimmense aux conceptions philosophiques, aux aspirations de la nature humaine avec en même tempsun stimulant puissant aux déterminations morales supérieures de l’homme.

Il faut bien le dire aussi, le Christ en sa doctrine en présentant à l’homme les perfections de lanature divine comme idéal de destinée rationnelle offert légitimement à ses aspirations réalisablespar degrés progressifs indéfinis ; le Christ ne comprenait la vie actuelle que comme un préambule, unâge transitoire, puisqu'elle est temporaire, inévitablement mortelle, un stage ; mais devant aboutir àune vie ultérieure immortelle, de pure spiritualité, en laquelle devait s'achever, s'accomplir toujoursindéfiniment, la réalisation de ces perfections avec tous les degrés de bonheur qu'elle implique.

Mais en proclament ce terme ultérieur de la vie à venir, de la destinée, le Christ s’attachait aussià enseigner les conditions morales nécessaires pour y arriver, en prêchant lui-même, conditions qu’ilrésumait en ceci = aimez votre prochain comme vous même et dieu pardessus tout (c’est à dire lebon, le juste, le beau, le vrai qu’il représente comme perfections) toute la loi est là ; en appelant ainsiaux inspirations du sentiment, de la conscience, de l’intelligence sage ; sans tenir compteaucunement des pratiques dévotes du pharisaïsme Juif, soi disant religieuses.

Ici encore le Christianisme se trouve en concordance scientifique avec le spiritualisme purementphilosophique ancien et moderne ; constatant l’indivisibilité substantielle par là impérissable du moianimé de l’âme, et par son immoralité, sa survivance logique….

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….à la décomposition mortelle de son organisme corporel, sa transformation rationnelle en puresprit dans une vie ultérieure de pure spiritualité qui peut être définie de plus en plus par cetesprit chrétien et l’esprit philosophique moderne, d’ensemble d’accord en fusionnement.

Dans le spiritualisme moderne purement philosophique, il semble qu'après avoir constatél'immortalité de l'âme, on s'en tienne là provisoirement, indécis pour formuler la vie ultérieuresimplement comme la transformation divine de pure spiritualité de l'âme actuelle ; sur la vieantérieure il semble s'être tenu sur une réserve prudente comme dans la transition de l'exposé àl'explication de ses paraboles : mais quand Salomon dit : qui sait si l'âme des bêtes descend en bas,si l'âme des hommes monte en haut ; quand la bible encore parle de l'échelle de Jacob allant de laterre au ciel et que gravissent ou descendent les anges de Dieu, on peut se demander s'il n'a pasdéjà envisagé la question, laissant au temps à en formuler les problèmes à leur heure.

Mais les matérialistes attardés de la science moderne toujours en progression, sous l'influence, ilfaut le dire, de la défiance, aversion du mysticisme et dogmatisme théologique, théocratique, descatholiques, s'en tiennent aux impressions primitives traditionnelles, vulgaires, comme lescatholiques à leurs dogmes, sans réfléchir que par réaction outrée, on peut tomber de charybde enScylla ; les matérialistes actuels sourient quand on leur parle d'une âme incorporée oudésincorporée, disant que personne n'a pu en voir une à la loupe ou à l'oeil nu, oubliant quepersonne non plus n'a pu voir ainsi un atome d'air ou de matière quelconque volatilisée, tousimperceptibles isolément ne devenant observables qu'alors qu’ ils s'agrégent plus ou moins, semanifestant, s'exprimant ainsi d'ensemble, en commun, en corps, et hors desquels la matière sisensible, palpable comme substance, serait sans réalité aucune, puisqu'ils en sont les élémentsconstituants en substance, l'enfantent ou la détruisent selon qu'ils se rapprochent ou s'éloignent,s'agrégent et paraissent ou se volatilisent et disparaissent.

- La matière en réalité n'est donc pas un être, une substance, mais une forme collective, unemultitude, un agrégat dissoluble, adventif, temporaire, périssable comme toute forme effective,phénoménale, émanant de la virtualité substantielle de l'Etre impérissable en principe; et dont lesatomes seuls sont les représentants en substance, les seuls êtres véritables, mais comme simplesindividus substantiels, inétendus, indivisibles, indissolubles, imperceptibles ainsi isolément, etassimilables en principe , en cette condition, au simple individu animé qu'on appelle L'âme.

Quand ces atomes s'expriment en agrégat même solide, ils ne font que manifester en commun, encorps, la consistance indestructible de leur réalité substantielle, en principe dégagés d'étendue.C'est dans cette donnée fausse de leur conception matérielle de la substance (de la substanceétendue divisible même à l'infini selon eux) que les matérialistes n'admettant dans l'organismecorporel animé que la matière qui le compose, ont prétendu que…

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….les phénomènes animiques manifestés dans ces organismes provenaient de la matière elle-même (sans tenir compte de l'observation qu'en faisait le moi dans sa simple intimité) : disant queles différences seules des organes, différenciaient ces phénomènes, et comme le vulgairel'admettait, que c'était la peau , la chair qui avait le sens tactile, que c'était l’oeil qui voyait,l’oreille qui entendait, le cerveau qui pensait, voulait et aussi sans doute craignait, espérait,aimait, haïssait, etc. . . .

Mais la science anatomique et physiologique jetant quelque lumière sur ces obscurités, ons'est ravisé; on a admis que c'était seulement les nerfs, les centres nerveux qui étaient la cause,génératrice des sensations, présidaient aux mouvements spontanés, et selon leur organismespécial étaient centres nerveux de la vue, de l'ouïe, de l'odorat, du goût, de la pensée, de lavolonté; et puis enfin, par suite d'études ultérieures, tous ces centres nerveux ont fini par se relierentre eux, concentrer en un seul point central, convergeant, pivotal, le nœud vital, pas plus grosqu'une tête d'épingle, selon Flourens, et situé entre le cerveau et l'extrémité supérieure de lamoelle épinière. C'est à cette simple cellule du noeud vital principe générateur principal de la vieanimique et organique ensuite par l'influence prépondérante du système nerveux, que convergenttoutes les sensations, d'où procèdent tous les mouvements spontanés du corps, la vivification desorganes intérieurs, où se ramènent les principes des organes de la vision, de l'ouïe etc. . . . et desopérations du cerveau, et qui, par sa destruction, anéantit du coup toute la vie animique etorganique.

Cette concentration de toute la vie animique et organique en ce noeud vital, assimilable àune simple cellule, d'où on peut induire qu'a procédé toute la formation évolutive de l'organismecomme d'une cellule ovulaire, comme elle en est après la cellule vivifiante, motrice, et queconstate la science anatomique et physiologique, semble confirmer la doctrine des animistes quiconsidèrent L'âme comme le principe générateur de l'organisme. L’âme en effet admise commerésidant originairement dans cette cellule ovulaire et vivifiante du noeud vital, peut êtreconsidérée comme l'agent formateur d'instinct embryonnaire de cet organisme, comme l'agentd'adaptation, en concordance de ses aspirations, besoins, des éléments puisés par elle dans lemilieu ovulaire, matriciel, pour former tous les organes spéciaux de cet organisme, les adapterd'ensemble, par la même puissance de subordination par laquelle tous ces organismes formés, elleles meut spécialement ou d'ensembles, par laquelle - par l'alimentation et l'excrétion, elle lesrenouvelle intégralement en substance, sans excepter les os, avec réadaptation nouvelle deséléments alimentaires à la…

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….diversité des organes ; réadaptation formant à nouveau tout le système nerveux etmusculaire précurseurs du surplus organique, et à mesure de leur formation agents detransmission des corrélations, des influences animiques génératrices, vivifiantes, pour laréadaptation formatrice continue des organes, pour leur revivification spéciale et générale.

L'âme constitue ainsi d'abord en son corps, en sa simple virtualité individuelle, en son moiinstinctif et dans la mesure de sa puissance spéciale de subordination, constitue le centregénérateur vivifiant, moteur, convergeant et expansif animé de tout son organisme, le pivotautour duquel gravitent comme circulation du sang et système d'excrétion tous ces élémentstemporaires de formateurs et de renouvellement de cet organisme, qui ne fonctionnent et nevivent comme celui-ci que par elle, par son influence animique nerveuse, musculaire ; le coeur lui-même d'où procède la circulation sanguine, aussi bien que les autres organes intérieurs à fonctiondiverse, n'agissant en leur fonction spéciale que sous l'influence nerveuse musculaire convergeantau noeud vital et à l'Âme qui en est le principe central d'animation, de vivification.

Cette influence de subordination, d’adaptation génératrice, vivifiante motrice de l'âme surson organisme corporel, que consacre explique pour ainsi dire la concentration unitaire dusystème organique et nerveux, définie par la science anatomique et physiologique constatée parelle ; vient jeter un certain jour comme renseignement complémentaire sur la question de laformation des espèces organiques animées, par évolution les unes des autres, étudiée, développéeparticulièrement par les matérialistes ; mais non comme ils l'entendent.

Ceux-ci imbus de l'idée que la vie animique provient de la matière du corps, que les facultésanimiques sont enfantées par les organes préalablement formés , ainsi la pensée par le cerveau,d’autant plus grande qu’ il y a plus de circonvolutions en celui-ci : au lieu de voir ces organesformés par subordination active et adaptation émanant de l'Âme, en besoin d’exercer cesfacultés, de faire correspondre les éléments matériels qui l’enveloppent et à sa portée, à l’exercicede celles-ci ; tout l'organisme en un mot, ainsi formé par elle, lui servant d'instrument, etfournissant sa plasticité matérielle. Les matérialistes s'expliquent à contresens la formation del'organisme, et alors quand il s'agit de comprendre, s'expliquer l'évolution des espèces, ilsnégligent entièrement, (comprenant mal) l'influence importante et même indispensable de cefacteur se combinant avec les influences …

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….correspondantes d’adaptation du milieu ; ces dernières deviennent insuffisantes pourl'explication cherchée.

Il y a plus. Si au lieu de considérer la vie de ces organismes animés dans la limite de leurforme actuellement observable, mortelle, comme des météores qui sortent du néant quandils naissent et paraissent et qui retournent quand ils meurent et disparaissent comme deshiéroglyphes incohérents, sans signification, ils la considéraient comme une forme vivantetransitoire de l'âme animant ces organismes, le sens de ces organismes vivants deviendraittout autre. L'âme en effet résidant temporairement dans un organisme spécial, y développeses facultés animiques par leur exercice, par la gymnastique de la vie ; et quand cetorganisme spécial se dissout - comme elle lui survit, elle devient un germe, supérieur àl'espèce qu'elle représentait, apte de métamorphose en métamorphose à gravir dans une viegénérale, tous les degrés de plus en plus élevés que comporte la vie animique jusqu'à unterme d'épanouissement définitif, comme c'est la loi de tout être vivant en son espèceparticulière. Ce qui est une conception naturelle, conforme à la nature impérissable del'âme en substance, toujours apte à exercer à nouveau ses facultés ; conforme aussi auxconditions vraisemblables de son évolution animique.Le sens explicatif de l'évolution de ces espèces réduites au sens exclusivement matériel,

reste dans son ensemble assimilable à cette vie météorique et hiéroglyphique, incohérentede chacun de ces organismes spéciaux, tandis que entendu comme l'expression purementmatérielle de l'évolution animique du simple individu animé, de l’Âme qui en est leprincipe générateur et vivifiant, ce sens explicatif de l'évolution des espèces devient pluscomplet et ouvre la voie à une compréhension philosophique bien plus ample aussi de tousles individus animés, de toutes les âmes animant ces organismes.

L’évaluation des espèces organiques animées s'exprime comme une vie généraleconcordant avec leur impérissabilité en substance et dont les degrés d'ascendancemarquent, en formes spéciales, transitoires, les phases, les âges, les stages de cette viegénérale.

Les individus animés ou âmes représentant ces organismes s'évoluent ainsi par l'exercicede leurs facultés, du terme le plus simple, le plus infime de la vie animée, animale au plusélevé ; leur organisme humain ou autre ne représente que l’âge viril qui le caractérise en enespèce. Leur pur Esprit dégagé de toute incorporation, vivant en pure spiritualité de la viedivine (ainsi que le professe le Christ, représente l’âge adulte de cette vie générale, le termedéfinitif de la destinée à….

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…laquelle tous sont appelés, accessible à tous.Ces paroles de l’ecclésiaste : « Qui a connu si l’Esprit des enfants d'adam monte en haut, si

l'esprit des bêtes descend en bas? ne semblent-elles pas poser la question sur ce sensphilosophique de la vie générale de tous les êtres animés ? et remarquons combien cette questionainsi posée ressemble au caractère des recherches philosophiques en contradiction avec ledogmatisme tranchant de l'Eglise Catholique. La parabole de l'échelle de Jacob allant de laterre au ciel et que montent et descendent par degrés les anges de Dieu, ressemble bien aussi àcette ascendance et descendance du plus infime au plus élevé des degrés de la vie, selonl'exercice plus ou moins actif des facultés, selon les tendances effectives, dégradantes ousupérieures; selon le mérite ou le démérite.

L idée de métempsycose admise dans la religion des hindous et que Pythagore, quil’avait puisée, enseignait en Grèce, montre aussi combien cette conception de la vie générale etdes âmes animales et humaines date de loin, car elle avait aussi le sens d'ascension graduée.Par ce qui précède, c'est l'âme qui a formé son organisme; c'est elle qui a produit l'évolutionprogressivement spécifiée, ramifiée, ascendante des organismes animés constituant les espèces etque nous enregistrons selon leurs caractères analogues et distinctifs par catégories graduées declasses, de genres et d'espèces. Les modifications transformatrices des espèces les plus infimes,les plus primitives aux supérieures jusqu'à l'homme au sommet, se sont produites par lacombinaison des influences animiques et du milieu ambiant.

On peut citer comme Ex. de ces modifications arrivant à produire des races, des espèces et parsuite l’évolution progressivement diversifiée et ascendante de celle-ci : l’hirondelle martinet quipar un exercice plus constant du vol a développé d’avantage ses ailes que l’hirondelle ordinaireet dont par suite les pattes se sont attrophiées faute d’usage, de même le chien de Terre Neuveaux pattes palmées acquises par la nage, la Girafe au long coup à force de rechercher haut lesfeuilles qui la nourrissent etc.…

Si l’on suit la série en progressant, depuis la monade microscopique jusqu'à l'homme on voitprogressivement cette action d'appropriation, d'adaptation se développer par spécificationgraduelle en organismes de plus en plus spécifiés, perfectionnés. L'homme au sommet, le plusparfait, les résume en mode supérieur.

La vie générale à laquelle tous participent, des termes infimes de laquelle tous procèdent, à ladestinée idéale, supérieure de laquelle tous sont appelés ; cette vie générale ainsi constituée,conçue, explique tout, en sens rationnel, compréhensif, juste.

Les progrès scientifiques qui on déjà dérouté quelque peu les matérialistes dans leurconception de la matière, de la substance de l'âme, de la vie animique, de l'évolution même desespèces d'organismes animés, finiront par les transformer et amener aux conceptions plusrationnelles des spiritualistes.

Mais ceux-ci, eux mêmes timides dans leur recherches actuelles, inspirés des vuestraditionnelles, quoique non théologiques, se confinent dans l'intimité du moi, en vue desimples analyses psychologiques, ont besoin aussi d'être stimulés ou transformés par lesaspirations, les compréhensions philosophiques plus amples de l'esprit moderne, pour être…

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à la hauteur des problèmes soulevés en ces temps de rénovation scientifique, problèmes qu'ilssemblent ne pas oser aborder, ignorer même. Ainsi après avoir défini l'Âme en sa simplicitésubstantielle et animique du moi et reconnu son immortalité, sa condition future de spiritualitévivante désincorporée, de pure esprit, ils n'osent en quelque sorte aborder la question de sa vieultérieure, dont le sens a été formulé hardiment dans la doctrine du Christ, avec une portéeimmense comme nous l’avons vu plus haut, et que les compréhensions philosophiques peuventchercher à définir davantage. - Et en ce qui concerne la vie antérieure de l'âme, précédant sonincorporation humaine, dans les formes organiques d'avant, que manifestent les espèces animalesen progression de vie animique aussi bien qu’organique, ils ne l'abordent nullement, et semblentl'ignorer, bien que l'idée ancienne de la métempsycose pourrait la leur suggérer ; mais celle-cidénaturée par la suppression inexacte de son sens ascensionnel est devenue oiseuse, n'ayant plusque les sens d'une métempsycose à tort à travers.

En passant par tous les termes intermédiaires de l'animalité inférieure et supérieure, puis de laspiritualité virile, nous touchons à un problème réservé mais qui se pose de lui-même malgré tout ;c'est celui de l'existence de l'Âme antérieurement à ce terme de vie animée du microbe, de vieanimée qui même se manifeste au delà de lui, en forme infime aussi dans les spores des algues.

Avant de se manifester sous ces formes primitives et rudimentaires, où l'âme résidait-elle? quelleexistence avait-elle? Où était-elle alors en cette condition de simple substance impérissable, devirtualité sans exercice, en germe? Elle était ballottée sans doute au milieu des atomes, ou groupés,ou se mouvant autour d'elle, l'enveloppant, comme agrégée au milieu d'eux, comme un autre atomepourrait-on dire. Et cela depuis que le globe terrestre qu'elle habite est constitué jusqu'à la fin destemps géologiques où ont paru, se sont produits, les premiers organismes animés . Toutes les âmesdes organismes animés, du plus simple animal à l'homme y compris en sont là, ont eunécessairement cette condition d'origine. Mais ici une idée surgit : Est-ce qu'à cette époqueprimitive, toutes ces âmes n'auraient pas été des atomes, transformées plus tard par l'essor,ledéveloppement de leurs facultés animiques et ensuite de spiritualité supérieure? tous les êtres enprincipe, en substance étant identiquement constitués comme simples monades virtuelles, atomesen âmes, est-ce que la nature dans son évolution progressive d'espèce ne présenterait pas par le faitune simple spécification effective, comme transformation de la matérialité de la force enspiritualité de la force ; une transformation de l'atome insensible, inerte, dénué d'abord de vieanimique, en atome devenu sensible, devenu alors une âme douée de vie animique.

L’Histoire alors de l’atome et de l’âme serait l’histoire d’un….

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… seul et même être à deux âges différents; la nature s'exprimerait ainsi dans son unité essentielleet vivante dans le développement général et individuel d'une même vie universelle, s'évoluant del'atome au pur esprit, dans la portée immense, éternelle et infinie, du temps et de l'espace.

Cette conception sort tellement de la manière de voir restreinte et traditionnelle générale, qu'onn'ose s'y arrêter et qu'après avoir renversé la barrière séparative des âmes animales et humaines onn'ose aller au delà. On s'arrête à l'atome comme virtualité essentiellement distincte de celle de l'âme,formant lui et elle deux classes d'êtres absolument à part, sauf à la science à modifier plus tard.

Néanmoins ce problème se pose à nouveau quand même devant l’Esprit : est-ce qu'en principe iln'y aurait eu dans la nature que des êtres élémentaires, identiques en substance, en constitution, enportée virtuelle, et que l'exercice seul de ces virtualités en conditions déterminantes, différentes,aurait spécifié seulement en fait.

Qu'étaient donc tous ces éléments de la nature universelle avant d'être agrégés en astres, d'oùtoute vie ensuite a procédé? _ de simples substances identiquement constituées, comme virtualitéssans exercice : n'ayant réalisé encore aucun fait, sans modalité effective alors, sans réalitéapparente, sans un signe manifeste d'existence, comme simples germes primordiaux, repliés,concentrés, dissimulés dans l'essence intime, métaphysique et mystérieuse, de leur virtualité pure,comme absorbés, endormis, anéantis dans le sommeil du premier âge, en germes.

- Principes invisibles, indéterminés, inobservables alors, tous par l'inertie première de leurvirtualité, sans un acte perceptible ou percevant, sans réalité, active ou passive, sans cohésion par làmême, n'offraient évidemment qu'un caractère, celui de la nature entière sans vie, sans expression,dissoute, réduite à rien, engloutie dans l'immensité de l'espace, qui sans forme aucune et comme videet pénétrée par la nuit et le silence dans toutes ses profondeurs devait être comme un abîme sansnom, c’était le chaos, le néant primordial, non de l'Etre, mais de la vie, qu'après on appelle l'empirede la mort quand la vie qui s'en était produite y revient.

C'est alors, selon Moïse, que Dieu, nageait sur l'abîme avant la création ; que selon les Védas,Dieu compacta la matière cosmique éthérée, dissoute et dissimulée dans l'espace.

Comment à ce néant a succédé la Vie?Ce qu’on peut assurément présumer et la logique y entraîne, c’est qu’à un moment donné un

souffle * divin, fécondateur s’est produit de l’abîme,° émanant évidemment de quelque chosed’essentiel, d'un principe premier, vivant avant tout suprême générateur, et qu'à ce souffle de Dieupénétrant, remuant, éveillant l'espace immense, tous les germes sans nombre qui….

* pour ainsi dire ° faisant corps avec lui à l’état de sommeil

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….s'y trouvaient contenus, se sont trouvés comme projetés dans une existence nouvelle, procréésà la vie, mis en rapport actif ou passif ; transformés en puissances modifiées ou modifiantes, enindividualités vivantes, en un monde social immense, vague d'abord, incohérent, inordonnémême, mais animé déjà d'une vie collective, commune.A cette heure première d'actions et réactions infimes, élémentaires, représentées de proche en

proche, à l'infini, comme électriques dans un milieu identiquement impressionnable, la formeapparente, la vie de tous ces éléments réunis et confondus simplement au début en un seul, a dûse produire comme un simple effet généralisé; comme l'expression identique uniforme immédiated'un seul, l’individualité de chacun se trouvant confondue dans la manifestation vivante detous.La nature alors dès qu'elle sortit du sommeil absolu et primitif, de sa virtualité pure, dès qu’elle

se produisit en fait, a donc du apparaître dans le néant de l'abîme sous les formes sensibles d'unseul et même élément, immense, unique, éthéré, aérien, rayonnant la lumière du jour (1) dansl'espace infini, se mouvant dans toutes ses profondeurs, comme un souffle animé, y bégayantpartout le simple langage du vent, un bruissement vague et mystérieux comme la première paroleincohérente de la vie ; tels ont dû être les premiers signes d'existence, les premières manifestationsvivantes de l'universalité des êtres à l'issue du néant. C'est avec ce prélude simple expansif etuniforme de la vie individuelle et Sociale qu'a dû apparaître le germe fécondé de l'univers. (2)

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(1) Au commencement Dieu dit : que la lumière soit, et la lumière fut. (Genèse)(2) Et les maories sauvages semblaient avoir un vague instinct du monde inanimé mis subitementmis subitement en mouvement par un souffle divin de Taaroa _ affirmant, désignant les deuxprincipes uniques et universels de la vie pour ensuite les résoudre en une suprême unité ; l’unâme et intelligence, Taaroa est mâle ; l’autre purement matériel et constituant en quelque sorte lecorps du même Dieu, est femelle : c’est Hina. Il y a Hina de la lune, de l’air, de la mer, del’intérieur.- Il était, Taaroa était son nom.Il se tenait dans le vide, avant la terre, avant le ciel, avant les hommes. Taaroa appelle, rien ne lui

répond, et seul existant, il se change en l'Univers.Les Pivots sont Taaroa : c'est ainsi que lui-même s'est nommé. Les rochers sont Taaroa, les sablessont Taaroa - Taaroa est la clarté, le germe et la base : l’univers n'est que la coquille de Taaroa.C'est lui qui ne tout en mouvement et règle l'harmonie universelle.

« Vous ! Pivots, vous ! Rochers vous ! sables nous sommes. Venez, vous qui devezformer la terre :

Et il presse entre ses mains les rochers et les sables et les presse longtemps, mais ces matièresne veulent pas s'unir. Alors, de sa main droite il lance les sept cieux pour en faire …

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…Mais après, ce qu'on peut présumer encore, c'est qu'au premier jour de la vie, après la premièrecommunication effective de tous les éléments virtuels de l'univers, qui a dû se produire, nousl'avons dit comme un souffle, comme une explosion de lumière, transformant l'abîme primitif à enun ciel visible, manifestant l'universalité des êtres sous la forme d'une sphère infinie, composéed'une matière homogène, éthérée, d’assimilation universelle ; après dis-je ce premier mouvementd'impulsion vitale, fécondatrice, procréatrice, propagé dans l'immensité de l'espace, il a dû seproduire comme un mouvement en retour, un effet universel de pesanteur attractive, effet généraltransformé en cohésion particulière, agrégation par masses, une sorte de précipitation etcristallisation physique en grand (comme se produisent les bulles d’air dans l’eau, les gouttes d'eaudans l'air, les grenailles métalliques à la fusion) d’où sont nées alors toutes les agrégations astrales,cométaires, solaires, planétaires.

Tous ces mondes particuliers qui apparaissent comme les primitives expressions effectives desindividualités universelles, se manifestent en corps, issus d’une même forme générique générale;toutes les sphères sans nombre qui peuplent et illuminent l'espace, semblant reproduire en formeimmensément agrandie le simple principe virtuel, élément analogue dans son unité substantielle àune sphère purement intelligible ayant servi de point primitif de groupement, d’élément générateurde cristallisation sphérique, et tous les systèmes de gravitation nés du mouvement primitif et durapport de puissance attractive des masses et qui paraissent se relier et résumer en une gravitationuniverselle autour d'un point central, pivot de l'espace, semblant à leur tour constituer unecristallisation combinée de mouvement, comme la primitive expression d'un mouvement organiqueuniversel. Enfin après cette sorte de commotion….

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(Suite de la note n°2 du folio 155 verso) …le fondement du monde et la lumière est créée. Tout sevoit, l’univers brille jusque dans ses profondeurs et le Dieu reste extasié devant l’immensité.

L’immobilité du néant a cessé ; la vie existe et tout se meut. La parole a fait son œuvre et lesmessagers ont accompli leur mission.

Les pivots sont fixés, sables et rochers sont à leur place. Les cieux s’élèvent et tournent. La meremplit les abîmes.

- L’Univers est.

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…électrique, qui s’étendit à l'infini des éléments de la nature tout identique à cette date, et lesenlevant à l'inertie du néant, fit soudainement de l'abîme un ciel visible, un souffle animé, on peutprésumer en raison, c'est qu'après ce prélude simple et uniforme, cette sorte d'inspiration premièredans la vie, tous les éléments de la nature une fois projetés dans l'espace pour l'éternité, pour lavie, et de ce moment constitué en fait pour vivre, mais désormais livrés à leurs propres forces, tousemportés alors dans les régions inconnues de la vie, dans les profondeurs mystérieuses de ladestinée, n’ont plus fait par la suite des temps que suivre de conséquences en conséquences,d'évolutions en évolutions, tous les développements de cette vie première et rudimentaire : parsuite s'exprimer successivement sous toutes les diverses et innombrables formes de la vie quechacun dans sa sphère, son espèce, tous dans leur ensemble évidemment reliés, offrent actuellementà l'observation, aux investigations de la science.

Ce qui est remarquable c'est de comparer les deux termes extrêmes de la vie organique animée,de la monade à l’homme, de la monade simple cellule ovulaire, sans apparence d'organes semouvant, vivant dans une goutte d'eau, à l'homme qui se montre comme un centre de vie, autourde qui sous son influence de simple individu animé ou âme, sous une forme plus ou moins idéaliséeet dans un milieu plus agrandi, en correspondance avec son degré acquis d'évolution vivante, depuissance expansive de vie nouvelle : mais alors en rompant définitivement avec l’incorporationqui n'était sous toutes ses formes antérieures qu'une vie d'adaptation embryogénique, larvaire,transitoire fatalement destiné par la mort à disparaître pour faire place à la forme de spiritualitévivante du pur esprit qui est le terme d'épanouissement vital et définitif de l’Être.

Mais si cette transformation de l'individu humain en pur esprit vivant de la vie la plusidéalisée qu’on appelle divine, se conçoit comme une conséquence naturelle, logique, rationnelle deson évolution vivante, animale, puis supérieurement spiritualisée.

Sa désincorporation définitive se conçoit aussi.Elle se conçoit comme la conséquence logique d'une évolution parallèle à son ascension générale

dans la vie, comme le résultat final du travail de dégagement progressif de son individualité, del'agrégation et des asservissements de la matière, accompli à travers les âges au sein des organismesanimaux précédemment animés par elle.

Quand le simple individu atome d'abord, ou plutôt, si l'on veut, quand l’âme assimilable à luien germe, à transformé

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…ainsi graduellement par l’exercice, sa virtualité d'abord passive, brute, en spontanéité de plusen plus active, puissante, et libre, par les degrés de plus en plus supérieurs de l'animalité arrivant àl'homme : après avoir subi toutes les transformations, passé par tous les Etages, définitivementémancipé, véritablement majeur et pourvu de toutes les conditions, facultés, vertus nécessairespour agir, se guider dans le droit chemin de la vie, en la forme suprême qu'il conçoit, l'individucomprend comme la conséquence naturelle la transfiguration idéale. C'est en quelque sorte lasanction de toute sa vie antérieure qu'elle complète et couronne, et dont celle-ci antérieure,primitive, ne semble être comme forme rudimentaire qu'une expression matérialisée, unedémonstration en figures, en symboles corporels, ayant au-delà du sens littéral, symbolique, le senssignifié de l'Esprit de la vie définitive et supérieure, individuelles et sociale des pures esprits.

- L'être l'individu arrivé à ce terme viril, plus ou moins développé suffisamment caractérisé dansce qu’on nomme le commun des mortels, la mort peut venir alors, le corps peut se décomposer,disparaître. Là aussi assurément s'évanouit, disparaît, mais pour après se ranimer, revivifier,reprendre ses sens, ses facultés, toute sa puissance, sa vertu vivante d’avant ; et alors entraînéepar le ressort, l'expansion de son énergie vitale acquise antérieurement, de la chrysalide humaine,l'âme en raison s'échappe désormais pur esprit, sans souvenir du passé, sans doute, comme un êtrenouveau-né mais en besoin d'agir, de vivre, et désentravé du corps par sa force motrice d’avant ;spontanément, cela va de soi, elle s'élance en tous sens, dans les régions éthérées du ciel, prête à semouvoir à son gré, en tout lieu, partout, dans l'espace immense, la matrice générale, la sphèreprimitive et définitive de la vie universelle des êtres. Elle s'élance, avide de tout voir, de toutsavoir, tout comprendre, tout aimer, s'impressionner en bonheur de tout, prête à parcourir tous lesmondes devenus à sa portée, ayant du reste l'éternité devant elle : prête à pénétrer comme leséléments impondérables tous les agrégats corporels les plus denses, à aller au fond intelligible detoutes choses pour s'expliquer le sens, la véritable réalité essentielle et vivante des êtres, le sensexplicite de la nature vivante universelle. De l'infini de l'espace et de la nature elle fait désormaissa sphère définitive activité, d’expansion son milieu intégral d’adaptations vivantes, indéfinimentprogressives, en conformité de sa nature transformée, spiritualisée.

Et alors reprenant la vie comme précédemment à chaque terme mais en mode supérieur, elle puisesans cesser dans ce milieu…

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…infini d'alimentation ; mais pour s'agréger, s'assimiler, s'adapter non plus lasubstance élémentaire des êtres, mais leur nature intelligible, elle s'incorporeintellectuellement leur fait observé, leur loi organique comprise, leur théorie explicite enun mot.

Et au cours de cette élaboration graduellement analytique, s'adaptant à mesure,coordonnant en leur sens général synthétique, tous ces ensembles théoriques, comme lesgroupes organiques d'un organisme corporel ; étendant ce travail de compréhension,d'assimilation intellectuelle à toutes les réalités, tout l'ordre universel de la nature.L’âme ou pour mieux dire le pur Esprit, s’en fait un organisme intellectuel encorrespondance organique avec ses sentiments, sa volonté, supérieurement spiritualiséedéjà : en identification de la nature universelle qu'il personnifie ainsi en son sens leplus élevé ; et au moyen de cet organisme toujours accru, il développe scientifiquementsa puissance vitale, et vit au sein de la nature universelle comme en son milieu naturel,intégral de vivification, comme en son domaine, comme précédemment l’homme ainsidevenu roi sur la terre.

De la base au sommet, l'évolution progressivement spécifiée, collectivementuniverselle de la nature, ou du simple individu élémentaire, se trouve en correspondanceréciproque ; celle-ci comme étant l'expression élémentaire, celle-là la synthèse collectivede l'autre ; de même à chaque terme l'évolution spéciale, (même corporellementindividualisée) reproduit, réitère en résumé, dans la mesure effectuée de ce terme le sensévolutif correspondant de la vie générale..

Le sens éminemment suggestif qui s'en dégage, plus ou moins vaguement aperçud'abord comme reproduction d'expression des choses entre elles, c'est que plus on va aufond des choses plus on voit que toutes les diversités se relient en leurs correspondancesgénériques, analogiques, harmoniques ; que la nature comme la vie est une ; que L’êtreen son universalité est un. Ces harmonies expressives de l'unité vivante de la nature, lesartistes, les poètes, s'en inspirent et les traduisent en leurs oeuvres, en leursreproductions d'idéalisme. C'est aux philosophes à en définir par le fait et en raison lesens scientifiquement supérieurement démonstratif, compréhensif qui au fond peutmettre de plus en plus en lumière, résoudre ce problème humanitaire toujours posé :expliquer ce que…

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… nous sommes, d’où nous venons, où nous allons ? maintenant dans cette conceptionphilosophique, universelle de la nature, résultant d'idées déjà formulées, admises dans la sociétémoderne, combinées avec d'autres qui ne font encore que couver, mais qui s'y adaptentlogiquement, qu'y a-t-il en discordance avec la doctrine biblique ou du Christ ?

En son sens rationnel bien entendu, dégagé de l'interprétation purement littérale,surnaturelle, irrationnelle, à contresens de l'Eglise catholique ? est-ce la doctrine de l'évolutioncomparée au texte de la genèse, relatif à la création ? dans le sens agrandi logiquement développéde cette doctrine de l'évolution, embrasant toute la nature, il y a concordance évidente sur cetteaction génératrice originelle de Dieu (En note marginale : ou Être) comme cause première nécessaireen raison explicative de la vie universelle, sans préoccupation d'une tradition quelconque ;concordance sur le fond, bien que la forme diffère ; mais si l'on se rapporte au langagehabituellement en usage dans la bible, exprimant l'idée en forme matérialisée, plus sensible,symbolisant le fond, pour le rendre plus palpable aux esprits primitifs, peu aptes encore au sensspirituel des choses, employant ainsi la parabole presque toujours pour l'exposition de la doctrine; le texte de la genèse formulant la création comme enfantement, mise au jour des termes vivantsprincipaux de la nature en 7 jours c'est-à-dire successivement et dans un ordre qui bien qu’abrégécorrespond précisément à l’ordre successif des apparitions de ces termes, démontré par les couchesgéologiques ; à l'ordre successif de toutes les phases de formation que la science reconnaît,consacre ; mais en périodes immensément plus longues et même plus nombreuses. Ce texte de lagenèse peut parfaitement s'interpréter en concordance avec le sens de la doctrine évolutionniste.Est-ce le sens encore de l'évolution transformatrice des âmes animales, humaines parmétamorphose, métempsycose ascensionnelle ? la parabole de l'échelle de Jacob, allant de la terreau ciel, peut parfaitement s'y adapter. Après tous ces aperçus signalés d’avant, et ici, l'étudeultérieure du christianisme ne peut que développer des affinités d'aspirations, d'idées de celui-ciavec la société moderne et les réunir dans une….

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…. même compréhension philosophique, les fondre, identifier en un même toutrevivifié, plus riche et plus fécond.

Mais ! Mais hors l'Eglise catholique qui est pétrifiée dans son pharisaïsme hypocritede formes absorbantes du fond véritablement religieux, de pratiques dévotes, luiservant de moyens d'asservissement dans sa tendance théocratique oppressive, sondogmatisme infaillible, injustifié, son surnaturalisme irrationnel, à contre sens de lavraie doctrine biblique et du Christ, à rebours enfin de la société moderne.

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Cette étude qui précède, sur Jésus avec son vrai caractère, soit qu'il soit historique,soit qu'il soit un mythe.

Sur le dogmatisme de l'Eglise catholique faussant les textes.Et finalement sur la philosophie moderne, (cette dernière étude se reliant à la

première) malgré leur peu de développement suffisent toutes trois à :Démontrer que Jésus est impérissable quel que soit son origine vraie ou fabuleuse.

La pierre peut périr mais la parole reste.Que l'église périra (les textes l'annoncent) : la philosophie moderne la met à

confusion, la démasque.Cette philosophie progressive reliée à la doctrine de Jésus, comme j'ai essayé de le

démontrer, est rivée comme un maillon à la chaîne, continuera l'oeuvre commencée.Et nous commençons à apercevoir logiquement, rationnellement cette figure

pitoyable d’un Dieu qu’on adore sans raison, ayant créé depuis la nomade jusqu'àl'homme sans progression, sans lois immuables que l'homme peut à force de prièresdéranger de leur cours.

Et Isaïe s’écrie. Dieu dit : qu'ai-je à faire de toutes vos obligations, l’encens m’est enabomination, je ne puis souffrir vos nouvelles lunes, vos sabbats, et vos autres fêtes ;tout cela m’est iniquité et fainéantise : assistez l'opprimé, faites justice à l'orphelin,défendez la veuve et après cela venez et…

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entrons en discussion.... Dans ces paroles :Où se trouve le Temple, la prière, et les assistants. Nulle part… Les

actions sages sont les seules prières.Le Dieu de vos temples, celui que vous priez, Il faut le tuer.

Le seul Dieu désormais réside dans la sagesse, dans la vertu : pour devenir comme Jésusle type parfait, le fils de Dieu.

Et tous les hommes deviendront des Boudas.

Ici Gauguin a inséré un paragraphe où il revient sur l’ouvrage de Massey.Comme il s’agit de la suite logique du texte introductif, nous l’avons placéau début de notre étude. (voir pages 14 et 15)

A l’issu de cet excursus il a placé le mot « - Fin - » et ajouté « voirpage 328 »

Enfin, l’artiste a clôt son écrit par un tirage d’une gravure sur boismontrant la tête d’un homme couché.

Cet ensemble sera présenté en conclusion de notre étude.

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Au début des années 1960, l'ethnologue suédois Bengt Danielsson a réalisé uneenquête très complète sur les séjours de Gauguin à Tahiti et aux îles Marquises.

Voici la réflexion qu'il nous livre au sujet de l'essai consacré par le peintre àl'Eglise Catholique et les temps modernes : « Incapable de peindre et ne recevantplus de visites, Gauguin passe son temps à noter les pensées qui agitent son espritet écrit un long essai de quarante pages grand format sur l'Eglise Catholique et lestemps modernes. Il est lui-même convaincu que c’est son magnum opus, aussi bienà cause de son style qu’à cause de l'originalité de ses théories. En cela il se trompeentièrement. Le lecteur courageux qui accomplit l'exploit de lire jusqu'au bout cemanuscrit inédit est, pour dire la triste vérité, surtout frappé par le jargon pseudo-scientifique presque inintelligible, les idées banales de l'auteur et l'insuffisance desa documentation fragmentaire. Si l'on est malgré tout ému, c'est exclusivementparce qu'on sait que l'auteur est sincère et profondément angoissé »

Pour notre part, nous espérons que « le lecteur courageux », arrivé au bout despages qui précèdent, aura découvert, par-delà le goût de Gauguin pour la polémiquecontre les églises, par-delà le « jargon pseudo scientifique », l’émergence d’unepensée théologique non seulement sincère mais structurée.

Certes, la fougue et les envolées lyriques de l'artiste peuvent brouiller les pisteset obscurcir la logique du développement de son discours. Le trouble du lecteur estd'autant plus compréhensible qu'en restituant dans l'Eglise Catholique et les tempsmodernes les « diverses choses » qui lui passent par la tête, Gauguin n’introduit nititres, ni sous-titres.

Aussi, pour conclure notre travail, proposons-nous de donner, en quelqueslignes, le plan que nous avons cru déceler dans le florilège des pages du peintre-écrivain.

1. Pour commencer, Gauguin formule la thèse qu'il se propose d'attaquer. Sefondant sur la parole du Christ : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai monéglise et les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle », l'Eglise catholique sedéclare « autorité infaillible ». Contrairement à « la raison de chacun »,elle édicte des dogmes tels ceux de « la présence réelle du corps et de l'âme duChrist dans l'eucharistie » ou « l'enfantement surnaturel de la vierge Marie ».

Quant au pape, « représentant infaillible de cette autorité dogmatique », ilcondamnera tous les acquis philosophiques et scientifiques qui ne lui paraissent pasconformes à la lettre des écrits bibliques. Seront ainsi condamnés, Galilée, Jean

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Huss, Jérôme de Prague, les Albigeois et bien d'autres, l’église ayant recours, sibesoin, aux tortures de l’Inquisition pour faire taire ceux qui pensent librement.

2. Après ce constat, Gauguin tente de démontrer la supériorité de la raison surles affirmations dogmatiques de l'église catholique. Et de souligner que le textefondateur « tu es Pierre », et partant tous les autres textes bibliques, deviennentcompréhensibles si on accepte « la raison comme seule autorité naturelle ».Plus généralement « pour peu qu'on étudie la Bible », on constate que « la doctrinequ'elle renferme », tant au niveau de l'Ancien que du Nouveau Testament, s'énoncesous « une forme symbolique ».

3. Cette compréhension symbolique des textes ne peut s’acquérir queprogressivement. A l'image de ce que l'apôtre Paul a écrit, le Christ nourrit sesdisciples « par du lait d'abord, puis par une nourriture intellectuelle plus solide ».Et c’est lentement qu’émerge un « sens moral, compréhensif » des Ecritures.

4. Dans leurs approches figées et dogmatiques, l'église catholique, mais aussil'église protestante, sont un contre témoignage du message du Christ. Et Gauguin demontrer que « la Bible a raison contre l'église ». Qu'on en finisse donc avec cettelecture littérale, avec « la lettre qui tue », pour que triomphe « l'esprit qui vivifie ».Ainsi « dégagée de ce surnaturalisme hors de la réalité vraie … la grande figure duChrist n'en reste pas moins magnifique de beauté, de grandeur, comme le plus beautype historique d'idéal réalisé, d'idéal de réalisation progressive, indéfinie, enidentification de la nature divine, indiqué, affirmé, offert en destinée auxaspirations de la nature humaine ».

5. Après un retour très critique sur les thèmes de la naissance virginale de Jésus,l'eucharistie, le culte des reliques, sur les indulgences et le rôle des jésuites,Gauguin aborde la question de la résurrection des morts : « cette résurrection duFils de l'homme, cette résurrection des morts sortant de leurs sépultures, énoncéecomme devant venir à la fin des temps, ne doit pas arriver avec ce sens théâtral,surnaturel, frappant les sens, qu'enseigne toujours de même d'après le sens littéral,l'Eglise catholique, mais doit être entendue dans ce sens moral, naturel, rationnel,expliquant tant d'autres textes ».

La résurrection est en fait « une régénération complète » ou, si l'on veut « unamour du progrès ».

6. La foi en un progrès possible est largement développée. Elle va de pair avecune compréhension spirituelle des Ecritures. « Le christianisme se trouve enconcordance scientifique avec le spiritualisme ». Au même titre que les églises, il ya donc lieu de critiquer les « matérialistes, attardés de la science moderne, toujoursen progression ».

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7. Les longs développements consacrés aux sciences, allant de l'anatomie, de laphysiologie et de la psychologie jusqu'à la physique et l'astronomie, sont d'un aborddifficile pour un lecteur du XXIème siècle.

Cependant, Gauguin montre qu'en plus de ses efforts d’acquisition deconnaissances approfondies de la Bible, il s'est évertué à comprendre les sciencesdites exactes de son époque.

Selon Philippe Verdier, Gauguin a puisé ses connaissances dans leDictionnaire des Sciences en 50 brochures qu’il avait emmené en Polynésie.20

Nous n’avons pas réussi à nous procurer ces textes mentionnés dansl’inventaire des Archives établi à Atuona aux Marquises à la mort de Gauguin. Parcontre, nous nous sommes efforcés de parcourir trois ouvrages de Jules Soury, letraducteur, et commentateur, on s’en souvient, du livre de Gérald Massey entré dansles mains du peintre en 1896 et qui a déclenché le présent écrit.

Il s'agit de « Jésus et les Evangiles » publié en 1878, du « Bréviaire del’histoire du matérialisme » de 1881 et des « Fonctions du Cerveau, doctrines del’école de Strasbourg et de l’école italienne » paru en 1892. Cet effort nous conduità avancer que les propos du savant professeur ne sont pas beaucoup pluscompréhensibles à un lecteur d’aujourd’hui que ceux de Gauguin.

Néanmoins, pour résumer d'une phrase la pensée de Gauguin par rapport à cellede Jules Soury, nous dirions que le peintre postule que « l’âme est le principegénérateur de tout organisme ».

8. Le thème du fond commun à toutes religions et celui de la recherche du «paradis perdu » qui ont tant hanté Gauguin, sont à peine esquissés ici. En noteseulement, il mentionne la conception du monde des « maoris sauvages ».21 Aussipouvons-nous dire que l'écrit de Gauguin n'est pas un traité d'histoire des religions,mais une étude de théologie biblique.

9. Les textes bibliques sont cités en abondance mais sans références précises ;seul le livre biblique est mentionné, jamais le chapitre ou le verset.

Si Gauguin possédait bien une Bible, qu’il étudiait avec ardeur, il se fiaitsouvent à sa mémoire pour rédiger son texte. Cette manière de procéder expliqueles approximations des citations. Et si sa mémoire faisait défaut, il contournait leproblème. Ainsi, en folio 146 verso, au lieu de chercher la référence il note unecitation qu’il attribue tout simplement au « prophète X » !

Cette façon de travailler rend difficile la recherche de l’édition de la Bible dontl’artiste s’est servie. En nous appuyant sur la deuxième version de l’écrit deGauguin, nous avons montré ailleurs, qu’il utilisait fort probablement une bible dited’Ostervald dans la version parue 1869.22

20 Verdier, opus cité p. 283.21 Ces données occupent une place bien plus importante dans la reprise de l’étude aux Marquises.22 Printz, Gauguin et le Protestantisme, opus cité pp 14 et 111 ss.

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10. En conclusion de son écrit, Gauguin établit une sorte de synthèse de sapensée. Ecoutons-le, une fois encore dans son style et son vocabulaire bien à lui :« … la nature comme la vie est une ; L’être23 en son universalité un. Ces harmoniesexpressives de l'unité vivante de la nature, les artistes, les poètes, s'en inspirent etles traduisent en leurs oeuvres, en leur reproductions d'idéalisme. C'est auxphilosophes à en définir, par le fait et en raison, le sens scientifiquement,supérieurement démonstratif, compréhensif qui au fond peut mettre de plus en plusen lumière, résoudre ce problème humanitaire toujours posé : expliquer ce quenous sommes, d’où nous venons, où nous allons ? maintenant dans cetteconception philosophique, universelle de la nature, résultant d'idées déjàformulées, admises dans la société moderne, combinées avec d'autres qui ne fontencore que couver, mais qui s'y adaptent logiquement, qu'y a-t-il en discordanceavec la doctrine biblique ou du Christ? ».

Il convient donc, en définitive, et à l’instar des paroles du prophète Isaïe, de« tuer le Dieu des temples » pour adorer comme seul Dieu celui qui « désormaisréside dans la sagesse, dans la vertu : pour devenir comme Jésus le type parfait, lefils de Dieu ».

11. Après avoir glorifié Jésus, Gauguin achève son écrit par un proposétonnant, voire provocateur : « Et tous les hommes deviendront des Boudas ». Sansdoute avait-il, tout à coup, pris conscience d’avoir quelque peu négligé l’apport dela philosophie religieuse bouddhique qui lui tenait à cœur.24

12. Cette mention est suivie d’une note complémentaire consacrée à GéraldMassey dont la vraie place se situe - nous l’avons vu plus haut - avant la rédactionde L’Eglise Catholique et les temps modernes.

Puis Gauguin a annoncé, assez solennellement, la « - Fin - » de son ouvrage,

avant de l’agrémenter d’un tirage d’une gravure sur bois représentant une têted’homme couché.

Enfin, probablement suite à une relecture ultérieure de son essai, et aprèsavoir inséré d’autres « Diverses Choses » dans son album, il a ajouté, avec unsouligné pointillé, la mention : Voir page 328

Cette page, très poétique, et la gravure qui illustre le propos de l’artisteconstitueront la conclusion de notre travail.

23 En folio 158 recto, dans une note marginale, Gauguin note « Dieu » ou « Être »24 En folio 146 recto, il inscrira verticalement dans la marge : « Et tous les hommes peuvent devenir des Boudas »

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Cette gravure pourrait bien illustrer Gauguin faisant la sieste sur la véranda

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Sur la véranda, douce sieste, tout repose. Mes yeux voient sanscomprendre l'espace devant moi ; et j'ai la sensation sans fin dont je suisle commencement.

Moorea à l'horizon, le soleil s'en approche, je suis sa marche dolente ;sans comprendre j'ai la sensation d'un mouvement désormais perpétuel :une vie générale qui jamais ne s'éteindra.

Et voilà la nuit, - tout repose. Mes yeux se ferment pour voir sanscomprendre le rêve dans l'espace infini qui fuit devant moi : et j'ai lasensation douce de la marche dolente de mes espérances.

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