LE MONSTRE Le tout premier dictionnaire de lAcadémie française, en 1694, souligne dentrée de jeu...

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LE MONSTRE Le tout premier dictionnaire de l’Académie française, en 1694, souligne d’entrée de jeu la diversité des sens du mot monstre : MONSTRE. s. m. : Animal qui a une conformation contraire à l’ordre de la nature. Monstre horrible, effroyable, affreux, épouvantable, hideux, terrible. un monstre à deux testes. cette femme accoucha d’un monstre. cet enfant a trois yeux, c’est un monstre. les hermaphrodites sont des monstres. l’Afrique produit, engendre beaucoup de monstres. Il se dit au sens figuré d’une personne cruelle et dénaturée. Neron estoit un monstre, un monstre de nature, un monstre de cruauté. c’est un monstre qu’il faudroit estouffer. On dit aussi, d’une personne noircie de quelque vice, comme d’ingratitude, d’avarice, d’impureté. C’est un monstre d’ingratitude, un monstre d’avarice, un monstre d’impureté. Monstre, Se dit de ce qui est extrêmement laid. La laideur de cette femme la fait paroistre un vray monstre. L’essence du monstre se dessine déjà, à travers la différence face à une nature considérée comme norme. En fait, il s’agit surtout d’une distinction négative . Selon le Gaffiot, le latin monstrum désigne « tout ce qui sort de la nature », mais aussi, en premier lieu, un « fait prodigieux [avertissement des dieux] ».

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LE MONSTRELe tout premier dictionnaire de l’Académie française, en 1694, souligne d’entrée de jeu la

diversité des sens du mot monstre :

MONSTRE. s. m. : Animal qui a une conformation contraire à l’ordre de la nature. Monstre horrible, effroyable, affreux, épouvantable, hideux, terrible. un monstre à deux testes. cette femme accoucha d’un monstre. cet

enfant a trois yeux, c’est un monstre. les hermaphrodites sont des monstres. l’Afrique produit, engendre beaucoup de monstres.

Il se dit au sens figuré d’une personne cruelle et dénaturée. Neron estoit un monstre, un monstre de nature, un monstre de cruauté. c’est un monstre qu’il faudroit estouffer.

On dit aussi, d’une personne noircie de quelque vice, comme d’ingratitude, d’avarice, d’impureté. C’est un monstre d’ingratitude, un monstre d’avarice, un monstre

d’impureté.

Monstre, Se dit de ce qui est extrêmement laid. La laideur de cette femme la fait paroistre un vray monstre.

L’essence du monstre se dessine déjà, à travers la différence face à une nature considérée comme norme. En fait, il s’agit surtout d’une distinction négative .

Selon le Gaffiot, le latin monstrum désigne « tout ce qui sort de la nature », mais aussi, en premier lieu, un « fait prodigieux [avertissement des dieux] ».

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ANTIQUITE : L’EXEMPLE DE LA MEDUSE

Les Gorgones sont, dans la mythologie grecque, des créatures fantastiques malfaisantes et d'une telle laideur que quiconque ose les regarder en plein visage meurt pétrifié. La plus célèbre, Méduse, était mortelle, contrairement à ses deux sœurs qui ne connaissaient ni la mort ni la vieillesse. On les représentait comme des jeunes femmes, souvent avec des ailes et de grandes dents; leur chevelure était constituée de serpents. Selon Ovide (les Métamorphoses), seule Méduse possédait de tels cheveux. Poséidon, attiré par la couleur dorée des cheveux de cette Gorgone, s'était uni à elle dans le temple d'Athéna et cette dernière lui donna cette apparence en guise de châtiment. Les Gorgones avaient parfois des ailes d'or, des serres de cuivre et des défenses de sangliers. Eschyle écrit qu'elles n'avaient qu'un seul œil et une seule dent à elles trois. D'autres auteurs, parmi Ovide, ont décrit les sœurs comme très belles.

Relever les caractéristiques qui font des Gorgones des créatures fantastiques.

Persée, armé d'un bouclier, dont l'intérieur servait de miroir pour éviter d'être pétrifié par le regard du monstre, et d'une épée offerte par Hermès, put trancher la tête de Méduse. Du sang qui jaillit de son cou naquit Pégase. Persée offrit la tête de Méduse à Athéna. Elle en orna son bouclier, l'égide, qui conserva ce redoutable pouvoir. Selon certaines versions du mythe, du sang pris sur le côté droit d'une Gorgone pouvait ramener un mort à la vie, tandis que celui pris sur son côté gauche devenait un poison fatal et instantané.

Pourquoi Méduse est-elle monstrueuse ? Elle est fascinante et redoutable (prouvez)

La gorgone Méduse par Le Caravage

Copie de l'Athéna chryséléphantine de Phidias.

Déesse de la guerre, de la pensée, des artisans.Comme Hermès, son demi-frère, elle se charge souvent de protéger les héros. Elle aide les Achéens lors de la guerre de Troie et tout particulièrement elle protège Ulysse et surtout Télémaque, sous les traits de Mentor. Elle aide également Héraclès à accomplir ses douze travaux, et Persée à tuer Méduse. C'est elle qui conseille Cadmos, le fondateur de Thèbes, lui enjoignant de tuer le dragon puis de semer ses dents pour susciter une armée hors de terre. Elle indique à Bellérophon comment dompter Pégase.

Montrer qu’Athéna est une déesse qui apporte la civilisation aux Grecs.Dès lors que signifie le fait qu’Athéna se pare de la dépouille de la Méduse ?

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MOYEN-AGE► Le jardin des délices , Jérôme Bosch, vers 1503-

1505

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Pourquoi représenter l’Enfer de cette manière ?

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L’enfer de Bosch► Mais ce qui différencie Bosch, ce sont les représentations de figures monstrueuses construites à partir

de gravures de bestiaires du Moyen-Age : pattes d'insectes, plumes et becs d'oiseaux, têtes de reptiles ou de batraciens, membres humains, mais aussi machines fantastiques ponctuent son oeuvre dans des paysages chaotiques. Les visions de certains prédicateurs de son époque peuvent aussi être rapprochées de l'univers pictural de Jerôme Bosch, telles celles d'Alain de La Roche qui meut en 1475, pour qui les insectes et les animaux sont les représentations des vices et des péchés.

► En 1484, un ouvrage intitulé " La Vision de Tungdal ", d'un auteur anonyme irlandais circule en Hollande. C'est un long poème qui raconte l'histoire de Tungdal un chevalier Irlandais du XIIIéme siècle qui après une existence d'oisiveté et de débauche, voit en songe l'enfer durant trois jours et trois nuits. A son réveil il se repent en se retrouvant dans son corps humain. Il y a vu un monde peuplé de monstres, d'insectes et de serpents, dans les ténèbres de l'enfer que l'on rejoint en traversant le paradis rempli de plaisirs, d'or, et de pierres précieuses. A n'en pas douter, Bosch a pu lire et trouver inspiration dans ce poème médiéval, tant cela pouvait rejoindre ses propres visions du monde à cette époque.

Le Portement de Croix avec sainte Véronique

Mais c’est aussi une représentation d’un monde tourmenté, difficile.Cf danses macabres.

Voir le contexte (guerres, maladies)Cf. pwpt sur la tentation de St Antoine.

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EPOQUE MODERNE ET

CONTEMPORAINE►Le Vampire

Fresque du bon et du mauvais gouvernement : le tyran.Sienne,13e siècle, palazzo publico

Le mythe du vampire est quasiment universel, chaque pays, chaque époque, ou presque, a eu " son vampire ". Ainsi, dans la Bible on peut lire que Moïse lui-même défendait d'invoquer les esprits, par crainte de voir les morts revenir à la vie. Cette même Bible fait également référence au roi David qui " reprenait des forces " en absorbant la chaleur de ses jeunes esclaves pendant leur sommeil.Dans la mythologie grecque, plusieurs divinités étaient pourvues des " qualités " du vampire, ainsi Circé a la sinistre réputation de concocter des philtres magiques à base de sang humain. Homère, dans l'Odyssée, rapporte qu'Ulysse, lui-même initié par Circé, fut amené à célébrer des sacrifices de sang.Médée, quant à elle, a aussi la faculté de rajeunir quiconque selon son bon vouloir en lui faisant absorber une décoction de son cru également à base de sang. Elle aurait ainsi sacrifié son frère pour rajeunir Jason, dont elle était éprise.Les empuses, les lamies et les stryges sont des créatures issues de la mythologie grecque.Empusa, fille d’Hécate, est une créature démoniaque aux pieds de bronze qui peut se transformer en jeune fille pour séduire les hommes pendant leur sommeil. Les empuses sont ainsi les ancêtres des succubes, démons femelles abusant des hommes pendant leur sommeil.

Lamia, fille du roi Bélos, se venge du meurtre de ses enfants commis par Héra jalouse. Elle se métamorphose en monstre qui dévore les enfants ou leur suce le sang. Les lamies, ses descendantes, sont des serpents ailés avec un buste de femme.Les stryges sont des femmes au corps d’oiseau, munies de serres, qui sucent le sang des nouveaux-nés dans leur berceau, ou qui épuisent la vitalité des jeunes hommes pendant leur sommeil.

 Une variante orientale de ces démons est la Goule qui d'après les Mille et une nuit erre dans les campagnes et se jette par surprise sur les passants pour les tuer ou le cas échéant se rend la nuit dans les cimetières se repaître de la chair des défunts.Cependant, contrairement aux vampires, ces créatures ne sont pas des mortes-vivantes mais des divinités incarnées, capable de prendre une apparence humaine pour séduire les mortels.Autre créature biblique, Lilith, redoutée et haïe dans la religion hébraïque, était censée s'abreuver tel un vampire au corps des hommes. Première femme répudiée par Adam, elle est devenue la reine des démons et des mauvais esprits. Comme les lamies et les stryges elle est réputée pour sucer le sang des nourrissons, et elle dépouille les jeunes hommes de leur virilité. Aux yeux des hébreux, Lilith est avant tout coupable de transgresser le tabou absolu de la loi qui interdit de consommer le sang des êtres vivants. « C’est pourquoi j’ai dit aux enfants d’Israël : Vous ne mangerez le sang d’aucune chair, car l’âme de toute chair c’est son sang : quiconque en mangera sera retranché » (Lévithique XVII 10-14).

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► c'est qu'ils ont épouvanté la Lorraine, la Prusse, la Silésie, la Pologne, la Moravie, l'Autriche, la Russie, la Bohème et tout le nord de l'Europe, pendant que les sages de l'Angleterre et de la France renversaient d'une main hardie et sûre les superstitions et les erreurs populaires. Chaque siècle, il est vrai, a eu ses modes ; chaque pays, comme l'observe dom Calmet, a eu ses préventions et ses maladies; mais les vampires n'ont point paru avec tout leur éclat dans les siècles barbares et chez les peuples sauvages; ils se sont montrés au siècle des Diderots et des Voltaires, dans l'Europe, qui se dit civilisée.

►         Les journaux publics de la France et de la Hollande parlent, en 1693 et 1694, des vampires qui se montraient en Pologne, et surtout en Russie. On voit dans Le Mercure Galant de ces deux années que c'était alors une opinion très répandue chez ces peuples que les vampires apparaissaient de midi à minuit; qu'ils suçaient le sang des hommes et des animaux vivants avec tant d'avidité que souvent ce sang leur sortait par la bouche, par les narines, par les oreilles; et quelques fois leur cadavres nageaient dans le sang répandu dans leurs cercueils.

►         On disait que ces vampires, ayant continuellement grand appétit, mangeaient aussi les linges qui se trouvaient autour d'eux; on ajoutait que, sortant de leur tombeaux, ils allaient la nuit embrasser violemment leur parents ou leur amis, à qui ils suçaient le sang, en leur pressant la gorge pour les empêcher de crier. Ceux qui étaient sucés s'affaiblissaient tellement qu'ils mouraient presque aussitôt. Ces persécutions ne s'arrêtaient pas à une personne seulement; elles s'étendaient jusqu'au dernier de la famille ou du village (car le vampirisme ne s'est guère exercé dans les villes), à moins qu'on en interrompit le cours en coupant la tête ou en perçant le coeur du vampire dont on trouvait le cadavre mou, flexible, mais frais, quoique mort depuis très longtemps. Comme il sortait de ces corps une grande quantité de sang, quelques-uns le mêlaient avec de la farine, pour en faire du pain : ils prétendaient qu'en mangeant ce pain ils se garantissaient des atteintes du vampire.

► Voici quelques histoires de vampires.►         M. de Vassimont, envoyé en Moravie par le duc de Lorraine, Léopold Ier, assurait, dit dom Calmet, que ces sortes de

spectres apparaissaient fréquemment, et depuis fort longtemps chez les Moraves, et qu'il était assez ordinaire dans ce pays-là de voir des hommes, morts depuis quelques semaines, se présenter dans les compagnies, se mettre à table sans rien dire avec les gens de leur connaissance, et faire un signe de tête à quelqu'un des assistants, lequel mourait infailliblement quelques jours après. Un vieux curé ces apparitions donnèrent lier à un petit ouvrage composé par Ferdinand de Shertz, et imprimé à Olmütz, en 1706, sous le titre de Magia posthuma. L'auteur raconte qu'en un certain village une femme, étant morte munie de tous ses sacrements, fut enterrée dans le cimetière à la manière ordinaire. On voit que ce n'était point une excommuniée. Quatre jours après son décès, les habitants du village entendirent un grand bruit, et virent un spectre qui paraissait, tantôt sous la forme d'un chien, tantôt sous celle d'un homme, non à une personne seulement, mais à plusieurs. Ce spectre serrait à la gorge de ceux à qui il s'adressait, leur comprimait l'estomac jusqu'à les suffoquer, leur brisait presque tout le corps et les réduisait à une faiblesse extrême, en sorte qu'on les voyait pâles, maigres et exténués. Les animaux même n'étaient pas à l'abri de sa malice; il attachait les vaches l'une à l'autre par la queue, fatiguait les chevaux, et tourmentait tellement le bétail de toute sorte, qu'on entendait partout que mugissements et cris de douleur. Ces calamités durèrent plusieurs mois ; on ne s'en délivra qu'en brûlant le corps de la femme vampire.

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► A ce sujet, l'église chrétienne du Moyen-Age ( surtout entre le Vème et le Xème siècle) a eu recours à l'assimilation des principes des divinités "étrangères" , ainsi que des légendes populaires, afin de faciliter la fusion des individus dans la religion catholique. Devenus des anges ou des saints, les dieux originels virent leurs noms relégués à un bestiaire démoniaque et leur symbolique "recyclée". A partir du Vème siècle, les "Capitulaires" condamnent à mort le paganisme, et marquent le début de la persécution de ceux qui refusent toujours le dieu unique. La population est terrorisée par les visions infernales de Jugement Dernier.En 781, un Capitulaire saxon dénonce des cultes dits diaboliques, et interdit définitivement les festins de chair humaine et les rites magiques. Les Buveurs de Sang sont pourchassés sans distinction, disparaissent presque. En 1031, l’évêque de Cahors évoque dans le Concile de Limoge le premier cas de vampirisme recensé depuis longtemps. Il s'agit du corps d'un soldat qui avait refusé les Saints Sacrements, et qui était retrouvé hors de terre à chaque tentative d'enterrement dans un cimetière consacré. Le corps ne trouva la paix que lorsque des amis l'ensevelirent en terre profane.En 1484, le pape Innocent VIII reconnaît officiellement l’existence des morts- vivants en approuvant la publication de Malleus Maleficarum, ouvrage de deux dominicains contenant toutes sortes de récits sur des défunts, généralement des excommunies. En effet, la croyance aux morts-vivants représente une excellente occasion pour raffermir l’autorité de l’Eglise : sujets du vampirisme deviennent uniquement les exclus de l’Eglise ou les débauchés, dont les caractéristiques physiques coïncident trop avec celles des morts-vivants au teint jaunâtre, décharnés, malodorants. Les premiers écrits mettant en scène l’apparition du mort-vivant et ses agissements dans le monde des vivants, sont œuvre de deux auteurs britanniques du XIIeme siècle, Map et de Newburgh qui, dans leurs chroniques, rédigées en latin, rapportent divers écrits concernant l’existence de défunts sortant la nuit de leur tombe, afin de tourmenter leurs proches et de leur sucer le sang. A l’ouverture de leur tombe, on trouve les cadavres intacts et maculés de sang. Pour les arrêter, le seul moyen est de transpercer les corps morts a l’aide d’une épée. Cette description regroupe déjà une grande partie des caractéristiques du vampire , revenant fait de chair et d’os (contrairement au fantôme) qui se déplace la nuit pour se nourrir du sang de ses proches. Cependant, on ne retrouve pas la transmission du vampirisme aux personnes mordues. A ce moment-là, on ne parle pas encore de vampire mais de cadaver sanguisugus.On retrouve déjà quelques cas de vampirisme : En 1337 et 1347, deux vampires furent découverts, empalés puis réduits en cendres puis, de 1346 à 1353, une épidémie de peste noire s'abattit sur l'Europe, on croyait que la maladie flottait dans l'air comme la brume et s'abattait sur ses victimes, et qu'elle disparaissait au son des cloches de l'église. Enfin, en 1414, Sigismond de Hongrie (1368/1437) fait reconnaître officiellement les vampires par l'Eglise Orthodoxe, lors du Concile œcuménique. En 1520, on recense 30 000 cas de lycantropie (toujours confondu avec le vampire). C'est une psychose générale, et l'Eglise décide d'ordonner une enquête officielle sur ce phénomène qu'elle considère encore comme une superstition dénuée de tout fondement. En effet, depuis le Xème siècle, l'Eglise freinait les assimilations des légendes à au culte, celles-ci ayant tendance à trop le détourner de son austère but original de pureté spirituelle. Il fallait à présent des années, voire des siècles, avant que ne soit reconnu un nouveau saint, ou un miracle.En 1552, une réforme officialise le vampire, et donne les moyens de le détruire, et de prévenir sa prolifération. Puisqu'on a demandé son avis à l'Eglise Catholique Romaine, elle va répondre, après bien des hésitations : les vampires sont selon elle des excommuniés, à qui Dieu refuse le repos éternel de l'âme : les symboles de la foi seront les armes contre eux. L'existence du vampire est désormais soutenue "officiellement", et au lieu d'en venir à bout, cette validation va encourager ses apparitions et "codifier" quelque peu sa destruction.Le XVIIIe  

Après une certaine accalmie, le vampire revient en en cette fin du XVIIème, et une nouvelle vague de chasse aux vampires déferla, qui correspondait à peu près à l'époque des plus importantes chasses aux sorcières de l'histoire du Christianisme. Dans les salons littéraires, on aime se faire peur : c’est la période du Gothique, ou Roman noir, et le diable fait partie des sujets de prédilection. Les traités de voyageurs qui sont allés à l'est, où le vampire s'est "institutionnalisé", se multiplient. Dans les campagnes, la peur règne, la population rurale est en proie à une sorte d’obsession morbide qui tourne à la panique ... On voyait des vampires partout, les polémiques concernant leur existence réelle battaient leur plein.Le terme même de " vampire " apparaît pour la première fois dans un document officiel vers 1725 en Hongrie, dans un rapport fait par les autorités autrichiennes à propos d'un paysan nommé Peter Plogojowictz, accusé d'être réapparu après sa mort et d'avoir causé le décès de huit personnes dans son village natal de Kizilova. En France, c'est en 1732, à la suite d'une affaire similaire, le cas d'Arnold Paole accusé des mêmes maux, que le terme de vampire apparaît officiellement dans un article de la revue franco-hollandaise, Le Glaneur, traitant de ces deux cas. Ces deux affaires de vampirisme devaient donner naissance à une longue liste de non-morts attestés par l’Eglise, liste attestée lors du Concile de 1414, et les autorités locales, et ce dans toute l'Europe, jusqu'au XVIIIe siècle qui, malgré son appellation de Siècle des Lumières, vit une recrudescence étonnante de l'obscurantisme exacerbé à propos des cas de vampirisme. Le terme de « vampire » n’apparaît qu’en 1746 dans la Dissertation sur les apparitions des anges, des démons et des esprits, sur les revenants et les vampires de Don Augustin Calmet. Dans un autre ouvrage du même auteur- Vampires de la Hongrie et de ses alentours (1749), on trouve la définition suivante du vampire : « Les revenants de Hongrie, les vampires, sont des hommes morts depuis un temps considérable, quelquefois plus, quelquefois moins long, qui sortent de leurs tombeaux et viennent inquiéter les vivants, leur sucer le sang, leurs apparaissent, font le tintamarre a leur porte et enfin leur causent la mort. »

Le XIXe  

A cette époque, le Vampire n’est plus accusé d’engendrer les calamités, maladies et épidémies, et privé de ce rôle essentiel, il aurait dû disparaître à jamais. Mais ce n’est pas le cas, il réapparaîtra en Angleterre prise dans la logique d’une révolution industrielle doublée d'un froid matérialisme rigide et étouffant. Au milieu d'une société qui réprimait tant l'âme humaine, la littérature replongea directement ses racines dans ce qui n'était plus que folklore. Le Fantastique, populaire depuis le XVIIIème, et renouant avec les démons familiers de l'âme, devint un moyen de se soustraire à cette réalité oppressante, et se fit porte-parole de l'inconscient . Le vampire se retrouva ainsi investi d’une nouvelle mission, à savoir exalter nos peurs déguisées sous couvert de la fiction fantastique. D'abord sous la plume de Polidori ("The Vampyr", 1819 et sa suite française "Lord Ruthven et les vampires" par Cyprien Berard, de 1820), puis sous celle de LeFanu ("Carmilla", 1872). Mais il est aussi présent dans quelques études (les ouvrages de Montague Summers (1880/1948), ou un article dans le "Dictionnaire infernal" de Collin de Plancy, qui raconte l'histoire du vampire Harppe). Mais il existe cependant quelques cas de vampirisme, comme, par exemple, en 1871, celui de Croglin Grange, qui fut romancé par la suite.Mais l’apogée du vampire en cette fin du XIXe siècle reste sans conteste le célébrissime « Dracula », de Bram Stoker. (1892) :le roman, basé sur de nombreuses recherches sur les ouvrages du siècle précédent, et, bien que l'auteur ne se soit jamais rendu en Transylvanie, ce roman porte en lui la force des anciennes croyances, mais il les réduit néanmoins de façon involontaire à une caricature de ce qui fut le Voleur de Vie. Le succès du "Dracula" entraîna de nombreuses adaptations cinématographiques, citons, entre autre, "Nosferatu" de Murnau (1922), ou "Dracula" de Ted Browing, premier film parlant sur les vampires (1931) au "Bram Stoker's Dracula" de F.F. Coppola (1992), plus d'une centaine de films sont consacrés au célèbre Comte. Cela acheva de répandre le Nosferatu et d'effectuer le remplacement des autres formes de vampires dans les esprits.

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► Les Fleurs du mal► XXIX LE VAMPIRE ►    

    Toi qui, comme un coup de couteau,    Dans mon cœur plaintif es entrée,    Toi qui, comme un hideux troupeau    De démons, vins, folle et parée,            De mon esprit humilié    Faire ton lit et ton domaine,    — Infâme à qui je suis lié    Comme le forçat à la chaîne,                Comme au jeu le joueur têtu,    Comme à la bouteille l'ivrogne,    Comme aux vermines la charogne,    — Maudite, maudite sois-tu !            J'ai prié le glaive rapide    De conquérir ma liberté,    Et j'ai dit au poison perfide    De secourir ma lâcheté.            Hélas ! le poison et le glaive    M'ont pris en dédain et m'ont dit :    « Tu n'es pas digne qu'on t'enlève    A ton esclavage maudit,            Imbécile ! — de son empire    Si nos efforts te délivraient,    Tes baisers ressusciteraient    Le cadavre de ton vampire ! »

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Bilan

► Est monstrueux qui est à l’écart par rapport à la norme , par rapport à un canon idéal, moral ou esthétique. Qui s’éloigne par trop de l’image de l’homme en tant que créature de Dieu est rejetée hors de l’humanité…

► Il faut distinguer entre monstre et créature fantastique mais cette distinction est faite tardivement, avec les progrès de la science et de la géographie qui permettent de prouver que les cynocéphales ou la licorne n’existent pas et sont des produits de l’imagination humaine.

► Le monstre frappe l’imagination. « Monstre » désigne ce qu’on montre. Exhibé à la foire, montré du doigt, la tare du monstre lui confère une aura qui ne laisse personne indifférent puisqu’être a-normal, c’est aussi être extra-ordinaire.