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Forum D. 2/3 15 Directeur général des douanes pendant 21 ans A la veille de la retraite, Rudolf Dietrich entre rétrospective et perspectives La frontière sud, un point sensible en matière de migration La tâche des gardes-frontière tessinois alors que de nombreux réfugiés entrent dans le pays Importation frauduleuse de véhicules de luxe Astuces de fraudeurs et ripostes d'enquêteurs Le magazine d’information de la douane suisse | www.ezv.admin.ch

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Forum D. 2/3 15

Directeur général des douanes pendant 21 ans A la veille de la retraite, Rudolf Dietrich entre rétrospective et perspectives

La frontière sud, un point sensible en matière de migration La tâche des gardes-frontière tessinois alors que de nombreux réfugiés entrent dans le pays

Importation frauduleuse de véhicules de luxe Astuces de fraudeurs et ripostes d'enquêteurs

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2 Forum D. | Citations

«Nous souhaitons renforcer les services de conseil et de soutien relatifs à l’application des accords de libre-échange suisses. Cet aspect est important, car même si le Conseil fédéral a négocié de nombreux accords intéressants, peu d’entreprises savent comment en profiter, tant ils sont complexes.» Daniel Küng, directeur Switzerland Global Enterprise, Sonntagszeitung, 5/15

«La publicité, c’est bon pour le fromage suisse, pas pour le pays.» Tim Guldimann, ancien ambassadeur à Berlin, Blick, 5/15

«En participant au marché intérieur, nous renonçons à une partie de notre souveraineté. C’est le prix à payer pour pouvoir profiter de l’accès au marché européen.» Tim Guldimann, ibid., 5/15

«Le Corps des gardes-frontière ne fait pas que travailler aux diffé-rents postes frontières; il représente aussi un partenaire de sécurité fiable pour la police, et ce depuis toujours.» Markus Melzi, ancien commissaire de la police judiciaire et porte-parole du Ministère public de Bâle-Ville, Basler Zeitung, 6/15

«Visiblement, toute ouverture des frontières est suspecte aux yeux de l’Union suisse des paysans. Enfin, tant qu’il ne s’agit pas d’im-portation de semence, de tracteurs, de diesel, ou d’importation en franchise d’impôt de fourrage concentré.» Anita Fetz, conseillère aux Etats PS, Die Zeit, 5/15

«Les champions nationaux des économies se font mousser devant le public électoral. Au Conseil national, ils aimeraient amputer le budget de la Confédération de plusieurs milliards de francs en bloc, et ce en cinq sec. L’armée, qui compte un tiers des employés fédéraux, serait la plus touchée; de même que le Corps des gardes-frontière, dont les mêmes milieux veulent justement aug-menter les effectifs, à juste titre. A Bâle, nous pouvons en parler en connaissance de cause. Les Tessinois et les Genevois aussi. Pour-tant, au Conseil national, aucun membre de l’UDC ne s’est opposé à cette demande de coupe du budget.» Anita Fetz, conseillère aux Etats PS à Bâle-Ville, ibid.

«L’Europe doit ouvrir ses portes à des personnes qui, sans cela, risquent de succomber à la famine, à la maladie ou à la guerre. Nous ne pouvons pas nous barricader dans notre beau pays et fermer les yeux.» Carla Del Ponte, juriste, Blick, 6/15

«Pas de frontière, pas de pays.» Viktor Orban, premier ministre de la Hongrie, Tagesanzeiger, 7/15

«La Suisse devrait davantage libéraliser ses marchés de façon unilatérale. Au lieu de l’affreux protectionnisme préconisé par le Conseil national pour les agriculteurs et le commerce de détail, nous devrions appliquer le concept de ’certification avec tarifica-

tion remplaçant l’autorisation’. Tous les produits qui ne répondent pas aux normes suisses mais qui sont autorisés dans un pays de l’OCDE pourraient être importés librement.» Reiner Eichenberger, professeur de théorie de la politique économique et financière, Swisseurope, 7/15

«Je me sens bien en Suisse, mais pour trouver l’inspiration, je suis obligé de partir à l’étranger.» Max Usata, chanteur du groupe bien-nois Puts Marie, Das Magazin, 5/15

«Nous ne sommes pas en guerre! Je ne vois pas l’intérêt d’envoyer l’armée aux frontières.» Hans-Jürg Käser, conseiller d’Etat bernois, SonntagsZeitung, 6/15

«La facilitation et la promotion du commerce transfrontalier restent une tâche permanente de la douane.» Rudolf Dietrich, directeur général des douanes, lors de la cérémonie de remise des diplômes de l’Ecole supé-rieure de douane à Berne, 8/15

«D’après une enquête externe indépendante, les coûts de gestion administrative des barrières doua-nières, pour l’économie exportatrice et importatrice, s’élèvent non pas à 1 % de la valeur marchande, contrairement à ce qui a été dit pendant des années, mais tout juste à 1 ‰.» Rudolf Dietrich, ibid.

«Lors de la sélection des voitures à contrôler, l’intuition et l’expérience d’un garde-frontière sont plus impor-tantes que les critères esthétiques.» Peter Zellweger, chargé d’information de la région Cgfr II, Zürcher Unterlän-der, 8/15

«Même si nous n’attrapons personne, nous sommes satisfaits. Au final, notre mission de prévention est tout aussi importante.» Peter Zellweger, ibid.

Tim Guldimann

Viktor Orban

Carla Del Ponte

Anita Fetz

Peter Zellweger

Citations

Page de couverture: SPEDLOGSWISS, Photo: Andreas Greber, Berne

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3Forum D. | Sommaire

4 En point de mire 4 Directeur général des douanes pendant 21 ans: à la veille de la retraite, Rudolf Dietrich

entre rétrospective et perspectives

8 Dossiers

8 La frontière sud, un point sensible en matière de migrations

11 Technique: atteindre l’objectif plus rapidement grâce au nouveau système d’aide à la conduite et de gestion de l’engagement (FUELS) du Cgfr

13 Commerce extérieur: exportations par la voie aérienne au cours du 1er semestre 2015

14 «Une administration dans l’administration»: la Régie fédérale des alcools (RFA) sera intégrée dans l’Administration fédérale des douanes (AFD) au début de 2016

16 ARGOS: améliorer l’analyse des risques et, par conséquent, l’efficacité des contrôles

18 Réduire le nombre de recours voués à l’échec: dans son travail de diplôme pour l’Ecole supérieure de douane, l’experte de douane Regina Hostettler fait des propositions pour optimiser la gestion des recours de l’AFD

20 Les pays d’Afrique également concernés par la douane électronique: l’expert de douane suisse Patric Burkhard relate sa mission à la Commission de l’UE

22 «La clé du succès, c’est la mentalité caucasienne»: Roger Hermann, directeur du Bureau régional pour le renforcement des capacités en Europe, nous parle de son travail pour l’Organisation mondiale des douanes à Bakou, en Azerbaïdjan

23 Sur la piste des fraudeurs: Patricia Wichser, rédactrice pour le «St. Galler Bauer», a suivi une équipe de contrôleurs d’entreprises lors du contrôle de deux exploitations agricoles

25 Infographie: plus de véhicules mais moins d’impôt sur les huiles minérales

26 Un garde-frontière chez Europol: Martin Michel évoque sa mission à La Haye

28 Le nouveau centre douanier de Brigue-Glis (VS) illustre la stratégie douanière consistant à quitter la frontière

30 Origine: qu’entend-on par «déclarations d’origine du fournisseur sur territoire suisse»?

32 Urs Hoffmann, président du Conseil d’Etat, chef du Département de l’économie et de l’intérieur du canton d’Argovie et co-président de la plateforme CCDJP/AFD, invité de Forum D.: tous alliés pour la protection des frontières

33 Section antifraude: pratiques illégales avec des véhicules de luxe

34 La douane lutte contre le cabotage illégal

35 Section antifraude: soustraction de droits de douane grâce à une tromperie sur l’origine

36 Quand je pense à la douane... Jürg Martin Gabriel, professeur honoraire en politique internationale à l’EPFZ

37 Peter Widmer, président de l’association swiss export et membre du conseil d’administration de Rhenus Alpina AG, invité de Forum D.: la douane, alliée de l’économie

51 Panorama

51 Viande avariée au menu d’un repas d’enterrement – deux affaires de contrebande de viande qui sortent de l’ordinaire

52 Un zèle exemplaire: histoire de la douane (deuxième partie)

54 J’apprends tous les jours quelque chose de nouveau: Brigitt Menegazzi, suppléante de l’inspecteur de douane, nous parle de son travail

56 Maria Moser, directrice du Musée des douanes, dresse le bilan de l’exposition temporaire «Fuite – protection – humanité: le travail du HCR»

58 L’engagement des premières femmes au Corps des gardes-frontière (Cgfr) remonte à 25 ans: rétrospective avec Regula Ita

61 Lionel Stio: retour réussi dans le monde professionnel grâce notamment à un stage pratique à la douane

62 Histoire: Goumois (JU) – la Suisse ouvre ses portes aux réfugiés polonais

64 Goumois, de part et d’autre du Doubs: une localité frontalière suisse porte le même nom que la localité étrangère située juste de l’autre côté de la frontière

68 Des frontières en mouvement – une Suisse en expansion grâce à la fonte des glaciers

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Sommaire

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4 Forum D. | En point de mire

«A la fois plaisant et passionnant»Directeur général des douanes pendant 21 ans

Après 21 ans à la tête de l’Administration fédérale des douanes (AFD), Rudolf Dietrich part à la retraite à la fin de novembre 2015. Apprécié de ses collaborateurs comme de ses partenaires, le directeur général a marqué la douane suisse de son empreinte et l’a fait évoluer à bien des égards. Pour lui, les réorganisations ont été «une constante, mais aussi la condition sine qua non pour s’adapter aux nouvelles exigences». Dans les lignes qui suivent, entre rétrospective et perspectives, il fait part à Forum D. de ce que lui inspirent différents mots clés.

Travailler à l’AFDCe que j’ai trouvé fascinant et très satisfaisant à la douane, c’est qu’à la fin de chaque journée il y a quelque chose de concret et de mesurable. Nous ne produisons pas pour la salle d’étude et la théorie, bien que nous ayons nous aussi le travers de noircir beaucoup (trop) de papier ou d’écrans. La douane a quotidienne-ment des centaines de milliers de contacts avec la clientèle, auxquels s’ajoutent d’innombrables discussions et concertations, que ce soit sur le plan interne ou avec des partenaires tels que les associations économiques, les milieux politiques, les syndicats ou d’autres parties prenantes, et tout cela dans les différentes langues et cultures nationales ainsi qu’à l’échelle internationale. J’ai trouvé tout cela à la fois plaisant et passionnant.

Evénements et rencontres marquantsLes rencontres et événements positifs ont été nombreux; ce serait injuste

des personnes à travers la frontière, on ne devrait pas sentir la présence de la douane et ne subir ni charges administratives, ni retards, ni frais. Malgré cela, nous devons exécuter nos nombreuses tâches intégralement, de façon uniforme et juste. Lorsque de la viande est avariée, qu’un jouet est toxique ou que des légumes sont radioactifs, ou lorsque des personnes abusent des achats à l’étranger, nous devons garantir la protection des consommateurs et producteurs suisses. Et c’est sans parler de l’élimi-nation de la criminalité transfrontalière et du trafic d’armes ou de drogue. Confrontés au destin des réfugiés, nous devons agir de façon cohérente, mais avec humanité et respect. Tous ces défis ne doivent cependant pas nous paralyser, mais plutôt nous stimuler!

La douane m’a offert un job de rêve et j’y ai passé de très belles années. Cela m’inspire une profonde gratitude.

de désigner certains d’entre eux en particulier. La variété de nos activités est ce qui m’a le plus marqué. C’est une chose que j’ai encore ressentie lors de ma tournée d’adieu dans les arrondissements et les régions. En l’espace de quelques heures, on passe d’un poste frontière reculé sur les hauteurs du Jura au siège central d’un groupe international, ou d’un port rhénan animé à un aérodrome à piste en herbe, et partout nous avons des tâches à accomplir. Sur le plan négatif, je retiens avant tous les décès que nous avons eu à déplorer, certains étant dus à une violence aveugle. Dans ces situations, on se sent terri-blement impuissant par rapport aux proches des victimes, même si nous nous sommes toujours efforcés de tirer les leçons de ces terribles événe-ments.

Le dilemme de la douaneC’est pour moi une expression appro-priée. Lorsqu’il s’agit de transporter rapidement des marchandises et

Rudolf Dietrich en 1994, lors de son entrée en fonction… ... en 1996, en conversation avec des gardes-frontière genevois…

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Loi sur les douanesC’est la base de nos procédures et de nos compétences, refaite à neuf en 2005 mais nécessitant déjà des inno-vations et des compléments. En tant qu’administration d’un Etat de droit, nous devons respecter strictement la loi, mais sans nous cacher derrière elle. Nous devons toujours nous demander si les règles sont encore judicieuses ou doivent au contraire être adaptées.

l’économie, ces changements sont un défi permanent qui n’est pas près de s’arrêter.

RéorganisationsPendant mes 21 ans à la douane, ils ont été une constante, mais aussi la condition sine qua non pour s’adapter aux nouvelles exigences. La douane civile et le Cgfr ont fait preuve de leur aptitude au changement dans le cadre d’innombrables projets, dont

renouvellement intégral des TIC, deux programmes à long terme, consti-tueront à tout point de vue des défis pour la douane.

Objectifs et projets personnels après le départ à la retraiteActuellement, il n’y a (heureusement) pas de grands projets concrets. Je me réjouis de pouvoir entreprendre avec ma femme tout ce que nous avions jusqu’à présent repoussé. Je lui ai

ChangementsIls ont été réguliers, significatifs et généralisés. Ce qui frappe le plus, c’est l’augmentation du volume d’affaires et du tempo, favorisée par l’informa-tisation et l’automatisation. Certaines redevances ont été transformées (on est passé de l’IChA à la TVA et des droits de douane sur les carburants à l’impôt sur les huiles minérales), tandis que d’autres ont été introduites (RPLP, taxes d’incitation). La loi sur les douanes a été entièrement révisée, et nous avons simplifié les procédures et assoupli notre stratégie en matière de contrôle. Le Cgfr a maîtrisé l’adhé-sion à Schengen et opère selon une nouvelle doctrine d’engagement. La période récente a surtout été caracté-risée par l’augmentation du nombre d’accords de libre-échange. Avec ces derniers, nous entendons soutenir notre industrie d’exportation sur les marchés étrangers. Pour la douane et

ils sont sortis renforcés, notamment parce que nous avons à chaque fois réussi à mettre en œuvre les change-ments organisationnels et les coupes budgétaires sans aucun licenciement. Le personnel s’est toujours associé à ces processus avec compréhension et confiance, ce dont je lui suis extrême-ment reconnaissant.

Défis pour l’avenirL’évolution va se poursuivre et sera probablement encore plus rapide. Mais je suis persuadé que nous avons la bonne attitude envers les change-ments et que nous saurons les gérer, cela à tous les échelons. La moderni-sation fondamentale de la formation, caractérisée par l’introduction d’une école supérieure et d’un examen professionnel supérieur, crée des conditions particulièrement favorables à cet égard. La refonte de la ges-tion du trafic des marchandises et le

par ailleurs promis de jouer un rôle plus actif dans le ménage. J’espère en outre que mon état de santé me permettra de profiter du grand air et d’être un bon client des magasins de sport!

RemerciementsLa douane m’a offert un job de rêve et j’y ai passé de très belles années. Cela m’inspire une profonde grati-tude. La confiance dont j’ai bénéficié de tous côtés m’a toujours beaucoup aidé. Le travail au sein du comité de direction a toujours été empreint d’égards et de respect, même quand la discussion était vive. La motivation et la loyauté des collègues travaillant dans les directions, les arrondisse-ments et les régions ont été une source d’énergie. Je vous remercie tous du fond du cœur pour le soutien que vous m’avez apporté et vous souhaite un avenir radieux!

... en 2008, au poste frontière de Bâle/Weil-autoroute… ... et en 2015, en compagnie de Thomas Schwarzenbach, directeur

de SPEDLOGSWISS (à gauche), et de Franz Schnider, président de la

commission douanière de SPEDLOGSWISS.

SPEDLOGSWISS. Photo: Andreas Greber, Berne

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Des personnalités nous parlent de Rudolf Dietrich

SPEDLOGSWISS. Photo: Andreas Greber, Bern

Eveline Widmer-Schlumpf, conseillère fédérale et cheffe du DFF«L’AFD sans son directeur général Rudolf Dietrich, c’est une situation à laquelle il ne sera pas facile de s’habi-tuer. Il a dirigé son unité administra-tive avec compétence et engagement pendant pas moins de 21 ans et fait ainsi partie des ’douaniers’ les plus anciens. J’ai moi-même pu collaborer avec lui pendant cinq ans, ce qui m’a permis de découvrir un interlocuteur d’une grande loyauté mais qui s’en-gageait sans réserve pour son office et ses collaborateurs. Cher Ruedi, je t’en remercie du fond du cœur. Je te souhaite le meilleur pour la prochaine étape de ta vie!»

Thomas Schwarzenbach, directeur de SPEDLOGSWISS«L’administration des douanes et le milieu des transitaires ont tous les deux intérêt à ce que le commerce extérieur suisse soit prospère. Si les rapports entre la douane et les transitaires ont pris la forme d’un partenariat, nous le devons en grande partie à Rudolf Dietrich. Interlocuteur fiable, il a toujours recherché des solutions acceptables, pragmatiques et judicieuses. Beaucoup de ces solutions nous semblent aujourd’hui aller de soi, mais n’ont été possibles que grâce à Rudolf Dietrich, un homme de conviction doté de clairvoyance, d’intuition et surtout d’un humour très fin. Je le remercie cordialement de tout ce qu’il a réalisé pour nous et lui présente mes vœux les meilleurs.»

Beat Moser, directeur de l’associa-tion scienceindustries«Au cours des 21 années pendant lesquelles Rudolf Dietrich a dirigé l’administration des douanes, tant les exportations que les importations de la principale industrie suisse d’expor-tation ont doublé. Cette progression réjouissante est aussi à mettre sur le compte de l’amélioration perma-nente de l’efficience des procédures douanières. Je remercie Rudolf Dietrich d’avoir toujours été disposé à collaborer avec scienceindustries. Nous espérons maintenir cette voie couronnée de succès avec la DGD. Je présente à Rudolf Dietrich mes vœux les plus chaleureux pour son avenir.»

Fritz Etter, directeur de la Régie fédérale des alcools (RFA)«Ces dernières années, Ruedi Dietrich et moi avons travaillé intensivement sur un objectif commun: intégrer la RFA dans l’AFD dans les meilleures conditions possibles. Même quand tout semblait très mal engagé, nous avons toujours trouvé de bonnes solutions. Avec ses énormes connais-sances techniques, sa vaste expérience et son caractère tranquille, Ruedi a toujours su trouver la clé du succès. Lorsqu’une situation semblait à pre-mière vue insoluble, il avait toujours cette phrase apaisante: ’Mir hei ir OZD no immer e Lösig gfunge!’ Au nom des collaborateurs de la RFA, je remercie cordialement Ruedi Dietrich de son précieux engagement, de sa grande compréhension pour la situa-tion particulière de la RFA ainsi que pour notre collaboration agréable et constructive.»

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Urs Hofmann, ancien conseiller national, président du gouvernement argovien, Co-président de la plateforme CCDJP/AFD«Il y a des hommes qui marquent leur fonction. Rudolf Dietrich est un directeur général des douanes qui dégage tout ce qu’on désire pour ce poste: calme, sérénité, sérieux, fiabilité. Dès ma première rencontre avec Rudolf Dietrich en tant que membre de la Com-mission des finances du Conseil national et de la Délégation des finances des Chambres fédérales, j’ai su que l’Administration fédérale des douanes était dans de bonnes mains. Je remercie Rudolf Dietrich pour la bonne collaboration qu’il a toujours maintenue avec le Parlement et les cantons et je lui présente tous mes vœux pour ce nouveau chapitre de son existence.»

Kunio Mikuriya, secrétaire général de l’Organisation mondiale des douanes«Il m’est particulièrement agréable de pouvoir rendre ici hommage à un estimé collègue douanier, M. Rudolf Dietrich, à l’occasion de son départ à la retraite après quelque 40 ans de service distingué dans l’administration fédérale et un mandat presque inégalé de 21 années en tant que directeur général.Durant deux décennies, sous sa direc-tion avisée, la douane suisse est allée de succès en succès et a constitué pour les autres administrations des douanes un modèle de cohérence et une source de bonnes pratiques.M. Dietrich a très bien appréhendé l’importance d’une douane efficace et productive et a compris en outre qu’il fallait regarder au-delà des frontières de la nation pour avoir une vision plus

large de la douane. Il a été une source précieuse de conseils et de coopéra-tion et a apporté beaucoup à la com-munauté douanière au fil des années, notamment à travers sa participation personnelle dans les organes clés de l’Organisation mondiale des douanes, à savoir le Conseil, où les directeurs généraux des douanes de 180 pays se réunissent pour échanger des avis et bonnes pratiques, et la Commission de politique générale, à la fois groupe de réflexion et direction de l’organisation. Il a fait profiter ses collègues de ses connaissances techniques et politiques considérables, fruit de sa longue expérience.Sous la direction de M. Dietrich, la douane suisse a fait bénéficier des fonctionnaires des douanes du monde entier d’un renforcement des capa-cités, d’une assistance technique et d’une formation inestimables. La qualité des experts mis à disposition par la Suisse est largement reconnue et appréciée dans le monde entier. Il a également détaché des fonction-naires de haute qualité au Secrétariat de l’OMD, pour le plus grand bien de l’OMD et de la mise en œuvre des politiques de l’OMD.A titre personnel ainsi que profes-sionnel, M. Dietrich est apprécié et res-pecté pour son intégrité, sa modestie

et sa tranquille efficacité – qualités largement reconnues dans la commu-nauté douanière internationale mais également, et chose très importante, au sein de l’Administration suisse des douanes elle-même. Il a en outre constamment veillé à encourager les jeunes fonctionnaires de son adminis-tration qui ont fait preuve d’enthou-siasme et d’aptitude pour la profession douanière.M. Dietrich m’a donné à plus d’une reprise de judicieux conseils et je me suis toujours réjoui de pouvoir discuter avec lui de questions douanières d’actualité.La Suisse a eu le privilège de pouvoir compter, en la personne de M. Dietrich, sur une personne dévouée et talentueuse qui a tenu la barre pendant 21 ans. J’espère sincèrement que M. Dietrich pourra, durant sa retraite, rencontrer autant de réussite que durant sa carrière professionnelle. Il nous manquera indéniablement, mais son héritage se perpétuera au sein de la douane suisse et dans les initiatives nationales et internationales de celle-ci.Au nom de la communauté douanière internationale, je souhaite à M. Dietrich une retraite longue, heureuse et en bonne santé.»

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La frontière sud, un point sensible en matière de migration

Cgfr

Depuis 2011, les effets du Printemps arabe ainsi que de la situation économique et politique affectant de nombreux pays d’Afrique se font de plus en plus sentir à nos frontières. Le sud du pays est particulièrement touché: au cours du premier semestre, le Corps des gardes-frontière (Cgfr) y a découvert un nombre record de personnes en séjour illégal et de passeurs. Forum D. s’est entretenu de la situation actuelle avec Patrick Benz, chef du domaine spécialisé Migration au Cgfr.

al. Depuis le début du Printemps arabe en 2011, le Cgfr n’avait encore jamais découvert un nombre aussi élevé de personnes en séjour illégal et de passeurs que pendant le premier semestre 2015. Alors que pendant tout l’année 2011 on avait dénombré 5614 personnes en séjour illégal et 114 passeurs, on en était déjà à 19 636 personnes en séjour illégal et à 326 passeurs présumés à la fin de septembre 2015. Ces chiffres specta-culaires ont déjà suscité d’intenses dis-cussions politiques, et pas seulement en Suisse. Simultanément, les renvois aux frontières intérieures suisses ont comme prévu augmenté. Alors qu’en 2014 le nombre de personnes ren-voyées était encore de quelque 3500 (dont 2600 vers l’Italie), on en était déjà à plus de 4600 personnes à la fin du troisième trimestre 2015 (dont 3600 vers l’Italie). Les chiffres montrent bien que le Cgfr a du travail plein les bras, avant tout à la frontière sud. Et

Le domaine spécialisé Migration reçoit par ailleurs des informations spécifiques d’autorités partenaires suisses et étrangères très diverses. Le domaine spécialisé dépouille ces informations et les rend accessibles aux collaborateurs et à d’autres services concernés. De plus, le Cgfr dispose d’agents de liaison au Secré-tariat d’Etat aux migrations.»

Les passeurs réagissentDans le domaine de la migration comme ailleurs, les engagements du Cgfr sont effectués sur la base de tableaux de situation, d’informa-tions diverses et de ce qu’on appelle des profils de risques. C’est le seul moyen d’opérer des concentrations

la situation migratoire n’est pas seule en cause:le tourisme criminel reste un grand problème, en particulier au Tessin, certaines régions proches de la frontière subissant régulièrement les visites de bandes de cambrioleurs.

Des renforts à la frontière sudCette situation tendue a eu deux conséquences: d’une part, le person-nel permanent des régions méri-dionales a été affecté en fonction de la situation; d’autre part, des collaborateurs supplémentaires issus d’autres régions ont été déplacés à la frontière sud. C’est ainsi que quelque 20 gardes-frontière venus d’autres parties du pays effectuent leur service avec leurs collègues tessinois, qui sont actuellement au nombre de 310. En fonction de la situation, ces enga-gements de renfort peuvent encore s’amplifier. Cependant, s’il devait à l’avenir être nécessaire de renforcer notablement certains tronçons de la frontière, cela aurait des consé-quences en raison de la faiblesse des ressources. Par exemple, il se pour-rait que les prestations douanières doivent être réduites dans les régions qui détachent du personnel. Les mesures de renforcement actuelles sont-elles suffisantes? «Oui, nous travaillons avec les moyens à notre disposition», répond Patrick Benz. «Comme dans d’autres domaines, le succès est avant tout conditionné par l’information et par un engagement ciblé du personnel. Les constatations faites à la frontière et dans l’espace frontalier sont traitées par des respon-sables régionaux du renseignement et transmises au Centre d’analyse et de renseignement (CAR), sis à Berne.

Patrick Benz en plein entretien

A la gare de Chiasso (photo Roland Schmid)

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de surveillance efficaces à l’aide du personnel et des moyens disponibles. Jusqu’à la fin de septembre de cette année, 48 % (9371) de toutes les personnes en séjour illégal ont été découvertes au Tessin, 20 % de ces personnes (3880) ont été intercep-tées à la frontière sud du Valais. La plupart de ces personnes sont entrées dans le pays par Chiasso ou par Brigue, principalement en train. «Ces constatations ont naturellement des conséquences sur notre manière de fixer les priorités et sur les endroits où nous les appliquons.» Et qu’en est-il des passeurs? «A l’heure actuelle, on les rencontre avant tout dans le trafic routier. Ils utilisent aussi bien des postes frontières occupés, où ils espèrent se fondre dans la masse, que des postes frontières inoccupés.» C’est ainsi que, pendant les neuf premiers mois de l’année 2015, le Cgfr a intercepté quelque 77 % des passeurs dans le trafic routier. Et com-ment la «partie adverse» réagit-elle aux contrôles du Cgfr? Patrick Benz reconnaît que c’est le jeu du chat et de la souris. «Dans le domaine de la migration, nous constatons sur le plan régional une légère tendance à se rabattre sur d’autres modes de transport, tels que les autocars trans-

frontaliers. Sur le plan international, il y a un transfert de la Méditerranée aux Balkans.» Un nombre croissant de migrants et de passeurs utilisent la route passant par la Turquie, la Grèce et la Serbie afin d’accéder à l’Europe centrale et septentrionale par la Hongrie. Cependant, au vu de l’énorme quantité de personnes actuellement sur les routes, ces tendances ne sont pas encore nettes. Les passeurs sont également devenus plus prudents et évitent le plus sou-vent d’accompagner personnellement les migrants. C’est précisément dans le cas des passeurs que se pose la question de l’objectif de notre lutte. Les arrestations de passeurs présumés empêchent-elles la migration irrégu-lière? Résoudraient-elles le problème? Patrick Benz répond par la négative et explique que la lutte contre l’activité des passeurs n’a pas pour objectif exclusif d’empêcher la migration, mais vise en premier lieu à réprimer une infraction. Il complète sa pensée en déclarant que les hommes fuient en raison de la guerre, de la pauvreté ou de l’absence de perspectives, et pas à cause des passeurs. Il précise cependant ce qui suit: «Les passeurs sont des criminels qui exploitent la détresse des réfugiés afin d’en tirer

profit. Ils enfreignent la législation suisse, quelle que soit la raison qui a poussé les migrants à quitter leur patrie et à s’en remettre aux pas-seurs.»Grâce aux investigations des autorités judiciaires, Patrick Benz sait que des organisations de passeurs peuvent facilement gagner jusqu’à 100 000 euros par mois grâce à leur activité. Il y a peu, les médias italiens ont rapporté que la criminalité organi-sée tire elle aussi de gros profits de la détresse des migrants. Mais la détresse et l’ignorance de ces derniers sont également exploitées à plus petite échelle. Par exemple, à la gare de Milan, des personnes prétendant aider les migrants qui ne connaissent pas les lieux leur achètent le billet et leur expliquent comment se rendre en Suisse. Lors de ses engagements à Chiasso, Patrick Benz a déjà vu bon nombre de ces billets. «Un voyage de Milan à Chiasso en 2e classe coûte environ 20 euros. Or, les personnes qui offrent leurs ’services’ aux migrants dans les gares réclament souvent un multiple de cette somme.»

Des quatre coins de la planèteIl est actuellement beaucoup question

A la gare de Chiasso (photo Roland Schmid) Une patrouille mobile dans l’espace frontalier à Chiasso (photo Roland Schmid)

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de la guerre civile en Syrie, qui a semé la destruction dans cette région. Des centaines de milliers de Syriens ont trouvé un abri en tant que réfugiés, principalement dans les pays voisins. A la frontière sud de notre pays, les Syriens ne sont pas encore très nom-breux. Des nations africaines telles que l’Erythrée, la Gambie, la Somalie, le Nigéria et le Sénégal sont en tête de la statistique régionale du Cgfr concernant les personnes en séjour illégal au Tessin. Pour l’ensemble de la Suisse, les Erythréens sont égale-ment en tête, tandis que les Syriens occupent le 10e rang. Il en va autrement des passeurs. Les ressortissants du Kosovo sont les plus nombreux, suivis de ceux de Suisse, d’Erythrée, de Somalie, de Serbie, de Syrie, de Turquie, du Pakistan, d’Irak et d’Allemagne. Mais pourquoi le Kosovo? «C’est en relation avec l’exode des Kosovars, qui a com-mencé à la fin de 2014 et que nous avons constaté à partir de novembre/décembre 2014, principalement aux frontières nord et est.» De nombreux passeurs semblent provenir du même milieu culturel que les personnes qu’ils aident à franchir la frontière. Certains d’entre eux semblent aussi déjà posséder la nationalité d’un pays de l’UE ou de l’AELE. Les raisons sont de nature pratique, par exemple la communication ou les relations avec le pays de provenance. Cette particula-rité complique également les investi-gations menées contre les passeurs. Par ailleurs, depuis que le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) a intro-duit la procédure d’asile en 48 heures, entre autres pour les Kosovars, la motivation de ces personnes à venir en Suisse et à y déposer une demande d’asile a fortement baissé.

Des gardes-frontière flexiblesLes gardes-frontière ont régulièrement l’occasion de montrer à quel point ils sont flexibles. «J’ai le plus grand respect pour le travail de nos colla-borateurs, qui sont quotidiennement confrontés, en particulier à la frontière méridionale, à la pression migratoire venue du sud et à de nombreux destins humains», nous dit Patrick Benz. Se référant à la routine des

contrôles au poste de gardes-frontière de la gare de Chiasso, il nous déclare: «Il n’est pas rare qu’un garde-fron-tière ayant effectué le contrôle des migrants doive ensuite se rendre à la caisse pour y faire le décompte des redevances d’entrée dues par les adeptes du tourisme d’achat. Cela aussi fait partie des tâches des gardes-frontière.»

Des passeurs agressifsAvec la plupart des migrants, les contrôles se déroulent sans problèmes. Les gardes-frontière découvrent rarement de la drogue, des armes ou de faux papiers sur eux. En général, ils n’emportent guère plus qu’un billet de train et un peu d’argent. D’après Patrick Benz, il est également très rare qu’ils opposent de la résistance. Par contre, avec les passeurs, il en va autrement. «Avec eux, le potentiel de violence et le danger sont beaucoup plus élevés.» Alors qu’en 2014 on a enregistré 154 cas de violence envers des membres du Cgfr, le nombre de cas a

été de 274 l’année passée.La plupart des migrants ont un long et pénible chemin derrière eux et sont marqués par ce qu’ils ont vécu. Comment les gardes-frontière gèrent-ils de telles situations? Patrick Benz: «Nous sommes conscients que bon nombre de ces personnes ont vécu des événements traumatisants en relation avec des uniformes. Nous en tenons compte lorsque cer-taines d’entre elles ont une attitude défensive ou semblent apeurées.» Les murs du poste de gardes-fron-tière de Chiasso Stazione portent également des affiches rédigées en différentes langues qui expliquent à ces personnes qu’elles se trouvent sur territoire suisse. Ce simple fait apaise nombre d’entre elles.Les gardes-frontière sont régulière-ment confrontés à des personnes malades: «Il arrive que des migrants soient atteints de la gale, et nous

avons déjà eu des cas de tubercu-lose.» C’est pourquoi les gardes-fron-tière portent toujours des gants pendant leurs contrôles. Si l’on soupçonne une maladie contagieuse, les personnes concernées sont mises à l’écart et l’on fait immédiatement appel à du personnel médical. En outre, chaque poste de gardes-fron-tière est équipé de combinaisons protectrices et hygiéniques. L’officier Patrick Benz fait un sort à un cliché relatif aux migrants: «Ce ne sont de loin pas tous des anal-phabètes. Les personnes arrivant du Proche-Orient, en particulier, sont souvent issues de la classe moyenne et ont un bon parcours scolaire et professionnel.» La plupart d’entre elles se font comprendre en anglais, en français ou en italien, ou alors par gestes. Les questionnaires que tous les arrivants doivent remplir sont disponibles dans les langues les plus courantes. Comment Patrick Benz évalue-t-il les flux migratoires actuels? «Nous avons déjà été confrontés à des flux migratoires par le passé. Je me souviens de la situation des réfu-giés dans les années 80 et 90, lorsque les guerres civiles du Sri Lanka et de l’ex-Yougoslavie déclenchaient de forts mouvements migratoires.» Et maintenant?Malgré la vague migratoire actuelle, les gardes-frontière remplissent leur mandat. Celui-ci consiste essentielle-ment en la découverte des personnes en séjour illégal et en l’arrestation des passeurs. Ces derniers sont remis pour la suite des investigations aux autorités cantonales de police compé-tentes. Les personnes en séjour illégal qui déposent une demande d’asile sont attribuées aux centres d’enre-gistrement et de procédure (CEP) du SEM. Si elles ne demandent pas l’asile, elles sont renvoyées. Si de la drogue, des armes ou des faux papiers sont découverts, le Cgfr procède dans chaque cas à une remise à la police.Cependant, toutes les personnes en séjour illégal – qu’elles déposent une demande d’asile ou qu’elles soient en transit – et tous les passeurs sont contrôlés de façon approfondie et si nécessaire enregistrés par les gardes-frontière.

Ces chiffres spectaculaires ont déjà suscité d’intenses discussions politiques, et pas seulement en Suisse.

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FUELS, ou comment atteindre l’objectif plus rapidement (partie 2)

Technique

«FUELS» doit permettre aux centrales d’engagement du Corps des gardes-frontière (Cgfr) de traiter plus rapidement et plus efficacement les événements qui se produisent à la frontière et dans l’espace frontalier, cela au bénéfice des forces engagées au front. Des systèmes standard sont prévus à cet effet. Les systèmes actuellement planifiés sont déjà utilisés avec succès par la police, les pompiers et les services sanitaires. A l’aide de cas fictifs, Lukas Killian, chef du projet «SGE & localisation» au commandement du Cgfr, nous montre en quoi «FUELS» peut améliorer le soutien apporté aux engagements.

instants, un simple clic permet d’an-noncer l’engagement dans le système de gestion de l’engagement (SGE). Les autres membres du team arrivent l’un après l’autre. Ils s’informent de la situation actuelle et lisent les annonces établies par la centrale d’engagement Nord du Cgfr (CET Cgfr Nord) au sujet des incidents de la nuit écoulée, puis ils s’équipent. Ils gagnent les véhicules, où les conducteurs se livrent au pro-cessus d’identification. Pour ce faire, ils insèrent leur smartcard personnelle – également utilisée pour les ordinateurs – dans le terminal pour conducteur dont est équipé chaque véhicule.Dans le SGE, l’opérateur de la CET Cgfr Nord identifie le team qui s’est annoncé, voit l’emplacement actuel des véhicules sur la carte de la situa-tion et peut consulter les détails de l’engagement. Il ne doit cependant pas encore s’occuper plus en détail de cet engagement et peut se consacrer à d’autres tâches.Le team du Cgfr est déjà en tournée depuis un certain temps; il a mis en place des postes de contrôle et sur-veillé des passages frontières inoccu-pés. Le tour de service touche à sa fin. Les gardes-frontière décident alors de

Dans la planification des engagements du personnel (PEP), cela fait déjà des semaines que le team du poste de gardes-frontière mobile de Bâle Sud est prévu pour un engagement de 5 h 00 à 12 h 00. Au petit matin du jour d’engagement, peu avant le brie-fing, le chef d’engagement du team ouvre le formulaire web dans Intra-douane. Ce document contient déjà les noms des membres de son team. Le chef sélectionne encore les véhicules d’intervention et saisit les détails de l’engagement. Au bout de quelques

faire le plein du véhicule d’intervention et se rendent à une station-service. Le conducteur saisit la quantité de carburant dans le terminal ad hoc du véhicule. Il n’est donc plus nécessaire d’indiquer cette quantité dans le car-net de route.

L’opérateur saisit les coordonnées de l’objectif dans le système de navigationEn regagnant le poste de gardes-fron-tière, les agents remarquent un véhicule suspect. Ils l’interceptent. C’est un homme qui est au volant. Le coffre du véhicule regorge de bijoux en or, d’argent liquide et de téléphones portables, vraisemblablement des biens volés. En effet, l’homme est incapable de présenter la moindre quittance, et ses explications ne sont pas crédibles. Les gardes-frontière lui réclament un document d’identité. Pour le contrôle de la personne, les agents utilisent l’interrogateur multifonctions pour le contrôle des personnes et des passe-ports (MAPP), qui interroge en ligne les systèmes de recherche. Le résultat est positif: l’homme est sous mandat d’arrêt pour dommages à la propriété, violation de domicile et vol. Après avoir procédé à l’arrestation provisoire de la personne recherchée, les gardes-fron-tière décident de soumettre également le véhicule à un contrôle approfondi; ils prennent alors contact par radio avec la CET Cgfr Nord. Celle-ci doit convo-quer des spécialistes du Cgfr pour la vérification approfondie du véhicule. L’opérateur de la centrale d’enga-gement réceptionne l’appel radio et ouvre directement un «événement» en cliquant sur le système de com-

Le terminal pour conducteur dont sont équipés les

véhicules d’intervention

Le système de gestion de l’engagement est représenté sur trois écrans.

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munication; dans le SGE, les données personnelles de l’agent du Cgfr effec-tuant l’appel radio sont directement attribuées à cet événement. Après sélection du mot-clé caractérisant l’événement, les forces d’intervention disponibles dans la région s’affichent sur l’écran de l’opérateur de la CET Cgfr Nord. L’unité la plus rapidement disponible est mobilisée par l’intermé-diaire du système. Les spécialistes du Cgfr sont informés par radio par les soins de la CET. Ils reçoivent simulta-nément les coordonnées de l’objectif dans le système de navigation de leur véhicule.Les spécialistes du Cgfr qui ont main-tenant été mobilisés reçoivent, via le système de navigation, le soutien nécessaire à leur déplacement au poste de gardes-frontière de Bâle Sud. Le sta-tut de leur unité passe au rouge; cela signifie que, dans l’immédiat, elle n’est pas disponible pour une autre mission. Le statut «vert» signifie en revanche qu’une patrouille peut être mobilisée dans un délai de cinq minutes.Dans l’intervalle, la deuxième patrouille du Cgfr a repéré une voiture suspecte et somme son conducteur de s’arrê-ter. Cependant, ce dernier ignore les injonctions des agents et prend la fuite à toute allure en direction de la fron-tière. Les gardes-frontière le prennent en chasse et informent la CET Cgfr Nord de ces faits par radio. La CET saisit toutes les annonces reçues et suit l’évolution au fur et à mesure sur la carte. L’officier de permanence est informé. Il ouvre l’application «Satellit»

(NetViewer) de son ordinateur portable et peut ainsi se tenir au courant de l’évolution de l’événement par satellite et en temps réel. En pareil cas, les forces disponibles dans la région sont simultanément convoquées.Dans l’intervalle, la patrouille mobile du Cgfr est parvenue à intercepter le véhicule et à contrôler son conducteur. Il est en état d’ébriété, ce qui entraîne le retrait de son permis de conduire. Les renforts mobilisés par le SGE sont maintenant arrivés sur les lieux.

La composante «LAFIS», un sys-tème servant à la représentation de la situation, à la conduite et à l’information«LAFIS», une composante importante de «FUELS», sert à la représentation de la situation, à la conduite et à l’infor-mation. Les centrales d’engagement

peuvent transférer directement dans ce système des données concernant par exemple les moyens d’intervention ou les ressources en personnel. «LAFIS» permet de gérer électroniquement des événements concernant plusieurs unités d’intervention ou plusieurs organisations. A cet effet, on peut «dessiner» une carte de la situation en y représentant directement des zones d’exclusion, des secteurs d’interven-tion, des bâtiments importants, etc. Tous les partenaires peuvent effectuer des saisies dans le journal ou établir des mandats par voie électronique. «LAFIS» est utilisé par le Cgfr, par la section antifraude et par certaines parties de la douane civile. Dans le cas que nous venons d’évoquer, les opé-rateurs de la centrale d’engagement n’ont pas besoin d’ouvrir un dossier. Une fois que la personne a été remise à la police et que le contrôle du véhi-cule est terminé, la CET peut fermer l’événement dans le SGE.

Diverses composantes du système travaillent en étroite collaboration, comme l’illustre le cas évoqué. Mais en quoi chaque collaborateur est-il direc-tement concerné par ce système?

Vous en apprendrez plus à ce sujet dans le prochain Forum D.

Grâce à «Satellit», il est possible de visualiser l’événement sur chaque poste de travail.

«LAFIS» sert à la représentation de la situation, à la conduite et à l’information.

«LAFIS» est utilisé par le Cgfr, par la section antifraude et par certaines parties de la douane civile.

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Exportations par avion au cours du premier semestre 2015

Commerce extérieur

l’or, des œuvres d’art et des antiquités inclus). Si l’on considère non plus la valeur, mais le poids total des expor-tations, on remarque que la part cor-respondante ne se monte plus qu’à 4 %. Cela permet de conclure que les exportations aériennes concernent

Au cours du premier semestre 2015, la Suisse a exporté des marchandises par avion pour un total de 69,7 milliards de francs, ce qui correspond environ à la moitié des exportations totales d’après le total 2 (commerce des métaux précieux, de

en particulier des marchandises plutôt légères, mais onéreuses. Ainsi, les métaux précieux et les pierres gemmes constituent le groupe de marchandises le plus important et représentent 44 % des exportations pour un total de 30,4 milliards de francs (dont 29,0 milliards concernent les exportations de métaux précieux). Les instruments de précision, l’hor-logerie et la bijouterie constituent le deuxième plus grand groupe de marchandises (un quart des expor-tations par avion pour un total de 17,4 milliards de francs, dont plus de la moitié concerne l’horlogerie). Ce groupe est suivi de très près par l’industrie chimique et pharmaceu-tique (23 %). L’industrie des machines et de l’électronique représente, quant à elle, seulement 5 % des exporta-tions. Des marchandises d’une valeur de 36,3 milliards de francs ont quitté la Suisse par l’aéroport de Zurich, qui représente la plaque tournante la plus importante pour les exporta-tions aériennes (52 %). L’aéroport de Bâle figure quant à lui au deuxième rang (20 % des exportations par voie aérienne).

44%

25%

23%

5% 3%

Métaux précieux, pierres gemmes

Instruments de pré-cision, horlogerie et bijouterie

Industrie chimique et pharmaceutique

Industrie des machines, des appareils et de l’électronique

Autres

Exportations par avion, premier semestre 2015Total 2: 69,7 milliards de francs

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Une administration dans l’administrationOrganisation

Bien que la révision de la loi sur l’alcool ne soit pas encore achevée, la Régie fédérale des alcools (RFA) sera intégrée dans l’Administration fédérale des douanes (AFD) le 1er janvier 2016, où elle fera partie de la division principale Redevances de la Direction générale des douanes (DGD). L’équipe de Forum D. s’est entretenue avec Robert Lüssi, chef de la division, des motifs et des enjeux de cette réorganisation.

tenues. C’est un cas très particulier, car nous aurons bientôt une adminis-tration dans l’administration.

Même si la RFA restera autonome dans un premier temps, ses colla-borateurs et ceux de l’AFD travail-leront ensemble, n’est-ce pas?La RFA et l’AFD collaborent déjà depuis longtemps sur des dossiers importants. Depuis quelques années, elles travaillent la main dans la main à la réalisation des projets relatifs à la mise en œuvre de la nouvelle législation sur l’alcool et à l’intégra-tion de la RFA dans l’AFD. Des liens étroits unissent également les services de communication des deux adminis-trations. Nous nous aidons aussi dans les domaines du droit, du personnel et du secrétariat. Comme Stefan Schmidt, ancien chef de la section Imposition du tabac et de la bière, sera à la fois mon suppléant et le chef par intérim de la RFA à partir du 1er janvier prochain, la collaboration sera également garantie au niveau de la direction.

Quels sont les avantages de cette fusion précoce?Nous pouvons utiliser le temps qui nous sépare de l’entrée en vigueur de la nouvelle législation pour garantir le transfert des connaissances et les bonnes pratiques en matière de gestion, apprendre à mieux connaître les personnes avec lesquelles nous travaillerons, nous familiariser avec la

La révision de la loi sur l’alcool n’en finit plus. Malgré cela, la RFA sera rattachée à l’AFD dès le 1er janvier 2016. Pourquoi?Bien qu’elle ne soit pas contestée par les parlementaires, la fusion des deux administrations ne peut avoir lieu que sur la base d’une révision partielle ou totale de la loi sur l’alcool. Le 1er janvier 2016, la RFA sera toutefois rattachée à l’AFD sur le plan admi-nistratif et fera partie de la division principale Redevances de la DGD.

Quel effet ce rapprochement aura-t-il sur l’organisation de la RFA?Ce rattachement administratif ne changera rien à l’organisation de la RFA. Jusqu’à l’entrée en vigueur des nouvelles bases légales, la régie conservera sa personnalité juridique et continuera de tenir sa propre comptabilité. Les unités d’organisa-tion et les fonctions des responsables hiérarchiques seront également main-

culture d’entreprise de chacun et pré-parer le déménagement à Delémont avec les responsables de la division Alcool et tabac. Nous sommes en train d’examiner les offres du canton du Jura et de la ville de Delémont afin de choisir l’emplacement qui répon-dra le mieux à nos besoins.

Qu’est-ce qui change pour les clients de la RFA?Rien pour l’instant. La RFA et Alco-suisse continueront d’exister sous leur forme actuelle.

Qu’adviendra-t-il d’Alcosuisse?La suppression du monopole d’impor-tation de l’éthanol entraînera la priva-tisation d’Alcosuisse. En sa qualité de centre de profit de la RFA, Alcosuisse acquiert divers services auprès de cette dernière, notamment dans les domaines transversaux tels que l’in-formatique et le personnel. Il se pré-sente toutefois sous sa propre identité visuelle auprès des clients externes de l’administration. Employant une trentaine de personnes, il importe les quantités d’éthanol nécessaires pour couvrir l’ensemble des besoins de notre pays et stocke ces produits dans ses entrepôts de Delémont et de Schachen (LU). Bien qu’il soit inscrit en tant que société anonyme depuis 1998 au registre du commerce du canton de Berne, le centre de profit de la RFA n’exerce pour l’heure aucune activité à ce titre. Le but est de privatiser Alcosuisse et de créer les conditions nécessaires pour que la future société alcosuisse sa puisse agir librement sur le marché après la levée du monopole d’importation de l’étha-nol. Lors de sa séance du 5 décembre 2014, le Conseil fédéral a pris

C’est un cas très particulier, car nous aurons bientôt une administration dans l’admi-nistration.

Robert Lüssi

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connaissance de la composition du conseil d’administration d’alcosuisse sa. Les membres de ce conseil devront mettre à profit leurs connaissances du marché pour poursuivre les prépara-tifs liés à la vente et à la privatisation du centre de profit de la RFA.

On nous dit que l’intégration de la RFA dans l’AFD créera des syner-gies. Dans quels domaines?Les tâches liées à l’importation et à l’exportation de boissons spiritueuses sont un premier exemple de syner-gies. D’autres peuvent être créées sur-

tout au niveau de la perception des impôts, des contrôles et des activités transversales. En raison de notre ins-tallation prochaine à Delémont, nous serons toutefois contraints de laisser tomber une partie des optimisations que nous avions prévues.

Sait-on déjà comment la division Alcool et tabac sera organisée à l’issue de la révision de la loi sur l’alcool?C’est difficile à dire, car nous ne savons pas encore quel système fiscal le Parlement va privilégier. Au final,

la division devrait se composer de trois sections et d’un service chargés de fiscaliser l’éthanol, les boissons spiritueuses, le tabac et la bière, de contrôler le marché de l’alcool et la publicité et de faire de la prévention.

Stefan Schmidt, chef par intérim de la RFA

La conseillère fédérale Eveline Wid-mer-Schlumpf, cheffe du Dépar-tement fédéral des finances, a nommé Stefan Schmidt, chef dési-gné de la division Alcool et tabac, à la direction par intérim de la RFA. Celui-ci prendra ses fonctions après le départ à la retraite de Fritz Etter, l’actuel directeur de la régie, soit le 1er janvier 2016.

Stefan Schmidt est né le 17 août 1970 à Sissach (BL). Titulaire d’un brevet fédéral de spécialiste de douane, il a effectué des études de droit à l’Université de Bâle parallè-lement à son emploi et décroché la licence correspondante en 2002. En 2006, il a obtenu un diplôme postgrade en droit économique international à l’Université de Zurich.

Stefan Schmidt a commencé sa formation au sein de l’AFD en 1988. Après avoir travaillé dans divers bureaux de douane de la région de Bâle, il est entré à la DGD en 2003 en tant que juriste et expert douanier. Après un stage au tribunal de district de Sissach, Stefan Schmidt a intégré la section Imposition du tabac et de la bière en 2007 et suivi de près la mise en œuvre de la loi sur l’imposition de la bière. En 2008, il a pris les rênes de la section précitée. L’achèvement, en 2010, de la révision partielle de la loi sur l’imposition du tabac a constitué une étape impor-tante dans le parcours professionnel de Stefan Schmidt. Celui-ci justifie de plusieurs années d’expérience dans le domaine des législations nationales et internationales relatives aux taxes et aux redevances ainsi qu’aux impôts à la consommation.

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ARGOS: une application centrale pour les contrôles douaniers

TIC

Avec l’application ARGOS, l’Administration fédérale des douanes mise sur une solution centrale pour la saisie des résultats des contrôles douaniers. Développé en collaboration avec l’OFIT, ce logiciel permet d’améliorer l’analyse des risques et, par conséquent, l’efficacité des contrôles. Par Daniel Wunderli, Corporate Publisher, Office fédéral de l’informatique et de la télécommunication

Contrôles multiples, solution uniqueL’Administration fédérale des douanes (AFD) utilisait auparavant une multi-tude d’outils de saisie pour la docu-mentation des contrôles douaniers. Par conséquent, les résultats de ceux-ci ne pouvaient être évalués précisé-ment qu’application par application. Les possibilités d’évaluation globale étaient limitées. «Avec ARGOS, les collaborateurs de la douane civile peuvent maintenant saisir, dans une seule application, les résultats de tous les contrôles des bureaux de douane», dit Markus Hirschi, chef de projet à l’AFD. ARGOS est déjà en service depuis janvier 2013 et a été continuel-lement perfectionné jusqu’à fin 2014.

Produits alimentaires espagnols, téléviseurs chinois ou voitures alle-mandes: chaque jour, quelque 70 000 envois passent la frontière de notre pays. Les collaborateurs de la douane civile sont chargés du contrôle des importations arrivant en Suisse par route, par rail, par air et par eau ainsi que par pipeline. Ils vérifient par exemple si les marchandises sont déclarées correctement, comparent la déclaration en douane avec les indications figurant sur la facture ou examinent le chargement et clarifient les éventuelles incohérences. Ces contrôles ne concernent pas unique-ment les camions à la frontière, mais ont aussi lieu à l’aéroport ou dans les halles de fret.

Un logiciel convivial«A la frontière, le travail doit s’effec-tuer rapidement», déclare Markus Hirschi. «Les collaborateurs n’ont pas de temps à perdre avec un logiciel compliqué pendant un contrôle.» C’est pourquoi l’AFD a, dès la phase de conception, insisté sur la réalisation d’une interface utilisateur intuitive. «En collaboration avec un expert externe en expérience utilisateur, nous avons conçu un prototype d’interface utilisateur et l’avons fait tester par des employés de la douane civile», révèle Markus Hirschi. Les retours d’informa-tion de ces testeurs ont été intégrés directement dans le développement d’ARGOS. Dans cette application, les employés des douanes peuvent choisir

Un collaborateur de la douane civile contrôle un chargement de produits alimentaires importés. Il saisira ensuite les résultats de son

contrôle dans l’application spécialisée ARGOS.

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aisément parmi de nombreux types de contrôles: en plus d’un contrôle formel des documents, ils peuvent, par exemple, inspecter le moyen de trans-port ou le chargement ou effectuer des contrôles de police de la circulation.

Une seule saisie des donnéesParmi d’autres avantages, ARGOS permet de transférer les données de diverses applications spécialisées de la douane, comme e-dec, NCTS et SI RPLP*. L’application e-dec, par exemple, sert à la taxation électro-nique des importations et des expor-tations. «Si un camion est contrôlé à la frontière suisse, les marchandises sont déjà déclarées dans e-dec pour le dédouanement», explique Bernhard von Allmen, chef de projet technique à l’OFIT. Au lieu d’entrer à nouveau les mêmes données dans ARGOS, il suffit de scanner le document e-dec. Toutes les indications disponibles sont alors importées par le biais d’une interface, sans saisie manuelle sur place. Cela permet de gagner du temps.

Des contrôles plus efficacesLa Suisse est un pays de transit impor-tant, que de nombreuses marchan-dises traversent pour atteindre leur destinataire. «Grâce à ARGOS, un employé des douanes à Bâle voit quels contrôles son collègue de Chiasso a déjà effectués pour un camion de marchandises en transit», affirme Markus Hirschi. «On peut ainsi éviter de contrôler deux fois les mêmes véhicules.» ARGOS permet en outre de déléguer des tâches de contrôle au sein d’un bureau de douane ou à l’extérieur, c’est-à-dire à un autre bureau de douane. Possibilité particulièrement pratique: une fonction de messagerie intégrée permet aux utilisateurs de saisir des commentaires relatifs à un contrôle et de les communiquer à d’autres personnes concernées. Toutes ces fonctionnalités permettent d’aug-menter considérablement l’efficacité du processus de contrôle.

Bonne base de données, meilleure analyse des risquesCertaines des informations saisies dans ARGOS sont des données personnelles sensibles. Dès qu’un employé des douanes enregistre des informations, celles-ci sont transmises de manière

cryptée à travers le réseau de l’admi-nistration fédérale, sauvegardées dans une base de données puis transférées vers un «Data Warehouse». Le Data Warehouse de l’AFD est un système de gestion de bases de données dans lequel sont centralisées, dans un format unique, non seulement des informations provenant d’ARGOS, mais aussi des données d’autres applications douanières (par ex. les applications e-dec, NCTS et SI RPLP précitées). Le Data Warehouse de l’AFD est un élément important d’ARGOS. D’une part, les utilisateurs peuvent importer de manière simple des données qui ont déjà été saisies dans d’autres systèmes. D’autre part, l’enregistrement centralisé rend les données disponibles pour des analyses. De telles analyses sont impor-tantes, car la douane ne peut contrôler qu’une partie de l’énorme quantité de marchandises arrivant dans notre pays ou le traversant. Les analyses de risques constituent l’élément central dont dispose l’AFD pour définir des priorités et ordonner des contrôles ciblés.

Accueil favorable de la part des utilisateursUn sondage auquel ont participé 400 utilisateurs sur 1200 environ montre qu’ARGOS est apprécié par les doua-niers civils lors de leur travail quoti-dien. «Les retours d’information sont positifs», se réjouit Markus Hirschi. «Les utilisateurs apprécient notam-ment l’utilisation intuitive d’ARGOS, sa conception conviviale et le transfert stable des données depuis le Data Warehouse de l’AFD.»

* Vous trouverez des informations supplé-

mentaires concernant e-dec (déclaration

électronique) et NCTS (nouveau système

de transit informatisé) sur le site www.

ezv.admin.ch > Déclaration en douane,

ainsi que des informations sur le thème

de la RPLP sur le même site, sous www.

ezv.admin.ch > Infos pour entreprises

> Transport, document de voyage,

redevances routières > Redevances sur le

trafic des poids lourds (RPLP et RPLF).

La version complète du présent article a paru dans le magazine «Eisbrecher», destiné aux clients de l’OFIT, no 58, édition de juin 2015. L’article est publié dans Forum D. avec l’aimable autorisation de son auteur et de l’OFIT.

Il suffit de scanner le document e-dec pour importer directement dans l’application ARGOS des données

déjà enregistrées. Une saisie manuelle sur place n’est donc plus nécessaire.

Les collaborateurs n’ont pas de temps à perdre avec un logiciel compliqué pendant un contrôle.

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Réduire le nombre de recours voués à l’échec

Gestion des recours

Pour l’Ecole supérieure de douane, Regina Hostettler, experte de douane de la Direction d’arrondissement de Schaffhouse, a écrit un travail de diplôme sur la gestion des recours au sein de l’Administration fédérale des douanes (AFD). Dans ce travail, elle explique pourquoi de nombreux recours sont voués à l’échec et ce que l’on doit faire pour éviter cette situation.

liée aux déclarants en douane, c’est-à-dire aux transitaires, agences en douane, particuliers, etc., qui sont responsables de l’exactitude de la déclaration en douane. Pour ce faire, ils doivent disposer de tous les docu-ments nécessaires. Le soin apporté à la saisie des données pertinentes est le b.a.-ba. Le nombre de recours dépend donc principalement de la qualité de la déclaration en douane.

Quand peut-on déposer un recours et que se passe-t-il ensuite?Pour déposer un recours, il faut s’être vu notifier une décision de première instance. Une fois le recours déposé, la direction d’arrondissement l’exa-mine d’un point de vue formel, c’est-à-dire qu’elle se pose les questions suivantes: l’instance de recours est-elle compétente en la matière? Le recourant a-t-il qualité pour recourir? Le délai de recours est-il respecté? Si le délai est échu, le recourant reçoit une décision de non-entrée en matière. Le motif de recours n’est plus important dans ce cas. Si l’on donne suite au recours, mais qu’il manque encore certains documents probants, la direction d’arrondissement exigera des moyens de preuve supplémen-taires ou une avance de frais auprès du recourant. Dans certains cas, un recours peut être directement accepté sur la base des documents remis. Une décision sur recours dépend donc de plusieurs facteurs.

Dans quel cas un recours fait-il sens?Un recours fait sens lorsqu’il est fondé et qu’il a des chances d’aboutir. Avant toute chose, le recourant devrait se poser les questions suivantes: le délai

kp. Madame Hostettler, pourquoi le nombre de recours déposés est-il aussi élevé?Laissez-moi faire une petite digression sur la diversité des contrôles effec-tués par l’AFD. On distingue avant tout entre les contrôles formels et les contrôles matériels des marchandises. Tandis que dans le cadre des premiers, on vérifie uniquement la concordance de la déclaration en douane avec les documents d’accompagnement (par ex. factures, bulletins de livrai-son), dans le cadre des seconds, on examine également la marchandise. Un contrôle matériel prend ainsi toujours plus de temps qu’un contrôle formel. Dans le cadre de la stratégie en matière de contrôle dans le trafic des marchandises de commerce, l’AFD met depuis 2010 l’accent sur les contrôles matériels et a donc revu à la baisse les contrôles formels qu’elle effectuait. Les bureaux de douane identifient ainsi moins de déclarations en douane erronées, ce qui entraîne une augmentation du nombre de recours. Cette hausse est également

de recours est-il respecté? Quelles sont mes chances de succès? La valeur litigieuse est-elle supérieure aux émo-luments auxquels je dois m’attendre?

Et dans quels cas un recours est-il voué à l’échec?Sont voués à l’échec les recours dépo-sés après l’expiration du délai et ceux sur lesquels l’AFD ne peut influer, à savoir les recours contre une décision rendue sur la déduction de l’impôt préalable ou contre un émolument qui n’a pas été perçu par l’AFD. Un recours est également dépourvu de toute chance de succès si le recou-rant présente après la déclaration en douane une preuve d’origine établie a posteriori, c’est-à-dire après l’importa-tion de la marchandise.

Bien que la proportion de recours voués à l’échec s’élève à 45 %, le nombre de recours déposés et celui des recours retirés sont très élevés. Comment expliquez-vous cela?Plusieurs facteurs sont déterminants ici aussi. S’agissant des processus des partenaires de la douane, il manque souvent des instructions et contrôles des délais. Parfois, les connaissances spécialisées font également défaut. Dans certains cas, ce sont les clients ou assurances qui poussent les par-tenaires de la douane à déposer un recours. La plupart du temps, le retrait d’un recours est dû à l’avance de frais exigée, qui est accompagnée du motif

Un recours fait sens lors-qu’il est fondé et qu’il a des chances d’aboutir.

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19Forum D. | Dossiers

pour lequel le recours ne peut pas (encore) être accepté. Le recourant a alors la possibilité de verser l’avance de frais et de poursuivre la procédure de recours ou de retirer le recours. S’il ne fait ni l’un ni l’autre, le recours est jugé irrecevable, comme lorsque le délai est échu. Dans tous les cas, le recourant dispose d’un document, à savoir la demande relative à une avance de frais, qu’il peut présenter au client ou à l’assurance.

Quel est l’objectif de la gestion des recours de l’AFD?La gestion des recours vise avant tout à réduire de manière durable le nombre de recours. Il s’agit d’éliminer en premier lieu les recours voués à l’échec. Afin d’atteindre cet objectif, il faut sensibiliser davantage les parte-naires de la douane à ce problème.

Comment réduire le nombre de recours voués à l’échec?L’AFD estime qu’il faut élaborer une gestion des recours qui soit convi-viale en développant les informations correspondantes et en améliorant leur compréhension. Pour ce faire, il est important de voir les choses d’un autre regard afin de vulgariser les prescriptions en la matière. Le défi consiste à traduire dans une langue compréhensible par le client les actes législatifs, qui sont souvent compli-qués. A mon avis, la publication des prescriptions de service constitue une étape importante dans ce cadre. Les partenaires de la douane peuvent également contribuer à une baisse du nombre de recours voués à l’échec en améliorant leurs processus internes et en profitant des possibilités de per-fectionnement qui leur sont offertes.

En vue d’éviter à l’avenir des recours similaires, il faut effectuer la gestion de la qualité à un échelon proche de celui de la conduite et ne pas la négli-ger. Avant que le déclarant en douane ne dépose un recours, il devrait se demander si sa requête est justifiable. Dans de nombreux cas, il manque en effet des documents fiables, ce qui augmente considérablement la charge de travail de toutes les personnes concernées. Afin d’améliorer la ges-tion des recours, il faut donc agir tant au niveau de la douane qu’au niveau des clients de cette dernière.

Recours, ventilés par domaine (de 2011 à mi-2015)

Recours déposés

1re place 2e place 3e place

TVA: 21 % Classement tarifaire: 20 % Taxation préférentielle a posteriori: 15 %

Recours retirés

1re place 2e place 3e place

TVA: 26 % Classement tarifaire: 22 % Taxation préférentielle a posteriori: 20 %

Recours pour lesquels une décision de non-entrée en matière a été rendue

1re place 2e place 3e place

Taxation préférentielle Classement tarifaire: 19 % Transferts comptables: 9 %a posteriori: 22 %

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20 Forum D. | Dossiers

Douane électronique: les pays d’Afrique également concernés

International

Patric Burkard, collaborateur de l’Administration fédérale des douanes (AFD), travaille depuis mi-février 2014 à la direction générale Fiscalité et union douanière (DG TAXUD) de la Commission européenne, à Bruxelles. En tant qu’expert de l’unité Processus douaniers et gestion de projets, il est chargé d’aménager efficacement les processus douaniers, dont il vérifie ensuite la mise en œuvre dans les Etats membres de l’Union européenne (UE). Dans le présent numéro de Forum D., il nous parle de la collaboration entre les autorités douanières et des différents défis à relever dans ce cadre.

Comme son nom l’indique, la stra-tégie en matière de douane électro-nique vise à remplacer par des proces-sus électroniques tous les processus douaniers recourant au papier. Une fois que les spécifications et prescrip-tions légales ont été élaborées, c’est aux différents pays qu’il incombe de garantir la mise en service dans les délais des divers systèmes. Je les aide à documenter les processus de travail des nouveaux systèmes et réponds à leurs demandes concernant la procé-dure afin d’assurer le bon fonctionne-ment de ces derniers.En février de cette année, je me suis acquitté de ma première mission officielle à l’étranger en tant qu’ex-pert national pour la DG TAXUD. J’ai animé un atelier de l’Organisation mondiale des douanes (OMD) axé sur les régimes de transit régionaux et s’adressant aux pays d’Afrique australe et orientale. La «Uganda Revenue Authority» (URA) était à la fois l’hôte et le coorganisateur de cet atelier, qui s’est déroulé à Kampala, capitale de l’Ouganda, et auquel

quelque 20 Etats membres de la région ont participé. Il a surtout été question des aspects pratiques et techniques de la gestion coordonnée de la frontière, des postes frontières à arrêt unique et du territoire douanier unique.L’objectif de l’atelier était de trans-mettre aux pays d’Afrique participants le travail réalisé par l’UE en matière de transit ainsi que les expériences faites et le savoir-faire accumulé notamment dans le domaine du nouveau système informatisé de transit (NCTS), introduit en 2001 en Europe. La manifestation devait contribuer au développement d’un système de transit plus efficace

et efficient en vue d’une accélération de l’intégration régionale.Dans le cadre de cette mission, nous autres experts avons également eu la possibilité de visiter le poste central de surveillance («Central Monitoring Center» [CMC]) de l’URA, situé à Nakawa, soit en bordure ouest de la capitale. Au CMC, on coordonne les opérations électroniques de transit entre l’Ouganda, le Kenya, le Rwanda, la Tanzanie et le Sud-Soudan. En outre, toutes les formalités douanières (importation et exportation) entre l’Ouganda et le Kenya sont exécutées par le biais de ce système.

Patric Burkard

Un douanier appose un scellé électronique.

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Amélioration des processus en matière de transitLes participants à l’atelier ont pu pro-fiter des expériences les plus diverses. Tous ont montré un vif intérêt pour la simplification de la procédure de tran-sit entre les Etats d’Afrique orientale et australe. Il s’est avéré que certains Etats ne jurent que par le «Electronic Cargo Tracking and Security System» («ECTS System»), qui est notamment utilisé au Kenya. Fondé sur des outils électroniques de localisation (scellés électroniques), ce système ne peut malheureusement être employé que pour les conteneurs ou citernes qui sont fixés sur des moyens de trans-port appropriés et qui fournissent des données en temps réel au personnel douanier du CMC. La Commission européenne estime que ce système

dépend dans une trop large mesure d’un matériel informatique coûteux, d’une infrastructure adaptée, d’un sys-tème de positionnement global (GPS) ainsi que d’une connexion à Internet et qu’il ne peut donc être que partielle-ment recommandé.

L’atelier a également mis en avant le fait que les Etats membres travaillent avec les systèmes de transit les plus variés, dont il s’agit à présent de trouver l’interconnexion. Pour l’Ou-ganda, qui doit gérer cinq frontières extérieures au total, il faut par exemple

faciliter les processus en créant des synergies. Dans cette perspective, l’OMD a récemment publié un manuel sur le transit qui vise à soutenir les Etats membres dans la mise en œuvre de systèmes de transport fonctionnels et efficaces. L’amélioration des proces-sus permettra de garantir la compéti-tivité économique et les recettes. Les résultats de l’atelier seront intégrés dans le manuel précité.Depuis que j’ai commencé à travailler pour l’AFD, en mars 1996, au bureau de douane de Chiasso-Strada, le thème du transit fait partie de mon quotidien. Mon travail au sein de la Commission européenne me permet de combiner mes expériences pratiques avec mes acquis techniques, tout en parfaisant mes connaissances en la matière.

Au poste central de surveillance

Douane suisse: engagements à l’étrangerA la douane suisse, les engagements à l’étranger ont une longue tradition. Cela fait des années que des collaborateurs accomplissent un précieux travail pour le compte de l’ONU, de l’UE, de l’OMC, de l’Organisation mondiale des douanes, de l’AELE et de l’OSCE, ainsi que pour des missions bilatérales dans le monde entier. Ces engagements s’inscrivent dans le cadre des relations extérieures de notre pays, mais également dans celui de la politique qu’il mène en matière de promotion des échanges, de la paix et de la sécurité. En 2015 également, de nombreux collaborateurs ont effec-tué des missions plus ou moins longues dans le monde entier.

Par cette action, l’AFD renforce la confiance qu’elle inspire à ses partenaires suisses et étrangers et la bonne réputation dont elle jouit. Cela est particulièrement payant lorsque des problèmes surviennent dans des affaires internationales. On a constaté à maintes reprises que cette base facilitait considérablement la recherche de solutions. L’AFD met son réseau, ses expériences et ses compétences à la disposition des autori-tés partenaires (internes et externes à l’administration fédérale) et de l’économie suisse.

Sur le plan interne, ces engagements à l’étranger sont pour les collaborateurs une précieuse occasion de mettre leurs compétences à l’épreuve et d’en acquérir de nouvelles, mais également de découvrir de nou-velles cultures (y compris en matière de travail), tout en promouvant la paix et les échanges.

Andrea Canonica, chef de la section Affaires Internationales de l’AFD

Tous ont montré un vif intérêt pour la simplification de la procédure de transit entre les Etats d’Afrique orientale et australe.

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«La clé du succès, c’est la mentalité caucasienne»

International

Fin avril 2015, l’expert de douane suisse Roger Hermann a été élu pour trois ans directeur du Bureau régional pour le renforcement des capacités en Europe par les 52 directeurs généraux des douanes des pays européens membres de l’Organisation mondiale des douanes (OMD). Après cinq ans passés au service de la Commission européenne, Roger Hermann a rejoint l’an dernier les rangs de l’OMD à Bruxelles. Pour Forum D., il raconte comment il a décroché ce nouveau poste et quels sont les défis qui l’attendent à Bakou (Azerbaïdjan), son nouveau lieu de travail.

kp. Après avoir travaillé quatre ans dans le domaine de la douane électro-nique à la Direction générale Fiscalité et Union douanière de la Commission européenne (TAXUD), Roger Hermann se voit offrir la possibilité de travailler pendant une année au sein du service international. Chargé de représenter la TAXUD dans les séances de l’OMD, il découvre les multiples tâches assu-mées par cette dernière. Une année plus tard, il quitte la Commission européenne pour l’OMD. Engagé en tant qu’attaché technique au sein de la Direction du renforcement des capacités en Europe, il est avant tout responsable des pays d’Europe de l’Est. Lorsque le poste de directeur du Bureau régional pour le renforcement des capacités en Europe (BRRC) est mis au concours, il sait tout de suite qu’il va se porter candidat: «Il s’agissait d’une chance unique de m’engager encore plus pour la promotion des objectifs de l’OMD et de pouvoir influencer personnellement le cours des choses», se souvient Roger Hermann. Il s’impose à la fin d’une procédure de sélection de plus de trois mois, notamment grâce à son expérience de plus de trente ans auprès de la douane suisse et à son activité à l’étranger. Le 1er juillet 2015, Roger Hermann reprend officiellement la conduite du bureau à Bakou. Outre ses fonctions de direction, Roger Hermann assume les tâches suivantes: coordination des activités de renforce-ment des capacités, développement et maintien des partenariats établis avec les groupes d’intérêt régionaux, évaluation des processus de moder-nisation initiés par les administrations douanières de la région et soutien à ces dernières dans la mise en œuvre

des normes internationales en matière douanière et commerciale dans la région Europe. Il peut pour cela comp-ter sur l’aide du personnel technique local. Il collabore aussi étroitement avec la directrice régionale de l’OMD à Bruxelles et le vice-président pour la région Europe, secondé par son secré-tariat. Il dispose en outre d’un réseau de coordinateurs dans les administra-tions douanières de la région et travaille avec ses contacts personnels sur place.

Un plus pour l’économie et la douane suisseQuels sont les objectifs du nouveau directeur pour son bureau de Bakou? «Je suis actuellement en train de développer le BRRC pour en faire un centre de compétences à disposition de tous les partenaires de la douane et opérateurs économiques de la région. Je désire aussi répondre au mieux aux besoins des pays en matière de renfor-cement des capacités, dans les limites du budget. Ces besoins sont recensés et analysés chaque année.» La douane n’est pas la seule à profiter du travail de l’expert suisse: l’économie est elle aussi gagnante. «Le BRRC de Bakou coordonne les efforts de réforme de

l’OMD en Europe, en particulier dans les pays du sud-est de l’Europe, du Caucase méridional et d’Asie centrale. Ces régions constituent une priorité pour la politique extérieure suisse. Je pense que l’élection d’un Suisse au poste de directeur du BRRC renforce l’influence de la douane suisse dans la région, influence également due à l’engagement de cette dernière dans les activités bilatérales de renforcement des capacités. Ces activités seront désor-mais mieux ciblées et plus efficaces.» L’existence d’administrations douanières modernes, respectueuses des normes internationales en matière douanière et commerciale, faciliterait grandement l’accès des pays de la région au marché mondial, ce qui serait également profi-table à l’économie suisse, ajoute encore Roger Hermann.Pour le douanier suisse, le véritable défi, en tant qu’Européen de l’Ouest, c’est de se familiariser avec la culture et la mentalité caucasienne, des éléments essentiels pour comprendre la façon d’appréhender les problèmes à Bakou. «C’est la clé du succès. De bonnes connaissances de russe sont bien sûr également indispensables.»

L’expert de douane suisse Roger Herrmann (4e depuis la gauche) avec son équipe du

Bureau régional pour le renforcement des capacités en Europe à Bakau, en Azerbeïdjan.

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23Forum D. | Dossiers

En effet, ils sont considérés comme des fraudeurs.

Diesel: sur la piste des fraudeurs Contrôles de carburant aux côté des douaniers

Remplacer le diesel par de l’huile de chauffage pour économiser de l’argent est tentant. Mais quand les douaniers se pointent à l’entreprise, on ne rigole plus. Patricia Wichser, rédactrice pour la publication «St. Galler Bauer», a suivi une équipe de contrôleurs d’entreprises de l’inspection de douane du Rheintal lors du contrôle de deux exploitations agricoles.*

Il en existe encore par-ci par-là, des agriculteurs qui remplissent les réser-voirs de leurs tracteurs et machines avec de l’huile de chauffage plutôt que du diesel. Roman Hutter, chef de l’équipe de contrôleurs d’entreprises de l’inspection de douane du Rheintal, en donne la raison: le prix actuel de l’huile diesel est de 1 fr. 52, tandis que l’huile de chauffage ne coûte que 78 centimes environ. En cause: la diffé-rence d’impôt. L’impôt grevant l’huile diesel s’élève à 758 fr. 70 pour 1000 litres (il com-prend l’impôt sur les huiles minérales à 458 fr. 70 et la surtaxe sur les huiles minérales à 300 francs), alors que la Confédération ne demande que 162 francs pour 1000 litres d’huile de chauffage (soit l’impôt sur les huiles minérales à 3 francs et la taxe sur le CO2 à 159 francs). Les agriculteurs à qui ce calcul donne le sourire sont

toutefois punissables. En effet, ils sont considérés comme des fraudeurs. C’est la raison pour laquelle les douaniers procèdent à des contrôles inopinés en vertu de l’ordonnance sur l’impo-sition des huiles minérales. Outre les exploitations agricoles, ils contrôlent également l’industrie et l’artisanat.

De moins en moins de fraudeL’inspection de douane du Rheintal à St. Margrethen est compétente dans les cantons de St-Gall, de Thurgovie, d’Appenzell Rhodes-Extérieures, d’Ap-penzell Rhodes-Intérieures et des Gri-sons, ainsi que dans la principauté de Lichtenstein. Les sondages ont porté leurs fruits. «Il est de plus en plus rare que le diesel soit remplacé par de

l’huile de chauffage», explique Roman Hutter. Mais ce dernier ne pense pas que les contrôles pourront être aban-donnés un jour. La procédure s’est simplifiée. Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l’imposition des huiles minérales en 1997, l’huile de chauffage est colorée en rouge. Outre la coloration, elle contient également des substances de marquage, qui indiquent la présence même des plus petites particules d’huile de chauffage. C’est le cas lorsque le fournisseur de diesel n’a pas fait son travail propre-ment, c’est-à-dire lorsqu’il restait de l’huile de chauffage dans le tuyau ou le réservoir. En fonction de la gra-vité de l’infraction, une procédure (ordinaire ou simplifiée) est lancée. L’amende est réglementaire: deux fois le montant de l’impôt soustrait sur cinq ans. «Dans des cas particuliers, nous tenons compte de la situation

Andreas Aemisegger fait partie de la grande majorité des agricul-

teurs de Suisse orientale qui mettent du diesel dans leurs engins

agricoles.

Depuis 1998, les collaborateurs de l’inspection de

douane ont procédé à des milliers de contrôles.

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économique de l’auteur de l’infrac-tion», ajoute Roman Hutter. Existe-t-il des domaines ou des classes d’âges particulièrement enclins à utiliser l’huile de chauffage de manière abusive? «Non pas vraiment, cela dépend des personnes», répond Roman Hutter.

Une colorationLe premier contrôle amène Roman Hutter et son collègue à Lutzenberg. Les agriculteurs qui les accueillent sont rarement agressifs. «Le seul danger, ce sont les chiens qui aboient dans la cour», selon Roman Hutter. En effet: le chien de la ferme sélectionnée ne cesse d’aboyer. L’entrepreneur de travaux agricoles Bruno Aemisegger est en revanche très aimable et détendu. Après s’être présentés, le chef de l’équipe de contrôleurs d’entreprises et son collègue se mettent au travail. Ils examinent deux tracteurs Massey Ferguson reluisants. Tout va très vite. A l’aide d’une pompe manuelle et d’un tuyau très fin, ils extraient du diesel du réservoir et en versent sept millimètres dans une éprouvette. Roman Hutter secoue l’éprouvette. Il explique: «Lorsque le fond se colore en rouge, cela signifie qu’il y a des particules d’huile de chauffage». Mais rien ne se passe. Sur le second tracteur et le chargeur agricole non plus. Les deux douaniers découvrent alors un troisième tracteur dans la remise. «Il n’est pas à moi», souligne l’agriculteur. «L’un des tracteurs est au service, et celui-ci est le tracteur de réserve».

Mais les deux hommes ne se laissent pas influencer. Ils contrôlent aussi le tracteur «étranger». «Là, nous avons une coloration», déclare Roman Hutter. La journaliste tressaille. Fausse alerte! Mais voilà qui est intéressant. Dans l’éprouvette, on distingue clairement la différence de couleur entre le diesel normal du tracteur de réserve et le diesel écologique utilisé habituellement par l’agriculteur. Pour ce dernier, la qualité du diesel est très importante. Ses tracteurs sont utilisés pour le secteur des services. Il ne peut se per-mettre une qualité moindre ou le risque de tomber en panne. «Un tracteur à l’arrêt durant une après-midi me coûte plus de 1000 francs», argumente-t-il. Les yeux de lynx des douaniers repèrent encore une collection de vieux trac-teurs, que les deux hommes souhaitent examiner. Surpris? «Bien sûr que je suis surpris, mais ce n’est pas un problème, vraiment», répond l’agriculteur en toute décontraction. Des échantillons sont prélevés sur deux vieux véhicules. Encore une fois, l’éprouvette ne révèle aucune anomalie. L’agriculteur a donc passé le contrôle sans difficulté et se voit délivrer, de façon imagée, le «cer-tificat de non-culpabilité». En vérité, il ne reçoit aucun document, sauf si le résultat s’était avéré positif.

Regards curieuxLors du deuxième contrôle, aucun chien à l’horizon. L’agriculteur Andreas Aemisegger est occupé à remplir la citerne à purin. Après avoir briève-

ment expliqué la raison de leur visite, les douaniers examinent un tracteur équipé d’une faucheuse. Ils relèvent toujours le nom du fournisseur de carburant. Andreas Aemisegger le prend avec philosophie: «Il faut passer par là. Mais ce n’est pas un problème.» Cependant, le contrôle attire le regard de quelques passants et automobilistes curieux. L’agricul-teur explique: «Je connais quelqu’un qui s’est fait prendre. La facture a été salée». Roman Hutter demande s’il y a d’autres véhicules. Sans attendre, ils se rendent à la remise, où un tracteur en service et un autre hors service les attendent. Les deux douaniers pré-lèvent les échantillons et ne constatent aucune coloration. Last but not least, l’agriculteur de Lutzenberg possède encore une enrubanneuse, située un peu plus haut. Celle-ci est également examinée. Résultat: diesel. Tout est en ordre. Andreas Aemisegger passe donc aussi le contrôle sans encombre.

La raison l’emporteLes deux exploitations contrôlées font partie de la majorité des fermes de Suisse orientale qui agissent de manière raisonnable et respectent la loi sur l’imposition des huiles minérales. Les cas de fraude dans le secteur agri-cole ne cessent de baisser.

* Cet article a été publié en allemand dans le

numéro 29-2015 du «St. Galler Bauer». Il est

publié dans Forum D. avec l’aimable autorisa-

tion du «St. Galler Bauer» et de son auteur.

Une main expérimentée pompe le carburant du réservoir.C’est indéniable: à gauche, du diesel; à droite, de l’huile de chauffage

colorée.

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Plus de véhicules mais moins d’impôt sur les huiles minérales

Infographie

Sources: OFS / AFD

Les recettes issues de l’impôt sur les huiles minérales ont atteint leur niveau maximal en 2008. Depuis lors, elles ont tendance à fléchir. La princi-pale raison de ce recul réside dans la baisse de la consommation moyenne de carburant des véhicules. Une autre raison est la diminution du tourisme à la pompe. C’est pourquoi la part du produit de l’impôt sur les huiles miné-rales dans les recettes fiscales diminue continuellement.L’accroissement du parc de véhicules s’accompagne généralement d’une hausse correspondante du nombre de kilomètres parcourus. La moyenne par véhicule a toutefois connu une légère baisse au cours des dernières années en ce qui concerne les voitures de tourisme. La consommation moyenne des automobiles neuves est, habituellement, plus basse que celle des anciens véhicules de lamême catégorie. La consommation moyenne de carburant, considérée pour l’ensemble du parc de véhicules, fléchit depuis longtemps. En 2014, la consommation des voitures neuves immatriculées s’élevait encore à

6,11 l/100 km, ce qui correspond à une moyenne d’émissions de CO2 de 142 g/km (année précédente: 145 g/km). Ces prochaines années, l’influence du recul de la consomma-tion sur les recettes provenant

de l’impôt sur les huiles minérales ira en s’agrandissant.

Source: AFF, budget 2016 – explica-tions complémentaires et statistiques

© Union Pétrolière

Nombre de véhicules à moteur Redevances sur les carburants* (en milliers de francs)

* Impôt sur les huiles minérales et surtaxe sur les huiles minérales

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26 Forum D. | Dossiers

Un garde-frontière auprès d’EuropolInternational

Depuis le 1er mars 2006, la Suisse et Europol sont liés par un accord de coopération qui prévoit l’échange d’informations opérationnelles et le détachement d’officiers de liaison auprès de l’autorité européenne de poursuite pénale. L’Administration fédérale des douanes (AFD) dispose depuis le 1er mai 2015 d’un Europol Liaison Officer (ELO, officier de liaison Europol) en la personne de Martin Michel. Ce garde-frontière évoque pour Forum D. le rôle d’Europol et présente sa mission au sein de l’organisation européenne.

al. Les réseaux de la criminalité organisée se distinguent de nos jours par des liens plus étroits que jamais et une très forte internationalisation. Les trafics de drogues, d’armes, de cigarettes, la contrefaçon d’articles de marque et de médicaments, le trafic de migrants ou encore la traite d’êtres humains sont autant d’exemples de leurs agissements. L’office euro-péen de police Europol est l’une des nombreuses organisations qui luttent contre ces activités. Basée à La Haye (Pays-Bas), cette autorité européenne de poursuite pénale vise à prévenir et à combattre la criminalité organisée internationale et le terrorisme.

Martin Michel, quelles raisons ont motivé l’AFD à détacher un officier de liaison auprès d’Europol?En assumant des tâches de surveil-lance et de contrôle du trafic des

marchandises et des personnes, l’AFD joue un rôle important dans la lutte contre la criminalité transfrontalière. Elle dispose ainsi d’informations susceptibles d’aider certaines auto-rités étrangères à mener à bien des procédures pénales. En outre, le succès de l’AFD dépend également d’informations obtenues par des enquêteurs étrangers. Les autorités de poursuite pénale n’ont d’autre choix que d’échanger des informations et de se soutenir mutuellement pour parvenir à contrer des réseaux crimi-nels de mieux en mieux organisés, qui agissent à l’échelle internationale. L’action d’Europol est déterminante pour la promotion et le renforce-ment de cette coopération. Europol encourage d’ailleurs une approche dite «multiagence», car chaque pays répartit différemment les compé-tences entre ses autorités de poursuite pénale. Par le passé, Europol était une organisation purement policière, qui s’est transformée ces dernières années en autorité de poursuite pénale au sein de laquelle autorités policières et douanières collaborent dorénavant sur un pied d’égalité. Il est donc particu-lièrement important que l’AFD soit représentée auprès d’Europol.

Quelles sont les tâches d’Europol?Le mandat d’Europol concerne 25 domaines différents de la criminalité. Cela englobe aussi bien le trafic de stupéfiants que la criminalité trans-frontalière, en passant par le trafic de tabac et d’alcool, les délits de fraude, la contrefaçon ou encore le commerce illégal d’espèces menacées ou de biens culturels. Europol ne dispose toute-fois pas de prérogatives l’autorisant à

enquêter directement dans des pays tiers ou à interpeller des personnes. La souveraineté des pays est ainsi préservée. Mais avec ses différentes tâches d’analyse et d’information et les connaissances de ses quelque 900 collaborateurs, Europol sou-tient chaque année plus de 18 000 enquêtes internationales visant à identifier et à poursuivre des réseaux criminels et terroristes.

Quelle est la portée de l’action d’Europol?Outre les 28 pays membres de l’Union européenne, Europol travaille en étroite collaboration avec 13 pays tiers, ainsi qu’avec Interpol et Eurojust, l’équivalent judicaire d’Europol. Tous ces partenaires ont conclu des accords opérationnels. Europol entretient en outre un partenariat stratégique avec cinq autres pays et différentes agences européennes, dont Frontex.

Quelles sont les défis auxquels Europol doit faire face?La lutte contre le terrorisme constitue une priorité de première importance en raison des menaces actuelles. Se basant sur la Serious and Organised Crime Threat Assessment (SOCTA; évaluation de la menace que repré-sente la grande criminalité organisée), le Conseil européen a en outre fixé pour la période 2014-2017 une série d’autres priorités dans le domaine de la grande criminalité organisée. Ces priorités concernent notamment la fraude à la TVA et aux impôts à la consommation, l’immigration clandes-tine, le trafic d’êtres humains, le trafic et le commerce de stupéfiants ainsi que la cybercriminalité. A ce propos,

Martin Michel (35), officier garde-frontière

et juriste, travaille depuis bientôt six mois à

La Haye comme officier de liaison de l’AFD

auprès d’Europol.

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il faut souligner qu’Europol met actuellement sur pied une Internet Referal Unit, destinée à lutter conjoin-tement avec les fournisseurs d’accès à Internet contre la diffusion en ligne de propagande terroriste et violente. Europol a également créé une Joint Operational Team afin de combattre la criminalité transfrontalière et poursuit un objectif similaire en participant à l’EU Regional Task Force basée à Catane, en Sicile.

Vous avez évoqué les tâches d’in-formation et d’analyse qu’Europol assume. Pouvez-vous nous en dire davantage?Les analyses opérationnelles repré-sentent une des grandes plus-values qu’apporte Europol. Ces analyses portent sur les modes opératoires, les ressources, les capacités et les faiblesses des réseaux criminels. Elles permettent aussi d’identifier des similitudes entre différentes affaires.

Un exemple concret: des informations fournies par la Hongrie ont permis d’établir des liens entre un trafiquant de cigarettes établi en Suisse et un trafiquant de drogues basé dans les Balkans.

Qu’en est-il des tâches opérationnelles?Europol fournit également un soutien opérationnel et coordonne les actions qui impliquent différents pays et différentes autorités. Europol apporte en outre son assistance aux groupes d’enquête communs, qui sont mis sur pied lorsque plusieurs pays enquêtent ensemble sur un même délit. De telles investigations nécessitent une réelle coordination entre les Etats. En juillet dernier par exemple, Europol et Eurojust ont coordonné l’opération «VERTIGO 2», qui a permis d’inter-peller quatorze personnes dans huit pays différents dans le cadre de la lutte contre la fraude à la TVA. Les services antifraude de l’AFD ont également participé à cette opération. A la suite d’une demande d’entraide judiciaire internationale, ils ont mené différentes perquisitions et ont saisi de nombreuses preuves.

Quelle est votre mission en tant qu’officier de liaison?Je fais partie des quelque 180 officiers de liaison issus de 37 pays qui sont accrédités auprès d’Europol. Les offi-ciers de liaison facilitent la collabo-ration entre leur pays et Europol. Ils assurent notamment la coordination lors de nombreuses enquêtes et per-mettent une bonne communication entre les autorités de poursuite pénale concernées. Je suis en quelque sorte le lien entre Europol et l’AFD.

Quelle est la plus-value de ce réseau d’officiers de liaison?Ce grand réseau permet aux pays représentés de prendre contact rapidement et directement avec les autorités d’un autre Etat. Mon bureau se trouve ainsi juste à côté de celui des officiers de liaison de la Policía Nacional colombienne et de l’US Drug Enforcement Administration. Grâce à cette proximité, il est par exemple possible d’obtenir facilement et sans délai auprès de la douane belge des informations sur un conteneur suspect renfermant des marchandises soumises à des redevances élevées, mais aussi de vérifier l’identité d’un trafiquant de cigarettes auprès de la police roumaine ou encore d’échanger des renseignements avec des enquê-teurs allemands et espagnols après une saisie de stupéfiants à la frontière suisse.

Etes-vous le seul représentant de la Suisse auprès d’Europol?En tant qu’officier de liaison de l’AFD, je travaille au sein du bureau de liaison suisse avec deux attachés de police de l’Office fédéral de la police (fedpol). Nous garantissons ainsi une étroite collaboration entre police et douane. Nous profitons également de la présence à La Haye d’une procu-reure de liaison suisse auprès d’Euro-just, qui nous donne un accès direct aux ministères publics européens. Nous pouvons donc offrir un soutien optimal aux autorités de poursuite pénale suisse, aussi bien dans le cadre de l’assistance administrative que de l’entraide judiciaire.

La lutte contre le terrorisme constitue une priorité de première importance en raison des menaces actuelles.

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La douane quitte la frontièreStratégie

La première pierre du nouveau centre douanier de Brig-Glis (VS), qui sera opérationnel en 2017, a été posée au printemps dernier. Ce projet s’inscrit dans la stratégie de la douane consistant à transférer, autant que faire se peut, les dédouanements vers l’intérieur du pays. Economie, usagers de la route, riverains et douane: tout le monde y trouve son compte. Hans Peter Hefti, suppléant du directeur général des douanes suisses, nous révèle dans cet article ce qui se cache derrière cette stratégie et illustre son propos à l’aide de l’exemple de ce nouveau centre douanier valaisan.

L’une des stratégies de la douane consiste à progressivement transférer les dédouanements à l’importation et à l’exportation des bureaux de douane de frontière aux bureaux de douane de l’intérieur. Avec ce nou-veau centre de douane, la procédure douanière appliquée au départ et à destination de Gondo devra éga-lement subir des modifications. Le transfert des dédouanements vise essentiellement à améliorer la capacité de débit pour les camions aux bureaux de douane de route. La frontière douanière et les contrôles effectués dans le trafic des marchandises de commerce demeurent. Mais la douane migre, autant que faire se peut, de

la frontière vers l’intérieur du pays, surtout dans les endroits particulière-ment exigus, comme à Gondo, et là où le trafic routier est supérieur à la capacité de la douane. Que ce soient les usagers de la route, l’économie, les riverains ou la douane, tout le monde souffre de cette situation. Actuelle-ment, plus de 700 000 personnes, 350 000 véhicules de tourisme et 20 000 camions traversent chaque jour les frontières suisses. Et ces chiffres continuent d’augmenter.

Hans Peter Hefti, suppléant du directeur

général de l’AFD

Le nouveau centre douanier de Brig-Glis devrait être opérationnel en 2017. Il représente un modèle pour les futurs projets de transfert de la taxation vers l’intérieur du pays.

Le nouveau centre de Brig-Glis est un modèle pour l’avenir à plusieurs égards.

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29Forum D. | Dossiers

La douane démonte ses barrièresIl y a quelques années déjà, nous avons adopté une nouvelle stratégie en matière de contrôle. Le but n’est plus de procéder à autant de contrôles que possible, mais d’intervenir dans les situations que nous estimons suspectes sur la base de nos analyses de risques. De plus, les contrôles ne doivent plus obligatoirement avoir lieu à la frontière. L’économie a besoin de frontières ouvertes pour une exécu-tion simple et rapide des importations et des exportations. La douane a démonté ses barrières il y a longtemps déjà. Mais seulement pour ceux qui respectent la loi, ce qui représente la majorité des gens. Notre mission consiste à identifier les personnes qui fraudent et qui portent préjudice à l’économie suisse. Nous voulons protéger les personnes honnêtes qui paient leurs redevances, car elles ne sauraient être lésées.

La protection douanière demeureGrâce à notre stratégie de transfert, nous optimisons la douane et la transférons en partie vers l’intérieur du pays, comme c’est le cas à Brig-Glis et également dans l’UE. Notre but est de pouvoir laisser les frontières ouvertes, sans pour autant renon-

cer à la protection douanière et à la sécurité. Même si notre présence n’est plus visible à certains endroits de la frontière, la douane, elle, subsiste. Depuis longtemps déjà, la surveillance de l’espace frontalier se fait à partir de postes statiques, mais aussi mobiles. Nous sommes là pour la protection de la population et de l’économie. Le nouveau centre douanier de Brig-Glis en est l’illustration parfaite. La douane civile et le Cgfr seront réunis sous le même toit pour que leur future colla-boration soit meilleure et plus efficace.Lors des contrôles douaniers, ce sont plus de 150 lois et autres actes législatifs qu’appliquent nos collabo-rateurs et collaboratrices: leur mission consiste à ne pas laisser des armes, des drogues, des criminels ou des pro-duits contrefaits ou interdits entrer en Suisse, le tout en donnant une bonne image de notre pays. Pour mener leur mission à bien, ils doivent certes faire preuve de tact et de savoir-faire, mais ils ont également besoin d’une infrastructure de qualité et de moyens techniques modernes.

Modèle pour l’avenirLe nouveau centre de Brig-Glis est un modèle pour l’avenir à plusieurs égards:

1. Pour les économies valaisanne, suisse et internationale: grâce à la suppression du goulet d’étran-glement (Gondo), le passage de la frontière s’accélèrera. Nous devons ouvrir nos frontières pour le bien de notre économie intérieure. Si nous ne le faisons pas, nous nous replierons sur nous-mêmes et affaiblirons notre économie. Nous assurons également la protection douanière et la sécurité.

2. Pour le trafic routier et les rive-rains: nous supprimons un goulet d’étranglement et créons de l’es-pace pour de nouvelles initiatives.

3. Pour la douane: nous ouvrons la voie. Ce transfert de la douane vers l’intérieur du pays implique de nouvelles procédures douanières. Les nouveaux processus d’exploi-tation impliquent créativité et flexibilité de la part de la douane. Par ailleurs, le nouveau centre douanier représente un modèle pour les futurs projets.

Le nouveau centre douanier de Brig-Glis devrait être opérationnel en 2017. Il représente un modèle pour les futurs projets de transfert de la taxation vers l’intérieur du pays.

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Qu’entend-on par «déclarations du fournisseur sur territoire suisse»?

Accords de libre-échange

La Suisse et l’AELE ont conclu des accords de libre-échange (ALE) avec divers Etats et groupes d’Etats. Portant notamment sur des préférences tarifaires, ces accords permettent d’importer en franchise ou à un taux réduit des marchandises suisses dans le pays de destination. Dans le trafic transfrontalier de marchandises, une déclaration d’origine sur facture ou un certificat de circulation des marchandises (CCM EUR.1 ou EUR-MED) est nécessaire à cet effet. Pour les mouvements non transfrontaliers, c’est-à-dire les livraisons sur le territoire suisse, de marchandises bénéficiant de préférences tarifaires, il existe la déclaration du fournisseur (DF). Matthias Gfeller et Stefan Meinigg, de la section Origine, nous expliquent ce qu’il en est.

Lorsque l’origine d’une marchandise doit être reportée en Suisse, il faut éta-blir une DF. Celle-ci peut se rapporter à plusieurs ALE (à la différence des preuves d’origine transfrontalières). L’exportateur en a besoin pour prouver l’origine d’un produit. La DF fait partie de la chaîne de preuve (chaîne de l’ori-gine), qui doit permettre de documen-ter l’origine d’une marchandise sans interruption et être vérifiable. Cette chaîne peut donc partir de l’exporta-teur, passer par un négociant et par le fabricant proprement dit, et remonter jusqu’au fournisseur de ce dernier.

Les fournisseurs étrangers reportent le caractère originaire avec les preuves d’origine, qui servent également à obtenir la préférence tarifaire lors de l’importation (CCM, déclaration d’ori-gine). Les fournisseurs suisses utilisent quant à eux la DF.Si la DF manque, la chaîne de l’origine est brisée, entraînant ainsi la perte du caractère originaire des marchandises. Ces dernières sont alors réputées «marchandises non ori-ginaires». A l’étranger, le traitement préférentiel est donc exclu pour ces marchandises.

La DF est une indication contrai-gnante du fournisseur concernant le caractère originaire d’une mar-chandise livrée par ses soins, dans le cadre des réglementations préfé-rentielles de la Suisse avec les pays mentionnés dans la déclaration.

Des justificatifs d’origine completsCe qui compte, ce n’est pas en pre-mier lieu de savoir si la marchandise a été suffisamment ouvrée par l’expor-tateur lui-même, mais si la totalité des

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ouvraisons effectuées en Suisse ou dans la zone de libre-échange concer-née sont suffisantes.La DF est donc importante notam-ment lorsqu’une marchandise est exportée sans avoir subi d’ouvraison supplémentaire. Elle permet à l’ex-portateur de reporter l’origine qui lui a été indiquée par son fournisseur en Suisse et qu’il ne peut pas déterminer lui-même, et de profiter ainsi de pré-férences tarifaires lors de l’importation dans un pays partenaire de libre-échange. Exemple: un fabricant de machines distribue non seulement des machines, mais également les lubri-fiants correspondants. Il ne produit pas lui-même ces derniers, mais les

achète à un fournisseur suisse en tant que marchandise d’origine suisse.D’autre part, afin qu’une marchandise produite en Suisse obtienne l’origine suisse, il faut souvent ne pas dépasser une certaine part de matières non originaires (par ex. pas plus de 40 % de la valeur). Dans ce cas, la preuve de l’origine des différentes matières est importante, puisqu’elle permet à ces dernières de ne pas être réputées «non originaires». Exemple: le moteur monté (outre d’autres matières) dans une voiture électrique déterminée représente une part élevée de la valeur de celle-ci. La voiture est réputée originaire uniquement si le moteur est lui-même considéré comme originaire. Grâce à la DF établie pour le moteur, l’exportateur peut prouver l’origine de la voiture dans son ensemble. C’est donc cette déclaration qui déter-mine par exemple s’il faudra oui ou non s’acquitter de droits de douane s’élevant à 10 % de la valeur totale de la voiture lors de l’importation dans l’Union européenne.

Importance des accords de libre-échange pour les fournis-seurs suissesSouvent, un fournisseur suisse éta-blissant une DF est nettement plus

attrayant pour les clients qui exportent leurs produits qu’un fournisseur suisse qui ne peut pas établir une DF. Les ALE favorisent ainsi non seulement les exportateurs, mais également les four-nisseurs suisses qui sont fortement intégrés dans la fabrication en Suisse et, partant, influent sur le marché intérieur. Les fournisseurs suisses qui livrent des marchandises originaires et établissent une DF peuvent ainsi éventuellement compenser les désavantages au niveau des prix par rapport aux concurrents de pays tiers.Cependant, le fournisseur suisse ne peut pas faire autrement que de se pencher sur les règles des ALE, et ce même s’il n’exporte pas lui-même. Il doit appliquer les mêmes règles d’ori-gine qu’une entreprise exportatrice.Dans le cadre de l’assistance admi-nistrative, l’Etat d’importation peut demander un contrôle de la preuve d’origine à l’Etat d’exportation. Ayant avant tout lieu auprès de l’exporta-teur, ce contrôle peut cependant être étendu en tout temps à une partie ou même jusqu’au début de la chaîne de l’origine. Les entreprises qui attestent l’origine des produits au moyen de DF sont soumises aux mêmes disposi-tions que celles qui établissent des preuves d’origine transfrontalières. Lors de contrôles a posteriori, elles doivent donc pouvoir prouver en tout temps l’exactitude des DF qu’elles ont établies.L’établissement de DF n’est pas une obligation légale. Même si les condi-tions sont remplies, une entreprise qui préfère y renoncer ne peut donc pas y être forcée. Les responsables doivent cependant être conscients du fait que l’entreprise risque d’être moins attrayante pour ses clients en tant que fournisseur et, partant, de perdre des contrats.Les DF ne sont cependant pas utiles pour toutes les livraisons sur le terri-toire suisse, en particulier lorsqu’une marchandise n’est ni exportée ni utili-sée en tant que matière pour un pro-duit destiné à être exporté ou lorsqu’il ne s’agit pas d’une exportation dans un pays partenaire de libre-échange. Il est également possible de renoncer à l’établissement d’une DF lorsque la

marchandise fait partie d’un produit final destiné à être exporté dans un pays partenaire de libre-échange, mais qu’elle n’a pas d’incidence sur la détermination de l’origine dudit produit (par ex. dans le cas de pièces d’importance minime). Etant donné que le fournisseur ne sait pas toujours à quelles fins le client utilise la mar-chandise, il faut qu’il dialogue avec ce dernier afin d’éviter les DF inutiles.Comme c’est aussi le cas avec les preuves d’origine transfrontalières, des DF sont parfois établies à tort. Il peut donc arriver que la preuve d’origine établie par l’exportateur d’une marchandise et destinataire de la DF soit considérée comme nulle, bien qu’il ait lui-même tout fait de manière correcte. Il en résulte des frais de douane inattendus dans le pays de destination. L’Administration fédé-rale des douanes (AFD) recommande par conséquent aux exportateurs de s’assurer contractuellement contre ce risque.

L’AFD a élaboré une notice contenant les principales informa-tions concernant les DF (www.ezv.admin.ch ➔ Documentation ➔ Publications ➔ Publications concer-nant l’origine ➔ Territoire suisse).

Si la DF manque, la chaîne de l’origine est brisée, entraînant ainsi la perte du caractère originaire des marchandises.

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Tous alliés pour la protection des frontières

L’invité de Forum D.: Urs Hoffmann, président du Conseil d’Etat, chef du Département de l’économie et de l’intérieur du canton d’Argovie et co-président de la plateforme CCDJP/AFD.

Les tâches des cantons et celles du Corps des gardes-frontière (Cgfr) ont beaucoup de points communs. Depuis l’adhésion de la Suisse à l’espace Schengen, cette collaboration s’est encore intensifiée. La crise des migrants que connait actuellement l’Europe le démontre: les défis actuels ne pourraient être surmontés sans une harmonisation des stratégies et des tâches prioritaires entre les autorités cantonales de police, le Cgfr et le Secrétariat d’Etat aux migrations.

Compte tenu de la réglementation des compétences prévue par la Consti-tution, la sécurité intérieure est du ressort des cantons. Ceux-ci sont éga-lement responsables du contrôle des personnes aux frontières nationales, alors que l’Administration fédérale des douanes se charge des tâches doua-nières. Toutefois, il existe de grandes synergies entre ces deux missions, particulièrement depuis l’adhésion de la Suisse à l’espace Schengen. Depuis lors, celle-ci n’a plus le droit d’effec-tuer des contrôles systématiques des personnes aux frontières, mais elle continue à pratiquer des contrôles

douaniers et à effectuer des contrôles mobiles près de la frontière et sur les liaisons ferroviaires internationales. La Conférence des directrices et direc-teurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) et l’Adminis-tration fédérale des douanes (AFD) ont cherché des solutions pour optimiser la collaboration. Les discussions ont abouti sur un accord-cadre, qui régit la collaboration entre les cantons et le Cgfr et l’AFD en général. De cette manière, la CCDJP a essayé de garantir un régime aussi uniforme que possible dans les régions frontalières. Par ailleurs, presque tous les cantons ont

conclu des accords avec l’AFD durant ces dernières années.Par ces accords, les cantons délèguent certaines tâches au Corps des gardes-frontière, qui les assume de manière autonome et dans un espace frontalier défini. Cela concerne par exemple la répression des entrées illégales, la répression de la falsifica-tion de documents, la répression des infractions en matière de stupéfiants ou de certaines infractions de la route. La collaboration s’est mise en place à la satisfaction des deux parties. Les estimations de la situation sont discu-tées, les engagements coordonnés et des actions communes parfois menées dans l’espace frontalier.En ce qui concerne les thèmes poli-tiques et stratégiques, je préside une plateforme CCDJP-AFD, en collabo-ration avec le directeur général des douanes. Elle a lieu au moins deux fois par an et réunit notamment les commandants de la police et le chef du Cgfr.Dans la situation actuelle, avec les flots de migrants qui arrivent aux frontières sud et est, la coordination établie sur le plan politique et opérationnel se révèle particulièrement importante. A l’aide des instruments évoqués, nous avons créé les conditions pour que la Confédération et les cantons utilisent les ressources disponibles de manière adéquate dans le domaine de la gestion des frontières et qu’ils puissent fixer des priorités en ce qui concerne les sujets actuellement au centre des préoccupations. Dans l’intérêt de la sécurité des citoyens et citoyennes, il est important d’entretenir et de déve-lopper la qualité et l’intensité de cette collaboration.

Urs Hofmann

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Pratiques illégales avec des véhicules de collection

Section antifraude douanière

Au début de l’année, la section antifraude douanière de Zurich a clos deux enquêtes similaires dans le domaine des voitures de collection. Des particuliers avaient tenté d’économiser de l’argent lors du dédouanement en falsifiant des papiers et en déclarant des valeurs erronées. Les deux cas ont été découverts et les redevances soustraites se situent autour de 100 000 francs suisses. Par Kim Sandy Pittet, stagiaire en communication à la DGD

Lors de la crise financière de 2008 à 2013, les voitures de collection étaient vendues à des prix intéres-sants. Monsieur A. a profité des circonstances en important un grand nombre de véhicules pour les

revendre ensuite en Suisse. Au total, il a acheté aux Etats-Unis 37 voitures, produites pour la plupart pendant les années 60. C’est à sa demande que le dédouanement à l’importation a été organisé. Il a remis personnelle-ment les justificatifs de valeur pour les voitures aux transitaires chargés de la déclaration en douane. Bien que les collaborateurs des bureaux de douane se soient rapidement doutés que les renseignements n’étaient pas corrects, ils n’avaient pas de preuves contre monsieur A. Ce dernier avait présenté, entre autres pièces justificatives, des relevés de comptes et des quittances. C’est sur cette base que les voitures ont été imposées par la douane et monsieur A. a immédiatement payé les redevances correspondantes.La section antifraude douanière, qui soupçonnait monsieur A. d’avoir émis des faux documents et soustrait des redevances, a ouvert une enquête pénale au printemps 2014. Lors de la première audition, l’accusé a encore nié les charges retenues contre lui. Les pièces à conviction trouvées lors de la perquisition ont montré toute l’énergie déployée pour réaliser cette escroquerie. L’enquête a révélé que les

justificatifs bancaires et les relevés de compte avaient été falsifiés. De plus, monsieur A. avait fabriqué des docu-ments de qualité professionnelle et ils n’avaient donc pas éveillé les soup-çons lors du contrôle des papiers. Les redevances soustraites se montaient dans ce cas à 30 000 francs.

Voitures de sport de collection pour un million de francsMonsieur T. a lui aussi un faible pour les voitures de collection, en particulier les voitures de sport, et il est prêt à y mettre le prix. Entre 2008 et 2014, il a investi environ un million de francs dans l’achat de six véhicules. Les docu-

ments présentés lors de la déclaration en douane indiquaient des valeurs étrangement basses et la section antifraude a donc été réquisitionnée. Ayant examiné le cas avec la plus grande attention, elle a fini par enga-ger une enquête pénale à l’encontre de monsieur T. Après la perquisition, l’accusé s’est montré raisonnable et a avoué avoir enfreint la loi. Lors des six importations, il avait personnellement veillé à ce que des justificatifs de valeur fictifs et des factures de complaisance soient présentés au bureau de douane. Les redevances soustraites s’élevaient à 80 000 francs.

Source: section antifraude de Zurich

L’enquête a révélé que les justificatifs bancaires et les relevés de compte avaient été falsifiés.

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34 Forum D. | Dossiers

La douane lutte contre le cabotage illégalSection antifraude douanière

Les sections antifraude douanière sont notamment responsables des enquêtes pénales en cas d’infractions à l’interdiction de cabotage. Pour ce faire, elles ont besoin du soutien de l’industrie suisse des transports. En effet, les indications relatives au véhicule, au lieu et à l’heure de la constatation, aux faits et à l’interlocuteur en cas de questions sont déterminantes dans la lutte contre les transports intérieurs (cabotage) illicites. Sur la base d’une dénonciation, les sections antifraude douanière peuvent protéger les entreprises suisses de trans-port d’une distorsion de la concurrence. Par Paul Zuber, chef de la section antifraude douanière de Bâle

L’Administration fédérale des douanes (AFD), et plus précisément ses sections antifraude douanière, combattent depuis des décennies, sur l’ensemble du territoire suisse et en tenant compte de la situation, les transports inté-rieurs interdits. La plupart des rapports concernant ces transports découlent de contrôles effectués par la douane civile et le Corps des gardes-frontière (Cgfr) dans les régions frontalières et à la frontière nationale. La police, les entreprises de transport et les asso-ciations de la branche sont également d’importantes sources d’information. Au moyen d’une feuille d’information, la police a de nouveau été sensibilisée en avril 2015 au problème du traite-ment douanier des véhicules. Elle doit immédiatement signaler à l’AFD les irrégularités qu’elle constate lors de contrôles.Les entreprises de transport peuvent se protéger d’une distorsion de la concurrence en signalant les trans-ports intérieurs illicites. Les sections antifraude douanière vérifient alors ces dénonciations et ouvrent une enquête pénale douanière lorsqu’il existe un soupçon suffisant. Bien qu’elles soient

chargées d’identifier de nombreuses autres infractions, elles s’efforcent d’assurer aussi rapidement que pos-sible la conservation des preuves sur les lieux. Ces enquêtes pénales douanières conduisent souvent à des amendes importantes et à des perceptions sub-séquentes portant sur des montants de redevances élevés.

De nombreuses enquêtes pénales douanièresA elle seule, la section antifraude douanière de Bâle (qui est responsable des cantons de Berne, de Lucerne, d’Obwald, de Nidwald, de Soleure, de Bâle-Ville, de Bâle-Campagne, d’Argovie et du Jura) doit déjà traiter de nombreuses enquêtes pénales douanières dans le domaine du cabo-tage à l’encontre d’entreprises suisses et étrangères. Ces enquêtes ont déjà porté sur toutes sortes de moyens de transport étrangers tels que des remorques, des semi-remorques, des véhicules utilitaires, des limousines, des conteneurs, des locomotives, des wagons de chemins de fer ou encore des avions. Dans ce cadre, des rede-vances s’élevant à plusieurs millions ont été recouvrées et des amendes considérables prononcées.

Les contrôles et interpellations sont souvent effectués en collaboration avec le Cgfr ou la police. Il peut donc arriver qu’un voyage en car ne se déroule pas comme prévu. Selon les circonstances, il faudra tout d’abord se procurer un car en Suisse. Quant au véhicule qui a servi à commettre l’infraction, il sera ensuite dédouané et imposé. Des mesures de contrainte (séquestres, perquisitions) seront éga-lement prises afin de mettre en sûreté les preuves concernant ces transports et d’élucider les faits.

Une pratique déloyale et antisocialeLes cas de cabotage illégal devraient immédiatement être signalés à l’AFD. En effet, comme la contrebande, le cabotage illicite est une pratique déloyale qui nuit à l’économie, car il crée une distorsion de la concurrence. Il s’agit également d’une pratique antisociale qui prive l’Etat des rede-vances dont il a besoin pour remplir ses obligations envers la population.

Paul Zuber

Interdiction de cabotageEn principe, seuls les moyens de transport dédouanés, imposés et immatriculés en Suisse sont autorisés pour les transports internes (cabo-tage) au sein du territoire douanier suisse. Cette mesure vise à protéger l’industrie suisse des transports. Vous trouverez des détails à ce sujet et les bases légales correspondantes sur le site Internet de l’AFD: www.ezv.admin.ch ➔ Infos pour entre-prises ➔ Transport, document de voyage, redevances routières ➔ Prescriptions relatives au transport.

La plupart des rapports concernant ces transports découlent de contrôles effectués par la douane civile et le Corps des gardes-frontière (Cgfr) dans les régions frontalières et à la frontière nationale.

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35Forum D. | Dossiers

Soustraction de droits de douane grâce à une tromperie sur l’origine

Section antifraude douanière

La ténacité de la douane suisse et des autorités étrangères a fini par payer: la Section antifraude douanière de Lausanne a pu démasquer un commerçant ayant falsifié plus de 150 déclarations d’origine sur facture et sous-trait de la sorte plusieurs milliers de francs de droits de douane. Par Jean-Claude Duvoisin, chef de la Section antifraude douanière de Lausanne

Les accords de libre-échange per-mettent de bénéficier de taux de douane réduits lors de l’importation de certaines marchandises, pour autant que le tarif des douanes le prévoie. Ces préférences tarifaires ne sont toutefois pas octroyées automati-quement. Les marchandises importées doivent remplir des critères stricts en ce qui concerne leur fabrication, la proportion de certaines matières pre-mières ou la part de la valeur ajoutée. L’exportateur doit en outre souscrire un engagement pour que son client puisse bénéficier de la réduction ou de l’exonération. Depuis plusieurs années, un commer-çant romand donne du fil à retordre aux gardes-frontière ainsi qu’aux spé-cialistes et aux enquêteurs de douane. Cet homme a commencé sa carrière de contrebandier en important des marchandises, sans les déclarer, par

de petits passages frontières non gardés. Par la suite, désireux d’éviter les tracas liés à ses multiples interpel-lations, il change de méthode: tout en déclarant sa marchandise au bureau de douane, il «oublie» régulièrement de déclarer une partie des vêtements qu’il transporte. Avec le temps, il semble pourtant vouloir s’amender: il déclare à chaque passage l’ensemble des vêtements transportés, factures à l’appui. Sur ces factures, ses fournis-seurs attestent de l’origine préféren-tielle de l’envoi.De nouvelles vérifications effectuées par la douane révèlent pourtant que certains vêtements ont été manipulés de manière à cacher leur véritable ori-gine, un pays tiers en l’occurrence. De plus, le personnel douanier remarque que les factures de différents fournis-seurs étrangers présentent un timbre en tout point identique.

Contrôle a posteriori de l’origineLes spécialistes de douane se mettent donc à douter de l’origine préféren-tielle des marchandises et de l’authen-ticité des preuves d’origine produites par le commerçant. Ils sollicitent auprès des autorités étrangères un contrôle a posteriori de la validité de certains documents. Il en ressort

qu’aucun des produits contrôlés pour lesquels le commerçant a revendi-qué une origine préférentielle ne remplit les critères de l’accord de libre-échange concerné. La Section antifraude douanière dépose alors auprès de la douane française une demande de contrôle de toutes les autres preuves d’origine. Le résultat est sans appel: la quasi-totalité des envois ont été déclarés au moyen de preuves d’origine établies à tort. Dans le cadre de l’enquête menée par la Section antifraude douanière, la res-ponsabilité du commerçant et impor-tateur suisse dans cette infraction a pu être démontrée. Celui-ci deman-dait en effet à tous ses fournisseurs de dater et de signer les factures, sans leur fournir d’autres explications. Sur les factures signées, il apposait ensuite son timbre déclarant ces produits comme originaires. En revendiquant une origine préféren-tielle pour ses produits, ce commer-çant n’a pas seulement soustrait des droits de douane; il a aussi faussé les règles du marché. Par rapport à ses concurrents, il s’est en effet acquitté de droits de douane moins élevés. Ce genre de tromperie nuit aux fabricants de vêtements en UE et en Suisse ainsi qu’aux autres importateurs. Comme le contrevenant prenait tout de même en compte une partie des droits de douane dans le calcul de ses prix, les consommateurs n’ont pas tiré profit de ses pratiques. La tromperie n’a bénéficié qu’au contrevenant, lequel a considérablement augmenté sa marge de profit sur le dos de l’Etat, de ses clients et de ses concurrents.

La tromperie n’a bénéficié qu’au contrevenant, lequel a considérablement aug-menté sa marge de profit sur le dos de l’Etat, de ses clients et de ses concurrents.

Jean-Claude Duvoisin, chef de la Section

antifraude douanière de Lausanne

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Quand je pense à la douane…Jürg Martin Gabriel (75), professeur honoraire en politique internationale à l’EPFZ

Quand je pense à la douane, c’est essentiellement la notion d’Etat qui me vient à l’esprit. Pour être plus précis, je considère les droits de douane comme un moyen dont dispose l’Etat pour gouverner la société. Ceux-ci doivent par conséquent servir l’intérêt général et être susceptibles d’être perçus de force si cela s’avère nécessaire. Tel est du moins mon avis de politologue car, comme l’affirme mon confrère amé-ricain David Easton, le rôle principal de la politique consiste à répartir les valeurs par voie d’autorité. Cette défi-nition s’applique aux droits de douane.

A l’heure actuelle, les droits de douane sont perçus avant tout sur le plan national. Mais pas seulement. Le monde politique ne cesse d’évoluer. Ainsi, il peut aussi exister des autorités douanières à un niveau supérieur ou inférieur au niveau national. L’Union douanière de l’UE représente un exemple d’autorité supranationale. En Suisse, la souveraineté douanière était exercée par des autorités subnationales avant 1848. Elle incombait en effet

aux cantons et à certaines communes à cette époque. Le restaurant «Zoll-haus» situé au bord du Plessur à Coire évoque encore aujourd’hui cette com-pétence que possédait autrefois la ville.

Les frontières sont érigées ou abo-lies, que ce soit en temps de paix ou de guerre. Citons à titre d’exemples l’effondrement du bloc de l’Est, de l’Union soviétique ou de la Yougosla-vie. Par ailleurs, les mesures douanières font constamment l’objet de nou-velles négociations. Dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), la Suisse a accepté quantité de nouvelles règles du jeu et réduit massi-vement les droits de douane appliqués. Il en découle une perte de souverai-neté, qui est cependant compensée par une augmentation de la prospérité économique. Pour les défenseurs de la théorie du libre-échange, cette évolu-tion est bénéfique à l’intérêt général.

Les droits de douane servent à diverses fins. L’une d’elles est d’ordre financier. L’ancien bâtiment douanier situé au

bord du Plessur permettait à la ville de Coire de remplir ses caisses. Après 1848, les droits de douane revêtaient une importance considérable pour la Confédération. Mais les choses ont changé. Si l’autorité douanière est restée attachée au Département fédéral des finances, d’autres recettes étatiques ont surpassé les droits de douane en importance. Si la Suisse adhérait un jour à l’Union douanière européenne, la situation évoluerait une nouvelle fois.

Les droits de douane remplissent en outre une fonction protectrice. Un des rôles dévolus à l’ancien bâtiment douanier situé au bord du Plessur était probablement de protéger le commerce de la ville de Coire de toute concurrence fâcheuse. Ce genre de protectionnisme existe encore aujourd’hui, principalement dans le domaine de l’agriculture. Cependant, une protection est aussi nécessaire dans le commerce transfrontalier des médicaments, des stupéfiants, des explosifs ou des armes.

Les contrôles effectués aux frontières concernent également les personnes. Cette tâche est accomplie par le Corps des gardes-frontière, souvent en étroite collaboration avec la douane civile. Une évolution est visible même dans ce domaine. A l’intérieur de l’espace Schengen, les contrôles systématiques des personnes ont été supprimés. Mais ils ont encore lieu le long des frontières extérieures de l’espace Schengen, et le Corps des gardes-frontière suisse et l’Agence européenne pour la gestion des frontières (FRONTEX) collaborent étroitement dans ce domaine. Il n’est donc guère surprenant que les gardes-frontière suisses utilisent les outils électroniques modernes de FRONTEX et que certains d’entre eux travaillent même au siège principal de l’agence à Varsovie.

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La douane, alliée de l’économie

L’invité de Forum D.: Peter Widmer, président de l’association swiss export et membre du conseil d’administration de Rhenus Alpina AG

La Suisse est dépendante d’un commerce extérieur aussi efficient et fluide que possible. La douane, partenaire important de l’économie, peut elle aussi se révéler une précieuse alliée grâce à son propre pouvoir d’innovation.

Comme le montrent clairement les chiffres de l’Administration fédérale des douanes, l’industrie d’exportation en Suisse et au Liechtenstein a vécu un premier semestre 2015 difficile. Il est impressionnant de constater avec quelle véhémence et quelle force d’innovation elle affronte cette situation exceptionnelle persistante et défend ses qualités incontestables sur le marché mondial.

Être plus qu’un simple partenaireEn raison du rôle majeur que joue le commerce extérieur dans la prospé-rité de notre nation, considérer que seules les entreprises orientées vers l’import-export doivent se charger d’inverser la tendance serait une politique à courte vue et une occasion manquée. Une politique à courte vue, car les interactions qui se produisent dans une économie intégrée et une société moderne seraient négligées. Une occasion manquée, car agir de la sorte signifierait ignorer le potentiel innovateur et l’engagement actif d’ac-teurs importants, comme par exemple l’Administration fédérale des douanes.Par son rôle central dans le bon déroulement des transactions com-merciales, la douane est un parte-naire essentiel de l’économie. En tant que tel, elle peut soutenir avec bienveillance les initiatives que prend la branche exportatrice suisse dans le but d’accroître son efficience au quotidien. En outre, la douane peut devenir une véritable alliée de l’éco-nomie, en donnant des impulsions positives à une amélioration durable des conditions.

Surmonter les obstacles, simplifier les échangesPar exemple, les grands flux de mar-

chandises qui doivent circuler juste à temps sont pris en charge de manière toujours plus efficiente grâce aux possibilités qu’offre la technologie de l’information moderne. Par ailleurs, la douane suisse joue un rôle important dans la facilitation du commerce inter-national, en supprimant des obstacles au commerce et en mettant en œuvre des accords de libre-échange. Selon la Banque mondiale, la douane suisse occupe le sixième rang mondial de l’index de performance logis-tique 2014. La vitesse à laquelle sont remplies les formalités, ainsi que leur simplicité et leur prévisibilité, sont particulièrement bien classées par rap-port aux autres nations. Cette place honorable dans le top 10 démontre qu’une douane innovante et favorable à l’économie contribue grandement

au succès de cette dernière. Lorsque des gains en matière de coûts et d’efficience sont générés dans les entreprises elles-mêmes et que le pro-cessus de dédouanement est simplifié, la place économique en bénéficie doublement.

Conjuguer les effortsEtant donné la position inhabituelle dans laquelle se trouvent aujourd’hui de nombreuses PME et grandes entre-prises du commerce extérieur, elles ont besoin de pouvoir compter sur des alliés capables de s’associer à leur réflexion. Les progrès déjà accomplis démontrent que la douane, dans le respect des prescriptions légales, peut jouer un rôle à la fois de soutien et de motivatrice.

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Renforcement des capacités de la douane ivoirienneAu centre de formation de la douane d’Abidjan, deux experts de la douane suisse ont instruit plus de 80 douaniers ivoiriens dans le domaine des contrôles a posteriori. Jean-Marc Renaud, sup-pléant du chef de la section antifraude de Lausanne, et Stéphane Ulrich, chef de service au bureau de douane de Genève-Routes, ont prodigué cette formation dans le cadre du Programme d’appui au commerce et à l’intégra-tion régionale (PACIR), qui est financé par l’Union européenne et piloté par l’OMD. Les participants à ce cours de perfectionnement étaient des doua-niers ivoiriens travaillant en première ligne, c’est-à-dire à l’aéroport, dans les ports et dans les bureaux de douane de frontière, ainsi que des membres du service d’analyse des risques et du service antifraude.

Le «Basilisk» retrouve tout son éclatAprès plusieurs mois de révision dans un chantier naval, le bateau d’inter-vention «Basilisk» du Cgfr a retrouvé les eaux du Rhin au printemps 2015. Au service des gardes-frontière bâlois depuis 2001, ce bateau de type

P16-EX accusait le poids des ans et a par conséquent dû être révisé. Le «Basilisk» dispose désormais de deux moteurs de 170 CV chacun, ce qui le rend à la fois plus performant et plus respectueux de l’environnement. Son design est également nouveau. Sa peinture extérieure bleue et jaune, le marquage rectangulaire bleu et jaune de ses parois et les inscriptions «Grenzwachtkorps» et «Garde-fron-tière» visibles de loin constituent égale-ment des nouveautés. Sur le Rhin, les gardes-frontière suisses n’assument pas seulement des tâches douanières et policières, mais font également partie du service de sauvetage. Le «Basilisk» est par conséquent équipé de matériel tel que des extincteurs, un brancard, un défibrillateur, un sac de sauvetage, des bouées et gilets de sauvetage, ainsi que d’une caméra thermique, d’un radar, d’un échoson-deur et d’une radio.

Nouveau site pour Chavornay Port Franc Pour les collaborateurs du bureau de douane de Chavornay, le 1er mai 2015 a été marqué d’une pierre blanche. Après plus de 38 ans dans ses locaux d’origine, le BD du dépôt franc sous

douane de Chavornay a été transféré dans un nouveau site. Le port franc de Chavornay avait pris naissance le 3 janvier 1977 en relation avec la fermeture des ports francs de Lau-sanne et d’Yverdon. Il appartenait à l’entreprise PESA. Le projet Chavornay Parc SA a vu le jour en 2006, mais a été abandonné deux ans plus tard par ses promoteurs. Ce n’est qu’après la reprise de PESA par l’entreprise Planzer, en 2009, que le projet de création d’un nouveau dépôt franc sous douane a repris forme. Finalement, le bureau de douane a déménagé le 1er mai 2015 au numéro 4c de la rue de l’Industrie, également à Chavornay. Il se trouve maintenant dans une ancienne halle d’entreposage. Le nouveau BD est caractérisé par des locaux conviviaux. Il dispose par ailleurs d’une aire de vérifi-cation couverte dans laquelle un poids lourd de 40 tonnes peut être contrôlé sans difficultés. Par David Di Carlo, spécialiste de douane à Chavornay Port Franc.

Accréditation auprès de l’Organisa-tion mondiale des douanesL’Organisation mondiale des douanes (AOMD) organise régulièrement des ateliers d’accréditation destinés aux experts de douane de divers pays. Pour obtenir cette accréditation, les candi-dats doivent faire preuve non seule-

En bref

Le poste frontière de Noé, entre le Ghana et la Côte d’Ivoire

Le «Basilisk» autrefois… et aujourd’hui

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ment de connaissances de la technique douanière, mais aussi de capacités didactiques. Le processus d’accrédi-tation dure une semaine. Les partici-pants sont ensuite engagés pour des missions internationales à court terme. Ces missions consistent avant tout à soutenir des autorités douanières dans le renforcement des capacités (Capacity Building). Elles constituent pour l’OMD un moyen de soutenir les Etats membres dans la mise en œuvre et le maintien des normes édictées par l’organisation.En mai de cette année, Rolf Schre-fel, expert de douane au bureau

de douane du Rheintal, a obtenu son accréditation dans le domaine spécialisé de la gestion des risques. Son accréditation auprès de l’OMD à Bruxelles témoigne d’une part des performances de la douane suisse et garantit d’autre part le transfert de connaissances entre cette dernière et l’OMD.

Des douaniers suisses à l’école des douanes de ShanghaiDans le cadre de l’accord de coopé-ration conclu avec l’administration chinoise des douanes, une délégation de la douane suisse a visité l’école des

douanes de Shanghai à l’occasion d’un atelier consacré au commerce électro-nique, à la perception des droits et à la gestion des risques. Chaque année, ce sont jusqu’à 2000 étudiants venus de toute la Chine qui sont formés dans cette école. Les participants suisses étaient Heinz Widmer, chef du bureau de douane de Zurich-aéroport, Marcel Steiner, chef de la section PCD et RPLP à la DGD, et Carmelo Lombardo, chef de service au bureau de douane de Zurich-aéroport. Cet atelier accueillait 32 autres participants, tous venus de Chine. La comparaison des processus de dédouanement dans le domaine du commerce électronique a suscité d’in-téressantes discussions. Les collègues chinois se sont montrés impression-nés par l’efficience de nos processus PCD ainsi que par les structures et les processus de la gestion des risques de l’Administration fédérale des douanes. Par Heinz Widmer, chef du bureau de douane de Zurich-aéroport

Conférence de presse sur les graines de cannabisEn raison de l’augmentation des saisies de graines de cannabis, une conférence de presse a eu lieu à la fin de mai 2015 au centre de tri de Zurich-Mülligen. Alors que 735 envois avaient été saisis en 2014, la douane suisse en a déjà découvert 2874 pendant le premier trimestre de cette année, avant tout dans le trafic postal international. Cela correspond à une quantité d’environ 50 000 graines

Le nouveau bureau de douane de Chavornay Port Franc

Rolf Schrefel (3e depuis la gauche au

deuxième rang)

Les participants devant les locaux de formation de l’école des douanes de Shanghai

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de cannabis. Roman Litschi, chef du bureau de douane de Zurich, Thomas Zehnder, commandant de la région Cgfr II, et Andreas Trachsel, chef du domaine de service Stupéfiants de l’AFD, ont renseigné les représen-tants des médias. En tablant sur une croissance moyenne, les graines de cannabis saisies en 2015 auraient per-mis de produire quelque 2 tonnes de marihuana séchée. Cette drogue aurait eu une teneur en THC jusqu’à 25 fois supérieure à la limite légale de 1 %. Ces graines de cannabis tombent par conséquent sous le coup de la loi sur les stupéfiants. La quantité de 2 tonnes correspond à une valeur marchande comprise entre 14 et 24 millions de francs. Les envois saisis ont été transmis aux autorités compétentes des cantons de destination; selon les informations émanant de divers cantons, la découverte de ces envois a entraîné celle de plantations de chanvre en salle exploitées profession-nellement.

Des cellules de lutte contre le trafic de stupéfiants au CamerounEn juin 2015, Jean-François Christen, coordinateur stupéfiants au bureau de douane de Genève-aéroport, a donné un cours dans le cadre de la formation «AIRCOP» au Cameroun. «AIRCOP» est une institution mise sur pied par l’Organisation mondiale des douanes et par Interpol. Elle est financée à hauteur de trois millions d’euros par la Commission européenne, et ses

activités sont coordonnées par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNDOC). Elle met en place les capacités nécessaires à la lutte contre le trafic de drogue dans une douzaine d’aéroports internationaux d’Afrique occidentale, du Maroc et du Brésil. «AIRCOP» prévoit notamment la créa-tion d’unité spéciales communiquant entre elles par l’intermédiaire d’une plateforme protégée. Cette plateforme permettra d’échanger en temps réel des informations relatives à des pas-sagers ou colis suspects et d’accéder à des banques de données interna-tionales. Lors de sa mission, l’expert suisse a mis en œuvre et dirigé une

partie du stage pratique de 10 jours destiné à 33 représentants de la gen-darmerie, de la police et de la douane. Ces neuf femmes et 24 hommes travailleront ensuite dans les cellules de lutte contre le trafic de stupéfiants qu’il est prévu d’ouvrir dans les aéroports de Yaoundé et de Douala. La formation a eu lieu à Yaoundé, où le bureau régio-nal d’Interpol pour l’Afrique centrale avait mis des locaux à disposition.

Destruction de couteaux et de casserolesLors d’une opération conjointe effec-tuée en juin au bureau de douane de Thônex-Vallard, le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO), le Ministère public du canton de Genève, la Section antifraude et la Direction d’arrondis-sement de Genève ont procédé à la destruction d’environ une tonne de couteaux et de casseroles. Ces objets, au nombre d’environ 2700, avaient été retirés de la circulation par la douane suisse entre 2013 et 2015. Il s’agissait de produits bon marché de piètre qualité que les vendeurs proposaient à des prix exagérés. Des assortiments de casseroles ont par exemple été proposés pour 1700 francs alors qu’ils étaient vendus environ 35 euros dans la région frontalière voisine. Ces casseroles et ces couteaux étaient par ailleurs munis des armoiries de la Confédération afin de passer pour des

Les participants de la formation «AIRCOP»

Contrôle douanier au centre de tri de Zurich-Mülligen

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produits de qualité suisse. En plus de payer un prix exagéré, les acheteurs de ces produits de piètre qualité mettent leur santé en danger.

Délégation d’Amérique centraleEn juin 2015, une délégation du SIECA (Secretaria de Integración Económica Centroamericana) a effectué une visite en Suisse sous la conduite de Mme Carmen Gisela Vergara, secrétaire générale. Le SIECA est une organisa-tion intergouvernementale regroupant les Etats d’Amérique centrale, soit le Costa Rica, le Salvador, le Guate-mala, le Honduras, le Nicaragua et le Panama, dans le but de promouvoir la paix, la liberté et la démocratie. La délégation du SIECA a visité le bureau de douane de Bâle/Weil-autoroute, la subdivision Ports rhénans du bureau de douane de St-Jakob et le bureau de douane de Zurich-aéroport. La visite s’est terminée par une réception à la Direction générale des douanes à Berne. Elle a notamment permis de présenter les bonnes pratiques en vigueur dans notre pays en matière douanière et d’évaluer plus en détail la possibilité d’une assistance technique de la douane suisse en faveur des pays d’Amérique centrale rattachés au SIECA. C’est ainsi que la douane suisse pourrait soutenir les autorités douanières d’Amérique centrale – par exemple dans le cadre de mesures de renforcement des capacités – dans la mise en œuvre de l’Accord de l’OMC sur la facilitation des échanges.

Pangea VIIILe nom de l’opération Pangea se réfère à la Pangée, soit le dernier supercontinent regroupant l’ensemble des terres émergées. Il vient du grec ancien pân (en français: tout) et gaîa (en français: terre), soit littéralement «toutes les terres». L’opération Pangea a lieu chaque année et dure environ une semaine. En plus des autorités nationales chargées des questions douanières et de la surveillance des médicaments, elle voit la participation d’Interpol, de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), du «Permanent Forum on International Pharmaceutical Crime (PFIPC)» et du «Pharmaceutical Security Institute (PSI)». Y participent également diverses plateformes de paiement par Internet, ainsi que LegitScript et Google. Cette année, 115 pays ont participé à l’opération. Cela ne représente donc pas toute la terre, contrairement à ce que le nom de l’opération pourrait laisser sup-poser, mais tout de même 60 % de tous les Etats membres des Nations Unies (ONU). L’opération «Pangea» vise à lutter contre la vente illicite de médicaments sur Internet grâce à des contrôles systématiques des paquets postaux dans les aéroports et les centres postaux. Sur le plan mondial, 149 623 envois suspects ont été contrôlés entre le 9 et le 16 juin, ce qui a permis de saisir 50 068 paquets et de fermer 2414 sites Internet illégaux. En Suisse, des collaborateurs de la douane suisse, de Swissmedic et de la fonda-

tion Antidoping Suisse ont retiré près de 600 paquets de la circulation pen-dant la semaine en question. De plus, les contrôles ont permis à Swissmedic de signaler des personnes pratiquant la vente par correspondance illégale à partir de l’étranger aux autorités des pays concernés. L’Institut suisse des produits thérapeutiques a également pris des mesures à l’encontre d’en-treprises suisses hébergeant les sites Internet de commerçants illégaux. C’est ainsi qu’une entreprise d’enregis-trement ayant son siège en Suisse a dû retirer leur nom de domaine à plusieurs centaines de sites Internet.

Des membres de la délégation du SIECADes couteaux et casseroles saisis

Des médicaments saisis

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62 nouveaux spécialistes de douaneLe 3 juillet 2015, à Liestal, 62 nou-veaux spécialistes de douane ont reçu leur diplôme en présence du conseiller national Thomas de Courten et de Rudolf Dietrich, directeur général des douanes. Les nouveaux diplômés, qui avaient commencé leur formation en août 2013, ont suivi un millier de leçons et accompli 70 semaines de stage pratique. Dans son discours, Rudolf Dietrich a repris une citation qu’il avait lue lors de l’une de ses premières visites dans un bureau de douane et qu’il n’a jamais oubliée depuis: «L’Homme voit le monde depuis l’endroit où il se trouve. Etant donné l’impossibilité pour deux per-sonnes d’être exactement au même endroit, il n’y a jamais deux points de vue absolument identiques. Quiconque souhaite élargir ses perspectives ne peut le faire qu’en essayant de changer de position et en regardant le monde depuis un autre point de vue.» Pour Rudolf Dietrich, ce conseil aide aussi à prendre des décisions face à des situations difficiles ou controversées du quotidien de la douane. D’après lui, les missions à l’étranger ou les séjours linguistiques dans d’autres régions de Suisse permettent aux collaborateurs d’élargir leurs perspectives. L’AFD encourage ces deux genres d’activi-tés, car la compréhension d’autres cultures et la prise de conscience que tous ne voient pas le monde depuis le même point de vue se révèlent

d’une aide précieuse dans les relations internationales. Il s’agit donc d’un échange essentiel pour la préservation des intérêts du pays à l’étranger. Le maintien de bonnes relations avec les autres Etats et l’organisation de projets communs sont en fin de compte béné-fiques pour la Suisse et son économie. Le directeur général des douanes a uti-lisé comme exemple la longue et fruc-tueuse collaboration entretenue avec l’administration chinoise des douanes, cultivée déjà bien avant l’accord de libre-échange signé en 2014. Le conseiller national Thomas de Courten, qui a honorait la cérémonie de clôture

de sa présence, a ensuite pris la parole en soulignant l’importance du travail effectué par la douane pour l’écono-mie, l’Etat et la société. Il a encouragé les nouveaux spécialistes de douane à remettre en question ce qui existe et à amener de nouvelles idées.

Saisie record d’ivoireLe 6 juillet 2015, lors d’un contrôle, des collaborateurs du bureau de douane de Zurich-aéroport ont saisi quelque 262 kg d’ivoire, soit la quan-tité la plus importante jamais décou-verte à cet endroit. Cette marchandise, qui est soumise à la Convention de Washington sur la conservation des espèces et dont l’importation en Suisse est interdite, était répartie dans huit valises que trois ressortissants chinois avaient fait enregistrer à Dar es Salam (Tanzanie) à destination de Pékin (République populaire de Chine) via Zurich. Au marché noir, sa valeur est d’environ 400 000 francs. Cette saisie a été présentée aux médias le 4 août 2015. A cet effet, le bureau de douane de Zurich-aéroport et l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) avaient organisé un point de presse à l’Operation Cen-ter 4 de l’aéroport de Zurich. Heinz Widmer, chef du bureau de douane de Zurich-aéroport, et Mathias Lörtscher, chef du domaine spécialisé Conserva-

Le conseiller national de Courten (au centre) en discussion avec le directeur général des

douanes (à droite) et avec le directeur de l’arrondissement de Bâle, Heinz Engi (à gauche).

De l’ivoire saisi à l’aéroport de Zurich

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tion des espèces à OSAV, ont fourni des renseignements sur cette affaire. Ce point de presse visait à sensibiliser le public à la conservation des espèces végétales et animales.

Bilan intermédiaire positif pour le libre-échange entre la Chine et la SuisseLa première séance de la commission mixte instituée dans le cadre de l’ac-cord de libre-échange Suisse-Chine a eu lieu les 18 et 19 août 2015 à Berne. La délégation chinoise était dirigée par Yao Wenliang, suppléant du directeur général des douanes au ministère du commerce, tandis que la délégation suisse était conduite par l’ambassadeur Christian Etter, du SECO. L’AFD était pour sa part représentée par Arthur Müller, chef de la section Accords de libre-échange et accords douaniers, par Meinrad Müller, de la même section, ainsi que par Reiner Koch, de la section Origine. L’accord de libre-échange étant entré en vigueur le 1er juillet 2014, il était temps d’en tirer un pre-mier bilan. Celui-ci s’est révélé positif, car le volume des échanges entre les deux pays a augmenté, contrairement au volume total des échanges des deux pays, ce qui est en grande partie à mettre au crédit de l’accord de libre-échange. L’ordre du jour de la séance comprenait notamment des thèmes en relation avec l’application des prescrip-tions régissant l’origine.

17 diplômes de l’Ecole supérieure de douaneLe vendredi 21 août 2015, 17 spécia-listes de douane ont reçu leur diplôme de l’Ecole supérieure à l’Hôtel de Ville de Berne. Le titre délivré par l’Ecole supérieure fait suite à la formation de base de spécialiste de douane. Il repré-sente une qualification professionnelle approfondie et permet aux nouveaux diplômés d’occuper des positions de cadre moyen ou d’assumer d’exi-geantes fonctions de spécialiste. Karin Bühler, cheffe de la formation, leur a déclaré: «En achevant la formation de l’Ecole supérieure et en obtenant votre diplôme, vous vous êtes créé des opportunités pour la suite de votre par-cours professionnel.» Rudolf Dietrich, directeur général des douanes, a relevé que la douane a besoin de collabora-teurs bien formés, motivés et flexibles. Cela est d’autant plus vrai aujourd’hui que l’AFD est appelée, une fois de plus, à améliorer la qualité de ses services en traitant un nombre accru d’affaires tout en réduisant les charges. Rudolf Dietrich est par conséquent persuadé que le recours à des univer-sitaires ne doit pas être systématique:

dans bien des cas, ce qu’il faut, ce sont des professionnels aux compétences étendues. C’est pour cela que l’Ecole supérieure de douane a été créée: pour former à partir de spécialistes de douane des cadres possédant une vision globale de l’avenir.

«Inverna»«Hortense», «Aurora» et «Artémis» patrouillaient déjà sur les eaux fron-tières suisses. A la fin du mois d’août 2015, ces bateaux ont été rejoints par «Inverna», du nom d’un vent de vallée qui souffle souvent pendant la journée sur le lac Majeur par temps calme. Ce nouveau bateau d’intervention du Cgfr, de type Targa 37+ Professional, a été baptisé à Tenero. C’est Julie Arlin, présentatrice météo de la RSI, qui lui a servi de marraine. Le baptême a eu lieu en présence de représentants du Cgfr, mais aussi de Matteo Cocchi, com-mandant de la police cantonale tessi-noise, de Giovanni Monotti, président du conseil communal de Locarno, et de Bixio Caprara, directeur du centre sportif national de Tenero.

Karin Bühler, cheffe de la formation, salue

les hôtes de la cérémonie de remise des

diplômes de l’ES douane

Le bateau d’intervention du Cgfr «Inverna»

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Vous avez commencé votre formation d’employée de commerce à la douane suisse en 2013 et allez l’achever en été 2016. Pour vous, qu’est-ce que cela représente d’effectuer votre apprentissage auprès de la douane suisse?En raison des tâches qu’elle assume pour l’économie, la sécurité et la santé, la douane suisse comporte des champs d’activité intéressants et variés, par exemple dans les finances, la formation, ou encore les achats. Pour moi, pouvoir travailler à la douane suisse représente quelque chose de particulier, car j’aime-rais ensuite accomplir la formation de garde-frontière. Je profite également de mes connaissances doua-nières sur le plan privé. Etant donné que je me rends régulièrement à l’étranger, il faut que je connaisse la nature et la quantité des marchandises que je peux importer. Vais-je devoir payer des redevances? A combien se monte la quantité maximale? Qu’est-ce qui est interdit et qu’est-ce qui est autorisé? Certains de mes collègues travaillent dans l’économie privée, tandis que d’autres œuvrent comme moi dans l’ad-ministration fédérale. A l’école professionnelle, étant donné que je travaille à la douane, c’est à moi que l’on pose des questions au sujet des droits de douane, de l’exportation ou de l’importation. Bien entendu, je ne sais pas tout. Cependant, je cherche à répondre le mieux possible.

Les apprentis de la douane suisse effectuent des passages de quelques semaines dans diffé-rentes divisions. Vous étiez auparavant au Centre de services en matière de finances du DFF et vous vous trouvez depuis quatre semaines à la division Personnel et formation de la Direction générale des douanes. Que pensez-vous de ce système de rotation?Grâce à ce système, j’enrichis régulièrement mes connaissances. Lors de chaque rotation, je dois remplir de nouvelles exigences. Ce système est précieux, car il me permet de découvrir de nombreuses tâches de l’administration des douanes, mais aussi de nouveaux collaborateurs.

En fait, comment avez-vous trouvé votre place d’apprentissage?J’ai focalisé mes recherches sur l’administration fédérale. J’ai ensuite trouvé ma place d’apprentissage sur le site Internet «Portail emploi Confédération». J’ai tout d’abord appelé personnellement la personne de contact afin de m’assurer que la place d’apprentissage d’employé de commerce était vraiment libre. C’était le cas, si bien que je me suis portée candidate. Après la formation d’employé de commerce, la douane offre de nombreuses possibilités: on peut se former en tant que spécialiste de douane, garde-frontière, essayeur juré du contrôle des métaux précieux, assistant de douane ou réviseur de douane.

Trois questions à …Krenare Alija (17 ans), apprentie de commerce de 3e année à la Direction générale des douanes

?Saviez-vous que …… en 2014, les exportations des cantons de Bâle-Ville, du Tessin, de Genève et de Zurich ont représenté

ensemble une valeur de 159 milliards de francs?

… l’année passée, le canton de Bâle-Ville a principalement exporté vers l’Allemagne (8,2 mrd), tandis que les principaux

partenaires commerciaux des cantons du Tessin (Inde: 13 mrd), de Genève (Hong Kong: 6,5 mrd) et de Zurich

(Chine: 4,3 mrd) se trouvaient en Asie?

… les exportations que ces quatre cantons ont réalisées l’an passé ont représenté 55,8 % de l’ensemble des exportations suisses,

qui se sont montées à 285 milliards de francs?

… les exportations du canton de Bâle-Ville ont presque exclusivement porté sur les produits des industries chimique et pharmaceutique (49 mrd), tandis que celles du canton du Tessin ont avant tout consisté en métaux précieux et en pierres gemmes (41 mrd)?

… que les exportations du canton d’Appenzell Rhodes-Intérieures, d’une valeur de 79 millions de francs, ont eu la part

la plus modeste dans les exportations suisses, soit 0,03 %? Le groupe de marchandises le plus important a en l’occurrence été

celui des articles et appareils de l’industrie électrique et électronique, avec 28,9 millions de francs.

Source: Statistique du commerce extérieur AFD; autres chiffres www.ezv.admin.ch ➔ Thèmes ➔ Statistique du commerce extérieur suisse ➔ Chiffre du mois

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45Forum D. | Panorama

Revers pour la mafia de la drogueRégion Cgfr IV: De par sa position géographique sur l’axe sud-nord, le Tessin constitue une porte d’entrée de la Suisse. Plus de 60 000 frontaliers y franchissent quotidiennement la frontière, ce chiffre faisant abstraction des autres voyageurs et des touristes. Il est donc clair que la mafia italienne de la drogue utilise elle aussi ce goulet d’étranglement pour introduire clandestinement des marchandises en Suisse ou les y faire transiter. Les gardes-frontière en sont bien conscients. Au cours du 1er trimestre 2015, le Cgfr a effectué pas moins de trois grosses prises, privant ainsi la mafia de plusieurs millions de francs. Elle a subi son premier revers au poste frontière de Chiasso-Brogeda, où les gardes-frontière ont découvert 2,5 kg de cocaïne dissimulés dans des emballages de jus de fruits transportés par un homme de 28 ans entrant en Suisse. Deux semaines plus tard, au poste frontière de San Pietro di Stabio, des gardes-frontière ont intercepté ce que les médias ont ensuite appelé «la Porsche la plus chère de tous les

temps». Un homme de 24 ans avait tenté d’exporter frauduleusement 27 kg de cocaïne en utilisant la cachette classique fournie par l’ha-billage latéral des portes. Valeur mar-chande: environ 3 millions de francs. Ce cas a ensuite permis l’arrestation de deux Albanais. Avec le soutien du Cgfr, la police cantonale tessinoise a intercepté ces deux hommes sur l’A2, près d’Airolo. Le contrôle de leurs deux véhicules s’est soldé par la saisie de 12 kg supplémentaires de cocaïne.

Des marchands ambulants à la douaneRégion Cgfr VI: Le nom latin mercatus signifie «marché» et a notamment donné le mot français «marchand»; quant au verbe latin ambulare, il signifie «marcher», «se promener», et est à l’origine du mot français «ambulant». Un marchand ambulant est une personne qui vend des mar-chandises sans disposer d’un local de vente. Ces marchands ambulants sont encore nombreux sur nos routes. Mais quand ils se mettent à proposer leurs marchandises à des postes frontières

inoccupés, on ne sait pas trop s’il faut parler de courage ou d’effronterie. En mars 2007 et en octobre 2009, des individus avaient déjà utilisé des postes de ce genre dans la région de Genève pour vendre de la camelote à des fron-taliers en alléguant des faits menson-gers. Ces faits viennent de se répéter: munis de gilets de sécurité de couleur jaune, des Maghrébins, prétextant récolter de l’argent pour une organi-sation fantôme, ont tenté de vendre aux voyageurs des porte-clés en forme de boules de billard. Ils ne se sont pas contentés d’entraver le trafic trans-frontalier, mais ont en plus recouru à des méthodes agressives pour inciter les voyageurs à acheter leurs porte-clés. Ils n’avaient bien entendu aucune autorisation pour la vente de marchan-dises. Tout s’est terminé pendant la première semaine de juin: aux postes frontières de Veyrier et de Mon Idée, ces marchands ambulants sont tombés dans les filets des gardes-frontière, qui ont mis fin à leurs agissements illégaux.

Revue

Cocaïne provenant de la saisie réalisée à Airolo Un marchand ambulant sévissant à la frontière

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4646 Forum D. | Panorama

Le passage d’un camion au scanner révèle la présence de 27 kg de marihuanaArrondissement de Genève: Lorsque Wilhelm Conrad Röntgen a publié une radiographie de sa main en décembre 1895, cela a fait sensation dans le monde scientifique et a constitué une étape majeure dans l’histoire de la médecine moderne. Aujourd’hui, il n’est plus concevable de se passer des rayons X, et pas seulement en médecine. Depuis 2003, la douane suisse se sert elle aussi de la capa-cité qu’ont ces rayons de traverser la matière pour contrôler des poids lourds ou des conteneurs. Cela a notamment été le cas au bureau de douane de Bardonnex, où le compar-timent de chargement d’un camion immatriculé en Bosnie et Herzégovine a été radiographié par un scanner mobile (MOBS) de la douane suisse suite à la découverte de traces de substances interdites dans la cabine du véhicule par des spécialistes de la douane civile utilisant un appareil d’analyse. Et ne voilà-t-il pas que les douaniers découvrent 27 kg de marihuana au milieu de bouteilles de vin! Les deux occupants du véhicule, âgés de 38 et 43 ans, avaient en outre sur eux 9000 francs et 5718 euros. Cette affaire a une fois de plus mon-

tré l’avantage du scanner. Quelques secondes suffisent pour radiographier le compartiment de chargement d’un poids lourd sans qu’il soit nécessaire de décharger le fret. Quant à l’analyse de la radiographie, elle ne dure que quelques minutes. Une façon particulièrement rapide et efficace de contrôler si l’on pense aux 20 000 poids lourds qui franchisse-ment quotidiennement la frontière suisse.

Un mode opératoire trop répanduRégion Cgfr I: Le 27 mai 2014, la police polonaise a martelé la porte d’un appartement situé au 4e étage d’un immeuble locatif de Varsovie. Ce matin-là, après plus de dix ans d’enquête, Arkadiusz «Hoss» Lakatosz est tombé dans les filets de la police, suivi peu après de son frère Adam. Ces deux frères sont considérés comme les inventeurs du «coup du neveu». Ils semblent en être venus à cette astuce en 1999 à Hambourg, lors d’une tentative d’escroquerie téléphonique. Ce mode opératoire est aujourd’hui largement répandu. Il consiste à appeler une personne par téléphone, à se faire passer pour son neveu ou son petit-fils et à demander de l’argent. Les victimes sont le plus souvent des personnes âgées, qui

remettent ensuite leurs économies à des «messagers» des prétendus parents (qui n’ont en réalité aucun lien avec eux). Les gardes-frontière du poste de Bâle-Lysbüchel ont réussi à coincer un de ces messagers. Ins-tallé dans un autobus, cet homme de 18 ans était sur le point d’entrer en France. Lors de leur contrôle, les gardes-frontière ont découvert l’équi-valent de plusieurs dizaines de milliers de francs en diverses monnaies. L’homme, originaire de Pologne, a tenu des propos contradictoires au sujet de cette grosse somme, si bien que les gardes-frontière l’ont remis à la police cantonale de Bâle-Ville. Les premières investigations ont mené au canton d’Argovie, la police ayant établi un lien entre cet homme et une escroquerie commise à Zofingue au détriment d’une personne à laquelle une somme de 20 000 francs avait été soutirée. La police met régulière-ment la population en garde contre ce mode opératoire. D’après le dernier rapport annuel de l’Office fédéral de la police, les dommages subis par des Suisses en 2014, soit 2 millions de francs, ont déjà diminué de moitié par rapport à l’année précédente. L’écri-vain allemand Erich Maria Remarque (1898–1970) disait à peu près qu’il faut attendre de voir comment les

La radiographie révélant la présence des 27 kg de marihuana

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petits-enfants s’en sortent pour pouvoir juger l’éducation que l’on a donnée à ses propres enfants. Cet aphorisme n’est malheureusement d’aucun secours pour les victimes de ce type d’escroquerie.

Attention aux pickpockets!Région Cgfr V: Dans la cohue des grandes villes, les touristes, l’œil souvent rivé sur un plan de ville ou un monument, sont des victimes de choix pour les pickpockets. Et, la plupart du temps, les délinquants ont depuis longtemps pris le large lorsque les lésés remarquent la disparition de leur porte-monnaie, de leur appareil photo ou de leur téléphone portable. Les deux délinquants qui avaient détroussé un homme de 88 ans à Lau-sanne ont connu moins de réussite. Leur butin, soit 20 000 francs, sortait de l’ordinaire. Ils avaient observé un retraité qui retirait de l’argent à sa banque. L’un des deux hommes l’a alors abordé pour lui demander de lui faire l’aumône. A peine le retraité avait-il sorti son porte-monnaie que l’individu le lui a arraché, jetant le vieil homme à terre. Le voleur est alors monté dans une voiture où l’atten-dait son complice. L’incident n’était cependant pas passé inaperçu, et les déclarations des témoins ont permis

à la police lausannoise de lancer un avis de recherche. Environ une heure plus tard, les deux hommes, des Roumains âgés de 21 et 30 ans, ont été interceptés par des gardes-fron-tière au poste frontière de Mon Idée, dans le canton de Genève. Le butin se trouvait encore dans le véhicule. En avril 2014, le site Internet TripAdvisor, se fondant sur des évaluations de ses usagers, a établi la liste des dix villes comptant le plus grand nombre de vols à la tire et à l’arraché. Le top 5 est constitué de Barcelone, Rome, Prague, Madrid et Paris. Lausanne n’apparaît pas dans ce palmarès.

Le temps, c’est de l’argentArrondissement de Schaffhouse: La plupart des gens connaissent le visage de Benjamin Franklin (1706–1790) grâce au billet de banque de 100 dollars. Ce que l’on sait moins, c’est que Franklin est aussi l’auteur de l’adage «Le temps, c’est de l’argent» («Remember that time is money» en version originale). Ce constat par-faitement exact explique sans doute l’importance que les montres ont acquise dans le quotidien de l’homme moderne, auquel elles permettent de savoir l’heure, mais aussi d’affirmer son statut social. Il arrive par exemple que des montres-bracelets servent de

placement, ce qui est intéressant du point de vue fiscal. Bref, les montres font aussi l’objet de contrebande. On a pu le constater aux postes frontières de Koblenz et de Bad Zurzach, où un Allemand a importé en fraude des montres Rolex d’une valeur de plus de 306 000 francs sur une période de trois ans. Il dissimulait ces montres dans le logement de roue de secours de sa voiture ou dans le coffre, sous des denrées alimentaires. Il achetait ces montres usagées aux enchères auprès de divers commerçants européens opérant sur Internet et se les faisait envoyer à un point de retrait situé à Waldshut-Tiengen (D). Pendant la même période, cet homme

Message d’avertissement à Rome

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a également acheté sur Internet d’autres montres Rolex provenant des Etats-Unis. Il chargeait à chaque fois l’expéditeur américain de déclarer une valeur de 100 dollars pour ces montres, soit au total 196 400 francs de moins que la valeur réelle. Un beau jour, cependant, des gardes-fron-tière en service au poste frontière de Bad Zurzach ont découvert cinq Rolex dans le logement de la roue de secours. Cette découverte a entraîné, de la part de la section antifraude de Zurich, une enquête approfon-die assortie d’une perquisition. Les redevances dues, soit près de 42 000

francs, ont été recouvrées auprès de l’inculpé. Il doit de plus s’attendre à payer une amende salée pour infrac-tion à la loi sur la TVA.

50 euros? 7 centimes!Région Cgfr II: Actuellement, quelque 16,7 milliards de billets libellés en euros sont en circulation; leur valeur nominale totale est de l’ordre de 980 milliards d’euros. Si l’on consi-dère la quantité en circulation sous l’angle de la valeur nominale, on constate que les billets de 50 euros sont les plus nombreux (43 %), suivis de ceux de 10 euros (13 %) et de

ceux de 100 euros (12 %). Il n’est dès lors pas étonnant que les faussaires donnent leur préférence aux billets de 50 euros. En effet, ces coupures largement diffusées et d’une valeur nominale pas trop élevée ne suscitent guère de méfiance. La valeur impri-mée n’est pas non plus trop basse. Dans le cas contraire, il ne serait pas rentable de les contrefaire, et le paiement de gros montants attirerait l’attention. Des gardes-frontière en service dans le train EC 24 ont pu constater la popularité de ces faux bil-lets en contrôlant trois Italiens âgés de 18, 19 et 21 ans. Ces trois hommes

De faux billets de 50 et 100 euros

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étaient montés dans le train à Milan et étaient en route pour Zurich. Le sac de voyage de l’un d’entre eux contenait 10 000 euros en coupures de 50 et 100 euros: il s’agissait exclu-sivement de faux billets. A la gare centrale de Zurich, les gardes-frontière ont remis ces trois hommes à la police cantonale. Pendant une bonne partie du 20e siècle, les monnaies avaient une couverture-or, et les billets de banque étaient en fait des certificats d’option sur de l’or. A l’heure actuelle, les billets ne sont rien de plus que du papier imprimé, dont la valeur nominale se fonde sur la confiance et sur une convention sociale. Quelle était alors la valeur réelle de ces 10 000 euros de fausse monnaie? Dans les 14 euros à tout casser, car la production d’un billet libellé en euros coûte environ 7 centimes, soit un peu plus que le papier dont il est constitué.

Des biens volés en abondanceArrondissement de Schaffhouse: Le mot «abondance» vient du nom latin abundantia, signifiant «richesse, abondance», lui-même dérivé du verbe abundare («déborder»). Il s’applique parfaitement à la décou-verte effectuée par le personnel douanier en service à Au: 4 tonnes de pièces de machines volées d’une valeur de 140 000 euros. Comment en était-on arrivé là? Ces pièces de machines avaient été volées dans une halle d’entreposage située en Allemagne. Deux chauffeurs ont ensuite tenté de les transporter en Suisse au volant d’un camion de location en passant par le bureau de douane de Schaanwald, mais en dehors des heures de dédouanement des marchandises de commerce. Des gardes-frontière se trouvaient sur place et ont prié les deux chauffeurs d’aller dédouaner leurs marchandises

au bureau de douane d’Au. Quelques heures plus tard, une équipe mobile du Cgfr a découvert le camion à l’intérieur du pays. Dans l’incapacité de prouver que les marchandises avaient été dédouanées, les chauf-feurs ont été escortés jusqu’au bureau de douane d’Au. Les douaniers y ont contrôlé les papiers. Un contrôle du chargement et un appel au four-nisseur ont révélé qu’il s’agissait de marchandises volées. A noter qu’Abondance est aussi une divinité allégorique qu’on représentait sous la figure d’une belle femme couverte de fleurs, tenant dans sa main droite une corne remplie de fleurs et de fruits, qu’on nommait la corne d’abondance; c’était une des cornes de la chèvre Amalthée, nourrice de Jupiter, que ce dieu donna aux nymphes qui avaient pris soin de son enfance.

Un contrôle commun de la douane civile et du Cgfr

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50 Forum D. | Dossiers 50 Forum D. | Panorama

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51Forum D. | Panorama

Viande avariée au menu d’un repas d’enterrement

Section antifraude douanière

Si la viande est transportée sans être réfrigérée, elle perd non seulement sa qualité, mais peut également pré-senter un danger pour la santé du consommateur. C’est pourquoi de telles marchandises sont confisquées, en accord avec l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) et les autorités canto-nales. Dans les deux cas suivants, la section antifraude douanière a découvert des quantités inhabituelles de viande de contrebande.

kp. Un certain vendredi 13 s’est avéré un jour maudit pour trois hommes qui ont essayé de faire passer illégalement 614 kg de viande par le poste fron-tière inoccupé de Riehen-Weilstrasse. Ayant franchi la frontière sans se faire remarquer, ils se sont trop vite crus en sécurité. C’était compter sans un contrôle du Corps des gardes-fron-tière à Riehen-Dorf. Les agents ont découvert que la viande avait été introduite en Suisse sans être déclarée ni réfrigérée. Pendant l’interrogatoire effectué par la section antifraude douanière, l’importateur a prétendu que la viande était destinée à un repas d’enterrement et non à des fins commerciales. Cette réponse n’a pas convaincu les enquêteurs de douane. Le propriétaire a été catégorique et a assuré que de grandes familles, de nombreux amis, connaissances et voi-

sins seraient présents à l’enterrement et qu’ils mangeraient volontiers de la viande. Il a toutefois admis savoir qu’il aurait dû la déclarer en arrivant en Suisse. Etant donné que la chaîne du froid avait été interrompue et que la viande n’avait pas été transportée selon les prescriptions applicables aux denrées alimentaires, la marchandise a dû être saisie et détruite. En voyant l’amende de 10 400 francs qu’il était condamné à payer, le coupable a probablement eu l’appétit coupé. Nous ne savons pas ce qui a été servi au repas d’en-terrement… si tant est que celui-ci ait eu lieu.

Des réductions grâce à la viande de contrebandeUn deuxième cas semblable a été découvert grâce à l’attention d’un

garde-frontière. En rentrant chez lui, il a remarqué qu’un propriétaire de commerce et son employé déchar-geaient de la viande d’un véhicule pour l’amener dans le magasin. Par une heureuse coïncidence, cela faisait longtemps que la section antifraude douanière avait cet homme dans le collimateur. Il était soupçonné d’introduire ses marchandises en Suisse illégalement, seule explication possible des fortes réductions de prix qu’il accordait à sa clientèle. Les rapports transmis par le Corps des gardes-frontière avaient amené la section antifraude douanière à ouvrir une enquête préliminaire. Cependant, les indices à charge étant insuffisants, le dossier avait été provisoirement clos. Mais l’affaire a pris une nouvelle tournure lorsque le garde-frontière a observé les deux hommes déchar-geant les marchandises, éveillant ses soupçons. Après avoir été informée, la section antifraude douanière a cette fois ouvert une enquête pénale. Sur place, elle a confisqué au total 550 kg de viande fraîche, d’une valeur d’environ 12 700 francs, qui avait été introduite en Suisse sans être réfrigérée. Lors de l’interrogatoire, le coupable a avoué ne pas l’avoir déclarée, ce qu’il avait également manqué de faire lors d’importations antérieures. La section antifraude douanière a donc pu clore définiti-vement le dossier, non sans avoir au préalable facturé au contrebandier les redevances pour les aliments passés en fraude.

Les consommateurs n’ont pas toujours la

garantie que la viande vendue en magasin

est réellement fraîche.

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5252 Forum D. | Panorama

Zèle exemplaireHistoire de la douane (deuxième partie)

Le 12 septembre 1848, avec l’adoption de la première constitution fédérale, la Suisse se transforma de fédération d’Etats en Etat fédératif. A cette occasion, les compétences douanières passèrent des cantons à la Confédération, entrainant la naissance de la douane suisse, appelée alors Département du commerce et des péages. La précédente édition de Forum D. s’est penchée sur l’histoire de la perception des droits de douane, des débuts de l’Etat fédéral à la création du Cgfr le 1er janvier 1894. Le présent article constitue le premier volet d’un diptyque consacré aux nombreuses évolutions que connut la surveillance des frontières au cours de cette période de transition. Tout commença dans le canton d’Argovie.

al. Durant ses premières heures, la Confédération conclut des traités de protection de la frontière avec les cantons frontaliers afin d’assurer la perception des droits de douane. Seuls les cantons du Tessin et de Genève firent exception à cette délé-gation des compétences douanières; des gardes-frontière fédéraux y furent déployés dès 1850-1851. Puis ces tâches furent progressivement reprises par la Confédération, jusqu’à l’entrée en vigueur au 1er janvier 1894 de la révision de la loi sur les douanes et la suppression des traités de protection de la frontière encore en vigueur, marquant la naissance d’un corps de gardes-frontière à l’échelle de la Confédération.

Rattachement du canton d’Argo-vie au «territoire douanier I»Le traité de protection de la frontière conclu avec le canton d’Argovie entra en vigueur le 1er août 1850 pour n’être révoqué que 41 ans plus tard, à la fin de l’année 1891. A cette époque, le canton d’Argovie pouvait compter sur quelque 90 gendarmes, qui assuraient leur service sur la base du «règlement de gendarmerie» de 1813, et qui combattaient la contre-bande avant même la création de l’Etat fédéral.Le canton d’Argovie fut rattaché au «territoire douanier I» de Bâle. Theodor Hoffmann-Merian, directeur des douanes fraîchement nommé, dut alors analyser la situation aux frontières et organiser l’infrastructure avant de mettre au concours des postes de receveur et de contrôleur

des impôts. Le canton fut divisé en trois secteurs, et les douze gendarmes mis à disposition par les autorités can-tonales furent répartis entre les postes de surveillance frontalière suivants: Kaiseraugst, Rheinfelden, Wallbach, Säckingerbrücke, Laufenburg, Etzgen, Jüppen (Full), Koblenz, Zurzach-Barz,

Reckingen et Kaiserstuhl. Un gen-darme cantonal fut également affecté à Sisseln, sur un poste de contrôle flottant. Les marchands de bois profitaient en effet des énormes ressources sylvicoles de la Forêt-Noire toute proche. Tous les ans, plus de 2000 radeaux de rondins traversaient

Le bureau de douane de Jüppen (Full) vers 1900

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alors la frontière argovienne. Chaque tronc d’arbre était taxé à hauteur de 32 kreuzer (monnaie utilisée dans plu-sieurs cantons suisses au XIXe siècle).

Des gendarmes aux frontières au service de la ConfédérationLe nouveau régime frontalier mis en place à partir de 1850 sous l’égide de la Confédération fut bien accueilli par la population frontalière. Le déta-chement de gendarmes cantonaux pour l’accomplissement des tâches de surveillance de la frontière se déroula également sans accroc. Le chef du service argovien de surveillance de la frontière ne manqua d’ailleurs pas de se féliciter de la ponctualité des gardes-frontière et du respect que ces derniers suscitaient au sein de la population. Même écho à Bâle, où le directeur des douanes loua auprès de Berne le travail des gendarmes, leur zèle exemplaire et leur enthousiasme à la tâche. On ne retrouvait pas une telle assiduité dans tous les cantons.La mission principale des gendarmes stationnés en zone frontalière était de surveiller la frontière et de lutter contre la contrebande. Pour ce faire, ils furent notamment équipés de fusils à platine à silex ou à percussion et de sabres. Berne recevait régulièrement des comptes rendus concernant les affaires de contrebande. Le seul mois de décembre 1850 vit par exemple la découverte de quatre cas de contre-bande à Rheinfelden et Laufenburg, ainsi que de deux autres à Koblenz. Quelques années plus tard, des affaires de contrebande de vannerie et de céramique furent mises au jour.Les gendarmes continuaient toutefois d’accomplir des tâches policières au profit de la police centrale d’Aarau. On retrouve ainsi de nombreux rap-ports faisant état des enquêtes et des interpellations réalisées alors par les gardes-frontière argoviens.

1891: la fin des traités de protection de la frontièreLe traité de protection de la frontière entre la Confédération suisse et le canton d’Argovie fut renouvelé en 1875. Cette fois encore, il prévoyait un effectif de 12 hommes pour la surveillance de la frontière, assorti

d’un budget de 1200 francs par tête. La dénomination de gendarme laissa place à celle de soldat de police. La situation resta toutefois relativement calme à la frontière argovienne, si bien qu’aucun cas de contrebande ne fut signalé en 1889. Le Département du commerce et des péages mit cette situation sur le compte de la stricte surveillance effectuée par les autorités douanières allemandes.A la fin de l’année 1891, les autorités cantonales argoviennes demandèrent que les indemnités pour le service de surveillance de la frontière passent de 1200 à 1550 francs. Le Départe-ment du commerce et des péages établit alors que l’engagement de gardes-frontière fédéraux en Argovie représenterait une charge sensible-ment équivalente, avec l’avantage que ces derniers seraient libérés de toute tâche cantonale. Le traité de protec-

tion de la frontière fut par conséquent résilié, à l’image de la stratégie menée dans les autres cantons frontaliers, tels que le canton de Vaud, pour lequel le traité fut révoqué au 1er octobre 1890. Neuf soldats de police argoviens furent définitivement engagés dans le corps fédéral des gardes-frontière, si bien qu’il ne resta que trois nouvelles recrues à former.La Confédération put compter durant 41 ans sur le soutien indéfectible du canton d’Argovie pour la surveillance de ses frontières. L’étroite collabora-tion qui se poursuit de nos jours entre le Corps des gardes-frontière et la police cantonale argovienne perpétue ainsi une solide tradition séculaire.

Découvrez dans le prochain Forum D. l’histoire de la surveillance aux fron-tières du canton de Bâle-Campagne

Gendarmes argoviens vers 1900.

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5454 Forum D. | Panorama

«J’apprends tous les jours quelque chose de nouveau»

Personnel

Brigitt Menegazzi (52 ans) a travaillé durant plusieurs années comme cheffe de service au bureau de douane de Chavornay. Elle a décrit son activité pour une série de cahiers du Centre suisse de services Formation professionnelle / orientation professionnelle, universitaire et de carrière*. Dans cette interview, elle explique comment elle s’est retrouvée à la douane, quelles sont ses tâches et pourquoi son travail la fascine toujours autant. Depuis peu, elle est suppléante de l’inspecteur de douane.

Quelles étaient vos tâches princi-pales lorsque vous étiez cheffe de service à la douane? Dans le trafic des marchandises de commerce, nous veillons au respect de plus de 150 lois en matière de droits de douane, de TVA, d’armes, de stupéfiants et de denrées alimentaires. Contrairement aux gardes-frontière, nous ne portons pas d’uniformes ni d’armes. Je dirigeais une équipe de quatre à huit collaborateurs, pour les-quels je planifiais les contrôles à effec-tuer dans des entreprises. Je réglais les modalités des engagements, comme le prélèvement d’échantillons. Nous ne voulons intervenir que là où nous soupçonnons une irrégularité sur la base d’analyses de risques. Enfin, je répondais par téléphone aux demandes des transitaires sur le dédouanement des marchandises.

Pourquoi avez-vous choisi la douane?Mon oncle travaillait à la douane. Il nous racontait des récits captivants sur son travail, comme dans les romans policiers. Le fait que la formation soit rémunérée et plutôt brève ainsi que l’importance des langues m’ont par ailleurs beaucoup plu.

Comment se sont passés vos débuts à la douane?Mes débuts après ma maturité ont été très intéressants, mais aussi difficiles. La formation était exigeante et inten-sive. Le stage au bureau de douane m’a vraiment plu. Ensuite, j’ai débuté à Birsfelden, où j’étais la première femme. Mes collègues étaient très serviables. Maintenant, les femmes sont majoritaires dans la formation à la douane.

Quel a été votre parcours professionnel jusqu’à votre fonction actuelle d’inspectrice de douane suppléante?Après la formation de base d’une année, j’ai continué à me perfection-ner pour devenir experte de douane, puis cheffe de service. Depuis peu, j’occupe le poste de suppléante de l’inspecteur de douane à Chavornay.

Quelles sont les qualités et les compétences indispensables dans votre profession?Nous devons être curieux, persévé-rants et serviables. Nous devons aussi être capables de prendre des déci-sions et connaître les limites légales en sachant tirer profit de la marge de manœuvre dont nous disposons. Enfin, nous devons faire preuve

d’esprit d’équipe et avoir le sens de la communication.

Qu’est-ce qui vous passionne dans votre travail?J’apprécie le fait d’apprendre tous les jours quelque chose de nouveau. Nous devons sans cesse mettre à jour nos connaissances des marchan-dises. J’aime aussi le fait de pouvoir mettre en pratique mes connaissances linguistiques: les factures que nous recevons proviennent des quatre coins du monde, tout comme les clients, entreprises ou chauffeurs, qui se présentent à notre guichet. Il est utile de savoir parler autre chose que sa langue maternelle et quelques mots d’anglais. Parfois, il suffit de dire bonjour à son interlocuteur dans sa langue pour briser la glace.

Qu’est-ce qui vous tient à cœur en tant que femme active?Nous bénéficions de l’égalité des chances à la douane en matière de travail et de salaire. Ensuite, j’ai pu réduire mon taux d’occupation à 30 % après la naissance de mon fils et l’augmenter de nouveau plus tard. Mon chef a fait preuve de compré-hension et m’a vivement encouragée. Enfin, mon travail est utile. Nous aidons à préserver la population de différents dangers et désagréments, par exemple en intervenant lorsque des crèmes pour la peau contenant des composants dangereux sont importées ou en vérifiant l’authenti-cité des bijoux importés.

Depuis début septembre, Brigitt Menegazzi

est la suppléante du chef du bureau de

douane de Chavornay

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Y a-t-il également des tâches diffi-ciles dans votre travail? Il peut se révéler difficile d’expliquer à un client qu’il doit dédouaner sa voiture. Certaines personnes fondent en larmes. Les choses se compliquent lorsqu’un client ne voit pas en quoi la douane est utile et devient agressif. Il faut alors savoir rester calme et expli-quer pourquoi nous sommes là.

Avez-vous déjà vécu une situation dangereuse?Lorsqu’un client a menacé de lancer une bombe dans mon bureau, j’ai demandé à être rayée de l’annuaire. Hormis cet événement, rien de vrai-ment dangereux ne m’est arrivé.

Comment votre domaine de responsabilité est-il organisé?Dans notre bureau de douane, il y a un inspecteur de douane, son sup-pléant, cinq chefs de service, des spé-cialistes de douane et des réviseurs. La composition des équipes change tous les six mois.

Y a-t-il des aspects que vous appréciez particulièrement dans votre travail?J’apprécie le contact avec les gens, clients ou collègues. J’aime

aussi devoir farfouiller et faire des recherches, par exemple sur Internet au sujet d’une désignation apparais-sant sur une facture afin de détermi-ner quelle marchandise est importée et si des prescriptions particulières doivent être suivies.

Avez-vous des possibilités d’évolu-tion au sein de votre service?Depuis début septembre, j’occupe le poste de suppléante de l’inspecteur

de douane, un défi nouveau pour moi. Pour le moment, je me familia-rise avec mes nouvelles tâches.

* Cahier: Sécurité – Série de cahiers du

Centre suisse de services Formation

professionnelle / orientation profession-

nelle, universitaire et de carrière (CSFO).

L’interview a été enregistrée par Christine

Schrade, conseillère en orientation

professionnelle aux centres d’orientation

professionnelle OP du canton de Berne.

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5656 Forum D. | Panorama

«Nous avons été submergés de demandes de visite guidée»

Musée des douanes

Mi-octobre, le Musée des douanes de Cantine di Gandria a mis fin à sa saison. L’exposition temporaire «Fuite – protection – humanité: le travail du HCR» a elle aussi pris fin. Les personnes intéressées pourront néanmoins retrouver cette exposition au Forum politique de Berne. Maria Moser, directrice du Musée suisse des douanes, dresse le bilan et nous parle de l’avenir de cette exposition temporaire qui a attiré de nombreux visiteurs, fruit de la collaboration entre la douane suisse et le HCR.

kp. Mme Moser, vous avez réalisé l’exposition temporaire «Fuite – protection – humanité: le travail du HCR». Pourquoi avoir choisi ce sujet?En 2011, nous avons célébré le 60e anniversaire de l’entrée en vigueur de la Convention de l’ONU

relative au statut des réfugiés, éga-lement signée par la Suisse. A cette occasion, l’Office fédéral des migra-tions avait déjà organisé une petite exposition. Au vu de l’actualité, nous avons de nouveau voulu aborder cette thématique. C’est pourquoi nous avons réalisé cette exposition, en collaboration avec le HCR. Avec ses plus de 20 000 visiteurs par an, parmi lesquels figurent de nombreux écoliers et familles, le Musée des douanes est le lieu idéal pour une telle exposition. L’exposition permet aux visiteurs de découvrir ce que vivent les personnes qui doivent quitter leur patrie du jour au lende-main pour fuir la violence, souvent pour simplement sauver leur vie. Il est alors évident que la douane a un lien direct avec ce thème. En effet, le garde-frontière est souvent la première personne que les réfugiés rencontrent au cours de leur périple vers l’Europe et vers la Suisse.

Comment la collaboration avec le HCR s’est-elle déroulée?Voir la migration du point de vue du HCR et montrer comment cette organisation travaille dans le monde entier était passionnant. C’est impressionnant et captivant de voir ce que le HCR réussit à faire, souvent dans des conditions difficiles, pour les personnes dans le besoin. Le travail du HCR mérite une grande reconnais-sance.

Quelle a été la réaction des visiteurs?Les retours que nous avons reçus sont tous positifs. Les enseignants et les écoliers ont surtout profité du matériel didactique qui pouvait être téléchargé avant la visite de l’exposi-tion. De plus, nous avons carrément été submergés de demandes de visite guidée. Nous avons par exemple pu compter parmi nos visiteurs une com-mission internationale de l’ONU, le

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chef de l’armée ou encore le conseil d’administration de Coop.

Quel bilan tirez-vous personnelle-ment de cette expérience?Je suis très satisfaite. Je pense que nous avons réussi à sensibiliser les visiteurs de l’exposition temporaire à ce thème et que nous avons par là pu légèrement contribuer à une meilleure compréhension de cette probléma-tique mondiale. De plus, nous tenions à montrer la contribution active qu’apporte la Suisse grâce à sa tradi-tion humanitaire.

L’exposition temporaire migre à présent du Musée des douanes du Tessin au Forum politique de la Käfigturm de Berne.Comme la question de la migration est un sujet brûlant d’actualité et attire l’intérêt du public, le Forum politique de la Confédération nous a demandé s’il pouvait reprendre l’exposition temporaire pour la pré-senter à la Käfigturm. Les expositions du Forum politique traitent depuis toujours de questions d’actualité. Aujourd’hui comme hier, les gens manifestent un intérêt marqué pour

le thème du mouvement des réfugiés à l’échelle planétaire. La question de la migration offre toujours des débats animés. L’exposition doit également encourager le dialogue entre les diffé-rents acteurs politiques, économiques et sociaux. La Käfigturm, qui est le centre politique de la Confédération en plein milieu de la capitale, est à mon avis l’endroit le plus approprié pour une telle exposition.

Quelle exposition temporaire nous attend l’année prochaine au Musée des douanes?Nous présenterons à partir d’avril 2016 une exposition sur le thème des contrefaçons en collaboration avec l’Institut de la propriété intellectuelle (IPI). L’une des missions de la douane consiste à retirer les contrefaçons du marché. La douane exécute plus de 150 actes législatifs. La lutte contre le piratage des marques fait partie de ses nombreuses tâches importantes. Les compétences de la douane civile et du Corps des gardes-frontière portent non seulement sur les droits de douane et la TVA, mais aussi sur l’économie, la sécurité et la santé des personnes dans notre pays. Naturellement, l’exposition perma-nente continue de raconter avant tout des histoires de contrebande d’aujourd’hui et d’hier. Nous voulons toutefois montrer la transformation de la douane et de ses tâches et montrer à quel point celle-ci a marqué l’histoire et l’évolution de la Suisse. La naissance de notre pays est en effet étroitement liée à la douane.

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5858 Forum D. | Panorama

L’engagement des premières femmes au Corps des gardes-frontière (Cgfr) remonte à 25 ans

Personnel

Le 11 décembre 1989, soit 19 ans après l’introduction du droit de vote des femmes en Suisse, quatorze pre-mières aspirantes gardes-frontière ont suivi au Cgfr le cours préliminaire destiné aux femmes. Début janvier 1990, elles ont commencé la formation dispensée à l’école du Cgfr de Liestal. Ce 25e anniversaire représente pour Forum D. l’occasion d’effectuer une rétrospective et de s’entretenir avec Regula Ita, qui faisait partie, à l’âge de 28 ans, des premières femmes enrôlées au sein du Cgfr.

al. «Monsieur le conseiller fédéral, au début de l’été 1987, vous avez chargé la Direction générale des douanes (DGD) d’examiner la possibi-lité d’engager des femmes au Cgfr. Par la suite, la division Corps des gardes-frontière a été invitée à éla-borer un concept tenant compte du principe de l’égalité entre femmes et hommes.» C’est par cette phrase que débute une note datant du 20 avril 1989 qui était adressée par la DGD au conseiller fédéral Otto Stich, alors chef du Département fédéral des finances (DFF). Cette phrase marque le début de 25 années de succès pour les femmes au Cgfr. Au niveau politique, cet engagement a été proposé par la conseillère nationale Amélia Christinat (PS), qui faisait partie des premières femmes élues au Conseil national. Compte tenu de l’inscription, en 1971, de l’égalité entre femmes et hommes dans la Constitution, elle a demandé au Conseil fédéral le 14 juin 1982 s’il n’était pas temps d’engager des femmes au Cgfr. Le projet «Femmes au Cgfr» ne s’est concrétisé qu’alors que le DFF était dirigé, de 1984 à 1995, par le conseiller fédéral Otto Stich (1927–2012).

L’accent est mis sur la capacité à s’imposerAu début de l’été 1987, le conseiller fédéral Otto Stich a chargé la DGD d’examiner la possibilité d’engager des femmes au Cgfr. Celle-ci a alors créé un groupe de travail composé de représentants de l’administration et des associations du personnel ainsi que de trois femmes travaillant à la douane civile ou à la police. Dans le cadre de l’examen effectué, le

groupe de travail a contacté plusieurs offices fédéraux. Des rapports sur les expériences faites qui avaient été établis par les corps de police suisses et par l’ancien corps fédéral allemand de protection des frontières (appelé aujourd’hui police fédérale) ont en outre été étudiés. Le 19 février 1988, un rapport final a été rédigé et soumis à la consultation des offices. La version révisée du rapport a ensuite été remise aux arrondissements, qui étaient alors encore au nombre de six. Aucune objection de principe n’a été émise, mais de nombreuses remarques sont parvenues à la DGD. Ainsi, les engage-ments différenciés qui étaient prévus pour les femmes ont été rejetés, et il a été décidé que l’ensemble des fonctionnaires effectueraient les tours

de service de nuit comportant certains risques. Il a aussi été relevé que lors du recrutement, un accent particulier serait mis sur la capacité à s’imposer et que la formation et l’engagement seraient conçus de façon à n’engen-drer aucune discrimination directe ou indirecte. S’agissant des tâches militaires, certains estimaient qu’il ne devait pas être fait appel aux femmes pour les exécuter. La soumission des membres féminins du Cgfr au droit pénal militaire a nécessité des examens approfondis, d’autant plus que l’ac-complissement de l’école de recrues constituait alors une condition d’ad-mission à la profession de garde-fron-tière. La création de cours militaires préliminaires destinés aux femmes a permis de prendre en compte ce point.

Patrouille mixte

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59Forum D. | Panorama

Les avis exprimés par les directions d’arrondissement concernaient princi-palement des aspects opérationnels, et la conclusion qui en découlait était la suivante: personne ne s’oppose au projet d’engager des femmes au Cgfr. Dans la note adressée au conseiller fédéral Otto Stich, la DGD a relevé qu’aucune des parties consultées n’a émis d’objection de principe contre l’engagement de femmes au Cgfr. Cette note se terminait par ces mots:

ont été publiées dans la Revue des douanes 3/89, ont été réalisées. A l’issue d’un cours préliminaire de deux semaines, qui a débuté le 11 décembre 1989 et lors duquel ont notamment été enseignés des acti-vités et des connaissances militaires, l’usage de l’arme à feu ainsi que le combat rapproché, 14 aspirantes issues de toutes les régions linguis-tiques du pays ont débuté l’école du Cgfr de Liestal (CFL) le 8 janvier 1990.

fait preuve de scepticisme dans les premiers temps, les préjugés tels que l’appréhension et le manque de force physique et de capacité à s’imposer ont très vite été écartés en raison de la confiance croissante des aspirantes et des expériences faites en commun. Le recrutement des aspirantes a en outre permis d’introduire une nouveauté. Lors du service exécuté à l’extérieur, elles portaient alors un chapeau de garde-frontière, comme leurs collè-gues masculins. Lors du service de planton, elles portaient en revanche le béret en tissu pour uniforme qui avait été créé à leur intention. En raison de son inconfort, le képi a été remplacé par la suite par le béret, même chez leurs collègues masculins.

«Femmes dans le Cgfr – panacée ou couac?»Fin janvier 1991, après le tradition-nel cours de ski qui s’est déroulé à la Lenk, treize premières aspirantes gardes-frontière ont été promues fonc-tionnaires gardes-frontière, en même temps que 75 de leurs collègues mas-culins, à l’église réformée de la Lenk. D’autres femmes ont suivi leurs traces, si bien que le Cgfr comptait plus de 50 femmes sur les 1855 membres pré-sents dans ses rangs vers fin 1991.Aujourd’hui (état au 1er janvier 2015), le Cgfr compte 1816 membres, dont 211 femmes (sans les aspirantes et les aspirants). Si l’on songe à la situation actuelle, l’article intitulé «Femmes dans le Cgfr – panacée ou couac?», qui est paru dans la Revue des douanes 1/91, prête presque à sourire. Les avis alors recueillis auprès des gardes-frontière concernant les expériences faites avec leurs collègues féminines ont été réunis pour aboutir à cette conclusion: comme l’assurent leurs collègues, les femmes se sont intégrées dans le Cgfr.... et elles y ont fait leurs preuves. Il n’y aurait rien à ajouter, si ce n’est peut-être que l’accomplissement de l’école de recrues ne constitue plus une condi-tion d’admission à la profession de garde-frontière, notamment en raison de l’égalité entre femmes et hommes, et que les cours préliminaires destinés aux femmes ont été supprimés depuis longtemps.

compte tenu des examens auxquels nous avons procédé et du résultat des procédures de consultation, nous sommes convaincus qu’il est juste d’engager des femmes au Cgfr.

Les femmes prennent d’assaut un ancien bastion masculin«A la mi-avril 1989, le chef du DFF a approuvé notre proposition visant à former et à engager aussi des femmes, dès janvier 1990, dans le Cgfr, dont les membres portent l’arme et l’uniforme. Je me réjouis person-nellement de cette décision et espère que plusieurs Suissesses saisiront cette occasion au cours de la campagne de recrutement qui vient de débuter». Ces attentes de l’ancien directeur général des douanes Hans Lauri, qui

Le nouveau béret

L’intérêt suscité auprès des médias était grand, notamment lors de la journée de presse qui s’est tenue fin janvier 1990 au CFL ainsi qu’au mois d’avril 1990, lorsque les premières aspirantes, vêtues de l’uniforme gris du Cgfr, ont débuté leur stage aux postes de gardes-frontière. Les gros titres alors publiés étaient les suivants: «Les femmes prennent d’assaut un ancien bastion masculin», «Des femmes en patrouille avec un pistolet militaire» ou encore «Des femmes surveillent dorénavant nos frontières». Ces réactions étaient attendues mais, comme il s’est avéré par la suite, l’étonnement du public n’a duré qu’un temps. En effet, l’intérêt manifesté s’est rapidement normalisé. Si certains collègues masculins des aspirantes ont

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6060 Forum D. | Panorama

En 1991, Regula Ita, qui était alors âgée de 28 ans, a répondu à quelques questions pour la Revue des douanes 1/91. A l’heure actuelle, Regula Ita a 53 ans et assume la fonction de cheffe de service Exécution des tâches dans la région gardes-frontière II. Que pense-t-elle aujourd’hui en lisant l’interview qu’elle avait accordée à l’époque?

Madame Ita, il y a 25 ans, vous avez été une des premières femmes à devenir membre du Cgfr. Qu’éprouvez-vous lorsque vous pensez à cette époque?J’ai vécu de nombreuses expériences: beaucoup de moments intéressants, de très belles rencontres, mais aussi des événements tragiques et extrêmement tristes. En 1990 et 1991, il était inhabituel, pour les voyageurs et pour mes collègues gardes-frontière, d’être confron-tés à une femme garde-frontière. Aux mots «bonjour, transportez-vous des marchandises?», certains voyageurs réagissaient en disant «c’est une femme». En apprenant que des femmes seraient engagées, mon premier chef de poste a déclaré à son chef de secteur: «ne m’en amène pas une». Neuf mois plus tard, j’ai néanmoins été formée par ses soins et par ses trois collaborateurs au poste de Rafz. Cette période était intéressante, et le scepticisme initial s’est dissipé.

Dans l’interview que vous avez accordée à l’époque, vous aviez déclaré que la profession de garde-fron-tière avait représenté une aubaine pour vous. Comment envisagiez-vous alors votre avenir et qu’en pensez-vous aujourd’hui?J’ai saisi l’occasion de faire encore une fois quelque chose de complètement nouveau. Après avoir exercé une profession presque uniquement féminine dans le secteur de l’économie domestique, j’ai pu apprendre une profession masculine qui était désormais aussi ouverte aux femmes. Celle-ci m’a en outre permis de travailler en partie en plein air. Le fait d’avoir affaire à beaucoup de personnes différentes ainsi que la grande diversité de la profession me fascinent encore aujourd’hui. La profession de garde-frontière a cependant aussi éveillé en moi un intérêt pour le sport, si bien que je pratique aujourd’hui la marche, le tir, le vélo et le ski de fond.

Concernant les nombreux règlements et prescrip-tions, vous aviez déclaré à l’époque qu’il fallait identifier la marge de manœuvre permettant la prise d’initiatives, mais aussi savoir où se situent les limites. Est-il devenu plus simple ou plus difficile de fixer et d’identifier des limites aujourd’hui, c’est-à-dire 25 ans plus tard?Beaucoup de choses ont changé au cours de ces années. Je suis moi-même devenue plus décontractée sur certains points. Pour certaines choses, il faut accepter les limites fixées. Mais il existe aussi souvent d’autres solutions. Les discussions que j’ai avec des collaborateurs du Cgfr ainsi que les contacts que j’entretiens avec des collègues des organisations partenaires suisses et étrangères dans le cadre de ma fonction me permettent par exemple fré-quemment d’en trouver.

A l’époque, vous aviez été intégrée très tôt au groupe de travail du Cgfr «Nouvel uniforme». Votre première pensée concernant les uniformes était «qu’il faut s’y sentir bien». Selon vous, en quoi les anciens uniformes étaient-ils mieux ou moins bien?Les uniformes que nous portions étaient gris et noirs, puis verts et bordeaux, alors qu’aujourd’hui ils sont bleu roi et bleu foncé. Cette couleur me plaît beaucoup. La qualité des tissus s’est améliorée pour la plupart des pièces d’uni-forme, de même que le confort et l’entretien. Aujourd’hui, nous portons du softshell au lieu de pèlerines en tissu. La coupe de certaines pièces peut cependant prêter à débat. Mais autrefois comme aujourd’hui, c’est finalement une question de goût.

A l’époque, vous étiez hébergée avec d’autres collègues dans un ménage commun (ménage formé de personnes célibataires). Que pensez-vous aujourd’hui de cette expérience de colocation avec d’autres femmes? La renouvelleriez-vous?Selon les colocataires, je pourrais envisager de partager un appartement pendant quelques mois.

Choisiriez-vous de nouveau la profession de garde-frontière?Oui, sans hésiter.

Regula Ita autrefois… …et aujourd’hui

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Saisir sa chanceSection antifraude douanière de Lausanne

La douane offre elle aussi des «placements à l'essai» aux personnes ayant un handicap afin que celles-ci puissent se réinsérer dans le monde professionnel. Lionel Stio (31 ans) de Prilly (VD) a saisi sa chance: après avoir travaillé six mois à l'arrière-guichet de la section antifraude douanière de Lausanne, le jeune homme a trouvé un poste dans une entreprise à Yverdon (VD), où il travaille depuis juillet 2015. Il y exerce différentes fonctions dans la vente et l'administration.

wp. Le jeune Vaudois rayonne lors de son entretien avec Forum D.: il est confiant, sûr de lui et a la tête pleine de projets. Enfin. Le jeune homme a longtemps cru qu'il ne pourrait plus remettre les pieds dans le monde du travail, après tous les revers qu'il a essuyés. Mais grâce à son enga-gement et à sa volonté, et grâce au coup de pouce des autorités, le jeune homme a réussi: il a trouvé un travail. Petite rétrospective.Il y a sept ans, Lionel Stio se voit contraint d'abandonner son appren-tissage de peintre en automobile à cause d'une allergie. Un malheur n'arrivant jamais seul, il est à cette époque victime d'un grave accident de voiture. Après avoir subi sept opérations, il tient difficilement sur ses deux jambes. Il ne peut pas rester debout très longtemps, ne peut pas porter de charges lourdes. Après tous ces revers, le jeune homme n'est plus aussi performant. Malgré tout, il ne perd pas son courage et s'essaie à diverses activités, dans le monde de

la coiffure et de la gastronomie entre autres. Mais les charges sont trop importantes. Grâce au soutien des autorités, qui se préoccupent de la réinsertion professionnelle des per-sonnes comme Lionel Stio, ce dernier a pu acquérir de nouvelles expériences professionnelles, notamment en effectuant un stage d'un an auprès de la ville de Genève. Début 2015, il commence un «placement à l'essai» de six mois à la section antifraude douanière de Lausanne, où il exécute diverses tâches à l'arrière-guichet: tri et distribution du courrier, gestion des appels, enregistrement et classement des dossiers, etc.

Energie criminelle«Avant de faire ce stage à la section antifraude douanière, je ne connais-sais pas grand-chose à la douane. Pour moi, la douane se limitait aux gardes-frontière que je rencontrais lorsque je rentrais de vacances», raconte le Vaudois de 31 ans. Quelle n'a pas été sa surprise de découvrir à la section antifraude douanière la diversité des tâches de la douane. Il a aussi été surpris de l'ampleur de la contrebande organisée profession-nellement et de l'énergie criminelle déployée par les escrocs. Les dom-mages pour l'économie et l'Etat sont considérables. Mais les consomma-teurs aussi sont dupés: les denrées alimentaires importées en contre-bande présentent souvent un risque pour la santé. «C'était très intéressant de voir comment la section antifraude douanière fonctionne. Je me suis aussi rendu compte de la complexité de certains cas et de la nécessité de collaborer avec les autorités parte-

naires nationales et internationales. J'ai trouvé particulièrement intéressant de pouvoir assister à l'audition d'un inculpé», raconte le jeune homme d'origine italienne.Lionel Stio est reconnaissant de la chance qu'on lui a offerte. «J'ai beaucoup appris et les collaborateurs m'ont largement soutenu à tous les niveaux. Cette expérience m'a beaucoup aidé dans ma recherche d'une nouvelle place de travail.» Pour Jean-Claude Duvoisin, chef de la section antifraude douanière de Lausanne, cette expérience de «place-ment à l'essai» a aussi été un succès: «Nous pouvons facilement placer des gens comme Lionel Stio chez nous. Il a surtout pu nous soulager dans le domaine administratif. Je trouve qu'il est important de permettre aux gens de se réinsérer dans la vie profession-nelle grâce à de tels engagements. Il faut toutefois être conscient des inves-tissements que cela demande.»

Gestion de la santéLa section Gestion de la santé de la division Personnel et formation de la DGD est entre autres respon-sable de l'intégration des per-sonnes handicapées. En collabo-ration avec la Consultation sociale du personnel de l'administration fédérale et des institutions sociales externes (par ex. les offices AI), elle encourage les essais de travail dans tous les domaines de l'AFD. Elle donne ainsi la possibilité aux per-sonnes exclues de la vie profession-nelle de se réinsérer dans le monde du travail.

Lionel Stio

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6262 Forum D. | Panorama

Goumois (JU) – la Suisse ouvre ses portes aux réfugiés polonais

Histoire

Le 20 juin 2015 a marqué le 75e anniversaire du franchissement de la frontière à Goumois (JU) par la 2e divi-sion polonaise de chasseurs à pied. En remerciement du refuge accordé par la Suisse durant la Seconde Guerre mondiale, une plaque commémorative a été apposée sur la façade du poste de gardes-frontière. Forum D. revient sur ces moments historiques. Par Roman Dörr, expert de douane, bureau de douane de Pratteln

«En souvenir du franchissement de la frontière par les soldats polonais le 20.VI.1940. Merci à la Suisse pour le refuge accordé et à nos pères pour leurs œuvres. Les descendants d’inter-nés polonais en Suisse. Goumois, le 20.VI.2015». La plaque portant cette inscription en polonais et en français a été dévoilée le 20 juin dernier lors de la cérémonie organisée au poste de gardes-frontière de Goumois. Parmi les nombreux invités présents se trouvaient également d’anciens soldats polonais internés en Suisse après s’être battus aux côtés des Français. For-mant avec leurs proches un émouvant cortège, ils ont, comme par le passé, franchi le pont à cheval sur la frontière.En 1936, le bureau de douane de Gou-mois ayant été transformé en poste de gardes-frontière, les supérieurs de l’époque entreprirent de rédiger une «orientation de poste». Outre des informations sur la géographie, l’histoire locale, les activités du village, les relations avec les Etats voisins et l’organisation du service, ce docu-ment contient également, au chapitre «Evénements militaires», un récit des événements qui se déroulèrent sur les rives du Doubs durant la Seconde Guerre mondiale.

L’Europe s’enfonce dans la guerre«En 1939, la situation internationale devient très tendue, l’Allemagne, cherchant à agrandir son espace vital, est très active. Le gouverne-ment prend diverses mesures qui ne manquent pas de donner à réfléchir aux pays qui l’entourent. La France, notre voisine, prend des mesures pour améliorer sa défense, c’est pour cette raison que la continuation de la ligne fortifiée dite ’Maginot’, se fait le long

de la frontière de notre secteur, où une série de fortins sont construits par le Génie militaire français avec bouche à feu dirigée contre notre pays». C’est ainsi que les gardes-frontière décrivent la situation à la frontière à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Le 1er septembre 1939, l’armée alle-mande envahit la Pologne. En Suisse, Henri Guisan a été élu général de l’armée suisse et l’ordre de mobilisa-tion générale est publié. Du côté français du Doubs, les troupes ne cessent d’affluer. Fin janvier 1940, le commandant de place de Maîche (F) donne l’ordre de retirer toutes les embarcations se trouvant sur le Doubs. Au début du mois de juin 1940, après l’invasion de la Belgique et des Pays-Bas par l’Allemagne, les signes d’une attaque imminente de la France se précisent: les postes de gardes-frontière reçoivent l’ap-pui d’autres troupes assignées à la protection de la frontière. Dans les villages des Franches-Montagnes, on procède à un exercice d’obscurcisse-ment. Les autorités françaises finissent par interdire le franchissement de la frontière. Seuls les habitants de Gou-mois peuvent encore traverser le pont, moyennant une autorisation établie par le consul français à Bâle. Les gardes-frontière suisses observent les changements qui se suc-cèdent: déplacement de nombreux contingents militaires de Goumois (Doubs) vers le front, suppression de la ligne téléphonique internatio-nale vers Saignelégier, interdiction du pacage journalier des troupeaux suisses sur sol français ainsi que violations répétées de l’espace aérien suisse par les pilotes de chasse allemands, conduisant finalement les

chasseurs suisses à abattre des appa-reils allemands au-dessus du Jura.

La guerre sur le Doubs«Après l’enfoncement du front fran-çais du Nord au début de juin 1940, la panique s’agrandit dans toute la France. L’avance formidable de la XIIe armée allemande en direction de notre pays, préoccupa beaucoup nos autorités. Dès le 17 juin 1940, les réfu-giés abordent déjà notre frontière». Le lendemain, le 18 juin, un détachement du 10e régiment du génie désamorce les mines du pont de Goumois. Selon les gardes-frontière, c’est un miracle qu’il n’ait pas explosé. Puis, tout d’un coup, les gardes-frontière voient la guerre qui fait rage, juste en face: «Les Allemands ne sont plus qu’à une vingtaine de km de notre frontière. Des combats se déroulent sur le plateau de Maîche. Une violente bataille est engagée entre les troupes françaises commandées par le général Daille, la deuxième division polonaise comman-dée par le général Prugar-Ketling, et les troupes allemandes. Les Spahis, déjà

Source: bibliothèque du Musée polonais

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à proximité de notre frontière partent à l’attaque pour dégager la division polonaise, qui est encerclée. Après des efforts formidables et au prix de lourdes pertes, ils parviennent à déga-ger l’armée polonaise, laquelle combat avec acharnement jusqu’à proximité de notre frontière pour finalement se réfugier chez nous emportant avec eux tout un matériel.»Le 19 juin, deux officiers franchissent le pont. Ils remettent aux gardes-frontière suisses un message destiné aux repré-sentants français et polonais à Berne. Les généraux Daille et Prugar-Ketling, à court de munitions et acculés par l’ar-mée allemande, demandent à la Suisse d’interner leurs troupes. Prévoyant la défaite, le général Guisan a déjà pris, la veille, la décision d’interner ces soldats en déroute. Dans la nuit du 19 au 20 juin, 10 100 soldats, 3000 civils, 1763 chevaux, 840 camions et automobiles, 800 vélos, 30 motos, 10 véhicules agricoles et 83 vaches passent la frontière à Goumois, formant une colonne interminable. «C’est une vague immense de réfugiés militaires qui afflue chez nous venant de tous côtés» observent les gardes-frontière, qui ajoutent que «les troupes sont désarmées à la frontière puis achemi-nées vers l’intérieur du pays». Polonais, Français et Africains du Nord se succèdent. Les soldats polonais franchissent le pont au pas. Leurs colonnes sont si serrées qu’il faut les désarmer en marchant à leurs côtés. Armes, munitions et objets d’équipe-ment s’entassent bientôt au bord de la route. Assurer un service ordré est impossible: les gardes-frontière aident l’armée à gérer un afflux de réfugiés auquel la Suisse n’est pas préparée. Le conseiller fédéral Ernst Wetter, le directeur général des douanes, Arnold Gassmann, le directeur d’arrondisse-ment de Bâle, Alexander Berner, ainsi que plusieurs membres de la direc-tion militaire du canton de Berne et le consul polonais leur prêtent main forte. Le temps presse si l’on veut mettre tout le monde à l’abri. Dans quelques heures, les unités allemandes investiront Goumois (Doubs).A Saignelégier, les soldats polonais sont accueillis chaleureusement par la

population, qui leur apporte de quoi reprendre des forces pour la suite du voyage vers l’intérieur des terres. L’armistice signé par la France à Compiègne quelques jours plus tard permet aux soldats français internés de retourner chez eux. Quant aux Polonais, ils sont condamnés à rester, leur pays demeurant en guerre contre l’Allemagne.

Du travail et des études pour les internésEnfermés pendant plusieurs mois dans le camp de réfugiés de Büren an der Aare, les soldats polonais sont ensuite dispersés dans toute la Suisse pour aider la population. Ils remplacent les bras qui manquent, suite à la mobilisa-tion, dans les fermes et les entreprises. On veille néanmoins à ce que leur travail ne concurrence pas l’économie

locale. Sous la conduite de l’Ecole poly-technique fédérale de Zurich (EPFZ), des cours sont mis en place dans les camps pour permettre aux internés de poursuivre leurs études commencées avant la guerre. De nombreux internés ont ainsi obtenu un diplôme d’une université ou d’une haute école durant leur séjour forcé en Suisse. Jusqu’à la fin de la guerre, les internés vont accomplir près de 4,3 millions de jours de travail. Ils construisent entre autres 450 km de routes, 63 ponts et 10 km de canaux, travaillent dans les mines, défrichent des forêts et exploitent des alpages. De nombreux monuments, noms de fleuves et de routes nous rappellent encore aujourd’hui l’aide inestimable apportée à la population suisse par les Polonais durant la Seconde Guerre mondiale.

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Goumois, de part et d’autre du DoubsLocalités frontalières (2e partie)

Certaines localités frontalières, en Suisse, portent le même nom que la localité étrangère située juste de l’autre côté de la frontière. Forum D. est allé à la découverte de Goumois (canton du Jura) et de Goumois (département du Doubs), cherchant à savoir ce qui relie les deux localités. Par Roman Dörr, expert de douane, bureau de douane de Pratteln

Le Doubs serpente au fond d’une vallée encaissée séparant les Franches-Mon-tagnes de la Franche-Comté. Sur la rive droite se trouve le village suisse de Goumois. Un pont le relie au village français du même nom, situé sur l’autre rive. La vallée du Doubs fait partie de ces coins de nature peu connus à la frontière franco-suisse.

Du Gomoens médiéval au village frontière La région de Goumois est habitée depuis le Moyen Âge. Au 11e siècle, la rive droite était un fief du prince-évêque de Bâle. La suzeraineté sur le village de «Gomoens», situé sur la rive gauche du Doubs, était exercée en 1177 par l’abbaye bénédictine de Montbenoît. En 1247, le comte Thierry III de Montbéliard acheta le village au prieuré de Lanthenans.En 1304, le sire de Montfaucon, Gauthier II, hérita de «Goumoens» et de ses dépendances. Il acheta en outre au comte de la Roche un grand domaine sur la rive droite du Doubs. Sur ces terres, Gauthier II créa la

seigneurie de Franquemont, qu’il admi-nistra depuis le château du même nom. En 1380, Isabelle de Neuchâtel renonça à son héritage au profit du comte de Montbéliard. En 1474, durant les guerres de Bourgogne, les soldats du prince-évêque Jean de Venningen, allié aux Confédérés, s’emparèrent de Franquemont et de son château. Après avoir vainement tenté de récupérer ses terres, le comte de Montbéliard céda le pays au prince-évêque pour 200 florins.Le fief fut ensuite acquis en 1537 par l’ancien ambassadeur de l’empereur Charles Quint, Nicolas de Gilley, qui l’érigea en baronnie. Une maison seigneuriale, avec prison et tribunal, fut alors construite à Goumois, chef-lieu de la baronnie. Frédéric de Wurtemberg, comte de Montbéliard, racheta la baronnie en 1595, tout en refusant de reconnaître les droits de l’évêque. Il profita du conflit qui s’ensuivit pour introduire le luthéranisme. En 1658, la reconnaissance de la suzeraineté de l’évêque sur la seigneurie et le rétablissement de la religion catholique permirent de trouver un arrangement.

Les rivalités perdurèrent toutefois entre le vassal et son suzerain, qui fit détruire le château en 1677. Le conflit ne prit fin qu’en 1780, lorsque Louis XVI et le prince-évêque Friedrich de Wangen fixèrent le Doubs comme frontière commune. Ce traité, par lequel le prince-évêque renonçait à la rive gauche du Doubs, scinda le village de Goumois en deux.En 1792, Goumois fut rattaché à la République rauracienne, une des républiques sœurs nées de la Révolu-tion française. Suite à l’occupation par Napoléon, l’évêché de Bâle fut dissous et son territoire annexé à la France. En 1815, le Congrès de Vienne fixa de nouveau le Doubs comme frontière entre la France et la Suisse et attribua les terres de l’ancien évêché de Bâle au canton de Berne. Cette fois, la scission du village était définitive. En 1830, les habitants de la rive droite obtinrent toutefois l’autorisation d’utiliser l’église et le cimetière situés sur la rive gauche, donc côté français, et les habitants de la rive gauche de fréquenter l’école située sur la rive droite, côté suisse.

«Bienvenue à Goumois». Le paisible village de Goumois (JU) avec le

pont frontière orné de drapeaux, à l’heure du dîner.

Le village français de Goumois (Doubs) vu depuis la rive suisse

du Doubs.

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Au début du 20e siècle, Goumois était équipé de routes en dur, d’un réseau électrique et de lignes téléphoniques. Une ligne d’autocar fut également créée. Goumois subit de nombreuses inonda-tions au cours de son histoire. En 1898, le pont frontière en bois fut arraché par le courant et remplacé par l’ouvrage actuel. Durant l’été 1940, celui-ci per-mit à 10 000 soldats polonais et fran-çais et à 3000 civils fuyant les troupes allemandes de passer en Suisse.Depuis 2009, Goumois et les hameaux de Belfond et de Vautenaivre, soit quelque 80 habitants, font partie de la commune de Saignelégier. Le lieu vit principalement du tourisme. Le village n’accueillant pas d’autre activité économique sur son sol, de nombreux habitants se rendent à l’extérieur pour travailler.

Goumois (Doubs) – au pays horlogerJusqu’au rattachement de la rive gauche à la France en 1780, l’histoire des deux communautés était identique. En 1793, le village français de Goumois (Doubs) fut attribué au département du Mont-Terrible, puis à celui du Haut-Rhin. Durant les deux guerres mon-diales, la localité fut un lieu de passage des réfugiés fuyant vers la Suisse. En raison des liens de parenté existant de part et d’autre de la frontière, le lieu avait alors la réputation d’être un nid de contrebandiers. De nos jours, Gou-mois (Doubs) vit au rythme de l’activité agricole et forestière, du tourisme et des petits ateliers de sculpteurs sur bois

et d’horlogers. La région a été baptisée «Pays horloger» par la Franche-Comté, qui vise ainsi à y attirer davantage de visiteurs. Un grand nombre des quelque 180 habitants travaillent à l’extérieur du village.

Le trafic frontalier sur le DoubsJusqu’en 1678, aucune taxe n’était perçue lors du franchissement du Doubs. Cette année-là, Louis XIV introduisit d’importants droits de douane sur l’importation de marchan-dises en Franche-Comté. Il en résulta une intense activité de contrebande. Afin d’acheminer de l’autre côté de la frontière sans être inquiétés les denrées alimentaires, l’alcool et le sel, et plus tard aussi le tabac et le café, les contrebandiers équipèrent les versants du Doubs de passerelles et de chemins tenus secrets. Le sentier des Bornes et les vertigineuses Échelles de la Mort, empruntés autrefois par les «passeurs», font aujourd’hui partie du réseau des chemins pédestres.Les douaniers français s’installèrent à Goumois (Doubs) en 1791. La Confé-dération suisse acheta une maison côté suisse en 1853. Ce bâtiment, loué en 1851 par l’administration des contributions, servait déjà de bureau de douane depuis 1847. Poste principal en 1898, celui-ci devint ensuite bureau de douane secondaire du bureau de douane principal de Porrentruy et servit dès 1920 également de bureau de poste. En 1936, il fut transformé en poste de gardes-frontière. «Le passage frontière de Goumois dépend actuellement du commandement de

la Région gardes-frontière VIII, qui se trouve à Porrentruy. Il est situé à l’extrémité ouest du Ier arrondissement des douanes», explique le sergent Gérard Terrier, chef du service Trafic des voyageurs au commandement de la Région gardes-frontière VIII. «Le pont est franchi par les habitants des deux villages, les frontaliers, les randonneurs et des camions. Nous dédouanons sur-tout des produits agricoles et du vin; il s’agit aussi bien de marchandises com-merciales que de marchandises privées. En dehors des heures d’ouverture, une boîte à déclarations est à disposition. Les gens s’en servent fréquemment.»

Goumois, aujourd’hui et demainAujourd’hui, les touristes d’un jour, les pêcheurs à la ligne, les adeptes du canoë et les campeurs se croisent à Goumois. Les amateurs de poisson viennent aussi de loin pour y savourer une truite accompagnée d’un verre de vin. Pendant longtemps, de nombreux habitants des deux villages avaient de la famille sur l’autre rive. Ces liens familiaux, tissés par-delà la frontière, ont aujourd’hui quasiment disparu. Les deux localités restent tout de même liées par un passé commun, qu’elles fêtent chaque année. A la manière suisse ou française? «A notre manière», tranche un habitant d’un certain âge. «J’ai finalement renoncé à fêter le 14 juillet», expliquait il y a peu l’ancienne maire de Goumois (Doubs), en fonction jusqu’en 2014. «J’en avais assez de dépenser de l’argent pour un feu d’artifice qui n’intéressait personne. Pour compenser, nous organisons le 31 juillet et le 1er août, avec les sociétés de musique suisses, un bal en l’hon-neur du Doubs et de la fête nationale suisse.» D’autres manifestations, comme les compétitions internatio-nales de canoë-kayak, qui ont lieu régulièrement, sont aussi organisées en commun. La population entend prendre soin de sa vallée, à la nature en grande partie préservée. Peu peuplée et sinueuse, la vallée du Doubs avec sa flore et sa faune si variées, est tout simplement unique. Qu’en sera-t-il demain? «On verra bien», conclut un pêcheur en lançant sa ligne au loin. Le Doubs: un paysage encore intact.

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… au point d’appui garde-frontière sur la Testa Grigia

En tournée…

Situé en Valais à 3474 mètres d’altitude, le poste frontière sur la Testa Grigia est le plus élevé d’Europe. Il a été construit en 1938. Le bâtiment dispose de deux chambres pour officiers et d’un logement de groupe. Il offre de la place pour une dizaine de personnes. De nos jours, le point d’appui garde-frontière est surtout utilisé dans le cadre de l’instruction alpine des gardes-frontière.

Vue sur le Cervin

Le point d’appui garde-frontière à 3474 mètres d’altitude

Gravé dans la pierre

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De la place pour dix personnes

L’Italie est toute proche… A la limite

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Des frontières en mouvement – une Suisse en expansion grâce à la fonte des glaciers

Frontière suisse

Le tracé actuel de la frontière suisse a été fixé lors du congrès de Vienne en 1815. Depuis, il n’aurait subi aucune modification. Vraiment? Forum D. s’est penché sur la question: le tracé de notre frontière n’est en réalité pas encore défini partout et continue de se mouvoir.

al. Par ses conquêtes militaires et sa politique, Napoléon Bonaparte, empe-reur des Français, a considérablement bouleversé la configuration politique de l’Europe. Après la défaite définitive de Napoléon à Waterloo le 18 juin 1815 et son bannissement sur l’île de Ste-Hélène, la carte géopolitique de l’Europe a été complètement remo-delée. Nombre de frontières ont été redessinées et de nouveaux Etats ont été fondés lors du congrès de Vienne, sous la direction du prince de Metter-nich, ministre des affaires étrangères de l’Empire d’Autriche.Le tracé de la frontière suisse a été fixé durant le congrès de Vienne. Après sa fondation en 1848, l’Etat fédéral suisse a conclu avec ses pays voisins de nom-breux traités frontaliers concernant des modifications de tracé plus ou moins importantes, dues par exemple à des glissements de terrain ou à des projets de construction, qui supposaient des échanges de surfaces de taille similaire. Tel a été le cas lors de la construction de l’aéroport de Genève-Cointrin, du passage frontière de Bardonnex et des barrages de Livigno et d’Emosson. D’autres modifications de frontière se sont révélées par ailleurs nécessaires pour des questions de douane, notam-ment en 1892 lorsque la commune de Samnaun est devenue une enclave douanière suisse, et en 1923 et 1964 lorsque la Principauté de Liechtenstein et la commune allemande de Büsingen respectivement sont devenues des enclaves douanières étrangères. La frontière nationale actuelle de la Suisse ne correspond donc pas à la frontière douanière.

Qui délimite les frontières?La Suisse entretient avec chacun de ses pays voisins une commission

mixte, composée, du côté suisse, de représentants du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), de l’Administration fédérale des douanes (AFD), des cantons frontaliers concernés et de l’Office fédéral de topographie (swisstopo). Ce dernier est responsable de la mensuration et de l’entretien de la frontière natio-nale. Il est chargé notamment de la détermination exacte du tracé de la frontière et de la pose des signes de démarcation (marquage matériel). La frontière étant sous la souveraineté de l’Etat, toute modification de son tracé doit être validée au préalable par le Parlement et peut dès lors faire l’objet d’un référendum.

La frontière suisse en chiffresLa frontière nationale de la Suisse s’étend sur 1899 km le long de cinq autres pays. La Suisse partage 744 km de frontière avec l’Italie, 572 km avec la France, 362 km avec l’Allemagne, 180 km avec l’Autriche et 41 km avec le Liechtenstein. La topographie de la Suisse est telle que la frontière passe à travers des villes, comme Genève, Bâle, Constance ou Chiasso, sur terre ferme (717 km), mais aussi dans des lacs, des rivières et des ruisseaux (436 km), ainsi que sur des mon-tagnes et des hautes montagnes (746 km). A La Cure, dans le canton de Vaud, la frontière traverse même un bâtiment: l’hôtel «Arbez Fran-co-Suisse» se situe exactement sur la frontière franco-suisse. C’est le seul hôtel en Europe qui a, pour ainsi dire, deux adresses.

Beaucoup de mouvements à la frontièreLes tronçons sur terre ferme sont bornés par 7132 signes de démarca-

tion. Les mouvements à la frontière sont nombreux: plus de 750 000 personnes, 350 000 voitures de tou-risme et 20 000 camions franchissent chaque jour la frontière. Les quatorze axes de trafic principaux (Chiasso-Brogeda, Bâle/Weil-auto-route, Bardonnex, etc.) sont surveillés en permanence par l’AFD. Sur les axes secondaires, 29 postes frontières sont partiellement occupés, et 161 postes inoccupés situés sur des routes à trafic toléré sont contrôlés par des patrouilles mobiles. On compte en outre 600 routes et chemins car-rossables, également surveillés de manière sporadique par des équipes mobiles, sans oublier, enfin, la fron-tière verte.

Frontières artificielles et frontières naturellesLes tracés définis de manière artifi-cielle sont bornés par des signes de démarcation, généralement reliés entre eux par une ligne droite. Ces bornes ont été posées en partie déjà au XVIe siècle. Témoignages de l’histoire de la frontière suisse, elles font partie de notre héritage culturel. Leur numéro-

Borne de Rafz sur la carte topographique

nationale à l’échelle 1:25 000 (n° 1051)

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tation diffère d’un canton à l’autre. Les bornes qui marquent également la limite entre deux cantons présentent ainsi deux numéros différents. Tel est le cas de la borne «Im Loch», située entre le canton de Zurich, pour lequel elle porte le numéro 129, et le canton de Schaffhouse, pour lequel elle porte le numéro 35.Certaines bornes sont inscrites sur la carte topographique nationale de la Suisse (1:25 000), assorties de leurs numéros et, plus rarement, de leur désignation. C’est le cas, par exemple, de la borne de Rafz (Rafzerstein), à la limite entre le canton de Zurich et l’Allemagne.En vertu du Code pénal suisse (CP, RS 311.0), le déplacement de bornes officielles est punissable. L’art. 268 prévoit en effet que «celui qui aura supprimé, déplacé, rendu mécon-naissable, falsifié ou placé à faux une borne ou tout autre signe destiné à marquer les frontières de la Confédéra-tion, d’un canton ou d’une commune sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire».

Frontières naturellesLes montagnes, lacs et cours d’eau constituent des frontières naturelles, sans repère dans le terrain. Les crêtes des montagnes, qui forment les lignes dites de partage des eaux, sont considérées comme des frontières naturelles. Dans les lacs et les cours d’eau, la frontière passe en général au milieu, bien qu’il y ait des exceptions. Dans les cantons de Bâle-Campagne et d’Argovie, par exemple, la frontière ne passe pas au milieu du Rhin, mais suit les points les plus profonds du lit du fleuve. Cette situation devrait tou-tefois changer d’ici peu. Le Doubs fait également exception dans le canton du Jura: la frontière longe le rivage du côté suisse. Il en est de même pour la Morge, à St-Gingolph, dans le canton du Valais, où le bord supérieur de la berge du côté suisse fait office de frontière. En revanche, la frontière qui traverse le lac de Constance n’a pas encore été définie de manière officielle.

Des frontières en mouvementContrairement à ce que l’on pourrait croire, le tracé de la frontière suisse n’a pas été fixé de manière définitive. Il peut encore changer. La frontière ne cesse en effet de se déplacer en raison de phénomènes climatiques et naturels. Les crêtes des monts enneigés et des glaciers situés à des altitudes supérieures à 3500 m se sont abaissées au cours des dernières décennies sous l’effet, notamment, du réchauffement climatique et de la fonte des neiges qui y est liée. Ainsi, lorsqu’une crête de neige ou de glace fond, la frontière se déplace automa-tiquement. Dans la région de Zermatt, par exemple, les changements de terrain ont fait reculer la frontière de plus de 150 m en direction de l’Italie au cours des 70 dernières années. La Suisse s’est ainsi agrandie d’environ 7 ha. Aucune compensation n’est prévue à l’heure actuelle pour ce type de déplacements naturels, car le tracé le long des crêtes des montagnes est considéré comme judicieux.

Borne «Im Loch»

Cette borne de 1839 marque la frontière entre la Suisse et l’Allemagne (anciennement le Grand-duché de Bade), entre les cantons de Zurich et de Schaffhouse et entre les communes de Rafz (ZH), de Rüdlingen (SH) et de Lottstetten (DE). Elle porte les numéros 129 pour Zurich et 35 pour Schaffhouse. On notera que la lettre «N», pour «Numéro», a été reproduite à l’envers sur la pierre, son auteur ayant probablement posé le chablon dans le mauvais sens!

Abréviations: CZ; Canton de ZurichR; RafzGB; Grand-duché de Bade (DE)L; Lottstetten (DE)

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7070 Forum D. | Panorama

Que dois-jedéclarer?L'application douanière«Voyage & marchandises»vous informe.

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Héritage encombrant, saucisse à rôtir pour la Garde suisse et droits d’entrée d’un ordinateur portable au Zimbabwe

Poules naines«En lisant les formalités d’importa-tion, je n’ai pas su dire si les poules naines étaient considérées comme des animaux domestiques. Puis-je quand même en importer quelques-unes pour mon jardin?»

Recherche d’un paquet«Voilà près de dix jours que nous attendons un paquet qui contient les habits usagés de notre nounou, qu’elle a fait envoyer depuis un bureau de poste allemand, juste avant son retour de vacances. D’après le service de suivi des envois, le paquet devrait déjà être arrivé en Suisse et prêt à être livré. Etant donné que notre employée n’a plus de vêtements propres, ce sont les miens qu’elle porte à présent. Le paquet se trouve-rait-il dans votre bureau de douane? Si tel n’est pas le cas, pourriez-vous dire quelques mots en notre faveur au service de messagerie pour permettre à notre nounou de récupérer ses habits au plus vite?»

L’administration des douanes reçoit chaque jour des dizaines de questions de citoyens domiciliés en Suisse ou à l’étranger, qui souhaiteraient savoir à quoi ils doivent veiller lors de l’importation de marchandises. Forum D. vous propose un pot-pourri de messages prouvant que, dans la vie, il faut s’attendre à tout.

Des noix pour remplacer la viande«J’essaie de savoir s’il est permis d’amener des noix en Suisse pour nos vacances. Comme nous sommes végétariens, les fruits à coque sont essentiels à notre régime alimentaire journalier durant notre séjour. A mon sens, il nous sera difficile de trouver des noix crues non salées au cours de notre séjour dans votre pays. C’est pourquoi nous voulons les faire emballer auparavant. Je vous remercie d’avance pour votre temps et votre attention, et j’attends votre réponse.»

Déclaration en douane de l’âge de la pierre«Concernant l’importation d’un trac-teur 4x4, est-il possible de se procurer une déclaration en douane de l’âge de la pierre?»

Cartes postales«Ma mère et moi avons hérité de près de 40 tonnes de cartes postales et de photos de mon grand-oncle (il était suisse et il est décédé en Suisse). Cet héritage se trouve actuellement en Allemagne et n’a presque plus de valeur. Nous aimerions le ramener en Suisse et y décider de son sort. Est-il correct que, en tant qu’héritiers, nous n’avons pas besoin de payer de droits de douane pour ce transport?»

En vacances avec le chien«Nous avons pour projet de partir en vacances chez notre fille aux Etats-Unis. Une question nous tracasse cependant: est-ce que les chiens qui accompagnent leurs maîtres de la

Questions posées à la douane

Suisse aux Etats-Unis doivent payer une nouvelle fois les droits de douane à leur retour en Suisse?»

Bière sans alcool«Je souhaite importer une caisse de bière sans alcool en Suisse. Dois-je dédouaner la quantité excédant la franchise quantitative pour la bière? La bière sans alcool n’est-elle pas soumise aux mêmes dispositions que les boissons alcoolisées?

Ordinateur portable«Pourriez-vous me donner le montant des droits d’entrée pour un ordinateur portable au Zimbabwe?»

Saucisses à rôtir pour la Garde suisse«Ancien garde suisse, je souhaite faire une surprise aux actuels gardes suisses en apportant 120 saucisses à rôtir et 120 cervelas au Vatican. Est-ce faisable? Quelles sont les précautions à prendre lors du franchissement de la frontière à Chiasso et lors du transit par l’Italie pour que la marchandise arrive sans dommage à Rome?»

Vignette autoroutière«J’ai reçu une vignette pour ma caravane. Au dos de la vignette, il est indiqué où il faut la coller sur la vitre d’une voiture. J’ai donc tenté, en vain, de trouver l’endroit où la coller sur une caravane, car celle-ci n’a des vitres que sur les côtés. Où dois-je coller cette vignette? Malgré toute ma bonne volonté, je n’en ai aucune idée!»

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72 Forum D. | Dossiers

Impressum

Forum D. – Edité par: Administration fédérale des douanes AFD; mode de parution: trois fois par an en allemand, français et italien; tirage: 8500 exemplaires; rédaction: Walter Pavel (wp), Attila Lardori (al), Kim Pittet (kp); adresse de la rédaction: Administration fédérale des douanes, Direction générale des douanes, Communication/médias, Monbijoustrasse 40, 3003 Berne; www.ezv.admin.ch; [email protected].

Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL), Vente de publications fédérales, 3003 Berne, www.bundespublikationen.admin.ch; [email protected] / numéro d’article 606.000.15/2/3F

Service d’abonnement: [email protected]

11.15 1900 860357019

Gare de Chiasso, été 2015

©foto CdT/Fiorenzo Maffi