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Institut d'Etudes Politiques de Lyon Université Lumière Lyon 2 Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe Mémoire soutenu le 7 septembre 2007 par Frédéric PICHON Master Professionnel Management du secteur public : collectivités et partenaires Année universitaire 2006-2007 Sous la direction de Christian DEBIEVE, Consultant spécialisé en achat public Président du jury Membres du jury : Denis ROQUIER Directeur national des concours de la fonction publique territoriale au CNFPT Patricia BRAVARD Responsable du service marchés – achats de l’Office Public de l’Habitat Loire Habitat Maître de stage

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Institut d'Etudes Politiques de LyonUniversité Lumière Lyon 2

Le développement durable dans lesmarchés publics, une évolution complexe

Mémoire soutenu le 7 septembre 2007 parFrédéric PICHON

Master Professionnel Management du secteur public : collectivités et partenairesAnnée universitaire 2006-2007

Sous la direction de Christian DEBIEVE, Consultantspécialisé en achat public Président du jury

Membres du jury : Denis ROQUIER Directeur national des concours de la fonction publique territorialeau CNFPT Patricia BRAVARD Responsable du service marchés – achats de l’Office Public del’Habitat Loire Habitat Maître de stage

Table des matièresRemerciements . . 5INTRODUCTION . . 6I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchéspublics . . 11

A- Des évolutions internes sous l’impulsion du droit communautaire . . 111°) L’acception extensive du développement durable dans les achats publics par laCJCE . . 112°) Le développement durable sous l’empire du Code des Marchés Publics de 1966. . 183°) Le Code des Marchés Publics 2001 : les prémices pour des achats publicsdurables . . 21

B- Les Codes des Marchés Publics 2004 et 2006 : les progrès de l’intégration dudéveloppement durable aux marchés publics . . 23

1°) Le Code des Marchés Publics 2004 sous le sceau des directivescommunautaires . . 232°) Le Code des Marchés Publics 2006 : la possibilité de prendre en compte ledéveloppement durable à chaque étape du marché . . 283°) La Stratégie Nationale de Développement Durable appliquée aux marchéspublics . . 33

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables . . 37A. Les risques liés à un marché public intégrant des aspects du développement durable. . 37

1°) Une sécurité juridique imparfaite . . 372°) Des risques économiques contraignants . . 413°) L’effectivité des achats socialement responsables à travers les clausesd’insertion en question . . 46

B- Des lacunes de l’achat public durable en France à dépasser . . 481°) Des réticences ancrées dans les pratiques . . 482°) Pour des achats systématiquement durables . . 55

CONCLUSION . . 60BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE . . 61

[1] Ouvrages généraux sur les marchés publics . . 61[2] Rapports et documents officiels assimilés . . 61[3] Articles – Revues juridiques . . 62

[3.1] Articles juridiques ciblés sur les aspects sociaux . . 62[3.2] Articles juridiques ciblés sur les aspects environnementaux . . 62[3.3] Articles juridiques traitant du développement durable dans sa globalité… . . 63

[4] Articles – Revues spécialisées . . 64[5] Enquêtes sur l’achat public durable . . 64[6] Ressources en ligne . . 64

[6.1] Comptes-rendus de manifestations liées à l’achat public écoresponsable . . 64[6.2] Articles liés à la commande publique écoresponsable . . 65[6.3] Guides issus des retours d’expériences locaux . . 67[6.4] Guides officiels relatifs à l’achat public durable . . 68

[6.5] Chartes et déclarations d’intention locales . . 69[7] Autres sources en ligne . . 69

ANNEXES . . 71Exemple-type d’une démarche d’achats écoresponsables . . 71Illustration de conditions d’exécution en faveur de l’insertion professionnelle . . 71Exemple de délibération relative aux références de développement durable dans lesachats publics . . 75Fiche-Produit relative à la fourniture écoresponsable de papier . . 76

RESUME . . 77

Remerciements

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RemerciementsAvant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à remercier les personnes qui ont contribuéà l’élaboration de ce mémoire. Jusqu’en juillet, mon stage à Loire Habitat a été l’occasiond’échanges sur l’achat public écoresponsable, quand bien même il ne s’agissait pas de la missionproposée. Les techniciens de l’Office et les responsables m’ont rapporté leurs expériences. Surtout,le service marchés-achats dirigé par Mme BRAVARD-ROYER, qui m’a fait le plaisir d’êtreégalement membre du jury de soutenance, a été le cadre de réflexions utiles et précieuses.

M. ROQUIER m’a fait l’honneur de participer au jury.

Je remercie également M. Christian DEBIEVE pour son concours lors de l’élaboration et dela rédaction de ce mémoire.

Enfin, je remercie Nathalie, soutien indispensable, ne fût-ce que dans la période de rédactionde ce mémoire.

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INTRODUCTION

La cinquième édition de la semaine du développement durable s’est déroulée du 1er au7 avril dernier, avec une ampleur et une médiatisation sans précédent. En mai, suite àl’élection présidentielle a été créé un « super ministère » de l’écologie, du développement etde l’aménagement durables, avec à sa tête le seul ministre d’État du gouvernement. Dansla foulée, le lancement d’un « Grenelle de l’environnement » le 6 juillet a été une étapesupplémentaire dans la prise de conscience de la nécessité d’agir et de dépasser les mots.Le 15 juillet a été inauguré le système Velib’ de mise à disposition, à moindre coût pour lesusagers, de vélos en de nombreux points de Paris.

Le développement durable a ainsi pris une ampleur nouvelle en France au cours desderniers mois : la richesse de l’actualité traduit l’ouverture des politiques et de la sociétéaux enjeux écologiques. Au demeurant, si « l’écologie est un problème culturel », commel’affirme Nicolas Hulot, et que « le respect de l’environnement passe par un grand nombrede changements comportementaux »1, les habitudes de consommation et de réflexionsemblent s’ouvrir aux enjeux environnementaux. En décembre 2006, 64 % des françaisaffirmaient avoir déjà entendu parler de développement durable. Parmi eux, 86 % estimaientavoir un rôle à jouer en matière de développement durable au même titre que les autresacteurs de la société, comme l’État ou les entreprises2. Ces proportions ont assurémentaugmenté au gré de l’irruption dans l’actualité d’évènements participant du développementdurable. Néanmoins, cette notion est trop souvent réduite dans les médias à l’écologie.Or un développement soutenable n’intègre pas uniquement des préoccupations d’ordreenvironnemental ; et si la popularité de cette thématique est croissante depuis le début desannées 2000, sa définition est connue depuis 20 ans.

Le développement durable est, selon la définition proposée en 1987 par la Commissionmondiale sur l’environnement et le développement (dite Commission Brundtland), « undéveloppement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité desgénérations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : leconcept de " besoins ", et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, àqui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nostechniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement àrépondre aux besoins actuels et à venir »3. Le développement durable vise donc d’une partà préserver, améliorer et valoriser les ressources naturelles sur le long terme, en diminuantle risque et les impacts environnementaux ; d’autre part, son objectif est la satisfaction desbesoins de l’homme en matière de santé, de logement, de consommation, d’éducation,d’emploi, de culture… selon un principe d’équité sociale basé sur la lutte contre l’exclusion,sur la réduction des inégalités ou sur la promotion de la diversité culturelle ; enfin, ledéveloppement durable tend à assurer une croissance économique dans le but de favoriser

1 Nicolas Hulot, Revue Ma planète, Novembre Décembre 1995. Source : Wikipédia [7]2 IFOP, Baromètre de la communication gouvernemental - décembre 2006. Site du Ministère de l'Écologie, de l'Aménagement

et du Développement Durables [7]3 Extrait du chapitre 2 du rapport Notre avenir à tous, consultable sur le site du Ministère de l'Écologie, de l'Aménagement

et du Développement Durables [7]

INTRODUCTION

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la création de richesses pour tous en utilisant de manière raisonnée les ressources et lesmilieux naturels.

Malgré ces objectifs humanistes, le développement durable ne fait toutefois pasl’unanimité. La notion même de développement accolée à celle de durable sous-tend lemaintien d’une logique économique capitaliste et productiviste qui s’est traduite par deseffets nocifs, dont l’ampleur a conduit à l’émergence du concept de développement durablepour en limiter les impacts. L’appropriation du concept par des groupes industriels, dontl’activité conduit directement ou indirectement à renforcer les problèmes environnementaux,crée également un flou sur la portée du développement durable. Toutefois, « l’équivoquede l'expression "développement durable" garantit son succès, […] d'autant que, puisquele développement est proclamé durable, donc implicitement sans effets négatifs, il estconsacré comme le modèle absolu à généraliser sur l'ensemble de la planète » 4 . Enoutre, les opposants à cette notion la caractérisent comme un oxymore, puisque moinsde 20 % de la population mondiale consomme plus de 80 % des ressources naturelles :le développement durable ne saurait être qu’une conception occidentale, à laquelle il fautsubstituer celle de décroissance soutenable5.

Le développement durable est-il pour autant un mirage ? S’il peut être jugé insuffisant,« le peu que l’on peut faire, le très peu que l’on peut faire, il faut le faire, pour l’honneur,mais sans illusion »6. La nécessité de prendre en compte le développement durableest provoquée par trois déséquilibres portés par la mondialisation de l’économie et del’information. Le premier, économique, se traduit par le creusement des inégalités entreles pays riches et les pays pauvres et par l’affaiblissement de la gouvernance locale auprofit des institutions internationales dont la logique est avant tout économique, commele Fonds Monétaire International7. La deuxième raison de l’émergence du développementdurable est d’ordre sociale : l’accélération de l’exode rural au niveau mondial (désormaisplus de 50 % de la population mondiale vit en ville) crée des situations de précarité nouvelleset a des conséquences sociales néfastes (paupérisation, exclusion). Enfin, le troisièmedéséquilibre rendant nécessaire la prise en compte du développement durable, le plusimportant également, est d’ordre environnemental : les activités économiques, notammentdepuis les révolutions industrielles du XVIII° et du XIX° siècles, ont pour corollaires unépuisement des ressources naturelles, une émission exponentielle de substances nociveset une production de déchets dont certains peuvent être problématiques, comme les déchetsultimes issus des centrales nucléaires. L’activité humaine influe sur son milieu ; au-delà dudébat sur le dérèglement climatique, certains phénomènes naturels sont directement liésà la pollution d’origine humaine, tels le trou dans la couche d’ozone, les pluies acides, ladéforestation ou encore l’effet de serre. La prise en compte du développement durable dansles activités humaines est donc, à défaut d’une solution radicale, la moins mauvaise dessolutions actuellement possible.

La portée planétaire des problèmes évoqués nécessitait une concertation au niveauinternational : la pollution et ses conséquences, tout comme la mondialisation, neconnaissent pas les frontières. Ainsi, depuis la Conférence des Nations Unies sur

4 DENEUX Marcel, Rapport au Sénat sur l'évaluation de l'ampleur des changements climatiques. Source : Wikipédia [7]5 Voir notamment l’Institut d'études économiques et sociales pour la décroissance soutenable6 MONOD Théodore, Dictionnaire humaniste et pacifiste – Thèmes et valeurs d’un penseur du XX° siècle, Éditions de Poche,

J’ai Lu, février 20077 La littérature du prix Nobel d’économie Joseph E. Stiglitz est sur ce point assez équivoque, avec notamment La grande

désillusion, Éditions Fayard, janvier 2002.

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l’environnement humain à Stockholm en 1972, plusieurs conférences mondiales surl’écodéveloppement puis sur le développement durable ont eu lieu, dont le point d’orgue futla signature à Kyoto en décembre 1997 d’un protocole de réduction des émissions de gazà effet de serre engageant les 168 pays parties à diminuer à l’horizon 2012 leurs émissionsde six gaz de 5,2 % par rapport aux niveaux de 1990. Dans cette perspective l’intégrationdes enjeux de développement durable est devenue juridiquement contraignante pour cequi concerne les activités économiques. Les engagements internationaux ont eu commeconséquences des bouleversements des droits communautaire et interne pour la France àpartir de la fin des années 1990, période caractérisée par ce qu’Yves Jégouzo qualifie de« judiciarisation de l’environnement »8.

L’action en faveur du développement durable reste bien sûr possible à tous les niveauxde la société : État, collectivités locales, associations, entreprises, individus. La pertinencedu niveau d’action ne pose pas de difficultés particulières. « Agir local, penser global »représente la philosophie du développement durable. Néanmoins certains comportementsde consommation ont des répercussions plus grandes. Parmi les consommateurs, lespersonnes publiques, c’est-à-dire les personnes morales de droit public, ont un rôleparticulier à jouer. En effet, dans les relations avec les administrés et à travers la participationà l’activité économique, les politiques publiques peuvent influencer les modes de décisionet les orientations stratégiques des acteurs. Ainsi, la conférence des Nations Unies surl’environnement et le développement qui se déroula en juin 1992 à Rio fut marquéepar l’adoption de 27 principes et 2500 recommandations liés au développement durable,un véritable Programme d’actions pour le XXI° siècle. Parmi ces préconisations figurela mise en place d’Agendas 21 par les collectivités locales. Ces programmes d’actionslocales doivent permettre de répondre à des objectifs d’équité sociale et d’amélioration del’environnement, des objectifs de démocratisation des modes de prise de décision au niveaulocal et des objectifs de solidarité, traduits par l’application des principes de précautionou de subsidiarité, lequel permet de traiter les problèmes à l’échelon pertinent. Plus de300 démarches d’Agenda 21 ont été initiées en France par les collectivités locales9. Parmices programmes d’actions en faveur du développement durable, nombreux sont ceux quiintègrent un volet relatif aux achats publics.

En effet les achats des pouvoirs adjudicateurs représentent un marché estimé à 137milliards d’euros en 2003, soit environ 15 % du Produit Intérieur Brut10. Les pouvoirsadjudicateurs sont définis à l’article 2 du Code des Marchés Publics paru au décret n

° 2006-975 du 1er août 2006, comme l’État et ses établissements publics autres queceux ayant un caractère industriel et commercial, les collectivités territoriales et lesétablissements publics locaux. Leurs achats sont des achats publics ; pour cela, lespouvoirs adjudicateurs doivent passer des marchés publics, régis par le Code du mêmenom et définis par celui-ci comme « les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirsadjudicateurs définis à l’article 2 et les opérateurs économiques publics ou privés pourrépondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures et de services ». Par leurimportance économique et en tant qu’outil contractuel, les achats publics apparaissentdonc comme un puissant levier pour intégrer le développement durable. De tels achats

8 Yves JÉGOUZO, La Constitution et l’environnement, Quelques réflexions sur le projet de charte de l’environnement, Cahiersdu Conseil Constitutionnel n° 15, Éditions Dalloz-Sirey, 2004. 178 p

9 Site portail des démarches Agenda 21 en France [7]10 http://www.minefi.gouv.fr/directions_services/daj/oeap/analyse_economique/

analyse_economique_commande_publique.html [7]

INTRODUCTION

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sont dits durables si leurs effets sur la santé humaine ou encore sur l’environnement sontmoindres ou sont réduits en comparaison des produits ou des services concurrentielsqui répondent aux mêmes besoins. Un produit durable comporte au moins une descaractéristiques suivantes : il est recyclable, biodégradable, son emballage est minimal, iloptimise l’utilisation des ressources, son contenu et l’utilisation de substances toxiques dansle cadre de la production sont minimaux, sa fabrication favorise la lutte contre l’exclusion etle chômage… Il existe différentes déclinaisons des achats publics durables en fonction dudomaine du développement durable pris en compte. Ainsi les achats verts contiennent unedimension environnementale, tandis que la commande publique socialement responsablese préoccupe des droits sociaux et des conditions de travail ; on parle encore d’achatsécoresponsables, d’achats éthiques, équitables, solidaires… Il s’agit là de dépasser l’aspectglobalement consumériste de l’achat public pour s’inscrire dans une démarche considéréecomme plus citoyenne de l’achat.

Néanmoins l’adéquation entre marchés publics et développement durable ne va pasde soi : au niveau international, les Accords sur les Marchés Publics, qui font partie desAccords de l’Organisation Mondiale du Commerce, ne mentionnent pas le développementdurable. Le préambule de ces Accords sur les Marchés Publics fait cependant référenceau sixième considérant du préambule des Accords de l’OMC, qui reconnaît la nécessitéd’agir conformément aux principes de développement durable et de protéger et préserverl’environnement. Le développement durable n’apparaît donc qu’indirectement dans lesaccords internationaux relatifs à la commande publique. En droit interne, sous l’empiredu Code des Marchés Publics issu du décret n°66-887 du 28 novembre 1966 relatif auxcollectivités locales modifiant et complétant le décret n° 64-729 du 17 juillet 1964 portantcodification des textes réglementaires relatifs aux marchés publics pour l’État, l’adjudicationétait purement économique. Quoique la notion de développement durable fût apparuesous le règne de ce Code, aucun de ses articles ne faisait référence à l’environnementou à des aspects sociaux dans les marchés publics. L’entrée en vigueur d’un nouveauCode des Marchés Publics instauré par le décret n° 2001-210 du 7 mars 2001 était avanttout une réponse aux exigences de simplification et de sécurisation juridique des achatspublics. L’échec de la mise en application de ce Code au regard de ses ambitions (seuilsd’application trop rigides, nomenclature des achats inadaptée…) a entraîné la rédactiond’un nouveau texte. Le Code des Marchés Publics issu du décret 2004-15 du 7 janvier 2004fut une réponse temporaire jusqu’à l’entrée en vigueur du Code des Marchés Publics 2006,lequel permet la mise en conformité du droit français au regard du droit communautaire. Lanécessaire transposition des directives 2004/17/CE du 31 mars 2004 portant coordinationdes procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, destransports et des services postaux et 2004/18/CE du 31 mars 2004 relative à la coordinationdes procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de servicesavait de fait révélé des inadaptations sensibles du Code des Marchés Publics 2004. Le Codedes Marchés Publics 2006 comprend ainsi les nouveautés apportées par les directives :nouvelles procédures, dématérialisation et possibilités de formuler les besoins sous la formede spécifications techniques.

Quid du développement durable ? Si la nécessité d’adopter de nouveaux textes relatifsà la commande publique trouve ses sources dans l’obsolescence des règles applicables, lesnouvelles versions ont été néanmoins l’occasion d’intégrer au cadre juridique des marchéspublics des éléments de prise en compte du développement durable. Il n’en reste pas moinsque le développement durable ne fait pas partie des règles fondamentales de la commandepublique, voire s’y oppose. Aussi, la priorité pour les pouvoirs adjudicateurs est l’efficacitéde leurs achats publics et la bonne gestion des deniers publics. Le dernier Code des

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Marchés Publics, comme les directives communautaires, ont mis en place des procédureset des obligations légales pour atteindre ces objectifs. Le développement durable, s’il setraduit par une atteinte à la libre concurrence, peut par conséquent entrer en contradictionavec les trois grands principes d’origine communautaire de la commande publique quesont la liberté d’accès aux marchés publics, la transparence des procédures et l’égalitéde traitement des candidats. Des achats durables doivent donc être compatibles avec cesprincipes d’inspiration économique, et non l’inverse : le développement durable n’est pasune finalité en soi. Pourtant, relativement à l’importance des montants des achats publicset aux engagements internationaux, subsiste une ambigüité que ne lève pas l’article 6de la Charte de l’environnement adoptée le 28 février 2005 qui fait obligation à toutesles politiques publiques, y compris les achats publics, de promouvoir un développementdurable et, à cet effet, de concilier la protection et la mise en valeur de l’environnement,le développement économique et le progrès social. Cette charte de l’environnement a étéintégrée au bloc de constitutionnalité, située au sommet de la hiérarchie des normes endroit interne.

Cette ambigüité entre préservation à long terme des conditions et du cadre de vie etlogique de rentabilité immédiate, décisions politiques et volontés sociétales, cadre juridiqueet impératifs économiques, constituera la problématique centrale de ce mémoire : ledéveloppement durable est-il soluble dans les marchés publics ? Ce questionnementrevêt différentes dimensions : comment le Code des Marchés Publics 2006 permet-ilde respecter les principes de développement durable dans les achats publics ? Lesdispositions légales relatives au développement durable dans les achats publics sont-ellescompatibles avec une bonne gestion des deniers publics ? Le Code des Marchés Publics2006 est-il l’aboutissement de la prise en compte du développement durable dans lesmarchés publics ? L’intérêt de tels questionnements n’est pas de trancher sur la place dudéveloppement durable dans les marchés publics ou sur l’efficacité des avantages procuréspar la prise en compte de la protection de l’environnement ou de la promotion du progrèssocial au moment d’une commande publique, mais de montrer quelles sont les margesd’action possibles. A travers ces éléments, il est tout de même possible de donner desindications sur l’opportunité de développer à travers les marchés publics les élémentssociaux, environnementaux et économiques prônés par les défenseurs du développementdurable.

Ainsi, comme cela a déjà été abordé, le droit des marchés publics a connu plusieursbouleversements au cours des dernières années, en droit communautaire comme endroit interne. La dernière évolution, le Code des Marchés Publics 2006, fait une placeparticulière aux enjeux environnementaux et sociaux. Mais ce texte est également le fruitd’une évolution juridique amorcée dès 1988 par la Cour de Justice des CommunautésEuropéennes (CJCE). La prise en compte progressive du développement durable dansle droit des marchés publics (I) qui en a résulté donne aux acheteurs publics la capacitéet la légitimité juridiques de s’engager dans des achats écoresponsables, grâce égalementà des appuis techniques et administratifs. Pourtant, si les marchés publics peuvent, voiredoivent, intégrer le développement durable, de nombreuses difficultés font obstacle à unegénéralisation de l’achat public durable. L’évolution culturelle nécessaire aux modificationscomportementales de l’Administration comme le faible recul par rapport aux démarchesinitiées témoignent de la fragilité de la situation de l’achat écoresponsable. Le chemin versla généralisation de l’achat public durable est encore long (II).

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

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I- La prise en compte progressive dudéveloppement durable dans le droit desmarchés publics

Le cadre juridique des marchés publics a peu à peu laissé entrer le développement durabledans son champ. Non sans mal, notamment en droit interne, où le juge administratif n’affichepas la même volonté que le juge communautaire. Ainsi, c’est par la voie législative quel’intégration du développement durable aux marchés publics a été réalisée, sous l’impulsiondu droit communautaire (A). Les versions successives du Code des Marchés Publics depuis2001 ont été marquées par une prise en compte croissante des aspects environnementauxet sociaux. Le Code des Marchés Publics 2006 est le plus abouti dans ce domaine (B). Lesacheteurs disposent en outre d’outils pour mettre en œuvre le développement durable dansleurs procédures.

A- Des évolutions internes sous l’impulsion du droitcommunautaire

Depuis 1988, la CJCE a consacré la possibilité d’introduire le développement durabledans les marchés publics (1°), d’abord à travers les conditions d’exécution socialesd’un marché, puis en recourant aux critères d’attribution environnementaux. En France,le Code des Marchés Publics ne prévoyait pas le développement durable, et le jugeadministratif a maintenu ce régime (2°). C’est donc par la voie législative qu’ont été introduitsl’environnement et le social dans les marchés, à partir du Code des Marchés Publics paruen 2001 (3°).

1°) L’acception extensive du développement durable dans les achatspublics par la CJCE

L’arrêt Beentjes de 1988 marque l’intronisation, à travers des éléments sociaux, dudéveloppement durable dans le droit de la commande publique (a). Malgré les réticencesde la Commission Européenne (b), la logique de la CJCE s’est traduite par une extensionà l’environnement, et ce à différentes phases d’un achat public (c). Néanmoins, si un critèred’attribution environnemental ou social est possible, des limites d’ordre général encadrentces critères (d).

a- La prise en compte d’aspects sociaux dans les marchés publics : l’arrêtBeentjes de la CJCEEn 1988, la CJCE est amenée à examiner pour la première fois la légalité de l’intégrationd’éléments sociaux dans un marché public. En l’espèce, le ministère de l’agriculture et de

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la pêche des Pays-Bas avait prévu dans un marché de travaux des clauses sociales, visantà promouvoir l’emploi des femmes et à favoriser l’emploi de personnes en situation dechômage de longue durée, pour lesquelle les candidats devaient démontrer leur aptitude.Le pouvoir adjudicateur avait donc privilégié une entreprise capable d’assumer un niveaud’insertion professionnelle élevé. L’entreprise non retenue Beentjes BV, qui proposaitpourtant l’offre la moins disante, avait attaqué la décision du pouvoir adjudicateur en tantqu’elle violait les dispositions de la directive 71/305 du Conseil du 26 juillet 1971 portantcoordination des procédures de passation des marchés publics de travaux. La CJCE étaitdonc conduite à se prononcer sur le caractère légal de l’exclusion d’un soumissionnairepour incapacité de l’entrepreneur d’employer des chômeurs de longue durée.

De fait, la Cour devait répondre à deux questions relatives à l’intégration d’élémentssociaux dans un marché public. L’arrêt du 20 septembre 1988, Gebroeders Beentjes BVcontre État des Pays-Bas, apporte des réponses favorables au développement durable.Tout d’abord, le fondement de l’exclusion de Beentjes BV s’analyse-t-il en une conditiond’exécution ou en un critère d’attribution du marché ? Pour la CJCE, l’obligation d’emploide chômeurs de longue durée correspond à une condition d’exécution, puisqu’« unetelle condition n’a trait ni à la vérification de l’aptitude de l’entrepreneur ni aux critèresd’attribution du marché ». Les conditions d’exécution sont des prescriptions que l’offreproposée doit respecter. En second lieu se posait alors la question de la légalité d’unecondition d’exécution d’un marché public tendant à imposer que les entreprises candidatesemploient des chômeurs de longue durée. La CJCE valide cette hypothèse dans la mesureoù elle respecte les principes fondamentaux posés par le Traité et notamment le principede non discrimination en raison de la nationalité. Cet arrêt consacre donc pour la premièrefois l’intégration du développement durable dans les marchés publics en reconnaissant lecaractère légal de conditions sociales d’exécution.

Néanmoins, les différents commentaires de l’arrêt soulevèrent rapidement desambigüités ; certains, comme la Commission, estimant que le recours à un critèred’attribution environnemental ou social semblait exclu dans les conclusions de la CJCE. Ladistinction entre conditions d’exécution du marché et critères d’attribution est une constantequi représente la difficulté récurrente s’agissant de l’intégration des considérationsenvironnementales ou sociales dans les marchés publics. Les critères d’attribution sont lescritères permettant à l’acheteur public de classer les offres selon qu’elles répondent aumieux aux critères établis et ainsi de choisir l’offre économiquement la plus avantageuse. Uncritère est dit additionnel quand il n’est mobilisé que dans le but de départager deux offreséquivalentes et classées ex aequo après application des critères principaux. Par exemple,dans cette affaire Beentjes, la CJCE a estimé que la condition d’emploi de chômeurs delongue durée était une « condition particulière supplémentaire ». La commission a interprétécette formule comme interdisant le mieux-disant social dans le cadre de l’attribution etlimitant la possibilité d’utiliser cette clause comme une condition d’exécution principale dumarché.

Ce n’est qu’en l’an 2000 que la CJCE précisa sa position et les interprétations à donnersur son arrêt Beentjes de 1988 dans un arrêt du 26 septembre 2000, Commission contreRépublique Française. En l’espèce, la région Nord-Pas-de-Calais et le Département du Nordavaient passé un marché public de travaux relatif à la construction et à la maintenance dedivers bâtiments scolaires incluant un critère lié à la lutte contre le chômage. Parce qu’ils’agissait d’un critère d’attribution et non pas d’une condition d’exécution du marché, eten lien avec son interprétation restrictive de l’arrêt Beentjes, la Commission Européenneavait attaqué la décision de la commission d'appel d'offres. Ce fut donc l’occasion pour la

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CJCE de préciser les conditions d’utilisation des critères d’insertion sociale et d’indiquerle sens à donner à la jurisprudence Beentjes. La CJCE affirme que dans l’arrêt Beentjes,elle n’avait pas interdit le recours à de tels critères, à condition qu’ils soient justifiés parl’objet du marché et accessoires par rapport aux autres critères d’attribution. La CJCEaffirme donc la légalité d’un critère d’attribution à caractère social pour déterminer le choixde l’offre économiquement la plus avantageuse en se référant à sa jurisprudence de 1988.Un tel critère est légal sous réserve du respect des principes fondamentaux du droitcommunautaire et des règles procédurales applicables à la passation des marchés publics.

L’arrêt Beentjes, complété par l’arrêt Commission contre France, est fondateur del’achat public écoresponsable d’un point de vue juridique. Ces deux jurisprudencestémoignent en outre de l’importance de la Cour de Luxembourg dans la légitimation desachats durables comme des divergences avec la Commission Européenne.

b- Les divergences entre la Commission Européenne et la CJCESuite aux arrêts Beentjes et Commission contre France, la Commission Européenne aaffiché des désaccords relatifs à l’intégration du développement durable dans les marchéspublics, notamment sur la portée des critères de sélection sociaux des candidatures et desoffres. Les oppositions entre ces deux institutions communautaires ont toutefois profité àl’achat public durable, par l’affinement de son cadre juridique et par son importance dansles débats de l’Union Européenne. A la différence de la CJCE qui n’est amenée à seprononcer sur les aspects du droit que lors de la survenance d’un litige remontant jusqu’àelle, la Commission Européenne bénéficie d’une certaine liberté pour exprimer sa positionsur l’intégration du développement durable dans la commande publique. Ainsi, dans sonlivre vert « Les marchés publics dans l’Union Européenne » paru en 1997, la Commissionne traite pas directement des achats écoresponsables mais considère que l’ouverture desmarchés publics à la concurrence permet d’obtenir une allocation efficace des denierspublics en assurant les meilleurs résultats possibles en termes de qualité et de coût, touten permettant aux entreprises de tirer profit du marché unique. Cette approche traduit uneconception fondamentalement économique de l’achat public, dans laquelle la concurrence,principe général du droit communautaire, est un moyen et une fin.

Ensuite, dans une communication du 11 mars 1998, la Commission reconnait que« l’objectif d’une utilisation optimale des deniers publics n’exclut pas la prise en compted’aspects d’ordre écologique, social et de protection des consommateurs, ni ne nécessiteune modification des règles actuelles. Il est cependant nécessaire de définir des orientationsprécises sur les possibilités offertes aux organismes acheteurs de prendre en considération,dans leurs procédures de passation de marchés, des critères environnementaux et sociaux,dans le respect des règles communautaires, notamment des principes de transparence etde non discrimination ainsi que des règles sur les marchés publics. De telles orientationssont aussi nécessaires si l’on veut mettre les fournisseurs européens sur un piedd’égalité » : la logique affichée, malgré l’ouverture à l’éventualité de critères d’attributionenvironnementaux ou sociaux, est celle de la subordination du développement durableà la logique de rentabilité et à l’objectif implicite de concurrence effective dans l’UnionEuropéenne. La méfiance affichée de la Commission Européenne est cependant logique auregard des objectifs qui lui sont alors assignés, dont les principaux relèvent de l’économique(gardienne des Traités, garante de la libre concurrence et de l’achèvement du marchéintérieur…). Toutefois, en juin 2001, le Conseil européen, réuni à Göteborg, après examendu rapport de la Commission Européenne « Développement durable en Europe pour unmonde meilleur : stratégie de l'Union européenne en faveur du développement durable »,

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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a mis au point la première stratégie européenne de développement durable, dont le respectincombe à la Commission.

Les différences entre la Commission Européenne et la CJCE sur l’intégration dudéveloppement durable dans le cadre juridique des achats publics se sont toutefoismaintenues par la suite. La Commission Européenne a eu l’occasion d’affirmer une visiontoujours restrictive des achats publics écoresponsables à travers deux communicationsinterprétatives intitulées « Le droit communautaire applicable aux marchés publics et lespossibilités d’intégrer des considérations environnementales dans les dits marchés » et« Le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d’intégrer desaspects sociaux dans lesdits marchés » (Journal Officiel des Communautés Européennen° C333 du 28 novembre 2001). La Commission reconnaît néanmoins dans cescommunications qu’il est possible d’exclure en phase candidature d’un marché public unsoumissionnaire ayant fait l’objet d’une condamnation ayant autorité de chose jugée pournon respect de la législation nationale sur l’environnement ou le droit social. Toutefois,elle exclut certaines modalités de prise en compte du développement durable dans lesmarchés publics. Par exemple, les règles permettant d’évaluer la situation économiqueet financière des candidats ne doivent pas permettre de tenir compte de considérationsenvironnementales ou sociales ; ou encore, la Commission conditionne la validité descritères d’attribution pouvant affecter la valeur d’une offre à leur traduction économique.

La Commission de Bruxelles affiche donc une certaine pusillanimité, en contradictionavec le volontarisme en matière d’achats durables du juge communautaire. Les directives du31 mars 2004 seront l’occasion d’un rapprochement des deux points de vue. Entre temps, laCJCE va étendre sa position des arrêts Beentjes et Commission contre France aux aspectsenvironnementaux des marchés publics.

c- L’extension de la logique communautaire aux aspects environnementauxdes marchés publicsLa jurisprudence de la CJCE avait admis la possibilité de recourir à des conditionsd’exécution ou à des critères de sélection des candidats ou de classement des offresd’inspiration sociale. Les arrêts Concordia Bus Finland et Wienstrom marquent l’extensionde la logique d’intégration du développement durable dans les marchés publics aux aspectsenvironnementaux, mais également la confirmation de la possibilité d’en faire des critèresd’attribution.

Tout d’abord, l’arrêt Concordia Bus Finland Oy Ab de la CJCE en date du 17 septembre2002 peut être analysé comme le pendant environnemental de l’arrêt Beentjes. En l’espèce,le conseil municipal d’Helsinki avait décidé en août 1997 de soumettre progressivement àadjudication l’ensemble du réseau d’autobus urbains de la ville. Selon l’avis de marché, pourchacun des sept lots, trois critères étaient pris en compte pour le jugement des offres : leprix global demandé pour l’exploitation, la qualité du matériel (ici, les autobus) et la gestionpar l’entrepreneur de la qualité et de l’environnement. Le lot n°6 fut attribué à l’entreprisecommerciale municipale de transports, HKL, celle-ci étant considérée globalement commela plus avantageuse sur le plan économique. L’entreprise la moins-disante, Concordia,intenta alors un recours en annulation, en faisant valoir notamment que l’attribution depoints supplémentaires pour un matériel moins polluant en termes d’émissions d’azote etde niveaux sonores inférieurs à certains plafonds (éléments prévus dans le règlement deconsultation) était inéquitable et discriminatoire car un seul soumissionnaire, HKL, avaitla possibilité de proposer des autobus fonctionnant au gaz naturel. Cette affaire relativeà l’intégration d’un critère environnemental pour l’achat de bus d’une collectivité soulevait

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

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plusieurs questions : un tel critère est-il valable ? Si oui, quelles sont les modalités derecevabilité d’un critère environnemental ?

La CJCE confirme la légalité d’un critère relevant du développement durable enappliquant une logique similaire à sa jurisprudence relative aux aspects sociaux d’unmarché. Elle précise par ailleurs qu’un critère environnemental doit être en rapport avecl’objet du marché et doit constituer un moyen de détermination de l’offre économiquementla plus avantageuse, dans le respect des conditions procédurales fixées par les directivesrelatives aux marchés publics en vigueur. C’est le cas en l’espèce selon la CJCE, qui ajouteque ce critère est conforme aux exigences de protection de l’environnement reconnuespar l’Union Européenne. En effet, contrairement aux communications interprétativesdu 28 novembre 2001 de la Commission Européenne, la CJCE estime qu’un critèreenvironnemental ne doit pas obligatoirement revêtir un caractère économique ou présenterun avantage de cette nature. En outre le critère de la gestion par l’entrepreneur de laqualité et de l’environnement n’est pas discriminatoire dans ce cas, puisqu’il n’élimine pas laconcurrence et ne confère pas une liberté inconditionnée de choix au pouvoir adjudicateur.En effet, l’entreprise requérante, Concordia, a obtenu un autre lot mis en concurrenceau cours de cette procédure, nonobstant l’exigence explicite de véhicules fonctionnant augaz. Les liens entre HKL, entreprise commerciale municipale, et le pouvoir adjudicateur nesont donc pas de nature à restreindre la concurrence ou à conférer à ladite entreprise unavantage concurrentiel décisif.

L’arrêt Concordia Bus Finland légitime donc la prise en compte pour l’attribution d’unmarché public de la santé de la population à moyen ou à long terme, dont l’évaluationéconomique ne peut être ni immédiate ni limitée au territoire d’exécution du marché.Cette conception élargie de l’offre économiquement la plus avantageuse offre donc auxpouvoirs adjudicateurs la liberté d’introduire dans leurs appels d’offres des critères qui nesont pas expressément mentionnés par les directives, qui ne présentent pas une naturepurement économique et qui servent l’intérêt général. La CJCE sera amenée à préciserles éléments de validité d’un critère d’attribution estampillé développement durable dansl’arrêt Wienstrom (CJCE, 4 décembre 2003, EVN AG et Wienstrom GmbH contre RepublikÖsterreich).

En l’occurrence, la question était de savoir si l’utilisation d’un critère d’attributionexigeant la fourniture d’électricité d’origine renouvelable est autorisée pour le choix de l’offreéconomiquement la plus avantageuse. Le critère en cause était affecté d’un coefficientde 45 % et exigeait du soumissionnaire, sans imposer de date de fourniture déterminée,qu’il indique la quantité d’électricité produite à partir de sources d’énergies renouvelablesqu’il serait en mesure de fournir à une clientèle non déterminée. La quantité la plusimportante proposée devait bénéficier du maximum de points, et seule était prise en comptela fraction dépassant la consommation prévisible dans le cadre de l’appel d’offres. Parmi lesproblématiques auxquelles la Cour était confrontée figurent la légalité de ce critère et cellesous-jacente de la validité d’un critère relatif à la préservation de l’environnement et doncne procurant pas un avantage immédiat. Dans la continuité de la jurisprudence ConcordiaBus Finland, le juge communautaire répond par l’affirmative à ces questions : de manièregénérale, un critère d’attribution environnemental est donc valable quand bien même ilne procure pas un avantage susceptible d’évaluation économique immédiate. Mais un telcritère ne doit pas conférer au pouvoir adjudicateur une liberté inconditionnée de choix etdoit respecter les principes applicables aux critères d’attribution.

Dans un second temps, la CJCE était invitée à examiner la validité de l’applicationd’un coefficient de 45 % pour un critère environnemental. La Cour assortit sa réponse

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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favorable d’une limite. La pondération des critères ne doit pas entraver le choix par lepouvoir adjudicateur de l’offre économiquement la plus avantageuse : créditer le critèreenvironnemental d’une importance de l’ordre de 45 % ne doit pas empêcher une évaluationsynthétique des critères d’attribution. Mais en constatant que la Communauté Européenneattache une importance particulière à la préservation de l’environnement et notamment à laréduction des émissions de gaz à effet de serre en prônant le recours aux énergies d’originerenouvelable11, la CJCE reconnaît que le niveau de la pondération est dans ce cas justifié.Le juge communautaire accepte donc que l’acheteur puisse faire un achat plus coûteux pourun service rendu rigoureusement identique (ici, la fourniture d’électricité) sans que l’offreretenue ne lui apporte un quelconque bénéfice directement appréciable sur son territoire.

Cela revient-il à valider tout critère d’intérêt général qui serait justifié par l’importanceaccordée à son objet par les politiques communautaires ?12 La question reste ouvertemême si la CJCE n’a aucunement sous-entendu une telle possibilité. Le rôle des critèresd’attribution n’est pas de mettre en œuvre des politiques communautaires ou autres maisde déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse, c’est-à-dire celle répondantle mieux aux besoins définis par le pouvoir adjudicateur. Sans aller jusqu’à subordonnerla validité d’un critère à son objet en lien avec un objectif d’intérêt général ou d’originepolitique, la jurisprudence de la CJCE traduit un détachement des marchés publicsd’une logique trop économique prônée par la Commission Européenne : la dimensionimmédiatement économique d’un critère n’est pas une condition de validité. Le choix d’uncritère environnemental ainsi que sa pondération sont libres dès lors qu’ils concourent auchoix de l’offre économiquement la plus avantageuse.

Une question subsidiaire relative au critère de la fourniture d’électricité d’originerenouvelable était également soumise à l’appréciation de la Cour : un critère imposantaux soumissionnaires de fournir davantage d’électricité issue d’énergies renouvelables quenécessaire pour la stricte exécution du marché est-il légal ? La réponse de la CJCE surce point est sans équivoque. Un tel critère ne peut être valide car il ne correspond pas àl’objet du marché qui est la seule quantité d’énergie nécessaire au pouvoir adjudicateur.L’attribution de points en fonction d’une production supplémentaire est sans rapport avecl’objet précis du marché. Cela revient en outre à favoriser les entreprises ayant une capacitéde production plus importante, sans toutefois que cette importance soit nécessaire à lasatisfaction des besoins de l’acheteur public. Le critère crée donc une discrimination et neconcourt pas à la satisfaction du besoin défini par le pouvoir adjudicateur.

Cette dernière réponse du juge communautaire apporte des éléments sur les conditionsde validité des critères d’attribution des marchés publics. La jurisprudence de la CJCE estétoffée sur ce sujet, et soumet les critères environnementaux et sociaux à un corpus derègles relevant du droit commun.

d- Les critères de développement durable, des critères comme les autresLa CJCE a eu l’occasion de préciser les conditions d’utilisation de clauses et de critèresrelevant du développement durable dans les marchés publics. Il ressort du processusjurisprudentiel que les critères doivent être liés à l’objet du marché, qu’ils ne doivent pas être

11 « (…) C’est précisément dans cette perspective que la directive 2001/77 vise à favoriser, par l’utilisation de la puissancedes forces du marché, une augmentation de la contribution des sources d’énergie renouvelables dans la production d’électricité surle marché intérieur, objectif qui, selon son deuxième considérant, se situe au premier rang des priorités de la Communauté »

12 GUILLOU Yves-René et son équipe de droit public des affaires et de la régulation. Environnement et marchés publics :évolution des modalités juridiques d’intégrations des considérations environnementales dans les marchés publics. p. 12 à 16 [6.2.1].

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

Frédéric Pichon - 2007 17

discriminatoires et ne pas conférer au pouvoir adjudicateur une liberté de choix exagérée,afin de respecter les principes généraux du droit de la commande publique. Ces élémentsde validité sont strictement identiques, et ce quelle que soit la nature du critère d’attribution.Néanmoins, la jurisprudence relative aux critères environnementaux et sociaux a pu êtrel’occasion de consolider le cadre juridique des critères d’attribution des marchés publics.

Tout d’abord, l’arrêt de la CJCE du 28 mars 1985, Commission contre Italie, consacre lerôle des acheteurs publics : le pouvoir adjudicateur doit disposer d’une certaine liberté pourapprécier les offres soumises et prendre une décision sur la base de critères d’attributionquantitatifs et qualitatifs variables et adaptés en fonction des caractéristiques du marchéen question. La reconnaissance de la pluralité et de la diversité des critères constitue unepremière remise en cause de l’hégémonie du seul critère « prix » dans le droit des marchéspublics.

L’affaire SIAC Construction Ltd contre County Council of the Country of Mayo, examinéepar la CJCE le 18 octobre 2001, est le prétexte à une question préjudicielle : lescritères pouvant être retenus à titre de critères d’attribution d’un marché public à l’offreéconomiquement la plus avantageuse sont-ils énumérés de manière limitative par lesdirectives sur les marchés publics ? Le juge communautaire précise sa position : dès lorsqu’est employée l’expression « par exemple », les possibilités de critères d’attribution nesauraient se réduire aux seuls cas cités par les directives. Un pouvoir adjudicateur peut doncfixer des critères visant à obtenir des avantages non susceptibles d’évaluation objectiveimmédiate, notamment des critères n’étant pas de nature purement économique, commeles critères environnementaux et sociaux.

Une autre modalité de validité des critères est le lien avec l’objet du marché. Cettecondition est essentielle et a été rappelée maintes fois par le juge communautaire. L’arrêtCJCE du 19 juin 2003 Gesellschaft für Abfallentsorgungs – Technik GmbH (GAT) contreÖsterreichische Autobahnen und Schnellstraben AG (ÖSAG) fut l’occasion de reprendreles différents éléments énoncés au fil des arrêts Beentjes, Commission contre France,Concordia Bus Finland, Wienstrom, SIAC… En conséquence, les critères d’attributionne doivent pas conférer au pouvoir adjudicateur une liberté inconditionnée de choix ;ils doivent être expressément mentionnés soit dans l’avis de marché soit dans le cahierdes charges, comme l’a confirmé l’arrêt CJCE du 16 octobre 2003 Traunfeller GmbHcontre Österreichische Autobahnen und Schnellstraben-Finanzierungs-AG ; ils doiventenfin respecter tous les principes fondamentaux du droit communautaire et notamment leprincipe de non discrimination. Outre le lien avec l’objet du marché, les limites des critèresd’attribution résultent du principe selon lequel la procédure d’adjudication d’un marché publicdoit respecter à tous les stades tant le principe d’égalité de traitement des soumissionnairespotentiels que le principe de transparence, afin que tous les opérateurs économiquesdisposent des mêmes chances dans la formulation et l’examen des termes de leurs offres(CJCE, 12 décembre 2002, Universale-Bau).

D’autres conditions subsidiaires de recevabilité d’un critère ont été dégagées par ladoctrine13. Les critères doivent être compris de la même manière par le pouvoir adjudicateuret par tous les candidats à la consultation en respect du principe d’intelligibilité. De plus,les critères constituent une aide à la sélection non discriminatoire : ils doivent être sélectifset permettre de classer les offres. En outre, l’exhaustivité des critères garantit une libreconcurrence et permet au pouvoir adjudicateur de juger les offres en fonction de sespropres exigences. Enfin, la doctrine a mis en avant la non-redondance des critères :deux critères ne doivent pas avoir pour objet d’évaluer les offres sur des caractéristiques

13 JACOB Maxime, RAVENEL Pierre, Le choix des offres : critères, pondération, évaluation. Contrats Publics n°67 p.55 [3.3.2]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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similaires. L’ensemble de ces conditions est donc applicable aux critères environnementauxou sociaux, au même titre que des critères quantitatifs ou qualitatifs (esthétique des produitspar exemple).

Conditions d’exécution du marché, critères de sélection des candidatures et de choix del’offre économiquement la plus avantageuse, aspects environnementaux comme sociaux :la jurisprudence communautaire est venue étayer la possibilité d’intégrer le développementdurable dans les marchés publics. Le droit interne a de son côté débuté sa mutation en2001, après des années de refus jurisprudentiel.

2°) Le développement durable sous l’empire du Code des MarchésPublics de 1966

Nonobstant les évolutions du droit communautaire, le juge administratif français s’esttoujours montré réservé sur l’intégration du développement durable dans les marchéspublics, sous l’empire du Code des Marchés Publics de 1966 (b). Le dogme de la neutralitéde la commande publique (a) en est la principale explication.

a- Une incompatibilité a priori entre développement durable et commandepubliqueL’irruption du développement durable dans les marchés publics a remis en cause certainsprincipes du droit de la commande publique au niveau communautaire, avec par exemple lapossibilité de prévoir des critères d’attribution insusceptibles d’une évaluation économiqueimmédiate. En France, le cadre juridique de la commande publique a jusqu’en 2001 étéinfluencé par le décret n°66-887 du 28 novembre 1966 relatif aux collectivités localesmodifiant et complétant le décret n° 64-729 du 17 juillet 1964 portant codification destextes réglementaires relatifs aux marchés publics pour l’État. Malgré de nombreusesévolutions (loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ; l oi n°85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapportsavec la maîtrise d'œuvre privée ; loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparenceet à la régularité des procédures de marché et soumettant la passation de certainscontrats à des règles de publicité et de mise en concurrence ; loi n° 93-122 du 29janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vieéconomique et des procédures publiques…), la philosophie originelle était celle del’attribution du marché à l’offre économiquement la moins disante.

Ainsi, l’article 84 du Code des Marchés Publics de 1966 énonçait : « Laprocédure des marchés passés par adjudication comporte une ouverture des offreset une attribution provisoire du marché en séance publique. La personne responsabledu marché doit fixer un prix maximum au-delà duquel aucune attribution ne peut êtreprononcée. L'attribution provisoire du marché est faite au moins disant s'il a été reçuau moins une offre répondant aux conditions de l'adjudication ». Ce principe del’adjudication s’oppose à toute prise en compte de critères extra-financiers pour le jugementdes offres : le Code des Marchés Publics de 1966 n’intégrait d’ailleurs aucunemention relative aux piliers de ce qui n’était pas encore appelé développementdurable. Le principe même de développement durable est en effet relativement récent.Toutefois aucune considération environnementale ou sociale n’était envisagée sous l’empiredu Code des Marchés Publics 1966, même après la jurisprudence Beentjes.

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

Frédéric Pichon - 2007 19

L’attribution d’un marché public par adjudication rejoint le principe de neutralité de lacommande publique. Cette neutralité revêt deux dimensions : d’une part elle se traduit parl’absence d’un quelconque intérêt de l’acheteur public, celui-ci ne devant pas entretenir derelations privilégiées avec des opérateurs économiques susceptibles de soumissionner àdes marchés publics relevant de cet acheteur (cette acception prévaut encore) ; d’autre part,la neutralité des achats publics, dans une logique capitaliste-libérale remontant au débutdu XX° siècle, correspond à l’absence d’orientation économique, seuls pouvant être prisen compte dans une consultation des critères de sélection des offres justifiés par l’objetdu marché et lui seul. La neutralité de la commande publique prohibe donc tout critère nepermettant pas une évaluation objective immédiate des offres. Sous cet aspect, ce principes’oppose donc à toute introduction du développement durable dans les marchés publics.Ainsi, un décret du Président Millerand du 10 août 1899 imposait d’insérer dans les marchéspublics des clauses relatives aux conditions de travail, concernant notamment le reposhebdomadaire (on parlerait de nos jours de commande publique socialement responsable).Ce décret ne fut jamais mis en œuvre.

La neutralité dans son premier sens résulte notamment du principe d’égalité detraitement des candidats, consacré en droit communautaire par l’arrêt CJCE du 3 décembre2001, Bent Mousten Vestergaard contre Spottrup Boligselskab. En conséquence, toutemesure de discrimination ou de préférence en faveur de catégories de soumissionnairesdéfavorisés apparaît illégale, tout comme la prise en compte de critères environnementauxou sociaux pour la sélection des candidatures et des offres. Ce principe a été affirmé par leConseil d’État dans un arrêt Société Wanner Isofi Isolation du 13 mai 1987.

b- L’inflexibilité du juge administratifDans un cadre juridique peu propice au développement durable, le juge administratiffrançais n’a pas fait preuve de velléités d’ouverture à l’environnement et au social dans lesmarchés publics.

L’arrêt Société Wanner Isofi Isolation du 13 mai 1987 est éloquent : dans sesconclusions, le Conseil d’État affirme que « l’achat public ne doit satisfaire d’autre butque celui de la satisfaction aux meilleures conditions des besoins de l’acheteur ».Cette interprétation laisse peu de place aux aspects non économiques. Un an avant lajurisprudence communautaire Beentjes, les orientations du droit administratif français sontdonc sensiblement divergentes. La jurisprudence inflexible du Conseil d’État trouve uneautre référence avec l’arrêt FFB / FNTP du 10 mai 1996. En l’espèce, une circulaireinterministérielle du 29 décembre 1993 autorisait l’insertion d’un critère additionnel relatif à lacréation d’emplois et à la formation professionnelle en sus des critères d’attribution visés parles articles 97 et 300 du Code des Marchés Publics alors en vigueur. Pour aussitôt préciser :« La qualité de l’offre relative au critère additionnel d’emploi et de formation de demandeursd’emploi ne peut, en elle-même, compenser des garanties techniques ou financières nonsatisfaisantes, une offre insuffisamment adaptée aux besoins exprimés par la collectivitépublique ou un prix inférieur à celui d’un concurrent. Les propositions qui pourraient êtrefaites à ce titre ne sauraient favoriser un candidat par rapport à d’autres entreprises quiauraient présenté des offres équivalentes, notamment au regard du critère du prix et de laqualité technique de la prestation »14. Ce critère additionnel ne pouvait donc pas influer surle choix de l’offre retenue.

14 Point « III- Mise en œuvre des nouveaux critères b- Modalités d’application de ce critère » de la circulaire.

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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Saisi d’une demande d’annulation de la circulaire par les fédérations du bâtiment etdes travaux publics, le Conseil d’État considéra que les dispositions attaquées « constituentune simple déclaration d’intentions, destinée à marquer l’intérêt porté par les cocontractantsaux questions relatives à l’emploi et à la formation professionnelle sans que cettedéclaration d’intentions puisse constituer un critère de choix qui se substituerait auxcritères réglementaires des articles 97 et 300 du Code des Marchés Publics, ou même sebornerait à compléter ces critères réglementaires ». La circulaire n’est donc pas impérative.L’introduction de ce critère, qui n’en est pas un, représente donc une manifestation del’intention de l’acheteur public d’encourager les propositions des candidats en matièresociale. Il convient de noter que dans ses conclusions, le commissaire du gouvernementavait déclaré qu’utiliser tout autre objectif qu’économique dans les marchés publics pouvaitconstituer une erreur de droit15.

Une autre illustration de cette réserve en droit interne concerne le refus de l’utilisationd’un critère d’attribution à caractère social. Dans un jugement du 30 novembre 1999, affairePréfet du Bas-Rhin contre Communauté Urbaine de Strasbourg, le Tribunal Administratif deStrasbourg était amené à se prononcer sur un règlement de consultation d’un marché denettoyage et de balayage prévoyant explicitement un critère autonome lié à la présentationd’un mémoire de démarche d’insertion professionnelle. Ce critère est jugé illégal dans lamesure où le lien avec l’objet du marché ou ses conditions d’exécution est insuffisant. Etce, « quand bien même l’objet du marché se prête assez bien à une démarche d’insertionprofessionnelle dans la mesure où le niveau de qualification requis pour l’exécution destâches est relativement facile à atteindre ».

La jurisprudence Commune de Gravelines du 25 juillet 2001 marque un tournantdans la position jusqu’alors intangible du juge du Palais-Royal et par conséquent desdifférents juges administratifs de l’ordre juridique. Dans le cas présent, un marché detravaux relatif à la réhabilitation d’une décharge sur la commune de Gravelines prévoyaitdans son règlement de consultation un critère relatif aux propositions en matière decréation d’emplois, d’insertion et de formation professionnelle. Malgré les évolutions endroit communautaire (notamment les arrêts Beentjes et Commission contre France), leConseil d’État a jugé que « la commune ne pouvait légalement retenir, pour apprécierles offres des entreprises, un critère de sélection relatif aux propositions faites par lessoumissionnaires en matière de création d’emplois, d’insertion et de formation », avant depréciser que les critères d’attribution, quels qu’ils soient, doivent être en rapport avec l’objetdu marché ou ses conditions d’exécution. Les conclusions (toutes n’ont pas été suivies)du Commissaire du gouvernement Denis Piveteau allaient plus loin et ne laissaient pasentrevoir une quelconque inflexion du droit national : « la dépense publique qui s’effectue àl’occasion d’un marché ne doit pas être l’instrument d’autre chose que de la réalisation dumeilleur achat au meilleur coût »16. La position du juge administratif est certes plus souple,puisque l’interdiction d’un critère social de sélection des offres n’est pas formelle, mais ledécalage avec le droit communautaire est prégnant. Se pose alors la question de savoir si uncritère social peut entretenir un rapport suffisant avec l’objet du marché quand celui-ci n’estpas expressément social, situation pour laquelle le juge français reconnaît la validité d’uncritère de cette nature. De ce point de vue la jurisprudence française incite à la prudence,comme le démontre cet arrêt Commune de Gravelines.

15 Droit des marchés publics. Éditions du Moniteur. Point III.430.2 p. 31 [1]16 Ibid. p. 34

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

Frédéric Pichon - 2007 21

A l’aube du Code des Marchés Publics 2001, le cadre juridique de la commandepublique, notamment la jurisprudence nationale, est donc peu enclin à l’achat publicécoresponsable. La nécessité d’une réforme par voie législative en est l’ultime illustration.

3°) Le Code des Marchés Publics 2001 : les prémices pour des achatspublics durables

La réforme du décret n° 2001-210 du 7 mars 2001 portant Code des Marchés Publicsmarque l’intronisation du développement durable dans le cadre de la commande publiquenationale (b). Les enjeux économiques et environnementaux liés aux marchés publics sonten effet majeurs (a).

a- Les marchés publics, supports du développement durableL’utilisation des marchés publics comme levier pour le développement durable est légitiméepar les potentialités offertes par la puissance financière des achats publics. Les différentescontroverses juridiques n’auraient pas atteint de telles proportions si l’enjeu avait été mineur.Les marchés publics, de par leur importance, peuvent être un moyen de favoriser ledéveloppement durable de la société.

Ainsi, la Commission Européenne estime pour l’année 2002 à environ 1500 Milliardsd’euros (soit plus de 16 % du PIB de l’Union Européenne) le montant total des achatspublics17. Par ailleurs, 80 % des achats des collectivités ont une incidence sur le marchélocal18 donc les marchés publics sont un moyen d’inciter les opérateurs économiques àdéployer une stratégie tenant compte du développement durable, par l’utilisation de clausesou de critères écologiques ou sociaux. En outre, la Commission Européenne a cofinancé unprojet de recherche ayant pour but d’évaluer scientifiquement les avantages potentiels pourl’environnement de l’adoption à grande échelle de marchés publics écologiques à traversl’Union Européenne19.

Il en ressort que si tous les pouvoirs publics à travers l’Union Européenne sefournissaient en électricité dite verte, cela permettrait d’économiser l’équivalent de 60millions de tonnes de CO2, soit 18 % de l’engagement de l’Union Européenne en faveurde la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le cadre du protocole deKyoto. L’économie serait pratiquement du même ordre si les pouvoirs publics optaient pourdes bâtiments à Haute Qualité Environnementale (HQE®). Dans la même logique, cetteétude démontre que si tous les pouvoirs publics à travers l’Union Européenne s’équipaientd’ordinateurs à plus faible consommation énergétique, incitant ainsi l’ensemble du marchéà faire de même, il en résulterait une économie de 830 000 tonnes de CO2. En outre, sitous les pouvoirs publics européens optaient pour l’installation de toilettes et de robinetsefficaces dans leurs bâtiments, la consommation d’eau serait réduite de 200 millions de m³(soit 0,6 % de la consommation totale des ménages dans l’Union Européenne). Bien queces estimations soient basées sur des hypothèses assez improbables à moyen terme, ellessont une démonstration de l’utilité des achats publics. Les marchés publics peuvent doncêtre un support du développement durable, et dans la mesure où les pouvoirs publics se

17 COMMISSION EUROPEENNE, Acheter vert ! Un manuel sur les marchés publics écologiques. P.5-6 [6.4]18 AGENCE REGIONALE POUR L’ENVIRONNEMENT ET LE DEVELOPPEMENT SOUTENABLE EN BOURGOGNE. Guide

pour les achats écoresponsables de fournitures. Décembre 2006. P.1 [6.3]19 COMMISSION EUROPEENNE, op. cit. p.5 [6.4]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

22 Frédéric Pichon - 2007

sont donnés comme priorité d’agir en faveur de l’environnement aux niveaux internationauxet européens, la commande publique constitue un des moyens d’action directe les pluspuissants.

Le recours aux achats publics comme support du développement durable peutégalement se traduire par des externalités positives pour les pouvoirs adjudicateurs. De fait,les achats verts sont des achats de qualité dont l’équilibre économique intègre l’ensembledes coûts prévisibles à moyen et à long termes. Ils s’opposent donc à tous les achats dontl’objectif se limite à la dépense immédiate et qui s'avèrent générateurs de surcoûts pourla collectivité publique au cours de leur utilisation. Ces surcoûts s’entendent en termes demauvaise qualité des prestations, d’avenants en matière de construction, de dommages etde pollutions, de fiabilité des entreprises qui rendent le service après-vente impossible ouencore d’infractions au droit du travail, etc. Les achats durables incitent donc à une bonnegestion des deniers publics.

Malgré ces avantages et une évolution de la jurisprudence communautaire, il aura falluattendre 2001 pour voir le développement durable intégrer le droit de la commande publiqueen France.

b- Une ouverture timorée au développement durable dans le texteL’entrée en vigueur définitive du Code des Marchés Publics 2001 en septembre 2001, sixmois après sa parution au Journal Officiel, s’accompagne de multiples bouleversementspour les acheteurs publics. Parmi ces changements, un seul concerne les achats publicsdurables. Il s’agit de l’article 14 : « La définition des conditions d'exécution d'un marché dansles cahiers des charges peut viser à promouvoir l'emploi de personnes rencontrant desdifficultés particulières d'insertion, à lutter contre le chômage ou à protéger l'environnement.Ces conditions d'exécution ne doivent pas avoir d'effet discriminatoire à l'égard descandidats potentiels ». L’acheteur public peut ainsi imposer un comportement déterminé àson cocontractant à travers les conditions d’exécution du contrat. L’ouverture au social et àl’environnemental est cependant limitée : un pouvoir adjudicateur pouvait exiger du titulairedu marché qu’il utilise des procédés de fabrication respectant des normes antipollution,mais ne pouvait pas déclarer un candidat vainqueur d’un appel d’offres au motif que sonoffre était écologiquement meilleure20. D’autre part, seules sont concernées dans ce Codedes Marchés Publics les clauses d’exécution, alors que la jurisprudence communautaire ad’ores et déjà légalisé les critères d’attribution sociaux.

Une ordonnance du tribunal administratif de Montpellier en date du 31 juillet 2001considérait cependant que « les travaux devant se dérouler dans une zone écologiquementsensible, le maître de l’ouvrage pouvait légalement insérer, dans le règlement de laconsultation, un critère additionnel de sélection des entreprises imposant à ces dernièresde préciser les mesures qu’elles entendaient prendre en ce qui concerne la protectionde l’environnement, lequel présente en l’espèce, tant avec l’objet du marché qu’avec sesconditions d’exécution, un rapport suffisant au sens des dispositions sus-rappelées del’article 53-2 du Code des Marchés Publics ». La combinaison de l’article 14 et de l’article53 relatif aux critères de choix des offres du Code des Marchés Publics 2001 constituaitdans cette perspective un premier pas vers la reconnaissance du critère environnementaldans les marchés publics. En effet, l’article 53 admet les critères additionnels justifiés par

20 CHABANOL Daniel, JOUGUELET Jean-Pierre, BOURRACHOT François. Droits et obligations des signataires des marchés detravaux. Collection analyse juridique. 2005. p.194 [1]

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

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l’objet du marché ou ses conditions d’exécution, qui peuvent être d’ordre environnementalcomme le précise l’article 14.

De facto, les considérations sociales ont des conséquences plus rigoureuses etautomatiques lorsqu’elles sont intégrées aux conditions d’exécution. En effet, en tant quecritères de choix, la pondération ou la hiérarchisation peut en atténuer l’importance. Lesystème des clauses d’exécution est donc plus brutal que la mise en œuvre des critèresd’attribution : l’entreprise est éliminée dès lors qu’elle ne répond pas au cahier des charges,soit qu’elle n’y réponde pas du tout, soit qu’elle n’y réponde pas suffisamment, sans queson offre, irrecevable parce que non conforme, ne soit examinée par les organes du pouvoiradjudicateur. Le respect de clauses environnementales ou sociales rend l’offre conforme,mais le degré d’engagement d’une entreprise ne fait pas l’objet d’une valorisation pour lechoix de l’offre économiquement la plus avantageuse.

Le Code des Marchés Publics 2001 représente donc une ouverture timorée audéveloppement durable. Mais la dynamique de l’achat écoresponsable est dès lorsenclenchée. L’influence du droit communautaire fait son œuvre, malgré les réticences dujuge français. Cet ascendant européen va se poursuivre à travers les directives marchéspublics de 2004. Mais le droit interne connaît également une mutation rapide, avec deuxnouveaux Codes des Marchés Publics porteurs du développement durable.

B- Les Codes des Marchés Publics 2004 et 2006 : lesprogrès de l’intégration du développement durableaux marchés publics

La prise en compte progressive du développement durable dans le droit interne de lacommande publique connaît deux étapes majeures en seulement trois ans. Tout d’abord leCode des Marchés Publics 2004 développe les possibilités pour les pouvoirs adjudicateursde procéder à des achats écoresponsables (1°). Le Code des Marchés Publics version 2006poursuit le processus (2°), dans un contexte favorisé par les premiers retours d’expérienceset les affichages politiques en faveur de l’achat public durable (3°).

1°) Le Code des Marchés Publics 2004 sous le sceau des directivescommunautaires

Le Code des Marchés Publics paru en janvier 2004 consacre plusieurs articles audéveloppement durable (b), en tentant de transposer par anticipation les dispositions desdirectives communautaires du 31 mars de la même année (a). Après sa parution, ce Codedes Marchés Publics connaîtra des apports en matière d’achats écoresponsables (c).

a- Les directives communautaires du 31 mars 2004Les positions parfois contradictoires de la CJCE et de la Commission Européenne trouventun terrain d’entente avec les directives marchés publics du 31 mars 2004. L’impulsiondu droit communautaire en matière d’achats publics durables en sort renforcée, même sisubsistent certains questionnements.

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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Ces textes communautaires ne sont pas créés ex nihilo. Les directives 92/50/CEE,93/36/CEE et 93/37/CEE couvrant respectivement les achats de fournitures, services,travaux sont abrogées et refondues en un seul texte, tandis que les secteurs spéciauxencadrés par la directive 93/39/CEE portant sur la coordination des procédures depassation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et destélécommunications font l’objet d’un traitement différencié. Désormais, le droit des marchéspublics fait référence aux directives 2004/17/CE du 31 mars 2004 portant coordinationdes procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, destransports et des services postaux, dite directive secteurs spéciaux, et 2004/18/CE du 31mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics detravaux, de fournitures et de services, dite directive secteurs classiques. Si l’objet premiern’est pas le développement durable, dès leurs premiers considérants, les deux directivesprécisent qu’elles ont pour finalité « de clarifier comment les pouvoirs adjudicateurs peuventcontribuer à la protection de l’environnement et à la promotion du développement durable »à travers leurs achats publics. Elles n’ont donc pas pour objet la satisfaction d’objectifssociaux ou environnementaux mais visent à assurer une « concurrence effective entre lesentreprises » et à optimiser les conditions de l’achat public « dans le cadre du marché uniquede l’Union Européenne ».

Les directives marchés publics représentent par ailleurs la synthèse des positionsde la Commission Européenne et de la CJCE en matière d’achat public durable : si lajurisprudence de la Cour n’est pas reprise dans son intégralité, les objections de Bruxelles nesont pas non plus prédominantes. Avant 2004, aucune directive ne mentionnait la possibilitéde conditions d’exécution ou de critères environnementaux ou sociaux. Si les directives de2004 réaffirment en outre la nécessité de respecter les principes de la commande publique,y compris, et surtout, lorsque des éléments de développement durable sont inclus dansune procédure, le résultat témoigne d’une évolution des termes concernant la sélection descandidatures, le jugement des offres, ou encore les critères d’attribution.

Ainsi, les modalités de sélection des candidats susceptibles de présenter une offreprévoient la possibilité d’exclure une candidature pour non paiement des cotisationssociales, ou pour non-respect d’une législation nationale sur l’environnement ou le droitsocial. La directive secteurs classiques confirme en outre que la vérification de l’aptitude descandidats à présenter une offre doit se faire sur la base de critères fondés sur la capacitééconomique, financière et technique des candidats. L’article 48-1 de la directive 2004/18prévoit ainsi que « la directive détermine les moyens par lesquels la preuve de la capacitétechnique d’un candidat peut être apportée. (…) L’objectif de la phase de sélection est dechoisir les soumissionnaires que le pouvoir adjudicateur juge capable d’exécuter le marchéen question. Les différentes exigences doivent donc avoir un lien direct avec l’objet dumarché en question ». En outre, les directives ne prévoient pas la possibilité d’intégrerdes considérations environnementales ou sociales pour évaluer la situation économiqueet financière des candidats, conformément à la position de la Commission que la CJCEn’a jamais eu l’occasion d’invalider. Par contre, pour ce qui concerne la capacité techniqueet professionnelle des candidats, les deux textes envisagent la possibilité d’exiger uneexpérience ou des équipements particuliers, de vérifier la composition et l’encadrement dupersonnel de l’entreprise, d’analyser le système qualité mis en place, voire de demandersi l’entreprise s’engage dans un Système de Management Environnemental (EMAS). A cestade de la passation d’un marché, l’article 48-2 f de la directive secteurs spéciaux donnela possibilité aux pouvoirs adjudicateurs d’exiger des candidats « pour les marchés detravaux et de services et uniquement dans les cas appropriés l’indication des mesures degestion environnementale que l’opérateur économique pourra appliquer lors de la réalisation

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

Frédéric Pichon - 2007 25

du marché ». Le flou du libellé (quels sont les « cas approprié » ?) n’a pas été levépuisqu’aucune précision n’a été apportée depuis en droit communautaire. Il n’existe de pluspas d’équivalent au niveau social.

Les deux directives innovent également en matière de critères d’attribution desmarchés : elles consacrent la règle de l’offre économiquement la plus avantageuse ou, lecas échéant, celle du prix le plus bas. Selon les directives les critères d’attribution pourdéterminer quelle est l’offre économiquement la plus avantageuse doivent être portés à laconnaissance des candidats dans l’avis d'appel public à la concurrence. Des critères nonsusceptibles d’une évaluation économique immédiate (donc environnementaux ou sociaux,mais aussi esthétique, liés à l’organisation de l’entreprise…) peuvent être utilisés. La miseen application a été rappelée ultérieurement par l’arrêt Sintesi de la CJCE en date du 7octobre 2004 : la législation nationale ne peut, de manière générale et abstraite, priver unpouvoir adjudicateur de la possibilité de prévoir dans son appel d’offres qu’il choisira l’offreéconomiquement la plus avantageuse, laquelle sera basée sur des critères quantitatifs etqualitatifs. Toutefois, la directive secteurs classiques n’intègre pas de critère social parmiles critères d’attribution des marchés expressément mentionnés par l’article 53, sans pourautant les interdire, mais contient une disposition relative à la condition sociale d’exécution àl’article 2621. L’aspect environnemental est repris de la jurisprudence Concordia Bus Finlandet est expressément cité au titre des critères de choix de l’offre économiquement la plusavantageuse comme au titre des conditions d’exécution.

Un des autres apports des directives relatif à l’achat public écoresponsable concernela faculté pour le pouvoir adjudicateur d’utiliser les écolabels dans la détermination desspécifications techniques22. Un écolabel est attribué à un produit par une organisation decertification, garantissant que le produit concerné a un impact réduit sur l'environnement encomparaison avec des produits similaires23. Les spécifications techniques peuvent y faireréférence ; ces dernières sont définies comme « l'ensemble des prescriptions techniquescontenues notamment dans les cahiers des charges, définissant les caractéristiquesrequises d'un matériau, d'un produit ou d'une fourniture et permettant de les caractériser demanière telle qu'ils répondent à l'usage auquel ils sont destinés par le pouvoir adjudicateur »pour ce qui concerne les marchés de travaux, ou comme les « spécifications figurant dansun document définissant les caractéristiques requises d'un produit ou d'un service », dansles marchés de fournitures et de services24. Les pouvoirs adjudicateurs doivent établirdans la mesure du possible des spécifications techniques qui tiennent compte des critèresd’accessibilité pour les personnes handicapées.

Quant aux conditions d’exécution d’un marché, elles peuvent selon le considérant 33 dela directive secteurs classiques « avoir pour objet de favoriser la formation professionnellesur le chantier, l’emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d’insertion,

21 « Les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger des conditions particulières concernant l'exécution du marché pour autantqu'elles soient compatibles avec le droit communautaire et qu'elles soient indiquées dans l'avis de marché ou dans le cahierdes charges. Les conditions dans lesquelles un marché est exécuté peuvent notamment viser des considérations sociales etenvironnementales »

22 Article 23-6 : « Lorsque les pouvoirs adjudicateurs prescrivent des caractéristiques environnementales en termes deperformances ou d'exigences fonctionnelles, telles que visées au paragraphe 3, point b), ils peuvent utiliser les spécifications détailléesou, si besoin est, des parties de celles-ci, telles que définies par les écolabels européens, (pluri)nationaux, ou par tout autre écolabel(…) »

23 Définition issue du site d’actu-environnement [7].24 Point 1-a et 1-b de l’annexe VI de la directive 2004/18/CE.

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de lutter contre le chômage ». Néanmoins les directives ne prévoient pas d’équivalent ausystème EMAS pour une éventuelle sélection des candidatures au niveau social.

Les directives marchés publics du 31 mars 2004 consacrent en fin de compte diversesdispositions aux achats publics écoresponsables. Une place plus importante est faite auxéléments environnementaux, pourtant consacrés postérieurement aux éléments sociauxpar la CJCE. Ceux-ci sont limités aux conditions d’exécution, leur utilisation en tant quecritère n’étant pas clarifié par les directives.

b- Les nouveautés du Code 2004 relatives aux achats écoresponsablesLe Code des Marchés Publics 2004 issu du décret 2004-15 du 7 janvier 2004 est paruavant les directives communautaires, mais ces dernières ont connu un long processusde rédaction amorcé par les réponses envoyées par les pouvoirs adjudicateurs suite à lapublication du livre vert de la Commission le 27 novembre 1996. L’esprit de la directiveet les orientations principales étaient donc connus. Ce Code anticipe ainsi les principalesdispositions des directives communautaires du 31 mars 2004 relatives aux marchés publics.La version 2004 du Code des Marchés Publics conserve l’apport du Code 2001 et met enplace de nouveaux éléments en élargissant la prise en compte du développement durableà différents stades de la procédure de passation.

Tout d’abord, la rédaction de l’article 14 reste inchangée et admet donc la possibilitéd’objectifs sociaux ou environnementaux dans les conditions d’exécution. Le Code 2004étend en revanche les aspects de développement durable aux phases d’admission descandidatures et de sélection de l’offre économiquement la plus avantageuse. Il est ainsipossible de demander aux opérateurs économiques des renseignements permettantd’évaluer leurs capacités professionnelles, notamment sur leur savoir-faire en matière deprotection de l’environnement. Tel est l’objet de l’article 45 du Code des Marchés Publics2004 : « A l'appui des candidatures, il ne peut être exigé que : 1º Des renseignementspermettant d'évaluer les capacités professionnelles, techniques et financières du candidat.(…) Au titre de ces capacités professionnelles, peuvent figurer des renseignements sur lesavoir-faire des candidats en matière de protection de l'environnement (…) ».

En outre, le critère de la performance en matière de protection de l’environnement faitson entrée dans le Code à l’article 53 : « (…) II. - Pour attribuer le marché au candidat quia présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, la personne publique se fonde surdivers critères variables selon l'objet du marché, notamment le coût d'utilisation, la valeurtechnique de l'offre, son caractère innovant, ses performances en matière de protection del'environnement, le délai d'exécution, les qualités esthétiques et fonctionnelles, le serviceaprès-vente et l'assistance technique, la date et le délai de livraison, le prix des prestations.D'autres critères peuvent être pris en compte, s'ils sont justifiés par l'objet du marché.». Ils’agit là d’une adaptation libre des innovations communautaires, notamment par rapport àla capacité des candidats et aux critères de sélection (plus particulièrement par rapport àl’article 48-2 f de la directive secteurs spéciaux)25. La directive fait par ailleurs référence aux« caractéristiques environnementales » pour les critères et non aux « performances » (article53-1-a de la directive secteurs classiques). Enfin, le Code des Marchés Publics 2004, danssa version originelle, s’aligne sur les directives communautaires du 31 mars 2004 en necitant pas de critère d’attribution social.

25 HEINTZ Mathieu, La transposition des critères sociaux, environnementaux et économiques. CONTRATS PUBLICS.Novembre 2005 p. 44 [3.3.1]

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Quel est le bilan du Code des Marchés Publics 2004 en termes d’intégrationdu développement durable ? Malgré l’explicitation des articles 14, 45 et 53, certainscommentateurs ont dénoncé « une réforme composite sans réelle portée en ce qui concerneles critères environnementaux »26. Selon cette analyse, les dispositions consacrées nesont d’aucune utilité pour nombre de marchés et risquent d’être utilisées comme unmoyen de détourner les grands principes qui régissent la passation des marchés publics.Cette remarque montre également l’ampleur de la tâche concernant l’évolution vers unecommande publique écoresponsable.

c- Les apports ultérieurs favorisant l’intégration du développement durableNonobstant les efforts d’anticipation des directives communautaires, le législateur fut amenéà compléter le Code des Marchés Publics 2004. Ainsi le décret n° 2004-1298 du 26novembre 2004 relatif à diverses dispositions concernant les marchés de l'État et descollectivités territoriales a rajouté un point IV à l’article 54 du Code des Marchés Publicsconcernant les marchés réservés aux ateliers protégés et aux centres d’aide par le travail :« (…) IV. - Certains marchés ou certains lots d'un marché peuvent être réservés aux ateliersprotégés mentionnés à l'article L. 323-31 du code du travail ou aux centres d'aide par letravail mentionnés à l'article L. 344-2 du code de l'action sociale et des familles. Dans ce cas,l'exécution de ces marchés ou de ces lots est réalisée majoritairement par des personneshandicapées qui, en raison de la nature ou de la gravité de leurs déficiences, ne peuventexercer une activité professionnelle dans des conditions normales ». Ces dispositions sontconformes au droit communautaire, et notamment au considérant 28 de la directive 2004/18/CE27 et à l’article 19 de cette même directive.

Mais les apports ultérieurs à l’entrée en vigueur du Code des Marchés Publics 2004 ontaussi été l’occasion d’une affirmation de la volonté du législateur d’encourager les achatspublics écoresponsables. Tout d'abord, l’article 58 de la loi n°2005-32 du 18 janvier 2005 deprogrammation pour la cohésion sociale insère à l’article 53 du Code des Marchés Publics2004 le critère de « performance dans l’insertion professionnelle des publics en difficulté » etva donc plus loin que l’article 53 des directives communautaires qui ne précise pas ce critèredans la liste des exemples cités. L’utilisation de ce critère social est toutefois subordonnéeà des conditions de validité, comme le lien avec l’objet du marché, sur lequel le Conseild’État a toujours affiché sa rigueur.

Quant aux articles 29 et 38 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité desdroits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, ilsmodifient l’intitulé de la section 3 du chapitre 3 du Titre III du Code des Marchés Publics2004. Cette section porte ainsi sur « les conditions d’accès à la commande publique relativeà la situation fiscale et sociale des candidats ou au respect de l’obligation d’emploi destravailleurs handicapés ou aux difficultés des entreprises ». En outre, est ajouté au Codedes Marchés Publics un article 44-1 qui prévoit que « ne sont pas admises à concourir aux

26 GUIBAL M., Le nouveau Code des Marchés Publics : une réforme composite, cité dans LAVOILLOTE, Marie Pierre,L’environnement dans le nouveau Code des Marchés Publics – L’affirmation du contrat au service de l’environnement. AJDA p.2084[3.2]27 « (…) de tels ateliers pourraient ne pas être en mesure de remporter des marchés dans des conditions de concurrence normales.Dès lors, il convient de prévoir que les États membres puissent réserver le droit de participer aux procédures de passation de marchéspublics à de tels ateliers ou en réserver l'exécution dans le cadre de programmes d'emplois protégés ».

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marchés publics les personnes assujetties à l’obligation définie à l’article L.323-1 28 du Codedu Travail qui, au cours de l’année précédent celle au cours de laquelle a eu lieu le lancementde la consultation, n’ont pas souscrit la déclaration visée à l’article L. 323-8-5 du même code,ou n’ont pas, si elles en sont redevables, versé la contribution visée à l’article L.323-8-2de ce code ». Cette obligation est également étendue aux délégations de service public.Pour contrôler le respect de cette obligation, le législateur modifie par la même occasionl’article 45-1 du Code des Marchés Publics, qui porte sur les capacités professionnelles,techniques et financières du candidat et qui énonce désormais qu’au titre des capacitésprofessionnelles, l’entreprise peut être amenée à faire figurer dans sa candidature des« renseignements relatifs au respect de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapésprévus à l’article L. 323-1 du Code du Travail ».

Avec ces ajouts, le Code des Marchés Publics 2004 va plus loin en matière socialeque ne le font les directives. Dans l’attente du Code des Marchés Publics 2006, celles quisont encore les « personnes responsables du marché » disposent donc de plusieurs basesjuridiques pour mettre en œuvre une démarche d’achat écoresponsable.

2°) Le Code des Marchés Publics 2006 : la possibilité de prendre encompte le développement durable à chaque étape du marché

Le Code des Marchés Publics issu du décret n° 2006-975 du 1er août 2006, toujoursen vigueur, propose des nouveautés pour intégrer le développement durable dans lesmarchés publics, tout en s’appuyant sur le corpus législatif existant. De la définition dubesoin (a) aux critères d’attribution (c) en passant par les désormais classiques conditionsd’exécution (b), le Code des Marchés Publics prévoit la prise en compte d’aspects sociauxou environnementaux, qu’il étend à d’autres aspects de la passation d’un marché (d).

a- Définition du besoinLes versions 2001 et 2004 du Code des Marchés Publics mentionnaient à l’article 14des éléments du développement durable. Dans le Code 2006, celui-ci apparaît en tantque tel dès l’article 5, preuve de son importance croissante. Ainsi dès la définition desbesoins, le pouvoir adjudicateur doit prendre en compte des objectifs de développementdurable. L’insertion de cette disposition est le fruit de longs débats parlementaires : lesdiscussions relatives au Code des Marchés Publics 2004 avaient posé la question dudéveloppement durable au stade de la définition des besoins, avant que cette hypothèsesoit écartée. En outre l’article 5 de l’avant-projet de Code des Marchés Publics 2006énonçait : « […] Le ou les marchés ou accord-cadres conclus par le pouvoir adjudicateuront pour objet de répondre à ces besoins, tout en prenant en compte des préoccupationsde développement durable »29. La rédaction définitive apparaît plus impérative et traited’objectifs de développement durable : « La nature et l'étendue des besoins à satisfairesont déterminées avec précision avant tout appel à la concurrence ou toute négociation nonprécédée d'un appel à la concurrence en prenant en compte des objectifs de développementdurable ». L’emploi du présent de l’indicatif suggère que la prise en compte des objectifs dudéveloppement durable devient une obligation du droit positif de la commande publique.

28 « Tout employeur occupant au moins vingt salariés est tenu d'employer, à temps plein ou à temps partiel, des bénéficiairesde la présente section dans la proportion de 6 p. 100 de l'effectif total de ses salariés Pour les entreprises à établissements multiples,cette obligation d'emploi s'applique établissement par établissement »29 Code des Marchés Publics 2006 : les grands principes de la réforme. CONTRATS PUBLICS n° 58. p.9 [3.3.2]

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

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Au stade de l’expression des besoins, l’article 6 du Code des Marchés Publics 2006permet, voire impose, le recours à des spécifications techniques : « I- Les prestationsqui font l'objet d'un marché ou d'un accord-cadre sont définies, dans les documents dela consultation, par des spécifications techniques formulées : 1º Soit par référence à desnormes ou à d'autres documents équivalents accessibles aux candidats (…) ; 2º Soiten termes de performances ou d'exigences fonctionnelles. Celles-ci sont suffisammentprécises pour permettre aux candidats de connaître exactement l'objet du marché etau pouvoir adjudicateur d'attribuer le marché. Elles peuvent inclure des caractéristiquesenvironnementales (…) VII. - Lorsque les performances ou les exigences fonctionnellesdéfinies en application du 2º du I comportent des caractéristiques environnementales,celles-ci peuvent être définies par référence à tout ou partie d'un écolabel pour autant :1º Que cet écolabel soit approprié pour définir les caractéristiques des fournitures oudes prestations faisant l'objet du marché ; 2º Que les mentions figurant dans l'écolabelaient été établies sur la base d'une information scientifique ; 3º Que l'écolabel aitfait l'objet d'une procédure d'adoption à laquelle ont participé des représentants desorganismes gouvernementaux, des consommateurs, des fabricants, des distributeurs et desorganisations de protection de l'environnement ; 4º Que l'écolabel soit accessible à toutesles parties intéressées. Le pouvoir adjudicateur peut indiquer, dans les documents de laconsultation, que les produits ou services ayant obtenu un écolabel sont présumés satisfaireaux caractéristiques environnementales mentionnées dans les spécifications techniquesmais est tenu d'accepter tout moyen de preuve approprié.».

L’acheteur public peut donc solliciter un matériau de base plus respectueux del’environnement (bois, produits recyclés ou renouvelables…), imposer un processus deproduction (une source d’énergies renouvelables pour la fourniture d’électricité), décrire sesbesoins en termes de performances et d’exigences fonctionnelles (par exemple, obtenirune température constante de locaux comprise entre 22 et 25 degrés) en précisant queles moyens de climatisation et de chauffage ne devront pas dépasser certains niveaux deconsommation énergétique, ou encore exiger des produits écolabellisés. Comme indiqué àl’article 23-6 de la directive communautaire relative aux secteurs classiques, le recours àdes écolabels est une possibilité pour le pouvoir adjudicateur mais ne doit pas lui permettred’exiger des produits certifiés en fonction d’un label déterminé. Pour la première fois sontdonc consacrés les écolabels en droit interne. Il convient ici de relever qu’il n’existe pasd’écolabel privé et que les écolabels en vigueur sont révisés tous les trois ans. D’autrepart, la mention d’un écolabel ne saurait se traduire par une atteinte disproportionnée à laliberté d’accès à la commande publique. Cette hypothèse a été confirmée par le TribunalAdministratif de Nice30, dans un jugement du 30 mars 2006. Les juges Niçois ont annulé unmarché à procédure adaptée pour lequel la collectivité avait imposé dans ses spécificationstechniques la norme NF environnement. Il y a manquement aux obligations de mise enconcurrence dans la mesure où les produits devaient être certifiés par le label sans mentionde la possibilité de proposer des produits aux caractéristiques équivalentes.

De nombreux normes et labels peuvent faciliter la passation de marchés publicsécoresponsables : NF Environnement, Écolabel européen (symbolisé par une fleur), EnergyStar (ce label garantit un niveau minimal d’efficacité énergétique et une consommationminime de l’appareil en veille ; ce label a été popularisé dans les années 1990 par unedirective du président des États-Unis engageant tous les départements de l’administrationfédérale à s’approvisionner en ordinateurs à faible consommation d’énergie ; ainsi la

30 ACP FORMATION, La référence à un écolabel permet-elle de garantir le succès d’une consultation ? Lettre d’informationdu 29 juin 2007. [6.2.2]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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quasi totalité du marché des PC prend en compte la faible consommation électrique desproduits informatiques31), labels FSC (Forest Stewartship Council) ou PEFC (programmede reconnaissance des certifications forestières) pour le bois, le label de l’agriculturebiologique, le label OEKO-TEK pour les textiles…

Ainsi, le Code des Marchés Publics 2006 permet aux pouvoirs adjudicateurs d’intégrerle développement durable dès le début du processus d’achat, au moment de la définitiondu besoin.

b- Conditions d’exécutionComme dans les versions 2001 et 2004 du Code des Marchés Publics, la mouture 2006consacre, en le nommant, le développement durable à travers les conditions d’exécutiondes marchés à l’article 14 : « Les conditions d'exécution d'un marché ou d'un accord-cadrepeuvent comporter des éléments à caractère social ou environnemental qui prennent encompte les objectifs de développement durable en conciliant développement économique,protection et mise en valeur de l'environnement et progrès social ». Les soumissionnairesdoivent respecter le cahier des charges et l’intégration d’éléments environnementaux ousociaux devient donc une obligation, sans quoi la candidature sera non conforme et déclaréeirrégulière. En effet, au sens de l’article 35-I du Code des Marchés Publics 2006, « uneoffre irrégulière est une offre qui, tout en apportant une réponse au besoin du pouvoiradjudicateur, est incomplète ou ne respecte pas les exigences formulées dans l’avis d’appelpublic à la concurrence ou dans les documents de la consultation ».

La pratique des achats écoresponsables apporte des exemples de conditionsd’exécution favorables au développement durable : dans une réponse à la question écriten°102 882 publiée au JO du 28 novembre 2006, le Ministre de l’Économie, des Finances etde l’Industrie cite la livraison en vrac plutôt qu’en emballages individuels, la récupération oula réutilisation des éventuels emballages…32 Les conditions d’exécution peuvent égalementconcerner l’élimination et les modalités de tri des déchets issus de la démolition ou destravaux publics. Les enjeux environnementaux pour le BTP s’élèvent à 343 millions detonnes de déchets en 2004, soit 91 % des déchets des activités économiques en France33.Le cahier des charges d’un marché de travaux peut imposer le tri des déchets selonleur nature et leur composition, exiger la réduction de la quantité de déchets produits,prescrire la réduction de la taille des déchets solides par concassage ou encore prévoir unerevalorisation des déchets quand cela est possible (réutilisation en tant que remblais parexemple).

Mais comme cela a déjà été abordé, le recours aux seules conditions d’attribution pourfavoriser le développement durable dans les marchés publics fonctionne en « tout ou rien » :soit un opérateur économique est capable de répondre à la prescription de l’acheteur publicet est en mesure de présenter une offre ; soit il ne peut que partiellement répondre, etdès lors sa candidature est rejetée. Les clauses d’exécution sociales ou environnementalesdoivent donc être utilisées en connaissance de causes afin de ne pas évincer un trop grandnombre de candidats potentiels capables de répondre au besoin du pouvoir adjudicateur.

31 CARPE. Guide CARPE de l’achat public responsable. Juillet 2005. P.5. [6.3]32 Comment mettre en œuvre l’intégration du développement durable dans la commande publique ? CONTRATS ET MARCHES

PUBLICS. Février 2007. p. 35-36. [3.3.2]33 BITTER Maxime, DEVIGE-STEWART Thierry, VAYSSE Françoise, Les entreprises mettent le cap sur le développement

durable. LE MONITEUR. 22 juin 2007. p. 61 [4]

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

Frédéric Pichon - 2007 31

Pour diversifier sa logique, l’acheteur public peut donc recourir à des critères de sélectiondes candidatures et de jugement des offres relevant du développement durable.

c- Critères de sélection des candidatures et de jugement des offresL’article 45 du Code des Marchés Publics 2006 approfondit les possibilités ouvertes sousl’empire du Code 2004 quant au savoir-faire des candidats en matière de protection del’environnement : « (…) II. − Le pouvoir adjudicateur peut demander aux opérateurséconomiques qu’ils produisent des certificats de qualité. (…) Pour les marchés detravaux et de services dont l’exécution implique la mise en œuvre de mesures degestion environnementale, ces certificats sont fondés sur le système communautairede management environnemental et d’audit (EMAS) ou sur les normes européennesou internationales de gestion environnementale. Dans les cas prévus aux trois alinéasprécédents, le pouvoir adjudicateur accepte tout moyen de preuve équivalent ainsi queles certificats équivalents d’organismes établis dans d’autres États membres. (…) IV. −Peuvent également être demandés, le cas échéant, des renseignements sur le respectde l’obligation d’emploi mentionnée à l’article L. 323-1 du code du travail (…) ». Lesystème communautaire de management environnemental et d’audit vise à promouvoirune amélioration continue des résultats environnementaux de toutes les organisationseuropéennes, quel que soit leur secteur, en organisant et en mettant en œuvre dessystèmes de management environnementaux évalués objectivement et périodiquement, enorganisant la formation et la participation active du personnel et l’information du public etdes autres parties intéressées34. Le système EMAS va plus loin que la norme ISO 14001car il oblige au respect permanent de la réglementation environnementale et impose unecommunication fréquente prenant la forme d’un rapport public.

D’autre part, l’article 53 reprend les possibilités de critères relevant du développementdurable pour le jugement des offres évoquées dans le Code des Marchés Publics 2004 :« I. − Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l’offre économiquement laplus avantageuse, le pouvoir adjudicateur se fonde : 1° Soit sur une pluralité de critèresnon discriminatoires et liés à l’objet du marché, notamment la qualité, le prix, la valeurtechnique, le caractère esthétique et fonctionnel, les performances en matière de protectionde l’environnement, les performances en matière d’insertion professionnelle des publics endifficulté, le coût global d’utilisation, la rentabilité, le caractère innovant, le service après-vente et l’assistance technique, la date de livraison, le délai de livraison ou d’exécution.(…) ». Aucune nouveauté relative aux critères d’attribution n’est donc à mentionner. Lescritères environnementaux ou sociaux devront être « justifiés par l’objet du marché ouses conditions d’exécution », être expressément mentionnés dans l’avis de marché oule règlement de consultation, et respecter les principes fondamentaux de la commandepublique rappelés à l’article 1 du Code des Marchés Publics. Le manuel d’application duCode des Marchés Publics 2006 précise au point 12.1 que « les critères doivent êtreobjectifs, opérationnels et non discriminatoires, c’est-à-dire qu’ils doivent être liés à l’objetdu contrat pour éviter les contraintes inutiles ».

Au demeurant, le Code des Marchés Publics 2006 prévoit à l’article 50 la possibilitéde variantes : « Lorsque le pouvoir adjudicateur se fonde sur plusieurs critères pourattribuer le marché, il peut autoriser les candidats à présenter des variantes. Le pouvoiradjudicateur indique dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans les documentsde la consultation s’il autorise ou non les variantes ; à défaut d’indication, les variantes nesont pas admises. Les documents de la consultation mentionnent les exigences minimales

34 Extraits du règlement CE n° 761-2001 du 19 mars 2001 permettant la participation volontaire des organisations à un système EMAS

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

32 Frédéric Pichon - 2007

que les variantes doivent respecter ainsi que les modalités de leur présentation. Seulesles variantes répondant à ces exigences minimales peuvent être prises en considération.Les variantes sont proposées avec l’offre de base (…) ». Les acheteurs publics peuventdonc autoriser les candidats à présenter des variantes à leur offre de base et demanderdes variantes offrant une meilleure performance environnementale. Cette possibilité permetpeu d’applications dans le domaine social. Enfin, à défaut d’indication dans l’avis d'appelpublic à la concurrence, les variantes ne sont pas autorisées. Les variantes sont toutefoisadmises dans les marchés à procédures adaptées, même dans le silence des documents dela consultation : les opérateurs économiques peuvent alors prendre l’initiative de valoriserleur expertise environnementale. L’article 28 du Code des Marchés Publics 2006 donneune définition des procédures adaptées : « Lorsque leur valeur estimée est inférieure auxseuils mentionnés au II de l’article 26, les marchés de fournitures, de services ou de travauxpeuvent être passés selon une procédure adaptée, dont les modalités sont librement fixéespar le pouvoir adjudicateur en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin àsatisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d’yrépondre ainsi que des circonstances de l’achat ».

d- Les autres éléments relatifs au développement durable prévu par le Codedes Marchés Publics 2006Outre la définition du besoin, les conditions d’exécution et les critères d’attribution, le Codedes Marchés Publics 2006 contient plusieurs dispositions concernant le développementdurable. L’article 15 relatif aux marchés réservés succède à l’article 54-IV du Code 2004 :« Certains marchés ou certains lots d'un marché peuvent être réservés à des entreprisesadaptées ou à des établissements et services d'aide par le travail mentionnés aux articlesL. 323-31 du code du travail et L. 344-2 du code de l'action sociale et des familles, ou à desstructures équivalentes, lorsque la majorité des travailleurs concernés sont des personneshandicapées qui, en raison de la nature ou de la gravité de leurs déficiences, ne peuventexercer une activité professionnelle dans des conditions normales ». Ce droit de préférencetrouve une application dans l’allotissement consacré comme la règle par l’article 10 du Codedes Marchés Publics. Certains lots pourront de cette manière être réservés aux organismesmentionnés à l’article 15 du Code des Marchés Publics. L’allotissement permet en effet demoduler la consistance des lots selon le niveau de technicité requis de sorte que le pouvoiradjudicateur dispose d’une certaine liberté pour utiliser, s’il le désire, cet article.

D’autre part, l’article 30 rend possible le passage en procédure adaptée des marchésdont l’objet est l’insertion sociale : « I - Les marchés et les accords-cadres ayant pour objetdes prestations de services qui ne sont pas mentionnées à l'article 29 peuvent être passés,quel que soit leur montant, selon une procédure adaptée, dans les conditions prévues parl'article 28. (…) III. - Lorsqu'un marché ou un accord-cadre a pour objet à la fois desprestations de services mentionnées à l'article 29 et des prestations de services qui n'y sontpas mentionnées, il est passé conformément aux règles qui s'appliquent à celle de ces deuxcatégories de prestations de services dont le montant estimé est le plus élevé ». Le passageen procédure adaptée n’est possible que dans la mesure où l’objet principal du marchéest l’insertion. Les pouvoirs adjudicateurs ne doivent pas utiliser les facilités offertes poursoustraire un marché aux obligations prévues dans le cadre des procédures formalisées :par exemple, la réalisation de travaux venant se greffer sur un marché d’insertion doit êtreaccessoire sous peine de voir le juge requalifier le marché. Les critères d’évaluation doiventdonc accorder une place prépondérante à la qualité de l’insertion et dans une moindremesure à la qualité des travaux réalisés. Dans ce cadre, les critères à caractère social sontparfaitement admis.

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

Frédéric Pichon - 2007 33

L’article 53-IV (correspondant à l’article 54 des Codes des Marchés Publics 2004et 2001 et 261 du Code de 1966) prévoit en outre que « IV. - 1° Lors de la passationd'un marché, un droit de préférence est attribué, à égalité de prix ou à équivalenced'offres, à l'offre présentée par une société coopérative ouvrière de production, par ungroupement de producteurs agricoles, par un artisan, une société coopérative d'artisansou par une société coopérative d'artistes ou par des entreprises adaptées. 2° Lorsque lesmarchés portent, en tout ou partie, sur des prestations susceptibles d'être exécutées pardes artisans ou des sociétés d'artisans ou des sociétés coopératives d'artisans ou dessociétés coopératives ouvrières de production ou des entreprises adaptées, les pouvoirsadjudicateurs contractants doivent, préalablement à la mise en concurrence, définir lestravaux, fournitures ou services qui, à ce titre, et dans la limite du quart du montant de cesprestations, à équivalence d'offres, seront attribués de préférence à tous autres candidats,aux artisans ou aux sociétés coopératives d'artisans ou aux sociétés coopératives ouvrièresde production ou à des entreprises adaptées. 3° Lorsque les marchés portent, en toutou partie, sur des travaux à caractère artistique, la préférence, à égalité de prix ou àéquivalence d'offres prévue au 2°, s'exerce jusqu'à concurrence de la moitié du montant deces travaux, au profit des artisans d'art ou des sociétés coopératives d'artistes ». Cet articleconsacre également un droit de préférence en faveur de certains opérateurs économiques.Cette disposition est autorisée par le considérant 25 de la directive secteurs classiques du31 mars 2004.

Le cadre juridique de l’achat public écoresponsable s’est donc précisé au fil des années2000 et des Codes des Marchés Publics successifs. Les collectivités désireuses de fairedes achats durables disposent donc de la légitimité juridique à agir avec le Code 2006, leplus abouti en la matière. Pour faciliter les démarches, des outils sont mis à dispositiondes acheteurs, dans le cadre notamment de l’affirmation politique de la prise en compte dudéveloppement durable.

3°) La Stratégie Nationale de Développement Durable appliquée auxmarchés publics

L’impulsion politique créée par la mise en place d’une Stratégie Nationale deDéveloppement Durable a eu comme conséquence l’adoption d’un Plan National d'Actionpour des Achats Publics Durables(a). Ce plan fixe des objectifs en matière d’achatécoresponsable que les différents guides officiels (b) doivent permettre d’atteindre. Enparallèle, la mutualisation des expériences (c) facilite les démarches nouvelles.

a- Le Plan National d'Action pour des Achats Publics DurablesSi le cadre juridique de la commande publique prévoit des possibilités et quelquesobligations en vue d’intégrer le développement durable dans les marchés publics, desdécisions politiques ont été prises pour inciter les acheteurs publics. Parmi elles, la StratégieNationale de Développement Durable en date du 3 juin 2003 fixe sept objectifs principaux,dont un est consacré à l’évolution « Vers un État exemplaire », notamment par l’acquisitionde produits et de services intégrant une meilleure qualité environnementale. La StratégieNationale de Développement Durable fixe le cadre général de la politique environnementalede la France et prévoit ainsi l’intégration du développement durable dans le fonctionnementde l’administration, notamment en développant les démarches d’écoresponsabilité au seindes services de l’État.

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

34 Frédéric Pichon - 2007

Adoptée trois ans plus tard par le Conseil en juin 2006, la Stratégie Européennede Développement Durable, demande aux États membres de s’efforcer d’atteindre d’ici2010 un niveau moyen de marchés publics respectueux du développement durable égalà celui atteint actuellement par les États les plus performants. En conséquence, leComité Interministériel pour le Développement Durable du 13 novembre 2006 a actualiséla Stratégie Nationale de Développement Durable afin d’y intégrer l’adoption d’un PlanNational d’Actions pour des Achats Publics Durables. Ce plan a pour objectif de faire de laFrance, d’ici 2009, l’un des pays de l’Union Européenne les plus engagés dans la mise enœuvre du développement durable dans la commande publique. La France fait partie des huitÉtats-membres à avoir adopté un plan national d’action pour les achats verts à l’été 200735.

Le Plan National d'Action pour des Achats Publics Durables a par conséquent étéadopté fin mars 2007 et sera révisé en 2009 en fonction des résultats obtenus tantau niveau de l’évolution des comportements et des pratiques par les acheteurs publicsque par le positionnement de la France au niveau européen. Ce plan ne revêt pasde caractère juridiquement contraignant mais s’inscrit dans une logique incitative dedétermination d’objectifs. Il préconise une méthode progressive pour passer à l’acte : enpremier lieu vient l’implication des décideurs politiques et administratifs, pour déterminer uneresponsabilité claire. Il faut ensuite mettre en place une démarche d’amélioration continue.Avant la réalisation d’un achat durable, il est impératif d’approfondir l’analyse préalabledes besoins, de sensibiliser les agents et d’accompagner toutes les parties concernées,partenaires institutionnels et opérateurs économiques. Pour concrétiser une démarched’achat écoresponsable, un pouvoir adjudicateur a intérêt à cibler des achats facilementsusceptibles d’intégrer le développement durable. Enfin, un dispositif de suivi est nécessairepour évaluer les marchés et la progression globale de la collectivité.

Ce Plan National d'Action pour des Achats Publics Durables fait également office deguide pour adopter une démarche d’achat public écoresponsable. D’autres documentsexistent : le Ministère de l'Écologie et du Développement Durable (devenu Ministèrede l'Écologie, de l'Aménagement et du Développement Durables depuis mai 2007), leMinistère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie (devenu Ministère de l'Économie,des Finances et de l'Emploi en mai 2007), et d’autres organismes publics comme l’ADEMEont coordonné leurs actions afin de mettre à disposition des acheteurs publics des guidesméthodologiques.

b- Les guides méthodologiques officiels

note du tire 36

Différents guides édités par des organismes officiels permettent aux acheteurs publicsde faciliter leurs démarches d’achats durables. D’origines internationale, européenne, ounationale, globaux ou consacrés à un type d’achat particulier, ils sont l’illustration de lanécessité d’accompagner les pouvoirs adjudicateurs qui se lancent dans une politiqued’achat écoresponsable.

Au niveau international, l’Organisation de Coopération et de DéveloppementÉconomiques a publié plusieurs rapports relatifs à l’intégration du développement durabledans les marchés publics. Parmi eux, les exposés « Marchés publics et environnement :Problèmes et solutions pratiques » d’août 2000 et « La performance environnementale des

35 POHARDY Aude, Le plan national d’action pour des achats publics durables. LE COURRIER JURIDIQUE DES FINANCESET DE L’INDUSTRIE. Mai - juin 2007. p. 162 [3.3.2]36 Voir le point [6.4] de la bibliographie

I- La prise en compte progressive du développement durable dans le droit des marchés publics

Frédéric Pichon - 2007 35

marchés publics – Vers des politiques cohérentes » de Novembre 2003 intègrent des retoursd’expériences et font le lien entre l’achat public et l’achat privé. La légitimité de ces guidestient à leur dimension internationale.

Sur le plan Communautaire, la Commission Européenne est l’auteur du guide « Achetezvert ! Un manuel sur les marchés publics écologiques », paru en août 2004. Sa dimensionprescriptive en fait encore un outil d’actualité. Ce guide recommande par exemple detravailler sur l’intitulé du marché pour y faire figurer de manière explicite une référence audéveloppement durable : plutôt qu’un « marché de fournitures en papeteries » mentionnantle respect de l’écolabel européen, mieux vaut intituler son marché « Fournitures de papiersécolabellisés ». Même s’il a mis plus d’un an à être traduit, ce guide fait référence dansl’Union Européenne.

En France, l’arrêté du 9 janvier 2004 portant création du groupe permanent d’étudedes marchés - développement durable, environnement, suppléé en 2007 par le grouped’étude des marchés développement durable, environnement (GEM-DDEN), rattaché àl’observatoire économique de l’achat public issu de l’article 132 du Code des MarchésPublics, est l’organe officiel de publication des guides de l’acheteur public. Son rôle estde tenir à disposition du public et des acheteurs une information synthétique relative auxaspects techniques et économiques de la commande publique écoresponsable. Parmi sespublications figurent des guides consacrés au « bois, matériau de construction », à l’achatde « services d’efficacité énergétique », à l’achat de papier ou encore de produits. Le dernierguide rendu public en juillet 2007 concerne la « Commande publique et l’accès à l’emploides personnes qui en sont éloignées – Guide à l’attention des acheteurs ». Il précise dansson introduction que « les acheteurs publics ont besoin d’être sécurisés juridiquement etaccompagnés techniquement tant pour définir les clauses sociales orientées vers l’emploique pour en contrôler l’exécution ». D’autres publications sont prévues, notamment sur letextile ou la qualité environnementale des bâtiments publics. En outre, une circulaire duPremier Ministre du 5 avril 2005 relatif aux achats publics de bois et de dérivés présenteles possibilités de participer à une meilleure gestion des forêts dans le monde à travers lesachats publics. Enfin, des sites internet de sensibilisation et de promotion de l’achat publicdurable ont été créés, dont un est consacré à l’écoresponsabilité (sous la responsabilitédu Ministère de l'Écologie, de l'Aménagement et du Développement Durables) et un auxécolabels37.

c- Guides méthodologiques et retours d’expériences

Note du titre 38

Avant même le Code des Marchés Publics 2006 et les publications officielles, plusieurscollectivités se sont lancées dans le développement durable à travers leurs marchés publics.Plus de 400 actions avaient été ainsi recensées fin 200539, dans le cadre d’Agenda 21 dansla plupart des cas. Par exemple, le Conseil Général de la Loire a opté depuis 2005 pour une

37 Voir le point [7] de la bibliographie38 Voir le point [6.3] de la bibliographie

39 AACT – JARGOIS Béatrice, Développement durable et commande publique : quelques éléments de réflexion... Juin 2006.p.5 [6.2.2]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

36 Frédéric Pichon - 2007

systématisation des critères relatifs au développement durable dans ses marchés publics,pondérés à hauteur de 10 %40.

Certains acteurs locaux ont mis à profit leurs démarches liées au développementdurable pour promouvoir l’achat écoresponsable avec la mise en ligne de guidesméthodologiques. Alterre Bourgogne (agence régionale pour l’environnement et ledéveloppement soutenable en Bourgogne) est particulièrement active dans ce domaine.Ses guides relatifs à l’éclairage public, aux marchés de travaux et aux marchés defournitures proposent des fiches produits indiquant les enjeux et les critères envisageables.Par exemple, exiger un bois certifié FSC ou équivalent pour la fabrication du mobilier debureau.

Les grandes villes jouent également un rôle en condensant leurs retours d’expériences :le guide de l’achat durable de bois de la ville de Lyon fut un des premiers publiés ennovembre 2003. En avril 2004, la ville de Paris publiait un guide à l’attention des acheteurspublics relatif à « L’insertion par l’économique à travers la commande publique ». Auniveau européen, l’association Cities As Responsible Purchasers in Europe (Les villeseuropéennes, acheteurs responsables) a publié en 2006 un guide de l’achat publicresponsable. Le Conseil Général des Hauts de Seine avait publié un guide à l’intitulésimilaire en novembre 2004. Enfin, citons le « guide de l’achat éthique pour les acheteurspublics », consacré à la valorisation des droits humains à travers les marchés publics, misen ligne en septembre 2006 par le Conseil Régional Nord-Pas-de-Calais en lien avec leCollectif « De l’Éthique sur l’Étiquette ».

Ces guides sont le fruit d’expériences réussies ou non en matière d’achats durables.Ils permettent aux acheteurs publics de disposer de nouveaux critères relevant dudéveloppement durable pour lesquels l’expérimentation a réussi (ce qui ne garantit pas leurvalidité juridique dans tous les cas) : niveau sonore en dB, taux d’émission en CO2, durabilitédes produits, consommation énergétique des équipements en fonctionnement et en veille,teneur en métaux lourds, quantités d’emballages utilisées…

D’autres outils sont à la disposition des acheteurs publics : de nombreuses rencontressont organisées chaque année et les formations à l’achat écoresponsable se multiplientdans le sillage de l’Institut de FORmation de l’Environnement, créé par un arrêtéinterministériel du 9 juillet 2001, sous la forme d'un service à compétence nationale duMinistère de l'Écologie, de l'Aménagement et du Développement Durables.

L’acheteur public n’a donc jamais disposé d’autant de légitimité juridique à agir, d’autantd’appuis techniques et administratifs pour s’engager dans des achats écoresponsables. Dece point de vue, le développement durable apparaît soluble dans la commande publique.Pourtant, si les marchés publics peuvent, voire doivent, intégrer le développement durable,et notamment l’environnement, long est le chemin qui mène à une banalisation des achatspublics durables en France.

40 YVARS Guillaume, Intégration de critères environnementaux et sociaux de la commande publique du conseil général dela Loire. 2005 [6.5]

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

Frédéric Pichon - 2007 37

II- Verdir n’est pas mûrir : le longcheminement vers des achats publicsdurables

Le verdissement des marchés publics doit être relativisé : les outils existent, mais leurutilisation est encore limitée. En outre, le recul est encore trop faible pour augurer del’efficacité d’une politique d’achats durables. De plus, certains éléments du cadre juridiqueactuel restreignent les possibilités offertes aux pouvoirs adjudicateurs, dont les habitudesne favorisent pas toujours le passage à l’acte. Conséquemment, hormis pour certainescollectivités de taille importante, le fait d’acheter vert ne pourra se faire qu’après maturationdes consciences et des projets. Ainsi, les risques liés à l’intégration du développementdurable dans les marchés publics (A) sont un facteur de limitation, tout comme les lacunesde l’achat public durable en France (B).

A. Les risques liés à un marché public intégrant desaspects du développement durable

La persistance de problèmes juridiques (1°) et les difficultés d’ordre économique (2°) sontdeux éléments majeurs limitant l’extension de l’achat public écoresponsable. L’effectivité dudéveloppement durable peut également être questionnée à travers les clauses d’insertionsociale (3°).

1°) Une sécurité juridique imparfaiteMalgré les évolutions du cadre juridique, la position du juge administratif français n’incitepas les acheteurs (a), confrontés au dilemme de la sécurisation de leurs achats (b).

a- La position du juge administratif en questionL’inflexibilité du juge administratif sous l’empire du Code des Marchés Publics de 1966n’a pas laissé place à une acception extensive du développement durable dans le cadrejuridique de la commande publique avec l’entrée en vigueur des nouveaux Codes desMarchés Publics à partir de 2001.

La controverse de l’article 5 du Code des Marchés Publics 2006 en est l’archétype :quelle sera la position du juge administratif face à l’obligation de prendre en compte desobjectifs de développement durable au stade de la définition des besoins ? L’article 5 est-il l’illustration d’une volonté politique avant tout symbolique ? Quelle est la portée de la

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

38 Frédéric Pichon - 2007

prise en compte « d’objectifs de développement durable » ? Selon Jérôme Michon41, ilfaudra attendre quelques années avant de voir la jurisprudence considérer comme illégal unmarché qui n’aurait pas respecté au stade de la définition des besoins la prise en compte detels objectifs. En outre, pour de nombreuses collectivités publiques, la rédaction de l’article 5du Code des Marchés Publics témoigne plus de la manifestation d’un affichage politique quede la réelle mise en œuvre d’une politique d’achats durables dans le cadre de la passationde leurs marchés publics. Les explications fournies dans les rapports de présentation prévusà l’article 79 du Code des Marchés Publics sont souvent évasives42.

Se pose de plus la question de la sanction encourue par un pouvoir adjudicateur quidéfinirait ses besoins sans prendre en compte le développement durable43. En premier lieu,la sanction du défaut de définition suffisante des besoins n’apparaît qu’indirectement, àl’occasion du contrôle opéré par le juge sur le respect d’autres obligations incombant aupouvoir adjudicateur. C’est le cas lorsque le juge sanctionne l’imprécision de la définition desbesoins, ce qui vicie les documents de consultation et constitue de ce fait une violation desobligations de publicité (jurisprudence du Conseil d’État, 29 décembre 1997, départementde Paris). En second lieu, la notion « d’objectifs de développement durable » ne paraît passuffisamment précise pour servir de base à une telle sanction. Si l’on peut définir ce qu’est uncritère d’attribution exigeant une performance en matière de protection de l’environnementou une condition d’exécution intégrant une caractéristique environnementale, un objectifde développement durable est par hypothèse beaucoup plus large et, par construction,beaucoup plus flou. L’article 14 du Code des Marchés Publics 2006, qui ouvre la possibilitéd’intégrer des préoccupations environnementales dans les conditions d’exécution desmarchés ou des accords-cadres, mentionne d’ailleurs des « éléments à caractère (…)environnemental qui prennent en compte des objectifs de développement durable », cequi montre bien que ces objectifs ne sauraient à eux seuls directement recevoir uneapplication juridique. « L’insertion d’une telle obligation dans le code 2006 permet donccertainement une meilleure prise en compte des préoccupations environnementales dansles marchés publics et les accords-cadres, mais on est encore loin d’une obligation juridiquevéritablement contraignante et, à ce titre, susceptible d’être sanctionnée par le juge »44.La controverse de l’article 5 alimente donc les débats doctrinaires, dans l’attente d’unejurisprudence confirmant ou infirmant la position réservée des commentateurs.

Le Conseil d’État a d’ores et déjà eu l’occasion de se prononcer sur le Code desMarchés Publics 2006 suite à la remise en cause de certains articles par des organisationsprofessionnelles du secteur du bâtiment et des travaux publics et par des représentantsde la profession d’avocat. Mais dans son arrêt du 9 juillet 2007, le Conseil d’État n’a paseu à traiter des aspects relatifs au développement durable. En conséquence les précisionssont celles apportées par le Ministère de l'Économie, des Finances et de l'Emploi à traversles questions parlementaires. Or ces réponses sont de simples indications et ne peuventprétendre à une valeur juridique similaire à celle d’une jurisprudence. Néanmoins ellesprécisent la volonté du législateur. Dans une réponse à la question écrite n° 25167 du

41 MICHON Jérôme, Le cadre juridique de la commande publique responsable – Nouveau Code des Marchés Publics adoptéle 1er août 2006. Septembre 2006 p.1 [6.2.1]

42 Code des Marchés Publics 2006 : les grands principes de la réforme. CONTRATS PUBLICS n° 58. p.9 [3.3.2]43 Droit des marchés publics. Éditions du Moniteur. Point III.300.1 p.9-10 [1]44 Ibid. p.9

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

Frédéric Pichon - 2007 39

sénateur Bernard Piras publiée dans le Journal Officiel du Sénat du 9 novembre 200645,le Ministre précise que l’obligation de respect d’objectifs de développement durable pèsesur le pouvoir adjudicateur. Au demeurant, celui-ci n’a pas à se justifier de la non priseen compte de ces objectifs vis-à-vis des opérateurs économiques mais seulement enversles organismes de contrôle des marchés (contrôle de légalité ou chambre régionale descomptes). L’utilisation du rapport de présentation prévu à l’article 79 du Code des MarchésPublics est ici recommandée par le ministère. Néanmoins, cette réponse ministérielle reflèteune certaine hésitation sur la portée de l’article 5. En outre, elle occulte la nécessité, pourdes achats efficaces, de la définition préalable des besoins, qui n’est pas seulement uneobligation juridique.

D’autre part, aucun texte ne légitime la prise en compte de critères éthiques etéquitables dans les marchés publics et rien ne permet aux pouvoirs adjudicateurs des’assurer qu’ils participent ainsi au développement durable. Les pratiques sont pourtantnombreuses, surtout pour ce qui concerne les produits alimentaires, comme en régionRhône-Alpes46. Le commerce équitable comprend les trois volets du développementdurable : économique (meilleure rétribution du producteur), social (reconnaissance d’unminimum de droits sociaux aux travailleurs) et environnemental (utilisation de produitsnaturels, utilisation raisonnable des ressources). En outre la ville de Lille a systématiséles clauses éthiques dans ses marchés publics à travers une délibération47. Ces clausesse traduisent par le respect de droits sociaux fondamentaux : interdiction du travail forcé,de l’exploitation des enfants, respect de la liberté d’organisation et du droit de négociationcollective (liberté syndicale), non discrimination, rémunération au moins équivalente ausalaire minimum légal, respect des règles fixant la durée maximale du travail, rémunérationdes heures supplémentaires et respect des conventions de l’Organisation Internationale duTravail.

Cette lacune réglementaire relative aux aspects éthiques et sociaux n’est pas combléepar les directives marchés publics du 31 mars 2004. Il est de plus difficile d’inclure desnormes éthiques dans les procédures de passation des marchés publics dans la mesureoù ces normes ne se réfèrent pas à des caractéristiques visibles du produit mais à desaspects en amont de la chaîne logistique48. De plus, bien que la CJCE les ait légitimés (arrêtBeentjes et Commission contre France), les directives du 31 mars 2004 ne prévoient pasexplicitement de critères sociaux pour le jugement des candidatures et des offres. Malgréson inscription dans la loi française, on peut supposer que le juge administratif appliquerastrictement les principes liés aux critères d’attribution des marchés publics, à commencerpar le lien avec l’objet du marché, ce qui, en matière sociale, laisse une faible marge demanœuvre. En outre la crainte de voir des marchés attribués à des associations d’insertionsélectionnées pour des causes de voisinage voire d’électoralisme peuvent inciter le jugeadministratif à la prudence et à la rigueur49.

45 Doit-on justifier l’absence d’objectif de développement durable dans la définition du besoin ? CONTRATS ET MARCHESPUBLICS. Avril 2007. p. 31. [3.3.2]

46 REGION RHONE ALPES, Engager sa collectivité locale dans une démarche de commerce équitable Méthodes, expériences,acteurs. Mai 2007. [6.3]

47 INSTITUT DE LA GESTION PUBLIQUE ET DU DEVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE, Échanges de pratiques sur les achatsécoresponsables – Compte-rendu du lundi 3 octobre 2005. p.31 [6.1]

48 CARPE, Op. Cit. p.2749 DUFOURCQ Elizabeth, Rapport préliminaire sur la prise en compte des exigences et des critères sociaux dans les marchés

publics. La Documentation Française. Mai 2005. p.16 [6.4]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

40 Frédéric Pichon - 2007

Le cadre juridique de la commande publique écoresponsable révèle des zonesd’incertitudes. L’acheteur public n’est pas toujours à même de dépasser ces risquesjuridiques.

b- Un arbitrage difficile pour l’acheteurL’acheteur public cherche avant tout à sécuriser ses achats. L’existence d’une incertitudejuridique et le maintien de certaines croyances en matière d’achats durables limitentencore fortement le passage à l’acte. La priorité pour les pouvoirs adjudicateurs est derespecter les obligations légales prévues par le Code des Marchés Publics 2006 : lesobligations de publicité, de délais, le respect des seuils et des procédures sont autant decontraintes. Le moindre écart peut se traduire par une annulation de la procédure en casde recours précontentieux d’un concurrent évincé. L’incorporation d’éléments relevant dudéveloppement durable, dont les bases légales existent mais pour lesquelles subsistent uneappréhension, est une difficulté supplémentaire dans le métier d’acheteur.

De fait, l’image d’un achat durable dangereux, illégal, voire susceptible de constituerun fait délictuel à l’instar du délit de favoritisme demeure répandue50. En outre surgissentdes difficultés pour bâtir un cahier des charges ouvert lors de la mise au point d’un marchéintégrant des éléments de développement durable. Le risque de limiter la concurrence voirede créer une discrimination peut être la conséquence du recours à une solution existantsur le marché pour mettre au point son cahier des charges. Ce risque est encore plusélevé dans le cadre de produits nouveaux à caractère environnemental puisqu’il y a peu desolutions connues par l’acheteur. L’arbitrage en faveur d’un achat durable n’est pas favorisédans ce cas. En outre, les ambivalences concernant les critères d’attribution sociauxn’invitent pas à les retenir car il existe un risque juridique pour tous les marchés dont l’objetn’est pas expressément de nature sociale. Par conséquent, les pouvoirs adjudicateurs lesévitent, comme à Paris, où le guide de l'insertion par l'économie à travers la commandepublique contient un titre relatif aux aspects sociaux intitulé « impossibilité d’en faire descritères de choix »51.

Les retours d’expériences illustrés par la jurisprudence ne sont pas non plus des signesencourageants. La compatibilité entre achat durable et principes généraux du droit de lacommande publique est parfois litigieuse. La Cour Administrative d’Appel de Paris, dansses conclusions du 20 juillet 2004 sur l’affaire Société SITA Ile de France52, a par exemplecondamné la ville de Paris. Dans l’espèce, lors de la mise en concurrence d’un marchéde collecte des ordures ménagères, la ville avait lié la protection de l’environnement àl’utilisation de moteurs ayant les émissions polluantes les plus basses sur les véhiculesde collecte. Le pouvoir adjudicateur avait retenu au titre de la valeur technique del’offre l’indicateur de pollution des véhicules et justifiait son choix final par la naturedes motorisations proposées, mixte pour le candidat retenu par la commission d'appeld'offres, tout diesel pour le candidat requérant dont l’offre avait été rejetée. Or ce dernierprésentait une meilleure offre au regard des critères annoncés dans le règlement de

50 GROUPE DE COLLECTIVITÉS FRANCILIENNES POUR UNE COMMANDE PUBLIQUE RESPONSABLE - MICHONJérôme, Compte-rendu de l’atelier du 25/04/2006 : Le cadre juridique de la commande publique responsable et la démarche de gestionde projets appliquée aux achats responsables. Mai 2006. P. 1 [6.1]

51 VILLE DE PARIS. L’insertion par l’économique à travers la commande publique – Guide à l’attention des acheteurs publics.Avril 2004 p.9 [6.3]

52 Critères d’attribution des marchés publics – Conclusions de Victor Haïm Commissaire du gouvernement, CAA de Paris, 20juillet 2004. AJDA. 17 janvier 2005, p. 95 à 98. [3.2]

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

Frédéric Pichon - 2007 41

consultation (valeur technique et prix). La commission d’appel d’offres a donc porté atteinteau principe d’égalité entre les candidats en départageant les offres sur la nature des moteurséquipant les véhicules. Ce « nouveau critère » est alors illégal, quand bien même il apporteun mieux-être environnemental.

En outre, les marges de manœuvre juridiques sont limitées et les éventuellesnouveautés risquent d’être retoquées : le Tribunal Administratif de Bordeaux, dans unjugement du 5 décembre 2006, a condamné la commune de Bègles. Celle-ci avait demandéà ses services de faire figurer dans ses documents de marchés publics une clause demieux disant social permettant d'évincer les entreprises soumissionnaires ayant recoursau Contrat Nouvelle Embauche. Le juge administratif a annulé cette délibération pourméconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats. L’offre économiquementla plus avantageuse doit se fonder uniquement sur des critères en lien avec l'objet dumarché. Il ne peut donc y avoir de discrimination fondée sur la nature des contrats de travail.

Il convient par ailleurs de noter que depuis 2001, trois nouveaux codes sont venusmodifier des pratiques « traditionnelles ». La stabilisation des nouvelles façons de travailler(nouvelles procédures, nouvelles modalités de publicité, nouvelles obligations) accaparentencore la concentration de certains acheteurs publics, qui se consacrent alors moinsau développement durable. Le Code des Marchés Publics 2006 peut même inspirer laméfiance : l’arrêt du Conseil d’État du 9 juillet 2007, concernant la légalité du Code desMarchés Publics 2006 et de la circulaire du 3 août 2006, a annulé les dispositions du Coderelatives à la possibilité de fixer un nombre minimum de Petites et Moyennes Entreprises(PME) admises à déposer une offre pour un marché, pour cause de discrimination.La fragilisation d’une des mesures phares du Code 2006 ne favorise pas la confiancedes acteurs dans les autres nouveautés apportées par ce texte, comme celles liées audéveloppement durable. Enfin, ces Codes successifs se sont traduits par un effet d’usure :de nombreux documents, formels ou non, mis en place depuis 2001 dans des collectivitéspour favoriser les achats durables n’ont pas été efficients, ou n’ont pas été remis à jouren fonction des directives communautaires et du nouveau Code des Marchés Publics (casde la charte des achats durables de la ville d’Orléans53, du guide relatif à l’insertion parl’économique à travers la commande publique de Paris…).

Un autre problème est lié à la faiblesse de la concurrence dans les secteurs d’activitéliés au développement durable. Ne risque-t-il pas d’y avoir discrimination si le pouvoiradjudicateur définit son besoin en incluant des aspects environnementaux et en décrivantpar conséquent un produit pour lequel le nombre d’entreprises susceptibles de répondreest très faible ? Un pouvoir adjudicateur peut ne vouloir que des fenêtres en bois dansla mesure où il existe une concurrence forte pour ce type de produit spécifique ; il n’y adonc pas d’atteinte abusive à la concurrence et à l’égalité d’accès à la commande publiquedans ce cas. Mais à partir de combien de candidats potentiels un acheteur se situe-t-il dansle cadre de la légalité ? La réponse dépend du montant et de la nature du marché. Ceproblème d’une concurrence insuffisante contient également une dimension économiqueavec le risque que le marché soit déclaré infructueux faute de candidats.

2°) Des risques économiques contraignantsEn matière d’achats écoresponsables, deux risques économiques sont mis en avant :l’infructuosité du marché (a), et le surcoût à l’achat (b).

53 VILLE D’ORLEANS. Marchés publics et développement durable – La charte des achats durables – La ville d’Orléans poursuitson engagement. 2005 [6.5]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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a- Le péril de l’infructuositéAu delà des difficultés juridiques, la mise en pratique de l’achat durable peut se révélerêtre une impasse faute de fournisseurs54, ou en raison de la présence d’un seul fournisseurcapable de répondre au cahier des charges. Certains secteurs d’activité du BTP sontmarqués par une pénurie de fournisseurs pour leurs activités classiques. Par exempledans la Loire, les pouvoirs adjudicateurs sont confrontés à des difficultés pour trouverdes candidats pour la maçonnerie, les sols souples, les sols minces - carrelage – faïenceou la menuiserie intérieure55. L’intégration d’aspects sociaux ou environnementaux est unfacteur aggravant et de tels marchés sont plus souvent confrontés à infructuosité. Lesguides méthodologiques font fréquemment mention des premières tentatives avortées decommande publique écoresponsable. Le Conseil Régional de Bourgogne avait notammentlancé un marché de fournitures de bureau en intégrant un critère environnemental pondéréà hauteur de 30 %56. Toutefois, si les réponses concernant les produits courants étaientcompatibles, les stylos faisaient figure d’exception car aucun échantillon ne correspondaitaux attentes du pouvoir adjudicateur. Les matériaux de fabrication ne permettaient pas laconservation et la recharge des stylos. Après déclaration sans suite du marché, le secondappel d’offres a modifié son libellé et une entreprise a pu répondre en proposant des produitsrechargeables en bois, suffisamment esthétiques pour permettre une utilisation en internecomme en externe.

Un autre risque économique est lié à l’intégration de conditions d’exécutionenvironnementales ou sociales dans les marchés publics. Celles-ci, en tant qu’elles figurentau cahier des charges du marché, sont en effet impératives : l’entreprise doit les prendre encompte au même titre que les conditions techniques sous peine de voir son offre déclaréeirrégulière. Une entreprise qui n’est pas en mesure de satisfaire ces clauses n’est donc pasen mesure de répondre. Le risque d’éviction peut être analysé au préalable en vérifiant lenombre d’opérateurs économiques susceptibles de présenter une offre complète.

Mais si le péril de l’infructuosité est une réalité, les marchés publics peuvent néanmoinsjouer un rôle à travers les signaux envoyés au secteur privé. Les efforts faits par lescandidats en matière environnementale sont récompensés lors du choix de l’offre parl’instauration de critères. Cette incitation à la R&D dans le domaine du développementdurable est essentielle. En septembre 2005, sur les cinquante entreprises implantées enFrance titulaires du label écologique communautaire, dix-neuf étaient des PME57. Leur rôleest donc majeur dans le développement durable mais ces petites entités porteuses deproductions innovantes et labellisées sont insuffisamment structurées pour répondre auxappels d’offres. Ainsi un secteur économique peut être localement déficient (exemple desdifficultés d’approvisionnement en produits « bio » à Pamiers dans l’Ariège58). A l’inverse lesgrosses structures répondent avant tout aux marchés dépassant les seuils de formalisation

54 DYCKMANS Sandrine, Acheteurs éco-responsables recherchent fournisseurs désespérément. Octobre 2004. [6.2.2]55 Données issues du stage à Loire Habitat de mai à juillet 2007 – cf. rapport de stage.56 GALLAS Marie, L’achat de fournitures de bureau, cité dans CONSEIL REGIONAL DE BOURGOGNE, Marchés publics : pourune démarché écoresponsable – Compte-rendu des interventions des rencontres de Dijon du 5 décembre 2006. Décembre 2006.p. 12 [6.1]

57 Site du Ministère de l'Écologie, de l'Aménagement et du Développement Durables relatif aux écolabels [7]58 DYCKMANS Sandrine, Pamiers court derrière les fournisseurs pour alimenter sa cantine en produits « bio ». 5 octobre

2004. [6.2.2]

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

Frédéric Pichon - 2007 43

des procédures59 et donc plus volumineux d’un point de vue financier. Or les marchésintégrant des clauses ou des critères de développement durable sont généralement despetits marchés, notamment lorsqu’une collectivité débute dans l’achat écoresponsable. Lerisque d’infructuosité peut donc freiner la mise en place d’une politique d’écoresponsabilitéde la part des personnes publiques.

L’enquête 2006 de Factea Sourcing sur les pratiques d’achats durables60 fait le pointsur les « freins à la mise en œuvre pérenne d’une politique achats durables »61. Lesquarante collectivités interrogées identifient comme étant le frein le plus important le manqueapparent de références du marché fournisseur. D’autres illustrations sont mentionnées dansles différents guides à l’attention des acheteurs publics. Le Conseil Régional de Bourgogne,pionnier en matière d’achats écoresponsables, a ainsi connu des difficultés au niveaude l’offre dans ses premiers marchés de véhicules propres en 2004-200562. Le manquede stations d’approvisionnement en GPL et GNV (34 stations sur l’ensemble du territoireBourguignon), l’absence de formation des garagistes à l’entretien et à la réparation de cetype de véhicules et l’arrêt de la production de véhicules électriques dans l’attente par lesconstructeurs de nouvelles générations de batterie limitaient l’opportunité d’acquérir desvéhicules propres.

Une autre limite économique de l’efficience des achats publics écoresponsablesconcerne la pratique de la sous-traitance ou de la cotraitance. En effet, lors de l’intégrationde clauses de développement durable dans un marché public, la personne publique poursuitun objectif d’incitation sur la structure de l’offre. Cependant l’effet incitatif ne fonctionnepas toujours si l’entreprise titulaire du marché sous-traite les produits, services ou travauxcomportant des éléments environnementaux. Il est toutefois admis que ce phénomène peutlimiter l’infructuosité.

Enfin, le péril de l’infructuosité, s’il est souvent invoqué pour refuser les achats publicsdurables, n’est pas systématique. Les craintes parfois infondées des acheteurs peuventêtre levées par l’application de solutions simples contre l’infructuosité, préconisées parla plupart des guides méthodologiques. Ceux-ci recommandent d’engager une démarcheécoresponsable par des marchés portant sur des produits pour lesquels les pratiques sontfacilitées par une multiplicité d’expériences et une offre suffisante : papier recyclé, produitsphytosanitaires, bois, éclairage public, peintures et solvants, produits d’entretien.

L’infructuosité des marchés publics responsables est certes une possibilité.Néanmoins, l’assimilation de l’importance du développement durable, d’un point de vueéconomique en tant qu’image notamment, devrait se traduire par une hausse significativedu nombre de produits et de domaines concernés. En l’occurrence, qui dit développementdurable dit croissance durable et rentable (il suffit pour cela de se référer aux innombrablespublicités ventant le caractère durable ou écologique de produits peu respectueux del’environnement au demeurant).

59 Actuellement 210 000 euros pour les marchés de travaux, de fournitures et de services passés par les collectivités territoriales60 FACTEA SOURCING. Quelle politique achats durables pour les collectivités territoriales ? Enquête et bilan opérationnel sur

la politique « achats durables » des collectivités territoriales. Novembre 2006 [5]61 Ibid. p. 3362 MARIE Dominique, La politique d’achats « véhicules propres », cité dans CONSEIL REGIONAL DE BOURGOGNE, Marchés

publics : pour une démarché écoresponsable – Compte-rendu des interventions des rencontres de Dijon du 5 décembre 2006.Décembre 2006. p. 11 [6.1]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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b- Un surcoût initial à relativiserLa rareté de l’offre peut être à l’origine d’un surcoût des prix proposés comparativementà des offres classiques n’intégrant pas la protection de l’environnement ou la promotionde l’emploi. A l’achat, un produit ou un service respectueux du développement durableest plus coûteux qu’un produit ou un service lambda car il s’agit souvent d’une offreinnovante, comportant un apport technologique supérieur, nécessitant des conditions deproduction plus longues, favorisant l’insertion professionnelle de travailleurs handicapésdont la productivité est limitée, etc.

Au demeurant, dans le cadre d’une démarche HQE, qui consiste à maîtriser les impactsdes bâtiments sur l’environnement extérieur et créer un environnement intérieur sain etconfortable, les surcoûts initiaux sont inévitables et de l’ordre de 2 à 10 % par rapportà une construction utilisant des matériaux classiques. Néanmoins ces quelques pointssupplémentaires peuvent représenter un obstacle pour les bailleurs sociaux. Ces dernierssont en effet grandement dépendants des subventions publiques qui leur sont accordéesdans le cadre de l’aménagement urbain par exemple. Bien qu’il existe des subventionsparticulières au titre d’une démarche HQE (octroyées par l’ADEME notamment), un projetde construction HQE nécessite l’apport financier de fonds propres, souvent limités chez lesbailleurs sociaux. La démarche HQE contient quatre piliers63 : éco-construction (chantier àfaibles nuisances, relation harmonieuse des bâtiments avec leur environnement immédiat,choix intégré des procédés et produits de construction), éco-gestion (gestion de l’énergie, del’eau, des déchets d’activité, de l’entretien et de la maintenance), confort (hygrothermique,acoustique, visuel et olfactif) et santé (qualité sanitaire de l’air, de l’eau et des espaces).Bien que l’amortissement de l’investissement soit plus rapide compte tenu de la diminutiondes charges de fonctionnement, peu nombreux sont les maîtres d’ouvrage qui franchissentle pas.

Néanmoins, en matière de construction comme pour les produits et les services, lesurcoût initial à l’achat d’un produit durable est compensé à l’usage. Afin de prendreen compte cet équilibre, les acheteurs peuvent utiliser le critère du coût global pourl’attribution du marché à l’offre économiquement la plus avantageuse. Celui-ci inclut lescoûts d’utilisation du produit, traduit les économies réalisées au cours de l’utilisation duproduit : consommation d’énergie, résistance à l’usage, structure rechargeable, recyclabilitédes composants, biodégradabilité… Selon l’ADEME, le coût global sur 15 000 heures d’uneampoule classique à incandescence est de 126,9 euros (6,9 euros à l’achat et 120 eurosà l’utilisation) contre 34,7 euros pour des ampoules fluo-compactes (10,7 euros à l’achatet 24 euros à l’utilisation)64. En conséquence, « acheter vert n’est pas forcément acheterplus cher », comme le proclamait Herbet Aichinger, chef d’unité à la direction généralede l’environnement de la Commission européenne, lors du lancement officiel du Manueleuropéen « Achetez vert » le 29 octobre 200465.

Le surcoût financier de l’achat écoresponsable est également à relativiser pour ce quiconcerne certains métiers du bâtiment. De fait, les pratiques professionnelles en vigueur

63 BOUDEAU Frédéric, Villenave-d’Ornon, une piscine construite dans le respect de la démarché HQE. MARCHES PUBLICS.N°59 Août septembre 2005 [3.2]

64 Voir le site de l’ADEME, rubrique « Économies d’énergie » [7]65 HUGON Danyèle, Les performances environnementales des entreprises dans les marchés publics – Recommandations de

la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris. Juin 2005. P. 9 [6.2.2]

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

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permettent de connaître les secteurs à forte intensité de main d’œuvre66. Ainsi, le prix d’unlot peinture intérieure est composé à 70 % de coût de main d’œuvre. Le chiffre est de50 % pour la maçonnerie et proche de 40 % dans le domaine des travaux publics. Parconséquent, dans ces secteurs, la part de la main d’œuvre est primordiale, donc le surcoûtdû par exemple à une peinture plus écologique n’impacte pas sensiblement le prix finald’un lot peinture dans un marché public. Exiger une peinture répondant aux exigences dulabel NF environnement se traduit donc par un mieux-être environnemental sans sacrificefinancier pour la personne publique. En effet, les peintures écolabellisées ne contiennentpas de métaux lourds comme le plomb, l'arsenic, le cadmium ou le mercure ; les teneurs enhydrocarbures et en composés organiques volatils sont en outre strictement limitées.

Néanmoins, la démarche achat durable suppose selon Philippe Schiesser, une politiqued’achats formalisée67 (seulement 17 % des collectivités en sont dotés selon une étude ducabinet Factea Consulting68), une personne dédiée à l’opération (les petites collectivités n’enont souvent pas les moyens), une analyse des enjeux de développement durable pour lescatégories de produits cibles (cette démarche peut nécessiter l’aide d’un prestataire externedonc payant) et des résultats vérifiables. D’un point de vue financier, accéder aux achatsdurables ne semble donc pas à la portée de tous les pouvoirs adjudicateurs. En outre lespetites collectivités ne peuvent se tourner que depuis très peu de temps vers des centralesd’achats pour effectuer des achats écoresponsables. De fait, l’UGAP a notifié son premiermarché de véhicules propres en juillet 2007. Il s’agit d’un marché à bons de commandes devéhicules particuliers standards ou spécifiques dont le montant sur trente mois doit oscillerentre 190 et 600 millions d’euros HT. Un marché de papier éco-labellisé avait égalementété notifié en juillet 2007 (marché inférieur à 1 million d’euros HT) 69. Néanmoins, la placedes produits durables dans le catalogue de l’UGAP est minime : les véhicules propres sontbeaucoup moins nombreux que les 4x4.

L’environnement semble donc rester une préoccupation de pays riches et l’achatdurable une préoccupation de collectivités très engagées ou disposant de plus de moyensque les autres. C’est ainsi que plus les collectivités sont de taille importante, plus ellesintègrent le développement durable et perçoivent le Code des Marchés Publics 2006comme pouvant favoriser le développement durable70. Dans les autres collectivités, lesréticences affichées ne sont toutefois pas toujours fondées. Celles liées au surcoût del’achat écoresponsable sont souvent injustifiées. Les difficultés liées à l’annualité desbudgets et au cloisonnement des budgets d’investissement et de fonctionnement (lorsqu’unarticle budgétaire est lié à l’acquisition d’un produit et un autre à sa maintenance) ne sontpas crédibles au regard des nombreuses évolutions de l’encadrement juridique des budgetsdes personnes publiques (loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001,pluriannualité des budgets…). Néanmoins, la gestion des contraintes budgétaires de court

66 OBSERVATOIRE ÉCONOMIQUE DE L’ACHAT PUBLIC. Commande publique et accès à l’emploi des personnes qui ensont éloignées- Guide à l’attention des acheteurs publics. Juillet 2007. P.29 [6.4]

67 ECOEFF, La Commission publie des lignes directrices relatives à des procédures de passation de marchés respectueusesde l'environnement. 5 juillet 2001. [6.2.1]

68 Etude citée dans BEUREY Thierry - EVS Conseil, De l’intérêt des collectivités locales pour l’achat responsable. Novembre2006. [6.2.2]

69 Cf. le site de l’UGAP [7], notamment la déclaration des marchés conclus au cours de l’année 2006 en vertu de l’article 133du Code des Marchés Publics 2006

70 DELUZ Sophie, EMERY Cyrille, Marchés publics : les praticiens jugent le code 2006. LE MONITEUR. 1er juin 2007. p. 73. [4]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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terme (au mieux sur une mandature, soit six ans dans une mairie) laisse peu de place aulong terme induit par une politique d’achats durables.

Le surcoût à l’achat pour un produit durable doit donc être relativisé. La possibilitéde prendre en compte les coûts de fonctionnement, de maintenance, d'entretien etd'exploitation lors de la passation du marché, avec le critère du coût global, favorise lesproduits respectueux de l’environnement ou intégrant d’autres aspects du développementdurable.

3°) L’effectivité des achats socialement responsables à travers lesclauses d’insertion en question

L’achat public socialement responsable traduit les préoccupations du pouvoir adjudicateuren matière d’emploi et d’insertion professionnelle. Mais le mécanisme des clausesd’insertion (a) est-il l’assurance de résultats positifs (b) ?

a- Le mécanisme des clauses d’insertionUn marché public peut satisfaire aux objectifs de développement durable prévu à l’article 5du Code des Marchés Publics en intégrant des conditions d’exécution sociales d’insertionprofessionnelle des publics en difficulté. L’article L. 322-4-16 du Code du travail relatif auxstructures d’insertion par l’activité économique définit ces publics en difficulté : « L’insertionpar l’activité économique a pour objet de permettre à des personnes sans emploirencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières de bénéficier de contratsde travail en vue de faciliter leur insertion sociale et professionnelle. Elle met en œuvre desmodalités spécifiques d’accueil et d’accompagnement ».

Sont ainsi concernés les demandeurs d’emploi de longue durée (plus de 12 moisd’inscription au chômage), les allocataires du Revenu Minimum d’Insertion, les publicsreconnus travailleurs handicapés au sens de l’article L. 323-3 du Code du travail,les bénéficiaires de l’Allocation Spécifique de Solidarité, de l’Allocation d’Insertion, del’Allocation parent isolé, de l’Allocation Adulte Handicapé ou de l’Allocation d’Invalidité,les jeunes de niveau infra 5, c’est-à-dire de niveau inférieur au CAP/BEP, les personnesprises en charge dans le dispositif d’Insertion par l’Activité Économique et les personnesemployées dans les Groupement d’Employeurs pour l’Insertion et la Qualification (GEIQ)et dans les associations poursuivant le même objet71. L’intégration de clauses d’insertionsociale dans les marchés publics est plus adaptée aux marchés de travaux dont l’éventuelledurée, la localisation et le montant se prêtent à l’emploi de publics en difficulté. Néanmoins,prévoir une condition d’exécution imposant 50 % de publics en difficulté pour exécuter unmarché serait de facto discriminatoire car seules les structures spécialisées seraient enmesure de répondre72. Un tel marché relèverait plutôt de l’article 15 du Code des MarchésPublics 2006.

En outre, les modalités d’insertion ne sont pas limitatives. L’intégration d’une clauserelative à l’insertion professionnelle des publics en difficulté doit préserver la libertéd’organisation des soumissionnaires. Le maître d’ouvrage ne saurait imposer le recoursà un partenaire ou à une catégorie d’entreprise prédéterminée par ses soins (Tribunal

71 OBSERVATOIRE ÉCONOMIQUE DE L’ACHAT PUBLIC. Commande publique et accès à l’emploi des personnes qui ensont éloignées - Guide à l’attention des acheteurs publics. Juillet 2007. P.9 [6.4]

72 Ibid. P.27

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Administratif de Paris, 27 juin 2000, Gaborit et associés). Le recours à la sous-traitanceavec une entreprise d’insertion ou une autre structure d’insertion par l’activité économique,le recours à des organismes qui mettent à disposition des salariés en insertion dans lesconditions légales et réglementaires fixées par le Code du travail, l’utilisation des salariésoccupant des emplois mutualisés dans le cadre d’un GEIQ ou de toute autre association demême nature et l’embauche directe de personnes en difficulté d’insertion sont exécutoires.Tous les types de contrats sont par ailleurs possibles, comme l’a rappelé le juge administratifdans la jurisprudence Bègles du 5 décembre 2006.

Enfin, le regroupement des acheteurs publics sur un même territoire rend plus efficaceles clauses d’insertion dans les marchés publics, à condition de coordonner les actions. Lapossibilité de conventionnement facilite les démarches. Ainsi, une « charte locale d’insertion– Promotion de l’emploi au travers des marchés publics – Applicable au porteur de projetet aux maîtres d’ouvrage contractant avec l’Agence Nationale pour le RenouvellementUrbain » (ANRU) a été signée le 11 avril 2005 par la ville de Saint Etienne et différentspartenaires, comme les bailleurs sociaux publics et privés. Cette convention regroupe denombreux acteurs (ANRU, collectivités, Plan Local pour l’Insertion et l’Emploi, missionslocales…) concernés par l’insertion professionnelle.

b- Les difficultés rencontrées : l’exemple de Saint-EtienneLa charte signée dans l’agglomération stéphanoise vise à « restructurer, dans un objectif dedéveloppement durable, les quartiers classés en Zone Urbaine Sensible. Les signatairesde la charte s’engage à un objectif d’insertion au minimum égal à 5 % du nombre totald’heures travaillées dans le cadre des travaux d’investissement du projet financés parl’ANRU, réservés aux habitants des quartiers classés en ZUS ; d’autre part, la charte prévoitun objectif d’insertion au minimum égal à 10 % des embauches directes ou indirecteseffectués dans le cadre de la gestion urbaine de proximité et de la gestion des équipementsfaisant l’objet d’aides de l’ANRU, réservés aux habitants des ZUS » 73. Un marché public nepeut en principe pas faire référence à la zone d’habitation des publics concernés par uneclause sociale. Le législateur a toutefois accordé une dérogation à l’ANRU, en application

de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville etla rénovation urbaine. En conséquence, les signataires d’une charte avec cet organismedoivent s’engager à réserver 5 % des heures travaillées dans le cadre des investissementsfinancés par l’ANRU aux habitants des zones urbaines sensibles en difficultés d’insertionprofessionnelle.

La convention signée à Saint-Etienne représente pour la totalité des opérationsconcernées 2005-2008 un montant global proche de 212,6 millions d’euros. Le potentield’heures d’insertion est donc élevé. En effet, le concours de l’ANRU s’élève à environ54 millions d’euros, ce qui peut se traduire par un effort d’insertion de l’ordre de 1,35millions d’euros (en se basant sur un taux moyen de 50 % de main d’œuvre et un tauxd’insertion de 5 %). Dans l’hypothèse d’un coût moyen horaire charges comprises de 30euros, ce sont donc 45 000 heures d’insertion professionnelle potentielles que permet lacharte. Néanmoins, le nécessaire suivi des conditions d’exécution et du respect de leursobligations par les cocontractants est une difficulté récurrente de ces clauses. Les pénalitésen cas de non respect des engagements contractuels relatifs à l’insertion posent problème :l’entreprise n’est pas toujours responsable des carences constatées. En effet, les absences

73 LOIRE HABITAT. Promotion de l’emploi au travers des marchés publics – Charte locale d’insertion – Applicable au porteur deprojet et aux maîtres d’ouvrage contractant avec l’ANRU. Version du 10 novembre 2006. p.2 [6.5]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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imprévues et les retards sont souvent en cause lorsque les bénéficiaires de l’insertion sontproposés par un organisme extérieur comme les missions locales. Néanmoins, les résultatsde l’insertion sont globalement satisfaisants. La charte d’insertion locale de Saint-Etienne,étendue en 2006, n’a toutefois pas encore fait l’objet d’un traitement statistique public. Auplan national, pour 53 territoires recensés entre 2002 et 2006 pour avoir mis en œuvre desclauses sociales dans les marchés de travaux ou de services, plus de deux millions d’heuresd’insertion ont été recensées en faveur des publics éloignés de l’emploi74. Les entreprisessont en outre favorables à ces clauses, attendu que la formation des bénéficiaires del’insertion professionnelle est financée par des fonds publics. Le coût d’un emploi pourvudans le cadre d’un conventionnement avec l’ANRU est d’environ 1 000 euros, sachantqu’environ les 2/3 des personnes recrutées dans ce cadre restent dans l’emploi à l’issuede l’exécution du marché public75.

Les différents risques juridiques, économiques, et pratiques liés à un marché publicintégrant des aspects du développement durable montrent donc que le cheminement versune généralisation des achats verts est encore long. Associés à des craintes persistantes,ces risques constituent un frein puissant.

B- Des lacunes de l’achat public durable en France àdépasser

La prise en compte du développement durable dans la société suppose des changementsculturels et comportementaux. Les acheteurs ne sont pas étrangers à cette évolution, maisles réticences constatées étant ancrées dans les pratiques (1°), il est nécessaire d’encadrerplus fortement les achats publics écoresponsables, pour en faire une modalité d’achatordinaire (2°).

1°) Des réticences ancrées dans les pratiquesLa nouveauté du développement durable dans le Code des Marchés Publics explique enpartie les réticences des acheteurs publics (b) à respecter les obligations légales et àutiliser les possibilités offertes par le Code en matière d’achats durables. Surtout, l’impulsionnécessaire à la démarche fait globalement défaut (a). En outre, la position des opérateurséconomiques ne facilite pas toujours la mise en pratique de l’achat public écoresponsable(c).

a- La nécessité d’une volonté commune

74 Alliance Villes Emploi, Ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, Conseil national de l’insertion par l’activitééconomique, Clauses sociales et promotion de l’emploi dans les marchés publics. Guide en direction des donneurs d’ordre », citédans MINISTÈRE DE L'ÉCOLOGIE, DE L'AMÉNAGEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLES, Plan national d’action pour desachats publics durables. Mars 2007. P.3 [2]

75 Interview de Maurice BURDIN, Le dispositif emploi de Grenoble-Alpes Métropole. Article du dossier Du bon usage desaspects sociaux, CONTRATS PUBLICS. Décembre 2005, p.62-63 [3.1]

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

Frédéric Pichon - 2007 49

Une politique d’achats durables ne s’improvise pas : il faut une volonté, notamment politique,forte, et une stratégie. Les changements de comportements induits par une telle démarchesupposent en outre une modification du management dans les administrations.

Les expériences76 montrent que le niveau d’implication des élus et des directeursconditionne le niveau des objectifs, fondés sur la réponse politique à la question « quelest le surcoût acceptable pour la collectivité ? ». L’impulsion des dirigeants peut setraduire par une délibération générale qui est un signe fort d’un engagement en faveurdu développement durable, lequel pourra ainsi prendre les achats publics comme moyend’action. Une délibération est en effet un acte exécutoire et officiel, au contraire d’unesimple motion, d’une résolution ou d’une note interne, dont les effets peuvent être purementdéclaratifs. Il existe de nombreux exemples-types de délibération ou de motion sur le thèmedu développement durable et plus précisément des achats durables77. La volonté politiquepermet de légitimer la démarche d’achats écoresponsables auprès des services en interneet des opérateurs économiques en externe.

Toutefois, les achats sont encore trop souvent conçus et perçus par les personnespubliques comme un moyen de fonctionnement déconnecté des objectifs de leurspolitiques78. Ainsi, les achats publics ne reflètent pas systématiquement les politiqueséconomiques, environnementales et sociales, ce qui prive ces dernières d’un instrumentde soutien efficace. Il résulte également de cette situation des incohérences, par exemplelorsqu’une collectivité locale investit dans la gestion rationnelle des déchets sur sonterritoire mais n’intègre pas de critères de fin de vie (biodégradabilité, part de composantsrecyclables…) pour les matériaux et les produits qu’elle acquiert. Ces incohérences sontsource d’inefficacité et suscitent des coûts qui auraient pu être évités. Elles contribuentd’autre part à rendre peu crédibles, aux yeux des opérateurs économiques et des citoyens,les objectifs affichés et les politiques menées. Une démarche achat durable est d’autant plusefficace qu’elle est coordonnée aux autres actions de la collectivité. Ce constat expliquenotamment le succès des Agendas 21.

La réussite d’une politique d’achats durables passe ensuite par l’implication del’ensemble des acteurs. Les élus en premier lieu, porteurs du projet ; le service marchés-achats, responsable de la mise en œuvre de la démarche ; les acheteurs, qui doivent êtreformés ; les fournisseurs, qui doivent être informés ; les citoyens, qui doivent être incitésà adopter une consommation responsable. La communication interne comme externe estdonc un aspect primordial dans une stratégie d’achats durables. La mise en place d’uncomité pilote au sein d’une administration, ou d’un groupe pilote quand plusieurs collectivitéscollaborent pour mettre en place une politique commune d’achats écoresponsables, peut setraduire par l’intégration d’un pilotage transversal. La sensibilisation, la mobilisation voire lamotivation de tous les acteurs est un préalable nécessaire à la concrétisation des objectifs.En effet, rien ne sert d’acheter des ampoules dites à économie d’énergie si les lumières nesont pas éteintes lorsqu’une pièce est inoccupée (durant le temps de pause déjeuner par

76 Par exemple : POLIAUTRE Danièle, Développement durable et éclairage public : l’expérience de la mairie de Lille, citédans INSTITUT DE LA GESTION PUBLIQUE ET DU DEVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE, Échanges de pratiques sur les achatsécoresponsables – Compte-rendu du lundi 3 octobre 2005. Octobre 2005. p. 31-32 [6.1]

77 Voir le site du collectif « De l’éthique sur l’étiquette » pour un exemple de motion sur l’achat éthique [7] Pour un exemplede délibération sur l’achat public socialement responsable : LOQUET Patrick, Réussir la prise en compte de l’insertion sociale etprofessionnelle, Article du dossier Du bon usage des aspects sociaux, CONTRATS PUBLICS, Décembre 2005, p. 60 [3.1]

78 La plupart des guides à l’attention des acheteurs insistent sur l’apport du raccordement d’une démarche achats durablesà une politique environnementale globale au sein des collectivités

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

50 Frédéric Pichon - 2007

exemple). La responsabilisation de tous les acteurs est nécessaire, notamment en interne.Le rôle du management est donc de s’assurer de la pénétration au sein des services dela démarche globale de développement durable. La volonté commune indispensable à lamise en place d’une politique achats durables ne souffre pas d’exception. Un lobbyinginterne peut être nécessaire si des réticences infondées sont affichées par des élus ou desresponsables de service79.

Une fois le consensus installé et la stratégie définie, il convient d’analyser l’état desmarchés existants afin de repérer les éventuelles traces de développement durable et lesmarchés sur lesquels une action est possible. L’éventualité de l’acquisition de matérielsd’occasion (avec le risque qu’ils soient de conception dépassée et moins respectueusede l’environnement) ou de la location doit être envisagée dès ce stade. Il revient auservice marché-achats de recenser les référentiels techniques existants et de déterminerles modalités d’intégration du développement durable aux achats publics. Pour s’assurerdu respect des obligations du cocontractant, le service peut insérer dans le cahier desclauses administratives de nouvelles pénalités, des clauses financières incitatives liéesà des axes de progrès, afin d’inciter le cocontractant à se mobiliser pleinement, etc.L’existence préalable d’une politique achat est un atout dans la mise en place d’unedémarche d’achats écoresponsables. En effet, afin de prévenir tout risque d’infructuosité, ilest préférable de connaître les offres à caractère durable disponibles sur le marché. Le caséchéant, le recours à une expertise externe (guides méthodologiques, cabinets de conseils)pour déterminer les besoins sous un angle de développement durable et pour évaluer leniveau de performance sociale ou environnementale d’une offre est un palliatif. Auparavant,l’analyse approfondie des besoins réels des utilisateurs de produits et services peut êtrel’occasion de réajuster les quantités aux consommations. De fait, certaines collectivitésfonctionnent dans une logique de moyens et non de résultats ; une politique d’achatsdurables peut être l’occasion d’impulser une logique rationnelle de consommation descrédits budgétaires. Intégrer des critères environnementaux ou sociaux nécessite donc uneréflexion en amont et notamment dans la définition des besoins : l’achat le plus durable estcelui que l’on ne fait pas. L’acquisition d’objets promotionnels jetables constitue ainsi uneaberration tant économique qu’écologique80.

L’implication de tous les acteurs est la condition sine qua non de la réussite d’unepolitique d’achats durables. Ce qui signifie également que la moindre défection d’undécideur est une lacune difficile à surmonter. En outre, les réticences face à l’achat publicécoresponsable peuvent être dues aux difficultés des acheteurs publics à déterminer lechamp de ces achats.

b- Les difficultés des acheteursLes acheteurs publics, malgré la profusion d’outils de savoir en la matière, n’ont parfois pasla compétence pour déterminer une politique d’achats écoresponsables, ou bien utilisentle développement durable comme un prétexte pour détourner les règles de la commandepublique. Le cadre juridique et les retours d’expériences déterminent un champ d’applicationqui, sans être exhaustif, élimine certaines pratiques. Ainsi, faire des achats durables ne

79 CONSEIL GENERAL DES HAUTS-DE-SEINE, Encourager une commande publique écoresponsable dans les Hauts-de-Seine. Mars 2005. P.[6.3]

80 PASQUIER Sarah, Achats publics durables : en parler pour mieux les passer ! 22 janvier 2007 [6.2.2]

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

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signifie pas imposer l’origine géographique des matériaux utilisés sur un chantier81 (horsexceptions liées aux matériaux utilisés pour la rénovation de bâtiments historiques oudont l’architecture nécessite des matériaux précis). Toutefois, l’intégration d’un critère deperformance de l’offre en matière de protection de l’environnement peut permettre deprivilégier une entreprise s’approvisionnant dans la région d’exécution du chantier parrapport à un candidat se fournissant à l’étranger, par exemple en Chine.

Une politique d’achats durables ne se traduit pas non plus par un favoritisme enversles fournisseurs locaux. Il peut être tentant, en prétextant des effets bénéfiques surl’environnement, d’insérer un critère d’attribution lié à la proximité du fournisseur (moindresdéplacements, rapidité d’exécution…). Mais un tel critère est illégal car il crée unediscrimination. Le seul critère susceptible de favoriser les opérateurs économiques situésà proximité du lieu d’exécution du marché, validé par le cadre juridique de la commandepublique, est celui du délai de livraison. Toutefois, si une entreprise éloignée met en œuvreles moyens d’une intervention rapide, elle ne peut être exclue. La logique est similaireconcernant les aspects sociaux d’un marché public. Au demeurant, la mise en œuvred’un critère social peut se traduire par le risque de voir la collectivité publique protéger oupromouvoir l’emploi local. Il semble certain qu’une entreprise installée sur le territoire dupouvoir adjudicateur serait plus performante à mener des actions d’insertion sur le planlocal que des entreprises implantées hors du territoire d’exécution du marché. Cependantle juge administratif censure l’attribution préférentielle d’un marché au motif de la protectionde l’emploi local. Le Conseil d’État, dans un arrêt Commune de Ventenac-en-Minervois du29 juillet 1994 a déclaré illégale la préférence au bénéfice des entreprises locales dès lorsque leurs offres ne dépassaient pas de plus de 4 % les meilleures offres.

L’achat public écoresponsable ne saurait en outre favoriser les PME-PMI82. D’ailleursl’arrêt du Conseil d’État en date du 9 juillet 2007 a annulé les dispositions du Code desMarchés Publics relatives à ces faveurs. En outre, avec les marchés à procédure adaptéenotamment, les PME-PMI sont les partenaires naturels des administrations locales ; etrien ne garantit une meilleure prise en compte d’aspects sociaux et environnementauxdans le cadre d’une contractualisation avec une PME qu’avec une entreprise de taille plusimportante.

Les difficultés des acheteurs publics peuvent d’autre part être liées au faible volumefinancier de leurs contrats susceptibles d’intégrer des aspects du développement durable.Une disposition du Code des Marchés Publics 2006 peut cependant être utilisée pourdépasser cet obstacle. En effet, l’article 8 du Code prévoit la possibilité de recourir àun groupement de commandes : des opérateurs économiques peuvent donc réaliserdes économies d’échelle en regroupant leurs besoins et par exemple acquérir des outilsperformants au plan environnemental. D’autre part, le groupement est une incitation à laR&D dans le domaine du développement durable car les marchés sont plus conséquents.

Des difficultés concrètes limitent dans certains cas le recours à l’achat solidaire.Ainsi, vérifier le respect des clauses contractuelles en faveur du développementdurable est parfois impossible. C’est le cas lorsque des clauses relatives au commerceéquitable sont intégrées dans le cahier des charges. Les coûts de la vérification des

81 Cela est d‘autant plus vrai concernant le bois : OBSERVATOIRE ÉCONOMIQUE DE L’ACHAT PUBLIC. Guide de l’achat publicécoresponsable – Le bois, matériau de construction. Mai 2007. P.20 [6.4]

82 Définition française : entreprise employant un maximum de 500 employés, ayant un chiffre d'affaires inférieur à 40 millionsd’euros ou un résultat après bilan de moins de 27 millions d’euros, et avec moins de 25 % de contrôle par une ou plusieurs entreprise(s)non-PME - excepté pour les sociétés d'investissement et de capital-risque.

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

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conditions de production quand il s’agit d’un café équitable fabriqué en Amérique du Sudsont disproportionnés. Aucun organisme légal n’est par ailleurs chargé d’effectuer cesvérifications83.

Par ailleurs, les acheteurs publics peuvent être confrontés à des difficultés pourfaire accepter de tels achats. L’achat durable n’est pas nécessairement l’expressiond’un engagement sincère pour le développement durable ou l’illustration d’une politiquecohérente. L’exemple des véhicules des administrations centrales parisiennes84, s’il illustreune inclination au développement durable, soulève quelques interrogations. Jusqu’en 2006,le parc de véhicules de ces administrations situées à Paris était surdimensionné : 85 % desvéhicules avaient une puissance supérieure à 7 CV pour des besoins qui correspondent,très majoritairement, à une circulation intra-muros avec une seule personne transportée. Enconséquence, la mission interministérielle de modernisation du parc automobile de l’Étatprojette de doter ce parc de 550 à 600 véhicules adaptés à l’usage urbain d’ici 2008. Deplus, les véhicules acquis doivent dorénavant rejeter au maximum entre 109 g et 122 gde CO2 par kilomètre selon leur motorisation, conformément à la circulaire du PremierMinistre du 28 septembre 2005 sur le rôle exemplaire de l’État en matière d’économiesd’énergie, qui prescrit l’achat ou la location de véhicules particuliers ne dégageant pas plusde 140 g de CO2 par kilomètre. Il est attendu de cette mesure une réduction des rejets de 1000 tonnes de CO2, une réduction de consommation de carburant d’au moins 250 tonneséquivalent-pétrole et une économie de 30 à 40 % sur le coût du parc considéré. Cependant,peut-on dans ce cas parler d’achats durables ou simplement d’un réajustement ? Enl’espèce, l’irresponsabilité antérieure de l’administration est plus prégnante que son attitudeestampillée écoresponsable. Il en est de même pour les phénomènes « d’évaporation »des fournitures de bureau ou des ramettes de papier : une politique d’achat suppose uneconsommation durable et un changement des comportements des personnes en contactavec les produits et services achetés par les pouvoirs publics.

Mais pour percevoir l’ensemble de ces particularités, les acheteurs publics doiventacquérir les compétences liées à l’achat durable. Le manque de formation sur les achatsécoresponsables des services de l’État est néanmoins une lacune. En 2005, une étude de J-B de Foucauld, Inspecteur Général des Finances85, portant sur l’utilisation par les acheteursde l’État et des organismes de Sécurité Sociale des potentialités sociales offertes par lecadre juridique de la commande publique, s’était révélée infructueuse, faute de réponsepositive.

La question de la fiabilité est fréquemment mise en avant pour refuser les achatsdurables. En l’an 2000, la Caisse des Dépôts avait tenté de formaliser une démarched’achats de fournitures de bureau en produits verts avec la création d’un catalogue.Mais les utilisateurs, peu préparés à une telle évolution, ont systématiquement considéréles produits présentés comme étant de mauvaise qualité et donc inadaptés à leursbesoins. Néanmoins, en reprenant une démarche logique où les utilisateurs sont égalementacteurs (sensibilisation, participation, décentralisation des initiatives), les évolutions des

83 CITIA, Comment être équitable ! SIS Marchés – Information réglementaire du 4 mai 2007. [6.2.2]84 MINISTÈRE DE L'ÉCOLOGIE, DE L'AMÉNAGEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLES. Plan national d’action pour

des achats publics durables. Exemple du parc automobile de l’État. P.3 Mars 2007 [2]85 Étude portant sur 231 marchés et plus de 626 millions d’euros. DUFOURCQ Elizabeth, Op. Cit. P. 15 [6.4]

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comportements se font en douceur86. Une politique d’achats durables peut en outre se fairepar étape pour être acceptée par tous les acteurs. Le Conseil Régional des Pays de la Loirea intégré le développement durable dans les marchés en deux étapes pour ce qui concernela fourniture des repas à la région87. En 2003, son marché prévoyait une variante permettantde présenter des produits respectueux du développement durable. En 2006, le cahier descharges prévoyait un produit bio dans chaque repas. D’abord incitatif, le marché est devenuimpératif.

Les difficultés des acheteurs publics, réelles ou supposées, n’en demeurent pas moinsune lacune pour l’achat public durable. Pour Jérôme Grand d’Esnon, directeur des affairesjuridiques du MINEFI et acteur majeur dans la rédaction du nouveau Code des MarchésPublics, le développement durable « fait toutefois l’objet d’une vraie prise de consciencenotamment dans les collectivités locales. Elles veulent le mettre en avant même si elles nesavent pas toujours comment s’y prendre »88.

c- Les craintes des opérateurs économiquesDirectement concernés par les achats publics durables, les opérateurs économiquesexpriment des craintes quant à l’effectivité de la concurrence et à l’homogénéité desexigences des pouvoirs adjudicateurs89.

Déjà soumis aux nombreuses formalités administratives du Code des Marchés Publics,les opérateurs économiques souhaitent que les performances environnementales portentsur les produits et les services et non sur les entreprises elles-mêmes. Pour cela les pouvoirsadjudicateurs doivent encourager les entreprises à fabriquer des produits certifiés par unécolabel et les pouvoirs publics doivent favoriser l’accès des entreprises à ces écolabels. En2007, les deux écolabels décernés en France (NF environnement et l’écolabel européen)portent sur 43 produits90. Une éventualité est la multiplication des références aux labelsdans les spécifications techniques des marchés, rendues possibles par l’article 6 du Codedes Marchés Publics 2006. Mais la France n’est pas pionnière en ce domaine, à l’exempledu papier recyclé de format A4 qui ne représente que 3,5 % du marché national, contreplus de 15 % en Allemagne et près de 10 % en Angleterre91. Par son caractère exemplaire,la commande publique doit encourager une consommation responsable des opérateurséconomiques et des foyers.

86 MICHELOT Anne-Marie, L’engagement de la Caisse des Dépôts dans la démarche développement durable etécoresponsabilité, cité dans IGPDE, Échanges de pratiques sur les achats écoresponsables – Compte-rendu du lundi 3 octobre 2005.Octobre 2005. P.15 [6.1]

87 GROUPE DE COLLECTIVITÉS FRANCILIENNES POUR UNE COMMANDE PUBLIQUE RESPONSABLE - MICHONJérôme, Compte-rendu de l’atelier du 25/04/2006 : Le cadre juridique de la commande publique responsable et la démarche de gestionde projets appliquée aux achats responsables. Mai 2006. P.18 à 21 [6.1]

88 Cité dans DELUZ Sophie, EMERY Cyrille. Op. Cit. p. 69. [4]89 HUGON Danyèle, Les performances environnementales des entreprises dans les marchés publics – Recommandations de laChambre de Commerce et d’Industrie de Paris. Juin 2005. P.2-3 [6.2.2]

90 http://www.ecologie.gouv.fr/ecolabels/ , onglet « données générales et économiques » [7]91 ADEME, Minutes des premières rencontres nationales « Produits verts et éco-consommation : modes d’emploi. 7 et 8 juin

2006. Maison de la Chimie. Juillet 2006 p.39 [6.1]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

54 Frédéric Pichon - 2007

Cependant les acheteurs manquent de formation92 sur les diverses formes d’étiquetageenvironnemental et les différents écolabels officiels. Ils ne sont donc pas en mesure dereconnaître les offres des entreprises les plus soucieuses du développement durable. Deplus, la spécificité française du nombre élevé de communes participe au nombre très élevéd’acheteurs publics (200 000 au total en France93). Les difficultés pour homogénéiser lespratiques et former les agents acheteurs en matière d’achats écoresponsables limitent lamutualisation des expériences du côté des entreprises.

D’autre part, les démarches de certification ISO 14 000 ne sont pas assez reconnueslors de la passation des marchés publics, alors qu’elles sont souvent porteuses de qualitéet d’innovation. Selon l’AFNOR94, les normes ISO 14000 permettent d’aider une entrepriseà maîtriser et/ou à réduire ses sources d’impacts sur l’environnement. Ces normesn’imposent pas d’exigences absolues en matière de performance environnementale,si ce n’est l’engagement politique de la direction de l’entreprise à se conformer à lalégislation et au principe de l’amélioration continue. Les normes internationales de gestionenvironnementale doivent permettre aux entreprises et organismes volontaires d’acquérirdes outils et d’intégrer des principes environnementaux à leur système de gestion déjà enplace. La certification ISO 14 000 permet notamment de formaliser des plans d’action pourune meilleure gestion des impacts liés à une activité, un service donné, un produit utilisé.

Quant aux aspects sociaux des marchés publics, leur développement ne provoque pasde refus de principe de la part des syndicats et des fédérations d’entreprises. En effet, denombreuses branches d’activité ont initiées des démarches relatives au respect du droitdu travail. Dans le bâtiment les principales fédérations ont mis au point une charte relativeà la sous-traitance. En outre les opérateurs économiques ne sont pas défavorables à desclauses sociales, dans la mesure où une entreprise qui ne respecte pas les obligationslégales en vigueur provoque une distorsion de concurrence à travers un dumping social95.Au contraire d’une discrimination, l’utilisation d’éléments sociaux dans les marchés publicspeut donc rendre plus efficace la concurrence entre les opérateurs économiques. D’autrepart, dans des secteurs frappés par une pénurie de main d’œuvre, l’insertion sociale peutêtre un palliatif financièrement intéressant pour les entrepreneurs, puisque le coût de laformation est assuré par l’apport de fonds publics.

Enfin, selon un sondage IPSOS pour le Moniteur réalisé du 14 au 19 mars 2007,le développement durable n’est considéré comme un apport majeur que par 20 % desentreprises et seulement 16 % des maîtres d’ouvrage96. Cela ne signifie pas que lespouvoirs adjudicateurs et les opérateurs économiques ne souhaitent pas s’investir en faveurdu développement durable, mais qu’à leur sens la réforme de 2006 ne marque pas unerévolution. Ainsi « le code 2006 n’a pas bouleversé la vie des entreprises », selon ChristianGay, président de la commission marchés de la Fédération Française du Bâtiment97. De

92 Ibid. p.1693 RAVENEL Pierre, L’achat public durable en France en 2006 : vers une généralisation. FACTEUR 4D Novembre – Décembre

2006. P.4 [4]94 Voir le site de l’AFNOR, rubrique information [7]95 CONSEIL REGIONAL NORD PAS DE CALAIS, COMMUNAUTE URBAINE DE DUNKERQUE, COLLECTIF DE L’ETHIQUE

DE L’ETIQUETTE. Guide de l’achat éthique pour les acheteurs publics. Septembre 2006. P.6 [6.3]96 DELUZ Sophie, EMERY Cyrille. Op. Cit. p.7197 Ibid. p.69

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fait, le critère du prix reste prédominant et la référence aux écolabels dans les règlementsde consultation trop rare.

Une étude menée au niveau européen en 2006 conclut, malgré la faiblesse du nombrede réponses françaises (qui serait dûe à un manque de temps…) que 33 % des marchésintègrent des considérations environnementales en France98. Mais la réalité des 200 000acheteurs publics semble éloignée de ce résultat flatteur. L’association les Eco Maires alancé une enquête nationale en mai 2007 pour faire un bilan de l’achat public responsableet disposer d’indicateurs fiables99. L’ambition est par cette occasion de « démontrer que lacommande publique responsable est bien une réalité locale » et de constituer une base dedonnées sur l’intégration du développement durable dans les marchés publics. Une réalitélocale que différentes mesures pourraient encourager.

2°) Pour des achats systématiquement durablesLes risques liés à l’intégration du développement durable dans les marchés publics etles réticences des acteurs de la commande publique limitent l’expansion des achatsécoresponsables. Au-delà de cet aspect pour lequel des solutions sont envisageables (b),il convient de s’interroger sur la manière dont les marchés publics peuvent, à travers leurdéroulement, favoriser le développement durable, en particulier avec la dématérialisation(a).

a- La dématérialisation des marchés publics : un atout environnemental ?La dématérialisation des procédures de marchés publics est apparue avec le Code desMarchés Publics 2001100 et s’inscrit dans le plan Administration ELEctronique 2004-2007.Le Vade-mecum juridique sur la dématérialisation des marchés publics en donne unedéfinition : « la dématérialisation consiste à mettre en œuvre des moyens électroniquespour effectuer des opérations de traitement, d’échange et de stockage d’informationssans support papier »101. La pratique des procédures de passation des marchés publicsimpose un constat : les formalités des marchés publics sont gourmandes en supportpapier. Formulaires DC4, DC5, nouveau DC7 ou attestations fiscales et sociales surl’honneur nécessaires lors de chaque candidature, édition des dossiers de consultation desentreprises, tirages de plans, frais d’acheminement ou encore duplication pour archivagerythment la vie des services marchés-achats.

98 RAVENEL Pierre, L’achat public durable en France en 2006 : vers une généralisation. FACTEUR 4D Novembre – Décembre2006. P.4 [4]

99 ASSOCIATION LES ECO MAIRES, Enquête : collectivités et commande publique durable. [5]100 Section 8 - Dématérialisation des procédures - Article 56 « Les échanges d'informations intervenant en application du présentcode peuvent faire l'objet d'une transmission par voie électronique. 1o Le règlement de la consultation, la lettre de consultation,le cahier des charges, les documents et les renseignements complémentaires peuvent être mis à disposition des entreprises parvoie électronique dans des conditions fixées par décret. Néanmoins, au cas où ces dernières le demandent, ces documents leursont transmis par voie postale. 2o Sauf disposition contraire prévue dans l'avis de publicité, les candidatures et les offres peuventégalement être communiquées à la personne publique par voie électronique, dans des conditions définies par décret. Aucun avis nepourra comporter d'interdiction à compter du 1er janvier 2005. 3o Un décret précisera les conditions dans lesquelles des enchèresélectroniques pourront être organisées pour l'achat de fournitures courantes. 4o Les dispositions du présent code qui font référenceà des écrits ne font pas obstacle au remplacement de ceux-ci par un support ou un échange électronique ».101 LEVET-VEYRIER Stéphanie, Modernisation de l’achat public. Recueil de textes. 2007. P. 33 [1]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

56 Frédéric Pichon - 2007

Comme en matière de développement durable, chaque nouvelle édition du Codedes Marchés Publics a engagé plus avant les pouvoirs adjudicateurs dans la voie dela dématérialisation. Ainsi l’article 56 du Code des Marchés Publics 2004 prévoyait qu’à

compter du 1er janvier 2005, l’administration devait permettre aux candidats de répondre parvoie électronique dans le cadre des procédures formalisées. Les possibilités ouvertes parle Code des Marchés Publics actuel concernent le téléchargement des pièces du marché(avis d'appel public à la concurrence, documents de consultation, CCAP, CCTP, bordereaudes prix, acte d’engagement) et la possibilité pour les opérateurs économiques de déposeren ligne leurs candidatures et leurs offres. En outre, le Code des Marchés Publics prévoitla possibilité pour les pouvoirs adjudicateurs de recourir aux enchères électroniques del’article 54 : « Une enchère électronique est une procédure de sélection des offres réaliséepar voie électronique et permettant aux candidats de réviser leurs prix à la baisse et demodifier la valeur de certains autres éléments quantifiables de leur offre. II. - Le pouvoiradjudicateur ne peut recourir à l’enchère électronique que pour les marchés de fournituresd’un montant supérieur aux seuils fixés au II de l’article 26 ». Cette procédure entièrementdématérialisée relève cependant plus de l’expérimentation que de la pratique courante despersonnes publiques.

La dématérialisation permet-elle de limiter la consommation de papiers ? La questionest de savoir si la mise en œuvre de moyens électroniques pour effectuer des opérationsde traitement, d’échange et de stockage d’informations dans les marchés publics procureun mieux-être environnemental. Or, l’effet global de la dématérialisation est limité. Defait, la transmission par voie électronique se traduit par un transfert de l’impression duDCE au niveau des entreprises, et des supports des candidatures et des offres auniveau des pouvoirs adjudicateurs. Néanmoins la dématérialisation des procédures demarchés publics rend directs les échanges entre acheteurs et vendeurs. La suppressiondes intermédiaires comme les services d’acheminement du courrier évite les transportsphysiques des dossiers, qui nécessitent des véhicules qui, quoique « propres » (GPL, GNV,biocarburants…), n’en rejettent pas moins des gaz polluants.

La dématérialisation permet également aux entreprises de consulter les dossiersde consultation mis en ligne : en 2005, le site achatpublic.com a recensé 141 123téléchargements de dossiers de consultations, pour moins de 5 % de réponsesélectroniques102. Ces téléchargements permettent aux entreprises de trier, sur formatélectronique, les marchés vraiment susceptibles de les intéresser quand seul l’intitulédu marché a initialement attiré leur attention. L’expérience de la dématérialisation à uneéchelle plus locale traduit les mêmes tendances. A Loire Habitat, Office Public de l’Habitat

du département de la Loire, durant la période du 1er janvier au 20 août 2007, 771téléchargements de dossiers de consultation ont été recensés (pour 99 consultations misesen ligne), pour seulement six réponses électroniques en ligne.

Un autre aspect de la dématérialisation dans le cadre des marchés publics intéresseles échanges avec le contrôle de légalité préfectoral. La voie électronique demeurel’exception malgré les engagements politiques symbolisés par l’arrêté du ministre del’intérieur du 26 octobre 2005 portant approbation d'un cahier des charges des dispositifsde télétransmission des actes soumis au contrôle de légalité et fixant une procédured'homologation de ces dispositifs. En 2006, quatre départements (les Yvelines, départementpilote, les Alpes-Maritimes, le Rhône et le Val-d'Oise) ont expérimenté la transmission

102 DELUZ Sophie, EMERY Cyrille, FODOR Xavier, Les entreprises face à la dématérialisation, des marchés publics. LEMONITEUR du 24 mars 2006, p.44 à 50. Cité dans LEVET-VEYRIER Stéphanie, Op. Cit. p. 3 à 9

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des documents soumis au contrôle de légalité par voie électronique. La généralisationdu contrôle de légalité dématérialisé à toutes les préfectures était prévue pour l’année2007 mais a subi des retards du fait du manque de coopération des collectivités. En effet,seules les collectivités territoriales volontaires peuvent envoyer à la préfecture ou à la sous-préfecture leurs documents sous forme électronique. En outre, les documents transmis aucontrôle de légalité sont généralement issus des délibérations et de l’État civil103.

En fin de compte, la dématérialisation à travers les marchés publics nécessite, à lamanière des achats écoresponsables, une évolution des mentalités, notamment du côtédes opérateurs économiques. Les réticences aux réponses électroniques, étayées par larhétorique de la méfiance envers la transmission en ligne (virus, piratage), sont infondées.Le risque est en effet moindre qu’une transmission par courrier104. De plus, les entreprises nesavent pas toujours que leur certificat de signature électronique utilisé par exemple pour ladéclaration et le règlement de la TVA en ligne est valable pour candidater électroniquementà un marché public. La possibilité pour les pouvoirs adjudicateurs de rendre obligatoire auxopérateurs économiques à l’horizon 2010 les réponses dématérialisées, conformément àl’article 56-III-2 du Code des Marchés Publics est un encouragement.

En conclusion, s’il est nécessaire d’améliorer l’information sur les possibilités de ladématérialisation des marchés publics, les transmissions par voie électronique représententun atout environnemental à valoriser.

b- Un code de la commande publique écoresponsable ?Au-delà du débat lié à la sortie de trois Codes des Marchés Publics en cinq ans et lanécessité d’intégrer dans un même texte l’ensemble des modalités de l’achat public, commeles délégations de service public, les marchés publics, ou les contrats de partenariat, unéventuel code de la commande publique pourrait être l’occasion de franchir un palliersupplémentaire dans la prise en compte du développement durable. A condition que ce codesoit lui aussi durable, dans le temps surtout. Le cadre juridique des contrats de partenariatprévoit ainsi des dispositions que le Code des Marchés Publics ne permet pas. L’ordonnancen°2004-599 du 17 juin 2004 pour les contrats de partenariat insère le critère du montantsous-traité à de petites et moyennes entreprises pour choisir l’offre économiquement la plusavantageuse. Une extension au Code des Marchés Publics avait été envisagée lors destravaux préparatoires au Code des Marchés Publics 2006, mais semblait incompatible avecle droit communautaire et a donc été exclue.

D’autre part, l’absence de labels sociaux rend difficile la mise en place de considérationssociales dans les marchés publics pour le jugement des candidatures. En matièrede spécifications sociales, les référentiels sont inexistants pour les produits mais sedéveloppent au niveau des entreprises. Toutefois il s’agit souvent de démarches internesdifficiles à évaluer. A l’instar des écolabels, les pouvoirs publics ont intérêt à développer deslabels publics attestant de la prise en compte par les opérateurs économiques d’aspectssociaux et éthiques dans leur politique d’entreprise interne et en termes d’investissements.L’exemple de la loi Belge du 27 février 2002 visant à promouvoir une production socialementresponsable fait référence. Le législateur a créé un label octroyé sur le fondement d’unepart du respect des normes définies dans les conventions de base de l’OrganisationInternationale du Travail, et d’autre part sur le fondement du respect de certains principes

103 Voir l’article consacré au sujet sur le site de l’association des maires des grandes villes de France [7]104 Jérôme Grand d’Esnon, cité dans DELUZ Sophie, EMERY Cyrille, FODOR Xavier, Op. Cit. p.49

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

58 Frédéric Pichon - 2007

sociaux comme la non discrimination en matière de rémunération105. Pour améliorer la priseen compte du développement durable dans les marchés publics, un Code de la CommandePublique Écoresponsable pourrait élargir le panel de critères relevant du développementdurable, en donnant une liste fournie d’exemples spécifiques à la prise en compte d’aspectssociaux et environnementaux : niveau de formation professionnelle, niveau de nocivité desproduits, niveau d’égalité hommes/femmes dans l’organisation de l’opérateur économique,performance en matière de promotion de la diversité106, durée de vie des produits, niveauxde recyclabilité ou de biodégradabilité des produits, caractère écologiquement innovant del’offre, émission sonore, gestion des déchets…

Une autre possibilité pour généraliser l’achat durable serait d’obliger les acheteurspublics à tenir compte du fonctionnement de leurs constructions sur les trente ans à venir.Cette démarche serait plus efficace que la difficile mise en œuvre de la démarche HQE. Lalégalisation du principe des « 4 R », pour Réduire les quantités consommées, Réutiliser,Recycler et Récupérer107, dans un Code de la Commande Publique Écoresponsablepermettrait également d’intégrer le cycle de vie pour tous les achats de produits.

L’encadrement juridique des achats publics se limite à la subordination dudéveloppement durable aux principes généraux de la commande publique. Un Code dela Commande Publique Écoresponsable pourrait aller plus loin en reconnaissant queles achats publics doivent concourir à la mise en œuvre du développement durable dela société. Par conséquent, les pouvoirs adjudicateurs devraient en pratique départagerles opérateurs économiques en choisissant non plus l’offre économiquement la plusavantageuse mais l’offre la plus avantageuse pour concourir au développement durable.

Bien qu’un Code de la Commande Publique Écoresponsable relève de l’improbable,les propositions présentées peuvent pour la plupart être adaptées au cadre actuel.Ainsi, en ce qui concerne la communication entre les acteurs, la sensibilisation et lastructuration des moyens humains, dont l’efficacité présume celle des achats durables,diverses dispositions permettraient d’améliorer la formation des acheteurs108. Tel seraitl’objectif de l’intégration d’un module obligatoire sur la commande publique écoresponsabledans les formations initiales de tous les agents territoriaux. La consolidation des réseauxexistant et l’encouragement à la création de réseaux d’échanges sur la commande publiqueécoresponsable, dans les régions qui ne sont pas encore concernées, pourraient êtreconfiés à une agence nationale en charge d’accompagner les collectivités. En parallèle, lacréation d’une base commune d’informations sur la commande publique écoresponsablecentraliserait les données issues des retours d’expériences. En outre l’élaboration d’unguide du dialogue entre les entreprises et les acheteurs publics préciserait les attentes desvendeurs et des acheteurs. Les groupements d’achats existants doivent également êtreincités à proposer des écoproduits dans leurs catalogues.

105 NAVEZ François, Marchés publics et développement durable : quelles possibilités de prise en compte des particularitésdes entreprises d’économie sociale ? Actes du colloque ISTR-EMES à Paris du 27 au 29 avril 2005. [6.1]

106 JACOB Maxime, Peut-on introduire le critère social dans la commande publique et comment s’y prendre ? Article du dossierDu bon usage des aspects sociaux, CONTRATS PUBLICS. Décembre 2005 p. 44-45 [3.1]

107 VILLE D’ORLEANS. Marchés publics et développement durable – La charte des achats durables – La ville d’Orléanspoursuit son engagement. 2005. P.4 [6.5]

108 ALBERT Emmanuelle, Commandes publiques et développement durable – 4° assises nationales du développementdurable- Synthèse de l’atelier M7. 11 octobre 2006. P.2-3 [6.1]

II- Verdir n’est pas mûrir : le long cheminement vers des achats publics durables

Frédéric Pichon - 2007 59

La validation de certaines propositions concernant les produits présentés par lesopérateurs économiques devrait d’autre part permettre aux acheteurs publics de satisfaireleurs besoins et aux entreprises de développer leurs débouchés, dans une logiquevertueuse. La multiplication des références aux écolabels et du nombre de produitsécolabellisés serait bénéfique pour tous les acteurs. De même, la qualification des matériauxd’origine renouvelable, notamment dans le secteur du bâtiment, permettrait de sortir dudilemme du coût initial concernant la construction. Il convient en outre d’institutionnaliserl’ensemble des comités d’évaluation et de qualification des matériaux, afin d’éviter unlobbying nuisible au développement durable109.

Pour vérifier la pertinence de ces propositions, il est nécessaire d’encourager lamise en place d’Observatoires départementaux de la commande publique locale. De telsorganismes existent actuellement, comme la Cellule Économique Rhône Alpes110. Celle-ciassocie les fédérations du bâtiment et des travaux publics aux maîtres d’ouvrage publics etprivés acteurs de la construction dans la région. Cependant, malgré le nombre d’indicateursproposés par ces observatoires (entre autres, modes de passation des marchés, tauxd’infructuosité et motifs, délais moyens entre la date de publicité et la date de notification),aucun ne concerne le développement durable. L’objectif final est de mettre en œuvre lesmoyens d’un recensement complet des montants des marchés publics, par catégorie depouvoir adjudicateur, par nature, par secteur d’activité… dans le but de connaître la portéede l’achat écoresponsable et les marges de manœuvre existantes. Aucune statistiqueglobale n’est à l’heure actuelle disponible.

109 Ibid.110 Voir le site de cet organisme [7]

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

60 Frédéric Pichon - 2007

CONCLUSION

Parce que le développement durable n’en est pas la quintessence mais que les marchéspublics ont été désignés comme un levier pour intégrer aux politiques publiques desdimensions environnementales, sociales et économiques, l’ambigüité majeure relevée enintroduction demeure. L’état actuel du droit de la commande publique ouvre certes despossibilités aux acheteurs publics désireux de s’engager dans la voie de l’écoresponsabilité.L’intégration progressive du développement durable dans les Codes des Marchés Publics,sous l’impulsion du droit communautaire, rend désormais possible la prise en compted’éléments sociaux et environnementaux à différentes étapes d’un marché public. Pourtant,la perspective d’un Code de la Commande Publique Écoresponsable apparaît illusoire.

Sous le régime du Code 2006, les critères d’attribution peuvent prendre la formed’une combinaison de critères qualitatifs et économiques, éventuellement à caractèreenvironnemental et dans une moindre mesure, social, sous quatre conditions : lescritères d’attribution doivent être liés à l’objet du marché ; ils doivent être objectifs etsuffisamment précis, donc ne pas donner lieu à une liberté inconditionnée de choix pourle pouvoir adjudicateur ; ils doivent respecter les obligations de publicité et être portés àla connaissance des opérateurs économiques dès l’avis de marché ; enfin, les critèresne doivent pas violer le principe de non-discrimination. Si les critères permettent declasser les offres et de valoriser la stratégie d’un opérateur en matière de développementdurable, les clauses à caractère social ou environnemental incluses dans les conditionsd’exécution fonctionnent sans compromis. Les guides méthodologiques proposent denombreux exemples d’expériences réussies et les pouvoirs publics intègrent les achats dansla stratégie globale de développement durable.

Toutefois, les démarches de « verdissement » des achats sont limitées juridiquementmais aussi d’un point de vue économique. La logique issue des principes généraux dela commande publique demeure supérieure à celle induite par le développement durable,ce qui constitue la limite fondamentale de l’achat durable. Le juge administratif rappellefréquemment que l’achat écoresponsable n’est pas un but en lui-même mais une modalitéd’achat. L’offre des opérateurs économiques n’est en outre pas encore suffisammentdéveloppée. Surtout, il manque encore dans de nombreuses collectivités locales la volonténécessaire.

La solubilité du développement durable dans les marchés publics est en effet le fruitd’une évolution complexe affectant les pratiques et les schémas de pensée. Le changementculturel pour l’intégration du développement durable dans les achats connaît une tendancepositive mais inégale selon la taille et les moyens des collectivités. Pourtant, les pouvoirsadjudicateurs ont une responsabilité morale et doivent prendre conscience que leur pouvoird’achat n’est pas seulement économique. Ils peuvent aussi inciter les fournisseurs àfavoriser le progrès environnemental et social, sensibiliser les agents et les utilisateursdes services publics aux objectifs et aux moyens d’une consommation durable, avecune efficacité accrue pour les administrations locales. Les élections municipales de 2008seront peut-être l’occasion d’avancées : la nécessaire impulsion politique éventuellementmanquante pourrait trouver son fondement dans les nombreux programmes électoraux quiintègrent des éléments de développement durable.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

Frédéric Pichon - 2007 61

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

Dans le corps du mémoire, les notes de bas de page renvoient, après les références, à l’unedes catégories de la bibliographie suivante. Le classement des sources est réalisé dans unsecond temps de façon chronologique.

[1] Ouvrages généraux sur les marchés publics

CHABANOL Daniel, JOUGUELET Jean-Pierre, BOURRACHOT François. Droits etobligations des signataires des marchés de travaux. Collection analyse juridique. Éd.Le Moniteur. 4° édition 2005. 528 p.

CHARREL Nicolas, GUIBAL Michel, Code commenté des marchés publics. Éditions duMoniteur, Octobre 2006, 420 p.

LEVET-VEYRIER Stéphanie, Modernisation de l’achat public. Recueil de textes –Master Management du Secteur Public : Collectivités et Partenaires - IEP Lyon. 30mars 2007. 103p.

BRECHON-MOULENES Christine, DE BAECKE Pierre, DELALOY Guillaume, EMERYCyrille, de GERY Philippe, GUEZOU Olivier, LICHERE François, NICINSKI Sophie,ROUQUETTE Rémi, TERNEYRE Philippe. Droit des marchés publics. Éditions duMoniteur. Collection Moniteur référence. Version actualisée juillet 2007. 3 000 p.

[2] Rapports et documents officiels assimilés

Ministère de l'Écologie, de l'Aménagement et du Développement Durables.StratégieNationale de Développement Durable – Programme d’actions et plus particulièrementle point 9 « État exemplaire, recherche et innovation » (p. 80-86). Versionactualisée du 13 novembre 2006. [En ligne] 100 p. Disponible sur http://www.ecologie.gouv.fr/2-Programmes-d-actions.html

Ministère de l'Écologie, de l'Aménagement et du Développement Durables. StratégieNationale de développement durable. Version du 13 novembre 2006. [En ligne].Disponible sur http://www.ecologie.gouv.fr/-SNDD-actualisee-.html

Ministère de l'Écologie, de l'Aménagement et du Développement Durables.Dossier de presse : Plan National d’Action pour des Achats PublicsDurables – Lancement de la consultation publique. 13 p. 14 décembre2006. [En ligne] Disponible sur http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/dossier_presse_plan_daction_achats_publics_durables.pdf

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[3] Articles – Revues juridiques

[3.1] Articles juridiques ciblés sur les aspects sociaux

SCHMIDT Philippe, Insertion des publics en difficulté : pour une utilisation sécuriséeCHAVAROCHETTE Séverine, Des conceptions communautaires et nationales

différentesRAVENEL Pierre, Critère social et bénéfices sociétauxDE BAECKE Pierre, Critère social et effectivité de la concurrence : un dialogue de

sourds ?FOLLIOT-LALLIOT Laurence, Critère social et droit de préférence aux États-UnisJACOB Maxime, Peut-on introduire le critère social dans la commande publique et

comment s’y prendre ?HEINTZ Mathieu, Sélection des candidats et critères sociauxLOQUET Patrick, Réussir la prise en compte de l’insertion sociale et professionnelleBURDIN Maurice, interview, Le dispositif emploi de Grenoble-Alpes Métropole.Articles du dossier Du bon usage des aspects sociaux, CONTRATS PUBLICS –

L’actualité de la commande et des contrats publics, n° 50, Décembre 2005, p.22 à 64

[3.2] Articles juridiques ciblés sur les aspects environnementaux

LLORENS F. et SOLER-COUTEAUX P., Les marchés publics au secours del’environnement. CONTRATS ET MARCHES PUBLICS. Éditions du Juris-Classeur.Octobre 2001, n° 10, p.3.

LLORENS F., La CJCE persiste et signe : après le critère social, elle admet le critèreenvironnemental. CONTRATS ET MARCHES PUBLICS. Éditions du Juris-Classeur.Novembre 2002, p. 16 à 18.

BLAISE Damien, La prise en compte des critères environnementaux dans les marchéspublics. AJDA. 10 mars 2003, p. 433 à 436.

GLIOZZO Thomas, L’admissibilité d’un critère environnemental au regard de laréglementation communautaire des marchés. AJDA. 16 février 2004, p. 334 à 337.

LAVOILLOTE Marie Pierre, L’environnement dans le nouveau Code des MarchésPublics – L’affirmation du contrat au service de l’environnement. AJDA. 8 novembre2004, p. 2081 à 2084.

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BOUDEAU Frédéric, Villenave-d’Ornon, une piscine construite dans le respect de ladémarché HQE. MARCHES PUBLICS. N°59 Août septembre 2005

[3.3] Articles juridiques traitant du développement durable dans saglobalité…

[3.3.1] … en droit communautaire

CHAVAROCHETTE Séverine, Panorama des principaux apports des nouvellesdirectives marchés publics. CONTRATS PUBLICS – L’actualité de la commande etdes contrats publics, n° 33, mai 2004, p. 46-47

CHARREL Nicolas, Les critères d’attribution dans la nouvelle directive unifiée.CONTRATS PUBLICS – L’actualité de la commande et des contrats publics, n° 33,mai 2004, p. 62-63.

BREVILLE Anne, La détermination et la mise en œuvre des critères en droitcommunautaire. CONTRATS PUBLICS – L’actualité de la commande et des contratspublics, n° 39, décembre 2004, p. 39 à 43

HEINTZ Mathieu, La transposition des critères sociaux, environnementaux etéconomiques. CONTRATS PUBLICS – L’actualité de la commande et des contratspublics, n° 49, novembre 2005, p. 43 à 46

[3.3.2] … en droit interne

VANDERMEEREN Roland, L’admission des candidatures et le choix des offres.CONTRATS PUBLICS – L’actualité de la commande et des contrats publics, n° 31,mars 2004, p. 76 à 80

CLOIX Pierre-Manuel, Contrôle juridictionnel et critères de choix. CONTRATSPUBLICS – L’actualité de la commande et des contrats publics, n° 33, mai 2004, p.58 à 61

Code des Marchés Publics 2006 : les grands principes de la réforme. CONTRATSPUBLICS – L’actualité de la commande et des contrats publics, n° 58, Septembre2006, p. 9

SUPPLISSON Didier, Critères d’attribution : quelques changements dans la continuité.AJDA. 2 octobre 2006, p. 1765 à 1769.

Comment mettre en œuvre l’intégration du développement durable dans la commandepublique ? CONTRATS ET MARCHES PUBLICS. Éditions du Juris-Classeur. Février2007. p. 35-36.

Doit-on justifier l’absence d’objectif de développement durable dans la définition dubesoin ? CONTRATS ET MARCHES PUBLICS. Éditions du Juris-Classeur. Avril2007. p. 31.

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JACOB Maxime et RAVENEL Pierre, Le choix des offres : critères, pondération,évaluation. CONTRATS PUBLICS – L’actualité de la commande et des contratspublics, n° 67, juin 2007, p. 54 à 57

[4] Articles – Revues spécialiséesRAVENEL Pierre, L’achat public durable en France en 2006 : vers une généralisation.

FACTEUR 4D n° 33 Novembre – Décembre 2006. P.4-5.ETRILLARD Claire, Commande publique et développement durable. LES PETITES

AFFICHES, n° 49 / 2007, 8 mars 2007 p.3DELUZ Sophie, EMERY Cyrille, Marchés publics : les praticiens jugent le code 2006.

LE MONITEUR. 1er juin 2007. p. 68 à 75.BITTER Maxime, DEVIGE-STEWART Thierry, VAYSSE Françoise, Les entreprises

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[5] Enquêtes sur l’achat public durableMAISON DE LA CONSOMMATION ET DE L’ENVIRONNEMENT – ASSOCIATION

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FACTEA SOURCING. Quelle politique achats durables pour les collectivitésterritoriales ? Enquête et bilan opérationnel sur la politique « achats durables » descollectivités territoriales. Novembre 2006, 42 p.

ASSOCIATION LES ECO MAIRES, Enquête : collectivités et commande publiquedurable. Questionnaire diffusé en mai 2007. 4 p. [En ligne]. Disponible sur http://www.achatsresponsables.com/fichiers/questionnaire_marches_publics.pdf

[6] Ressources en ligne

[6.1] Comptes-rendus de manifestations liées à l’achat publicécoresponsable

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NAVEZ François, Marchés publics et développement durable : quelles possibilitésde prise en compte des particularités des entreprises d’économie sociale ?Actes du colloque ISTR-EMES à Paris du 27 au 29 avril 2005. 18 p. [En ligne]Disponible sur http://www.univ-nancy2.fr/RECHERCHE/EcoDroit/DOWNLOAD/coll_eco_socontretextes%20de%20com/Francoise%20Navez.pdf

INSTITUT DE LA GESTION PUBLIQUE ET DU DEVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE,Échanges de pratiques sur les achats écoresponsables – Compte-rendu dulundi 3 octobre 2005 . Octobre 2005. 77 p. [En ligne] Disponible sur http://www.institut.minefi.gouv.fr/sections/etudes__publication/comptes-rendus/developpement-durable/atelier_achats_publi/downloadFile/file/seminaire_achat_eco-responsable.pdf?nocache=1136740854.22

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ADEME, CONSEIL REGIONAL BOURGOGNE, DIREN BOURGOGNE, AGENCEREGIONALE POUR L’ENVIRONNEMENT ET LE DEVELOPPEMENTSOUTENABLE EN BOURGOGNE. Marchés publics : pour une démarchéécoresponsable – Compte-rendu des interventions des rencontres de Dijondu 5 décembre 2006. Décembre 2006. 74 p. [En ligne]. Disponiblesur http://www.oreb.org/recherche_new/codeMP/codeMP_synthese_5_dec_06.htm

[6.2] Articles liés à la commande publique écoresponsable

[6.2.1] Articles à dimension juridique

ECOEFF, La Commission publie des lignes directrices relatives à des procédures depassation de marchés respectueuses de l'environnement. 5 juillet 2001. [En ligne]Disponible sur http://ecoeff.nomades.ch/fr/achat/regle.htm

GUILLOU Yves-René et son équipe de droit public des affaires et de la régulation,Environnement et marchés publics : évolution des modalités juridiques d’intégrationsdes considérations environnementales dans les marchés publics. Novembre2004. 34 p. [En ligne] Disponible sur http://www2.ademe.fr/servlet/KBaseShow?sort=-1&cid=96&m=3&catid=12913

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LECAUDE Philippe, La prise en compte des critères environnementaux dans lesmarchés publics : conséquences des nouveaux principes de développement durableet environnementaux de la constitution sur les actions des collectivités territoriales. 2005. [En ligne] Disponible sur http://www.reseau-ideal.asso.fr/agen/medias/interventions/forum_7/philippe_lecaude.pdf

GROUPE DE TRAVAIL NATIONAL DES RESEAUX TERRITORIAUX, Code desMarchés Publics version 2006 et son manuel d’application – Extraits concernant la commande publique écoresponsable. 2006. 4 p. [En ligne] Disponible sur http://www.achatsresponsables.com/fichiers/extrait_cp_ 2006 _ commande _responsable. d oc

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publique responsable – Nouveau Code des Marchés Publics adopté le 1 er août2006. Septembre 2006. 3 p. [En ligne] Disponible sur http://www.areneidf.org/emploi/pdf/cp-TableauCMP2006.pdf

MARC Philippe, Marché public et environnement. Novembre 2006 [En ligne] Disponiblesur http://www.territoiresdurables.fr/upload/pagesEdito/fichiers/AVocat-P.Marc.pdf

GUIARD Norman, Une solution attendue par beaucoup . 13 juillet 2007 [En ligne]Disponible sur http://www.marchespublics.net/actualite/outil.php?id=1208

[6.2.2] Articles d’inspiration économique ou pratique

COLLECTIF DE L’éthique sur l’étiquette. Collectivités et consommation éthique. 2004. 2p. [En ligne] Disponible sur http://ethique-sur-ethiquette.org/ .

DYCKMANS Sandrine, Acheteurs écoresponsables recherchent fournisseursdésespérément. Octobre 2004. 2 p. [En ligne]

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DYCKMANS Sandrine, Pamiers court derrière les fournisseurs pour alimenter sacantine en produits « bio ». 5 octobre 2004. 2 p. [En ligne]

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[6.3] Guides issus des retours d’expériences locaux

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Disponible sur http://www.lyon.fr/staticontrevdl/contenu/environnement/Bois3.pdfCONSEIL GENERAL DES HAUTS-DE-SEINE, PREFECTURE DES HAUTS DE

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ASSOCIATION DE VILLES EUROCITIES - CARPE - CITIES AS RESPONSIBLEPURCHASERS IN EUROPE (Les villes européennes, acheteurs responsables).Guide CARPE de l’achat public responsable . Juillet 2005. 52 p. [Enligne] Disponible sur http://www.eurocities.org/carpe-net/site/IMG/pdf/CARPE_guide_de_l_achat_public_responsable.pdf

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Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

68 Frédéric Pichon - 2007

ADEME, CONSEIL REGIONAL BOURGOGNE, DIREN BOURGOGNE, AGENCEREGIONALE POUR L’ENVIRONNEMENT ET LE DEVELOPPEMENTSOUTENABLE EN BOURGOGNE. Guide pour les achats écoresponsables defournitures. Décembre 2006. 53 p. [En ligne].

Disponible sur http://www.oreb.org/recherche_new/codeMP/codeMP_les_guides.htmADEME, CONSEIL REGIONAL BOURGOGNE, DIREN BOURGOGNE, AGENCE

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Disponible sur http://www.oreb.org/recherche_new/codeMP/codeMP_les_guides.htmREGION RHONE ALPES, Engager sa collectivité locale dans une démarche de

commerce équitable Méthodes, expériences, acteurs. Mai 2007. [En ligne].Disponible sur http://www.equisol.org/pdf/refcera/CDREFCEENRA26mai.pdf

[6.4] Guides officiels relatifs à l’achat public durable

ORGANISATION DE COOPERATION ET DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUES,Marchés publics et environnement : Problèmes et solutions pratiques . Août 2000.122 p. [En ligne]. Accès réservé.

ORGANISATION DE COOPERATION ET DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUES,La performance environnementale des marché s publics – Vers des politiquescohérentes. Novembre 2003. 244 p. [En ligne]. Accès réservé.

MINEFI – GROUPE PERMANENT D’ETUDE DES MARCHES - développement durableENVIRONNEMENT. Notice d’information sur les outils permettant de promouvoirla gestion durable des forêts dans les marchés publics de bois et produits dérivés.31 mars 2004. 24 p. [En ligne]. Disponible sur http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/05-022.pdf

COMMISSION EUROPEENNE. Acheter vert ! Un manuel sur les marchés publicsécologiques. Traduit en 2005 de Buying Green ! A handbook on environmental publicprocurement. Août 2004. 39 p. [En ligne].

Disponible sur http://ec.europa.eu/environment/gpp/pdf/handbook_fr.pdfMINEFI – GROUPE PERMANENT D’ETUDE DES MARCHES - développement

durable ENVIRONNEMENT. Guide de l’achat public écoresponsable –Achat deproduits. 9 décembre 2004. 52 p. [En ligne]. Disponible sur http://www.collectivites-locales.afnor.org/collectivites/pdf/guide_achats_eco_responsables.pdf

DUFOURCQ Elizabeth, R apport préliminaire sur la prise en compte des exigences etdes critères sociaux dans les marchés publics. Rapport 2005-65 présenté au Ministredu Travail, de l’Emploi et de la Cohésion Sociale. La Documentation Française.Mai 2005. 43 p. [En ligne]. Disponible sur http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/054000684/index.shtml

MINEFI – GROUPE PERMANENT D’ETUDE DES MARCHES - développement durableENVIRONNEMENT. Guide de l’achat public écoresponsable –Achat de papier àcopier et de papier graphique. 8 décembre 2005. 48 p. [En ligne].

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

Frédéric Pichon - 2007 69

Disponible sur http://www.pavillonbleu.org/docsdivers/achatPapier.pdf

MINEFI – GROUPE PERMANENT D’ETUDE DES MARCHES - développementdurable ENVIRONNEMENT. Guide de l’achat public écoresponsable –L’efficacité énergétique dans les marchés d’exploitation de chauffage etde climatisation pour le parc immobilier existant. Version 2 du 4 avril 2006.Avril 2006. 64 p. [En ligne]. Disponible sur http://www.minefi.gouv.fr/directions_services/daj/guide/gpem/efficacite_energetique_chauffage_climatisation/efficacite_energetique_chauffage_climatisation.pdf

MINEFI - OBSERVATOIRE ÉCONOMIQUE DE L’ACHAT PUBLIC. Guide de l’achatpublic écoresponsable – Le bois, matériau de construction. Approuvé par la décisionn°2007-17 du 4 mai 2007 du Comité exécutif de l’OEAP. Mai 2007. 50 p. [En ligne].Disponible sur http://www.minefi.gouv.fr/directions_services/daj/guide/gpem/bois_materiau_construction/bois_materiau_construction.pdf

MINEFI - OBSERVATOIRE ÉCONOMIQUE DE L’ACHAT PUBLIC.Commande publique et accès à l’emploi des personnes qui en sontéloignées- Guide à l’attention des acheteurs publics. Version définitivejuillet 2007. 59 p. [En ligne]. Disponible sur http://www.minefi.gouv.fr/directions_services/daj/oeap/documents_ateliers/personnes_eloignees/guide_commande_publique_acces_emploi_personnes_eloignees.pdf

[6.5] Chartes et déclarations d’intention locales

VILLE D’ORLEANS. Marchés publics et développement durable – La charte desachats durables – La ville d’Orléans poursuit son engagement. 2005. 10 p. [Enligne]. Disponible sur http://www.ville-orleans.fr/download/qualite/Charte-achats-durables.pdf

YVARS Guillaume, Intégration de critères environnementaux et sociaux de lacommande publique du conseil général de la Loire . 2005 [En ligne] Disponible sur http://www.loire.fr/display.jsp?id=c_343956

AGENCE REGIONALE DE L’ENVIRONNEMENT ET DES NOUVELLES ENERGIESD’ILE DE FRANCE, INSERGUEIX Christelle. Accompagnement d’un groupe decollectivités franciliennes sur la commande publique responsable . 20 décembre2005. 23 p. [En ligne] Disponible sur http://www.territoires-durables.fr/upload/pagesEdito/fichiers/Groupe_achats_IDF_Diaporama.pdf

LOIRE HABITAT. Promotion de l’emploi au travers des marchés publics – Charte localed’insertion – Applicable au porteur de projet et aux maîtres d’ouvrage contractantavec l’ANRU. Version du 10 novembre 2006. 10 p. Document interne.

[7] Autres sources en ligne

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

70 Frédéric Pichon - 2007

Définition du développement durable. [En ligne] Disponible sur http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9veloppement_durable

Divers sites consultés qui proposent des commentaires ou des outils sur l’achat publicécoresponsable :

http://cairnconseil.over-blog.com/

http://ec.europa.eu/index_fr.htm

http://www.achatsresponsables.com/

http://www.actu-environnement.com

http://www.afnor.org/portail.asp

http://www.agenda21france.org/

http://www.andd.fr

http://www.association4D.org

http://www.cellule-eco-rhone-alpes.asso.fr/

http://www.dd-pratiques.org/

http://www.ecologie.gouv.fr (site officiel du Ministère de l'Écologie, de l'Aménagementet du Développement Durables)

http://www.ecologie.gouv.fr/ecolabels/

http://www.ecoresponsabilite.ecologie.gouv.fr/index.php

http://www.ethique-sur-etiquette.org/motion-type.htm

http://www.grandesvilles.org/article.php3?id_article=531#art2

http://www.institut.minefi.gouv.fr/

http://www.localjuris.com.fr/

http://www.marche-public.fr/index.htm

http://www.minefe.gouv.fr

http://www.territoires-durables.fr

http://www.ugap.fr/

http://www2.ademe.fr/

ANNEXES

Frédéric Pichon - 2007 71

ANNEXES

Exemple-type d’une démarche d’achatsécoresponsables

A consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institutd'Etudes Politiques de Lyon

Illustration de conditions d’exécution en faveur del’insertion professionnelle

ANNEXE N° X AU CCAP n° XXX du XX/XX/2007AFFAIRE : XXXPromotion de l’emploi et rénovation urbaine

1 - promotion de l’emploi des publics prioritaires

Au titre des opérations de rénovation urbaine, LOIRE HABITAT a obtenu desfinancements de la part de l’AGENCE NATIONALE pour la RENOVATION URBAINE(ANRU).

Dans ce cadre, une charte locale d’insertion qui intègre dans le programme nationalde rénovation urbaine les exigences d’insertion professionnelle des habitants des zonesurbaines sensibles a été adoptée.

Aussi, conformément d’une part à la volonté de la ville de Saint Etienne d’utiliser lelevier que représente la commande publique pour agir efficacement en faveur de l’insertion,et d’autre part au regard des obligations découlant de la charte nationale précitée, desdispositions du code des marchés publics notamment son article 14, et de la loi n° 2003-710

du 1er août 2003, et dans la mesure où les travaux objet du présent marché bénéficientd’un concours financier de l’ANRU ; cette opération contient dans l’exécution du marché,une clause visant à employer dans une certaine mesure un public prioritaire.

Ainsi, la Ville de Saint Etienne en sa qualité de maître d’ouvrage,s’engage à mettreenoeuvre des actions visant à favoriser le retour à l’emploi durable et de qualité de publicsen recherche d’emploi et localisés prioritairement en zone urbaine sensible.

L’action envisagée par la personne publique s’articule autour de cinq axes principaux :Lutter contre l’exclusion par l’accueil des personnes en difficulté.Améliorer la qualification et l’employabilité.Elaborer un parcours personnel d’insertion professionnelle et sociale.

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

72 Frédéric Pichon - 2007

Rapprocher avec l’environnement économique et accompagner dans l’emploi pendantles premiers mois.

Contribuer à la professionnalisation des jeunes.Ainsi, l’utilisation des contrats, tels que le contrat d’apprentissage, le contrat de

professionnalisation ou le contrat initiative emploi, sera recherchée chaque fois qu’ilspermettront d’atteindre les objectifs d’insertion sociale.

Sans que cette énumération soit limitative, cette opération concerne, par ordre depriorité :

Les habitants des 4 quartiers prioritaires GPV ANRU de St Etienne ( Montreynaud, SudEst, Crêt de Roc, Tarentaise Beaubrun Séverine)

Les habitants des autres quartiers GPV de St Etienne : Cotonne-Montferré, Solaure,Dame Blanche, Terrenoire, Momey , Grangeneuve, Reveu.

Les demandeurs d’emplois de St Etienne présentant des difficultés d’insertionprofessionnelles :

Les chômeurs de longue durée, inscrits à l’A.N.P.ELes jeunes de faible niveau de formationLes bénéficiaires de minima sociaux dont les allocataires du R.M.I, ayant signé un

contrat d’insertionLes travailleurs handicapés, reconnus par la Cotorep2 - l’ingénierie d’insertionAfin de faciliter la mise en œuvre des formules d’insertion retenues par les entreprises,

la personne publique met en place une cellule « Promotion de l’emploi et rénovationurbaine » composée d’un agent de l’ANPE, d’un agent de la Mission Locale jeunes et d’unagent du PLIE ( Plan Local pour l’Insertion et l’Emploi), coordonnés par le chargé de missioninsertion de la Ville de St Etienne.

Elle est à la disposition :Des entreprises soumissionnaires pendant la préparation de leurs offres pour les

renseigner sur le dispositif d’insertion prévu au marché et définir l’action d’insertion la plusappropriée.

Des entreprises attributaires pour mettre au point avec elles de manière opérationnelleleur engagement en tenant compte des spécificités du chantier.

Des entreprises intervenantes pour leur proposer des personnes susceptibles debénéficier des mesures d’insertion.

Elle est en outre le garant de l’accompagnement d’insertion des personnesembauchées. Elle est un interlocuteur privilégié pour les entreprises afin de régler toutproblème matériel et assurer le suivi quotidien de la démarche.

Pour obtenir tous les renseignements utiles, les entreprises peuvent prendre contactavec cette dernière au :

La « cellule promotion emploi et rénovation urbaine » est donc chargée de mettreen oeuvre la charte destinée à favoriser la promotion et la qualité de l’emploi des publicsprioritaires.

ANNEXES

Frédéric Pichon - 2007 73

Elle apportera un soutien méthodologique aux entreprises pour les aider à satisfaire lesconditions particulières d’exécution des marchés publics, une fois que celles-ci auront étédésignées attributaires des marchés ou des lots de marchés correspondants.

Elle répondra aux demandes, de conseils ou d’appui, formulées par les entreprises quiauront engagé directement des actions de recrutement de publics prioritaires ou de sous-traitance auprès de structures d’insertion par l’activité économique.

Elle pourra assister les entreprises dans leurs recrutements en recherchant etprésentant des personnes aptes à l’emploi (ou enfin de parcours d’accès ou de retour àl’emploi) et s’assurera, si nécessaire, de la mise en place d’un accompagnement favorisantl’accueil et l’intégration.

Elle apportera aux autres personnes issues des dispositifs d’accueil et d’insertion, etparticulièrement à celles faiblement qualifiées ou éloignées de l’emploi, si besoin

est, des réponses en matière d’ingénierie de formation pour satisfaire aux besoins decompétences définis avec les entreprises ou leurs organisations professionnelles.

Enfin, cette prestation de services n’implique aucune autre obligation pour l’entrepriseadjudicataire du marché, ou du lot, que de satisfaire aux engagements pris.

3- Conditions particulières d’exécution

Pour mettre en oeuvre cette politique, et pour satisfaire à l’objectif d’accès à l’emploi despublics prioritaires, “le maître d’ouvrage” demande l’application des conditions particulièressuivantes qui engagent l’entreprise titulaire du marché.

Les entreprises participant à la consultation s’engagent, dans le cas où elles seraientattributaires, à réserver au moins X heures de travail, dans le cadre des travauxd’investissement objet du présent marché du projet financé par l’ANRU, auxhabitants des zones urbaines sensibles en priorité ou à des demandeurs d’emploisen insertion.

Afin de répondre à cet impératif, le titulaire du marché dispose des options suivantes :La mutualisation des heures de travail à accomplir dans le cadre de l’insertion induisant

la mise à disposition de personnels. Il s’agit pour le titulaire d’allouer un nombre d’heurestotales de production au profit de salariés en insertion (minimum souhaité 950 heures)

pour le lot n° 1 : démolition : 250 heurespour le lot n° 2 : VRD 250 heurespour le lot n° 4 : serrurerie métallerie : 150 heurespour le lot 7 : façades : 200 heurespour le lot 8 : espaces verts :100 heuresLa mutualisation sera effectuée au bénéfice d’une entreprise d’intérim d’insertion

dûment agréée, d’une association intermédiaire ou d’un groupement d’employeurs pourl’insertion et la qualification (GEIQ) si l’entreprise comporte moins de 300 salariés.

Cet organisme se chargera du recrutement et mettra à disposition de l’entreprisetitulaire, des personnes en insertion à l’instar d’une entreprise de travail temporaire.Elle favorisera à qualités équivalentes le recrutement local correspondant au secteurd’intervention et assurera le suivi et l’accompagnement des personnes embauchés etencadrées par le titulaire du marché.

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

74 Frédéric Pichon - 2007

L’embauche directe :Les entreprises attributaires peuvent recourir à l’embauche directe sur la base d’un

contrat de travail prévu par la législation du travail (Contrats de droit commun, contratd’apprentissage, Contrat en alternance, contrats aidés). Si il s’agit d’un Contrat à Duréedéterminée , il doit comprendre au moins le nombre d’heures prévues dans le marché.Il est néanmoins précisé que l’entreprise conserve l’entière responsabilité du choix despersonnes recrutées, de la signature des contrats de travail et de la définition du programmede formation de sorte que les personnes embauchées bénéficient tout au long de leur contratd’une véritable insertion professionnelle.

La co-traitance ou la sous-traitance :L’entreprise attributaire peut choisir de co-traiter ou de sous traiter dans les conditions

décrites au CCAP et conformément à la réglementation concernant la co-traitance et lasous-traitance, une partie de ses travaux à une ou plusieurs structures d’insertion.

La sous-traitance à une structure d’insertion, dont une liste non exhaustive seradisponible auprès de la cellule dédiée, est possible. L’entreprise attributaire confiera doncune partie de ses prestations à un sous-traitant et ceci conformément à la réglementationsur la sous-traitance.

Autre proposition :Le candidat a la possibilité de mettre en place tout programme propre à son entreprise

et atteignant les objectifs d’insertion fixés par la personne publique dans le cadre du respectde la charte locale d’insertion.

Le candidat indiquera dans sa note méthodologique ou son mémoire technique, lasolution qu’il envisage de retenir pour se conformer aux obligations du présent marché.

La solution définitive sera établit le plus tôt possible avant le démarrage del’exécution du chantier avec les membres de la cellule « Promotion de l’Emploi etrénovation Urbaine ». Elle devra être soumise pour validation au Maître d’ouvrage.

Article 4 : Évaluation de l’exécution des clauses particulières et sanctions en casde non respect des conditions d’exécution.

Le titulaire du marché remettra au chargé de mission insertion le nom et une copie duCV de la personne recrutée.

L’entreprise est tenue de signaler sous 24 heures le départ prématuré des personnesembauchées et d’accepter toute proposition faite par la cellule « Promotion de l’Emploi etrénovation Urbaine » pour y remédier. En cas de non-respect, elle encourt les pénalitésapplicables en cas de non remise de documents prévues au présent CCAP.

En cours de réalisation du marché, une évaluation quantitative et qualitative sera faitecontradictoirement par le maître d’ouvrage et la “cellule promotion et rénovation urbaine”avec l’entreprise adjudicatrice pour juger de l’exécution des conditions particulières.

Le non respect des engagements pris en annexe de l’acte d’engagement parl’entreprise donnera lieu au versement d’une pénalité de 30 euros par heure d’insertionnon réalisée dans les conditions fixéesau CCAGapplicable à cette catégorie de prestations.

Après mise en demeure restée sans effet, le non respect des engagements pourraentraîner la résiliation du marché sans donner lieu à indemnisation pour l’entreprise. Lesdispositions du CCAG relatif à cette opération sont applicables.

ANNEXES

Frédéric Pichon - 2007 75

Source : Loire Habitat - 2007.

Exemple de délibération relative aux références dedéveloppement durable dans les achats publics

Vu la déclaration universelle des Droits de l’Homme,Vu les conventions internationales relatives aux principes et droits fondamentaux au

travail de l’Organisation international du travail (OIT), notamment les conventions n°1, 26,87, 98, 105, 111, 131, 138, 155, 182,

Vu la convention internationale des Droits de l’enfant, notamment l’article 32,Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne adoptée au Conseil

européen de Nice le 07 décembre 2000,Vu la résolution européenne « HOWITT » adoptée par le Parlement européen le 13

janvier 1999, sur les normes communautaires applicables aux entreprises européennesopérant dans les pays en voie de développement : vers un code de bonne conduite,

Vu la résolution 2003/C 39/02 du Conseil de l’Union européenne du 06 février 2003,concernant la Responsabilité sociale des entreprises,

Vu la loi n°87-157 du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés,Vu l’article 14 du Code des marchés publics, qui permet aux collectivités de définir un

niveau d’exigence sociale et environnementale pour l’exécution des marchés,Le Maire, le Président expose :Dans le monde, plus de 250 millions d’enfants âgés de moins de 14 ans travaillent ;

la disparition des forêts primaires et de la biodiversité s’accélère ; les atteintes àl’environnement atteignent des seuils préoccupants (effet de serre, pollution des eaux, …) ;l’emploi n’est pas accessible à tous, notamment pour les personnes handicapés.

La collectivité/administration, consciente de la nécessité de combattre les atteintes à ladignité humaine et à l’environnement, affirme son engagement à promouvoir un commerceresponsable, dans le cadre de ses achats de produits et de services.

En application des conventions internationales, des lois françaises, du Code desmarchés publics et des engagements de la collectivité en faveur du développement durable,la collectivité/administration s’engage à intégrer des références de développement durable(relatives à l’emploi, à l’environnement, aux Droits de l’Homme au travail) dans ses achats,lorsque cela est opportun et dans les limites permises par le Code des marchés publics.

La collectivité s’engage également à :- apporter son concours à la promotion des démarches d’achats publics responsables- faire la promotion auprès des entreprises, de la population et des partenaires locaux

des démarches en faveur d’un commerce équitable.Source : ALTERRE Bourgogne. Guide pour les achats écoresponsables de fournitures.Décembre 2006. P.49

Le développement durable dans les marchés publics, une évolution complexe

76 Frédéric Pichon - 2007

Fiche-Produit relative à la fourniture écoresponsablede papier

A consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institutd'Etudes Politiques de Lyon

RESUME

Frédéric Pichon - 2007 77

RESUME

Dans un cadre juridique national de plus en plus propice au fil des nouveaux Codesdes Marchés Publics, sous l’impulsion notable du droit communautaire, l’achat publicdurable ou écoresponsable dispose désormais d’une légitimité légale forte pour êtremis en œuvre. Les critères d’attribution et les conditions d’exécution sont deux moyensmajeurs d’intégrer des considérations environnementales et sociales dans la commandepublique. Les outils techniques et administratifs se développent pour accompagner lesacheteurs publics. Néanmoins, de nombreuses difficultés font obstacle à la généralisationdes achats verts. Le droit des marchés publics subordonne le développement durableaux principes économiques fixés au niveau communautaire. Le marché des écoproduitsmanque de diversité et de maturité. Les acteurs publics également, par manque deformation ou plus souvent faute de volonté politique suffisante. Les démarches d’achatspublics écoresponsables doivent donc être accompagnées et soutenues, si besoin aumoyen de nouvelles dispositions réglementaires, afin de concrétiser les potentialitésenvironnementales et sociales offertes par la puissance financière des achats publics.

Marchés publics – Achats publics – Commande publique – Développement durable –Écoresponsabilité –Environnement – Éthique – Achats verts – Code des Marchés Publics.