Le dénouement de la Révolution astronomique

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LE DNOUEMENT DE LA RVOLUTION ASTRONOMIQUEIl est manifeste, tous ceux qui tudient srieusement la question, que lastronome Galile n'est jamais parvenu prouver l'hliocentrisme, seulement rfuter le gocentrisme, nous laissant avec la cosmologie intermdiaire de Tycho Brah (selon laquelle les autres plantes tournent autour du soleil mais que cet ensemble tourne autour de la terre) comme modle le plus crdible selon les donnes disponible pendant la premire moiti du XVIIe sicle. En effet, expliquer la rotation des autres plantes autour du soleil, laquelle avait dj t propose par Brah, avant dtre dmontre (observe scientifiquement) par Galile, ne prouve aucunement que la terre suive une trajectoire quivalente celle des autres plantes. Outre labsence de preuve positive, il y avait lpoque au moins une raison scientifique de rejeter lhliocentrisme : la parallaxe stellaire : la rotation de la terre autour du soleil doit entraner un dplacement apparent des toiles proches par rapport aux toiles loignes, or nous nobservions pas de tel dplacement lpoque1. Il y avait donc une raison temporelle persuadant des scientifiques dalors de ne pas adhrer lhliocentrisme. Comme la parallaxe stellaire fut seulement observe pour la premire fois par Friedrich Wilhelm Bessel en 18382 et que l'hliocentrisme est devenu une thorie accepte ds la seconde moiti du XVIIe sicle (donc environ 175 ans plus tt), d'autres personnages et/ou dcouvertes ont d intervenir entre temps pour permettre l'hliocentrisme de triompher sur son rival brahen. Ce document dmontrera que le modle de Newton dont la force est quavec une seule hypothse (la gravitation comme attraction des masses) il parvient expliquer de faon hliocentriste tous les mouvements terrestres et clestes permit de faire abstraction de la parallaxe stellaire et daccepter lhliocentrisme. Louvrage La vrit sur l'affaire Galile3 est une rcente et solide prsentation approfondie de la controverse galilenne effectue exclusivement partir des sources primaires (minutes des procs et correspondances crites des intervenants) contrairement la plupart des livres qui scrivent sur ce sujet. Dans cet ouvrage se trouve une piste4, il y est question du scientifique Alfonso Borelli (1608-1679). Tout ce que lEncyclopdie Universalis a dire sur la contribution de cet homme l'astronomie est qu'il connaissait la thse hliocentriste soutenue par Copernic et Galile et qu'en 1665 : Il installe un observatoire astronomique San Miniato ; dans Theorica medicorum planetarium ex causis physicis deductae (1666), il fait intervenir la loi de l'inertie etYves GINGRAS et al., Du scribe au savant Les porteurs du savoir de lAntiquit la Rvolution industrielle, Montral, Boral, 1998, p. 225 sur 361. 2 Jean-Ren ROY, Les hritiers de Promthe , Qubec, Presses de lUniversit Laval, 1998, p. 69 sur 202. 3 Aim RICHARDT, La vrit sur laffaire Galile, Paris, Franois-Xavier de Guibert, 2010, 254 p. 4 Ibid, p. 220.1

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soutient que le mouvement circulaire des plantes entrane l'existence de forces centrifuges qui compensent les forces centriptes, mais il rejette la notion d'attraction5. Cela nous laisse un peu sur notre faim. Il ny a rien de significatif sur l'Encyclopdie de l'Agora, outre une page disant que Borelli fut lve de Benedetto Castelli qui eut lui-mme Galile comme matre6 . LEncyclopdie Britannica nous informe que : Borelli also wrote many astronomical works, including a treatise in 1666 that considered the influence of attraction on the satellites of Jupiter. In a letter published in 1665 (), he was the first to suggest the idea that comets travel in a parabolic path7. Dautre part, un Institut-Muse d'histoire des sciences bas en Toscane dit ceci propos de Borelli : Borelli's chief contribution during his stay in Tuscany was unquestionably his research on Jupiter's moons, described in the Theoricae Mediceorum Planetarum Ex Causis Physicis Deductae (Florence, 1666), which played an important role in the European discussions on cosmology. In a self-professed Copernican framework, Borelli voiced the hypothesis of a curvilinear motion of planets driven by two forces: a centrifugal force and an attraction to the Sun [pouvant se comprendre comme une force centripte], which together would create equilibrium in the heavens8. La seule donne supplmentaire que Wikipdia apporte (en se rfrant un Dictionnaire universel d'histoire et de gographie publi en 1878) est que Borelli rencontra Galile vers 1640 Florence. Lintervenant suivant dans la Rvolution astronomique est Isaac Newton. Celui-ci n'a pas vraiment fait de nouvelles dcouvertes astronomiques, mais il a mathmatis l'univers de faon trs crdible. Voici des extraits de l'article de l'Encyclopdie Encarta sur Newton : Vers 1679, Newton se remis tudier le phnomne des orbites plantaires. L'ide d'une attraction plantaire base sur le carr inverse de la distance entre le Soleil et les plantes qu'il avait calcul beaucoup plus tt, Woolsthorpe [vers 1665-1667].Jacqueline BROSSOLET, Alfonso Giovanni Borelli , Encyclopdie Universalis, http://www.universalis.fr/encyclopedie/giovanni-alfonso-borelli/ 6 Stphane STAPINSKY, Les mtaphores scientifiques du corps , Encyclopdie de lAgora, http://agora.qc.ca/Documents/Sport-Le_sport_moderne_et_la_science__Les_metaphores_scientifiques_du_corps_par_Stephane_Stapinsky 7 Encyclopdie Britannica, Giovanni Alfonso Borelli , http://www.britannica.com/EBchecked/topic/74070/Giovanni-Alfonso-Borelli 8 Museo Galileo, Giovanni Alfonso Borelli http://brunelleschi.imss.fi.it/itineraries/biography/GiovanniAlfonsoBorelli.html5

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[...] Cette loi sur l'attraction fait suite, pour le cas simple d'une orbite circulaire, la troisime loi de l'astronome allemand Johannes Kepler, qui considre que le temps de rvolution d'une plante autour du Soleil dpend de la taille de l'orbite de la plante. La loi sur l'attraction prend galement en compte l'acclration centripte d'un corps en mouvement autour d'un cercle, tablie par l'astronome danois Christiaan Huygens en 1673. Le problme pour dterminer l'orbite partir d'une loi sur la force avait dconcert tout le monde avant Newton, qui trouva la solution vers 1680. [...] Les Principia sortirent finalement durant l't 1687. La communaut scientifique considra ce travail comme un chef-duvre, [...] L'ide magistrale de la gravitation tendue tout le systme solaire captiva la communaut scientifique. Ce travail utilisait un seul des principes pour expliquer divers phnomne comme le mouvement des mares, les irrgularits du mouvement lunaire, et les lgres variations dans le changement des saisons9. Nous comprenons ainsi que la loi de gravitation universelle de Newton laquelle sappuyait sur les travaux de Borelli et Huygens qui permet d'expliquer le cosmos par un systme uniforme, complet et cohrent, combine des calculs beaucoup plus prcis et rigoureux que ses prdcesseurs, fut suffisante pour pouvoir raisonnablement ignorer l'apparente absence de parallaxe stellaire et accepter l'hliocentrisme. Galile tait un assez pitre astronome, mais il eut plus de chance en physique, et ironiquement, c'est plus son travail en physique qu'en astronomie qui aida la communaut scientifique saffranchir du dogmatisme aristotlicien. Comme la physique d'Aristote tait dmonte, Newton (inspir de Galile) a d en dvelopper une autre, et cette physique appuyait l'hliocentrisme et non le gocentrisme. Notons donc que la thorie hliocentrique n'a pas t adopte uniquement par les mesures, mais aussi par des arguments mathmatiques.

RCAPITULATION CHRONOLOGIQUE1. Ds l'Antiquit, Aristarque de Samos et les pythagoriciens proposrent l'hliocentrisme, mais ils furent rabrous par leurs contemporains cause de la parallaxe stellaire10. 2. Au Moyen ge, Nicole Oresme et Albert de Saxe considrrent l'hliocentrisme mais le rejetrent ; le cardinal Nicolas de Cues y adhra au milieu du XVe sicle, ainsi que Lonard de Vinci quelques dcennies plus tard11.9 Encyclopdie 10

Encarta, reproduit sur Astrofiles, http://www.astrofiles.net/astronomie-isaac-newton Aim RICHARDT, op. cit., p. 42-43 et 157.

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3. Nicolas Copernic rintroduisit lhliocentrisme aprs avoir lu des pythagoriciens antiques12. 4. Tycho Brah proposa un modle alternatif celui de Ptolme et d'Aristarque/Copernic. 5. Johannes Kepler dmontra que si hliocentrisme il y a, les orbites sont elliptiques et non circulaires. 6. Galile limina le systme gocentrique d'Eudoxe, Aristote et Ptolme en observant les phases de Vnus. 7. Newton imposa l'hliocentrisme grce la loi de gravitation/attraction en s'appuyant en partie sur la notion de forces centripte-centrifuge de Borelli et Huygens.

LES MESURES DES PHASES DE VNUSComme nous lavons dit, qualitativement, les phases de Vnus pouvaient aussi bien s'expliquer de faon hliocentrique que brahenne. Une hypothse pourrait venir branler la conclusion soutenue dans les lignes prcdentes : les mesures de ces phases faites par Galile favorisaient peut-tre l'hliocentrisme. cela il faut rpondre que probablement que des observations ultrieures de ces phases s'accordaient mieux avec un modle hliocentriste (mme si le modle brahen permettait aussi de sauver les apparences , comme on disait l'poque). Cependant, on peut douter que ce constat ne fut fait du vivant de Galile, qui navait pas le souci du dtail et dont la rigueur scientifique est fort discutable. Ses influences platoniciennes lavaient rendu irrationnellement obsd par les cercles parfaits, cest pourquoi Galile s'est inflexiblement accroch jusqu' la fin un systme d'orbites circulaires avec le soleil exactement au centre, ide qui ne concordait avec aucune observation et que mme Copernic n'a jamais admis. Probablement que les mesures de Johannes Kepler, publies dans les Tables Rodolphines de 1627 lequel demeura le document de base pour tous les astronomes pendant plus d'un sicle13 penchaient dans le sens de lhliocentrisme. Chronologiquement, cette uvre magistrale tait accessible au moment du second procs de Galile (en 1633), mais lgocentrique Galile tait relativement indiffrent de Kepler (il n'a lu qu'en diagonale ou de faon partielle ses crits). Au demeurant, Galile na jamais argument que les mesures des phases correspondaient plus fidlement au modle hliocentrique que brahen. Si les mesures en question lui avaient vraiment permis daffirmer une telle chose, Galile aurait certainement exploit cet argument, or il ne la pas fait, signe que ses mesures ne lui permettaient pas de le faire. Quoi quil en soit des mesures des phases de Vnus, l'hypothse de la combinaison des forces centripte-centrifuge (permettant de maintenir des corps dans une trajectoire circulaire) des plantes, prconise par Borelli, Huygens et Newton, semble avoir t suffisante pour faire pencher la balance dans ce dbat, et il ne fut pas ncessaire de recourir d'autres arguments.Ibid., p. 56 et 66-67 ; David SNCHAL, Histoire des sciences, Universit de Sherbrooke, Dpartement de physique, 2007, p. 67 sur 226. 12 Aim RICHARDT, op. cit., p. 74. 13 Ibid., p. 99.11

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