LE 40e ANNIVERSAIRE DE LA FRANCOPHONIE CÉLÉBRÉ ......qu'il traite par ailleurs de "cons" (L'AF...

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« Tout ce qui est national est nôtre » À l'approche du réexamen À l'approche du réexamen du traité de non-prolifération du traité de non-prolifération : Le n Le n uc uc léair léair e militair e militaire en déba en débat PAGE 6 DÉFENSE DÉFENSE LE 40 LE 40 e ANNIVERSAIRE DE LA FRANCOPHONIE CÉLÉBRÉ À L'ÉL ANNIVERSAIRE DE LA FRANCOPHONIE CÉLÉBRÉ À L'ÉLYSÉE SÉE P. 16 16 Le torchon brûle Le torchon brûle entre Obama et Net entre Obama et Net anyahou anyahou : Le Pr Le Pr oc oc he-Orient he-Orient s'enlise dans la crise s'enlise dans la crise PAGE 9 ÉTRANGER ÉTRANGER La mort La mort de Philippe Daudet de Philippe Daudet : Suicide Suicide ou assassina ou assassinat ? PAGE 11 HIST HIST OIRE OIRE 3 s N° 2791 64 e année Du 1 er au 14 avril 2010 Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois www.actionfrancaise.net 2 0 0 0 3:HIKLKJ=XUXUUU:?c@h@t@l@a; M 01093 - 2791 - F: 3,00 E pa pa g g e 3 e 3 Poissons d'avril Lorsqu'en 1564 Charles IX eut décrété que l'année commen- cerait désormais le 1 er janvier dans tout le royaume, on continua pendant longtemps d'envoyer des vœux fictifs et des cadeaux ridicules à ceux dont on exploitait la crédulité parce qu'ils s'obstinaient à faire commencer l'année dé- but avril comme autrefois. Ce serait l'origine de nos poissons d'avril. M. Sarkozy n'a pas attendu l'arrivée du mois pour y aller de ses « vieux tubes » (dixit Libération) que savourent en- core quelques attardés d'une droite fictive. Il a dès le 24 mars repris la partition qui avait réussi en 2007, avec tous les propos sécuritaires (en finir avec les « parents ir- responsables » qui élèvent leurs enfants en voyous, en fi- nir aussi avec, dans les écoles, sur les stades, les « agresseurs, traités avec plus d'égards » que les vic- times...). Et de bomber le torse : « Ceux qui attendent une réaction ferme de ma part [contre l'insécurité] ne seront pas déçus ! » Il n'ou- blie pas non plus les cam- pagnes : « Je suis prêt à al- ler à une crise en Europe plu- tôt que d’accepter le démantèlement de la PAC ! » Enfin le point d'orgue : « Vous attendez des résultats, ces résultats vous les aurez »... Seulement voilà : M. Sarkozy est peut-être sincère pendant qu'il parle, mais ni son aura personnelle, ni la noblesse de sa fonction qu'il ne cesse de rabaisser par son comporte- ment, ni le régime qu'il in- carne ne lui donnent la possi- bilité de mener à bien la grande politique dont le pays a besoin. Il n'est qu'un politi- cien aléatoire et provisoire, et même ceux qui l'écoutent poliment n'ont guère d'illusions... U ne fois encore citons Georges Frêche. Les hommes de relief sont si rares dans la classe politique ac- tuelle... Lui, au moins, sait ap- peler un chat un chat et des par- tis se partageant péniblement la moitié de l'électorat, des mori- bonds. Le soir des résultats du second tour des régionales, pen- dant que les autres politiciens péroraient sur les ondes et les écrans, il a observé une minute de silence pour tous les partis. Il a même déclaré (propos re- produits par le site de lafautea- rousseau ) : « Il faut voir le monde tel qu'il est : les partis politiques tels qu'on les a connus au XX e siècle ont passé ; ce sont des étoiles, mais des étoiles mortes, ils continuent à briller mais ils n'attirent plus personne. Si vous ajoutez l'abstention et le vote Front national, vous vous apercevez que les deux tiers des Français sont quasiment deses- pérés et ne croient plus dans les partis politiques... Il faut re- fonder complètement la poli- tique en France.... » Voilà qui est dit et bien dit. Qu'un homme de gauche en soit ainsi réduit à cracher dans la soupe que lui apprêtent des électeurs qu'il traite par ailleurs de "cons" (L'AF 2000 du 18 février) est un fait tout nouveau. Nous ne sommes pas sûr de nous trouver d'accord avec M. Frêche sur les bases d'une refondation de la po- litique. Mais au moins disons-nous ensemble que le système est ver- moulu et qu'il faut tout flanquer par terre. Il est temps de parler ferme et sans tabous. Imaginer une nou- velle constitution pour une sixième république serait se mettre le doigt dans l'œil (d'ailleurs une tragédie classique n'a jamais plus de cinq actes !). Créer un nouveau parti, même avec un nouveau discours, divi- serait encore plus les Français. Refonder quelque chose autour d'un homme autoproclamé pro- videntiel s'avérerait la plus fu- neste des aventures quelques an- nées après. C'est d'une totale re- fondation de la politique que la France a besoin, refondation in- tellectuelle et morale pour être pleinement politique. Pour cela il faut débarrasser les esprits du venin des sacro-saints cadeaux de la Révolution dite française et oser renouer, certes en le modernisant, avec le ré- gime qui a fait la France, qui n'a en rien démérité en dépit des mensonges rabâchés, et qui reste riche d'une expérience ayant duré mille ans. Michel Fromentoux FRÊCHE Refonder la politique... Confronté à l'abstention massive, un homme de gauche crache dans la soupe et juge les partis dépassés. APRÈS LES RÉGIONALES Notre seule priorité : l'intérêt national L’ACTION FRANÇAISE

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« To u t c e q u i e s t n a t i o n a l e s t n ô t r e »

À l 'approche du réexamen À l 'approche du réexamen du t ra i té de non-pro l i férat iondu t ra i té de non-pro l i férat ion ::

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Le torchon brû le Le torchon brû le ent re Obama et Netent re Obama et Net anyahouanyahou ::

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Suicide Suicide ou assassinaou assassinatt ??

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3 s y N° 2791 y 64e année y Du 1er au 14 avril 2010 y Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois y www.actionfrancaise.net

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Poissons d'avrilLorsqu'en 1564 Charles IX eutdécrété que l'année commen-cerait désormais le 1er janvierdans tout le royaume, oncontinua pendant longtempsd'envoyer des vœux fictifs etdes cadeaux ridicules à ceuxdont on exploitait la crédulitéparce qu'ils s'obstinaient àfaire commencer l'année dé-but avril comme autrefois. Ceserait l'origine de nos poissonsd'avril.M. Sarkozy n'a pas attendul'arrivée du mois pour y allerde ses « vieux tubes » (dixitLibération) que savourent en-core quelques attardés d'unedroite fictive. Il a dès le24 mars repris la partition quiavait réussi en 2007, avectous les propos sécuritaires(en finir avec les « parents ir-responsables » qui élèventleurs enfants en voyous, en fi-nir aussi avec, dans lesécoles, sur les stades, les« agresseurs, traités avecplus d'égards » que les vic-times...). Et de bomber letorse : « Ceux qui attendentune réaction ferme de mapart [contre l'insécurité] neseront pas déçus ! » Il n'ou-blie pas non plus les cam-pagnes : « Je suis prêt à al-ler à une crise en Europe plu-tôt que d’accepter ledémantèlement de la PAC ! » Enfin le point d'orgue : « Vousattendez des résultats, cesrésultats vous les aurez »...Seulement voilà : M. Sarkozyest peut-être sincère pendantqu'il parle, mais ni son aurapersonnelle, ni la noblesse desa fonction qu'il ne cesse derabaisser par son comporte-ment, ni le régime qu'il in-carne ne lui donnent la possi-bilité de mener à bien lagrande politique dont le paysa besoin. Il n'est qu'un politi-cien aléatoire et provisoire,et même ceux qui l'écoutentpoliment n'ont guère d'illusions...

Une fois encore citonsGeorge s F rêche . Le shommes de relief sont si

rares dans la classe politique ac-tuelle... Lui, au moins, sait ap-peler un chat un chat et des par-tis se partageant péniblement lamoitié de l'électorat, des mori-bonds. Le soir des résultats dusecond tour des régionales, pen-dant que les autres politicienspéroraient sur les ondes et lesécrans, il a observé une minutede silence pour tous les partis.Il a même déclaré (propos re-produits par le site de lafautea-rousseau) : « Il faut voir lemonde tel qu'il est : les partispolitiques tels qu'on les a connusau XXe siècle ont passé ; ce sont

des étoiles, mais des étoilesmortes, ils continuent à brillermais ils n'attirent plus personne.Si vous ajoutez l'abstention etle vote Front national, vous vousapercevez que les deux tiers desFrançais sont quasiment deses-pérés et ne croient plus dans lespartis politiques... Il faut re-fonder complètement la poli-tique en France.... »Voilà qui est dit et bien dit. Qu'unhomme de gauche en soit ainsiréduit à cracher dans la soupeque lui apprêtent des électeursqu'il traite par ailleurs de "cons"(L'AF 2000 du 18 février) est unfait tout nouveau. Nous nesommes pas sûr de nous trouverd'accord avec M. Frêche sur les

bases d'une refondation de la po-litique. Mais au moins disons-nousensemble que le système est ver-moulu et qu'il faut tout flanquerpar terre.Il est temps de parler ferme etsans tabous. Imaginer une nou-velle constitution pour unesixième république serait semettre le doigt dans l 'œi l(d'ailleurs une tragédie classiquen'a jamais plus de cinq actes !).Créer un nouveau parti, mêmeavec un nouveau discours, divi-serait encore plus les Français.Refonder quelque chose autourd'un homme autoproclamé pro-videntiel s'avérerait la plus fu-neste des aventures quelques an-nées après. C'est d'une totale re-

fondation de la politique que laFrance a besoin, refondation in-tellectuelle et morale pour êtrepleinement politique. Pour cela il faut débarrasser lesesprits du venin des sacro-saintscadeaux de la Révolution ditefrançaise et oser renouer, certesen le modernisant, avec le ré-gime qui a fait la France, qui n'aen rien démérité en dépit desmensonges rabâchés, et qui resteriche d'une expérience ayantduré mille ans. n

Michel Fromentoux

o FRÊCHE

Refonder la politique...Confronté à l'abstention massive, un homme de gauche crache dans la soupe et juge les partis dépassés.

APRÈS LES RÉGIONALES

Notre seulepriorité : l'intérêt national

L’ACTION FRANÇAISE

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ment les 175 milliards de dollarset la firme a fait un chiffre d'af-faires 2 de plus de 23 milliards dedollars en 2009, laissant un bé-néfice de 28 % !La monétisation du "mot clé" se-rait-elle réservée au jeune lion ?En apparence, tout est tellementsi simple quand c'est fait, que lesmoteurs nationaux comme Baiduou Sinacorp se sont sentis capablesde prospérer pour peu que l'ex-pansion du géant américain enChine soit découragée. En Chine,c'est l'État qui "décourage" ! Il lefait sans émotion aucune. Parexemple, il a carrément fermé In-ternet au Xinkiang après lesémeutes d'Urumqi de 2009, n'ou-vrant certaines lignes profession-nelles que sur demande expresseet justifications au grand dam desPME locales.Au delà de la fonction "moteur",l'enjeu le plus important est denourrir les plateformes mobilesde moult applications dont tousles internautes ont entendu par-

ler, même si tous ne les utilisentpas encore. Or China Mobile,première compagnie de téléphonedu monde avec cinq cents mil-lions d'abonnés, doit décider cesjours-ci d'une alternative à Googleavec lequel elle est sous contrat.

Soumission à l'État

Ce sera le signal qui dictera laposture de tous les autres, at-tendu qu'il est très dangereux debraver l'État central dans un do-maine aussi sensible que les té-lécommunications nomades. TOMOnline, la téléphonie mobile deLi Ka-shing 3 sur le continent, adéjà succombé à la peur et seproclame depuis mardi dernierdébranché de la pieuvre améri-caine. Pacific Century Cyberworks(Hong Kong) de son fils Li Tzar-kai devrait suivre.Les moteurs chinois sont-ils ca-pables de surpasser Google, telleest la grande question "nationa-liste". S'ils y parviennent – et les

développeurs chinois ne sont pasdes manches – l'État chinois aurale contrôle parfait de l'informa-tion étrangère destinée à l'em-pire. S'ils échouent, en ce sensque de nombreux internautes par-ticuliers et professionnels rous-pèteront, noieront les services of-ficiels de réclamations véhé-mentes ou enverront leursrecherches à l'extérieur du paysfaisant perdre la face aux diri-geants, alors les têtes de la Cen-sure tomberont tant le pays estobsédé par le comblement del'écart entre lui et l'Occident. Ànoter que cet écart est de notrefaute, ancienne certes mais tou-jours vivace.

Le libéralisme à l'épreuvede l'immensitéS'il y a matière a s'émouvoir desrestrictions imposées par la Chineà ses ressortissants résidents aupays, on peut aussi prendre un jo-ker et ne pas se joindre au concertde protestations. Non parce quela bataille au fond est terrible-ment capitalistique – on oublietrop souvent le paramètre "fric"dans la gestion de l'État chinois –mais surtout parce que de mé-moire d'homme, nul n'a vu qui-conque gouverner un empire de 1 350 millions de citoyens,égaux en droits qui pis est, et qu'à ce niveau de défi, les vieilles re-cettes libérales sont peut-être dé-passées. n

Catoneohttp://royalartillerie.blogspot.com

1 Le Pagerank est un indice de po-pularité des pages web calculé parGoogle, Google Maps un service decartes et de plans en ligne, Adsenseune régie publicitaire, G-mail unservice de messagerie, Chrome unlogiciel permettant de naviguersur la Toile.2 Cf. http://investor.google.com/fin_data.html3 Le territoire est divisé entre dif-férents magnats spécialisés qui nes'affrontent pas. Les plus connussont Li Ka-shing, les frères Kwok,Lee Shau-kee, Cheng Yu-tung, Stan-ley Ho, Yeung Sau-shing et JimmyLai. Le classement Forbes comptequarante millardaires chinois àHong Kong !

z ÉCONOMIE & MÉDIAS

z 2 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010

Directeur de 1965 à 2007 : Pierre Pujo (?)

Directeur de la publication : M.G. PujoDirecteur éditorial : Gérard BedelRédacteur en chef : Michel FromentouxRédacteur graphiste : Grégoire Dubost

Politique française : Guillaume Chatizel, Jean-Philippe Chauvin, Antoine Goursky, Stéphane PiolencSociété :Stéphane Blanchonnet, Jean-Pierre Dickès, Michel FromentouxEurope :

Charles-Henri Brignac, Grégoire Dubost, Guy C. MenusierMonde : Philippe Maine, Pascal NariHistoire :Michel Fromentoux, Yves Lenormand,René Pillorget, Frédéric WinklerCulture : Anne Bernet, Monique Beaumont, Charles-Henri Brignac, Alain WaelkensChroniques : Jean-Baptiste MorvanCombat des idées :Gérard Baudin, Stéphane Blanchonnet

Abonnements, publicité, promotion : Monique Lainé

10 rue Croix-des-Petit10 rue Croix-des-Petits-Champs-Champs s 75001 Paris75001 Paris

Tél. : 01 40 39 92 06 - Fax : 01 40 26 31 63

wwwwww.actionfrancaise.net.actionfrancaise.netredaction@[email protected]

[email protected] 1166-3286

L'hydre capitaliste est-ellesans âme ? La firme de Moun-tain View avait accédé en

2006 au premier marché mondialen passant sous les fourches cau-dines de la Censure chinoise luidemandant de filtrer les requêtesadressées à ses serveurs.

Poussé par un piratage

Après quelques piques de mau-vaise humeur, la communauté in-ternétique l'avait alors absoute aumotif premier que le développe-ment du moteur global sur l'im-mense marché chinois était im-parable. De simples questionsd'éthique – améliorables dans lefutur - ne pouvaient brider GoogleInc., tous les acteurs majeursétant passés par là (Microsoft, Ya-hoo, Amazon...). Il faudra qu'enjanvier dernier les services chi-nois de basse police fassent pira-ter les serveurs afin d'accéder auxdonnées personnelles des dissi-dents ciblés, pour que les Améri-cains se fâchent et, comme tou-jours à la fin de l'envoi, tombentdu bon côté. Sacré scouts ! Mais la morale de l'affaire est toutautre et les chevaliers ni si noirsni si blancs. Le succès phénomé-nal des intuitions techniques deGoogle (Pagerank, Google maps,Adsense, G-mail, Chrome... 1) aindiqué la voie de monstrueux pro-fits aux acteurs chinois d'un mar-ché presque comparable bientôten taille à celui du reste dumonde. La capitalisation boursièrede la société avoisine actuelle-

o INTERNET

La Chine désertée par GoogleRefusant désormais la censure de Pékin, le géant américain de l'internet veut passer pour un champion de l'éthique. Il ouvre surtout la voie au développement des acteurs locaux orchestré par l'État chinois.

» RADIO

Les flashs d'information de-vraient être diffusés ennombre réduit sur NRJ et Nos-talgie. Un signe de l'intérêtporté à l'actualité politiquepar nos compatriotes ?

» PRESSE 2.0

La presse continue de tâton-ner à l'orée de l'ère numé-rique. Tandis que La Tribunepourrait disparaître deskiosques, les sites Internet duTimes et du Sunday Timess'orientent vers un modèlepayant. Le New York Times aentrepris, quant à lui, de dif-fuser en ligne sa conférencede rédaction.

» OUTRAGE

L'audience de Facebook auraitdépassé celle de Google auxÉtats-Unis. Mais toutes lesconséquences n'ont pas en-core été tirées de l'émer-gence des réseaux sociaux enligne. Certains utilisateurs enfont les frais : un agriculteurdu Vaucluse a été condamné à250 euros d'amende pour ou-trage envers la police de Ca-vaillon, après avoir affirmésur Facebook que ses « poulets » constituaient « le vide-ordure » des forces de l'ordre.

» CATASTROPHE

Le gouvernement britanniquemène une communicationcontroversée contre le ré-chauffement climatique. L'au-torité nationale de vérifica-tion de la publicité a censurédes annonces signalant lamultiplication prochaine desinondations, vagues de cha-leur et autres tempêtes. L'Ad-vertising Standards Authorityles a jugées alarmistes, re-quérant davantage de nuanceétant donné les « incerti-tudes » planant sur ces phé-nomènes.

Glanés sur InternetBernard Lugan vient de lancerune lettre internet reprenant l'es-prit de sa défunte revue L'AfriqueRéelle, et portant le même nom.Vous pouvez vous abonner direc-tement sur son site. Bernard Lu-gan est un des rares historiensafricanistes osant affronter le po-litiquement correct.

Au travers de son site, François-Bernard Huygues étudie médiaset techniques (matérielles, intel-lectuelles, sociales) de commu-nication dans l'optique de la com-pétition et du conflit, comme dela diffusion des croyances. Ses re-cherches transdisciplinaires surles stratégies de l'information(pour lesquelles il a créé le néo-logisme infostratégie) s'appliquent

en intelligence économique, enmédiologie et en polémologie. Unsite de référence pour connaîtreles tenants et les aboutissants dela modernité.

Journaliste à Libération, Jean-Dominique Merchet a en chargeles questions militaires depuis unequinzaine d'années. Une passiondans laquelle il est tombé toutpetit... Auteur de nombreux ou-vrages sur les forces armées fran-çaises, il est auditeur de l'Insti-tut des hautes études de défensenationale. Son blog est un desmieux informés en matière de dé-fense nationale. Beaucoup de pro-pos de notre confrère pourraientêtre signés par nous. n

Christian Lestang

3 bernardlugan.blogspot.com3 www.huyghe.fr3 secretdefense.blogs.liberation.fr

Service minimumen Euroland

Craignant une asphyxie de sonpays sous la pression des marchés,le Premier ministre grec GeorgesPapandréou avait sollicité un« large soutien politique » qui luipermettrait de financer sa dette« à des taux raisonnables ». Le 25 mars , en marge du Conseileuropéen, les chefs d'État et degouvernement des seize pays dela zone euro sont convenus decontribuer à des prêts bilatérauxcoordonnés. Cela en « dernier re-cours », avec une implication« substantielle » du Fonds mo-nétaire international.

« Il a fallu travailler dur » pourparvenir à cet accord, a reconnule président de la République. Àl'approche des élections en Rhé-nanie-du-Nord-Westphalie, lechancelier allemand craignait vrai-semblablement de froisser sonopinion publique, exaspérée parles déboires de la Grèce, lesquelscontrastent avec la rigueur prati-quée outre-Rhin. La déclarationde l'Eurogroupe annonce d'ailleursune surveillance renforcée desrisques économiques et budgé-taires. « La question des sanctionsest clairement posée », a souli-gné Nicolas Sarkozy. De fait, l'accord arraché à AngelaMerkel ne fait aucun mystère deses réticences. Prenant le risquede tester les marchés lundi der-nier, Athènes a toutefois bénéfi-cié d'un accueil relativement fa-vorable après avoir lancé un em-prunt de 5 milliards d'euros sursept ans. Affaire à suivre. n

Les bureaux chinois de Google à Beijing

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POLITIQUE z

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010 3 z

z NOTRE SOUSCRIPTION POUR L'AF

Dimanche 21 mars 2010, lesformations de gauche ontremporté les élections ré-

gionales auxquelles Nicolas Sar-kozy, en dépit de ses dénégationstardives, avait donné une portéede politique générale en lançantlui-même la campagne de l'UMPfin 2009.

Cohn-Bendit triomphe

Le Parti socialiste, renforcé desradicaux de gauche et de "diversgauche", passe de 714 à 754 élus,soit à peine 40 de plus qu'avant.L'UMP (366 élus plus 124 élus UDFen 2004) passe à 330 élus, aux-quels s'ajoutent ceux du NouveauCentre, du MPF, de CPNT, duPCD 1, soit 460 élus. Les élus com-munistes qui étaient 191 en 2004dans les conseils régionaux tom-bent à 127 en 2010. Les journauxqui avaient annoncé un échec duFront national en ont été pourleurs frais, mais, bien qu'il ait étécité comme l'un des gagnants del'élection, le parti de Jean-MarieLe Pen a perdu 38 sièges, passantde 156 à 118. Présent dans 17 tri-angulaires en 2004, il l'était dans12 en 2010.Le principal vainqueur est EuropeÉcologie. Partis de 159 élus Vertsen 2004, les écologistes se re-trouvent forts de 263 élus en2010, soit 104 de plus. Là encore,il faut nuancer car parmi ces nou-veaux élus un certain nombre nevient pas des Verts. Ce parti seclasse en troisième position, der-rière le PS et ses partenaires etla majorité présidentielle. Toutesles formations ont fait de la sur-enchère écologique en parlant deréchauffement de la planète pourdes motifs industriels et en pro-posant des mesures plus ou moinsfantaisistes. Résultat de tout cebattage : Cohn-Bendit arbore unsourire triomphant !Les victoires des coalitions ne sontjamais nettes. Le Parti socialisteporte plusieurs épines dans sa

chair : Georges Frêche, quimontre qu'une bonne implanta-tion locale permet de faire unpied de nez à l'appareil, et sur-tout Ségolène Royal renforcée parson succès personnel. Les écolo-gistes vont poser des problèmesaux socialistes qui doivent dirigeravec eux. Ils s'entendent contrel'UMP mais ne sont d'accord surrien d'essentiel en économie.Alors, on va diriger les régions surdes dosages de soupes qui risquentde tourner à l'aigre, surtout pourles Français.

Sarkozy affaibli

Mais qui se soucie d'eux dans lepersonnel républicain au lende-main d'un vote ? Tous n'ont d'yeuxet d'oreilles désormais que pourla présidentielle. Qui sera candi-dat ? Qui a des chances d'êtreélu ? Comment partagera-t-on legâteau ministériel ? Martine Au-bry plairait à Bruxelles, DominiqueStrauss-Kahn à Wall Street.Le président a voulu un mouve-ment uni derrière lui, il sort af-faibli et déjà les rivalités s'ins-

tallent dans son camp. On lui op-pose Villepin pour faire croire ànouveau à l'électorat conserva-teur qui s'est abstenu que l'UMPest "à droite". Les Dernières Nou-velles d'Alsace annoncent: « L'an-cien Premier ministre comble unvide à droite », La Montagneparle d'une « alternative à droiteen 2012 ». Lors du Conseil des ministres du24 mars, les membres du gou-vernement les plus expérimentésont senti que l'atmosphère étaitglaciale entre le président et lePremier ministre. Lors de leurtête-à-tête hebdomadaire, le chefde l'État a fait acte d'autorité endemandant à son Premier ministred'annuler son intervention prévuesur TF1 le soir même.À l'Élysée, on tentait d'écarterle différend entre les deuxhommes : « Il est préférable d'at-tendre la semaine prochaine pourintervenir à la télévision afin derépondre à la gauche en cas demotion de censure. Et puis, cen'est pas la peine que le prési-dent et le Premier ministre semarchent sur les pieds. »

Fillon est désappointé : Sarkozyrefuse sa démission et ne veut pasde remaniement. Il veut donnerl'impression que rien n'est changéet faire passer ses réformes, quid'ailleurs ne changeront pasgrand' chose. À Matignon, chacuna compris que le patron était ensursis et qu'il n'avait été recon-duit que pour six mois. NicolasSarkozy n'a pas apprécié l'ovationpar laquelle les députés de la ma-jorité ont salué le Premier mi-nistre. Il s'est fâché quand il a vuFillon se faire applaudir debout àquatre reprises par les députésUMP. Il est vrai que la successionde sondages désignant Filloncomme un meilleur candidat en2012 n'arrange pas l'entente entreles deux hommes.

Penser à la France

En Allemagne, on doutait des ca-pacités de l'exécutif français. Hé-las, on ne doute plus de notre dé-clin politique. Mais chez nous onne pense qu'à la présidentielle.Même ceux parmi les républicainsqui possèdent le plus le sentiment

national se laissent entraîner dans les questions électorales. Qui sera meilleur en 2010, Ma-rine ou Bruno ?Et l'intérêt de la France ? Il n'y aqu'à l'AF qu'il représente la prio-rité. Crise économique et finan-cière, problème des retraites liéà la situation démographique,l'école machine à fabriquer designares asociaux, insécurité, im-migration, terrorisme, Europe quiréduit peu à peu notre souverai-neté, politique étrangère nulle,conséquence de tout ce qui pré-cède, et même crise "d'identité",ils font tout passer après leurs in-térêts partisans.. Quand on se de-mande ce que signifie être fran-çais, c'est qu'on ne l'est plus guère.

Des élites coupées du peupleIls se livrent aux joies de la com-pétition avec des règles du jeuperverses devant un pays qui sedétourne de plus en plus d'eux.Jamais la distinction entre paysréel et pays légal n'a été aussicriante de vérité. La "droite" agagné l'élection présidentielle de-puis Mitterrand, deux fois Chiracet une fois Sarkozy. Mais cette"droite" diffère-t-elle beaucoupde la gauche ? Dans l'ensemble,de renoncement en renoncement,la fausse "droite" a rejoint sa ri-vale. Les grands partis du Systèmeprofessent les mêmes idées surl'essentiel, assorties des mêmesignorances, des mêmes carences,des mêmes démissions, desmêmes lâchetés.La forte abstention lors du der-nier scrutin montre le dégoût desFrançais face à leurs politiciens.À nous, à l'Action française, deleur faire comprendre qu'une nou-velle réforme ou un changementdu personnel politique ne seraientque de nouvelles illusions dé-bouchant tôt ou tard sur de nou-velles déconvenues. Que laFrance se libère des partis quiprofitent d'elle et l'épuisent, ma-tériellement et moralement ! n

Gérard Bedel

1 Ces sigles indiquent les partisansde Philippe de Villiers, Chasse,Pêche, Nature, Traditions et le Partichrétien-démocrate de Mme Boutin.Notons que PCD désigne en comp-tabilité les « provisions pourcréances douteuses »...

o APRÈS LES RÉGIONALES

Notre seule priorité : l'intérêt nationalComme la campagne électorale, l'analyse des résultats des élections régionales est dominée par le jeu des partis. L'affaiblissement de l'UMP attise les rivalités à droite, tandis que la présidentielle de 2012 s'impose comme le seul horizon...

C'est la somme qu'un magnatfranco-russe vient d'insufflerdans la nouvelle formule deFrance Soir, tirée à 500 000exemplaires vendue seulement50 centimes d'euro, avec un sup-plément TV le samedi.Le résultat : 100 000 exemplairesvendus en moyenne chaque jouret un "bouillon" quotidien de400 000 exemplaires qui doiventêtre détruits... Cela devraits'améliorer dans les semaines àvenir, affirme la direction. L'ob-

jectif est de 200 000 exemplairesvendus fin 2010. Pour l'instantça n'en prend pas le chemin.Quel gâchis !

Alors que pour un journal de ré-flexion politique comme L'ActionFrançaise 2000, nous avons dumal à trouver 30 000 euros pournous dégager des soucis finan-ciers pour l'année. C'est pour-quoi nous demandons à l'en-semble de nos amis et lecteursqu'ils nous aident dans toute la

mesure de leurs moyens. Il y anotamment urgence pour entre-prendre les travaux d'aménage-ment de nos locaux. Merci pour ce que vous pourrezfaire. n

Marielle Pujo

3 Merci d'établir vos chèques àl'ordre de Mme Geneviève Castel-luccio et de les lui envoyer à cetteadresse : L'Action Française 2000,10 rue Croix-des-Petits-Champs,75001 Paris.

20 millions d'euros...

Liste n° 4Virements réguliers : Mme YvonnePeyrerol, 15,24 ; Mlle Annie Paul,15,24 ; Vincent Claret-Tournier, 15 ;Jean-Pierre Lamy, 30 ; Henri Morfin, 32.

Mlle Odile Lopez, 5 ; Jean-Pierre Lopez, 5 ; Claude Delatte, 50 ;Mme Crouillebois d'Alençon, 68 ;Jacques Lamonerie, 100 ; GérardTourneur, 150.

Total de cette liste : 485,48 sListes précédentes : 2 341,56 s

Total : 2 827,04 s

« Que la France se libère des partis qui profitent d'elle et l'épuisent, matériellement et moralement ! »

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z ASPECTS DE LA FRANCE

z 4 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010

Nos confrères restés catho-liques et français ont déjàlonguement évoqué ce

« jour de honte » qu'a été jeudi18 mars la réception de SimoneVeil à l'Académie française. On sedemande toujours à quel titrecette dame dont on ne connaîtaucun grand livre et dont les ta-lents oratoires sont très moyensa pu être reçue dans cette noblemaison créée par le cardinal deRichelieu en 1635 pour consacrerla notoriété de personnalitésayant contribué à enrichir lalangue et la culture françaises.Par on ne sait quelle coquetterie,Nicolas Sarkozy, après avoir an-noncé qu'il n'assisterait pas ausacre de l'avorteuse, est finale-ment venu s'asseoir aux côtés deJacques Chirac et de Valéry Gis-card d'Estaing, et les trois hommesqui ne s'aiment guère ont com-munié dans une même glorifica-tion de la mort.

Résolution

Ne pouvant pas trouver la matièred'un éloge littéraire pour recevoirsa nouvelle consœur sous la Cou-pole, Jean Lefèvre d'Ormesson,semblant se souvenir qu'il des-cend par sa mère du régicideLe Peletier de Saint-Fargeau,n'était nullement gêné d'avoir àlouer celle qui a donné son nomà la loi tolérant de multiples mas-sacres d'innocents. Après avoir –et nul ne le lui reprochera - évo-qué non sans émotion les annéesque Simone Veil vécut en dépor-tation, l'orateur en est venu àexalter le courage de celle quiétait en 1974 « du côté desfemmes » : « Avec calme, maisavec résolution, vous vous affir-miez féministe... » Qu'y a-t-ild'admirable à inscrire "résolument"une action dans une mentalitéd'abandon des mœurs ?La pauvre femme connut des dif-ficultés « cruelles », lesquelles« ne viennent pas principalementdes autorités religieuses ». C'estvrai, hélas ! Mais d'Ormessoncontinue : « Les catholiques in-tégristes vous étaient – et vous

restent - farouchement oppo-sés. » Ici, l'auteur d'Au plaisir deDieu montre qu'il connaît plutôtmal la langue française : que vientfaire ici ce qualificatif d'intégristespour désigner des catholiques toutsimplement fidèles intégralement- comme ils doivent tous l'êtretant qu'ils ne se renient pas - aucatéchisme que l'Église enseignedepuis deux mille ans, donc bienavant que surviennent les débatsautour de la loi en question ? Àsavoir que la vie est un don deDieu, que chaque être dès saconception est appelé à entrerpar la grâce du baptême dans lavie éternelle et que tuer le pluspetit, le plus démuni, le plus in-nocent d'entre les hommes est lecrime le plus abominable ! Or c'estla négation de cette loi naturelleque Mme Veil a fait entrer dans laloi pour la plus grande honte dela France de Clovis, de saint Louiset de sainte Jeanne d'Arc.Et d'Ormessson continue : « Uneminorité de l'opinion s'est dé-chaînée – et se déchaîne encore- contre vous. L'extrême droiteantisémite restait violente et ac-tive. [...] Le mot de génocideétait parfois employé. » Ici, l'aca-

démicien politiquement correctatteint le sommet du méprisableen voulant assimiler le respect dela vie à l'antisémitisme. La vie estun bien intangible, la personnede Mme Veil est une tout autrequestion. Quant au mot génocide,s'il est chargé de souvenirs ef-froyables, doit-il pour autant êtreeffacé de la langue françaisequand il s'agit de désigner l'as-sassinat légal de plus de 220 000enfants à naître par an ? Mêmeen tenant compte du fait que tousn'auraient pas atteint l'âge adulte,on doit compter par millions lenombre d'hommes dont la loi Veilprive la France depuis plus detrente ans.

Représentant contesté

D'ailleurs d'Ormesson lui-mêmerappelle en les montrant du doigtles juifs religieux de New York les-quels, il y a cinq ans, « ont écritau président de la République po-lonaise pour contester le choixde l'auteur de la loi française surl'interruption volontaire de gros-sesse comme représentant des dé-portés au soixantième anniver-saire de la libération d'Ausch-

witz ». Alors entendre dire queMme Veil inscrit « à jamais [son]nom au tableau d'honneur de lalutte, si ardente, dans le mondecontemporain, pour la dignité dela femme » ne peut qu'engendrerle dégoût. En quoi la dignité dela femme a-t-elle gagné quelquechose dans le fait de pouvoir re-noncer à s'épanouir dans la ma-ternité ? Dans le fait de pouvoirinterrompre une grossesse non pasvolontairement mais sous le jougde la pression médiatique et d'unementalité qui préfère l'inciter aucrime plutôt que de lui venir enaide quand elle traverse des si-tuations de détresse ?Mais laissons là ce discours pon-tifiant pour lequel l'orateur a sansdoute mérité aux oreilles de cer-tains d'être surnommé comme sononcle Vladimir jadis par Léon Dau-det « d'Endormesson »...

Réaction catholique et françaiseAu même moment, la "femme laplus aimée des Français", proté-gée de ces mêmes Français parune multitude de policiers, étaithuée de l'autre côté de la Seinepar plus de trois cents manifes-tants désireux de sauver autantque possible l'honneur français.Parqués comme des délinquantspar les forces de l'ordre qui allè-rent jusqu'à arracher le micro desmains de l'abbé Xavier Beauvais,curé de Saint-Nicolas du Char-donnet, qui méditait le chapelet,et jusqu'à tenter de déplacer ledocteur Xavier Dor priant à ge-noux, ils ont finalement tenuquelques heures leur territoirede l'autre côté du pont des Artsen déployant de grandes bande-roles, en priant pour la France et pour les victimes de l'im-monde loi Veil et en chantant descantiques. Quai Conti, la République danstoute son horreur souillant l'ins-titution fondée par un cardinal...Quai du Louvre, un trop petitnombre de Français incarnant lafidélité aux promesses du bap-tême de leur pays... Le rapportde forces était certes dérisoire,mais on devinait plus d'espérancefrançaise de ce côté-ci que del'autre où, comme l'a dit le doc-teur Luc Perrel, président de Lais-sez-les-vivre, en citant CharlesMaurras, on célébrait « la Répu-blique mangeuse d'hommes ».L'affontement devra bien avoirlieu un jour. n

Michel Fromentoux

o ACADÉMIE

Dame Veil "canonisée"À quel titre Mme Simone Veil a-t-elle été reçue à l'Académie ? Faisant son éloge,Jean d'Ormesson a cru devoir saluer sa lutte « pour la dignité de la femme »,tandis que des manifestants s'étaient rassemblés de l'autre côté de la Seine.

L'Institut de France où siège l'Académie française

Zemmour sauvéÉric Zemmour l'aura échappébelle ! On se souvient (voirL'AF 2000 du 18 mars) qu'il avaitdit le 6 mars sur Canal + que « lesFrançais issus de l'immigrationsont plus souvent contrôlés queles autres parce que la plupartdes trafiquants sont noirs etarabes... C'est un fait. » Après toute une semaine avec lesgrandes consciences médiatiques,la direction du Figaro et la LICRAà ses trousses..., Zemmour se re-trouve, en ce début d'avril, chro-niqueur journalistique, radiopho-

nique et télévisuel comme de-vant. "Ils" n'ont pas osé l'abattre :son figaresque patron l'avaitconvoqué pour un entretien avantlicenciement, mais a changé d'avisavant même qu'une manifestationde soutien eût été bruyammentimprovisée ; la ligue de vertu"contre le racisme et l'antisémi-tisme" s'est rassérénée à la lec-ture d'une lettre du "coupable"expliquant qu'il n'avait point vouludire que tous les maghrébins ettous les gens de couleur sont tra-fiquants ; quant aux pontifes dela bien-pensance, ils ont vite com-pris que le gibier qu'ils croyaienttenir se retournerait contre eux.

Seuls Frédéric Mittterrand s'estflatté de ne pas regarder Zem-mour, et Catherine Duflot a crubon de dire que les propos de ce-lui-ci étaient « dégueulasses »...

Quelle liberté ?

Le talentueux chroniqueur pou-vait dire très calmement au Sa-lon du Livre le 29 mars : « Je neregrette rien. » Les médias tropchatouilleux ont pour une foisperdu la face. Dire tout haut ceque tout le monde pense tout bassemble désormais ne plus être uncrime de lèse-droits de l'homme.Même un avocat général à la cour

d'appel, Philippe Bilger, a prisquelques risques pour soutenirZemmour.Deux questions se posent encore :la liberté de la presse, après cetteaffaire, cessera-t-elle d'être sou-mise à l'opportunité médiatiquede dire une chose ou redevien-dra-t-elle la liberté de dire unechose tout simplement parcequ'elle est vraie ? Cette libertélaissée à un fleuron du systèmedonc à quelqu'un qu'il était dan-gereux de toucher, sera-t-elle dé-sormais étendue à tous ceux quitiennent une plume et que le sys-tème méprise depuis tant d'an-nées ? L'avenir le dira. n M.F.

» WALLIS ET FUTUNA

Quelques jours après le dé-chaînement de la tempêteXynthia en métropole, le cy-clone Tomas a frappé les îlesde Wallis et Futuna les 14 et15 mars. Les habitations au-raient beaucoup souffert, toutparticulièrement sur la côtenord de Futuna, selon uncommuniqué du gouverne-ment : « Les maisons en dursont endommagées de 30 à70 % (toitures arrachées,inondations). Les cultures vi-vrières ont été détruites à80 % à Futuna et à 50 % surWallis. De nombreux com-merces ont été détruits. Lamoitié des écoles est endom-magée, dont le collège de Fu-tuna. » Le secrétaire d'État àl'Outre-Mer, Mme Marie-LucePenchard, a débloqué desfonds d'urgence et lancé laprocédure de reconnaissancede l'état de catastrophe naturelle.

» TV ŒNOLOGIQUE

En les assimilant à de la pu-blicité, le Conseil supérieurde l'audiovisuel interdit au-jourd'hui la création dechaines de télévision consa-crées à la viticulture, la vigneet le vin. Une situation aber-rante aux yeux du sénateurRobert Navarro, soucieux de« mettre en valeur tous nossavoir-faire » sur les réseauxcâblés, satellitaires et ADSL.Il a déposé une proposition deloi modifiant le code de laSanté publique, dont l'adop-tion lui paraît d'autant plusurgente que de telles chaînesexistent dans d'autres pays,alors que le principe de librecirculation des programmestélévisés européens au seindu marché intérieur a étégrandement renforcé.

» CATÉCHISME

Le site Liberté politique(26 mars) nous apprend que« le ministre de l'Éducationnationale Luc Châtel veut "en-courager l'école du mercredimatin" (Le Monde, 20 mars). »Mgr Bouwet, évêque auxiliairede Nanterre, s'inquiète et pré-cise que « les enfants n'ontpas classe le mercredi, nonpas d'abord pour qu'ils se re-posent mais parce qu'une loide mars 1882 prévoit que lesécoles ferment pendant unejournée pour que les enfantspuissent aller au catéchisme.[...] Depuis quelque temps lasemaine de classe est une se-maine de quatre jours. [...]Certaines voix s'élèvent pourdire que c'est trop peu. [...]Mais alors que devient l'ensei-gnement religieux ? [...] Enlibérant le mercredi matin,l'État n'organise pas le caté-chisme mais reconnaît l'impor-tance de la transmission de lafoi pour un futur citoyen.[...] Ce n'est pas seulementune question d'agenda, c'estla question de la légitimité dela foi dans notre société. »

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ASPECTS DE LA FRANCE z

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010 5 z

Une conférencedu prince Jean

« Vive la Pologne, Monsieur ! »On se souvient de l'exclamationdu bouillant Charles Floquet lorsde la visite du tsar Alexandre II àl'Exposition universelle à Paris enen 1897. La Pologne a toujours

occupé une place particulière enFrance, celle du cœur. Le prince Jean, hôte de la Sociétéhistorique et littéraire polonaise,l'a rappelé le mardi 16 mars. Lessalons de la bibliothèque polo-naise, quai d'Orléans (tout un sym-bole) n'étaient pas assez grandspour accueillir le public venu l'en-tendre. Un lieu où demeure pré-sent le souvenir de Chopin, « lerêveur inspiré que l'exil nous en-voie » – et auquel le musée de laVie romantique, rue Chaptal, ré-serve un bel hommage jusqu'au11 juillet. Le Prince a évoqué un voyage ré-cent en Pologne au cours duquelil s'entretint avec Lech Walesa. Ils'est dit impressionné par la jeu-nesse de la société et le dyna-misme qu'apportent ses repré-sentants souvent revenus destages à l'étranger. En réponse àune question, il a regretté qu'enPologne – et dans d'autres paysde l'Est – « le rêve américain »

prévale. « La France, malheu-reusement, ne fait plus rêver. »Il souhaiterait que l'Alliance fran-çaise mette davantage d'ardeur àdéfendre la francophonie. Et l'Europe ? « Ma femme est au-trichienne, ma famille est euro-péenne. Je ne suis pas aussi anti-européen que cela. Il faut aussiagir en Européen sans oublier l'at-tachement des princes françaisau "pré carré". »

Un prince chrétien

Se référant à la publication de sonlivre, Un Prince français, il a dé-claré : « Je pense en prince chré-tien, j'agis en prince français »,ce qui l'amena à parler de la na-tion et du concept de laïcité. « Lalaïcité à la française a toujoursexisté, mais je regrette qu'au-jourd'hui il y ait une laïcité anti-religieuse. » Interrogé sur la souf-france des chrétiens de Palestine,le Prince s'est dit proche de

l'Œuvre d'Orient. Il voudrait quela France constitue le « relais »des communautés chrétiennes sou-vent harcelées et pourchassées ;qu'elle retrouve ce rôle qui fut lesien dans l'Histoire...Comme on pouvait le présumer,l'idée monarchique a été évoquéepar l'assistance. Les princes, a-t-il été répondu, devraient se mon-trer plus présents dans l'espacepublic. D'où le livre Un Princefrançais. Le projet de retrouverle temps où La Lettre du comtede Paris bénéficiait d'une au-dience certaine a été envisagé.« Cela étant, les circonstancesd'une restauration monarchiquene me paraissent pas réunies »,a souligné le prince Jean, qui aconclu en souriant et avec hu-mour : « Si la monarchie ne vientpas, je ne vais pas en mourir. »Demeure la devise du Téméraireselon laquelle « il n'est pas né-cessaire d'espérer pour entre-prendre ». n Ch.-H.B.

Nous sommes, avouons-le,extrêmement flattés : ilsemble bien que le prési-

dent de la République, NicolasSarkozy, soit un lecteur assidu deL'Action Française ! Dans notrepremier numéro de janvier, aprèsle sommet de Copenhague, nousplaidions en effet pour la miseen place d'une taxe carbone eu-ropéenne.

L'environnement contre la compétitivitéAvec, à l'appui de notre proposi-tion, un raisonnement assezsimple : si l'on veut bien admettreque la réduction des gaz à effetde serre est une nécessité, elle« nécessitera des investissementsde l'Europe et des efforts de lapart des industries, des agricul-teurs et des ménages européens.Au risque même, par des direc-tives imposant de nouvellesnormes, ou par des mécanismesfiscaux comme la taxe carbonefrançaise, de peser sur la com-pétitivité des acteurs écono-miques européens, déjà pénali-sés sur le plan social par rapportà d'autres pays. »Aurions-nous été entendus ? Aulendemain des élections régio-nales, par la voix du Premier mi-nistre François Fillon, l'exécutifrenonce à la taxe carbone à lafrançaise. Officiellement, ill'ajourne et plaide pour qu'elle soitmise en place au niveau européenavec des arguments que nous nesaurions contester : il ne faut pas« voir s'accroître notre déficit decompétitivité ».C'est Hervé Novelli, l 'un desmembres du gouvernement lesplus sensibles à l'économie deproximité, qui avait ouvert labrèche durant la campagne des

élections régionales. Le 19 février,devant les responsables agricolesréunis dans le Cher, il réclamaitque le gouvernement lève le piedsur les efforts environnementauxque la France impose à son agri-culture et à son industrie.

Appel au moratoire

Considérant que les efforts déci-dés lors du Grenelle de l'Environ-nement n'étaient plus réalisables,du fait de la crise, le ministreavait plaidé pour « un moratoiredes normes réglementaires envi-ronnementales qui sont aujour-d'hui à l'œuvre dans notre pays ».

L'autisme de la cour sarkozyste,plus prompte à écouter les mul-tinationales et leurs lobbyistesque "la France qui se lève tôt",n'aura pas permis qu'une telle dé-cision fût prise avant l'échec desrégionales. Mais la cuisante dé-faite subie par l'UMP le 21 marsaura au moins eu cette vertu :celle de faire comprendre à Ni-colas Sarkozy que son alignementsur les thèses de Nicolas Hulotn'était plus supportable, en par-ticulier pour les chefs d'entrepriseet agriculteurs qui composent ha-bituellement l'électorat de droite.En renonçant à l'application im-médiate d'une taxe carbone

franco-française, le gouvernementa sans doute sauvé nos entreprisesd'une nouvelle perte de compé-titivité alors qu'elles sont déjàgrevées par une législation socialedéfavorable, aggravée notammentpar les 35 heures.Mais que l 'on considère qu'ils'agisse d'un report, d'un ajourne-ment ou d'un abandon de la taxecarbone, dans tous les cas c'estévidemment un lourd revirementpour Nicolas Sarkozy, élu sur lapromesse de "faire ce qu'il dit".« Je ne comprends pas commenton peut avoir signé le pacte deNicolas Hulot au printemps de2007 et aujourd'hui renier sa pa-role et ne pas faire ce que l'on adit que l'on ferait. Je l'ai signé.Je le fais. C'est une questiond'honnêteté » déclarait le chef del'État en septembre dernier.

Encore un revirement

Pour gommer cette impression derevirement, le chef de l'État sedit « déterminé » et a demandéà la Commission européenne deproposer en juin un mécanismed'ajustement aux frontières del'Union pour taxer les importa-tions de pays rechignant à réduireleurs émissions de gaz à effet deserre. Sur le fond, nous ne pou-vons que lui donner raison et nousindiquions en janvier que la taxecarbone détruirait nos emplois sielle incitait à importer des pro-duits fabriqués dans les pays neprenant pas part à la réductiondes gaz à effet de serre.Mais sur la forme, force est deconstater que le chef de l'État,lors de la présidence française del'Union européenne, n'avait prisaucune initiative pour aller dansce sens. Et qu'il sait bien qu'il estillusoire de penser qu'une majo-rité pourrait rapidement seconstituer au niveau de l'Europepour mettre en place une taxecarbone s'appliquant à nos fron-tières. Une fois de plus, lespeuples européens risquent deconstater combien l'Europe,prompte à pondre des directivescontraignantes, semble incapablede protéger nos emplois... n

Guillaume Chatizel

o ÉCOLOGIE

Emplois et taxe carbone Nous plaidions en janvier pour que la taxe carbone soit mise en place au niveaueuropéen. Il faut croire que le président nous lit ! Mais il oublie de dire combienl'Europe des marchés sera réticente à adopter un tel mécanisme.

» VOILE

Que ce soit pour des raisonsd'identité nationale, de laïcitéou de dignité de la femme,tous s'accordent à vouloirbouter le voile intégral horsde France. Mais puisqu'il est"interdit d'interdire", leconsensus contre le voilerisque de ne pas suffire :« Aucun fondement n'est ap-paru juridiquement incontes-table pour procéder à unetelle prohibition » estime leconseil d'État. Et il faudradonc tricoter une loi emberli-ficotée interdisant de se dissi-muler le visage pour des "rai-sons de sécurité".

» EXCUSES

Abdelaziz Belkhadem, mi-nistre algérien et secrétairegénéral du FLN, appelle laFrance à présenter ses ex-cuses à l'Algérie pour « lescrimes » commis durant la co-lonisation. Il n'est évidem-ment pas question pour luique l'Algérie dise "merci" pource que cette période lui a ap-porté ni "pardon" pour lescrimes commis lors de la dé-colonisation... En finira-t-onun jour avec cette mode desexcuses ?

» DÉRAPAGES

Pendant que la droite hurlecontre les propos de l'humo-riste Stéphane Guillon à l'en-contre d'Éric Besson, lagauche hurle contre ceux d'É-ric Zemmour estimant que laplupart des trafiquants sontnoirs ou arabes. Mais le pro-blème n'est pas tant dans cesdérapages, il est surtout dansle mélange permanent entrecomédie et politique : l'humo-riste fait sa chronique surFrance Inter juste avant l'en-trée en plateau de l'invité po-litique et l'éditorialiste poli-tique intervient sur un tonfaussement léger dans desémissions de divertissement.Drôle d'époque.

» CLASSE AFFAIRES

Quand il n'est pas occupé àsauver la langue française,Alain Joyandet, secrétaired'État à la Coopération et à laFrancophonie, dépense lesdeniers publics... C'est pourun sommet à la Martiniqueconsacré à la situation des si-nistrés en Haïti que le mi-nistre a utilisé un jet privépour la modique somme de ...116 500 euros. Il aurait pour-tant pu prendre un avion deligne ou un des avions gouver-nementaux réservés aux mi-nistres... « Joyandet est unrécidiviste » car « il y aquelques semaines, il avaitdéjà fait le coup pour serendre à Haïti » précise desurcroît René Dosière, le dé-puté socialiste qui s'est faitune spécialité d'éplucher lesdépenses de la cour.

Guillaume Chatizel

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Àl'approche de la conférenced'examen du traité sur lanon-prolifération des armes

nucléaires (TNP), qui se tiendra àNew York du 3 au 28 mai, des voixse sont élevées pour réclamer, àl'image de Barack Obama, unmonde « sans armes nucléaires ».Faisant écho au discours prononcél'année dernière par le présidentaméricain, la Belgique, l'Alle-magne, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Norvège ont proposéd'inscrire la politique nucléaire àl'ordre du jour d'une prochaine ré-union de l'Otan (Bruxelles 2,28/02/2010).

Permanence à la mer

« La Guerre froide est terminée.Il est temps d'adapter notre po-litique nucléaire aux circons-tances nouvelles », ont proclaméquelques personnalités belges(Le Soir, 19/02/2010). Selon WillyClaes, Jean-Luc Dehaene, LouisMichel et Guy Verhofstadt, « lesarmes nucléaires tactiques amé-ricaines en Europe ont perdutoute importance militaire ».Considérant qu'elles stimulent in-directement la prolifération, etminent de ce fait la sécurité deleur pays, ils demandent leur re-trait. Cette perspective sembleinquiéter Jean-Pierre Chevène-ment : « Une "Europe sans armesnucléaires" créerait un vide stra-tégique étant donné que la Rus-sie, puissance eurasiatique, con-serve un arsenal très important,tout comme les États-Unis, et quele Moyen-Orient n'est pas unezone dénucléarisée », affirme-t-il dans un rapport déposé au Sé-nat le 24 février.Dans ce contexte, selon les révé-lations du Guardian (19/03/2010),la France aurait proposé auRoyaume-Uni un partage des pa-trouilles sous-marines censées ga-rantir la dissuasion nucléaire. Unprojet surprenant, sinon surréa-liste, naturellement rejeté parLondres. Le Premier ministre bri-tannique n'en a pas moins con-firmé sa volonté d'accroître sa co-opération avec Paris. En effet,« il est possible de se parler etde se dire beaucoup de choses »,souligne notre confrère Jean-Do-minique Merchet (Secret Défense,19/03/2010). « Notamment en ai-dant les Britanniques à conserverun certain nombre de savoir-faire... sans l'aide des Américains.En partageant quelques techno-logies complexes et coûteuses.Ou pour éviter que nos sous-ma-rins ne naviguent dans les mêmeseaux au même moment. On sesouvient qu'en 2009, deux SNLE[sous-marins nucléaires lanceursd'engins] étaient entrés en colli-sion en pleine mer. »Craignant de se trouver isolée enEurope, la France chercheraitpeut-être à se prémunir d'un hy-pothétique abandon du nucléaire

militaire outre-Manche. En sep-tembre dernier, Gordon Brownavait envisagé de réduire lenombre de sous-marins britan-niques, au risque de compromettrela permanence à la mer. « Chaqueannée, la dissuasion nucléairecoûte aux Français la moitié dubudget de la Justice ou de celuides transports », avait estimé leprésident de la République en2008. « Mais je suis déterminé àassumer ce coût », avait-il assuré,arguant que « ce n'est ni une af-faire de prestige ni une questionde rang, c'est tout simplementl'assurance vie de la nation ».

Stricte suffisance

Les restrictions budgétairesconduiront-elles le chef de l'Étatà renier son ambition ? C'est d'au-tant moins probable que la Francepeut se targuer, selon ses propresmots, d'« un bilan exemplaire »en matière de désarmement nu-cléaire. Et de louer alors « laFrance, premier État, avec leRoyaume-Uni, à avoir signé et ra-tifié le traité d'interdiction com-plète des essais nucléaires ; laFrance, premier État à avoir dé-cidé la fermeture et le déman-tèlement de ses installations deproduction de matières fissiles àdes fins explosives ; la France,seul État à avoir démantelé, demanière transparente, son sited'essais nucléaires situé dans lePacifique ; la France, seul Étatà avoir démantelé ses missilesnucléaires sol-sol ; la France,seul État à avoir réduit volon-tairement d'un tiers le nombrede ses sous-marins nucléaires lan-ceurs d'engins. »La France compterait désormais348 têtes nucléaires, selon l'esti-mation reprise par le sénateurJacques Gautier – chiffre que le

président entendait ramener àtrois cents, soit la moitié du maxi-mum détenu pendant la Guerrefroide. Outre les bons sentiments,la fiabilité accrue des charges etla meilleure précision des tirs plai-dent en faveur d'une réduction desarsenaux. « Dimensionnées selonle principe de stricte suffisance,qui a conduit à des réductions uni-latérales successives, les forcesnucléaires françaises ne peuventêtre prises en compte, à ce stade,dans aucun processus de négocia-tion multilatérale de désarme-ment », avertit Jean-Pierre Che-vènement. « La disproportion esttelle entre les arsenaux des deuxpremières puissances nucléaires(22 400) et tous les autres réunis(environ 1 100) que l'effort dedésarmement nucléaire doit por-ter en priorité sur les États-Uniset la Russie. » Lesquels ont an-noncé la prochaine signature d'unaccord bilatéral de réduction deleurs armes stratégiques offen-sives, faisant suite au traité Start.Depuis le pic de la Guerre froide,ils ont éliminé les deux tiers deleurs têtes nucléaires. La Chineen détiendrait quatre cent, laGrande-Bretagne moins de deuxcents, Israël entre cent et deuxcents, l'Inde et le Pakistan une pe-tite centaine, et la Corée du Nordmoins d'une dizaine.Le 23 mars, lors d'un débat auSénat – le premier du genre de-puis la création de notre forcede frappe nucléaire selon Mme Mi-chelle Demessine – Mme DominiqueVoynet n'a pas manqué de stig-matiser la France « qui a été l'undes principaux vecteurs de la pro-lifération dans le monde ».« Sauf à renoncer à voir advenirun monde sans armes nucléairesde notre vivant, nous ne pouvonsplus nous contenter de discoursconvenus », a-t-elle lancé, ex-

primant son soutien à ses col-lègues communistes. En leur nom,Mme Demessine a appelé la Franceà « montrer l'exemple » en re-nonçant à déployer le missile stra-tégique M51. À ses yeux, il serait« davantage un héritage de laGuerre froide qu'un instrumentde défense adapté aux menacesd'aujourd'hui ». Le "tir d'accep-tation" devrait néanmoins inter-venir au début de l'été en baied'Audierne, dans le Finistère, etmarquer l'arrivée effective dumissile dans la Force océaniquestratégique (Secret Défense,20/03/2010).

Consensus au Sénat

En dépit de quelques voix discor-dantes, le rapport de Jean-PierreChevènement « fait désormais au-torité », a observé Jean-Paul Gau-tier. Un consensus politiquesemble se dessiner en faveur dustatu quo national, et si le rêved'un monde dénucléarisé n'est pasexclu, il est poursuivi sans angé-lisme. D'autant qu'« il n'y a pasde lien univoque entre désarme-ment et prolifération », martèlel'ancien ministre. C'est pourquoi

« il est essentiel d'agir sur les dé-terminants régionaux de la pro-lifération nucléaire, qui s'enra-cine beaucoup moins dans la len-teur du désarmement des paysdotés que dans les crises poli-tiques régionales ».Sans nier la fragilité du TNP,M. Chevènement y voit « un ins-trument irremplaçable pour lasécurité internationale ». Il con-viendrait dorénavant de pro-mouvoir, entre autres : la réduc-tion des arsenaux américain etrusse jusqu 'à un niveau dequelques centaines d'armes nu-cléaires ; la ratification du traitéd'interdiction complète des es-sais nucléaires par les États-Uniset tous les autres États qui n'yont pas procédé ; l'ouverture ra-pide et sans condition de la né-gociation d'un traité d'interdic-tion de la production de matièresfissiles à usage militaire. Autantde perspectives que la Francesoutiendra vraisemblablement enmai prochain.

Une carte à jouer

Intervenant devant la chambrehaute, le ministre des Affairesétrangères a réaffirmé « le choixdéterminé » de la France en fa-veur du nucléaire civil, « enpleine renaissance ». Paris se ditdisposé à aider tous les pays vou-lant s'engager sur cette voie. Enconséquence, a annoncé BernardKouchner, lors de la conférenced'examen du TNP, « nous feronsvaloir l'exigence qui accompagnenotre proposition : que le déve-loppement du nucléaire se fasseavec les meilleures garanties desécurité, de sûreté, et de non-prolifération ».À court terme, précise Jean-PierreChevènement, il apparaît « in-dispensable » de concrétiser leprojet de "banque du combus-tible" : un mécanisme internatio-nal garantirait l'approvisionne-ment en combustible nucléaire detous les États demandeurs res-pectant les normes de non-proli-fération . À plus long terme de-vraient être mises en place desinstallations d'enrichissement oude retraitement à caractère mul-tilatéral. « Une approche régio-nale mériterait d'être privilégiée,avec notamment la création d'unetelle installation sous la respon-sabilité de l'AIEA [l'Agence inter-nationale de l’énergie atomique],dans un État du Moyen-Orient, oùles projets de réacteurs civils sontnombreux. » Le moment venu, ilappartiendra aux industriels fran-çais de remporter les appelsd'offre... n

Grégoire Dubost

z ASPECTS DU MONDE

z 6 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010

o DÉFENSE

Le nucléaire militaire en débatTandis que nous voisins veulent "dénucléariser" l'Europe, la France renforce sa coopération avec le Royaume-Uni et vante son exemplarité en matière de désarmement, confirmant par ailleurs son soutien aux usages civils de l'atome.

TARIF DES ABONNEMENTS(paraît les 1er et 3e jeudis de chaque mois)

1. Premier abonnementFrance (un an) . . . . . . . . . . . . . . . 76 s

2. Premier abonnementÉtranger (un an) . . . . . . . . . . . . . . 85 s

3. Abonnement ordinaire (un an) . 125 s4. Abonnement de six mois . . . . . . . 70 s

5. Abonnement de soutien(un an). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150 s

6. Étudiants, ecclésiastiques,chômeurs (un an) . . . . . . . . . . . . . 65 s

7. Outre-mer (un an). . . . . . . . . . . . 135 s8. Étranger (un an) . . . . . . . . . . . . . 150 s

BULLETIN D’ABONNEMENT

Nom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Adresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Bulletin à retourner avec un chèque à lordre de la PRIEP à :L’Action Française 2000, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 PARIS

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ASPECTS DU MONDE z

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010 7 z

Stratégie sans surprise

Réuni à Bruxelles les 25 et26 mars, le Conseil européendes chefs d'État ou de gouver-nement de l'UE a approuvé lesprincipaux éléments d'une nou-velle stratégie pour l'emploi etla croissance : porter à 75 % letaux d'emploi des femmes et deshommes âgés de vingt à soixante-quatre ans, investir 3 % du PIB enrecherche et développement, ré-duire les émissions de gaz à ef-fet de serre de 20 % par rapportaux niveaux de 1990, améliorerl'éducation et réduire le taux dedécrochage scolaire, favoriser l'in-clusion sociale et lutter contre la

pauvreté... Des objectifs sommetoute très généraux , qui serontcertes précisés d'ici l'été. Selon les conclusions du Conseileuropéen, « la Commission pré-sentera prochainement un rap-port sur d'éventuelles sources no-vatrices de financement, commeun prélèvement mondial sur lestransactions financières ». Enoutre, « la stratégie comprendraune dimension extérieure forteafin de garantir que les instru-ments et les politiques de l'UEseront mis en œuvre pour pro-mouvoir nos intérêts [...] par laparticipation, à l'échelle mon-diale, à des marchés ouverts etoù les conditions de concurrencesont équitables ». D'aucuns y ver-ront un écho aux propos de Ni-colas Sarkozy jugeant « invrai-semblable que l'Europe interdisele soutien aux industries expor-tatrices », alors que « ses concur-rents asiatiques déploient des fi-nancements massifs »...« Si certains objectifs sont ins-crits dans les textes législatifs del'UE, les autres ne le sont pas et

n'impliquent pas de partage del'effort », observent les chefs d'É-tat ou de gouvernement ; « ilsconstituent un but commun à at-teindre par une combinaison d'ac-tions entreprises à l'échelon na-tional et à celui de l'UE ». Com-mentant la stratégie précédente,Yves Bertoncini s'était interrogé« sur la nécessité pour l'UE de re-tenir comme une priorité poli-tique majeure une stratégie pourlaquelle ses moyens d'action di-rects sont limités » (Dictionnairecritique de l'Union européenne,Armand Colin). La question de-meure pertinente, malgré l'an-nonce d'une implication accrue duConseil européen et celle d'unmeilleur suivi. « Un dialogueétroit » entre les États membreset la Commission permettra, pa-raît-il, « d'améliorer la qualité dela surveillance et de favoriserl'échange de bonnes pratiques » ;« il pourrait notamment prendrela forme de réunions entre desexperts de la Commission et desÉtats membres ». Une vraie ré-volution ! n

Divorceseuropéens

On recenserait chaque annéeprès de 300 000 mariages inter-nationaux dans l'Union euro-péenne. En cas de divorce, la va-riété des législations nationalesentraine « des complications surle plan juridique et des frais éle-vés, rendant plus difficile le pro-noncé des divorces à l'amiable »,selon les observations de la Com-mission européenne. Celle-ci aproposé un règlement en vertu du-quel les couples contrôleraient da-vantage leur séparation, et les ju-ridictions disposeraient d'une mé-thode commune pour déterminerle pays dont la loi s'applique

lorsque les couples ne peuvent pass'accorder sur ce point. « L'ob-jectif est d'alléger la charge pe-sant sur les enfants et de proté-ger les conjoints les plus vulné-rables » explique-t-on à Bruxelles.La Commission répond à la de-mande de dix États membres, dontla France, qui doivent désormaisobtenir l'approbation du Conseilet du Parlement européen pourmettre en œuvre une "coopéra-tion renforcée" – la première de-puis l'introduction de ce méca-nisme par le traité d'Amsterdamentré en vigueur en 1999.En février dernier, la France etl'Allemagne avaient déjà signé une convention créant un régimematrimonial commun (Coulissesde Bruxelles, 01/03/2010). Parailleurs, un projet de directivevise à établir un ordre de pro-tection européenne, qui permet-trait à un État membre d'étendredes mesures d'éloignement au ter-ritoire de ses partenaires. Un nou-veau signe de l'immixtion crois-sante de l'Union dans la justice etles affaires intérieures (JAI). n

» BRICOLAGE

Un zeste de populisme va-t-il pénétrer les rouages de latechnocratie bruxelloise ? LaCommission européenne de-vait présenter le 31 mars uneproposition législative enca-drant "l'initiative citoyenne"introduite par le traité de Lis-bonne – un succédané de ré-férendum d'initiative popu-laire, qui fait naître quelqueespoir dans l'extrême droiteeuropéenne galvanisée par lavotation suisse sur les mina-rets. Lors d'un débat au Parle-ment européen, plusieurs dé-putés auraient admis « que sil'on n'explique pas clairementquelles propositions peuventêtre acceptées, ou si les pre-mières propositions ne sontpas appliquées, cela peut en-traîner une frustration et undécouragement de la part descitoyens », rapporte la prési-dence espagnole. En défini-tive, cette avancée "démocra-tique" pourrait attiser la dé-fiance à l'égard deseurocrates.

» CONTENTIEUX

Le différend opposant laConfédération helvétique àMouammar Kadhafi avaitcontaminé l'espace Schengen.Lundi dernier, 29 mars, laprésidence espagnole duConseil de l'UE s'est félicitéeque les ressortissants euro-péens puissent à nouveau en-trer en Libye sans restrictionparticulière, tandis que lesnoms des Libyens ajoutés parla Suisse à la "liste noire" dusystème d'information Schen-gen en étaient retirés. Madridprétend désormais poursuivreses efforts pour obtenir unesolution à ce contentieux bi-latéral.

Le Haut Représentant del'Union européenne pour lesAffaires étrangères et la Po-

litique de sécurité continue defaire jaser. Selon Jean Quatremer,Mme Catherine Ashton aurait re-fusé une rencontre le 18 avril avecles ambassadeurs du Conseil deSécurité des Nations unies, « toutsimplement parce que ce jour-làest un dimanche et que la ba-ronne passe tous ses week-endsà Londres, là où résident son mariet ses enfants » (Coulisses deBruxelles, 18/03/2010).

Architecture du SEAE

Les critiques sont d'une autre na-ture depuis qu'elle a révélé sonprojet d'architecture du futur Ser-vice européen pour l'Action ex-térieure (SEAE) – « un bureau au-tonome de l'UE, séparé de laCommission et du secrétariat gé-néral du Conseil, avec la capa-cité juridique nécessaire pour ac-complir ses tâches et atteindreses objectifs ». Il serait dirigé par un secrétairegénéral placé sous l'autorité duHaut Représentant, prenant« toutes les mesures nécessairespour assurer le bon fonctionne-ment du SEAE ». L'administrationcentrale serait organisée en di-rections générales comprenantdes bureaux géographiques outhématiques. Les organes de ges-tion de crises, civils et militaires,dépendraient directement duHaut Représentant.Du côté des gouvernements, onreconnaît à demi-mot la difficultédes négociations en cours : « Laprésidence espagnole est déter-minée à ne pas ménager ses ef-

forts pour parvenir à un accord »,précise un communiqué du se-crétariat général du Conseil. Àtravers le transfert au SEAE (sui-vant un principe de neutralitébudgétaire) de services rattachésjusqu'alors tantôt au Conseil desministres, tantôt à la Commission,l'équilibre institutionnel pourraitse trouver modifié. Or, le Parle-ment européen entend bien tirerla couverture à lui.

Un projet inacceptable

Ce projet d'architecture, qui nedevrait pas dépayser les diplo-mates français, est jugé « inac-ceptable » par une majorité dedéputés. Fustigeant tout particu-lièrement l'ampleur des pouvoirsconférés au secrétaire général –un fonctionnaire –, ils réclament« un service autonome lié à laCommission aux niveaux admi-

nistratif, organisationnel et bud-gétaire » qui serait « responsabledevant le Parlement aux niveauxpolitique et budgétaire ».Forte de sa mainmise sur le bud-get européen, l'assemblée n'a pascaché sa volonté d'« intensifier lapression sur les autres institutionsde l'UE ». Elle l'a réaffirmée le10 mars, en votant, par 633 voixcontre 13 (Le Point, 10/03/2010),une résolution « sur la transpa-rence et l'état d'avancement desnégociations ACTA » (Anti-Coun-terfeiting Trade Agreement). Man-datée par les gouvernements, laCommission participe à la négo-ciation d'un accord multilatéralcensé renforcer la protection desdroits de propriété intellectuelle.Or, les parties sont convenus d'uneclause de confidentialité. Les dé-putés le tolèrent d'autant moinsque les fuites nourrisent moult in-quiétudes quant au contenu de

l'accord. « Les douanes pourraientfouiller lecteurs MP3, téléphoneset ordinateurs portables de toutcitoyen suspecté d'avoir télé-chargé illégalement un quel-conque fichier », prévient BrunoGollnisch.

Le souverainisme piégé ? La résolution adoptée condamneune telle perspective, invitant parailleurs la Commission et leConseil « à assurer l'accès des ci-toyens et des organes parlemen-taires aux documents et aux syn-thèses relatifs à la négociationde l'ACTA ». Le Parlement « at-tend de la Commission qu'elle pré-sente des propositions avant leprochain cycle de négociations quise tiendra en Nouvelle-Zélandeen avril 2010, qu'elle exige quela question de la transparencesoit inscrite à l'ordre du jour decette réunion et qu'elle commu-nique au Parlement le résultatdu cycle de négociations immé-diatement après sa conclusion ».Enfin, le texte « souligne que, s'iln'est pas informé immédiatementet intégralement à tous les stadesdes négociations, le Parlement seréserve le droit de prendre lesmesures appropriées, y comprisd'intenter une action auprès dela Cour de justice afin de dé-fendre ses prérogatives ».Le cas échéant, si la Cour don-nait raison au Parlement, l'Europeserait-elle contrainte de trahir laconfiance de ses partenaires in-ternationaux ? S'exprimant au nomdu groupe "Europe, libertés, dé-mocratie" où siège Philippe de Vil-liers, le Britannique Derek RolandClark n'a pas manifesté davantagede réserve que le porte-parole duFront national dans son explica-tion de vote en faveur de la ré-solution. Le souverainisme révèleici son ambiguïté : en effet, à tra-vers l'exigence de transparence,c'est, en définitive, l'influence desgouvernements sur le fonction-nement de l'Union qui nous semblecontestée. n

Grégoire Dubost

o SEAE & ACTA

Le Parlement joue des coudesInnovation majeure du traité de Lisbonne, la création du Service européen pour l'Action extérieure se prépare sur fond de rivalités institutionnelles. Le Parlement européen entend bien conforter ses prérogatives...

Le Parlement européen à Strasbourg

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z ASPECTS DU MONDE

z 8 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010

Le Téméraire, l'un des quatre SNLE

de la Force océaniquestratégique

Les relations euro-méditerra-néennes ont pris un tour dé-cisif avec le lancement de

l'Union pour la Méditerranée sousl'égide de Nicolas Sarkozy en 2007.En réalité, le président de la Ré-publique a connu une défaite. Eneffet, son projet reposait sur l'idéed'établir des liens privilégiés entreles pays européens riverains de laMéditerranée et la rive sud. L'ob-jectif était d'établir une zone d'in-fluence française qui aurait faitcontrepoids aux relations privilé-giées de l'Allemagne en Europecentrale et orientale.

Opposition allemande

L'opposition acharnée d'AngelaMerkel fit capoter le projet. Eneffet, lors d'une rencontre entreles chefs d'État français et alle-mand en mars 2008 à Hanovre, lechancelier exigea que tous les paysde l'Union européenne, dont l'Al-lemagne, participent au projet del'Union pour la Méditerranée. Faceà l'insistance d'Angela Merkel, leprésident français céda sur toutela ligne. Vidé de sa substance d'ori-gine, le projet politique de Sar-kozy s'est européanisé au profitdes lobbies de Bruxelles et deleurs alliés de Berlin. Commentpeut-on expliquer une telle vo-lonté d'abattre le projet françaisau profit des instances euro-péennes ? La réponse est simple ;elle tient à l'énergie.En effet, l'approvisionnement enénergie de l'Europe pose pro-blème. Dépendant du pétrole etdu gaz, les dirigeants bruxelloisse sentent pieds et poings liés

face au géant russe Gazprom. Afinde se dégager de cette emprise,des dirigeants d'instituts euro-péens en liaison avec des payssud-méditerranéens ont décidé delancer en 2003 un projet misantsur l'énergie solaire. Il s'agit decouvrir de panneaux solaires toutel'Afrique du Nord et les pays duProche-Orient afin d'irriguer l'Eu-rope en énergie. Inversement, les pays sud-médi-terranéens seront en mesure debénéficier de la technique né-cessaire pour dessaler l'eau demer. Ainsi, leur agriculture ver-rait les rendements augmentéspour le plus grand profit de leurs

économies. Sous l'égide de labranche allemande du Club deRome, de la Fondation hambour-geoise pour la protection du cli-mat (la HKF) et du Centre natio-nal de la recherche énergétiquede Jordanie, une "Coopérationtransméditerranéenne pour lesénergies renouvelables" (TREC) avu le jour.

Ces compléments venusdes déserts C'est un véritable réseau interna-tional réunissant l'Europe (EU, es-sentiellement allemand), leMoyen-Orient (Middle East, ME) et

l'Afrique du Nord qui, sous le sigleEU-MENA, a décidé de se lancerdans une politique définie commesuit : « Fournir de l'énergiepropre à bon marché pour l'EU-MENA, aussi rapidement que pos-sible en se basant sur une coopé-ration entre les pays de ces ré-gions. TREC voit l'électricité enprovenance des déserts comme uncomplément aux ressources eu-ropéennes en énergie renouve-lable ainsi qu'un moyen d'accélé-rer le processus de réduction desémissions européennes de CO2 etd'augmenter la sécurité d'appro-visionnement énergétique euro-péenne. Pour les populations duMoyen-Orient et d'Afrique du Nord(MENA), ce projet apporterait unefourniture importante d'énergiepropre, des emplois, des sourcesde revenus économiques, des in-frastructures améliorées, des pos-sibilités de dessalement d'eau demer et de nombreux bénéfices po-tentiels (comme par exemplel'agriculture) apportés par l'ombredes collecteurs solaires. »

Projet titanesque

Afin de promouvoir cette coopé-ration trans-méditerranéenne,TREC s'est doté d'un outil appeléDesertec. Lancé lors d'une réunionà Munich en juillet 2009, avecl'appui d'une multitude de groupesfinanciers essentiellement ger-maniques, il consiste à engagerplus de 400 milliards d'euros jus-qu'en 2050. Ce projet titanesquerepose sur l'idée phare de res-serrer les liens politiques et éco-nomiques entre les deux rives dela Méditerranée. Il préfigure cetidéal ancien d'unifier l'Occidentet l'Orient en un seul et mêmebloc comme au plus beau tempsde l'Empire romain. Toute la ques-tion est de savoir si les pays mu-sulmans accepteront ce projet etsa finalité voulus par les finan-ciers apatrides de Bruxelles, deLondres et de Berlin. n

Pierre Hillard

o SOLAIRE

Énergie en MéditerranéeL'approvisionnement en énergie de l'Europe est très dépendant du pétrole et du gaz russe. Cette situation ne serait pas étrangère au projet de couvrir de panneaux solaires toute l'Afrique du Nord et les pays du Proche-Orient.

Incertitudepolitique en IrakLes résultats définitifs desélections législatives ira-kiennes ont été publiés samedi27 mai. Il reste leur validationpar la Cour suprême du paysqui semble faire peu de doute,et le nouveau parlement en-trera en fonction.

La formation politique que dirigel'ancien Premier ministre Iyad Al-laoui arrive en tête avec quatre-vingt-un sièges sur trois cent vingt-cinq, suivie par celle du chef ac-tuel de l'exécutif Nouri-el-Maliki,qui en obtient soixante-dix-neuf.Les partisans de l'extrémiste chi'iteMaqtada-el-Sadr ont soixante-dixsièges et les partis kurdes en rem-portent quarante-trois dans leurrégion. Les autres sièges sont at-tribués aux petites formations etaux minorités religieuses, les chré-tiens notamment.Allaoui, chi'ite, partisan affirméde la laïcité de l'État, ce qui estun bon point, ancien bassiste dis-

sident, soulève beaucoup d'espoir.Il a même obtenu des sièges dansla région kurde. Il milite pour unrégime non clérical, un systèmeen quelque sorte bassiste mais dé-mocratique.Mais, bien qu'arrivé en tête et endroit de former le gouvernement,il n'a pas de majorité. D'intermi-nables tractations politiques vontdonc commencer. Et ce dans uneambiance d'insécurité persistante ;rien que ce même samedi 27, qua-rante personnes ont été tuées dansles attentats terroristesAu cours des tractations, le rôlede Téhéran sera important. Lesformations strictement chi'ites etextrémistes de Moqtada-el-Sadret ses alliés sont aux ordres du

régime de Téhéran. Quant àNouri-el-Maliki, il est très atten-tif aux souhaits de Washington etde.. Téhéran.Le sort de l'Irak devient ainsi unenjeu de la crise globale qui se-coue le Proche et le Moyen-Orient,sa stabilité, toute relative il estvrai, un atout entre les mains desayatollahs de Téhéran que Wa-shington tente actuellementd'amadouer à tout prix.Voilà donc une bonne nouvelle,le succès relatif d'un homme rai-sonnable et adversaire de l'isla-misme radical, ternie par une am-biance politique générale et descorrélations internationales quile dépassent. Rien n'est joué.Pauvre Irak. n P.N.

Chrétiens à Bethléem

On oublie trop souvent que lesplus tragiques victimes du conflitisraélo-palestinien sont les chré-tiens enracinés dans cette terreoù vécut le Christ. L'Homme Nou-veau du 27 mars cite le cas d'unfamille ayant aménagé à Beth-léem un restaurant qui connutquelques années de succès : « Au-jourd'hui, la vaste salle de ré-ception est vide, désespérémentvide et les couverts attendent desclients qui ne viendront pas. "Lesgens ne peuvent plus se rendreici, c'est une place pour les sol-dats", se désole le père. »

L'armée israélienne a investi leslieux, ne laissant à la famille quele rez-de-chaussée, menaçant àchaque instant de couper l'eau etl'électricité. Les musulmans, deleur côté, espèrent bien récupé-rer l'immeuble sans rien avoir àpayer. Alors, confie le fils aîné :« Ni les Israéliens ni les musul-mans n'ont d'intérêt à ce que noussoyons ici, pourquoi quelqu'unnous aiderait-il ? »Dans cette ville où il y avait uneseule mosquée dans les annéescinquante, il y en a aujourd'huiune multitude, « implantées àdessein à côté des lieux de cultechrétien ». La conclusion du re-portage porte à la réflexion ences jours où nous allons fêterPâques : « Si l'on sent parfois dansleurs yeux et leurs paroles un pro-fond sentiment de lassitude et siles traits de leurs visages sontmarqués par la tristesse, il restedans le cœur de ces Arabes chré-tiens un attachement à leur terreet à leur foi qui dans une pareillesituation relève de l'héroïsme. "Jesuis né chrétien, je resterai chré-tien", a conclu l'aîné de la familleavant que nous le quittions. » n

Un "champ" de panneaux solaires aux États-Unis

» REALPOLITIK

Une délégation du Hezb-i-is-lami, dirigé par l'islamisteGulbuddin Hekmatyar, s'estrendue à Kaboul le 22 marspour négocier avec le prési-dent afghan Hamid Karzai.Cette organisation fut à l'ori-gine de l'embuscade d'Uzbind'août 2008. « Ce sont ses mi-litants qui se pavanaient avecl'équipement des soldatsfrançais qu'ils avaient tués »,souligne Jean-Dominique Mer-chet (Secret Défense,22/063/2010). « D'autres mi-litaires sont sans doute tom-bés sous leurs coups. » Tellessont les vicissitudes de laRealpolitik.

» SCANDALE

Tandis qu'elle vient de nom-mer un représentant uniqueen Afghanistan, prenant sesfonctions le 1er avril, l'UE estconfrontée à un scandale ré-vélé par Jean Quatremer dansLibération. La sécurité desbureaux de la Commission àKaboul n'aurait pas été assu-rée des mois durant, en rai-son de l'inconséquence de lacompagnie de sécurité privéechoisie par l'administrationeuropéenne. Et le contrat neserait encore que partielle-ment honoré.

» IMMIGRATION

En dépit des efforts consentispar les Occidentaux pour sta-biliser le pays, l'Afghanistanest devenu un foyer impor-tant d'émigration. En consé-quence, le gouvernementfrançais a annoncé qu'unecampagne serait menée surplace « pour informer la po-pulation des risques de l'im-migration clandestine ».

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ASPECTS DU MONDE z

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010 9 z

Mgr Sabbah et la Palestine

Le conflit israélo-palestinien ho-quette, s'enroue, s'enlise, s'em-bourbe. On pourrait pour le dé-crire user d'un florilège à l'infini.L'initiative de Benjamin Neta-nyahu de construire mille six centsnouveaux logements à Jérusalemconstitue un pas sérieux dans l'es-calade. C'est une gifle aux Amé-ricains, aux Européens et auQuartet, et un crochet du droit(ou de la droite israélienne) dé-coché aux Palestiniens.Un de leurs représentants les plusrespectés était l'autre jour à Pa-ris : Mgr Sabbah, patriarche latin

émérite de Jérusalem. Il occupasa charge durant vingt ans. Nousnous souvenons avoir été reçu parlui en audience privée quelquessemaines à peine après que sa no-mination par Jean-Paul II eut faitgrand bruit. Ses premiers mots fu-rent pour stigmatiser des mili-taires israéliens qui avaient mo-lesté un de ses prêtres, un Jor-danien. Il nous avait ensuitedépeint la souffrance du peuplepalestinien.Le discours n'a pas changé. Il s'estalourdi du poids de l'occupationet de la répression, sans omettrela radicalisation qu'elles ont en-traînée avec les attentats suicide.Déjà à l'époque, il n'avait de cessed'exiger une levée de l'occupa-tion. Cette fois, il est venu à Pa-ris pour exposer et faire valoir undocument émanant du conseilœcuménique des Églises. Il est in-titulé Kairos Palestine. Kairos si-gnifie le moment présent par op-position à chronos.« Dans le mal du présent, nousvoulons voir la grâce de Dieu. »C'est une vision chrétienne qu'ontainsi ratifiée, en apposant leur si-gnature, les chefs des Églises chré-

tiennes de Palestine. On y trouvel'Église catholique, la grecque or-thodoxe, l'anglicane, la luthé-rienne et bien d'autres. « Nous nenions pas l'existence de l'État d'Is-raël. Nous faisons la distinctionentre le pécheur et le péché. L'oc-cupation est un péché et un pé-ché est une insulte faite à Dieu.L'occupation c'est le viol de la di-gnité d'un peuple. C'est pourquoinous appelons au boycott. Non paresprit de vengeance car nousn'avons d'autre stratégie que cellede l'amour. Si nous y appelons c'estpour que cesse l'occupation. »

2 % de chrétiens

Mgr Sabbah rappelle les donnéesdu problème : « 78 % de la Pa-lestine sont occupés par l'État d'Is-raël. Le monde arabe a reconnucette annexion. Demeurent les22 % restants conquis en 1967. Is-raël consent à nous laisser 40 %de ces 22 %. D'où le cycle de laviolence. » La proportion de chré-tiens ne cesse de s'amenuiser. Nonparce qu'ils diminuent en nombreabsolu. Selon Mgr Sabbah, celui-ciaugmenterait même légèrement.

Mais la démographie musulmanesubmerge l'îlot chrétien réduit àenviron 2 %. Il existe dès lors unsentiment de peur chez des chré-tiens pris en étau ente juifs etmusulmans. Sentiment qu'entendcombattre le prélat. « Soyez fortsdans vos convictions et vous se-rez respectés. Si vous vendez vosterres, ne criez pas à l'extensionmusulmane. »Que ce soit dans l'exorde ou dansl'épilogue, Mgr Sabbah martèle in-lassablement son credo : « Sansune solution juste, équitable ap-portée au problème palestinien,Israël ne trouvera pas la paix. »Mais Israël veut-il la paix ? L'autresoir, Hervé de Charrette que nousrencontrions se disait assuré mal-heureusement que non. Propos àmettre en regard avec ce qu'écri-vait Denis Charbit, journaliste is-raélien connu. On soupçonne Is-raël d'être plus que jamais atta-ché « à la poursuite du processusde paix à condition qu'il reste tou-jours un processus et n'aboutissejamais à la fin de l'occupation ».Tout n'est-il pas dit ? n

Charles-Henri Brignac

Israël

sur la sellette

Un colloque de l'ordre duSaint Sépulcre de Jérusalem-s'est tenu le 20 mars au pa-lais du Luxembourg, salleClemenceau - ce qui est as-sez cocasse puisque cethomme d'État, franc-maçon etsioniste notoire, torpilla laprésence française et chré-tienne en Palestine : « Je neserai pas le sacristain dupape aux Lieux Saints »,avait-il déclaré.L'ordre de Jérusalem poursuitun but inverse : soutenir leschrétiens et en particulier lesécoles catholiques, comme lerappela SE le général BernardFleuriot, lieutenant deFrance. Lui succéda M. JeanGueguinou, ambassadeur deFrance, qui se demanda si lacréation d'un État palestinienétait encore possible. Aprèsl'intervention émouvante du P.Maurice Borrmans, le cardinalJean-Louis Tauran souligna lesefforts du Vatican pour dé-fendre les Lieux saints, sansrappeler qu'en retirant à laFrance son protectorat deschrétiens à la conférence deSan-Remo, le 24 avril 1920, leSaint-Siège s'était tiré uneballe dans le pied.Le P. David Maria Jaeger(ofm), délégué de la Custodiede Terre sainte à Rome, parlades accords concordatairesentre le Saint-Siège, l'OLP etIsraël - accusé de faire preuvede mauvaise foi. Selon le dis-cours aux arguments éculésdu ministre plénipotentiaired'Israël, ce petit pays n'estresponsable de rien, tous lesmalheurs viennent des Pales-tiniens. Dans un certain sensc'est vrai : si les Palestiniensn'existaient pas, il n'y auraitpas de problème...L'ambassadeur de Jordanie etsurtout le chercheur palesti-nien Elias Sambar protestè-rent vigoureusement. Ils fu-rent très applaudis - ce quine fut pas le cas du diplo-mate israélien.Le recteur Joseph Meila traitaavec l'autorité qu'on luiconnaît des minorités auProche-Orient, et le profes-seur Jean-Dominique Duranddes papes et de la Terresainte depuis Léon XIII, en dé-gageant les constantes et lesévolutions. Depuis Jean-Paul II le Saint-Siège penchetrop vers Israël.M. Gueguino reprit la parolepour retracer les liens nom-breux qui ont existé entre laFrance et les Lieux saints de-puis le XIXe siécle.Il revint à SE M. Agostino Bor-roméo, gouverneur général del'ordre du Saint Sépulcre, detirer les conclusions de cettejournée.

Yves Lenormand

Rien ne va sur le "théâtre" pa-lestinien. Les troubles ontrepris. Plusieurs morts du

côté palestinien, deux au moinsdu côté israélien dont un officier.Les incursions de Tsahal dans labande de Gaza et les tirs de ro-quettes sur les localités israé-liennes ont repris. Dans les "Ter-ritoires" et à Jérusalem, ce n'estpas encore l'intifada, mais cela yressemble de plus en plus. Pourne pas arranger les choses, unesérieuse crise diplomatique s'ins-talle entre l'État hébreu et lesÉtats-Unis.

L'échec de Netanyahouà WashingtonIl y a une dizaine de jours, le vice-président américain Joseph Bi-den, qui compte de plus en plusdans la conduite de la diploma-tie américaine, s'était rendu dansla région. Son objectif ? Relancerles pourparlers entre Israéliens etPalestiniens et obtenir le gel descolonisations illégales dans les ter-ritoires palestiniens. Le jour deson arrivée, l'ONU, l'Europe deBruxelles et Moscou l'avaient éga-lement soutenu.Non seulement, Biden a été pra-tiquement éconduit, mais lemême jour, Netanyahou a annoncéla construction de nouvelles co-lonies. Des incidents protocolairessignificatifs ont également émailléle séjour du vice-président Biden.Un voyage "officiel" de "Bibi" Ne-tanyahou, programmé depuis desmois, a suivi ces incidents et de-vait régler les problèmes entreTel Aviv et Washington.

Malgré l'accueil chaleureux ré-servé au Premier ministre israé-lien par l'AIPAC (le tout puissantlobby pro-israélien), la rencontreavec Obama a été catastrophique.Et c'est là encore un euphémisme.Toute photo de la rencontre, de-mandée par les Israéliens, a étérefusée. Après une heure et demide tête à tête, le présidentObama a laissé son hôte pourpresque une heure afin de consul-ter ses conseillers disent les uns,pour aller déjeuner en famille,disent les autres ! Réplique desrebuffades essuyées par JosephBiden. On imagine la scène et lescommentaires qui ont suivi.Obama demandait, exigeait, des« gestes significatifs » pour re-lancer les négociations avec lesPalestiniens et apaiser la grogne

montante du monde arabe. Ne-tanyahou n'a rien accepté. Desexperts militaires et des diplo-mates américains ont déclaré pu-bliquement que l'attitude israé-lienne et l'impuissance de Wa-shington à sortir de l'impasseparalysent toute l'action diplo-matique, politique et militaire desÉtats-Unis dans la région voiredans le monde musulman. Ils n'ontpas tort.

Que pourrait faireWashington ?Mais que pourrait faire Washing-ton ? Prendre des sanctions contrel'État hébreu, son principal allié-protégé dans la région ? Incon-cevable, et en tout cas le lobbypro-israélien aux États-Unis l'em-

pêcherait. Surtout à l'approchedes élections de novembre, celarendrait encore plus difficile laposition des démocrates sur leplan intérieur. Washington ne peutfaire grand-chose et Netanyahoule sait. Mais ce dernier est lui-même dans l'impasse.Pour sortir du cercle vicieux, lecabinet israélien devrait consen-tir à des concessions concrètes.Or, les partis religieux et extré-mistes de la coalition gouverne-mentale, et même certainsmembres du parti du Premier mi-nistre, s'opposent à tout recul faceaux Palestiniens, à la moindre« mesure de confiance » souhai-tée par Washington.

Dans l'impasse

Si Netanyahou résiste, les rela-tions avec Washington s'en res-sentiront progressivement. Cellesavec l'Europe ne sont déjà pas ex-cellentes, les Arabes réagiront etmême la Turquie, allié tradition-nelle d'Israël, deviendrait mena-çante. Israël risquerait donc unsérieux isolement diplomatiquedont les conséquences à longterme, surtout après les électionsaméricaines de novembre, serontimprévisibles.En revanche, si Netanyahou faitles « gestes significatifs » exigéspar Washington – sur les colonies,sur la libération des prisonnierspolitiques et sur Jérusalem, sacoalition gouvernementale écla-tera et il perdra le pouvoir,comme la première fois. Il estdonc dans l'impasse.L'analyse de la crise israélo-pa-lestinienne conduit à des conclu-sions pessimistes malgré lesbonnes intentions de l'adminis-tration Obama en la matière, quimanque toutefois de moyens – oude volonté disent certains – pourles mettre en œuvre. La crisepourrait durer et même s'aggra-ver avec tous les risques que celaengendre sur le plan régional. n

Pascal Nari

o ISRAËL-PALESTINE

L'impuissance américaineLa crise israélo-palestinienne peut encore durer longtemps. Obama manquede volonté et sans doute de moyens. Netanyahou est dans l'impasse.Les risques se multiplient dans cette région du globe.

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou

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La situation du peuple iraniendevient de plus en plus pré-caire et il est important de

le faire savoir, a affirmé Mme Shi-rin Ebadi à l'occasion d'une confé-rence de presse qu'elle donnait àParis, le 15 mars dernier, pourpromouvoir le lancement de sonlivre La Cage dorée (L'Archipel,19,95 euros).

Contre les sanctionséconomiquesOpposante à l'actuel régime ira-nien, Mme Shirin Ebadi, prix Nobelde la paix en 2003, avait pu, jus-qu'à ces derniers mois, rester enIran et continuer d'y exercer laprofession d'avocate. Le durcis-sement du régime, à la suite del 'élection présidentielle dejuin 2009, lui a fait choisir l'exil,en septembre dernier : soncompte bancaire et celui de sonmari venaient d'être bloqués, l'ac-cès à son coffre à la banque luiétait interdit, une partie de sesbiens, notamment la médaille re-présentant son prix Nobel, avaitété confisquée. Seule la médaille du prix Nobellui a, depuis, été rendue à la suited'une protestation vigoureuse dugouvernement norvégien. « Enexil je suis plus utile aujourd'huià mon pays que si j'étais restéesur place, mais dès que je pour-rai rentrer et être efficace à l'in-térieur de l'Iran, j'y retournerai »,a précisé Mme Ebadi.« Le plus grand soutien que lepeuple iranien attend est un sou-tien moral, affirme-t-elle. Lemouvement de protestation estdevenu tel aujourd'hui que la vic-toire du peuple est devenue unecertitude : les Iraniens ont com-pris que le prix à payer pouvaitêtre leur sang et cela leur donneune force considérable. » Shirin Ebadi se dit clairement op-posée à des sanctions économiquesou à des embargos dont les consé-quences pénaliseraient la popu-lation ; elle préconise plutôt des

sanctions politiques comme leremplacement d'ambassadeurs pardes chargés d'affaires ou la res-triction des visas aux personnali-tés du régime. L'ancien ministredu Shah, Houchang Nahavandi, quiest loin de partager toutes les po-sitions de Mme Ebadi, notammentsur la démocratie et les préten-dus "droits de l'homme", la rejointpar contre sur tous les aspects quiviennent d'être cités.

Mort à la Chine, mort à la Russie !Même si beaucoup d'espoirs sontpermis, le constat de la situationactuelle reste alarmant : l'infla-tion forte précarise les classes lesplus pauvres et s'accompagned'une augmentation du chômage ;le nombre d'Iraniens emprisonnéspour délit d'opinion est en crois-sance ; début mars, M. Karroubi,candidat malheureux à l'électionprésidentielle, a vu son domicileenvahi et saccagé par des mani-festants pro-gouvernementaux...« La police était là, mais elle estrestée à distance et n'a pas agi,comme c'est presque toujours le

cas quand la personne visée faitpartie de l'opposition », a préciséMme Ebadi. Dans les manifestationsofficielles, les slogans « Mort à Is-raël, mort aux États-Unis » quelancent les amis du régime sontaujourd'hui couverts par des cris« Mort à la Chine, mort à la Rus-sie ! » par lesquels répliquent lesopposants. La Chine et la Russiesoutiennent en effet l'Iran (et sonrégime actuel) devant le Conseilde sécurité de l'ONU ; la Chine estdevenue le plus important parte-naire industriel et commercial del'Iran et la construction de la cen-trale nucléaire iranienne de Bou-chehr se déroule sous le contrôlede la société russe Atomstroyex-port. Le débat sur la constructionde centrales nucléaires en Iran nerencontre que peu d'échos dans lapopulation : « Les gens ont tropd'autres soucis qui touchent di-rectement leur vie quotidiennepour s'intéresser à ce sujet », aprécisé Mme Ebadi.Récemment aussi, le gouverne-ment a voulu empêcher les Ira-niens d'accéder aux émissions enpersan de la BBC et de VOA quiétaient diffusées au moyen du sa-

tellite Hotbird, dépendant de lasociété française Eutelsat. Unbrouillage intense a d'abord étémis en place, au risque de mettreen danger la santé des popula-tions proches des émetteurs. Eu-telsat a finalement cédé aux pres-sions du pouvoir iranien et dé-placé les canaux des chainesémettant en persan de manièreà ce qu'elles ne puissent plus êtrecaptées en Iran. Mme Ebadi s'in-surge contre cette attitude d'uneentreprise française qui se faitcomplice de la censure d'Ahma-dinejad. L'opposante accuse aussiles sociétés allemande Siemenset finlandaise Nokia d'avoir livréà l'Iran des logiciels qui ont aidéTéhéran, selon elle, « dans la ré-pression et la censure » de l'op-position. « Elles ont livré à l'Étatiranien des logiciels permettantde mettre sur écoutes les conver-sations par téléphone portable,les échanges de SMS », a-t-elleaffirmé en reprochant aux Occi-dentaux de ne pas conformer leursactes à leurs paroles en matièrede sanctions.

Sécularisation ?

L'avocate reste évasive sur sespréférences en matière de chan-gement de régime. Elle constatesimplement qu'il existe plusieurstendances dans l'opposition :« Certains veulent changer de ré-gime, d'autres souhaitent le strictrespect de la constitution actuellequi n'est pas appliquée. » ShirinEbadi ne fait pas, tout au moinspubliquement, d'autre choix po-litique que celui des "droits del'homme", pour lesquels son en-gagement est déjà connu. Elle selimite à constater que le passageà « une démocratie comme laFrance » ne serait pas réaliste etelle déclare que, si les mouve-ments sécularistes existent, il luiparaît souhaitable d'avancer parétapes, en utilisant les voies quiporteront le moins préjudice à lapopulation. Le passage d'une "ré-publique islamique" à une "répu-blique" tout court ne semble pasencore faire l'unanimité dans l'op-position, même s'il est de plus enplus fréquemment évoqué. Quantau retour à un gouvernement mo-narchique, Mme Ebadi se garde del'évoquer : il est des penséesqu'une démocrate engagée ne sau-rait exprimer... n

Arnaud Danloux-Dumesnils

L'Arabie saouditese modernise

Dans les salles de réunion du pa-lais du Luxembourg s'est tenu le11 mars un colloque consacré àla société saoudienne. Le prési-dent du Sénat, Gérard Larcher,tout en rondeur, déploya sa bon-hommie convenue et souriantepour accueillir le prince Khaled

Al Faysal Bin Abdulaziz Al Saoud,gouverneur de La Mecque et filsde feu le roi Faysal.Nous nous souvenons de l'audienceroyale accordée à la fin des an-nées soixante dans un palais à l'im-mense salle gardée par deshommes aux poignards recourbéssortis d'un album de Tintin. Jeconserve précieusement un poi-gnard recouvert de feuilles d'or,présent du roi. Cette fois, auLuxembourg, nous eûmes en sou-venir un recueil de poèmes duprince Khaled Al Faysal : « Jecherche à acheter le temps. Dites-moi où je peux le trouver. » LePrince est à l'unisson de ce paysoù « le désert [était] la patrie dema famille » et qui a l'ambitionde s'industrialiser.

Si un colloque de cette nature s'esttenu au Luxembourg c'est, toutnaturellement, dans ce contexte.La France aspire à figurer en bonneplace parmi les pays auxquelsl'Arabie saoudite fait appel pourse moderniser. Pour l'heure, elleapparaît seulement comme le hui-tième fournisseur du royaume etle troisième investisseur. « Il y amoyen de faire mieux », a relevéJean-Pierre Fourcade, en souli-gnant que Nicolas Sarkozy s'estdéjà rendu trois fois en Arabie etle roi Abdallah une fois en France.Le président de la chambre decommerce franco-arabe, l'ancienministre des Affaires étrangèresHervé de Charrette, a annoncél'arrivée en France d'une déléga-tion de jeunes cadres saoudiens.

En réponse, la princesse Lulwah aévoqué les huit cents boursierssaoudiens en France, les mille cinqcents étudiants en langue fran-çaise en Arabie, les efforts pourque le français soit enseigné danstoutes les écoles. Les choses bou-gent. À la fois sur le plan cultu-rel, médical, architectural. LaFrance est associée à la restaura-tion du centre historique de Djed-dah. Autant de promesses.Plusieurs femmes de qualité, s'ex-primant souvent dans un françaisparfait, étaient présentes au Sé-nat. Elles n'ont pas pratiqué lalangue de bois. Là où jusqu'à lafin des années cinquante, excep-tion faite de quelques établisse-ments privés, l'école était ferméeaux filles, tous les diplômes leur

sont aujourd'hui accessibles. Maisil est une ombre sérieuse. Beau-coup d'entre elles ne trouvent pasde débouchés dans une société oùla femme doit être accompagnéed'un "tuteur". Plusieurs des inter-venantes ont très ouvertementdénoncé ces « pôles de résis-tance » où l'islamisme (ne ditespas l'islam...) s'arc-boute sur lerefus de reconnaître aux femmestoute prétention à l'égalité. Mal-gré les débats et les tumultes, leroi Abdallah a, paraît-il, promisde ne pas faire machine arrière.C'est ce que les Saoudiennes à Pa-ris sont venues dire. Elles furentapplaudies avec l'espoir qu'ellessoient entendues dans leur pays. n

Charles-Henri Brignac

z ASPECTS DU MONDE

z 10 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010

o IRAN

L'espoir d'un Prix Nobel Les opposants Iraniens croient la victoire proche. Exilée depuis quelques mois,l'avocate Shirin Ebadi a profité d'un court passage à Paris pour témoignerdevant la presse des souffrances de son peuple.

» BROUILLAGE

La République islamique d'Irana suscité l'indignation de la"communauté internationale"en restreignant les télécom-munications. Ainsi le Conseildes ministres de l'Union euro-péenne a-t-il exprimé le22 mars « sa vive préoccupa-tion ». « L'ingérence délibé-rée par brouillage de la diffu-sion par satellite a eu des ré-percussions sur de nombreusesémissions de radio et de télé-vision, y compris les serviceseuropéens, transmis par Eu-telsat. En outre, les autoritésiraniennes empêchent réguliè-rement leurs citoyens d'accé-der, communiquer et recevoirlibrement des informationssur Internet, et de restreindreou de bloquer les télécommu-nications mobiles. Lebrouillage [...] va à l'encontredes engagements pris par laRépublique islamique d'Iranelle-même, dans le contextede l'Union internationale destélécommunications (UIT).Malgré les plaintes adresséesaux autorités iraniennes parle biais de l'UIT, elles n'ontpas mis un terme à cebrouillage, qui prend sasource sur le territoire ira-nien. »

» 14 JUILLET

Le roi Abdallah d'Arabiesaoudite devrait être l'invitéd'honneur des festivités du14 juillet à Paris, apprend-onsur le blog du journalisteGeorges Malbrunot. À cetteoccasion, le souverain inaugu-rera l'exposition Routes d'Ara-bie : Trésors archéologiquesdu royaume d'Arabiesaoudite, organisée avec lesoutien de la Fondation Totalet de l'entreprise saoudienneAl Rubaiyat. Trois centsœuvres seront exposées auLouvre, dont la plupart n'ontjamais quitté leur pays d'ori-gine. Elles permettront, selonle musée, « d'esquisser un pa-norama inédit des différentescultures qui se sont succédésur le territoire du royaumed'Arabie saoudite depuis lapréhistoire jusqu'à l'orée dumonde moderne ».

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HISTOIRE z

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010 11 z

En 1923, Léon Daudet est àla fois député de Paris, di-recteur et critique littéraire

à L'Action Française. Médecin, ro-mancier, essayiste, amateur d'art,c'est un homme d'une curiositéuniverselle et d'une étonnanteérudition. Également un redou-table polémiste, ce qui lui vautde nombreuses et solides inimi-tiés. La famille Daudet habite unappartement situé dans un bel hô-tel de la rue Saint-Guillaume.Mme Daudet signe Pampille dansL'AF des chroniques concernantla mode et la maison, et joint lesobligations d'une femme de lettresà celles d'une maîtresse de mai-son réputée.

Un mort dans le taxi

Les Daudet ont trois enfants.L'aîné, Philippe est demi-pen-sionnaire au collège Bossuet, l'an-nexe religieuse du lycée Louis-le-Grand. C'est un enfant qui leurdonne de graves soucis. Il a étécoutumier de fugues relevantd'une affection nerveuse. L'uned'elles, alors qu'il n'avait que onzeans, l'a conduit jusqu'à Marseille.Sans qu'il n'aille si loin, il lui estarrivé de marcher droit devantlui, sans but précis, et de rentrerà la maison exténué.Longtemps, il a été nécessaireque sa mère ou un autre membrede la famille l'accompagne, ma-tin et soir, à l'aller et au retourdu collège. Mais depuis les grandesvacances de 1923, Philippe sembleguéri. Il circule seul dans la rueet, les jours de congé, ses parentslui laissent une certaine liberté.Il n'a que quinze ans, mais commeil mesure 1 m 80, et comme il estlarge d'épaules, on lui en donnedix-neuf ou vingt.Or le mardi 20 novembre 1923, ilne rentre pas rue Saint-Guillaumecomme il le fait tous les soirs, vers19 heures. Très inquiète Mme Dau-det se rend au collège. Elle y ap-prend que son fils a été porté ab-sent à tous les cours. Durant lestrois journées qui suivent, son mariet elle vivent dans l'angoisse ; Ilsne préviennent pas la police. Dau-det n'a pas confiance en elle. Ill'accuse de troubles machinationspolitiques. Pour tuer le temps, ilse rend à la Chambre, puis à larédaction de L'AF, située rue deRome. Pampille écrit ses chro-niques. Tous deux espèrent quePhilippe reviendra, de lui-même,comme il l'a fait après ses fuguesprécédentes.Le samedi 24, Mme Daudet, de plusen plus angoissée, dépouille lesjournaux. Elle examine de près larubrique des faits divers. Elle sur-saute en lisant dans le Petit Pa-risien, en page 3 : « Un jeunehomme paraissant âgé d'une ving-taine d'années se tire une balledans la tête dans un taxi. Étatgrave. Lariboisière. » Mue par unpressentiment, elle téléphone à

un médecin de ses amis. Celui-cise rend à l'hôpital et vient lui fairepart d'une certitude : Philippe ya bien été transporté. Il y est mortau cours de la nuit. Atterré, LéonDaudet s'informe auprès de l'hô-pital et du commissariat de po-lice. Les faits lui sont présentésavec objectivité.

Des faits troublants

Samedi 24, vers 16 h 30, par untemps brumeux et froid, un taxiimmatriculé 7657 E, qui roule endirection de Barbès-Rochechouart,s'arrête devant le 126, boulevardMagenta. Le chauffeur, un certainBajot, déclare à un gardien de lapaix et à son brigadier que leclient qu'il a pris en charge, placede la Bastille, lui a demandé dele conduire au cirque Medrano,et qu'il s'est tout à coup tiré uneballe dans la tête.Les agents trouvent, effective-ment, dans le taxi, un jeunehomme inanimé et ensanglanté,qu'ils estiment âgé d'environ vingtans, et à ses pieds, un revolver.Ils font transférer le blessé à La-riboisière sans qu'il ait reprisconnaissance. Il n'a, sur lui, au-cun papier d'identité. Les marquesde ses vêtements ont été arra-chées. On ne trouve dans sespoches qu'une somme dérisoire :83 francs. M. et Mme Daudet vien-nent reconnaître le corps de leur

fils. Ayant hâte de le faire trans-férer chez eux, ils acceptent lathèse du suicide, renoncent à de-mander une autopsie, et reçoi-vent le permis d'inhumer.Le lundi 26 novembre, la presseannonce que « M. Léon Daudet,député de Paris, a eu la douleurde perdre son fils Philippe, âgéde quinze ans. Les obsèques au-ront lieu le mercredi 28, enl'église Saint-Thomas d'Aquin. Uncertificat médical, attestant l'ir-responsabilité de Philippe, qui seserait donné la mort en état decrise, a été remis au curé de laparoisse. Le tout-Paris politiqueet littéraire emplie l'église. » Ily a là de grands écrivains : PaulBourget, Maurice Barrès, JeanCocteau, François Mauriac,Georges Bernanos, Paul Morand ;de nombreux députés : l'ancienprésident de la République, Ray-mond Poincaré ; des amis etmême de nombreux adversairesde l'Action française.Les proches de Léon Daudet semontrent d'une extrême discré-tion en ce qui concerne les causesde la mort de Philippe. Toutefois,le rédacteur en chef du journal,Maurice Pujo, a fait effectuer uneenquête par des militants, et ilinsiste auprès des malheureux pa-rents : « il faut demander l'ou-verture d'une information judi-ciaire ; il y a trop de faits trou-blants... »

Le 1 er décembre au mat in ,Mme Daudet reçoit de Georges Vi-dal, administrateur du Libertaire(9, rue Louis Blanc, 10e arrondis-sement), un pneumatique conte-nant un billet de l'écriture de Phi-lippe : « Depuis longtemps déjà,j'étais anarchiste sans oser le dire.Maintenant, ma cause m'a ap-pelé... » Billet accompagné d'unelettre de Vidal affirmant que legarçon voulait commettre « unattentat anarchiste » et qu'ils'était efforcé lui-même de l'endissuader. Le jour même, les ven-deurs du Libertaire crient dansles rues une édition spéciale avecun gros titre : « Léon Daudetétouffe la vérité. » Dans son jour-nal, Vidal confirme ce qu'il a écrità Mme Daudet.

Nouvelle Affaire

C'est là le point de départ d'uneaffaire qui va passionner l'opinion,durant des mois, soulever des po-lémiques entre partisans du sui-cide et tenants du crime policier.« Quelques années auparavant,on s'était battu pour ou contreDreyfus. Seulement, cette fois-ci, il ne s'agissait plus d'un mili-taire sec, froid et distant, dé-pourvu d'humanité, et, au de-meurant, peu sympathique, maisd'un adolescent au front de poèteétoilé de rouge. » (Léon Malet)Le 2 décembre, Daudet écrit au

procureur de la République. Ilporte plainte pour détournementde mineur et homicide volontaire.La première page de L'AF affirme :« Une vengeance atroce : PhilippeDaudet a été assassiné. » Lapresse se divise. Sont favorablesà la thèse de l'assassinat : le Fi-garo, le Gaulois, l'Écho de Paris,le Petit Parisien ; lui sont hos-tiles : l'Ère nouvelle, où Mme Sé-verine prétend que l'autoritarismede Léon Daudet a poussé son filsau désespoir ; le Libertaire, quiva plus loin, et affirme que Phi-lippe était un enfant martyr, per-sécuté par son père. Le Parquetcharge le juge d'instruction Bar-naud de diriger l'enquête. Celle-ci réussit à reconstituer une par-tie de l'emploi du temps de Phi-lippe, à partir du 20 novembre.

La journée fatale

Ce jour-là, il ne se rend pas aucollège, mais à la gare Saint-La-zare. Il y prend le train pourLe Havre. Il est porteur d'unesomme de 1 700 francs : unebourse que ses parents lui ontconstituée pour ses vacances, plus1 000 francs qu'il leur a dérobés.Arrivés au Havre, il se rendcompte qu'il ne lui est pas pos-sible de prendre un billet pour leCanada, ainsi qu'il a rêvé de lefaire. Il s'installe à l'hôtel Belle-vue, passe des heures à lire et àfumer dans sa chambre. Il n'ensort que pour acheter des jour-naux et aller à la messe.Le 22, il prend le train pour Pa-ris, mais ne rentre pas rue Saint-Guillaume. Il se rend à la rédac-tion du Libertaire, où il dit s'ap-peler Philippe mais ne donne passon nom de famille. Il raconte àGeorges Vidal qu'il partage depuislongtemps ses idées, et qu'il estdéterminé à commettre un at-tentat « pour la cause ». Vidal sedemande si Philippe est un jeuneexalté ou un agent provocateur.Il lui donne des conseils de pru-dence, et le garçon le quitte. Lesamedi 24, il revient le voir, il luiremet quelques poèmes, Parfumsmaudits, ainsi qu'une enveloppecachetée, en lui demandant den'ouvrir celle-ci que plus tard. Ellecontient le billet que Georges Vi-dal doit envoyer à Mme Daudet etque le Libertaire publiera le1er décembre. Ce même samedi24, vers midi, Philippe passe chezun libraire apprécié des anar-chistes, Le Flaouter (46, boule-vard Beaumarchais, 10e arrondis-sement), un très louche person-nage, spécialisé dans la littératurepornographique – et indicateur auservice d'Auguste Lannes, contrô-leur général de la Sûreté, beau-frère de Raymond Poincaré. À LeFlaouter, Philippe tient à peu prèsles mêmes propos qu'à Vidal : «pour la cause », « faire un at-tentat », et, incidemment, il luidemande une certaine édition desFleurs du Mal que le libraire n'apas en magasin. Pas de difficulté :il pourra la lui obtenir et la lui re-mettre le jour-même, à 16 heures.Philippe promet de revenir. Àpeine l'a-t-il quitté que Le Flaou-ter se hâte de prévenir M. Lannes :il y a un jeune homme – « armé »,dit-il – qui prépare un atten-tat.. n À suivre

René Pillorget

o PHILIPPE DAUDET

Essai de mise au pointL'historien René Pillorget s'est penché sur le drame atroce du jeune Philippe Daudet trouvé mort dans un taxi en novembre 1923. Nous publions dans ce numéro et dans le suivant les conclusions de sa passionnante et bouleversante enquête.

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z HISTOIRE

z 12 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010

Cette année-là, la trente etun ième de son règne,Charles VII, cinquante ans,

en reprenant la Guyenne, mettaitfin à la guerre de Cent ans. On atrop souvent médit de ce roi, letaxant d'ingratitude à l'égard desainte Jeanne d'Arc, laquelle, leretirant du fin fond du gouffre,lui avait permis d'être sacré àReims le 17 juillet 1429 et de re-prendre ainsi, fort de sa légiti-mité affirmée et affermie, la luttecontre les Anglais toujours tropprésents sur le sol de France.

L'œuvre de Jeanne

On ne saurait nier que l'arresta-tion de la Pucelle par les ennemisavait jeté dans les armées royalesun découragement profond, d'au-tant plus cruel pour le roi que leprocès qu'intentait à Jeanne uneassemblée ecclésiastique, avec lacomplicité de l'évêque félon Cau-chon et de l'université de Paris,donc avec les apparences de lalégalité, le visait personnellement.À cela s'ajoutait le fait que Parisétait toujours aux mains de Phi-lippe le Bon, duc de Bourgogne,allié des Anglais.Charles VII avait peu de moyenspour mener la grande politiquequ'il eût fallu. Il n'en continua pasmoins l'œuvre de Jeanne, laquellen'avait pas apporté le salut maisseulement remis en place l'ins-trument du salut. Le reste devaitencore être gagné : "Aide-toi, leCiel t'aidera"...Le roi reconquit bientôt les ter-ritoires du Nord. Son rapproche-ment, tant souhaité par l'héroïne,avec le duc de Bourgogne, effa-çant quelque peu dès 1435 (traitéd'Arras) une animosité sanglante

de trois générations entre des-cendants de Charles V, fut un suc-cès pour l'unité nationale.Car tout en forçant pas à pas,mais prudemment, l'Anglais à ren-trer chez lui, Charles VII s'appli-quait à restaurer la France rui-née par la douloureuse incapacitéde son père Charles VI. Les dé-cennies d'après 1430 virent un re-marquable redressement des fi-nances grâce à l'aide avisée du fi-nancier berrichon Jacques Cœur,nommé grand argentier en 1440,puis membre du conseil du roideux ans plus tard. On ne peutici passer sous silence le rôle dela riche belle-famille du roi, sonépouse Marie d'Anjou, sa belle-mère Yolande d'Aragon, ni celuid'Agnès Sorel, splendide maîtressede Charles VII...

Pour accomplir un véritable re-dressement il importait que fûtrétablie l'intégrité du territoirenational. Paris avait été reprissans trop de difficultés en 1436.Furent peu à peu libérés Dieppe,Eu, Aumale... Puis en 1449,Charles VII put commencer unegrande offensive sur la Norman-die qui aboutit à la victoire deFormigny (15 avril 1450). En vraiCapétien, entrant dans Rouen -c'était tout un symbole ! - il ac-corda des lettres de rémission etdéclara maintenir les libertés etfranchises des villes. Parvenu dans la ville même duprocès et de l'immolation de1431, il put enfin entreprendrede faire éclater la vérité surJeanne : il s'empressa alors deconfier à Guillaume Bouillé,

membre de l'université de Paris,le soin de faire interroger les té-moins. Un procès de réhabilita-tion qui devait aboutir entière-ment dès 1456.

La bataille de Castillon

Restait à reconquérir une provinceoù les Anglais se croyaient chezeux depuis trop longtemps : laGuyenne. Le 17 juillet 1453 larencontre finale eut lieu à Cas-tillon sur la Dordogne entre 6 000soldats français commandés parle maître de l'artillerie Jean Bu-reau et 4 000 soldats anglaiscommandés par John Talbot. LesFrançais perdirent une centained'hommes, les Anglais 4 000...Comme à Formigny, le canon jouaun rôle décisif. Aussitôt après, lesvilles gasconnes se rendirent, dontBordeaux le 17 octobre.C'en était fini pour longtemps desprétentions de la Maison anglaisede Lancastre au trône de France.La guerre dite de Cent ans étaitclose. Crécy, Poitiers, Azincourtétaient effacés ! Seule la ville deCalais restait anglaise.Charles VII, la paix rétablie, en-treprit avec une autorité non decontrainte mais d'attraction de li-miter les pouvoirs des grands féo-daux en créant les parlements lo-caux (cours de justice). Il créa lespremiers offices, embryon de lafonction publique, soutint la pros-périté économique et orienta lecommerce extérieur en directionde la Méditerranée (la Renaissancen'était pas loin...). Comme l'écritl e d u c d e L é v i s M i r e p o i x ,Charles VII, qui devait mourir en1461, « a rendu le sang libre auxveines de la France et rétabli dansses destinées le beau royaumeblessé que Jeanne d'Arc avait re-mis entre ses mains ». Le turbu-lent dauphin Louis allait hériterd'une heureuse situation quand ildeviendrait Louis XI.L'Histoire n'est jamais de tout re-pos. 1453 vit la délivrance de laFrance, mais en même temps,de l'autre côté de l'Europe, laprise de Constantinople par lesTurcs... n

Michel Fromentoux

o CETTE ANNÉE-LÀ : 1453

Fin de la guerre de Cent ansPas à pas, Charles VII force l'Anglais à rentrer chez lui. Tandis qu'il lui resteà reconquérir la Guyenne, la rencontre finale a lieu sur la Dordogne le 17 juillet.Sa victoire lui permettra de mettre fin à la guerre de Cent ans.

Charles Maurraset la religion

Pourquoi la pensée de CharlesMaurras est-elle si méconnue ?Importante question qu'il est ur-gent de poser pour ne pas laisserperdre les fruits d'une doctrine,claire et structurée, tellement ac-tuelle qu'elle répond de manièrelimpide à la question de l'identiténationale.

Pour nous, catholiques et Fran-çais, l'analyse des rapports, poli-tiques, culturels et philoso-phiques, entre Charles Maurras etla question religieuse, et plus pré-cisément avec l'Église catholique,nous semble une des clefs de lasituation actuelle tant dans le do-maine purement politique que re-ligieux. En effet, Charles Maur-ras, bien que privé des lumièresde la foi jusqu'à ses derniers jours,s'est toujours présenté comme ledéfenseur des valeurs qui ontconstruit la France, toutes fon-dées sur les bases du dogme ca-tholique le plus traditionnel – sadéfense, réaliste et raisonnable,du Syllabus de Pie IX, et sa lutte,intransigeante, contre la démo-cratie chrétienne en sont desexemples édifiants. Son "Politiqued'abord" ne traduit pas un méprisdes choses métaphysiques maisl'affirmation d'un domaine pri-mordial où l'homme doit trouverla plénitude de son intelligenceet de sa volonté ; la politique n'estpas au-dessus de tout, elle est

avant toute chose dans l'ordre despriorités humaines. Maurras a tou-jours cherché à élever l'hommepour lui faire prendre conscience,même indirectement, de sa di-mension surnaturelle. C'est dans cet esprit que, samedi27 février à Arzens (près de Car-cassonne), et dimanche 28 févrierà Balma (près de Toulouse), ontété organisés deux cycles deconférences sur Charles Maurraset la question religieuse.

La Condamnation et ses conséquencesTrois conférenciers nous ont faitl 'honneur de nous éclairer.Me Henri Bec, de l'AssociationLouis XVI, a retracé les débuts del'AF et les fondements de la pen-sée de Maurras. Philippe Prévosta démontré que la condamnation,inique et arbitraire, de l'Actionfrançaise ne peut s'expliquer quepar la nécessité de séparer lesFrançais catholiques d'un mouve-ment qui s'opposait aux desseins

politiques du Vatican (ralliement,rapprochement franco-allemand,soutien aux mouvements d'actioncatholique...). Enfin, Arnaud deLassus Saint-Geniès, directeur del'Action familiale et scolaire, aprésenté les conséquences decette condamnation dont les ef-fets se mesurent dans la pauvretéintellectuelle abyssale de la"droite française" et dans l'acuitéde la crise de l'Église.Sur les deux journées, près de 350personnes ont répondu à l'appel,dont 120 pour Toulouse. Merci ànotre hôtesse de Toulouse, auxécoles de Fanjaux et Montréalpour leur accueil, à L'Action Fran-çaise 2000, à Rivarol, à l'Actionfamiliale et scolaire, à Civitas, àl'Association Louis XVI, enfin auxprêtres des prieurés et chapellesde la Tradition. Devant le succèsrencontré, nous envisageons déjàde renouveler l'opération.Cette action doit trouver natu-rellement son prolongement dansun exercice intellectuel : il fautlire, ou relire, Maurras, ses œuvres

capitales , contraction de sa pen-sée dans l'essentiel ; ses Lettresqui reflètent une personnalité ori-ginale et plus ouverte qu'on ne ladécrit généralement ; son Dic-tionnaire politique et critique,source d'eau fraîche d'une penséetoujours en mouvement ; sespoèmes riches de spiritualité... ;enfin tout Maurras. Mais égale-ment Daudet, Bainville, René Ben-jamin, Xavier Vallat, Jacques Per-ret... Et les auteurs d'aujourd'huiqui accomplissent un immense tra-vail pour mettre à notre portéela pensée des maîtres d'hier.En citant cette strophe extraitede la Prière de la fin, pensons,en remerciant le Bon Dieu, à latoute-puissance de la Grâce :« Seigneur, endormez-moi dansvotre paix certaine / Entre lesb r a s d e l ' E s p é r a n c e e t d el'Amour. / Ce vieux cœur de sol-dat n'a point connu la haine / Etpour vos seuls vrais biens a battusans retour. » n

Gal Daniel Nougayrède

La bataille de Castillon

Maurras et l'industrieLe site Maurras.net nous in-vite régulièrement à redécou-vrir le maître de l'AF. Ainsi a-t-il publié le 22 mars un texterédigé entre 1901 et 1911, oùCharles Maurras se garde defustiger le progrès technique,« ou, pour mieux parler, lesprogrès ». Il exprime à leurégard une certaine fascina-tion, tout en observantque, « loin de nous délivrerde notre condition », ils « laprécisent en la compli-quant ». Extrait : « J'en veuxà M. le préfet de police des'être permis, à l'Hôtel deVille, de railler l'extension na-turelle que vont prendre sescharges par la nécessité deveiller désormais à la sécuritédes airs. Le garde-champêtreaérien, le gendarme ailé, lesescadrons de dirigeables deguerre et d'aéroplanes armésnous signifient l'occupationdes espaces par la société hu-maine et leur réduction à seslois. Il n'est rien de plus ma-gnifique. [...] À l'homme vo-lant s'ajoutera la ville vo-lante, vertigineuse colonied'une métropole adorée etdans laquelle la discipline so-ciale, la stabilité sociale sera,comme aujourd'hui sur le pontd'un navire, la condition pre-mière de cet heureuxtriomphe de l'art humain servipar la richesse et la diversitéde lois de l'univers. Bien assu-rés de l'immuable, émer-veillons-nous des belles méta-morphoses cachées dansl'abîme du Temps. La véritépolitique et sociale qui nousconduit n'a pas la forme duregret. Elle est plutôt désir,curiosité, solide espérance ap-portant les moyens de réaliserl'avenir avec une impertur-bable sécurité. [...] Animalindustrieux, voilà la défini-tion première de l'homme. »

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Les grands livres ont de moinsen moins leur place dansl'édition française, surtout

lorsque leur contenu contrevientau prêt à penser d'un totalitarismeintellectuel qui ne dit pas sonnom. Le splendide ouvrage d'YvesMeaudre, Les Condamnés, Jésus,Jeanne et Louis, n'a donc pastrouvé place au catalogue des édi-teurs parisiens. Il avait tout pourleur déplaire.

Triple chemin de croix

21 janvier 1793 : le marquis dePradines a rejoint Batz afin del'aider à faire évader le roi sur lechemin de l'échafaud ; l'affairesemble jouable. Elle échouerapourtant : Louis XVI, en recon-naissant ses fidèles, aurait faitsigne qu'il ne voulait pas être dé-livré. Alors que le marquis s'ap-prêtait à désobéir, une étrangevision l'avait arrêté : devant lecarrosse du roi avançaient le char-roi menant Jeanne au bûcher, etle Christ montant au Golgotha.Triple chemin de croix signant,aux yeux du monde, un triple eteffroyable échec.Deux siècles plus tard, Jean dePradines, dernier descendant dumarquis, homme politique en vue,vient s'écrouler, désespéré, auxpieds de sa cousine, Mère Con-stance de la Croix glorieuse, etlui dire l'intolérable douleuréprouvée à regarder, malgré sesefforts impuissants, la France s'en-foncer toujours plus loin sur lechemin de l'apostasie et par-achever sa perte. Y a-t-il entreces événements des liens invi-sibles, un sens connu de Dieu seulqui se laisserait deviner descroyants ?Impossible de résumer cette mé-ditation où Louis XVI décidé à pé-rir pour son peuple, répond àl 'étonnement douloureux deJeanne qui n'a point de la fonc-tion royale la même conception,sous le regard aimant du Christaux outrages. En contrepoint pas-sent les juges : Pilate, mécontentdu rôle qu'on lui impose, de tous,le moins coupable ; Cauchon,Fouquier-Tinville, Voltaire et Ro-bespierre.

Deux conceptions du monde, del'homme se heurtent, un passégrandiose agonise, un avenir hor-rible se dessine, les justes sontpunis, les méchants triomphent,la France se meurt. Qui arrêteral'engrenage ? Devra-t-il aller à sonterme ? Yves Meaudre semblerapeut-être trop pessimiste. Nonqu'il ignore le Politique d'abord,dont Jeanne se fait ici porte-pa-role, mais parce qu'il lui sembleque nous avons passé ce stade etqu'il faut s'en remettre à Dieuquant à la suite.Nous ne sommes pas obligés departager ce point de vue. Mais ilfaut goûter à leur juste valeur lafinesse des analyses, l'acuité dutrait, la profondeur de la pensée,la beauté du style, et l'immenseamour de la France éternelle quianime cet inclassable et boule-versant chef d'œuvre.

L'éternel scandale du christianismeLorsque l'abbé Romano Guardini,Italien enseignant en Allemagne,prêche les Méditations sur la per-sonne et la vie de Jésus-Christ,publiées sous un titre générique,Le Seigneur, les temps sont mau-vais. Le nazisme impose sa doc-

trine à un pays où l'Église conserveseule l'audace de dénoncer unepensée contraire à l'humanité età la civilisation. On ne fera pastaire l'universitaire, par ailleurstragiquement conscient du mé-pris et du rejet qui entourent lapersonne du Christ dans un uni-vers qui érige la force en normede droit. Éternel scandale duchristianisme confronté aux sa-gesses humaines comme aux cer-titudes païennes ; incompréhen-sion d'un monde qui se cherchedes dieux et des modèles à sonimage, pour lequel la folie de laCroix est d'obligation risible et in-tolérable. Angoisse du chrétientoujours plus isolé et désarméface à ces attaques répétées, tan-tôt subtiles tantôt grossières maiségalement perturbantes.En termes simples, partant du Pro-logue de saint Jean pour fairecomprendre la signification de l'In-carnation, ce que signifie, pourDieu, se glisser dans le temps deshommes, devenir leur fils, ac-cepter d'assumer génétiquementleur héritage de péchés et de mi-sères, jusqu'au triomphe ultimede l'Agneau au dernier chapitrede l'Apocalypse, l'abbé Guardiniaffronte chaque problème enface, sans craindre les objections

ni les contradicteurs. Il va au-de-vant des interrogations parce quecelles qui n'ont pas trouvé réponsefinissent par infecter l'âme et lapensée. Il monte très haut, d'unemanière très simple. Sa Sainteté Benoît XVI, qui fut sonétudiant, - l'influence sur lui del'abbé Guardini n'échappera pasà ceux qui ont lu son Jésus de Na-zareth - tient beaucoup à ce quel'œuvre de son maître revienneen pleine lumière. On ne peuttrop lui donner raison.

Au risque de la BD

Peut-on adapter l'évangile selonsaint Matthieu en bande dessi-née ? Michel Dufranne et Jean-Christophe Camus, secondés parun illustrateur croate, Dalibor Ta-lajic, ont relevé le défi. Partantde la traduction centenaire deLouis Segond, ils proposent uneillustration assez fidèle du textesacré, même s'ils ont fait choixd'y mettre en évidence ce qu'ilsperçoivent avant tout comme unmessage révolutionnaire et scan-daleux. Façon de voir les chosesthéologiquement primaire maisqui, d'ordinaire, séduit les ado-lescents. Le crayon de Talajic estinégal. À côté de cases réussies,

voire belles, riches en portraitsintéressants, en scènes de nuit su-perbes, en paysages magnifiques,il y a, hélas, beaucoup de grimaceset de mimiques ridicules, sansdoute pour varier les expressionsde Jésus dans les longs passagesnarratifs tel le Sermon sur la mon-tagne, et une quasi-impossibilitéà dessiner une femme, fût-ce lasainte Vierge ou Marie-Madeleine,autrement que laide. La danse,suggestive, et très dénudée, deSalomé peut incliner à ne pas of-frir l'album aux plus jeunes. Cela,et la préface de Frédéric Lenoir,mis à part, l'impression d'ensembleest plutôt positive.

Question difficile

Sous-titrée Enquête pour l'unité,La Question interdite de Brunors'adresse en principe aux jeunes,mais j'hésiterais, pour ma part, àleur laisser ce livre entre lesmains, tant son propos, pour in-téressant et enrichissant qu'il soit,s'avère d'accès difficile, voire dan-gereux. La question interdite,c'est le débat sur la nature divineet humaine du Christ, qui soule-vait dans le peuple de si violentsdébats et de telles contestationsque l'empereur Constant préten-dit empêcher d'en discuter pu-bliquement. Le pape refusad'obéir, et fit bien.Cependant, quiconque connaît lesujet en sait l'incroyable com-plexité, le nombre effarant dethèses contradictoires, l'effer-vescence d'idées fausses et de po-sitions insoutenables soutenuesparfois par des gens très respec-tables voire très convaincants. Ilfaut donc des connaissances so-lides, un catéchisme impeccable,et beaucoup de prudence pouravancer là-dedans sans péril. Yentraîner un public, par défini-tion ignorant, et qui risque fort,au demeurant, de s'ennuyer viteà mourir, n'est pas sage. Mieuxvaut s'en tenir aux définitions duCredo de Nicée, et laisser aux spé-cialistes le soin de comprendrecomment elles se sont imposéesaux catholiques. n

Anne Bernet

3 Yves Meaudre : Les Condamnés,Jésus, Jeanne et Louis ; DominiqueMartin Morin, 225 p., 18 euros.3 Abbé Romano Guardini : Le Sei-gneur ; Salvator, 640 p., 39 euros.3 Camus, Dufranne et Talajic : L'É-vangile selon Matthieu ; Delcourt,128 p., 19,90 euros.3 Brunor : La Question interdite ;Viltis le Vieux Manoi (50660 Héren-guerville), 300 p., 22 euros.

CHRONIQUE DES LIVRES z

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010 13 z

o RELIGION

Qui dites-vous que je suis ?La réitération des attaques médiatiques contre le souverain pontife démontre la haine des faiseurs d'opinion envers le catholicisme. Rien là que de conforme aux avertissements évangéliques. Quelques auteurs aident à le comprendre, et l'accepter.

Lus aussi Dieu est amour et Il veut quenous l'aimions librement. Afin dedécouvrir sa tendresse miséricor-dieuse, voici d'abord un choix decitations empruntées à la Bible,aux Pères, aux saints, aux mys-tiques et qui invitent chacund'entre nous, dans sa faiblesse etsa misère, à oser regarder leChrist, car celui qui le voit voit lePère. Des images de la sainte faceviennent soutenir la méditation,car il s'agit aussi d'une introduc-

tion à la pratique de la lectio di-vina, d'une initiation à l'oraison età la contemplation. Un programmemoins ambitieux que nous avonstendance à le croire, et qui, envérité, nous concerne tous.Des prières pour tous les jours,toutes les circonstances, tousles états d'âme. Au Sacré Cœur,à Notre-Dame, aux saints, auxanges. Des prières pour louer, pourdemander pardon, pour réclamerune grâce, implorer une guérison,des formules d'exorcisme et debénédiction. Des textes pour ceuxqui ne prient jamais, pour ceux

qui ne savent pas, pour ceux quicherchent à renouveler leurprière. Chacun, à sa guise, y trou-vera de quoi glaner.

Semaine sainte

Un chemin de croix commentépar des citations évangéliquestirées de la Bible de Crampon etillustré de vignettes, voilà un fas-cicule précieux en ce temps dela Passion, mais aussi le reste del'année. Sa taille et son formatpermettent de l'emporter partoutsans inquiétude.

Pour mieux comprendre la tra-gédie du Vendredi saint, AntoineLegrand publie Évangile et Lin-ceul, commentaire extrêmementdur mais réaliste et véridique, dela Passion à travers l'étude duSaint Suaire de Turin et ce queles spécialistes peuvent aujour-d'hui déduire à travers les traceslaissées sur le drap par le corpssupplicié. Les clichés, souvent degrand format, une fois expliqués,sont des plus parlants. Ce dossierphotographique est d'une ap-proche plus simple et plus acces-sible, moins douloureuse aussi,

que la plupart des travaux publiéssur le Linceul, ou que l'admirable,terrible et irremplaçable Passionselon le chirurgien du docteurBarbet. n A.B.

3 Jean-Paul Dufour : Il le regardaet Il l'aima ; Téqui, 65 p., 7 s. 3 Mgr Mario Oliveri : Cœur à cœuravec Jésus ; Téqui, 135 p., 9,50 s.

3 Anonyme : Chemin de croix ; Té-qui, 5 p., 0,70 s.3 Antoine Legrand : Évangile etLinceul ; François-Xavier de Gui-bert, 16 p., 10 s.

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z CULTURE

z 14 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010

Les films d'avril

Tête de Turc"Jeune" et – à moitié – innocent !La scène d'ouverture se passe dansune cité de nos banlieues dites"difficiles" : une jeune fille, quise rebiffe et hurle, est interpel-lée par des policiers. Les "jeunes"du quartier s'en mêlent, et caillas-sent les policiers. Dans l'un desappartements, Simon, PascalElbé, un médecin d'origine ar-ménienne de SOS Médecins, estau chevet d'un patient. Lorsqu'ilregagne sa voiture, une pierre,suivie d'un cocktail Molotov, lelaisse inconscient dans son véhi-cule en flammes. C'est alors queBora, Samir Makhlouf, "jeune"Turc de quatorze ans, auteur dulancé de cocktail incendiaire, prisd'un remords, sort Simon de lavoiture, et prend la fuite. Borane dit rien à personne. Même pasà sa mère, Ronit Elkabetz, qui

élève ses enfants du mieux qu'ellepeut. De son côté, Atom, RoschdyZem, le frère policier de Simon,enquête pour trouver celui qui afailli tuer son frère ainsi que ce-lui qui a sauvé la vie de son frère.Sans se douter qu'il s'agit de lamême personne. Sans se douternon plus que le mari d'une femmedécédée des suites d'un malaiseet qui a attendu désespérémentl'arrivée de SOS Médecins, en l'oc-currence Simon, crie vengeanceà l'encontre de celui qui aurait dûvenir soigner sa femme. Sans s'enrendre compte, Bora a provoquépar son geste irréfléchi un en-chaînement de circonstances dra-matiques... Avec ce polar ten-dance sociale, Pascal Elbé signeun premier film coup de poingd'une actualité brûlante sur le"malaise" des banlieues. Sortie le31 mars.

Dragons

Donjons et dragons ! Il était unefois au pays des trolls et desgnomes, Harold, un jeune viking

épais comme un salsifis ano-rexique, fils du chef du village etrisée de ses potes. Un non-violentfreluquet mais qui en a dans latronche. Depuis toujours, dans cepays de légendes nordiques, leshommes et les dragons se livrentune guerre sans merci. Lors durite initiatique qui consiste à at-traper un dragon, Harold réussità capturer une Furie nocturne,

l'un des plus beaux et des plusmystérieux des dragons. À forcede patience, les deux s'apprivoi-sent. Ensemble, ils vont parvenirà rapprocher hommes et dragons,notamment en combattant un dra-gon monstrueux qui a droit de vieet de mort sur tous les autres dra-gons qui ne satisfont pas son...monstrueux appétit... Chris San-ders et Dean DeBlois signent une

spectaculaire chasse aux dragonsavec ce petit bijou d'animationen 3D. Une grande aventure toutdroit sortie des studios Dream-works, pour petits et grands. Sor-tie le 31 mars.

Alice au Pays des Merveilles

La dernière "folie" visuelle deTim Burton, qui revisite façon"suite" le célèbre conte fantas-tique de Lewis Carroll, avec sonacteur fétiche Johnny Depp dansle costume de celui qui travailledu... chapeau, à savoir Le Cha-pelier Fou, et avec Mia Wasi-kowska dans le rôle d'une Alicede dix-neuf ans qui retourne auPays des Merveilles aujourd'huisous la tutelle de la tyranniquereine Rouge qui réclame toujoursdes têtes. Au final, un voyage fan-tastique et un grand spectaclemagique du style... délice auxPays des Merveilles ! Déjà dansles salles. n

Alain Waelkens

Théatre

Fabrice Luchini lit Philippe Muray

Qu'il n'y ait plus de places dispo-nibles ou qu'on ait voulu, d'unefaçon ou d'une autre, nous ostra-ciser importe finalement assezpeu ayant réussi, par miracle, àécouter la lecture de Philippe Mu-ray que Fabrice Luchini nous pro-posait pour quelques semaines authéâtre de l'Atelier.À l'ombre de Dullin et des mânesd'Anouilh, l'assistance est empor-tée dans le tourbillon efferves-cent d'une prose qui se plaît àétriller notre société et ses codes :le PS et les emplois jeunes fonttriste mine ; on voit passerquelques "techniciennes de sur-face" égarées, mais tout espoirn'est pas perdu puisqu'on a encoreun "musicien de service". La verve du pamphlétaire sedonne libre cours ; l'interprète sedélecte des mots, les décorti-quant comme des cacahuètesdont il nous lance les coques auvisage. Un certain poème rimé autitre très classique Tombeau pourune touriste blonde fait pâmerd'aise l'assistance. L'"homo festi-vus" en prend aussi pour son gradeavec son trekking, ses croisières-conférences et le Club Med enprime. Lisons, ou relisons, Phi-

lippe Muray, c 'est avec unejoyeuse férocité notre époque auscanner.

Une heure et quart

Rendez-vous dans la crypte deSaint-Sulpice en cette fin de Ca-rême. L'auteur a trouvé l'inspira-

tion dans un retable du CaravageL'Incrédulité de saint Thomas. Ilssont trois en scène : le berger deBéthanie, Mathan, Thomas puisFred le chef de chœur, touchéspar la rencontre de Jésus - avecauprès de lui Jean, le très-aimé -celui qui a conservé ses paroles.« Il était comme un joaillier dont

les mots à lui devaient sertir lesparoles prononcées par Jésus. »Un jour, Jean dit : « C'est un motgrec qui veut dire la parole. LeChrist était le logos. » Mathan etThomas vont continuer à dialo-guer mais au delà des mots « c'estpeindre les mots qu'il faudraitpouvoir faire... ».Le texte, d'une grande poésie etd'une belle élévation, est trèsbien servi par des interprètes quel'on sent passionnés : Arnaud De-lon, Marc di Napoli et StefanRombaut. Ils sont rejoints par l'au-teur qui décide, suivant un pro-cédé classique, de porter "lethéâtre dans le théâtre" : d'autresacteurs ont besoin de la scène ;il faut se hâter, couper, réduirele texte, les chœurs si beaux...en multiples langues orientales.À toutes leurs interrogations, dé-sormais « plus de mots, juste desvoix d'enfants ». n

Monique Beaumont

3 Fabrice Luchini lit Philippe Mu-ray ; Théâtre de l'Atelier, 1 placeCharles Dullin, Paris 18e ; samedi 10avril à 15 heures, dimanche 11 à13 heures ; tél : 01 46 06 49 24.

3 Une heure et quart ; crypte deSaint-Sulpice, 33 rue Saint-Sulpice,Paris 6e ; du mardi au samedi à19 h 30, le dimanche à 16 heures ;jusqu'au vendredi 9 avril ; tél. :06 71 61 47 57.

Peinture

contemporaine

Pour qui s'intéresse à la pein-ture contemporaine, chercheà la comprendre en discer-nant dans sa masse lesœuvres qui comptent, il im-porte de se procurer Vu dema chaise - Journal d'unegardienne de musée. AvecAnne Eau, Nicolas de Staël atrouvé son interprète. On envoudra pour preuve cetteprésentation : « Beaucoup derouge avec du noir, du blancà peine coloré et de l'ocrejaune ; la dernière toile deStaël son Concert, largue unecargaison de teintes sur lemur du fond. Son formatgéant, non pas inhumain. Samatière : aqueuse, délavée,les larmes. L'absence mani-festée, tu l'as titrée : "Lepeintre en allé". »

Perceval

3 Anne Eau : Vu de ma chaise -Journal d'une gardienne de mu-sée ; préface de Victoria Thé-rame, dessins de Dana Radu-lescu, éd. La Cause des livres,120 pages, 14 euros.

Redécouvrir la géographieCe petit essai, qui paraît cesjours-ci, a tout de réjouissant.Il s'empare d'une discipline qui,avouons-le, nous emporte plus rarement que l'histoire, que lesrécits de ceux qui ont bâti laFrance et ont tenté de maintenirson rang. La géographie, hélas, c'est sur-tout le souvenir des heures fasti-dieuses à mémoriser des listes in-

terminables de limites adminis-tratives et des colonnes dechiffres... C'est ce qu'ont vouluremettre radicalement en ques-tion les auteurs de La géographien'est plus ce que vous croyez...Nos deux jeunes géographes re-visitent la France que nous ai-mons : celle des terroirs et desva l lons , des communautésd'hommes qui au fil du temps s'an-crent à un territoire, parfois lequittent et entament une nou-velle aventure. C'est à un voyageà travers une France des régionsni éternelle, ni figée, qu'ils nous

invitent, à la recherche de l'ins-cription dans les territoires decette tension toujours à l'œuvreentre perpétuation des traits cul-turels spécifiques et modernitédestructrice.De la Touraine à la Sologne, lesmonographies abondent. Retenonsparticulièrement la réflexionéclairante, et puisée au terrain(« Lâcher un géographe à Thion-ville un jour de Noël sous un ma-gnifique anticyclone hivernal,quel plus beau cadeau de Noëlpeut-on rêver de lui faire ? ») surThionville, où dans l'espace ur-

bain se lit une quadruple dimen-sion historique à la fois allemande,catholique, ouvrière et euro-péenne.Un essai à emporter partout avecsoi lorsque nous prend l'envie deregarder d'un œil averti ces pay-sages de notre chère France qui,disait Flaubert sont « si beauxqu'on a envie de les serrer surnotre cœur ». n

Marc Savina

3 Eudes Girard, Thomas Daum ; Lagéographie n'est plus ce que vouscroyez... ; Codex , 190 p., 21 s.

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Agitateurd'"idées" ?

Un singulier concours de photosa été organisé par la Fnac de Nice,dont le prix « politiquement in-correct » a été attribué à l'auteurd'une prise de vue représentant unindividu s'essuyant ce qui lui sertd'arrière-train à l'aide d'un dra-peau français. Outre que l'image, d'un point devue artistique, est particulière-ment médiocre, elle illustre bien,non seulement la question del'identité nationale, mais aussicelle de l'intégration. Car, enfin,depuis des décennies, en com-mençant par les petits profs, por-teurs de valises du FLN, jusqu'auxéducateurs dits "socioculturels"qui justifient les sifflets des stadessur l'hymne national, tout un ser-vice soi-disant public de l'éduca-tion nationale ou populaire tra-

vaille à détruire et à souiller lessymboles de la nation aux yeuxdes nouvelles générations, et plusparticulièrement de celles quisont issues de l'immigration.

Des dividendes...

Que la Fnac, qui est tout sauf "im-politiquement correcte", s'asso-cie à cette œuvre de destructionn'a rien d'étonnant étant donnéles origines pseudo-révolution-naires qu'on lui prête. Qui ne sesouvient que, dans les annéessoixante-dix, dans les facs et ly-cées, quand on arborait notre dra-peau national, on était traité defasciste ? Ceux-là mêmes qui nousinsultaient alors, et qui sont lesprofs et les éducateurs, n'ont pasun sort enviable aujourd'hui. Cettedérive n'est pas anodine et il fautun jour en payer le prix. Ils ra-sent les murs et se font casser lagueule dans les ZEP et les ZUS,car lorsque l'on apprend à mé-priser les fondements de la na-tion, cet espace commun et his-torique de solidarité, on découvreque l'on ne pèse plus grand choseindividuellement. Quant à la Fnac, il faut qu'elles'attende à verser à son tour desdividendes. Gageons qu'il reste

assez de patriotes dans ce beaupays de France pour faire passerle goût de la provocation haineuseà ces anciens "anticapitalistes" re-venus piteusement à la gamelle.

PercevalPrésident du Centre royaliste

d'Action française

L'AF EN MOUVEMENT z

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2791 – du 1er au 14 avril 2010 15 z

Centre royaliste d'Action française10 rue Croix-des-Petits-Champs 75001 PARIS

[email protected]

PrésidentOlivier Perceval

Secrétaire généralRomain Hellouin

TrésorierGiovanni Castelluccio

Secrétaire administratif

Marie-Suzanne deBenque d'Agut

Responsableopérationnel

François Bel-KerCommunication

externe Jean de ChenonCommunication

interne Philippe Castelluccio

François Lamy

Coordinationprovinces

Philippe CastelluccioMilitantisme

Jean-Baptiste del'Aviath

FormationOlivier Perceval,

Erwan BloüetMarc Savina

Vive Henri IV !Les militants et sympathisantsdu Centre royaliste d'Action fran-çaise, avec, à leur tête, OlivierPerceval, ont rendu hommage àHenri IV le dimanche 21 mars,à l'appel du Groupe d'Actionroyaliste, en cette année où nouscommémorons les quatre centsans de sa mort. Après les discours de FrédéricWinkler, président du Groupe d'ac-tion royaliste, de Jean-PhilippeChauvin, vice-président du GAR,de Bernard Bonnaves, membre ducomité directeur de l'Action fran-çaise, et de Stéphane Piolenc,membre de l'Alliance Royale, Oli-vier Perceval, a pris la parole, de-vant plus d'une une soixantainede personnes, pour demander auxroyalistes, devant les menaces so-ciales, économiques et politiquesqui pesant sur notre nation, d'en-trer en résistance et de faireconnaître autour d'eux la solution

« du bien commun » : la monar-chie. Il nous a ensuite invités àparticiper au défilé de Jeanned'Arc, le 9 mai 2010. La journées'est terminée par un banquet, or-

ganisé par le GAR, où des roya-listes de différentes tendancesont pu partager leurs expériences,dans une ambiance de chants etd'amitié.

» DÉCÈS

o C'est avec peine que nousavons appris le décès à l'âge de82 ans de notre amie GenevièveCarpentier née Dastouet, ledimanche 21 mars 2010. Elle aservi durant quelques années lesecrétariat de l'Action française,avec beaucoup de gentillesse etde dévouement. Les obsèquesreligieuses ont été célébrées lemercredi 24 mars à 14 h 30 enl'église Saint-Nicolas duChardonnet à Paris etl'inhumation au cimetière deSaint-Maur. À ses sept enfants : Philippe,Patrick, Sylvain, Bruno,Christian, Marie-Agnès et Marie-Hélène, à ses petits-enfants etarrière petits-enfants, nous

présentons nos bien vivescondoléances avec l'assurancede nos prières pour leur mère et grand-mère.

o Nous avons appris avec unegrande peine le décès, jeudi4 mars 2010 dans sa quatre-vingt-septième année deMme Georges Guillard, néeClaudette Hayotte, munie dessacrements de l'Église. Elle étaitl'épouse de notre ami GeorgesGuillard, de Mont-Saint-Aignan,fidèle de toujours à l'Actionfrançaise, que nous avonssouvent rencontré enNormandie et qui manifeste àchaque occasion son soutien àl'Action française. Les obsèquesde Mme Claudette Guillard ontété célébrées lundi 8 mars en

l'église Saint-Patrice de Rouen,en présence d'une nombreuseassistance. Nous assuronsM. Georges Guillard, son époux,ses nombreux enfants et petits-enfants, notamment le chanoineTancrède Guillard, de l'Institutdu Christ-Roi Souverain Prêtre,de notre bien vive sympathie etde nos ferventes prières.

» ANNONCES

o Conférences de ChristopheDickès : "Jacques Bainville,historien d'Action française, etnous". À Bordeaux le vendredi23 avril à 19 h 30 : dîner-débatau restaurant Le Xaintrailles,114 boulevard du maréchalLeclerc ; participation aux

frais : 24 euros. À Toulouse lesamedi 24 avril à 10 h 30 :déjeuner-débat dans le centre-ville ; participation : 24 euros.À Bayonne le samedi 24 avril à18 h 30 ; participation auxfrais : 5 euros. Prière des'inscrire avant le 20 avril auprèsde CAEC, BP 80093,33035BORDEAUX CEDEX ; règlement à l'inscription par chèque à l'ordre du CAEC – CCP 15 503 63 W BOR.

o Grande Journée d'amitiéfranco-russe le samedi 24 avrilde 9 heures à 19 heures. AuCentre Saint-Paul, 12 rue Saint-Joseph, Paris 2e. Buffet surplace (cuisine russe) ;participation aux frais ;renseignements : 01 40 26 41 78.

ÎLE DE FRANCE

Dîner-débatLa section des Hauts-de-Seine etdu 17e arrondissement vous convieà un dîner-débat le vendredi9 avril à 20 heures, en présencede Stéphane Giocanti, à l'occa-sion de la sortie de son livre Unehistoire politique de la littéra-ture (Flammarion). Au restaurant Le Bolero de Ravel,37 rue Gabriel Péri à Levallois-Perret (métro Anatole France, bus174). Participation : 26 euros ;étudiants, lycéens : 17 euros.Chèques à l'ordre de Mme Castel-luccio.

Inscriptions avant le 2 avril au-près de Mme Geneviève Castelluc-cio, 46 rue Gabriel Péri, 92300LEVALLOIS PERRET. Renseigne-ments : 01 47 57 05 81 n

» CERCLES D'ÉTUDES

Vendredi 2 avril : L'immigré ditéconomique et l'identité françaiseet européenne, par AlexandreChabanis ; vendredi 9 avril :Henri IV, réconciliateur des Fran-çais, par Michel Fromentoux ;vendredi 16 avril : Maurras, cet inconnu , par Stéphane Blanchonnet. Rendez-vous à 19 h 30, 10 rueCroix-des-Petits-Champs, Paris 1er

(métro Palais-Royal).

» GIRONDE

Un nouveau correspondant a éténommé en Gironde : Mme Anne-Marie Pupion. Vous pouvez luiécrire à cette adresse ; [email protected]

» VENTES À LA CRIÉE

Notre journal ne se vend pas toutseul ! Participez à la diffusion del'idée royale en rejoignant noséquipes de vendeurs. Pour Sainte-

Odile et Sainte-Germaine, prendrecontact avec Philippe Castelluc-cio au 06 35 50 50 68 ; pour Mau-bert-Mutualité et le Quartier la-tin, écrire à Frédéric Wincler, [email protected] ; pour lesautres ventes partout en France,appelez Jean-Baptiste de l'Aviathau 06 81 55 36 78.

» ADHÉSIONS

Qui n'a pas encore pensé à sonadhésion ? La cotisation est de32 euros pour un an (demi-tarifpour les étudiants et chômeurs ),la moitié étant reversée à la sec-tion locale de votre choix. C'est cette ressource indispen-sable qui nous permet de mon-ter nos projets... Adhésion à retourner au CRAF,10 rue Croix-des-Petits-Champs,75001 Paris.

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Édité par PRIEP S.A. au capital de 59 880 euros – 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – Imprimerie RPN – 93150 Le Blanc-MesnilNuméro de commission paritaire 0410I86761 – Directeur de la publication : M.-G. Pujo

z ASPECTS DU MONDE

La grande fête prévue le20 mars 2010, pour le qua-rantième anniversaire de la

Francophonie, a commencé parun échec : le point culminant duprogramme devait être l'inaugu-ration du nouveau siège de l'Or-ganisation internationale de laFrancophonie (OIF), 19-21 avenueBosquet, dans le 7e arrondisse-ment de Paris, par le présidentde la République, avec deux ansde retard sur le projet initial lancépar Jacques Chirac en 2006.

Retards à répétitions

Mais les travaux ayant pris un nou-veau retard, il a fallu se résoudreà une solution de secours qui nepuisse pas être mal perçue parles représentants des paysmembres de l'OIF. C'est finalementà une réception au palais de l'É-lysée qu'ont été conviés quelquehuit cents invités, diplomates, no-tables des États francophones,fonctionnaires de l'OIF et journa-listes. Quelques articles, annon-çant l'inauguration de la Maisonde la Francophonie, étaient ce-pendant déjà parus dans la presse(Le Figaro du 17 mars).Nicolas Sarkozy, s'éloignant de l'al-locution prévue lors de la récep-tion à l'Élysée, n'a pas hésité àévoquer ce contretemps qui, vi-siblement, l'irritait. « Je ne com-prends toujours pas, a dit le pré-sident de la République, pourquoiil a fallu tout ce temps pour y ar-river. On me dit : "c'est compli-qué". Non, non, il suffit de le dé-cider. [...]. Si l'OIF n'est pas ca-pable de faire une Maison de laFrancophonie à Paris, ce n'est pasla peine d'égrener des longs dis-cours sur l'importance de la Fran-cophonie. Ce n'était pas dans lediscours, naturellement, cela nese dit pas, mais je l'ai dit quandmême ! »Mais tout cela était oublié quandle secrétaire général de l'OIF etancien président du Sénégal, Ab-dou Diouf, a pris la parole devantles drapeaux des États franco-phones et sous les lambris dorés

de la vaste salle des fêtes de l'É-lysée. Il a d'abord rendu hommageaux fondateurs de l'Agence de co-opération culturelle et techniquecréée en 1970, aujourd'hui deve-nue l'OIF : Léopold Sédar Senghor,Hamani Diori, Habib Bourguiba etNorodom Sihanouk.

Un complexe hors de situationSon discours, assez convention-nel, fut un long rappel historiquedes principes de la Francophonieavant cette conclusion : « Té-moignons des valeurs et des ver-tus de la langue française, quinous a permis d'être ce que noussommes ! Œuvrons avec déter-mination et créativité à sonrayonnement pour continuer àporter, haut et fort, les idéauxde liberté, de partage et d'hu-manisme qu'elle incarne. »La prise de parole du présidentde la République française, donton pouvait craindre le pire – iln'était resté que quelques heuresau sommet des chefs d'États fran-

cophones à Québec en 2008 –, futplus dynamique et heureusementsurprenante. Nicolas Sarkozy,s'éloignant assez fréquemment dutexte prévu, a montré une réellevolonté de renforcement de laFrancophonie et de l'influencefrançaise dans les institutions in-ternationales.Il a d'abord souligné les paradoxesliés à l'utilisation de notre langue :« Il y a 200 millions de franco-phones qui s'expriment dans notrelangue sur tous les continents, etcontrairement à ce que j'entendsdire, ce nombre ne cesse de s'ac-croître. Il y a 900 000 professeursde français qui enseignent chaqueannée notre langue commune,dans le monde à plus de 50 mil-lions d'élèves. Et si la faiblessede la Francophonie, c'était qu'elleest la seule à ignorer sa force ?Une espèce de complexe tout àfait hors de situation, hors desréalités, qui fait qu'on est tou-jours prêts à s'excuser, alors quec'est un succès. Jamais, je l'af-firme, dans le passé, autantd'êtres humains ne se sont expri-

més en français ! Jamais la de-mande de français n'a été sigrande ! Et pourtant un sentimentd'inquiétude existe : le françaisest menacé ! »

Diplomates sermonnés

Le président de la République amême envoyé à ce propos un"message" aux diplomates – et parextension à tous les hommes po-litiques et à tous les fonctionnairesfrançais - : « La Francophonie estpour la diplomatie française unepriorité, encore faudrait-il quetous les diplomates français ycroient. Je le dis, j'en vois tantqui sont tellement heureux deparler anglais ! [...] Si eux-mêmesne parlent pas le français, pour-quoi voulez-vous que les autresle fassent ? Donc, là aussi, c'esttrès révélateur, une sorte de sno-bisme dont on peut penser qu'ilest assez partagé. » Nicolas Sarkozy a aussi rappelé –en présence de l'intéressé – queJean-Pierre Raffarin, son déléguépersonnel auprès de la Franco-

phonie, était « monté au front,à Genève et à Vienne, pour de-mander que le statut du français,l'autre langue de travail de l'ONUet de l'Union européenne, soitstrictement respecté. Nous ne de-mandons rien d'autre que l'appli-cation stricte des règles, pointfinal. Si nous ne le demandonspas, qui le fera à notre place ? »

Des promesses...

Cette déclaration, bienvenue, nesaurait faire oublier le vote, en2007, par les députés et les sé-nateurs français, du "protocole deLondres" qui permet aujourd'hui,en France même, qu'un brevet soitdéposé en anglais ou en allemand,enterrant ainsi l'ordonnance sé-culaire de Villers-Cotterêts. Leprésident de la République, aprèsavoir appelé les gouvernementsdes États francophones à parlerle français dans les institutions in-ternationales et à « être les am-bassadeurs de l'intransigeancefrancophone », a souligné qu'unepetite concession en entraînantune autre sur la pente fatale del'abandon il lui paraissait « inac-ceptable que des contingents del'ONU déployés dans les pays fran-cophones ne comprennent pas unmot de notre langue. [...] Com-ment peut-on faire un travail ef-ficace dans ces conditions ? » Ni-colas Sarkozy a poursuivi son al-locution en engageant les paysfrancophones et la Francophonieà mener une action politique co-hérente pour peser plus efficace-ment à l'ONU et dans les institu-tions internationales afin de faireplus efficacement « rayonner laFrancophonie ».Reste maintenant à savoir si lesactes à venir suivront ces bellesparoles, en rupture avec le dis-cours des années récentes. On adéjà suffisamment constaté la fa-cilité avec laquelle l'actuel pré-sident de la République changede priorités avec les saisons pouravoir quelques raisons de s'in-quiéter sur la pérennité des vo-lontés qu'il vient d'affirmer. Etmême s'il faisait, cette fois,preuve de constance, le dangerd'un revirement n'en disparaitraitpas pour autant : moins de deuxans nous séparent d'élections qui,si elles changent les hommes,peuvent remettre en cause cettepolitique à long terme. La Répu-blique rend bien fragiles les pro-messes les plus solennelles ! n

Arnaud Danloux-Dumesnils

o 40e ANNIVERSAIRE

La Francophonie est une forceL'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), créée à Niamey (Niger) en mars 1970, réunitaujourd'hui soixante-dix États. Son anniversaire sera-t-il le point de départ d'un nouveau rayonnementde notre langue dans un monde où la domination de l'anglo-américain est en régulière expansion ?

» L'OIF EN CHIFFRES

Un membre de l'ONU sur troisest membre ou observateurde l'OIF. Les soixante-dix Éatset gouvernements (cinquante-six membres et quatorze ob-servateurs) rattachés à l'OIFcomptent 870 millions d'habi-tants dont 200 millions defrancophones. Le français estla langue officielle de trente-deux des soixante-dix Étatsmembres de l'OIF. 900 000professeurs de français ensei-gnent notre langue à 50 mil-lions d'élèves dans le monde.

Des Mots d'orLa semaine de la Francophoniea été l'occasion de remettreaux lauréats des Mots d'or dufrançais leurs diplômes etleurs prix au cours de deuxcérémonies qui se sont dérou-lées l'une à l'OIF et l'autre auministère de l'Économie et desFinances, à Bercy.

Organisés par l'APFA (Actions pourpromouvoir le français des af-faires) depuis vingt-deux ans, lesMots d'or du français des affairessont destinées à encourager desprofessionnels ou de jeunes étu-

diants qui font preuve de créati-vité ou de maîtrise dans l'usagedu français, en particulier dansles domaines économique, finan-cier et industriel.Cette année quinze étudiants,tous venus de pays différents,principalement francophones,étaient distingués. Outre deslivres et des dictionnaires, leursprix comportent le voyage et unesemaine de séjour touristique etculturel à Paris. Les cérémoniesont comporté plusieurs interven-tions sur l'enrichissement de notrelangue par la création de néolo-gismes, conformes à l'esprit dufrançais, destinés à qualifier lescréations liées aux techniques

nouvelles ou à remplacer les en-vahissants mots franglais ou issusdes langues anglo-saxonnes. Au fil des années, l'APFA a ainsidéfini et publié plusieurs centainesde termes recommandés dontbeaucoup ont connu la consécra-tion en entrant dans le langagecommun. Cette action est menéeen concertation avec celle de laCommission de terminologie et denéologie et sous le patronage dela Délégation générale à la languefrançaise. Les mots ainsi définissont publiés au Journal Officielet s'imposent alors aux fonction-naires... Hélas, les journalistes oules hommes politiques, ne s'envoient pas imposer l'usage et, pour

les fonctionnaires, notamment lesenseignants, les sanctions sontquasi inexistantes ou jamais ap-pliquées.Les actions menées par Jean-Mar-cel Lauginie, président de l'APFA,n'en sont pas moins exemplaireset contribuent à la pérennité età la vitalité de la langue. L'APFAn'est bien évidemment pas la seuleassociation méritant respect dansce domaine, avec des moyens etdes méthodes différentes on peutaussi citer l'ASSELAF (Associationpour la sauvegarde et l'expansionde la langue française), ALF (Ave-nir de la langue française) et DLF (Défense de la langue fran-çaise). n A.D.-D.

Nicolas Sarkozy et Abdou Diouf (photos A.D.-D.)