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Louis Perrois L'Afrique équat o riale atlantique .. Paysages et milieux L'Afrique équatoriale, sur sa fasade atlantique, comprend le Sud du Cameroun, la Guinée équatoriale, le Gabon et le Congo. C'est le domaine de la grande forêt, appelée c( rain forest D en raison de son atmosphère constamment chaude et humide. Bien entendu, sur le terrain, il faut nuancer cette vue générale : on s'apergoit alors que des milieux très spécifiques et différents se juxtaposent dans ce vaste complexe du bassin de l'Ogooué. A l'ouest, ce sont les lagunes et les lacs (de l'estuaire du Gabon au delta de l'Ogooué et aux côtes basses de Setté Cama), avec de vastes zones maréca- geuses interstitielles; à l'interieur, plusieurs zones de hauts plateaux et de montagnes couverts de grande forêt se succèdent; enfin, quelques vallées délimitent des plaines à savanes dégagées, coupées de galeries forestières (Ngounie, Haut-Ogooué) . Les paysages ne'sont donc pas aussi uniformes qu'on pourrait l'imaginer, sauf dans la partie forestière proprement dite qui constitue un bloc homogène seulement édairci par endroits par les troués des rivières aux berges inaccessibles. La côte est partout très basse, la plage étroite débouchant sur des zones inondées la mangrove prolifère. La forêt est plus ou moins dense: à l'ouest elle a été relativement occupée surtout le long des rivières, c'est de la (( forêt secondaire B avec une végétation touffue de re- pousse; dans le centre et l'est, c'est de la (( forêt primaire )> de haute futaie avec un sous-bois étonnamment clair, toute la faune s'étant plutôt installée en haut de ces immenses arbres. Certaines régions forment un contraste inattendu : les collines her- beuses de l'Okanda au-dessus de la bouche de l'Ogooué et celles du Haut-Ogooué, entre Moanda et Franceville; plus à l'est, les ((plateaux batéké )) aux immenses éten- dues de sable seulement piquées de graminées éparses et de quelques boqueteaux de loin en loin signalant les villages. Les variantes climatiques, dans une constante chaude et humide, sont sensibles avec une forte pluviométrie au nord-ouest (Douala, Bata, Libreville) et des zones moins arrosées dans les vallées .de -€'.intérieur,-les-hauts plateaux et les montagnes restant souvent dans un brouillard épais que seule la chaleur de l'après-midi pardient à dissiper. Le climat, aux saisons peu parquées, propice à une végétation luxuriante, de développement très rapide et parfois de dimension impressionnante, n'est pas favora- ble à l'homme ni pour l'agriculture, en raison de la fragilité des sols qui, à peine défrichés, se stérilisent en peu d'années, ni pour les communications, les seules voies .possibles ayant été longtemps les rivières et quelques sentiers de chasse. On comprend dès lors que les modes de vie, dans le domaine économique.mais.aussi . y 'I . dans celui des structures sociales, soient restés liés aux groupes familiaux lignagers;. ..- ., : ... aucun ensemble plus organisé, (chefferie ou royaume) n'ayant pu'se structurer dans. ::.y ... un tel contexte, Les (( royaumes >> côhers (des Douala ou des.Mpongwé par exemple). ' . '.. . 3. ' , . . . I . . * . - . , . n'étaienten réalité que de gros villages sans extension territoriale. , . En-bref, à part quelques vallées côtières dont celle de la Sanaga au Cameroun' (limite, septëntrionale de la forêt dense) et du Niari au Congo, tout l'espace s'organise à pafir . du bassin de l'Ogooué avec ses multiples ramifications dont on a longtemps pensé : qu'il donnait accès au cœur de l'Afrique centrale avant de découvrir le Congo. . .. Les peuples : histoire et modes de vie L'cc histoire )> des peuples de l'Afrique noire, longtemps occultée parce que conservée dans la seule mémoire orale des nganga, les initiés et les chefs, est surtout une histoir des migrations dans la mesure tous ces groupes ont été longtemps semiznomade

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Louis Perrois

L'Afrique équat o riale atlantique

. . Paysages et milieux

L'Afrique équatoriale, sur sa fasade atlantique, comprend le Sud du Cameroun, la Guinée équatoriale, le Gabon et le Congo. C'est le domaine de la grande forêt, appelée c( rain forest D en raison de son atmosphère constamment chaude et humide.

Bien entendu, sur le terrain, il faut nuancer cette vue générale : on s'apergoit alors que des milieux très spécifiques et différents se juxtaposent dans ce vaste complexe du bassin de l'Ogooué. A l'ouest, ce sont les lagunes et les lacs (de l'estuaire du Gabon au delta de l'Ogooué et aux côtes basses de Setté Cama), avec de vastes zones maréca- geuses interstitielles; à l'interieur, plusieurs zones de hauts plateaux et de montagnes couverts de grande forêt se succèdent; enfin, quelques vallées délimitent des plaines à savanes dégagées, coupées de galeries forestières (Ngounie, Haut-Ogooué) .

Les paysages ne'sont donc pas aussi uniformes qu'on pourrait l'imaginer, sauf dans la partie forestière proprement dite qui constitue un bloc homogène seulement édairci par endroits par les troués des rivières aux berges inaccessibles. La côte est partout très basse, la plage étroite débouchant sur des zones inondées où la mangrove prolifère. La forêt est plus ou moins dense: à l'ouest où elle a été relativement occupée surtout le long des rivières, c'est de la (( forêt secondaire B avec une végétation touffue de re- pousse; dans le centre et l'est, c'est de la (( forêt primaire )> de haute futaie avec un sous-bois étonnamment clair, toute la faune s'étant plutôt installée en haut de ces immenses arbres. Certaines régions forment un contraste inattendu : les collines her- beuses de l'Okanda au-dessus de la bouche de l'Ogooué et celles du Haut-Ogooué, entre Moanda et Franceville; plus à l'est, les ((plateaux batéké )) aux immenses éten- dues de sable seulement piquées de graminées éparses et de quelques boqueteaux de loin en loin signalant les villages.

Les variantes climatiques, dans une constante chaude et humide, sont sensibles avec une forte pluviométrie au nord-ouest (Douala, Bata, Libreville) et des zones moins arrosées dans les vallées .de -€'.intérieur,-les- hauts plateaux et les montagnes restant souvent dans un brouillard épais que seule la chaleur de l'après-midi pardient à dissiper. Le climat, aux saisons peu parquées, propice à une végétation luxuriante, de développement très rapide et parfois de dimension impressionnante, n'est pas favora- ble à l'homme ni pour l'agriculture, en raison de la fragilité des sols qui, à peine défrichés, se stérilisent en peu d'années, ni pour les communications, les seules voies

.possibles ayant été longtemps les rivières et quelques sentiers de chasse. On comprend dès lors que les modes de vie, dans le domaine économique.mais.aussi . y 'I .

dans celui des structures sociales, soient restés liés aux groupes familiaux lignagers;. ..- ., : ...

aucun ensemble plus organisé, (chefferie ou royaume) n'ayant pu'se structurer dans. ::.y . . . un tel contexte, Les (( royaumes >> côhers (des Douala ou des.Mpongwé par exemple). ' . '..

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En-bref, à part quelques vallées côtières dont celle de la Sanaga au Cameroun' (limite, septëntrionale de la forêt dense) et du Niari au Congo, tout l'espace s'organise à paf i r .

du bassin de l'Ogooué avec ses multiples ramifications dont on a longtemps pensé : qu'il donnait accès au cœur de l'Afrique centrale avant de découvrir le Congo.

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Les peuples : histoire et modes de vie

L'cc histoire )> des peuples de l'Afrique noire, longtemps occultée parce que conservée dans la seule mémoire orale des nganga, les initiés et les chefs, est surtout une histoir des migrations dans la mesure où tous ces groupes ont été longtemps semiznomade

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------7 ans des

C’est le recueil et l’analyse des traditions orales des groupes aujourd’hui identifiés qui a permis d‘esquisser les grands traits d‘une histoire. L‘étude des langues (dont on peut apprécier la proximité relative) et des institutions a contribué également à la reconstitution des civilisations passées.

En l’état actuel des connaissances (encore très fragmentaires) on peut distinguer trois grandes périodes dans l’histoire des peuples de l’Ogooué :

ques, en tout cas toujours apologétiques, qui font venir les peuples actuels, les uns du Moyen-Cameroun, du sud du Tchad et du Soudan occidental, les autres de la Sangha et du nord de la boucle du Congo, d‘autres encore des régions méridionales de Cabinda et de l’Angola; - les migrations des X V I ~ et XVII~ siècles I?) qui concernent les groupes kota et

mbété dont on a pu localiser l’origine vers l’Oubangui; - la migration fang, la dernière connue et observée au XIX siècle, qui a conduit

plusieurs courants de population, par petits groupes, du Moyen-Cameroun à

Ces trois séries de déplacements, aux ramifications extrêmement complexes dans le i détail, ont amené des peuples dont on redécouvre aujourd‘hui la parenté d‘origine,

1 dans des régions plus ou moins vides mais toujours parcourues par les Pygmées Babongo, Bakola, Akowa ou Bekuk, ensuite habitées par des groupes kélé et okandé. *

Si le peuplement ((préhistorique )) du bassin de l’Ogooué est en cours de découverte, il reste un hiatus important entre les occupations de l’âge du fer et celles des peuples connus actuellement. Rien n’exclut un lent phénomène d‘osmose dont les (<migra- tions )) racontées ne seraient que la partie mobile et dynamique intervenant dans un substrat d’origine différente mais autochtone.

Quant à l‘histoire des contacts, des conflits, des catastrophes, toute la trame de la vie même des civilisations, seule l‘anthropologie peut en reconstituer la dernière partie, entre 1850 et 1920; plus loin dans le temps, la tradition se transforme vite et souvent disparaît.

La parenté culturelle des peuples de l’Ogooué et plus largement de ceux de la forêt équatoriale atlantique, de Douala à Yaoundé au nord à Pointe Noire au sud, de la côte gabonaise aux confins de la Likouala au Congo, apparaît avec netteté en comparaison avec les ensembles voisins, Ouest-Cameroun et Adamaoua, Centrafrique et Moyen- Congo. On ne peut dire si c’est le milieu forestier ou une origine plus ou moins commune qui a conditionné cette relative uniformisation.

Les villages de forêt se ressemblent tous, les cases plutôt petites, rectangulaires avec un toit à deux pans faits de feuilles cousues, alignées de part et d’autre du sentier (maintenant de la piste carrossable ou de la route) élargi en cour. Au siècle dernier, ces villages étaient fortifiés par des palissages et des lignes de pièges, les issues barrées par

L‘économie traditionnelle des peuples forestiers, sur la côte comme à l’intérieur, est étroitement conditionnée par le milieu hostile dans lequel ils doivent vivre: c‘est une économie rurale de subsistance où la chasse, la pêche en rivière et la cueillette avaient une importance prépondérante par rapport à la culture qui se pratiquait dans de petites plantations situées autour du village. Quand les sols étaient jugés trop infertiles, le gibier trop rare ou les lieux infestés d’esprits mauvais, le chef décidait de partir avec tous les siens pour s’installer ailleurs, à plusieurs jours de marche, Ià où on voudrait bien le tolérer ou là où i1 pourrait imposer une présence nouvelle.

Autre constante régionale, les structures sociales et politiques traditionnelles qui ont pour seul niveau de réalité le village et les lignages qui le composent. Ces familles, dont les <( chefs )) n’avaient pas beaucoup d’autorité, vivaient de manière très égalitaire dans un tissu de compensations réciproques qui concernaient tout le monde.

Dans une telle organisation, la parenté avait et a encore un poids déterminant en tout. Le système de parenté est classificatoire, c’est-à-dire que les parents sont identi- fiés et considérés au point de vue relationnel, par niveaux de générations par rapportà l‘individu. Par exemple la <( mère )) et les <( tantes )), soeurs ou cousines de la mère, sont donc toutes des amères N avec les mêmes devoirs et comportements envers tous les enfants de la génération d’après, pour leurs propres enfants comme leurs neveux et

I r c - les migrations anciennes, connues par les seules traditions, plus ou moins mythi-

l‘Ogooué.

, 1

. des <( corps de garde )) constituant à la fois les lieux de réunion et de vie des guerriers.

192 Louis Perrois

Fig. 42 Masque fang récent rappelant ceux de la société initiatique du So photographik en 1907 par G. Tessmann. (Photo: Agence Hoa-Qui, Paris)

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Fig. 43 Village fang au siècle dernier. Au centre, le corps de garde ou (c maison à pala- bres )>. (De: Le Tour du Monde, 1878, II,

nièces. Le système de descendance peut être matrilinéaire (les Myéné par exemple) ou patrilinéaire (les Fang).

Transverses aux groupes familiaux, les (( sociétés D initiatiques rassemblent des .. "-91 . r . _11 *. . . . . Ir- 41Jj Fig. 44 quaires vus par Brazza chez les Ondoumbo (Mindoumou) de la rivière Mpassa, affluent du Haut-Ogooué. A noter la présence de figures de reliquaires aux visages de petite taille, semblables à ceux découverts chez les Sango et les Duma vivant plus à l'ouest. (De: Le Tour du Monde, 1878, II, p. 328)

Construction légère abritant des reli- hommes ou des femmes du village pour accomplir tout ce qui a trait aux initiations et aux thérapies par la maîtrise des forces de l'au-delà et de la nature (médecine natu- relle, magie et sorcellerie).

Au Centre-Gabon, la société du Bwiti est réservée aux hommes. Les initiations; pénibles mais facilitées par l'absorption de l'iboga, une plante hallucinogène mainte-. nant connue aussi bien des Tsogo et Sango que des Fang, conduisent par degrés successifs à la connaissance de l'homme et du cosmos, la vie et la mort, la réalité et l'au-delà, tout ce qui est important dans le fonctionnement de la société. Tous les hommes ne deviennent pas povi (les maîtres du temple ébandzn), certains seulement- accèdent plus ou moins jeunes à ce grade, les autres restent des initiés ordinaires,;. nyimannkomvé, beaucoup devant se contenter d'assister aux cérémonies. Dans cha- ,. que région existent de telles sociétés, les unes masculines (NgiZ et So des Fang et Béti I du Cameroun et du Nord-Gabon, fig. 42; Mwiri des Sango et Shira; Mungala et Ngoy des Kota, Ndjobi des Obamba), les autres féminines, (Ndjembè des Myènè,< Ombwiri des Lumbo, Lisimbu des Kota, etc.).

Les peuples de l'Afrique équatoriale sont très religieux et imprégnés de la nécessité pour l'homme d'avoir un dialogue constant avec l'au-delà et les défunts.

Le culte des ancêtres, atte+ partout, était pratiqué à la fois au niveau de la famille (lignage) et au niveau des Sociétés d'initiation. Les ossements des défunts illustres (chefs, grands initiés, femmes prolifiques, etc.) étaient prélevés après la mort, net- toyés puis gardés comme reliques dans des boîtes en écorce ou des paniers de vannerie, le plus souvent surmontés d'une ou plusieurs figurines sculptées anthropomorphes qui sont parmi les chefs-d'czuvre de l'art africain (statuettes masculines ou fCminines du Byéri chez les Fang; effigies plaquées de cuivre Mbultr-Ngulu chez les Oba&ba;

Le sacré est donc partout, souvent caché sous des symboles déchiffrables par les seuls initiés. Rien n'est dû au hasard, tout doit s'expliquer, la chance comme Ia., malchance, la réussite comme le malheur, la naissance comme la mort'. Esprits fam{z I

liers, esprits des ancêtres ou monstres effrayants de la.nature, fantômes de défunts mécontents ou double exigeant des vivants, l'immense foule des ombres est omnipré- sente dans l'univers des vivants. D'oh la grande importance de la divination, des '

pratiques parapsychologiques et souvent de la sorcellerie. L'art, jamais p e r p comme tel ni par ses créateurs ni par ses utilisateurs, la sculpture

tout particulièrement, participe de cet Clan mystique constamment renouvelé, dans la mesure où il est un des supports privilégiés des symboles qui expriment partout les croyances animistes.

petits bustes Mbumba chez les Sango (fig. 44). ' . . .

L'Afrique kquatoriale atlantique 193 :

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Les arts plastiques du Sud-Cameroun et du Gabon *

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Bien qu’il soit toujours artificiel de délimiter de grandes zones

*#

. stylistiques, on peut estimer logique de rattacher les cultures de l’ouest-Cameroun au vaste complexe du Sud-Nigeria, d’inclure celles de la forêt sud-camerounaise depuis le mont Cameroun à l’ensemble céquatorCa1 atlantique)) et de relier celles de la rive droite du Congo à la mosaïque des arts du Zaïre.

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Le littoral camerounais: LES DOUALA

Les Douala sont installés depuis fort longtemps à l’embouchure du Wouri, non loin du mont Cameroun, dans une région de forêt et de marécages où les pluies sont extrêmement abondantes presque toute l’année. Ils sont organisés en chefferies comme les peuples des Grasslands, mais avec déjà des caractéristiques de populations

-, plus méridionales, de prépondéranoe lignagère. Plusieurs groupes leür sont apparentés tels les Koko et les Bassa de la basse Sanaga. De fait, on ne connaît d‘objets sculptés que des Douala proprement dits ce qui n‘exclut pas qu’on- découvre un artisanat et une sculp- ture bassa.

Les Douala sont des piroguiers’ habiles : l’estuaire très large du Wouri se prêtait bien aux courses gui étaient organisées lors des grandes fêtes annuelles. Les longues pirogues monoxyles étaient ornées de hautes figures de proue dont la sculpture en réserve permettait d’exprimer de véritables historiettes de bois peint. Autre production remarquable, les masques polychromes à cornes, dont un exemplaire figure dans ce livre, très stylisés mais riche- ment décorés de frises géométriques. L’art du littoral sud-came- rounais est encore mal connu, en lui-même et dans ses rapports avec les styles béti voisins.

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11s Masque de danse Douala, Cameroun

Bois polychrome noir, rouge et blanc, langue en fer; hauteur: 76 an

La sculpture douala n'est connue en Occident que par les figures de proue et les pagaies de pirogues de course et quelques masques àcornes polychromes, dont celui-ci est un exemple tout à fait remarquable.

Le thème du bovidé (et de l'antilope-cheval dans la zone forestiere) est très répandu au Ca- meroun, surtout dans l'Ouest et le Nord-Ouest, la région des Grasslands. Chez les Douala, il est trait6 de fason très géometrique voire stylisée.

Comme Philip Fry, on peut considérer que ((la peinture des surfaces sculptées est, en Afrique, un élément de la conception globale de l'œuvre et non une simple <décoration > 'D.

Dans ce masque de danse, il est clair que le ((décor )) peint, constitué de plusieurs éléments superposés en frise sur la face de l'animal et re- pris sur les comes, soutient les formes et en dé- veloppe l'impact symbolique.

Du point de vue de la conception des volumes, la tête de l'animal est traitée en trapèze avec des oreilles en oblique très amples, toute cette partie du masque étant une harmonie de droites et d'obliques en faisceau qui s'oppose à la courbe des comes en berceau, aux yeux ronds et aux motifs plutôt circulaires des frises décoratives.

Le rôle de ces masques n'est pas connu dans le détail; toutefois on estime qu'ils participaient de la puissance et du prestige des chefs tradition- nels. Si les figures de proue sont toujours très anecdotiques et réalistes, les masques restent beaucoup plus énigmatiques avec un décor com- plexe de signification esthético-symbolique.

LP

Lit. : Fry 1970

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+ - ~. t 3

I : > Les Béti et les Fang du Sud-Cameroun, de la Guinée équatoriale et du Gabon

Les (< Fang N constituent un vaste ensemble de peuples qui occupe aujourd’hui toute la région comprise entre Yaoundé au Cameroun et Lambaréné au Gabon. Au total, ils sont probablement plus d’un million (fig. 45).

Les Fang proprement dits ne sont qu’un seul de ces groupes dont les principaux sont: au nord, les Béti parmi lesquels les Ewondo, les Eton et les Bané, puis les Bulu dans la région de Sangmélima; les Ngumba vers Lolodorf; les Mabéa sur la côte au Sud de Kribi; les Mvaï dans la vallé du Ntem tant au Cameroun qu’au Gabon; les Ntumu sur la rive droite du Woleu (en Guinée équatoriale e t au Gabon vers Oyem), les Okak au Sud de la Guinée équatoriale; les Mékény dans la région de Medounen dans les Monts de Cristal; enfin les Bétsi au Gabon, de l’estuaire à Ndjolé sur l‘Ogooué, et les Nzaman vers 1’Ivindo.

Les Béti et les B u h n’ont laissé qu’une production mineure par . , rapport à celle des Fang méridionaux. Quelques groupes ont en

r.éalité été (<pahouinisés )) (on a appelé longtemps les Fang, ‘Y( Pangwe )) en allemand, ou (<Pahouins )) en franrais), comme cer-

’ . . . . .. ’ tains. .Maka qui sont devenus par assimilation les Ngumba et les .,. Mabéa. On ne sait pas cependant dans quelle proportion les styles . plastiques qu’ils ont développés, sont plus maka que fang.

En raison de la dispersion des villages, maintenant fixés, après plus de deux siècles de marche à travers la grande forêt, il est certain que sur place, ces divisions, qui sont pour nous commodes, restent très floues et ne constituent jamais des limites nettes. Les entités tribales s’interpénétraient largement dans un mouvement continu de progression vers le sud-ouest et la mer. Toutefois, dans chacune des grandes régions, ces pôles ethniques existent en tant que tels avec des caractéristiques culturelles tout à fait précises (par exemple le développement plus ou moins attesté des rituels du So, du Mélan ou du Byéri).

La statuaire liée au culte des ancêtres du Byéri est la principale expression sculpturale des Fang, (fig. 45) chaque groupe lignager ayant une ou plusieurs statuettes qui (( gardaient )) les reliques des défunts importants du groupe. D’autres figurines, plutôts ani- males, étaient taillées pour des rituels comme ceux du So des Béti.

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La statuaire fang se divise en deux grands styles, d‘une part les style des Fang du Nord où l’analyse morphologique fait constater une tendance à l’allongement des formes; d‘autre part le style des Fang du Sud, de tendance breviforme avec des volumes beaucoup plus massifs. I1 faut comprendre ces styles commes des ((pôles )) de tendances volumétriques différentes et non comme de5 ensembles de normes strictes, d’où l’abondance des formes de transition, consécutives à la fluidité sociale et culturelle de tous ces groupes en déplacement permanent.

Plusieurs sous-styles ont pu être déterminés, qui correspondent à la situation géo-culturelle de la fin du X E e siècle:

Style de Fang du Nord

- sous-style ngumba (Sud-Cameroun, vers Lolodorf) - sous-style mabéa (Sud-Cameroun, Kribi) - sous-style ntumu (Sud-Cameroun vers Ambam, Nord de la Gui-

Style des Fang du Sud

- sous-style des têtes seules betsi (vallées de I’Okano, de l’Ogo?ué

- sous-style nzaman-betsi (vallées de I’Okano, de l‘Ogooué et de

- sous-style mvaï (vallée du Ntqm) - sous-style okak (Sud de la Guinée équatoriale)

Les statues du Sud-Cameroun, du Nord-Gabon e t du Nord-Est de la Guinée équatoriale sont identifiables à leur tronc mince et élancé (souvent en forme de bouteille avec u n ventre proéminent et un nombril en cheville) auquel sont attachés des membres plutôt grêles et bien détachés du corps. La tête est de volume sphérique avec un front bombé très ample qui surplombe une face en cœur dont les lignes de fuite convergent vers une bouche mince qui fait la moue, sans menton. La coiffure est soigneusement représentée, soit u n casque à crête centrale, soit des tresses verticales pendant de chaque côté et derrière la tête; o n note dans le sous-style ngumba

née équatoriale, Nord du Gabon)

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Fig. 45 Centre d‘information missionnaire, Paris)

Guerriers fang. (Photo: Archives du

196 L’Afrique équatariale atlantique

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une utilisation systématique du métal (souvent des plaquettes de fer battu, parfois du laiton) comme élément de décor du visage et de la poitrine.

Le sous-style ntumu se distingue, des formes ngumba par ses volumes plus curvilignes et un velouté des surfaces qui atteste le souci de finition des artistes.

Au Gabon et au Sud de la Guinée équatoriale, on a trouvé des objets de volumes beaucoup plus trapus: ce sont des statuettes de formes compactes et puissantes, au tronc large avec des bras collés au corps, aux jambes massives et repliées qui donnent une impres- sion de monumentale robustesse. Les membres sont toujours traités de la même fagon avec de forts reliefs musculaires au niveau des biceps et des mollets.

Les statuettes nzaman-betsi et okak, avec quelques variantes de détail comme celle des Mvaï (caractérisée par une tête très grosse pourvue d'une coiffe à trois crêtes et un ventre scarifié de motifs triangulaires), s'opposent donc aux objets n tumu sans en être fon- damentalement différents.

L'opposition entre les styles du Nord et du Sud (selon la situa- tion des groupes au X I X ~ siècle, l'articulation géostylistique anté- - rieure devait être différente) apparaît comme une évidence à l'é- tude ethno-morphologique de grandes séries d'objets, sans limiter le nombre des variantes significatives qui attestent la liberté rela- tive des artistes dans le cadre d'une tradition beaucoup plus souple qu'on ne l'imagine, pourvu que le message symbolique puisse être compris des initiés.

Tous les groupes fang, outre une statuaire et un ar t mobilier abondant (cannes de chef, tabourets, Cléments d'architecture, cuil- lers et récipients, etc.), ont également fasonné des masques, géné- ralement utilisés par les sociétés d'initiation telles que le Ngil, le So ou plus récemment le Ngontnng.

Schématiquement, d'après les objets connus dans les collections et les enquêtes de terrain, on peut classer les masques fang en quatre catégories: - les masques de la société NgiI, grands masques blancs allongés, à

la face étirée pourvue d'un long nez et d'une bouche minuscule, attributs des justiciers du Ngil, toujours à la poursuite des sor-. ciers ou autres déviants sociaux à éliminer;

- les masques polychromes à comes du So, que G. Tessmann a pu voir en 1907 chez les Ntumu du Sud-Cameroun. Ces masques

- les masques blancs ngon ntang (c'est-à-dire R la tête de la jeune fille blanche )>) dont on connaît des variantes anciennes à un seul visage (certains ont été rapportés à Lübeck par Tessmann), d'au- tres à deux ou plus tard à quatre visages. La couleur blanche est la couleur des morts et le masque représentait l'esprit d'un dé- funt revenu parmi les vivants pour les protéger des actes maléfi- ques des sorciers. Aujourd'hui, cette danse n'est plus considécée comme un rituel religieux, elle est devenue une manifestatïon folklorique;

- enfin les masques caricaturaux qui, d'un expressionnisme éche- velé, avec des arcades sus-orbitales énormes et un nez proémi- nent, personnifient une sorte de croquemitaine effrayant appelé Bikeghe ou Bikereu, parfois Ekekek ou Okukwé dans la région de Lambaréné. LP

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sont les plus anciens connus des Fang; . .

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L'Afrique tqiiatoriale atlantique 197

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120 Sommet de reliq R:omnn-Betsi (Fang), G

198 L'Afrique équatoriafe atlnntique ''

L'antériorité chronolog têtes seules fang sur le:

pu être démontrée. (

l'on a trouvé de tels ob bon qu'ailleurs, dans L maire était aussi pratiqt deux thèmes, la tête se ont coexisté, tout au mo

Cette tête est omée tresses pendantes verti, très aplatie sur l'arrière I

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119 Statue d'ancêtre Mabén (Fang), Cameroun

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Le bois, dense et trè un liquide résineux et c brillance particulière a

Les têtes seules con

Bois mi-lourd, patine rouge brillante pour le COTS. L~~ cheveux sont teintés en noir. Bracelets en métal à u n poignet et auxchevilles; hauteur: 7 0 m

Les peuples côtiers du Sud-Cameroun, de la ~ ~ i - née équatoriale continentale et du Gabon jusqu*à Libreville vivent dans la mouvance culturelle des Fang mais ne sont pas ethniquement ni linguisti. quement des Béti ou des Fang.

Les Mabéa de Kribi, Lobé, Masuma et Campo sont un groupe avancé de la migration maka ve- nue du Sud-Est du Cameroun. Ces déplacements ont été provoqués par les Baya, eux-mêmes bousculés par les Foulbé. L'avancée des Béti et des Fang (Ntumu, Mvaï, Okak, Bétsi pour ne citer que les grands sous-groupes) ne s'est faite que plus tard: elle a submergé ou repoussé plu- sieurs populations installees qui, de l'intérieur, se sont retrouvées acculées à la côte jusqu'à l'es- tuaire du Gabon [les Benga par exemple, d'on- gine probablement kota). Les Béti-Fang ont ainsi imposé leur culture et leurs modes de vie, pfus difficilement leurs langues, chez des peuples aussi divers que les Ndzem, les Ndzimu ou les Ngumba.

Dans l'état actuel des connaissances (docu- mentation, archives et terrain), il est difficile de faire la part des éléments préexistants (maka pour les Ngumba et les Mabéa) et importés par les Fang dans la mesure oh l'on n'a pas pu identi- fier d'objets maka, ndzem ou benga pour ne prendre que ceux-là:

La statue féminine d'ancêtre de la collection de Josef Müller est un exemple particulièrement réussi de la sculpture sud-camerounaise au XIXI siècle dont on ne connait finalement que peu d'objets. Elle a été recueillie chez les Mabéa qui avaient déjà adopté les croyances du Byfri.

Les caractéristiques morphologiques de ce sous-style sont maintenant bien connues: bois à patine claire (ici rougeátre, à l'opposé des Biyfma-o-byéri ntumu ou bétsi toujours de pa- tine très foncée, brune ou noire), de surfaces non suintantes; téte de proportions réduites (à com- parer à celles des Bétsi, beaucoup plus impor- tantes) avec le visage projeté vers l'avant, une coiffure-casque formant une sorte de bonnet à coques, le front bombé, la face à peine creuse mais fendue d'une bouche très large avec des dents apparentes; les épaules modelées de facon réaliste avec des omoplates figurées et au recto, des salières daviculaires; des bras énormes et quelque peu disproportionnés avec les mains lar- gement ouvertes, les paumes tournées vers les cuisses; des jambes aux cuisses et mollets puis- sants. Beaucoup de ces statues mabéa, en compa- raison des objets ntumu, bulu, okak et surtout bétsi, sont assez grandes. Le décor est très sobre, à peine des bracelets de bras et de cheville.

Le sous-style mabéa est donc tout à fait parti- culier et bien reconnaissable avec ce mélange de réalisme idéalisé et' de schématisme, celui que l'on constate chez les Ntumu du Gabon et de la Guinée équatoriale. 11 a abouti à quelques-uns des chefs-d'ceuvre de la statuaire de l'Afrique équatoriale atlantique. LP

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et les sculptures resci.

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illante pour le corps. Les racelets en métalà un ur: 7 0 m

Cameroun, de la Gui- e et du Gabon jusqu'à ouvance culturelle des iquement ni linguisti- %. ié, kfasuma et Campo la migration maka ve- u n . Ces déplacements es Baya, eux-mêmes L'avancée des Béti et Okak, Bétsi pour ne

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120 Sommet de reliquaire du Byéri Nzaman-Betsi (Fang), Gabon

Bois dur. Yeux faits de dous de laiton. Patine suin- tante; hauteur: 3 6 m

L'antériorité chronologique et stylistique des têtes seules fang sur les bu5tes et les statuettes n'a pu être démontrée. On note simplement que l'on a trouvé de tels objets plutôt au Nord-Ga- bon qu'ailleurs, dans une région où l'art sta- tuaire était aussi pratiqué. II est probable que les deux thèmes, la tête seule et l'ancêtre en pied, ont coexisté, tout au moins au XIXc siècle.

Cette tête est omée d'une coiffure-casque à tresses pendantes verticales (appelées bikoma), très aplatie sur l'arrière du crâne.

Le visage lui-même est d'un volume beaucoup plus convexe avec un vaste front très arrondi et une face creuse plus ou moins en forme de cœur dont l'axe est souligné par un nez long et fin (comme sur les masques fang) surplombant une petite bouche faisant la moue, de facture très caractéristique.

Faite pour être vue de face avec ce visage typé aux yeux cloutés de métal brillant, encadré de ces deux tresses latérales décorées, cette tête peut aussi être vue au verso où l'on décèle un souci décoratif évident dans le traitement de la coif- fure. Là encore, la touffe de plumes (générale- ment des plumes d'aigle et de touraco, noires ou bleues foncé) est absente, seul le trou de fixation rappelle son existence en situation de fonction.

Le bois, dense et très foncé de teinte, exsude un liquide résineux et collant noir qui donne une brillance particulière au front e t à la bouche.

Les têtes seules comme les statues, certaines assez grandes, d'autres petites, étaient exhibées lors des initiations et des rituels propitiatoires du Byéri. En dehors de ces occasions, les reliquaires et les sculptures restaient cachés. LP

L'Afrique éqtiatoriale atlantique 199

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121 Sta tue d'ancêtre du Byéri Ntumu (Fang), Gabon

Bois mi-lourdà patine claire (les jambes sont cassées); hauteur: #un

De proportions longiformes et de visage à front bombé et face en cœur des "mu du Nord- Gabon, cette statuette aux jambes brisées est une figurine rituelle éyéma-6-Lyéri, qui servait au culte des ancêtres à l a fois comme instrument de protection des reliques importantes du lignage (la statue était fixée sur le couvercle de la boîte- reliquaire) et succédané symbolique des crânes lors des cérémonies propitiatoires et d'initiation.

La tête, de très belle facture, est presque sphérique avec un front proéminent et une coif- fure en calotte sans tresse, ce qui est rare dans ce style. Sur le tronc dont le volume cylindrique est caractéristique, sont accrochées de puissantes épaules et des bras aux reliefs musculaires bien marqués, dans une facture fang des plus clas- siques.

Instruments de culte, ces statuettes n'avaient en elles-mêmes qu'une valeur très relative en regard des reliques. On le voit dans les photo- graphies prises par G. Tessmann en 1907 sur les- quelles on distingue très bien les statues laissées à terre dans la poussière alors qu'on tient avec déférence les crânes pour les montrer et les nom- mer aux néophytes. Les rituels du Byéri [appelés aussi Mélan) ont peu à peu disparu dans leur forme licite à partir des années 1910-1920, pour se fondre dans d'autres pratiques moins contes- tées par les autorités officielles. Le Bwiti syncré- tique qui est apparu quelques décennies plus tard a conservé beaucoup d'éléments symboliques du Byéri e t du Mdlan, ce dernier rituel ayant pris une forme de thérapie traditionnelle plus admis- sible. LP

Lit. : Tessmann 1913, II, fig. 47

200 L'Afrique fquatoriale aflaiitique

122 Statue d'ancêtr N ~ U W (Fang), Gabon

B ~ ~ S dur, patine foncée et

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Le sous-style ntum statue se caractérise e longement des forme! accentué selon les pro1 parfois toutà fait extri de la tête avec un Vis i bouche projetée en avi

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Ia, la tête est un courbes et d'axes, de dent des volumes ang dont l'équilibre, mer règle (alors que le SEU

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gnent l'amorce de la du front et signent le (le croissant est sou Ntumu).

A noter, dans cem' décoration métalliqu que celle-u est de rè Sud-Cameroun. Par Byéri étaient ornés surtout de plumes d, ronnait la coiffure-c, d'osierà la crête cen verse. La plupart d'Afrique ont été d' alors que ceux-ci ét très significatifs dan:

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Byéri

i jambes sont cassées);

et de visage à front s Ntumu du Nord- imbes brisées est une ryéri, qui servait au Imme instrument de iortantes du lignage ouvercle de la boîte- mbolique des crânes toires et d'initiation. acture, est presque éminent et une coif- e qui est rare dans ce llume cylindrique est :hées de puissantes efs musculaires bien fang des plus clas-

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122 Statue d'ancêtre du Bykri Ntumu (Fung), Gabon

Bois dur, panne foncée e t brillante; hauteur: 54 cm

Les "mu constituent le groupe fang le plus important de la région sud du Cameroun, de la partie continentale de la Guinée équatoriale et du Nord du Gabon jusqu'à l'Ogooué.

Le sous-style ntumu auquel appartient cette statue se caractérise essentiellement par un al- longement des formes du corps, plus ou moins accentué selon les proportions relatives retenues, parfois tout 1 fait extraordinaire, et le traitement de la tête avec un visage A la face creuse et une bouche projetée en avant.

Dans tous les sous-styles fang, la manière de représenter les bras et les jambes est la même: les muscles paraissent toujours gonflés et contractés, d'autant plus que les biceps ou les mollets sont serrés dans des bracelets. La posi- tion du corps et des jambes en particulier ex- prime une tension contenue mais permanente.

Ici, la tête est un remarquable entrelacs de courbes et d'axes, de sphères auxquelles répon- dent des volumes anguleux, de reliefs et de creux dont l'équilibre, mesurable au compas et à la règle (alors que le sculpteur ne s'est servi que de son œil et de sa main), montre que l'artiste avait une parfaite maîtrise de ses outils (hache, cou- teau, herminette, feuilles abrasives) comme de la matièreà sculpter.

Quelques motifs décoratifs, très peu, souli- gnent l'amorce de la coiffure-casque sur le haut du front et signent les joues en avant des oreilles (le croissant est souvent utilisé chez les Fang Ntumu).

A noter, dans cette région, l'absence de toute décoration métallique (sauf pour les yeux) alors que celle-ci est de règle un peu plus au nord, au Sud-Cameroun. Par contre, tous les objets du Byéri étaient ornés de colliers, de chaînettes et surtout de plumes dont une énorme touffe cou- ronnait la coiffure-casque, attachée par les liens d'osierà la crête centrale percée d'un trou trane- verse. La plupart des objets présentés hors d'Afrique ont été dépouillés de tous ces ajouts alors que ceux-ci éraient des éléments de décor très significatifs dans leur contexte tribal. LP

L'Afrique équatorink atlantique 201

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124 Masque de dans Fang, Gabon ou Guinée

Bois mi-lourd. Le visage e5 hauteur: @cm

Les masques du Ngil fig plus prestigieuses de l’a connaît finalement qu‘L ne sait d’ailleurs pas gr descriptions des rituels ment muettes sur I’asp masques de bois dans ler tiation ou au rétablisserr sait par contre que de gr

123 Masque de danse Fang, Guinée équatoriale/Gabon

Bois leger, peint en blanc (kaolin) et pyrogravé; hauteur: ?.4m

On peut identifier ce masque comme fang bien que sa s t rumre volumétrique et même certains détails comme la coiffure en casquette, la bouche aux lèvres en huit et les yeux à la fente palpé- brale arquée puissent faire penser à un objet de la région de la Ngounié (pounou-loumho).

202 L’Afrique Pqitatoriale otlnntiq~rc

En fait, il faut regarder le masque de trois quarts ou de profil pour retrouver une morpho- logie typiquement fang: la courbure sinueuse de la face, le nez fin et allongé et les lèvres qui font la moue. La coiffure rappelle ce qui avait été observé par les voyageurs du xlxe siècle aussi bien chez les Ntumu de Guinée équatoriale que chez les Bétsi du Gabon. En outre, la scarifica- tion pyrogravée sur le front et le nez, un axe vertical coupant le double arc des sourcils, en noir sur un visage blanchi de kaolin, renforce formellement une identification fang.

Cet objet illustre la réalité de la complexité stylistique des arts africains où bien souvent, dans un ensemble pourtant cohérent, on décèle des apports extérieurs. L’essentiel est de déter- miner quels sont les éléments les plus pertinents en fonction des différents contextes. LP

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ité de la complexité 1 s où bien souvent, : cohérent, on décèle jsentiel est de déter- its les plus pertinents mtextes. LP

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124 Masque de danse du Ngil Fang, Gabon ou Guinée équatonale

Bois mdourd. Le visage est peint en blanc; hauteur: @cm

Les masques du Ngil figurent parmi les pièces les plus prestigieuses de l'art africain mais on n'en connaît finalement qu'un petit nombre dont on ne sait d'ailleurs pas grand-chose. Les quelques descriptions des rituels du Ngil restent quasi- ment muettes sur l'aspect et le rôle exact des masques de bois dans les cérémonies liées B l'ini- tiation ou au rétablissement de l'ordre soaal. On sait par contre que de grandes sculptures de terre battue existaient.

Les masques du Ngir sont de forme différente d e s Ngontang (ils devaient probablement leur être antérieurs): le visage est démesurément al- longé avec un front bombé déterminant parfois une sorte de calotte-heaume permettant au dan- seur d'engager sa tête dans la partie haute du

masque, une face en cmur très étiré dont Ies deux cavités orbitales sont séparées par un nez tres fin et allongé, toutes les lignes de fuite aboutissant à une bouche minuscule aux lèvres faisant la moue.

On constate des variantes 1 ce sch6nu: ici, la bouche est située juste en dessous du nez avec un méplat formant le menton, ce qui raccourcit la perspective habituelle. Les scarifications pyro- gravées sous les yeux et sur les tempes rappel- lent les motifs relevés par Tessmann chez les Ntumu et les Mvai en 1907.

Ces masques, dans cette forme ancienne, ne' ' ' : , sont plus en usage depuis le début du XXe siècle, . ,

mais d'autres types les ont remplacés comme I'Ekekèk [le croquemitaine) ou dans une certaine mesure le Bikegke qui, nous l'avons vu, en sont des variantes dérivées.

A noter dans tous ces styles, l'utilisation de la couleur blanche (le kaolin) qui, dans ces régions, est l'expression a8 la puissance des esprits des défunts.

Lit. : Tessmann 1913 - Ötah 1965

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L'Afrique dquatoriale ntlnntiqifr 203

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125 Masque de danse Bikeglie Fang, Gabon Bois mi-lourd, avec peinture hlanche (kaolin) et noire; hauteur: %cm

Le masque Bikeghe ou Bikerric tel qu'il subsiste aujourd'hui au Gabon, en particulier dans la ré- gion du Moyen-Ogooué, est une forme dérivée des masques d'initiation fang vus par G. Tess- mann vers 1907 en paps ntumu. Les caractéris- tiques morphologiques de ces objets du So ou du Ngil ont é\dué, par une modification progres-

sive de la facture des détails anatomiques, parfois même jusqu'à la caricature, dans un contexte de mutations sociales et religieuses constantes.

Le Bikeglie est à la fois un esprit humain et animal: on reconnaît id la créte sagittale du go- rille, le nez et les moustaches d'un homme blanc, enfin la houche lippue et dentée d'un être mal- faisant.

Ce masque, qu'on a parfois attribué aux Duma de I'OSooué en référence à la forme du nez et du front en surplomb, constitue un type intermé- diaire entre les cultures anciennes du moyen Ga-

bon et les apports plus récents des Fang. Il sert maintenant à animer des manifestations dénuées de toute signification religieuse.

On peut remarquer le contraste entre l'aspect serein de la statuaire fang <(classique* où les attitudes représentées sont toujours très sobres et celui de certains masques où la recherche de l'effet est évidente, le visage du personnage de- vant inspirer le respect sinon la terreur [celle-ci étant le plus souvent feinte, bien entendu,).

LP

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nts des Fang. I1 sert nifestations dénuées Ise. waste entre l'aspect

u classique ;> où les toujours très sobres j où la recherche de

du personnage de- n Ia terreur (celle-ci bien entendu).

LP

126 Masque de danse Fang-Betsi (?), Gabon

Bois léger pyrogravé, peinture blanche (kaolin); hauteur: 31cm

Les lacune; documentaires dans le domaine des masques fang restent importantes tant au niveau des objets connus que de leur environnement socio-religieux. Leur étude stylistique est donc encore très partielle et susceptible d'évoluer.

En raison de sa taille, plutôt réduite, et malgré sa forme allongée, on peut estimer en première analyse que ce masque est une variante du Ngontnng, traitée plus ou moins comme les Ngil

t

anciens. En référence de masques de facture ana- logue recueillis dans les années vingt dans la ré- gion de l'Abanga et de l'Okano, au Nord de la , boucle de l'Ogooué, on peut raisonnablement - . : penser que ce masque provient des Fang-Bétsi. . 1

ainsi que la scarification axiale sont de style Le front bombé comme la Face à peine creuse

fang. Par contre les yeux et la bouche sont traités de façon inhabituelle, de simples trous ronds qui ponctuent le creux des orbites (déter- minées par une ligne en double arc pyrogravé figurant les sourcils) d'une part et l'axe médian dans le prolongement d'un nez fin et allongé d'autre part. LP .

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L'Afrique équatoriafe ntfnntiqrie 205 .

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Les Kwélé

, Les Kwélé du Haut-Ivindo, qui vivent aux environs de Mékambo, sont assez peu connus. Comme les Mahongwé, les Kwélé sont installés de part et d'autre de la frontière qui sépare le Gabon de la République populaire du Congo. Et les deux groupes, de même que

.. les Obamba ou les Kota, seraient anciennement venus du nord-est, c'est-å-dire du bassin de la Sangha.

Dans l'ensemble des arts de l'aire GabodCongo, les productions kwélé restent très minoritaires par rapport aux objets fang, pou- nou-loumbo ou kota.

11 existe des masques animaliers, d'autres humains, e t enfin des masques-heaumes qui ressemblent beaucoup aux emboli des Kota et dont les Mahongwé voisins connaissent une variante, appelée

Selon Léon Siroto, ces masques appartiennent au culte Beete , dont le support est le pouvoir des ossements ancestraux conservés dans des paniers-reliquaires.

((la chouette n.

Lit. : Siroto 1969,1979

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. .

206 L'Afrique Cquatorinle atlantiqlre

_ _ AMV

127 Petit masque de danse Kwélé, Gabon

Bois mi-dur, peint en noir et blanc (kaolin); hauteur: 38cm

Des Kwélé, on connait surtout des ((masques )) dont la plupart n'ont pas dansé soit que ces vi- sages de bois aient été faits pour un autre usage, soit que les vrais masques soient restés cachés aux Blancs trop curieux. Parmi ces figures, il y a plusieurs masques d'antilope à comes verticales ou à peine courbées, probablement lios à des ri- tuels animistes évoquant les esprits de la forêt - on connaît mal les croyances h é l é mais on pense évidemment à certains masques à cornes des Fang du rituel So (l'antilope rouge) qui intervenaient dans les initiations, au sud du Ca- meroun (très voisin), et à d'autres masques kota et tsogho, àcornes également, du Gabon.

Ce petit spécimen est d'une grande qualité plastique tant par la sensibilité extrême de la sculpture des volumes que par le fini des sur- faces. De facture à la fois anguleuse (à l'opposé d'un autre masque du même type du British Museum, très arrondi) et douce, ce visage raffiné est ordonné en oblique de part et d'autre d'un axe médian soigneusement souligné: le mufle étroit s'évase en un front plus large dont les extensions rayonnantes déterminent des yeux finement étirés en amande ainsi que les oreilles incurvées qui supportent les cornes traitées en lignes brisées se répondant en losange.

Le rythme des plans, des courbes (particuliè- rement de trois quarts ou de profil) et des plages de couleurs (un blan; rehaussé de noir). mon- trent la maîtrise d'un artiste en pleine possession de ses moyens créatifs qui, avec un outillage que l'on sait très succinct, a pu aboutir à une œuvre exceptionnellement raffinée. LP

128 Grand masqu Kwélé, Gabon

Bois dur, avec peinture largeur: 62.5 cm

Ce grand masque à Kwélé du Nord-Con, concavité en forme est flanqué de deux au même facture gravés d cornes, dont la signif d'un visage humain, e

L'ensemble du mas nie remarquable de CO

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lgo, les productions x objets fang, pou-

mains, et enfin des ux emboli des Kota e variante, appelée

AIvfV

tnc (kaolin);

tout des ((masques n ansé soit que ces vi- pour un autre usage, soient restés cachés

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LP

128 Grand masque à cornes recourbées Kruélé, Gabon

Bois dur, avec peinture noire et blanche (kaolin); hrgeur: 62.5 cm

Ce grand masque à comes arquées provient des Kwélé du Nord-Congo. Le visage central, dont la concavité en forme de cœur est caractéristique, est flanqué de dem autres visages miniatures de même facture gravés dans la partie recourbée des cornes, dont la signification, de part et d'autre d'un visage humain, est inconnue.

L'ensemble du masque constitue une harmo- nie remarquable de courbes dont le seul élément

de rupture est l'axe horizontal des trois paires d'yeux, l'entrelacs des arcs étant souligné par l'usage alterné du noir et du blanc.

Cet objet a été rapporté par l'administrateur des Colonies A. Courtois dans les années trente. II est à rapprocher du grand masque à coiffe en W du Musée de La Rochelle (France).

On ne sait presque rien du rôle de ces mas- ques, on ne sait même pas s'ils dansaient effe+ vement ou s'ils servaient de représentations em- blématiques à accrocher dans une case de culte car la plupart n'ont pas les yeux percés*. Ce n'est pas le cas de celui-ci dont les orifices des yeux existent mais qui n'a pas, par contre, de

trous de fixation pour la collerette de raphia ha- bituelle à tous les masques de ces régions. ,

*R. Lehuard, qui a eu l'occasion d'aller récem- ment à Souanké en pays h é l é , m'a indiqué que les seules utilisations actuellement connues des t( masques n sont leur intervention dans les céré- monies d'initiation des jeunes gens et les levers de deuil. Les objets sont expliqués aux néo- phytes mais ne servent pas de masques de danse proprement dits. Cela correspond à ce que j'ai constaté moi-même au Gabon dans la région de kfadjingo, au nord de Mékambo. L' ' ' 'i . . -

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L' Afriq iie éq un tu riale a t h n t iq I I r 207

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Les Kota et Obamba de l’Est du Gabon

Schématiquement, les peuples de l’lvindo et du Haut-Ogooué se répartissent en trois ensemble principaux: le groupe kota propre- ment dit, le groupe mbédé-obamba et le groupe duma-ndjabi. Bien que différents au plan linguistique, ces trois groupes peuvent être

, valablement liés au plan culturel. L‘histoire de la région est com- plexe, on peut la résumer en mentionnant la migration kota plus andenne qui s‘esr avancée jusqu’au Congo (Ndassa, Wumbu) en laissant en arrière les Mahongwé puis la migration mbédé-obamba située plus à l’est qui est venue recouper l’autre à la latitude d’O- kondja sur la Sébé.

Tous ces mouvements, depuis le XVIIe siècle, on t compliqué la carte ethnique de la région est du Gabon et nord-ouest du Congo où,se retrouvent les mêmes groupes. Les productions plastiques de plusieurs de ces ethnies sont bien connues et appréciées depuis les _: débuts de’l’art nègre en Europe: ce sont les figurines qui gardaient

les paviers-reliquaires contenant les ossements des ancêtres dé- funts ifig. 47). Les scu1ptures;toujours anthropomorphes, sont à

_. une.face (avec le’revers orné d’un motif en relief) ou bifaces, surtout dans le sous-style obamba. Chez les Mahongwé et les Shamaye, où les figures sont exclusivement à une seule face, le visage est stylisé à l’extrême en une ogive, àpeine concave, décorée de fils de laiton disposés à l’horizontale de fagon absolument join-

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tive, avec comme détail de reconnaissance anatomique, juste les yeux et le nez.

L’analyse morphologique de très nombreuses sculptures kota a conduit à une classification comportant sept catégories distinctes toutes différentes au plan des formes mais parfois liées dans la réalité stylistique (fig. 48).

Les catégories 1 et II sont les bwété mahongwé e t shamaye à lamelles de laiton (on distingue les grandes et les petites figures). La catégorie III est une forme de transition avec un visage ovale décoré de fils de laiton agrafés à l’horizontale comme dans le Nord mais un cimier en croissant transverse comme dans le Sud. La catégorie IV est la plus Q classique D, correspondant à la production obamba (nibulu-ngulu). Les catégories V et VI, avec et sans cimier, présentent des schémas de formes très curvilignes. Les visages peuvent être franchement réalistes (convexes). Enfin la catégorie VI1 rappelle des m b t m b a sango avec une figure petite et étroite pourvue d’un crâne taillé en ronde-bosse.

Certaines sculptures étranges quoique tout à fait authentiques mais rarissimes, sont ces bustes dont les bras stylisés sont dispo&% en losange, avec une tête tout à fait <( kota j) mais parfois sans placage de laiton (cimier en croissant transverse, coiffes latérales à pendants verticaux, front en surplomb, etc.). LP

Fig. 47 Reliquaires vus par Brazza dans le village de Pongo, chez les Ondoumbo [main- tenant nommés Mindoumou), sur la rivière Mpassa. Noter que les paniers contenant les crânes, surmontés de figures plaquées de cui- vre, coexistent avec des boîtes en écorce contenant également des reliques, sans figurine. (De: Tour du Monde, 1888, II, p. 50)

Catégorie I

fj Catégorie III

Catégorie IV

Catégorie V

Catégorie vi

C

f

208 L‘Afrique e‘qiratoriale atlantique

Fig. 48 Tableau des SQ

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tomique, juste les

j sculptures kota a itégories distinctes rfois liées dans la

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LP

>ar Brazza dans le Ondoumbo (main- IOU), sur la rivière iiers contenant les res plaquées de cui- iltes en écorce diques, sans d e , 1888, II, p. 50)

Catégone I

Catégorie I11

Catégorie V

Catégorie VI

Catégorie II 2 ' . . .

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Catégorie VI1 1

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Fig. 48 Tableau des styles kota. (Domenico Terrana et Louis Perrois)

L'Afrique dqttntoriale ahnntique 209

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129 Panier-reliquaire complet avec u n e figurine anthropomorphe ni buin bu Sango, Gabon Bois, recouvert de lamelles de laiton. Panier tressé contenant des fragments de cránes humains; hauteur: 48 cm

Comme chez les Tsogho, les paniers-reliquaires sont connus chez les Sango et les Duma sous le nom de mbumba. L'aspect de la figure sculptée peut varier, on en connaît de facture plus ou moins stylisée selon les endroits: plus en ronde- bosse chez les Tsoghdet les autres groupes de la

laires; la bouche ba qu'il ne la complète c

Du point de vue de tiste, à coup sûr un 5

inspiré et maître de se n e ) , il faut remarque des volumes du visag de plans, de bosses et courbes entrelacées 9'. rectilignes, certains zontaux.

Les motifs décoratif une double ligne de p de la coiffe avec un rei sur les volutes du bas

, forme de diadème orr de petits cubes, de ta,

~ vers les tempes. Au

210 L'Afrique Pquatoriale atlalitique

De même pour les sculpteurs shake, shamaye et mahongwé des régions immédiatement au nord- est dont les innovations plastiques nous éton- nent tellement.

Les mbumba sango comme celui-ci sont des expressions intermédiaires entre les styles du centre et de la région littorale du Gabon, do- maine des figures peintes d'un réalisme plus ou moins idéalisé, et les styles'i kota )) de l'aire ga- bono-congolaise obamba, mbédé, ndassa et wumbu d'une part, shamaye et mahongwé d'au- tre part, domaine des figures plus ou moins abs- traites encerement plaquées de laiton. Si on doit nuancer les qualificatifs définissant les critères morphologiques de ces styles aux variantes nombreuses (correspondant à une réelle liberté d'expression à l'intérieur d'un schéma global identifié), on constate par contre l'existence d'une zone de rupture stylistique justement dans la région de Lastoursville, plus nette pour les figures d'ancêtres que pour les masques dont l'extension est plus large.

L'analyse de quelques paniers-reliquairb a permis de voir que les cránes, en fragments plus ou moins importants, étaient accompagnés de tout un ensemble de petits objets, coquilles, cau- ris, plantes séchées et autres ossements animaux (rongeurs, serpents, etc.) à valeur symbolique ou magique prédse.

Les rituels liés aux mbumba consistaient es- sentiellement en offrandes propitiatoires desti- nées à satisfaire les défunts du lignage, ceux-ci pouvant toujours être un danger pour les vi- vants. Les crânes étaient extraits du panier lors des initiations des jeunes gens, ils étaient alors exhibés et identifiés avant d'être oints du sang d'animaux sacrifiés (des poules en général).

LP

Haute-Ngounié, tout à fait abstraite dans l'aire de la boucle de l'Ogooué vers Lastoursville où les liaisons stylistiques avec les styles kota sont évi- dentes (piétement en losange, décor de laiton, etc.).

Ici, le visage comme le cou et les ((bras n de la figure sont réinterprétés dans un registre de vo- lumes qui n'a plus rien à voir avec une quelcon- que ressemblance de premier degré. La relative proximité des styles plus naturalistes tsogho, ndzabi et tsangui montre la détermination des artistes sango 1 s'exprimer dans un imaginaire spécifique pour des objets de mêmes fonctions.

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:Urs shake, shamaye et lmédiatement au nord. plastiques nous éton.

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LP

, 130 Figure de reliquaire h / l b t h - N g d u ~ ~ t ~ - ~ b a m b a , Gabon

~~i~ dur, d6coré de feuilles de laiton et de cuivre; hauteur: 41m

Contrairement à d'autres régions voisines, par exemple les Grasslands camerounais où le mobi- lier rituel est très abondant, chez les kota nous n'avons pratiquement que des figures de reli- qujires, celles-ci supportant 4 elles seules tout le

symbolique nécessaire aux pratiques cé- rémonielles.

Bien que dépourvue d'éléments probants #identification et de localisation comme quel- ques rares objets-repères, cette figure de reli- quaire, à l'examen de ses formes, de son décor, de $8 facture et de sa patine, peut être en pre- mière analyse rattachée au sous-style obamba/ mindumu du Haut-Ogooué et estimée relative- ment ancienne (XU('siec1e).

La silhouette, vue de face, est toutà fait carac- téristique d'une variante connue dont les détails typiques sont les suivants, de haut en has: ci- mier transverse très étroit et arrondi; coiffes la- térales courbes à volutes terminales délicatement relevées; visage concave-convexe avec un effet de contraste de volumes entre le front dégagé et bombé d'une part et le double creux des orbites d'autre part, celles-ci étant en continuité avec l'arête du nez comme pour déterminer une sorte de masque d'où jaillissent de gros yeux circu- hires; la bouche balafre le bas de la face plus qu'il ne la complète de manière anatomique.

Du point de vue de la marque propre de l'ar- tiste, à coup sûr un sculpteur particulièrement inspiré et maître de ses matières (le bois, le cui- vre), il faut remarquer le rythme et l'harmonie des volumes du visage, une dynamique subtile de plans, de bosses et de creux délimités par des courbes entrelacées qui s'articulent sur les axes rectilignes, certains verticaux d'autres hori- zontaux.

Les motifs décoratifs utilisés sont très sobres: une double ligne de points sur tout le pourtour de la coiffe avec un renforcement en trois lignes sur les volutes du bas et un bandeau frontal en forme de diadème orné d'une série rayonnante de petits cubes de taille décroissante du front vers les tempes. Au revers tout à fait plat, on trouve un grand losange en léger relief dont la partie médiane est percée de plusieurs trous ayant dû servir à la fixation d'une touffe de plumes comme sur tous les reliquaires du Gabon (ces plumes ont été enlevées soit par le collecteur sur place soit par les collectionneurs ensuite afin de faire <<plus net A et ou d'éviter une mise en valeur ((ethnographique )) le plus souvent mal

On peut replacer cet objet dans une dynami- que stylistique identifiée dans la mesure où une étude analytique tend à montrer que les coiffes latérales courbes à volutes terminales sont une évolution des pendeloques cylindriques obliques que l'on trouve sur des objets provenant de la vallée de la Sébé, un peu plus au nord.

Lit.: Ferrois 1985, p. 51

perwe).

LP

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L'Afrique éqrtatoriale atlantiqrie 211

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I -

131 Figure de reliquaire biface Mbulti- Ngulii Kota (h’dassa-Wunibu), Gabon Bois dur, décoré de plaques de laiton et de cuivre; hau- teur: 54 cm

Les représentations janiformes ne sont pas rares dans l‘art kota, en particulier dans les styles de la zone sud chez les Ndassa et les Wumbu du Nord-Ouest du Congo.

La signification de ce double visage reste encore énigmatique. Ailleurs, chez les Fang par exemple, la multiplication des visages et des yeux indique que le masque est très clairvoyant

,

et que rien ne peut lui échapper, en pamculier dans le domaine délicat de la sorcellerie.

Ici, les deux visages opposés sont traités, plas- tiquement, de manières différentes: l’un est réa- liste et convexe avec un front très bombé, le nez proéminent et la bouche entrouverte sur des dents pointues; l’autre est schématisé et concave avec comme seuls détails anatomiques les yeux et le nez, de volume tétraédrique. On a suggéré que les visages opposés concavelconvexe pou- vaient se rapporter à une différenciation sexuelle des figures, mais cela reste une hypothèse car aucune information sûre n’a été recueillie sur ce sujet.

Du point de vue stylistique, il est sÚr par mntre que cet objet provient des Kota du Sud (Nd3ss3 ou Wumbu), avec le large cimier trans- verse caractéristique et les coiffes latérales courbes à volutes terminales relevées. Le décor, 311 recto comme au verso, est soigneusement in- die, en particulier sur le pourtour, laissant de S‘Andes zones d’àplat, tant sur la coiffure que SUT le visage lui-même. A noter les lamelles de fer, traitées comme des e larmes ), métalliques jmais en réalité plutõt des scarifications) qui ioulignent l‘acuité du regard. LP

212 L‘Afrique Cqiiatoriale atlantique

132 Figure de reliqt Kota-Maliongué, Gabc

Bois, recouvert de fines lai ton. Patine de fouille; hau

Les figures de reliquair bassin de I’Ivindo au I

zones limitrophes de l e Congo ont, depuis les constamment fasciné It abstraction poussée a identifiable. C’est aus d‘innombrables falsific fois de manière habile sont rares, du moins I

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Sur place, à Mokokc figures étaient, et L

comme des objets dant son de leur rõle imp0 tue15 funéraires bien q ment disparu aujourd mations socio-religiei provoquées de l’extéri nières années.

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Les Européens n’or clastes de ces périodes

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stique, il est sûr par ient des Kota du Sud : le large cimier trans- les coiffes latérales

les relevées. Le décor, est soigneusement in- pourtour, laissant de

It sur la coiffure que L noter les lamelles de (larmes B métalliques les scarifications) qui rd. LP

132 Figure de reliquaire Bwe'te' Kota-Mnkongwé, Gabon

Bois, recouvert de fines lamelles et de plaques de lai- ton. Patine de fouille; hauteur: 38an

Les figures de reliquaire des Kota-Mahongwé du bassin de l'Ivindo au nord-est du Gabon et des zones limitrophes de la République populaire du Congo ont, depuis les débuts de l'art nègre n, constamment fasciné les amateurs du fait de leur abstraction poussée aux limites d'une forme identifiable. C'est aussi la raison pour laquelle d'innombrables falsifications ont été faites, par- fois ,de manière habile. Les objets authentiques sont rares, du moins ceux que tous, collection- neurs comme anciens utilisateurs gabonais, re- connaissent comme (( tr&s bons )>, par exemple celui-ci.

Sur place, à Mokokou, Mékambo ou Kellé, ces figures étaient, et sont encore, considérées comme des objets dangereux à manipuler en rai- son de leur rôle important dans les anciens ri- tuels funéraires bien que ceux-ci aient complète- ment dispam aujourd'hui du fait des transfor- mations socio-religieuses spontanées, d'autres provoquées de l'extérieur, dans les soixante der- nières années.

La figure présentée ia, comme beaucoup des plus belles pièces connues de ce style, a une pa- tine de fouille, ayant très probablement été dissi- mulée à une époque d'action missionnaire un peu plus aiguë que d'habitude, dans une sépul- ture clandestine aménagée tout exprès à l'écart des villages afin d'échapper à une destruction plus radicale, le plus souvent par le feu.

Les Européens n'ont pas été les seuls icono- dastes de ces périodes troublées: les adeptes du

culte syncrétique anti-sorcellerie connu sous le nom de Mademoiselle i> ont aussi parcouru des villages pour en extirper toutes les traditions considérées comme mauvaises, et notamment tout ce qui touchait au Bwété, au Gabon comme au Congo.

Les paniers-reliquaires, parfois de grande taille, contenaient les ossements des défunts im- portants du 'lignage. Les figures sculptées les surmontaient, attachées par des liens de fibre. Lors de rituels propitiatoires ou d'initiation, les crânes étaient sortis des paniers, oints de di- verses substances à caractère symbolique ou ma- gique et exhibés aux yeux effrayés des néo- phytes. Les sculptures elles-mêmes pouvaient être n animées )> comme des marionnettes pour renforcer l'effet des reliques.

. . . 1 .. . . .

Les Kota-Mahongwé tdlaient deux types de sculptures de Bwété: les ((grandes i> dont fa face _. en ogive était très ample avec les yeux placés.à.:. peu près à mi-hauteur, et les apetites:>, de pro-.. . , . ..' . . . .. portions en tous points réduites,,avec.les yeux .'. ,

placés très bas et un décor plus éla+. Les ' 1 i : ,' grandes figures représentaient les notables fon- '___

dateurs, les petites, des personnes de moindre . ' ,

importance, toutes les sculptures ayant un nom propre connu de tout le village.

Dans les zones de contacts inter-ethniques, il est très probable que l'on trouvait dans les mêmes villages, des figurines à lamelles de style . 1

c mahongwé x et des figures à plaques de styles . *.

<(obambar ou ((sango i) vers la boucle ' de - '. l'Ogooué, comme on peut le voir sur les gra- vures de la revue Le Tom dii Monde de 1888. LP

.-, . : . ' . '

.

L'Afriqiie équatoriale atfantiqr[e 213

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i-

133 Masque de danse Mahongwé ou Ngaré ( ? I , Rep. populaire du Congo

Bois dur. La face de ce masque était très anciennement couverte de pigment minéral rouge; hauteur: 35.5 cm

Ce masque, qui aujourd'hui est une pièce de ré- férence de <,l'art nègre)), aurait été collecté par l'administrateur A. Courtois dans le village d'Etoumbi, petite agglomération située au Nord- Ouest du Congo sur la Haute-Likuala, entre les postes plus importants de M a h a et de Kelle, région où se trouvent mêlés des Mboko, des Ngaré et quelques groupes mahongwé, parents de ceux du Gabon plus à l'ouest.

On connaît quelques autres masques de ce même style (notamment celui du Musée de Brooklyn), mais leurs origines sont tout 2 fait floues pour le moment.

Aucun, à part des copies récentes, n'est d'ail- leurs vraiment semblable à ce masque célèbre.

Jean Laude indique que, d'après Alfred Barr, c'est un masque itumba (mauvaise graphie de Etoumbi, petit village non loin de la frontière du Gabon, selon Charles Ratton) de ce genre qui aurait inspiré Picasso en 1907 pour le fameux tableau s Les Demoiselles d'Avignon x dont le visage e au nez en quart de brie )) constituerait donc un des premiers exemples de l'impact G nè- gre )) sur la peinture moderne européenne.

Les travaux de William Rubin ont aujourd'hui établi que d'art nègre)) n'avait pa5 encore in- fluencé Picasso lorsqu'il peignit (( Les Demoi- selles)). D'autre part, ce masque ne parvint qu'en 1930 en France et l'hypothèse fournie par LauddBarr n'est aujourd'hui plus retenue.

Du point de vue morphologique, on remarque que la face en cœur très creuse, les yeux proémi- nents en amande et le nez saillant rappellent la facture de certains masques emboli des Kota de I'Ivindo. Le visage lui-même en ogive allongée, touche aux figures de reliquaire, en particulier celles des Shamayé, voisins méridionaux des Mahongwé.

S'il semble maintenant admis que cette série de masques appament à la culture kota, il reste hasardeux en l'état actuel des connaissances de les attribuer à l'un ou l'autre des quelques groupes de la zone, Mboko et Ngaré (apparentés aux Mbochi et Kuyu) ou Mahongwé proprement dits. Du coup, il est encore impossible de définir

stylistiquement et historiquement ces objets qui, en l'état, sont parmi les œuvres les plus remar- quables de la zone. LP

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1 Rep. populaire du

I . . . c émir tres anciennement rouge; hauteur: 35.5 cm

bui est une pièce de ré. I aurait été collecté par brtois dans le village Fration située au Nord- !aute-Likuala, entre les le Makua et de Kellé, $i.Iés des Mboko, des ¡es mahongwé, parents 'ouest. ,autres masques de ce t celui du Musée de igines sont tout à fait

os récentes, n'est d'ail- à ce masque célèbre. e, d'après Alfred Barr, (mauvaise graphie de

I loin de la frontière du tton) de ce genre qui 1907 pour le fameux

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impossible de définir iement ces objets qui, uvres les plus remar-

LP

Les Tsogho, Sango et Ndjabi du Centre-Gabon

Si la sculpture de la zone côtière est particulière, celle du Centre- Gabon lui est apparentée, tout en ayant des formes très spécifiques aussi (fig. 49).

Le foyer sty-listique tsogho/sango est le dernier qui résiste en- core aux effets du modernisme ambiant, cela en raison de la vitalité encore forte du Bwiti, société initiatique masculine, qui pour les rituels demande tout u n matériel symbolique qui va des éléments d'architecture des ébnndzn (colonnettes, autels, poteaux centiaui) ., à l'art mobilier et à la statuaire sans omettre les très nombreux

.

,

types de masques, la plupart peu connus en Occident. I :.

La v a h des formes tsogho contraste fortement avec l'homogé-, '

, néité des autres styles de masques de l'aire shira-pounou-loumbo. Le style statuaire tsogho est caractéristique tant par la manière de traiter la tête et surtout la face, que par celle de sculpter les épaules e t les bras. Les formes sango sont très semblables sauf pour ce qui concerne les Mbtimbn. Le double arc des sourcils, appuyé sur un petit nez triangulaire e t plat, est u n omega qui souligne les yeux étirés en amande. Le visage est généralement triangulaire, parfois même tout à fait géométrisé en u n motif décoratif (surtout sur les planches des autels du Bwiti). Les Sango et les Vuvi avaient, il y a encore peu d'années, de magnifiques portes de case sculptées de motifs symboliques en bas-relief.

Les Ndjabi possédaient des masques, du genre Okriyi d'une part, mais surtout du type Mvttdi, polychromes, qui se sont répandus dans toute la région jusqu'aux plateaux téké à l'est. LP

fig. 69 Reliquaire mbumbn-bwiti des Sango du Centre-Gabon. . . ; _. :' .',... ' .

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(Photo: Monseigneur Augouard au début de ce siècle) . . . . . . .

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L'Afrique e'qiintorinle ntlnntiqrre 215

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134 Tête de reliquaire Mburiiba Bwiti Tsogho, Gabon

Bois, peint en rouge, noir et blanc (pigments miné- raux); hauteur: 36,8011

Les figurines anthropomorphes qui surmon- taient les paquets-reliquaires appelés Mbuntbn Bwiti dans la plupart des populations du Sud et du Centre du Gabon peuvent être classées en

, plusieurs catégories. Ce sont, soit des bustes, soit des têtes seules juchées sur un long cou comme celle-ci, ces dernières étant surtout con- nues des Sango, des Duma et parfois des Tsogho. A la frontière occidentale de la zone d'inférence kota-mbédé, les sculptures sango sont générale- ment complètement recouvertes de lamelles de laiton (mais pas toujours). Les têtes tsogho sont peintes, alors que chez les Tsogho l'utilisation décorative du métal (du laiton, rarement du fer),

'

216 L'Afrique éqrtntoriale aflantique

coup de statuettes de la région; la bouche est large, entrouverte sur des dents pointues avec des lèvres débordantes; la coiffe, au revers, est traitée en volumes carénés qui proviennent des Sango, ou les annoncent. On a donc là une sculpture dont la facture touche nettement aux formes sango-duma ou mêmekota.

Le culte des ancêtres Mombé fait partie des rituels liés au Bwiti, ensemb1ei"de croyances et pratiques socio-religieuses spédfiques du Cen- tre-Gabon, donnant lieu à une hiérarchie sociale bien identifiée, des initiations, des rites, des thé- rapies et des mythes complexes.

Depuis presqu'un demi-siècle, le Bwiti tsogho et sango s'est diffusé vers la côte et la région du Moyen-Ogooué oÙ les Fang, entre autres peu- ples, l'ont adopté tout en le transformant nota- blement par une intégration d'Cléments du Mé- Inn et du Bye'ri d'une part et des cultures impor- tées (christianisme, franc-maconnerie, adminis- tration, etc.) d'autre part.

Si les masques tsogho sont encore en usage dans beaucoup de manifestations traditionnenes, les figures d'ancêtres Mbumba ont maintenant

.

.

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pratiquement disparu. LP

Lit. : Gollnhofer 1975 - Perrois 1985, no. 30, p. 204

plaqué sur les sculptures de bois, reste discrète et même exceptionnelle, sauf pour les mbicmba où un décor frontal peut compléter la couleur ocre du visage.

Certaines têtes sont traitées en ronde-bosse aux volumes pleins, d'autres de facon plus sché- matique comme id.

Dans cet objet probablement tsogho, on peut retrouver un certain nombre de détails formels venus d'ailleurs. Le volume concave-convexe du visage (un front bombé, une face creuse) rappelle les styles voisins des Kota du Haut-Ogooué; les yeux, habituellement étirés en amande, sont ronds comme ceux de la figure de reliquaire (cat. 130).

Le cou, souvent cylindrique, est de section rectangulaire, aplati sur le devant et décoré d'une plaque métallique; les oreilles sont déme- surément étirées sur les côtés comme dans beau-

. .

135 Statuette com 30gl70, Gabon

Bois mi-lourd, polychroi en tissu; hauteur: 53.40

Les statuettes ghéong pays tsogho. I1 n'est I OU dix rassemblées d (dans la case-sacristit principal où rien ne re nifestations), comme ter lors de mes enqu mongo (1970).

Ces figurines sont mémoratives peu ou sées, parfois des objet si on leur rajoute u teuse à caractère mag tuettes sont d'ailleurs vent mal finies.

Celle-ci est un spec exécuté tant au point, que des surfaces. Le t i

ment tsogho avec de, rejetées vers I'avar contenu de tension di que les avants-bras, mais ramenés sur le mains aux doigts fer ventre proéminent ai seins àpeine esquissé:

La statuette est pei ques touches de kaolii ligner les détails imp( et coiffure.

La tête est de fam visage tendu vers la yeux en amande doi jaillir du fond blanc c ourlées, enfin une coi lisées par des bandes I

Au total, on a là un mais exceptionnellen ment de sa sculpture.

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Pgion; la bouche est p dents pointues avec coiffe, au revers, est

8 qui proviennent des On a donc là une

Ouche nettement aux nekota. lombé fait partie des mble de croyances et spécifiques du Cen-

une hiérarchie sonale ins, des rites, des thé- 'xes. - ;¡ède, le Bwiti tsogho a côte et la région du ig, entre autres peu- e transformant nota- n d'éléments du Mé- 't des cultures impor- nasonnerie, adminis-

ont encore en usage itions traditionnelles,

mmba ont maintenant LP

5 1985, no. 30, p. 204

135 Statuette commémorat ive d'ancêtre Dogho, Gabon

Bois mi-lourd. polychromé rouge, noir et blanc; pagne en tissu; hauteur: 53.4cm

Les statuettes ghéonga sont très nombreuses en pays tsogho. I1 n'est pas rare d'en découvrir cinq ou dix rassemblées dans telle ou telle ébandzn (dans la case-sacristie plutôt que dans le local principal où rien ne reste entreposé entre les ma- nifestations), comme il m'est amvé de le consta- ter lors de mes enquêtes dans la région de Mi- mongo (1970).

Ces figurines sont des représentations com- mémoratives peu ou même pas du tout sacrali- sées, parfois des objets à pouvoir prophylactique si on leur rajoute une achargen médicamen- teuse B caractère magique. Beaucoup de ces sta- tuettes sont d'ailleurs sculptées à la hâte et sou- vent mal finies.

Celle-ci est un spécimen particulièrement bien exécuté tant au point de vue de la forme générale que des surfaces. Le tronc est de facture typique- ment tsogho avec des épaules un peu levées et rejetées vers l'avant dans un mouvement contenu de tension du buste; les bras plus longs que les avants-bras, ceux-ci écartés du corps mais ramenés sur le devant du ventre avec des mains aux doigts fermés en un geste rituel; le ventre proéminent avec le nombril saillant; des seins à peine esquissés aux mamelons noircis.

La statuette est peinte d'ocre avec juste quel- ques touches de kaolin blanc et de noir pour sou- ligner les détails importants, mains, seins, yeux et coiffure.

La ,tête est de facture originale avec un long visage tendu vers la bouche entrouverte, des yeux en amande dont la pupille noire semble jaillir du fond blanc de l'iris, de grandes oreilles ourlées, enfin une coiffure à tresses aplaties sty- lisées par des bandes noires et blanches.

Au total, on a là un objet tsogho très classique mais exceptionnellement fort dans le raffine- ment de sa sculpture. LP

L'Afrique éqttntoriale n t h t i q r t e 217

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Des Myènè aux Shim-Pounou-Loumbo du Sud-Ouest du Gabon .

' Des Myènè on connaît essentiellement les masques Okttkwé des Galoa des lacs du Bas-Ogooué (fig. 50). I1 faut immédiatement

' dissiper le malentendu relatif aux masques a Mpongwé )). I1 s'agit des masques blancs originaires de la Ngounié, faits aussi bien par

. . . . , 1eS.Shira que par les Pounou et les Loumbo, mais attribués long- te,mps aux Mpongwé côtiers, alors que ceux-ci n'ont plus de mas- ques depuis plus d'un siècle et demi. Cette erreur d'identification provient certainement du fait que les premiers masques Q blancs )) ont été achetés à des traitants mpongwé qui se sont bien gardés de dire d'où ils venaient en réalité.

La statuaire du Sud-Gabon est riche en formes différentes, de- . . puis les poteaux shira maintenant disparus et oubliés jusqu'aux

. . . statuettes propitiatoires pounou et aux figurines magiques des

. . ':,. . Loumbo et des Vili. Dans toutes ces populations, on a à la fois u n

. . . ... .art mobilier développé et une sculpture abondante avec beaucoup

' . - . . L'examen de toutes ces ceuvres, toutes très raffinées, parfois -. .. . jusqu'au maniérisme, avec des. visages aux traits délicats et des

surfaces soigneusement polies et peintes, conduit à supposer que ces peuples avaient un goût certain pour la beauté, même si tous ces objets étaient éminemment fonctionnels. Les nombreuses coif- fures de femmes (dont on retrouve la réplique dans les coiffures de bois des masques) l'attestent également.

.

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. . . .

. .:

I . . . L

. . de statuettes et surtout de masques blancs. , . . ' . I

' .

Le foyer stylistique de ce qu'on désigne par ((masques blancs de l'Ogooué )), s'étend, avec des formes dérivées les unes des autres, de la région de Lambaréné au nord (Galoa, Enenga, Djumba, Pindji, Iuli du lac Zilé), au Congo au sud (Loumbo, Vili du Kouilou, Pounou, Tsangui), ainsi que vers l'est, à l'intérieur, chez les Tso- gho, Sango, Ndjabi, Tsangui, Vuvi et même les Wumbu de souche kota.

Les masques polychromes vili, très réalistes de facture, sont probablement liés aussi à cet ensemble.

Les plus anciens masques blancs connus sont curieusement bico- lores avec le front ocre et la face blanche. Leur coiffure en visière est également caractéristique. Une autre série, ancienne aussi, comporte dans la collerette une sorte de poignée sous-menton- nière. Mais les masques blancs les plus répandus sont les visages à coiffure à coques (généralement une haute coque centrale pourvue de petites tresses latérales) dont on connaît plusieurs types (fig. 51).

Les masques ndjabi, d'une part, avec leurs proportions réduites, leur coiffure à coque fendue, leur bouche lippue et leur menton caréné, et tsangui d'autre part avec leur visage scarifié horizontale- ment, sont très reconnaissables. Chez les Vuvi, le visage s'est sim- plifié pour n'être plus qu'un ovale aplati. LP

. Fig. 50 Masque Okukwé des Galoa de la région de Lambaréné. (Photo: Pere Trilles, 1903)

218 L'Afrique équatoriafe atlaiitique

Fig. 51 Danse du masque okiryi chez les Pounou. Le dan- seur est monté sur des échasses. (Photo: M. Huet, Agence Hoa-Qui, Pans)

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136 Masque d e d, Tsangiri, Gabon

Bois léger, peint en blai hauteur: 30an

Les formes tsangui taine articulation d front ample projet6 face plutôt petite ter - et à un motif déc scarifications polyc front et les joues. (

on trouve des vars moinsà ce schéma.

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masques blancs de s unes des autres, Enenga, Djumba, o, Vili du Kouilou, eur, chez les Tso- Numbu de souche

de facture, sont

urieusement bico- :oiffure en visière

ie, ancienne aussi, :née sous-menton- 1s sont les visages à l e centrale pourvue hit plusieurs types

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136 Masque de danse Tsangrri, Gabon

Bois léger, peint en blanc, rehaussé de noir et de rouge; hauteur: 3 0 m

Les formes tsangui sont identifiables à une cer- taine articulation des volumes du visage - le front' ample projeté en avant au-dessus d'une face plutôt petite terminée par un menton caréné - et à un motif décoratif tout à fait typique de scarifications polychromes horizontales sur le front et les joues. Comme dans tous les styles, on trouve des variantes correspondant plus ou moinsà ce schéma.

Ia, nous avons un objet de transition entre les styles de la zone littorale, shira-pounou-loumbo, et ceux de l'intérieur. De forme générale pou- nou, le visage se compose de trois éléments: le front réduit enserré dans une coiffure à coques avec un bandeau tressé à pointe médiane; la bouche large, très en relief, aux lèvres arquées vers le bas et le menton caréné; entre les deux extrêmités de ce visage, la zone du regard avec des yeux très finement arqués, aux paupières en léger relief, est comme délimitée par le double

arc des sourcils auquel répond plus bas le même motif géométrique inversé représentant Ià des scarifications jugales courbes.

Le décor à écailles du front et des tempes ren- force l'identification pounou-loumbo, ainsi que la coiffe à coque centrale et tresses latérales. Cette coiffure, de facture très élégante dans rar- ticulation de ses volumes, est décorée sur les lignes d'arête d'une série de clous à tête demi- sphérique de laiton, comme cela se pratique cou- ramment dans l'aire kota, plus à l'est.

Ce masque est remarquable par l'harmonie de ses courbes combinées et opposées, tant de face que de profil. On sent que l'artiste a recherchéà marquer son Ceuvre et à créer un effet par l'ac-

\

. .

. . . . .. . . . .. centuation de quelques angles et le maintien.,: ,. .

> . I . <: . d'une stricte symétrie. ' . ,

I1 ne faut pas oublier que si nous. pouvons'. '. , . contempler ces masques sous la lumière crue des' .'

spots, ils ne sont jamais vus de cette façon sur I

place: le masque okrryi danse sur des échasses et . . son visage de bois est complètement enfoui sous. ' . un amas de pagnes de tissu et de raphia, souvent ,

dans la lumière atténuée de l'aube ou du crépus- cule. I1 incarne l'esprit d'un défunt et se mani- , feste surtout lors des cérémonies de deuil. C'est . peut-être pourquoi'ces visages sont toujours re- . ._ ' présentés comme figés dans une sérénité triste et. . ,

austère, malgré leur beauté idéale poudrée de kaolin. LP

.. '

,

L'Afrique dqrmtoriale atlantiqrre 219

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137 Soufflet de forgeà figure anthropo- morphe Shira-Pounou, Gabon

Bois dur, patine brillinte; hauteur: 62 an

On connaît d'assez nombreux soufflets de forge du Gabon, mais peu de cette qualité plastique au niveau du décor. Nous avons là ~ + p véritable outil-sculpture.

Taillé dans un bois dense à la patine brillante et foncée due à un usage intensif, ce soufflet avait une grande importance culturelle, étant àla fois un instrument technique et une figurine symbolique. Ce type d'objet se trouve aussi bien chez les Fang du Nord du Gabon, que dans l'aire shira-pounou-tsogho du Sud de l'OgOOU6.

Appelé okrtka*, le soufflet fait partie du maté- riel rituel du Bwiti des Tsogho. Au cours de l'i- nitiation des jeunes gens, les évovi expliquent aux néophytes que le soufflet està la fois femme (l'orifice de refoulement de l'air est une vulve par o5 vient la vie) et homme (les deux chambres recouvertes de peau sont les testicules et le ou les bâtons de manipulation sont le pénis). Chez les Shira-Pounou-Loumbo d'où provient probable- ment cet objet, un symbolisme du même ordre existe.

La téte sculptée qui décore le bout du soufflet est de style pounou avec une coiffure à coque centrale, un front bombé omé du motif caracté- ristique des neuf écailles en losange et des yeux délicatement arqués. Le cou est annelé en spirale comme certaines cannes de chef par ailleurs bien connues dans toute cette région.

Partout, le soufflet est fabriqué par les hommes à l'abri du regard des femmes et des enfants. On note d'ailleurs une sexualisation de toutes les activités liées à l'extraction, puis à la transformation du fer au Gabon: abstinence sexuelle prolongée des forgerons; aide de très jeunes garcons impubères; renfort de e médica- ments )) d'origine féminine; figures symboliques à signification sexuelle évidente; etc.

Lit. : CoUomb 1977-Perrois 1985, no. 28, p. 200 "Le soufflet de forge est nommé nkom chez les Fang, okumba chez les Teké, iguwa chez les My&, loba chez les Ndjabi.

LP

138 Masque de dai PounoulLountbo, Gal

Bois léger, peinture blanc

220 L'Afrique éqicaforiale atlantique

là une forme d'art éla technique, rationalité

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$ figure anthropo-

uteur: 62cm

reux soufflets de forge tte qualité plastique au avons Ià un véritable

Ise à la patine brillante :e intensif, ce soufflet ice culturelle, étantà la nique et une figurine jet se trouve aussi bien Gabon, que dans l'aire

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:ore le bout du soufflet : une coiffure à coque omé du motif caracté- en losange et des yeux ou est annelé en spirale le chef par ailleurs bien /égion. 'est fabriqué par les ird des femmes et des rs une sexualisation de i l'extraction, puis à la iu Gabon: abstinence orgerons; aide de très 3 ; renfort de K médica- le; figures symboliques idente; etc. LP

1985, no. 28, p. 200 nmé nkom chez les Fang, ua chez les Myènè, loba

138 Masque de danse okuyi PotinotilLoumbo, Gabon

Bois léger, peinture blanche (kaolin); hauteur: 28cm

On peut parler de aclassicisme~ à propos des masques blancs de la Ngounié, si l'on entend par là une forme d'art élaborée où s'allient qualité technique, rationalité et harmonie. Dans cette perspective, ce masque est une illustration d'un style classique des arts de l'Afrique noire.

On note que dans toutes les variantes des masques blancs (connus sous cette appellation en raison du décor à fond blanc de leur visage), l'O- quilibre des formes n'est pas le même. Le front,

, la coiffure et la face n'ont pas les mêmes propor- , tions relatives ni en dimensions ni en volumes.

Id, peut-être par un certain souci de réalisme de Ia part de l'artiste qui aurait voulu représenter quelqu'un tout en l'idéalisant, la coiffure est très ample avec une coque centrale énorme qui Contraste avec les petites tresses latérales, le vi- sage large aux pommettes saillantes est propor- tionné au front bombé et l'ensemble des autres détails anatomiques est répam sur toute Ia sur- face: les yeux en grain de café finement fendus

.en courbes obliques opposées, le nez aux ailes " . ourlées, la bouche plutôt petite avec des lèvres

très en relief, les oreilles bien dégagées sur les côtés et les scarifications en écailles dont la cou- leur rouge éclate sur le front et les tempes.

A cet égard, il n'est pas tout à fait sûr que les masques à scarifications en écailles soient teu-

. .

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jours féminins car les informations varient à ce sujet. La danse est bien entendu réservée aux hommes, bien que le public villageois puisse y assister de plus ou moins près sans difficultés.

Les coiffures de bois des masqueç okuyi rap- pellent directement la manière dont se coiffaient les femmes galoa, shira et pounou au début du siècle. La coque centrale était un montage de cheveux tressés garni d'une bourre de fibres. On remarque ici les fines tresses latérales et la tresse transverse en bandeau qui délimite le haut du front. L'art capillaire était très développé dans toute cette région au X x c siècle avec des va- riantes multiples, certaines nous étant connues par les croquis faits par les voyageurs qui tous ont été étonnés par l'élégance de ces parures sou-

. .. . . . . . - .

vent complétées par des colliers, des chaînettes et; , : . ...' des peignes de bois au manchedécoré. . . . r . .

La sculptuie des Pounou et des Loumbo, du , : Gabon au Congo, reflète un souci constant d e . beauté et d'équilibre par une recherche au ni- . . veau de la structure des volumes et par un soud du détail anatomique aux aspects réinventés. On sent que l'artiste a d'abord appris des schémas et qu'il s'exprime dans un ensemble de formes préétablies, mais aussi que parfois, par la maî- ,

trise parfaite de la matière à tailler, il a réus& , - ' , l'exercice de façon exceptionnelle, comme ici. I1 . ,: y a peu de fantaisie ou de spontanéité dans ce style. On doit plu&t y voir l'application d'une expérience de l'œil et de la main au service d'un raffinement qui confineà la préciosité. LP , .

' , '

.

L'Afrique équatoriak atlantique 221

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lu-

,* -. Les Kuyu

'

,

Les Kuyu habitent un territoire relativement exigu de part et d'au- tre du fleuve du même nom qui se déverse dans la Likouala, af- fluent septentrional du fleuve Congo/Zaïre, au centre de la Répu- blique populaire du Congo. Leur système de parenté est de type

I patrilinéaire. Les villages sont dirigés par des chefs. En relation , . . avec ceux-ci se sont créées des sociétés initiatiques constituées en . '

, groupes organisés autour d'animaux emblématiques, tels Ie léopard et la vipère. Hommes et femmes appartiennent à des sociétés diffé- rentes. L'initiation aux associations, les funérailles de leurs mem-

. bres éminents, ainsi que d'autres événements, telle Ia naissance de jumeaux, sont accbmpagnés de rituels qui comprennent des danses masquées. A ces occasions, on sort des objets dont l'iconographie e t la signification sont en rapport avec les activités de l'association.

AMV . .

. . . .

Fig. 52 Marionnettes portées par des danseurs lors de cérémonies ebokita. (Photo: M. Huet, Agence Hoa-Qui, Paris) . .

222 L'Afrique éqrtaforiale atlantique

739 Figure féminin personnage yu, Rép. populaire

is, blanc, :

CeSe sculpture d'uni petite figure appliqué( aussi curieuse qu'ex]

couleurs utiliser Sentent le léopard dai masculine et féminin1 L~ bleu, plus rare sur partie du chromatisn pas de données prés' est vraisemblable que que evoque tout à la tambour et le serpe1 nière ou d'une autre I que$ et funéraires de du serpent. Sur les d ce5 confréries élitiste: point que, durant la cusait de terrorisme. surbordonnée à la ro si bien que les jambe drique, et les bras, ment, n'interferent 1 La petite figufe qui I

bas-relief, odre des ! latérale; elle est en général de l'ceuvre. buer cette sculpture aux rites de l'asso& mations dont nous image à l'une des fa nitricelcontinuité si beaucoup de sens. patrilinéaire, et le l i i héraldique comme transmet d'une géni

Lit.: Lheyet/Gaboka p. 53-88; 1919,p. 297-3

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139 Figure féminine avec u n petit personnage K ~ ~ ~ ~ , Rép. populaire du Congo

~ ~ i ~ , polychrome blanc, noir et jaune; hauteur: 67an

Cette sculpture d'une femme debout avec une petite figure appliquée sur son flanc est une pièce nussi curieuse qu'expressive. Les deux princi- pales couleurs utilisées, l'ocre et le blanc, repré- sentent le léopard dans l'attirail des assodadons

et féminine du léopard chez les Kuyu. Le bleu, plus rare sur la sculpture, fait également partie du chromatisme hyu , bien qu'il n'y ait pas de données précises sur son symbolisme. II est vraisemblable que Ia forme presque cylindri- que evoque tout à la fois le canoê, le cercueil, le tambour et le serpent, tous utilisés d'une ma- nière ou d'une autre dans les cérémonies initiati- ques et funéraires des'assoaations du IGpoard et du serpent. Sur les deux berges du fleuve Kuyu, ces confréries élitistes contrôlaient la sociétéà tel point que, durant la période coloniale, on les ac- cusait de terrorisme. La facture des membres est surbordonnée à la rondeur du torse de la figure, si bien que les jambes complètent l'aspect cylin- drique, et les bras, moins accentués plastique- ment, n'interfèrent pas avec le cylindre de base. La petite figure qui adhère au torse féminin, en bas-relief, offre des vues simultanées, frontale et .latérale; elle est en conformité avec le concept général de l'œuvre. I1 n'est pas possible d'attri- buer cette sculpture d'une manière convaincante aux rites de l'assoaation, en fonction des infor- mations dont nous disposons. Associer cette image à l'une des facettes du thème femme/@- nitrice/continuité sociale n'aurait pas non plus beaucoup de sens. La société h y u est de type patrilinéaire, et le lien de l'individu avec l'animal héraldique comme le léopard ou le serpent se transmet d'une génération d'hommes 1 l'autre.

zv

Lit.: LheyetlGaboka 1960, p. 21-23 - Poupon 1918, p. 53-88; 1919, p. 297-331 - Tsamas 1957, p. 61-65

L'Afrique équntorinle ntlnntiqrte 223

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'. LksIëké . . .

is venus du nord, occupent un vaste domaine s'éten- anley Poo1,cette grande cuvette que forme le fleuve du

ccidentaux,:qui vivent i r è s des sources de l'Ogooué e t omme aussi Tsaayi, sont les seuls à utiliser les masques, ui que présente M. C. Dupré. Ce sont des habitants des

savanes, opposCs,fondamentalement aux gens de la forêt que sont . ' les Obamba et différents groupes kota comme les Ndassa et les

Wumbu. ,Ces derniers se sont installés à une date assez récente ' parmi les Tsaayi à la faveur d'une*infiltration progressive, ultérieu-

ée par l'administration coloniale frangaise (voir

e que le masque'rond soit une version bidimensio- es de reliqukres 'kota, dont le front bombé sur- ge lggèrement concave. En tout cas, il n'a aucune u e avec Tart des autres groupes TéLé, sans contact

Ia frontière.du Gabon.

.

. .

abonais du Haut-Ogooué. AMV . . . , . ..

Lit. : Dupré 1968, p. 295ff. Fig. 53 Masque du Kidumu chez les Tsaayi. (Photo: M. C. Dupré)

140 Masque Téké-Tsaayi, Rép. populaire du Congo (région du Haut-Ogooué)

Bois; hauteur: 3 4 m

Parmi tous les masques teké, celui du Musée Barbier-Mueller est le seul (avec celui du Musée d'Ethnographie de Stockholm) dont la composi- tion est presque parfaitement symétrique. De part et d'autre du dénivellé médian qui délimite deux moitiés égales, les motifs paraissent identi- ques. Un a nez )) assez large, tricolore, permet d'identifier l'hémidisque inférieur sculpté en re- trait par rapport à l'hémidisque supérieur. Deux fentes percées de part et d'autre du nez permet- taient au danseur de se diriger. Le pourtour, scuplté également en retrait, est percé de nom-

.

breux trous utilisés pour attacher une parure de plumes et de fibres de raphia qui dissimulait la tête du danseur. Contrairement aux masques ve- nus en Europe avant 1920 (celui de Stockholm et celui du peintre et sculpteur Isaac Païlès), il n'est pas détérioré et fut probablement acquis alors qu'il était en usage.

Date et lieu d'acquisition sont inconnus. Le peintre André Derain en fut le premier proprié- taire européen. Dans le grand mouvement de recréation qui suivit l'indépendance au Congo, plusieurs masques apparentés, appelés kidumu, resurgirent en pays téké, chez les Tsaayi et beau- coup ressemblent au masque du Musée de l'Homme et à celui de Païlès. Mais, malgré les nombreuses photographies et croquis qui circu- lèrent chez les sculpteurs, ce type de masque,

224 L'Afrique équatoride atlantique

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to: M. C. Dupré)

lttacher une parure de ihia qui dissimulait la ment aux masques ve- [celui de Sto&olm et ir Isaac Piilès), il n'est iblement acquis alors

m sont inconnus. Le ut le premier proprié- :rand mouvement de épendance au Congo, ités, appelés kidnmu, hez les Tsaayi et beau- isque du Musée de ilès. Mais, malgré les i et croquis qui arcu- , ce type de masque,

avec sa symétrie et son motif à'quatre pales, ne fut pas recréé. Sans doute n'appartenait-il pas au pays tsaayi.

I1 en est pourtant fort proche. En premier lieu parce qu'il n'existe aucun masque semblable dans toute l'Afrique centrale; ensuite parce que certaines particularités se retrouvent, dispersées sur quelques masques kidumu. La localisation des exemplaires ayant des points de ressem- blance avec celui-ci permet de supposer qu'il siendrait, comme le masque de Stockholm, de la région située au Sud du pays tsaayi, c'est-à-dire dans une zone de plus de 200 km de long. Cela ne permet pas pour autant d'affirmer qu'il appar- tient 1 la famille des kidumti, avec les mêmes usages politiques et le même symbolisme. Kidumir fut N inventée dans le Nord-Ouest du

pays tsaayi. Vers le milieu du XKe siècle, le mé- tallurgiste maître de cette région envoya vers le sud un jeune parent avec deux boules de fer brut pour payer son apprentissage. Le jeune homme revint chez lui les mains vides et sculpta son premier masque de mémoire. La diffusion fut ensuite très rapide, s'accompagnant 1 chaque emprunt de modifications plus ou moins impor- tantes qui permettent de suivre les chemine- ments et les règles de la syntaxe graphique.

Le motif à quatre pales n'est jamais utilisé dans les masques tsaayi. Mais on trouve dans ceux qui s'apparentent aux premiers masques, dans l'hémidisque inférieur, Q la même place, quatre triangles accolés par le sommet et en- tourés de deux cercles concentriques. Ce motif, désigné tantôt comme le python tantôt comme le

'mille-pattes pourrait indiquer aussi le mouve- ment de rotation qui.est un moment important.'., ,, . . . ' des exhibitions de kidnmn. Quant à la flèche qu!,, 1 pointe vers le 'nez, non recouverte de peinkre, , ,

elle me semble postérieure à l'acquisition du masque, lorsqu'il fut nécessaire de remettre de la peinture par-dessus les fissures du bois. Les grandes parties blanches dissimulent aussi des incisions, sortes de cernes soulignant l'ellipse des ((yeux n qui étaient colorées différemment. S'a- git-il au contraire d'une retouche effectuée par les utilisateurs du masque et seulemenfiepeinte ultérieurement?

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MCD I . Lit.: Dupré 1984- Barbier 19i8, no. 2

L'Afrique éqiiatoriak nthntiqrre 225 .'

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. .

. . . .

. . , . .

. .

F-

Fig. 54 Costume ro! Kuba du Zaïre. (Phot,

1 Le monde se répart rieur, occupé par les inversé, qui est sout nons ici la cosmogor pée par Bunseki-Lur

2 Arbre qui ressembl, i n p i r n p ou bo dio A 113.