La perception d’une discipline scolaire par les elèves. Représentation et effets identitaires

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European Journal 0/ Psychology of Education 1990, Vol. V, n? 6, ;>37-354 © 1990, I.S.P.A. La Perception d'une Discipline Scolaire par les Eleves. Representation et Effets Identitaires Michel Chambon Universite de Clermont Ferrand II, France La perception d'une discipline par les eleves est abordee comme relevant d'une construction visant iJ donner un sens iJ leur realite scolaire quotidienne et ne se realisant done pas independamment des conditions sociales de son elaboration, ni des significations sociales attribuees a cette discipline et a ses contenus. Les resultats d'une enquete mennee en France aupres d'eleves de niveau College au sujet de leur represen- tation de l'Education Manuelle et Technique montrent ainsique les eleves ont une perception socialement differenciee de la pratique de celle-ci comme de la valeur des savoirs mobilises au cours de cette pratique. Liinterpretation avancee fait etat du role instrumental que pourrait jouer la representation de la discipline dans des processus psychosociaux de gestion identitaireet done, en retour, du poids de ces problemes d'identite dans l'expression des representations individuelles. Un des aspects de la situation pedagogique concerne la relation qu'entretiennent les eleves avec les contenus de I'enseignement en tant qu'objets de connaissance auxquels ces cleves sont con frontes dans leur pratique scolaire quotidienne. Parmi les problemes que souleve cette relation, celui de la perception des contenus par ces memes eleves constitue une question a Ia fois tres importante mais paradoxalement negligee. Negligee en effet parce que, comme le soulignent Haladyna et Thomas (1979), «Ia mesure systematique de l'attitude des eleves face iJ l'ecole et aux differentes matieres constituant son programme s'est rivelee manifestement tres rare». 'Ires importante en revanche puisque, lorsque cette mesure a ete effectuee, on a toujours releve un lien positif entre une attitude favorable a l'ecole comme a ses differentes matieres et la reussite scolaire (e. g. Brodie, 1964; Roshal et al., 1971; Haladyna & Thomas, 1979). Toutefois, ainsi posee en terme d'attitude, l'approche de la perception des contenus scolaires se trouve de la sorte circonscrite au recueil de l'expression evaluative d'un etat affectif interne a I'Individu-eleve: «J'aime/je n'aime pas l'ecole» - «J'aime/je n'aime pas I'Histoire- -Geographie, les Mathematiques ou le Dessin». Par ailleurs et d'une maniere assez proche, le meme probleme est egalernent evoque et traite dans le domaine pedagogique en termes d'interets ou de motivation, Iaquelle est elle aussi definie comme un etat interne, resultat d'une tension psychologique suscite par l'objet de reference (Leif & Delay, 1965, p. 376). Dans les deux cas, attitude et motivation se voient octroyer un statut de variables intermediaires entre la perception d'une part et, d'autre part, l'action qu'elles sont censees preparer, Les psychologues sociaux attribuant it. I'attitude un role d'orientation des conduites, les pedagogues

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European Journal 0/ Psychology of Education1990, Vol. V, n? 6, ;>37-354© 1990, I.S.P.A.

La Perception d'une Discipline Scolaire par les Eleves.Representation et Effets Identitaires

Michel ChambonUniversite de Clermont Ferrand II, France

La perception d'une discipline par les eleves est abordee commerelevant d'une construction visant iJdonner un sens iJleur realitescolairequotidienne et ne se realisant done pas independamment des conditionssociales de son elaboration, ni des significations sociales attribuees acette discipline et ases contenus. Les resultats d'une enquete menneeen France aupres d'eleves de niveau College au sujet de leur represen­tation de l'Education Manuelle et Technique montrent ainsi que les elevesont une perception socialement differenciee de la pratique de celle-cicomme de la valeur des savoirs mobilises au cours de cette pratique.Liinterpretation avancee fait etat du role instrumental que pourrait jouerla representation de la discipline dans des processus psychosociaux degestion identitaireet done, en retour, du poids de ces problemes d'identitedans l'expression des representations individuelles.

Un des aspects de la situation pedagogique concerne la relation qu'entretiennent leseleves avec les contenus de I'enseignement en tant qu'objets de connaissance auxquels cescleves sont con frontes dans leur pratique scolaire quotidienne. Parmi les problemes que soulevecette relation, celui de la perception des contenus par ces memes eleves constitue une questionaIa fois tres importante mais paradoxalement negligee. Negligee en effet parce que, commele soulignent Haladyna et Thomas (1979), «Ia mesure systematique de l'attitude des elevesface iJl'ecole et aux differentes matieres constituant son programme s'est rivelee manifestementtres rare». 'Ires importante en revanche puisque, lorsque cette mesure a ete effectuee, ona toujours releve un lien positif entre une attitude favorable al'ecole comme ases differentesmatieres et la reussite scolaire (e. g. Brodie, 1964; Roshal et al., 1971; Haladyna & Thomas,1979).

Toutefois, ainsi posee en terme d'attitude, l'approche de la perception des contenusscolaires se trouve de la sorte circonscrite au recueil de l'expression evaluative d'un etat affectifinterne aI'Individu-eleve: «J'aime/je n'aime pas l'ecole» - «J'aime/je n'aime pas I'Histoire­-Geographie, les Mathematiques ou le Dessin». Par ailleurs et d'une maniere assez proche,le meme probleme est egalernent evoque et traite dans le domaine pedagogique en termesd'interets ou de motivation, Iaquelle est elle aussi definie comme un etat interne, resultatd'une tension psychologique suscite par l'objet de reference (Leif & Delay, 1965, p. 376).Dans les deux cas, attitude et motivation se voient octroyer un statut de variables intermediairesentre la perception d'une part et, d'autre part, l'action qu'elles sont censees preparer, Lespsychologues sociaux attribuant it. I'attitude un role d'orientation des conduites, les pedagogues

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accordant a la motivation et a l'interet des vertus dynamogeniques indispensables aI'assimilation de l'objet (Piaget, 1969, p. 232). Deux perspectives voisines qui ont done cecien commun de situer I'approche du probleme des rapports aux contenus a un niveaustrictement intra-individuel et d'inscrire ces rapports dans un modele general de la perceptionou, comme le releve Moscovici (1%9, 1986), serait postulee une coupure entre deux universdistincts l'un - celui de la reponse - interieur au sujet, I'autre - celui de l'objet-stirnulus- qui lui serait exterieur,

Des lors, l'adhesion a un tel cadre conceptuel pour apprehender les relations aux objetsd'enseignement n'est pas sans consequences dans Ie domaine pedagogique:

a) Un tel modele definit du meme coup Ie type d'effort didactique it entreprendre qui, dansun souci pragmatique pour ameliorer la perception du contenu-stimulus, vise essentiellementit en fournir une meilleure presentation.

b) Ces contenus, consideres comme appartenant a une realite exterieure, sont tenus pourneutres et objectifs.

c) Ce modele oriente les explications des reussites et des echecs des uns et des autres dansla restitution, Ie traitement et I'appropriation des objets d'enseignement. Puisqu'il estfait de la perception un processus individuel, I'observation de differences entre lesperformances des eleves dans des conditions communes de presentation des contenus nepeut en effet que conduire it I'attribution de ces differences it des caracteristiquespersonnelJes (eleve interesse, eleve non motive, etc...). Kaufman (1975) et Gilly (1980)montrent ainsi que les comportements attestant une mobilisation motivationnelle soutenuede la part des eleves constituent une base importante de la bonne image que les maitresse forment d'eux, au meme titre que la perception de leurs capacites proprementintellectuelles. De sorte que ce modele de la perception des contenus renforce tout enla cautionnant la tendance, deja rres pregnante, a I'explication de type dispositionnel audetriment du recours a des explications impliquant des facteurs lies it la situation,notamment dans ses dimensions sociales (Deschamps & Clemence, 1987).

Par cette derniere remarque nous touchons aux limites du modele. De fait, pour chacundes trois points precedents, un certain nombre de recherches permettent d'indiquer qu'unetelle conception des rapports aux contenus et ses corollaires pedagogiques occulte divers aspectsde la question que ces travaux rendent dorenavant difficilement contournables.

a) Par rapport aux efforts diclactiques derives d'un tel modele qui viseraient a ameliorerla presentation des contenus al'intention d'un individu-eleve considere comme generique,les recents developpements de la didactique tendent plutot it retablir cet eleve dans toutesa specificite dans la mesure oil on le decouvre dote de structures d'accueil, de pre­-conceptions diverses, lesquelJes filtrent toute nouvelle information et en organisentl'integration, De sorte que Ie project didactique devient moins la mise au point de techniquesde transmission appropriees que, pour I'heure et en prealable atoute strategie pedagogique,la necessaire connaissance des ces pre-conceptions (Giordan & De Vecchi, 1987; Bautier­-Castaing & Robert, 1988, par exemple). Ces travaux mettent notamment en valeur Ierole primordial de l'eleveen tant qu'acteur de la construction de ces structures conceptuelles«au cours de son histoire sociale, au contact de l'enseignement, mais bien plus encorea travers toutes les informations mediatisees et les experiences de sa vie quotidienne»(Giordan & De Vecchi, 1987, p. 66). Il nous parait alors pertinent pour notre proposde retenir d'une telle orientation de recherche que la perception des objets d'enseignementne prendrait corps qu'en rapport avec une construction pre-existante largement chargeed'emprunts certes scolaires mais aussi sociaux et culturels.

b) Le postulat selon lequel les contenus scolaires seraient des objets neutres, objectifs etuniversels a largement ete battu en breche par les travaux d'un courant de recherchesd'origine anglo-saxonne dont les auteurs se sont appliques amontrer combien ces contenuss'averaient en fait des entites tres relatives car porteuses d'enjeux eminemment sociaux.

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En effet, pour les tenants de ce qu'on a appele la «nouvelle sociologie de I'education»le savoir que transmet l'ecole n'est pas seulement pedagogiquement construit mais se trouveetre aussi socialement construit, I'education etant «une selection et une organisation deconnaissances legitimes» (Young, 1971). La question se pose alors ainsi: quel savoir l'ecolelegitime-t-elle, distribue-telle et aqui? Comme Ie formule Apple (1976) tout contenu doitdone se comprendre comme le resultat d'une «selection ideologique». Des lors lessignifications sociales attachees aux savoirs dispenses a l'ecole ne sauraient etre negliges.

c) Si les progres cognitifs sur lesquels se batit la reussitescolairesont tendanciellementattribuesaux capacites intelleetuelles intrinseques de l'eleve, les travaux experimentaux menes dansle cadre recent de la psychologie sociale genetique rappellent que la mobilisation de cescapacites ne s'effeetue nullement dans des situations d'acquisition de connaissancessocialement vides, et montrent que des strategies mises en oeuvre par I'eleve pour gererles dynamiques relationnelles, notamment conflictuelles, inherentes aces situations peuvents'averer elles-memes sources de progres (cf. pour revue Mugny, 1985). Plus avant, lapregnance des variables sociales de la situation pedagogique sur les operations d'acquisitiondes connaissances a ete particulierement mise en evidencepar Monteil (1988) dans la mesureou ces variables sociales ne doivent plus etre seulement considerees a titre de facteursextrinseques facilitant ou inhibant les processusd'acquisition mais aussi comme constitutivesde ces processus. C'est ainsi qu'il a pu etre montre que, dans un contexte de comparaisonsociale et dans des conditions differentes d'insertion sociale et d'attribution de valeur, deseleves elaborent des mediations propres adefinir a la fois leur conduite atenir par rapportaI'objet et 1es significations it aeeorder it eet objet, mediations qui trouvent leur traductionau niveau des acquisitions dans des performances tres contrastees, Ainsi ces travaux revelentque les performances cognitives et scolaires attestent moins des capacites dont font montreles eleves dans la perception, le traitement et I'acquisition des objets de connaissance,que de leur gestion des conditions sociales dans lesquelles ces capacites sont mobilisees.

En resume, l'ensemble des recherches evoquees ci-dessus donne a penser qu'il failledepasser la conception d'une perception des contenus scolaires apprehendee dans le cadrerestrictif d'un rapport binaire sujet-objet et comme un simple etat interne engendre par descontenus exterieurs, non-sociaux, objectifs et pour ainsi dire reifies, Deux points sont aretenir:

1- La relation aux contenus s'inscrit dans un effort dynamique de la part de l'eleve pourproduire et donner un sens a sa realite quotidienne;

2- La perception des contenus ne saurait se realiser independamment des conditions socialesde son elaboration ni independamment des significations sociales liees aux objetsconcernes.

En consequence, nous voudrions soutenir ici que les objets d'enseignement, et unediscipline scolaire en general, ne constituent pas de simples stimuli capables de generer desHats d'excitation plus ou moins intenses voire plus ou moins mornes, mais que leur perceptionresulte d'une construction - que par commodite nous nommerons «representation» ­traitant, au-dela des caracteristiques intrinseques de ces objets, la signification sociale quileur est attachee comme la signification sociale que prete l'eleve a la situation dans laquelleil est amene a les percevoir.

C'est pour repondre ade telles preoccupations qu'a titre exploratoire nous nous sommesconsacres a atteindre les expressions de cette construction dans des prises de positionsindividuelles vis-A-vis d'une discipline scolaire donnee, Ces prises de position ont ete solliciteespar l'Intermediaire de questionnaires, ce qui a oriente notre etude vers des eleves qui nesoient pas trop jeunes de facon apallier d'eventuelles difficultes de lectureou de comprehensionface ades items ecrits, Ont ainsi ete interreges des eleves du Premier Cycle de l'EnseignementSecondaire francais, c'est-a-dire des eleves scolarises en College.

Parmis les disciplines enseignees au College, nous avons retenu I'Education Manuelleet Technique: (EMT), discipline assez recemment introduite ace niveau et institutionnalisant

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une pratique educative des activites manuelles et techniques. Dans la sphere sociale productricede biens, ces activites constituent en effet des elements de choix en matiere de pesanteursociale du fait, notamment, des enjeux de valeur attaches it la place du travail manuel dansnotre societe, ou encore du fait des normes de roles en vigueur regissant Ie repartition sexuelledes travaux traditionnellement devolus aux femmes ou aux hommes. Nous voudrions deslors conjecturer que, d'une part, importees, transposees et adaptees it des fins educativesces activites et les contenus scolaires relevantde ces activites refracteront dans la sphere scolaireles enjeux qui leur sont lies, derneurant ainsi charges de significations sociales, et que, d'autrepart, conforrnement it ce qui a ete expose plus haut, les positions des eleves vis-a-vis del'Education Manuelle et Technique, expression des representations individuellesde la discipline,se distribueront selon des criteres d'appartenance aux diverses categories sociales et culturelles.En bref, nous faisons l'hypothese d'une perception socialement contrastee de la disciplinescolaire en raison de la prise en compte par les eleves des significations sociales inherentesaux contenus.

Notre demarche peut done etre rapportee it I'ensemble du champ d'etude desrepresentations sociales et des travaux qui en relevent a Ia suite de Moscovici (1961). Lesquelstravaux s'interessent a la construction symbolique par les individus de la realite de leurexperiencepersonnelle, et s'inscrivent dans une perspectivevisant a I'articulation de I'individuelet du social. En effet, au sens de Moscovici, les representations sociales ne sont pas seulementsociales en raison du caractere social revetu par I'objet de la representation ou en raisonde ce que les representations sont susceptibles de varier selon les groupes et les categoriespour en quelque sorte en figurer des attributs. Mais c'est avant tout parce que les processusde production de ces representations lui-meme est social - les representations sociales etanten effet engendrees collectivement au cours des multiples communications et echanges inter­-individuels - que I'on doit leur attribuer ce qualificatif,

En tant que produit collectif, elles emanent donc d'un certain consensus et c'est it ce titreque Mugny et Carugati (1985) ont pu parler de H<Univers consensuel des representations» etque de nombreux travaux sur les representations sociales ont tente de degager cette constructionen ce qu'elle a de partage et qu'elle figure, selon Ies definitions, le«noyau central» de larepresentation (Abric, 1984), son «noyau dun> (Mugni & Carugati, 1985), son «lieu decoherence» (Flament, 1987), ou encore un «principe generateur de prises de position» (Doise,1985). Remarquons au passage qu'une telle entreprise n'est pas sans difficultesmethodologiquespuisque, quels que soient les precedes employes pour recueillir l'expression des representationsindividuelles et en analyser les donnees, le probleme du statut epistemologique de la structureformelle ainsi degagee reste entier: «All these methods nevertheless raise the problem ofwhat the structures defined in this way actually mean» (Moscovici, 1988).

Limite it la saisie des prises de position a l'egard de contenus scolaires et a I'etude deleur distribution selon des variables essentiellementpositionnelles, notre projet ne se conformedone pas pleinement it ce qu'il est convenu d'appeler une etude de representations sociales,se situant en-deca d'une preoccupation qui viserait a atteindre Ie schema ultime a partirduquel se decline toute representation de ces contenus. Par rapport au champ de notre objet,tout au plus pouvons-nous augurer en ce qui concerne les representations sociales proprementdites que nous devrions en recueillir les effets modelisateurs,

Avant de passer a l'expose des modalites du questionnaire, une rapide presentation del'Education Manuelle et Tehnique parait utile.

L'Education Manuelle et Technique

Supprimant les diverses filieres du Premier Cyclede l'Enseignement Secondaire, la reforrnedu systerne educatif intervenue en 1975 sous le ministere de M. Haby amenagea unenseignement commun pour tous les eleves soumis a la periode d'obligation scolaire.L'unification de l'ecole primaire fut ainsi etendue au premier cycle, de sorte que, du Cours

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Preparatoire it la classe de Troisieme, tous les eleves devaient desorrnais recevoir une memeeducation de base, Cette reorganisation fut en outre accompagnee d'une redefinition descontenus des disciplines existantes et par la creation d'une discipline tout it fait inedite danssa forme: l'Education Manuelle et Technique.

Instituee ,1. titre obligatoire et a raison de deux heures hebdomadaires en 6eme-5emeou une heure-et-demie en 4eme-3eme, l'EMT devenait ainsi une discipline it part entiere,Ni occupation recreative, ni preparation precoce it une quelconque activite professionnelle,les activites manuelles et techniques s'integraient done au tronc commun de la formationgenerale creant ainsi une situation radicalement nouvelle. En effet - pour resumer ce quenous avons developpe plus longuement ailleurs (Chambon, 1985) -, bien qui officiellementintroduite des 1882dans le cadre de la formation generale, l'education manuelle connut depuisdes fortunes tres diverses et des applications en general peu it la hauteur des intentionsdeclarees. Dotees de moyens et d'horaires reels, l'EMT tranchait done par rapport aun longpasse de pratique scolaire en ce domaine et, qui plus est, proposait un enseignernentabsolument commun it tous, garcons ou filles, enfants d'ouvriers ou de cadres, queUe quesoit la profession envisagee, alors que sous des formes variees la pratique educative de cesactivites etait jusqu'alors toujours differenciee: sous couvert d'activites manuelles et/outechniques on n'enseignait pas les memes contenus atous les eleves d'une meme classe d'age,ni avec les memes methodes ni avec les memes objectifs,

Ajoutons enfin que la discipline a evolue recemment vers une forme quelque peu differentequi se met en place progressivement depuis 1986 sous Ie nom de «Iechnologie»,

Le recueil des donnees

L'ilaboration du questionnaire

Le questionnaire soumis aux 6leves a ete construit selon trois themes distincts, it savoirles caracteres attribues a la discipline, ses finalites, sa pratique.

Les caracteres attribues al'EMT par les eleves ont ete saisis par un ensemble de questionselaborees avec I'idee directrice seIon laquelle une discipline est avant tout une activite, l'oceasiond'un veritable travail scolaire. Les sujets ont donc ete interreges sur leur perception desdifferents aspects de ce travail: aspect qualitatif, intensite, difficulte, controle, etc...

Par ailleurs, il a ete retenu que la perception des caracteres d'un objet, qu'il soit physiqueou social, constituait une operation relative et pour cette raison ne saurait etre formee et donesollicitee tsolemen; des caracteres attribues aux objets d'une meme classe. Les opinions au sujetde I'EMT ne pouvant ainsi prendre de signification que confrontees aux opinions relatives auxautres matieres, la reponse des eleves a ces questions s'est done effectuee dans des tableauxpresentant une liste des differentes disciplines limitees, par commodite, au nombre de huit.

Second volet de I'enquete, la question de la finalite de l'EMT a ete adaptee de sortequ'elle ne recoure pas a un verbalisme parfois difficile a apprehender pour certains d'entreeux. Au-dela des mots, il parait raisonnable de penser que Ie choix par les eleves de telsou tels travaux particuliers pouvait tres bien traduire la facon dont ces eleves envisagentla finalite de leurs efforts en EMT.

Pour terminer, dans une derniere partie du questionnaire, les eleves devaient prononcerleur accord ou leur desaccord avec diverses assertions cette fois plus particulieres ala pratiqueet au vecu scolaire de la discipline.

La population enquetee

Repartis sur trois Colleges appartenant it des secteurs geographiques et socio-economiquesdifferents, les 270 eleves du Premier Cycle de l'Enseignement Secondaire auxquels ont etepropose le questionnaire au cours de l'annee scolaire 1982-83 etaient ages de 11 a 16 ans,en classe de 6eme, 5eme, 4eme et 3eme.

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La passation s'est deroulee de facon collective, Ie questionnaire etant presente soit par Ieconseiller d'orientation, soit par Ie professeur principal de la c1asse dont on s'est bien assurequ'il n'etait pas professeur d'EMT. II etait precise dans la consigne que le questionnaire etait a­nonyme et qu'il ne s'agissait pas de chercher la reponse juste mais d'exprimer un avis personnel.

Deux cent cinquante-deux questionnaires ont ete retenus apres elimination de quelquesquestionnaires incomplets. La repartition des eleves en fonction des variables descriptivesde Sexe, Niveau d'etude et Categorie socio-professionnelle du pere sont fournis par Ies tableaux1 et 2.

Thbleau 1Repartition des eleves enquetes en fonction du Sexe et du Niveau d 'etude

Niveau d'etude

Sexe 6eme 5eme 4eme 3eme Total

Garcons 30 40 35 39 144Filles 35 34 15 23 107Total 65 74 51 62 252

Note. Un sujet parmi les 252 n'a pas indique son sexe,

Table 1Distribution of Survey Population depending on Gender and Grade.

Tableau 2Repartition des eleves enquetes ,enfonction de la categorie socio-professionnelle de leur pete

Categoric Socio-Professionnelle SlOES, 1982du pere n C1Jo (C1Jo)

CSP 1 7 2,8 6,5Secteur agricoleCSP 2 23 9,1 10,1Industriels, artisans, et cornmercantsCSP 3 39 15,5 25,8Profess. liberales, cadres moyens et superieursCSP 4 140 55,6 48,8Employes et ouvriersCSP 5 43 17 8,8Autres categories et inactifs

Total 252 100 100

Thble 2Social background of questioned students

On rernarquera, par rapport a un bilan statistique dresse sur l'ensemble de la Francemetropolitaine sensiblement it Ia meme epoque (SIGES, 1982), que la composition de lapopulation d'eleves enquetes presente certes quelques ecarts, rnais sans toutefois laisserapparaitre un desequilibre notable.

L'analyse des donnees

Les donnees recueillies it propos de l'ensemble des disciplines seront presentees dansun premier temps de facon a apprecier les evaluations relatives a I'EMT en regard des

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evaluations portees sur les autres matieres d'enseignement. Seront ensuite exposes les resultatssignificatifs obtenus apartir de tris croises integrant les variables descriptivesde la populationBleves et appliques aux seules evaluations de l'Education Manuelle et Technique, Enfin, uneanalyse factorielle des correspondances a repris la totalite des evaluations et opinions emisesa propos de l'EMT de maniere a preciser les orientations degagees en premier lieu et alessituer dans une vue plus large.

L'EMT au sein de la hierarchie des disciplines

La simplicite meme. VEducation Manuelle et Technique ne parait pas generalernentassociee, dans I'esprit des eleves, avec I'idee d'un effort scolaire particulierement soutenu.Pres de la moitie d'entre eux estiment en effet que I'EMT n'exige d'eux que peu d'effort,voire aucun. Par ce caractere de facilite, elle s'oppose ainsi it la plupart des autres disciplinesen compagnie de I'Education Physique et sportive et des Enseignements Artistiques (Figure1). Cette meme impression de facilite rejaillit sur I'estimation de Ia longueur des etudeseffectuees par les professeurs (Figure 2). Une precision s'impose a ce sujet pour signalerou rappeler que la duree de formation d'un professeur enseignant dans un College n'esten realite aucunement dependante de la nature de la discipline enseignee, Or on releve quela grande majorite des eleves suppose que les professeurs d'EMT n'ont guere suivi que desetudes plutot courtes ou de longueur moyenne...

Plus de Libertiet d'initiative. Parmis Ies trois qualites proposees aux eleves, I'imaginations'est revelee Ia plus frequemment citee comme etant absolument necessaire pour obtenir debons resultats en EMT. 610/0 la jugent absolument necessaire, alors que cette proportion

Figure 1. Mean score for each subject-matter on the item of required effort

Enormement d"effort 4

Beaucoup d'effor-t 3

d' eFfortPeu

: lli~~l~fS~ WiGUE.. SCIENCES

1KIST -GEO.

Effort moyen 2 I-iE P S

I• EM T/-

1j cessrs - w,,,."

Figure 1. Score moyen attribue achacune des disciplines a la question portant sur I'intensitede l'effort exige,

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Figure 2. Assessment of teachers' training time. Mean score for each subject-matter.

2

T._rs1MATHw.n~ES

I WlGUEi SCrE/lCES

• HrsrolRE - GEOOI1APHlE

1t• EroCAHOIi PH'lSr~E IT SPORTIVE

I• E. at T,-• OESSlII MUSl~E

atFigure 2. Estimation de la longueur des etudes effectuees par les professeurs, Score moyenpour chacune des disciplines.

ne s'eleve qu'a 270/0 pour Ia reflexion et it 20% seulement pour Ia mernoire, Si effort il ya au COUTS des seances d'EMT, cet effort est done percu comme un effort d'imagination.L'EMT est ainsi ressentie comme une aetivite d'une nature quelque peu differente des autresmatieres, certaines faisant beau coup plus appel a la reflexion (Mathematiques, Sciences,Francais), d'autres a la memoire (Langue, Histoire-Geographie) (Figure 3).

Figure 3. Supposed essential skills to succeed in each subject-matter

KlSTOlRE - GE,lGIIAPHlE

MATK~Tl~ES

S.clEIICES

EWCATlON PHYS1!illE ET SPORTlVE

EDUCATION ioIAlllEL~E ETTECIM~E

VESSlll - llilSl!illE

Note. Pourcentage d'eleves jugeant telle qualite absolument necessaire:

~ooln. de 33 %

;mtre 33 et. 61 S

plus de 67 "

Figure3. Qualites supposees absolument necessaires pour reussir dans chacune des disciplines.

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Parallelement a ce sentiment d'une activite scolaire surtout dominee par le recours itI'irnagination correspond l'idee selon laquelle la pedagogic la mieux adaptee a la pratiquede l'EMT serait une pedagogie liberale, a savoir, comme elle etait presentee dans l'enoncedu questionnaire, une attitude de la part du professeur laissant beaucoup de liberte et deresponsabilite a ses eleves, Or ceci n'est pas un choix general dont on aurait pu prejugerqu'il s'applique it toutes les matieres, car les eleves n'optent pas en effet systematiquementen faveur d'une attitude liberale, Pour les Mathematiques, ils sont meme a 84070 pour uneattitude plutot ou meme franchement autoritaire! (Figure 4).

Figure 4. Mean score for each subject-matter on the bipolar scale «Permissive/authoritarianpedagogy».

-- STYLEliberal I autoritaire -----

Figure 4. Position moyenne attribuee achacune des disciplines sur une echelle bipolaire «Stylepedagogique franchement liberal/franchement autoritaire».

Au cours du questionnaire, il etait demande aux eleves de proposer quelles matieresils placeraient de preference le matin ou l'apres-midi. On remarquera la correlation avecles dimensions precedentes, les disciplines jugees comme reclamant plus d'effort, plus dereflexion et de memoire, et pour lesquelles une pedagogic autoritaire serait plus souhaitable,ces disciplines s'averent etre placees Ie matin. La majorite des eleves reserveraient par contreI'EMT, Ie Dessin, la Musique et I'EPS pour leurs apres-midi,

Figure 5. Distribution of the population of the questioned students depending on chosenbest time.

/'lRTlN RPRE5-/'l1D1 ...... Sans

importance ...,

~~THBlATI~ES~A ~

FRIoIO;A1S WffMW#//M~LII«lUE W//00'///A~HIMEO. Wo00"ffM~SCIENCES W~~~

L!£.! ~~~

PESSIN - IlUSI~E ~w~

EPS @~~

Figure 5. Distribution pour chaque discipline de la population «Eleves» en fonction deschoix pour la periode horaire 1a mieux adaptee,

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Pour resumer, il se degage done parmi les eleves une tendance preponderante it voirdans l'EMT une activite apparentee aux disciplines favorisant plutot I'expression individuelleet pour lesquelles ils estiment qu'un contexte plus «liberal», menageant Iiberte et espritd'initiative, est mieux adapte, Ce sont ces memes disciplines qui paraissent ne leur imposerqu'une charge scolaire reduite et qu'ils preferent pratiquer l'apres-midi. Bref, au vu de cescaracteres, des activites rompant avec un travail scolaire plus traditionnel et figurant ainsiau sein meme de l'ecole comme une alternative face it des taches ou I'emprise normativede l'institution scolaire paraft plus forte et plus contraignante,

Une utilite neanmoins admise. La coupure precedement reperee entre deux groupes dedisciplines renvoyant it un travail scolaire de nature et d'intensite differentes, n'est plus toutit fait la regle lorsqu'il s'agit pour les eleves de juger de l'utilite de ces disciplines dans leurfuture vie quotidienne ou professionnelle, Si la position hegemonique du Francais et desMathematiques demeure, I'EMT est notamment estimee it un degre d'utilite moyen cettefois comparable ad'autres matieres, par ailleurs jugees comme reclamant plus d'effort ounecessitant des etudes bien plus longues pour en acquerir la maitrise,

Tres utileaj

3-r-iFI/.\N(;A1S

......THB<ATI~ES

Tres utile

Figure 6. Mean score for each subject-matter on the item of the subject usefulness. a) dailylife, b) professional life

Peu utile

2 -"l::..UJCJ<JE. E P S~EUT\. 'SCIENCES

"KIST-IlE<l.

Peu utile

• WGJE

2JSCIENCES

I~• E P SiKIST-GEO.

1jorn,. ..sr..

Figure 6. Degre d'utilite moyen attribue it chaque discipline dans la perspective a) de la viequotidienne, b) de la vie professionnelle

Ainsi, tout en considerant l'EMT comme un travail scolaire plutdt leger, les eleves n'endevaluent pas pour autant son caractere d'utilite. Or ceci ne se produit pas en faveur desenseignements artistiques ou seulement dans une moindre mesure pour l'EPS, ce qui confereau contraste dans les jugements portes sur l'EMT un relief tout it fait singulier.

E. M. T. et appartenances

Utile en premiere analyse, le profil moyen de l'EMT ainsi dessine se voit etre largementnuance en fonction des divers criteres d'appartenance. Sans toutefois remettre radicalementen question la hierarchie etablie ni la place qu'y occupe l'EMT, I'examen des reponses enfonction des criteres d'appartenance lies au sexeet it l'origine sociale met au jour de franchesoppositions.

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LA PERCEPTION D'UNE DISCIPLINE SCOLAIRE PAR LES ELEVES 347

Filles et garcons face a['EMT. Si le niveau de la classe du College it laquelle appartiennentles eleves n'a que quelques effets mineurs sur leurs reponses, en revanche, I'appartenancea un sexe ou a l'autre determine nettement les conditions dans lesquelles ils proposent depratiquer les activites manuelles et techniques. Ainsi, les filles souhaiteraient-elles dans leurensemble une pratique des seances d'EMT it tonalite plus recreative, contrairement aux garconspour qui ce sont la choses plus serieuses.

Concernant la pedagogic qu'elles estiment la mieux adaptee, les filles sont en effet plusnombreuses pour penser qu'une attitude «liberale» de leur professeur conviendrait mieuxit cette discipline. Cette opinion est d'autant plus saillante qu'elle va a centre-courant decelles exprimees a l'egard des autres disciplines: les filles ont en effet tendance a opter pourune attitude pedagoglque toujours plus «autoritaire» que ne Ie font les garcons, A cela deuxexceptions: l'EMT et l'Education Physique pour lesquelles seulement les garcons sontsignificativement plus nombreux aestimer qu'une pedagogie «autoritaire» est la mieux adaptee,

Opposition tout aussi tranchee en matiere de finalites attribuees ala pratique de l'EMTpuisqu'il se manifeste plus chez les garcons que chez les filles une tendance assez francheit s'interesser davantage aux themes impliquant une activite manuelle (realisation d'unemaquette, reparation d'appareils) qu'aux themes centres sur la connaissance au un travailde reflexion, Chez les garcons, la curiosite cede plus largement le pas au besoin d'action.Les choix effectues sur la seconde serie de themes temoignent d'interets nettement opposes.«Apprendre adepanner une automobile» au «s'Initier au soudage des meraux» sont en effetparmi les themes les plus choisis par les garcons et en meme temps les plus rejetes par lesfilles; a Pinverse, la realisation d'une corbeille en rotin» ou celle d'un «plat cuisine», rejeteespar les garcons, sont en revanche largement preferees par les fiIles...

Par ailleurs, interreges sur la tenue vestimentaire qu'ils preferent porter lors des seancesd'EMT, les eleves fournissent des reponses que l'on constate d'une part tres contrastees selonleur appartenance sexuelle, et d'autre part, tres Iiees aux themes de travaux retenues commeIe revele une analyse factorielle des correspondances effectuee sur ces choix,

Dans I'imrnediat, ces divergences appellent deux remarques. 11 est d'abord particulierementinteressant d'observer que la on les parents, dans une enquete parallele (Charnbon, 1985),se revelent faire fi des clivages traditionnels entre les roles attribues achacun des deux sexes- les parents de filles s'alignant sur le modele masculin dominant souhaiteraient que l'EMTleur propose plutct de s'inltier au soudage des meraux ou a la mecanique automobile, leseleves, eux, semblent tres respecteux de ces normes de role, Ensuite, les cours d'EMT etantmixtes, les filles comme les garcons participant en commun aux memes activites de cuisine,couture, bois, metal ou etude de mecanismes, Il apparait done clair que cette pratique effectivene change rien lorsqu'il s'agit pour un garcon ou pour une fille d'exprimer ses preferences.

Une origine sociale particulierement influente. Garcons et filles, nous venonsde Ie voir, di­vergent essentiellement sur des questions relatives a la pratique de I'EMT (controle pedagogi­que, tenue, theme de travail). Or il s'avereque des origines sociales differentes soient assorties,elles.d'appreciations fort distinctes quant a la nature et it la valeur du travail qui s'y accomplit.

Alors qu'il n'y a pas de difference significative au sujet des qualites de reflexion etd'imagination, on observe qu'il n'y a aucun <SIeve dont Ie pere exerce une profession Iiberaleou une fonction de cadre (CSP 3) pour estimer que la memoire constitue une qualiteabsolument necessaire en EMT. Opinion qui emane de ces seuls eleves et les distingue ainside l'ensemble (Tableau 3).

L'estimation par ces memes eleves de la duree des etudes effectuees par les professeursd'EMT va dans Ie rneme sens (Tableau 4): consideres par la majorite des eleves comme ayantsuivi des etudes de duree rnoyenne, les enseignants d'EMT sont en effet supposes par lamajorite des cleves de CSP 3 n'avoir suivi que des etudes «plutot courtes» (Pour CSP3 etCSP4, x2= 13.2" p<.OO1; pour CSP 3 et autres CSP, x2

=: 8,3, p<.Ol.On remarquera sur la Figure 7 que la devalorisation de la formation des professeurs

concerne plus particulierement et de facon selective deux disciplines: l'EMT et I'Enseignement

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348 M.CHAMBON

Tableau 3Distribution des eleves des differentes origines sociales selon leur reponse ala question surles quatites jugees absolument necessaires pour obtenir de bons resultats en EMT (memoireseule)

Categoric Socio-Professionnelle

Jugements CSP 3 CSP 4CSP 1, 2, 5confondues

Jugent la Memoireabsolument necessaire 0 18 8

0010 13010 15010

Ne jugent pas la Memoireabsolument necessaire: 39 122 53

100010 87070 85%

Total 39 140 61%100% 100% 100%

Thble 3Answers ofstudents from various social backgrounds on the item of supposed essential skillsto succeed in EMT

Tableau 4Distribution des eleves des differentes origines soc/ales selon leur estimation de la duree dela formation des professeurs d 'EMT.

Categories Socio-Professionnelles

Etudes des professeurs d'EMT CSP 3 CSP 4 CSP 1, 2, 5confondues

2 Plut6t longues 0 21 101 Moyennes 16 74 35o Plut6t courtes 23 43 27

N 39 138 72

Table 4Answers of Students from various social backgrounds on the item ofEMT Teachers' trainingtime.

Artistique. On touche la, par cette simple evaluation subjective de chaque discipline, a cequ'on peut admettre comme la manifestation d'une opposition entre deux options culturellesassez differentes, caracterisees par une denegation plus marquee de toute valeur a l'expressionartistique pour l'une, aux activites manuelles et techniques pour I'autre.

Enfin, les eleves de CSP 3 portent un jugement qui leur est specifique sur I'Intensitedu travail exige par l'EMT, estimant cet effort it un degre bien moindre que l'ensemble desautres eleves (Tableau 5). Soulignons qu'une fois encore, l'EMT cristallise tout particulierementles divergences de vues entre eleves d'origines sociales differentes lorsqu'il s'agit de jugerde la valeur du travail implique par telle ou telle discipline scolaire, puisque c'est a son seulsujet qu'on releve un ecart significatif (Entre CSP 3 et CSP 4, t=2,17, p<.OS; entre CSP3 et CSP 1, 2, 5, t=4,21, p<.OOI).

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LA PERCEPTION D'UNE DISCIPLINE SCOLAIRE PAR LES ELEVES 349

Figure 7. Assessment of teachers' training time according to the students of the two socialbackgrounds CSP 3 and CSP 4

CSP4

Etudes longues

FJWJCAIS

lIATHEWoTl0lES

SCIENCESu.MIUE

HISTOIRE - GEOGRAPHIE

ElXlCATlON PHYSl!1JJE IT SPORTlVEL!!...1

I1ESSIN - MUSl!1JJE

E',·udes courtes

CSP 3

F1IA/JCAIS

lIATHEW.T101ES

UJ.lJUE

SCIENCES

HISTOIRE - GEOGRAPHIE

I1ES$IN - MUSI01EElXlCATlON PHYSI0IE IT SPI1RTlVE

Figure 7. Estimation de la duree des etudes effectuees par les professeurs des diversesdisciplines. Scores moyens attribues par les eleves des deux origines sociales CSP 3 et CSP 4

Thbleau 5Distribution des ileves des differentes origines socialesselon leur reponse a10 question portantsur l'intensite de l'effort exige par les seances d'EMT.

Categoric Socio-Professionnelle

Les seances d'EMT exigent CSP 3 CSP 4 CSP 1, 2, 5confondues

4 Enormement d'effort 0 9 23 Beaucoup d'effort 1 23 182 Effort moyen 14 41 271 Peu d'effort 17 44 15o Aucun effort 7 23 4

N 39 140 66

Table 5Answers ofStudents from various social backgrounds on the item of required effort for EMT.

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350 M. CHAMBON

Pour terminer cette partie, deux precautions valent d'etre mentionnees, La premiere pourindiquer que les deux oppositions reperees, l'une imputable a I'appartenance a la categoriesexueIle, I'autre a l'origine sociale, fonctionnent bien independarnment l'une de I'autre, garconset filles de CSP 3 par exemple partageant effectivement la meme tendance a deprecier lavaleur de l'EMT. La seconde pour signaler qu'aucune difference significative n'a ete releveeen examinant les reponses des eleves en fonction de la nature de la profession de leur pere,a savoir son eventuel caractere manuel et/ou technique. Ce n'est done pas la nature par elle­-meme de cette profession mais bien la position sociale impliquee par celle-ci qui s'avereliee a I'expression des jugements de valeur.

Quatre regards differents sur l'EMT

Une Analyse Factorielle des Correspondances a ete realisee a partir de I'ensemble desreponses au questionnaire. Les donnees ont ete saisies a l'Universite de Paris X et traiteespar Ie Centre Inter-Regional de Calcul Electronique d'Orsay selon deux programmes successifs.Le premier assurant une ventilation des questions selon chacune de leurs modalites de reponsesalors considerees a titre de variables par l'analyse et executant Ie recodage adequat des reponses(RECOD 1); Ie second se chargeant de I'analyse proprement dite (ANCORR). Ajoutons enfinque ceIIe-ci n'a porte que sur les seules questions relatives al'Education ManueIle et Technique,les modalites de reponse ayant trait aux caracteristiques descriptives de la population ont,quant a elles, ete projetees sur cette analyse en tant que variables iIlustratives.

Les axes factoriels degages par I'analyse et l'examen des proxirnites entre modalites dereponses permettent de retrouver les resultats attestes precedemrnent dans la mesure ou l'onobserve bien, d'une part, I'existence de deux dimensions - a savoir I'EMT en tant qu'activitepar elle-merne et I'EMT en tant que savoir value - et, d'autre part, 1e fait que d'une facongenerale les eleves se distribuent par rapport a ces deux dimensions selon des criteresd'appartenances sociale et categorielle, Mais plus largement, l'analyse factorielle completeet nuance notre comprehension des diverses prises de position des elevesa l'egard de I'EMT.Pour des raisons d'espace, nous ne retiendrons de cette analyse detaillee dans Chambon (1985)que, pour l'essentiel, il se degage des prises de position des eleves a propos de I'EMT secristaIIisant autour de quatre grandes orientations.

0) L'EMT est une Niche scolaire de peu de valeur: peu d'effort exige, peu de connaissancesmises en oeuvre et peu d'utilite dans la preparation a la vie quotidienne comme a lavie professionnelle. Excluant virtuellement l'EMT du domaine de la competence scolaire,ces eleves demontrent une indifference certaine sur les questions d'horaire ou de tenuevestimentaire liees a la discipline.

Cette position est plus frequente chez les eleves dont Ie pere exerce une profession liberaleou une function de cadre (CSP 3), chez les eleves qui se declarent ne pas etre attires dutout par un metier a caractere manuel ni technique.

b) L'EMT est avant tout une activite reservee ii 10 detente: les Cleves se prononcent pourune plus grande liberte et pour des seances placees l'apres-midi, L'EMT est vecuagreablement (<<En EMT, Ie temps passe tres vite»), Le port du tablier et celui de la blouseblanche s'inscrivent egalement dans cette note generale,

Cette position est plus frequente chez les fiIles, chez les eleves que envisagent des etudeslongues, et chez les eleves un peu attires par un metier a caractere manuel.

c) L'EMT est une discipline scolaire de premier ordre: eIle necessite un effort important etdes qualites de memoire et de reflexion; elle est tres utile dans la preparation a la viequotidienne et professionnelle et les notes obtenues «devraient compter plus que Ies autres».Cette valorisation du role et de la nature de I'EMT s'accornpagne de 1a conviction selonlaquelle une attitude autoritaire de la part du professeur serait la mieux adaptee, et

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LA PERCEPTION D'UNE DISCIPLINE SCOLAIRE PAR LES ELEVES 351

s'accompagne de preferences exprimees en faveur de seances placees le matin et en faveurdu port d'un bleu de travail.

Cette position est plus frequente chez les garcons, chez les elevesdont le pere est employeou ouvrier (CSP 4), artisan ou commercant (CSP 2), chez les eleves tres attires par un metiermanuel ou par un metier technique.

d) Enfin, ['EAIT apparait eire subie par des eleves qui estiment qu'aux cours des seancesd'EMT «on se salit trop» et que (de temps ne passe pas tres vite», lis sont d'ailleursd'accord avec le principe d'une reduction des activites manuelles et techniques.

Cet etat concerne le plus frequemment les eleves ni tres attires par les metiers manuelset/ou techniques ni tres attires par les etudes, les eleves dont Ie pere releve de la CSP 5(inactifs ou diverses professions).

Discussion

On conceit desorrnais que l'examen de l'attitude des eleves a propos d'une disciplinescolaire, consideree en tant qu'evaluation globale, c'est-a-dire dans le cas present la questionde savoir de la part d'un eleve s'il aime ou non l'Education Manuelle et Technique, voires'il est motive ou non par celle-ci, ne pourrait recevoir de reponse simple. La question relevememe d'une certaine incongruite pour un collegien d'origine sociale favorisee dont en effetla position tend tout entiere a signifier que I'ecole et lui n'ont rien a voir avec cal Pourles autres, Ie sens que donnent Ies eleves a leur experience personnelle de I'ecole en generalcontribue a c:e que les memes seances d'EMT prennent une realite tres differente: activitecomplementaire equilibrant par ses vertus recreatives l'effort deploye dans d'autres disciplinesjugees plus essentielles, ou bien travail scolaire de meme nature que celui requis par les autresmatieres et participant avec elles a la preparation a la vie active.

En outre, nos resultats confirment que la perception de l'EMT s'avere effectivementcontrastee en fonction de l'appartenance des eleves a des categories sociales ou sexuellesdonnees. lis montrent par ailleurs que, parmi les diverses disciplines enseignees au College,c'est par rapport it I'EMT que les positions liees it ces diverses appartenances s'affichentde la rnaniere la plus tranchee, supportant ainsi l'hypothese selon laquelle les contenus deI'EMT conservent dans Ie cadre scolaire tout le poids des significations sociales attachesaux activites productrices de biens apparentees.

Un fait retient notre attention, il concerne Ie choix des eleves pour une distributiontraditionnelle et stereotypee des travaux reserves aux filles ou aux garcons, alors que toutela pratique pedagogique des seances d'EMT respecte une rigoureuse mixite, Ceci incline itreconnaitre dans leurs choix, opinions et jugements declares apropos de I'EMT, la propensiondes eleves a s'identifier a tel groupe, a telle position sociale. Comme si Ie rapport a la pratiquescolaire des activites manuelles et techniques traduisait et trahissait avant tout un rapportaux autres. En somme, la representation aurait une fonction instrumentale de gestion del'identite sociale, definie depuis Thjfel (1972) comme la conscience que possede un individude son appartenance a un ou plusieurs groupes sociaux.

Le college, par son contexte de comparaison sociale tres saillante du fait d'evaluationsmuItiquotidiennes et publiques, apparait comme Ie lieu d'une differenciation inter-individuelleparticulierement forte comme, en revanche et de facon concomittante, tout aussi forte setrouve etre la pression d'uniformisation sociale rendue manifeste par les principes constitutifsmeme du College - unique et mixte - fonctionnant toutes categories sexuelles et socialesconfondues. Des lors prendre position par rapport al'EMT pourrait bien fournir aux elevesI'occasion de construire et d'affirmer cette identite sociale, dans la mesure ou, conformementau modele de l'identification sociale (Iajfel, 1972), Ie fait pour un individu de renforcerson appartenance it un intra-groupe et de s'y identifier parait etre un moyen de reduire lasaillance de la differenciation inter-individuelle.

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352 M. CHAMBON

Deja, Moscovici (1961) a propos de l'etude de la propagande et Doise (1973) a proposdes rapports inter-groupes ont rnis en avant Ie role des representations dans ce qu'on peutappeler la «gestion identitaire des groupes». Mais c'est dans des etudes plus recentes qu'aete souligne Ie role instrumental de I~ representation dans, cette fois, la gestion identitaireindividuelle. Pour Mugny et Papastamou (1983) l'attitude d'une facon generale peut etreconsideree comme un element regulateur des appartenances, Ie fait d'adherer plus ou moinsvivement a une position tenue pour caracteristique d'un groupe donne renforcant plus aumoins le sentiment de l'appartenance a ce groupe. Mugny et Carugati (1985) dans Ie senspeut se voir OU la representation se voit organiseeet modelee sous une forme propre a preserverune identite menacee.

Ainsi s'ecarte-t-on quelque peu de l'idee d'une simple determination des representationsindividuelles par d'eventuelles representations collectives, ou l'appartenance apparaitrait commepremiere qui dicterait la commune facon dont chacun des membres d'un groupe se representetel ou tel objet social. Si l'on peut discerner qu'i! y a bien un lien entre les representationsindividuelles et des elements representationnels socialement deja constitues, ce lien n'est rendueffectif que par le biais de dynamiques identitaires. En effet, les filles interrogees nereproduisent pas la representation qu'ont les filles en general de l'Education Manuelle ettechnique tandis que les garcons reproduiraient celie de leur categorie, mais on doit concevoirque filles et garcons, eleves d'une origine sociale particuliere ou d'une autre, construisentplutOt une representation qui leur permette de s'affirmer comme teIs. Les processus identitairesagissent done a titre de facteurs eausaux dans l'aetualisation de representations socialementdisponibles et interpretees par un eleve comme specifiques du groupe auquel il cherche as'identifier. Dans le cas de l'EMT, les normes de roles en matiere de division sexuelle dutravail fournissent la base de l'identification a un sexe donne, des options ideologiquesconcernant la valeur des activites manuelles et techniques en tant que mise en oeuvre d'unsavoir fournissent, elIes, la base de l'identification a une categorie socio-cuIturelle particuliere,

Pour revenir anotre hypothese de depart, nous venons donc de verifier que la perceptionde l'Education Manuelle et Technique par les eleves s'avere bien contrastee selon des critereslies a leurs diverses appartenances, ce que nous avons interprete comme Ie resultat du traitementconjoint des aspects identitaires constitutifs de la situation sociale dans laquelle s'effectuela perception et des significations elles-memes sociales attachees a l'EMT. II reste neanmoinsa diseuter de ce que recouvre plus precisement la prise en compte par les eleves de cessignifications sociales inherentes aux contenus.·

Tout d'abord, l'EMT etant dispensee uniformement a tous, il est clair que les oppositionsobservees au niveau des representations ne peuvent etre induites par la pratique elle-memeet que les significations sociales sur lesquelles les uns et les autres fondent diversement leurposition ne saurait eire inferees a partir de cette pratique. Si bien que la dimension socialedes contenus parait moins pouvoir etre saisie lors de cette pratique de la discipline que setrouver restituee par les eleves parce qu'elle les sert dans l'interpretation sociale de leur proprerapport aux autres, Nous avancions au debut de ce travail I'Idee selon laquelle les contenusde I'EMT importeraient en quelque sorte dans le cadre scolaire l'habillage social des activitesauxquelles ils sont apparentes, nous sommes maintenant tentes d'attribuer aux eleves unrOle actif dans ce phenomene,

A propos du cas particulier de l'Education Manuelle et Technique, il s'etablit en definitiveque la representation d'une discipline par un eleve se construit conformement au sens queeet eLeve entend donner a La situation sociaLe dans Laquelle il est amene a fa pratiquer: Sidans le cas de l'EMT, les references normatives et ideologiques socialement disponibles pouretayer une telle elaboration ne font pas defaut, on peut supposer que pour d'autres disciplines,ou d'autres taches scolaires, aux implications sociales moins imrnediatement perceptibles,l'eleve pourrait etre des lors porte a leur en assigner d'autres, ceci d'une facon propice ala realisation de ses projets identitaires, A cet egard, on sait deja depuis les travaux de Lemaine(1979) combien des sujets-etudiants savent faire preuve d'originalite pour interpreter une tachedans une situation d'identite personnelle menacee,

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LA PERCEPTION D'UNE DISCIPLINE SCOLAlRE PAR LES ELEVES 353

Enfin, suggeree par l'approche descriptive de la presente etude de la representation d'unediscipline scolaire, l'Idee de I'implication de cette representation dans des processus psycho­-sociaux plus larges et sa construction en adequation avec le role instrumental tenu au seinde ces processus, nous amene a. envisager sa propre mise a. l'epreuve experimentale, Pournous permettre de mieux comprendre comment, dans queUes insertions sociales plusparticulieres mais aussi sous queUes conditions pedagogiques plus precises plus au moinsdifferenciatrices voire plus au moins integratrices, des eleves investissent-ils d'une dimensionsociale les contenus scolaires et les taches qui s'y referent. Comprendre comment cessignifications sociales peuvent moduler et conditionner les attentes, les strategies, lesexplications developpees vis-a-vis des performances obtenues, et surtout dans quelle mesuresont-elles susceptibles de moduler et de conditionner les performances elles-memes,

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The students' perception of a subject,Representation and identity effects

The students' perception of a subject is approached as being apure construction aiming at giving a meaning to their real everydayschool life and, therefore, is not done regardless of the social conditionsin which they were worked out, nor the social meanings conferred onthis subject and his contents. A survey done on French students froma comprehensive school about their own representation of «EducationManuelle et Technique» shows that, according to theirsocialbackground,the students have a different perception of its practice and of the valueof the knowledges called for. A further interpretation puts forward theinstrumental role that might be played by the representation ofa subjectin psychosocial processes of identity and then, in return, the weightof these problems of identity when working out this representation.

Mots des: Representation, Discipline scolaire, Identite.

Revision recue le: Mai 1989

Michel Chambon, Laboratoire de Psychologic Sociale, Universite Blaise Pascal Clermont Ferrand II, 34 avenue Carnot,63000 Clermont Ferrand.

Theme actuel de recherche:

Insertions sociales et performance scolaire,

Publications les plus representatives en Psychologie de l'Education:

Chambon, M. (1990). La representation des disciplines scolaires par les parents d'eleves: enjeux de valeurs, enjeuxsociaux. Revue Francaise de Pedagogie, 92, 31-40.