La Constitution de 1958 -...

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I. Introduction générale : Sources et significations de la Constitution de 1958 Au XIX, les gouvernants ont eu peur qu'enseigner le droit constitutionnel soit un risque. Car la Constitution est quelque chose de très politique. Aujourd'hui c'est plus juridique, mais ça reste une traduction : écart grand entre la lettre et l'esprit, cf la distinction de Émile [Bouyer] entre les arts à un temps (sculpture) et les arts à deux temps (théâtre, musique : interprétation). Idem pour le droit constitutionnel : écriture plus interprétation. Sens apparaît avec la Révolution française et étatsunienne. Deux processus : d'une part le peuple français devient titutalire du pouvoir constituant, en faisant du roi un organe constitué et non plus constituant. D'autre part écriture d'une Constitution libérale, c'est-à-dire qui a pour objet de restreindre l'exercice de la puissance publique. Le constitutionnalisme est une doctrine selon laquelle il est souhaitable qu'une Constitution existe et : Qu'elle soit écrite (Suède 1720) Qu'elle organise une séparation des pouvoirs Qu'elle soit supérieure à la loi ordinaire (septembre 1787 par convention de Phidadelphie, d'où solennité), car l'objectif est : fixer principes philosophiques, politiques, moraux, ... qui ont besoin d'une stabilité renforcée. Objet de la matière : le droit constitutionnel s'inscrit dans une perspective normative. Fixer règles du jeu. Objet = l'État, et la limitation de son pouvoir (différent de la science politique dont le but est d'étudier le pouvoir sous toutes ses formes). Transformation profonde du droit constitutionnel ces dernieres années ; devient un système de règles de droit obligatoires et juridiquement sanctionné, succès des Cours constitutionnelles. De politique il devient juridictionnel (c'est-à-dire dit par le juge). Il est devenu comme les autres droits, c'est-à-dire un droit c'est-à-dire un ensemble de règles. Donc de plus en plus habitude d'étudier la jurisprudence des Cours constitutionnelles. Mais il ne faut pas réduire à ca. Sur la V ième , il faut rompre avec le fétichime constitutionnel : il faut inscrire l'étude de la V ième dans un cadre plus large. De la Révolution à 1848, 3 grandes traditions : Révolutionaire (jusqu'au consulat) : marqué par la toute puissance de l'AN Napoléonienne qui marque une revanche de l'exécutif Enfin de 1914 à 1848, tradition parlementaire, avec limitations mutuelles du législatif et de l'exécutif. Après 1848 il faut trouver une synthèse dans l'équilibre de 1875, brisé par la crise du 16 mai, puis par la « Constitution » Grévy. En 1958 on cherche à se soustraire de ce modèle de République parlementaire. Titre I. Introduction Chapitre I. Les leçons de l'histoire constitutionnelle française Après l'abdication de Napoléon, il existe en 1814 une vacance du pouvoir. À l'opposé des excès du bonapartisme, il apparait indispensable de doter la France d'un régime politique équilibré dès 1814. Plusieurs textes dont la Charte, affirment un constitutionnalisme libéral. Toutefois aucun de ces textes n'instaurent un règime à proprement parler parlementaire du fait de l'absence de

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I.

Introduction générale : Sources et significations de la Constitution de 1958

Au XIX, les gouvernants ont eu peur qu'enseigner le droit constitutionnel soit un risque. Car la Constitution est quelque chose de très politique. Aujourd'hui c'est plus juridique, mais ça reste une traduction : écart grand entre la lettre et l'esprit, cf la distinction de Émile [Bouyer] entre les arts à un temps (sculpture) et les arts à deux temps (théâtre, musique : interprétation). Idempour le droit constitutionnel : écriture plus interprétation.Sens apparaît avec la Révolution française et étatsunienne. Deux processus : d'une part le peuplefrançais devient titutalire du pouvoir constituant, en faisant du roi un organe constitué et non plus constituant. D'autre part écriture d'une Constitution libérale, c'est-à-dire qui a pour objet de restreindre l'exercice de la puissance publique.Le constitutionnalisme est une doctrine selon laquelle il est souhaitable qu'une Constitution existe et :

Qu'elle soit écrite (Suède 1720) Qu'elle organise une séparation des pouvoirs Qu'elle soit supérieure à la loi ordinaire (septembre 1787 par convention de Phidadelphie,

d'où solennité), car l'objectif est : fixer principes philosophiques, politiques, moraux, ... qui ont besoin d'une stabilité renforcée.

Objet de la matière : le droit constitutionnel s'inscrit dans une perspective normative. Fixer règles du jeu. Objet = l'État, et la limitation de son pouvoir (différent de la science politique dont le but est d'étudier le pouvoir sous toutes ses formes).Transformation profonde du droit constitutionnel ces dernieres années ; devient un système de règles de droit obligatoires et juridiquement sanctionné, succès des Cours constitutionnelles. De politique il devient juridictionnel (c'est-à-dire dit par le juge). Il est devenu comme les autres droits, c'est-à-dire un droit c'est-à-dire un ensemble de règles. Donc de plus en plus habitude d'étudier la jurisprudence des Cours constitutionnelles. Mais il ne faut pas réduire à ca.Sur la Vième, il faut rompre avec le fétichime constitutionnel : il faut inscrire l'étude de la V ième dans un cadre plus large. De la Révolution à 1848, 3 grandes traditions :

Révolutionaire (jusqu'au consulat) : marqué par la toute puissance de l'AN Napoléonienne qui marque une revanche de l'exécutif Enfin de 1914 à 1848, tradition parlementaire, avec limitations mutuelles du législatif et

de l'exécutif.

Après 1848 il faut trouver une synthèse dans l'équilibre de 1875, brisé par la crise du 16 mai, puis par la « Constitution » Grévy. En 1958 on cherche à se soustraire de ce modèle de République parlementaire.

Titre I. Introduction

Chapitre I. Les leçons de l'histoire constitutionnelle française

Après l'abdication de Napoléon, il existe en 1814 une vacance du pouvoir. À l'opposé des excès dubonapartisme, il apparait indispensable de doter la France d'un régime politique équilibré dès 1814. Plusieurs textes dont la Charte, affirment un constitutionnalisme libéral. Toutefois aucun de ces textes n'instaurent un règime à proprement parler parlementaire du fait de l'absence de

dispositif relatif à la responsabilité politique du cabinet, donnant ainsi à la Chambre un moyen pour contrebalancer le droit de dissolution. La coexistence de tels instruments placera pour la première fois en France les pouvoirs exécutifs et législatif sur une pied d'égalité.Les ministres sont absorbés dans l'unité de l'exécutif. Le dogme de l'indépendance des organes est très rigide. Quand apparaît un « pouvoir ministériel » (B. Constant) indépendant par rapport au monarque, peut apparaître un parlementarisme car face à face direct monarque/Chambres laisse la place au rôle paratonnerre des ministres.Mécanismes classiques :

droit de pétition adresse au discours du trône (réponse des députés) questions mise en accusation (responsabilité pénale)

Rajouts de la monarchie de Juillet :

interpellation enquête parlementaire refus de voter le budget

Durant toute cette période toutes les familles politiques (même les ultras) voient que le parlementarisme peut les servir. De plus le rôle du monarque est questionné : comment conserver une autorité monarchique tout en conservant la nation dans ses droits ? Inviolabilité royale pour justifier son effacement. Chateaubriand dans La Monarchie selon la Charte met en exergue cela. Benjamin Constant pouvoir royal = povr apolitique, neutre, d'arbitrage. Thiers : « le roi règne ms ne gouverne pas », Guizot : « le trône n'est pas un fauteuil vide » pour la Monarchie de Juillet.

Section 1. L'instauration de la République parlementaire et la crise du 16/05/1877

Lois de 1875 s'inscrivent ds la tradition parlementaire et se bornent à renvoyer à la pratique desChartes, modestes par leurs tailles. Régime parlementaire dualiste susceptible de fonctionner dans une République ou dans une Monarchie modérée.Gouvernement responsable devant les Chambres et devant le Chef de l'État, car compromis entre forces politiques de l'Assemblée de Bordeaux par lequel pour la première fois la forme républicaine du gouvernement se voir associée à des mécanismes caractéristiques de la monarchieparlementaire. Les lois de 1875 pour les rapport entre les pouvoirs s'inspirent de la pratique des chartes, empruntent droit de dissolution et responsabilité des ministres. Article 3 loi constitutionnelle du 25 fév 1875 dispose : « Le Président de la République peut sur l'avis conforme du Sénat, dissoudre la Chambre avnt l'expiration légale de son mandat. ». Sénat est donc l'arbitre du conflit entre Chef de l'État/députés. Mais le Sénat est composé pour 1/4 d'inamovibles, donc personne ne doute qu'il refusera jamais. À côté de la responsabilité pénale des mins appraît pour la première fois de manière explicite leur responsabilité politique. Article 6 de la même loi : « Les ministres sont solidairement responsables devant les Chambres de la politique générale du gouvernement et individuellement de leurs actes personnels ». Consacre donc une pratique.Crise du 16 mai change tout. La question est : quelle serait la nature du parlementarisme désormais consacré ?La crise du 16 mai répond : le laborieux équilibre est rompu au profit des Républicains qui imposent une nouvelle lecture de la Constitution plus conforme à la tradition révolutionnaire. Le 16 mai 1877 le maréchal de Mac Mahon, Président de la République, adresse à Jules Simon

(République modéré) une lettre désapprouvant sa politique (lui reproche de n'avoir pas protesté après vote de la Chambre hostile à la papauté), application du principe dualiste. La lettre signifie la mise en jeu de la responsabilité du gouvernement devant le Chef de l'État. Jules Simon démissione, remplacé par un orléaniste : le duc de Broglie. Le 21 juin la Chambre des députés (Républicaine à majorité des 3/5) vote ordre du jour déclarant que ce gouvernement n'a pas la confiance. Le 25 juin, Mac Mahon prononce la dissolution de la Chambre avec l'accord du Sénat.Dans cette crise s'oppose deux conceptions des lois constitutionnelles de 1875 :

Mac Mahon : dualisme, la prérogative parlementaire doit équilibrer la prérogative parlemnetaire.

Républicains : le centre unique du pouvoir est la chambre des députés. Celle-ci est la seuleémanation directe de la volonté nationale : c'est un système moniste (orientation du ministère : seulement des chambres) qui n'entrait pas dans la conception du constituant de 1875 mais qui dérive du développement des institutions.

La question de la nature est indirectement posée en octobre 1877 à l'occasion de l'élection de la chambre. Victoire des Républicains, donc fin du parlementarisme dualiste. Mac Mahon après s'y être refusé déclare se soumettre; Constitution du gouvernement Dufaure (républicain modéré). Son message adressé aux chambres le premier décembre marque la fin de l'interprétation dualiste des institutions. Dufaure affirme son irresponsabilité et renonce à la direction du ministère : « l'indépendance des ministres est la condition de leur responsabilité »Le 5 janvier 1879 les républicains obtiennent également la majorité au sein du Sénat. Mac Mahon démissione. Jules Grévy dans son message de remerciement à l'AN qui vient de le désigner, le 6 février 1879 : « soumis avec sincérité à la grande loi du régime parlementaire, je n'entrerai jamais en lutte contre la volonté nationale exprimée par les organes constitutionnels ». Donc après, effacement du Chef de l'État + non usage du droit de dissolution, on s'éloigne de ses fondements orléanistes pour se modeler sur l'héritage révolutionnaire. La République est désormais complètement aux mains des républicains.

Section 2. La dénaturation du régime parlementaire

Grévy consacre la supériorité du parlement. Avec la « Constitution Grévy », les pouvoirs du Chef de l'État deviennent purement nominaux. Grévy refuse de nommmer président du conseil le leader de la majorité parlmentaire (Gambetta) (car...) donc ça affaiblit la position du président du conseil et déplace encore davantage le centre de gravité vers la chambre et favorise l'instabilité ministérielle. Droit de dissolution politiquement disqualifié. Les présidences ultérieures avalisent cette disqualification. Libére la chambre de des députés de l'un des rares contrôles susceptibles de limiter son pouvoir. L'effacement du président ne profite pas au gouvernement, ni à son chef, car il n'y a aucune procédure particulière pour la mise en jeu de la responsabilité du gouvernement, qui prend l'habitude de se retirer dès qu'il est mis en minorité, même si c'est sur une question secondaire. Le président du conseil en l'absence de groupes politiques et partis structurés, s'emploie avant tout à construire des coalitions qu'à tout momentle Parlement peut faire éclater. L'instabilité ministérielle est la conséquence de la pratique, du fait de la valse des gouvernements, la République devient régime des moindres pouvoirs (gouvernement trop faible, parlementaires dépassés). Celui-ci est recueilli par l'administration car celle-ci reste en place.Méfiance par rapport à l'exécutif débouche sur omnipotence parlementaire. Car député = attache locale, attentif à défendre le citoyen « contre les pouvoirs » (Alain). Représentants souverains, car forment le gouvernement (consultation, confiance) et contrôlent de très près son action.

Ce régime n'a jamais réussi à maîtriser la fonction gouvernementale, car fragilité des partis français. Pas de système de partis susceptibles de défendre le régime . Les défauts appraissent plus nettement car tentatives de réforme condamnées. D'où blocage, paralysie du système. Mais grand mérite a été de montrer que le régime républicain peut tenir. Est né de la défaite (1871), meurt de la défaite (1940)La IVième République : Constitution de 1946 inspirée par l'ambition de tirer la leçon de l'échec. Adaptation du régime britanique en ce qui conerne le rôle du PM pour plus de stabilité et d'autorité. Les mécanismes du parlementarisme rationalisé sont inventés pour assurer la stabilitégouvernementale et pour restreindre le pouvoir des chambres.Mais l'histoire de la IV témoigne de l'impossibilité de réformer le parlementarisme français sansremise en cause profonde de la souveraineté des députés et des partis. Rationalisation du parlementarisme se heurte à la compétition politique marquée par la faiblesse de la discipline partisane au Parlement, l'autonomie des groupes parlementaires par rapport aux partis politiques,l'independances des parlementaires au sein de ces groupes, et la précartié des alliances électorales. On a aucune impression de volonté commune or le principe de base c'est la collégialité et la solidarité gouvernementale : suppose unité de pensée et d'action du gouvernement. Or la IV se caractérise par le fait que les ministres n'entrent pas dans la discipline de gouvernement. Ils sont et demeurent des hommes de partis. Se sentent davantage en dette par rapport au parti que par rapport au Président du Conseil.Sous la IVième la démocratie est d'essence représentative, pas de procédés de démocratie directe, et cette suprématie est d'autant plus forte que le pouvoir exécutif est placé dans une situation de dépendance : c'est l'échec de la rationalisation.

Chapitre II. La restauration du principe de la séparation des pouvoirs

Section 1. L'élaboration et les sources intellectuelles de la Constitution du 4 octobre 1958

§ 1. Le processus d'élaboration

En juin 1958, le gouvernement se retire et appelle le général de Gaulle. Car depuis mai 1958 impuissance à résoudre le conflit algérien. Les gouvernements se succèdent et seul point commun : défense du régime, et militarisation du pouvoir. Le 13 mai 1958, soulèvement à Alger. CSP présidé par le général Massu. Quelques jours plus tôt, Pflimlin désigné président du conseil. Établi large majorité. Mais le général de Gaulle apparaît comme le seul à même de préserver la République. Dès le 15 mai celui-ci fait savoir qu'il est prêt à assumer les pouvoirs mais n'entendait pas se soumettre à la procédure ordinaire d'investiture pour le Chef de Gouvernement.Démission de Pierre Pflimlin. Le président Coty envoie le 29 mai un message au Parlement proposant investiture du général de Gaulle. Menace de démissionner si on ne l'investit pas. Ce message (à peu près comme question de confiance) a un caractère inhabituel car les usages de la IVième interdisait au président de faire pression sur l'AN. Le 1er juin, de Gaulle après son discours d'investiture et son refus de participer au débat est investit par l'AN par 339 voix contre 224. Nommé constitutionnellement. Aucune rupture dans la légalité. Toutes les procédures ont été suivies : de Gaulle est le dernier chef de gouvernement de la IVième.De Gaulle est conscient qu'il ne peut proposer de Constitution qu'en ayant les pleins pouvoirs. Annonce qu'il va demander à l'AN de donner mandat au gouvernement d'élaborer puis de proposer « des changements indispensables ». Pour ce faire, il convenait de modifier l'article 90 de la Constitution de 46. Article relatif à la procédure de révision de la constitution. L'AN et le Conseil de la République votent à la majorité qualifiée (3/5ième) la loi constitutionelle du 3 juin qui a pour objet de déroger aux dispositions de l'article 90. Ceci en confiant le pouvoir de

révision au gouvernement qui venait d'être investit par l'AN. Outre cet objet, cette loi va également fixer le cadre de l'élaboration de la Constitution. Car le général de Gaulle sait très bien qu'il ne peut recevoir l'assentiment de l'AN. Cette disposition n'est pas sans rappeler la loi du 10 juillet 1940. Toutefois, en dépit de certaines analogies, la démarche adoptée par le général est toute autre : en effet la loi du 3 juin 195! subordonne la délégation du pouvoir constituant à des conditions très précises, garantissant le respect d'un minimum de légitimité démocratique (principe selon lequelle tout pouvoir devait résulter du S.U., responsabilité politique, séparation des pouvoirs, indépendance des juridictions).

§ 2. Les sources

Sources multiples et parfois contradictoires. D'une part en effet il y a volonté de rompre avec latradition du régime parlementaire à la française, et la volonté d'un régime fort et stable. D'autre part volonté de se rattacher à la tradition républicaine. Certaines sources doctrinales trouvent leur source dans la IIIème République et dans l'examen des erreurs de la IVième. En 1931, dans son ouvrage La loi, expression de la Volonté Générale, René Carré de Malberg propose l'introduction du référendum et du contrôle de constitutionalité de la loi. Parallèlement un courant réformiste, dont les deux grands noms sont Roger Bonnard et Joseph Barthélémy, reconnait dans les années 30, l'importance de l'État, et la nécessité de repenser la démocratie sur de nouvelles bases. Joseph Barthélémy suggère tout particulièrement de rationaliser la procédure d'élaboration de la loi. Jean Barthélémy sera garde des sceaux sous Vichy, tout en étant pour l'État de droit. Maurice Hauriou soutient également l'idée d'un contrôle de la loi ainsi que l'élection du Président au Suffrage Universel direct. Quant au monde politique, à gauche Léon Blum veut renforcer la position du chef de gouvernement. Tandis que André Tardieu propose le renforcement du droit de dissolution, le référendum législatif, et l'encadrement du pouvoir des parlementaires en matière financière. La quasi-totalité de ces propositions seront reprises sous une forme ou une autre dans le texte de 1958.Outre ces sources anciennes, la source essentielle de la Constitution de 1958 résulte de la pensée constitutionnelle du général de Gaulle, centrée sur la restauration de l'État. Dans son discours de Bayeux, prononcé le 16 juin 1946, c'est-à-dire quelque jours après l'élection d'une ANC. Ce discours évoque de nombreux thèmes que l'on retrouve dans la Constitution de 1958. La thèse principale : l'État doit être au-dessus des partis politiques au nom de l'intérêt général. Au sein de l'État c'est le pouvoir exécutif et plus précisément le Chef d'État qui doit incarner ceci, car il est au-dessus des contingences partisanes. Dans la tradition française, les partis n'ont jamais eu bonne presse, du fait de la conception unitaire de la souveraineté. Plus problème du scrutin d'arrondissement. Les partis politiques se sont greffés sur un système de notabilité, ils ne sont jamais incorporés. Selon Georges Burdeau, la Constitution de 1958 restaure à côté du pouvoir du peuple, le pouvoir d'État. Le pouvoir d'État engage la collectivité pour l'avenir, il statue pour la nation toute entière, et il est exercé par le Chef de l'État qui incarne la nation dans son devenir. En parvenant à réconcilier l'autorité avec la démocratie, la Constitution du 4 octobre doit rappeler que l'État, et non pas le peuple, constitue le lieu/le siège du pouvoir.On peut dire que la Constitution du 4 octobre a voulu restauré la principe de la séparation des pouvoirs. Au terme de la loi de 1958 « Le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif doivent être effectivement séparés, de façon que le gouvernement et le parlement assument chaucun pour sa part et sous sa responsabilité, la plénitude de leurs attributions. ». Ca n'implique en aucun cas l'abandon du régime parlementaire, puisque le texte de la loi du 3 juin ajoutait immédiaement « le gouvernement doit être responsable devant le parlement ». Cette volonté d'effectuer une séparation effective témoignait d'un retour à un Montesquieu bien compris. Séparation à l'anglaise n'interdisant pas une collaboration entre les pouvoirs. Formule de Debré discours devant le conseil d'État toujours selon la procédure du 27 août 1958 : « Un chef d'État et un

parlement séparés encadrant un gouvernement issu du premier et responsable devant le second ». En principe la séparation des pouvoirs implique que les mêmes personnes ne peuvent appartenir au législatif et à l'exécutif. Pourtant cette situation est toujours la règle en régime parlementaire. Les ministres sont toujours choisis parmi les parlementaires, et c'est même là unemanifestation de leur responsabilité (cf Allemagne et Angleterre). Or lorsqu'en 1958 les rédacteurs de la Constitution insistait sur la nécessité d'établir une véritable séparation des pouvoirs, il pensait surtout à une indépendance organique entre les deux pouvoirs. Il s'agissait de mettre un terme à un situation qui faisait du gouvernement « un assemblage de délégations » et qui autorisait chaque ministre à se considérer comme le mandataire d'un parti politique. Il était donc impératif que le gouvernement ne procède plus du parlement. Pour ce faire, la Constitution aretiré au parlementaires la possibilité de composer le gouvernement (article 8), et elle a posé le principe de l'incompatibilité des fonctions ministérielles avec tout mandat parlementaire (article 23). Par réaction à la tradition républicaine antérieure, le grand principe que la Constitution met en oeuvre peut se formuler ainsi : le Gouvernement est un organe d'action, et non pas de représentation des partis parlementaires. Le parlement est un organe de contrôle, et non pas de gouvernement. On peut dire que le constituant s'éloigne ainsi de l'imprégnation rousseauiste qui est restée forte dans la conception française. Rousseau admettait en effet que le pouvoir exécutif devait être un représentant de la VG, présente dans l'assemblée du peuple. Le pouvoir exécutif n'était qu'un instrument d'exécution. Au contraire la réforme de 1958 va jusqu'à faire du gouvernement un législateur (certes subordonné du fait de son pouvoir réglementaire propre/autonome).Comment qualifier ce nouveau régime ? Debré le définit comme régime parlementaire. Si on reprend le texte originel de la constitution, on est conduit à reconnaitre la justesse d'une telle qualification, car les critères du régime parlementaire sont réunis :

Bicéphalisme de l'exécutif Responsabilité du gouvernement devant le parlement Droit de dissolution Règle du contreseing

C'est le modèle de la Grande-Bretagne qui inspire la volonté de Michel Debré d'instaurer un véritable régime parlementaire, c'est-à-dire de renforcer le gouvernement et son chef. Dans ce discours du 27 août, il explique que le gouvernement a voulu rénover le régime parlementaire, et même « l'établir car pour de nombreuses raisons la République n'a jamais réussi à l'instaurer » Ce qui fait l'originalité de ce régime parlementaire, c'est son caractère rationalisé, rééquilibré au profit de l'exécutif. Dès le départ, ce régime parlementaire possède trois caractéristiques quiont facilité l'évolution ultérieure :

Le caractère dualiste de l'exécutif La rationalisation des rapports exécutif/législatif L'existence de pouvoirs présidentiels propres (non soumis à contreseing)

Section 2. La réhabilitation du pouvoir exécutif

La cinquième République est gouvernementale, et à cet égard elle réalise l'ambition contrariée des pères fondateurs de la IIIième qui souhaitaient donner à la République figure de gouvernement.

Il s'agit de mettre un terme à l'instabilité ministérielle. La Constitution va charger l'exécutif de créer les conditions d'une discipline indispensable au fonctionnement du régime parlementaire.

De plus face au développement de l'État-providence, il importe au constituant de donner à l'exécutif les moyens de légiférer. D'où renforcement du pouvoir réglementaire au profit du gouvernement.

Pour le général de Gaulle il est en effet primordial que l'exécutif ne soit pas réduit à un simple prolongement du parlement. Dans le discours de Bayeux (juin 1946), de Gaulle avait précisé clairement que le choix doit s'opérer entre un modèle où le gouvernement gouverne et un modèle où le gouvernement est désigné par une Assemblée omnipotente qui dicte sa volonté. Le garant d'un tel pouvoir exécutif non inféodé au parlement, c'est le Président de la République placé au-dessus des-partis. C'est son indépendance qui va lui permettre d'assurer les fonctions de continuité, d'arbitrage, et de se poser en garant de l'indépendance nationale. De Gaulle inflige nettement la responsabilité de la Défaite de 1940 à la carence de l'exécutif, empéché d'agir par la logique institutionnelle de la IIIème. Pour remplir ses missions le Président doit disposer du droit d'en appeler au peuple, lorsque circonstances graves. Le Président a le droit de dissolution, dont il est seul à apprécier l'opportunité d'usage, et il peut également recourir à la procédure référendaire.ConclusionUn nouvelle hiérarchie des légitimité est établie : la légitimité de suprématie de l'État, lieu de l'intérêt général, va désormais prévaloir sur la traditionnelle légitimité purement représentative,portée par le Parlement.

Section 3. L'établissement d'un parlementarisme rationalisé

En 1958, prétendre réaliser la stabilité et la cohérence gouvernementale, tout en conservant le système parlementaire, cela s'est révélé être une entreprise très dificile et délicate. Le pouvoir constituant va donc s'inscrire dans le discours du parlementarisme rationalisé.Cette expression est forgée par Maurice Mirkine-Guetzévitch désigne une modalité apparue en 1919 avec la Constitution allemande de Weimar. Le parlementarisme rationalisé s'analyse désormais comme un ensemble de règles juridiques destinées à préserver la stabilité et l'autorité du Parlement, même en l'absence d'une majorité parlementaire constante. Le remède de la Vième devait consister, selon François Goguel, en « un régime parlementaire sans souveraineté parlementaire », le parlement n'est plus le dépositaire exclusif de la souveraineté nationale. Article 3 : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voir du référendum ». Les représentants comprennent les députés et le Chef de l'État (d'autant plus à partir de 1962...). Le Parlement ne peut plus assimiler a priori sa volonté à la volonté populaire, cette dernière pouvant désormais s'exprimer par d'autres voies.Pour éviter le retour de l'instabilité, on a retiré au Parlement une partie importante des prérogatives dont il disposait sous les III et IV : il n'élit plus le Chef de l'État (collège électoral), il peut encore renverser le gouvernement mais il ne peut le faire qu'en suivant des procédures très complexes. En outre il est désormais soumis au contrôle du Conseil constitutionnel. L'article 61 alinéa 1 montre la fin de la souveraineté parlementaire, faisant obligation aux deux chambres de soumettre avant leur application leur réglement au Conseil constitutionnel. Les lois constitutionnelles de 1875 et celle de 1946 avaient tenté d'introduire lesrègles essentielles de la séparation des pouvoirs, mais ces tentatives étaient restées vaines car l'organe législatif pouvait passer outre. Donc la Constitution de 1958 a mis fin à cette possibilité en instituant avec le Conseil constitutionnel une garantie procédurale de ses principales

dispositions. Le pouvoir d'élaboration des normes s'est déplacé au profit de l'exécutif, il résulte de deux phénomènes :

Expropriation de la loi qui se manifeste par le développement d'un pouvoir réglementaire autonome, la pratique des délégations du pouvoir législatif (ordonnances) et par la concentration des pouvoirs en cas de crise

Emprise croissante obtenue par l'exécutif sur l'élaboration de la loi, en effet non seulement l'excécutif joue un rôle déterminant dans l'initiative législative, mais encore les travaux parlementaires sont très fortement encadrés par l'exécutif.

ConclusionDésormais la loi est concue comme un moyen de traduction et réalisation d'un programme gouvernemental.

Chapitre III. L'exercice de la souveraineté

Section 1. Le sujet de la souveraineté dans la Constitution de 1958

L'opposition des théories de la souveraineté nationale et de la souveraineté populaire est largement répandu sous la IIIième. La Constitution de 1875 ne procédait à aucune attribution explicite de souveraineté. Beaucoup de juristes ont donc fait appel à une distinction élaborée sous la monarchie de Juillet, selon laquelle on peut opposer à un peuple concret et atomisé, une nation abstraite dissociable des individus. Affirmer une telle disctinction consiste à observer qu'au moment où la Révolution française transfère la puissance souveraine, deux conceptions de la souveraineté ont été défendues. Ce débat revenait à répondre à la question suivante : la souveraineté est-elle attribuée à une entité abstraite qui est la Nation ? Ou est-elle distribuée entre tous les citoyens ?En 1830 la bourgeoisie se dit héritère de la Révolution, mais en même temps ce sont Guizot, c'estCasimir Perrier, ... qui par démocratie entendent suffrage censitaire, et exercice du pouvoir réservé à ceux qui en sont capables. Question de la légitimité du pouvoir qui vient d'être créé : qui est souverain ? En plus on ne fait que modifier la Charte.Pour le constituant de 1789-1791, la souveraineté est exclusivement nationale. Consacré dans l'article 3 de DDH : « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation, nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expréssement ». Dans cette doctrine due à Sieyès, la nation n'est pas le peuple, mais une idée qui ne prend corps que par le biais de la représentation. La nation morale est distincte des individus qui la composent. Il faut en déduire que l'Assemblée exprime non pas les volontés de électeurs mais celle de la nation. Par les procédures de la délibération, l'Assemblée sera à même de dépasser les intérêts particuliers.Seuls les professionels de la politique sauront dégager un dénominateur commun. De plus Sieyès par son idée du gouvernement-médiat veut conserver une distance entre ceux qui gouvernent et ceux qui sont gouvernés, celle-ci étant inscrite selon lui dans la nature des relations sociales. La souveraineté de l'élite fera le bonheur de la communauté.A l'opposé >les constituants de 1793 défendent le principe de la souveraineté populaire. Le pouvoir appartient à la somme des souverainetés particulières. Chacun d'entre-nous détient une parcelle de la souveraineté.Comment en arrive-t-on à l'affirmation d'une souveraineté populaire ? Sieyès affirmait qu'il n'y avait pas de volonté commune hors de l'AN. Or à partir du moment où dans l'esprit des révolutionnaires, la souveraineté est tenue pour inhérente au corps de la nation, apparaît du même coup le danger permanent de son dévoiement par l'Assemblée. Pour éviter ce danger, la fonction constitutionnelle du roi comprend l'exercice d'un droit de veto suspensif. La conception

des modérés est ébranlée par la dynamique des conflits et l'Assemblée, les clubs et la législative.La dérive révolutionnaire commence par le sentiment que le veto royal s'est transformé en instrument de détournement de la VG.L'insurection du 10 août 1792 va installer à la place du roi, le peuple commis à la surveillance des députés. Dans la mesure où l'Assemblée s'identifie au peuple, elle peut aussi se substituer à lui, et elle ne peut prendre des décisions contraires à l'intérêt de ce peuple (puisqu'elle est le peuple). ceux qui prétendent le contraire sont des factieux, c'est-à-dire des groupes qui sortent de l'unité organique du peuple. Aux yeux des gouvernants, la distance entre gouvernants et gouvernés est considérée comme nocive, donc il faut dépasser la séparation société civile/État. Comme le montreront les libéraux du XIX dont Benjamin Constant, car cette séparation est justement constitutive de la modernité (distinction liberté des Anciens, qui se croient libres en participant à la chose publique, alors que la liberté des modernes c'est le bonheur privé). Pour les révolutionnaires du CSP, le corps du peuple doit incarner la même unité que celle qu'ils cherchent à imposer à ses députés. D'où : « La nation est unanime ou elle n'est rien ». Dans les faits, un tel principe ne peut conduire qu'à la Terreur. Période marqué par la purge de tous les éléments de désunions, pensée marquée par l'idée d'une réincarnation du pouvoir en un peuple purifié, et une violence « regénératrice ».Trois observations :

Ces deux modèles entraînent des conséquences institutionnelles différentes. La souveraineté nationale implique un régime représentatif. Souveraineté populaire s'exprime par la procédure du référendum. En outre, dans la doctrine de la souveraineté nationale, le citoyen, lorsqu'il vote, exerce une fonction conférée par la nation (et non pas un droit). Etat de droit: souveraineté populaire

Les Constitutions de l'époque révolutionnaire sont prises comme archétypes. Deux précisions : la Constitution de l'an I réputée fondée sur la souveraineté populaire, ne prévoit le référendum de manière discrète et prohibe le mandat impératif. La Constitution de l'an III réputée fondée sur la souveraineté nationale, organise le S.U.

La doctrine de la souveraineté nationale fut largement dominante dans la tradition politique française, à tel point que sous la IIIième, la souveraineté nationale s'est confondue avec celle des représentants. Les publicistes de la IIIième opposent très clairement nation et corps électoral pour affirmer l'indépendance des gouvernements parrapport aux SU, et pour préserver les équilibres classiques du régime parlementaire.

À la Libération, les constituants de 1946 ont réalisé une synthèse entre ces deux conceptions de la souveraineté. L'ancienne théorie révolutionnaire prend fin avec la Constitutiond'octobre 1946, avec le référendum constituant : le peuple français retrouve la parole pour l'approbation de la nouvelle constitution. La souveraineté nationale est transférée au peuple français. La tradition d'une Constitution « acte de souveraineté nationale » est remplacé par le principe « acte de la souveraineté du peuple ». Principe posé par l'article 3 alinéa 1 « La souveraineté nationale appartient au peuple français ».Cette modification est poussée plus loin avec la Constitution du 4 octobre : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum ». La souveraineté est désormais exercée non seulement par les représentants mais aussi par le peuple dans le cadre d'une démocratie semi-directe. La formule de l'article 3 signifie que dans une démocratie semi-directe, le peuple peut exercer au même titre que ses représentants la souveraineté nationale.

Section 2. Les modalités d'adoption et de révision de la Constitution

Il convient de souligner la séparation fondamentale du pouvoir constituant et du pouvoir constitué. Le pouvoir constituant, pris comme pouvoir créateur de la société politique, est généralement défini comme un pouvoir initial, autonome et inconditionné.

Initial dans la mesure où rien n'existe au-dessus de lui, ni en fait ni en droit, et dans la mesure où il exprime directement la volonté du souverain. Défini les objectifs et les méthodes, et il n'est pour cela tenu par aucune règle préexistante.

Autonome : aucun individu, aucun groupe ne peut invoquer un quelconque droit pour influencer le souverain et limiter sa liberté.

Inconditionné : aucune limite ne peut-être fixée à son exercice.

L'acte constitutionnel une fois élaboré, le constituant s'efface derrière son oeuvre, c'est alorsau pouvoir institué d'agir dans le cadre de la norme fondamentale. Cette distinction tend surtout à préserver l'acte constituant et à travers lui la souveraineté. Le peuple ne possède plus que des pouvoirs qui lui sont reconnus par la constitution. Il a épuisé tous ses pouvoirs dans l'acte constituant.Cette séparation est la condition de la distinction entre loi constitutionnelle et loi normale. Ce pouvoir constituant ne peut être suprême que si la loi qu'il édicte est inviolable, en particulier parle législateur ordinaire. La technique de distinction consiste à distinguer non pas par le contenu mais par les procédures.

§ 1. Les modalités d'établissement des Constitutions

a. L'opération constituante Les conditions dans lesquelles les normes constitutionnelles sont élaborées sont un problème, dont la solution dépend à la fois du titulaire de la souveraineté et des modalités de son expression. Il existe un lien entre l'exercice du pouvoir constituant et l'attribution de la souveraineté. Quant à la question du titulaire du pouvoir, il est admis qu'il appartient au peuple. Le transfert de souveraineté s'effectue lors des Révolutions, avec les premières constitutions écrites. Deux modalités d'expression : distinction pouvoir constituant dérivé/originaire.Le pouvoir constituant est dit originaire lorsqu'il intervient ex nihilo dans le cas d'un État nouveau, à l'occasion :

De l'institutionnalisation d'un pouvoir jusque là personnel D'une accession à l'indépendance D'une révolution.

Il est institué s'il est mis en oeuvre par des organes que la Constitution a établi (pouvoir de révision) et dans les limites que celle-ci a fixé.

b. Les modes d'élaboration Il existe différentes formes :

Autoritaire (Charte octroyée de 1814) Démocratique où le peuple est invité à élaborer lui-même la loi fondamentale de la

communauté (1776) Accords internationaux qui se substituent parfois (Constitution de Bosnie du 14

décembre 1994 : c'est le premier exemple d'État dont la Constitution est l'annexe d'un accord international, arrêté par un pouvoir constituant composé du président des États-Unis et des représentants du peuple bosniaque).

c. La préparation du texte La représentation est devenue inévitable. Adoptée dès la fin du XVIII. Mais danger : membres de l'AC peuvent donner de très grands pouvoirs à la future AN. Il y a eu des révolutions camérales : une assemblée appelée pour exercer un pouvoir institué s'arroge, en l'absence d'habilitation expresse, un pouvoir constituant originaire. Si la technique de l'assemblée constituante fut très populaire dans le monde après la II GM, elle est quelque peu abandonnée aujourd'hui, au profit d'une élaboration confiée à des experts.Dans le cadre de la Constitution française d'octobre 1958, si elle est a bien été préparée par lepouvoir exécutif, celui-ci était tenu d'élaborer un texte conformes aux principes fondamentaux de la tradition républicaine, tels qu'ils avaient été définis dans la loi constitutionnelle du 3 juin.d. L'adoption du texte L'approbation est donnée par une autre instance que la Convention. Aux États-Unis, le texte élaboré par la Convention de Phidadelphie en septembre 1787 fut ensuite approuvé par les États fédérés, et adopté seulement en juin 1(9|7)88.En Françe, adoption par le peuple. La constitution de 1958 fut adoptée par le peuple. Le procédé est démocratique s'il ne dégénère pas en plébiscite.

§ 2. Les modalités de révision

Un révision n'a pas toujours la même finalité :

Certaines sont destinées à corriger des lacunes ou des imperfections techniques (exemple : révision de décembre 1954 avait pour objet de remédier à un défaut de la procédure d'investiture du président du conseil : la Constitution de 1946 prévoyait que lePrésident du Conseil se présente deux fois devant l'Assemblée).

D'autres marquent un tournant dans l'orientation politique d'un régime. Par exemple, révision du 14 août 1884 qui avait pour objet de rendre la République républicaine (membres des familles régnantes inéligibles, suppression des messes au début des sessions parlementaires, et suppression des sénateurs inamovibles)

La révision est susceptible d'emprunter deux voies :

La révision formelle ou juridique La révisions informelle ou politique

a. La révision politique d'une constitution La procédure de révision est généralement prévue par la Constitution elle-même : cela semble être au départ un problème technique ou juridique. Toutefois c'est sans compter avec la vie du régime ou le comportement des acteurs. Toujours distorsion entre le texte applicable et le texteappliqué. Pour qualifier une telle pratique, on parlera de coutume constitutionnelle ou conventionconstitutionnelle. Elle constitue une révision politique de la constitution, ou une interprétation plus ou moins laxiste qui s'impose grâce à l'accord des acteurs politiques, et ceci tant que le consensus persiste (archétype : Angleterre). Cela laisse inchangé le texte formel de la constitution. Le droit positif peut ainsi déborder les textes constitutionnels, et la pratique politique peut engendrer la création de normes constitutionnelles, qui complètent ou abrogent des dispositions écrites : par exemple le parlementarisme.

b. La révision formelle La Constitution doit l'emporter sur tous les autres organes juridiques, selon la doctrine du constitutionnalisme. D'où l'intérêt d'une disctinction entre souplesse et rigidité.

Constitution souple : Une Constitution est souple lorsque sa révision n'est soumise à aucune procédure particulière, et s'opère selon les modalités prévués pour l'adoption des lois ordinaires (Royaume-Uni, Israel, IIIème). Elle est définie par son contenu plutôt que par sa forme. Cela permet d'assimiler une constitution souple à une Constitution matérielle : les constitutions souples sont le plus souvent coutumières.

Constitution rigide : Une Constitution est dite rigide lorsque sa révision exige une procédure particulière. Une Constitution rigide s'identifie le plus souvent à une constitution formelle.

Comment définir une Constitution ? En prenant en compte le contenant, ensemble de règles juridiques élaborées et révisées selon une procédure spéciale et supérieure à celle utilisée pour les lois ordinaires.Les normes constitutionnelles sont selon cette conception l'expression du peuple souverain, donc elles ne doivent pas pouvoir être modifiées aussi facilement que la loi. Sinon le législateur viendrait à confisquer sa volonté en sustituant à celle du souverain). Il s'en suit une hiérarchisation (loi inférieure à la constitution) et donc un contrôle de constitutionnalité.Une Constitution doit bénéficier d'une garantie de stabiilité et de longévité, et ne doit pas pouvoir être modifiée au gré de l'alternance politique. Il existe des degrés de rigidité. Sous la IIIème, la rigidité était très faible, puisque la différence essentielle entre les lois constitutionnelles et les lois ordinaires résidait dans le fait que les premières étaient votées par les deux chambres réunies, et les secondes séparement par chacune d'elle. La rigidité est bien plus forte sous la Vième.

Lorsqu'elle est rigide, la procédure de révision comporte trois phases :

L'initiative Le vote L'adoption définitive

La révision est ainsi étroitement limitée dans sa démarche de manière à parvenir à un équilibre raisonnable entre le souci d'adapter la Constitution à de nouvelles réalités et celui de préserver son identité.Il y a eu révision à deux reprises de la clause de révision : d'une part par la loi du 10 juillet 1940 ;et en 1958, par dérogation à l'article 90 de la Constitution de 1946, la loi de révision du 3 juin attribue le pouvoir constituant au gouvernement du général de Gaulle.

c. L'article 89 et les procédures de la Constitution de 1958 Deux procédures différentes.

Si la révision a pour origine une initiative du Chef de l'État, sur proposition du Premier ministre, la loi constitutionnelle, une fois votée dans les mêmes termes par les deux assemblées, doit :

o Soit être approuvée par référendum o Soit, si le Président le décide, être soumise au Parlement siègant en Congrès.Le

Congrès du Parlement doit adopter le projet à la majorité des 3/5ièmes Si c'est une initiative parlementaire, la loi constitutionnelle doit être nécessairement

soumise à référendum, après son adoption dans les mêmes termes par les deux assemblées.

Sur le pincipe la Constitution appartient d'abord au peuple avant d'appartenir à ses repreésentants. Toutefois, avant le référendum du 24 septembre 2000 (quinquennat), la Constitution n'avait jamais été modifiée par la procédure référendaire prévue à l'article 89. Elle avait jusqu'alors été modifiée dans le cadre de l'article 11. Toute les autres révisions ont émanées d'une initiative de l'exécutif et ont été adopté par le Parlement réuni en Congrès. À l'origine le recours au Congrès devait faire figure d'exception, et devait être utilisé pour les révisions à caractère technique ou urgent. De plus, l'intervention du président est un moyen pour donner le maximum de solennité au projet de révision, présenté comme l'affaire de toute la nation et non pas celle de la majorité (conjoncturelle). La proposition du premier ministre est justifié par la nécessité que la proposition soit faite par le gouvernement politiquement responsable agissant avec le soutien de la majorité parlementaire.On peut penser que le Président n'aurait pas la possibilité de soumettre au référendum une proposition de révision de la Constitution qui aurait été rejeté par le congrès. Sinon ça seraitune procédure d'appel à l'arbitrage populaire après que les Assemblées se soient prononcées. Ce serait opposer le peuple souverain à ses représentants, ce qui n'est pas conforme à l'idée du mandat représentatif. De plus, ce serait faire courir au Président de la République le risque de voir sa responsabilité mise en jeu si le peuple rejetait la proposition de révisionn, et d'être doublement désavoué.

d. La controverse relative à la révision de la Constitution par l'application de l'article 11 Une dérogation à l'article 89 a été introduite par la pratique en 1962 lorsque De Gaulle a voulu modifier l'article 7 de la Constitution pour instituer l'élection du président au suffrage universeldirect. Il sait très bien que les parlementaires sont opposés à cette idée. Donc il veut contournerl'obstacle, il soumet directement le projet de révision au référendum, en invoquant non pas l'article 89 mais l'article 11. Ceci a déclenché une controverse constitutionnelle, qui revient en 1969 avec le projet constitutionnel visant l'organisation régionale et la transformation du Sénat.

Arguments favorables à la démarche de de Gaulle

En 1962, on pouvait évoquer le fait que l'article 11 autorise le président de la République à soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics. Comment une révision de la Constitution ne serait-elle pas relative à cette organisation des pouvoirs publics ?

La Constitution porte un article 3 dans lequel il est indiqué que la souveraineté appartientau peuple français, qui l'exerce notamment par la voie du référendum. Or la révision de laConstitution est une question fondamentale de la souveraineté nationale. Étant souverain,le peuple ne saurait être lié par une procédure particulière. Pour admettre que seule la voie de l'article 89 soit ouverte pour procéder à une révision, il faudrait accepter que le pouvoir constituant originaire ait complétement disparu au profit du pouvoir constituant institué/dérivé.

Arguments défavorables :

La théorie du pouvoir constituant originaire suppose qu'il n'y a pas de Constitution soit parce qu'il n'y en a jamais eu, soit parce que celle qui existait a été abolie par une révolution. Mais en octobre 1962 il existe bien une constitution. Le peuple français renonçait donc à exercer son pouvoir constituant autrement que selon les lois/procéduresqu'il vait lui-même défini.

Il existe une différence entre projet de révision et un projet de loi relatif à l'organisation des pouvoirs publics.

ConclusionLa pratique instaurée par de Gaulle en 1962 appelle les plus expresses réserves. La Constitution de 1958 par son titre XVI comporte un ensemble cohérent intitulé « De la révision », puisqu'elle institue dans le cadre de l'article 89 deux procédures cohérentes de révision. Donc aucune raisonque l'article 11 institue accessoirement une procédure parallèle à celle de l'article 89.On remarquera également que si la décision de de Gaulle peut être considérée comme inconstitutionnelle, il n'en reste pas moins que le vote référenaire du peuple souverain couvre l'irrégularité commise.

e. La limitation du pouvoir constituant dérivé L'impératif de suprématie constitutionnelle a conduit le constituant à traduire cette idée endroit positif en soustrayant à toute révision un noyau de disposition et de principes intangibles. La révision n'est donc pas libre. La loi fondamentale allemande du 23 mai 1949 interdit ainsi toute modification qui porterait atteinte au principe du fédéralisme, des droitsfondamentaux et de l'État de droit. La rédaction des articles 1 et 20 de cette loi fondamentale allemande est si large que pris au pied de la lettre il pourrait faire de la loi fondamentale une Constitution immuable. Le problème est donc celui de la supra-constitutionnalité.Il s'agit de savoir si malgré les règles relatives à la révision posées par les dispositions constitutionnelles, il n'y aurait pas d'autres règles ou principes qui interdiraient certaines révisions constitutionnelles. En France ce thème de la supra-constitutionnalité a été débattu lorsnotamment du processus de ratification du traité de Maastricht.Le 9 août 1992 le Conseil Constitutionnel rend une décision, il avait été saisi sur le fondement de l'article 54 de la Constitution pour savoir si certaines clauses du traité étaient anti-constitutionnelles. En effet, le principe de l'article 54 affirme que si un traité comporte une clause contraire à la constitution, il ne peut être ratifié qu'après révision de la Constitution. Cette procédure témoigne de la supériorité du droit international sur le droit interne. Le Conseil Constitutionnel affirme effectivement que le traité nécessite une révision constitutionnelle.Donc loi constitutionnelle du 25 juin 1992 adoptée par le Congrès à Versailles. Suite à ceci, certains sénateurs et certains députés saisissent à nouveau le Conseil Constitutionnel sur le fondement de l'article 54. Là le travail demandé au juge du Conseil Constitutionnel est de se faire le juge de cette loi, qui est déjà constitutionnelle : ce qui revenait à lui poser la question suivante : si vous estimez qu'il vous est possible de juger la constitutionnalité d'une loi déjà constitutionnelle ; c'est alors qu'il existe des normes plus constitutionnelles que d'autres.Le juge répond à la question le 2 septembre 1992 par la décision « Maastricht 2 ». Elle aborde directement la question de la possibilité de soumettre une loi constitutionnelle au contrôle du juge constitutionnel. Les requérants (Charles Pasqua) n'invoquaient pas la méconnaissance par le constituant l'existence de normes du bloc de constitutionnalité (soit Constitution, préambule de 1958, qui renvoie à celui de 1946, qui renvoie à la DDH, les PFRR) ; mais ils faisaient valoir que la révision du 25 juin avait laisser subsister la contrariété de certaines clauses du traité avec diverses dispositions constitutionnelles non modifiées. On reprochait au constituant d'avoir eu recours à un subterfuge pour ne pas reconnaître clairement qu'il était porté atteinte à des dispositions essentielles de la Constitution telles que la souveraineté nationale. Il y aurait des limites implicites, par delà le texte, aux modifications susceptibles d'être apportées à la constitution.

Le Conseil constitutionnel pose le principe selon lequel le caractère souverain du pouvoir constituant interdit toute forme de contrôle de constitutionnalité. Il oppose une fin de non-recevoir général aux requérants. Selon le juge il n'il y a aucune limite à la volonté du constituant, la dérogation à des règles constitutionnelles antérieures peut être implicite comme explicite, toutefois, le Conseil marque les limites du pouvoir de révision de la constitution. Il rappelle que leconstituant de 1958 a interdit toute révision à certains moments :

En cas de vacance de la président de la République (article 7C) Lorsque la patrie est en danger (article 16C) Lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire (article 89C-4).

En outre la Constitution contient une condition de fond qui limite l'étendue du pouvoir de révision: article 89 alinéa 5, au terme duquel « la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une révision ». Donc le pouvoir constituant est souverain mais « dans les limites » fixées par la constitution. Le pouvoir constituant souverain n'est pas limité par les règles qu'il a fixé, dans l'exercice de sa souveraineté, il a toujours la possibilité d'abroger les limitations qu'il avait un jour posé. Donc il n'y a aucune possibilité de recours si le pouvoir constituant prenait la précaution de supprimer les limites posées à l'existence du pouvoir de révision.Que faut-il penser de cette réponse ambigue ? La question posée est celle de la possibilité d'un contrôle juridictionnel des révisions constitutionnelles. Le professeur Favoreu a par exemple conclut que le pouvoir constituant est limité et que le juge constitutionnel accepterait de vérifier si la loi constitutionnelle a bien respecté ces limitations. Le Conseil Constitutionnel admettrait donc ainsi la recevabilité d'un recours contre une loi constitutionnelle dès lors qu'elle aurait été adoptée par le Congrès et non pas par la voie du référendum. Une telle interprétation de la décision Maastricht II semble difficile à défendre car il apparait bien plus que la thèse de l'inexistence de normes supra-constitutionnelles a été clairement affirmée par lejuge. Dans sa décision du 2 septembre 1992, le Conseil Constitutionnel juge qu'il est loisible au pouvoir constituant « d'abroger, de modifier ou de compltéter des dispositions de valeur constitutionnelle, dans la forme qu'il estime appropriée ». Rien ne s'oppose à ce que le constituant puisse introduire dans le texte de la Constitution des dispositions nouvelles qui dérogent à une règle ou à un principe de valeur constitutionnelle. On en conclut que le juge a éliminé toute idée de surpa-constitutionnalité.Le doyen Vedel propose une vision opposée à Favoreu. C'est dans la tradition française : les lois sont toujours déclarées dans un cadre. Déclarer les droits en 1789 c'est absorber le droit naturel dans le droit positif.Décision du 26 mars 2003 rendue à propos de la révision de la Constitution relative à la décentralisation, est venu exclure toute compétence du Conseil Constitutionnel en la matière, et ceci au terme d'une interprétation stricte de sa propre compétence. Le fait que le Conseil Constitutionnel se refuse ainsi à exercer son contrôle sur les lois de révision, diminue la garantie du respect du pouvoir constituant originaire. Toutefois l'idée selon laquelle il appartiendrait au pouvoir constitué d'opposer des principes fondamentaux au pouvoir pouvoir constituant va à l'encontre du principe essentiel de la constitution normative : la soumission des pouvoirs constitués au pouvoir constituant. Admettre qu'il existe des principes de valeur supra-constitutionnelle c'est accepter une limitaiton de la souveraineté du peuple et par conséquent mettre en cause le principe démocratique. Si le juge pourrait se faire usurpateur de la souveraineté.Première observation : en déclarant intangibles certains éléments de la constitution, le pouvoir constituant originaire a simplement entendu les soustraire à la procédure de révision, ces dispositions ne sont donc non révisables qu'en vertu de la Constitution elle-même.

De plus, comme le précisait déjà la Constitution de 1793, une génération ne peut assujetir à ses lois les générations futures.

II.

L'organisation des pouvoirs

Titre I. « Le présidentialisme majoritaire » (Doyen Vedel)

L'établissement d'un exécutif bicéphal s'inscrit dans la tradition constitutionnelle française mais les relations entre le président et le gouvernement sont très différentes de celles qui existaient sous les Républiques précédentes.

Chapitre I. Pouvoir et irresponsabilité politique du Président de la République

Institution en 1958 d'un Chef de l'État qui détient un véritable pouvoir, et qui apparait comme lapremière magistrature du régime. Le régime s'est employé à donner au président les moyens de gouverner.Tout d'abord le constituant soustrait le Président de la République aux variations aléaotoires du parlement, qui ne peut ni le désigner ni le renverser. Collège électoral de 80k votants.En outre en découplant le pouvoir exécutif entre un Président de la République et un Premier Ministre, le constituant s'est attaché à immuniseré l'institution présidentielle, contre les dangers d'un parlementarisme triomphant. Il s'est également efforcé d'établir un rapport d'inégalité entre les deux pouvoirs en dotant le Chef de l'État de l'arme de la dissolution (quandelle est bien utilisée...). Le Président de la République n'est pas un représentant. Il est un organe d'État. Il faut rappeler que les publicistes de la fin du XIXième ont pensé l'État comme la personnification de la Nation, dans le but de s'opposer à la représentation parlementaire accuséede confisquer la souveraineté du peuple à son profit.Certains auteurs ont soutenu que cette théorie du Président organe de l'État, avec la révision constitutionnelle de 1962, était entrée dans une logique représentative plutôt qu'incarnative. Mais la révision n'a pas eu pour effet de transformer radicalement le sens de l'institution : dans d'autres démocraties parlementaires, l'élection du Chef de l'État au suffrage universel direct n'a pas fait de lui le monarque républicain qu'il est devenu en France (cf Autriche et Irlande).La position du président s'avérera néanmoins fragile. En effet à la suite des élections législativesde mars 1986, le président ne peut plus compter sur l'acquiescement de la majorité des députés, on reviendra à un conception plus restrictive de la fonction. La Constitution de 1958 semblait instituer une dyarchie avec le Premier Ministre ; on peut estimer que ça n'a fonctionné qu'à partir de 1986. Celui-ci s'est alors replié sur ses pouvoirs constitutionnels en s'efforçant de faire prévaloir une interprétation lui conférant un certain pouvoir d'empêcher.

Section 1. Les pouvoirs propres et partagés du Président de la République

§ 1. Les pouvoirs propres du président

L'institution par la Constitution de pouvoirs propres du président constituait une innovation considérable. En effet, sous les IIIième et IVième Républiques, tous les actes du président devaient être contresignés par un ministre.Le constituant de 1958 définit les pouvoirs propres du Chef de l'État comme dispensés du contreseing ministériel. Ses pouvoirs n'engagent donc pas la responsabilité politique du

gouvernement. Il existe donc des actes politiques dont personne n'est politiquement responsable.Les pouvoirs propres comprennent l'exercice de prérogatives essentielles car elles sont dévoluespour assurer « par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État » (article 5). Ceci confère au Président de la République un rôle de gardien de la Constitution. Les pouvoirs propres lui permettent de trancher ou de faire trancher par le peuple ou le juge constitutionnel les conflits qui vont opposer les pouvoirs publics. Cet « arbitrage sportif » (Vedel) renvoit à la vision de Michel Debré exprimée le 27 août 1958 : « le président n'a pas d'autre pouvoir que celui de solliciter un autre pouvoir [...], mais cette possibilité de solliciter est fondamentale ».Il est apparut que de Gaulle voyait sa fonction comme un arbitrage actif. Le système de la Vième République montre un pouvoir présidentiel que l'on peut analyser en terme de pouvoir neutre (B. Constant), conformément à la théorie d'un parlementarisme dualiste classique/idéalisé. Mais aussi en terme d'arbitrage politique, ce qui correspondait d'ailleurs à la pratique effective de ce que fut le parlementarisme classique. C'est précisement en raison de sa duplicité que le concept d'arbitrage est retenu.L'ambiguité de ce concept tolérait les interprétations les plus diverses, permettait donc de concilier les tenants de la tradition républicaine et partisan de la conception gaullienne.Les pouvoirs propres du Président de la République comprennent :

Droit de message au Parlement (article 18). Moyen classique, héritier du discours du trône : car interdit d'entrer dans les enceintes parlementaires. Le Chef de l'État peut intervenir quand il le souhaite, même en dehors des sessions, et il n'est pas tenu de le faire. Le message est lu par le président de l'Assemblée.

L'ensemble des actes relatifs aux rapports entre le Chef de l'État et le Conseil Constitutionnel : nomination de trois membres, désignation de son président, saisine d'un traité, saisine d'une loi. On peut estimer que le droit donné au président de saisir le Conseil Constitutionnel d'une loi votée avant promulgation lui donne une droit de veto suspensif, dont l'issu est juridictionnelle et non pas politique (à la différence du veto du président américain). Inflexion sensible du rôle du président à partir de la fin du septenat de Valéry Giscard d'Estaing, d'un président qui préside, d'une autorité éminente ; on passe à un président - selon Lagroye - « pontife constitutionnel ». Il peut revendiquer une maîtrise de la parole constitutionnelle, Valéry Giscard d'Estaing insiste sur ce rôle de protecteur des libertés fondamentales. L'arrivée de la gauche au pouvoir va parachever l'évolution et va consolider ce rôle comme un acteur qui est autorisé à par constitutionnellement de la constitution. Carl Schmitt fait du Chef de l'État (et pas le juge) le contrôleur de la Constitution en Allemagne.

Les pouvoirs exceptionnels de l'article 16. Il s'agit de l'éventualité d'une dictature à laromaine, concentrant provisoirement tous les pouvoirs entre les mains du seul Chef de l'État. Cette possibilité est invoquée par De Gaulle dès le discours de Bayeux au vu de l'impuissance du président Albert Lebrun en juin 1940. Dispositif propre au régime autoritaire.

La mise en oeuvre doit répondre à des conditions de fond :

o mise en danger de l'intégrité du territoire o de l'indépendance de la nation o menace sur ses institutions

Le contrôle de l'exercice de l'article est réduit au minimum.

Il faut distinguer la décision par laquelle le président décide l'application de l'article 16 et l'ensemble des décisions dans le cadre de son application. La première est un acte de gouvernement insusceptible de contentieux. Les mesures prises sont qualifiées de décisions qui ne sont que partiellement soumises au contrôle de légalité assuré par le conseil d'État. De plus le flou entoure la durée d'application du régime de l'article 16. Celle-ci ne connaît pas de limite effective. En 1961, la mise en oeuvre de l'article 16 par le général a fait l'objet de nombreuses critiques car la situation fut très rapidement rétablie à Alger, alors que le régime d'exception se prolongea jusqu'au 30 septembre. Aucune contrainte de droit ne retient véritablement le gardien de l'État en dehors de l'obligation de sauver la patrie. Et dans ce cas la sauvegarde des sujets ne dépend plus que de la vertu du sauveur.

Droit de grâce. Mais il n'est pas en droit dispensé du contreseing : il est considéré par tradition comme un pouvoir propre, le contreseing n'étant que formel.

§ 2. Les actes présidentiels contresignés : les pouvoirs partagés

Il faut rappeler que le contreseing est une technique inventée au XIXième pour rendre compatible l'existence d'un Chef de l'État irresponsable et le régime parlementaire dont le principe est justement la responsabilité du gouvernement devant le Parlement. Dans un tel système parlementaire le Chef de l'État ne peut exercer ses prérogatives constitutionnelles sans l'accordd'un membre du gouvernement. Le signataire porte la responsabilité politique de l'acte. La règle en régime parlementaire est la suivante : cette exigence du contreseing signifie que le pouvoir appartient à celui qui contresigne. Il implique normalement une co-décision. La pratique présidentialiste de la Vième République s'éloigne de cette conception en donnant l'illusion que le Chef de l'État dispose juridiquement d'un pouvoir de décision pour ses actes contresignés.Les actes contresignés sont classiquement soumis à la signature du président pour qu'il dispose d'un pouvoir de garant et d'arbitre. Or sous la Vième l'interprétation présidentialiste confère au président un véritable pouvoir de décision en ces matières. Les décisions relevant des pouvoirs propres sont essentielles à la marche de l'État, néanmoins l'autorité quotidienne s'exerce en faitdavantage à travers les actes contresignés qu'il est amené à prendre. Ces actes sont la marqued'un parlementarisme bicéphal et de la nécessaire entente entre les deux têtes de l'éxécutif pour conduire l'action gouvernementale. Il s'agit principalement du pouvoir réglementaire et du pouvoir de nomination et également ce qu'on a appelé curieusement le domaine réservé, c'est-à-dire la conduite des relations extérieures.

Sur proposition du Premier Ministre, le président nomme les ministes et met fin à leur fonction. Il préside (article 9) le conseil des ministres.

Dans le domaine diplomatique, le président négocie et ratifie les traités. Il tient également d'important pouvoir dans sa qualité de chef des armées, qui lui donne la faculté d'engager les troupes française dans des conflits armés. Dans ces domaines il ne peut agir sans l'accord du gouvernement et notamment sans l'accord du Premier Ministre.

La Constitution a confié le pouvoir de nomination au président. Il nomme non seulement les plus hauts fonctionnaires de l'État, mais aussi aux emplois civils et militaires de l'État: les conseillers d'État, ambassadeurs, préfets, officiers généraux, recteurs, professeurs d'université. Les dispositions de la Constitution sur le pouvoir de nomination ont élargi la garantie d'un magistère moral dans les nominations à l'ensemble de la fonction publique. Au lendemain des élections cela se traduit par une politisation de la fonction publique.

Aux termes de l'article 13 alinéa 1, le Président exerce le pouvoir réglementaire sous deux formes :

o Il signe les ordonnances o Il signe les décrets délibérés en conseil des ministres

A contrario, seuls les décrets simples (non délibérés en conseil des ministres) n'auront pas à être signé par le Chef de l'État, ils seront alors pris par le Premier Ministre. Dans la pratique ce pouvoir partagé est considérable pour le Président car par ce moyen il peutcontrôler le pouvoir réglementaire confié au Premier Ministre.

Le pouvoir d'initiative du Président en matière de révision constitutionnelle prend la forme d'un décret contresigné par le Premier Ministre.

Les actes présidentiels qui interviennent dans le cadre de la procédure législative ordinaire, c'est-à-dire la promulgation d'une loi ou le renvoi de cette loi au Parlementassortie d'une demande de nouvelle délibération. La promulgation est héritée de la sanction royale, qui faisait du roi le co-auteur de la loi. La signification est tout autre sous la Vième : c'est l'une des rares compétence liée du Président de la République : la loi votée sous réserve d'une saisine ou d'une nouvelle délibération, doit être promulguée. Le pouvoir de promulgation est donc un pouvoir notarial du Président de la République.

La convocation et la clôture des sessions extraordinaires du parlement sont aussi contresignés.

ConclusionAprès 1958, dans la pratique, si les pouvoirs propres dévolus au Chef de l'État demeurent à peu près intangibles, les pouvoirs partagés sont progressivement annexés par le Président qui s'approprie la réalité de la décision, le Premier ministre n'ayant plus qu'un pouvoir formel de confirmation.Sous les IIIième et IVième République, c'était l'appropriation du pouvoir présidentiel par les ministresLa dichotomie pouvoir propre et pouvoir partagé ne recoupe en aucun cas pouvoir discrétionnaire et compétence liée. En réalité toute les modalités sont possibles. Certains pouvoirs partagés laissent le Chef de l'État très libre car le contreseing est automatique (exemple : droit de grâce,nouvelle délibération). A contrario, on rencontre des pouvoirs propres dont l'exercice est, juridiquement et politiquement, fortement conditionné.

Section 2. La question de la responsabilité du Président de la République

L'adage selon lequel le roi ne peut mal faire se voit donc appliqué au président de la République. Mais responsabilité spécifique en cas de haute trahison.

§ 1. L'irresponsabilité politique du Président de la République

Aucune procédure ne permet au Parlement de mettre en jeu la responsabilité politique du Président : il incarne la permanence, au contraire du Parlement qui exprime les changements politiques.La démission ne peut être prononcée que par une décision de la haute cour de justice statuant sur la haute trahison. Deux éléments importants sont à noter :

Il n'y a pas de définition du crime de haute trahison, mais la Doctrine s'accorde sur cette définition : violation grave des devoirs/obligations qui incombent au Président.

D'autre part il est difficile de mettre en oeuvre la haute trahison qui ressemble à l'impeachment américain.

Il existe une contradiction dès l'origine de la cinquième. En principe l'irresponsabilité politique du Chef de l'État constitue la conséquence et la cause de la faiblesse de ses pouvoirs politiques. Il est politiquement irresponsable parce qu'il ne prend pas de véritable décision politique. Or la pensée du général de Gaulle tendait vers un renforcement du rôle politique joué par le Chef de l'État. Il était donc inévitable que la règle de l'irresponsabilité politique fut remise en cause par cette évolution. Si le président exerce effectivement les pouvoirs propre que la Constitution lui accorde, il est alors inévitable que soit supprimée son irresponsabilité.Durant la phase gaulienne de la Vième République on sait qu'il y a une relation directe entre le président et les électeurs. L'institution pour mettre en jeu une responsabilité du Président devant le Parlement n'est plus le vote d'un ordre du jour ni le droit de message mais le référendum populaire. Les élections législatives partielles peuvent être interprétées comme une question de confiance implicite.ConclusionLe vice profond du système de la Vième est le suivant : loin d'avoir instauré une double responsabilité du gouvernement devant le président et le Parlement, le système a progressivement institutionnalisé une responsabilité principale du gouvernement et des ministres devant le président. Cette situation était encore tolérable lorsque la Constitution était gaullienne, mais la situation est devenue intolérable depuis 1969 dans la mesure où le système combine omnipotence et irresponsabilité présidentielle.

§ 2. L'irresponsabilité pénale du Président de la République

À l'exception de la haute trahison, le président est irrésponsable pénalement. Quant aux actes extérieures à ses fonctions, l'irresponsabilité pénale ne le met pas à l'abri de la loi, dans le cas de délit ou de crime car dans ce cas là il serait obligé de démissionner.Mais faut-il attaquer le Chef de l'État pour des faits commis antérieurement à sa prise de fonction ? Le Conseil Constitutionnel, dans sa décision du 22 janvier 1999, a repris l'article 68 : pour les actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions et hors du cas de haute trahison, le Président bénéficie d'une immunité ; au surplus pendant la durée de ses fonctions, sa responsabilité pénale ne peut être mise en cause que devant la Haute Cour de justice. Sinon il faut attendre la fin de son mandat. Les actes accomplit par le Chef de l'État antérieurement à son entrée en fonction, relève également de la Haute Cour de justice, composée de 12 députés etde 12 sénateurs. La Cour de cassation, contrairement au Conseil Constitutionnel, dans un arrêt deprincipe du 10 octobre 2001, estime que la haute cour n'est compétente que pour les actes de haute trahison. Elle précise également de manière plus claire que le privilège de juridiction ainsique l'immunité temporaire ont vocation à s'éteindre à la fin du mandat : la prescription de l'action publique n'est que suspendue. Le principe d'égalité des citoyens implique que l'ancien président puisse relever ensuite des juridictions de droit commun.Les conditions de mise en accusation devant la Haute cour sont très complexes et fortement soumises au politique rendent l'accès difficile voire illusoire. Il y a trois étapes :

Poursuite : mise en accusation votée à la majorité absolue des membres du parlement. Avant le vote de la résolution, il faut que la motion de résolution soit signée par un dixième des parlementaires

Instruction : menée par les magistrats professionnels (5 magistrats de la Cour de cassation)

Jugement : il relève de la Haute cour de justice.

Certains commentateurs ont estimé que cette décision n'établit au profit du Chef de l'État aucun privilège de juridiction pour les actes en dehors de sa fonction. D'autres ont estimé (Favoreu par exemple) que l'article 68 interdit que le Chef de l'État soit poursuivi devant les juridictions avant la fin de son mandat. Pour Favoreu la protection du Président pendant son mandat est en conformité avec le principe de séparation des pouvoirs dont l'application commande une atténuation. Dans la plupart des États européens, les Chefs d'États jouissent d'une protection particulière contre les poursuites pénales. On souhaite ainsi éviter que ne soit porté atteinte à la fonction et en arrière plan à la continuité de l'État. Mais quand il redevient citoyen, pas de problème.La commission Avril propose qu'en cas d'atteinte à la fonction présidentielle, les président puissent engager la responsabilité du Chef de l'État sans la coloration pénale liée à la procédure devant la Haute cour de justice. Pour cette commission il faut désacraliser la fonction présidentielle.En cas de violation grave du droit international humanitaire (génocide par exemple) ; la CPI institué par le traité signé à Rome le 18 juillet 1998 est compétent à l'égard du Chef de l'État qui s'en rendu coupable et l'article 27 du statut de la CPI dispose que sa qualité officielle n'exonère en aucun cas un Chef de l'État de sa responsabilité pénale.

Chapitre II. L'exercice du pouvoir exécutif bicéphale

Dans l'histoire française, la dualité de l'exécutif est une constante, cette dualité a résisté à toutes les tentatives de confusion parlementaires. La hiérarchie au sein de cet exécutif est une constante de la Vième, elle survit même aux périodes de cohabitation, même si la primauté du Président, en ce cas, ne peut s'exercer que dans les domaines qui lui sont réservés par l'article 5,et seulement pour porter la responsabilité des intérêts nationaux. Deux types de lectures simplistes : lecture présidentialiste, et lecture parlementariste.

Section 1. Le Premier Ministre et le gouvernement

Il est le chef de la majorité parlementaire, mais plus exactement il le devient. La Vième s'est convertit au parlemtarisme majoritaire, mais elle n'en observe pas pour autant tout les rites. À l'opposé de ses homologues étrangers, le Premier Ministre français n'est pas a priori le chef de la majorité : son ascendant sur les députés résultent d'abord de la fonction qu'il occupe et ensuite de son éventuelle influence sur l'appareil partisan. C'est à lui qu'est confiée la gestion des rapports entre parlement et gouvernement. « Ce n'est pas le chef de la majorité qui devient Premier Ministre, c'est celui qui est nommé Premier Ministre qui devient chef de la majorité » (Guy Carcassone). Il faut également insister sur un autre point : en régime présidentialiste, le Premier Ministre doit parvenir à s'imposer à des députés dont la référence demeure le Chef de l'État. Donc d'une certaine manière il est toujours un leader, mais un leader en sursis, que la confiance de l'assemblée ne saurait préserver d'une démission forcée. Même en cohabitation, le Premier ministre peut ne pas être le chef de la majorité (Édouard Balladur en 1993).Certains juristes ont cru pouvoir déceler un pouvoir partagé entre le Président et le Premier Ministre. Dès les premiers mois du régime, de Gaulle a écarté toute interprétation de cette repartition des tâches qui donne prise à l'idée selon laquelle « une dyarchie exista au sommet » (de Gaulle dans une conférence de presse de 1964). Depuis lors, les présidents successifs ont fait valoir une primauté présidentielle. Si le Premier Ministre n'est pas près à accepter cette lecture, il ne peut que démissionner : cf Jacques Chirac en 1976.Il serait plus exact de parler d'un pouvoir subordonné plutôt que partagé en période de non cohabitation : contreseing inversé, c'est-à-dire que la signature présidentielle constitue l'expression du pouvoir de décision. Donc il y a absorption de la fonction gouvernementale par le

pouvoir présidentiel. Les premiers ministres sont enclins politiquement et juridiquement à s'affirmer contre le Chef de l'État, et l'on peut penser que le Parlement aurait pu en profiter : au contraire le Parlement, instrumentalisé par la logique présidentialiste du Premier Ministre, s'est trouvé conforté dans son statut d'institution subordonnée.

§ 1. La nomination et la révocation des membres du gouvernement

Le gouvernement a été voulu indépendant du parlement. Il existe juridiquement dès sa nomination sans avoir besoin d'être investit par l'Assemblée nationale. Selon la lettre constitutionnelle, le Premier Ministre compose son équipe ministérielle librement, sans avoir à se livrer à des consultation avec les présidents des assemblées ou encore avec les chefs des groupes/partis. Le Premier Ministre compose son équipe en accord avec le Président de la République, qui, selon l'article 8 alinéa 2, nomme les membres du gouvernements « sur proposition du Premier Ministre ». Le Président de la République possède donc un pouvoir discrétionnaire (différent du système britannique). La liberté de choix est réduite lorsqu'il est en face d'une majorité parlementaire hostile : dans ce cas il est dans une situation comparable à celle de la Reine d'Angleterre.Le Président de la République n'a pas le droit de révoquer le Premier Ministre selon la lettre de la Constitution. La présentation de la démission du gouvernement est la condition préalable. Par conséquent le Président ne pourrait révoquer un Premier Ministre, qui, fort de la confiance de l'Assemblée, entendrait rester au gouvernement.Cependant très souvent cette démission pourra être forcée : il y a donc une faculté de révocation indirecte. La tradition de monisme inversé permet d'affirmer que le Président peut encertaines circonstances, demander au Premier Ministre de lui présenter la démission du gouvernement. Selon la formule de l'article 8, le Président met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du gouvernement : or, bien que cet article ne laisse pas au Président une marge d'appréciation, il est constant que la présentation de démission n'oblige pas le Président à mettre fin à ses fonctions. Par exemple dans le cas d'une démission protocolaire (Pompidou reconduit en 1975), ou à la suite d'une motion de censure, lorsque la dissolution consécutive de l'Assemblée nationale entraîne de nouvelles élections : démission de Pompidou refusée en octobre 1962. Quant aux membres du gouvernement, le Président les révoque à la demande du Premier Ministre.L'établissement d'une incompatiblité entre les fonctions gouvernementales et le mandat parlementaire est parfaitement conforme au modèle de séparation des pouvoirs applliqué par certaines constitutions françaises, telle celle de 1791, celle de l'an III ou encore la loi fondamentale de 1852. Une telle règle est par contre - en principe - inadaptée à un régime parlementaire, qui suppose une collaboration des pouvoirs et la responsabilité politique des ministres devant le Parlement.Toutefois une telle règle est proposée en 1958 pour améliorer le fonctionnement du régime parlementaire, et d'assurer une plus grande autorité au gouvernement ; il est également logique qu'on ne puisse être à la fois contrôleur et contrôlé.

§ 2. Les attributions du gouvernement

C'est l'article 20 qui définit la fonction gouvernementale. Il confère au gouvernement le pouvoir de conduire et de déterminer la politique de la nation.Article 20

« Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation. Il dispose de l'Administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50 »

Sous la Vième République, les membres du gouvernement ont une double autorité :

Ce sont des autorités politiques disposant de pouvoirs attribués par la Constitution ; Mais également administratives en tant que chef du département ministériel.

Ils représentent l'État en justice, signent des conventions l'engageant, organisent les services qui dépendent d'eux, et exercent un pouvoir hiérarchique sur les fonctionnaires qui dépendent deleur administration.

a. La primauté du Premier ministre au sein du gouvernement La prééminence du Premier ministre se manifeste très clairement à l'égard des autres ministres du gouvernement. Elle est inscrite dans la Constitution, notamment dans l'article 21.Article 21

« Le Premier ministre dirige l'action du Gouvernement. Il est responsable de la Défense nationale. Il assure l'exécution des lois. Sous réserve des dispositions del'article 13, il exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils et militaires.

Il peut déléguer certains de ses pouvoirs aux ministres.

Il supplée, le cas échéant, le Président de la République dans la présidence des conseils et comités prévus à l'article 15.

Il peut, à titre exceptionnel, le suppléer pour la présidence d'un Conseil des ministres en vertu d'une délégation expresse et pour un ordre du jour déterminé. »

Il assure les arbitrages entre les différents ministères. Pour exercer cette direction, il dispose de l'assistance d'importants services administratifs, comme le sécrétariat général du gouvernement.Il exerce les compétences qui lui sont nommément attribuées, mais encore les compétences que la Constitution confie au Gouvernement, notamment la procédure législative.Le pouvoir réglementaire du Premier ministre recouvre à la fois la faculté de prendre des réglements d'application des lois et la possibilité d'agir par voix de réglements autonomes. Ce pouvoir est à la fois personnel et collégial ;

personnel car il est le seul à l'exclusion de tous les autres à en être le détenteur (supériorité et souci d'unité de la réglementation générale) ;

collégial car les décrets et ordonnances sont délibérés en Conseil des ministres.

L'article 22 impose d'autre part que les actes du Premier Ministre soient contresignés par les ministres responsables, signe de la cohésion gouvernementale.Les pouvoirs budgétaires sont un moyen d'exercer sa primauté, c'est sous son autorité que le ministre des finances prépare les projets de loi des finances. Il y a prééminence budgétaire du Premier ministre, il peut en effet être conduit à faire des arbitrages en la matière. Il préside

les comités inter-ministériels, ce qui lui permet d'orienter et d'harmoniser l'action gouvernementale, il dirige également les réunions ministérielles, qui se présentent sous deux formes :

Les comités interminitériels permanents Les comités restreints et non permanents

Leur fréquence est évidement fonction de l'importance que leur attache le Premier Ministre, ainsi que de l'autonomie qu'il souhaite affirmer vis-à-vis de l'Élysée.

b. Les attributions politiques du gouvernement La Constitution a attribué au Gouvernement un ensemble de prérogatives qui lui assure le contrôle de la procédure parlementaire.L'article 37, en investissant le gouvernement d'un pouvoir réglementaire autonome, a fait de l'exécutif un législateur dans un domaine qui lui est réservé. En 1958, les autorités exécutivesse sont vu accordé le pouvoir d'adopter des réglements autonomes, de valeur inférieure à celle de la loi, habilités à intervenir dans tous les domaines qui ne sont pas réservés explicitement par l'article 34. Le domaine autrefois illimité de la loi fait désormais l'objet d'un empiétement au profit du réglement.Cette révolution juridique n'a finalement eu qu'un faible impact : le juge constitutionnel a fini par reconnaître que les lois empiétant sur le domaine réglementaire autonome n'étaient pas pour autant inconstitutionnelles : tant que le gouvernement n'utilise pas les instruments que lui donne la Constitution pour protéger son domaine, le législateur peut très bien intervenir dans ce domaine.Le fait majoritaire a rendu partiellement inutile cette dichotomie, dans la mesure où peut importe que la norme soit adoptée par voie législative ou réglementaire, puisque dans tous les cas elle est celle d'une majorité parlementaire et donc aussi gouvernementale.En matière de politique internationale, il faut distinguer les traités qui passent par le Chef de l'État, et les accords internationaux non soumis à ratification qui relèvent du seul Gouvernement (soit Premier ministre, soit ministre des Affaires Étrangères). Ces accords en forme simplifiée donnent au gouvernement des pouvoirs propres en matière internationale notamment le pouvoir d'engager l'État sur le plan intenational.

c. Les attributions administratives du gouvernement Le gouvernement a pour tâche de faire respecter la loi. À cette fin l'article 20 prévoit que le gouvernement dispose de l'administration et de la force armée. Le gouvernement est responsabledu maintien de l'ordre : le Premier ministre commande aux forces armées et à la police.Le chef du Gouvernement dispose de l'administration dont il est le chef. Il exerce le pouvoir de nomination et le pouvoir réglementaire de droit commun. Le pouvoir de nomination n'est pas entier : même lorsqu'il s'agit d'emplois à la discrétion du Gouvernement, ce pouvoir ne s'exerce que sous réserve des dispositions de l'article 13, autrement dit sous réserve des prérogatives duprésident.Quant au pouvoir réglementaire de droit commun, il appartient au Premier ministre, qu'il exerce sous condition de contreseing.

Section 2. La présidentialisation du régime

L'écart est considérable entre les prérogatives accordées au Président par la Constitution et la manière dont elles ont été exercées. La Constitution d'inspiration gaullienne a certes modifié le régime parlementaire des IIIième et IVième Républiques dans le sens d'une

rationalisation ; mais elle demeure parlementaire : le gouvernement continue à être responsable devant le Parlement et non pas devant le Chef de l'État. Celui-ci est seulement un arbitre entre les pouvoirs.

Toutefois, cette utopie naïve ne résiste pas au premier mois de la pratique gaullienne du régime. De Gaulle définit en effet en termes très élargis les pouvoirs attribués au Président par la Constitution. Une coutume constitutionnelle s'établit, dans le sens d'un pouvoir quasi-omnipotent du Chef de l'État : il y a donc présidentialisation du régime. On estime que la rupture a lieu en octobre 1959 : Debré présente une déclaration de politique générale proposant l'autodétermniantion, mais personne n'est dupe que la politique est décidée par le Président dontle Premier ministre porte la responsabilité.La fameuse formule du « domaine réservé » rend compte de la réalité du partage des compétences entre le Président et le gouvernement. Pour les questions réputées appartenir au domaine réservé (défense nationale, relations internationales, et notamment celles concernant l'Algérie), le Chef de l'État prenait les initatives, définissait les solutions et fixait les mesures àprendre. Le Gouvernement était tenu à l'écart de ces décisions pourtant essentielles (article 20).Or à l'exception des questions concernant la Communauté, aucune disposition de la Constitution ne justifiait la compétence exclusive du Chef de l'État. Les pouvoirs présidentiels qui concernent la défense et la diplomatie sont soumis à contreseing et sont donc des compétences formelles pour lesquelles le pouvoir de décision appartient normalement au Premier Ministre. À l'époque seule l'acceptation tacite de cette violation de la Constitution (par le gouvernement, parla majorité parlementaire et par l'opinion) rendait la chose possible, dans un contexte de « démocratie plébiscitaire » (Georges Burdeau).La théorie du domaine réservé, inventée par Jacques Chaban-Delmas pour cantonner les abus depouvoir du général de Gaulle, disparaît avec la présidentialisation du régime. En 1964, Pompidou nie l'existence d'un tel domaine réservé au Président dans un discours à l'Assemblée nationale le 26 avril : effectivement il n'y a plus de domaine réservé puisqu'en 1964, il s'agissait d'un gouvernement présidentiel.Le scrutin du 28 octobre 1962 ratifie la lecture gaullienne des institutions. L'élection au suffrage universel manifeste la présidentialisation du régime, mais elle en est la conséquence et pas tant la cause. Ramenée à l'essentiel, la Vième République se définit par un changement de la convention relative au Président.À partir de 1962, le Président devient le représentant de la souveraineté nationale, au même titre que l'Assemblée nationale. Il est naturellement le chef de l'exécutif, il lui appartient doncd'exercer les attributions que la Constitution confie à l'exécutif. La notion d'arbitrage est alors dépassée. La notion de domaine réservé ne rend plus compte du nouveau rôle du président. Le gouvernement présidentiel exprime le fait que le Président définit la politique à suivre avec la collaboration du gouvernement qui reste placé sous le contrôle de l'Assemblée nationale.Il est indispensable que ce Président dispose au sein de l'Assemblée d'une majorité qui soutiennesa politique, telle qu'elle est présentée par le Gouvernement. L'existence d'une majorité est impliqué par la structure de la Vième République, de telle sorte que la démission du général de Gaulle en 1969, loin de réduire la portée de cette coutume/convention, a montré que la présidentialisation n'était plus liée au pouvoir charismatique du Chef de l'État, mais à l'institution elle-même. L'apparition du fait majoritaire a eu pour conséquence le renforcement du Président par rapport au Premier Ministre.À l'origine, le Premier Ministre, placé au centre du jeu politique (entre le Président et l'Assemblée), pouvait « déterminer et conduire la politique de la nation » (article 20). L'existence d'une majorité stable renverse cet équilibre : le Premier Ministre n'a plus d'argument à opposer aux souhaits du Chef de l'État, puisque le soutien de l'Assemblée est

acquis automatiquement. À partir de là, le dédoublement de l'exécutif se transforme en double emploi, il aboutit à la subordination d'une autorité à l'autre.Le passage au quinquennat (référendum de septembre 2000) n'est ni un remède contre la présidentialisation, ni une protection certaine contre la cohabitation. Au contraire on peut penserque le septennat relevait de la logique du modèle weimarien, la réduction du mandat répond plutôt à la logique du présidentialisme majoritaire, à savoir à celle d'un président chef de l'exécutif, en même temps que chef de la majorité.

Section 3. L'expérience de la cohabitation

La cohabitation conduit le Président à nommer un Premier ministre sans le choisir, parmi la majorité qui lui est hostile. La première expérience (1986-1988) a clairement donné tort à ceux qui pensaient que le Président ne pouvait garder que l'exercice de ses fonctions formelles. Si François Mitterrand a clairement entendu laisser Jacques Chirac la conduite de la nation, il n'en a pas pour autant abandonné les responsabilités constitutionnelles qu'il tient de l'article 5. La notion d'arbitrage prend alors tout son sens alors que précédemment le phénomène majoritaire l'avait eclipsée.

§ 1. Les pouvoirs du Chef de l'État en période de cohabitation

François Mitterrand, dans le message addressé au Parlement le 8 avril 1986, a cette formule : « la Constitution, rien que la Constitution, toute la Constitution ». Il explique par là que même si l'organisation des pouvoirs se rapproche durant la cohabitation d'un régime parlementaire classique (britannique ou allemand), le Président conserve encore un important poids politique,en étant contraint d'éviter un affrontement partisan : il retrouve les vertus de l'arbitrage au sens gaullien du terme.

Quels sont ces pouvoirs ?

Il peut refuser toute décision dictée/imposées quant au choix du Premier ministre, même s'il estime opportun d'appeller à Matignon le candidat du principal parti de la majorité. Mais pour le choix des ministres, François Mitterrand avait refusé François Léotard pour la Défense, en arguant du fait que c'était son domaine réservé.

Il peut rappeler qu'avec le droit de dissolution, il conserve le droit de « siffler la fin de la partie » en temps qu'arbitre.

Il peut affirmer, dans le domaine de la politique intérieure, son droit d'en appeler à l'opinion quand des réformes de la majorité lui paraissent de nature à mettre en cause la cohésion sociale. Il a toujours la possibilité de s'adresser à la nation.

Il peut maintenir son leadership en matière de politique extérieure et de Défense. Si celafut le cas durant la première cohabitation où le Premier ministre s'est effacé en ce domaine, la seconde cohabitation a été marquée par un effacement du Président de la République au profit du Gouvernement. Par exemple c'est contre l'avis du Gouvernement Balladur que le Chef de l'État impose le gel des essais nucléaires. Pour les question de défense, la dyarchie se plaçait sous le signe de la collaboration.

Toutefois, à l'occasion des conseils européens, le Chef de l'État demeure le véritable chef de la délégation française. La convention selon laquelle le Président serait le principal inspirateur de la politique sur ces questions de défense s'est cristallisée grâce au consentement des principaux acteurs et de l'opinion publique. On a pu dire que la cohabitation a permis l'avénement du domaine réservé. Lors de la dernière cohabitation, Lionel Jospin s'était rendu au Moyen Orien et avait qualifié le Hezbollah de mouvement

terroriste. Il avait fait l'objet de critiques vives, non pas sur le fond mais sur la forme, ilaurait empété sur ce soi-disant domaine réservé du Président.

Il reste maître de la procédure de révision constitutionnelle. Il peut également refuser de signer les ordonnances qui lui paraisse aller trop loin dans

le désaississement du Parlement de ses droits naturels : ce fut le cas pour la réforme surla nationalisation. Mais il a du s'incliner devant le vote de ces dispositions par la voie parlementaire classique. Pour Mitterrand il vaut mieux parler de « coexistence » plutôt que de cogestion. Pour savoir si le Président a le droit de refuser de signer des ordonnances, il y a deux textes dans le dossier : pour l'un oui, pour l'autre non.

Il peut nommer au Conseil constitutionnel des membres et un Président plus ou moins acquis à ses vues (nomination de Robert Badinter en 1986).

Il peut saisir systématiquement le Conseil constitutionnel s'il souhaite se poser en gardien de la Constitution.

Il peut demander une nouvelle délibération au Parlement : on a pu parler à cet égard d'un veto législatif temporaire.

La force du Président venait de sa popularité. L'équilibre instituttionnel imposé par le Président en 1986 est largement approuvé par l'opinion publique. « Le premier qui dégaine est mort » : le premier qui tentera de rompre l'équilibre sera sanctionné par les électeurs.

§ 2. Les prérogatives du Premier ministre en période de cohabitation

Le Premier ministre bénéficie du soutien d'une majorité parlementaire solide. Il est assuré de pouvoir faire voter les lois nécessaires à l'application de son programme de Gouvernement. Les projets de loi, délibérés en Conseil des ministres, ne sont pas soumis à la signature du Chef de l'État. Le Gouvernement trouve dans sa majorité à l'Assemblée la faculté d'un recours permanent contre les vélléités présidentielles. Exemple : les ordonnances refusées par le Président passent ensuite sous la forme de projet de loi.Dans de nombreux cas, le Gouvernement ne peut agir sans l'aval du Président. Mais jusqu'à présent le Chef de l'État a fait un usage très modéré de sa faculté de refuser de signer un acte,pour lequel sa signature était requise, c'est-à-dire :

ordonnances, décrets réglementaires, décrets de nomination, convocation du Parlement en session extraordinaire, ordre du jour du Conseil des ministres.

On ne peut donc nier que le Gouvernement « détermine et conduit la politique de la nation » (article 20). Il n'est plus responsable devant le Président. Si le Premier ministre utilise l'article 49-1 (question de confiance), c'est pour affirmer sa légitimité, et non pour vérifier s'il a le moyen de mettre en oeuvre la politique présidentielle. Cette expérience permet de découvrir l'étendue des pouvoirs personnels et des pouvoirs partagés du Premier ministre. On découvre qu'il peut exercer en toute autonomie un considérable pouvoir réglementaire, reconnu par l'article 37 et par l'article 21 (pour assurer l'exécution des lois et des réglements).Toutefois, le Premier ministre reste sous la menace d'une initiative présidentielle (dissolution de l'Assemblée). En outre il est dans la position difficile d'un candidat virtuel aux élections présidentielles : il ne peut donc pas chercher à dépouiller de ses principaux attributs une fonction à laquelle il aspire.

§ 3. La cohabitation et l'esprit de la Constitution

Il semble que la cohabitation, au sein de notre système présidentialiste, doive être considérée comme une parenthèse permettant au Chef de l'État de sauvegarder ses prérogatives incontournables plutôt que comme un retour durable à une lecture parlementariste de la Constitution. Le Premier ministre ne redevient responsable de la politique intérieure que le temps nécessaire pour rétablir l'équilibre en faveur du Président. Après toute cohabitation, on a constaté que le pouvoir est redevenu une dyarchie fortement hierarchisée.La cohabitation a certes transformé le système politique et la pratique qu'avait connue la V ième mais non pas le régime politique lui-même, puisqu'elle a conduit à un très fort respect de la Constitution. Ceci a montré qu'il s'agit d'un régime parlementaire moniste : la politique gouvernementale est déterminée par le Gouvernement, dirigé par le Premier ministre et responsable devant le seul Parlement. En même temps elle a rappelée qu'il s'agît d'un régime parlementaire dont la singularité est d'être un régime dans lequel le Chef de l'État dispose de pouvoirs importants.La cohabitation n'a jamais consacrée ni un authentique retour au parlementarisme moniste, ni unevéritable combativité du Premier ministre.Présenter la cohabitation comme propice au retour de la fonction de Premier ministre est démentie par les faits. Un fonctionnement parlementaire de la Vième reste à ce jour inconnu. La cohabitation a toujours été pratiquée dans un esprit présidentialiste. On a assisté à une reproduction des usages du présidentialisme par le Premier ministre, à la faveur d'une présidentialisation de sa fonction :

Autonomie très forte de la décision du Premier ministre Irresponsabilité politique Personnalisation du pouvoir Subordination du parti majoritaire Mise au pas des parlementaires

La position du Premier ministre n'est renforcée dans le seul but d'un conquête de la présidence.

Titre II. La fin de la souveraineté parlementaire

IntroductionSelon la conception française, le Parlement « porte en lui la représentation de la Volonté Générale » (Raymond Carré de Malberg). L'Assemblée se trouve investie d'une puissance souveraine. Tous les organes de l'État lui sont soumis.Ce modèle inspire quatre Républiques. La Vième signifie la fin de cette souveraineté parlementaire. En outre les constituants, pour palier la suprématie inefficace du Parlement, inscrivent dans la Constitution un définition matérielle de la loi : les articles 34 et 37 reprenaient des tentatives antérieures qui visaient à endiguer les débordements des Assemblée mais qui avaient échoué précisément parce que le législateur pouvait s'y soustraire. Or là il y a un contrôle de conformité de la loi à la Constitution, pour bien marquer le fait que la Constitution est supérieure à la loi.Ceci s'inscrit dans une crise européenne de la démocratie représentative. L'affaiblissement des parlementaires concerne aussi bien le pouvoir législatif que le pouvoir de contrôle. L'affaiblissement a emprunté trois voies :

Les parlements ont perdu le pouvoir budgétaire, ils n'ont plus le droit de proposer de nouvelles dépenses ou de nouvelles parlementaire. Or le régime parlementaire est né en

Angleterre avec la conquête de ce pouvoir. Désormais ce sont les gouvernements seuls quipréparent le budget et le proposent au Parlement.

Les parlements ont perdu le pouvoir de proposer des lois. L'initiative gouvernementale prime.

Il y a des délégations de pouvoir législatif qui constituent une véritable démission du Parlement.

Chapitre I. La démocratie représentative

Selon cette théorie, la démocratie ne peut s'exercer que par délégation et représentation : il y amise à distance du pouvoir. Selon les auteurs du fédéralisme, il faut éviter le désordre et la turbulence démocratique en la canalisant en un système instiutionnel inédit. Les auteurs américains vont introduire à cet égard une distinction essentielle entre la République et la démocratie. Cela permet d'écarter les objections selon lesquelles il est impossible d'établir une République dans un grand pays.À la démocratie, régime « où le peuple s'assemble et se gouverne lui-même », les auteurs du fédéralisme américain opposent la République, régime où « le peuple s'assemble et se gouverne par des représentants et des agents ». Madison explique que la représentation est un principe républicain, parce qu'elle permet non seulement d'éviter les effets nocifs des factions partisanes, mais encore elle permet de sélectionner une élite, choisie par le peuple et qui sera capable de délibérer, au-delà des passions particulières, en vue de l'intérêt général. Pour Madison, la représentation a un rôle de filtre, capable de régler les débordements de la multitude. Seul le filtre représentatif, par sa capacité de raffinement, permet d'atteindre le bien commun.

Section 1. La théorie libérale de la représentation

À la différence de la démocratie antique, la démocratie libérale a été conçue commme une démocratie « gouvernée » (Sieyès), dans laquelle le pouvoir effectif est exercé par des représentants. La puissance souveraine de la nation est avant tout une puissance constituante quiva s'exprimer par l'édiction d'un Constitution. Une fois la Constitution mise en place, cette puissance va s'évanouir, la Nation n'est plus qu'un organe constitué, chargé de désigner les représentants. Ce principe est utilisé dans la Constitution de 1791, qui pose que les représentantsde la Nation sont à la fois le roi et le corps législatif (élu au suffrage censitaire). Pour lui, il y a une forme de transcendance avec l'élection, fondée sur cette idée que la société politique ne se confond pas avec les individus concrets. Sorte de transfiguration de l'élu (au sens politique et théologique), du fait même de l'élection.Cette idée n'est pas retenue par les révolutionnaires français, qui conservent l'essentiel de l'ancien modèle monarchique : à savoir cette idée d'une intime union de la société civile avec l'État.Sous la IIIième, la plupart des publicistes opposent très clairement la Nation et le corps électoral,et ils postulent l'existence d'une différence essentielle entre les deux, dans le but d'affirmer l'indépendance des gouvernants à l'égard du suffrage universel. On retrouve l'idée de Sieyès : maintenir l'indépendance des gouvernés et des gouvernants.Cette conception classique prend fin avec l'apparition des premiers députés socialistes, qui redéfinissent le rôle d'un député. Le député socialiste se sent représentant d'une classe sociale. Il transpose au sein de l'Assemblée, un conflit dont l'expression est déjà présente dans la société.

Il est aussi mis à mal avec l'apparition de la notion de majorité : l'Assemblée n'est plus un lieude débat avec recherche de compromis, mais le lieu d'un affrontement politique entre majorité et opposition.

Section 2. Objet et caractères du mandat représentatif

§ 1. Un mandat représentatif et collectif

Pour désigner la fonction parlementaire, la tradition a légué le terme de mandat.Mandat :

Le mandat est le rapport entre le représentant et le représenté. On dit que le représentant a reçu et exerce un mandat, dont l'objet n'est autre que l'exercice de la souveraineté.

Cette terminologie n'est pas heureuse. Dans l'Ancien Régime, le terme de mandat était exact lorsque l'élu était député avec un mission déterminée. L'élection présentait alors les deux caractéristiques du mandat civil :

Le pouvoir de vouloir pour les mandants et en leur nom La révocabilité

Le mandat était donc impératif.Depuis le XVIIIième, le parlementarisme s'est rallié à une toute autre conception. En 1774, Edmund Burke (contre-révolutionnaire) avait proclamé aux électeurs de Bristol : « Vous choisissez un député, cela est bien, mais lorsque vous l'avez choisi, il n'est plus député de Bristol, il est membre du Parlement ». La Constitution française de 1791 allait consacrer dans sonarticle 7 cette conception anglaise : « les représentants nommés dans les départements ne seront pas représentants d'un départements particulier, mais de la nation entière, et il ne pourraêtre donné aucun mandat impératif. »Ce mandat est donc un mandat représentatif : il implique les représentants agissent par eux-même, définissant ainsi ce qu'ils estiment être l'intéret et la volonté de ce qu'ils représentent. Au nom d'une fiction juridique, il existe une présomption de conformité entre les actes des représentants et les souhaits des représentés. Le représentant n'a qu'un devoir (idée de Sieyès): être libre vis-à-vis de ses commettants, qui n'ont que la faculté de désigner.C'est un mandat collectif : lorsque les représentants sont désignés, le mandat dont ils bénéficient n'est pas individuel. C'est un mandat donné par la Nation à l'Assemblée dans son ensemble. Tout éligible a vocation à représenter l'ensemble de la nation, il peut se présenter indifféremment dans n'importe laquelle des circonscriptions, dessinées pour des seules raisons pratiques. Les candidats ne sont pas tenu d'apporter la preuve d'un lien de rattachement avec cette circonscription : ils peuvent être « parachutés ».Autre conséquence : le mandat, étant délié de tout rapport avec la circonscription, n'est pas affecté par les transformations que celle-ci peut subir. La disparition ou la modification de la circonscription ne porte pas atteinte à la situation de l'élu. Lorsqu'en 1871, la France céda à l'Allemagne l'Alsace et la Moselle, les députés de ces départements furent considérés comme demeurant en fonction, ils ne quitèrents l'Assemblée qu'après avoir démissionné de leur propre initiative.Si le statut juridique de représentant consacre encore la conception du mandat , il faut soulignerque les relations entre les électeurs et les élus ont pris la forme, dans les démocraties de masse,d'une dépendance politique accrue, en raison :

de la pratique généralisée du suffrage universel,

de l'importance prise par les partis politiques.

Lors des élections législatives, les candidats s'engagent à prendre en charge des revendications locales. En outre les députés élus, étroitements liés à leurs partis politiques, seront soumis à une très forte discipline de vote. Cette transformation sape toute possibilité de délibération réelle au sein des parlements, d'où critique très forte du parlementarisme.La démocratie française est encore une République des élus locaux. Se sont superposées en France, une tradition monarchique et républicaine, c'est-à-dire une tradition centralisée et une tradition décentralisée. Le jacobinisme a toujours été maîtrisé par le girondisme. Les gouvernants continuent à tenir leur légitimité des institutions représentatives, mais la représentation cesse d'être l'instrument d'une volonté politique pour devenir le moyen de l'expression des besoins et des identités des citoyens.Depuis 1958, les chambres n'ont plus le monopole de la représentation. La notion moderne de représentation, définie par Burke et Sieyès, c'est-à-dire le député membre du Parlement et représentant de la Nation, a eu pour corollaire une théorie de la souveraineté du Parlement, et d'autre part une théorie de la souveraineté nationale. Elles établissent une démocratie sans le peuple. Le danger existe que le régime représentatif soit dénaturé. La Constitution du 4 octobre rompt très clairement avec le principe de la souveraineté des députés.De nos jours l'identité des représentants ne se confond plus avec celle des parlementaires, dans la mesure où le Chef de l'État est également qualifié de représentant, puisqu'il procède lui aussi de l'investiture populaire. C'est dans ce sens qu'il faut entendre la formule de l'article 3 : « la souveraineté nationale appartient au peuple qu'il exprime par ses représentants »

§ 2. L'indépendance du parlementaire

La prohibition du mandat impératif a pour objet d'assurer l'indépendance du parlementaire. Elle est encore garantie par d'autre règles, et notamment les incompatibilité, notamment celle qui concerne l'exercice de fonction de direction dans certaines entreprises, qu'elles soient publiques ou privées. Ces dernières années consolidation de l'exigence. On attend du législateur qu'il s'investisse exclusivement de l'interêt général. Lionel Jospin a été très à cheval sur ce point, mais la loi organique a été écartée par le Sénat, donc on en reste au dispositif ancien : pas de mandat parlementaire si plus d'un mandat exécutif local.De plus immunités : le parlementaire est irresponsable pénalement de ses opinions, dans les autres cas il n'est pas irresponsable mais inviolable.Le mandat est donc protégé tant en ce qui concerne son indépendance qu'à l'égard des entraves à son exercice. L'irresponsabilité protège le parlementaire en tant qu'élu, l'inviolabilité en tant qu'individu. Ces protections sont instituées non dans l'intérêt du parlementaire mais dans l'intérêt du mandat. L'inviolabilité ne signifie pas l'impunité pénale, il s'agît d'un immunité de procédure, garantissant le parlementaire contre des poursuites pénales abusives à raison de faitsétrangers à l'exercice du mandat. Cela garantit au-delà l'intégrité de la représentation nationale.Depuis la loi constitutionnelle du 4 août 1995, plus rien ne s'oppose à ce qu'un parlementaire fasse l'objet d'une mise en examen et réponde de ses actes devant la justice dans les mêmes conditions qu'un citoyen. Son inviolabilité est désormais réduite à l'autorisation que doit donner le bureau de l'Assemblée dont il fait partie, « à toutes arrestation ou mesure privatives ou restrictives de libertés ». Le bureau de l'AN autorise l'action pénale lorsqu'il estime que la demande est sérieuse, loyale et sincère (non fondée sur des arrières-pensées politiques). Mais le bureau n'a pas à se prononcer sur le fond.

Chapitre II. Le bicaméralisme rationalisé de la Vième République

IntroductionLe parlement est uniquement un pouvoir constitué. Le constituant de 1958 consacre à nouveau le principe du bicaméralisme, cette division du pouvoir délibérant étant susceptible d'éviter sa prépondérance excessive par rapport à l'exécutif. L'article 24 le définit comme composé de l'AN et du Sénat. En 1958, l'institution du bicamérisme avait pour objet de constituer un facteurd'équilibre dans le système constitutionnel. Cette représentation est toujours apparue comme uncorollaire du libéralisme.Au premier niveau la représentation populaire est considérée comme nécessaire, mais elle doit être complétée par une représentation plus profonde et plus indépendante des variations de l'opinion. Le bicamérisme se distingue du monocamérisme par le fait qu'il se rattache davantage au principe de la souveraineté nationale qu'au principe de la souveraineté populaire. Cette fonction de régulation n'est pas remplie si le Sénat n'intervient qu'en faveur de certaines sensibilités politiques, c'est-à-dire tantôt en renforçant la majorité gouvernementale, tantôt en la gênant.Sous la Vième République, le bicaméralisme est inégalitaire. En cas de désaccord, l'AN peut avoir le dernier mot (article 45).

Section 1. Le rôle du Sénat

Sous la Vième, la seconde chambre constitue une puissance ressucitée (on lui redonne sa place et surtout son nom d'origine), mais une puissance conditionnée. Elle peut être une force d'appoint sérieuse pour le Gouvernement, ou lui être indifférente, mais elle ne saurait constituer pour le Gouvernement un caractère véritablement dangereux. Le Sénat, limité par les textes dans un rôle purement législatif, ne peut s'opposer au dernier mot de l'AN (bicamérisme inégalitaire) : les rapports avec le Gouvernement sont devenu très mauvais lorsque le Sénat s'opposa en des termes très sévères par la voix de son président (Gaston Monnerville) au principe de l'élection duPrésident de la République au suffrage universel direct. De Gaulle ne pardonna jamais cette attitude hostile, les ministres eurent pour consigne de boycotter les débats du Sénat.Le débat essentiel sur le Sénat concerne son caractère conservateur. Plusieurs modalités font duSénat un organe modérée, échappant aux grandes controverses idéologiques :

Composition du collège électoral des sénateurs : sur-représentation des régions ruraleset petites communes : députés, conseillers régionaux et généraux, maires, délégués des conseils municipaux (95% de ce collège)

Longueur du mandat : pendant fort longtemps 9 ans (modèle 1875), mais cette longueur a donné prise à l'idée selon laquelle le Sénat était réactionnaire. Les sénateurs ont donc réduits le mandat à 6 ans, loi organique du 30 juillet 2003

Âge relativement élevé des sénateurs

Si le Sénat a joué à partir de 1958 son rôle de Chambre modératrice, mais ce calcul est déjoué : la pratique montre que le Sénat n'est pas une simple chambre d'enregistrement. Adversaire très farouche de la gauche au pouvoir à partir de 1981. Face à ceux qui dénoncent « un ornement constitutionnel onéreux » (Lionel Jospin), on a coutume de souligner que la raison d'être du Sénat consiste dans son caractère représentatif des communautés locales. Dans la mesure où le pouvoir central se veut fort, il est nécessaire que puisse se faire entendre les représentants de la vie locale, qui a elle aussi ses tendances et ses droits.Des corps intermédiaires sont nécessaires. La France ne peut se passer d'un système bicaméral: car c'est à l'échelon parlementaire que doit avoir lieu ce dialogue entre le mouvement et la résistance. Cette tâche pondératrice est d'autant mieux assumée au Sénat que les élus locaux y ont une influence certaine. Depuis la révision constitutionnelle d'août 1995, lorsqu'un référendum

est proposé par le Gouvernement, il doit faire l'objet d'un débat devant chaque assemblée. Le Sénat dispose désormais d'un véritable pouvoir de proposition de référendum, exercé conjointement avec l'AN.

Section 2. Le Parlement au sein d'un régime présidentialiste

Le parlementarisme rationalisé de 1958 a été instrumentalisée au profit d'un gouvernement présidentiel, fondé sur une logique de séparation des pouvoirs, tout en bénéficiant des prérogatives d'un gouvernement parlementaire. Le prix à payer fut une certaine marginalisation du Parlement, dont le déclin a fait couramment l'objet d'un contresens.Ce n'est pas parce que le Gouvernement en dirige le travail que les assemblées françaises font figure d'institutions mineures. La prépondérance des projets de loi sur les propositions et la discipline de vote se retrouvent également dans les autres institutions représentatives européennes. L'abaissement du Parlement ne résulte pas tant des contraintes du parlementarisme rationalisé, il provient essentiellement de ce que le Gouvernement est en fait responsable devant le président et non pas devant l'AN. La source de l'autorité gouvernementale est extérieure au Parlement, qui se trouve réduit au rôle de chambre d'enregistrement, et qui n'exerce plus sa fonction de contrôle politique.La majorité parlementaire soutien le Gouvernement, cette mission est devenue quasi-exclusive detout autre. Pourquoi mettrait-elle en oeuvre des prérogatives constitutionnelles qui seraient susceptibles de boulverser cette architecture ? Renforcer les pouvoirs du Parlement, c'est renforcer les prérogatives de la majorité parlementaire, prérogatives que de toute façon cette dernière n'utilisera pas (discipline majoritaire).Quatre observations relatives à la compétence du parlement :

Selon l'article 39 de la Constitution, l'initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement. C'est conforme à la tradition du régime parlementaire, dans lequel doit prévaloir une collaboration des pouvoirs. Elle date de la Charte révisée de 1830 (c'est une des grandes différences avec celle de 1814). Cette égalité est en fait très atténuée. Les propositions de loi sont soumises à des conditionstrès strictes de recevabilité, essentiellement des conditions de recevabilité financière (si diminution des ressources ou augmentation des charges). En outre, ces propositions nepeuvent être discutées que lorsqu'elles sont inscrites à l'ordre du jour.

Bien que l'ordre du jour soit fixé par la conférence des présidents (de l'assemblée concernées, des groupes, des parlementaires), un ordre de priorité est déterminé par le Gouvernement qui peut ainsi faire prévaloir ses projets et éventuellement les propositions de loi qui lui conviennent. Une telle maîtrise a permis au Gouvernement de s'opposer aux débats législatifs qui n'auraient pas son assentiment. La révision du 4 août 1995 a permis de tempérer ces règles en confiant aux assemblées l'ordre du jour d'une séance par mois.

Renforcer le rôle de l'institution parlementaire passe aujourd'hui par un accroissement des droits reconnus à l'opposition, tant en matière législative que dans ledomaine du contrôle politique. Caractère très limité de la révision de 1995. Il faut augmenter l'initiative parlementaire, tout en évitant que cette amélioration ne profite qu'à la seul majorité et donc indirectement au Gouvernement. Il serait souhaitable que l'opposition puisse bénéficier d'une partie de l'ordre du jour, ce qui ne manquera pas de concourir à l'amélioration du débat démocratique. Autre exemple : les commissions d'enquête parlementaire ont une activité très réduite, surtout lorsqu'on compare au système en vigueur aux États-Unis. Il convient de renforcer leurs moyens d'action, y

compris à l'égard du pouvoir judiciaire, il faut permettre à l'opposition parlementaire de susciter la création de telles commissions (c'est le cas au Bundestag).

L'exercice du mandat parlementaire doit concilier la discipline de groupe avec la responsabilité personnelle du représentant. Or il semble que l'on soit passé de l'individualisme extrême à une sorte de caporalisation dûe au contrôle étroit que le groupe exerce au nom de la solidarité gouvernementale. La difficulté provient de ce que les solutions relèvent essentiellement du comportement des groupes parlementaires dont les statuts échappent à tout contrôle. (cf problème des boitier électronique, en plusarticle 27 de la Constitution qui impose le vote personnel, le Conseil constitutionnel a accepté cette pratique, interdite ensuite par Philippe Séguin)

Chapitre III. Référendum et régime représentatif

La reconnaissance actuelle de procédure de démocratie directe ne doit pas tromper : il ne s'agitnullement d'intégrer un véritable populaire apte à concurrencer les représentants. L'intervention directe du peuple apparaît soit comme un appoint de la représentation, soit commeun simple correctif afin de tempérer les effets de la représentation. Ainsi le terrain privilégié de la démocratie semi-directe demeure l'élaboration et la révision de la Constitution.

Section 1. Le mécanisme référendaire

Au sens strict le référendum est une expression direct de la volonté du corps électoral, qui fait partie du processus d'élaboration de l'acte constitutionnel législatif ou administratif. C'est une technique par laquelle les gouvernants prennent l'initative de consulter le peuple. Les modalités de référendum sont très variables, selon la matière, les conditions de son déclenchement ou sa portée juridique.

Quant à la portée juridique, le référendum peut être de décision ou de simple consultation. Dans ce dernier cas, il intervient avant la phase parlementaire (compétence législative exclusive du Parlement : Grande-Bretagne, Suède). En Suisse au contraire, tous les référendums sont de décision.

Quant à la matière on distingue référendum constituant (adoption/révision) et référendum législatif qui porte sur une loi ordinaire. Mais il peut également porter sur unacte d'administration, le cas le plus important étant celui de la ratification des traité internationaux.

La combinaison de procédure de démocratie directe avec le régime représentatif a été l'une des propositions développées dans l'entre-deux-guerres, notamment par Hans Kelsen et Carré de Malberg pour favoriser une démocratie plus réelle et contrecarrer la tendance à la souveraineté parlementaire. Ceci n'était pas neuf : le référendum existe depuis la fin du XIXième aux États-Unis, à l'échelon des États et surtout en Suisse. La difficulté majeure est l'hostilité du personnel politique à l'intervention directe du peuple, et la crainte d'un pouvoir personnel(d'autant plus qu'en France pratique plébiscitaire du référendum depuis son introduction en 1793par la Convention, pendant les deux empires). Le référendum a longtemps été considéré comme l'instrument du despotisme et de la manipulation démagogique au profit d'un pouvoir usurpé.En outre, il existe un fond libéral hérité de Montesquieu, largement partagé par les parlementaires, qui estime le peuple certes assez mûr pour élire ses représentants mais pas assez mature pour délibérer sur des lois.La Libération est marquée par l'utilisation du référendum constituant. La Constitution de 1958 a fait du référendum constituant la procédure normale de révision (article 89). Elle a

également innové par l'introduction d'un référendum législatif (article 11). En 1958 l'organe touché par la procédure est le Parlement. Le Parlement monopolisait en effet le pouvoir législatifvoir le pouvoir de révision. Le Chef de l'État peut contourner le Parlement selon l'article 11.

Section 2. La signification politique du référendum sous la Vième République

Le recours au référendum législatif permet au peuple de « jouer au législateur d'un jour » (de Gaulle). Cette procédure s'analyse en effet dans l'acte par lequel le Chef de l'État transfertexceptionnellement au citoyen le pouvoir d'adopter une loi. Selon l'article 11, le Chef de l'État, sur proposition du Gouvernement, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publiques. Depuis la révision d'août 1995, il peut aussi soumettre tout projet de loi portant sur des réformes relatives « à la politique économique ou sociale de la nation et au service public qui y concours ». Il peut soumettre à référendum tout projet de loi tendant à ratifier un traité, qui sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.Article 11

« Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement [...] ou sur proposition conjointe des deux assemblées, [...] peut soumettre tout projet de loi portant l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la Nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.

Lorsque le référendum est organisé sur proposition du gouvernement, celui-ci fait, devant chaque assemblée, une déclaration qui est suivie d'un débat.

Lorsque le référendum a conclu à l'adoption du projet de loi, le Président de la République promulgue la loi dans les quinze jours qui suivent la proclamation des résultats de la consultation. »

Malgré l'élargissement du champs référendaire, la formulation retenue écarte les sujets de société les plus controversés. La question essentielle est la suivante : comment donner la parole au peuple sans se voir imposer la vox populi ? Le thèmes des libertés publiques proposé par Mitterrand en 1984 n'a pas été retenu, certains ont avancé qu'un tel projet comportait le risque d'organisation de référendums liberticides. C'est sur cette grande partie que le président peut désormais intervenir. Cette extension s'inscrit dans la mythologie gaullienne qui veut que sur des sujets essentiels, le Président établisse un dialogue avec les Français. La menace d'un dérive plébiscitaire est alors réelle (si l'auteur fait d'une réponse positive la condition de son maintien). Concernant la procédure, le Chef de l'État dispose bien d'un pouvoir discrétionnaire dans le maniement du référendum dans la mesure où il apprécie seul la suite qu'il convient de donner à l'initiaitve dont il est saisi. La Constitution fait la disctinction entre le pouvoir de proposition et le pouvoir de décision, en pratique le Chef de l'État les a réuni entre ses mains. Le référendum ne peut être mis en oeuvre que lorsque certaines conditions sont réunies ; les assemblée doivent être en session, afin de permettre le cas échéant aux parlementaires d'exercer leur contrôle.La mise en oeuvre de la procédure référendaire associe le Conseil constitutionnel de manière consultative. Consulté par le Gouvernement sur l'organisation des opérations, il peut présenter des observations concernant la liste des organisations habilitées à participer à la campagne. En

revanche, le Conseil constitutionnel n'est juge de la constitutionnalité ni au départ ni à l'arrivée. Il se borne à en proclamer les résultats. En l'absence de ce garde-fou, la dérive plébiscitaire ne peut être entièrement exclue.Arguments mis en avant par le juge (décision du 6 novembre 1962) pour décliner sa compétence : la loi référendaire constitue « l'expression directe de la souveraineté nationale ».En septembre 1992, à l'occasion du référendum relatif à la ratification du traité de Maastricht, les députés qui avaient déposé un recours estimaient que la compétence du Conseil constitutionnel s'était largement élargie depuis 30 ans, et qu'il pouvait donc revenir sur sa position de 1962. Le Conseil constitutionnel maintient sa jurisprudence (décision du 23 septembre 1992). Il n'invoque plus comme en 1962 l'esprit de la Constitution (« l'esprit de la Constitution qui a fait du Conseil constitutionnel un organe régulateur de l'activité des pouvoirs publics... »), mais il invoque « l'équilibre des pouvoirs établis par la Constitution ». Le fait d'invoquer cette dernière formule est une autre manière d'affirmer que le Conseil constitutionnel ne contrôle pas le peuple sur ce point.À l'occasion du référendum de mai 2005, le Conseil constitutionnel a rendu une série de décision relatifs aux décrets préparant le scrutin, et il a été conduit pour la première fois à vérifier le respect du cadre posé par l'article 11 sur le plan formel et sur le fond, même si ce contrôle demeure très limité.ConclusionIl existe sous la Vième une corrélation entre les logiques référendaires et majoritaires. En l'absence d'une logique majoritaire, le général de Gaulle a cherché à la compenser en traitant les problèmes du pays en terme d'unanimité. À partir de 1962, il donne sa préférence aux solutions en terme de majorité, le contournement du Parlement est alors rarement recherché.On aurait tord de considérer le référendum comme un pur instrument au service du caprice des gouvernants, car le simple faire de demander son avis au peuple, expose le pouvoir à de possibles déconvenues.

Chapitre IV. Le contrôle de constitutionnalité - la démocratie constitutionnelle

Le constitutionnalisme établit une hiérarchie des normes et soumet la loi à la Constitution. Le légicentrisme conduit au principe de légalité qui subordonne l'administration à la loi tout en consacrant la suprématie quasi absolue de la norme législative.À l'origine le contrôle de constitutionnalité s'est heurté à un obstacle psychologique, dans la plupart des États existait une confusion entre pouvoir constituant et pouvoir législatif, même si la différence fonctionnelle était clairement établie.Dans la tradition française, pas de disctinction entre pouvoir législatif et pouvoir constituant cardès l'origine ce fut une même assemblée qui exerça les deux pouvoirs. L'article 6 de la Déclaration définit la loi comme « expression de la Volonté Générale », comme l'a montré Carré de Malberg, cette conception enlève à la distinction entre les lois constitutionnelles et les lois ordinaires son fondement principal, la reconnaissance d'une volonté supérieure à celle du pouvoir législatif.Tout au long du XIXième, le contrôle de constitutionnalité demeure une particularité du droit constitutionnel américain. Le constituant américain a souhaité une Constitution rigide pour conserver les termes du pacte fédéral fondateur. Étant donné la nature fédérale de l'État américain, le pouvoir constituant ne peut être confondu avec le législateur fédéral. Cette disctinction induit à envisager le pouvoir constituant comme le seul véritable souverain et évite une sacralisation du pouvoir législatif incompatible avec l'idée de Constitution moderne normative.

Section 1. L'affirmation tardive du principe de constitutionnalité en France

§ 1. Les réticences originelles

Si l'on pense que la Volonté Générale peut se déléguer d'un seul coup à un organe et que les députés doivent avoir le monopole de la représentation, il est alors impossible de concevoir un contrôle du pouvoir. Un contrôle n'est possible que si l'on considère que le souverain exprime son pouvoir dans plusieurs corps souverains.Alors que les Américains avaient été conduits par leur conflit avec le Parlement anglais à une certaine défiance à l'égard du pouvoir législatif, les Français avaient à créer un régime représentatif, ils ont dû pour cela transférer à l'Assemblée les attributs du souverain. La Francea donc refusé le principe des check and balance, et également la subordination de la loi aux droitsindividuels.Pour Rousseau, si le législateur est souverain, il est inutile de créer une instance gardienne de la Constitution.Toute autre est la position de l'abbé Sieyès, qui propose la mise en place d'un jury constitutionnaire, gardien et garant de la constitutionnalité des lois. Ce jury aurait une autorité spéciale, à la fois politique et représentative, et pourrait pallier les risques de voir les décisions législatives entrer en contradiction avec les lois fondamentales. Cette autorité ne pourrait être le juge, sinon le pouvoir judiciaire empiéterait sur le législatif et l'exécutif.La concrétisation de ce « tiers-pouvoir » est longue, à cause de l'idéologie parlementaire française, qui a confisqué la production normative dans les mains les représentants, disposant d'une légitimité plus importante. La conscience des parlementaires était donc le seul tribunal de la constitutionnalité des lois. D'autre part, la réception de la justice constitutionnelle n'étaitfaite qu'à travers le prisme de l'expérience américain, c'est-à-dire un contrôle exercé par le juge ordinaire.

§ 2. L'instauration du Conseil constitutionnel

En 1958, le problème que devait résoudre la France était celui de l'établissement d'un système de contrôle de constitutionnalité, qui ne serait ni l'héritier des parlements d'Ancien Régime, ni un simple instrument d'une domestication autoritaire du pouvoir législatif.La Vième République concilie les deux voies que Carré de Malberg avait imaginé : La loi expression de la Volonté Générale (1931), pour sortir du « parlementarisme absolu ». Elle associe ce contrôle à la démocratie et au renforcement de l'exécutif.Aux yeux du constituant de 1958, le contrôle s'inscrit avant tout dans la volonté d'un affaiblissement du Parlementt. « chien de garde de l'exécutif » ou « canon braqué sur le Parlement ». Le Conseil constitutionnel apparaît comme un rouage dans le mécanisme de rationalisation du parlementarisme : par exemple contrôle automatique des lois organiques oudes règlements des assemblées.En outre en 1958, il n'est plus choquant d'opposer la loi à la Constitution, parce que cette dernière est désormais considérée comme l'expression plus solennelle de la Volonté Générale, référendum constituant.Le Conseil constitutionnel, dans sa célèbre décision du 23 août 1985, pose « la loi votée n'exprime la Volonté Générale que dans le respect de la Constitution ». Cette formule énonceun régime d'expression de la Volonté Générale en totale rupture avec le modèle classique. Cela implique la loi votée peut errer.Selon certains auteurs, deux modes d'expression de la Volonté Générale coexistent :

Le mode légicentriste dans lequel la loi votée exprime la Volonté Générale sans être déférrée au contrôle du juge constitutionnel.

Le mode constitutionnaliste dans lequel la loi est le résultat d'un procédure, se composant du vote parlementaire auquel s'ajoute un contrôle de constitutionnalité.

Le Conseil constitutionnel devient essentiel dans l'expression de la Volonté Générale, il y a donc une révolution des pouvoirs, par rapport à la tradition juridique française. Elle brise un tabou en faisant participer un juge à l'élaboration de la loi. Michel Troper est allé jusqu'à qualifier le Conseil constitutionnel de co-législateur.

Section 2. Les modes d'exercice du contrôle de constitutionnalité de la loi

Il faut séparer modèle américain et européen

§ 1. Le modèle américain de la justice constitutionnelle

Grand nom : Thomas Hamilton, dans Le fédéraliste, il développe la première argumentation moderne en faveur d'un contrôle de constitutionnalité. Selon lui le Parlement peut mal faire, comme l'illustre la législation coloniale britannique : une majorité peut être oppressive.La Constitution fédérale de 1787 doit consacrer des limtes précises du pouvoir législatif. Aucunelégislation contraire à la Constitution ne saurait être valable, sans quoi les limitations prévues ne sauraient avoir de sens. Pour Hamilton, il revient au juge d'affirmer la suprématie de la norme fondamentale. Les tribunaux doivent interpréter les lois, mais la Constitution a une place privilégiée : les lois ordinaires n'expriment que la volonté d'une autorité déléguée.Face aux auteurs libéraux, les démocrates (Thomas Paine et Thomas Jefferson) se méfient de cequi peut limiter les États et les peuples. Donc compromis : pouvoir judiciaire fort sans contrôle de constitutionnalité.Le raisonnement de Hamilton n'est repris qu'en 1803 par le président de la Cour suprême Marshall dans l'arrêt Marbury c. Madison. La Cour suprême affirme dans cet arrêt que le pouvoir des tribunaux ordinaires de vérifier la constitutionnalité de la loi est une conséquence naturelle du pouvoir de juger : ce n'est pas une faculté mais un devoir.Modèle américain :

Contrôle diffus exercé par tous les tribunaux, sous l'autorité régulatrice de la Cour suprême. Le juge saisi en première instance est compétent pour se prononcer sur l'ensemble des questions soulevées par un litige. Il n'a pas le pouvoir d'annuler la loi estimée contraire, il ne peut que la déclarer inapplicable.

Contrôle concret : il s'exerce à l'occasion de cas concrets. Contrôle a posteriori - contrôle par voie d'exception

Modèle européen, dont la conception est due à Hans Kelsen. Mais il y a aussi Georges Jellinek (1885) :

Contrôle concentré : juridiction spécialisée, dotée d'un statut constitutionnel particulier garantissant son indépendance. La Haute Cour constitutionnelle d'Autriche instituée par la Constitution autrichienne de 1920 constitue la première application du modèle kelsenien

C'est un contrôle abstrait. Le juge statue sur la loi en elle-même et non pas sur son application dans un litige particulier. À la différence de la France, on peut trouver une coexistence du contrôle abstrait avec le contrôle concret : en Autriche, Italie, Espagne, Allemagne notamment.

Le contrôle est a priori : il est organisé par voie d'action. La saisine de la Cour est alors réservée à des autorités importantes. Ce système a plusieurs avantages : rapidité et sécurité (une fois promulguée, la loi devient incontestable). Mais il est aussi plus politique.

Chaque fois qu'une Cours statue sur une loi de manière abstraite, la logique du système veut que sa décision soit revêtue d'une autorité absolue (autorité de la chose jugée).

La Convention internationale des DH peut représenter une juridiction supérieure aux cours constitutionnelles dans la mesure où les décisions des cours pourront être confrontées aux dispositions de la convention par la cour de Strasbourg. Arrêt Ruiz Mateos du 23 juin 1993, ce contrôle s'est banalisé ces dernières années.

Section 3. La protection de la Constitution par le Conseil constitutionnel

Il a toujours refusé de se considérer comme une autorité ayant pour compétence de régler tous les problèmes constitutionnels. Il estime qu'il n'a pas une compétence générale, limitée par les textes (ordonnance du 7 novembre 1958 et Constitution).Il peut intervenir comme autorité constitutionnelle dans un processus situé en dehors de tout contentieux. Les décisions ou les avis ne sont dans ce cas pas des actes juridictionnels (article 16). Le Conseil constitutionnel peut intervenir en tant que juge électoral pour les élections à caractère national, à l'exception des élections européennes qui reviennent au Conseil d'État. Le Conseil constitutionnel statue en cas de contestation sur la régularité de l'élection, des députés et des sénateurs, régularité des candidatures.Dans le cadre de la procédure référendaire, le Conseil est consulté sur son organisation et surveille les opérations de vote.Il peut intervenir en tant que juge constitutionnel. Son indépendance est la plus nécessaire dans ce domaine. Ses interventions peuvent porter sur la répartition entre la loi et le règlement, ou alors sur le contenu des textes, lois ou traités. Si la première compétence était celle primitivement la plus importante telle qu'envisagée par les constituants, et qui a progressivementperdue de son importance, la seconde compétence a pris une grande ampleur et un intérêt essentiel.Le Conseil constitutionnel, avec la décision du 16 juillet 1971, a élargi le domaine de constitutionnalité, et se consacre désormais à la défense des droits et à la défense de la personne. Le Conseil constitutionnel a bouleversé la tradition en établissant un domaine sacré deslibertés, à l'abri du pouvoir législatif. Il est parvenu à dresser face au Gouvernement et face auxparlementaires la Constitution des citoyens ou la « Constitution sociale » (Maurice Hauriou).Déplacement de l'objet du contrôle, jusqu'à cette date le Conseil constitutionnel se cantonnait à un contrôle externe, sur le respect de la procédure et la répartition des compétences. À partir de 1971, il s'engage sur la voie d'un contrôle interne grâce à l'extension des normes de référence, qui contiennent avant tout des principes relatifs aux droits et libertés des citoyens. J. Rivero : « À la vieille idée qui domine tout le XIXième siècle libéral de la protection de la liverté par la loi tend à se substituer l'idée expérimentale de la nécessité de la protection des libertés contre la loi ».L'autre conséquence de la décision du 16 juillet, c'est que le Conseil constitutionnel se pose de manière spectaculaire comme pouvoir propre et libre, allié des droits et libertés des gouvernés.La légitimité d'une cour constitutionnelle ne se mesure pas à exclusivement à l'aune des modalités de recrutement de ses membres. Les juges doivent rechercher leur légitimité dans leur jurisprudence. La notion de conformité à la Constitution est transformée par la nouvelle jurisprudence : le changement est :

quantitatif (bloc de constitutionnalité) qualitatif : l'insertion dans le bloc d'une série de règles/principes intéressant la liberté

en modifie la nature.

Suite à la révision du 29 octobre 1974 (qui élargit la saisine à soixante députés ou soixante sénateurs), le Conseil constitutionnel a été beaucoup plus saisi et son rôle est transformé par ce que lui demandent les membres de la minorité parlementaire, à savoir se prononcer au fond sur les éventuelles atteintes portées par la politique majoritaire aux droits et libertés.Le Conseil constitutionnel devient juge du conflit politique entre nouvelle majorité et opposition. Le frein pour garantir les libertés, dans contexte caractérisé par une confusion des pouvoirs législatif et exécutif, ne peut venir que du juridictionnel.Pour éviter de s'exposer à la censure du juge, les acteurs ont été conduits à prendre ne compte les principes énoncés par la jurisprudence constitutionnelle. Cette promotion du juge s'inscrit dans le discours de l'État de droit, à savoir une façon de penser la légitimité du politique, qui subordonne la définition de l'intérêt général à sa régularité juridique et constitutionnelle. Les décisions ne se bornent pas à confirmer ou annuler mais précisent parfois l'interprétation qu'elles doivent recevoir en ne les déclarant conforme que sous cette réserve. Nouveau processus : AN, Sénat, Conseil constitutionnel. Certains auteurs estiment que la place que tient lejuge fait qu'il ressemble plus à une « troisième chambre spécialisée » (Shapiro) qu'à un véritable tribunal. Si le Conseil estime qu'il ne lui appartient pas de contrôler l'opportunité d'uneloi, il a toutefois renforcé le contrôle en recourant à la notion d'erreur manifeste d'appréciation.Reprenant une technique inventée par le Conseil d'État, il cherche à savoir si le législateur a commis une erreur grossière d'appréciation, si sa décision n'est pas déraisonnable ou disproportionnée par rapport au(x) but(s) poursuivi(s).Cette évolution du Conseil constitutionnel a changé la nature même du droit constitutionnel, qui de droit politique devient un droit juridictionnel, c'est-à-dire un droit dit par le juge. Tout au long du XXième, les juristes ont ressenti la fragilité du droit constitutionnel, la question pendant très longtemps posée : le droit constitutionnel est-il un droit ?Désormais elle est tranchée ; le droit constitutionnel est redevenu du droit, il peut constituer l'étude des règles de conduite obligatoires juridiquement sanctionnées. Si la Révolution françaisea échoué dans l'application pratique d'une Constitution normative, une transformation profonde s'est opérée à partir des années 1980, sous l'effet de la diffusion de la théorie kelsenienne, et de l'imprégnation de la culture politique américain, s'est opéré la conversion européenne à la Constitution normative.

Section 4. La question de la légitimité du juge constitutionnel

La juge constitutionnel se voit confier une mission éminemment politique pour lquelle il ne dispose d'aucune légitimité particulière. Dans un système politique démocratique les lois sont faites par le peuple souverain. L'institution d'un tel contrôle confié à une autorité qui n'est pas lepeuple et qui est composé de membres nommés et non pas élus signifie alors que cette autorité contrôle la volonté du peuple et donc que le système n'est pas réellement démocratique. On dénonce cet état de fait en parlant de « Gouvernement des juges ». Question classique : qui gardera les gardiens ?Pour Kelsen il faut que les juges soient désignés par le parlement. Cette condition est rempliedans le cas allemand. Certains auteurs appréhendent de manière critique l'impact du développement du droit constitutionnel sur la démocratie. Il considère que cette forme d'encadrement du pouvoir étatique disqualifie doublement la démocratie représentative.

L'État de droit constitutionnel porterait atteinte au principe même de la démocratie dans la mesure où il repose sur l'idée d'une incapacité du peuple à se gouverner lui-même et à établir une aristocratie éclairée.

L'extension du contrôle de constitutionnalité manifeste au travers de l'affaiblissement du Parlement, une dévalorisation de la légitimité issue de l'élection.

Plus généralement, l'État de droit amenerait la fin du politique. Pour les juristes de la IIIième République, il fallait pallier l'irrationalité du champ politique (cf disfonctionnement du régime parlementaire) en assurant la souveraineté du droit/de la raison. Ce lien étroit tend à se confirmer à mesure que l'État de droit prends corps (dans la Doctrine et dans le droit positif).Selon Georges Vedel, la légitimité tient de ce qu'il n'est pas une source du droit, il n'est qu'un pouvoir constitué ; il est donc subordonné au constituant. La démocratie pré-suppose que la loi soit conforme à l'acte édicté par le pouvoir constituant, elle appelle donc l'État de droit constitutionnel, dans lequel la Constitution exprime le pacte social fondamental, et non pas la loi. Le juge ne fait que garantir la souveraineté constituante.Sous l'effet combiné de la rationalisation du parlementarisme et de la recomposition du paysage politique, le Parlement français est dominé par des majorités disciplinées. Dans ces conditions, laloi exprime une volonté majoritaire et non plus générale. Les différents mécanismes peuvent faire prévaloir le pacte fondamental sur les volontés particulières. Le contrôle apparait comme un contrôle du Gouvernement, et non pas du Parlement.Théorie de l'aiguilleur initiée par Kelsen et reprise par Favoreu. Selon cette doctrine, la juridiction constitutionnelle ne se prononce pas sur le contenu de la loi, mais uniquement sur le contenu de la procédure employée. Le juge se borne à dire qu'il y a incompétence : dans le cas contraire, on peut passer par le peuple : le dernier mot revient toujours à la Constitution. Mais cette théorie s'effondre si le juge est juge de la supra-constitutionnalité.La réponse apportée à la question qui garde les gardiens se réfère au droit du dernier mot du pouvoir constituant dérivé. Cette théorie du dernier mot s’effondre dès que le juge a le pouvoir de contrôler les révisions de la loi constitutionnelle.La jurisprudence constitutionnelle par la construction « d’une charte des droits et libertés des citoyens » (Dominique Rousseau) et par le contrôle sur ce fondement des lois votées. Cette jurisprudence a permis de rendre visible ce qui était jusque là caché à savoir la dissociation toujours possible du corps du souverain et du corps de ses représentants. La jurisprudence du conseil constitutionnel a permis de mettre en lumière des divergences entre la volonté constituante du peuple et la volonté législative de ses représentants. La nécessité démocratique à laquelle renvoie la jurisprudence constitutionnelle est nouvelle, différente de celle admise depuis 1789, à savoir une fusion du peuple dans le corps politique de lareprésentation nationale.

II. Les relations entre les pouvoirs

Titre I. La pratique de la séparation des pouvoirs

Le premier fondement de cette séparation c'est le système politique anglais. Forte de son statutd’insularité, l'Angleterre a pu échapper à l'influence du droit romain, lequel prônait un renforcement de toute autorité. Donc l'Angleterre est le premier État monarchique ayant crée auprès du roi et face au rois des organes destinés à contrebalancer l'absolutisme. L'Angleterre est également le premier pays à avoir inscrit les droits des individuels parmi les contre pouvoirs : La célère déclaration de droit de 1689(Bill of Rights) impliquait l’adoption d’une technique de séparation des fonctions. Technique plaçant le parlement en face du roi et de ses ministres. .

Le principe de séparation des pouvoirs est le résultat d’une évolution historique qui ne sera théorisé qu’après cette formation collective.

Chapitre I. Les interprétations du principe de séparation des pouvoirs

Section 1. Les avatars du principe

La doctrine de la séparation des pouvoirs est au départ une doctrine libérale de la prudence, exprimée par Montesquieu « Tout Homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ». Il faut donc que « le pouvoir arrête le pouvoir ». Cette formule sera parfaitement comprise par les constituants américains, à la différence des Français. Ces auteurs ont pour objectif de sauvegarder la liberté des sujets. Pour eux seule une fragmentation de la puissance de l'État permettra cette sauvegarde.Montesquieu explique que cette garantie de la liberté infdividuelle ne peut être réelle que par une fragmentation de la puissance de l’état. Cette fragmentation doit se faire par une répartition des fonctions.

Fonction exécutive Fonction législative Fonction juridictionnelle (chez Locke : fédérative : relations internationales)

Pour Montesquieu il ne s'agit pas de séparer (n'utilise pas l'expression) mais de les répartir de telle manière que cela produise un exercice modéré du pouvoir. Le principe de séparation des pouvoirs recouvre en fait deux principes.

Principe du non-cumul Principe de non spécialisation (C6 du livre 11 De l'esprit des lois) : pour lui le monarque

doit avoir l'exécutif, mais aussi participer à la procédure législative, notamment avec le droit de veto.

Cela évite que les Assemblées puissent également ce rendre maîtresse de la fonction exécutive, cela permet également aux actes d’exécution de la loi d’être fidèle à l’esprit de la loi.

Les organes ne sont donc pas séparés fonctionnellement dans le système de Montesquieu. Il est aussi inexact que les autorités ne reçoivent aucun moyen d'agir les unes sur les autres. Pour Montesquieu, il importe avant tout d'investir du pouvoir suprême dans l’état conjointement le Parlement et le Gouvernement, en rendant l'accord nécessaire et libre. Il admet que plusieurs organes puissent concourir à l'exercice d'une même fonction. Et ce concours engendre la modération, à condition que les organes soient suffisamment indépendants pour s'équilibrer. Ce concours suppose que chaque organe soit titulaire de la faculté d'empêcher les autres d'abuser de leur pouvoir, mais qu'ils collaborent.Cette théorie sera très mal comprise. A travvaers J.J Rousseau et l’Abbé Mably, le principe reçoit une autre acception. Séparation est alors synonyme de spécialisation, chacune des fonctions de l’état étant réservé à des organes distincts de telle sorte qu’à une fonction correponde un organe. Dans la terminologie constitutionnelle courante c’est cette acception qui l'emporte. Encore aujourd'hui, on assimile le Gouvernement/le Chef de l'État à l'exécutif et uniquement à l’exécutif, même lorsque ses organes constituent ( comme c’est le cas dans les régimes parlementaires dérivés du modèles GB) les organes essentiels de la fonction législative. En conséquence le Parlement fut assimilé à lui seul au pouvoir législatif. Sous la révolution laséparation des pouvoirs apprait comme une technique politique pour subordonner le roi et éviter

les débordements d’une classe populaire à l’époque dépourvue de savoir et d’instruction civique. Une telle interprétation qui court tout au long du XIXè en France implique la conception d’un exécutif nécessairement subordonné. C'est la loi (expression de la Volonté Générale) qui définit les autres fonctions, ces dernières sont donc envisagées que par rapport à celles du législateur. Or dans une conception organiciste, tout le pouvoir législatif appartient au seul organe législatif, donc au Parlement, il en résulte que l'organe exécutif est réduit à la seule fonction d'exécution d’une loi à l’élaboration de laquelle il n’a pas eu part. LA constitution française de 1791 est sous tendue par une hiérachie des fonctions, une suprématie de la fonction législative et de ce fait une hiérarchie des organes assurant la suprématie de l’Assemblée.

Section 2( ou b) . La signification contemporaine du principe

Aujourd'hui le système de partage du pouvoir semble se fonder sur la distinction entre pouvoir d'action et pouvoir de contrôle reprenant donc ainsi la distinction de Monesquieu entre la volonté de statuer et une faculté d’empêcher. Aujourd’hui on voit bien que le modèle républicain français sépare les pouvoirs dans la seule mesure ou il distribue les fonctions à des organes distincts.

La perception moderne du principe de séparation souple des pouvoirs réhabilitée le pouvoir exécutif. Le Gouvernement a désormais les moyens de définir par lui-même les cadres de sa politique. Il dispose ainsi d’un Ppouvoir autonome, dit pouvoir normatif, qui lui permet d'édicter des règles générales et impersonnelles sans le secours du Parlement.

Le principe de séparation a été atténué à causegrâce au règne de la majorité, duc’est le phénomène majoritaire. Les partis politiques ont été la cause du développement des Gouvernements de cabinet ou gouvernements présidentiels, qui surmontaent la séparationen créant une autorité forte, efficace et stable (Parlement + Gouvernement). Actuellement en Angleterre, le cabinet (l'exécutif) est à ce point intimement lié/issu de l'assemblée, que ce n'est plus de séparation qu'il faut parler mais de fusion. Quand il existe une religation de confiance absolue entre l'exécutif et le législatif, il est bien certain que la possibilité pour l'un des pouvoirs de se dresser contre l'autre n'a plus guère de sens.

La séparation des pouvoirs s’est donc déplacé et La séparation des pouvoirs réside désormais dans le dialogue entre la majorité et l'opposition. Mais un tel régime ne conduit pas au despotisme : même si la majorité du parlement et l'exécutif relève de la même tendance politique, ils ont les moyens d'éviter leurs abus de pouvoir mutuels. A cet égard , Lles juges constitutionnels sont en mesure d'éviter les abus. Les citoyens peuvent mettre fin aux fonctions des gouvernants.Il existe une autre forme de séparation qui se dégage du suffrage universel. LaC’est ce que ledoyen Vedel l'appelait la séparation du pouvoir et de l'opposition : séparation entre le pouvoir d'aujourd'hui et celui de demain. Le système bipartisan semble susciter une autre forme de limitation par l'alternance régulière de deux grands partis dans la détention du pouvoir souverain.Les fonctions de l’état ne sont plus uniquement séparées horizontalement entre les pouvoirs exécutifs, législatifs et juridictinonels mais également verticalement par d’une part une division interne entre l’état et les collectivités llocales qui le composent et d’autre part par des limitations du pouvoir étatique imposées par ses relations avec les organisations internationales. D'autre part limitation du pouvoir étatique par la division interne verticalement entre l'État et les collectivités locales, et d'autre part limitation par les organisations internationales

Chapitre II. La séparation souple et le régime parlementaire

Section 1. Les caractéristiques du régime parlementaire

Le régime parlementaire tolère une exception au principe de spécialisation, et au principe d'indépendance.Cette interdépendance se traduit par l'existence :

du droit de dissolution de la responsabilité politique des ministres

Les ministres doivent agir conformément à la volonté politique de l'assemblée sous peine d'être renversés par elle. Le régime parlementaire répond à une logique de conflit et de compétition. Leconflit est institutionnellement admis et les moyens institutionnels d'y mettre un terme sontaménagés de telle sorte qu'il n'y a pas d'obligation d'autolimitation des acteurs. Pas d'obligation de compromis, alors que les régimes ignorant la responsabilité politique sont renvoyés à une logique d'autolimitation.Il semble désormais admis par la Doctrine que le droit de dissolution manque dans certains régimes parlementaires, donc ce n'est pas un élément nécessaire. Donc le seul critère est la responsabilité gouvernementale devant l'assemblée élue.

Section 2. Les différentes modalités du régime parlementaire

Le parlementarisme dualiste est défini comme un système dans lequel le Gouvernement est responsable devant la chambre et devant le Chef de l'État. La théorie dualiste se fonde sur le principe de l'égalité de la collaboration des pouvoirs, postulat d'une parité entre le Parlement et le Chef de l'État. Archétype : monarchie de Juillet, durant laquelle le Gouvernement ne pouvait rester en fonction que tant qu'il conservait la confiance du monarque etde la Chambre. La dissolution et la responsabilité constituaient les armes équivalentes qui permettait le maintien de cette égalité.Le parlementarisme moniste est un système dans lequel le Gouvernement ne dépend plus que de laChambre, qui en détermine donc la composition et la politique. Le régime parlementaire tend alorsà se réduire à un équilibre entre la majorité parlementaire et le Gouvernement qui en procède.En Angleterre, la Couronne a perdu l'essentiel de ses pouvoirs au cours du XVIIIième, depuis parlementarisme moniste.En France, le passage du dualisme au monisme s'est opéré à la faveur de la crise du 16 mai1877. Cela a donné au parlementarisme moniste français son caractère propre marqué par la primauté des assemblées et par la subordination de l'exécutif. Avec la Constitution Grévy apparaît le Gouvernement par délégation parlementaire.On a coutume d'identifier deux versions du parlementarisme moniste :

Il existe au sein de l'assemblée des partis très nombreux, de telle sorte que la formationet le maintien du Gouvernement dépendent toujours de la stabilité d'une coalition. Il y a alors prédominance de la Chambre, et à travers elle des partis politiques. Régime d'assemblée, notamment dans les IIIième et IVième Républiques.

Il existe un parti majoritaire homogène, stable et discipliné, de sorte que le Gouvernement est formé de l'équipe dirigeante de ce parti. C'est alors le cabinet qui va exercer la prédominance, puisque c'est lui qui contrôle la majorité

Après la Première Guerre Mondiale, la persistance du modèle dualiste se manifeste dans la Constitution de Weimar. H. Preuß « le vrai parlementarisme consiste en ceci que le Parlement ne

doit pas être tout-puissant, mais qu'il se trouve soumis à un contrôle qui est exercé par une instance démocratique, à savoir le Chef de l'État ».Après la Seconde Guerre Mondiale, mouvement vers un parlementarisme absolument moniste maisen principe équilibré. Cf Constitution de 1946, loi fondamentale allemande de 1949, Constitution italienne. Trait commun : maintiennent le Chef de l'État dans des attributions formelles.Seuls la France aujourd'hui et le Portugal n'ont pas adopté de parlementarisme moniste, mais plutôt un parlementarisme dualiste dans lequel le Président retrouve de l'autorité.Le Chef de l'État français nomme le Premier ministre sans intervention de l'assemblée, le Gouvernement procède donc du Chef de l'État. D'où évolution ultérieure du régime vers le présidentialisme majoritaire.

Chapitre III 3 - . Le régime présidentiel américain : une séparation rigide ?

Section 1. Les caractéristiques du régime présidentiel

Le Président, non responsable politiquement devant les assemblées, ne peut menacer de se retirer. La séparation des pouvoirs produit d'autres effets. Les ministres sont choisis en dehors des assemblées. Ils ne participent pas à l'élaboration de la loi. Les commissions au sein des assemblées sont indépendantes. La qualification du régime présidentiel se réfère uniquement à la forme de l'exécutif, et non pas à une conceptioin de primauté du président sur les organes parlementaires. Les américains n’uitlisent pas la formule de régime présidentiel. Le constituant de 1787 a plutôt vu un régime de type congresssionnel, en refusant au président américain les prérogatives du monarque anglais dans ses rapports avec le Parlement, à savoir l'initiative des lois, la sanction, la dissolutionDonc le régime présidentiel :

Un Chef de l'État chef de Gouvernement, chargé du pouvoir exécutif Le chef de l’état est assisté de Des ministres politiquement irresponsables devant la

chambre. Il est , et dépourvus de moyens de pression sur les assemblées, qui gardent de ce fait une large autonomie dans le contenu de la loi.

Section 2. Les relations entre les pouvoirs publics

L'idée fondamentale de Montesquieu selon laquelle pour sauvegarder les libertés, il faut que le pouvoir arrête le pouvoir, a été appliquée à la lettre dans la constitution américaine. Contrairement à l'idée généralement communément reçuee en France, une tellela conception américaine de la séparation des pouvoirs n'a rien d'une conceptionséparation rigide. Cet adjectif peut prêter à confusion car dans la constitution fédérale les organes ne sont pas spécialisés dans leurs fonctions et il existent donc . Il existe une véritable interconnexion des pouvoirs entre eux. LE président américain participie de façoàn déterminante à la fonction législative par un droit de veto suspensif. Le congrès peut à une majorité des 2/3 surmonter ce veto présidentiel. Le chef de l’exécutif peut utiliser cette arme du veto de manière dissuasive pour obtenir des concessions de la part des chamres voire parfois le retrait de textes entiers allant à l’encontre des priorités affichées par la présidence. Le président américain est titulaire du droit de veto : il participe donc à la fonction législative. Le congrès participe à la fonction exécutive de plusieurs manières : , d'une part par le vote du budget, et par le rôle important des commissions parlementaires. Le Sénat doit approuver tous les traités à la majorité des deux-tiers, négociés par le président.

Les sénateurs doivent approuver à la majorité simple, la nomination des ministres et des hauts fonctionnaires. Important pouvoir d’investigation : commission d’enquête peut rassembler tout rensignement utile afin de définir une intervention législative. Il dispose d’un moyen très efficace de renforcement de sa fonction de contrôle. Procédure d'impeachment qui peut viser le président, le vice-président et tous les fonctionnairescivils. Elle ne peut être utilisée qu'en cas de haute trahison, ou de corruption ou autre crime/délits majeurs. Responsabilité pénale et non pas politique.Aux USA, Iil est erroné de penser que chacun des organes est maître d'exercer ses compétences comme il l'entend. Au contraire il doit tenir compte des autres organes : check and balances. C’est bien ce que les constituants ont souhaité. L’idée est que Lles pouvoirs ne sont pas indépendants, chacun peut arrêter ou freiner l'action de l'autre, et lui faire équilibre.Importance du pouvoir judiciaire dans ce système, le contrôle de constitutionnalité exercé par la cour suprême vise à empêcher tout empiétement excessif d'un pouvoir sur un autre.Le congrès a les moyens de bloquer le programme du président le plus puissant qui soit. Le président est donc obliger de négocier. Aux USA l’absence de discipline de vote au sein des groupes parlementaires est importante pour permettre la collaboration des pouvoirs et la limitation réciproque des pouvoirs.Les présidents forts qui peuvent faire face au congrès sont des présidents populaires. La meilleure définition de ce régime est de dire que c’est un régime en droit congressionnel mais à présidence morte. L’histoire politique américaine répond à un mouvement de balancier, soit congressionnelle soit présidentialiste tout dépend des rapports de force politiques. Aux USA l’état n’est pas une puissance extérieure à la société. Le pays a voulu rompre à la fin du XVIIIè avec cette tradition monarchique caractérisée par une distinction très marquée entre l’état et la société civile. L’état n’est pas cette chose idéalisée qu’elle la Respublica dans la tradition française. C’est très concrètement un gouvernement, un groupe d’hommes qui ont du pouvoir et sont potentiellement dangereux pour les libertés. On va substituer à recherche du bien public, la recherche plus modeste d’une bonne gouvernance. Le pouvoir n’est pas extérieur à la société, l’autorité est socialisée.

Titre II. Les moyens d'action réciproque sous la Vème République

Droit de dissolution et contrôle de l'action gouvernementale.

Chapitre I. La dissolution de l'AN

IntroductionLe principe de l'équilibre des pouvoirs au sein d’un (régime parlementaire) se fonde sur la soumission du pouvoir au droit, les règles juridiques (écrites ou non) précisant les domaines d'intervention des différents pouvoirs. La fonction du droit de dissolution marque les limites dujuridique face aux options politiques : lors d'un conflit entre le Gouvernement et le Parlement, le peuple est exclu du jeu politique, jusqu'àau moment ou intervient la dissolution, toujours (prononcée par l'exécutif).La dissolution joue un rôle d'équilibre important, qu'elle soit décidée, ou simplement par la menace qu'elle fait planer. C’est un puissant Sstimuleant pour la cohésion majoritaire.

Les constituants de 1958 ont rompusouhaitent rompre avec l'attitude des constituants de 1946 (qui avaient admis la dissolution tout en la rendant impraticable). Le droit de dissolution appartient au Chef de l'État seul, il l'exerce sans être soumis au contreseing. Dans la mesure ou

il’agit d’un des pouvoirs propres du président on peut Il faut donc parler d'une dissolution présidentielle/royale et non pas d'une dissolution gouvernementale. En effet, Lla dissolution n'a pas la signification qui est habituellement donnéela sienne dans un régime parlementaire. En effet nNormalement ellela dissolution est à la disposition du Gouvernement, même si elle est formellement prononcée par le Chef de l'État (IIIième République et en Grande-Bretagne) : elle est alors le moyen d'action qui contrebalance la motion de censure votée par le parlement. DansSous la Vième, elle est un élément de l'arbitrage présidentiel.L'innovation a consisté donc dans la liberté de décision du Président de la République, alors que ses prédécesseurs avaient une marge de manœuvre réduite. Les lois constitutionnelles de 1875 lui donnaient une place importante à la dissolution mais son usage était conditionné par , maisl’ avis conforme du Sénat. D'autre part la dissolution prononcée par Mac-Mahon lors de la crise du 16/05/1877 a discréditée cette procédure qui n’a plus été mise en œuvre sous la IIIè Républque. l'a ensuite discréditée.L'article 12 de la constitution du 4/10 dispose qu'avant la dissolution le Chef de l'État doit consulter le Premier ministre et les présidents des assemblées. Mais ces avis n'ont pas de force contraignantene lient en aucun cas le chef de l’état.. Le décret de dissolution est totalement immunisébénéficie d’une totale immunité juridictionnelle, notamment devant le conseild'État. LaCette dissolution, comprise comme un pouvoir discrétionnaire du président,, constitue un élémentessentiel du principe majoritaire. À la différence de la IIIième République, la majorité parlementaire ne se disloquera pas, parce que le Chef de l'État dispose de cette menace.Conditions encadrant son exercice :

Les élections générales doivent avoir lieu 20 jours au moins et 40 jours au plus après la dissolution.

La nouvelle AN n'a pas à attendre une convocation. Elle se réunie de plein droit. La nouvelle AN ne peut être dissoute dans l'année qui suit son élection. Il est interdit de dissourdre pendant l'application de l'article 16, et également en

période d'intérim (le président du Sénat ou le gouvernement ne disposent pas de la légitimité du suffrage universel).

Le mythe fondateur de la tradition républicaine, selon lequel la dissolution porte atteinte à la souveraineté nationale, est tombé avec le mythe de la souveraineté du Parlement. D'autre part, ledroit de dissolution conçu comme moyen d'arbitrage est devenu l'arme majeure d'un Président partisan contre la majorité parlementaire. Elle apparaît comme un instrument propre à consolider la place du Président, en lui permettant d'en appeler au peuple. Elle permet la construction d'une majorité, qui lie élection présidentielle et élections législatives.Dissolution en 1962 (crise politique), 1968 (crise extra-politique), 1981, 1988 (après élection du Président, F. Mitterrand cherche à construite la majorité dont il a besoin). La dissolution de 1997pourrait s'y apparenter (dissolution à l'anglaise), pour reformer/consolider une majorité. Or le Président est resté au pouvoir. Mais dixit Monsieur le professeur, la Vième est en train de pourir par la tête.

Chapitre II. Le contrôle du gouvernement par le Parlement

IntroductionLe contrôle politique du gouvernement se manifeste sous différentes formes :

Il peut se limiter à l'exercice du droit à l'information : questions écrites dans le JO, questions orales (annoncées par écrits) et les questions au Gouvernement (instituées en juin 1974, et constitutionnalisées en août 1995).

Véritable travail d'investigation, malheureusement beaucoup trop limité, auquel se consacrent les commissions d'enquête ou de contrôle. Les commissions d'enquête sont souvent utilisées par les majorités pour étouffer une question. Ces dernières années, la constitution d'une commission est le moyen de faire surgir un problème et d'obliger le Gouvernement à le traiter (cf commission sur Outreau).

Les commissions sont très puissantes aux États-Unis, ce qui est paradoxal puisque c'est un régime présidentiel. Dans la mesure où le Congrès est débarrassé de l'obligation de soutien, il peut aller très loin dans le contrôle et s'y consacrer.

Pour l'essentiel : mise en jeu de la responsabilité politique suivant les procédures du parlementarisme rationalisé.

1. On peut se demander si la distinction entre la fonction législative et la fonction de contrôle ne créé par une cassure artificielle : lorsque le parlementaire légifère, il exerce aussi sa fonction de contrôle (notamment par les amendements).

2. Spécificité de la responsabilité politique : elle est une responsabilité pour fait d'autrui, par le procédé d'une imputation fictive, il existe un divorce entre l'auteur de l'acte et le responsable de l'acte. Un ministre ne peut se défausser de sa responsabilité en invoquantla faute d'un subordonné ou d'un collaborateur. C'est une responsabilité non pas individuelle, mais en raison de la fonction.

En outre, alors que la responsabilité pénale est toujours définie par la loi, la responsabilité politique est caractérisée par un principe d'opportunité.

3. Ces dernières années, tentation de transformer la responsabilité politique individuelle pour fait d'autrui, en une responsabilité pénale personnelle pour fait d'autrui. Le ministre est en effet poursuivi pour les actes effectués par ses subordonnés. Il y a « criminalisation de la responsabilité politique » (Olivier Beaud).

La principale conséquence de ce mouvement est une déparlementarisation du régime. L'appréciation de la légitimité relève désormais d'un processus pénal.

Affaire du sang contaminé a révélé les lacunes de l'engagement de la responsabilité pénale : les victimes ne pouvait mettre en œuvre la procédure : c'est la Chambre qui doit attaqué. Donc on a réformé, de façon contradictoire. On voulait favoriser l'action des magistrats de droit commun, mais en même temps protéger les ministres de recours incessants. D'où réforme de juillet 1993 : instauration de la cour de justice de la République (12 magistrats parlementaires, 3 magistrats du siège de la cour de cassation). Arrêt du 9 mars 1999 (Laurent Fabius, Georgina Duffoix relaxés, Edmond Hervé condamné mais dispensé de peines).

D'où pénalisation de la vie politique : est-il normal de sanctionner pénalement un ministre pour son incompétence ? On fait du juge pénal le seul capable de juger l'opportunité. Selon Olivier Beaud, il n'est pas compétent. Dans le cas d'une erreur aussi grave, où est la faute pénale ? N'est-ce pas plutôt une faute politique ? Recherche du

coupable. La sanction pénale d'une faute politique ouvre la voie à de dangereux débordements.

Section 1. La complexité des procédés de mise en jeu de la responsabilité gouvernementale

Le contrôle politique du Parlement peut aboutir à la mise en jeu de la responsabilité politique du Gouvernement. Mais, tandis que sous la IIIième République, cette mise en jeu pouvait intervenir à n'importe quel moment et pouvait résulter d'une simple interpellation ou du vote d'un ordre du jour, elle se trouve très circonscrite.Elle est limitée dans le cadre de procédures qui restreignent les prérogatives des députés et suppriment celles des sénateurs. Les procédures rationalisées sont destinées à éviter l'instabilité gouvernementale en rendant plus complexe/difficile la mise en cause de la responsabilité. Les constituants de 1958 ont agis directement en vue de limiter l'action du Parlement en l'enfermant dans la procédure réglementée comme la motion de censure et la question de confiance. L'AN n'a l'initiative de l'engagement de cette responsabilité que dans le cas de la motion de censure. Le grand changement introduit par la Constitution de 1958 est de considérer la confiance comme étant implicite, et d'exiger que la défiance soit explicitement affirmée.

§ 1. La question de confiance (art 49.1)

Le Gouvernement est considéré comme bénéficiant de la confiance de l'AN. Le Premier ministre, après délibération en conseil des ministres, engage la responsabilité du gouvernement sur tout ou partie d'un texte. Mécanismes : vote sur le programme (déclaration de politique générale), ... qui permettent au Gouvernement d'obtenir la confiance de l'assemblée. Ils sont davantage utilisés pour souder la majorité que pour provoquer le contrôle du Parlement. Pour la question de confiance, aucune majorité renforcée n'est exigée : majorité des suffrages exprimés.Existe-t-il une obligation ? Le Gouvernement a besoin de la confiance de l'AN. La pratique montre que cet engagement est considéré comme facultatif, par-delà l'interprétation littérale du texte. En 1966, Georges Pompidou se refusa à engager la responsabilité de son Gouvernement,à la suite de la déclaration qu'il avait prononcée devant l'AN, estimant qu'il appartient à l'AN de mettre en jeu cette responsabilité (article 49-2). Plusieurs explications :

Le Gouvernement, nommé par un Président élu au suffrage universel sur un programme, n'a pas à le re-présenter devant l'Assemblée

Le Gouvernement a une existence juridique dès que le Premier ministre est nommé par le Président.

Très souvent absence de majorité devant l'assemblée, donc crainte d'un rejet du Gouvernement à peine constitué

§ 2. L'engagement de la responsabilité sur un texte (article 49.3)

Avec cet article, le Gouvernement peut contraindre sa majorité à approuver un texte dont elle ne veut pas, sauf à le renverser. Le texte est considéré comme adopté, si une motion de censure (déposée dans les 24h) est votée à la majorité absolue des membres de l'AN. Là encore, la confiance se présume : dans le silence des députés, la confiance est réputée acquise, et le texte présumé adopté.La procédure évite au Gouvernement d'être renversé à une majorité simple, lors du débat sur un texte.

Le 49-3 était initialement réservé aux textes fondamentaux (budget, nucléaire). Son usage s'est banalisé. Le recours a changé de signification : les ressources du parlementarisme rationalisé ont été utilisées à des fins étrangères à leurs finalités originelles. Son application a répondu à trois fonctions :

Pressions sur la majorité Lutte contre l'obstruction parlementaire Substitut à l'absence de majorité

La banalisation de la procédure n'exclut pas sa critique : il est manifeste que l'usage répété de l'article 49-3 conduit à priver l'AN de l'exercice de son pouvoir législatif. C'est un scandale. Par ce mécanisme, un texte proposé par le Gouvernement, peut devenir une loi, sans que l'Assemblée ne l'ait jamais voté. Son utilisation répétée pour pallier les défaillances d'une majorité risque d'entamer gravement les prérogatives du Parlement, jusqu'à supprimer sa raison d'être.

§ 3. Le mécanisme sophistiqué de la motion de censure (article 49-2)

Le gouvernement n'a pas à faire la démonstration d'une confiance présumée du Parlement. Donc ses adversaires doivent administrer la preuve contraire. Afin d'éviter les pratiques aberrantes des IIIième et IVième République, la majorité absolue est exigée par l'adoption d'une motion de censure.La procédure n'a connu qu'un seul aboutissement, en octobre 1962 (gouvernement Pompidou). Ce qui est cocasse, c'est qu'en 1962 les élections législatives inaugurent le fait majoritaire et provoquer la mise hors-jeu de la procédure de l'article 49-2.L'aboutissement de la procédure a été rendu très difficile. En premier lieu, pour être recevable, la motion de censure :

doit être signée par 1/10ième le vote ne peut avoir lieu que 48h après son dépôt elle en peut être adoptée qu'à la majorité absolue des membres composants l'assemblée

Deux conséquences :

1. Incite les députés à choisir d'autres moyens pour s'opposer. 2. Permet à des gouvernements qui ne disposent que d'un soutien artificiel de durer

Dans la pratique, la motion de censure n'est plus utilisée que pour imposer un débat solennel, en brisant la logique de l'ordre du jour prioritaire. Elle est devenue un instrument médiatique/incantatoire.

Section 2. Le face-à-face bloc majoritaire/opposition

IntroductionLa responsabilité politique du gouvernement est aujourd'hui appréciée par les électeurs en fin delégislature. C'est le corollaire nécessaire de la disparition, dans presque tous les pays, de la voie parlementaire de cette mise en cause.En France, cette disparition s'inscrit dans la singularité de la Vième République. Particularité par rapport aux autres pays (où le choix du gouvernement est immédiat, par le corps électoral) : le choix du Gouvernement est toujours médiatisé par l'élection présidentiel. Des représentations

désuètes continuent d'opposer Parlement et Gouvernement alors que les clivages sont depuis longtemps déplacés, aussi bien dans l'activité législative que l'exercice du contrôle.Qualifier l'AN de Chambre d'enregistrement est un lieu commun, au motif que la majorité deslois adoptées sont des projets de lois. Mais il ne faut pas oublier que l'initiative législative ne fait que traduire la mise en œuvre d'une politique, œuvre d'un Gouvernement soutenu par une majorité parlementaire. La confrontation du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif a disparu. Nouvelle donne : bloc majoritaire (Gouvernement et majorité) contre l'opposition politique. Le bloc majoritaire s'est emparé de la loi, considérée désormais comme l'expression privilégiée de sa volonté. L'inflation législative en est une conséquence manifeste.La loi met beaucoup moins une politique d'intérêt générale, qu'elle n'affiche les intentions des vainqueurs. Le désequilibre véritable ne se situe pas dans l'insuffisance du rôle législatif de l'assemblée, mais bien plus dans son hypertrophie. Cette hypertrophie conduit aussi à concentrerle temps et l'énergie des parlementaires au détriment du contrôle politique.D'où la question suivante : le Gouvernement devient-il irresponsable dès lors qu'il est assuré du soutien de sa majorité ? Une telle conclusion méconnaitrait la signification positive de la responsabilité politique. Celle-ci présuppose l'obligation faite aux gouvernants de répondre de leurs actes. Les gouvernants doivent rendre compte de leur action, en s'expliquant dans un débatcontradictoire, qui se déroule sous les yeux des électeurs.La difficulté provient du fait que la majorité parlementaire soutient par hypothèse le Gouvernement et ne va pas jusqu'à adopter la conduite suicidaire, qui irait jusqu'à remettre en cause en action dont elle est solidaire devant les électeurs. Cette tâche appartient normalement à l'opposition politique. Mais cette évidence est étrangère à notre tradition parlementaire. L'opposition ne peut contrôler, et la majorité n'ose pas contrôler.Concernant la place reconnue à l'opposition, il était difficiles aux pères fondateurs de reconnaître des droits à l'opposition, alors que leur principal souci était de consolider la majorité.La réintégration progressive de l'opposition a débuté au moment de la rupture avec la période gaullienne, après l'élection de Valéry Giscard d'Estaing à la présidence : c'est lui qui a voulu :

les questions au gouvernement la saisine parlementaire du conseil

Mais l'opposition n'a pas fait l'objet d'un statut, son absence n'est pas une spécificité française, mais la plupart des démocraties voisines connaissent une forme d'institutionnalisation : en Allemagne on donne la présidence de certaines commissions à l'opposition, ou celle-ci peut demander des commissions d'enquête. En Grande-Bretagne, la confrontation entre les forces politiques en présence n'a jamais brisé le cadre de l'unité nationale. L'opposition en Grande-Bretagne accepte de jouer loyalement son rôle critique, sans contester les fondements du régime. En France, la principale préoccupation a été de garantir le consensus sur le régime lui-même.D'autre part difficulté dans le fait que le Chef de l'État prétend incarner l'unanimité et la majorité, en même temps. Il laisse nécessairement dans l'ombre la place de l'opposition au sein des institutions. Pour que l'opposition puisse normaliser de façon définitive, il faudrait accepter que le Chef de l'État cède la place à un monarque à l'anglaise, ou un président allemand. La principale source du déséquilibre provient aussi du fait suivant : la représentation nationale est appelée à soutenir une action préparée et mise en œuvre hors d'elle. Elle se trouve ainsi instrumentalisée par l'appareil gouvernementale.La chambre des Communes, confrontée elle aussi au défi de la domination gouvernementale, a entrepris une réflexion qui l'a conduite à remettre en cause sa conception traditionnelle d'un

parlement de la parole au profit d'un Parlement de travail. Elle a cherché à réévaluer la place de la séance publique, en faveur de l'activité des commissions parlementaires. Institution à partir de 1979 de commissions permanentes spécialisées, seize actuellement, dont les compétences correspondent étroitement à la répartition des ministères.En France, les pistes de réforme doivent s'orienter vers un contrôle plus individualisé de l'action ministérielle. La limitation par la Constitution du nombre de commission (6) est devenue une anomalie, parce que le contrôle de l'action gouvernementale nécessite une spécialisation des comités.Il faut revaloriser le Parlement comme lieu particulier du débat politique. Une revalorisationde sa fonction délibérative participerait de la visibilité du lien représentatif. L'enjeu est de taille car l'opposition qui n'est pas canalisée institutionnellement, ne peut trouver d'expression que dans la rue ou dans la violence. Cette revalorisation est d'autant plus nécessaire que le parlementaire perd de plus en plus de son prestige, au profit des experts. Dans les démocraties libérales, le Parlement est traditionnellement celui qui fait la loi, car organe de la souveraineté de la nation. Or aujourd'hui les lois sont de moins en moins importantes (sauf aux États-Unis) dans l'activité parlementaire, la complexité accrue des projets de lois explique que ces projets sont préparés par des techniciens au sein même des gouvernements et font obstacle à une discussion délibérative approfondie.D'autre part la loi est de plus concurencée, notamment par le contrat. D'où crise des assemblées qui n'ont plus d'autre choix que de suivre les positions du Gouvernement, sauf à verser dans la démagogie.La question de l'extension des droits du Parlement demeure un problème bien plus politique que constitutionnel. Si le fait majoritaire s'applique mécaniquement, il ne peut y avoir de Parlement vivant. Si l'on estime au contraire qu'il faut de grands débats, dans ce cas la discipline majoritaire doit se relacher. Donc la question ne sera pas réglée par des réformes purement constitutionnelles.

IV.

Conclusion : la qualification du régime de la Vième République

Le déséquilibre du système est-il consubstantiel au régime ? Le régime souffre d'une ambiguïté de départ : la Constitution de 1958 a été façonnée pour des périodes extraordinaires. Or l'extraordinaire ne dura que quatre ans. Trois éléments identitaires du régimes :

Un projet constitutionnel inédit Des circonstances dramatiques Un homme providentiel/exceptionnel

Ces trois éléments restaient de l'ordre du contingent. Donc la Vième République portait en elle son achèvement. Dès sa naissance la Vième a provoqué une certaine perplexité. En 1958, une caractéristique apparait d'emblée : restauration du « pouvoir d'État » (Georges Burdeau). Pour lapremière fois dans une Constitution républicaine, la spécificité de la fonction gouvernementale est proclamée par l'article 20. Cette fonction est distinguée de celle du Président, qu'énonce l'article 5.En réalité la distinction s'efface dès lors que le lieu où s'exerce la fonction gouvernementale n'est autre que le Conseil des ministres, sous la direction du Chef de l'État.La Constitution de 1958 est très généralement interprétée comme établissant un régime parlementaire, dans la mesure où il existe une collaboration entre les divers organes. Le modèle

authentique du régime parlementaire dont parle Michel Debré en 1958, prétendait s'inspirer de celui de l'Angleterre, à savoir une fusion presque complète entre l'exécutif et le législatif.L'établissement d'un parlementarisme rationalisé correspond aux différents moyens juridiques mis en œuvre pour restreindre les compétences du parlement. L'accord sur la primauté accordée au rôle présidentiel, conduit à un déséquilibre présidentialiste. Cette présidentialisation accrue est notamment consécutive à l'investissement accru des forces de gauche qui se rallie au régime.Article célèbre de 1973 de Georges Vedel. Selon lui, la Constitution possède deux constitutions : celle de 1958 qui établit une République parlementaire, et celle de 1962 qui conduit vers un régime présidentiel déformé. La tradition constitutionnelle du présidentialisme peut être définie comme celle du dualisme démocratique. Ce courant peut être qualifié de weimarien, puisque son origine se trouve dans la Constitution de la République de Weimar.Modèle weimarien :

Le problème constitutionnel a été posé entre comme un dilemne entre les soviets et la démocratie parlementaire. Ceci explique le choix quasi immédiat fait par l'assemblée nationale constituante, en faveur d'un Chef de l'État républicain unique. Il s'agissait de combler un espace laissé libre par la chute de l'empereur Guillaume II. L'idée de faire élire le Chef de l'État par le peuple fut suggéré par Max Weber au constituant (et notamment Hugo Preuß) fut retenue comme permettant d'éviter une neutralisation de la fonction présidentielle. Ce modèle weimarien s'inscrit dans une parfaite continuité avec la tradition du parlementarisme dualiste. La seule innovation consiste à donner une légitimité nouvelle au Chef de l'État.

À partir de mars 1986, le régime apparait comme un régime parlementaire moniste, dans lequel lePrésident ne remet pas en cause la supériorité du Gouvernement, seul responsable devant le Parlement.In fine, on peut finalement en effet définir la Vième République, on peut reprendre la définition deJean-Claude Colliard comme « un régime parlementaire à correctif présidentiel ». L'expression de présidentialisme majoritaire traduit bien la spécificité des institutions de la Vième République, mais c'est une spécificité en trompe-l'œil. C'est en réalité un véritable parlementarisme, qui fonctionne par l'instrument d'une majorité structurée. La différence, c'estque le chef de cette majorité n'est pas nécessairement le Premier ministre, mais le Chef de l'État. Et lorsqu'il n'est plus le chef de la majorité, il devient, en conservant ses fonctions, le chef de l'opposition.Alors qu'il n'a perduré dans aucun pays européens, le présidentialisme demeure en France. Contairement à la logique du système présidentiel, c'est l'existence d'une majorité parlementaire qui permet une pratique présidentialiste. Celle-ci est écartée en cas de cohabitation.

Titre I. La question de la VIième République

Cf crise profonde. Trois déficits :

Schizophrénie dans le pouvoir Irresponsabilité généralisée Langueur du Parlement

Chapitre I. Un régime présidentiel à la française ?

Pour rétablir l'unité de l'exécutif. Celui-ci permettrait de rompre le lien entre Gouvernement et Parlement, et donc de transposer le système américain, complété de moyens juridiques de

résolutions des conflits (droit de dissolution). Il s'agit de corriger le présidentialisme majoritaire.En premier lieu, il faut rappeler que les expériences française de régimes présidentiels furent toujours des échecs (1791, surtout en 1848). Qu'est-ce qui explique ces échecs ?Les conditions qui expliquent la pérénnité de la Constitution de 1787 sont absentes en France :

L'absence d'enjeu idéologique/partisan Une séparation des pouvoirs réposant sur le principe des freins et contrepois Le fédéralisme Le rôle de la Cour suprême Une conception des rapports sociaux fondées sur le pragmatisme et la recherche du

compromis

Cette proposition repose sur un contresens majeur sur le système américain. Elle néglige les risques de blocage entre l'exécutif et le législatif, mais encore une telle réforme institutionnaliserait une cohabitation permanente entre l'exécutif et les assemblées.D'autre part, la revitalisation des assemblées repose sur un autre contresens relative au rôle d'un Parlement dans un système parlementaire. Une VIième République présidentielle serait un régime pire que le mal qu'elle prétendrait résoudre, car source de blocages insurmontables dans le contexte culturel et politique français.

Chapitre II. Parlementarisme moniste ?

Il faut transférer la totalité des pouvoirs de gouvernement du Président au Gouvernement, afin que le Premier ministre (responsable) en réponde en son nom propre. Le président de la VI ième République serait un simple arbitre.Dans un tel système, seules les élections parlementaires détermineront l'orientation du cabinet.Mais l'élection du Président de la République au suffrage universel serait indispensable pour maintenir le fait majoritaire sans lequel le Gouvernement serait condamné à l'instabilité. Une élection parlementaire uniquement centrée sur l'enjeu de désignation d'un Premier ministre, peutaussi bien provoquer la polarisation nécessaire. Il faudrait un scrutin uninominal à un seul tour, accompagné d'un transfert au Premier ministre du droit de dissolution.Pour éviter le retour au parlementarisme absolu, il faudrait maintenir le dispositif de rationalisation des relations entre gouvernement et assemblée, ce que ne proposent pas les avocats d'un tel régime, dont Arnaud Montebourg. Les partisans de l'option radicale du monisme, en proposant de déserrer l'étau qui pèse sur le Parlement, semblent s'égarer dans une conception archaïque du système de Gouvernement. La contrepartie nécessaire à cette prédominance du Gouvernement devrait être l'établissement d'un statut et de privilèges importants pour l'opposition.ConclusionSi un rééquilibrage des pouvoirs dans le sens d'une re-parlementarisation doit avoir lieu, cela peut se faire en appliquant fidèlement le texte de 1958. La Constitution de 1958 s'est adaptée sans crise majeure à des scénarios très différents.C'est souvent le fantasme d'une monarchie républicaine, ou la nostalgie du parlementarisme absolu qui suscitent des vélléités de modification. Début 2006, vu le délabrement des institutions, « une Constitution ne vaut que ce valent les Hommes qui l'appliquent » (Jacky Hummel).

Droit

Plan du cours

I. Sécurité informatique et confiance o A. Sécurité/Insécurité informatiqueo B. L'identité numérique

II. Propriété intellectuelle et contrôle des contenus

III. Sécurité informatique et initiation au droit de l'Internet

I.

Sécurité informatique et confiance

A. Sécurité/Insécurité informatique

Définir l'insécurité : destruction, modification, vol, indisponibilité. Mythe du hacker et origine interne du problème : négligence. Spam : envoi en masse, non sollicité (ni opt-in : pas d'autorisation préalable ; ni opt-out : impossible de se désinscrire), collecte déloyale, contenu choquant mais pas forcément illégal, dissimulation de l'émetteur. Protection : réglementation (cf.Loi pour la confiance pour l'économie numérique de juin 2004), dispositifs techniques, régulation par le marché (rendre l'email payant), comportement individuel. Phishing : ce n'est plus la menaced'un contre une organisation, mais le contraire ; utilisation de la confiance en utilisant le vocabulaire de la sécurité. Quelles réponses ? Ne pas tout matérialiser, éducation du public, dispositif techniques, réglementation.La confiance est plus importante que la sécurité. Définir la confiance : réputation et pratiques. Longue à construire, rapide à détruite.

B. L'identité numérique

Identification (login), authentification (mot de passe), habilitation (preuve qu'on a un droit). Anonymat/Pseudonymat. Sécurité et identité : ce que je sais (mot de passe, code), ce que je possède (carte), ce que suis (biométrie : physiologique, comportementale : frappe du clavier, voix,démarche, écriture, multimodale). CNIL.

II.

Propriété intellectuelle et contrôle des contenus

Le problème ce n'est pas la propriété industrielle, mais le partage des connaissances. Faut-il un droi spécifique pour Internet, alors que rythme soutenu des innovations, et quel est le droit applicable ? « Code is law » (Lawrence Lessig). L'infrastructure est par essence une loi : le banc est fait pour s'asseoir, pas pour dormir.Les termes du débats : les auteurs doivent être rémunérés, mais le partage de connaissance est un facteur de progrès, lutte contre le piratage dépasse Internet, l'économie classique est une économie de la rareté, l'économie numérique est une économie d'abondance. Logiciel libre.La musique en ligne : 10 millions de voleurs en France ? Ou l'industrie de la bougie doit-elle régir l'usage de l'électricité ? Google et le travail universitaire : un formidable outil pour la recherche documentaire ou une invitation au plagiat généralisé ?

III.

Sécurité informatique et initiation au droit de l'Internet

L'érosion de la vie privée sur Internet : cf. Echelon. Les menaces : une quadruple remise en cause: le droit d'être laissé tranquille, droit à l'anonymat (relatif), le droit de vivre sans être surveillé,le droit de maîtriser la diffusion de ses données. Un email peut être gardé indéfiniment. La loi informatique et liberté définit des principes : principe de finalité, proportionnalité, loyauté, sécurité, transparence reconnu aux personnes, droit d'opposition, droit à l'oubli. Vers une tracabilité ? Téléphonie mobile, carte sans contact, RFID, ... Mais la surveillance peut résulter d'une demande sociale : pour protéger les faibles, éviter l'enfermement, la sécurité, le fun.