La coloration des verres - Verre online

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INTRODUCTION Il convient de débuter par un bref rappel sur la cou- leur, développée par Jacques Livage lors du sémi- naire organisé sur ce thème au Collège de France. "La couleur, dit-il, n'est pas une propriété intrinsèque d'un matériau. Celui-ci n'apparaît coloré que lors- qu'il est éclairé par la lumière. La couleur naît de l'interaction rayonne- ment/matière". Que se passe-t-il lors de cette interaction ? Nous pouvons avoir des chocs élastiques (sans échange d'énergie). Dans ce cas, la diffusion peut être cohérente (réfraction, dif- fraction), quasi cohérente ou incohérente. Si les chocs sont inélas- tiques, il peut y avoir absorption (coloration ionique, coloration par transfert de charge ou par délocalisation électro- nique), émission sponta- née ou émission stimulée. Chocs élastiques Le rayonnement est freiné dans le milieu matériel qu'il traverse, et ceci est à l'origine des phénomènes de réfraction, déjà décrits en son temps par Descar- tes. Cela explique que, pour augmenter l'indice de réfraction, il faut ajouter des éléments lourds (pour obtenir du verre cristal, on ajoute dans la composition de l'oxyde de plomb). A la suite des chocs élas- tiques, le rayonnement est dévié dans toutes les direc- tions. C'est le phénomène de diffusion. Celle-ci peut La coloration des verres GLASS COLOURATION In order to delimit the subject, let us specify that it relates to the colouration (in the field known as visible for the human eye, from 380 to approximately 780 nm) of mineral glasses manufactured at high temperature, excluding colouration by deposition of thin films and surface treatments of very low thicknesses (between some angströms and some microns). Also let us point out the importance of coloured glass in the glass productions: 55 % (in weight) of glass manufactured in the world are coloured, this amount is approximately 65 % in France, this being related to the market of bottle. AFIN DE DÉLIMITER LE SUJET, PRÉCISONS QUE CELUI-CI PORTE SUR LA COLORATION (DANS LE DOMAINE DIT DU VISIBLE POUR L'ŒIL HUMAIN, SOIT DE 380 À 780 NM ENVIRON) DES VERRES MINÉRAUX FABRIQUÉS À HAUTE TEM- PÉRATURE, EN EXCLUANT LES COLORATIONS PAR DÉPÔTS DE COUCHES ET TRAITEMENTS DE SURFACE D'ÉPAISSEURS TRÈS FAIBLES (COMPRISES ENTRE QUELQUES ANGSTRÖMS ET QUELQUES MICRONS). RAPPELONS ÉGALEMENT L'IMPORTANCE DU VERRE COLORÉ DANS LES PRODUCTIONS VERRIÈRES : 55 % (EN TONNAGE) DU VERRE FABRIQUÉ AU MONDE EST COLORÉ, CE CHIFFRE EST D'ENVIRON 65 % EN FRANCE, CECI ÉTANT LIÉ AU MARCHÉ DE LA BOUTEILLE. TECHNIQUE > couleur Texte condensé de la conférence donnée le lundi 7 février 2005, au Collège de France par Jean-Pierre Houdaer, Directeur géné- ral de l'Institut du Verre jusqu’en juin 2004. Cette conférence entrait dans le cadre d'un cycle de cours et de séminaires sur la couleur, organisé par Jacques Livage, Professeur au Collège de France et membre de l'Académie des Sciences. JEAN-PIERRE HOUDAER EXPERT VERRIER Vitrail de Jean-Michel Alberola, cathédrale de Nevers. ©Adagp/Gilles Puech.

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INTRODUCTIONIl convient de débuter parun bref rappel sur la cou-leur, développée parJacques Livage lors du sémi-naire organisé sur ce thèmeau Collège de France."La couleur, dit-il, n'est pasune propriété intrinsèqued'un matériau. Celui-cin'apparaît coloré que lors-qu'il est éclairé par lalumière. La couleur naît del'interaction rayonne-ment/matière".Que se passe-t-il lors decette interaction ?Nous pouvons avoir deschocs élastiques (sanséchange d'énergie). Dansce cas, la diffusion peut êtrecohérente (réfraction, dif-fraction), quasi cohérenteou incohérente.Si les chocs sont inélas-tiques, il peut y avoir

absorption (colorationionique, coloration partransfert de charge ou pardélocalisation électro-nique), émission sponta-née ou émission stimulée.

Chocs élastiquesLe rayonnement est freinédans le milieu matérielqu'il traverse, et ceci est àl'origine des phénomènesde réfraction, déjà décritsen son temps par Descar-tes. Cela explique que,pour augmenter l'indice deréfraction, il faut ajouterdes éléments lourds (pourobtenir du verre cristal, onajoute dans la compositionde l'oxyde de plomb).A la suite des chocs élas-tiques, le rayonnement estdévié dans toutes les direc-tions. C'est le phénomènede diffusion. Celle-ci peut

La coloration des verres �� GLASS COLOURATION

In order to delimit the subject, let us specify thatit relates to the colouration (in the field knownas visible for the human eye, from 380 toapproximately 780 nm) of mineral glassesmanufactured at high temperature, excludingcolouration by deposition of thin films andsurface treatments of very low thicknesses(between some angströms and some microns).Also let us point out the importance of colouredglass in the glass productions: 55 % (in weight)of glass manufactured in the world are coloured,this amount is approximately 65 % in France,this being related to the market of bottle.

AFIN DE DÉLIMITER LE SUJET, PRÉCISONS QUE

CELUI-CI PORTE SUR LA COLORATION (DANS LE

DOMAINE DIT DU VISIBLE POUR L'ŒIL

HUMAIN, SOIT DE 380 À 780 NM ENVIRON) DES

VERRES MINÉRAUX FABRIQUÉS À HAUTE TEM-

PÉRATURE, EN EXCLUANT LES COLORATIONS

PAR DÉPÔTS DE COUCHES ET TRAITEMENTS

DE SURFACE D'ÉPAISSEURS TRÈS FAIBLES

(COMPRISES ENTRE QUELQUES ANGSTRÖMS

ET QUELQUES MICRONS).

RAPPELONS ÉGALEMENT L'IMPORTANCE DU

VERRE COLORÉ DANS LES PRODUCTIONS

VERRIÈRES : 55 % (EN TONNAGE) DU VERRE

FABRIQUÉ AU MONDE EST COLORÉ, CE

CHIFFRE EST D'ENVIRON 65 % EN FRANCE,

CECI ÉTANT LIÉ AU MARCHÉ DE LA BOUTEILLE.

TECHNIQUE > couleur

Texte condensé de la conférence donnée le lundi 7 février 2005, au Collège de France par Jean-Pierre Houdaer, Directeur géné-ral de l'Institut du Verre jusqu’en juin 2004. Cette conférence entrait dans le cadre d'un cycle de cours et de séminaires sur lacouleur, organisé par Jacques Livage, Professeur au Collège de France et membre de l'Académie des Sciences.

JEAN-PIERREHOUDAER

EXPERT VERRIER

Vitrail de Jean-Michel Alberola, cathédrale de Nevers. ©Adagp/Gilles Puech.

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être incohérente ou cohé-rente selon les conditionsparticulières de distances etde géométrie entre lerayonnement et la matière.Cette relation est connuesous le nom de loi deBragg (nλ = 2 d sin θ,application notammenten diffraction X).Il faut signaler que les phé-nomènes d'irisation et d'o-palisation, bien connus desverriers, sont des applica-tions de la diffusion cohé-rente en lumière blanche.La diffusion quasi cohé-rente, nous devrions direplutôt quasi élastique, seproduit lorsqu'une trèsfaible partie de l'énergie durayonnement est échangéeavec le matériau. C'est ledomaine des spectroscopiesRaman et Brillouin qui per-mettent d'étudier les modesde vibration des atomesdans les solides et, notam-ment, dans les verres.

Chocs inélastiquesDans ce cas, les échangesd'énergie sont régis par larègle de Bohr. Il doit y avoirégalité entre l'énergie hνtransportée par le rayonne-ment et celle ∆Ε qui séparedeux niveaux d'énergiequantifiés du matériau : hν = ∆ΕLorsque cette condition estremplie, trois phénomènespeuvent se produire. L'absorption : responsabledes phénomènes de colora-tion (des verres, notam-ment), l'émission sponta-née: c'est la luminescenceavec ses applications natu-relles (exemple certainesroches ou encore certainspoissons) ou artificielles(écran de tube catho-dique…), et enfin l'émission

stimulée, qui est à la base del'effet laser.Pour les verres colorés,nous allons donc traiterplus particulièrement duphénomène d'absorption.Mais auparavant, faisonsun bref historique.

ORIGINES ETHISTORIQUENous avons classé les verrescolorés connus, en partantdes plus anciens jusqu'àceux de la période actuelle : Les verres lunaires

Datés de 3 à 4 milliardsd'années, les verres lunai-res ramenés par les mis-sions Apollo (n°17 notam-ment) sont les plusanciens connus. Lescoupes micrographiquesdes roches lunaires fontapparaître des petits mor-ceaux de verre, quelque-fois de couleur orange (liéeà la concentration élevéeen titane) et partiellementdévitrifiés.

Les tectitesCe sont des météoritesvitrifiées lors du refroidisse-ment rapide d'une roche

mise en fusion au cours desa rentrée dans l 'at-mosphère. Les plus ancien-nes connues sont datées dequelques centaines demillions d'années.

L'obsidienne On dit que les volcans sontles plus grands fours verriersau monde, car les laves, si lerefroidissement est rapide,ne cristallisent pas et setransforment en un verreappelé obsidienne. La teintefoncée est généralementdue au fer présent en forteconcentration (mêmeépoque que les tectites)

Les perles en verrecoloréIl s'agit des premiers objetsverriers élaborés et com-mercialisés, retrouvés lorsde fouilles, notamment enMésopotamie, datées d'en-viron 3000 ans av J.C

Les objets creux mouléssur noyaux

Avant l ' invention dusoufflage à la canne, desobjets creux en verreétaient réalisés par mou-lage sur des noyaux enterre argileuse (générale-ment entre 2000 à 100 avJ .C.) . Au musée duLouvre, ils bénéficientd'une salle spécialisée.

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Les objets soufflés à la canne

Daté d'environ 100 ans avJ.C., le soufflage à la cannea été utilisé courammentjusqu'au XIXe siècle. Cettetechnique est à présentréservée aux objets d'art.

Le verre plat coloré Les plus anciens (environ100 ans après J.C. ont étéretrouvés dans les ruines

de Pompéi et de Saint-Rémy de Provence. Audépart, ce verre servant devitrage était coulé enplaque, écrasé, et laminémanuellement. Puis deuxtechniques ont permis dele fabriquer de manièreplus sûre et avec desépaisseurs plus faibles. Enpremier lieu, la techniquedes manchons (appeléeaussi technique Lorraine).La Verrerie de Saint-Justsur Loire (groupe Saint-Gobain) en perpétue latradition. Autre méthodedécrite également dansl'Encyclopédie de Diderotet D'Alembert, la fabrica-tion de plateaux ronds,appelés également cives.Par cette technique diteNormande, le verrierobtient un cercle de verrede 50 à 80 cm de diamètre.Pierre-Alain Parot, maîtreverrier a refait, il y aquelques années, des civespour réaliser les vitraux del'église de Talant, près deDijon, conçus par le pein-tre Gérard Garouste.

La coulée des verres surtable métallique était trèsutilisée au XVIIe siècle. En1978, elle était encoreemployée en France pourproduire, entre autres, ladalle de verre colorée.Le verre coloré connaîtbeaucoup d'applicationsen ameublement et dansles domaines décoratifs.Fabriqué en France à l'u-s ine de Saint-Just surLoire , le verre coloréétiré est utilisé égale-ment pour les vitraux etdans la technique dufusing. Les plus anciensvitraux en France sontdatés du XIIe siècle.

La pâte de verreCette technique utiliséedans l'antiquité, avant l'in-vention du soufflage à lacanne, a été relancée parHenri Cros et FrançoisDécorchemont au XIXe

siècle.Elle permet une grande créa-tivité. Les variantes sontmultiples. De plus, en fonc-tion du choix de la tech-nique de moulage, les piècespeuvent être uniques oumultiples.

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TECHNIQUE > couleur

Un rondel de la Sainte Chapelle àParis, rénové par le Musée du

Moyen Age à Paris

Le Christ de Wissembourg, trèsconnu, daté du XIIe siècle

Gorgonia,Christian Ghion.Daum DesignCollection 12+1Pierre-Alain Parot examine une des cives qui composent

les vitraux de Gérard Garouste pour l'église de Talant. © T. de Beaumont.

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Les produits manufacturés

Depuis le XIXe siècle, l'indus-trialisation a permis la pro-duction de masse. Sur laphoto (ci-dessus), l'une despremières machines auto-matiques de fabrication d'ob-jets creux en verre (OwensIllinois, début XXe siècle).

La production, de quelquescentaines de bouteilles parjour pour un souffleur à lacanne, est passée àquelques centaines demilliers par jour en fabrica-tion machine. D'autresapplications en verre plat,gobeleterie, mosaïque deverre… se sont dévelop-pées avec l'abaissement descoûts de production.

PRINCIPAUX TYPES DE COLORATION DES VERRESVoyons les principaux typesde colorations des verres, enparticulier celles typiquesdes métaux de transition. Al'état de traces dans les com-positions verrières, ils per-mettent, grâce à des transi-tions électroniques d'uneorbitale à une autre orbitaledu même ion, d'obtenir dif-

férentes teintes. Le verre a la particularité,en tant que matériau destructure désordonnée, d'a-voir non pas un, mais unefamille de sites chromo-phores autour d'un sitetype. Au lieu d'être finescomme dans les cristaux,les bandes d'absorptions sontdonc larges.De plus, il faut signalerl'importance de la matrice,les teintes obtenues avecles verres silicosodocal-ciques, sont différentes decelles obtenues avec desmatrices boratées ouphosphatées, car lesligands changent.

Colorations ioniques à partir d'éléments à valence uniqueL'élément le plus utilisé estle cobalt, donnant avec leverre sodocalcique la colo-ration bleue bien connue.De toutes les bandes d'ab-sorption dans le visibleproduites par des ions sim-ples, c'est la plus intense.

A noter que les verriers uti-lisent généralement lesspectres de transmission,alors que les chimistes tra-vaillent en densité optique

(laquelle est égale a : –log(base 10) de la transmis-sion (T)).

Le second élément colo-rant à valence unique uti-lisé est le nickel Ni2+. Ildonne en verre silicosodo-calcique une couleur bru-nâtre qui assombrit lateinte des verres fabriqués. La particularité du nickelest sa sensibilité extrême àla nature des ions alcalins.Avec du potassium à laplace du sodium, la teintevire au pourpre, tandisqu'un remplacement pardu lithium produit unecoloration jaune. Ceschangements de couleurssont liés aux changementsde coordinence des ionsNi2+ entourés de 6 oxygè-nes en présence de Li+ et de4 en présence de potassium(coordinence 4 et 6 avec lesodium).

Pour avoir le même chan-gement de coordinencedans le cas du cobalt (Co2+),

il faut remplacer la matricesodocalcique par une bora-tée, sans alcalin. Le cobaltCo2+ est alors en coordi-nence 6 et la couleur est

Spectre de transmission de verre au cobalt (0,05% CoO). ep. : 6 mm

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Bouteilles, couleur ambre. Saverglass.

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rose (on est en coordinence4 avec le sodium ou lepotassium).

Remarque : D'autres colorants àvalence unique sont par-fois utilisés, et notammentparmi les terres rares : - le néodyme Nd3+ quidonne une couleur bleupourpre (en matrice sodo-calcique). A signaler que lesbandes d'absorption dunéodyme Nd3+ coïncidentavec la raie principale d'é-mission jaune du sodium,d'où son emploi dans leslunettes de protection dessouffleurs de verre.- le praséodyme Pr3+ donneune couleur jaune-vert,mais il peut avoir de multi-ples états de valence (j'ainotamment obtenu descolorations orangéesmagnifiques avec desajouts de praséodyme dansune matrice silicosodocal-cique, après irradiation deséchantillons avec desélectrons de 5 à 7 MeV d'é-nergie). - l'erbium Er3+ donne unecouleur rose.

Comme nous l'avons vu,avec les terres rares, lesbandes d'absorption sontétroites et les colorationsobtenues de faibles inten-sités car les électronsmobiles se trouvent enposition 4f, donc ils sontplus profonds dans lastructure, et moins sensi-bles à l'environnementchimique.

Colorations ioniques pardes éléments à valencesvariables En effet, il existe des élé-ments colorants dont lavalence et les bandes d'ab-sorption dépendent del'état redox des verres.Dans le tableau suivant, lescouples redox employés, àla fois pour la coloration,mais aussi en décoloration

TECHNIQUE > couleur

Spectre de transmission de verre à l’erbium

Ion CouleurDensitéoptiquetypique *

Etat oxydé Etat réduit

Ion CouleurDensitéoptiquetypique *

Cr6+ Jaune 2550 à 370 nm Cr3+ Vert 6,4 à 450 nm5,9 à 650 nm

Mn3+ Pourpre 4 à 490 nm Mn2+ Jaune très pâle 0,04 à 430 nm

Ce4+ (anti U.V.) 700 à 240 nm Ce3+ (anti U.V.) 100 à 314 nm

V5+ JauneMarron V3+ Vert

Cu2+ Bleu 3 à 780 nm Cu+ Incolore

As5+ Incolore As3+ Incolore

Sb5+ Incolore Sb3+ Incolore

Fe3+ Jaune 1,3 à 380 nm Fe2+ Bleu 9,1 à 1050 nm

Sn4+ Incolore Sn2+ Incolore

* La densité optique typique, à une longueur d’onde donnée ou dans une zone du spectrelumineux, est celle d’un verre de 1 cm avec 1% en poids de l’élément colorant

Vitrail de Christiane Andrieux exposé à Lyon, galerie Images en lumière, mai 2004.

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De haut en bas :Sculptures d'Ales Vasicek. Blue oval, L : 85cm et, en fond d'écran, Stèle Earth, H : 42cm.

Vases soufflés de la collection Drops. Salviati.

L'artiste Kristina Logan crée une perle au chalumeau lors d'une journée techniqueorganisée à l'atelier du verre de Sars-Poteries. © Glaire Gaillard. Clin d'œil de l'artiste àla fonction : l'anse de la théière, en perles colorées.

Vases Fasciati de Simon Moore, pour Salviati.

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(c'est enlever ou masquerune couleur gênante), sontrangés en ordre décroissantde la stabilité de l'espèceréduite ou encore dans l'or-dre croissant de la stabilitéde l'espèce oxydée. Par exemple, pour les deuxcouples du haut dutableau: (Cr6+ et Cr3+) et (Mn3+ et Mn2+), si le verrecontient du manganèseMn2+, on est assuré de nepas avoir de Cr6+, et à l'in-verse s'il contient du Cr6+ iln'y aura pas de Mn2+. Ondit que le couple Cr6+/Cr3+

est plus électropositif queMn3+/Mn2+.C'est ainsi que pour obte-nir la teinte pourpre dumanganèse Mn3+, on a toutintérêt à introduire dans lacomposition verrière destraces de chrome, en plusdu colorant (bioxyde demanganèse MnO2).

Pour fabriquer les vitragesanti-solaires des pare-briseautomobiles ou de l'archi-tecture, on développe unmaximum de Fe2+ (quiabsorbe les infrarougesentre 1000 et 1100 nm,tout en permettant degarder une visibilité suffi-sante au travers du vitrage).

En ce qui concerne les filtresà chaleur des projecteurs decinéma, de diapositives oud'éclairages de scène, c'esttoujours le Fe2+ qui est uti-lisé. Le verre n'est alors plusen matrice silicatée maisphosphatée, ce qui permetune excellente transpa-rence dans le domaine duvisible.

Colorations ioniques parformation de complexesLa coloration est obtenuevia un processus de trans-fert de charges de l'anionau cation.

Avec le séléniure et Fe3+,c'est la couleur bronze duverre plat bâtiment.Avec les cérates et Ti4+, leverre est légèrement jaune,c'est un très bon verre anti-UV, utilisé en lunetterie etquelquefois en automobile(pour protéger les garnitu-res plastiques).Mais le complexe le plusutilisé par les verriers estcelui associant les sulfures(S--) et le fer (Fe3+), quipermet d'obtenir les teintesjaune/ambre.Cette méthode de colora-tion, connue depuis l'anti-quité, n'a vraiment étéexpliquée que dans lesannées 1970 et encore,

comme nous le verronsplus loin, des interroga-tions demeurent.Les sulfures apparaissentdès que, dans le verre, lerapport Fe2+/fer total estsupérieur à 0,6. Dans laplupart des verres ambre cerapport est de 0,7 à 0,8, cequi correspond à des pres-sions partielles d'oxygènedans le verre fondu à1500°C, d'environ 10-6 à 10-5

atmosphère.Marie-Hélène Chopinet,ingénieur de Saint-GobainRecherche, a ainsi démon-tré qu'avec un verre réduit

(rapport de 0,8 pour leFe2+/Fe total) il ne peut exis-ter plus de 1 ppm (1 g partonne) de chrome à lavalence 6 dans du verrevert (teinte champagne).Ceci permet d'éliminer lerisque de toxicité dû auchrome (Cr6+) dans lesverres champagne réduit.

Revenons encore sur lateinte ambre.

Chromophore proposéhabituellement : O - - O - -

Fe3+

O - - S - -

Nouvelle proposition de

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TECHNIQUE > couleur

Spectre de transmission d'un verre contenant du chrome à lavalence 3 (Cr3+). C'est ce colorant qui est utilisé en bouteillerie

pour obtenir la teinte verte (dite encore champagne).

[Sulfures + Fe3+] couleur ambre

couleur orangée

[Séléniures + Fe3+ ] couleur brune

[Sulfures + Mo3+]

Les composés complexes les plus utilisés :

Les composés complexes moins utilisés :

[Cérates + Ti4+ ] couleur jaunâtre

[Cérates + Pb4+] couleur marron

[Cérates + Cu2+] couleur turquoise

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chromophore (? ) 2 S- - + 3Fe3+ ⇐⇒ (S2)

- - + Fe2+

Le chromophore jusqu'àprésent proposé est le sui-vant : un Fe3+ en coordi-nence tétraédrique avec 3oxygènes et un sulfure S--.Cette combinaison d'uneforme (oxydée) Fe3+ avecun sulfure S-- (réduit) néces-site un équilibre redox adé-quat, et l'on a vu que le rap-port Fe2+/Fe total doit êtred'environ 0,7 ou 0,8.Pour avoir une stabilité dece transfert de charge, ilfaut assurer dans le verreune teneur en Fe3+ suffi-sante d'où, dans le lit defusion, la nécessité d'avoirsuffisamment de fer et d'a-juster le couple sulfate (c'estl'oxydant) avec le réducteur(du coke le plus souvent, oudu laitier de haut fourneauqui, lui, contient directe-ment comme réducteurenviron 1% de sulfure).L'expérience montre égale-ment que les pourcentagesidéaux, apportés par lacomposition verrière, pourla maîtrise de la teinteambre, sont de : 0,5 % pourle SO3 , et 0,05 % pour lecarbone (si emploi du coke).En mettant trop de coke,l'oxydant est consommétrop vite, le sulfate ne joueplus son rôle d'affinant et,dans ce cas, apparaissentd'autres défauts (le verreproduit n'est plus homo-gène).De même, il y a avantage àutiliser le sulfate de sodiumpar rapport au gypse (sul-fate de calcium) commeoxydant, car l'affinage estégalement facilité et nousparvenons donc à unemeilleure maîtrise duredox (ceci s'ajoutant à l'a-

vantage d'apporter dusodium dans la composi-tion des verres silicosodo-calcique).

Très récemment, suite à denouveaux travaux, on aconclu -mais cela estencore discuté- que le rôlede Fe3+ est d'oxyder 2 sulfu-res S-- pour former unanion supersulfure quiserait, enfin, le mystérieuxchromophore ambre !2 S- - + 3Fe3+ ⇐⇒ (S2)

2- + 2 Fe2+

Cela semble vérifié par lefait que nous avons unerelation en équilibre quis'accorde bien avec uneobservation de terrain trèsancienne. Si l'on refroidit leverre ambre très rapide-ment, il est plus clair que si

nous le recuisonstraditionnelle-ment. C'est égale-ment la différencede teinte observéeen usine, dans laproduction debouteilles, parexemple, en fonc-tion de la lon-gueur des archesde recuisson ou enfonction du poids

des bouteilles. Cela veutdire qu'en refroidissantplus rapidement, on figel'équilibre plus à gauche del'équation précédente. L'ex-périence semble conforter cette explication.La teinte jaune ambre est trèsutilisée en bouteillerie, arrê-tant les UV et le début duvisible, zone du rayonne-ment souvent nuisible à laconservation de la qualitédes produits alimentaires.Si l 'on veut obtenir cemême verre filtrant, maistransparent, on y ajoute duzinc. Dans toutes les colorationsdécrites jusqu'à présent, iln'est pas question de lacouleur rouge, dite rubis, ettrès peu de l'orangé ou du

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Vasque d’un lavabo en verre teinté, présenté àGlasstec 98. Schott Desag.

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jaune citron. Ces teintessont produites en formantdans les verres des suspen-sions colloïdales de parti-cules microscopiques d'unmétal ou d'un élémentsemi-conducteur.Le seuil de l'énergie absor-bée, et donc de la couleurproduite, dépend de la tailleet de la conductivité des par-ticules produites.

La teinte rubis au cuivreétait déjà utilisée dans l'an-tiquité, puis dans lesvitraux. La teinte rubis à l'orest le fruit du travail dedeux alchimistes vers 1680.Le premier, Cassius, aobtenu une teinte pourpreà partir des chlorures d'oret d'étain, et a suggéré sonincorporation dans leverre. Le second, Kunckel, aobtenu un verre rubis en yintroduisant en plus descomposés d'or et d'étain,des éléments réducteurs.Une caractéristique intéres-sante de ces verres rubis, enmatrice silicosodocalcique,

est que la couleur se déve-loppe entre 560 et 610 °C,c'est-à-dire après le formagedes articles (d'où la possibi-lité de teintes rouges endégradés).Comme il s'agit de verresréduits, afin d'éviter la for-mation d'une teinte marron,il faut éviter les sulfures etdonc la présence de sulfatesdans la composition.

Si nous regardons à présentdans le tableau l'ajout desulfure et de séléniure, enassociation avec le cad-mium, on obtient égale-ment la teinte rouge rubis(de nuance différente à laprécédente) et également,en fonction des ajouts, lateinte jaune citron.Il faut rappeler que la toxi-cité du cadmium empêchel'emploi de ce type de com-position pour toute appli-cation en emballage ali-mentaire.A ces trois composants cad-mium, sélénium et soufre,l'ajout de zinc permet, enfonction de la composi-

tion, de couvrir les teintesd'orangé à rouge. Il est vrai-semblable que le zinc jouele rôle de tampon sur l'acti-vité des ions S- - et Se2-.

Avec un ajout de sélénium(voir tableau) on obtientdans un verre silicosodo-calcique à basse teneur enfer, une teinte rose, pou-vant être légèrement oran-gée (utilisation en gobele-terie et en décorationintérieure, notammentfabrication de miroirs àl'ancienne). Le soufre, qui dans letableau de Mendeleïev, setrouve dans la mêmecolonne que le sélénium,colore également par trans-fert de charge et a l'avan-tage d'être plus soluble.

Deux cas particuliers - la coloration des verresopalesLes verres opales fabriquésactuellement sont, presquetous, opalisés par les fluo-rures (cryolithe, spath fluorou fluosilicate de sodium).L'opalisation se produit par

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TECHNIQUE > couleur

Vases Phuket de Renzo Stellon, pourSalviati. Verre opale et verre noir

ChromophoreMatièrespremières Coloration Ajouts dans la composition

Cu2O + CuOxyde

Élément

Sulfure etSéléniure

Rouge Cu2O + SnO2 + red.

Ag Jaune AgNO3 ; AgCl

Au Rouge HAuCl4 + SnO2 + red.

Pt Brun rougeâtre H2PtCl6

Si Rouge SiO2 + red.

P Rouge H(NH4)2PO4 ; P2O5 + red.

Sb Brun rougeâtre Sb2O3 + red.

Bi Brun rougeâtre Bi2O3 + red.

S Bleu S ; Na2S

Se Rose Se ; Na2SeO3 + red.

Te Rouge Te ; Na2TeO3 + red.

CdS Jaune CdS + red.

CdSe Rouge CdSe + red.

Cd(x+y)SeySx Orange à Rouge CdO + Na2S + Se + ZnO + red.

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séparation de phases vers700 °C (en fin de travail duverre) et si la concentrationen fluor dans le verre est deplus de 3 %. De même, letemps pendant lequel leverre reste dans la zone detempérature convenableintervient sur la concentra-tion en particules de fluo-rures provoquant l'opales-cence, ainsi que lerefroidissement en surface(s'il est trop rapide les cou-ches de surface ne sont pasopalisées). Les verres opalescents peu-vent être colorés avec lescolorants habituels enmaintenant les conditionsredox convenables, maisl'intensité de la teinte serad'autant plus faible que leverre sera plus opaque, àcause de la diffusion de lalumière par les particules.Généralement, nous pro-duisons plutôt des teintespastel avec les verresopales.

- la teinte noireUn verre noir peut êtrefabriqué de différentesmanières mais souvent paraddition de différentsoxydes : chrome, cobalt,manganèse, cuivre… ouencore en produisant uneteinte ambre très foncée.

ELABORATION DESVERRES COLORÉSPour obtenir un verrecoloré dans la masse, nousajoutons les éléments colo-rants dans la compositionverrière, puis celle-ci estfondue. Le verre élaboré estamené aux machines deproduction pour être misen forme, à la bonne visco-sité et sans cristallisation.

Les moyens utilisésLes verres colorés sont éla-

borés, soit en pots, soit dansdes fours. Les pots ont géné-ralement des capacités com-prises entre 20 kg et 2 tonnesde verre maximum, et l'éla-boration du verre y dure de16 à 48 heures, puis celui-cipeut être mis en forme. Les fours peuvent être : - journaliers (day tank), etréservés aux artistes et auxtrès petites verreries. Lescapacités de productionssont généralement compri-ses entre 100 et 700 kg deverre/jour, mais il en existepouvant élaborer 3 t/jour. - continus, d'une capacitéd'environ 10 t/jour jusqu'à1000 t/jour. En verrecoloré, la capacité maxi-male produite par un fourest, à notre connaissance,d'environ 550 à 600 t/jour.

Une autre méthode de fabri-cation des verres colorés estd'élaborer un verre blanc

puis, à la sortie du four, d'a-jouter des verres colorants

très concentrés(appelés frittesde verre) quisont dissousdans le canal(feeder) condui-sant le verre auxmachines.Celui-ci est alorscoloré tel quesouhaité. Une autre solu-tion pour colo-rer les verre

consiste, sur un produitverrier, à provoquer unéchange ionique à chaud(généralement entre 400 et700 °C). Nous effectuonsdonc une cémentation.

Deux composés sont sou-vent employés dans cettetechnique : une pâte à based'ocre et d'argent (AgCldans la plupart des cas) etune pâte comprenant del'oxyde de fer et de l'oxydeou du sulfate de cuivre.Enfin, nous pouvons colo-rer les verres par irradia-tion, avec des rayons X, γou des électrons d'énergieinférieure à 10 MeV (afinde ne pas provoquer deradioactivité induite).Ces irradiations induisent desdéfauts dans les verres. Lesionisations et excitations VV

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13Décor de la table : bouteilles et carafes en verre soufflé.Ghislaine Jolivet. © C. Save.

Halle de production de verre plat coloré, au début du XXe siècle.

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électroniques intenses colo-rent ceux-ci de manièresdurables ou réversibles.L'ajout de traces d'élémentsdu groupe des métaux detransition permet de garderun verre de base blanc. Celui-ci, après irradiation, est colorédans la masse. Actuellement,cette technique est utilisée endécoration verrière.

Maîtrise du redox Il est bon de rappeler sonimportance dans ce chapi-tre sur l'élaboration desverres colorés.

Nous avons vu précédem-ment la nécessité de cettemaîtrise pour obtenir cer-taines colorations. Afin d'yparvenir, les verriers gèrentle caractère oxydo-réduc-teur d'une compositionvitrifiable en affectant àchaque matière premièreutilisée un nombre redox.Cela permet de prédire "lacouleur qui sera obtenue".Cette technique a étédécrite dans la revue Verre(voir bibliographie).

Changements de teintesAuparavant, les change-

ments de teintes s'effec-tuaient en coulant (vidant)et rinçant le four à chaud.A présent, l'élaboration desverres colorés se fait enchangeant de teinte partransition.Cela a été rendu possibleen : - élaborant des verres pos-sédant des propriétés redoxvoisines, si possible- maîtrisant les courants deconvection dans les fours(pour éviter le verre bariolé)- maîtrisant les composi-tions et leurs redox,comme indiqué plusavant.En verre plat, vu l'impor-tante capacité des fours etla qualité souhaitée, ladurée d'un changement deteinte est encore d'environ8 à 10 jours.En 1970, dans le secteur dela bouteillerie, un change-ment de teinte par transi-tion durait de 48 à 120heures (avec perte de pro-duction durant cette opéra-tion) ! Actuellement lesdurées sont de 12 à 36heures maxi, en fausseteinte (durée liée à la quan-tité de verre présente dansle four et à la tirée journa-lière maximale). Ce gain detemps est dû à la mise enplace opérationnelle demoyens d'analyses etcontrôles des teintes, com-plétant les calculs théo-riques et permettant d'ajus-ter les différentes phases deschangements de teinte.Les principaux incidentsliés aux changements deteintes sont la productionde mousse à la surface desfours et des problèmes d'af-finage (puces et bouillons).Ils découlent des modifica-tions de redox.

Contrôle des teintesEn contrôle continu(24h/24) les techniciens defabrication emploient desboîtes à lumière, compa-rant la teinte du verreréalisé à des échantillonstémoins.Un contrôle journalier àl'aide d'un spectrophoto-mètre permet d'obtenir lespectre de transmission,très utile lorsque la colora-tion est stabilisée. Maiscelui-ci ne permet pas dereprésenter exactement lavraie couleur de l'échan-tillon.Pour décrire cette couleur,trois caractéristiques sont àutiliser (je les rappelle sim-plement car elles ont déjàété abordées dans le cadredes séminaires sur la cou-leur) :- la luminance, exprimée enStilb (cd /cm2), le Candela(cd) étant l’unité d’inten-sité lumineuse- la longueur d’onde domi-nante (LOD), celle parmi lescouleurs pures qui repré-sente au mieux la couleurexaminée- la pureté, qui indique quela couleur se rapprocheplus ou moins de la couleurpure correspondante.

Ces mesures sont effec-tuées de manière standar-disée avec l'illuminant etl'épaisseur de verre sou-haités. Les résultats peu-vent alors être présentésdans un diagramme dechromaticité.

SpécificationsQuelques exemples en ver-rerie d'emballage, pourcinq teintes typiques. Cesspécifications ne sontqu'indicatives, chaque

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Bouteilles couleur ambre. Saverglass.

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client et verrier pouvantavoir des exigences parti-culières.

PRINCIPALESUTILISATIONS DESVERRES COLORÉSLe verre float coloré dans lamasse peut être utilisé enarchitecture, comme entémoigne la gare NorthGreenwich, à Londres, surla Jubilée line (ci-dessous),mais il est omniprésentdans bien d'autres domai-nes de la vie quotidienne :bouteilles et flacons deparfum ou de pharmacie,gobeleterie, arts de la tableet même…parures enperles de verre soufflées auchalumeau.

Les bouteilles peuvent êtrede toutes teintes et sontquelquefois mythiques.C'est le cas de la bouteillePerrier, Suze ou de la petiteboule Orangina.

Le verre qui les constitue,doit répondre quelquefoisaux critères de filtration deslongueurs d'ondes gênan-tes de la lumière (naturelleou artificielle) pour les pro-duits contenus. Pour les vinsblancs et le champagne, ilfaudrait arrêter les lon-gueurs d'ondes < 465 nm,pour la bière celle < 525nm, et c'est également vraipour beaucoup d'autresproduits tel que ceux à basede quinine, les huiles etc.Rappelons que les verriersfrançais sont leaders dansle domaine du flaconnagede luxe pour la parfumerie.Certaines réalisations sontexemplaires, tant sur leplan du savoir-faire que del'expression artistique(entre autres, le flacon Fah-renheit pour l'eau de toi-lette de Christian Dior,fabriqué par Saint-GobainDesjonquères, en teintedégradée, rouge rubis aucuivre).

Quant aux arts de la table,depuis quelques années,créateurs et designers leurapportent esthétique etfonctionnalité. Un exem-ple : le célèbre verrier Sal-viati a été intégré en 1999dans le groupe Arc Interna-tional (n°1 mondial) pourfaire évoluer les collectionsen séries limitées.Le verre se retrouve égale-

ment dans l'ameublementoù il peut être coulé, mouléet thermoformé (vasque delavabo) Enfin les vitraux sont, à cetitre, un domaine d'excel-lence. Aux cives souffléesdu XIIe siècle, ont succédéles manchons (verreantique) que produisentaujourd'hui encore, dansune gamme très diversifiéela Verrerie de Saint-Just surLoire (groupe Saint-Gobain). Mais, bien querespectant toutes les tech-niques de tradition, lesvitraux modernes fontaussi souvent appel aufusing où des verres colorésou non, mais compatibles(c'est-à-dire ayant le mêmecoefficient de dilatation),sont disposés selon le gréde l'artiste sur un verre de

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Ep. lame de verre

Type deteinte L.O.D nm Luminance

%Pureté

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0 mm Blanche 550 à 580 96 mini. 0,7 maxi.

2 mm Feuille morte 571 à 572 73 à 76 27 à 35

2 mm Cognac 565 à 570 94 à 95 1,5 à 2,8

5 mm Verte 563 à 567 24 à 30 65 à 80

2 mm Ambre 575 à 577 52 à 63 58 mini.

Le flacon Fahrenheit pour l'eau detoilette de Christian Dior (fabrication

Saint-Gobain Desjonquères)

Page 13: La coloration des verres - Verre online

base, pour subir une fusionincomplète donnant deseffets créatifs et décoratifs.En évoquant également lessecteurs de la lunetterie, dela photographie et de l'op-tique scientifique, ainsi queles vitro-cristallins, il estaisé de constater que lesapplications actuelles et àvenir sont nombreuses.

CONCLUSIONLe verre coloré est l'un desplus anciens matériaux aumonde. Il est prometteurde nouvelles évolutions, etceci tient à plusieurs fac-teurs : en premier lieu, lacomplexité possible descompositions verrières.Seules de toutes petitesrégions ont été explorées etaucune règle simple nepermet de prévoir les pro-priétés d'une compositionnouvelle (sauf au voisinageimmédiat de compositions

connues… et encore!). Onpeut dire qu'il n'y a pas deverre coloré sans chimie. Le second facteur d'avenirvient des approches les plusrécentes de la science dansl'étude des structures amor-phes et des milieux désor-donnés. Par exemple, après5000 ans d'améliorations,la transparence du verresemblait avoir atteint unpoint de quasi-perfection.Avec la découverte du laseret les développements dansles fibres optiques, cettenotion de transparence aété plus que décuplée.Troisième élément d'avenir:la mixité des matériaux,verres (colorés ou non) avecdépôts de couches minéra-les ou organiques, liaisonverre-matières plastiques…Développée depuis unetrentaine d'année, ellepermet actuellement d'ob-tenir des fonctionnalités

qui ouvrent de très nom-breuses perspectives nou-velles. Au travers du maté-riau verre, nous retrouvonsdes alliances entre lamagie, les secrets et lessciences.Régulièrement les hommes,qu'ils soient scientifiques,techniciens, artistes… esti-ment que tout a été fait oudit. Mais, ces mêmeshommes lancent toujoursde nouveaux défis, et c'est lecas pour les verres colorés.Aussi, je ne doute pas queceux-ci soient encore pleinsd'avenir n

RemerciementsJacques Livage, JamesBarton, Marie-Hélène Chopi-net, Danièle Foy, SophieLagabrielle, Florent Stange,Jean-Pierre Umbdenstock,Colette Save, Thierry deBeaumont, Claire Gaillard.

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