La blessure, seulement une question de physique ?

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La blessure, seulement une question de ‘physique’ ? Les (séquelles de) blessures peuvent constituer des compagnons de route (les rappels émotionnels, le non-retour à la performance, etc.). Elles représentent à ce titre une raison majeure à l’arrêt de la pratique. Les tenants et aboutissants de ce phénomène sont de mieux en mieux identifiés. Historiquement, les facteurs de prévention du risque de blessure ont été appréhendés à travers un filtre physiologique (ex, le volume d’entraînement) ou biomécanique (ex, la raideur musculaire/articulaire). Cette dynamique a évolué. Depuis une vingtaine d’années, l’analyse des facteurs psychosociaux est entrée en jeu pour prévenir contre le risque de blessure. Du point de vue psychosocial, le risque de blessure est déterminé par la réponse de stress de l’athlète aux changements environnants (ex, apprendre une nouvelle, être témoin d’un événement). Le stress, c’est la source ! Plus précisément, cette réponse dépend à la fois de l’intensité et de la durée du stress subi, et on peut la représenter sous la forme d’un U-inversé (ci-joint) : une certaine dose de stress (peu long et/ou peu intense) a un impact positif sur l’organisme car ce dernier est stimulé (libération d’hormones type cortisol et adrénaline), mais devient délétère en cas d’excès. Pourquoi ? En situation de pratique sportive et de stress important, les processus de traitement de l’information sont altérés (ex, vision périphérique réduite, temps de réaction allongés, mémoire de travail défaillante) et parvenir à se tempérer/concentrer requiert un effort surdimensionné. Vous le savez, on agit en conséquence surtout par réflexe, au coup par coup en réaction, car c’est un fonctionnement économique. En mode impulsivité ou « automatique ». Ainsi, c’est en raison d’une carence attentionnelle, c’est-à-dire une incapacité à intégrer/considérer les informations afférentes de l’organisme (la « proprioception ») et de l’environnement (l’incertitude du terrain, le comportement d’autrui), que le risque de blessure pourrait être augmenté. On a donc ici une perspective neurocognitive. Dose de stress optimale Avec ceci en tête, certains facteurs ont (logiquement) été identifié pour peser plus que d’autres, et donc prédire la survenue d’une blessure. Globalement, ces différences interindividuelles dans la réponse de stress convergent autour 3 paramètres (ci-joint). Une hypothèse mécanistique : les situations de stress (émotion !) sont reconnues pour activer les régions cérébrales de régulation de la peur (ex, l’amygdale) dont la stimulation est, elle, connue pour inhiber/déconnecter les centres de l’attention (ex, le cortex préfrontal). À termes, c’est donc la baisse du niveau de vigilance de l’athlète qui en pâtit. La suite, on la connait… Dans cette logique, les résidus de peur – et le détournement attentionnel associé – peuvent expliquer pourquoi les individus antérieurement blessés, régulièrement soumis au stress, ou ayant témoigné un impact émotionnel fort en réponse à un événement, demeurent les individus les plus « à risque » vis-à-vis de la survenue d’une blessure. En clair, moins j’ai de frein à être focus, moins je risque la blessure. À noter : le stress chronique biaise les processus de décision vers des comportements d’ « habitudes » sur la base d’une atrophie de régions cérébrales frontales.

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Lablessure,seulementunequestionde‘physique’?Les(séquellesde)blessurespeuventconstituerdescompagnonsderoute(lesrappelsémotionnels,lenon-retouràlaperformance,etc.).Ellesreprésententàcetitreuneraisonmajeureàl’arrêtdelapratique. Les tenants et aboutissants de ce phénomène sont de mieux en mieux identifiés.Historiquement, lesfacteursdepréventiondurisquedeblessureontétéappréhendésàtraversunfiltre physiologique (ex, le volume d’entraînement) ou biomécanique (ex, la raideurmusculaire/articulaire).Cettedynamiqueaévolué.Depuisunevingtained’années,l’analysedesfacteurspsychosociauxestentréeenjeupourprévenircontrelerisquedeblessure.

Du point de vue psychosocial, le risque de blessure estdéterminé par la réponse de stress de l’athlète auxchangements environnants (ex, apprendreunenouvelle, êtretémoin d’un événement). Le stress, c’est la source ! Plusprécisément,cetteréponsedépendàlafoisdel’intensitéetdeladuréedustresssubi,etonpeutlareprésentersouslaformed’unU-inversé(ci-joint):unecertainedosedestress(peulonget/ou peu intense) a un impact positif sur l’organisme car cedernier est stimulé (libération d’hormones type cortisol etadrénaline),maisdevientdélétèreencasd’excès.Pourquoi?

Ensituationdepratiquesportiveetdestressimportant,lesprocessusdetraitementdel’informationsontaltérés(ex, vision périphérique réduite, temps de réaction allongés, mémoire de travail défaillante) et parvenir à setempérer/concentrerrequiertuneffortsurdimensionné.Vouslesavez,onagitenconséquencesurtoutparréflexe,aucoupparcoupenréaction,carc’estunfonctionnementéconomique.Enmodeimpulsivitéou«automatique».Ainsi,c’estenraisond’unecarenceattentionnelle,c’est-à-direuneincapacitéàintégrer/considérerlesinformationsafférentesdel’organisme(la«proprioception»)etdel’environnement(l’incertitudeduterrain, lecomportementd’autrui),quelerisquedeblessurepourraitêtreaugmenté.Onadonciciuneperspectiveneurocognitive.

Dose de

stress optimale

Aveccecientête,certainsfacteursont(logiquement)été identifié pour peser plus que d’autres, et doncprédire la survenue d’une blessure. Globalement, cesdifférences interindividuelles dans la réponse de stressconvergentautour3paramètres(ci-joint).

Une hypothèse mécanistique : les situations destress (émotion !) sont reconnues pour activer lesrégions cérébrales de régulation de la peur (ex,l’amygdale)dontlastimulationest,elle,connuepourinhiber/déconnecterlescentresdel’attention(ex,lecortexpréfrontal).À termes,c’estdonclabaisseduniveaudevigilancedel’athlètequienpâtit.Lasuite,onlaconnait…Danscettelogique,lesrésidusdepeur–etledétournementattentionnelassocié–peuventexpliquerpourquoilesindividusantérieurementblessés,régulièrementsoumisaustress,ouayanttémoignéunimpactémotionnelfortenréponseàunévénement,demeurentlesindividuslesplus«àrisque»vis-à-visdelasurvenued’uneblessure.Enclair,moinsj’aidefreinàêtrefocus,moinsjerisquelablessure.Ànoter:lestresschroniquebiaiselesprocessusdedécisionversdescomportementsd’«habitudes»surlabased’uneatrophiederégionscérébralesfrontales.

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Àcourt-terme,lesstratégiesdecopingsontsurtoutcognitives– la relaxation/ventilationétantparfoisdifficileà implémenterselonlecontexte.La«pleineconscience»entredanscecadre.Cette méthode consiste à porter son attention dans l’ici etmaintenant,pourreconnaitrequel’onpeutsetrouverdansunétat inconfortable, vis-à-vis duquel on ne fuit ni ne succombemais que l’on accepte, pour alors se reconcentrer sur leséléments/butspertinents(ex,sonpacing,sonplaisir).L’énergien’estainsipasdépenséeàinhiber/camouflerunproblème,maisà établir un focus sur les outils de la performance (l’étape de lâcher prisepermettantdeconserverses ressources,plutôtque les ‘gâcher’).End’autrestermes, l’enjeu initial peut éventuellement rester unemenacemais il devient, par ses points-clé,surtout un défi. D’autres techniques efficaces à entraîner : l’autosuggestion (encourageante etbienveillante),l’attributioncausale(cequejepeuxcontrôler,etcesurquoijedoislâcherprise).Pourallerplusloin:Ivarssonetal.2016;Soaresetal.2012

Attention:ladécadenceliéeàl’impactdustresspsychosocialsurl’organismefonctionneparétapes.Sicelapeutêtrerassurant(onvoitvenir),enréalité,onsetrouvedéjàbienentamé(e)lorsquel’onprendconsciencedenotreétat(d’ailleurssouventgrâceàunfeedbackextérieur).Enfait, lesécartsdevigilanceoudesensationsànotrenormeusuellesontd’aborddiscretsetanodins,puiss’installentprogressivementsouslaformed’uneimpressiondepertedemoyens,alorsqu’aucunchangementn’est(encore)opérédanslapratique–précisémentenraisondececaractèreanodin.Solutions:unevigilancegardéeà l’égarddesévénement/périodesexceptionnelsdestresspotentiel–notammentlorsquel’enjeuestgrandetrisquedemasquerlespremierssymptômesdefatiguementale–etdesstratégiesdecoping! Lesétudesdémontrentquelesstratégiesdecoping(oudegestion

du stress) ont un impact important et positif dans la relation‘réponseaustress/survenuedelablessure’.Autrementdit,plusonestcompétenten‘gestiondesoi’,plusonadebillespouraffronterladiversitédesincertitudesquinouspréoccupent.Leschangementfonctionnelsetstructurelsdustresssontdoncréversibles!Ànoter:cet impactestparticulièrementévidentchezles individus«àrisque»;cetterelationdedose-réponse(«jesuisàrisque,doncjerépondsmieux»)affichealorstoutl’intérêtd’unemiseenplaceprécoceducopingchezdesindividusapriorimoinsexposés.

Àmoyen-terme, lesstratégiesdecopingsontcomportementales. Leurbutestderenforcernotrecapacitéàrépondreaustressen«prenantsoindesoi»via i)uneélévationduniveauderessourcesdisponibles(aspectquantitatif),etii)unapprentissagedelaconnaissancedesoi(aspectqualitatif).Dansle1ercas,l’importantseradepréserversonénergie:onprogrammerades‘vrais’tempsfaiblesdédiésàlarécupération(sanssmartphoneniinteractions),etonanticipera/organiseralesfuturespériodesdestresspotentielpourgagnerenflexibilité(quelsparamètres de ma vie sont modulables, lesquels restent non-sacrifiables ? ex, temps de sieste, repas, tempssocial…).Dansle2ndcas,onchercheraàrepérerlesfacteursdestresspersonnels(attentesd’autrui,pressiondupartenaire, peur de l’échec…) pour alors se réapproprier la tâche (développer des sources de motivationautotéliqueset/ouauto-référencées).Important:desoutilsd’aideausuividel’étatdeforme(ex,scoredebien-être)peuventaideràidentifierladynamiquesurlaquelleonsesitue.

Parmilescausesdeblessure,onadoncunevalencepsychologiqueévidente,quipeutfairepencherlabalance.Pour la faire pencher du bon côté, les stratégies de coping constituent une aide si elles sont maitrisées,appropriées,donctravaillées.Malgréelles,onnerestepourautantpasàl’abri,etquelquesmémospeuventêtredebonsrappels:«Lejeuenvaut-illachandelle?»«Àchaquejoursuffitsapeine»«Connais-toitoi-même».