INRA Magazine n° 13 - juin 2010

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magazine Alimentation Agriculture Environnement INR A N°13 - JUIN 2010 REPORTAGE Les risques des métiers de la recherche RECHERCHE Bactéries intestinales : mille espèces pour 6 milliards d’humains DOSSIER La tomate, les défis du goût REGARD Mieux coordonner la recherche agricole internationale

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Inra Magazine N°13 - juin 2010- Ce numéro d’Inra magazine illustre la complexité des notions de nutrition et de sécurité alimentaire et la diversité des approches mobilisées. Tout d'abord, le dossier central "La tomate, les défis du goût" souligne, à travers l’exemple de la tomate, l’ampleur de l’implication de l’Institut dans l’amélioration de la qualité des fruits. Parmi les autres sujets : un reportage à Toulouse au sein du pôle Toxalim qui s’intéresse aux contaminations chimiques dans l’alimentation humaine ou animale ; un article sur l’étude en ligne NutriNet-Santé qui vise à mieux connaître les habitudes alimentaires des Français ; le bilan de la participation des internautes sur www.inra2014, le blog de consultation sur les priorités scientifiques de l’Inra.http://www.inra.fr/l_institut/inra_magazine_n_13_est_paru

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AlimentationAgricultureEnvironnementINRA

N°13 - JUIN 2010

◗ REPORTAGELes risques des métiers de la recherche

◗ RECHERCHEBactéries intestinales :mille espèces pour 6 milliards d’humains

◗ DOSSIER

La tomate,les défis du goût

◗ REGARDMieux coordonner la recherche agricole internationale

INRA MAGAZINE • N°13 • JUIN 2010

◗sommaire

Directrice de la publication : Marion Guillou. Directeur éditorial : Jean-François Launay. Directeur de la rédaction : Antoine Besse. Rédactrice en chef : Pascale Mollier. Rédaction :Géraud Chabriat, Magali Sarazin, Brigitte Cauvin, Marc-Antoine Caillaud, David Charamel. Photothèque : Jean-Marie Bossennec, Julien Lanson, Christophe Maître. Couverture : photo ©Tommaso Sartori. Maquette : Patricia Perrot. Conception initiale : Citizen Press - www.citizen-press.fr. Impression : Imprimerie CARACTERE. Imprimé sur du papier issu de forêts géréesdurablement. Dépôt légal : juin 2010.

Renseignements et abonnement : [email protected]

03◗ HORIZONSGlobalisation des problématiques, mondialisation de la recherche

Inra 2014. Un succès et des suites

07◗ RECHERCHES& INNOVATIONS

Bactéries intestinales : mille espèces pour six milliards d’humains

Compétitivité et environnement, un mariage de raison

Une prospective pour la volaille française

Devenez Nutrinaute !

25◗ REPORTAGEToxalim, des poisons au menu des chercheurs

L’accident de travail ne fait pas partie du métier

31◗ IMPRESSIONS

34◗ REGARDMieux coordonner la recherche agricoleinternationale

ISSN : 1958-3923

Le 22 mai 2010 a eu lieu la journée européennede l’obésité, maladie qui touche 400 millions depersonnes dans le monde alors que 800 autres

souffrent de malnutrition. La sécurité alimentaire des populations est donc bien un défi majeur pour les politiques et pour la recherche. Garantir uneproduction alimentaire suffisante en qualité et enquantité afin de nourrir la planète, tout en préservantl’environnement, guide les priorités scientifiquesaffichées et mises en débat par l’Inra pour les dixprochaines années. Sur le blog participatifwww.inra2014.fr, les internautes ont d’ailleursconfirmé l’aspect essentiel de cet enjeu. Ce numérod’Inra magazine illustre la complexité de la notion de sécurité alimentaire et la diversité des approchesqu’elle nécessite.

Tout d’abord, le dossier central souligne, à traversl’exemple de la tomate, l’ampleur de l’implication de l’Institut dans l’amélioration de la qualité desfruits. Séquençage, génomique fonctionnelle, créationvariétale, optimisation des filières de distribution…voilà quelques exemples des techniques convoquéesdans les laboratoires de l’Inra dans un seul but :retrouver du plaisir à déguster des fruits de qualité.

Ensuite, à Toulouse, la nouvelle Très Grande UnitéToxalim travaille également sur la qualité desaliments. Mais, ici, il s’agit d’étudier les discretstoxiques omniprésents dans nos assiettes : pesticides,hormones, composés plastiques volatils. Les chercheurs tentent d’identifier les diversesconséquences pour l’organisme de l’ingestion à faibledose mais répétée et simultanée de ces composés.

Enfin, assurer une bonne alimentation demande de connaître les habitudes alimentaires actuelles. Vous pouvez aider l’Inra dans cette démarche, il suffitde participer à l’étude Nutrinet sur le site www.etude-nutrinet-sante.fr.

La rédaction

Chers lecteurs

INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE147 rue de l'Université • 75338 Paris Cedex 07 www.inra.fr

13◗ DOSSIERLa tomate, les défis du goût

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R éunissant près de millescientifiques, décideurspolitiques, acteurs de la

société civile, provenant d’une cen-taine de pays du Nord et du Sud, laconférence (GCARD) s’est donnécomme objectif ambitieux, maisnécessaire, de « redessiner ensemblel’agriculture mondiale ». « Les enjeux sont très importants sil’on superpose les menaces sécuritai-res et les migrations économiques quipourraient résulter de la pauvreté, de lafaim et d’autres carences », déclare ledocteur Adel El-Beltagy, présidentsortant de l’instance organisatrice, leGFAR (3). De fait, deux milliards depersonnes vivent avec moins de deuxdollars par jour et 800 millions souf-frent de malnutrition. « Nous som-mes particulièrement en retard en cequi concerne le changement climatique(…) car nous n’avons pas encore lescultures adaptées à de telles condi-

L’Inra a participé à la première conférence mondiale sur la recherche agricole pourle développement (1), organisée du 28 au 31 mars 2010 à Montpellier. L’engagement de l’Institut dans Agreenium (2) lui permettra d’intensifier son implication dans la rechercheagricole internationale face aux grands défis de la sécurité alimentaire, de la préservation des ressources et du changement climatique.

Globalisation des problématiquesmondialisation de la recherche

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NStions », ajoute le président du GFAR.Face aux grands défis mondiauxposés à l’agriculture, la rechercheinternationale doit se coordonnerpour être plus efficace.

A question globale, réponse mon-diale. Mais la mondialisation de larecherche est complexe à organiser,de par l’importance des moyensmobilisés et de par la multiplicité des

ISMAÏLSERAGELDIN,directeur de labibliothèqued’Alexandrie, a ouvert la premièrejournée de laconférence.

Des réserves génétiques à la lutte contre la faim

Les centres internationaux de recherche pour le développement sont basés en majorité dansles pays du Sud, par exemple, le centre du riz pour l’Afrique (Bénin) et plusieurs centres derecherche en agriculture tropicale et zones arides (Nigéria, Colombie, Syrie, Inde). Focalisésau départ sur l’amélioration génétique, onze des quinze centres s’emploient encore aujourd’huiessentiellement à maintenir les banques internationales de gènes qui constituent la base dela sécurité alimentaire mondiale. Les centres du CGIAR sont également à l’origine d’innova-tions qui ont permis des progrès importants dans la lutte contre la faim, par exemple, des varié-tés de riz associant la productivité du riz asiatique et la résistance aux ravageurs des variétésafricaines. Ces variétés, cultivées aujourd’hui en Afrique, ont permis de réduire notablementles importations. Autre succès, des techniques de lutte biologique contre des ravageurs dumanioc, qui génèrent des économies (4 milliards de dollars) du même ordre de grandeur quel’ensemble des coûts de recherche engagés par le CGIAR en Afrique jusqu’à ce jour. Les effectifs du CGIAR se montent à environ 8 500 personnes, déployées dans les divers pays,soit une taille et un budget (550 millions de dollars) équivalents à ceux de l’Inra. Le Cirad etl’IRD y détachent une quarantaine de chercheurs.

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Pourquoi est-il nécessaire de développer une rechercheagricole internationale coordonnée ?Guy Riba : Aucun des grands problèmes actuels tels que lasécurité alimentaire, les ressources en eau et en énergie, les épidémies, ne peut être traité par une seule institution. Il y a une nécessité de créer des synergies de projets, de moyens et de compétences, entre les institutions nationales.

En quoi la recherche peut-elle contribuer à résoudre les problèmes mondiaux de faim, de santé, d’environnement ? G. R. : Le problème de la faim est avant tout un défi social, lié à des facteurs politiques qui perturbent l’accès aux ressourcesalimentaires et ne peuvent être résolus par la recherche. Mais il n’enreste pas moins que pour passer de six à neuf milliards d’habitants, il faut maintenir, voire augmenter, la production alimentaire mondiale, en même temps que l’agriculture devra produire autre chose, commede l’énergie et ce, tout en préservant au mieux l’état de la planète. Ils’agit donc bien aussi d’un problème technique, agronomique,écologique, économique sur lequel la recherche peut et doit sepencher.

Comment l’Inra participe-t-il à la recherche agricoleinternationale ? G. R. : En tant qu’Institut de recherche publique, l’Inra peut faciliterl’accès aux connaissances génériques, partager des bases dedonnées. Il peut aussi développer des approches comparatives avecdes méthodologies communes, en particulier au travers decollaborations avec des acteurs du développement dans les paystiers. L’Inra doit aussi renforcer sa capacité d’ingénierie pour mieuxdécliner en solutions opérationnelles les résultats de ses recherches.Enfin, l’Inra peut renforcer son rôle dans la formation des jeuneschercheurs étrangers en les accueillant, en créant des écoles dechercheurs et en collaborant avec les membres d’Agreenium.

Guy RibaVICE-PRÉSIDENT DE L’INRA, EN CHARGE DES QUESTIONS

INTERNATIONALES

O 3 QUESTIONS À...

acteurs : quelle gouvernance pourdéfinir les priorités de recherche ?Avec quels financements ? Commentarticuler programmes nationaux etprogrammes internationaux ? Un des succès de cette premièreGCARD a été de légitimer le rôle duGFAR en tant qu’instance globali-sante. Créé en 1998, le GFAR réunit,en plus des organismes de recherche,l’ensemble des acteurs concernés :gouvernements, organisations pay-sannes, ONG, entreprises et bailleurs.Il est organisé en forums par gran-des régions du monde, permettantainsi l’expression de tous les pays, duSud comme du Nord. La détermina-tion des participants s’est traduite parune feuille de route et l’engagementd’organiser une nouvelle conférencetous les deux ans pour en suivre l’avancement. Après l’analyse des défisposés région par région, la feuille deroute définit des domaines prioritai-res de recherche : les systèmes de cul-ture en pays pauvres, l’amé liorationde la productivité ou le changementclimatique. Ont été aussi soulevés desbesoins stratégiques transversauxcomme, par exemple, l’accès aux mar-chés commerciaux des femmes afri-caines, dont les récoltes représentent80 % de la production alimentaire dece continent.

Mieux coordonner la recherche agricole et agronomique pour le développementUne autre avancée majeure de laGCARD a été de mieux définir le rôledes différents opérateurs impliquésdans la recherche pour le dévelop -pement et leurs articulations. Au pre-mier plan, se trouvent les centresinternationaux de recherche agricole,regroupés sous l’égide du CGIAR (4).Créés en 1971, ces centres, financéspar les Etats, fonctionnaient de façonplus ou moins autonome, chacundans sa spécialité (cf. encadré pageprécédente). Depuis deux ans, leCGIAR se réforme sous l’impulsiondes bailleurs de fonds qui souhaitentfavoriser les synergies et éviter lesredondances dans la programmationde la recherche. Un consortium déter-minera désormais une stratégie col-lective, soutenue par un fonds localiséà la Banque mondiale. Le conseild’admi nistration du consortium,composé de personnalités du Nordet du Sud, établira des contrats deperformance avec des objectifs précis

et des indicateurs chiffrés, qui seronttransmis pour approbation au conseildes donateurs, qui gère le fonds. Cetteorganisation se traduira par la miseen place de mégaprogrammes impli-quant plusieurs centres internatio-naux. La GCARD a été l’occasion deprésenter cette réforme à l’ensembledes acteurs internationaux et de déga-ger les priorités stratégiques pour lesmégaprogrammes. Les deux méga-programmes qui seront développésen priorité d’ici fin 2010 portent surle riz et sur le changement climatique.

(1) GCARD : Global Conference on Agricultural Researchfor Development (conférence mondiale sur la recher-che agricole pour le développement) organisée par leGFAR et Agropolis International (association d’établis-sements de recherche et d’enseignement supérieur deMontpellier et de la région Languedoc-Roussillon). (2) Agreenium : consortium national pour l'agriculture,l'alimentation, la santé animale et l'environnementcréé en 2009 réunissant l’Inra, le Cirad, les écolessupérieures agronomiques de Paris, Montpellier etRennes ainsi que l’Ecole nationale vétérinaire deToulouse.(3) GFAR : Global forum of agriculture research,forum d’échange international créé en 1998.(4) CGIAR : Consultative group on internationalagricultural research, alliance stratégique soutenantquinze centres internationaux de recherche agricole.

Pour un autre éclairage, voir aussi l’article en rubriqueRegard, page 34.

en bref

OGrandes cultures économes en pesticides Démarches, outils et innovationspour utiliser moins de pesticidesen grandes cultures ont étéprésentés le 6 mai dernier àVersailles, lors des Carrefoursde l’innovation agronomique(CIAg), par les chercheurs de l’Inra en direction desprofessionnels. Retrouvez enligne les textes et documents de synthèse : www.inra.fr/ciag/revue_innovations_agronomiques

OFormation des habitudes alimentaires Dix équipes européennes semobilisent autour de HabEat,nouveau programme coordonnépar Sylvie Issanchou, chercheuseà l’Inra, pour comprendre lespériodes et mécanismes clésdans la formation des préférencesalimentaires des enfants, de la naissance à cinq ans. Les stratégies pour fairedisparaître les mauvaiseshabitudes seront aussi étudiées.Résultats attendus à l’horizon2013.www.habeat.eu/index.php

OPhenol-ExplorerLa première base de donnéescomplètes sur les polyphénols et leurs teneurs dans lesaliments est enfin constituée eten libre accès, grâce à lacollaboration d’industriels et de chercheurs, dont l’Inra deClermont-Ferrand-Theix.Antioxydants naturels, lespolyphénols sont impliqués dansla prévention des maladiescardiovasculaires, neuro -dégénératives, du diabète, etc.www.phenol-explorer.eu

OInter-TropL’Inra, le Cirad et l’IRD lancent le projet Inter-Trop de mise en réseau des Centres deressources biologiques végétalestropicales. Constitué lors deprogrammes de recherche ou de missions de prospection, ce matériel végétal (espècescultivées, plantes ornementales,herbier) représente une véritablebase pour des programmes de diversification, de créationvariétale ou d'analyse de ladiversité.http://collectives.antilles.inra.fr

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Autres acteurs impliqués dans larecherche pour le développement, lesinstituts nationaux de recherche agro-nomique s’organisent également pourmieux se coordonner. Plusieurs initia-tives européennes et internationalesfont écho aux mégaprogrammes duCGIAR. Parmi elles, l’Inra est à l’ori-gine d’une initiative de programma-tion conjointe (5) appelée « Agriculture,Food security and Climate change » quiréunit 20 pays européens et associés(Israël, Turquie). Sur le thème du chan-gement climatique, une autre initia-tive, la Global alliance « Agriculturalgreenhouse gas research » est coordon-née par la Nouvelle-Zélande. Des liensentre toutes ces initiatives sont en trainde se mettre en place. Les mêmesscienti fiques leaders sont impliquésdans plusieurs d’entre elles.

L’engagement de l’Inra dans le consor-tium Agreenium, qui renforce lacoopération avec le Cirad et les écolesagronomiques et vétérinaires, permet-tra d’intensifier l’implication de l’Ins-titut dans la recherche pour ledéveloppement de différentes maniè-res : en développant des connaissancesgénériques extrapolables à différentscontextes et en en facilitant l’accès auxacteurs de pays tiers via le dévelop -pement d’actions de formations et l’accueil de chercheurs étrangers. ●

Pascale Mollier

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Quelques initiatives de l’Inra pour une coordination internationale

O Par la programmation- Programmation conjointe : deux initiatives en 2009 : « Agriculture, Sécurité alimentaire et

changement climatique » et « Une alimentation saine pour une vie saine »- Actions pour la région Méditérranée : ERA-net Arimnet (lancement en 2008,

coordination Inra) : identification et mise en réseau des programmes de recherche entre treize pays méditerranéens (1) et deux instituts, le CIHEAM (2) et l’ICARDA (3).Coordination de l’accueil des chercheurs et ouverture de plateformes technologiques.Parmi les thématiques abordées : la protection intégrée des cultures, la gestion de l’eau,la conservation des sols, les maladies animales émergentes, l’élevage des petits ruminants…

(1) France, Italie, Espagne, Portugal, Grèce, Chypre, Turquie, Israël, Egypte, Tunisie, Algérie et Maroc.(2) CIHEAM : Centre international des hautes études agronomiques méditerranéennes.(3) ICARDA : International center for agricultural research in dry areas.

O Par l’organisation du dispositif de recherche - Création d’Agreenium, en 2009. Intensification des approches comparatives, comme

celle déjà engagée avec le Cirad pour comparer le potentiel d’adaptation des forêts tropicales et tempérées face au changement climatique.

- Projet de création d’un collège doctoral international en agronomie, projet prioritaire d’Agreenium, en vue de faciliter la mobilité des doctorants et la construction de parcours mixtes recherche/enseignement.

(5) Programmation conjointe : nouveau dispositif de coordination des programmes de recherche nationaux sous l’égide de la Commission européenne.

LA RÉGIONméditerranéenne, l’un des berceaux

de l’agriculture, a un fortpotentiel

qui mérite d’être mieux

valorisé et mieux partagé.

+d’infosO web : www.egfar.org/egfar/website/gcard

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tenaires agricoles, les citoyens inté-ressés par les enjeux de recherche, lespersonnels de l’Inra et les organisa-tions non gouvernementales... Ils cou-vrent les deux tiers des contributionsqui sont dans leur grande majoritéfactuelles ou constructives. Cela tendà confirmer le fort besoin d’un dialo-gue positif entre science et sociétéautour des thèmes de l’alimentation,de l’agriculture et de l’environ nement.Parallèlement à la consultation enligne, la mise en débat des priorités aété complétée par 37 cahiers d’acteursprésentant les points de vue argu-mentés de partenaires de l’Inra (orga-nisations professionnelles agricolesou agroalimentaires, associations pourla protection de l’environ nement,instituts techniques, industriels, par-tis politiques…) et par la prise en

La participation a été au rendez-vous pour la mise en débat des priorités scientifiques de l’Inra. Etape suivante : la synthèse afin d’aboutir au contrat d’objectifs.

Inra 2014 Un succès et des suites

Pour une première, c’estune réussite. Le blogwww.inra2014.info, qui

présentait les projets de prioritésscientifiques de l’Institut pour lesprochaines années et permettait àtout un chacun d’y donner son avisa reçu la visite de plus de 11 000internautes. Durant les trois moisde concertation en ligne, de janvierà début avril 2010, quelque 210contributions ont été déposées.C’est une belle performance pourun exercice encore inédit (aucuninstitut de recherche français ne s’yétait risqué jusque-là) et brassantdes problématiques complexes.

Qui a participé ?Les principaux contributeurs audébat se comptent parmi les par-

compte des ateliers de réflexion asso-ciant les partenaires de l’Inra et quiont eu lieu le 4 mars 2010 au SalonInternational de l’Agriculture.

Que ressort-il des participations ? Outre une analyse quantitative, la tota-lité des contributions a été traitée parun outil d’analyse lexical. Il en ressortdeux préoccupations saillantes, d’unepart, les systèmes de production avecnotamment l’agriculture biologiqueet la question de la viabilité des exploi-tations, d’autre part, la démarchescientifique incluant le couplage expérimentation-modélisation, lesprospectives et les partenariats.Parallèlement, la consultation des partenaires a souligné une demandeforte pour une approche intégrée desfilières en partant des besoins desconsommateurs. Cela apparaîtcomme la clé pour garantir la com-pétitivité et la durabilité de ces filièresdans un contexte difficile. De façon générale, l’ambition pourune sécurité alimentaire mondiale faitconsensus, de même que la demanded’indicateurs robustes de développe-ment durable et d’analyses menées àdifférentes échelles (de la parcelle à larégion). L’approche systémique, prônée par l’Inra, liant développe-ment durable et sécurité alimentaireentraîne une large adhésion.

Et après ?Les diverses contributions alimententl’élaboration du futur document d’orientation qui définira les prioritésscientifiques sur les 10 ans à venir.Une première ébauche de ce docu-ment sera soumise aux instances del’Inra puis au conseil d’administra-tion fin juin. La version finale seradéclinée à la fin de l’année, sous laforme d’un contrat d’objectifs avecles ministères de tutelle de l’Institut. ●

Antoine Besse

Bactéries intestinales :mille espèces pour six milliards d’humains

Que vous ont appris les premiers résultats de MétaHIT ?Stanislav Dusko Ehrlich : Onpensait jusqu’ici qu’il existait desmillions, voire des milliards d’espè-ces de bactéries intestinales et quechaque individu possédait une florequasiment unique. Or, en séquençantl’ensemble des gènes contenus dansles fèces de 124 individus, nous n’a-vons trouvé QUE 3,3 millions degènes différents. C’est très peu !Sachant qu’une bactérie type contientquelque 3 000 gènes, nous avonsestimé autour de mille le nombred’espèces bactériennes différentes (2).Mille espèces à répartir entre 6milliards d’êtres humains sur terre,cela signifie beaucoup d’espèces com-munes entre les individus ! Notre floren’est donc pas si différente d’un indi-vidu à l’autre : pour l’instant, nousavons identifié 57 espèces communessur 170 espèces d’une flore intestinaleet ce chiffre devrait croître.

d’ici deux ou trois mois, nous devrionsavoir l’ensemble des résultats.

Comment identifiez-vous les gènes bactériens, puis lesespèces à partir des gènes ?S. D. E. : Une première prouessetechnique consiste à reconstituer lesgènes complets à partir des milliardsde fragments très courts d’ADN quenous séquençons, en utilisant lesrecouvrements des extrémités. Ce sontnos collègues chinois du Beijing Geno-mics Institute de Shenzhen qui ontcréé les logiciels nécessaires, que nousappelons des « pipe-lines »… Une foisles gènes identifiés, encore faut-il trou-ver à quelles espèces ils appartiennent,c’est un autre défi ! Certaines espècesbactériennes sont déjà connues et leurgénome séquencé, mais il en reste denombreuses non encore caractérisées.Nos partenaires du Sanger Institutede Cambridge sont en train de déve-lopper une technologie très intéres-sante, qui permet de séquencer legénome d’une seule bactérie isolée,soit une quantité infime de matérielgénétique ! Grâce à un gène marqueur,on détermine s’il s’agit d’une nouvelleespèce et dans ce cas, on séquence latotalité du génome de LA bactérie etl’on ajoute une nouvelle espèce à notrerépertoire… ●

Propos recueillis par Pascale Mollier

(1) MétaHIT rassemble 9 instituts européens, 1 institutchinois et 4 industriels. www.metahit.eu(2) Deux espèces bactériennes différentes ont très peude gènes strictement identiques.

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STREPTOCOCCUSTHERMOPHILUS

Une des espècesbactériennes de la

flore intestinale.Microscopie

électronique àbalayage

(T. Meylheuc, Inraplate-forme MIMA2

Massy).

+d’infosOcontact :[email protected]

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Comment poursuivez-vous les travaux ?S. D. E. : La rupturetechnologique appor-tée par la métagéno-mique nous amène àrevoir complètementnotre approche despathologies : pourcomparer des indivi-dus sains et des indi-vidus malades, ilfaudra se focaliser surla partie de la flore quidiffère. Nous étudionsdeux types de patho-logies qui semblentimpliquer la flore

intestinale : l’obésité et les maladiesinflammatoires de l’intestin. Actuel-lement, nous sommes en train deséquencer les gènes des selles de 118obèses. Nous comparerons ces gènes àceux de 67 individus de poids nor-mal. La comparaison sera valable carla méthode nous permet d’établir un« catalogue » assez complet des gènesbactériens intestinaux, et de « voir »même des espèces bactériennes pré-sentes à des fréquences très faibles (1 sur un million). Dans nos compa-raisons, nous devrons cependant distinguer les bactéries résidentes sus-ceptibles d’avoir un réel impact surla santé et les bactéries « de passage »qui proviennent de l’environnementde façon aléatoire : quand nous man-geons un yaourt, quand un enfantlèche ses doigts tachés, etc.Nous entamons un autre projet, cettefois pour séquencer le métagénomedu rumen de vache. Le projet réunitdes scientifiques de l’Inra deClermont -Ferrand et nos partenaires chinois. Douze vaches, sur la centaineprévue, ont déjà été « séquencées », et

Les nombreuses bactéries qui peuplent notre intestin sont très importantes pour la santé en tantque barrière contre les pathogènes et pour leur rôle dans la digestion, mais on les connaît mal.Grâce à la métagénomique (l’étude globale des gènes d’une population bactérienne) le programme européen MétaHIT (1) apporte un éclairage nouveau. Stanislav Dusko Ehrlich, de l’Inra de Jouy-en-Josas, qui coordonne ce programme, en commente les premiers résultats,publiés dans la revue Nature du 4 mars 2010.

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estion des paysages, pré-servation des sols et desmasses d’eau, maintien dela biodiversité… La mon-

tée en puissance des exigences envi-ronnementales dans le cahier descharges de l’agriculture intervient aumoment même où la profession tra-verse l’une de ses plus graves crisessur le plan économique. D’économie,il a donc d’abord été question afin decerner les déterminants de cette com-pétitivité et la situation actuelle de l’agriculture française.

Etat des lieux de l’agriculturefrançaise Où se situe la compétitivité desexploitations françaises par rapport àleurs homologues communautaires ?Pour répondre à cette question, Vin-cent Chatellier, directeur du Lereco(1) à Angers, nous livre les résultatsd’une étude basée sur les donnéesdu Rica (2) qui compare la situationentre 1990 et 2007 dans sept pays

(Allemagne, Danemark, Espagne,Royaume-Uni, Pays-Bas, Irlande etItalie). Il ressort que la productivitéagricole par hectare de surface agricoleutile stagne dans la plupart des paysen raison de rendements stabilisés etde prix en baisse. Plus inquiétant, laproductivité française par emploi atendance à décrocher par rapport àcelle de ses voisins, notamment l’Allemagne où l’emploi salarié pro-gresse nettement. La France possède,en effet, une main-d’œuvre essentiel-lement familiale qui facilite les suc-cessions mais se révèle moins flexiblepour s’adapter aux conditions éco-nomiques fluctuantes. En revanche,l’hexagone bénéficie d’un rapportfavorable entre le coût des biens etdes services utilisés pour la produc-tion agricole et la valeur de cette der-nière, en particulier grâce à un foncierabondant et bon marché. Sur le plandes investissements, les efforts fournispar bon nombre d’agriculteurs cesdix dernières années pèsent encore

Compétitivitéet environnement,un mariage de raison

lourds dans les comptabilités maisdevraient offrir plus de latitude dansla prochaine décennie pour faire faceà de nouveaux défis. En aval de l’agriculture, les filièresagroalimentaires seront égalementconcernées par les exigences envi-ronnementales à venir. Louis- GeorgesSoler, directeur de l’unité Aliss (3) àIvry, dresse un constat mitigé de leursituation. « Si quelques grandes entre-prises multinationales tirent leur épin-gle du jeu, le secteur est composé à 97 %de PME. Beaucoup voient leurs parts demarché régresser en raison de faiblesgains de productivité ». Si elles ontbénéficié des gains de productivité del’agriculture, elles les ont en grandepartie répercutés vers les distribu-teurs. Les coûts d’adaptation à denouvelles contraintes environne-mentales risquent donc d’être diffi-ciles à supporter. La disposition desconsommateurs à payer des produitsrespectueux de l’environnement n’étant pas démontrée pour l’instant,

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Le colloque organisé par l’Inra, le 2 mars 2010, dans le cadre du Salon international de l’agriculture, était consacré au double défi du monde agricole : préserver sa rentabilité et respecter l’environnement.

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+d’infosOvidéos des interventions : www.inra.fr/audiovisuel/web_tv/agriculture_et_environnement_le_defi_agricolewww.inra.fr/audiovisuel/web_tv/ciag/ciag_versailles_mai_2010

la solution passera par une forte capacité d’in-novation. Des gains sont possibles en amélio-rant les rendements de conversion des matièrespremières en produits finaux. Comme dans lecas de procédés économes en énergie, ces nou-velles contraintes pourraient inciter à des inno-vations faisant converger efficacité économiqueet respect de l’environnement. Se pose alors laquestion des capacités en R&D des PME. Ellemet en exergue un défi organisationnel auniveau des filières.

Pour des systèmes de production intégréeDans son discours, Guy Riba, vice-président del’Inra, a souligné la nécessité d’une approchepar filières pour fonder une recherche systé-mique à même de fournir des réponses audouble défi économique et environnemental.Celui-ci a également appelé à une plus fortecontribution à l’innovation génétique en ren-forçant les capacités de génotypage et de phé-notypage à haut débit ainsi que le traitementdes données qui en sont issues. En plus de l’a-mélioration des pratiques qui permettrontdéjà de notables avancées pour l’environne-ment, la production intégrée apparaît commeune réponse efficace pour aller plus loin. Sondéveloppement réclame de solides référencestechniques et donc une optimisation des dispo-sitifs expérimentaux. D’où l’importance derenforcer les partenariats académiques et éco-nomiques et d’impliquer tous les acteurs desfilières. C’est le rôle des différents groupe-ments d’intérêt scientifique (GIS) fédérateursdéjà initiés par l’Inra. Ces derniers pourrontensuite échanger selon une approche systé-mique et transversale dans le cadre du GIS« Relance agronomique », signé lors du Saloninternational de l’agriculture. Ils pourrontoptimiser les méthodes et techniques qu’ilspartagent, identifier des besoins communs de

formations ou encore développer des indica-teurs d’impacts environnementaux. Cette vision a depuis été relayée auprès desprofessionnels par le ministre de l’Agriculture,de l’Alimentation et de la Pêche, lors des Car-refours de l’innovation agronomique qui sesont tenus à Versailles, le 20 mai dernier. « LeGIS Relance agronomique doit être le pilier dunécessaire effort de recherche multidisciplinairedédié aux solutions techniques permettant uneagriculture durable » a-t-il déclaré. BrunoLemaire a profité de cet événement consacré àla réduction des pesticides en grandes culturespour affirmer que seule une agriculture dura-ble, économe en intrants, permettrait de pré-server notre compétitivité. ●

Géraud Chabriat

(1) Laboratoire d’études et de recherches en économie, centre Inrad’Angers-Nantes.(2) Réseau d’information comptable agricole.(3) UR Alimentation et sciences sociales, centre Inra de Paris.(4) UMR Structures et marchés agricoles, ressources et territoires,centre Inra de Rennes.

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Instabilité des prix : attention aux idées reçues !

La volatilité des cours mondiaux est, depuis quelques années, la principale source derisques pour les agriculteurs et leur gestion est un facteur important qui pèse sur la com-pétitivité des exploitations. Des recherches posent la question du rôle de la libéralisationdes politiques publiques dans l’ampleur de la volatilité actuelle. En effet, en l’absence de prixgarantis, les agriculteurs adaptent la surface dédiée à chaque culture à l’anticipation qu’ilsfont de la situation future du marché au moment où leur production sera vendue. Au vu dela complexité de ces prévisions, il peut y avoir des erreurs d’anticipation. « En introduisantces erreurs dans les modèles standard internationaux, nous avons montré que ces fluctuationsde la production, associées à une demande peu dépendante des prix, conduisaient à unevolatilité supplémentaire que l’on appelle endogène. C’est donc un phénomène qui s’auto-entretient », conclut Alexandre Gohin, directeur de recherche à l’UMR Smart (4). Néan-moins, l’économiste tempère ce résultat : « L’ampleur de cette volatilité est limitée par desmécanismes privés de gestion des risques comme les décisions d’investissements qui vontau-delà des assolements. L’évolution des politiques ne semble donc que partiel lementresponsable de la volatilité totale ». Un élément que l’on doit prendre en compte au momentde concevoir de futures politiques publiques destinées à donner la visibilité nécessaire auxagriculteurs pour faire face, par exemple, aux futures exigences environnementales. Autrerésultat surprenant, le rôle parfois modérateur de la spéculation. Les chercheurs ont en effetdémontré que les spéculateurs, en intervenant massivement sur les marchés à termeentre 2004 et 2006, ont permis d’augmenter les stocks finaux 2006. Ce qui a amorti la flam-bée des prix en 2007...

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en bref

ORévélations sur le diamant noirUn consortium franco-italiencoordonné par une équipe de l’Inra de Nancy a achevé le séquençage et le décryptage du génome de la truffe noire duPérigord, le plus grand chez leschampignons, avec 125 millionsde paires de bases. Les chercheurs pourront mieuxcomprendre la biologie de ce champignon, symbiotique des racines de certains arbres et consommé depuis des millé naires.Nature, mars 2010

OArrangements du prion Le pouvoir infectieux du prion,responsable notamment de lamaladie de Creutzfeldt-Jakobchez l’homme, varie en fonctionde sa structure spatiale. En effet, le nombre et l’agence -ment des acides aminés de cette protéine dépendent de la nature de la souche,pathogène ou non. Ces travauxmenés par des chercheurs del’Inra de Jouy-en-Josaspermettront d’améliorer les méthodes de détection.PLoS Pathogens, avril 2010

OComme une fleurSur l’île de Bornéo, deschercheurs de l’Inra ont décou -vert que Nepenthes rafflesiana,plante carnivore, possède desfeuilles qui miment les fleurs :nectar, couleurs… et doucesodeurs pour capturer lesinsectes qu’elle mange. Ces pièges pourraient inspirerle dévelop pement de nouveauxmoyens de lutte biologiquecontre les insectes ravageursde cultures.Journal of Ecology, avril 2010

OReprise des essais à ColmarLe ministre de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Pêche,a annoncé le 18 mai qu'ilautorise la reprise del’expérimentation de porte-greffeOGM de vigne, saccagée en 2009. Dans le respect desprincipes qu'il s'est fixés -parcimonie, précaution etdialogue - l'Inra va donc relancercet essai, complémentaire auxautres voies de recherche non OGM de lutte contre la maladie du court-noué.

GUY RIBA vice-président de l’Inra, intervenantau colloque du SIA.

L a prospective, menée par ungroupe de travail mixte Inra -Itavi (1), réunissant des cher-cheurs et des professionnels,

analyse les tendances qui pourraientorienter l’évolution de la productionde viande de volaille en France. Laviande de volaille reste certes la troi-sième consommée en France (après leporc et juste derrière le bœuf), avecune consommation qui se maintient àenviron 25 kg par an et par habitant.Mais la production française a chuté de20 % en dix ans alors que dans lemême temps la production mondialea progressé de 38 %. La Franceimporte désormais de la viande conge-

lée ou préparée venant de Thaïlandeou du Brésil et a réduit ses exporta-tions de 37 % en dix ans. La filière avi-cole française est devenue moinscompétitive sur le marché mondialpour plusieurs raisons. Le coût de pro-duction est beaucoup plus faible parexemple au Brésil. Ce pays a déployédes structures de production moder-nes et présente un accès plus facile auxmatières premières alimentairescomme le soja, ainsi qu’une main-d’œuvre meilleur marché et des régle-mentations sanitaires moinsexigeantes. A cela s’ajoute une pertede compétitivité au niveau européenqui réduit également les exportations

et renforce les importations. La volaillefrançaise se vend plus cher et pour-tant, les marges dégagées ne suffisentpas à rémunérer suffisamment les éle-veurs qui ne peuvent investir pourrenouveler leurs installations. Allons-nous vers une disparition des volaillesfrançaises au profit de viande impor-tée, de provenance et de qualité le plussouvent peu différenciées ?

Une production qui pique du becAu-delà de ce constat, le groupe deprospective a construit quatre scéna-rios possibles à l’horizon 2025, encombinant des hypothèses sur l’évo-lution des politiques publiques(libéra lisation ou protectionnisme,différentes options pour la politiqueagricole européenne), sur le compor-tement des consommateurs, sur lesstratégies des acteurs (grands groupesnationaux ou internationaux) et surles options choisies pour l’innovation(cf. tableau). Le choix de l’échéanceapparaît comme un bon compromisentre le long terme nécessaire au chan-gement en profondeur des systèmesde production ou des régimes ali-mentaires, et un horizon plus prochemieux à même de mobiliser les déci-deurs. « Les scénarios élaborés ne pré-disent pas l’avenir, mais aident àimaginer les évolutions possibles et àproposer des voies de réflexions pour lesacteurs » précise Christine Jez, chef deprojet de l’unité prospective de l’Inra.Dans tous les scénarios envisagés, laproduction française ne peut retrouverles niveaux qu’elle avait en 2000. Lefacteur le plus incertain est l’évolutiondes politiques commerciales, commel’illustrent les difficultés des négocia-tions agricoles à l’Organisation mondiale du commerce. On peutcepen dant raisonnablement prévoir ladisparition des aides à l’exportationet le renforcement des réglementa-tions, deux facteurs a priori peu favo-rables à la production française… saufsi celle-ci en fait un avantage, en intro-

Une prospective pour la volaille françaiseL’Inra et l’Itavi ont conduit un travail prospectif pour explorer les évolutions possibles de l’élevage de volailles en France en 2025. Le maintien de cette activité dépendra de la capacité de l’ensemble des acteurs à privilégier la volaille française, en différenciant les produits sur des critères de qualité gustative, sanitaire et environnementale.

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ComposantesScénario 1

La chair de pouleScénario 2

Le coq européenScénario 3

La poule est dans le préScénario 4

La poule au pot

Politiques et

réglementations

• Libéralisation des échanges agricoles

• Suppression des aides directes de marché à l'agriculture communautaire

• Maintien des protections tarifaires à l'entrée dans l'Union européenne

• Politiques publiques européennes centrées sur l'emploi et la santé

• Libéralisation des échanges agricoles

• Réglementations sanitaires européennes renforcées

• Aides directes à l'agriculture UE conditionnées au respect d'exigences renforcées en matière d'environ nement, de bien-être animal, etc.

• Gouvernance mondiale des échanges agricoles en 2025 après plusieurs années de crises

Consommation,comportem ent

des consommateurs

et citoyens

• Augmentation des revenus

• Diversité des achats orientés vers des produits à plus forte valeur ajoutée, élaborés et faciles d'emploi

• Atonie des revenus• Recherche des prix

les plus bas

• Augmentation des revenus• Réduction de la

consommation de viande, y compris de viande de volaille

• Achats orientés vers des produits de qualité

• Atonie des revenus• Recherche des prix

les plus bas

Stratégies des acteurs

et structuration de la filière

• Domination par des grands groupes mondiaux non européens

• Perte de contrôle de la transformation française par les acteurs hexagonaux

• Structuration du secteur avicole communautaire autour de quelques opérateurs européens spécialisés

• Coexistence de quelques grands groupes européens et d'un tissu de petites et moyennes entreprises ancrées dans les territoires et valorisant le terroir

• Domination par des grands groupes mondiaux non européens implantés sur tous les continents dans un objectif de sécurisation de leurs approvisionnements

Innovationsscientifiques et techniques

• Innovations dictées par les grands groupes de la transformation, orientées sur des objectifs de réduction des coûts et de sécurité sanitaire des produits

• Innovations européennes ciblées sur les coûts de production et la sécurité sanitaire

• Innovations européennes ciblées sur des objectifs de durabilité, notamment dans les dimensions environnementale et sanitaire

• Innovations dictées par les grands groupes de la transformation, orientées sur des objectifs de réduction des coûts, de diminution des émissions de GES et de sécurité sanitaire des produits

duisant par exemple des normes plussévères sur l’environnement, le bien-être animal et la sécurité sanitaire pourles produits importés.

Le salut par la qualitéLa marge de réduction des coûts deproduction paraît faible mais la France peut revitaliser sa productionen valorisant des produits frais, dequalité et de proximité. Une dynamique globale est nécessairepour cela, impliquant l’ensemble desacteurs de la filière, jusqu’au consom-mateur. Le groupe de travail de lapros pective a examiné des pistes pos-sibles pour favoriser la transforma-tion par les industriels des volaillesproduites sur place. Les coopératives,par exemple, pourraient valoriser desatouts environnementaux ou territo-riaux. D’autre part, elles pourraientfavoriser des démarches collectivespour la mutualisation des outils d’abattage (qui mobilisent la moitié de

nationaux produisant et transformantune matière première indifférenciéeet que se maintiennent des leaderseuropéens, français, et des entreprisesde taille moyenne ancrées dans les ter-ritoires. ●

Pascale Mollier

(1) Itavi : Institut technique de l'aviculture.

l’emploi de la filière) de manière à faireabattre les volailles dans un périmè-tre proche des lieux de production.Les industriels de la transformationpourraient quant à eux privilégier unapprovisionnement local et valorisercommercialement l’origine de leurmatière première. Cette démarche suppose que l’industrie ne soit pasdominée par des grands groupes inter-

+d’infosOcontacts : [email protected], unité prospective ; [email protected], unité de recherche avicole ; [email protected]

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Trois axes de recherche : durabilité, santé, facteurs économiques

Pour améliorer la durabilité des systèmes de production, l’Inra et ses partenaires des insti-tuts techniques développent des solutions innovantes dont certaines sont déjà opéra-tionnelles : par exemple des échangeurs de chaleur pour économiser le chauffage dansles bâtiments d’élevage, des chaudières à biomasse et des lampes fluorescentes pour éco-nomiser l’électricité. Les chercheurs optimisent également des mélanges de micro- organismes pour transformer le fumier en amendement organique utilisable au champ.Les recherches sur la santé ont en outre abouti à l’identification d’ensembles de gènes impli-qués dans la résistance aux salmonelles, ce qui permettra d’orienter la sélection génétiqueet de restreindre l’usage des antibiotiques en élevage.Enfin, les sciences économiques sont sollicitées, entre autres, pour analyser l’impact despolitiques publiques, étudier la reconnaissance des signes de qualité, ou encore explorerles conséquences des systèmes de contractualisation sur la qualité des produits, lesperformances technico-économiques, les marges et leur répartition entre les différentsmaillons de la filière.

2 LES SCÉNARIOS DE LA PROSPECTIVE

+d’infosOcontact :[email protected]é de recherche en épidémiologienutritionnelle (Inserm / Inra / Cnam / UniversitéParis 13)

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D epuis mai 2009, plus de120 000 personnes se sontconnectées sur www. etude-nutrinet-sante.fr pour par-

ticiper à l’étude NutriNet-Santé. Enquelques clics, ces internautes sontdevenus des « Nutrinautes » et appor-tent leur contribution à la plus grandeenquête nutritionnelle existante.Les résultats obtenus avec les 30 000premiers Nutrinautes, répartis surtoute la France et dans toutes les caté-gories socioprofessionnelles, permet-tent déjà de révéler certains aspects denos comportements alimentaires.Ainsi, malgré la tendance à la mon-dialisation, les particularités alimen-taires régionales subsistent, avec une« France du beurre » au Nord, unepréférence pour l’huile au Sud etmême pour l’huile d’olive en régionProvence-Alpes-Côte d’Azur. Un ques-tionnaire spécifique a aussi mis en évi-dence que 63 % des femmes de poidsnormal et 9 % des femmes considéréescomme maigres par rapport à l’indicede masse corporelle moyen souhai-tent encore perdre du poids, reflétantles critères de minceur idéale envigueur dans notre société. « Pour l’ins-tant, les femmes sont surreprésentéesdans l’étude, avec trois quarts des effec-tifs, rapporte Serge Hercberg, le coor-dinateur de NutriNet-Santé, je lesinvite donc encore à s’inscrire en nom-bre mais aussi à encourager leursconjoints, frères, fils, à s’inscrire à leur

tour ! Et le plus tôt sera le mieux pourêtre suivi dès le début ». Un acte béné-vole pour aider un projet de recherched’intérêt public et une façon de réflé-chir à la manière dont nous nous ali-mentons.

Un petit clic citoyen pour un grand pas scientifique

Les Nutrinautes doivent renseignerdes questionnaires généraux sur leurshabitudes de vie et leur santé, etdétailler leur régime alimentaire pen-dant trois jours par an. Très ergono-miques, les questionnaires nenécessitent aucune compétence eninformatique. Nul besoin non plus depeser ses aliments, des photos indi-quent les quantités à sélectionner. Enéchange de leurs efforts, les partici-pants reçoivent chaque mois un cour-riel les informant de l’avancement del’étude et de l’actualité en nutrition etsanté. Ils peuvent accéder aussi à unespace d’information qui leur permetde calculer leur consommation calorique et d’évaluer leur régime ali-mentaire par rapport aux recomman-dations nutritionnelles en vigueur.« Nous étions préparés à créer cette inter-face informatique d’envergure natio-nale par nos précédentes étudesépidémiologiques, explique Serge Hercberg. L’étude SU.VI.MAX, miseen place depuis 1994, pour évaluer l’effet de la consommation de vitami-

nes et minéraux antioxydants avaitdémarré modestement sur Minitel, maiselle nous avait permis de mettre aupoint les questionnaires de manière àcollecter suffisamment d’informationstout en guidant au mieux l’utilisateur eten lui demandant un effort minimum.L’utilisation d’Internet permet deréunir une masse impressionnante dedonnées sur les relations complexesentre la nutrition et la santé. Ellesdevraient permettre de préciser l’im-portance relative des facteurs nutri-tionnels dans plusieurs pathologiesayant des enjeux de santé publiquedans nos pays, telles que les cancers,mala dies cardiovasculaires, diabèteinsulinodépendant etc. Les chercheursont calculé qu’un échantillon de500 000 personnes suivies pendantcinq ans permettrait d’obtenir descorrélations fiables entre les facteursnutritionnels et la survenue de cer-taines maladies. ●

Pascale Mollier

(1) Ministère de la Santé, Institut national de préventionet d'éducation pour la santé (Inpes), Institut national de veille sanitaire (InVS), Université Paris13, Institutnational de la santé et de la recherche médicale(Inserm), Institut national de la recherche agronomique(Inra), Conservatoire national des arts et métiers(Cnam), Fondation pour la recherche médicale (FRM).

Aux côtés de sept partenaires (1), l’Inra soutient l’étude en ligne NutriNet-Santé. Elle vise à mieux connaîtreles comportements alimentaires des Français et leur incidence sur la santé, afin de préciser comment ciblerles recommandations nutritionnelles.

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Devenez Nutrinaute !

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La tomate,les défis du goûtLa tomate,les défis du goût

Comment retrouver le plaisir simple de manger des fruits et légumessavoureux ? Loin d’être triviale, cette question rejoint les objectifs du Programme National Nutrition Santé. Dans cette quête qui mène de la sensation à la consommation, la tomate tient un rôle à part. Il va bien

au-delà de son importance dans notre régime alimentaire. Pour la communautéscientifique internationale, elle est en effet devenue le modèle d’étude qui sert à comprendre les bases biologiques très complexes des caractères de qualité aussibien chez ses espèces cousines que pour tous les fruits charnus. Cette importancescientifique est reflétée par l’ampleur du dispositif pluridisciplinaire consacré par l’Inraà la qualité sensorielle de la tomate. Du génome de la plante à nos papilles gustativesen passant par les linéaires de la grande distribution, ce dossier donne un aperçu des nombreuses recherches qui visent à ramener du plaisir dans nos assiettes.

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L ’histoire de la tomate est celled’un succès. Elle est loin l’époque de son arrivée enEurope au XVIe siècle où la

tomate, encore parée d’une robe cou-leur or, était considérée comme unornement voire un aphrodisiaque unpeu magique. Elle pâtissait alors de laréputation sulfureuse de ses prochescousines de la famille des Solanacées :la mandragore ou la belladone. A pré-sent, la tomate est devenue le pre-mier fruit produit dans le monde et ledeuxième légume juste derrière lapomme de terre, autre membre émi-nent de la même famille. En France, la tomate se taille égale-ment la part du lion. En à peine unsiècle, elle est passée du statut dequasi-inconnue des assiettes au pre-

mier légume frais consommé dansl’hexagone avec 14 kg par personneet par an. Même si nous sommesencore loin des Grecs qui dévorentchaque année 56 kg de tomates fraî-ches, son importance dans notrerégime alimentaire n’est plus àdémontrer. Nous en consommonstellement qu’elle est devenue le pre-mier apport en vitamine C de notreorganisme (loin devant l’orange).Comme pour tout fruit et légume,son faible contenu calorique et sesnombreux micronutriments parti-cipent à une alimentation équilibréequi prévient l’obésité. Sa composi-tion originale en antioxydants laisseà penser qu’elle pourrait égalementavoir des propriétés protectricescontre les mala dies cardiovasculai-

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Cœur de bœuf ou cerise ? Croquante ou fondante ? Sucrée ou acide ? Vous l’aimez commentvotre tomate ? La question suscite des réponses aussi variées que tranchées. Elle illustre bienune des difficultés majeures de l’amélioration de la qualité sensorielle (ou organoleptique) desfruits et légumes : comprendre, en parallèle du fonctionnement de la plante, les perceptions etles attentes des consommateurs afin d’orienter les pistes de recherches.

res et peut-être contre certains can-cers (cf. encadré Lycocard).

Au détriment du goûtPeu à peu, elle a réussi à s’imposerdans notre quotidien et nous désironsmaintenant toute l’année celle qui estlongtemps restée la reine de l’été. Maiscette victoire a eu un prix. Pour satis-faire nos envies hors saison, il a falluadapter la production aux climatsmoins ensoleillés et aux jours pluscourts. La culture sous abri en hors-sol représente désormais 60 % desvolumes. Les Hollandais ont été despionniers en la matière. Autre solu-tion, faire venir les tomates de régionsplus lointaines au climat adapté. Cequi a entraîné de nouvelles contrain-tes en matière de fermeté des fruits.

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A l’écoute des papilles1

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Segmentation : une réponse adaptée aux enjeux ?

Contraintes encore renforcées par lesimpératifs de conservation de lagrande distribution. Les sélectionneursont trouvé la solution au début desannées 90 à la faveur d’une mutationgénétique naturelle qui ralentit lamaturation du fruit. C’est grâce à ellequ’ont été créées les variétés dites« long life » pouvant se conserver troissemaines, dont la fameuse « Daniela »qui a rapidement colonisé les étals.Or, ces tomates souffraient d’un péchéoriginel. Déjà peu favorable à l’ex-pression des arômes et à une bonnetexture, cette mutation inhibitrice de lamaturation a été introduite dans desvariétés aux qualités gustatives médio-cres. Résultat : fadeur d’une partiecroissante de la production et baissedu sentiment de naturalité due à laculture sous serre en hors-sol ont peuà peu dégradé l’image de la tomatedans la population. Phénomèneauquel s’est ajoutée la banalisationd’un produit présent toute l’année quine crée donc plus la même envie quelorsqu’il se faisait attendre huit mois.

Une bonne tomate c’est quoi ?Il faut donc redonner du plaisir à ladégustation des tomates ! Mais lanotion de plaisir est très complexe àcaractériser et c’est bien aux préfé-rences des consommateurs qu’il s’a-git de répondre.

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En France, la qualité organoleptiquede la tomate est scrutée depuis unedizaine d’années par le CTIFL (1).Depuis peu, elle l’est aussi au niveaueuropéen avec le projet EU-SOL, fortde 56 partenaires venant de quinzepays, qui s’intéresse aux deux Solana-cées vedettes : la tomate et la pommede terre. Son but est d’établir les pré-férences des consommateurs à l’échelleeuropéenne, de distinguer les caractè-res à améliorer et d’identifier leursbases génétiques et moléculaires.Mathilde Causse de l’unité Inra Géné-tique et amélioration des fruits et légu-mes (GAFL) dirige le module consacréaux bases biologiques de la qualité et àleurs perceptions par les consomma-teurs. « Pour la tomate, nous avonsréalisé une cartographie des préféren-ces dans trois pays, l’Italie, la Hollandeet la France. Il est apparu que la saveur,principalement le ratio sucre-acide, et latexture sont très importantes. D’autrepart, l’apparence influence aussi la satis-faction générale. Des résultats surpre-nants nous ont conduits à conclure qu’ily avait moins d’écarts de préférencesentre les pays qu’entre les classes deconsommateurs de ces mêmes pays »explique la chercheuse. En effet, qua-tre catégories de consommateurs seretrouvent dans chaque pays. Ainsi,on distingue les « gourmets », plusnombreux, qui aiment les tomates gus-

tatives et juteuses, les « tradition -nalistes », sensibles à la texture fon-dante et aux arômes des tomatescôtelées anciennes, les « classiques »qui prisent les tomates fermes, ron-des mais sucrées et enfin, les « indiffé-rents » qui n’ont pas d’avis marqué etont tendance à rejeter les nouveautés.

Les experts de la dégustationLa qualité organoleptique de la tomatefait référence à tous les sens qu’ellemet en éveil. En plus de l’aspect exté-rieur, elle est définie par les saveursperçues au niveau de la langue (acide,sucré, salé, amer), les arômes perçuspar voie rétronasale (citron, bonbon,tomate verte, pharmaceutique…) etla texture (peau croquante, fruit ferme,fondant, juteux…).Malgré des avancées sur les mécanis-mes de la perception du goût et de laqualité organoleptique en général, c’estencore son expression par l’hommelui-même qui reste le meilleur outilpour les évaluer. Depuis des annéesles chercheurs, les centres techniques etles sélectionneurs peaufinent les tech-niques de l’analyse sensorielle afind’objectiver les caractéristiques d’unproduit aussi bien qualitativement quequantitativement. La tâche n’est pasfacile. En effet, comme des sportifs dehaut niveau, les jurys experts chargés dedécrire un produit doivent s’entraîner

Afin de soutenir la demande globale de tomate, les producteurs et lesdistributeurs ont décidé de segmenter l’offre présente sur le marché. Il s’agitde proposer de nouvelles variétés qui soient facilement identifiables par leuraspect tout en répondant à des usages précis censés donner d’autresoccasions de consommation. C’est ainsi que sont apparues au milieu desannées 90 d’abord les tomates en grappe et les tomates cerise puis desvariétés anciennes remises au goût du jour comme la « Marmande » ou la« cœur de bœuf ». L’offre est aujourd’hui pléthorique en termes de taille, deforme et de couleur. Cette stratégie a-t-elle permis de stimuler la demande de tomate ? Alors que l’on estime à 60 % lenombre d’individus ayant un niveau de consommation de fruits et légumes inférieur aux recommandations des nutritionnistes,la question revêt un intérêt majeur en terme de santé publique. Afin d’y répondre, des chercheurs de l’UMR GREMAQ (1) ont examiné le comportement des consommateurs vis-à-vis desinnovations introduites sur le marché. En se basant sur des données couvrant la période 1990-2008, ils ont pu modéliserl’impact de l’apparition des tomates grappe et cerise sur les prix et les volumes consommés. Premier constat : les nouvellesvariétés n’ont pas dynamisé la demande globale. Au contraire, on assiste même à une baisse depuis 1996. Que s’est-ilpassé ? En fait, les tomates grappe, bénéficiant d’une image de plus grande naturalité, se sont simplement substituéesaux tomates rondes sans donner d’autres occasions de consommation. Les chercheurs parlent de cannibalisme entre deuxproduits dont les usages sont trop proches. Les tomates cerise, par contre, sont plus à même d’augmenter la demandecar elles se différencient par leur goût plus sucré et des utilisations ciblées comme le grignotage. Néanmoins, leur prixélevé les cantonnent au statut de produit de niche. Au final, la segmentation a surtout eu le mérite d’enrayer la baisse deschiffres d’affaires dans la filière en servant de support à des augmentations de prix. Elle a aussi permis de rendre laconsommation de tomates fraîches moins sensible aux baisses de prix d’autres produits, notamment les légumes transformés.

1. Groupe de recherche en économie mathématique et quantitative. Centre Inra de Toulouse.

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www.lycocard.com/www.eu-sol.net

LYCOCARD : COMMENT LA TOMATE NOUS PROTÈGE-T-ELLE ?

Les maladies cardiovasculaires et les cancers sont les premièrescauses de mortalité dans les pays développés. Or, de nombreusesétudes épidémiologiques font ressortir une relation inverse entrel’incidence de certaines de ces pathologies et la consommationd’antioxydants contenus dans les fruits et légumes, en particulierla tomate. Cependant, les mécanismes en question ne sont pasencore assez documentés pour améliorer les recommandationsnutritionnelles ou concevoir des aliments plus protecteurs. Le sujetest complexe et les nombreuses molécules à analyser nécessitentun gros effort de recherche. Depuis quatre ans, le projet européen Lycocard s’attache àcomprendre et quantifier les effets protecteurs du lycopène, lepigment qui donne sa couleur rouge intense à la tomate, contreles maladies cardiovasculaires. Regroupant quinze partenairesparmi lesquels des scientifiques de plusieurs disciplines, desindustriels transformateurs et une association de patients, ceconsortium développe l’approche globale qui a fait défaut jusqu’icipour comprendre les effets biologiques de ce puissant antioxydant.Deux unités de l’Inra y participent. L’UMR Nutrition lipidique etprévention des maladies métaboliques de Marseille réalise desétudes in vitro et in vivo sur l’activité biologique du lycopène ainsique des études cliniques. A Avignon, l’UMR Sécurité et qualité desproduits d’origine végétale (SQPOV) se focalise sur les propriétésphysico-chimiques de la molécule et de ses dérivés.Les objectifs du programme sont doubles. Au niveau fondamental,il s’agit de comprendre le métabolisme et les mécanismesmoléculaires impliqués dans les effets protecteurs du lycopène.Ces résultats donneront ensuite des applications finalisées. Untransfert de ces résultats vers les industriels permettra de produiredes aliments à la valeur santé améliorée tandis que les pouvoirspublics et les associations de patients accèderont à desrecommandations nutritionnelles plus précises et fondéesscientifiquement.D’ores et déjà, Lycocard a permis de nettes avancées. Ainsi, l’équipede Catherine Caris-Veyrat de l’unité SQPOV a pu synthétiser etpurifier de nombreux dérivés du lycopène qui diffèrent par leurstructure chimique. Ils ont ensuite été testés sur différents modèlesexpérimentaux afin d’établir une relation entre la structure desmolécules et leur activité antioxydante mais aussi leur capacité àmodifier l’expression des gènes de certains tissus. De son côté,l’équipe de Marseille, placée sous la direction de Patrick Borel, apermis de mieux comprendre la biodisponibilité du lycopène. Leschercheurs ont démontré qu’un transporteur intestinal intervenaitdans le transport jusqu’au sang des antioxydants. Par la suite ilsont observé un lien entre la concentration en antioxydant dans lesang et les variations du gène codant pour ces transporteurs. Celapourrait expliquer les différences de capacité d’absorption entreindividus et ouvrir la voie à des conseils nutritionnels plus ciblés.Par ailleurs, les effets de la transformation des tomates (sauces,conserves, plats cuisinés) sur les teneurs et la biodisponibilité dulycopène sont également analysés par des partenaires de Lycocard.La molécule est en effet plus facilement absorbée sous forme depurée ou de sauce que depuis une tomate fraîche. Une plateformeindustrielle de transfert de connaissance a vu le jour et déjà troisproduits aux qualités nutritionnelles améliorées sont en cours detest épidémiologique à Marseille.Les pistes de recherches à explorer sont encore nombreuses. Ainsi,en plus de son activité antioxydante, le lycopène a également deseffets sur la capacité des cellules à communiquer entre elles. Cequi pourrait être un autre mécanisme biologique important dansson rôle protecteur.

assidûment. La capacité à reconnaîtrecertains arômes ou saveurs ne s’im-provise pas. Par exemple, afin d’éva-luer l’aspect sucré, les experts dégustentdes solutions diluées plus ou moinssucrées et doivent les remettre dansl’ordre. Au vu du nombre de paramètres quientrent en jeu dans la description d’unproduit, on comprend que la techni queest longue et coûteuse. C’est pourquoi,les chercheurs tentent en parallèle demettre au point des outils d’analysephysico-chimique qui permettent deprédire les résultats d’une analyse sen-sorielle avec une bonne corrélation.Une fois les caractéristiques organo-leptiques décrites, il faut ensuite décou-vrir leur place dans les préférences desconsommateurs. C’est le rôle des testshédoniques. Les panels sont consti-tués de plusieurs centaines de consom-mateurs représentatifs. Ces derniersgoûtent plusieurs types de tomates etdonnent une note de satisfaction géné-rale sur une échelle de 1 à 10. Des étu-

des statistiques permettentensuite de développer une

« carte des préférences » quiva dévoiler des

classes deconsomma-

teurs adep-tes de telou telproduit.En ce quiconcerneles fruitset légu-

mes, il s’a-git là de la

base de futursprogrammes de

sélection qui pren-dront la qualité orga-

noleptique en compte.Pour les chercheurs et les sélection-neurs, l’existence de ces catégories estplutôt une bonne nouvelle car elle per-mettra de rendre économiquementpossible la construction d’idéotypesvariétaux à même de satisfaire le plusgrand nombre.

(1) Centre technique interprofessionnel des fruits etlégumes.

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Fruit ou légume ?Selon le botaniste, la tomatequi est l’organe de la plante

protégeant les graines est bienun fruit. Mais selon le

cuisinier, ce végétal peusucré est un légume.

Une bonne tomate ? Unsujet effroyablement compliqué ! Goût, forme,texture, teneur en vita-

mine C…Voilà quelques-uns des cri-tères qui doivent être pris en comptesimultanément par les chercheurspour définir de façon exhaustive laqualité du fruit de tomate. Ces critè-res résultent de nombreux processusbiologiques complexes, parfois anta-gonistes, qui dépendent eux-mêmesde variations génétiques (variétés) ouenvironnementales (conditions decultures, climat…). Ces processusinteragissent également entre eux et

évoluent au cours du développementdu fruit. Leur compréhension fine estlongtemps apparue comme un défihors de portée.Les progrès de la génomique à hautdébit ont permis de le relever. Lagénomique fonctionnelle a été larévolution attendue : pour chaquecellule ou tissu observé, les chercheursont désormais accès à l’ensemble desARN messagers effectivement trans-crits à partir du génome (le trans-criptome) ainsi qu’aux protéinestraduites (le protéome) mais aussiaux produits des réactions métabo-liques qui en résultent (le métabo-

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lome). Ces informations varient dansle temps en fonction de l’environne-ment de l’organisme. Il devient doncpossible d’identifier les fonctions bio-logiques des protéines, leur régula-tion et de suivre leur interaction toutau long du développement du fruit.

Une recherche nécessairement intégréeL’Inra a déployé, depuis une quin-zaine d’années, un important dispo-sitif de recherche interdisciplinairecapable de prendre en charge tous lesaspects de la qualité du fruit detomate. Les collaborations y sont

La science de la saveur2

Les amateurs de tomate ont de la chance. Leur fruit préféré a été choisi comme modèlepour étudier les bases biologiques de la qualité organoleptique et nutritionnelle des fruitscharnus. Deux caractères particulièrement difficiles à analyser impliquant le fonctionnementglobal de systèmes aussi complexes que la cellule, le fruit ou la plante, le tout placé sous l’influence du génome et de l’environnement. Heureusement, les scientifiquespossèdent à présent des outils puissants pour y parvenir.

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FRUIT DE TOMATEcoloré et observé sous loupe binoculaire. La taille et l'agencementdes cellules font partiedes éléments régulant la texture.

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R nombreuses : généticiens, physiolo-gistes, spécialistes des biopolymères,de la maturation du fruit ou de la chi-mie des antioxydants…Deux approches sont privilégiées. Lapremière consiste à décrire l’élabora-tion de la qualité dans le fruit au coursde son développement. Il s’agit demodéliser les flux d’eau et de carboneainsi que l’accumulation des sucreset des minéraux en fonction dugénome, de l’environnement et desconditions de culture. La deuxièmeapproche se concentre sur le déter-minisme génétique des différentescomposantes de la qualité (texture,forme, teneur en sucres…). Ces der-nières dépendent souvent d’un grandnombre de gènes et de plusieursrégions chromosomiques. Le but estde quantifier leur importance respec-tive dans la variation du caractère étu-dié. Grâce aux deux mille variétés detomates sauvages ou cultivées conser-vées par l’unité GAFL (1), les généti-ciens pourront ensuite explorer lavariabilité naturelle de l’espèce à larecherche d’allèles permettant d’améliorer la propriété en question. In fine, l’objectif est d’intégrer tou-tes ces données dans des modèles quipermettront de maîtriser la qualitéaussi bien par la sélection variétaleque par les pratiques culturales ou la

gestion post-récolte. Il s’agit d’unenouvelle démarche scientifique : labiologie intégrative.La mobilisation dépasse les frontières.Les recherches de régions chromoso-miques intéressantes se font à partir de

banques de données internationales.Le récent séquençage du génome de latomate qui implique un consortiumde plusieurs pays (voir encadré) ainsique le programme européen Eu-Soldédié à la qualité des Solanacées entémoignent également.Au niveau national aussi, la familledes chercheurs s’intéressant à la qua-lité de la tomate s’agrandit. Ces troisdernières années, de nombreux tra-vaux de l’Inra sur cette thématiqueont été réalisés dans le Cadre du pro-gramme ANR « Qualitomfil » qui fai-sait partie de l’appel à projet PNRA(2). Placé sous la direction deMathilde Causse de l’unité GAFL, il aintégré des représentants de tous lesacteurs de la filière et a permis d’ou-vrir le domaine de la qualité aux éco-nomistes. « C’est la première fois quedes généticiens dialoguaient avec deséconomistes », souligne la chercheuse« ce qui n’a pas été sans poser quelquesproblèmes de vocabulaire et d’inter-prétation au début ». Dans un premier temps, ce pro-gramme interdisciplinaire a apportéune meilleure connaissance du fonc-tionnement du marché de la tomateet des attentes des consommateursen terme de qualité sensorielle. Il aaussi permis d’identifier les verrousorganisationnels qui freinent la valo-risation de cette qualité dans la filière :méthodes de stockage qui pénalisentles arômes et la texture, manque de

A toutes les saucesL’intensité des efforts de recherche sur la tomate à l’échelleinternationale n’est pas seulement la conséquence de son fort intérêtéconomique. Quand la génomique fonctionnelle a permis des’intéresser de plus près à des caractères aussi complexes que laqualité des fruits charnus, c’est vers la tomate que les chercheursse sont tournés pour choisir leur modèle. Car elle a des atoutscertains. Tout d’abord, un passé glorieux qui avait déjà vu fleurir unegrande quantité d’études sur sa physiologie, son métabolisme ouencore sur sa maturation. Avant son séquençage complet, sa cartegénétique était déjà assez dense et nombre de ses gènes déjàséquencés. Elle bénéficie enfin d’une biologie très pratique : cyclesde développement assez courts avec plusieurs cultures possiblespar an et un génome assez petit et manipulable qui facilite les étudesfonctionnelles. Mais son caractère de fruit modèle ne s’arrête pas là. En tant quebaie, la tomate peut également apporter, par exemple, des élémentsde compréhension sur le fonctionnement du raisin. D’autre part, songénome est très proche d’autres Solanacées économiquementimportantes comme la pomme de terre, l’aubergine, le piment oule tabac. Elle est aussi génétiquement assez proche du café. Autantd’espèces pour lesquelles les gènes ou les régions chromosomiquesintéressantes chez la tomate pourraient être mises à profit.

PUCE À ADN.Elle a permis de

comparerl'expression des

gènes trancritsdans un fruit vert

(points verts) et unfruit mûr (points

rouges) etd'identifier ainsi un

gène intervenantdans la synthèse

du lycopène.

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répères ou de signes de qualité pourles consommateurs… Des avancéesscientifiques au niveau fondamentalouvrent également des perspectivespour l’amélioration variétale et laconception d’outils d’évaluation dela qualité à la fois rapides et peucoûteux. Au final, le programme Qua-litomfil constitue une étape supplé-mentaire pour répondre à lademande des consommateurs de pro-duits de qualité. Dans un contexteéconomique particulièrement diffi-cile, la filière pourrait aussi tirer ungrand profit d’une nouvelle segmen-tation basée sur le goût.

Des prototypes variétaux savoureuxLes recherches s’orientent aussi vers lacréation de nouvelles variétés plussavoureuses. Dès 2002, les chercheursdu GAFL d’Avignon avaient identifiéplusieurs QTL (régions chromoso-miques ayant un effet partiel sur uncaractère) de qualité chez une tomatecerise possédant un goût et des arô-mes remarquables. A l’aide de mar-queurs moléculaires, ils ont pu suivrela présence de ces régions au gré descroisements avec une variété à grosfruit et évaluer les caractéristiquesdes hybrides les plus intéressants. Ceprogramme de sélection assistée parmarqueurs a produit des fruits auxqualités organoleptiques améliorées.Malheureusement, ceux-ci présen-taient un trop petit calibre pour uneexploitation commerciale. Ils consti-tuent néanmoins des prototypes quiserviront de supports aux sélection-neurs pour des améliorations futures.Plus récemment, une collaborationentre chercheurs et sélectionneursprivés dans le cadre du programmeQualitomfil a permis de franchir uncap vers des variétés commercialisa-bles. Les partenaires ont ainsi visé descaractéristiques adaptées aux circuitscourts ou aux jardins d’amateurs :culture en pleine terre, en champ ousous abri, récolte à maturité, pas deconservation au froid. Dans ce cadre-là, des prototypes cumulant qualitésagronomiques (résistance aux mala -dies) et organoleptiques ont pu êtreobtenus. Les évaluations physico- chimiques ont démontré leursapports pour des critères nutrition-nels et sensoriels. Les analyses hédo-niques sont également sans appel.L’un des prototypes, développés parl’Inra, se place en tête des préféren-ces du panel de consommateurs etdevrait être proposé à l’inscription au

catalogue. Cette variété pourrait seretrouver dans nos assiettes d’iciquelques années.

Métabolites secondaires maisimportance de premier planLa vitamine C, les polyphénols, les fla-vonoïdes ou le lycopène… Les méta-bolites secondaires jouissent d’unegrande attention de la part des cher-cheurs. Ces molécules sont qualifiéesde secondaires, uniquement parcequ’elles ne font pas partie du méta-bolisme primaire vital de la plante :production des protéines, des lipides,des glucides ou des acides aminés. Elles

présentent un double intérêt. La planteles sécrète pour se défendre contre denombreux facteurs de stress (hydrique,lumineux, carence azotée, parasite…) ;elles interviennent donc dans la pro-tection des cultures. Elles présententaussi un intérêt nutritionnel majeurcar beaucoup de ces métabolitessecondaires ont des propriétés anti-oxydantes qui peuvent également pro-téger l’être humain. Au vu de son importance avérée pourla santé humaine, la vitamine C est laplus étudiée. Dans le cadre du pro-gramme dédié à la biologie intégra-tive AgroBI, le projet VTC fruit a

Votre laboratoire travaille beaucoup sur le développement précoce du fruit.Quelle est l’importance de cette étape dans la qualité ?Christophe Rothan : La phase qui précède la maturation est essentielle. Pour lecalibre des fruits par exemple. Il dépend à la fois du nombre de cellules, qui est fixé dansles premiers jours qui suivent la fécondation, et de leur taille qui n’évolue plus dès que lamaturation commence. Le goût et les arômes aussi sont très influencés par cette phasecar elle conditionne l’accumulation des sucres et des acides organiques mais aussi de certains précurseurs d’arômes. Nous travaillons sur les mécanismes biochimiques et moléculaires qui régissent ces phénomènes. Parallèlement, nous identifions aussi des gènes qui interviennent dans la transition fleur-fruit et dans la croissance du fruit,très liée à la division cellulaire. La tomate a la capacité de faire grossir ses cellules en continuant à y synthétiser de l’ADN tout en bloquant leur division. Certaines d’entre elles peuvent avoir des milliers de fois leur taille initiale.

Comment est venue l’idée d’un rapprochement avec l’université japonaise ?C. R. : Notre laboratoire possède de nombreux points communs avec le « GeneResearch Center » de l’université de Tsukuba. Nous avons en particulier développéséparément deux collections originales de mutants de la même variété de tomatedestinées à une activité de TILLING (Targeting Induced Local Lesions IN Genomes). Il s’agit d’une puissante méthode de génétique inverse, donc du gène vers le phénotype,que nous avons adaptée à la tomate en partenariat avec Abdelhafid Bendahmane de l’URGV (1) d’Evry. Elle permet l’analyse fonctionnelle systématique des grandesquantités de gènes candidats fournies par la génomique à haut débit. La techniquerepose sur l’observation des effets d’une variabilité génétique artificielle introduite dansla plante. Plus cette variabilité est grande plus la méthode est efficace, c’est pourquoinous avons mis nos deux collections en commun. D’autre part, notre unité a été àl’origine de la création à Bordeaux de plusieurs plateformes de génomique fonctionnellecommune avec le CNRS et l’université. Nos collègues japonais ont apprécié de pouvoirtrouver tous ces outils de pointe regroupés sur le site de l’Inra. Nous accueillons déjà unchercheur japonais au sein de notre équipe, une thèse en co-tutelle est en cours etplusieurs vont commencer. L’initiative se poursuit en partenariat étroit avec l’université de Bordeaux , qui met en place des échanges de masters et travaille à la mise en placed’un master commun dans le domaine végétal avec Tsukuba

1. Unité de recherche en génomique végétale. Evry

www.bordeaux.inra.fr/umr619

Christophe Rothan, directeur de recherche à l’UMR biologie du fruit àBordeaux. Spécialiste de la génomique fonctionnelledu développement du fruit, il est à l’origine de lacréation du laboratoire commun entre l’université de Tsukuba (Japon) et l’Inra.

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pement afin de pénaliser le moins pos-sible les rendements ». Ces résultatspourraient avoir des applications à lafois en matière de production inté-grée des cultures et de fruits à la valeursanté améliorée.Pour décrire les effets de l’environ-nement sur la qualité de la tomate,les chercheurs de l’unité PSH ont

regroupé de nombreuses unités (BF(3), GAFL, SQPOV (4), BIA (5)). Ilsont pu confirmer le rôle majeur d’uneenzyme dans la biosynthèse de la vita-mine C. La teneur en vitamine C estapparue très liée à la résistance aufroid, elle-même associée à la texturedu fruit. Le « stress froid » entraîne eneffet une perte de la fermeté du fruit.Or la vitamine C, en influant sur lanature des molécules qui forment lesparois des cellules du fruit, permetde limiter ce phénomène. En plus del’aspect nutritionnel, le contrôle géné-tique de cette vitamine devient doncaussi un enjeu pour la filière quiconserve souvent les fruits à des tem-pératures susceptibles d’affecter leurfermeté.

Cultiver la qualitéLes unités LAE (6) et PSH (7) tra-vaillent aussi sur les polyphénols,connus pour leurs effets bénéfiquessur la santé. Les chercheurs ont analyséla production de ces molécules dansdes conditions de carence azotée. « Nosrésultats sur les parties végétativesconduisent à penser que, pour aug-menter la teneur en polyphénols, le stressazoté peut conduire aux mêmes résultatsque l’ingénierie métabolique par trans-génèse», explique Frédéric Burgaud,directeur du LAE. « A l’avenir nouspensons appliquer des carences brèveset ciblées à certains stades de dévelop-

effectué des expériences de conduitesde cultures sous serre en hors-soldans des conditions très précises etpour des génotypes finement décritsau niveau moléculaire. Ils ont ainsipu développer un modèle de crois-sance du fruit qui décrit les interac-tions génotype-environnement pourde nombreux critères dont certains

Séquençage du génome de la tomate : l’Inra a joué un rôle crucial

Après quatre années d’effort, le consortium international Solanaceae Genomic Network (SGN), quiregroupe des équipes de dix pays, a dévoilé la première version de la séquence complète du génomede la tomate le 12 Janvier 2010. Cette séquence va augmenter l’efficacité de la génomique fonctionnelle.D’autre part, elle ouvre de nouvelles perspectives pour comprendre les bases génétiques de la diversitémorphologique et physiologique des plantes ainsi que leurs mécanismes évolutifs.Parmi les pays impliqués dans le projet, la France a eu la responsabilité du septième des douze chromosomesde la tomate. Le travail a été piloté par Mondher Bouzayen du laboratoire génomique et biotechnologiesdes fruits de Toulouse en collaboration avec le Centre national de ressources génomiques végétales(CNRGV). En plus de sa contribution au séquençage, l’équipe française a apporté de nouveaux outils etméthodologies aux différents partenaires.En effet, des technologies de séquençage nouvelle génération, beaucoup plus rapides, sont apparuesen cours de projet. Elles imposent de subdiviser le génome en très petits sous-ensembles. Le défi résidaitdonc dans l’obtention de méthodes d’assemblage et de finitions capables de fournir une séquence finalede haute qualité. Ces méthodes ont largement bénéficié des mises au point et des validations de laplateforme bioinformatique de l’Inra de Toulouse. Il s’agit de la première réussite d’assemblage d’ungénome complexe obtenu par séquençage nouvelle génération.De son côté, le CNRGV a enrichi ses collections de plusieurs banques de fragments génomiques. Des poolstridimensionnels d’ADN ont notamment été produits afin d’obtenir un criblage plus rapide. La diffusion decette ressource unique pour la tomate auprès des partenaires du SGN a permis au centre français derenforcer sa visibilité au sein de la communauté scientifique internationale travaillant sur les Solanacées.

http://solgenomics.net - http://gbf.ensat.fr - http://cnrgv.toulouse.inra.fr/fr

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CULTURE DE TOMATES TRANSGÉNIQUES en milieu confiné. Ces plants altérésà des fins de recherche ont permis de découvrir un lien entre la résistance des fruits au froid et le taux de vitamine C.

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sont liés à la qualité : composition ensucre soluble, taille des fruits, teneuren matières sèches. Ce modèle permettra, à l’avenir, demieux cibler les essais de recherches etles expérimentations appliquées. Cesdernières ont d’ailleurs fait l’objetd’une deuxième approche à traversdes essais représentatifs des condi-tions de cultures retrouvées dans lesexploitations agricoles. Plusieursparamètres ont permis de modulerles qualités organoleptiques et nutri-tionnelles du fruit. Ainsi, l’effeuillagedes parties basses de la plante aug-mente le rayonnement lumineuxintercepté par le fruit, ce qui a pourconséquence d’accélérer la matura-tion et d’augmenter la teneur en anti-oxydants. Une plus faible densité deplantation ou une charge en fruitréduite permettent d’obtenir desfruits plus sucrés et riches en vita-mine C. Toutefois, ces améliorationsse font au prix d’un rendement infé-rieur. Cet antagonisme entre rende-ment et qualité se retrouve égalementlorsque l’on agit sur l’irrigation de laplante. Des solutions nutritives à fortesalinité conduisent ainsi à augmenterla teneur en sucres et en vitamine Cmais elles réduisent fortement la tailledes fruits. L’effet étant très différentsuivant les variétés étudiées, l’impactde ce stress salin a mis en lumièrel’importance des interactionsgénotype -environnement.

Bonnes ou rentables ?Au-delà des pratiques culturales, l’effet « saison » a été égalementquantifié en caractérisant, à conduiteégale, la qualité des fruits à deuxpériodes de récoltes différentes. Lesfruits apparaissent plus sucrés en étéqu’en hiver. L’effet est plus contrastépour la teneur en antioxydants. Alorsque la teneur en vitamine C aug-mente en été, le taux de lycopène est,lui, plus faible. Des problèmes decoloration peuvent même apparaîtreen cas de fortes températures.Tous ces résultats jettent les basestechniques du nécessaire compromisentre rendement et qualités gustativesou nutritionnelles. Ils permettent, parexemple, d’envisager une gestion dif-férentielle suivant la saison de récolte.Néanmoins, l’amélioration variétaleet l’optimisation des conduites decultures ne constituent qu’une pre-mière étape dans la recherche de cecompromis. La capacité de la filière àvaloriser les critères de qualité dansses pratiques commerciales et logis-

tiques sera aussi déterminante. C’estpourquoi les recherches de l’Inravisent également à donner aux dif-férents acteurs des outils efficacespour relever le défi de la satisfactiondes consommateurs.

1. Génétique et amélioration des fruits et légumes, Inra Avignon.2. Programme national de recherche en alimentation et nutritionhumaine.3. Biologie du fruit, Inra Bordeaux.4. Sécurité et qualité des produits d’origine végétale, Inra Avignon.5. Biopolymères, interactions et assemblages, Inra Nantes.6. Laboratoire agronomie et environnement, Inra Nancy.7. Plantes et systèmes horticoles, Inra Avignon.

PALISSAGE DES PLANTS DE TOMATES. Les techniques culturales permettent d'améliorer la saveur des fruits.

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Filières : le prix de la qualité 3

A u fil des ans, la productionmaraîchère s’est structuréepour fournir des tomatesadaptées aux circuits longs,

comportant deux intermédiaires ouplus (centrale d’achat, semi-grossiste)entre le producteur et le consom -mateur. Ces circuits atteignent parfoisdes dimensions internationales, trèssouvent européennes. Les tomatessont produites pour les supermar-chés, « taillées pour résister à laroute », mais elles y ont peu à peulaissé leur goût. Parallèlement, onassiste à une timide percée de la pro-duction de tomates pour les circuits

courts (un intermédiaire au maxi-mum entre le producteur et leconsommateur) qui aspire entre autres à restituer leur goût.

Circuits longs, courts en bouchePartant de l’hypothèse qu’unedemande, encore latente, pour destomates « qui ont du goût » existe chezdes consommateurs prêts à y mettre leprix, une partie du programme Quali -TomFil a étudié comment la qualitéorganoleptique est prise en comptedans l’offre proposée au consom -mateur et comment l’améliorer.

Cette étude qualitative a été menéeauprès de tous les acteurs de la filière.Premier constat, la qualité organo-leptique n’est pas perçue de la mêmemanière selon que l’on est sélection-neur, acheteur (distributeur ou gros-siste) ou consommateur. Les premiersla réduisent à la qualité commerciale(couleur, aspect, fermeté) réglemen-tée (2) et qui fait consensus. Seuls lesconsommateurs, en bout de chaîne,s’intéressent à la qualité gustative. Des entretiens confirment qu’auniveau de la production, la qualitégustative n’est jamais prise en comptepour rémunérer les producteurs.

Dans un contexte économique morose, la recherche explore les outils à apporter aux filières (1) longues et courtes pour que le goût devienne une plus-value.

© William Beaucardet

Chez le distributeur, le manque degoût ne peut être un motif de refusde la marchandise. Ces étapes clés frei-nent le reste de la filière pour trouverdes adaptations qui garantiraient unemeilleure qualité gustative.En gardant les variétés actuelles, plu-sieurs points clés dans la logistiqueexistante pourraient être amélioréspour préserver la qualité des tomates.Par exemple, en compartimentantl’espace des frigos et des entrepôts descentrales d’achat. Actuellement, toma-tes et laitues sont conservées ensembleà la température de conservation dela deuxième (8°C). Or, après récolte, lestomates conservées à moins de 12°Cdeviennent farineuses, moins sucréeset perdent 20 à 30 % de leur potentielen vitamine C. « La logistique a uneimportance cruciale, note Jean-ClaudeMontigaud, retraité de l’Inra qui a tra-vaillé cette question. Pour améliorer laqualité des produits, les acteurs de l’avalde la filière se démènent pour écono-miser les kilomètres à parcourir etréduire les émissions de CO2 : plates-formes de groupage et d’éclatement pouroptimiser le chargement sur les camions,contrôle des températures, logiciels per-mettant de gérer les produits du point de

départ au point d’arrivée, etc. Parailleurs, le transport maritime parcontainers se développe. Port- Vendres(3) connaît déjà une forte activité d’im-portation de melons et de tomates enprovenance du Maroc. » En magasin, laqualité organoleptique des tomatesbaisse quand la durée de conservations’allonge et que les manipulations semultiplient. Favoriser les petits condi-tionnements permet de renouvelerplus fréquemment les stocks et dimi-nue le temps de stockage en rayon.

Pour un Label Rouge « tomate »Pour le consommateur, l’aspect visuelreste le principal indicateur pour jau-ger de la qualité de la tomate. Com-ment rendre pertinente unesignalisation du goût ? Les chercheursmultiplient les propositions : condi-tionnement et emballage, campagnede sensibilisation aux variétés gusta-tives, création de logo, recourt à unsigne officiel de qualité comme leLabel Rouge (4) ou à une marquecommune. Ce qui implique à toutesles étapes de la filière de s’entendresur les critères gustatifs minimumsdes tomates comme l’ont fait les filiè-

res pomme, poire ou melon. Cela per-mettra de limiter les différences dequalité gustative d’un groupement deproducteurs à l’autre et de rassurer leconsommateur. Une telle démarche adéjà été initiée pour la charte qualité« Tomates de France » mise au pointpar l’Association d’organisations deproducteurs nationale « Tomates etconcombres de France ». Aujourd’huiprès de 70 % de la production fran-çaise est produite conformément à cesrègles (5) malheureusement encoreincomplètes du point de vue du goût.« La filière devra trouver les moyensorganisationnels de gérer ce bien collec-tif qu’est la qualité gustative » observel’économiste Emmanuel Raynaud (6),spécialiste de la gouvernance des filiè-res agroalimentaires à l’Inra.

Le plus court chemin vers la qualitéUn circuit court compte au maximumun intermédiaire entre le producteuret les consommateurs. Il se développepeu à peu : 10 % des légumes sont ven-dus selon ce mode de distribution et43 % des exploitations légumières fran-çaises sont concernées. Pour certaines,les circuits courts constituent une op-portunité intéressante en s’affranchis-sant des marges pratiquées par lesintermédiaires des circuits longs (prèsde 51 % du prix final du produit) etdes frais de transport (près de 7 %).Dans ce cas, les tomates bénéficientd’une image très positive. Leurs qua-lités attendues, d’après une étude del’unité expérimentale Inra d’Alénya- Roussillon, combinent à la fois descritères liés au produit (aspect, fraî-cheur, nutrition, sanitaire et saveur)mais aussi une dimension sociale(contact avec le producteur, éthiquedu mode de production) et environ-nementale. Selon la méthode d’analysedu cycle de vie, l’impact sur l’environ -nement d’une tomate produite en cir-cuit court, en pleine terre et en saison,est deux à cinq fois moindre que celled’une tomate cultivée toute l’année,en hors-sol, sous serre chauffée.Les produits en vente directe sontissus d’exploitations de petite taille(4 ha), avec rotation de légumes desaison en production en sol, nonchauffée, assez extensive, où les pro-ducteurs sont moins souvent re-groupés en organisation de produc-teurs. En moyenne, dix-neuf espècessont produites. Une diversificationqui exige des compétences techniquespoussées (opérations manuelles nom-breuses, savoir-faire approfondis…)

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« On méconnaît les exploitations tournées vers la vente directe,explique Yuna Chiffoleau, sociologue de l’Inra*. Partant de ce constat,nous avons enquêté et dressé une typologie en cinq trajectoiresde producteurs en circuits courts :- les pragmatiques, qui combinent circuits longs et circuits courtsdans une optique de rentabilité. Adhérant à des organisations deproduction, ils sont autorisés à valoriser 25 % de leur productionen vente directe ;- les innovateurs. Les difficultés en circuits longs les ont poussésà aller vers les circuits courts. Leurs cultures sont très diversifiées(plus de 20 sur l’année) et valorisées à travers des activitéscomplémentaires (transformation, agritourisme, actionspédagogiques…) ;- les hédonistes efficaces cherchent à allier rentabilité et qualité devie. Ils prônent des pratiques culturelles naturelles ou mêmebiologiques et pratiquent une diversification moyenne ;- les spécialistes engagés. Souvent pionniers de la vente directe etpar panier, leurs systèmes de culture sont extensifs, souvent enagriculture biologique ou en très bas intrants, la surface utiliséede petite taille (4 ha), les cultures très diversifiées (plus de 10 parsaison) ;- les idéalistes, veulent un « retour à la terre » mais ne sont pastrès intéressés par l’activité de commercialisation.Les données rassemblées ont permis de mieux comprendre lefonctionnement des exploitations ainsi que les pratiquescommerciales, les motivations et les réseaux des exploitants. »

* Laboratoire « Innovation et développement dans l’agriculture et l’agroalimentaire » (Inra, Cirad et SupAgroMontpellier)

Qui produit en circuit court ?

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sant sur diverses techniques : rotationdes cultures, solarisation, apport dematière organique au sol pour tuerles micro- organismes pathogènes. ●

+d’infosOweb :Dossier :www.inra.fr/la_science_et_vous/tomatequiz : www.inra.fr/quiz_tomate

Oréférences :- Produire des tomates pour des circuitscourts, vers de nouveaux critèresd’évaluation variétale, Frédérique Bressoud,FaçSADe, Inra-SAD, n°2009/29.- Le temps de Syal, techniques, vivres etterritoires, coordination éditoriale de JoséMuchnik, Christine de Sainte-Marie, éditionsQuae, janvier 2010.- Les Cahiers de l’Observatoire Coxinel :http://psdr-coxinel.fr/spip.php- Mesure des changements deconsommation à la suite d’une segmentationde l’offre : l’exemple de la tomate fraîche.D.Hassan, M. Monier-Dilhan, Revued’Etudes en Agriculture et Environnement,90 (3), 309-326.- Les maladies de la tomate - Identifier,connaître, maîtriser. Dominique Blancard avecHenri Laterrot, Georges Marchoux, ThierryCandresse, éditions Quae, décembre 2009.

tout en complexifiant l’organisationdes exploitations (exigeantes en main-d’œuvre, planification des récoltes,etc). Les producteurs récoltent no-tamment à maturité (une tomatecueillie plus tôt sera plus fade et moinsriche en vitamine C, carotène et lyco -pène) et limitent le stockage en frigo.La qualité gustative peut justifier desprix plus élevés, ce qui permet de va-loriser une production autrement quepar son seul rendement.

Des variétés adaptéesVendre des tomates avec du goût àprix accessible nécessite d’améliorerla production, ce qui reste difficile enl’absence de références agronomiquessur les variétés potentiel lement in-téressantes. Beaucoup de producteursse sont en effet tournés vers des va-riétés anciennes, manquant de fer-meté mais réputées gustatives, par-fois consommées dans la premièremoitié du XXe siècle et dont les ca-ractéristiques sont peu connues. « Onsait aussi que, selon le mode de culture,la variété n’exprimera pas son poten-tiel gustatif de la même façon. Il estdonc nécessaire d’avancer dans laconnaissance de ces interactions, ex-plique Frédérique Bressoud, agro-nome de l’Inra à Alénya. Son unité aainsi comparé 43 variétés anciennesou hybrides plus récentes et évaluéleur comportement agronomique(rendement, défauts apparents, éche-lonnement des récoltes, sensibilitéaux maladies, etc) et leur qualité gus-tative dans différentes conditions derestrictions d’intrants (eau, azote).Résultat : la qualité s’amé liore avec labaisse des rendements (de 15 à 45 %).Cette relation s’exprime cependantde manière contrastée d’une variétéà l’autre. Ainsi, certaines tomates an-ciennes réputées peu productives peu-vent produire plus que des hybrides.A l’inverse, selon les conditions de culture, certaines d’entre elles ne sontpas meilleures que les hybrides lesplus goûteux.L’équipe d’Alénya travaille aussi surles modes de conduite à définir pourobtenir un rendement intéressant, endéterminant les rotations de culturesles plus appropriées aux différentessituations pédo-climatiques et enfonction des risques de maladie. Carl’apparition de maladies liées au sol(corky root, fusariose... ) est favoriséepar la répétition des mêmes culturessur les parcelles. Ces travaux s’ins-crivent dans un programme de luttecontre ces mala dies telluriques, repo-

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(1) La filière regroupe les activités imbriquées et liéespar l’appartenance à un même produit, dont la finalitéconsiste à satisfaire le consommateur.(2) Par les normes européennes de commercialisation.(3) Dans les Pyrénées-Orientales à 30 km de Perpignan.(4) Attribué par l’Etat, ce label agricole atteste de laqualité supérieure d’un produit alimentaire.(5) Les règles incluent la protection biologique intégréede cultures ; la cueillette à maturité ; des conditions detransport à une température comprise entre 12 et 18°C ;un écoulement de la marchandise de 48 h entre lacueillette et le point de vente ; des contrôles qualité lorsdu tri et du conditionnement.(6) Du laboratoire Sciences pour l'action et ledéveloppement : activités, produits, territoires, SADAPT(Inra et AgroParisTech).

© Inra / Christophe Maître

Dossier rédigé par GéraudChabriat et Magali SarazinResponsable scientifique :Mathilde Causse (Inra, Avignon)

Inauguré en mars 2009, le pôlede recherche en Toxicologie ali-mentaire (Toxalim), installé surle site Inra de St Martin du

Touch à Toulouse, propose des outilset des modèles d’investigation ori-ginaux pour évaluer les risques decontaminations chimiques dans l’alimentation animale ou humaine.Les équipes du pôle savent analyserles effets des faibles doses, les mélan-ges de plusieurs contaminants, et leseffets à long terme. Toxalim se placeainsi dans des conditions d’exposi-tion les plus proches de la réalité,

variété des champs disciplinaires étudiés : physiologie, nutrition, bio-chimie, chimie, immunologie,mathématiques, biologie cellulaireet moléculaire. Pour développer sa visibilité inter na -tionale, l’unité mise aujourd’hui surle renforcement de ses compétencesen biostatistique et en bio informa -tique, nécessaire au dévelop pementdes plateformes techno lo giques et desinvestigations biologiques à hautdébit. Ces outils et méthodologiesvisent à caractériser l’exposition del’homme aux contaminants alimen-

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Toxalim, des poisons au menu des chercheurs

sans oublier de prendre en compteles populations à risques et la périodepérinatale comme une fenêtre d’ex-position critique.Ce pôle national, installé sur 6 500 m²de locaux, est issu de la fusion de qua-tre unités de recherche Inra officia -lisée au 1er janvier 2011, soit dixéquipes aux compétences variées. Lepôle rassemble également des plateaux techniques en toxicologieanalytique - tels que Axiom - entranscriptomique, en imagerie cellu-laire, ainsi que des animaleries.Toxalim doit sa performance à la

unpôle

O À TOULOUSE

LE 20 MARS 2009,Marion Guillou,

présidente de l’Inra,a inauguré sur le

site de St Martin duTouch à Toulouse, le

pôle de rechercheen Toxicologiealimentaire en

présence de Jean-Claude Blanchou,

président de lacommission

agriculture etagroalimentaire duConseil régional et

Dominique Bur,Préfet de la Région.

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taires, leurs effets sur les fonctionsphysiologiques, et leurs mécanismesd’action aux niveaux moléculaire etcellulaire. Les pathologies plus parti-culièrement ciblées sont des maladiesmétaboliques chroniques comme lediabète, l'obésité ou le cancer.A la croisée des départements ali-mentation humaine et santé animalede l’Inra, Toxalim travaille avec l’Ecolenationale vétérinaire de Toulouse, l’Ecole d’ingénieurs de Purpan, l’Inserm et l’Université Paul-Sabatier.Son partenariat se poursuit aujour-d’hui avec les pôles de compétitivité,Agrimip Innovation, Cancer-bio-santé et le consortium PA3S (Ali-ment, Sécurité Sanitaire et Santé).Déjà reconnu au niveau français, lepôle développe ses perspectives inter-nationales, d’une part en ouvrant sesportes aux réseaux européens de for-mation étudiante, d’autre part en tis-sant collaborations et jumelages avecdes laboratoires et des instituts homo-logues dans toute l’Europe.

Une approche innovante de l’impact des pesticides sur la santé En partant du constat que la plupartdes aliments sont contaminés par desrésidus de pesticides, Laurence Gamet-Payrastre, coordinatrice du projetExpoMatPest financé par l’ANR,

TOXIQUES DANSLES PRÉS.

Toxalim étudie leurimpact sur la santé.

Un technicien entenue traite auxpesticides une

parcelle de test.

LA SOURISCOMME MODÈLE.

Laurence Gamet-Payrastre étudie

chez les rongeursles conséquences

d’une expositionmaternelle aux

pesticides.

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cherche à mettre en évidence l’impactéventuel d’une exposition maternelleà un mélange de pesticides à faiblesdoses sur la santé des enfants. En effet,le développement embryonnaire pour-rait être sensible à des facteursenviron nementaux, dont les conta-minants alimentaires.« Je me pose la question de savoir com-ment le corps réagit à l’arrivée de plu-sieurs contaminants à la fois etcomment la cellule peut s’organiser pourse protéger », explique la chercheuse. L’originalité de son approche consisteà considérer les pesticides non commeune entité isolée, comme c’est le casdans les évaluations toxicologiquesclassiques, mais comme pouvant pro-voquer une réponse cellulaire parfoisdifférente de celle attendue par la som -mation des effets de chacune desmolécules. Laurence Gamet- Payrastrea observé chez la souris des perturba-tions de certaines fonctions physiolo-giques des petits lorsque la mère estexposée à des mélanges de pesticidespendant la gestation et la lactation.Les souriceaux présentent aprèssevrage une modification des capaci-tés de la moelle osseuse à fabriquerles lignées sanguines, par exemple uneaugmentation de la production delymphocytes et de macrophages. Deplus, pour ceux qui sont encore expo-sés après le sevrage, la perturbationest plus importante et aboutit parfois

à une migration de cellules souchesvers le sang. « L’organisme se retrouvedans un état, qui, sans être obligatoi-rement pathologique, n’est pas consi-déré comme normal » conclut lachercheuse. Les résultats finaux de l’étude seront publiés cette année.

Résonance magnétiquecontre bisphénolLa plateforme analytique Axiom (Ana-lyse de Xénobiotiques, IdentificatiOnMétabolisme) joue un rôle essentieldans l’étude des perturbations méta-boliques et endocriniennes liées auxcontaminants alimentaires. Dirigée parLaurent Debrauwer, cette plateformeest intégrée à la plateforme de Méta -bolomique et Fluxomique de Tou-louse. Elle fédère les moyens de cinqunités de recherche toulousaines dontToxalim. La plateforme est aujourd’huidevenue un outil incontournable pourla communauté scientifique locale,nationale et européenne.Axiom a contribué à l’obtention derésultats remarquables en établissantles schémas métaboliques de plusieurscontaminants : un fongicide, la vin-chlozoline, utilisé en production frui-tière, un phyto-estrogène, la génistéine,présente dans le soja et ses dérivés etun contaminant alimentaire, le bisphé-nol A, présent dans les récipients enplastique de type polycarbonate (1). Ces résultats ont été obtenus grâce au

développement de techniques analy-tiques telles que la résonance magnétique nucléaire ou la spectro-métrie de masse à haute résolution,et de techniques de séparation et depuri fication. Ces méthodologies per-mettent de caractériser les macromo-lécules, protéines ou ADN, qui ont étémodifiées par des perturbateurs endo-criniens et qui servent de marqueursprécoces d’exposition. Elles permet-tent aussi de quantifier des résidusprésents à l’état de traces ou d’analyserdes matrices biologiques complexes(urine, plasma) pour déceler des per-turbations subtiles du métabolisme. Le conseil, l’expertise, les analyses, lesprestations sur demandes, la mise àdisposition d’équipements, et la for-mation sont autant de services pro-posés par la plateforme. Ce qui lui avalu en 2009 la labellisation IBiSA(Infra structures Biologie Santé etAgronomie), reconnaissance nationaleoctroyée par le réseau des systèmes derecherche en sciences de la vie. ●

David CharamelReportage photo : © Gilles Cattiau

(1) Pour plus de précision, voir l’article d’Inra magazinen°10, page 11.

+d’infosOcontact scientifique :[email protected] communication de l’Inra Toulouse : [email protected]

LA RÉSONANCE MAGNÉTIQUE NUCLÉAIRE permet de caractériser les résidus de contaminants dans des extraits cellulaires.◗

SOURCESD’IONISATION en spectrométrie de masse utiliséepour l'étude des effetsdu bisphenol A.

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Des matériels plus adaptésRécolteuse spécialisée pour micro-parcelles de céréales, avec un prélèvement embarqué d’échantillons. Dans l’habitacle, un technicien conduit pendant que l’autre récolte des lots de grains en toute sécurité. Avant l’achat de la machine, il était à pied, se tenantplusieurs heures dans le bruit et la poussière, en positioninconfortable et risquant l’accident.

Un travail postémoins péniblePrélèvements de laitpour analyses dansune salle de traite. Une fosse a étéimaginée dès laconception de l’atelierpour que l’agent soit en position debout,plus confortable poureffectuer des gestesrépétitifs. Deux fois parjour, il va soutirer 150échantillons de lait en une heure, lorsquele point de collecte surle manège passedevant lui.

L’accident de travailne fait pas partie du métier

Une démarche innovante a été déployée par l’Inra pour mieux prévenir et maîtriser les risquesprofessionnels dans ses installations expérimentales. En 2005, de bons résultats intermédiairesont encouragé la poursuite et le renforcement de la méthode sur le long terme. Une nouvelleétape se dessine aujourd’hui, avec un tour de France des centres pour pérenniser et étendre le dispositif de prévention.

L es installations expérimenta-les de l’Inra cumulent, quel-quefois sur un même lieu, desrisques aussi divers que ceux

que l’on peut trouver dans l’atelierd’un artisan, le hangar d’une PME,un laboratoire de recherche ou uneexploitation agricole. Aux accidentsde la vie ordinaire, tels que des chutesou des malaises, vont s’ajouter desrisques dépendant de la nature du tra-vail effectué sur chaque site. Com-ment tendre vers le « zéro accident » ?Au milieu des années 90, une unitéexpérimentale d’élevage, située àBourges et support de recherches engénétique animale, initie la prise deconscience. Un diagnostic met en évi-dence les raisons des nombreux acci-dents et des absences pour mala dies.Le constat est sévère mais partagé partous, un plan d’action est mis enœuvre pour y remédier. En trois ans,il aboutira à une réduction sensibledu nombre des accidents et de leurgravité, entraînant la baisse des deuxtiers du nombre de jours d’absence.

Développer l’attitude « prévention »Ces premiers résultats joueront le rôlede catalyseur pour conduire uneréflexion globale sur la sécurité et lasanté des personnels dans l’ensem-ble des installations expérimentales.Une méthode participative émerge :elle vise à améliorer les comporte-ments et à déployer une culture deprévention chez l’acteur de terraincomme aux différents niveaux del’encadrement. L’animateur de cettedémarche collective menée depuis2001, Michel Maquère, est un ingé-nieur qui a travaillé dans plusieursunités d’élevage puis de culture. Après l’action significative mais trèsponctuelle de Bourges, deux vaguessuccessives de projets se dérouleront :de 2002 à 2005, douze collectifsconcerneront 300 personnes, puisquinze nouveaux sites avec 350 per- 2

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sonnes pour la période 2006-2009. Un suivi statistique a été réalisé depuisle début de l’opération sur une popu-lation de 300 agents. De 2001 à 2009,le nombre d’accidents a diminué de33 % et leur taux de gravité de 80 %.En conséquence, dès 2003, lamoyenne annuelle de jours d’arrêt detravail passe à 200, alors qu’elle était à1 200 au début de l’étude. Et ce chif-fre semble stabilisé sur le long terme.

Les critères de réussiteQuatre points sont essentiels dans lesuccès de cette opération et pour sapérennité : la présence active de la hié-rarchie, l’adhésion au projet de l’en-semble des agents d’un site, l’inter-vention d’une personne extérieureet l’élaboration d’un plan d’actionpartagé.Pour l’investissement de la hiérarchie,il s’agit tout autant de l’implicationdes directeurs d’unités que de celle,plus proche, des responsables directsdes agents. L’effet d’entraînement estnécessaire pour réussir le projet desite. Les centres et les départementsde recherche favorisent cette actionde management en renforçant la lé-gitimité des encadrants. Les profes-sionnels ou les réseaux locaux orga-nisent et amplifient les actions :délégués prévention en centres, comités « hygiène et sécurité », for-mation permanente…Les collectifs étudiés ont rassemblé dehuit à quarante-six personnes. Pourchacune d’entre elles, travailler sur sasécurité et ses conditions de travail estun objectif clair. Le traduire en pro-jets précis apparaît plus compliqué :chaque agent, dans le respect de samission, doit comprendre la justifi-cation des éventuelles contraintes im-posées pour la prévention. Cette di-mension est d’autant mieux intégréepar les acteurs qu’ils sont associés àtoutes les phases de l’opération, depuisle diagnostic des dysfonctionnementsjusqu’à la validation des actions à met-tre en œuvre. Opérateurs en premièreligne, ils pointent eux-mêmes les zonesd’ombre en exposant leurs pratiquesquotidiennes. Leur adhésion au pro-jet en est ainsi facilitée. Le recours à un consultant extérieurapporte un regard décalé et une dyna -mique nouvelle sur un lieu : son actions’exerce hors des gestes routiniers, etau-delà des relations inter- personnellesétablies. Il soulève des questions iné -dites, facilite la prise de parole, et aideà formuler des solutions acceptablespar tous. Son intervention s’appuie

Une meilleure organisation des chantiers complexesRécolte de pommes par lots distincts. Les diverses séquences du chantier sontcoordonnées en fonction du protocole de l’expérience : cueillette, étiquetage des fruitsou des lots, regroupement des caisses. Les postes de travail ainsi que les matérielsdédiés sont adaptés à l’enchaînement de chacune des tâches à exécuter.

Des personnels bien protégésPrélèvement dans un cocon de chenilles processionnaires du pin. Cet agent est protégé contre le risque d’allergie. De nombreux postes de travail exigent des protections particulières (combinaison, masque, lunettes, gants, harnais ou casque).Ce sont des contraintes d’autant mieux tolérées qu’elles s’inscrivent dans un projet plusglobal : confort des vestiaires, praticité des tenues, rythmes d’habillage…

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+d’infosOcolloque et vidéos : Colloque de juin 2009 (actes du colloque :62 p.) www.inra.fr/les_hommes_et_les_femmes/colloque5juin2009

Votre mission d’animateur de ce projet participatif a été un « vrai bonheur », selon vos propres termes. Pouvez-vous cependant pointer quelquesdifficultés ?Michel Maquère : Ce fut d'abord de passer del'incrédulité des agents devant une nouvelle action - une de plus - à la conviction que la prévention peutêtre largement facilitée quand chacun s'implique pourla collectivité, sans attendre de crédits spécifiques. Ensuite, de trouver une stabilité de l’organisation surle long cours pour que les différentes initiatives deprévention de la Mission centrale soient conduites ensynergie et non en mille-feuilles. Enfin, pour latraçabilité des actions correctives et la sortie debilans exhaustifs, il est plus facile de mesurer lesbénéfices apportés sur des aspects matériels que lesaméliora tions, plus diffuses, liées au management ouaux comportements.

Quels succès retenez-vous ?M. M. : Les baisses chiffrées des accidents traduisent un réel progrès pour les agents.C’est la justification des engagements managériaux et financiers de l'Institut dans cetteopération d'envergure. La visible installation de la culture de prévention dans les collectifsest un signe encourageant d’une nouvelle perception par les agents : l'accident n'est plusinéluctable. L'appropriation des résultats par les départements de recherche les plusconcernés indique que les collectifs scientifiques sont sensibles au sujet, même si unemarge de progrès conséquente existe en ce domaine.

Quel témoignage souhaitez-vous transmettre à ceux qui continuent sur ce chemincollectif que vous avez tracé ? M. M. : La pertinence de la méthode permet de faire surgir le progrès de l'intérieur des collectifs. Mais l'opération nécessite une animation permanente, en appui auxDélégués prévention de centre (DPC) qui sont les véritables professionnels de laquestion. Le partage d'expérience nécessite l'activation des réseaux existants : certains sont dédiés, comme celui des DPC au niveau national ou des agents chargés de prévention sur les centres, d'autres sont plus généralistes : départements de recherche, Commission nationale des unités expéri mentales, groupes « animaliers »,« serristes »… Rien n'est possible sans l'impulsion des hiérarchies puis leur implicationdans le suivi. Qu’elles soient de type administratif - le centre - ou bien de naturescientifique - les départements - leur rôle est déterminant dans l'organisation du travail,dans l'affectation des crédits et des postes, et dans l'accompagnement des agents dans leur carrière.

Michel Maquère, ingénieur à l’Inra de Rennes.

sur un cahier des charges préparé enamont par l’unité ; elle s’achève parla remise d’un document final, validéavec les acteurs du projet. Par sa pré-sence, ce professionnel délivre égale-ment une formation à la prévention.Enfin, le collectif élabore un plan desactions à mettre en œuvre : certai-nes peuvent être réalisées facilement,d’autres demandent des analyses plusfines, des achats coûteux ou des chan-tiers de rénovation à évaluer. Un suiviest organisé pour que les pistes d’a-mélioration soient toutes exploréeset que des solutions se mettent enplace. La vigilance quotidienne, in-dividuelle et collective, doit également devenir l’état d’esprit du site où le projet est déployé.

La prévention, une qualification professionnelleparmi d’autresLa démarche participative a été amé-liorée depuis 2002. Des outils d’aideont été construits. La méthodologieet les exemples vécus sont aujourd’-hui diffusés plus largement dans l’Ins-titut. Un tour de France des centresde recherche a débuté au printemps2010 pour fédérer et étendre la mé-thode à de nouveaux sites. Les installations de terrain ont pourvocation de générer des données pourles chercheurs : aussi, l’amé liorationdes conditions de travail serait ainsila garantie de produire des résultatsexpérimentaux plus fiables. ●

Brigitte Cauvin

O 3 QUESTIONS À …

La pénibilitéd’un gesterépétitif, le bruit,la poussière,l’humidité,l’ammoniac… les conditionsd’exerciceinfluencent laqualité etl’efficacité dutravail quotidien.

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Le site web événementiel « Agriculture et biodiversité », lancé pour le Salon international de l'agriculture 2010 et associé à l'année de la biodiversité,

fait le point sur les actions, les partenariats et les travaux de recherche engagés par l’Inra sur ce thème. Il vous permet de vous informer,de visionner des films courts, de tester vos connaissances avec des quiz...La complexité des questions posées nécessitede développer des synergies entre différentesdisciplines : agronomie, écologie, scienceséconomiques et sociales... Les travaux menés parl'Inra permettent de mieux comprendre commentles activités humaines influencent la biodiversitéet souvent la dégradent. Ils visent à connaître et à valoriser les processus qui associent laproduction agricole et sylvicole à la biodiversité,des mécanismes génétiques et physiologiquesaux pratiques culturales et à l’organisation des paysages. La biodiversité doit en effet êtreconsidérée dans l’espace, dans le temps et àplusieurs échelles : la diversité des écosystèmes,celle des espèces et celle que l’on trouve au seinde chaque espèce. Elle participe à tous lesservices que les écosystèmes nous apportent, en termes de ressources pour l’alimentation,l’habitat, la régulation des pollutions, le bien-être… Sa préservation est essentielle dans

une perspective de développement durable. Quelques exemples parmi les actions, les partenariats et les travaux de rechercheprésentés :• le programme « Écologie pour la gestion des écosystèmes et de leurs ressources »favorise le rapprochement entre écologie et agronomie• l’expertise scientifique collective « Agricultureet biodiversité : valoriser les synergies » lancéeen 2007 dresse un bilan critique desconnaissances académiques sur les interactionsentre l'agriculture et la biodiversité• la Fondation pour la recherche sur labiodiversité, dont l'Inra est membre fondateur,coordonne les recherches dans le champ de la biodiversité et des ressources génétiquesen concertation étroite avec les acteursassociatifs et économiques • les animations sur le stand de l’Inra au Saloninternational de l'agriculture en mars 2010 ontpu sensibiliser le public autour des recherchessur les relations entre agriculture et biodiversité • une conférence sur le thème de la sauvegardedes espèces animales menacées a étéorganisée à Tours en février 2010…

Marc-Antoine Caillaud

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Owww.inra.fr/agriculture_biodiversite

Sur le web, un site Inra dédié à

l’année de la biodiversité

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O MÉTAMORPHOSES DE L'EXPERTISE - PRÉCAUTION ET MALADIES À PRIONSCéline Granjou, Marc BarbierÉDITIONS QUAE, COÉDITEUR MSH, COLLECTION NATURES SOCIALES, FÉVRIER 2010, 304 P., 26 €

en bref

ODouleur animale, douleurhumaine Données scientifiques, perspectives anthropologiques,questions éthiquesJean-Luc Guichet (Coord.)La reconnaissance de la douleuranimale pose à l’homme desproblèmes éthiques. Cet ouvragevise à faire le point sur la questionde la douleur et des états associéschez l'animal, il interroge à tour derôle la douleur animale et la douleurhumaine, et propose de clarifier lesbases éthiques du débat. Éditions Quae, Collection UpdateSciences & Technologies, avril 2010, 218 p., 37 €

OLa lutte biologique - Vers de nouveaux équilibresécologiquesLydie Suty La lutte biologique apporte dessolutions pour une agriculture plusrespectueuse de l’environ nementet aux consommateurs sensibles à la qualité de leur alimentation.Cet ouvrage rappelle levocabulaire, les connaissances de base de la biologie et lesprincipes de la lutte biologique. Il s’adresse aux enseignants,formateurs et étudiants mais aussiaux lecteurs « profanes »sensibilisés à la préservation des écosystèmes.Éditions Quæ, coéditeur Educagri,Collection Sciences en partage, mars2010, 332 p., 32 €

OLa modélisation d'accompagnementUne démarche participative enappui au développement durableMichel Étienne (Coord.)Cet ouvrage présente lesméthodes, les outils et la placeparticulière des modèles dans la gestion durable des ressourcesnaturelles renouvelables. Il expliqueen particulier comment intégrerplusieurs échelles de décision,prendre en compte les jeux depouvoir et évaluer les effets sur les personnes associées à la miseen œuvre de cette démarche. Il est destiné aux chercheurs, aux étudiants et aux enseignants.Éditions Quæ, collection UpdateSciences & Technologies, mars 2010, 352 p., 45 €

Cet ouvrage analyse les transformations

de l'expertise scientifique à la suite de la crise de la « vache folle ». Il explore la complexité des questions posées parl’évolution du recours à lascience pour gérer les risques.Un livre éclairant au momentoù les grippes à répétitiontendent à construire un état de surveillance généralisé. Ce livre intéressera autant les chercheurs en sciencessociales que les décideurs.

O ATLAS MEDITERRA : AGRICULTURE, ALIMENTATION, PÊCHE ET MONDES RURAUX EN MÉDITERRANÉE Auteur : CIHEAMEDITIONS LES PRESSES DE SCIENCES PO, COLLECTION ANNUAIRES FRANÇAIS, DISPONIBLE EN ANGLAIS, MARS 2010, 132 P., 32 €

INRA MAGAZINE • N°13 • JUIN 201032

O DE L'ORANGERIE AU PALAIS DE CRISTAL,UNE HISTOIRE DES SERRES

Yves-Marie Allain ÉDITIONS QUAE, MAI 2010, 144 P., 26 €

Comment protégerles plantes qui ne

peuvent supporter nosclimats ? Comment leurconstruire un abriapproprié, orangerie,serre froide ou serrechaude ? Durant dessiècles, botanistes,jardiniers etpropriétaires vont setrouver confrontés à denombreux défis :connaissancesbiologiques, matériauxde construction, systèmes de chauffage... Ce longcheminement est décrit ici, des débuts balbutiants des années1600 à l’apogée des années 1900.

Aridité, dégradation des sols, littoralisation… de nombreux risquespèsent sur l'espace méditerranéen. Jamais les hommes n'y ont été

aussi nombreux et les paysans, qui ont façonné ce berceau del'agriculture, ont vu leur activité évoluer et se transformer. Ils doiventaffronter de nouveaux défis économiques, sociaux et démographiquesqui touchent directement l’agriculture et l’espace rural. Il estnécessaire de construire aujourd'hui un espace de coopération où l'agriculture, le développement durable et l'alimentation joueront unrôle essentiel. Dans ce contexte, la coopération euro-méditerranéennes'annonce comme une étape nouvelle d'une histoire millénaire.

Depuis 1995,l’Inra a

entrepris derecueillir destémoignages de chercheurs,techniciens etgestionnaires, qui ont construitl’Institut ;parcourspersonnelss’inscrivant dansun collectif et constituant un corpus mémorielpour notre établissement de recherche, et ce dansle cadre d’une mission animée par ChristianGalant, ingénieur de l’Inra. Tous les témoignages sont déposés aux Archivesnationales, certains sont publiés dans la revueannuelle Archorales et disponibles sur Internet.Ce numéro rend hommage à Denis Poupardin,initiateur de cette mission, qui nous a quittés le 25 mars 2009. Il propose des récits de vies professionnelles de 9 personnes de l'Inraimpliquées dans différents secteurs de la recherche(productions animales, amélioration des plantes,environnement...) et de l’administration.

OForests, Carbon Cycle and Climate ChangeLes forêts, le cycle du carbone et le changement climatiqueEdited by Denis LoustauCe livre résume les principalesobservations du projetCARBOFOR dont l’objectif étaitd’étudier les effets futurs du climatsur le cycle du carbone, la productivité et la vulnérabilitédes forêts françaises. C’est uneréférence de valeur pour les chercheurs, les académiciens, les ingénieurs, les gestionnairesdes eaux et forêts ainsi que pourles étudiants.Éditions Quæ, collection UpdateSciences & Technologies, anglais,mars 2010, 348 p., 49,00 €format PDF : 34,30 €

www.quae.com

c/o Inra - RD 10 -F-78026VersaillesCedex

éditionsQuæ

ONutrition minérale des ruminantsFrançois Meschy Cet ouvrage de synthèse metl’accent sur l’importance desmacroéléments et des oligo -éléments dans la nutrition desruminants : leurs fonctions ausein de l'organisme, lesconséquences d'un apportalimentaire insuffisant ou excessif,les apports journaliersrecommandés et ceux réaliséspar les principales catégoriesd'aliments. Les éléments « nouveaux » potentiellementindispensables ou toxiques sontaussi évoqués.Éditions Quæ, collection Savoir-faire, mars 2010,180 p., 32 €., format PDF : 22,40 €

OAgriculture et paysanneriesdu mondeSous la direction de Bernard A. WolferA travers une lecture socio -politique des transformations des agricultures du monde, cetouvrage analyse leur diversitéainsi que la complexité dessystèmes agricoles construits pardes paysanneries aux histoiresriches de savoir technique. Il s’interroge sur la place quel’agriculture et les paysanneriespeuvent tenir dans nos sociétés. Il s’adresse aux enseignants du supérieur, aux responsablespolitiques ou associatifs et aux professionnels. Éditions Quæ, avril 2010, 350 p., 42 €

OLE TRAITEMENT DES DÉCHETSRené MolettaEDITIONS TEC&DOC LAVOISIER, OCTOBRE 2009, 684 P.,165 €

Ce livre présente les différentesstratégies à mettre en œuvre pour

réduire le volume des déchets et mieuxles valoriser. L’auteur, directeur de recherche à l’Inra, a fédéré lescompétences de 45 spécialistesreconnus pour faire le point sur lesacquis scientifiques et technologiquesactuels, sans négliger les aspectsréglementaires, sociétaux etéconomiques. Il concerne de nombreuxtypes de déchets, qu'ils soientorganiques, minéraux et mêmeradioactifs. Cet ouvrage unique trouveune place privilégiée dans le conceptdu développement durable.

Àpartir de la littérature ancienne,l’auteur décrit les techniques de

construction et d’exploitation des étangsainsi que leurs usages par les sociétésrurales d’hier et d’aujourd’hui. Sonouvrage livre des pistes pour unepolyculture optimisée des poissonsd’étangs avec une attention particulièrepour l’association des espèces et leurs régimes alimentaires.

OARCHORALES Les métiers de la recherche :

témoignages n°14 www.inra.fr/archorales

À PARAÎTRE EN 2010

INRA MAGAZINE • N°13 • JUIN 2010 33

ODERRIÈRE CHEZ MOI, Y'A UN ÉTANGLes étangs, textes d'hier, regards d'aujourd'hui et de demainRoland BillardÉDITIONS QUAE, 2010, 304 P., 25,90 €

Que retenez-vous de la première GCARD (2),qui s’est tenue à Montpellier fin mars 2010 ? Pierre Fabre : Cette première conférence consacre lesefforts politiques et institutionnels menés ces deux der-nières années pour mieux coordonner la recherche agro-nomique en faveur du développement. D’abord, ellereconnaît le GFAR (3) en tant qu’organe essentiel de lacoordination et la GCARD comme lieu de réflexion col-lective tous les deux ans. C’est un grand pas que d’avoirune instance et un lieu de rencontre partagés entre lesmultiples acteurs impliqués : organismes de recherche,décideurs politiques, organisations agricoles, secteurindustriel, ONG, etc. et ce, en provenance de tous lespays. Les participants ont de fait entériné l’organisation duGFAR en plusieurs forums correspondant aux grandesrégions du monde, ce qui garantit que chaque pays pourraexprimer ses besoins spécifiques dans le processus deconstruction des programmes régionaux et mondiaux. Autre succès de la GCARD : la concrétisation de la réformedes centres internationaux de recherche agricole duCGIAR (4), qui va, là aussi, vers une meilleure coordina-tion entre ces centres. Et enfin, le rapprochement entre lesinstituts de recherche agronomique dits « avancés » despays industrialisés et ceux des pays émergents : Brésil,Chine, Inde, Afrique du Sud…

Que peut-on attendre de ces évolutions ?P. F. : A côté des centres internationaux de recherche agri-cole du CGIAR, il existe des systèmes de recherche natio-naux très différents d’un pays à l’autre, par leurs moyens,leur organisation voire leurs objectifs. Schématiquement,il y a une dichotomie entre la recherche agronomique« fondamentale » qui est plutôt le fait des pays industria-lisés et une recherche plus appliquée pratiquée dans les

Mieux coordonner la recherche agricoleinternationale ◗

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© Inra / Christophe Maître

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Pierre Fabre est secrétaire exécutif de la Commission pour la rechercheagricole internationale (CRAI (1)),l’instance qui représente la France

dans le domaine de la recherche agricolepour le développement.

Propos recueillis par Pascale Mollier

pays du Sud pour répondre à des besoins à court terme,sinon d’urgence. Typiquement, ces derniers font de lasélection variétale alors que les premiers ont les moyens dedévelopper de vastes programmes de génomique. Onpeut espérer que l’avènement d’un système mondial mieuxcoordonné contribuera à décloisonner ces deux types derecherche. La science elle-même évolue : les approchesgénériques s’amplifient, par exemple depuis que l’on saitdétecter, grâce aux techniques de séquençage des génomes,les similitudes entre plantes cultivées. On a ainsi découvertque le riz, le blé, le maïs et le sorgho dont on savait qu’ilsdérivent d’ancêtres communs, partagent de larges régionschromosomiques, ce qui facilite le transfert des connais-sances d’une espèce à l’autre.

Cela demande donc d’intenses échangesNord-Sud.P. F. : Même si cette dimension générique se développe,l’agronomie reste aussi une science de la localité, qui doitprendre en compte la spécificité de chaque agro-écosys-tème, voire de chaque exploitation. C’est pourquoi lesprogrammes de recherche devront rassembler des cher-cheurs du Nord et du Sud, ce que visent les mégapro-grammes qui se mettent en place à l’initiative du CGIAR.Ainsi, le programme sur le riz, en voie de montage, devraitassocier les trois centres internationaux spécialisés sur leriz, situés au Bénin (Centre du Riz pour l’Afrique), auxPhilippines (IRRI) et en Colombie (CIAT) avec le Cirad,l’IRD et d’autres équipes spécialistes du riz dans de nom-breux pays du Sud. La participation des pays du Sud dansce type de programme de recherche permettra de tenircompte d’emblée des contraintes réelles, plutôt que detenter ensuite un transfert « linéaire » des résultats duNord vers le Sud.Pour réussir cette évolution des pratiques et des pro-grammes, nous avons cherché à faire évoluer les structures.La composition du conseil d’administration du consor-tium du CGIAR est ainsi équilibrée entre les pays duNord et du Sud, et son ouverture vers des personnalitésextérieures devrait faciliter l’évolution du système CGIARvers une stratégie collective, moins cloisonnée entre lescentres et vis-à-vis de l’extérieur (au Sud et au Nord).

Comment est organisée la recherche pour le développement en Europe et en France ?P. F. : C’est un système en « poupées gigognes ». L’Europea créé en 1995 une instance de coordination, l’EIARD (5),qui intervient à son tour dans les instances internationa-les. La plupart des pays y sont représentés par un ministèreou par une agence de développement. Le cas de la Franceest particulier puisque sa représentation constitue elle-même une petite structure qui inclut les opérateurs derecherche. Cela se justifie par une autre originalité de laFrance, seul pays européen à maintenir une importantecapacité de recherche dans les pays du Sud, à travers leCirad et l’IRD.L’EIARD est une structure clé dans le système agrono-mique international car elle porte une parole unique pourl’Europe. Grâce à cette cohérence, l’Europe a joué un rôle

important dans la réforme du CGIAR, dont elle assureprès de 50 % du budget total.

Comment tout cela se traduit-il en programmesde recherche ? P. F. : Certains donateurs étaient favorables au dévelop -pement rapide de programmes pilotes alors que d’autresauraient préféré avoir un panorama d’ensemble des pro-grammes avant de prendre des décisions. Le compromisa été d’accélérer le montage d’au moins deux mégapro-grammes en 2010, sur le riz et le changement climatique.La proposition devrait être entérinée en mars par le conseild’administration et finalisée en octobre pour être sou-mise au Conseil du Fonds du CGIAR. Les deux à troismois qui viennent vont donc être décisifs pour organiserces programmes. Le succès des mégaprogrammes dépendra de leur facultéd’associer efficacement les acteurs du Sud et du Nordpour développer des innovations réellement adaptées auxbesoins. Mais il s’agit aussi d’assurer l’ouverture aux aut-res partenaires pour maximiser la compétence collective.Sur le thème du changement climatique, des rencontresont lieu en ce moment pour faire le lien entre le méga-programme du CGIAR et l’initiative de programmationconjointe européenne « Agriculture, Food security andClimate change ». Elles ont pour objectif de distribuer letravail de manière à travailler en synergie et à éviter lesdoublons. Parmi les donateurs, on note depuis l’année dernière l’arrivée en puissance de la fondation Bill et MélindaGates, qui devient, avec 20 % du fonds, le premier donateur, devant les USA, la Banque mondiale ou leRoyaume-Uni (de l’ordre de 10 % chacun). Il nous faudraobserver comment la stratégie de cette fondation vainfluencer l’organisation future des programmes.En conclusion, on a passé un cap structurel pour coor-donner les programmes de recherche, il reste maintenantà relever les manches sur le plan scientifique ! ●

(1) CRAI : Commission pour la recherche agricole internationale, instance decoordination et de représentation française composée des ministères en charge de la Recherche, de l’Agriculture et des Affaires étrangères, de l’Inra, du Cirad, de l’IRD,du Cemagref et d’Agropolis international. (2) GCARD : Global Conference on Agricultural Research for Development , Conférencemondiale sur la recherche agricole pour le développement, organisée par le GFAR etAgropolis International. Voir aussi l’article dans Horizons en page 3.(3) GFAR : Global forum of agriculture research, forum mondial de la recherche agricolecréé en 1998.(4) CGIAR : Consultative group on international agricultural research, alliance stratégiquesoutenant quinze centres internationaux de recherche agricole.(5) EIARD : European initiative for agricultural research for development, plateforme decoordination composée de pays de l’Union européenne, de la Norvège, de la Suisse etde la Commission européenne.

+d’infosOcontact :[email protected]

INRA MAGAZINE • N°13 • JUIN 2010 35

◗AG

ENDA

28 juin/1 juilletMONTPELLIER

Symposium Innovation et développementdurable dans l'agriculture et l'agroalimentaireComment les sciences et les sociétés peuvent-ellesréinventer les systèmes agricoles et agroalimentaires versune plus grande durabilité ? Ce symposium proposé par leCirad, l'Inra et Montpellier SupAgro a pour objectifs deréfléchir aux choix futurs, de faire émerger de nouvellesperspectives pour les agendas scientifiques et d'apporterdes propositions concrètes pour l'action et les politiques.WWW.isda2010.net

24 juinPARIS

Les comportements alimentaires : quels en sont les déterminants ? Quelles actions pour quels effets ?Le colloque de restitution des résultats de l'expertisescientifique collective sur les comportements alimentairesmenée par l'Inra à la demande du ministère de l’Alimentation,de l’Agriculture et de la Pêche se tiendra à la Cité des sciences.https://colloque.inra.fr/expertise_comportements_alimentaires

17/18 juinVERSAILLES-GRIGNON

Colloque ClimatorLe colloque, organisé par l’Inra et Arvalis - Institut duvégétal, présente les méthodes et les résultats du projetClimator initié en 2007 et réunissant dix sept partenaires. Il porte sur l’élaboration d’outils et de références pour analyser l’impact du changement climatique sur les agro-écosystèmes du monde. WWW.inra.fr/les_partenariats/17_18_juin_climator

13/15 septCLERMONT-FERRAND

Xe Conférence internationale sur lesapplications de la résonance magnétiquedans la science des alimentsCe congrès international, co-organisé par l'unité derecherche Qualité des produits animaux (Inra Clermont-Ferrand - Theix), réunit des chercheurs d'institutionspubliques et privées de différents pays européens etprésente des travaux de recherche faisant appel aux outilsd'imagerie et de spectroscopie en résonance magnétiquedans le domaine de l'agroalimentaire.https://colloque.inra.fr/mrinfood

4/9 juilletBORDEAUX

Conférence internationale sur le mildiouet l’oïdium de la vigneLa maîtrise du mildiou et de l'oïdium de la vigne restetoujours très dépendante de l'utilisation de fongicides.C’est pourquoi il est urgent d'envisager d'autres moyens de lutte contre ces agents pathogènes et d’examinertoutes les innovations scientifiques qui permettront de construire la viticulture de demain plus respectueuse de l’environnement.https://colloque.inra.fr/gdpm_2010_bordeaux_fre

23/27 aoûtTOURS

XIIIe Congrès européen d’aviculture Ce congrès est organisé par la branche française de l'Association mondiale de science avicole (WPSA) en partenariat avec l'Inra, l'Institut technique de l'aviculture,l'Afssa et des représentants professionnels de la filière.Multidisciplinaire et quadriennal, il s’adresse à tous lesacteurs de la production avicole et permet d’échanger et d’obtenir les informations les plus récentes sur lesdifférents aspects de la production avicole. WWW.epc2010.org

er

Carrefoursde l’innovation

agronomique2010

Démarches, outils et innovationspour utiliser moins de pesticides en grandes cultures

Face aux enjeux du développementdurable, l’agriculture française doitse conformer à de nouvellescontraintes réglementairesobligeant les producteurs à réduireleur utilisation de pesticides. Le Carrefour de l’innovationagronomique du 6 mai 2010 portaitsur les démarches, les outils et lesinnovations que demandent les agriculteurs pour reconcevoirleur système de production danscette nouvelle donne. L’intégralitédes interventions est visionnablesur notre site.

www.inra.fr/audiovisuel/web_tv/ciag/ciag_versailles_mai_2010