Homicide involontaire : faute de diagnostic et dans la prise en charge

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Droit Déontologie & Soin 10 (2010) 297–302 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Jurisprudence Homicide involontaire : faute de diagnostic et dans la prise en charge Céline Hauteville (Infirmière diplômée d’État, étudiante en droit) 28, rue Vicq-d’Azir, 75010 Paris, France Disponible sur Internet le 9 novembre 2010 Résumé Une affaire jugée par la chambre criminelle de la Cour de cassation (Cour de cassation, chambre criminelle, 29 juin 2010, n o 09-87448) permet, à propos d’une affaire dramatique, de décrypter les méthodes d’analyse de la justice pénale. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 1. La plainte pénale Pierrette Y., une patiente âgée de 50ans, a été admise aux urgences d’un centre hospitalier, le 2 août 2004, afin d’y subir l’ablation de la vésicule biliaire sous cœlioscopie. L’intervention a eu lieu le matin du 6 août. Elle a été reconduite dans le service de chirurgie et sera transférée en unité de soins cardiologiques intensifs à 20 heures 15, et elle décédera le 7 août à 8 heures 15. Le 10 décembre 2004, son époux, Alain Y., agissant en son nom personnel et en qualité d’administrateur légal de son fils mineur, ainsi que leur fille majeure, ont déposé plainte en se constituant parties civiles pour homicide involontaire devant le juge d’instruction. 2. Les avis médicaux 2.1. L’expertise Par ordonnance de référé du 15 mars 2005, dans le cadre d’une procédure engagée parallèle- ment, la plainte pénale ne paralysant pas une procédure de référé, le président du Tribunal de Adresse e-mail : [email protected] 1629-6583/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.ddes.2010.10.006

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Droit Déontologie & Soin 10 (2010) 297–302

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

Jurisprudence

Homicide involontaire : faute de diagnosticet dans la prise en charge

Céline Hauteville (Infirmière diplômée d’État, étudiante en droit)28, rue Vicq-d’Azir, 75010 Paris, France

Disponible sur Internet le 9 novembre 2010

Résumé

Une affaire jugée par la chambre criminelle de la Cour de cassation (Cour de cassation, chambre criminelle,29 juin 2010, no 09-87448) permet, à propos d’une affaire dramatique, de décrypter les méthodes d’analysede la justice pénale.© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

1. La plainte pénale

Pierrette Y., une patiente âgée de 50 ans, a été admise aux urgences d’un centre hospitalier, le2 août 2004, afin d’y subir l’ablation de la vésicule biliaire sous cœlioscopie. L’intervention a eulieu le matin du 6 août. Elle a été reconduite dans le service de chirurgie et sera transférée en unitéde soins cardiologiques intensifs à 20 heures 15, et elle décédera le 7 août à 8 heures 15.

Le 10 décembre 2004, son époux, Alain Y., agissant en son nom personnel et en qualitéd’administrateur légal de son fils mineur, ainsi que leur fille majeure, ont déposé plainte ense constituant parties civiles pour homicide involontaire devant le juge d’instruction.

2. Les avis médicaux

2.1. L’expertise

Par ordonnance de référé du 15 mars 2005, dans le cadre d’une procédure engagée parallèle-ment, la plainte pénale ne paralysant pas une procédure de référé, le président du Tribunal de

Adresse e-mail : [email protected]

1629-6583/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.ddes.2010.10.006

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grande instance a ordonné une expertise confiée au professeur Z. afin de déterminer les causes dudécès.

L’expert a conclu :

• l’opération décrite par le docteur A. et réalisée chez Pierrette Y. est conforme aux donnéesacquises de la science en dehors de deux remarques, à savoir que la tentative d’extraction de lalithiase de la voie biliaire principale aurait pu être essayée si un drain adéquat avait été présent,et que la manœuvre d’exsufflation du pneumopéritoine avant retrait des trocarts pour détecterune éventuelle hémorragie (hémorragie masquée par la pression du pneumopéritoine) n’a pasété réalisée ;

• la mort de Pierrette Y. est le fait d’une hémorragie postopératoire sur le site de la régionsous-hépatique.

Cette complication postopératoire était révélée par :

• un état clinique postopératoire avec rapidement un tableau associant sueurs, pâleurs, baissetensionnelle, sang dans le drain de Redon (250 cc et plus), alors que le compte rendu opératoiredécrit une cholécystectomie sans difficulté apparente ;

• une baisse progressive de l’hémoglobine, malgré la transfusion de deux culots de sang ;• l’absence de trouble de l’hémostase en préopératoire et même en postopératoire ;• une distension abdominale avec, à l’échographie, un épanchement atteignant l’hypochondre

gauche, alors que le liquide de lavage résiduel avait toute possibilité de s’évacuer par le drainde Redon.

Ces signes auraient dû inciter le chirurgien, le docteur A., à réintervenir en urgence par voiecœlioscopique, transformée en laparotomie si nécessité. Cette réintervention n’a pas été décidéeou envisagée car il y a eu erreur de diagnostic, une partie des signes étant masquée par un traitementde bêtabloquants au long cours entraînant, en particulier au début, un certain degré de stabilitétensionnelle et de non-accélération du pouls. L’erreur de diagnostic a été de faire de cette situationhémorragique évidente, un phénomène d’hypocoagulabilité lié à une cholestase qu’elle n’avaitd’ailleurs pas le jour de l’intervention : bilirubine totale à 11 mg, phosphatases alcalines à 111 mg(le 6 août à 17 heures).

2.2. L’autopsie

L’autopsie a confirmé le décès par hémorragie sur le site opératoire mais n’a pas retrouvé delésion vasculaire évidente : plaie vasculaire ou lâchage de suture par clip.

3. Le droit applicable

Il résulte des dispositions de l’article 121-3 du Code pénal qu’il y a délit, lorsque la loi leprévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation deprudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’apas accompli les diligences normales, compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missionsou de ses fonctions, de ses compétences, ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait.

Les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé oucontribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les

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mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont commisune faute caractérisée et qui exposait l’autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles nepouvaient ignorer.

L’erreur de diagnostic n’est susceptible d’engager la responsabilité pénale du médecin que sielle résulte de sa négligence.

4. Analyse de la cour d’appel

4.1. Les faits

À 15 heures 45, Pierrette Y. a fait un malaise lequel a persisté, malgré l’interruption del’administration d’Acupan®. À 17 heures, les docteurs A. et X. ont ordonné une échographieabdominale qui n’a révélé aucune anomalie au niveau du lit vésiculaire ni au niveau hépatiquemais 50 centilitres de sang dans le drain de Redon. À partir de 17 heures 45, l’état de Pierrette Y.a empiré. Le docteur A. n’était plus joignable.

Le docteur X. a prescrit l’administration de Voluven® en prévision d’une éventuelle réinterven-tion chirurgicale et l’injection de deux culots de sang. À 20 heures 15, il a fait transférer PierretteY. dans le service de soins intensifs de cardiologie, faute de place dans le service de réanimation eta demandé une échographie cardiaque qui a permis d’éliminer toute anomalie cardiaque. PierretteY. a été revue par le docteur A. à 22 heures puis à 22 heures 30, avec le docteur X. Le docteur A.a confirmé le diagnostic de syndrome septique, tout en demandant une surveillance tensionnelleavec prescription d’alerte en cas de chute anormale de la tension artérielle.

Aucun médecin n’a été appelé jusqu’au matin du 7 août, où est survenu un arrêt cardiorespi-ratoire à 5 heures 40.

4.2. Les explications des médecins

4.2.1. Le chirurgienLe docteur A. fait valoir que les épisodes de sueurs et de pâleur présentés par Pierrette Y. dans

l’après-midi pouvaient être attribués à l’administration d’Acupan®, antalgique ; que l’échographieétait rassurante, le liquide retrouvé se situant à l’opposé du côté de l’intervention chirurgicale ;qu’à 22 heures, l’état de Pierrette Y. était stable. Il avait attribué l’augmentation du volume deliquide sanglant dans le drain de Redon à un possible syndrome septique biliaire aggravé par unehypocoagulabilité. Il a prescrit de la vitamine K pour améliorer l’hémostase et favoriser l’arrêtdes saignements ; l’échographie cardiaque n’a pas montré une hypovolemie.

Il a quitté Pierrette Y. à 22 heures 45 après avoir donné des consignes strictes et communiquéson numéro de chambre à l’hôpital afin de pouvoir être contacté en cas de difficulté. Il soutientqu’il n’a commis aucune erreur de prise en charge postopératoire et met en cause un défaut desurveillance par le personnel médical. Il soutient encore qu’une erreur de diagnostic ne constituepas en elle-même une faute pouvant engager la responsabilité du médecin et qu’une réinterventionn’aurait fait qu’augmenter les chances de survie, et que faute de certitude du lien de causalité,l’infraction n’est pas constituée.

4.2.2. L’anesthésisteLe docteur X. soutient que sa responsabilité ne peut être engagée que sur le fondement d’une

causalité indirecte, la preuve devant être rapportée d’une faute caractérisée. Après le premiermalaise de Pierrette Y. à 15 heures 45, il a constaté que son état ne s’améliorait pas et a suspecté

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une complication postopératoire. Il a demandé une échographie abdominale et, en prévision d’unenouvelle intervention, prescrit l’administration de Voluven®. Après les résultats de l’échographie,il s’est incliné face aux avis contraires du docteur A. et du radiologue ; mais l’état de PierretteY. s’aggravant et le docteur A. n’étant plus joignable après 17 heures, il a décidé la transfusionde deux culots de sang et le transfert dans un service plus adapté à la surveillance des patients àrisque.

Il fallait évaluer le risque de complications cardiovasculaires. Étant de garde au bloc obstétrical,il était indisponible après 23 heures et n’a pas eu connaissance des résultats de l’échographiecardiaque, et il soutient qu’il n’a commis aucune faute.

4.3. Les conclusions de la cour d’appel

Il est acquis que Pierrette Y. est décédée à la suite d’une hémorragie postopératoire. Les expertsreprochent au chirurgien de n’avoir pas posé un diagnostic qui était pourtant évident.

Le professeur Z. a relevé que l’apparition de 50 centilitres de sang en postopératoire, alors quela cholécystectomie semblait s’être passée sans problème, aurait dû l’interpeller. L’obligation detransfuser deux culots sanguins sur une cholécystite qui s’est passée sans incident ni extériorisationde sang pur par le drain de Redon était un signe qui devait engager une décision de réinterventiondans les plus brefs délais. À 22 heures 30, alors qu’il existait 250 centilitres de sang dans le flaconde recueil, eu égard à l’état de la patiente, aux modifications hémodynamiques survenues, auxmodifications biologiques constatées, il aurait été souhaitable d’envisager une réintervention sanstarder, par voie cœlioscopique.

Deux autres experts, le docteur C. et le professeur B., ont également relevé l’erreur diagnos-tiquée, précisant que si le malaise dans l’après-midi a été attribué à un choc septique et quel’échographie abdominale à 17 heures n’a pas révélé d’épanchement significatif, cette erreur pou-vait encore ne pas être fautive, alors qu’elle était patente lors de l’examen effectué à 22 heures,plusieurs éléments faisant évoquer un saignement et, au décours d’une chirurgie intra-abdominale,un hémopéritoine. Des signes cliniques décrits dans le rapport du docteur A., teint terreux,sueurs, bouche sèche, présence de 250 centilitres de liquide sanglant dans le drain de Redon, tauxd’hémoglobine anormalement bas malgré la transfusion de deux culots globulaires, le docteur A.devait envisager, soit une reprise de la cœlioscopie, soit une laparotomie.

Les docteurs E. et D. ont relevé qu’en postopératoire d’une cholécystectomie réalisée dansdes conditions normales, sans aucune autre cause détectée, la complication hémorragique était, àl’évidence, la cause de la détérioration de la patiente et n’avait pas été appréciée à sa juste mesureau bon moment. Ainsi, le risque de complication postopératoire était présent. Si le docteur A. aattribué l’état de Pierrette Y. à un phénomène septique dû à une cholestase, il devait, notammentcompte tenu de l’avis contraire du docteur X., vérifier son hypothèse. Or il s’est rendu injoignableà partir de 17 heures. À 22 heures 30, son erreur était patente, tous les indices étant en faveur del’hémorragie postopératoire ; il devait nécessairement intervenir, ce qu’il n’a pas fait.

Les experts D. et E. ont écarté toute faute du personnel paramédical, les prescriptions ayantété suivies.

Ainsi, le docteur A. a commis une négligence en ne procédant pas à une réinterventionchirurgicale et une telle négligence a entraîné le décès de Pierrette Y. de manière certaine.

Tant le docteur A. que le docteur X. n’ont pas causé directement le décès mais ils n’ont paspris les mesures permettant de l’éviter, commettant une faute caractérisée en ne réintervenant pasmalgré les signes d’hémorragie postopératoire, laquelle exposait Pierrette Y. à la mort, ce qu’ilsne pouvaient ignorer.

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Il convient de relever que le docteur X. avait fait le bon diagnostic dans l’après-midi et a prisdes mesures en conséquence, telles que la prescription de Voluven® en vue d’une réintervention,d’une échographie abdominale, la commande de deux culots sanguins ; que cependant, il s’estincliné face à l’avis contraire du docteur A. Mais, la décision de reprise opératoire appartenaitaussi bien au chirurgien qu’au médecin anesthésiste, ce dernier pouvant contacter le chirurgiende garde si le docteur A. n’était pas joignable.

On ne comprend pas la raison pour laquelle le docteur X. ne s’est pas fait communiquer lerésultat de l’échographie cardiaque, lequel était déterminant puisqu’il devait confirmer le diag-nostic d’hémorragie postopératoire. Dès lors, il appartenait au docteur X. de convaincre le docteurA. de réintervenir ou de faire appel au chirurgien de garde.

Le docteur X. est ainsi responsable du défaut de reprise opératoire et a commis une fautede négligence au même titre que le docteur A. Tous deux ont causé le décès de la patiente, parnégligence en n’accomplissant pas les diligences normales compte tenu de la nature de leursfonctions et de leurs compétences, en ne prenant pas les mesures permettant d’éviter la mort dePierrette Y., commettant ainsi une faute caractérisée dont ils ne pouvaient ignorer la conséquencefatale.

5. Devant la Cour de cassation

5.1. Arguments en défense devant la Cour

Seul l’anesthésiste s’est pourvu devant la Cour de cassation.

5.1.1. Contradiction de motifsLa faute caractérisée, visée par l’article 121-3, alinéa 4, du Code pénal, n’est constituée

qu’autant qu’il ait été démontré qu’au regard du contexte, il ne soit pas vraisemblable que lapersonne poursuivie ait ignoré l’existence du risque d’une particulière gravité encouru pour lestiers.

Or la cour d’appel ne pouvait reprocher au docteur X., durant la période où il est intervenu auprèsde Pierrette Y., située avant 23 heures, de n’avoir pas pris la décision d’une reprise opératoire,cependant, qu’il ressortait de ses propres constatations que les indices de nature à révéler chezPierrette Y. une hémorragie postopératoire n’étaient pas encore avérés, ces signes n’étant, eneffet, apparus évidents qu’après que le docteur X., anesthésiste de garde, eut été retenu de faconcontinue au bloc obstétrical, de sorte qu’une réintervention chirurgicale n’apparaissait pas encorecomme une solution évidente.

De même, la cour ne pouvait reprocher au docteur X. une négligence fautive caractérisée par lefait de n’avoir pas provoqué une reprise opératoire de Pierrette Y. au vu du résultat de l’échographiecardiaque, pratiquée après 23 heures, laquelle devait, selon les motifs de l’arrêt, confirmer lediagnostic d’hémorragie postopératoire, cependant, qu’il était démontré que ce praticien, en saqualité d’anesthésiste de garde, était alors en service continu au bloc obstétrical et qu’un tel résultatn’a pas cru devoir lui être communiqué par son confrère le docteur A. ou par l’équipe soignante.

5.1.2. Absence de lien de causalitéUne faute d’imprudence ou de négligence ne peut entraîner la responsabilité de son auteur que

si elle a une relation de causalité certaine avec le dommage causé à la victime.À ce titre, le docteur X. insiste sur le fait que la non-reprise chirurgicale de Pierrette Y. avait tout

au plus généré une perte de chance de survie pour la patiente mais non le décès de cette dernière,

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ce praticien se fondant à cet égard sur l’expertise des docteurs E. et D. ayant retenu qu’« on ne peutaffirmer avec certitude que cette reprise aurait permis une survie de la patiente ». Ainsi, la courne pouvait de facon péremptoire retenir que l’abstention chirurgicale ainsi reprochée au docteurX. aurait entraîné le décès de la patiente, sans que cette conclusion hâtive ne soit étayée par unquelconque motif de l’arrêt, démontrant qu’une reprise opératoire aurait effectivement permis destopper l’hémorragie postopératoire et éviter de facon certaine le décès de la patiente.

5.2. Conclusion de la Cour de cassation

Pierrette Y. est décédée à l’âge de 50 ans, dans la matinée du 7 août 2004, dans le centrehospitalier où elle avait été admise en urgence le 2 août afin de subir une ablation de la vésiculebiliaire sous cœlioscopie, réalisée dans la matinée du 6 août. À l’issue de l’information ouvertesur la plainte de son époux, le chirurgien qui avait procédé à cette intervention chirurgicaleet l’anesthésiste-réanimateur, M. X., ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel du chefd’homicide involontaire.

Or le décès de la patiente est la conséquence d’une hémorragie postopératoire qui s’est dévelop-pée dans la région sous-hépatique et justifiait une nouvelle intervention chirurgicale, à 22 heures30, au plus tard, le 6 août. M. X. s’est incliné devant la décision erronée de son confrère chirur-gien, sans se faire communiquer les résultats de l’échographie abdominale qu’il avait lui-mêmeprescrite après avoir fait un diagnostic exact de la complication postopératoire et il s’est abs-tenu de contacter, soit le chirurgien responsable de l’opération, qui avait quitté l’établissement à17 heures, soit le chirurgien de garde en vue d’une nouvelle intervention dont il avait compris lanécessité.

Le médecin anesthésiste, qui n’a pas pris les mesures permettant d’éviter le dommage, a ainsicommis une faute caractérisée entretenant un lien de causalité certain, quoique indirect avec celui-ci et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’il ne pouvait ignorer, au sens del’article 121-3, alinéa 4, du Code pénal.