Helicobacter pylori en 2013
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Helicobacter pylori en 2013
Pierre Deprez
! Introduc)on
! Indica)ons
! Traitements d’éradica)on
! Conclusions
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Jusqu’en 1983, on pensait que l’estomac était un organe stérile et que les ulcères de l’estomac
étaient causés par le stress
pH median de l’estomac = 2
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Cliniques universitaires Saint-‐Luc – Pierre H. Deprez
1886 : identification de bactéries spiralées dans des lavages gastriques humains par Walery Jaworski (Université de Cracovie)
1893 : description de bactéries spiralées dans l’estomac d’un chien par Giulio Bizzozero (Université de Padoue)
Anciennes observations de bactéries dans l’estomac...
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1) Analyse de biopsies de l’estomac de 135 patients souffrant de gastrite et de biopsies de patients sains => identification d’une bactérie spiralée uniquement chez les patients souffrant de gastrite
3) Barry Marshall démontre l’un des postulats de Koch en avalant une culture de cette bactérie qu’ils appellent Helicobacter pylori
En 1983 - le travail exemplaire de deux médecins australiens, R. Warren et B. Marshall
2) Culture de cette bactérie pure in vitro
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2005: R. Warren et B. Marshall Prix Nobel de Médecine
pour la démonstration du rôle de la bactérie Helicobacter pylori
dans le développement des maladies de l’estomac
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La bactérie Helicobacter pylori
• Gram négatif
• Classe des epsilon protéobactéries • Spiralée et fortement mobile
H. pylori colonise exclusivement l’estomac des humains
et des primates non-humains
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- très forte prévalence, la moitié de la population humaine mondiale - fortes disparités géographiques (niveau socio-économique)
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Mode de transmission : - inter-humaine - acquisition par voie oro-orale - acquisition au cours de la petite enfance - transmission le plus souvent intrafamiliale - infection persiste souvent toute la vie
Epidémiologie de l’infection par Helicobacter pylori
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Prévalence des infections à H. pylori
Dans les pays occidentaux => l’incidence diminue
- 66 % de la population de l’âge de 60 ans est infectée - 22 % de la population de l’âge de 20 ans est infectée Effet cohorte
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H. pylori possède des propriétés uniques qui lui permettrent de survivre
et de se multiplier à long terme dans l’estomac, un organe pourtant hostile...
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Barrière physique : mucus très épais
Barrière biologique : réponse immunitaire
Barrière chimique : acidité pH médian : 2
pH 4.5-6
cellules épithéliales
Adapté de Tortora, Funke and Case "Microbiology, an introduction" editeur Pearson
pH neutre
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Barrière immunologique Motifs Lewis : mimétisme moléculaire
Immuno-suppression
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Barrière physique : mucus très épais
Forme spiralée pour pénétrer dans le mucus
Flagelles pour se déplacer dans le mucus 14
2 NH3 + CO2
NH4+
H+
H+ =
O
NH2-C-NH2 + H2O
H+
H+
H+
H+
Barrière chimique : pH très acide
Uréase
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Urease : un facteur de virulence majeur de H. pylori
- Enzyme essentielle pour la résistance à l'acidité, indispensable à la colonisation de modèles animaux
- Urease : 10% protéines totales de H. pylori
- Uréase de H. pylori, la plus active de toutes les uréases décrites (Km=0,2-0,5 mM)
- Au niveau des cellules épithéliales gastriques de l'hôte - l'ammoniac produit par H. pylori est cytotoxique - la présence d'ammoniac accélère l'induction de l'apoptose induite
par la cytokine TNFα
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Ni2+
24 nickel ions par complexe actif d'uréase [(UreA-UreB)3]4
Urease : une métalloenzyme à nickel
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Ni2+
Uréase : une arme à double tranchant
- à pH acide : activité indispensable à la survie de H. pylori
- à pH neutre : production d'ammoniac délétère car conduit à un pH alcalin toxique pour H. pylori
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Asymptomatique (80%)
Ulcères gastriques ou duodénaux (10%)
Gastrite atrophique
Adénocarcinome (1-3%)
Lymphome du MALT (0.3%)
Gastrite chronique (100%)
Infection par H. pylori
Métaplasie intestinale
Dysplasie
Pathologies associées à l’infection par H. pylori
Dyspepsie fonctionnelle
(5-10%)
<1a
20-30a
65-80a
30-50a
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Caractéristiques génétiques de l’hôte
Génotype de la bactérie
Facteurs de l’environnement et mode de vie de l’hôte
Risque accru d'atrophie gastrique et d'adénocarcinome
Polymorphismes des cytokines pro-inflammatoires -> TNFα et IL1 β (puissant inhibiteur de la sécrétion acide gastrique)
(îlot de pathogénicité Cag, VacA-s1m1)
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Principaux agents impliqués : Bactérie : Helicobacter pylori 5.5% Virus : Papilloma Virus humains 5.2%
Virus des Hépatites B & C 4.9% Virus d’Epstein-Barr 1% VIH & HHV8 0.9% HTL Virus 0.03%
Parasites du foie : 0.02% (Parkin, Int J Cancer 2006)
Cancers associés aux infections
cancers gastriques
Nombre total de cancers attribuables aux infections en 2002 : - 1.9 million de cas dans le monde - 18% de l’ensemble des cancers
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Comment l’infection par H. pylori conduit au cancer gastrique ?
Processus très long (>40 ans) multifactoriel - mécanismes encore mal compris. mutagenèse de l'ADN des cellules hôtes (inflammation, AID). diminution de l'expression de facteurs de réparation de l'ADN. expression de facteurs de virulence (VacA et Cag) qui augmentent le risque d'oncogenèse
• H. pylori provoque une réponse inflammatoire chronique au niveau des cellules épithéliales de la muqueuse gastrique => conduit à des lésions de l'ADN (espèces réactives de l'oxygène et de l'azote). • H. pylori provoque l'augmentation de l'enzyme AID, une cytidine deaminase responsable de l"editing" d'ADN => génère l'accumulation de mutations dans TP53. (Matsumoto et al. Nature Med 2007)
• L'infection par H. pylori diminue l'expression de certaines enzymes de réparation de l'ADN. (Machado et al, Clin. Canc Res 2009)
• H. pylori exprime des facteurs de virulence dont les activités augmentent le risque d'oncogenèse (VacA et CagA).
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Activités de la cytotoxine VacA
s1 s2 i1 i2 m1 m2
p33 p55
Formes plus fréquemment associées avec le cancer gastrique
(D'après Polk and Peek, Nature Reviews Cancer, 2010)
Séquence signal Domaine
autotransporteur s i m
Libération cytochrome C
Vacuolisation Affaiblissement des
jonctions intracellulaires
Induction de l'apoptose
Integrin ß2
Inhibition de l'activation et de la prolifération
IL-2
Altération de la capacité à présenter
les antigènes
Activité immuno-suppressive : évasion de la réponse immunitaire adaptative
Macrophages Lymphocytes B Cellules T
Inhibition de la fusion phagosome-lysosome
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L'îlot de pathogénicité Cag
cagA 30 gènes
- Ilot Cag : acquis par transfert horizontal de gènes, présent dans :
• 50 % des souches européennes • >95% des souches asiatiques
- souches Cag+ = facteur de risque pour le cancer gastrique :
cancer => 95% Cag+ gastrite non-atrophique => 40 % Cag+
- Contient 22 gènes requis pour la synthèse d'un système de sécrétion de type IV (SST4)
40 kb
Cellule
épithéliale
H. pylori Membrane interne
Membrane externe
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H. pylori
Cellule épithéliale
CagA
SST4
CagA, une molécule pro-oncogène
injectée par le SST4 Cag récepteur
intégrines α5 ß1
- Remaniement du cytosquelette (augmentation de la mobilité et élongation cellulaire) - Prolifération cellulaire
CagA P
SHP2
SRC ABL
CagA
P CSK
fragments de PG Viala et al.
Nature Immunol. 2004
Activation de NF-kB => Stimulation de la
transcription de la cytokine pro-inflammatoire IL-8
Nod1
Perturbation - des jonctions serrées et adhérentes - de la polarité cellulaire
CagA JAM
ZO-1
ß-catenin Activation anormale
Hyperprolifération et différentiation
aberrante
(D'après Polk and Peek, Nature Reviews Cancer, 2010)
Rôle du SST4 Cag dans la transformation des cellules épithéliales gastriques 25
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Tests diagnos)ques
26 Source: Kenneth E.L. McColl, N Engl L Med 2010; 362; 17
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Tests diagnos)ques
27 Source: Maastricht 4, Delchier SFED
! Introduc)on
! Indica)ons
! Traitements d’éradica)on
! Conclusions
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Recommanda)ons
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Et …. Maastricht 4: Gut 2012;61:646-664
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Recommanda)ons de Maastricht IV
30 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
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Pe)t cas clinique…
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! 28 ans, femme ! Gène épigastrique post-‐prandiale ! Parfois pyrosis nocturne ! Ballonnement, saMété précoce ! Gastro? Ou IPPs?
Gastroscopie ! RGO, oesophagite grade A ! Gastrite HP Faut-‐il traiter?
! Oui, pour le reflux? ! Oui, pour la dyspepsie ! Non…
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Indica)ons de traitement
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Indica)ons de traitement
33 Source: Lamarque D, et al, Revisiondes recommandations franc¸aises sur la prise en charge de l’infection par Helicobacter pylori.
Hepato Gastro 2012 ; 19 : 475-502.
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Indica)ons de traitement
34 Source: Delchier SFED 2011
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Indica)ons de traitement: MALT
35 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
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Test and treat?
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Indica)ons de traitement: dyspepsie et acidité
37 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
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Indica)ons de traitement: malades à haut risque de cancer gastrique (zones de faible incidence)
38 Source: Delchier SFED 2011
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Indica)ons de traitement: RGO
39 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
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Indica)ons de traitement: IPPs
40 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
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Indica)ons de traitement: AINS
41 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
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Indica)ons de traitement: maladies extra-‐gastriques
42 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
! Introduc)on
! Indica)ons
! Traitements d’éradica)on
! Conclusions
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Pe)t cas clinique…
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! PaMent âgé de 24 ans, masculin ! Né Belgique, parents marocains ! Douleurs epigastriques aiguës post
prandiales depuis 6 jours ! Gastro?
! Ulcère gastro-‐duodénal ! HP+ au test uréase rapide
! R proposé: ! Trithérapie OAC ou OMC? ! Traitement séquenMel? ! Quadrithérapie?
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Traitement HP: taux des résistances
45 Source: Delchier SFED 2012
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Conséquences de l’augmenta)on des résistances à la clari et lévo
46 Source: Delchier SFED 2012
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Traitement séquen)el
47 Source: Zullo et al, Gut 2007;56:1353-1357
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Comparaison traitement séquen)el et trithérapie
48 Source: Vaira et al, Ann Intern Med 2007;146:556-563
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Comparaison traitement séquen)el et trithérapie: impact de la résistance à la clarithromycine
49 Source: Vaira et al, Ann Intern Med 2007;146:556-563
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Quadrithérapie bismuthée
50 Source:
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Résultats Pylera
51 Source:
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Résultats Pylera: impact de la résistance au metronidazole
52 Source: SFED 2011
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Thérapie guidée par an)biogramme (ou PCR)
53 Source:
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Si allergie Pénicilline
54 Source:
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Algorythmes de traitement HP
55 Source:
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Algorythmes de traitement HP
56 Source:
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Vérifica)on de l’éradica)on HP: test urée
57 Source: SFED 2011
! Introduc)on
! Indica)ons
! Traitements d’éradica)on
! Conclusions
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Conclusions
o Helicobacter pylori : une bactérie responsable de diverses pathologies de l'estomac chez l'homme.
o H. pylori colonise de manière persistante la moiMé de la populaMon humaine mondiale (800 000 morts/an).
o H. pylori = la seule bactérie reconnue comme oncogène de classe 1 (MALT et adénocarcinome)
o H. pylori doit être cherché et traité chez les malades à haut risque de cancer gastrique.
59 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
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Conclusions o IndicaMon de recherche et traitement stables depuis Maastricht 3
o Tests diagnosMques: sérologie uMle comme diagnosMc iniMal (hémorragie, MALT, malade sous IPPs)
o À ce jour, le traitement séquenMel IPP + amoxicilline 5 jours puis IPP + clarithromycine + métronidazole 5 jours consMtue le traitement probabiliste de référence.
o La quadrithérapie oméprazole + bismuth + métronidazole + tétracycline 10 jours consMtuera une alternaMve.
o Le test respiratoire à l’urée 13C doit être systémaMquement fait pour contrôler l’efficacité du traitement anM HP
60 Source: Malfertheimer et al. Maastricht IV. Gut 2012
Helicobacter pylori, inflammation chronique et cancer gastrique
Hilde de Reuse ([email protected])
Unité de Pathogenèse de
Helicobacter
Institut Pasteur, PARIS 61