Guide de Néologie Terminologique

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  • 1conomie transparence objet nonymienologie conomie langue de spcialitnymie transparence objet drivationterminologisation univocit domainologie domaine conomie nonymieonomasiologie motivation conceptnologie lexicale drivation conomiedrivation onomasiologie termemotivation terminologie drivationconomie domaine terme univocittristique objet motivation nologieconcept drivation terminologisaticaractristique terme nologie univocitparence objet langue de spcialitterminologisation nologie morphologiquonomasiologie conomie nologie lexicalecaractristique objet nologie domainenologie morphologique langue de spcialitnologie lexicale transparence drivationterme univocit terminologisationnologie conomie langue de spcialitminologisation motivation objetparence drivation caractrisnologie onomasiologie univocitnonymie domaine terminologie conceptsation domaine transparent termeterme caractristique conomie nologieonomasiologie concept onomasioloterme motivation caractristiquedomaine objet terminologisationtransparence nologie morphologiqueconomie nologie lexicale conceptonomasiologie nologie drivationterminologisation drivation conomiecaractristique nonymie domaine

    Terminologie Terminologie Terminologia Terminologia Terminology

    GUIDEDE

    NOLOGIETERMINOLOGIQUE

  • 2

  • 31 Quest-ce que la nologie ? 1.1 Nologie morphologique 1.2 Nologie lexicale

    2 Importance de lactivit nologique terminologique

    3 Situations de cration terminologique 3.1 Nologie primaire 3.2 Nologie traductive

    4 Typologie des nologismes

    5 Implantation des nologismes 5.1 Lexicalisation 5.2 Anglicismes

    6 Principes de la nologie terminologique ou nonymie 6.1 Principes de base 6.1.1 Notions de terminologie 6.1.2 Formes du terme 6.1.3 Critres de qualit dun nologisme 6.2. Recommandations pour la cration de termes 6.2.1 Dmarche onomasiologique 6.2.2 Rattachement un domaine 6.2.3 Dfinition de la notion 6.2.4 Cration dun terme nouveau

    7 Analyse dexemples de cration terminologique

    8 Exemples de procds de formation en franais

    9 Conclusion

    Bibliographie

    555

    7

    888

    11

    131313

    15151515161919191920

    22

    27

    30

    32

    Sommaire

  • 4

  • 5Le Grand Robert dfinit la nologie comme un ensemble de processus par lesquels le

    lexique dune langue senrichit : drivation et composition, volution smantique, em

    prunts, calques ou tout autre moyen (sigles, acronymes).

    La question de la nologie est le plus souvent aborde sous langle de la langue gnrale,

    mais ce sont les langues de spcialit qui produisent le plus de termes nouveaux, en

    relation avec le dveloppement des sciences et des techniques.

    La nologie est souvent un acte individuel1. Lavenir des nologismes est donc trs incer

    tain, raison pour laquelle il est important dimpliquer le plus grand nombre de personnes

    possible dans le processus de cration terminologique.

    1.1 Nologie morphologique

    Chacun dentre nous peut crer des mots dans sa propre langue et sait intuitive

    ment quels moyens employer. partir de la racine dun mot il est possible de

    former dautre mots, comme des substantifs, verbes, adjectifs, adverbes : p. ex.

    varier, variation, variable, variabilit, invariable, etc. Un mot peut tre cr et utilis

    pour rpondre un besoin spontan, ponctuel et disparatre aussi vite quil est

    n. On parle alors de nologie morphologique , frquente dans la langue g

    nrale. Les possibilits sont quasiment infinies, cest ce qui explique que tous les

    mots possibles du vocabulaire dune langue ne soient pas rpertoris dans les

    dictionnaires de langue.

    1.2 Nologie lexicale

    En langue de spcialit, la nologie consiste dans la cration de termes spcia

    liss. Ce type de nologie est dite lexicale , car les termes crs vont enrichir

    le vocabulaire dun domaine de spcialit. La cration lexicale, appele aussi

    nonymie 2, rpond un besoin impratif de dnommer, de dsigner de faon

    1 Leroy Louis (1971). Nologie et nologisme, Essai de typologie gnrale. Paris : CILF, La banque des mots n 1, p. 7

    2 Rondeau Guy (1984). Introduction la terminologie. 2e d. Qubec : Ed. Gatan Morin, p. 121

    1 Quest-ce que la nologie ?

  • 6univoque des notions nouvelles, que ces notions correspondent des objets

    concrets ou abstraits, des processus, des proprits, voire des sentiments. Dans

    de nombreux domaines (informatique, conomie et gestion, mdecine, etc.) la

    cration de termes nouveaux se fait en anglais.

  • 7En gnral, un terme est utilis par les spcialistes dun domaine prcis et contribue

    la qualit de la communication lintrieur de ce domaine. Grce une terminologie de

    qualit, la communication spcialise est sans quivoque. La qualit de la communica

    tion rside, notamment, dans la transparence (le lecteur doit comprendre instantan

    ment la teneur du message), lunivocit (le message dlivr doit tre exempt dambigut),

    lconomie (le texte spcialis doit tre le plus court possible) et ladquation avec les

    systmes linguistiques concerns. En langue de spcialit, cest le terme qui vhicule le

    contenu technique (au sens large) dun texte ou dun document. Un terme mal choisi aura

    un effet nfaste sur la communication, jusqu rendre celleci opaque et confuse. Il est

    donc important dapporter un soin particulier la cration de termes nouveaux.

    La langue, en tant que vecteur de communication, a besoin de termes nouveaux. La

    cration de termes nouveaux rpond aux besoins dexpression et de communication des

    locuteurs. Une langue qui cre des termes est une langue qui senrichit ; linverse, une

    langue qui nvolue pas, une langue qui ne se renouvelle pas en crant du vocabulaire

    spcialis est destine disparatre. Selon Diderot, si la langue dun peuple donne son

    vocabulaire, il est galement vrai que ce vocabulaire est un tableau assez fidle de toutes

    les connaissances de ce peuple ; toujours selon Diderot, sur la seule comparaison

    du vocabulaire dune nation en diffrents temps, on pourrait se former une ide de ses

    progrs 3.

    Les nologismes sont donc les tmoins des volutions dune socit et refltent ltat de

    dveloppement scientifique, technique et culturel de cette socit une priode prcise.

    Les nologismes peuvent avoir un impact non ngligeable sur limage dune entreprise

    ou dune institution, sur ce quon appelle lidentit visuelle. Ce nest pas un hasard si

    des entre prises comme Microsoft, IBM, Google, Twitter ou encore Facebook, dans le

    monde de linformatique et de linternet, rivalisent dingniosit pour crer des noms et

    des termes qui marquent les esprits et simposent dans leur secteur dactivit. Microsoft

    a cr les fentres, Facebook, les amis4, Twitter, les tweets et les followers, etc.

    3 Naigeon JacquesAndr (1821). Mmoires historiques et philosophiques sur la vie et les ouvrages de Denis Diderot. Paris : J.L.J. Brire, p. 83, Livre numrique Google

    4 Fentre et amis sont deux exemples de terminologisation.

    2 Importance de lactivit nologique terminologique

  • 83.1 Nologie primaire

    La cration de termes intervient le plus souvent la suite de lapparition, dans

    le milieu socioprofessionnel, de nouvelles notions qui correspondent des

    techniques ou des technologies nouvelles, des documents ou des instruments

    nouveaux, etc. Les auteurs de ces nologismes sont des spcialistes (ingnieurs,

    chercheurs) qui souhaitent communiquer entre eux, lintrieur de leur domaine

    de spcialit, rarement des linguistes. G. Rondeau parle de nonymie dori

    gine 5, dautres auteurs de nologie primaire . Les spcialistes dun domaine

    connaissent parfaitement l objet quils doivent dnommer, en particulier ses

    caractristiques essentielles, et ils font intuitivement le bon choix de dnomina

    tion. Cependant, il arrive parfois que leur choix soit guid par des proccupations

    dordre idologique (moderne ou dsuet : efficience plutt quefficacit), politique

    (politiquement correct, dans lair du temps : non voyant plutt que aveugle), voire

    affectif (flatteur, valorisant Strassenfachmann plutt que Lastwagenfahrer ou en

    core apprenant plutt quapprenti), ce qui est souvent prjudiciable la qualit du

    choix nologique.

    3.2 Nologie traductive

    linverse, les traducteurs sont rarement appels crer des termes nouveaux.

    Cependant, traducteurs et linguistes (rdacteurs ou terminologues) peuvent tre

    amens proposer des quivalents lorsquil nexiste pas de terme, dans

    leur langue, pour dnommer des objets spcifiques dans une autre langue.

    Cest ce que certains appellent la nologie traductive 6, dautres, la nonymie

    dappoint 7.

    Parmi les moyens qui se prsentent eux, les traducteurs ont notamment re

    cours au calque (cf. 8 Exemples de procds de formation en franais). Le calque

    consiste intgrer un mot tranger dans une langue, par exemple en le franci

    5 Rondeau Guy (1984). Introduction la terminologie. 2e d. Qubec : Ed. Gatan Morin, 238 p.6 Hermans Adrien, Vansteeland Andre (1999). Nologie traductive (1999). RINT, Terminologies nouvelles, n 20,

    p. 377 Rondeau Guy (1984). Introduction la terminologie. 2e d. Qubec : Ed. Gatan Morin, p. 124

    3 Situations de cration terminologique

  • 9sant , ou en traduisant mot mot le terme de la langue trangre. Le proces

    sus de nologie sappuie alors sur le mot , cestdire sur la forme8, et non pas

    sur le contenu9, cestdire la notion dnommer.

    La solution la plus frquemment utilise est le recours au syntagme descriptif

    travers lequel ils traduisent avant tout des ides. Le recours aux syntagmes

    descriptifs constitue 60% de la terminologie traductive. Le risque de ce proc

    d est que plusieurs syntagmes, non lexicaliss (cf. 5.1 Lexicalisation), donc non

    stables, soient crs et diffuss par diffrents traducteurs pour dcrire une mme

    notion, induisant ainsi une large dispersion terminologique. La lgislation suisse

    en fournit de nombreux exemples : tre capable de prendre part aux dbats10,

    tre apte prendre part aux dbats11, tre en tat de prendre part aux dbats12,

    en franais, et autorit di rilascio, autorit rilasciante il visto, autorit che rilascia il

    visto13, en italien.

    Dans le monde de la traduction, notamment au sein de ladministration fdrale,

    le recours au calque et au syntagme descriptif sont les deux faces dun mme

    procd : la recherche dquivalents, en particulier des termes allemands et

    anglais. Dans lurgence de lactivit traductive, on prfrera traduire mot

    mot un terme allemand ou anglais plutt que de rechercher le terme franais ou

    italien correspondant. Pour se faire le calque prendra la forme dun syntagme non

    lexicalis, p. ex. base de calcul de limpt (Steuerbemessungsgrundlage) pour

    assiette fiscale ou bulletin des prix (Preisbulletin) pour mercuriale.

    Le rle des traducteurs dans le processus de cration et de diffusion des termes

    nouveaux est essentiel, car les termes quils crent sont immdiatement utiliss,

    vhiculs en contexte, et dissmins dans le monde socioprofessionnel14.

    Ils contribuent ainsi largement lenrichissement de la langue dans les domaines

    spcialiss.

    8 Correspond au signifiant, en linguistique. 9 Correspond au signifi, en linguistique.10 Code de procdure pnale suisse, art. 114 al. 1 (RS 312.0, tat 201305)11 Code de procdure pnale suisse, art. 251 al. 2 (RS 312.0, tat 201305)12 Arrts du Tribunal fdral, 1P.8/2007 (2007)13 Ordinanza VIS (RS 142.512, stato 201401)14 Hermans Adrien, Vansteeland Andre (1999). Nologie traductive. RINT, Terminologies nouvelles, n 20, p. 37

  • 10

    Les traducteurs produisent des textes qui auront la mme fonctionnalit que les

    textes dans la langue source : transmettre un message de faon claire et uni

    voque, au mme titre que les textes originaux. Cela est particulirement vrai pour

    les textes lgislatifs dont les traductions font foi en Suisse. Il est donc essentiel

    que les nologismes, que les traducteurs mettent en circulation, rpondent aux

    critres fondamentaux de la cration terminologique (cf. 6 Principes de la nologie

    terminologique ou nonymie).

  • 11

    4 Typologie des nologismes

    En langue de spcialit, les nologismes et les procds utiliss pour leur cration

    peuvent tre tudis sous diffrents angles comme le mode de cration, la motivation, la

    situation, le domaine ou encore lpoque.

    Selon le procd de cration des termes (cf. 8 Exemples de procds de forma

    tion en franais), on peut diffrencier : les mots nouveaux (p. ex. ordinateur, courriel),

    les sens nouveaux, ou nologie smantique, (p. ex. jupe [dune automobile], bretelle

    [dautoroute], souris [informatique], etc.), les changements de catgorie grammaticale

    (p. ex. ladjectif idal devient un substantif : un idal)15, ou encore de graphie, notam

    ment le passage de la majuscule la minuscule qui indique que le terme se lexicalise

    (cf. 5.1 Lexicalisation), p. ex. labrviation anglaise AIDS qui devient aids et Aids en

    anglais et en allemand et sida en franais. Autre exemple : LED, acronyme du terme

    anglais light-emitting diode, devenu un nom commun dans toutes les langues, qui

    scrit en minuscule en franais et en italien (led), et qui prend la marque du pluriel aussi

    bien en allemand (LEDs) quen franais (leds).

    Selon les besoins, les nologismes peuvent tre considrs comme des nolo

    gismes ncessaires, cestdire crs en fonction dun besoin imprieux de dnom

    mer les choses, les ides, les technologies nouvelles (p. ex. ralit augmente, realt

    aumen tata, erweiterte Realitt) ou comme des nologismes de luxe, crs sans besoin

    rel mais en fonction dune mode ou dune tendance gnrale (comme automation,

    efficience, gouvernance, en franais, automazione, efficienza, governanza, en italien,

    ou encore Automation, Effizienz, Gouvernanz, en allemand, tous ns sous linfluence

    de langlais).

    Selon la situation16, on distingue, comme dcrit au chapitre 3 (Situations de cration

    terminologique), la nologie primaire, qui consiste crer des termes pour dnommer

    une notion nouvelle, et la nologie traductive, qui a lieu pendant le processus de tra

    duction en cas dabsence dquivalence dans la langue cible.

    15 Selon Georges Matorz dans Goosse Andr (1971). De laccueil au refus. Paris: CILF, La banque des mots, n 1, p. 37

    16 Hermanns Adrien, Vansteelands Andre (1999). Nologie traductive. RINT, Terminologies nouvelles, n 20, p. 37

  • 12

    Selon le domaine, aussi, les modes de cration terminologique varient. Dans son

    tude de quatre terminologies 17, A. Hermanns montre que, dans les domaines

    scientifiques, la terminologie est moins sujette aux variations que dans les sciences

    humaines ou le droit.

    Le vocabulaire de la chimie est un cas particulirement complexe, trs structur mais

    sujet de nombreuses variations. ct dune nomenclature internationale normali

    se, il existe des nomenclatures divergentes entre lEurope et les tatsUnis, de nom

    breux noms de produits et de molcules, et une multitude de synonymes.

    Mme phnomne pour le vocabulaire de la pharmacie et de la pharmacologie. Les

    produits sont dsigns par trois types de dnominations : le nom commercial, le nom

    gnrique international (INN : International Nonproprietary Name) et le nom chimique.

    Le monde de la construction et du btiment est, lui aussi, caractris par une grande

    dispersion terminologique due la prsence dune terminologie des chantiers diff

    rente de la terminologie officielle. Par ailleurs, le recours aux noms de marques et autres

    ponymes y est trs frquent : ainsi velux est utilis pour fentre rampante (aussi en

    italien pour finestra da tetto ou finestra da mansarda), plexiglas pour polymthacrylate

    de mthyle (aussi en italien pour polimetilmetacrilato), et le vocabulaire, mme norma

    lis, peut souffrir de lexistence de normes diffrentes dun pays lautre.

    Selon les poques : les modes de formation des termes voluent avec le temps.

    A. Hermanns montre, travers divers exemples, lvolution du vocabulaire de la chimie

    qui, aprs avoir t marqu par lempreinte du franais (influence des travaux de

    Lavoisier), a subi linfluence de lallemand pour finalement devenir international et donc

    anglais aprs la Deuxime Guerre mondiale.

    Aujourdhui lactivit nologique est souvent associe, tous domaines confondus,

    la recherche dquivalents pour des anglicismes (sur cet aspect cf. le point 5.2 Angli

    cismes et Productivit sous 6.1.3 Critres de qualit dun nologisme).

    17 Hermanns Adrien (1992). tudes de quatre terminologies. Paris: CILF, La banque des mots, n 43, p. 51

  • 13

    5 Implantation des nologismes

    5.1 Lexicalisation

    La lexicalisation dun nologisme correspond au processus dintgration de ce

    nologisme dans le lexique dune langue de spcialit. Selon B. Habert, cest

    le processus de lexicalisation qui transforme une dnomination possible en une

    dnomination effective18. On considre quun nologisme est lexicalis lorsque sa

    diffusion a atteint un certain seuil, quand il est connu et utilis par les spcialistes

    du domaine. Lorsquil est lexicalis, un terme cesse dtre un nologisme. Bien

    entendu, un nologisme a plus de chances dtre lexicalis sil rpond aux critres

    voqus au point 6 Principes de la nologie terminologique ou nonymie.

    Le processus de lexicalisation est souvent prcd dune phase durant laquelle

    le terme est instable et la dispersion terminologique, cestdire la prsence de

    synonymes, importante. Dans le domaine de la formation continue, la notion de

    validation des acquis de lexprience (VAE) sest impose. Sa dsignation en

    anglais reste encore floue et donne lieu de trs nombreuses variantes, comme :

    recognition, validation and accreditation of non-formal and informal learning (RVA),

    accreditation of prior learning (APL), prior learning assessment and recognition

    (PLAR), etc.

    La lexicalisation des nologismes, leur accueil et leur implantation dans lusage

    sont des problmes rcurrents de la nologie.

    5.2 Anglicismes

    En matire d acceptabilit , la traduction des anglicismes, ncessaire pour ga

    rantir la clart de la communication (cf. 6.1.3 Critres de qualit dun nologisme),

    constitue un cas particulier car elle se heurte de fortes rsistances surtout

    dans les milieux spcialiss. Pour traduire un terme anglais, on aura souvent

    recours un mot connu de la langue. Or traduire un terme spcialis par un mot

    18 Habert Benot (1998). Des mots complexes possibles aux mots complexes existants : lapport des corpus ; sous la direction de A.M. Diller. Thse en linguistique. Universit Lille III Charles de Gaulle, 197 p.

  • 14

    ordinaire est ressenti comme la ngation de la spcificit du terme. Cest ce

    qui se passe lorsquon traduit marketing, terme charg des techniques de vente

    anglosaxonnes, originales et efficaces, par commercialisation, qui est ressenti

    comme extrmement plat et fade19. En plus de limage moderne, jeune et dyna

    mique que vhiculent les termes anglais dans les milieux spcialiss, le malaise

    provient du fait quil ny a pas dadquation parfaite entre les lexiques des diff

    rentes langues, ce qui donne le sentiment que lquivalent propos ne recouvre

    pas la mme ralit que le terme anglais.

    19 Mortureux MarieFranoise (1987). Les rsistances la nologie terminologique : systme lexical et facteurs socioculturels. Meta : journal des traducteurs / Meta : Translators Journal, vol. 32, n 3, p. 250254

  • 15

    6 Principes de la nologie terminologique ou nonymie

    6.1 Principes de base

    6.1.1 Notions de terminologieLes trois notions de base de la terminologie sont la notion 20, le terme

    et l objet . La notion 21 est, en quelque sorte, la reprsentation abstraite

    quon se fait dun objet. Le terme est la dnomination verbale dune no

    tion, ou plus simplement le nom que lon donne une notion ou l ob

    jet correspondant ; cest une forme linguistique qui dnomme une unit non

    linguistique. Dans la majorit des cas, il sagit dun substantif, dans une moindre

    mesure dun verbe ou dun adjectif. L objet 22, quant lui, est lentit quon

    peut voir ou ctoyer sous une forme concrte (p. ex. une imprimante) ou abstraite

    (p. ex. un sentiment). Ces trois notions sont indissociables et relies entre elles par

    un lien direct et immdiat23.

    Le nologisme est un terme nouveau, ou un terme existant avec un sens nou

    veau, qui nest pas stable et qui ne se trouve pas encore dans les dictionnaires.

    Un terme cesse dtre un nologisme lorsquil est lexicalis (cf. 5.1 Lexicalisation).

    6.1.2 Formes du termeEn franais, en italien comme en allemand24, les termes peuvent se prsenter sous

    diffrentes formes : sous la forme de termes simples (logiciel, programma, Com-

    puterprogramm), de termes composs (alcool linaire amylique, alcole lineare

    amilico, geradkettiger Amylalkohol), de termes composs avec juxtaposition des

    lments, construction frquente en franais pour viter des syntagmes trop longs

    (service clients) et en italien (servizio clienti), de termes composs avec abrge

    ment (cotourisme, ecoturismo, kotourismus), voire de termessyntagmes ou

    20 Concept et notion sont synonymes en franais.21 Les trois notions sont dfinies dans la norme ISO 1087.22 Le didacticiel, Le Pavel, dfinit lobjet comme suit : Toute entit concrte ou abstraite reconnaissable grce ses

    attributs ou proprits caractristiques23 Luc Damas fournit une illustration humoristique de ces trois notions sur le blog : Humeurs illustres dun

    enseignantchercheur, ladresse http://www.lucdamas.fr/humeurs/concepttermeobjet/24 Pour lallemand, nous renvoyons au dossier du DTT, Terminologiearbeit: BestPractices 2.0, 2014, et au chapitre

    intitul Modul 3 Benennungen.

  • 16

    de phrasologies25 (canton qui a octroy l'autorisation, en franais, cantone che

    ha rilasciato il permesso en italien, mais Bewilligungskanton, en allemand).

    Les formes syntagmatiques tant longues et difficiles mmoriser, elles sont

    souvent remplaces par des formes abrges (abrviations, sigles, acronymes) :

    p. ex. validation des acquis de lexprience est remplac par VAE, en franais,

    validation of prior learning par VPL, en anglais ; petites et moyennes entreprises

    est frquemment remplac par PME, en franais, piccole e medie impese par

    PMI, en italien, et kleine und mittlere Unternehmen par KMU, en allemand.

    6.1.3 Critres de qualit dun nologismePour reprendre les termes dAndr Goosse, le nologisme est jug surtout en

    fonction de son efficacit . Par efficacit on entend le fait quun nologisme

    joue son rle dinstrument de la communication. Si, linverse, le nologisme

    reprsente un obstacle la comprhension, il empche la langue de fonction

    ner correctement. Pour garantir l efficacit du nologisme, pour assurer sa

    viabilit , il est important quil rponde un certain nombre de critres :

    Univocit et spcificit : lintrieur dun domaine, un terme ne devrait dsi

    gner quune seule notion, linverse une notion devrait tre dnomme par un

    seul terme, afin dviter la confusion. Cest le cas, par exemple, de : ordinateur,

    en franais, stampante, en italien, et Glhlampe, en allemand. De lunivocit nat

    la spcificit du terme, indispensable une bonne comprhension. En franais,

    le terme transformation nest pas spcifique car il peut avoir plusieurs sens,

    contrairement transformation alimentaire. Trasformazione, en italien, nest pas

    spcifique contrairement trasformazione geometrica. Mme constatation en

    allemand : Absturz nest pas spcifique, contrairement Programmabsturz et

    Systemabsturz. Des termes qui viennent de la langue commune comme pres-

    tation, transformation, en franais, autorit, trasformazione, en italien, Organ,

    Trger, en allemand, sont souvent polysmiques et vhiculent une certaine ambi

    gut. Dans la plupart des cas, cest le contexte qui permet de lever lambigut.

    25 Le franais et litalien tant des langues de traduction dans ladministration fdrale suisse, le recours la forme syntagmatique est plus frquent quen allemand.

  • 17

    Motivation : le sens dun terme doit facilement pouvoir se dduire du terme

    luimme. Cest le cas de vol spatial habit, en franais, de volo spaziale uma-

    no, en italien et de bemannte Raumfahrt, en allemand. La motivation du terme

    nat du choix de la ou des caractristiques reprises dans le terme : a peut

    tre la classe dobjets laquelle appartient lobjet, lusage quon en fait, ses

    composants, les caractres perus par les sens (forme, couleur, dimension), sa

    localisation gographique, etc. On distingue deux types de motivation :

    la motivation morphologique, dune part, qui nat du choix des moyens mor

    phologiques utiliss pour construire le terme et rendre le sens : pisciculture

    ou mammographie, en franais, piscicoltura et mammografia ou encore

    avamprogetto, en italien, Vorfussbelastung et Wertpapierkennnummer, en

    allemand.

    la motivation smantique, dautre part, qui joue avec la ressemblance et lana

    logie : virus (informatique), en franais, testa (di un bullone), en italien, Maus

    (Computer), en allemand.

    La motivation du terme soppose, par dfinition, larbitraire du mot dans la

    langue gnrale26.

    conomie linguistique : pour quun nologisme simpose, quil soit accept,

    il doit tre court et facile mmoriser. Or les langues ne sont pas sur un pied

    dgalit face ce principe. Lallemand et langlais peuvent crer facilement

    des termes simples alors que le franais et litalien, surtout dans le processus

    de traduction, ont souvent recours des constructions syntagmatiques (cf. 3.2

    Nologie traductive). Ainsi, en allemand, verhandlungsfhig est la fois court

    et motiv, alors que les quivalents franais : capable de prendre part aux d-

    bats, et italien : capace di prendere parte al dibattimento, sont certes motivs

    mais beaucoup plus longs. Conformment au principe dconomie linguistique,

    les termes trop longs sont souvent remplacs par des formes abrges

    (cf. 6.1.2 Formes du terme), limage de diode lectroluminescente, en fran

    26 Nicolas Christian (1996). Motivation morphologique et ambigit smantique. LInformation Grammaticale, n 68, pp. 4749

  • 18

    ais, diodo a emissione luminosa et Lichtemittierende Diode27 dnomms com

    munment LED, qui correspond lacronyme du terme anglais light-emitting

    diode.

    Appartenance au systme de la langue : un nologisme ne peut tre totale

    ment accept que sil sintgre parfaitement au systme morphologique et

    phonologique de la langue concerne. Lorthographe et la prononciation jouent

    un rle essentiel. Un terme quon ne comprend pas, dont lorthographe ou la

    prononciation ne sont pas faciles, a peu de chances de simposer et dtre

    accept. Whistleblowing ou gender mainstreaming, comme les anglicismes en

    gnral, sintgrent mal au systme de la langue franaise. Ce principe est

    la pierre dachoppement de lintgration des anglicismes, raison pour laquelle

    le franais et litalien sont rticents recourir lemprunt (cf. 8 Exemples de

    procds de formation en franais) et cherchent des quivalents dans le voca

    bulaire existant comme, surveillance ou monitorage, en franais, monitoraggio,

    en italien pour monitoring ou encore paritarisme comme quivalent franais

    gender mainstreaming.

    Productivit : le principe de la productivit est troitement li au principe pr

    cdent. Pour sintgrer la langue, le nologisme doit tre productif cestdire

    permettre la cration de formes lexicales drives : adjectifs, verbes, etc.

    comme construction qui donne dconstruction et dconstruire, en franais,

    costruzione, decostruzione, en italien et Bau, Rckbau, en allemand.

    Certains anglicismes ont russi sintgrer en franais et en italien et

    produire des drivs. Cest le cas, notamment, de surf qui produit surfer ou

    encore zoom qui produit zoomer et zoomage. Cependant, lincapacit de bon

    nombre de mots anglais produire des formes drives est un des obsta

    cles majeurs leur intgration dans les autres langues, en particulier le franais

    et litalien. En revanche, le fonds lexical allemand, du fait de sa parent avec

    langlais, intgre les anglicismes assez facilement : dune part, par lajout sys

    tmatique de la majuscule aux substantifs (E-Mail) et, dautre part, par lajout

    27 Lallemand utilise aussi la forme abrge Leuchtdiode.

  • 19

    de la terminaison en aux verbes (downloaden construit partir de download)

    et lapplication de la flexion allemande, en particulier dans le cas des participes

    passs : ainsi, downloaden donne downgeloadet ou gedownloadet.

    6.2 Recommandations pour la cration de termes

    6.2.1 Dmarche onomasiologiqueLa cration nologique sintgre dans une dmarche onomasiologique (par

    opposition la dmarche smasiologique des dictionnaires de langue). Cette

    dmarche consiste partir de lide, cestdire de la notion, pour aller vers le

    terme. Cela implique une analyse minutieuse de la notion dnommer. Cette

    analyse notionnelle se fait selon une dmarche prcise dcrite ciaprs (cf. 6.2.3).

    6.2.2 Rattachement un domaineLa terminologie nexiste pas sans domaine de spcialit. Un terme est troite ment

    li un domaine : p. ex. aiguille (ingnierie nuclaire)28, en franais, marmotta

    (ingnierie ferroviaire)29, en italien, Schwert (voile)30, en allemand ; cest le domaine

    qui lui donne tout son sens.

    6.2.3 Dfinition de la notion Situer la notion dans sa classe dobjet

    Toute notion fait partie dun systme notionnel dans lequel elle est rattache

    dautres notions lintrieur dune classe dobjets ; une classe dobjets dpend

    dun domaine et est identifie par une notion gnrique, p. ex. personne, autori

    t, document, instrument, mesure (de prvention, dintervention, dinformation),

    etc. Ainsi les deux notions, dsignes par imprimante et clavier, en franais,

    stampante et tastiera, en italien, Drucker et Tastatur, en allemand, appartiennent

    la classe dobjet priphrique informatique .

    28 Crayon utilis dans le cur dun racteur neutrons rapides. (source FranceTerme)29 Signal nain consistant en un feu deux faces (arrt avancer), utilis pour grer les mouvements de manuvre

    des trains.30 Lame qui traverse le fond dun driveur par un puits de drive et qui lempche de driver.

  • 20

    Identifier les caractristiques de la notion

    lintrieur dune classe dobjets, les notions sont dcrites partir de leurs

    caractristiques. Une caractristique peut tre une proprit physique telle

    que la composition dun objet, sa forme, sa couleur, sa fonction, etc. Ainsi

    tous les siges ont comme caractristique commune et essentielle la fonc

    tion pour sasseoir qui dfinit la classe dobjets, alors que la caractristique

    possde un dossier est une caractristique distinctive qui permet de distin

    guer les notions chaise et tabouret .

    La dfinition de la notion est une tape essentielle de la cration terminolo

    gique. Elle dcrit une notion de faon univoque lintrieur dune classe dob

    jets en reprenant ses caractristiques essentielles et distinctives (cf. 7 Analyse

    dexemples de cration terminologique).

    6.2.4 Cration dun terme nouveauLe terme se compose dans la majorit des cas31 de deux parties32 :

    Dun ct une partie classifiante qui renvoie la notion une classe dobjet au

    sein dune taxinomie ou dun systme notionnel spcifique. Cette partie corres

    pond au gnrique de la classe dobjets laquelle appartient la notion. Ce peut

    tre une personne, une organisation, une mthode, un dispositif, un instrument

    dintervention, une mesure de protection, etc. (cf. cidessus). Ainsi, en franais,

    chassier peut tre class dans la classe dobjets : animal ou oiseau. Le suffixe

    ier, partie classifiante du terme, dsigne un animal (comme dans bous-ier, four-

    mil-ier, ram-ier, etc.). Litalien trampoli-ere a recours une forme comparable au

    franais, et le terme allemand, Stelz-vogel, prsente une structure encore plus

    explicite33.

    De lautre, une partie qualifiante qui contient la ou les caractristiques de la

    notion dnommer. Dans un premier temps lanalyse consiste numrer toutes

    31 Sauf les cas de termes simples lexicaliss comme bois, table etc.32 Vlasta Kekov (1997). Les tendances de la nologie terminologique en franais contemporain. Studia

    minora Facultatis philosophicae Universitatis. Brunensis33 Trampoli, en italien, et Stelzen, en allemand, signifient chasses.

  • 21

    les caractristiques de lobjet (cf. Identifier les caractristiques de la notion sous

    6.2.3). Dans un deuxime temps il faut procder une slection des caract

    ristiques pour ne garder que la ou les caractristiques essentielles, cestdire

    celles qui font que lobjet est ce quil est, et la ou les caractristiques distinctives,

    cestdire celles qui permettent de distinguer un objet dun autre objet voisin.

    Ainsi la caractristique distinctive de chassier est possde de longues pattes

    (qui lui permettent de marcher dans les marais, telles des chasses). Cest le

    choix de la caractristique cl qui va dterminer la motivation du terme (cf. 6.1.3),

    donc sa transparence. Ainsi, le terme puce (lectronique) a t choisi par analogie

    avec linsecte (en raison du rapport entre la taille et la puissance).

    Dans les dnominations syntagmatiques, cette structure est facilement reconnais

    sable : p. ex. personne apte supporter la dtention est compos de personne

    [gnrique classifiant] et apte supporter la dtention [lments qualifiants].

    Mme modle en italien avec libretto [gnrique classifiant] di vaccinazione elet-

    tronico [lments qualifiants] et en allemand avec hafterstehungsfhige [lments

    qualifiants] Person [gnrique classifiant].

    Au moment de sa cration, un nologisme prend souvent une forme syntaxique

    dont les lments peuvent subir des variations (cf. 5.1 Lexicalisation). Ainsi, dans

    la recherche dun quivalent pour home staging, des syntagmes comme redco-

    ration dun bien immobilier avant la vente et travaux damnagement pour faciliter

    la vente ont circul avant que valorisation immobilire (cf. 7 Analyse dexemples

    de cration terminologique), terme lexicalis, ne russisse simposer.

  • 22

    quivalents pour le terme anglais home staging

    La dfinition de home staging en anglais est : Redecorating a home often using

    rented furnishings to make it appear more attractive to potential buyers.

    Analyse des caractristiques de la notion :

    redcoration dun bien immobilier

    le rendre neutre pour que de futurs acheteurs puissent sy projeter

    favoriser la vente immobilire

    valorisation immobilire et mise en valeur immobilire sont tout fait en ad

    quation avec lanalyse qui a t faite de la notion.

    Crer un calque de langlais comme le proposent certains sites allemands avec

    Inszenierung von Wohnraum qui joue sur lide de mise en scne est moins

    efficace car elle est typique de la culture amricaine et correspond moins la

    culture europenne.

    En italien on utilise la fois valorizzazione immobiliare et home staging.

    Dans ce chapitre, nous analysons quelques exemples de nologismes la lumire des

    principes terminologiques dcrits prcdemment.

    7 Analyse dexemples de cration terminologique

  • 23

    quivalents pour le terme anglais whistleblower

    La dfinition de whistleblower est : Employ qui constate et dnonce des malver

    sations qui impliquent des collgues ou des personnes plus haut places dans la

    hirarchie de lentreprise.

    Analyse des caractristiques de la notion :

    employ

    tmoin de malversations

    signale les malversations aux autorits

    lanceur dalerte est lquivalent franais officiel actuel tout fait adquat.

    limage du franais, plusieurs synonymes circulent en italien, par ex. segna-

    latore, lanciatore dallarme, denunciante, informatore, en Suisse, et vedetta

    civica, en Italie ; lallemand a gard Whistleblower.

    Dnomination en allemand de Suisse : Strassentransportfachmann /

    -fachfrau

    Analyse des caractristiques de la notion :

    Fahrer

    schwere Motorwagen mit Anhngern

    transportiert Gter

    erbringt Dienstleistungen fr die Kunden wirtschaftlich und umweltgerecht

    conducteur/conductrice de vhicule lourd en franais et autista di veicoli pe-

    santi en italien sont corrects et motivs. Par contre cest en allemand que le

    principe de la motivation du terme nest pas respecte, contrairement lan

    cienne dnomination, Lastwagenfhrer/Lastwagenfhrerin, motive, elle.

  • 24

    Terme allemand de la formation professionnelle en Suisse : dritter Lernort

    Dritter Lernort employ en allemand dans la loi fdrale sur la formation profession

    nelle est dfini comme suit : Institutionell klar definierter und von beiden anderen

    Lernorten abgegrenzter Teil des beruflichen Lernens [...], der bewusst zwischen dem

    schulischen und dem betrieblichen Lernen angesiedelt ist. 34

    Analyse des caractristiques de la notion :

    Teil des beruflichen Lernens

    zwischen dem schulischen und dem betrieblichen Lernen angesiedelt

    Lanalyse des caractristiques montre que le terme et la notion dnomme ne

    sont pas en adquation en raison du choix erron de la partie classifiante. La

    motivation du terme nest pas respecte. Le synonyme berbetrieblicher Kurs

    est, lui, correct.

    34 Office fdral du personnel (OFPER), Kaufm. Ausbildungs und Prfungsbranche Bundesverwaltung, berbetriebliche Kurse, 11.03.2012

  • 25

    Dnominations suisses des mtiers de la pierre35 en franais, italien et alle-

    mand

    tailleuse de pierre CFC/tailleur de pierre CFC Scalpellina AFC/

    Scalpellino AFC Steinmetzin EFZ/Steinmetz EFZ

    marbrire CFC/marbrier CFC marmista AFC/marmista AFC

    Marmoristin EFZ/Marmorist EFZ

    marbrire du btiment CFC/marbrier du btiment CFC operatrice della

    pietra AFC/operatore della pietra AFC Steinwerkerin EFZ/Steinwerker EFZ

    Les dnominations cidessus mlangent les types de caractristiques : cer

    taines sappuient sur lobjet de la profession, dautres sur le niveau de forma

    tion ou de responsabilit.

    Les termes marbrier/marbrire et marbrier/marbrire du btiment manquent de

    transparence car tous deux ne travaillent pas seulement le marbre mais aussi

    la pierre naturelle en gnral. En ce sens, il rejoint le tailleur de pierre. Mme

    chose en italien pour marmista et operatore della pietra.

    Par ailleurs il est regrettable que les trois langues officielles suivent des modles

    de cration distincts pour dsigner une seule et mme profession, comme

    cest le cas avec marbrier/marbrire du btiment operatore della pietra

    Steinwerker/Steinwerkerin36.

    Dans un contexte multilingue comme celui de la Suisse, il serait souhaitable

    que le choix des dnominations des professions se fasse paralllement dans

    les langues nationales et relvent de la mme motivation. Ceci faciliterait la

    mmorisation et la cohrence autour dune seule et mme notion.

    35 Secrtariat dtat la formation, la recherche et linnovation SEFRI, Professions AZ [en ligne] (page consult le 30/04/2014) http://www.sbfi.admin.ch/bvz/berufe/index.html?lang=fr

    36 Secrtariat dtat la formation, la recherche et linnovation SEFRI, Professions AZ, Marbrier du btiment CFC (Champ professionnel travail de la pierre) [page consulte le 30/04/2014] (disponible sur) http://www.sbfi.admin.ch/bvz/grundbildung/index.html?detail=1&typ=EFZ&item=1245&lang=fr

  • 26

    Termes Langsamverkehr mobilit douce traffico lento tels quils sont

    utiliss en Suisse

    Ce cas est particulirement intressant. La notion dnommer est dfinie comme

    suit : Dplacement mu par la seule force musculaire . Il ne sagit donc ni de

    circulation lente , ni de mode de transport cologique .

    Le choix des termes allemand, Langsamverkehr, et italien, traffico lento, ne corres

    pond donc pas la notion. La motivation est errone.

    Analyse des caractristiques de la notion :

    type de dplacement

    par la force musculaire uniquement

    La partie qualifiante du terme, langsam en allemand et lento en italien, voque

    la lenteur alors que doux/douce en franais peut tre peru comme synonyme

    de cologique , raison pour laquelle les mdias assimilent frquemment les

    transports ferroviaires la mobilit douce. Dans les trois langues le choix du

    terme ne correspond donc pas lintention.

    En franais on aurait pu crer les termes : circulation non motorise, myo-

    dplacement ou encore myomobilit. En italien, traffico non motorizzato37, voire

    miomobilit, en allemand, nicht-motorisierter Individualverkehr38, sont corrects.

    37 Sito del Servizio per il traffico non motorizzato dei Grigioni [page consulte le 30/04/2014] (disponibile sur) http://www.gr.ch/IT/istituzioni/amministrazione/bvfd/tba/flv/chisiamo/Seiten/default.aspx

    38 Bundesamt fr Strassen. konomische Abschtzung der volkswirtschaftlichen Gesundheitsnutzen des Langsamverkehrs in der Schweiz, 2.7.2012 [page consulte le 30/04/2014]

  • 27

    La nologie terminologique fait en principe appel aux mmes procds de formation que

    la langue gnrale. Du point de vue linguistique, les systmes des langues permettent le

    recours un ensemble de procds morphologiques, morphosyntaxiques et morpho

    smantiques, pour crer des dnominations nouvelles.

    Pour ce qui est des procds de formation en franais, nous renvoyons aux ouvrages

    de L. Guilbert39, de A. Goosse40 ou encore de P. Gilbert41 ainsi quaux recommandations

    des services linguistiques centraux de la Chancellerie fdrale en matires de cration

    de mots et de gestion des anglicismes42. Il sagit de procds tels que la drivation, la

    composition, lacronymie ou encore la siglaison, lemprunt ou le calque.

    Nous numrons ciaprs quelques exemples de procds de formation des mots utili

    ss en terminologie43.

    La drivation

    Le franais dispose dun systme suffixal44 important auquel la nologie terminologique

    peut faire appel en privilgiant certains suffixes, notamment ation, age, ment, eur,

    iste, eur, ance, pour les substantifs, el et ique pour les adjectifs et enfin, iser,

    ifier pour les verbes ; cest ainsi que sont ns : dconstruire, horairiste, gouvernance,

    conteneur, etc. Il peut galement y avoir drivation partir dune abrviation, dun sigle

    ou dun acronyme : onusien (de ONU), ocriser (de OCR).

    Les prfixes et les suffixes sont porteurs de sens. Les suffixes peuvent galement

    changer la catgorie grammaticale des mots : le verbe citer devient un substantif dans

    citation.

    39 Guilbert Louis (1978). Problmes du lexique et de la nologie dans la linguistique franaise contemporaine. Philologica Pragensia, 21, n 1, pp. 3443

    40 Goosse Andr (1975). La nologie franaise aujourdhui. Paris : CILF, 72 p.41 Gilbert Pierre (1971). Dictionnaire des mots nouveaux. Paris : HachetteTchou42 Chancellerie fdrale suisse. Aides la traduction et la rdaction [page consulte le 30/04/2014] (disponible

    sur) http://www.bk.admin.ch/themen/lang/04929/index.html?lang=fr43 Voir aussi Dlgation gnrale la langue franaise et aux langues de France (DGLFLF), Nologie et terminologie.

    Repres [page consulte le 30/04/2014] (disponible sur) http://www.dglflf.culture.gouv.fr/publications/Reperes11_TerminoNeo.pdf

    44 Voir aussi Guilbert Louis (1971). La nologie scientifique et technique. Paris: CILF, La banque des mots, n1, p. 45

    8 Exemples de procds de formation en franais

  • 28

    Lemprunt au modle grco-latin

    Cest ce quon a lhabitude dappeler les mots savants ; ce modle est li la driva

    tion car les suffixes et les prfixes y jouent un rle essentiel (cf. La drivation cidessus) ;

    il sagit de formations en -algie, -thrapie, -logie, -mtre, -manie, aro-, tl-, macro-,

    mono-, micro-, poly-, no-, etc. comme dans nvralgie, physiothrapie, technologie,

    hliomtre, etc.

    La composition

    Procd de formation de termes par combinaison de bases lexicales (radicaux ou

    termes) :

    par abrgement : coproduit, cocitoyen, avec une glissement de sens possible ;

    co qui signifiait domestique a volu avec le temps et signifie aujourdhui

    cologique .

    par juxtaposition ou apposition : contrairement lallemand ou langlais, qui

    peuvent juxtaposer les diffrents lments dun terme sans mot de liaison, p. ex. Ver-

    bandsklage / class action, le franais ajoute des mots de liaison de, , pour, comme

    dans action de groupe. En franais, il sagit souvent de formes syntagmatiques, peu

    lexicalises, voire de phrasologies, sapprochant plus de la description (p. ex. auto-

    rit pnale comptente en matire daudition) que du terme. Cependant, il est assez

    frquent, en France plus quen Suisse romande o on fait appel au trait dunion,

    que, linstar de langlais, le franais utilise lapposition simple et juxtapose plusieurs

    lments sans les relier entre eux45 : p. ex. service clients, assurance accidents, etc.

    Un recours ce type de procd permet dviter les termessyntagmes trop longs et

    donc difficiles imposer.

    par combinaison de termes existants (motvalise) : alicament (aliment + mdicament),

    adulescent (adulte + adolescent).

    45 Lusage du trait dunion en franais devrait cependant disparatre la suite de la mise en place des nouvelles rgles dorthographe.

  • 29

    La nologie smantique ou reprise dun lment lexical existant

    Un mot existant est rutilis pour dnommer une notion nouvelle du domaine scien

    tifique et technique ; cest ce quon appelle terminologisation . Cest le cas de

    jupe (dune voiture), bretelle (dautoroute), souris (informatique). Cette reprise touche

    bien souvent des mots de la langue courante au contenu smantique peu marqu,

    comme opration, crneau, machine, instrument, engin, appareil, transformation.

    Ce procd est trs pratique mais, en contrepartie, il favorise lhomonymie et la poly

    smie, phnomnes quil convient habituellement dviter en terminologie qui prne la

    transparence et la monosmie (cf. Univocit et spcificit sous 6.1.3 Critres de qualit

    dun nologisme). Malgr le sens nouveau donn au mot existant, un lien smantique

    persiste entre la premire signification et la nouvelle, lien qui va apporter au terme sa

    motivation (cf. Motivation sous 6.1.3 Critres de qualit dun nologisme).

    Lemprunt de termes trangers

    Il sagit de la reprise intgrale dun terme tranger dans une langue : p. ex. monitoring,

    whistleblower, reporting, etc. Ce procd est trs frquent en langue de spcialit. Cer

    tains de ces emprunts ont russi simposer dans la langue courante, lexemple de

    bistro, week-end, etc. La plupart du temps, cependant, les emprunts ont une dure de

    vie limite aussi bien dans la langue courante que dans la langue de spcialit : les tags

    ont remplac les graffitis, mais aujourdhui, les tagueurs se transforment en graffeurs

    ou graffiteurs ! En informatique notebook est en train de dtrner laptop, probablement

    pour des raisons dvolution technologique. Les emprunts langlais ne russissent

    simposer vraiment que dans les milieux professionnels trs spcialiss. Cependant

    certains anglicismes russissent se franciser et perdurer : blogue, podcaster, impl-

    menter, surfer, conteneur, etc.

    Le calque

    Il sagit de la cration dun terme nouveau qui est une copie adapte du terme de

    la langue source. Il sagit en quelque sorte dune traduction littrale (dog leg, dans

    lindustrie du ptrole, traduit par patte de chien en franais). On distingue le calque

    smantique (bogue/bug) qui sappuie sur une ressemblance et le calque de forme

    (libre-service/self service).

  • 30

    9 Conclusion

    Dans le domaine de la nologie terminologique, il faut certes mobiliser les forces cra

    trices mais aussi respecter les principes terminologiques de base pour viter les choix

    guids par des critres personnels, motionnels ou politiques. Les termes, chargs de

    vhiculer un contenu spcialis et de faciliter la communication en langue de spcialit,

    devraient tre fonds sur des choix objectifs et avoir une certaine universalit.

    Nous constatons que la cration syntagmatique est la plus frquente pour gnrer les

    termes nouveaux en franais, particulirement dans un contexte de nologie traductive.

    Les nologismes ainsi crs sont la fois motivs et transparents. Par contre, ils peuvent

    tre longs et sujets des variations, ce qui prsente un obstacle leur diffusion et leur

    implantation dans lusage.

    Les anglicismes sont lorigine dune importante activit nologique, particulirement

    en franais. Cependant, la traduction des anglicismes rencontre une forte rsistance

    dans les milieux professionnels, en raison de limage de modernit et de comptence

    quils vhiculent (cf. 5.2 Anglicismes) mais aussi parce quils apportent des solutions

    euphmiques (whistleblowing face dnonciation) ou, qui favorisent limprcision. Per

    sonne ne peut dfinir avec prcision mobbing, monitoring ou encore controlling.

    Mme si la cration nologique relve souvent dune dmarche individuelle, il est indis

    pensable dimpliquer dautres personnes, soit au sein de son service ou de son office, soit

    au niveau de ladministration. Afin dviter des crations parallles divergentes (dispersion

    terminologique) et de faciliter la diffusion du nologisme, celuici doit tre saisi dans une

    banque de donnes comme TERMDAT, ventuellement avec le statut provisoire .

    Malheureusement, il ne suffit pas toujours de respecter les principes terminologiques pour

    quun terme russisse simplanter. Les termes peuvent avoir une dure de vie courte et

    tre remplacs par dautres. Ainsi en vatil des termes et de la langue en gnral.

    Enfin, pour une communication efficace, il ne sert rien de se battre pour les causes

    perdues, surtout quand lusage a tranch. Cest au moment o le besoin de cration

    nologique se prsente quil faut sorganiser et intervenir vite.

  • 31

    En conclusion, il convient de rappeler et dinsister sur le fait que, souvent, il y a besoin

    non pas de crer, mais de chercher. En effet la plupart les termes existent dj. LInternet

    permet aujourdhui deffectuer des recherches audel des frontires, notamment dans

    le droit communautaire, et frquemment de trouver le mot juste ! La nologie doit par

    consquent rester le recours ultime une situation sans autre issue.

  • 32

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