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    Z*

    A.nt.

    (iKEGOIKE

    PETIT TRAITE

    DE

    LINGUISTIQUE

    4*

    DITION

    revue

    et

    corrige

    Ouvrage

    couronn

    par

    VAcadmie royale

    de Belgique

    Prix

    (le

    Kern.

    IQ.IQ

    Prix

    Rouverojr,

    :

    >

    cn^

    nombreux

    et

    diffrents,

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    18

    )tl

    grce

    aux

    intonations spciales qu'elle

    reoit.

    La

    mme

    forme

    peut

    possder

    jusqu'

    une trentaine

    d'acceptions,

    suivant

    les

    nuances

    de

    la

    mlodie

    sur

    laquelle

    on

    la

    prononce

    (1)

    :

    niu signifiera tantt pouse, tantt

    pou-

    ser. Tao

    voudra

    dire ravir,

    atteindre,

    couvrir, drapeau,

    froment,

    mener,

    chemin,

    etc.

    ;

    parmi

    ses

    acceptions,

    lu

    possde

    par

    exemple

    celles

    de

    : pierre prcieuse, rose,

    forger,

    vhicule,

    dtourner,

    chemin.

    12.

    Les

    trois

    bases

    de

    classification

    qui

    viennent

    d'tre

    indiques

    appellent

    une

    observation

    trs

    importante.

    Elles

    sont

    trop

    absolues.

    Il

    n'existe,

    semble-t-il,

    aucune

    langue

    qui

    soit

    entirement

    flexionnelle,

    entirement

    agglutinante,

    ou

    entirement

    isolante.

    La rpartition

    traditionnelle

    ne

    doit

    donc tre admise

    qu'avec

    des

    restrictions,ainsi

    que

    le

    montreront

    les

    exemples suivants.

    13.

    Les

    mots

    du

    chinois

    ne sont pas

    tous des

    sortes

    de

    racines

    ayant

    chacune

    leur

    sens particulier et

    rem-

    plissant

    des fonctions

    identiques.

    Les

    grammairiens

    chinois

    eux-mmes

    ont tabli

    une distinction

    entre

    les

    mots

    de leur

    langue

    ;

    ils

    les

    divisent

    en

    deux

    groupes:

    les

    mots pleins

    et les

    mots

    vides.

    Par

    mots

    pleins,

    ils

    entendent

    les

    monosyllabes

    pourvus

    d'une

    signification

    toujours

    indpendante

    :

    ces mots

    correspondraient

    nos

    substantifs,

    nos adjectifs

    et

    nos verbes. Les

    mots

    vides

    ont

    pour

    fonction

    de

    dterminer

    le sens

    des

    mots

    pleins

    et

    d'indiquer le

    rle

    que ceux-ci jouent

    dans

    la

    phrase

    ;

    ils

    agissent

    la faon

    des

    dsinences

    de

    cas,

    de

    genre

    ou

    de nombre,

    ou

    comme

    les

    prpositions

    des

    (1)

    A

    la

    diffrence

    des

    homonymes

    franais, dont

    la

    prononciation

    ne diffre

    point

    ;

    par

    exemple

    sang, cent, sans,

    s'en.

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    19

    langues

    flexionnelles.

    On

    ne peut sans

    doute

    considrer

    ces

    mots

    comme

    des dsinences,

    puisqu'ils

    sont

    isols

    et

    indpendants

    des

    expressions

    auxquelles

    ils

    se

    joignent

    ;

    mais

    la

    fonction

    qui

    leur est

    dvolue

    leur

    enlve

    leur

    valeur

    propre,

    d'o leur

    appellation

    de mots

    vides,

    et

    elle

    tend les rapprocher des

    particules

    employes

    dans

    les

    langues

    agglutinantes.

    14. D'autre

    part,

    le

    latin

    et

    le

    grec,

    langues

    flexion-

    nelles

    par excellence,

    connaissaient l'usage

    des

    prpo-

    sitions,

    procd analytique

    et

    mme

    isolant,

    du

    moins

    l'origine.

    En effet,

    ces

    prpositions

    taient

    primitive-

    ment

    des adverbes qui

    se

    joignaient

    aux

    mots

    et

    qui

    prcisaient des notions

    dj

    marques

    par des

    dsinences

    casuelles

    :

    en

    latin,

    contra

    voulait

    dire

    d'abord

    :

    en face

    ;

    il

    marcha

    contre

    l'ennemi

    signifiait

    donc

    :

    il

    marcha

    vers

    l'ennemi

    (de

    faon

    tre)

    en

    jace.

    Cette

    prposition

    tait

    par consquent d'abord

    ind-

    pendante

    ;

    elle pouvait

    mme

    se

    placer

    avant ou

    aprs

    le

    substantif.

    A

    la longue

    seulement,

    ces sortes

    de mots

    ont t considrs

    comme rgissant le

    cas auquel

    se

    trouvait le

    substantif :

    contra,

    en

    latin classique.

    l'accusatif.

    Leur

    position a t en

    gnral circonscrite

    la

    place

    qui

    prcdait

    le

    mot complment.

    A partir

    de

    ce moment,

    la prposition peut

    tre

    considre

    comme

    agglutine

    au

    substantif, et

    l'agglutination

    devient

    encore

    plus

    complte,

    lorsque les cas

    ayant disparu, comme

    en

    franais,

    la

    prposition n'est

    plus

    qu'une

    particule

    accole

    au

    mot pour

    en

    prciser

    la fonction.

    15.

    En

    latin,

    comme

    en

    grec,

    l'un

    des

    procds

    de

    formation

    des

    mots

    consistait

    ajouter

    au

    mot

    primitif

    un

    mot-prfixe,

    par

    exemple

    pnu-.

    /(-.

    de-,

    qui

    s'agglu-

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    20

    tinait

    au

    mot,

    trs

    souvent

    sans

    entraner aucune

    modi-

    fication

    du radical

    :

    praecurrere,

    devancer

    (

    la

    course),

    decurrere,

    descendre

    en courant.

    16.

    Enfin,

    les

    flexions

    que l'on

    constate

    une

    poque

    donne

    dans une

    langue,

    proviennent

    souvent

    de

    formes

    juxtaposes,

    autant

    dire

    agglutines. La formation

    du

    futur

    et du conditionnel

    franais

    en

    sont

    deux exemples :

    chanterai

    quivaut

    chanter ai

    =

    j'ai

    chanter,

    chan-

    terais,

    chanter

    avais.

    Dans des langues romanes

    autres

    que

    le

    franais,

    on

    pouvait

    encore au

    moyen

    ge

    sparer

    l'infinitif

    de l'auxiliaire

    ;

    tel

    tait

    le

    cas

    en

    espagnol,

    en

    portugais, en provenal,

    en catalan

    et

    dans quelques

    dialectes

    du

    nord

    de l'Italie. A

    prsent, l'auxiliaire n'est

    plus compris

    que

    comme

    une terminaison,

    temporelle

    dans le futur, temporelle

    et modale

    dans

    le conditionnel.

    Ces

    formes,

    d'agglutines

    qu'elles taient,

    sont

    donc

    devenues

    flexionnelles.

    17.

    Par

    contre, la

    tournure anglaise

    /

    know

    you are

    good,

    littralement

    :

    je

    sais vous

    tes bon

    ;

    la

    tournure

    allemande

    :

    ich glaube,

    du bist

    mde,

    ou

    encore

    l'expres-

    sion

    franaise

    :

    il

    est

    malade, je

    crois,

    sont

    simplement

    des

    tournures

    isolantes,

    car

    il

    ne

    s'y

    trouve

    marque

    aucune

    relation

    entre la principale

    et

    la

    subordonne.

    Les

    tournures

    plus normales : /

    know

    that you

    are

    tirai

    ;

    lch

    glaube

    dass du

    mde

    bist,

    en

    flamand

    :

    ik

    geloof

    dat

    gij

    vermoeid

    zijt,

    sont au fond galement

    des tour-

    nures

    isolantes

    quivalant

    :

    je

    sais

    cela

    vous

    tes

    fatigu.

    Les mots

    dass,

    ihat, dat,

    sont

    d'anciens

    pronoms

    dmonstratifs

    ayant

    servi

    dans

    la

    suite

    indiquer

    une

    relation

    entre deux

    propositions.

    18.

    Quant

    aux

    intonations dont

    les

    varits

    servent

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    21

    distinguer

    les

    nuances du

    discours

    dans

    les langues

    iso-

    lantes,

    elles

    n'taient pas

    inconnues

    aux

    langues

    ancien-

    nes

    flexion,

    et

    les

    langues

    modernes, telles

    que

    le

    franais,

    l'allemand,

    l'anglais,

    en

    font

    un

    usage

    courant.

    En

    franais, on

    exprime

    d'habitude

    l'interrogation

    par

    la place des

    mots

    :

    Viendrez-vous

    ?,

    mais on

    dit

    tout

    aussi

    bien, avec la

    mme

    valeur

    interrogative

    :

    Vous

    viendrez ?

    qui

    ne

    diffre,

    de

    l'affirmation

    :

    Vous

    viendrez

    heure

    que vous

    voudrez,

    ou

    de

    l'ordre

    :

    Vous

    viendrez,

    je

    le veux, que

    par

    l'intonation

    (1).

    19. Ces

    exemples

    suffisent

    montrer

    combien il

    serait

    exagr

    d'tablir une distinction

    rigoureuse

    et absolue

    des langues

    suivant les trois

    espces qui ont t

    cites.

    Malgr

    ces

    rserves,

    la

    classification

    en

    langues isolante-,

    agglutinantes et

    flexionnelles

    reste

    un

    moyen

    commode

    de

    rpartir les

    idioir.es

    d'aprs les caractres

    qui

    mar-

    quent

    principalement

    chacun d'entre eux.

    20.

    La

    dmonstration

    qui

    prcde

    vient aussi

    com-

    battre

    un prjug

    vivace

    concernant

    la

    valeur

    relative

    des

    langues.

    On

    s'imagine

    d'ordinaire

    que

    la

    structure

    monosyllabique

    marque

    le

    degr

    infrieur

    du

    dvelop-

    pement

    linguistique

    :

    la

    flexion

    serait

    le

    propre

    des

    idiomes

    les plus

    parfaits,

    et

    dans la

    succession

    de

    leurs

    progrs,

    les

    langues

    devraient

    au

    pralable passer

    par

    un

    stade

    intermdiaire,

    celui

    de

    l'agglutination.

    Mono-

    Syllabisme, agglutination,

    flexion, telles

    seraient

    les

    trois

    tapes

    du

    perfectionnement

    des langues.

    (1)

    Sans

    parler de

    plusieurs

    autres

    iiii.mas

    qui

    sont

    galemenl

    possibles

    ;

    par

    exemple,

    dit

    avec

    ddain

    .

    Vota viendra

    sous-

    entendu:

    vous

    ne t'oserez

    pas

    ou

    avec

    amertume :

    Vous

    viendrez

    I

    c'est--dire :

    je ne le crois

    pas,

    malgr

    votre

    profil

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    22

    21.

    Cette fois encore,

    la

    ralit est

    plus complexe.

    Dire

    que

    les langues

    flexions

    sont

    arrives

    au

    plus

    haut

    degr

    de

    leur

    achvement,

    c'est

    supposer,

    contre

    toute

    probabilit,

    qu'elles ne

    changeront plus

    de

    physionomie

    et qu'elles

    conserveront

    tout

    jamais

    leurs

    procds

    flexionnels.

    Or,

    les

    langues,

    on le verra plus loin,

    voluent

    sans

    cesse,

    et

    l'histoire

    de

    leurs

    mtamorphoses

    enseigne

    qu'elles

    peuvent

    revtir des

    aspects

    fort

    opposs

    d'une

    priode

    l'autre,

    parcourant

    ainsi une sorte de. cycle,

    dont

    les phases

    s'enchanent,

    mais

    souvent

    se

    contre-

    disent.

    L'anglais

    et

    le franais,

    issus tous

    deux de langues

    flexionnelles,

    ont

    perdu

    la

    majorit

    des dsinences an-

    ciennes.

    Le

    vocabulaire

    anglais,

    comme

    on

    l'a

    fait

    remarquer,

    est

    peu

    prs aussi monosyllabique que

    celui

    du

    chinois,

    sauf

    pour

    les longs mots d'origine

    savante.

    22.

    Ainsi

    l'anglo-saxon

    et le

    latin, dans leur

    transfor-

    mation

    en

    les

    deux

    langues

    analytiques

    qui

    existent

    aujourd'hui,

    ont

    abandonn

    presque totalement

    leur

    caractre flexionnel.

    Leur

    sort doit

    nous porter

    rfl-

    chir

    quand nous

    considrons des

    langues dont

    l'histoire

    est

    peu connue,

    telles

    que

    le

    chinois

    :

    qui

    sait

    si le

    mono-

    syllabisme

    de cet

    idiome ne cache

    pas

    des

    couches

    ant-

    rieures,

    parmi lesquelles

    on retrouverait,

    si

    l'on

    possdait

    des

    documents,

    un

    systme de

    flexions ou

    d'aggluti-

    nations

    modifi

    depuis des

    sicles ?

    23.

    Enfin,

    la

    valeur

    intrinsque

    d'une

    langue ne

    se

    mesure

    pas

    la

    richesse

    ou

    la

    pauvret

    de sa

    flexion.

    L'anglais

    et

    le

    franais,

    presque

    sans

    flexions,

    ne

    laissent

    rien

    dsirer

    en

    lgance

    et

    en clart.

    Au

    contraire,

    l'une

    des langues

    les plus

    synthtiques

    qui aient

    exist,

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    23

    le

    sanscrit,

    possdait des

    formes

    d'une

    extrme

    varit,

    et

    son

    apprentissage

    a d

    de

    tout

    temps

    prsenter

    des

    difficults

    :

    on

    ne

    voit

    pas

    non

    plus quels services

    a

    pu

    rendre

    une

    pareille surabondance

    de

    distinctions

    gram-

    maticales.

    De

    mme,

    certains idiomes

    des sauvages,

    par

    exemple

    les

    dialectes bantous,

    sont

    encombrs

    d'une

    foule

    de

    prfixes

    nominaux

    et

    verbaux,

    corrlatifs

    entre

    eux,

    dont la

    superfluit nous

    surprend.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

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    CHAPITRE

    I

    CLASSIFICATION

    DES

    LANGUES.

    On

    trouvera

    ci-dessous

    la

    nomenclature

    des princi-

    pales langues,

    classes d'aprs leur

    structure

    gramma-

    ticale.

    Il

    est

    utile

    d'observer

    que cette classification n'a

    pas toujours

    une porte

    gnalogique

    : des idiomes

    peu-

    vent figurer

    sous une rubrique

    commune,

    en

    vertu

    de

    leur conformation,

    par exemple

    le

    chinois

    et le japo-

    nais, langues

    isolantes toutes

    deux

    tout en paraissant

    tre

    trangers

    l'un

    l'autre.

    Lorsqu'un

    rapport

    de

    parent

    existe

    entre des idiomes, il en

    est

    fait mention

    expressment.

    I.

    Langues

    isolantes.

    Ces

    langues

    forment

    l'est

    et

    au

    sud

    de l'Asie un

    groupe

    compact, ne

    connaissant

    ni

    dclinaison ni con-

    jugaison. Elles

    ne

    paraissent

    pas

    apparentes

    entre

    elles.

    Les principales

    sont : le

    chinois,

    dont les

    monuments

    littraires

    remontent

    plus

    de

    1000

    ans

    avant

    J.-C.

    ;

    le

    siamois,

    le

    birman

    et quelques autres

    idiomes

    ;

    le

    japonais,

    qui

    a subi

    fortement

    l'influence

    du

    chinois.

    Comme

    ce

    dernier

    idiome,

    le

    japonais

    occupe

    jusqu'

    prsent une place

    isole dans le tableau

    gnalogique

    des

    langues.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    27/176

    25

    On

    peut

    faire

    la

    mme

    remarque

    concernant

    les

    langues de

    l'Himalaya,

    par exemple le thiblain.

    II.

    Langues

    agglutinantes.

    Elles sont trs

    nombreuses.

    Dans

    les

    Indes,

    on

    trouve

    la famille des

    langues

    dravidiennes (telougou,

    tamoul

    ou

    tamil, malabar,

    etc.), et

    les

    langues des Moundas,

    langues

    probablement plus

    anciennes

    que

    l'indo-aryen

    (cf.

    plus

    loin)

    et

    refoules vers

    le

    sud de la pninsule avec

    les

    indignes qui

    les

    parlaient.

    En

    Afrique,

    au

    sud

    de

    l'quateur,

    les langues

    bantou,

    comprenant

    entre autres

    les dialectes du

    Congo

    ;

    les

    langues

    des

    Hottentots

    ;

    celles

    des

    Bochimans.

    Les langues

    malayo-

    polynsiennes,

    que

    l'on

    divise

    en

    trois

    groupes

    :

    1

    le

    malais

    proprement

    dit,

    parl

    dans

    la

    pninsule

    de

    Malacca

    et

    les

    grandes

    les

    avoisinantes,

    dans

    les

    groupes

    des

    les

    Philippines

    et des

    Larrons

    :

    le

    javanais

    ;

    2

    le

    polynsien, parl

    dans

    la

    Polynsie

    ;

    le malgache,

    dans

    l'le

    de Madagascar

    ;

    3

    le

    mlansien,

    dans

    les

    les Fidji

    et

    les autres

    les

    du

    nord-est

    de

    1

    Vus-

    tralie.

    Les langues

    indignes

    de

    l'Amrique

    du nord

    :

    Veski-

    mon

    ou

    inuitj

    Viroquois

    sur les

    bords

    du

    Saint-Laurent.

    Falgonquin,

    au

    sud

    de

    la

    baie

    d'Hudson,

    etc.

    ;

    les

    lan-

    gues

    du

    centre

    :

    par

    exemple

    l'ancienne langue

    des

    Aztques

    nu

    nafiuatl

    ;

    les

    langues

    du

    siul. par exemple

    le

    quichua,

    ancienne

    langue

    des

    Incas.

    Ce

    sont

    des

    langues

    encore

    peu

    tudies et

    dont

    la

    gnalogie

    reste

    incertaine.

    Les

    langues

    finno-ougriennes

    :

    le

    finnois

    ou

    souomi,

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

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    26

    la

    langue

    de

    la

    Finlande

    et

    de

    l'pope

    appele

    Kalvala;

    Veste

    ;

    le

    live

    ou

    livonien

    ;

    le

    lapon;

    le

    votiaque;

    le

    tchr

    misse

    ;

    le

    magyar

    ou

    hongrois

    ;

    Yostiaque

    ;

    le

    vogoul,

    etc.

    Sauf

    Yostiaque

    et

    une

    partie

    du

    vogoul,

    deux

    idiomes

    sibriens,

    ces

    langues

    sont parles

    en

    Europe.

    Les

    sources

    relatives

    au

    magyar

    remontent

    au

    XII

    e

    sicle

    ;

    celles

    du

    finnois,

    au

    XVI

    e

    sicle.

    Les

    langues

    samoydes,

    sur

    les

    ctes

    de

    l'Ocan gla-

    cial

    arctique,

    en

    Europe,

    l'est de

    la

    mer Blanche,

    et

    en

    Asie, au

    nord

    de la Sibrie.

    Les

    langues

    turco-tatares,

    comprenant

    des

    idiomes

    nombreux

    :

    le yakout,

    les

    langues

    altaques,

    le

    kirghise,

    le

    bachkire,

    le

    turkmne,

    le

    turc

    ou

    osmanli,

    les

    idiomes

    tatares,

    etc.

    Leur gnalogie

    est

    encore en partie

    incer-

    taine.

    Le

    mongol,

    en

    Mongolie,

    et

    le

    mongol

    occidental

    ou

    kalmouk,

    qui

    a

    pntr en

    Russie jusqu'

    l'embouchure

    du

    Volga.

    Le

    tongouse

    ou

    toungouse,

    l'est

    de

    la

    Sibrie, jusqu'

    la rgion

    du

    bas Amour, et

    le

    mandchou,

    au sud

    de

    l'Amour.

    On

    a

    essay

    de

    retrouver

    des traces

    de

    parent entre

    les

    cinq

    derniers

    groupes de langues,

    et

    mme

    avec

    le

    japonais. Pour

    le

    moment,

    on

    admet

    des liens

    troits

    entre la

    famille

    des

    langues

    finnoises

    et

    celle

    des langues

    samoydes

    :

    leur

    parent

    est certaine,

    d'aprs les

    toutes

    dernires

    recherches.

    III.

    Langues

    flexion.

    A.

    Premire

    famille

    des

    langues

    flexion

    :

    les

    langues

    indo-europennes.

    Les

    langues

    indo-euro-

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

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    27

    pennes,

    appeles

    indo-germaniques par

    les

    linguistes

    allemands,

    sont les

    mieux

    connues, en raison

    de

    l'orien-

    tation

    prise

    par

    la

    linguistique,

    ses

    dbuts,

    au

    sicle-

    dernier.

    On

    suppose

    leur base une

    langue

    commune,

    l'indo-europen,

    dont

    les

    dialectes,

    la suite de

    conqutes.

    -de

    migrations, de

    mlanges de peuples,

    auraient

    produit,

    dans

    chacune des

    contres

    indo-europennes (Inde,

    Grce,

    Italie, etc.), de

    nouvelles

    langues

    s'loignant

    de

    plus

    en

    plus

    du

    type

    primitif,

    et

    cela, dans des

    mesures

    divei

    On

    distingue, dans la

    descendance de

    l'indo-europen,

    plusieurs

    branches

    gnalogiques,

    fortement

    diffrentes

    l'une

    de

    l'autre.

    I.

    Le

    groupe

    indo-iranien

    ou

    indo-aryen, compre-

    nant

    deux

    groupes

    distincts,

    celui de

    l'Inde

    et celui de

    r

    Iran.

    Les

    populations

    parlant

    ces

    dialectes

    s'appelaient

    aryennes:

    le

    mot

    Iran

    lui-mme

    est

    la

    continuation

    du

    mot

    arya.

    A.

    Dans les

    Indes,

    les

    textes dont

    la

    langue est

    la

    plus ancienne

    sont

    les

    hymnes

    vdiques

    ou

    des

    j

    (vda

    signifiait

    connaissance,

    savoir).

    On

    distingue

    quatre

    recueils

    de ces

    hymnes : le

    Rig-vida

    est

    celui

    dont la

    langue

    est la

    plus

    archaque

    ;

    il

    renferme

    les

    hymnes

    rcits

    dans les

    sacrifices

    par

    les

    prtres

    ;

    il

    contient

    1028

    hymnes

    en

    10

    livres

    ;

    les plus

    anciens

    remontent, prtend-on,

    au

    XVI

    e

    sicle

    avant

    J.-C.

    Des

    savants,

    tels

    que Jacobi,

    en

    ont

    mme

    fix

    la

    date

    beau-

    coup

    plus

    haut

    :

    ils

    la

    reportent,

    sans

    certitude du

    r

    quatre

    mille ans

    avant

    J.-C.

    Le

    texte

    des

    Vdas

    reprsente

    une

    langue

    dj

    tradi-

    tionnelle,

    conserve

    dans le

    monde

    des

    prtres.

    Aux

    Vdas

    se

    rattache

    une

    ancienne

    littrature

    thologique

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

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    28

    en prose,

    forme de

    textes appels

    brhmanas.

    La

    langue

    dans laquelle

    ils

    sont

    rdigs, moins

    archaque

    que

    celle

    des

    Vdas,

    se

    rapproche

    progressivement

    du

    sanscrit

    proprement

    dit,

    qui

    est

    la

    langue

    des

    popes,

    le

    Mah-

    bhrata

    et

    le

    Rmyana,

    ainsi

    que

    de

    la

    littrature

    trs

    riche

    de

    l'Inde.

    Le

    nom

    mme

    de

    cette

    langue

    (samskrita :

    artificiel,

    travaill)

    annonce un

    dialecte

    savant,

    litt-

    raire. Elle

    a

    t

    travaille

    par les

    grammairiens, et

    sur-

    tout

    par

    Pnini,

    le

    plus

    clbre d'entre

    eux. Le

    sanscrit

    eut

    une

    poque

    de

    floraison

    littraire : ce

    fut lors

    de

    la

    raction des

    brahmanes

    contre

    le

    bouddhisme.

    Lesanscrit

    a

    encore

    conserv

    jusqu'

    prsent son

    importance

    litt-

    raire, quoique,

    depuis

    le

    X

    e

    sicle, les

    autres

    dialectes

    indous

    aient

    chacun

    leur

    littrature

    indpendante.

    Deux

    autres

    dialectes

    importants

    de

    l'Inde

    ancienne,

    plus rcents

    cependant

    que

    le

    vdique,

    ont

    t

    le

    pli

    (signifiant

    ordre,

    canon), langue

    religieuse

    des

    boud-

    dhistes

    du

    sud,

    et

    le

    prkrit (langue

    naturelle,

    simple),

    ou

    plutt

    les

    prkrits,

    sortes de

    langues

    littraires

    qu'on

    trouve

    dans

    certains

    textes,

    par

    exemple

    dans

    les

    drames,

    comme

    tant

    la

    langue des

    femmes et

    des

    personnages

    de

    condition

    infrieure,

    tandis que

    le

    sanscrit

    est

    la

    langue

    rserve

    aux

    hros.

    Les

    dialectes

    modernes

    de

    l'Inde

    sont les

    descendants

    des

    dialectes

    populaires

    anciens.

    Citons

    Yhindoustani,

    Yhindi.

    le

    bengali, le

    mahratte,

    le

    singhalais,

    dans

    l'le

    de

    Ceylan.

    Le

    gipsy ou

    tzigane

    appartient

    aussi

    ces

    dialectes,

    mais

    les

    migrations

    sculaires

    des

    populations

    tziganes

    ont

    profondment

    altr

    leur

    langue.

    B.

    Dans

    l'Iran,

    on

    trouve des

    langues

    littraires

    assez

    semblables

    l'une

    l'autre

    :

    1

    la

    langue

    des

    ins-

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    31/176

    29

    criptions

    cuniformes

    du

    roi

    Darius

    Hystaspes

    et

    de

    ses

    successeurs,

    c'est--dirt Y ancien

    perse

    ;

    2

    la

    langue

    de

    Y

    Avesta

    ,

    c'est--dire

    la

    langue

    des

    textes sacrs

    de

    la

    religion

    de

    Zoroastre,

    langue

    appele improprement

    zend.

    Les

    inscriptions

    en ancien

    perse,

    graves

    sur

    les rochers

    et sur

    les

    pierres d'anciens

    palais,

    n'ont

    t

    dchiffres

    qu'au

    XIX

    e

    sicle

    ;

    la

    plus importante

    est

    celle

    de

    Bagistana,

    ou

    inscription du

    roi

    Darius.

    L'Avesta,

    tel

    qu'il

    nous

    est

    parvenu,

    est,

    sous

    le

    rapport

    linguistique,

    un

    travail

    de

    compilation savante

    du

    temps

    des Sassanides

    (1).

    L'ge

    des

    diffrentes parties

    de

    l'Avesta est

    fort

    variable

    ;

    les

    plus

    anciennes

    sont

    formes

    des

    hymnes

    appels gths.

    Parmi

    les

    langues

    iraniennes

    modernes, il

    faut

    citer

    li

    persan

    moderne,

    le

    kourde,

    les

    dialectes

    du

    Pamir,

    Yosste,

    parl

    dans

    le Caucase,

    Vafghan

    t

    qui

    a

    t influenc

    par

    les

    langues indou

    II.

    L'armnien,

    attest

    depuis le

    V

    e

    sicle

    aprs

    J.-C.

    L'armnien

    moderne comprend

    des

    dialectes

    spares

    en

    deux groupes

    principaux,

    le

    groupe

    oriental

    et

    le

    groupe occidental.

    Fortement

    influenc

    par

    le

    persan,

    il

    a pass

    longtemps, mais

    tort, pour

    un

    dialecte

    iranien.

    Outre

    les

    migrs

    armniens

    qui

    se

    trouvent

    en

    grand

    nombre

    surtout

    dans

    une

    partie de

    la

    pninsule des

    Balkans,

    les populations

    de

    langue

    armnienne

    ha

    l'Asie,

    dans

    les

    rgions d'Erivan,

    de Van.

    el

    d'Erzn

    (1)

    Les

    Sassanides ont

    rgn de

    Bprt

    J.-C.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    32/176

    30

    III.

    L'albanais.

    Cette

    langue

    est

    parle

    par environ-

    un

    million

    d'individus

    dans

    la

    pninsule des

    Balkans

    et

    dans

    les

    colonies

    albanaises

    d'Italie.

    Connu

    seulement

    partir du

    XVII

    e

    sicle,

    il

    a subi

    l'influence du grec,

    des

    langues

    slaves,

    du

    turc et plus

    anciennement du

    latin.

    IV.

    Le

    grec,

    ou

    plutt les dialectes du

    grec ancien.

    Parmi les

    peuples

    grecs de l'antiquit,

    qui

    envahirent

    la

    pninsule des

    Balkans et en chassrent

    les

    populations

    autochtones,

    les

    plus

    anciens turent

    les

    Ioniens

    et les

    Achens. Les

    premiers,

    tablis

    d'abord en

    Attique,

    dans

    l'le

    d'Eube,

    &ur

    les

    ctes

    nord

    et est

    du

    Ploponse,

    refouls peut-tre

    par les Achens, se

    rpandirent

    dans

    les les

    de

    la

    mer

    Ege,

    puis dvelopprent

    une

    civilisa-

    tion

    indpendante

    sur

    les ctes

    de

    l'Asie

    Mineure.

    Ils

    y

    trouvrent

    des

    Achens

    d'origine thessalienne,

    nomms

    oliens,

    qui

    occupaient

    galement

    l'le

    de

    Lesbos.

    La

    conqute

    des

    villes

    oliennes

    par

    les

    Ioniens

    eut

    des

    consquences

    considrables

    pour

    le

    dveloppement

    de

    la

    posie

    grecque

    :

    il

    semble

    en

    effet

    que

    les

    Ioniens em-

    pruntrent

    aux

    oliens

    les

    lgendes

    hroques

    achennes.

    Ainsi

    s'expliqueraient

    les

    particularits

    dialectales

    des

    pomes

    homriques,

    le plus

    ancien

    monument littraire

    des

    Grecs

    (1)

    ;

    on croit

    y

    reconnatre le

    mlange

    de

    deux

    dialectes

    principaux,

    l'ionien

    et

    l'ancien

    olien.

    La

    langue

    homrique,

    d'ailleurs en

    partie

    artificielle,

    est

    devenue

    le

    type du

    langage de

    l'pope

    grecque.

    V

    ionien conserva

    le

    mieux

    son

    aspect

    ancien dans

    l'le

    d'Eube

    et

    dans

    les

    Cyclades.

    1

    volua

    le plus

    rapi-

    (1)

    Les

    pomes

    homriques,

    moins anciens

    que

    le

    Rig-Vda,

    ne

    peuvent

    tre

    postrieurs

    au

    VII

    e

    sicle

    avant

    j.-C.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    33/176

    31

    dment

    Athnes, au

    point

    de

    former

    un

    dialecte

    parti-

    culier

    appel

    Yattique,

    qui

    prsentait encore

    d'importantes

    analogies

    avec

    l'ionien.

    Pour

    cette

    raison,

    on

    runit

    les

    dialectes ioniens

    et

    le dialecte attique

    en

    un seul groupe

    appel

    ionien-attique.

    L'

    ionien fut

    crit,

    ds le

    VII

    e

    sicle, par des

    p.

    tels

    qu'

    Archiloque,

    ds

    le

    VI

    e

    ,

    par

    des

    prosateurs tels

    qu'

    Hrodote.

    V

    attique

    est

    connu

    par

    des

    inscriptions

    depuis

    le

    VII

    e

    sicle

    avant

    J.-C,

    et

    par

    une

    littrature

    illustre.

    Un

    second

    peuple grec, dj

    cit,

    les

    Achens,

    s'tait

    implant

    en

    Thessalie, d'o

    un

    certain nombre

    partirent

    la

    conqute

    de la cte

    nord

    de l'Asie

    mineure

    (prise

    de

    la

    Pergame

    des

    Troyens).

    Leur

    parler,

    appel

    Yolien,

    resta

    en

    usage

    dans

    la

    partie

    septentrionale

    de

    la

    cte

    d'Asie

    Mineure, de

    Smyrne

    l'Hellespont,

    ainsi

    que

    dans

    l'le

    de

    Lesbos,

    d'o

    taient

    originaires

    les

    potes

    Alce

    et Sapho.

    Un

    dialecte

    apparent

    Yolien

    est

    le

    botien,

    parle

    en

    Botie,

    connu

    surtout

    par

    des

    inscriptions

    et

    par

    des

    fragments

    de

    l'uvre

    de

    la

    potesse

    Corinne.

    Les

    Achens

    se

    rpandirent

    aussi

    dans

    le

    sud

    de

    la

    Grce et

    passrent

    le

    golfe

    de

    Corinthe

    ;

    ils

    tablirent

    sur

    les

    ctes et

    dans

    les plaines

    du

    Ploponse

    de

    puis-

    sants tats,

    que

    rappellent

    les

    noms

    piques

    d'

    memnon,

    de

    Mnlas

    et

    de

    Nestor.

    Mais

    l'A

    enae

    disparut

    devant

    les

    invasions

    de

    peu-

    plades

    grecques

    venues

    de

    l'pire,

    auxquelles

    on

    a

    donne

    le

    nom

    de

    doriennes.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    34/176

    32

    Les

    Doriens,

    aprs

    avoir envahi

    la Grce centrale, s'in-

    troduisirent

    dans le

    Ploponse, qu'ils

    enlevrent

    pro-

    gressivement

    aux

    Achens.

    Les

    dialectes parls

    par

    les

    Achens

    ne rsistrent

    que

    dans

    la

    Thessalie

    orientale,

    et

    dans deux

    contres

    importante^

    du Ploponse,

    savoir

    en

    lide

    et dans

    les

    montagnes

    de

    l'Arcadie.

    La

    vieille

    langue

    se

    retrouvait

    aussi

    avec son type

    particulier

    dans

    l'le

    de

    Chypre, colonise

    par les Achens.

    Les

    inscriptions

    ont montr

    l'tonnante

    ressemblance

    existant

    entre

    le

    cypriote

    et

    l'arcadien,

    dont

    il

    vient

    d'tre

    question. Aussi

    les

    runit-on

    en

    un

    groupe unique.

    Varcadien-cypriote,

    dans lequel

    on

    fait

    rentrer aussi

    le

    pamphylien,

    apparent

    l'arcadien

    et

    au

    cypriote,

    et

    parl

    sur

    la

    cte

    asiatique

    voisine de Chypre.

    En

    rsum,

    les

    dialectes grecs

    issus

    de

    l'ancien

    dia-

    lecte

    achen

    parl

    en Thessalie sont

    au

    nombre

    de

    cinq,

    qu'on

    peut

    rpartir

    en deux

    groupes,

    un

    groupe septen-

    trional,

    celui

    du

    thessalien,

    de

    Yolien,

    et un

    groupe mri-

    dional,

    celui

    de

    l'arcadien,

    du

    cypriote,

    et

    du

    pamphylien.

    On

    a

    donn

    le

    nom

    de

    doriens

    aux parlers

    des

    popu-

    lations

    qui,

    venues du

    nord,

    envahirent

    en

    dernier

    lieu

    la

    Grce,

    et refoulrent les

    peuples

    qui

    s'y

    taient tablis.

    Les

    Doriens

    se

    rpandirent

    dans

    le

    Ploponse,

    o

    les

    dialectes

    achens,

    comme

    on

    l'a

    vu, ne

    se

    maintinrent

    que

    dans la

    rgion montagneuse

    de

    l'Arcadie.

    Les

    Doriens

    l'emportrent

    galement

    dans

    l'le

    de

    Crte, o

    l'on

    a

    dcouvert

    des inscriptions

    de

    grande

    importance, telles

    que

    celle

    de la loi

    de

    Gortyne. Ds le

    IV

    e

    sicle

    avant

    J.-C,

    le dorien

    tait devenu

    la langue

    commune

    des

    colonies

    hellniques

    de

    l'Italie

    et

    de

    la

    Sicile. Mais

    en

    Grce,

    et

    dans

    l'le

    de

    Crte,

    les parlers doriens

    n'arri-

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    35/176

    33

    vrent

    point

    s'unifier en

    une

    langue

    commune

    vraiment

    dorienne.

    On

    ne

    connat

    gure

    le

    dorien

    que

    par

    les

    inscriptions.

    Les

    textes

    littraires

    sont

    rares.

    On

    rapproche des

    parlers

    doriens

    proprement

    dits le

    groupe des

    parlers

    du Nord- Ouest

    ;

    ces parlers

    sont

    ceux

    de

    la Phocide, de

    la

    Locride,

    de

    l'tolie,

    de

    l'Acarnanie

    et

    de

    l'pire,

    et dans

    le

    Ploponse, ceux

    de

    l'lide.

    De tous les dialectes grecs,

    ce

    fut

    l'attique

    qui

    prit

    le

    plus

    d'importance

    :

    il devint

    le dialecte

    de

    la

    prose

    littraire, puis,

    partir

    du

    III

    e

    sicle

    avant

    J.-C,

    la

    langue des Grecs cultivs. Mais il

    ne

    put

    chapper

    l'influence

    des dialectes

    locaux,

    et notamment

    celle

    de

    l'ionien

    ;

    le

    mlange

    de

    ces lments

    forma

    une

    sorte

    de grec

    commun,

    appel

    la

    hoirie

    (1).

    Les

    autres

    dialectes

    disparurent,

    en

    tant

    que

    langues

    littraires,

    aprs

    l're

    chrtienne.

    Le grec

    commun

    du

    moyen

    ge

    porte le

    nom de

    moyen

    grec

    ou byzantin.

    L'poque

    du

    grec moderne ou

    romaque

    commence

    au

    XVI

    e

    sicle.

    Cette

    langue

    contient

    aussi des

    dialectes,

    qui ne reprsentent pas

    cependant

    la continuation directe

    des

    dialectes

    anciens

    de

    I'

    1

    lellade.

    Malgr son

    pass

    illustre,

    le

    grec,

    en

    tant

    que

    langue

    parle,

    a

    perdu

    peu

    peu

    de

    son influence.

    11

    n'est

    plus

    en

    usage

    qu'au

    sud de la pninsule des

    Balkans,

    dans

    toutes les les

    de

    la

    mer Ege,

    Chypre, en

    Crt

    _

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    .^

    E

    .-

    -

    j

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    c

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    *. -

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    gj^-g-c

    -

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    6*5

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    S

    1.-

    ^^l^aggga.gc

    g2s

    2

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    2

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    Et

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    SB

    0-5i

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    70/176

    68

    3.

    Jusque

    dano la

    dernire priode

    de

    l'histoire

    de

    la

    linguistique,

    on

    considrait

    les

    changements

    du

    langage

    comme

    des

    marques

    de dprissement.

    C'est

    un

    prjug

    encore

    courant

    dans

    le

    public.

    Les

    langues subiraient

    l'atteinte

    d'une

    sorte

    de maladie

    ;

    les

    altrations

    qui

    s'ensuivent

    amneraient

    leur

    dchance

    plus

    ou

    moins

    rapide. Les crateurs

    de

    la

    linguistique,

    Fr.

    Bopp, W.

    von

    Humboldt,

    etc.,

    ont

    partag

    cette

    opinion. Elle

    est

    cependant

    errone

    ;

    mais

    on

    comprend

    qu'elle

    ait eu

    cours

    aux

    dbuts de

    la science du

    langage.

    A

    cette

    poque,

    on

    cherchait

    dcouvrir

    l'tat

    primitif

    des

    langues

    indo-europennes,

    en

    comparant

    aux

    langues

    modernes

    le

    latin, le grec,

    et

    surtout

    le

    sanscrit

    ;

    on

    trouvait ces

    derniers

    idiomes plus complexes, plus

    riches

    de

    formes

    ;

    on

    s'imaginait reconnatre en eux les caractres d'une

    rgularit

    et

    d'une

    perfection

    anciennes,

    perdues

    depuis.

    D'aprs

    cette

    conception,

    les langues actuelles ne

    seraient

    plus

    que des

    rejetons

    puiss

    et

    dforms.

    4.

    En

    ralit,

    il

    serait

    faux d'attribuer

    aux langues

    les

    plus

    lointaines

    une

    fixit

    qu'elles

    n'ont

    jamais

    possde,

    pas

    plus

    que

    les langues

    vivantes,

    l'volution

    desquelles

    nous

    assistons de

    nos jours.

    Nous

    ne

    connaissons

    les

    langues mortes que par des

    monuments

    crits,

    qui ne re-

    prsentent

    pas

    d'ordinaire

    toutes les phases de

    l'histoire de

    ces parlers.

    Si

    nous

    possdions

    d'autres

    renseignements,

    nous montrant l'aspect

    de ces

    langues

    aux

    diverses

    prio-

    des,

    il

    suffirait de

    comparer une

    poque

    une autre,

    pour

    constater

    des

    modifications

    nombreuses

    et de

    tout

    genre.

    5.

    En

    second

    lieu,

    on

    n'est

    pas

    en

    droit

    d'affirmer

    qu'un

    changement

    linguistique

    implique

    toujours une

    dfor-

    mation

    du

    langage et

    qu'il soit un

    signe

    de

    dcadence.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    71/176

    69

    Trs

    souvent,

    les

    modifications

    ont

    pour

    rsultat

    de

    donner

    aux

    langues

    plus

    de

    clart

    et

    plus

    de

    simplicit

    :

    le franais

    a

    beaucoup

    gagn abandonner

    les

    compli-

    cations

    grammaticales

    qui

    alourdissaient

    le latin

    ;

    l'anglais,

    o l'on retrouve

    peu

    de

    chose

    de la

    morpholo-

    gie

    des

    langues

    germaniques

    primitives,

    passe

    nanmoins

    pour un

    des

    idiomes

    dont

    l'usage est le

    plus commode

    (1).

    6. On

    aurait donc tort

    de considrer

    le

    pass

    des

    langues

    comme

    une

    sorte

    d'ge d'or,

    qui aurait

    vu

    leur

    panouissement,

    tandis qu'aux

    sicles

    suivants

    elles

    n'auraient

    point

    cess

    de

    se

    dgrader.

    Le

    langage,

    qui

    est

    une

    rsultante

    des facults humaines,

    n'a pu,

    aucune poque,

    rsister l'instabilit

    frappant

    tout

    ce

    qui

    touche

    l'homme

    ;

    si

    les

    murs,

    les

    institutions,

    le.

    peuples

    voluent

    sans

    interruption,

    il

    va

    de

    soi

    que

    les langues participent

    dans

    une certaine

    mesure

    ces

    transformations.

    7.

    Les changements

    atteignent aussi

    bien

    le

    matriel

    extrieur

    du langage,

    c'est--dire les

    sons,

    que

    ses l-

    ments

    internes

    ;

    il

    y

    aurait donc lieu de

    distinguer,

    dans

    l'tude qui

    va

    suivre,

    les

    changements

    phontiques,

    les

    changements

    de

    signification,

    ou

    changements

    sman-

    tiques,

    les changements

    des formes

    ou changements

    morphologiques,

    et

    les

    changements

    syntaxiques.

    Nous

    parlerons spcialement

    des

    deux

    premiers

    ordres

    de

    modifications,

    qui

    sont

    les

    mieux

    connus.

    (l)

    L'orthographe

    mise

    part.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    72/176

    CHAPITRE

    VI,

    LES

    CHANGEMENTS

    PHONTIQUES.

    1.

    Si l'on

    compare deux

    phases

    diffrentes

    de

    l'histoire

    d'une

    langue,

    on

    s'aperoit

    que

    les

    mots

    n'ont

    pas

    con-

    serv

    d'une

    poque

    l'autre

    une

    physionomie

    identique

    :

    un son

    ou

    plusieurs

    sons

    de

    ces

    mots

    ont

    t

    remplacs

    par

    d'autres

    parfois

    trs dissemblables.

    Ces

    transforma-

    tions

    phontiques

    peuvent

    tre

    divises

    en deux

    cat-

    gories

    :

    les

    changements

    lents

    et

    gnraux,

    et

    les

    change-

    ments

    brusques et isols.

    2.

    Voici

    un

    exemple

    des

    premiers. L'infinitif

    latin

    dbre

    se

    retrouve,

    lment

    pour

    lment,

    dans

    le

    fran-

    ais

    devoir.

    Nous

    ne

    nous

    occuperons

    prsent

    que du

    son

    e

    (long

    et

    ferm)

    de

    la

    2

    e

    syllabe

    de

    dbre.

    Il

    est

    devenu

    en

    franais un

    son

    diphtongue

    crit oi

    et

    qui

    se

    prononce actuellement

    wa.

    Cette

    transformation,

    qui

    parat inexplicable

    premire

    vue, a

    demand

    plusieurs

    sicles

    avant d'tre

    termine.

    Tout

    d'abord,

    le

    latin

    a

    donn

    naissance

    une

    diphtongue,

    ei

    (=

    y),

    laquelle

    s'est change

    en une autre

    diphtongue, bi

    (=

    y),

    encore

    prononce

    avec

    un

    b

    ouvert en

    vieux

    franais

    du

    XII

    e

    sicle,

    et

    mme

    plus

    tard,

    dans

    certaines

    positions.

    Puis,

    cette diphtongue

    a

    volu, en

    suivant

    une

    longue

    srie

    de

    prononciations

    de plus

    en plus

    cartes

    de

    la

    nuance

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    73/176

    71

    initiale

    : par

    exemple o,

    w,

    pour

    aboutir notre

    pro-

    nonciation

    :

    wa

    (1).

    3.

    Cette

    transformation

    du

    son

    a

    t

    lente,

    puis-

    qu'elle a

    ncessit

    de

    nombreuses

    tapes

    intermdiaires

    dont on

    retrouve

    les

    traces

    ;

    de

    plus,

    elle

    a

    atteint, non

    seulement

    le

    second

    e

    du

    mot

    dbre,

    mais

    n'importe

    quelle

    voyelle

    analogue

    qui

    se trouvait

    dans

    les

    mmes

    conditions

    (2)

    :

    ainsi

    habre

    est devenu avoir

    ;

    dolre

    :

    vieux

    franais

    douloir

    ;

    valre

    :

    valoir,

    etc.

    4.

    Nous

    concluons

    que

    les

    changements lents

    du

    genre

    de

    e

    devenu

    wa sont

    gnraux,

    puisqu'ils

    affectent,

    non

    pas

    tel

    son

    d'un

    seul

    mot

    isol

    ou

    de

    quelques

    mots

    seulement,

    mais

    les

    sons de

    tous

    les

    mots

    o

    ils

    se

    trou-

    vaient

    dans les

    conditions requises.

    5.

    Tout

    autre

    est

    la

    transformation

    qui

    a

    dfigur

    (3)

    l'ancien

    verbe

    franais

    toussir.

    Dans

    cet

    infinitif,

    le

    i

    de

    la

    dsinence

    a

    t

    remplac

    par un

    (crit

    e

    devant

    r).

    Pour

    expliquer ce

    changement,

    il

    n'est plus

    ncessaire

    de

    songer

    des

    modifications

    lentes dont

    l'effet

    aurait

    t

    de dgrader progressivement

    la voyelle

    /,

    jusqu'

    lui

    donner

    la

    sonorit

    de

    .

    Au

    contraire,

    le changement

    (1)

    Voici la srie

    des

    transformations

    subies

    vraisemblablement

    par

    la

    diphtongue

    ei

    (y),

    avec ferm

    :

    y,

    avec un

    ouvert

    ;

    ay (de

    mme

    que

    le

    ei des mots

    allemands

    quivaut maintenant

    ai)

    ;

    by,

    avec un

    b

    ouvert

    ;

    b,

    avec un

    b

    ouvert et un

    ferm

    ;

    b,

    avec

    deux

    voyelles ouvertes

    ;

    w,

    avec le changement

    de

    en la

    semi-voyelle

    w

    :

    enfin

    wa,

    le

    son

    i

    redevenant

    lui aussi

    a.

    (2)

    La condition

    principale

    tait ici

    que

    la

    voyelle

    se

    trouvai

    accentue.

    Par contre,

    le

    premier

    de

    dbite,

    plus faiblement

    accentue

    que

    le

    second,

    n'a

    pas

    t

    chang

    en

    wa,

    mais

    s'est

    attnu

    en

    un

    t

    muet.

    (3)

    Nous

    employons

    ce

    mot

    sans

    vouloir

    y

    attacher

    aucune

    ide

    pjorative.

    Il

    en est

    de

    mme

    du

    mot

    dgrader,

    employ

    plus bas.

    Cf. ce

    qui

    a t dit

    p.

    68.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    74/176

    72

    s'est

    fait

    d'une

    gnration

    une autre :

    l'ancienne

    pro-

    nonciation

    toussir

    a

    subsist

    encore

    quelque temps

    ;

    mais

    paralllement,

    l'habitude

    s'est

    de

    plus

    en

    plus

    ancre

    de dire tousser,

    et

    la

    fin,

    la

    nouvelle

    pronon-

    ciation

    a

    prvalu.

    Compare

    aux prcdentes,

    la

    trans-

    formation

    peut

    donc

    tre

    appele

    une

    transformation

    brusque,

    en

    ce

    sens

    que la

    substitution

    s'est

    accomplie

    d'une

    gnration

    une autre.

    6. En

    outre,

    elle

    n'est

    pas

    gnrale

    :

    elle

    n'a

    pas

    atteint,

    en

    effet,

    tous

    les

    i

    qui

    se trouvaient dans les

    mmes

    conditions

    phontiques

    que le

    i

    de

    toussir,

    c'est--dire

    les

    i

    accentus

    ;

    ainsi,

    les

    mots

    issus des

    termes latins

    mille,

    vita,

    nidus,

    etc.,

    ont

    tous

    conserv

    Vi

    primitif

    :

    mille,

    vie,

    nid.

    Le

    /

    accentu

    n'a t chang en

    que

    dans

    toussir

    et

    dans

    quelques

    autres

    infinitifs

    (1),

    alors

    qu'il

    n'a

    pas

    vari

    dans

    la

    masse

    des

    verbes

    en

    ir.

    7. Les

    transformations

    lentes et gnrales ont,

    comme

    nous

    l'avons dit, affect

    des sries

    entires

    de

    mots.

    Aussi

    constituent-elles

    la

    partie essentielle

    de

    l'volution

    des

    sons,

    et leur

    tude est

    de

    la

    plus

    haute

    importance

    pour

    l'intelligence

    de

    l'histoire

    du langage.

    8.

    Les

    lirguistes

    ont

    t

    frapps

    du

    caractre

    de

    rgu-

    larit avec lequel

    elles

    se produisent.

    Nous avons

    vu,

    par

    exemple,

    que tous les mots

    latins

    renfermant un

    accentu

    l'ont

    chang

    en

    oi

    (=

    wa).

    L'examen

    des

    changements

    de

    ce

    genre

    a

    permis

    d'en

    tirer

    des

    lois

    (1)

    Notamment

    garer,

    doublet

    de

    gurir,

    autrefois

    garir

    ;

    peler,

    en

    vieux

    franais

    espelir

    ;

    grogner,

    en v.

    fr.

    gronir

    ;

    gronder,

    en

    v.

    fr.

    grondir : puer,

    anciennement

    pur

    ;

    sangloter, au

    lieu

    de sangloutir

    (dans

    Rabelais)

    ;

    tisser,

    qui

    a

    remplac

    tissir.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    75/176

    73

    phontiques.

    Ces

    lois constatent

    que,

    dans

    des

    condi-

    tions

    donnes, tel

    son ou

    tel groupe de sons

    se

    modifie

    au

    sein

    d'une

    langue

    d'une

    manire

    dtermine.

    9. Ce sont

    des

    lois

    phontiques

    que

    celles

    qui

    enregistrent la

    transformation du c latin

    (prononc

    d'abord k)

    devant

    a

    en

    ch, dans les mots franais,

    et en

    l'explosive

    palatale

    transcrite

    tch

    dans les

    mots

    wallons

    correspondants :

    lat.

    carrum

    (1),

    fr.

    char,

    wal.

    tchor

    ;

    lat. caballum, fr.

    cheval,

    wal. tchfb

    ;

    lat.

    cancm,

    fr.

    chien,

    wal.

    tchin

    ;

    lat.

    carnem, fr. chair,

    wal.

    tchbr,

    etc.

    ;

    la

    transformation

    du

    mme c latin

    en

    s

    (ou

    z)

    devant

    e

    et

    i

    dans

    les mots

    franais

    et

    wallons :

    lat.

    ra(di)cina,

    fr.

    racine,

    wal.

    rsri

    (2)

    ;

    lat. vicinum,

    fr. voisin,

    wal.

    wzin,

    etc.

    ;

    la

    vocalisation,

    ou

    transformation

    en

    voyelle de

    la

    consonne

    /

    devant conscnne

    : lat.

    talpam,

    fr.

    taupe

    ;

    lat.

    palma,

    fr.

    paume

    ;

    ancien

    fr.

    chevals,

    fr.

    chevaux

    ;

    ancien fr. valdrai,

    fr.

    vaudrai,

    etc.

    la

    chute

    de F/j

    des

    mots

    latins

    dans

    la

    prononciation

    vulgaire ds

    avant

    les

    premiers

    sicles de l'empire

    ;

    en

    italien,

    le

    changement

    en

    i

    de

    tous

    les

    /

    latins

    aprs

    p,

    b,

    ou

    c,

    g,

    par exemple

    :

    pieno,

    plein

    ;

    chiave,

    clef

    ;

    chiaro, clair,

    du

    latin

    plnum, clavem,

    clarum.

    On

    connat

    aussi, ne

    ft-ce

    que

    par

    ou-dire,

    les

    lois

    phontiques

    des

    langues

    germaniques

    dont

    la dcouverte

    a

    illustr

    les

    savants

    Rask,

    Grimm

    et

    Verner.

    (1)

    Nous

    citons les mots

    latins

    (sauf

    les

    noms

    fminins

    de

    la

    l

    r

    ''

    dclinaison)

    sous la

    forme

    de

    l'accusatif,

    tant

    donn

    que

    les

    noms

    franais

    issus

    du

    latin

    se

    rattachent

    en

    principe

    a

    ce

    c.is.

    La

    graphie

    [ch

    est

    fautive

    en

    ce

    qu'elle donne

    l'illusion

    de

    deux

    SOIU

    I

    ch.

    alors

    qu'il

    s'agit

    ici d'une

    consonne

    unique.

    (2)

    Nous marquons au

    moyen

    de l'apostrophe

    les

    consonnes

    finales

    qui

    doivent

    tre

    prononc

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

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    74

    10. Il

    arrive

    que les

    lois

    phontiques

    souffrent

    des

    exceptions.Mais

    une

    tude

    plus

    approfondie

    des

    faits

    per-

    met

    d'habitude

    de

    restreindre

    de

    beaucoup le nombre

    de

    celles-ci.

    Phontiquement,

    la

    conjugaison

    du

    prsent

    de

    l'indicatif

    du

    verbe

    franais

    trouver

    devrait

    tre

    treuve

    :

    trouvons...

    ;

    mais

    il

    s'est

    fait

    que

    l'analogie

    du

    pluriel

    trouvons

    s'est

    mise

    en

    travers

    de

    l'alternance

    phontique

    eu

    :

    ou,

    rgulire

    au

    moyen

    ge, et qu'elle

    a

    modifi

    le

    vocalisme

    du

    singulier.

    Toussir

    devrait

    s'tre

    conserv

    sous cette

    forme

    ancienne.

    C'est

    en

    effet

    une

    loi

    phon-

    tique

    du franais

    que

    Yi

    long

    latin accentu

    a

    rsist

    aux

    changements

    jusqu'

    nos

    jours :

    toussir

    ne

    rend

    point

    cette

    loi

    illusoire,

    car

    c'est

    une des rares

    exceptions

    dues,

    comme

    nous

    le verrons

    (p.

    77),

    une

    cause

    spciale.

    11.

    Il

    semblerait

    donc,

    en

    dernire

    analyse,

    que

    les

    lois

    phontiques

    manifestent

    leur action

    avec

    une

    con-

    stance

    rigoureuse.

    Quand

    une

    langue

    montre,

    dans

    l'vo-

    lution

    de

    son

    systme

    phontique,

    une

    tendance

    dter-

    mine

    par exemple

    celle de transformer le

    c en

    ch

    devant

    a

    ,

    cette

    tendance

    se ralise avec

    l'inflexibilit

    d'une

    loi,

    et l'on

    a

    pu

    riger

    en

    principe

    que

    les

    lois

    phontiques

    sont

    aussi

    aveugles,

    aussi fatales

    dans

    leurs

    manifestations,

    que

    les

    lois

    physiques

    (1)

    .

    Nanmoins

    ces lois

    souffrent

    des

    exceptions,

    ainsi que

    nous

    l'avons

    rappel.

    Ces

    exceptions

    .>ont

    dues

    des

    causes

    qui font

    obstacle

    aux

    lois et

    empchent

    leur

    action

    en

    telle

    ou telle circonstance.

    On

    ne

    connat pas

    toujours

    ces

    causes. L'ignorance

    o

    l'on en

    est

    souvent

    (1)

    Suivant les

    termes

    du

    linguiste

    franais

    V.

    Henry.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    77/176

    75

    a

    suscit

    des doutes sur l'infaillibilit

    des lois

    phontiques.

    La

    question de

    cette

    infaillibilit

    est

    l'une de celles

    qui

    ont

    le

    plus

    divis

    les

    linguistes.

    Il

    existe

    son

    sujet

    une

    vaste

    littrature.

    En ralit

    la

    discussion

    est

    oiseuse

    et superflue.

    On ne

    peut

    mconnatre

    le

    caractre

    de

    rigueur des lois phon-

    tiques.

    Lorsque,

    telle

    poque,

    dans

    tel

    pay.

    ,

    un

    son

    tend

    se

    modifier d'une

    certaine

    manire,

    la

    modification

    s'accomplira

    aussi

    fatalement

    que

    s'exercerait

    une

    loi

    naturelle de

    la physique

    ou de la

    chimie,

    pour

    autant

    du

    moins

    qu'elle ne

    soit

    point

    contrecarre

    par quelque

    facteur.

    Ainsi

    que

    l'crit

    M.

    M.

    Grammont,

    nous

    pou-

    vons

    prdire

    qu'une pierre

    lche

    du

    haut d'un balcon

    tombera

    sur le sol,

    moins

    qu'elle

    ne

    rencontre un

    obsta-

    cle

    qui l'arrte

    et

    l'empche

    d'y arriver

    ;

    mais

    nous pou-

    vons

    tout

    aussi

    bien

    prdire

    que

    corridor,

    abandonn

    la

    tendance la

    dissimilation,

    deviendra

    colidor,

    moins

    qu'il

    ne

    rencontre un obstacle

    qui

    l'en

    empche, et

    qu'il

    ne

    deviendra

    jamais

    corridol

    ;

    nous pouvons

    mme

    prdire

    que,

    dans les

    mmes

    conditions,

    pruneraie

    deviendra

    prunclaie

    et jamais

    pluneraie.

    12.

    Les

    obstacles

    contre lesquels

    se

    heurtent

    les

    lois

    phontiques peuvent tre

    nombreux,

    il

    faut

    l'avouer.

    Parmi

    eux,

    nous

    avons

    dj

    signal

    l'analogie,

    dont

    deux

    exemples

    ont

    t

    cits.

    L'analogie

    joue

    dans l'volution

    des langues

    un

    rle

    des

    plus

    importants.

    11

    est

    peu

    de

    lois

    phontiques

    dont

    elle

    ne brise

    la

    constance, et

    dont elle

    n'empche

    l'effet

    dans

    un

    nombre

    de

    cas

    plus

    ou

    moins

    tendu.

    13. 11

    arrive aussi, avec

    non moins

    de

    frquence, que

    des

    mots

    soient

    empruntes aux

    langues

    trangres

    ou

    aux

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    78/176

    76

    autres

    dialectes

    ;

    ces

    mots

    entrent

    dans

    la langue

    en

    conservant

    autant

    que possible leur

    physionomie

    tran-

    gre,

    et ils

    chappent

    souvent

    l'influence

    des

    lois

    phon-

    tiques.

    On a

    longtemps

    mconnu

    le

    rle

    important

    que

    jouent les

    emprunts

    faits

    d'idiome

    idiome,

    et surtout

    de

    dialecte

    dialecte.

    Les

    relations

    de

    tout

    genre qui s'ta-

    blissent

    entre

    les populations,

    les immigrations,

    les

    unions qui se

    contractent

    entre

    gens de contres

    diff-

    rentes,

    n'introduisent

    pas

    seulement

    des

    usages

    nou-

    veaux

    ;

    elles

    apportent aussi

    des

    procds

    de

    langage

    (mots,

    prononciations),

    inusits

    jusqu'alors,

    et

    devant

    lesquels les

    lois

    phontiques

    se

    trouvent

    impuissantes.

    Si

    les

    mots

    cavalcade,

    cavalier,

    carbonade,

    font

    exception

    soit

    la

    loi

    de

    la

    transformation du

    c

    en

    en,

    soit

    celle

    de

    la

    vocalisation

    de

    17 en

    u,

    etc.,

    c'est

    parce

    qu'.ils

    sont des

    emprunts

    faits

    l'italien,

    l'espagnol

    ;

    mais

    les

    dites

    lois

    ont

    t

    oprantes

    dans les mots

    correspondants

    chevauche, chevalier,

    charbvnne,

    qui

    sont

    d'extraction

    purement franaise.

    14. Enfin,

    aux

    irrgularits

    que

    nous venons de

    signaler,

    il

    conviendrait

    d'ajouter:

    1

    les mets d'un

    emploi

    quetidiea, les

    formules

    de politesse

    comme

    siouplat ou

    mme

    splat, l'allemand

    gmoin pour

    guien

    Morgen,

    toutes

    transformations

    qui

    ne s'expliquent pas

    phontiquement

    ;

    2

    les

    mots de la

    langue

    enfantine,

    tels

    que

    l'italien

    Beppo

    venu

    de

    Giuseppe,

    l'anglais

    Bob,

    pour Robert,

    le

    franais

    Mimi pour

    Marie,

    etc.,

    exemples

    ne

    rentrant

    pas

    davantage

    dans

    les

    cadres des

    lois

    pho-

    ntiques

    ;

    3

    la

    masse

    des

    transformations

    brusques

    et

    isoles

    dont il

    a t

    parl plus

    haut et

    parmi lesquelles

    devraient

    figurer

    les cas

    o

    l'analogie a

    exerc son

    in-

    fluence.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    79/176

    77

    CAUSES

    DES

    CHANGEMENTS

    PHONTIQUES.

    A.

    Causes des

    transformations

    brusques et isoles.

    1.

    Ces

    transfoi

    mations proviennent de

    causes

    varies.

    Souvent

    elles

    remontent

    des

    analogies. En vieux

    fran-

    ais,

    on

    conjuguait

    d'abord

    treuve,

    trouvons,

    mais

    on

    finit par

    conjuguer, soit

    treuve,

    treuvons,

    soit

    trouve,

    trouvons

    (1),

    en

    gnralisant

    pour toutes

    les

    personnes

    la

    voyelle radicale

    du singulier

    ou

    bien

    celle

    du

    pluriel.

    C'est l'analogie soit

    de

    treuve,

    soit

    de

    trouvons

    qui

    a

    chang

    le ou

    de

    trouvons,

    trouvez,

    ou

    inversement

    le

    eu de

    treuve

    et des

    autres formes

    en

    eu.

    La

    tendance

    tait

    d'autant

    plus

    forte

    que,

    dans

    la

    majorit

    des

    verbes

    du

    franais, le

    radical

    reste

    identique

    chaque

    temps,

    aussi

    bien

    au

    singulier

    qu'au pluriel.

    2.

    Quant

    toussir,

    qui

    tantt

    a

    servi

    d'exemple, on

    l'a rattach

    au

    substantif

    toux, comme s'il

    en

    tait

    driv,

    alors qu'il

    vient

    directement du

    latin

    tussire.

    Or,

    la

    plupart

    des verbes

    drivs

    de

    substantifs

    appar-

    tiennent

    la

    conjugaison

    en

    er

    :

    tels

    souffler,

    driv

    de

    souffle,

    chanter,

    de chant, marcher,

    de

    marche,

    etc.

    L'ana-

    logie,

    c'est--dire

    la

    ressemblance avec

    ces

    sortes

    de

    verbes,

    a

    attir

    le verbe toussir

    dans

    la

    famille

    des

    verbes

    en

    er.

    3.

    Les

    analogies

    dont

    il

    vient d'tre

    parl

    sont au

    fond

    des associations

    d'ides

    plus

    ou

    moins

    inconscientes.

    Elles

    se

    justifient

    dans

    une

    certaine

    mesure.

    Mais

    il

    en

    existe

    d'autres

    tout

    fait

    fortuites,

    que

    rien

    n'explique

    (1)

    Dans

    la

    suite,

    un

    seul

    de ces

    systmes

    de

    formes

    a

    t conse

    ^

    je

    trouve, nous

    trouvons.

  • 7/26/2019 Grgoire Antoine - Petit trait de linguistique.pdf

    80/176

    78

    ni

    historiquement

    ni

    logiquement,

    qui

    sont

    dues

    des

    ressemblances superficielles

    et

    non

    relles,

    qui

    consti-

    tuent

    par

    consquent

    de

    vritables

    erreurs.

    Le

    mot

    alle-

    mand

    sauerkraut,

    dans la

    composition

    duquel

    entrent

    deux

    termes

    signifiant,

    le premier,

    aigre

    et l'autre

    chou,

    a

    t

    transform en

    franais

    en

    choucroute,

    sous

    l'effet

    d'une

    similitude

    assez

    vague des

    sons germaniques

    avec

    les

    deux

    mots

    franais chou

    et

    crote.

    En

    wallon,

    on

    donne

    au

    loir

    le

    nom

    de

    sot-dwrmant,

    sot

    dormant,

    c'est--dire

    un

    animal

    qui

    se

    dort sot

    ,

    qui

    dort

    outre

    mesure

    ;

    mais

    on

    prsume

    que cette

    appellation

    tait

    l'origine

    un sept dormant, quivalant

    l'allemand

    siebenschlfer

    et

    renfermant

    une

    allusion

    la

    lgende

    des

    sept

    dormants

    d'phse

    si

    populaire au moyen

    ge.

    Le mot

    cordon

    n'avait

    rien

    de

    commun

    avec le

    mot

    cordonnier,

    primitivement

    cordouanier

    (c'est--dire

    l'ar-

    tisan

    en

    cordouan

    ou

    en

    cuir

    de

    Cordoue)

    ;

    cependant

    cordon

    a

    veill

    l'ide d'une parent

    commune

    avec

    cordouanier

    et

    a

    dtermin le changement de ce mot

    en

    cordonnier.

    4. Citons

    encore

    le

    mot haut,

    reprsentant

    du

    latin

    altum

    :

    ce

    mot

    ne

    devrait

    pas

    avoir

    d'aspiration

    initiale,

    mais on l'a

    rapproch

    tort

    du

    mot germanique

    hh,

    qui possdait

    la

    mme signification

    ;

    cette association

    a

    eu

    pour

    effet

    de

    doter

    le

    mot d'une

    h

    qui

    lui

    tait

    tout

    fait

    trangre.

    5. On

    pourrait mentionner dans

    chaque

    langue beau-

    coup

    de changements

    dus

    aussi des

    confusions ou

    des

    erreurs. Il

    s'en

    produit

    trs souvent, et

    l'on peut en

    entendre

    dans la bouche

    des

    ignorants ou des

    demi-

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    80

    set,

    avec

    un t qui

    est

    la

    rduction

    d'un double

    /

    ;

    de

    mme

    septime

    ;

    cf.

    l'italien

    seite

    y

    settimo. Salvage,

    forme

    ancien-

    ne

    de

    sauvage,

    continue

    le

    latin

    silvaticum^

    homme

    des

    forts

    (silva, bois)

    :

    Yi

    de

    la premire

    syllabe s'est

    assimil

    l'a

    de

    la seconde.

    8.

    Dans le

    phnomne

    que

    l'on

    appelle

    dissimilation,

    les

    sortes de

    rptitions qu'on vient

    de voir sont cartes.

    Le

    mot latin

    peregrinum renferme

    deux

    /

    ;

    le franais

    les

    a

    rduits

    un

    seul,

    en

    remplaant

    le

    premier par

    un son

    voisin ae

    r, c'est--dire

    par /:

    plerin-,

    paraveredum

    est

    devenu

    palefroi

    ;

    frigorosum,

    frileux

    ;

    ensorcerer,

    ensor-

    celer,

    en

    dpit

    du

    mot

    sorcier

    ;

    esquarterer,

    quarteler,

    malgr

    le

    mot

    quartier.

    Bononia,

    avec deux

    n,

    a

    donn

    Boulogne.

    Il existe des

    dissimilations

    qui s'exercent

    rgulirement

    dans

    un

    domaine

    fort tendu

    ;

    ainsi

    le

    grec

    et

    le

    sanscrit

    changeaient

    en

    explosives

    simples

    les

    explosives

    aspires

    quand

    la

    syllabe

    suivante

    com-

    menait

    par

    une

    aspire

    : grec

    tithmi,

    je

    pose, au

    lieu

    de

    thithmi.

    Cette

    loi

    tait constante.

    Il

    en

    tait de

    mmo

    en

    latin

    de

    la

    dissimilation de deux

    /

    conscutifs

    :

    le

    suffixe

    -alis

    de

    navalis, etc.

    devient

    -aris

    dans

    solaris.

    consularis, etc.,

    au

    lieu de

    solalis,

    consulalis.

    B.

    Causes

    des

    transformations

    lentes et

    gnrales.

    1.

    Ces

    sortes de

    changements

    constituent,

    comme

    nous

    l'avons vu,

    une

    partie

    essentielle

    de

    l'volution

    des

    sons.

    Pour

    expliquer

    leur

    apparition,

    on

    a

    song

    tout

    d'abord

    l'action

    de

    Y

    euphonie

    :

    le

    souci,

    mme

    inconscient,

    de bien

    parler

    porterait

    les

    hommes

    choisir

    d'instinct

    les sons

    les plus

    harmonieux

    et

    les

    substituer

    d'autres,

    dont

    l'audition

    serait

    moins

    agrable.

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    2.

    Cette

    proccupation

    d'ordre

    esthtique

    ne

    peut

    tre

    considre

    comme

    une

    des causes

    gnrales des

    change-

    ments

    phontiques.

    Rien

    n'est

    plus

    variable en effet,

    rien

    n'est

    plus

    relatif

    et plus

    individuel

    que le sentiment

    de

    la beaut

    des

    sons.

    Dans

    l'apprciation

    que

    nous

    portons

    sur

    le

    langage, nous ne nous laissons

    point

    guider

    par

    sa

    sonorit

    relle, par

    son

    harmonie intrinsque

    :

    nous obissons

    la

    tyrannie

    de

    l'habitude, et

    les

    sons

    les

    plus

    recommandables

    nous

    paraissent,

    sans

    conteste

    possible,

    ceux

    que

    nous

    entendons

    et

    que nous

    mettons

    tous

    les

    jours.

    Nous considrons les autres

    comme

    inso-

    lites,

    bizarres,

    dplaisants,

    parfois

    mme

    comme

    gro-

    tesques.

    Ainsi

    des

    mots

    congolais,

    tels

    que

    Arouwimi,

    Lou-

    loualaba,

    Monitikira,

    Oua-Manyma,

    etc.,

    nous

    tonnent

    par

    la

    succession

    de

    leurs

    voyelles,

    alors

    que

    l'accumula-

    tion

    des voyelles augmente en

    gnral

    la

    sonorit

    et

    l'harmonie

    des

    mots.

    Les

    voyelles

    nasales,

    si

    frquentes

    dans

    la

    langue

    franaise, ne sont

    pas sans

    choquer cer-

    taines

    oreilles

    trangres,

    qui leur

    prfrent

    les voyelles

    pures

    de

    l'italien ou de

    l'espagnol

    :

    les nasales

    contri-

    buent

    en

    effet

    assourdir

    le

    son

    (1).

    Nanmoins

    les

    mots

    franais

    produisent

    sur

    nous

    un

    effet

    ridicule,

    quand

    nous

    les

    entendons

    dire sans

    nasalisation,

    dans

    les

    dia-

    (1)

    Le

    pote

    ou

    le

    musicien

    peuvent sans

    doute

    en

    tirer des

    effets

    prcieux

    ;

    cf.

    par

    exemple

    les

    vers

    suivants

    :

    Avec des

    grondements

    nue

    prolonge

    un

    long

    rle

    (Heredia).

    Quelle

    est

    l'ombre

    qui

    rend

    plus

    sombre

    encor

    mon

    antre

    ?

    (Heredia).

    A l'heure

    o

    dans

    les

    champs

    l'ombre

    des

    monts

    t'allonge. (Hug

    Le

    Mon

    qui

    jadis

    au

    bord

    des

    flots

    rdant

    Rugissait

    aussi

    haut que

    l'Ocan

    grondant.

    (Hugo).

    6

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    83

    l'allemand

    strauch,

    demande

    un

    effort de

    plus

    que

    5/

    dans

    stern.

    Inconsciemment,

    nous

    serions

    tents

    de

    rendre

    ces

    sortes

    de

    groupes

    plus

    commodes

    prononcer.

    Ainsi

    se justifierait

    le

    passage

    des

    deux

    consonnes

    et

    du

    latin

    octo

    au

    /

    long

    de l'italien

    otto,

    dont l'articulation

    ne

    demande

    qu'une seule

    position

    des organes.

    7.

    Mais

    la difficult

    des

    sons,

    pas

    plus que

    leur

    eupho-

    nie,

    ne

    peut tre

    soumise

    une

    mesure

    absolue. Le

    sen-

    timent

    que nous en

    avons

    varie,

    suivant

    que nous

    apprcions

    notre

    langage

    ou

    une

    langue

    trangre.

    En

    gnral, les

    sons qui

    nous

    semblent

    faciles

    appartien-

    nent

    aux

    mots dont

    la prononciation

    nous

    est

    familire.

    L'habitude,

    cette fois

    encore,

    rgle notre opinion.

    Les

    associations

    de consonnes, si

    frquentes et

    si

    touffues

    dans

    les langues

    germaniques,

    font sur les

    Allemands,

    sur

    lts

    Nerlandais,

    etc.,

    l'impression

    d'tre

    au

    moins

    aussi

    aises

    que

    certains

    sons

    simples des

    langues

    latines

    :

    cf.

    les

    mots

    nerlandais

    schrijven,

    allemands

    schwin-

    gungen,

    zpfchen,

    zwtschern,

    ansichtsturm, etc.

    8.

    D'ailleurs,

    les

    sons nouveaux,

    qui,

    dans une

    langue,

    viennent

    en remplacer

    d'autres,

    apparaissent

    souvent

    plus

    compliqus

    que

    les anciens.

    Ainsi, les

    consonnes

    explosives

    manifestent

    une

    tendance

    s'adjoindre

    une

    aspiration

    parasite

    :

    p,

    dans les

    langues

    germaniques,

    devient

    ph;t

    =

    th,

    etc.

    ;

    ces

    groupes

    s'alourdisstiit

    encore

    jusqu'

    se changer

    en

    pj

    : cf.

    l'allemand

    pierd,

    du

    latin

    paraveredus,

    en

    nerlandais

    :

    paard

    ;

    th

    devient

    ts

    : le

    mot

    tard,

    prononc

    par

    un

    Danois,

    sonne

    comme le

    mot

    tzar.

    C'est

    un

    changement

    de ce

    genre qui

    a

    boulevers

    autrefois

    le systme

    phontique de

    l'allemand :

    il

    y

    a

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    84

    introduit l'ensemble

    des phnomnes

    runis

    sous le

    nom

    de

    zweite

    lautverschiebung.

    Des

    mots qui,

    jadis,

    commenaient

    par

    des

    consonnes

    non

    aspires,

    ainsi

    que

    le

    tmoignent

    le gotique

    et les

    autres dialectes,

    sont

    devenus en

    haut allemand

    : zahn

    (1)

    :

    got.

    tunthus

    ;

    zunge

    : anglais longue

    ;

    zhlen

    :

    anglais

    tell,

    nerlandais

    taal

    ;

    pfund

    :

    anglais

    pound

    ;

    pfau

    est

    emprunt

    au

    latin

    pavo

    (paon).

    9.

    On

    prtend

    parfois

    que les

    conditions

    climatriques

    ont

    un

    retentissement

    sur

    le

    langage,

    parce qu'elles

    influent

    sur l'tat physiologique

    des individus.

    On ne

    peut

    nier

    de

    prime

    abord

    cette

    action, mais

    on

    prouve

    une grande

    difficult

    en

    trouver

    des

    exemples

    certains.

    Peu

    d'entre

    ceux qui ont t signals

    rsistent

    la

    cri-

    tique.

    Le son

    r

    roul,

    c'est--dire

    pourvu

    des

    vibrations

    nergiques

    de

    la

    pointe

    de

    la

    langue

    ou

    de

    la

    luette,

    s'entend d'ordinaire

    dans les

    campagnes, tandis

    que,

    dans

    les

    grandes villes,

    il cde

    la

    place

    une

    r

    beaucoup

    moins

    sonore

    :

    les

    roulements

    de Yr

    seraient, dit-on,

    ncessits

    par

    le

    besoin

    de

    se

    faire mieux

    entendre tra-

    vers

    champs,

    de

    longues

    distances.

    Il

    a

    paru plus

    vraisemblable

    d'attribuer

    aux

    poussires

    du

    dsert,

    la

    crainte

    de les

    respirer,

    la

    prdilection

    que les

    Arabes

    montrent

    pour les

    laryngales

    :

    ces sons,

    trs

    rauques,

    sont articuls