Forme des ruches et

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que soit la forme de l'espace. L'homme en domestiquant les abeilles a donc reproduit cette forme circulaire, la ruche pouvait être hori- zontale ou verticale. Les premières ruches en Égypte étaient en terre cuite et horizontales, en Crête elles étaient verticales. En Afrique les ruches sont horizontales en fibres végétales et maintenant en bois (type kényane), il existe aussi un mo- dèle en ciment inattaquable par les termites! La chaleur et l'humidité au sein de la colonie seront régulées par la forme de la ruche i dans les pays chauds les ruches sont horizontales pour per- mettre à la chaleur de se diffuser. Pour la santé des colonies la tempé- rature doit être constante (35 0 à 37 0 pour le couvain) et l'hygrométrie ré- gulée en fonction de leurs besoins, chaud et humide pour le couvain, sec pour le miel operculé à 18 %. Ces observations ont certainement in- fluencé la forme et les matériaux des premières ruches. Forme des ruches et qualité de vie des abeilles Thierry Bordage Laforme des ruches et les matériaux ont-ils une influence sur la qualité de vie des colonies d'abeilles? « ... la ruche la meilleure est encore inconnue, le trésor à venirflotte encore dans la nue. Pour bien faire on devrait consulter les abeilles ... »1 L'abbé Voirnot. Une colonie s'est in5tallée 50U5 cette fenêtre. I ly a autant de modèles de ruches que d'apiculteurs, mais deux fac- teurs ont changé radicalement l'apiculture, les modèles de ruches avec la construction fixe ou mobile des rayons et l'introduction de la feuille de cire gaufrée et ensuite l'éle- vage des reines. Ces évolutions de l'apiculture ont bouleversé la santé des abeilles. De la eveillelfe à la palette. L'ÉVOLUTION DE L'APICUL- TURE ET DES FORMES DE RUCHES La sphère, le cy- lindre, le cube ou l'œuf? Si l'on observe une colonie qui s'ins- talle dans un tronc d'arbre (voire der- rière un volet ou sur une branche) ou que l'on trouve les constructions de cire laissées par une colonie, la forme ronde est toujours présente, quelle ( \ . \

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que soit la forme de l'espace.L'homme en domestiquant lesabeilles a donc reproduit cette formecirculaire, la ruche pouvait être hori-zontale ou verticale. Les premièresruches en Égypte étaient en terrecuite et horizontales, en Crête ellesétaient verticales. En Afrique lesruches sont horizontales en fibresvégétales et maintenant en bois(type kényane), il existe aussi un mo-dèle en ciment inattaquable par lestermites!La chaleur et l'humidité au sein de lacolonie seront régulées par la formede la ruche i dans les pays chauds lesruches sont horizontales pour per-mettre à la chaleur de se diffuser.Pour la santé des colonies la tempé-rature doit être constante (350 à 370

pour le couvain) et l'hygrométrie ré-gulée en fonction de leurs besoins,chaud et humide pour le couvain,sec pour le miel operculé à 18 %. Cesobservations ont certainement in-fluencé la forme et les matériaux despremières ruches.

Forme des ruches etqualité de vie des abeilles

Thierry Bordage

Laforme des ruches et les matériaux ont-ils une influence sur la qualité de viedes colonies d'abeilles?« ... la ruche la meilleure est encore inconnue, le trésor à venir flotte encore dansla nue. Pour bien faire on devrait consulter les abeilles ... »1 L'abbé Voirnot.

Une colonie s'est in5tallée50U5 cette fenêtre.

Ily a autant de modèles de ruchesque d'apiculteurs, mais deux fac-teurs ont changé radicalement

l'apiculture, les modèles de ruchesavec la construction fixe ou mobiledes rayons et l'introduction de lafeuille de cire gaufrée et ensuite l'éle-vage des reines. Ces évolutions del'apiculture ont bouleversé la santédes abeilles.

De la eveillelfe à la palette.

L'ÉVOLUTIONDE L'APICUL-TURE ET DESFORMES DERUCHESLa sphère, le cy-lindre, le cube oul'œuf?Si l'on observe unecolonie qui s'ins-talle dans un troncd'arbre (voire der-

rière un volet ou sur une branche) ouque l'on trouve les constructions decire laissées par une colonie, la formeronde est toujours présente, quelle

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Pour confectionner des objets usuelsl'homme a le plus souvent tressé levégétal ou modelé la terre; la formecirculaire est de fait plus facile à ré-aliser, les ruches avaient essentiel-lement une forme ronde en cloche,d'un diamètre et d'un volume en rap-port avec les constructions natu-relles des essaims.Celles-ci étaient composées de 8 à10 rayons de cire pour un volume de30 à 40 litres. La plupart des ruchesavaient 32 à 38 cm de diamètre, surune hauteur variant de 40 à 60 cmafin que le miel destiné à être prélevésoit posé sur les côtés de la grappe etqu'il y ait un espace aéré en dessousafin que la colonie puisse s'agrandirau printemps (voir dessin en bas decette page).La technique de tressage a ensuitepermis de réaliser des comparti-ments amovibles en séparant ainsile corps de vie de la colonie de celuidestiné aux réserves de miel. Au furet à mesure que l'homme devenaitéleveur et producteur, les modèlesde ruches ont évolué pour ses be-soins personnels plus que pour ceuxdes abeilles.Les ruches étaient donc tresséesavec les matériaux dont disposaientles apiculteurs, paille, ronce, éclissesde châtaignier, saule, etc. Le pouget,un enduit à base de bouse de vached'argile et de cendre, recouvrait cer-taines de ces ruches sur lesquelles onajoutait pour l'hivernage, une pro-tection faite de paille de seigle, lesurtout.Dans le Sud de la France, en Italie etau Nord de l'Espagne nous retrou-vons des constructions en pierre« des murs à abeilles», qui abritaientles ruches du vent et de la pluie et

De55in d'inférieur de rucheenpal)fe.

les protégeaient des prédateurs.Certaines maisons avaient même unplacard dans le mur sud communi-quant avec l'extérieur et dans lequelles colonies logeaient. Dans les ré-gions de montagne ou les régionsfroides, des maisons à abeilles re-groupaient l'ensemble des ruches.Des ruches étaient aussi creuséesdans des troncs d'arbres et recou-vertes d'une lourde pierre (Cévennes)ou construites avec de l'écorce dechêne liège.

Les pratiques apicoles basées surl'observation du développement descolonies, de la nature environnanteet des croyances populaires, évo-luaient peu, et l'expérience se trans-mettait oralement.Des écrits anciens (Colume!') fontétat d'observations et de conseilspour le bien-être des abeilles et deshommes, pour l'utilisation des pro-duits de la ruche, etc. et du mo-dèle de ruche le plus judicieux maisne comportent pas de représenta-tions. Il faudra attendre leXVIIe pour qu'une scienceapicole relate les obser-vations et les modèlesde ruches. Le micros-cope permet de décou-vrir la structure internedes abeilles par JanSwammerdam (1637-1680), Johannes Kepler

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Ruche en ferre.

(1571-1630) pour l'observation descellules de cire et Marcello Malpighi(1628-1694) pour l'observation dusystème digestif. C'est FrançoisHuber (1750-1831) qui le premierconstruit une ruche d'observationet fait ainsi des découvertes impor-tantes.A cette époque chaque village a en-core son rucher qui se transmet depère en fils ou petit-fils car ce sontles hommes qui sont apiculteurs.

Les modèles de ruches à cadresamovibles apparaissent au XVIII·puis l'industrie agricole remplace pe-tit à petit une activité jusqu'alors fa-miliale en un métier de productionet de spécialisation. L'abeille de-vient un objet commercial, avec l'es-sor de l'agriculture au XX· siècle, les

premiers mo-dèles de ruches àcadres sont pré-sentés à l'occa-sion des foires.Les dernièresruches en pailleiront ainsi dansles greniers àpart i r des an-nées 1950.C'est ainsi quela ruche est de-venue carrée ourectangulaire,en bois, avec descadres mobiles

et des feuilles de cire gaufrées quiimposent une taille de cellule unique.Les traités d'apiculture jusque versle XIX· représentent toujours desruches en paille sur un support enbois dans un espace entouré d'uneclôture. Il y a aussi des gravures mon-trant les apiculteurs cueillant du miel

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Manuel anglai5 du XVIFm, siècle.

dans des ruches creuséesen haut desarbres comme encore aujourd'huidans. la forêt primaire de Pologne,dans des forêts préservées commeen Russie et dans la forêt d'Arnot aunord de New York (voirT. D. Seeley).

Aujourd'hui encore, des ruchesrondes en paille entourées de fleurssauvages sont représentées sur lespots de miel, mais dans les pots lemiel ne vient pas de ruches en pailleet rarement de fleurs sauvages.L'abeille sur ces étiquettes n'est plusdu tout celle qui construisait libre-ment ses rayons. Est-elle encoresauvage, libre, essaime-t-elle encorenaturellement et la jeune reine peut-elle encore se faire féconder par unebelle journée de printemps en s'ap-prochant du Soleil?

CONSTRUIRE LIBREMENT LESRAYONS DE CIREL'organisme ruche construit soncorps de cire en fonction de la formeet du volume dans lequel il loge etil édifie le plus souvent une sphère.Cet organisme est totalement lié aurythme de l'astre solaire, jour-nuitet cours de l'année, ainsi qu'à sa ro-tation sur lui-même, entre 21 et 24jours, qui influence la durée de lagestation des abeilles. Les ouvrièresont besoin de 21 jours de gestationdans leur cellule, les mâles de 24jours et la reine de 16 jours. La reinepond en spirale en décrivant descercles de plus en plus larges et ré-alise ainsi une sphère de «Chaleur»et de «Lumière», qui culmine ausolstice d'été puis diminue jusqu'àl'automne. Les cellules de cire sonthexagonales en lien avec la lumière(silice) qui rayonne du Soleil et seules

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les cellules de reine sont rondes.Cet organisme très structuré montreune forme d'intelligence collectiveet s'adapte facilement à toutes lessituations climatiques et environne-mentales, mais depuis plusieurs an-nées dans les pays industrialisés, savitalité décline.Il est harcelé par un parasite, le var-roa qui affaiblit ses défenses im-munitaires et par le frelon asiatiquedepuis presque dix ans. La baissedes ressources polliniques géné-rées par les monocultures asso-ciée aux pollutions chimiques ainsiqu'aux pratiques d'élevage intensifpeu respectueuses de la biologie desabeilles, affaiblissent ses défensesimmunitaires et sa capacité de re-prod uction.Malgré cela des colonies surviventdans des arbres et montrent une ré-sistance et une adaptation éton-nantes aux agressions multiples (T.D. Seeley). L'homme n'intervient pasquand un essaim s'installe dans unarbre creux ou dans des ruches aban-données où des essaims viennent seloger. Il est impossible de visiter cescolonies car elles y ont construit li-brement leurs rayons sans tenircompte de la dispositiondes cadres et se sont com-plètement isolées avec dela propolis.Nous voyons parfois desessaims s'installer entredes fenêtres et les volets,sous les toitures ou dansdes tonneaux vides, etc.Ce n'est peut-être pas alorsla forme de l'habitat quiprédomine pour la santé deces colonies, mais plutôt lapossibilité de construire li-

brement leur corpsde cire comme ellesle souhaitent et degérer l'essaimage.

LE PRATIQUEDE LA LIGNEDROITE ET LA LÉGÈRETÉ DELA COURBEDans le rucher école que j'anime, il ya des ruches carrées, des rondes, il ya un tronc creusé par l'homme et unque la nature a offert aux abeilles,dans ce rucher les abeilles essaimentnaturellement et quand je cueille unessaim, un choix qui déterminera savie devra se faire. Le mettre dansune des ruches en paille ou un troncou bien dans une ruche à cadres,Dadant, Warré ou kényane.Si je veux récolter du miel sans écra-ser les rayons ni couper à l'intérieurde la ruche en paille, je mettrai l'es-saim dans une ruche à cadres, maissi je pense à la vie harmonieuse dela colonie qui va construire commeelle le « sent» son corps de cire, fairedes alvéoles à la taille de ses besoins,etc., je le mettrai dans la ruche enpaille, entre les deux j'ai la possibilitéde la ruche solaire*.

Ruche tronc en Russie.

1

Lever de soleil ausolstice d'hiver.

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La ruche kényanen'a pas de cadre nide hausse, elle offreun support compo-sé uniquement debarres en haut, de3t5 cm de large sur50 cm de long surlesquelles une finebande de cire estcollée. Ces barressont posées les unes

à côté des autres comme un plan-cher sur lequel la colonie construitdans le vide ses rayons. La forme del'habitat est faite avec des angles de1200 en bas et de 600 sur le haut. Lacolonie n'a pas le choix de l'espaceentre les rayons ni de la profondeur.

Cadre kényan.

En observant les colontes, leurrythme d'essairnaqe, comment ellesse protègent des prédateurs, com-ment elles gèrent leurs réserves,etc. et surtout comment elles viventavec le varrca, je pourrai peut-êtretrouver le modèle d'habitat qui leurconvient puisqu'elles sont toutes

dans le même rucher.

LA CONSTRUCTION DESRAVONSLa qualité de l'environnementet le lieu d'implantation d'unrucher ont une influence sur lavie des colonies.La construction des rayons decire est un facteur importantpour la qualité de vie des co-lonies, puisqu'il est une desprincipales indications en api-culture biodynamique.Au début de mes recherchesj'ai commencé par laisser

* Ruche 50/aire.

construire librement les rayons dansdes ruches à cadres, en mettantdans le corps de vie des cadres dehausse déjà bâtis entre deux cadresconstruits. Au printemps, quand lecadre est proche du couvain, les co-lonies édifient tout de suite des cel-lules de mâles.

Si nous coupons ces constructionsavec le couvain de mâles, les sui-vantes seront le plus souvent descellules d'ouvrières avec en bas descellules de mâles. Au cœur de lagrappe l'organisme gère plus facile-ment les rayons construits librementet les édifie suivant ses besoins. Àla périphérie du couvain il agran-dit la profondeur des cellules poury mettre le miel et les cadres sontparfois plus difficiles à manipulercar les rayons sont souvent ondulésavec des passages entre eux. Pourconsolider les rayons construits dansle vide, les abeilles construisent desponts qui deviennent alors un han-dicap pour l'apiculteur. Cela pose leproblème de l'écartement fixe entreles cadres. Pour cet aspect la rucheen paille ou en bois où les abeillesn'ont pas de modèle est préférable.Nous avons donc trois formes decellules dans une ruchet les cellulesrondes pour élever les reines, les cel-lules hexagonales pour l'élevage ducouvain d'ouvrières, celles de mâlesqui sont plus qrandes, mais il y a aus-si des cellules pour le miel qui sontde taille variable et surtout plus pro-fondes ce qui influence la largeur durayon. C'est ce qui explique aussi lesondulations dans les constructionslibres.Une colonie s'est laissée aller àconstruire librement dans une

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hausse dont les cadres n'avaientaucune cire gaufrée. Afin d'éviterce genre de problème il est préfé-rable de mettre un cadre à construireentre deux cadres déjà bâtis.

UNE CONSTRUCTION ENHAUTEUR OU EN LARGEUR?L'existence de nombreux modèlesde ruches à cadres prouve quel'homme a toujours cherché un mo-dèle idéal pour son travail mais aus-si pour la vie des abeilles. Pourtantquand les abeilles quittent une rucheelles cherchent le plus souvent unarbre creux, l'ambiance de cet es-pace de vie, sa forme, son volumeet la qualité de l'emplacement ontune résonance sur le bien-être desabeilles. Dans cet espace « l'orga-nisme » se développe à son rythmeet se soigne certainement. Je recon-nais les essaims ayant vécu deux ansdans un arbre à la manière dont ilsconstruisent leurs rayons rapide-ment et de façon harmonieuse.Je n'ai pas remarqué de différencesmarquantes pour la qualité de viedes colonies, leur résistance au var-roa ou aux autres maladies entre uneruche verticale ou horizontale, maisplutôt selon l'importance du volumedont l'essaim dispose pour se déve-lopper et stocker ses réserves. Dansune région où les hivers sont longset rigoureux, une ruche verticale se-ra mieux adaptée car la chaleur se si-tue dans le haut de la ruche où sontles réserves de miel, avec le couvainjuste dessous. Au fur et à mesure desa consommation la grappe monte,alors que dans une ruche horizontaleles réserves seront réparties dans lalargeur (N.B. un isolant sera utile).

LES OBSERVA-TIONSEn visita nt les es-saims dans desruches rondes enbois ou en paille,le calme, la tran-quillité nous im-pressionnent toutde suite, les abeilles ne semblentpas perturbées par notre présence.L'activité de la colonie n'est pas trou-blée jusqu'à ce qu'un rayon soit dé-placé. Les gestes doivent bien sûrêtre précis et nous devons toujoursêtre attentifs au « chant» de la co-lonie qui nous informe de son « étatd'âme », de l'acceptation ou non denotre intervention par l'organismequi ne réagit avec nos critères de« bien ou mal ». Il m'est arrivé d'êtrepiqué en apportant un sirop de soin àune colonie.Dans les ruches à cadres le fait d'ou-vrir par dessus éclaire violemmentles abeilles ce qui est «comme siun violent courant d'air pénétrait àl'intérieur ... » R.Steiner3, la chaleurs'échappe ainsi rapidement et re-froidit le couvain, alors qu'avec lesruches en paille nous les basculons,ce qui maintient la chaleur à l'inté-rieur.

Un cadre à consttuùe qu'iles! préférable de poser entre

deux csdtes déjà bêtis.

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Les colonies peu visitées, quel quesoit le modèle de ruche, ne réa-gissent pas tout de suite à nos inter-ventions sauf si nous faisons coulerdu miel en manipulant les rayons etle fait de désolidariser l'ensembledu corps peut être vécu comme uneagression; pourtant certaines co-lonies ne semblent rien remarquerjusqu'à ce que l'on approche de lareine.Les colonies comme les humainsont leurs humeurs qui dépendentde multiples facteurs, il est impos-sible d'affirmer que tel ou tel modèlerend les abeilles plus calmes, maisles conditions de vie ont un rôle im-portant.J'ai plus de sympathie pour la rucheen paille, la ruche tronc et la ké-niane ; les abeilles y seraient-ellessensibles?

V A-T-IL UNE MÉMOIRE DECET ORGANISME?Une colonie qui a vécu un ou deuxans dans une ruche ronde et qui apu construire ses rayons librement,a-t-elle gagné en vigueur et en san-té 7 Le fait de construire librementson corps physique la rend-elle plus«joyeuse » ? Et cela a-t-il une in-fluence sur sa relation avec l'apicul-teur(rice) 7

" faudrait disposer de nombreusescolonies sur plusieurs années pouravoir une réponse objective. " y abeaucoup de paramètres qui in-fluencent l'humeur des coloniesdont la qualité des cultures environ-nantes, mais plusieurs observationspeuvent nous servir de guide.Voir une colonie construire de beauxrayons dont la forme est harmo-nieuse est réjouissant car cela est

une preuve de bonne santé.Les essaims collectés avec respect,délicatement mis en ruche sans fu-mée et à mains nues nous recon-naissent certainement. Cette façonde faire nous lie instantanément àeux. Cette observation est capitalecar si nous optons pour une apicul-ture proche de l'être de l'abeille enlaissant se développer le processusd'essaimage jusqu'à la sortie de l'es-saim, nous créons tout de suite unlien avec ce nouvel organisme en de-venir, que nous le mettions dans uneruche à cadre ou non.La période d'essaimage est la pluspropice aux échanges avec les co-lonies et à l'installation dans uneruche. Le processus naturel se déve-loppe avec une montée de la tempé-rature et se déroule en cinq phases(voir Biodynamis nO93).

Regardons l'image d'un essaimconstitué d'abeilles de colonies dif-férentes dans lequel on introduit deforce une reine élevée artificielle-ment que l'on a achetée très cher etque l'on va nourrir avec du sucre.Observons maintenant un essaimposé sur une branche ainsi que la co-lonie d'où il vient de sortir, devenueorpheline au sein de laquelle dansune semaine naîtra sa jeune reine.Les deux processus sont totalementopposés et pourtant le résultat estidentique du point de vue matériel,une nouvelle colonie est créée.En accueillant un essaim posé surune branche je peux créer un lienavec lui tout comme avec un essaimartificiel.Pourtant le chaos de l'essaimagenaturel entre dans un processusde régénération, alors que celui de

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l'artificiel crée un stress parce que leprocessus d'essaimage se fait sans lamontée en température et qu'il n'y apas la répartition naturelle des abeillesfidèles à chacune des reines.Les liens que nous créons avec ces es-saims sont-ils alors de même nature?

Pour comprendre les abeilles et entreren relation avec elles je me suis inspi-ré entre autres du travail de KonradLorenz" avec les oies et de ses obser-vations sur le lien que l'on peut créerdès la naissance avec les animaux quel'on élève.Avec les abeilles il n'est pas possible dese lier comme avec un chien par le re-gard et la voix. Cet organisme est dansun état de conscience différent de ce-lui des autres animaux, il est plus ré-ceptif à nos pensées qui reflètent nosintentions et à nos états d'âme. Lesabeilles entrent en relation avec ceuxqui s'occupent d'elles, par la pensée etles rêves.

«...L'AVENIR DES ABEILLES DÉ-PENDRA DES APICULTEURS ... »Les indications données par R. Steinersur l'origine des abeilles' et leur rôledans l'évolution de l'humanité ap-portent un éclairage précieux sur lesliens qui unissent l'homme et l'abeilleet peuvent nous aider à mieux les com-prendre et les accompagner.

L'intention avec laquelle nous interve-nons dès la « naissance» d'une nou-velle colonie est déterminante pour lasuite de notre travail d'apiculteur(rice).Si notre intention est motivée parl'aspect uniquement pratique et parla rentabilité, en copiant des mé-thodes mécaniques, une ambiance àl'image de cette approche se crée. Si je

connais bien les abeilles, que j'écoutemes ressentis et pratique une observa-tion sensible" des colonies ainsi que del'environnement tout en étant attentifaux influences cosmiques, je suis dansune approche totalement différente.

L'ABEILLE EST-ELLE SENSIBLEAUX MATÉRIAUX?Le bois est toujours le matériau pri-vilégié des abeilles et principalementdans des arbres vivants, mais dansles régions désertiques ou en Inde, unabri dans un rocher a pu leur suffire.L'homme a utilisé des matériaux à sadisposition pour réaliser une formesphérique en tressant des liens végé-taux. Jusqu'à aujourd'hui le bois sert àréaliser les ruches à partir de planches.La qualité du bois peut être considéréeen lien avec l'essence de l'arbre et avecune planète".Si l'on considère la colonie d'abeillecomme un organisme de lumière et dechaleur nous chercherons des arbresen lien avec le Soleil et Saturne" (voirBiodynamis nO98), faciles à travailleret offrant un diamètre assez impor-tant si nous voulons réaliser une ruchecreusée dans un tronc.Le frêne est en relation avec le Soleilet dans certaines régions une pratiqueconsiste à l'étêter à deux mètres du solsa deuxième année afin qu'il se diviseen plusieurs branches qui seront en-suite coupées tous les 15 ans à 20 ans.Des cavités sont formées à partir deces blessures par les champignonsd'abord puis par toute une série d'ani-maux qui creusent le bois. Quandl'espace est assez grand les abeillesviennent s'y loger.Les résineux et surtout les épicéas sontdes arbres saturniens.Dans les forêts de l'Oural, des ruches

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sont tou-jours creu-sées dans despins vivants,cette pra-tique se dé-veloppe auxÉtats-U n is,en Allemagne

et en France. Il y a aussi des ruchesdans des troncs creusés dans desarbres coupés.

Ruche dans un tronc creusé.Musée de l'abeille Ignalina enLituanie.

Il est important de noter que dans unarbre vivant, la sève circule de part etd'autre de la grappe d'abeilles, qui setrouve ainsi dans un courant d'éner-gie entre ciel et terre ce qui n'est pasle cas dans un tronc coupé commepour la ruche cévenole ou pour lesruches sculptées dans des troncs.D'autre part, les planches de boisque l'on utilise ont un fil horizon-tal alors que dans l'arbre il est ver-tical. Construire une ruche avec desplanches verticales apporterait-ilune autre dynamique aux abeilles?

La terre cuite est principalementconstituée de silice 40 à 60 %, d'alu-mine 20 à 40 %, de fer l à 6 %, de

Ruches sculptées en Russie.

chaux 5 %, etc., très isolante elle per-met de bien réguler la températureet l'humidité. Elle permet de réali-ser une variété de formes rondes etde les décorer, enduites de cire lesruches peuvent être mises à l'exté-rieur.

La paille de seigle très riche en si-lice (lumière et structure) est facileà mettre en œuvre avec de la roncecomme lien et permet aux coloniesde bien réguler la température etl'humidité, c'est le matériau le mieuxadapté pour les ruches et offrant unevariété infinie de formes.

RÉSISTANCE AUX MALADIESET PARASITESCela fait dix ans que je ne mets aucunproduit, chimique ou autre dans lesruches pour lutter contre le varroa.Je laisse les colonies construire libre-ment leurs rayons de cire, avec justeune amorce pour celles à cadres.Les colonies essaiment librement etje récupère facilement les essaimsprimaires et secondaires.J'apporte une tisane de soin avec desgouttes homéopathiques au prin-temps et à l'automne et si besoin un

nourrisse ment à base de sucre decanne biodynamique et de miel.Les modèles de ruches sont desDadant 10 cadres, kényane, rucheen paille de seigle, Warré, uneruche tronc creusée dans un dou-glas et un tronc d'arbre où un es-saim s'est logé naturellement.

Seules les colonies dans les Dadantet Warré reçoivent les tisanes desoins et sont récoltées. Les autresne le sont pas.Les colonies les plus calmes sont

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dans les troncs, les ruches en pailleet la kényane.Une colonie récoltée dans un comp-teur électrique et logée dans uneruche Dadant est très vigoureuse.Les essaims primaires se déve-loppent bien dans les ruches àcadres.Le varroa est présent dans toutes lescolonies, sans vérification dans lestroncs et les ruches en paille, maisje constate qu'il n'y a pas d'abeillesaux ailes déformées visibles sur lesplanches d'envol, les autres modèlesont plus ou moins de chute de varroasur la planche de contrôle. La mor-talité de l'ensemble du rucher s'eststabilisée mais a toujours été iden-tique à la moyenne constatée dansla région. Il ya pour l'instant moinsde mortalité au printemps dans lesruches sans cadres et la kényane, etl'essaimage secondaire est plus im-portant avec un faible remérage enfin d'été.La loque européenne est peu pré-sente mais chaque année une colo-nie est très infestée et nécessite untraitement particulier.

De 2005 à 2010 le syndrome d'effon-drement des colonies a été le plusmarqué avec une recrudescence dela nosémose, depuis trois ans l'en-semble des colonies a trouvé unéquilibre.Ce sont les mêmes constatationsque T. D. Seeley fait pour les essaimslogés dans des arbres.Les colonies se différencient par leurcomportement, leurs pratiques denettoyage et d'essaimage, quel quesoit le modèle de ruche.Pour la gestion des frelons asia-tiques, les colonies se défendent

mieux actuellement qu'au débutde leur arrivée et le frelon euro-péen semble reprendre sa place.Une communication entre les co-lonies (comme pour les arbres) surla manière de résister aux frelons,semble s'être installée et certaine-ment avec les autres colonies dansla région.Les ruches que je n'ouvre pas ont uncomportement plus défensif maisdans l'ensemble chacune adopte lamême technique que les abeillesasiatiques car elles font la «ola »

pour intimider le frelon (BiodynamisnO91, automne 2015).Malgré une pression importante desfrelons à l'automne elles arrivent àstocker du pollen et du nectar.Je n'ai pas constaté de présence defourmis dans les ruches en paillealors qu'il yen a davantage dans lesruches Dadant où le varroa est plusprésent.Les essaims issus des ruches sanscadres seront mis dans des ruchesDadant et kényane où ils vont trèsrapidement construire des rayonsparfaitement verticaux et produiredu miel la première année. De fait jen'achète ni cire gaufrée, ni reine.La cire étant un produit gras, elleaccumule les produits toxiques queles abeilles pourraient éventuelle-ment rapporter de leurs butinageset récoltes d'eau, je change donc lescadres par roulement tous les deuxans et dans les ruches tronc seule-ment si la colonie disparaît.Je récupère de fait beaucoup decire pour faire des bougies et desamorces pour les nouveaux cadres etle fond des ruches en paille. Les co-lonies sont ainsi le plus souvent dansun corps de cire neuve.

Ruche Warrré ronde. 1

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Modèle5 de rucbesen paille. AVANTAGES ET INCONVÉ-

NIENTSChaque modèle a ses avantages etinconvénients selon que nous optonspour la construction libre des rayonsou une manipulation facile, la récoltepar centrifugation ou pressage,'etc.L'inconvénient des ruches en pailleest qu'il faut apprendre à les fabri-quer, mais après quelques essais ce-la devient un plaisir (voir formationorganisée par le MABD). Elles néces-sitent un abri et leur manipulationest plus délicate.Les avantages des ruches en paillesont que le couvain n'est pas divi-sé par des cadres, que les essaimss'y développent plus rapidement etsont plus autonomes, qu'elles ont unfaible coût (20 €) et qu'elles sont es-thétiques. Elles offrent une bonneisolation pour les colonies, une lé-gèreté pour les déplacements ainsiqu'une grande solidité et longévitéquand elles sont habitées (plus de

40 ans).Les inconvénients des ruches àcadres sont le poids et la fragilité auxintempéries avec beaucoup de ma-tériel nécessaire à leur utilisation.L'avantage des ruches à cadres estleur standardisation qui facilite letravail pour diviser et faire la récolte.Actuellement lescolonies sont moinsvolumineuses, il est donc nécessairede réduire à 9 ou 8 cadres le corps devie, ce qu'il n'y a pas à faire dans lesruches en paille car l'organisme gèrel'espace comme il le veut (diamètreintérieur 35/38 cm sur une hauteurde 60). La ruche kényane se déve-loppe horizontalement et il suffit del'agrandir au fur et à mesure des be-soins en déplaçant la partition, ce quise fait sans gêner la grappe mais né-cessite plus de visites au printempsquand la colonie se développe.Dans la ruche Warré et les divisiblesun seul modèle de corps et de cadrefacilite le travail et permet de mieuxréguler le volume nécessaire au dé-veloppement de la colonie.

QUEL MODÈLE CHOISIR?Le premier critère pour faire un choixsera lié au type d'apiculture que nousrecherchons, intensive ou non avectranshumance, etc. Ce choix déter-minera de fait le modèle et les ma-tériaux.Le deuxième sera le bien-être desabeilles (déjà avec le modèle) pourconstruire leur corps de cire libre-ment avec ou sans cadres, horizon-tal ou vertical.Le troisième, la facilité de construc-tion si nous les fabriquons et la fa-cilité de manipulation pour notrebien-être.Les abeilles nous offrent leur miel et

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nous devons recevoir ce don comme unbienfait.Extraire le miel avec une machine im-pose des cadres solides, sinon opter pourle pressage (quand le miel est très fluide).Il est aussi possible de développer lavente de miel en rayon. Récolter du mieldans des ruches sans cadres peut se fairesans casser les constructions où se situele couvain (ni le tuer comme ancienne-ment), ni affaiblir la colonie en prélevanttrop de miel, mais cela demande un ap-prentissage et exige d'être plus attentifaux besoins des colonies.

LA RUCHE IDÉALE DU POINT DEVUE DES ABEILLES!Pour les abeilles il n'y a pas mieux qu'unarbre au bord d'un petit ruisseau serpen-tant le long d'un pré fleuri et dans lequeldes vaches avec des cornes ruminentpaisiblement. Mais elles viennent nousrendre visite dans des endroits parfoisincongrus et nous invitent ainsi à les ac-cueillir. Il y a beaucoup de plaisir à voirles abeilles entrer dans une ruche, à lesécouter chanter, à humer le parfum quis'en dégage les soirs de miellée: pas fa-cile quand elles sont dans un arbre à 10mètres de haut.

À moins d'être cueilleur dans les arbres,nous devons pratiquer l'apiculture avecdes ruches en paille ou en bois, carrées,rondes ou hexagonales peut-être, maissurtout avec beaucoup d'amour pour lesabeilles. Elles sauront nous dire ce quileur convient. En étant à l'écoute de lanature et de nos ressentis chaque colo-nie saura nous aider à faire des choix.Une belle ruche harmonieuse offre unequalité de vie aux abeilles et est aussi unplaisir pour nous, mais cela ne suffit pasau bien-être des abeilles.C'est en respectant leur biologie et leurs

rythmes, en leur offrant un environne-ment de qualité et l'amour avec lequelnous les accompagnons que nous leurapportons des forces de vie aussi impor-tantes qu'en choisissant le modèle de laruche.

En conclusion il n'y a pas de modèle idéalde ruche, mais celui avec lequel noussommes en adéquation.Par amour pour nous, les abeilles conti-nuent de nous visiter et de nous of-frir leur chaleur et leur lumière malgrétoutes les agressions qu'elles subissent,savons-nous les entendre 7

Notes:1. Biographie de Daniel LejeailleVoirnot, pionnier Lorrain de l'apiculture.Imprimerie Christmann.2.Columelle, le siècle, Rome, De l'agricul-ture, tome 2 livre IX.3. Rudolf Steiner. Abeilles, fourmis etguêpes. Ed. Triades.4. Konrad Lorenz, 1903-1989 biologistezoologiste, Nikolas Tinbergen. À l'originede l'éthologie.5. Abeilles, Hommes et Dieux. Ed. Triades1958.Biodynamis nO89 à 94.6. Karsten Massei. Messages des êtresélémentaires. Ed. MABD 2016.7 et 8. MThun. Arbres, bois et planètes.Ed. MCBD 2001.9. Jane Bulleyment, Thomas D. Seeley.La démocratie chez les abeilles: Un mo-dèle de société. Broché, 2017. Ed. Quae.10. M. Chaudière. D'argile et d'abeille,pour une apiculture douce. Ed. de Terran,2014.11. http://miriampanigel.blog.lemonde.fr/page/3/?s=14+09+2011

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