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Professeur Mohamed Haddy Institut National d’Aménagement et d’Urbanisme Rabat 1 Formation doctorale Gestion des Risques et Développement Territorial Il faut se demander si les acteurs font vraiment ce qu’il faut au lieu de se demander s’ils font bien ce qu’ils ont choisi de faire. I/ Présentation générale des préoccupations de sécurisation I/1 Introduction Parce que le verbe n’est pas un simple véhicule qui permet d’expliciter ou d’appréhender une réalité dite « objective » ; Parce qu’il permet, toujours, de formuler une pensée à partir d’une idéologie déterminée ; parce que toute société est constituée d’une pluralité de champs d’action qui rendent compte de l’ orientation du mouvement social, à l’effet de concrétiser un projet sociétal ou une menace qui ébranle ledit projet, il faut investiguer le concept de sécurité, lequel est, par excellence, générique et polysémique. En ce début du XXIe siècle, la société a perdu les repères de contenir les risques inhérents à la vie en groupes ; les évènements multiples qui traversent et qui secouent la société, rendent difficile de saisir une compréhension exhaustive des rapports entre la violence et la sécurité. En effet, les nouvelles configurations de la violence ne se laissent plus circonscrire dans les termes de la philosophie politique de sécurité classique. En effet, si la définition classique de la sécurité pourrait être la réaction proportionnée, rationnelle, publique et juste, qui surviendrait en cas de tensions politiques,

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1

Formation doctorale

Gestion des Risques et Développement Territorial

Il faut se demander si les acteurs font vraiment ce qu’il faut au lieu de se demander s’ils font bien ce qu’ils ont choisi de faire.

I/ Présentation générale des préoccupations de

sécurisation

I/1 Introduction

Parce que le verbe n’est pas un simple véhicule qui permet d’expliciter ou

d’appréhender une réalité dite « objective » ; Parce qu’il permet, toujours, de formuler

une pensée à partir d’une idéologie déterminée ; parce que toute société est constituée

d’une pluralité de champs d’action qui rendent compte de l’orientation du mouvement

social, à l’effet de concrétiser un projet sociétal ou une menace qui ébranle ledit projet,

il faut investiguer le concept de sécurité, lequel est, par excellence, générique et

polysémique.

En ce début du XXIe siècle, la société a perdu les repères de contenir les risques

inhérents à la vie en groupes ; les évènements multiples qui traversent et qui secouent

la société, rendent difficile de saisir une compréhension exhaustive des rapports entre

la violence et la sécurité. En effet, les nouvelles configurations de la violence ne se

laissent plus circonscrire dans les termes de la philosophie politique de sécurité

classique.

En effet, si la définition classique de la sécurité pourrait être la réaction proportionnée,

rationnelle, publique et juste, qui surviendrait en cas de tensions politiques,

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économiques, sociales, culturelles… Si l’objectif politique et le cadre juridique de la

sécurité constituaient les structures les plus communes de l’expérience sécuritaire

pendant des siècles ; il ne reste, néanmoins, de cette expérience que le cadre

théorique. En effet les traits moraux, politiques et juridiques de l’état de sécurité -saisis

dans leurs dimensions historiques et historiales (qui marquent un point précis de

l’histoire)- ne se retrouvent plus à l’identique dans le monde contemporain, du fait que

la symétrie ne fonctionne qu’au niveau théorique et méthodologique et elle ne peut

pas être extrapolée au-delà de la réalité soumise à l’analyse.

Aussi, faut-il tenter de répondre aux défis que posent les différentes recensions ; Ces

recensements se définissent comme de puissants désordres qui règnent dans le

monde. En réponse, la réalité semble confirmer la prévision de nouveaux dispositifs,

souvent restrictifs de droits et libertés, quand ils ne reviennent pas sur des droits

acquis. En outre, l’insécurité actuelle est globale, dispersée et aléatoire spatialement ;

de même, si l’insécurité classique était due à des phénomènes naturels et opposait

des adversaires selon des codes, actuellement les acteurs des violences sont des

anonymes et leurs victimes sont des populations civiles et leurs effets n’obéissent à

aucune règle.

I/2Risque et catastrophe

I/2/1 Risque

L’essentiel des débats se focalise sur des risques autour desquels plane le soupçon

de construire des peurs et des théories du complot ; en effet, au lieu de s’attaquer aux

causes des questions qui préoccupent les consciences collectives, les décideurs

privilégient des calculs égotistes et des allégations, imposées par l’espace médiatique.

Pourtant, le moment de consommation des risques doit être séparé de celui de sa

production ; sachant que l’administration des hommes est toujours fonction de la

sécurisation des autres vivants.

Les temps présents font que l’analyse du risque se globalise et se politise ; aussi, cette

analyse dicte-t-elle l’identification de nouveaux styles de gestion dont la portée

dépasse le cadre traditionnel, celui de l’Etat. Ainsi, le risque se positionne comme un

axe fondamental de la pensée ; il s’impose en tant qu’alternative à la catastrophe qu’il

évacue ou qu’il phagocyte.

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Le risque, « événement-non-encore-survenu » incite à l’action dans un système fait

d’acteurs, de rapports, de pouvoirs de négociations et de décisions ; et dans un tel

contexte, le savoir n’est plus exclusivement entre les mains des chercheurs, il est

partagé avec les acteurs territoriaux. Aussi, ne doit-il pas être fermé dans une micro-

dimension du territoire, du fait que cette modélisation l’assécherait et lui ferait perdre

toute teneur pour n’être plus qu’une conséquence d’échecs (erreurs humaines,

défaillances d’un système technique, défauts de coordination)… D’ailleurs, la

succession d’évènements majeurs et dramatiques qui ont, depuis ceux du 11

septembre 2001 requalifié les rapports à la société et ont conduit à relancer un

nouveau type de relations internationales à l’aune des extrémismes violents.

La gestion du risque permet de conceptualiser, d’ordonner, de prévoir, d’anticiper, de

« probabiliser », d’inventorier les vulnérabilités internes, d’identifier les limites de

l’acceptable, de déterminer ce qui est négociable, d’informer, d’orienter, d’insuffler les

décisions, de participer à la vie publique, d’accompagner les victimes, d’indemniser.

La gestion du risque permet d’éclater l’imprécision de l’aléa en une myriade

d’applications et ce, par la mobilisation des acteurs, pour se traduire en politiques

publiques.

Aux USA, l’Etat contractuel a depuis -le 11 septembre 2001- accentué la

transformation par la création du « Department for Homeland Security » (DHS) par

la privatisation d’une partie des services d’urgences, prétendant suppléer au manque

de moyens de l’intervention étatique ; or dans le déluge, le privé est incapable

d’intervenir, il ne pense qu’à sauver ses intérêts.

En fait, la privatisation du risque signifie l’abandon des pauvres à la catastrophe et à

la préparation à la catastrophe… Ainsi la libéralisation du secteur ne modifie

aucunement l’ordre social qui continue de favoriser les dominants et d’engendrer des

vulnérabilités de la ville et de ses populations.

Par ailleurs, le risque est généré par la modernisation elle-même ; le progrès

technique, au lieu de diminuer le risque devient un facteur de risques. Il est devenu

une incertitude incalculable dans ses incidences, ce qui remet en cause la théorie de

la société postmoderne et de ses certitudes. Il s’agit, donc, de faire en sorte que les

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institutions deviennent aptes à gouverner avec raison et investiguer les champs d’un

nouveau « contrat » qui vise à intégrer l’humain et le non humain.

Les risques qui n’étaient que sociaux, sont devenus d’environnement, technologique

et technique où l’individu affranchi de ses liens sociaux et familiaux traditionnels s’était

perdu dans l’anomie. Il a causé tellement de dégâts irréversibles, qu’il cherche de plus

en plus à se réorienter vers une quête de reconstruction identitaire.

En outre, le savoir scientifique qui tenait le premier rang dans la société du risque,

s’interroge désormais sur lui-même : la science s’affronte avec toutes les armes de la

science. Ainsi, la réflexivité doit porter sur ce qui menace la société de l’intérieur et sur

la prise en compte rationnelle et graduée des dangers qui naissent du processus de

la modernisation.

I/2/2 Catastrophe

Les grandes sécurisations héritées des périodes passées s’étiolent ; les risques, tels

qu’ils sont pensés, réduisent la catastrophe à sa symbolique fatale et inappropriée. Et

dans cette acception, la catastrophe conserve son statut de mot-valise, un « fourre-

tout» ne revêt aucun intérêt scientifique et par sa symbolique explosive : elle fige toute

exploration de recherche.

On peut penser que l’augmentation du nombre de catastrophes ces dernières années

(par exemple, le tsunami en 2004 (Océan indien –Indonésie), l’ouragan Katrina en

2005 (USA et Amérique), le séisme de Haïti en 2010, plus récemment le tsunami au

Japon, mais aussi l’explosion de l’usine AZF en 2001(de nitrate d’ammonium de

Toulouse) ou l’attaque terroriste contre les Twin Towers en 2001 permettent de

comprendre ce qu’elles impliquent et d’envisager les manières de s’en prévenir.

Mais qu’est-ce que la catastrophe ? D’abord, elle regroupe des événements qui

semblent largement hétérogènes : Sont ainsi appelées catastrophes les cataclysmes

dont l’origine est naturelle (ouragans, tsunamis, tremblements de terre...) et les

tragédies produites par la volonté ou l’incapacité de l’homme (attentats, violences

politiques, accidents…).

Ainsi, la catastrophe est une intensité tragique, elle est la mort collective donnée

massivement et implacablement ; sachant qu’il est souvent difficile de décider ce qui

est à l’origine de la catastrophe. Penser, en effet, ce qui menace en termes de risque,

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c’est inviter à prendre en compte la probabilité des menaces et à envisager la

catastrophe, seulement, comme une réalisation concrète et dommageable d’un risque

potentiel : le principe de précaution –qui n’est pas la simple prévention- suppose de

prendre en compte les risques, ceux qui sont potentiels qui ne sont pas improbables,

mais hypothétiques.

La catastrophe est associée aux « caprices » de la nature (Tsunami 2004, Katrina

2005, Séisme à Haïti 2010), aux ratés de la technologie (Bhopal 1984, Tchernobyl

1986, crash du Concorde 2000) ou encore aux pires atrocités humaines, du fait de

catastrophes et de violences politiques (génocide Rwandais, 1994, attentats du 11

septembre 2001 attentats de Casablanca 2003, attentats de Marrakech 2011…). Elle

a pour particularité d’amalgamer des réalités aux origines disparates et aux

conséquences à échelle variable ; en tout cas, sans réel équivalent. Par son

immédiateté, la catastrophe -à des degrés- impacte tout le monde par sa terreur et par

sa portée. Cependant, du fait de son caractère flou, elle reste toujours indéfinie ; mais

en dépit de ce caractère approximatif, la catastrophe reste un terrain fort riche à portée

heuristique, aussi faut-il mettre en discussion la collusion implicite entre risques et

catastrophes.

La catastrophe offre une grille de lecture qui dépasse très largement les modèles

scientifiques établis, en ce sens qu’elle renvoie à une réalité sensible qui dépasse

l’acception sémantique (vigilance, vulnérabilité, prévention, précaution...), ce qui doit

renforcer l’usage du terme au sein de la communauté des chercheurs.

En fait, la catastrophe constitue un pont entre le percept (le vécu, l’émotion, le factuel)

et le concept (le pensé, l’idée, le potentiel) ; elle décrit dans un premier temps, puis

traduit dans un second. Elle est ce qui bouleverse, ce qui met sens dessus dessous.

Elle se traduit par une rupture et enclenche une extériorité et un retournement, d’où le

désordre, par le fait qu’elle télescope le quotidien, le banal et le normal. Par ailleurs,

lorsqu’on étudie la catastrophe, cela implique de quitter toute posture modélisée et de

procéder par connexité, sachant qu’elle n’est pas réductible à un évènement localisé

et daté et encore moins à une conjonction de phénomènes empiriques qui seraient

déconnectés de toutes interprétations.

Ainsi, la catastrophe constitue une sorte de revers de la médaille ou envers du décor ;

elle nécessite d’explorer cette part inédite du monde, particulièrement dans ses

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rapports humains. Par son ampleur, elle affecte les esprits et se dénoue dans une

catharsis douloureuse qui clôt la tragédie : la métaphore théâtrale magistralement

mise en scène par les médias.

Tenter l’intellection d’une catastrophe revient à accepter la confrontation à un rapport

au temps spécifique, lequel n’est pas un temps linéaire de la pensée rationnelle. Le

temps de la catastrophe ne tient compte ni du temps passé, ni de celui à venir, il se

concentre sur l’instant présent ; en effet, le temps suspend son cours, il se concentre

sur le grand et unique temps de l’évènement qui est en train de se produire. Il est rivé

sur l’environnement. La catastrophe permet d’interroger les fondements d’une société,

non pas en termes de progression ou de régression, mais en termes de rupture, de

surgissement brutal de l’évènement.

Un palimpseste telle est l’image à retenir de la catastrophe ; cependant, bien que

toujours singulière, la catastrophe dans son intellection suppose l’identification de

multiples dimensions, notamment des éléments d’analyse d’un découpage temporel

visant à décrire le temps de l’urgence, le temps de la reprise en main et de

l’enquête, le temps de la justice et le temps commémoratif venant clore la tragédie

pour la rendre à l’histoire.

Par ailleurs, la responsabilité des acteurs suppose de rechercher l’origine de la

catastrophe ; pour cela les différentes commissions d’enquêtes policières,

administratives et techniques doivent s’inscrire dans le registre des tentatives

explicatives du phénomène. Une telle responsabilité doit être globale et intégrée et ce,

depuis la prise en charge des victimes, à la vulnérabilité de certains publics, à la

nécessaire réparation, à la qualité des traitements des corps meurtris, à la gestion des

cadavres.

Ainsi, la catastrophe met en place une grammaire des émotions, elle enclenche des

émotions « primitives », des affects travaillés faisant de la catastrophe un espace

d’expression de la mobilisation collective, des solidarités, tout en étant le théâtre de

conflits et de revendications diverses.

La catastrophe détourne de la rationalité habituelle et toute la difficulté réside dans la

capacité du système à saisir toutes ses dimensions, à juguler les écueils et à

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transcender les goulots d’étranglement que peut créer une modélisation unique de la

catastrophe.

Il est essentiel de recueillir tous les récits pour saisir la catastrophe comme une réalité

à part entière ; ces récits peuvent provenir de témoignages directs ou de seconde

main, de reportages, d’articles médiatiques, d’allocutions des pouvoirs publics, de

compte-rendus, d’hommages, de souvenirs… Et cette parole collective -construite sur

la base de discours qui varient peu- traduit les maux en mots.

Cette analyse de la catastrophe -au lieu de partir des acteurs et des politiques

publiques- se réfère au territoire pour le laisser « parler ». Pour cela il est fondamental

de garder en tête l’image de la catastrophe « palimpseste » qui rend compte des

aspects synchroniques (simultanés) et diachroniques (évolutifs) ainsi que de la

diversité des dimensions en question.

Par ailleurs, quand on étudie la catastrophe, il ne faudrait pas sombrer dans une

posture excessive qui la magnifierait ; et cela doit être un défi permanent, tout comme

il s’agit de se départir de toute modélisation, car chacune des catastrophes a sa propre

histoire, il suffit de savoir écouter le territoire pour en décoder le langage.

En effet, la catastrophe Katrina (2005) raconte l’ouragan survenu à la fin de l’été 2005

à la Nouvelle Orléans, elle raconte ce que le désastre révèle comme fractures sociales,

conséquences du démantèlement de l'État-providence américain. Les eaux de

l'ouragan ont entraîné la rupture des digues et à la destruction de la Nouvelle Orléans

: la ville a été inondée pour 80%, 1300 personnes ont péri, 1,5 millions de personnes

ont été déplacées, quelques 150 000 personnes -sans moyens- sont abandonnées sur

place.

En fait, la catastrophe Katrina est plus sociale que naturelle, résultat qui n’est que le

produit d’une longue histoire de racismes, d’exclusions sociales, de machines

économiques prédatrices, d’ingénieries techniques iniques à l’origine de vulnérabilités

diverses ; et un tel drame s’explique par l’abandon des pauvres et il est aggravé par la

faillite des interventions gouvernementales.

Pour un véritable retour sur expérience, l’histoire orale, les entretiens sociologiques,

la pratique du terrain… permettront d’étudier et de suppléer la faillite des dispositifs de

gestion de la catastrophe. Par ailleurs, la privatisation de la gestion du risque pousse

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à se détourner de la logique solidariste et transforme le pouvoir –tout au plus- à n’être

qu’un « Etat compatissant » qui ne vient que ponctuellement au secours de ceux qui

sont en situation de détresse.

D’ailleurs, en 1927, l’ouragan qui a fait quelques 250 morts et plus de 700 000 évacués

concrétise parfaitement cette charité locale et privée qu’Herbert Hoover -alors ministre

du Commerce et chargé d'organiser l'aide aux sinistrés- a mis en place les principes

fondateurs de l'État-providence qu'il a développé par la suite, une fois président (31e

Président 1929/1933).

Une gestion raisonnée de la catastrophe réside dans la prise en charge des individus,

par l’adaptation de politiques sociales, l’assistance privée et publique, par la garantie

de la sécurité menacée par la désorganisation de l’Etat. La catastrophe est devenue

emblématique d’une immense rupture historique, une rupture avec l’idée de progrès,

avec le respect de la nature, avec la rationalité… une rupture avec l’authenticité. La

catastrophe est le récit du dessillement (analyse) de la postmodernité qui est en fait

une involution d’une modernité confrontée à ses propres créations.

Il est, donc, temps de questionner la pertinence du récit de toute catastrophe, de ses

lacunes historiques et de sa vision du contemporain. Sachant que toute crise met à nu

la « a-modernité » où les sciences et les techniques ont multiplié subrepticement et

d’une manière hybride les grandes distorsions et les drames dévastateurs.

En effet, la modernisation ne se préoccupe que de la production des richesses et non

des problèmes que celle-ci peut entraîner (pénuries, la pauvreté, conflits…) et des

menaces qu’elle produit, comme le prouve la multiplication des catastrophes du XXe

siècle et du début du XXIe siècle. Cependant, cette modernisation devient de plus en

plus réflexive, elle porte attention désormais à ce qui peut la mettre en danger,

notamment l’industrialisation qui repose sur l’idée d’une soumission du naturel aux

nécessités du productivisme.

Par ailleurs, la catastrophe ne doit pas être comprise comme un échec dans la

prévention du calcul du risque ; il faut la considérer comme un risque plus grand, un

évènement absolu, qui pense le temps comme discontinuité et une sorte de rupture ;

aussi doit-elle être entièrement anticipée, du fait que ses effets sont globaux,

dépassant largement les frontières (Tchernobyl 1986 ou le 11 septembre 2001).

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D’autre part, les résonances de la catastrophe sont universelles de par les élans de

compassion qu’elle suscite chez les populations, sa mise en image y jouant un rôle

déterminant.

La catastrophe constitue, donc, un évènement qui s’inscrit dans une temporalité de

l’instant et une rupture du temps. Elle ouvre un registre extrême de l’émotion ; elle est

le temps de la mort, des cadavres, de la souillure des corps et des espaces de vie, du

sinistre, des excès et des démesures. La brutalité des faits (paysages dévastés, morts

massives, souillure des espaces de vie…) et la surprise occasionnées par la rapidité

du sinistre ont pour effet d’engendrer des états d’âme sans équivalents.

La catastrophe ne peut pas être séparée des discours qui la racontent, qui l’interprètent

et qui participent également de sa construction. Ces discours sont liés aux

traumatismes et aux tragédies qui la construisent à partir des affects, de l’angoisse,

du désespoir, de la colère, du sentiment d’injustice… qui sont la marque de toute

rupture catastrophique du temps.

Par ailleurs, le temps de la catastrophe remet en cause l’individualisme de la

postmodernité ; les désastres ne sont pas des épreuves individualistes irrationnelles,

aveugles ; puisque dans une telle situation, la survie est fonction de la communauté et

des solidarités existentielles et collectives, seules à même de reconstituer les relations

disloquées et les liens sociaux défaits.

Ainsi, l’analyse de la catastrophe permet de saisir les limites d’une société qui prétend

n’avoir affaire qu’à elle-même ; or force est de constater qu’une telle proposition est

inefficace : seule l’appropriation de la catastrophe peut constituer la meilleure

protection, sachant que la probabilité du risque reste une probabilité et qu’un risque

probable n’est qu’ « un risque de risque », alors que la catastrophe est certaine,

massive, implacable et il faut en avoir peur.

Voltaire, commentant le tremblement de terre de Lisbonne (1755) se soulève contre

les excès d’optimisme :

Philosophes trompés qui criez : « Tout est bien » ;

Accourez, contemplez ces ruines affreuses,

Ces débris, ces lambeaux, ces cendres malheureuses,

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Ces femmes, ces enfants l’un sur l’autre entassés,

Sous ces marbres rompus ces membres dispersés (…)

De même, JJ Rousseau, dans la Lettre à Voltaire (août 1756), à propos du tsunami du

Portugal, lui répond : « ce n’est ni Dieu ni la nature qu’il faut accuser, c’est à

l’homme à qu’il faut imputer le mal. Car ce qui est en question, ce n’est pas le

tremblement de terre en lui-même, mais l’incurie des hommes qui bâtissent des

maisons à étages, qui concentrent la population dans des villes où riches et

pauvres ne sont pas pareillement exposés… ».

I/2/3 Un avatar écologisé du progrès

La postmodernité refuse toujours de distinguer un passé aveugle d’un présent

méandreux, elle continue de se cramponner à une orientation indexée à un dit progrès

mécaniste qui ne se préoccupe que procéduralement du démantèlement des

régulations environnementales par l’économie consumériste. L’antienne (refrain) de la

« fin du progrès » et de « la fin du monde », à la suite de chaque catastrophe en

cette période de haute technophilie (nucléaire civil, informatique, internet,

biotechnologies…) traduisent l’idée que le progrès est « la plus morte des idées

mortes » comme le disait Lewis Mumford1 en 1932 ; lequel progrès a perdu tout sens

politique faute d’ennemi : il a fléchi devant le consumérisme, devenant pour toutes les

composantes de l’Etat, synonyme de prospérité.

Ainsi, l’omnipotence du secteur privé a soumis la recherche scientifique aux objectifs

de rentabilité économique, ce qui nécessite la production de nouveaux produits au

détriment d’un contrôle régulé médié par l’État. La science est désormais guidée par

la rentabilité financière, via, notamment le Nasdaq2 et le capital-risque3 et

l’artificialisation du monde.

1 Lewis Mumford (1895-1990) un historien américain, spécialisé dans l’histoire de la technologie et de la science,

ainsi que dans l’histoire de l’urbanisme. Lewis Mumford s’est attaché à décrire la genèse et les conséquences de la société industrielle, il a développé une vision du monde moderne extrêmement critique, en particulier envers les techniques et technologies militaires. 2 Le NASDAQ, sigle de National Association of Securities Dealers Automated Quotations, est le deuxième plus

important, en volume traité, marché d'actions des États-Unis, derrière le New York Stock Exchange ; il est le plus grand marché électronique d'actions du monde. 3 Les investisseurs en capital-risque apportent du capital, ainsi que leurs réseaux et expériences à la création et

aux premières phases de développement d'entreprises innovantes ou de technologies considérées comme à fort potentiel de développement et de retour sur investissement.

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La technologie ne répugne pas le monde développé ; mieux, ce monde externalise ses

conséquences les plus négatives hors de l’Occident, au gré des coûts salariaux, de la

production industrielle et de la recherche et développement4. Désormais, un risque est

toléré, en fonction de l’intérêt économique des substances et la définition des seuils

de tolérance qui s’imposent dans les instances de régulation : consacrant en fait

l’acceptation, pour des raisons économiques, pour « un taux de cancer

acceptable » !!!!!

Le terme « soutenable » ou « durable » joue un rôle similaire dans l’exploitation

toujours plus sauvage de la nature. Le principe du « maximum sustainable yield »

mis en œuvre après la seconde guerre mondiale dans des traités internationaux

(conférence de la FAO en 1955) consacre le principe que l’on peut, en toute quiétude,

pêcher des quantités optimales. Des modèles dits écologiques cautionnent ainsi

l’augmentation radicale des prises, de 20 millions de tonnes en 1950 à 80 millions en

1970. Les stocks ne prenant pas en compte certains facteurs comme la structure des

populations ou la dégradation des écosystèmes marins, ils ont conduit à l’affaissement

généralisé des réserves halieutiques : la « soutenabilité » a conduit à l’illusion d’une

réconciliation des impératifs environnementaux avec l’efficience économique.

La science « prescience » passe sous silence des questionnements majeurs, tels ce

qui pourrait causer l’apocalypse : qui sait si en extrayant tonne après tonne de charbon

ou baril après baril de tonnes d’hydrocarbures, en pêchant tonne après tonne de

poisson on ne risque pas de déplacer le centre de gravité de la Terre et de produire

un basculement de son axe ? Qui sait si les canaux interocéaniques ne perturberont

pas les courants maritimes, causant ainsi des inondations dévastatrices ? Qui sait si

le déboisement et l’industrialisation n’entraîneront pas une catastrophe climatique ?

Le monde est en train de devenir des sillons de chemins de fer, des calles de grands

navires, une succession de « monstres » qui rejettent des billions d’acide carbonique

et d’oxyde de carbone qui troublent l’harmonie du monde. La postmodernité se réalise

dans un brouillard d’inconscience et dans une frénésie totale5.

4 À la fin des années 1940, des toxicologues avertissent les gouvernements : à n’importe quelle dose, des molécules

issues de la chimie de synthèse accroissent le risque de cancer. Un consensus s’est formé pour bannir ces molécules de l’alimentation. En 1958, aux États-Unis, la clause Delaney interdit la présence de résidus de pesticide dans les aliments. 5 Eugène Huzar : La fin du monde par la science, Paris, Ere, 2008 qui réédite des extraits des deux ouvrages de

Huzar : La fin du monde par la science (1855) et l’Arbre de la science (1857)

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La confusion qui existe actuellement entre la catastrophe et le risque n’est pas fortuite :

ils sont tous deux liés aux politiques de financement de la recherche. En effet, le risque

a pris une telle importance qu’il occupe désormais une place prépondérante,

facilement finançable, même si la recherche sur le risque demeure relativement

limitée : elle se résume à des thèses de doctorat. Aussi, faudrait-il intégrer l’étude de

la catastrophe au paradigme du risque, pour garantir l’exploration et rassurer les

financeurs : car si le journaliste ferraille avec le chaud et joue sur le versant des

émotions, le chercheur analyse à froid.

A la conscience de la finitude –prônée par les tenants du « risque zéro »- succède

celle de la catastrophe où l’homme n’est plus un « être-pour-mourir ». Il est

désormais un « être-pour-détruire-et-se-détruire ». Cette philosophie de l’incertitude

et de la probabilité de la catastrophe est la seule leçon à tirer de la catastrophe ; en

effet, l’homme est toujours faillible, vulnérable et démuni face à des événements qu’il

ne maîtrisera jamais.

Enfin, si la peur n’est jamais bonne conseillère et s’il n’est pas prouvé qu’elle éveille la

raison ; il faut mettre, néanmoins, fin à l’optimisme qui entoure les sciences et les

techniques et veiller à leur usage, notamment par des dispositifs permanents de veille,

de surveillance et de délibération implicatives.

I/2 Intellection/historicisation de sécurisation

Dans l’antiquité gréco-romaine, le terme sécurité avait un sens surtout philosophique,

il signifiait la tranquillité d'esprit, la sérénité, l'état d'âme de celui qui est sine curae,

sans inquiétudes (serein). Alors que tout au long du Moyen-âge, le mot

sécurité signifiait l’extinction de toutes sortes d’aléas et menaces : au sens de la

croyance chrétienne « millénariste6 ».

Depuis, cette idée de sécurité mythique, au sens d'allégresse et de paix n’a jamais

disparu. Elle continue d’être galvaudé, par les puissances à idéologie dominante, pour

faire croire à l’avènement d’un quelconque éden dont les mots d’ordre sont

6 La croyance millénariste, condamnée comme hérétique, surviendrait après une période qui durerait mille ans. Après cela, le

monde connaîtrait une absolue sécurité, une prospérité totale, un bonheur partagé et cette période serait le prélude du jugement dernier : pax et securitas, pour reprendre l’expression de Saint-Paul. Ainsi, la violence, l’injustice et le mal disparaîtront de la

surface de la terre : elle est un mouvement de pensée contestant l'ordre social et politique existant, réputé décadent et perverti.

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l’universalisme, le conformisme (correctness), la globalisation omnimarchandisante,

unidimensionnalisante et unidirectionnelle : un nouvel ordre mondial.

La sécurité constitue, ainsi, un principe régulateur, c’est-à-dire qu’elle est à la fois, un

sentiment, un programme politique, une force matérielle, une source de légitimité, un

bien marchand, un service public… La sécurité s’expliquerait par quatre acceptions

historiques, à savoir la sécurité comme état mental qui est une disposition des

grandes sagesses stoïciennes (courageuses), épicuriennes (heureuses) et sceptiques

(incrédules) pour atteindre la quiétude de l’âme face aux vicissitudes du monde. Une

sécurité qui est une situation objective et un ordre matériel caractérisé par

l’absence de dangers ; une sécurité qui est une garantie par l’État des droits

fondamentaux de la conservation des biens et des personnes, voire comme un bien

public (surveillance, équilibre des forces, raison d’État et état d’exception) ; une

sécurité qui est un contrôle des flux décisionnels et qui intègre de nouveaux

concepts, particulièrement la traçabilité, la précaution, la régulation, la

gouvernementalité.

I/2/1 Instrumentalisation de la sécurité

Les états de violences ne se comprennent plus uniquement par comparaison négative

avec l’état de sérénité ; la sécurité constitue une affaire de vie commune, de chacun

et de tous ensembles, et elle doit être toujours urgente, massive et générale pour

remédier aux discontinuités, aux menaces, aux risques et aux crises.

La sécurité, au sens actuel, est liée à l’existence et à l'affirmation de l'Etat-nation et

elle est indissociable des compétences, des finalités et des fonctions de l’Etat. Et dans

ce contexte, émergent des variantes de la sécurité étatique qui correspondent aux

trois dimensions fonctionnelles de l'Etat, à savoir la sécurité juridique, la sécurité

policière et la sécurité militaire : le juge, le policier et le militaire.

Pour ce qui est de la sécurité juridique, les textes fondent la théorie d'un "contrat

social" sur lequel repose la construction de l’Etat moderne ; il s’agit des normes qui

sont à l’origine des institutions politiques et qui sont structurées par l’autorité

souveraine. Ces textes régulent un vivre ensemble selon des règles et selon le principe

de la légitimité. Ainsi la finalité de la fonction principale de l'Etat, c'est la sécurité, la

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liberté et l'égalité et cette sécurisation supposera des lois publiques efficientes et une

justice indépendantes que les politologues appellent la « gouvernementalité

sécurisante ».

La sécurité se comprend, aussi, comme la conservation des biens et des personnes

d’une part et comme l’outil qui permet de sauvegarder l’ordre public d’autre part ; il

s’agit d’une sécurité qui suppose l’existence de normes et de systèmes de

surveillance7. Cette sécurité fonctionne aux renseignements (contrôle des individus

suspectés de menacer l’ordre public) ; ces pratiques de sécurité peuvent menacer les

droits fondamentaux des individus (liberté de circulation, droit à l’intimité…). Elle définit

une gouvernementalité sécuritaire qui fait passer le maintien de l’ordre et la

conservation des personnes avant le respect strict des droits des personnes ; sachant

que la première des sécurités qui doivent être garanties, c’est la liberté ; aussi, s’agit-

il de consacrer une gouvernementalité sécurisante, alors que pour la

gouvernementalité sécuritaire, la première des libertés, c’est la sécurité.

Il est aisé de constater, qu’actuellement, l'Etat n'a plus le monopole de la sécurité, il

n’est qu’un des gestionnaires, du fait qu’il accepte de plus en plus de sous-traiter à

des entreprises privées des opérations de surveillance. Et ce qui est grave, c’est

lorsque ces groupes –qui s’internationalisent- interfèrent et grignotent dans des

espaces de sécurité, jadis du seul ressort de l’Etat. Ainsi, les compagnies énergétiques

travaillent à leur propre sécurité, tout comme d’autres grands groupes et ce faisant, il

ne restera à l’Etat que la gestion des populations, notamment leur régulation, leur

traçabilité et leur sélection, mais est-ce le rôle d’un Etat de droit ?

Alors, sur quoi fonder le souci de sécurité ? Peut-on lui trouver un fondement qui soit

d’un côté, juridique et politique, et qui ne soit pas de l’autre, attentatoire aux droits

individuels ? Sachant que l’idée de sécurité doit être la priorité du juste et non le

délire de la contre-terreur, un délire enclenché par quelconques « connaisseurs »

de races, de religions, de civilisations qui ont déjà distingué les bons des mauvais Etats

ou peuples fréquentables, « c'était un gnome hideux... Il avait le nez camus des

Mongols, les yeux petits des Samoyèdes [peuples de Sibérie], les lèvres pincées

7 En cas de mise en péril et en cas de survie des institutions, à l’exception des mesures d’exception, d’états d’exception, état

de siège…

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des Sioux... Sa brutalité était si manifeste, ses gestes si menaçants, sa cruauté

si affichée, sa bouche tellement venimeuse8 » : voilà, leurs refrains, sachant que

de telles attitudes n’engendrent que dangers, violences innommables et tentations

paroxystiques pour des individus qui n’en peuvent plus.

I/2/2 Privatisation de la sécurité

Feignant le péril insécuritaire, prétextant des menaces contre leur existence sociale

et contre leurs souverainetés, les décideurs confondent, souvent, des manifestations

pour rétablir des équilibres avec des tumultes violents. Ces approximations génèrent

et entretiennent des imprévisibilités qui servent de subterfuges aux décideurs pour

opérer des actions de quasi-maternage peu valorisantes, commettre des actes

infantiles et opérer de viles opérations, magnifiées par une prétendue quête du

« risque zéro » qui deviennent, en fait, le fourrier de perversions et d’errances

irréversibles.

De par son développement historique, l’approche sécurité subit des contraintes

contradictoires, dont témoigne l'ambiguïté de sa dénomination : appréhendée au

début, pour prévenir des aléas en termes de négociations entre les acteurs

institutionnels concernés et les représentations sociétales impliquées dans un

quelconque conflit. Elle concerne, depuis, tous les faits violents, aussi minimes soient-

ils.

Ces aléas sont, d’ailleurs, magnifiés et politisés par chacun des groupes et lobbies

politiques. Ils confèrent aux vocabulaires conflictuels des symboliques et des

dimensions performatives eu égard la position qu’ils défendent : pour les tenants du

pouvoir, ces violences sont couramment qualifiées d’irrationnelles et

d’incompréhensibles ; alors que pour ceux qui revendiquent des changements, elles

sont le fruit d’une recomposition des identités politiques et se veulent de dessiner de

nouveaux équilibres sociétaux.

8 Jean-Marc Berlière : Du maintien de l’ordre républicain au maintien républicain de l’ordre ? Réflexions sur la violence, in

Genèse, 12, 1993, pp. 6-29

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I/2/3 Quelle sécurité ?

La recherche sur la sécurité doit s’inscrire dans un processus de nouvelles pratiques

discursives qui permettraient d’appréhender et de consolider un vécu sociétal paisible

et dynamique à jamais fini.

L’historicisation des vocabulaires de la sécurité et le processus de territorialisation,

déterritorialisation, reterritorialisation (TDR) doivent être mis en œuvre, pour

promouvoir une société intégrée et intégratrice, ce qui permettrait de mieux

comprendre comment les populations interprètent leur réalité. Cette méthodologie

conduirait à la formulation de nouvelles problématiques : notamment, quelles sont les

interactions entre les différentes composantes de la société pour une sécurisation

efficiente ? Quelles sont les pistes qui permettraient d’accroître le sentiment

d’appartenance sociétale, seule à même d’anticiper et de juguler les violences

négativistes ?

Par ailleurs, il n’existe pas “d'essence violente” inscrite dans la nature humaine ou

dans l’ordre social ; les pratiques extrémistes évoluent selon l’appréhension des

contextes sociaux et politiques. Il s’agit de pratiques signifiées pour contrebalancer

des formes multiples de dominations et d’exploitations. Par ailleurs, l’insécurité n’est

pas une psychose, elle ne fait qu’affirmer et compléter le vécu de tous les jours qui est

partiel, parcellaire et partial et qui ne laisse apparaître qu’une réalité apparente, siège

de prédilection et le plus élaboré des mensonges dont l’immense aven ne cesse de se

creuser. En effet, dans un climat d’effilochement des normes, de décriminalisation, de

dépénalisation, de contraventionnalisation, de classement sans suite des actions

violentes, l’insécurité prend des dimensions effarantes ; situations, d’ailleurs où les

pires dépassements s’accumulent et s’entassent.

En outre, face au laxisme qui n’épargne aucun secteur, le temps est venu de rétablir

une ambiance de sécurisation et pour cela, il faudrait libérer la parole publique par

divers moyens, du fait que la rencontre entre les nouvelles pratiques approximatives

et les logiques centralisatrices et autoritaires favorisent, toujours, l’émergence de

discours paroxystiques et aggravent les liturgies (cultes) qui célèbrent la rue comme

un ennemi de l’Etat, à la manière d’un Clemenceau qui lançait en 1906 à une

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délégation ouvrière : «Vous êtes derrière une barricade ; moi, je suis devant. Votre

moyen d’action, c’est le désordre. Mon devoir, c’est de faire de l’ordre ».

Le refus de la violence doit occuper une importante place dans le vécu social, pour

cela des instruments comme la légalité, la liberté et la justice doivent sous-tendre

cette quête. C’est à découvert que les décideurs doivent actionner les mécanismes de

régulation sociale, à l’effet de permettre l’exercice de l’équilibre sociétal, à moindre

frais. Dans ce sens, pour paraphraser Gambetta, qui disait en 1877, comment ne

voyez-vous pas que si on laisse la justice fonctionner, si on respecte son

indépendance et l’autorité de ses décisions, la sécurisation sociétale serait bien

assurée ? Comment ne voyez-vous pas, que vous avez là un moyen de terminer

pacifiquement tous les conflits et de dénouer toutes les crises ? Et que, si la

justice fonctionne dans la plénitude de sa souveraineté, il n’y aurait plus

d’injustice…

En effet, l’apathie de la sécurité et la déception devant l’action politique sont induites

par un système politique approximatif où les décisions structurantes et importantes

sont rarement prises ; et ce faisant, le laisser-aller délégitime toutes les actions

politiques directes, expressives et efficaces. Ainsi, les obstacles -qu’ils soient

politiques ou techniques en raison de leur diversité et parfois, en raison des

contradictions des procédures- expliquent les défaillances de politiques sécurisantes

et se traduisent en mécanismes inefficients, du fait de plusieurs déficits et de l’absence

d’instruments de coopération, notamment :

un réseau de communication avec une architecture, allant du niveau central

au niveau intermédiaire ;

des systèmes informatiques et informationnels très développés, utilisant des

techniques ciblées ;

un service performant de ressources humaines.

Il est, donc, déshonorant que des acteurs décisionnels se détournent de la quête d’une

politique sécurisante, axée sur la justice qui est la première marque de la souveraineté,

pour lui préférer une politique sécuritaire tout azimut.

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A côté des foyers classiques d’insécurité se sont adjoints de nouvelles acceptions de

la sécurité, à savoir la sécurité publique, la sécurité alimentaire, la sécurité

énergétique, la sécurité des frontières… Ainsi, la tranquillité ne dépend plus

uniquement d’un état d’âme mais surtout d’un gouvernement efficient et d’un État fort.

En effet, les fameux vœux millénaristes chrétiens ont été remplacés par ceux des

systèmes dominants des temps modernes, allant des systèmes militaires, aux

systèmes totalitaires, aux démocraties néolibérales ; lesquels systèmes n’ont pas

manqué de créer des confusions entre la sécurité policière et la sécurité juridique,

entre la sécurité juridique et la biosécurité et ses logiques de sollicitations permanentes

-être toujours et partout accessible et réactif- ce qui est à l’opposé de l’idéal

vernaculaire, construit sur la stabilité intérieure.

La sécurité dont il est question, actuellement, est une sécurité au sens néolibéral qui

suppose un démantèlement de l’Etat-providence, avec point focal, la remise en cause

des politiques publiques et des logiques de solidarités. En sommes, une sécurité-

marchandisation se substitue à la sécurité-protection : sachant que le véritable

principe de sécurité se définit toujours par une retenue au bord du désastre.

I/3 Sécurisation et biopolitique

La biopolitique, l’autre nom des politiques sécuritaires, même si elle se pare de la

rhétorique existentielle, reste tributaire de la dignité et de la morale. Et dans cette

logique, l’homme libre et critique doit se substituer à celui du consensus

inconditionnel ; cet homme dompté qui voudrait s’installer, confortablement, dans un

système aseptisé où l’individu est domestiqué et ce, prétendument, pour optimiser ses

capacités d’épanouissement et son progrès matériel.

Ainsi, la biopolitique est une manière de vivre dans une relative mobilité raisonnée ;

il s’agit de manifester, d’informer et de s’informer au sein de son milieu social. Elle est

une politique de régulation des populations par un pouvoir normalisateur.

La biopolitique se veut le contraire de la violence, de l’eugénisme, du génocide, du

racisme, de l’exclusion, de l’extermination de l’autre et de la dénégation des

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différences ; en fait, elle vise à concilier la zoé9 et le bios10 qui doivent se réajuster, en

permanence, dans une logique centripète.

Ainsi, le concept de la biopolitique surprend et interpelle à la fois, du fait qu’il n’est

pas évident et qu’il reste empreint d’ambiguïté : s’agit-il de pouvoir de la vie, de pouvoir

sur la vie, de politique de la vie, de politique sur la vie ? Les formules « sur la vie »,

« de la vie » s’interpénètrent-elles, s’influencent-elles, s’orientent-elles et dominent-

elles la société ? Aussi, l’étude du thème de la biopolitique s’offre au chercheur pour

investiguer et explorer les champs de sécurisation sociétale, particulièrement ceux de

la régulation de tous ses domaines, notamment socioéconomiques.

En effet, le principe de stabilité dicte une remise en cause des organismes classiques

de la sécurité. Dans cet esprit, les Départements en charge de la sécurité nationale,

intérieure, médicale, énergétique, alimentaire, environnementale doivent revoir leur

manière de travailler, du fait que l’âge de la biopolitique se concrétise par la

maximalisation des menaces tant internes qu’externes, tout comme il se traduit par

l’aggravation de la vulnérabilité de l’homme.

Pendant que dans ce même âge, l’Etat, ce maître-étalon, se démène pour tenter de

retrouver de nouvelles sources de légitimité, par la redéfinition de nouvelles stratégies

et par la réforme de ses principales institutions de sécurité, eu égard, l’émergence et

la prolifération d’aléas non conventionnels qui complexifient la nature des interventions

sécuritaires : bouleversements qui appellent à des investigations pour déceler de

nouvelles voies et pour croiser les regards sur de nouvelles doctrines, à même de

contenir et de réguler les dysfonctionnements sécuritaires de toutes catégories et de

toutes tailles.

I/4 Sécurisation humaine

La sécurité humaine est fonction du recours à un large éventail disciplinaire et

requiert une approche intégrale et intégrée, pour utiliser une large gamme de

possibilités, à l’effet de faire face aux menaces. En effet, les aléas de la sécurité

humaine ne doivent pas être appréhendés, exclusivement, aux travers des

9 La zoé est vie physique de l’être vivant, celle de l’humain comme de l’animal. 10 La bios est vie inscrite dans un espace social, propre à l’humain en tant qu’il est un animal politique.

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mécanismes traditionnels. Cette sécurité appelle à de nouveaux débats ouverts et

profonds qui reconnaissent les liens et les corrélations entre un développement intégré

et intégrateur, les droits de la personne et la sécurité de la société.

La sécurité humaine réunit, ainsi, les éléments humains de la sécurité, les droits et

le développement et à ce titre elle doit être abordée dans son acception à la fois

interdisciplinaire et transdisciplinaire et surtout à travers une vision anthropocentrique.

La sécurité humaine est, aussi, multisectorielle, globaliste, spécifique au contexte et

orientée vers la prévention pour contrebalancer toutes les gammes d’insécurités qui

menacent la vie et ce, à l’effet d’identifier le seuil au-dessous duquel la vie humaine

devient aléatoire. La sécurité humaine signifie la protection des libertés fondamentales

et se veut de sécuriser l’homme contre toutes sortes de menaces circonscrites ou

généralisées ; aussi, faut-il faire en sorte que les systèmes politiques, sociaux,

environnementaux, sécuritaires et culturels répondent aux besoins sécurisants des

populations.

En se focalisant sur la sécurité humaine, l’Homme participe à la concrétion

d’opportunités pour la promotion de réformes fondamentales, notamment l’inclusion

des franges exclues de la population, la réduction des inégalités, le renforcement des

réseaux sociaux et l’amélioration des relations entre l’Etat et la société. En effet, le

coût de l’absence de la paix, de la dégradation des conditions socioéconomiques, du

déchirement du tissu social, de l’intensification des inégalités, des exclusions et du

ressentiment aggravent, souvent, les dissociations et accentuent les espaces

d’insécurité.

Aussi, la quête de la sécurité humaine est requise pour répondre à l’intrication et aux

dysfonctionnements qui ne cessent de se démultiplier, particulièrement pour ce qui a

trait aux misères, aux violences xénophobes, à la désarticulation des écosystèmes, à

la surexploitation des ressources naturelles, aux changements climatiques, aux

pandémies létales, aux violences sociopolitiques paroxystiques de tous bords. De

telles menaces ont tendance à prendre des dimensions globalisantes et à dépasser

les acceptions exiguës de sécurité qui portaient, généralement, sur des réponses aux

agressions conjoncturelles spatialisées.

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Cependant, la complexité des opérations de consolidation de la sécurité humaine

nécessite un diagnostic, une évaluation, un examen, une réflexion et une amélioration

des outils d’analyse et de mise en œuvre, afin de surmonter les dissonances et

d’améliorer l’efficacité des opérations de la régulation sociétale.

A cet effet, les dysfonctionnements doivent être transcendés et l’accent doit être mis

sur les stratégies de sortie de crise. Lesquelles crises ne sont pas, toujours,

directement liées aux besoins de sécurité de la population ; d’autant, qu’aux lacunes

externes peuvent s’y ajouter celles de la gouvernabilité, du fait d’une gestion

exclusivement descendantes et des déficits en matière de capacités, de

connaissances et de savoir-faire des collectivités territoriales.

Par ailleurs, l’interdépendance est manifeste entre les différentes menaces et entre

elles et les réponses qu’elles doivent renvoyer ; aussi, la sécurité humaine ne peut

se réaliser qu’à partir d’approches holistiques qui mettraient l’accent sur le besoin de

réponses transdisciplinaires et multisectorielles, à l’effet de fédérer les agendas et de

mobiliser les acteurs de la sécurité, du développement et des droits de la personne et

de les orienter vers la prévention, la protection et l’autonomisation de la société.

Ces préoccupations appellent à la formulation d’éléments fondamentaux pour

enclencher un véritable processus de sécurité humaine ; cependant, cette sécurité

doit être assurée de façon systématique, complète et doit être fondée sur l’intégration

de tous les acteurs du territoire : sachant que l’Etat constitue le premier responsable

de la mise en œuvre de la sécurisation, sans toutefois occulter le rôle combien

signifiant des organisations supra et infra étatiques, ainsi que celui du secteur privé.

Par ailleurs, l’autonomisation constitue l’ensemble des stratégies qui permettent aux

acteurs de développer des résistances face à des situations difficiles et de faire appel

à une approche ascendante et implicative et ce, à l’effet de développer la sensitivité et

l’aptitude des collectivités territoriales, à faire des choix éclairés et à s’approprier le

champ sociétal. L’autonomisation permettra, donc, non seulement de développer le

plein potentiel dont regorge la société mais aussi de participer au processus de

sécurisation et de trouver les moyens adéquats pour trouver des solutions, à même

d’assurer la sécurité humaine pour l’ensemble de la société.

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En effet, pendant que la sécurité de l’Etat se focalise sur les menaces dirigées contre

l’Etat, la sécurité humaine est fonction d’une large gamme de préoccupations

auxquelles sont confrontées les populations et les collectivités ; et y pallier revient à

investiguer des scenarii et des solutions ciblées et impulsées localement : sachant

qu’en aucune façon, cette sécurité humaine ne doit supplanter la sécurité de l’Etat,

tout au contraire, l’une et l’autre doivent se renforcer mutuellement et dépendre l’une

de l’autre.

Par ailleurs, la sécurité humaine aborde les violations, les menaces et les déficits de

façon multidimensionnelle et intégrale et ce, par le fait de les intégrer dans un cadre

expérientiel, à l’effet d’identifier et de renforcer les espaces de droit et de liberté qui

doivent toujours être remis en cause et suivis périodiquement et ce, à l’effet d’évaluer

les arrangements institutionnels et de gouvernabilité.

Il s’agit, donc, d’assurer la durabilité des politiques de sécurisation en introduisant la

prévention, la protection et l’autonomisation de manière systématique. Et dans ce

sens, il faut renforcer l’aptitude des acteurs à agir et à renforcer la résistance des

populations et des collectivités aux conditions d’insécurité, ce qui revient à se

réapproprier le territoire par des processus participatifs.

En effet, les insécurités varient dans leurs causes et dans leurs expressions ; Aussi,

doit-elle offrir un cadre dynamique pour traiter avec efficience les différents types

d’insécurité selon l’ampleur de leur manifestation. La sécurité humaine pour être

porteuse et efficiente doit s’attaquer aux causes premières des insécurités à l’effet de

mettre l’accent sur la prévention plutôt que sur l’intervention tardive et donc

encourager des stratégies liées au développement de mécanismes d’anticipation, pour

atténuer les éventuels effets néfastes et permettre la mise en place de synergies qui

profiteraient des avantages comparatifs de chaque secteur affecté par l’insécurité.

Du point de vue opérationnel, la sécurité humaine vise à aborder les situations

complexes d’insécurité à travers des mesures communes, sensibles et durables ;

lesquelles actions sont centrées sur la personne tout en étant multisectorielles,

holistiques, spécifiques au contexte, et orientées vers la prévention. En outre, la

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sécurité humaine utilise une approche hybride où chaque principe de sécurité humaine

sera pris en compte et intégré dans la conception des programmes.

Il s’agit, donc, d’établir des processus participatifs pour identifier conjointement les

besoins et les vulnérabilités des populations concernées. Tout comme il s’agit de

définir les priorités à travers l’analyse des besoins, l’établissement de stratégies, de

réponses et mettre en place une planification multi-acteurs, pour assurer la cohérence

des objectifs.

De même, pour garantir l’efficience des actions de la sécurité humaine, une réelle

collaboration avec les partenaires tant locaux que nationaux et la mise en œuvre doit

prendre en compte la dynamique changeante du risque et des menaces, ce qui

nécessite le renforcement des compétences des collectivités territoriales et une veille

pour assurer l’apprentissage et l’adaptation.

La cartographie du territoire répondra, à son tour, aux besoins analytiques de

l’approche de la sécurité humaine et cette représentation spatiale sera cruciale pour

identifier les différences au sein et entre les collectivités territoriales. Par ailleurs, en

offrant un aperçu aussi complet que possible des insécurités, la cartographie permettra

une meilleure identification des lacunes dans les infrastructures de protection et

d’autonomisation et des priorités d’action relatives aux insécurités identifiées.

La quête de la sécurité humaine nécessite non seulement une évaluation

approfondie des vulnérabilités et des compétences des collectivités territoriales

concernées ; elle exige, aussi, une évaluation des stratégies pour aider à prévenir et

à atténuer les insécurités. Par ailleurs, afin de développer des stratégies de sécurité

humaine, il faut développer une cohérence des politiques et programmes entre les

secteurs, ce qui nécessite un travail intégré passant par une évaluation directe des

externalités qui mettent l’accent sur la légitimité, l’efficience et l’efficacité. Par

conséquent, il est important d’utiliser un matériel et une main-d’œuvre endogènes pour

ne pas déstabiliser le système local et ainsi contribuer à l’autonomisation des

collectivités territoriales : sachant que la surveillance et l’évaluation régulières des

programmes de la sécurité humaine constituent des aspects essentiels dans

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l’approche de sécurisation et sachant que l’information obtenue guiderait les

changements à apporter aux processus de mise en œuvre de la sécurisation.

I/5 Sécurisation sociétale

La sécurité sociétale est un concept générique, polysémique, dit «parapluie» ; il se

veut inclusiviste de tous les risques. La sécurité sociétale recourt à une stratégie

d’adaptation, d’anticipation et de réaction aux risques, tant en amont qu’en aval ; et

dans cette optique, elle se veut de faire participer les acteurs décisionnels du secteur

public et du secteur privé, pour fédérer tous les autres acteurs subétatiques,

notamment ceux de la société civile.

La sécurité sociétale suppose une réelle mobilisation des populations sur des

espaces ouverts et se veut d’être le théâtre qui contient tous les bouleversements

sociaux, même si cette mobilisation est toujours difficile à mettre en œuvre, tant au

niveau des discours politiques qu’au niveau des faits, ce qui induit une perturbation de

la vie sociale et un handicap à la consolidation de la citoyenneté. Sachant que la

citoyenneté constitue un concept qui rend compte des luttes historiques pour se libérer

de toutes les formes d’aliénation ; par ailleurs, la sécurité sociétale constitue un

processus de conversion visant à modifier les formes et les conditions de l’existence,

au sens de plus de mobilisation et plus de fédération.

La sécurité sociétale se veut, ainsi, de pallier les cultures politiques exclusivistes et

dominantes qui sont à l’origine de la prolifération virtuelle de « nouvelles menaces »

qui aggravent l’omnipotence d’un ordre « sécuritaire », dans le but de pacifier et de

domestiquer les masses et ce, pour faire perdurer un système socioéconomique

unidimensionnel et unidirectionnel qui exclut toute citoyenneté fédérative.

Aussi, la sécurité sociétale se veut, donc, d’endiguer les violences négativistes qui

excluent toute signification alternative ; aussi, cette sécurité doit être enclenchée dans

l’esprit de réveiller le dissensus et la dynamique citoyenne, à l’effet de reconstruire

l’équilibre sociétal dans une logique de transparence et de rigueur. Une telle société

se référera à des champs aussi divers que celui du naturel, du social, du sanitaire…

et devra s’employer à pallier tous les déficits : sachant que la sécurité sociétale charrie,

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toujours, une forte charge idéologique et émotionnelle englobant des réalités sociales

disparates et confuses qui peuvent corrompre les altérités politiques et sociales.

Le fondamental d’une sécurisation efficiente réside, ainsi, dans la construction de

l’action collective, pour se réapproprier le territoire, sans pour autant verser dans des

attitudes maximalistes et ambivalentes, telles le recours à des artifices pour se défaire

de ceux qui ne partagent pas les mêmes idéaux, « vous êtes avec nous ou vous êtes

contre nous ». Les puissances qui recourent à ces violences préfèrent, ainsi, agir sur

le « comment » -à qui on peut tout faire dire et son contraire- au détriment du

« pourquoi » qui est scientifiquement correct : sachant que s’inscrire dans le comment

revient à corriger les dysfonctionnements par d’autres démesures, ce qui ne fait que

démultiplier des normes privatives et radicaliser les attitudes.

Certes, les politologues, les sociologues et les juristes qui s’interrogent sur les

questions de sécurité sociétales notent tous, l’existence de « seuils de violence » à

ne pas franchir ; cependant, il reste difficile de matérialiser ces seuils et encore moins

de discerner, clairement, leurs processus de déclenchement ; d’autant plus que rien

n'exalte plus que l'ivresse de la sécurisation et que l’euphorie que procure la paix.

Par ailleurs, les décideurs les plus éclairés savent qu’il n’est de régime stable que celui

qui fédère la rue, du fait que c’est là que se joue -et que se jouera- toujours la stabilité

du régime et la durabilité du pays ; Et c’est à la défense de la légitimité, de la stabilité

et de la durabilité que doit tendre toute l’œuvre des décideurs, dont la plus sacrée des

missions est de garantir la liberté, par la lutte contre les déviances et les errances.

I/6 Mouvements sociaux

Dans les turbulences méandreuses qui traversent la société –du point de vue

sécurisation- les secousses sociétales de ce début du XXIe siècle, dits

approximativement, mouvements révolutionnaires sont, en fait, des grognes

d’indignés, d’excédés qui réclament des changements à l’effet de se réapproprier leurs

champs d’expression politiques sociaux, culturels. En effet, la majorité des

composantes de la société ont ressenti le besoin de protester contre les politiques en

place et cela préfigure de nouvelles reconfigurations sociétales, sans pour autant

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qu’on arrive, pour l’instant, à les déchiffrer, du fait de l’hétérogénéité des composantes

du mouvement.

En effet, des jeunes, des universitaires, des travailleurs, des travailleuses, des pères,

des mères de familles, des retraité(e)s avec l’envie de se remémorer les temps anciens

des grandes causes, des citoyens, à haut esprit civique et mus par de nobles idées,

ont relayé des mots d’ordres diversement exprimés. Ce mouvement a témoigné d’un

nouveau « nous » ; un « nous » multiple et fragmentaire qui s’est exprimé au travers

de répertoires d’actions collectives inédites. Cette grogne a regroupé des gens de tous

bords qui n’ont presque rien en commun, si ce n’est le désir de faire réagir la rue –à

l’origine de toute souveraineté et de toute légitimité- face à des politiques qu’ils croient

et qu’ils veulent changer.

Il est, donc, plus question de dénonciations de malaises, de mise en évidence des

défaillances et du mal fonctionnement des institutions ; il est plus question de mise à

l’index de l’absence de réalisme et d’honnêteté dans les pratiques que de remise en

cause de tout le système social et ce, dans une démocratie qui a besoin d’être

adjectivisée, du fait qu’elle constitue un concept polysémique et sujet à de multiples

transformations et re-significations historiques et du fait qu’elle est toujours

susceptibles d’être instrumentalisées par des lobbies opaques.

En fait, cette grogne sociale plurielle interpelle le système politique, à l’effet de

régénérer l’efficience de la régulation politique historiquement construite ; elle veut

remettre en question les failles du système au nom d’un a priori discursif qui ne veut

pas se borner à revendiquer des réajustements mécanistes. En effet, la rue

politiquement plurielle et socialement diversifiée revendique le passage d’une

démocratie bureaucratique et procédurale qui ne se focalise que sur l’économisme à

une démocratie engageante et sécurisante où les populations ne veulent plus être des

otages passifs de lobbies occultes ; ils veulent être des citoyens qui ne sont pas

soumis à des calculs politiques mécanistes et approximatifs : et pour le dire

trivialement, la rue voudrait démocratiser la démocratie.

En fait, ce « mouvement » social n’a pas d’autres objectifs que de régénérer le débat

public, de se réapproprier la rue et de venir à bout, du moins endiguer les césures qui

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isolent les populations de leurs représentants politiques, plombés par les calculs

électoralistes controuvés qui associent démagogiquement la démocratie au

conformisme et au pacifisme qui ne sont que le prélude d’un futur, pour le moins

inquiétant.

L’aventurisme intéressé de décideurs, le spectre de l’embrasement régional, le risque

de fractures de la région sud-méditerranéenne, en pleine crispation politique et en

pleine transe identitaire et toujours plongée dans une interminable entreprise

insurrectionnelle. Cette région truffée laquelle d’objectifs moraux irréalistes et « dans

un mélange tragi-comique de rhétorique malrucienne déboutonnée11 » que quelques-

uns de ses erratiques plongent dans un extrémisme dur, financé et armé à l’aveugle

par des sources difficilement traçables.

Sachant que ces extrémismes ne cessent de fédérer de larges pans de « dieux-

vengeurs » en réaction à l’homogénéisation des modes de vie et de consommation,

des bouleversements sociaux provoqués par une globalisation socioéconomique

outrancière, dont sont victimes de larges couches de la population suscitent

l’invocation de valeurs extrêmes, généralement violentes.

En effet, ces maximalistes se saisissent du religieux, pour le mettre au service de leur

politique de puissance, d’influence et d’expansion ; sachant que l’instrumentalisation

du religieux par les grandes et les petite puissances est vieille comme le monde. On

assiste, ainsi, à la montée en puissance de prétentions certains groupes pour se faire

les porte-parole de religions « transnationalisées », particulièrement pour ce qui est

des grandes religions monothéistes (Islam, Christianisme, Judaïsme). Le tout dans

une valse-hésitation entre un pacifisme, par impuissance et un idéalisme violent, par

vengeance.

I/7 Sécurisation alimentaire

De nombreux types d’insécurité sont liés à l’alimentation12 et leur gravité a donné lieu

à des préoccupations cruciales. En effet, la sécurité alimentaire constitue un élément

11 Olivier Zajec : Une décennie d’errements stratégiques, au Mali, l’inusable refrain de la guerre au terrorisme, Le Monde

Diplomatique, N° 707 février 2013 12 En 2007, on estimait à près d’un milliard (FAO, 2008), le nombre de personnes souffrant d’une faim persistante et d’une

insécurité alimentaire.

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fondamental du développement, particulièrement suite à la montée en flèche des prix

alimentaires et ceci renseigne sur l’articulation entre la sécurité alimentaire et la

sécurité humaine. Sachant que les plus touchées par cette insécurité sont les

populations dont la situation est précaire où qu’elles se trouvent.

L’alimentation représente entre la moitié et les trois quart du pouvoir d’achat des

ménages et la complexité d’assurer une sécurité alimentaire, d’autant que la

spécificité contextuelle de chaque situation d’insécurité ne permet pas des réponses

ou des solutions standardisées pour traiter des principaux éléments de la sécurisation

de la société.

D’ailleurs, la dynamique sous-jacente va au-delà des conditions de l’offre et de la

demande ; elle est fonction des fluctuations de nombreuses politiques, telles les chutes

de production liées aux conditions environnementales, les hausses des prix

énergétiques, les coûts des matières premières, les changements des habitudes de

consommation, sans oublier la spéculation entraînant la volatilité des marchés

financiers, du fait de manigances opérées par des lobbies véreux. D’autant que les

amortisseurs intermédiaires ne suffisent plus à protéger les individus et les collectivités

territoriales de l’impact de la volatilité des prix et de la rareté de l’approvisionnement

alimentaires. Aussi, est-il un besoin urgent de sécuriser les populations en leur

fournissant des opportunités qui leur permettront d’améliorer leur productivité et de

garantir leurs besoins alimentaires.

En outre, il continue d’exister un décalage manifeste entre les initiatives d’aide

alimentaire d’urgence et les programmes de développement et de sécurisation

alimentaire, du fait que la sécurité alimentaire a souvent été abordée uniquement à

travers des réponses assistancielles. Sachant que même si ces réponses dites

humanitaires sont importantes, seules des initiatives développementalistes peuvent

produire l’autonomie et assurer des solutions durables d’une sécurité alimentaire.

I/8 Sécurisation et santé

Assurer la sécurité sanitaire pousse à faire appel à des efforts scientifiques

considérables et à la mobilisation de moyens gigantesques ; cependant, ces efforts

sont, d’aujourd’hui, sont focalisés sur le traitement plutôt que sur la prévention, même

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si celle-ci n’en demeure pas moins essentielle. Aussi, importe-t-il de déterminer les

causes profondes (directes et indirectes) des événements affectant la santé, à l’effet

d’adopter des stratégies fiables.

Sachant que dans le domaine de la santé, les images qui retiennent l’attention sont

certes celles de malades en proie à des souffrances médiatisées ; pourtant pour

empêcher des maladies ou des traumatismes de se propager et d’occasionner des

dégâts, la première chose à faire est d’étudier et de combattre systématiquement leurs

causes.

De nombreux facteurs sont à prendre en compte pour apprécier un ordre de priorité

aux différentes stratégies visant à assurer une sécurité sanitaire, notamment la gravité

de la menace que représentent les différents facteurs de risque et la disponibilité quant

aux interventions.

Ces considérations sont, également, essentielles pour déterminer les priorités de la

recherche. Ainsi, l’apport d’informations fiables, comparables et exploitables sur

l’importance des différents risques est essentiel pour l’établissement des priorités,

notamment lorsqu’il s’agit de fixer les grandes orientations de la politique et de la

recherche sanitaires.

Sachant que le déficit informationnel pourrait être instrumentalisé par certains groupes

de pression pour minimiser ou au contraire exagérer certains risques. En outre,

l’information diffusée par les médias pourrait fausser la réalité ; très souvent, les

risques majeurs pour la santé, connus de tous, ne sont pas généralement signalés,

alors qu’une menace sanitaire rarement observée ou inhabituelle, jugée de nature à

intéresser le public, est largement étayée.

Il est notable que ces dernières décennies, l’analyse des risques s’est rapidement

développée et elle a porté sur l’identification, sur la quantification et sur la

caractérisation des menaces qui pèsent sur santé humaine. En effet, l’évaluation de la

sécurité sanitaire est à l’origine de plusieurs démarches, notamment celle écologique

élaborée en vue d’apprécier les problèmes environnementaux susceptibles de

constituer des risques sanitaires ; cette sécurité a été hiérarchisée en quatre phases :

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la reconnaissance de l’aléa, son évaluation, l’établissement de la relation dose-

réponse et la caractérisation du risque qui consiste à faire la synthèse des résultats

obtenus.

Aussi, l’étude de la sécurité sanitaire doit être abordée de manière globale et intégrer

tous les facteurs intervenant dans la chaîne de causalité ; sachant que les résultats de

l’étude, du coût et de la faisabilité technique, permettront d’établir les priorités en

matière d’aménagement de l’environnement. On pourrait, ainsi, dans ce cadre

conceptuel, développer une méthodologie susceptible d’être étendue à beaucoup

d’autres domaines. L’idéal serait de pouvoir évaluer l’impact de chaque facteur de

risque au moyen d’unités de mesure commune qui tiennent compte à la fois de la

dégradation de la qualité de vie et de la perte d’années de vie.

La principale conclusion à tirer, c’est que du fait de la multicausalité du risque, des

ensembles d’interventions peuvent conduire au même résultat, le choix étant

déterminé par le coût, la disponibilité, les préférences, etc. Il est, donc, inutile

d’attendre l’élucidation d’autres causes, pour prévenir les causes de maladies qui ne

seront pas toutes connues dans l’avenir prévisible pas plus qu’on ne sera en mesure

d’éliminer en totalité la charge morbide attribuable à des causes génétiques.

Aux fins de l’analyse, on a défini la charge évitable comme la fraction de la charge

morbide d’une année déterminée qui serait évitée si l’on modifiait d’une certaine

manière l’exposition actuelle et future. Cela dit, l’estimation de la charge évitable est

particulièrement difficile étant donné qu’elle comporte toute l’incertitude qui s’attache

à l’estimation de la charge attribuable plus un certain nombre de données qu’il faut

prendre en considération.

Il appartient à chaque région socio-sanitaire de mettre sur pied son propre plan

d’intervention, d’identifier ses partenaires et, de concert avec les autorités concernées,

de prévoir l’ensemble des modalités, ententes et mécanismes d’interactions

nécessaires à un déroulement efficace des opérations.

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I/9 Sécurisation et environnement

Des siècles durant, l’homme a vécu en harmonie avec son milieu. Mais depuis , cet

équilibre a profondément changé avec les premières évolutions ou plus exactement,

cette involution civilisationnelles. L’homme a inauguré une ère de déprédation, de

divorce avec la nature ; puisque de plus en plus gigantesques, ses besoins en sol

cultivable, en matières premières, en sources énergétiques et sa maîtrise parfaite en

moyens techniques et technologiques, le poussent modifier, voire à dégrader

irréversiblement son milieu et d’accentuer les déséquilibres.

Par ailleurs, les pollutions ont toujours existé, mais avec des effets néfastes limités ;

Ces dernières se rapportaient à des contaminations localisées des eaux superficielles

et des nappes phréatiques par des substances biodégradables, du fait de la simplicité

de la vie d’antan. Mais au cours des derniers siècles, l’évolution industrielle a exercé

des pressions sur des ressources énergétiques de plus en plus polluantes et de plus

en plus en plus dangereuses.

D’autres facteurs, d’ordre socio-économique ont constitué des sources de nuisance

notamment, une urbanisation qui a provoqué une concentration des industries et une

prolifération effrénée de l’habitat, amplifiant ainsi les sources de détérioration de

l’environnement. De plus, la technologie moderne a engendré des quantités

démesurées de déchets, tout en produisant une multitude de substances minérales ou

organiques non biodégradables et parfois très toxiques.

Actuellement, il y a près de six milliards d’hommes qui se concentrent dans des villes

dont la plupart des régions sont souvent surpeuplées et victimes de diverses pollutions

et nuisances. En effet, de nombreux facteurs ont participé à l’amplification de

l’enlaidissement et de la détérioration de l’environnement tant urbain que rural et dont

les principales causes sont :

L’expansion énergétique qui se traduit par l’utilisation

irrationnelle des ressources énergétiques et dont les

conséquences les plus manifestes sont la multiplication

d’innombrables sources de dispersion d’agents polluants

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entraînant une contamination sans cesse accrue du milieu

environnant.

Le changement du mode de consommation et les mutations

technologiques où l’homme est passé d’une technologie

conservatrice à une technologie dévastatrice, productrice de

déchets et multiplicatrice de substances toxiques conduisant à

un déséquilibre expansionniste.

Par ailleurs, la pollution constitue un phénomène très complexe, compte tenu de la

diversité des polluants, de leur combinaison et transformations dans l’atmosphère ainsi

que de leurs interactions, surtout sous l’effet de réactions photochimique mais aussi

en raison du rôle de facteurs physiques. Ces modifications affectent l’homme

directement ou à travers des ressources en produits agricoles, en eau, et autres

produits biologiques qui peuvent aussi l’affecter en altérant les objets physiques qu’il

détient.

Par ailleurs, la pollution des eaux constitue, actuellement, une grave atteinte à

l’équilibre homme/nature ; en effet, la ville est à l'origine de rejets domestiques et

industriels gravissimes, auxquels s'ajoutent les eaux de ruissellement chargées de

pollutions diverses, en quantités importantes.

En outre, les déchets solides augmentent en quantité à un rythme sans précédent et

leur élimination est devenue un problème de survie de l’homme, du fait de la

dangerosité de leurs impacts directs et indirects sur l’homme et sur l’environnement ;

dans ce sens, on peut distinguer les déchets domestiques (ordures ménagères), les

déchets agricoles, et ceux industriels qui renferment des résidus non biodégradables,

inaltérables et contiennent des substances dont la toxicité est dangereuse, voire

létales13.

13 Au Maroc, la production des déchets est en augmentation constante, et les collectivités locales connaissent une

augmentation notable des rejets urbains ; selon les statistiques les plus récentes, la production des déchets solides ménagers est estimée à 6.5 millions de tonnes par an, dont 85 % sont collectées et le reste est mis dans des décharges (sauvages ou non contrôlées) sans traitement.

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L’environnement est, aujourd’hui, une clé de lecture indispensable à l’intellection de la

dynamique et de l’innovation des politiques publiques de développement. En effet,

depuis la conférence de Stockholm (1972) des plans, chartes, agendas ont été

élaborés, engageant les Etats signataires à se responsabiliser principalement vis-à-

vis de leur environnement ; Conventions qui engagent les Etats signataires, à adopter

des politiques de cohérence articulant l’économique, la gestion du territoire,

l’environnement et les préoccupations sociales. A la suite de cette prise de conscience,

beaucoup d’acteurs, à l’effet de conscientiser les collectivités territoriales sur le fait de

s’adapter aux irréversibles évolutions des comportements des aspirations sociales,

culturelles et économiques.

A cet effet, l’évaluation environnementale doit débuter par l’analyse des données

obtenues lors de l’évaluation environnementale de base. Par la suite, il est nécessaire

de définir l’hypothèse d’une relation entre la présence d’une contamination

environnementale et les symptômes éprouvés par les occupants. Il est alors important

de préciser les objectifs et les buts poursuivis et concentrer les efforts de l’enquête sur

les éléments qui apporteront suffisamment d’information pour établir le choix des

interventions, étayer les décisions et fournir les éléments nécessaires aux autorités en

place afin d’élaborer les actions qui s’imposent.

L’évaluation environnementale pourrait ainsi jouer un rôle primordial dans la

reconnaissance de l’existence et l’estimation de l’ampleur des problèmes de

contaminations qui affectent les territoires, ce qui permettrait d’identifier de façon

précise le degré des pollutions et de proposer des alternatives qui incluront des

mesures correctives.

L’ampleur de la démarche requise pour l’évaluation des problèmes d’environnement

qui devrait être déterminée en fonction des objectifs visés, soit entre autres :

• la vérification du lien potentiel avec les problèmes

environnementaux soupçonnés :

• la vérification de la prévalence des problèmes

d’environnement, leur distribution spatiale et leur variation

dans le temps ;

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• l’évaluation de l’efficacité des correctifs mis en œuvre ;

• la signalisation de la gravité des problèmes

d’environnement.

I/10 Sécurisation, culture et communication

I/10/1 Communication

C’est une réalité, aujourd’hui, que tout risque ou catastrophe passe par sa mise en

image ; sachant que l’image de la catastrophe, de ses victimes et de ses atrocités

n’est pas la catastrophe et n’a pas la même temporalité ; aussi, doit-on veiller à ce que

la médiatisation de la catastrophe serve à renforcer l’image du droit et celle de la justice

pour restructurer les rapports au pouvoir. Il s’agit, donc, d’explorer ce qui est derrière

le rideau épais de l’actualité, de l’urgence et du spectaculaire, tout comme il s’agit de

contenir l’inflation imaginale qui, très souvent, détourne l’attention des enjeux réels de

la vie en société.

Il s’agit de se saisir de nouveau de ce puissant outil/pouvoir, combien éclairant, mais

aussi combien manipulateur, à l’effet d’une reconfiguration des hiérarchies, un

repositionnement des acteurs, d’un renouvellement des stratégies politiques et

juridiques, dont les plus avertis ne perçoivent encore que les fragments approximatifs

d’un kaléidoscope qui refuse, toujours, de livrer sa réalité profonde et dont les enjeux

expliquent la gravité des insécurités.

I/10/2 Culture

Il faut savoir que le domaine de la culture que la moindre confusion pourrait produire

des erreurs gravissimes. Aussi, ce qui est à faire est délicat : traiter le culturel comme

on traiterait tout ce qu’il y a de plus sensible, à savoir avec dextérité, froideur et

détachement ; d’autant plus que les différences entre le culturel et son contraire, si

nettes d’habitude, s’estompent, de plus en plus.

Par ailleurs, le système politique a, depuis toujours, compris que toute politique de

séparation des populations, en fonction de leurs religions ou de leurs identitaires ne

pouvait que générer de graves conséquences. En effet, l’essence d’une nation est que

tous les membres de la société aient des choses en commun et que tous aient bien

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des choses à partager ; la nation devenant ainsi un résultat historique engendré par

des faits convergents : sachant qu’on est, souvent, unifié par ses défaites et démoli

par ses victoires.

Pour une stabilité et une durabilité du Pays et pour mieux assoir une démocratie

implicative, il faudrait impérativement investiguer le présent, particulièrement dans son

aspect culturel et ce, particulièrement pour la régénération de la dignité. En effet, après

des décennies d’abaissement de l’homme, celui-ci doit recouvrer ses droits ; même si

ceux qui ont la charge de fournir des éléments sur le présent, ont souvent été surpris

en flagrant délit de compromission et s’en sont, depuis longtemps, détournés de la

vérité.

Certes, lorsqu’on s’arrête sur les spasmes qui traversent le pays, les avertis parleront-

ils, sans doute, d’approximations stratégiques, tant les mouvements saccagés qu’il

connait paraissent syncopés. Aussi, pour compléter la description de ce qui se passe,

il faut réintégrer le Pays dans le temps longs ; sachant que ce qui n’a pu se produire

dans l’histoire –les errances extrémistes- personne ne le pourra dans l'avenir, à savoir

l'établissement d'un système amnésique, dit postmodernité, puisque les pièces

essentielles du damier sociétal sont fortement ancrées dans le vernaculaire.

Une véritable culture invite toujours à aller vers l’autre sans jamais forcer, du fait qu’il

y a dans l’homme quelque chose de supérieur, qui est la volonté et la prétention

dangereuse d’affecter la langue à la culture vient de ce qu’on l’a toujours regardé

comme un des signes de race et rien n’est plus faux : la Prusse où l’on ne parlait

qu’allemand parlait slave il y a quelques siècles.

Par ailleurs, quand on attise les référents socioculturels, on se claquemure dans une

culture exclusiviste et on s’enferme dans des conventicules, alors que l’homme est et

doit devenir un être d’altérité et un être de culture. Les persécutions d’Antiochus

Epiphane pour amener l’Orient au culte de Jupiter Olympien, celle de l’Empire Romain

pour maintenir une prétendue religion d’Etat furent une erreur, un crime et une véritable

absurdité. En effet, la religion regarde la conscience de chacun, alors que la

communauté est corps et âme à la fois.

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Le territoire est aussi une âme, un principe spirituel et pendant que l’une de ses

composantes est dans le passé, l’autre est dans le présent. L’une est la possession

en commun d’un riche legs de souvenirs, pendant que l’autre est le désir d’un vivre-

ensemble et la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis.

En conclusion, la culture se ramène au sentiment d’avoir fait de grandes choses

ensemble, et de vouloir en faire encore : on aime en sacrifices qu’on a consentis, en

maux qu’on a soufferts, on aime la maison qu’on a bâtie et qu’on transmet, à l’image

du chant Spartiate « Nous sommes ce que vous fûtes ; nous serons ce que vous

êtes ». La souffrance en commun unit plus que la joie ; et les deuils valent mieux que

les triomphes : ils commandent l’effort en commun.

Vivre la culture comme une grande solidarité suppose un passé et elle se résume dans

le présent par la continuation de la vie commune. Cette solidarité est, en fait, un

plébiscite de tous les jours et une affirmation perpétuelle de la vie. Mais si quelqu’un

doit bénéficier de tous les droits d’être consulté sur ce sujet, c’est bien le citoyen,

envers qui il faut toujours revenir. Néanmoins, l’homme a souffert, que d’autres

épreuves l’attendent encore ; alors, puisse la grande sagesse le guider pour

transcender les innombrables écueils qui parsèment sa route. Et cela ne saurait se

réaliser que par le fait de contrer le règne des dominants.

I/10/3 Identité

L’entrée complexe de l’identité irrite aussi bien les progressistes, les réactionnaires

que les modérés. D’autant plus que cette entrée est l’objet d’une instrumentalisation

politicienne dangereuse ; laquelle manipulation est en passe de transformer les

idéologies et les convictions en succursales de pacification et de domestication de

l’individu, sachant que la politique des chiffres sont le propre du pouvoir.

Dans la logique de la quête d’une véritable altérité, l’imaginaire politique doit recouvrer

toute son étendue pour que celle-ci réconforte les champs de la fédération et de la

mobilisation ; d’ailleurs, ces référents sont seuls à même d’asseoir la liberté qui

constitue une véritable ressource idéologique et une symbolique pour contrer la

rhétorique xénophobe et raciste où l’ « autre » est la cible principale des discours et

pratiques exclusivistes.

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Les attitudes maximalistes accentuent les velléités du fait de recroquevillements de

regroupements communautaires et les césures sociétales. Aussi, l’enjeu est de poser

la question de l’altérité, à l’effet de la déchiffrer et la contenir ; et ceci est loin d’être

aisé, du fait qu’elle est circonscrite dans une théorisation à réponse unique et dans un

essentialisme politico-culturel qui fait endosser le mal à l’ « autre ».

A la fin des années quatre vingt dix, avec l’entrée en force de la globalisation et de la

parcellarisation des champs politiques, des politologues14 montrent que ce qui tient

lieu d’identité a tendance à s’effilocher et à s’écrire en pointillés ; cependant, cette

orientation n’est pas entièrement vérifiée, puisqu’on assiste à un retour en force des

référents socioculturels qui ne cessent de prendre une ampleur, partout remarquée.

Ce retour identitaire par la production d’énoncés théoriques où l’ « Autre » est identifié

comme un facteur de troubles sociaux, de perturbation de la société. En fait, la société

actuelle se complaît dans des allégeances consensuelles qui sont considérées comme

valeurs fondatrices de l’Etat ; et cette stase idéologique profite à une vogue

essentialiste qui s’oppose à toute dialectique culturelle ; laquelle dynamique est définie

comme « la capacité d’une société à perdurer et à évoluer, même lorsque son

environnement change, ou lorsqu’elle est exposée à des menaces15.

Dans ce système déprédateur de la culture -seule arme d’existence des peuples, avec

ses échanges généreux, ses enrichissements, ses partages de coûts et de bénéfices-

les référents identitaires ne sont appréhendés que dans des logiques artificielles et ne

relèvent que des charmes du politiquement correct où l’ « Autre » n’est considéré

comme intégré que s’il s’encastre, sans réserves, dans un ethnocentrisme occidental,

présenté comme le summum de la démocratie. En fait, cette altérité n’est acceptable

que si l’« autre » se dilue, complètement, dans les valeurs et les pratiques trouvées

sur place et ainsi s’intégrer devient une offre sans alternative, ce qui constitue en soi

une relégation sociale.

En définitive, l’approche essentialiste constitue une pratique qui procède de ce qu’elle

exclut et non de ce qu’elle protège ; Elle veut renforcer des aspects exclusivistes de

14 Gellner, Habermas, Derrida, Samuel P. Huntington, Philippe Nemo. 15 Ole Waever et al. Identity, Migration and the New Security Agenda in Europe, p. 23

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l’Etat, de faire un tri dans l’histoire, en choisissant des individus contre d’autres, des

symboles contre d’autres et de hiérarchiser les évènements de façon à mettre en

exergue ce qui sépare, plutôt que de se focaliser sur ce qui rassemble : faire des

coupes dans un « héritage qu’on a reçu indivis16 ».

II/ Formation doctorale : Gestion des Risques et Développement Territorial

II/1 Présentation de la formation doctorale

Outre, les séries de challenges que le Maroc se doit de relever en matière de

développement politique, économique et social, le défi sécuritaire -cheville ouvrière de

toute stabilité durable- s’impose comme une préoccupation de premier ordre, « la

transition démocratique étant un processus long et ardu qui requiert un climat empreint

de stabilité, d’engagement et de vigilance, le premier préalable est, donc un Etat, fort

de la suprématie de la loi, en mesure d’assurer la sécurité des personnes et des biens,

et de faire pièce à ceux qui profitent de l’élargissement de l’espace des libertés, pour

porter atteinte à l’autorité de l’Etat17».

Il est, donc, nécessaire, voire impératif, de se pourvoir d’institutions spécialisées de

formation et d’éducation à même de relier et de corréler le territoire à la sécurité, en

l’occurrence la formation doctorale « Gestion des Risques et Développement

Territorial », à l’effet de permettre une opérabilité et une cohérence d’ensemble des

grandes orientations, d’aider à l’approfondissement et à la matérialisation d’une vision

stratégique du pays en matière de gestion des risques et ce, pour une opérationnalité

réfléchie, maîtrisée et efficiente et un accompagnement des mutations profondes qui

sont, souvent, diluées et/ou opaques.

La formation doctorale « Gestion des Risques et Développement Territorial »

constituera un espace de renforcement des compétences tant analytiques, causales

que prospectives pour renforcer les capacités d’adaptation et d’anticipation des

16 Ernest Renan : Qu’est ce qu’une nation ? Conférence donnée à la Sorbonne en 1882 17 Discours de Sa Majesté le Roi à la Nation, à l’occasion de la Fête du Trône, le 30 juillet 2003

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risques territoriaux. Il s’agit, donc, de participer à la constitution de pôles de

compétences transdisciplinaires, à la fois doctrinaires et expérientielles capables de

mener des recherches, des analyses, des études, de réfléchir et de mettre en œuvre

des stratégies sur les questions liées aux risques territoriaux, « Notre pays vit une

transition globale qui nécessite le renforcement de ses capacités d’analyse,

d’adaptation et d’anticipation » avait précisé Le Souverain18.

Cette formation doctorale « Gestion des Risques et Développement Territorial »

constituera, en outre, l’interface de tous les départements pour ce qui a trait au

perfectionnement de la formation en matière de prévention et de management des

risques et ce, en vue de l’harmonisation de l’action et de l’optimisation des efforts et

des investissements, par le croisement des regards et des expériences. Elle permettra,

en outre -par le réseautage avec des centres nationaux, régionaux et internationaux

et par les relations ciblées qu’elle aura à tisser avec eux- de cerner efficacement

l’intellection et les dimensions des phénomènes d’insécurité et de violence, à l’effet de

mieux adapter l’action du pays aux nouvelles approches et processus de sécurité

expérimentées, ailleurs.

Parce que les populations et le territoire sont, aujourd’hui, plus vulnérables que par le

passé, parce qu’ils sont, constamment, sous la menace de risques dont la probabilité

et l’ampleur varient en fonction des conjonctures et des conjectures et parce que ces

dangers -réels ou potentiels- concernent les différents types de risques,

particulièrement les attentats terroristes, les menaces balistiques, les risques

technologiques, les pandémies, les catastrophes naturelles, la criminalité organisée…

Il s’agira, donc, de construire des scénarii pour anticiper, les gérer et les endiguer, du

fait de la complexification des processus de production et de fonctionnement

(politiques, économiques, sociaux, culturels), du fait de la multiplication et de la

dématérialisation des échanges et du fait de la globalisation des activités qui imposent

de revisiter et d’approfondir l’approche du management des risques, au travers de la

clé d’entrée de la territorialité.

18 Ibid.

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Et cette clé d’entrée doit constituer une dimension collective et constructiviste, seule à

même d’ancrer et de développer le concept du « homeland security », base

fondamentale des stratégies à mettre en œuvre pour une stabilité efficiente du

territoire ; sachant que les équilibres entre la productivité économique, la sécurité et la

sécurisation des installations et établissements l’argument sanitaire sont d’une fragilité

extrême qui est à chaque fois remis en cause, d’où le nécessaire recours à différents

types d’interventions sécurisante.

L’homme est ainsi, de plus en plus, confronté à des problèmes globaux liés à

l’eutrophisation rapide des milieux naturels fortement investis, voire corrompus, où se

conjuguent des aléas naturels réels et des enjeux anthropiques considérables qui font

du territoire un espace à hauts risques ; et sur ce territoire à fortes contraintes, les

conséquences sont pour le moins tragiquement irréversibles.

Ainsi, la question du territoire constitue un incontournable pour appréhender les

diverses dynamiques qui orientent l’action sur les différents registres de management

des risques et ce, qu’il s’agisse des normes juridiques, des évolutions économiques,

politiques ou sociales ; ou que ces dynamiques appellent à recourir à des mécanismes

de restructuration des statuts liés au travail ou à la professionnalisation des métiers.

Cette approche permettra de mesurer l’importance que prennent les risques dans la

vie des citoyens et le sentiment d’insécurité qu’ils génèrent ; situation qui pousse à

envisager leur gestion et à repenser les modalités de leur traitement, selon une double

temporalité, combinant des aspects liés aux activités administratives et réglementaires

et des aspects plus structurels et ceux liés à la transformation progressive des relations

intra et inter sociétales.

Le lancement d’une telle formation doctorale en matière de management

territorialisé des risques constitue une opportunité de premier ordre pour conforter

le mouvement de régionalisation enclenché par le Maroc, en ce sens que la

professionnalisation des cadres régionaux participera à une meilleure sécurisation du

territoire. De même, ce chantier répondra à la demande itérative des collectivités

territoriales en matière d’efficacité, de traitement équitable des citoyens et des

territoires et de reconstruction des liens sociaux : postures seules à même de

permettre de juguler les risques et les menaces et ce, par un réel investissement, en

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formation et en éducation dans la prévention et le traitement des risques cette

orientation permettra, par ailleurs, de mieux préciser les responsabilités des acteurs

du territoire, à l’effet de mieux coordonner leurs actions.

II/2 Objectifs de la formation

La formation doctorale « Gestion des Risques et Développement Territorial » a

pour objectif, d’ancrer au sein de l’Institut National d’Aménagement et d’Urbanisme

(INAU), une nouvelle spécialité, celle de « risk-management », à l’effet de participer

à la formation et à la qualification de spécialistes de haut niveau. Il s’agira de former

des « risk-managers » aussi bien pour le secteur public décentralisé que déconcentré

que pour le secteur privé qui enregistrent un retard alarmant dans la discipline. En

effet, le rôle de « risk-manager » -de concert avec les autres acteurs institutionnels et

non institutionnels- consiste à identifier, à analyser et à quantifier tout genre de risques

que peut générer une quelconque activité, de prévoir quel type d’incident peut survenir,

de calculer son taux de probabilité et d’anticiper ses impacts et ses conséquences à

travers des scénarios catastrophes.

Cette action sera possible notamment, grâce à la concrétion de nouvelles spécialités

et en l’expérimentation d’outils et de méthodes spécifiques, tels le HAZOP (Hazard

Operability), adoptée depuis le début des années 1970 et dédiée à l’analyse des

risques des systèmes thermohydrauliques pour lesquels il est primordial de maîtriser

des paramètres comme la pression, la température et le délai. Il constitue un

instrument pour analyser la criticité des risques sur la base de techniques appropriées,

en recourant, particulièrement, à des données du genre : « types de déviation » qui

peuvent être négatives, modificatives, quantitatives, de substitution... et à des « mots

clés » comme ne pas faire, faire plus, faire moins, en plus de, à l’inverse de, plus tôt,

plus tard… Au même titre que cet outil, celui de « WHAT-IF », méthode dérivée de

l’outil, HAZOP et qui est fondée sur une succession de questions de type « que se

passe-t-il quand se produit un paramètre ou un comportement différent de celui

normalement attendu ?...

En outre, l’outil « pilotage des évènements » -qui consiste en la gestion des activités

et la sécurisation des équipes chargées de la sécurité- vise à mettre à la disposition

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des cadres chargés du management des risques, les moyens nécessaires pour

améliorer les services à rendre aux citoyens, par le renforcement des liens de

confiance entre les différentes composantes chargées de la gestion des risques et

entre celles-ci et les construits sociaux du territoire ; à ces outils peut s’ajouter, entre

autres, celui du « Crisis management simulation » qui est un système de gestion

des crises tant au niveau de l’Etat, des régions, des villes que des industries à risque.

Pour atteindre de tels objectifs, le recours aux sciences et outils géomatiques s’avère

indispensable. Ces sciences ne se limitent pas au fait d’être des plateformes

collaboratives de création et gestion des données, mais elles veulent mettre à la

disposition des « risk managers » des outils d’investigation méthodologique pour

cerner les phénomènes et systèmes localisés. L'utilisation des sciences et outils aux

divers domaines qui concernent l’homme et son environnement, les ressources

naturelles et les territoires, pour refaçonner les concepts et les méthodes et les

modèles d'analyse traditionnelles des différentes disciplines, en permettant d’élargir

leurs champs d'application. A cela s’ajoute la rapide évolution technologique qui

permet de se procurer l’appropriation d’une manne importante d’informations

provenant du monde entier sous des formes différentes (rapports, statistiques,

multimédias, photographies numérique, images satellitaires…) et ce, à l’effet de

répondre aux exigences de la société postmoderne en terme d’informations

pertinentes, pour toute prise de décision réfléchie et construite.

Cette formation permettra, à terme, l’intellection et la maîtrise du phénomène des

risques. Elle dotera, par ailleurs ceux intéressés, de compétences et de capacités qui

leur permettront de mettre en œuvre des stratégies pour une meilleure organisation

des services territoriaux, une redéfinition des priorités de l’action territoriale et une

meilleure organisation pour faire face aux situations d’urgence.

Pour atteindre de tels objectifs, la formation doctorale « Gestion des Risques et

Développement Territorial » s’articule autour de quatre axes principaux :

II/3 Présentation des principaux axes

AXE 1 : Cindyniques, gestion des risques et développement territorial ;

AXE 2 : Facteurs de risques et développement territorial ;

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AXE 3 : Responsabilité des acteurs face aux risques et crises, et

développement territorial.

AXE 4 : Management des crises, communication et processus de

développement territorial

AXE 1 : CINDYNIQUES, GESTION DES RISQUES ET DEVELOPPEMENT TERRITORIAL

Epistémologie des cindyniques/Cindynogénèses (processus de fabrication du

danger) ;

Théories cindyniques de la violence ;

Identifications des cindyniques (anthropiques, naturelles) ;

Composantes du risque : aléas, susceptibilités et vulnérabilités ;

Démarche des managements des risques.

AXE 2 : FACTEURS DE RISQUES, MANAGEMENT DES CRISES, COMMUNICATION ET DEVELOPPEMENT TERRITORIAL

Risques et santé publique (surveillance, prévention et santé ; publique, sécurité

alimentaire et santé publique, traitement de l'urgence dans la santé) ;

Risques technologiques (urbanisation autour des sites industriels) ;

Risques et transport (terrestres, maritimes, fluviaux et aériens tunnels et autres

espaces souterrains) ;

Risques liés aux accidents dus pollutions maritimes et terrestres ;

Risques liés aux incendies et explosions (espaces confinés, non confinés…) ;

Risques liés aux déchets solides et liquides (sites et sols pollués) ;

Risques hydrologiques, séismiques, toxicologiques.

Risques sociaux (exclusions sociétales, dislocation des liens sociaux,

mouvements sociaux, manifestations…) ;

Risques politiques (attentats, soulèvements…).

AXE 3 : RESPONSABILITE DES ACTEURS FACE AUX RISQUES ET CRISES, ET DEVELOPPEMENT TERRITORIAL

Droit, responsabilités et risques ;

Etat du droit de sécurité du travail ;

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Obligation de sécurité du décideur public/privé ;

Décideur public/privé face au droit.

Répartition des responsabilités ;

Coopération pour la maîtrise des risques au niveau du territoire ;

Approche comparée (UE, Amérique, Asie, Proche Orient).

Apport des TIC.

AXE 4 : MANAGEMENT DES CRISES, COMMUNICATION ET PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT TERRITORIAL

Dynamique de crises ;

Procédures, outils et philosophie ;

Non prise en compte des risques ;

Effets de la non-prise en compte des risques ;

Mise en place de dispositifs de prévention et de gestion des crises ;

Encadrement et mobilisation des populations ;

Dynamiques de crises ;

Expériences comparées ;

Apports des TIC

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