Foot Citoyen Magazine n°22

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Edito

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 02 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

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l y a peu, j’ai franchi la barrière… Parce que mon fils voulait « jouer aufoot », je suis passé de l’autre côté du terrain, derrière les lignes tracéesà la craie… Je suis devenu un parent de joueur ! Depuis, tous lesmercredis et samedis, ou presque, je l’accompagne, je l’attends à

l’issue de ses deux heures d’entraînement ou de football d’animation,je le regarde, parfois… Et j’observe autour de nous, alors, les réactions

de « mes » semblables, de tous ces papas et mamans qui se lèvent tôt, se pressent, sautent un repas pour pouvoir amener « nos » progénitures au lieu derendez-vous, en temps et en heure. Dans un club de la région parisienne, ça faitdu monde. Ils sont nombreux ces gamins de 6 à 7 ans à vouloir faire du foot. Là,on nous a dit qu’ils étaient près de 150… Une quarantaine à initier le matin et, sile compte est bon, près de 110 le mercredi après-midi… Et le samedi, « c’est tousensemble, tous ensemble, allez, allez… »

Et pendant que « nos » enfants apprennent à « manipuler » l’objet de leur désir,à trouver le bon équilibre dans les courses, à se décoller un peu du schéma dejeu « grappe de raisin » imposé par les gosses eux-mêmes, à vivre déjà un peuensemble, dans le vestiaire, etc…, on discute un peu entre parents… Où l’onvoit alors que le football est une passion qui, pour la plupart, s’est transmise degénération en génération… Souvent, là, le discours est plutôt posé…Souvent… Et puis, les petits matchs nous font lever la tête… Et une drôle detempête vient se substituer au calme… Sans prévenir. « Va au bout ! », « Marque-le ! », « Oui, c’est bien ! », « T’as vu, il en a mis deux (sous entendule mien, enfin le sien) aujourd’hui ! »… Oh, ça ne sort pas de toutes les bouches,mais de pas mal quand même, et ça me surprend encore… Toutes ces choses

évoquées depuis cinq ans avec l’association Foot Citoyen ressurgissent, et làde plein fouet... Le regard d’un enfant qui se tourne vers son père quand il aperdu un ballon, la colère qui s’exprime à travers un geste d’humeur del’enfant, une parole déjà déplacée envers un partenaire moins talentueux sansdoute, mais tout aussi passionné, et un père qui acquiesce… Et puis, dansl’esprit des parents, déjà une sorte de hiérarchie qui apparaît, qui dit en clairque son fils ou sa fille sera meilleur(e) que le sien, le tien, le mien, tiens… Deschoses presque anodines, des choses surtout banales, déjà, et c’est ce qui « effraie » un peu… Comment le binôme « enfant-parent » va-t-il évoluer au fildu temps… Et quand on voit que ces enfants de 6, 7 ans, qui ne sont là, pourla plupart, au départ de ce « train » que pour leur seul plaisir, on comprend vitece qui peut advenir, autour des notions de compétition et de gagne… J’aime,oui, n’ayons pas peur du mot, j’aime alors l’intervention de l’éducateur, de sonappel au calme immédiat lancé à la collégiale, de son explication à l’issue de la séance avec le ou les parents concernés… Des mots simples, des mots pourrecadrer, et c’est important. Je ne sais quelle sera leur portée, mais au moins,ils sont dits… et, à ce moment de l’Histoire des footballeurs qui se dessinedevant nous, c’est essentiel… Ce discours du coach est le premier à être entendu parle parent, la base de tout ce qui s’en suivra…

Comme indiqué sur une convocation (pour moi, pas pour mon fils… Non,mais ! Y en a déjà que pour eux…), en début de saison, j’ai joué le « père-modèle ». Je suis allé à la réunion organisée par le club à notre attention. Aumilieu de l’explication du mode de fonctionnement du club, le responsablede la catégorie a expliqué ce qu’il attendait des parents. Et pour ne rien vous

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«PARENT DE...

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Edito

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 03 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

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Foot Citoyen Magazine

Décembre 2008

N° 22

Rédaction - Administration

52 ter, rue de Billancourt92100 Boulogne-Billancourt

Tél. : 0146219628Fax : 0146219538Mail : [email protected]

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Romain Deshaies

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DOM-TOM, étranger : nous consulter.

Dépôt légal : à parution

ISSN : 1777-0149N° commission paritaire : 0208 G 87745Impression : Hebdoprint, ZAC Grand Angles, 30133 Les AnglesTél. : 0490151920Édité par l'association Foot Citoyen52 ter, rue de Billancourt92100 Boulogne-Billancourt

La rédaction n'est pas responsable de la perte ou de la détérioration des textes ou photos qui lui sont adressés pour appréciation.

apprécié… Je me suis dit « chouette », tout le mondeest d‘accord avec le rôle précis qui nous est alloué… « Vous êtes parent, pas entraîneur ! », «Les discourssur le terrain, ce sont les miens qu’on entend!», « Encouragez-les collectivement, ne les supportezpas ! » (vous voyez la nuance ?), etc… À l’issue dela réunion, j’ai dit à un moment à l’éducateur, quec’était plutôt bien de voir que tout le monde étaitd’accord… Naïf que j’étais, il m’a fait redescendre demon nuage : « Vous savez, aujourd’hui, on avait déjàceux qui sont concernés, ceux qui, a priori, nedevraient pas poser de « problèmes »… Mais sur 150,vous pouvez voir qu’il en manque un certain nombreet que, même parmi les présents (un petit quart), il yen aura qui, à un moment, devront être recadrés… » Pas gagné, hein ? Et pourtant, ce match-là, ce match éducatif, ce travaild’épanouissement de l’enfant,mais aussi du parent, est sans doute l’un des plus importants à gagner de notre vie…

Tout cela, c’est un peu, beaucoup, ce que nousont raconté si intensément, si intimement,Christian et Yohann Gourcuff. Ils nous ont décritleur relation, leur moments communs devant latélé à regarder le Brésil, cet amour pour ce

football qui se dessinait déjà à travers le maillotde Fluminense porté par le milieu bordelais et la présence, mais aussi le recul nécessaire dupapa, pourtant entraîneur professionnel, àl’égard de son fils…

Tout cela et plus encore que vous allez découvrirdans ce numéro 22 de Foot Citoyen. Un magazine,on l’espère, avec toujours autant de sens pourvous, pour votre quotidien, pour votre passiondu football, avec ce dossier qui, à travers nosenquêtes et reportages, vous intéresse tous auplus haut point : l’influence des parents… Unthème dont on parlera aussi prochainement à la radio, dans l’émission « Foot Citoyen », le week-end sur Europe1 Sport, sur 99.9 en régionparisienne et www.europe1sport.fr pour tous lesautres. Foot Citoyen avance, grâce à des opéra-tions comme celle que le FC Nantes nous a permisde mener lors de son match contre Lyon, et, onl’espère, vous aussi avec nous. Bonne lecture àtous.

Frédéric Hamelin et Didier Roustan

JOUEUR...»

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PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 05 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

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Foot citoyen

La gestion des parents : interview Christian et Yoann GourcuffAu nom du pére mais aussi du fils prêche-t-on chez les bretons fanas de football. Lorient a vu naître deux générations de footeux, Christian Gourcuff, entraîneur du FC Lorient, père de Yoann, footballeur à Bordeaux, passé par le MIlan AC et,aujourd’hui, indispensable en équipe de France. Quoi de plus logique alors que d’interviewer père et fils pour un dossier surla gestion des parents. Souvenirs d’enfance, complicité et éducation viennent remplir cet entretien «des familles ».

Dossier : La gestion des parentsIndispensables, encombrants, raleurs, et disponibles, les qualificatifs pour définir les parents ne sont qu’un étrange mélangede paradoxes. Comment gérer tout ces aspects pour installer une harmonie entre eux et le club ? Les dossier de ce nouveaunuméro de Foot Citoyen Magazine cherche à y répondre au travers d’enquêtes, de témoignages ou d’avis d’experts. Les possibles solutions se trouvent peut-être dans les initiaves de trois clubs (p. 16), les propos d’Alexandra Clarou (p. 17), pédopsychiatre, et dans ceux d’Alexis Delafargue, responsable des Débutants à l’ACBB (p. 20)... «Comment gérer lesparents? » est un sujet qui méritait vraiment qu’on lui consacre un dossier.

Reportage : Trois jours de foot en Bosnie Nous sommes allés à Foca, à 72 kilomètres de Sarajevo, en Bosnie, suivre un tournoi de foot de rue auquel participaient 25 associations, venues de toute l’Europe. Parmi elles,une etait française : «Sport dans la Ville ». Une première pleine dedécouvertes pour ces jeunes et leurs éducateurs, dans un pays meurtri par la guerre dans les années 90.

Les Papiers du coach : Zoom sur une séance d‘entraînementComment animer ses entrainements pour tirer le mellieur de ses joueurs ? Fred Izeda, entraîneur des «16 ans Nationaux» de l’EF Reims-Saint-Anne-Châtillon (51), décortique ici une partie de sa méthode... Parler et bouger pour mieux se faire comprendre.

Foot 2 rue : “Macho” MatchSamira et sa copine Manuela se voient refuser l’inscription à un tournoi de 3 contre 3 parce qu’elles sont des filles. Mais nosamies, acompagnées d’Eloïse, vont trouver un stratagème pour disputer la compétition. Leur plan leur permettra t-il d’arriver àleurs fins ? Un nouvel épisode de foot2rue plein de suspense. A l’issue du tournoi, Marinette Pichon s’exprime.

Le zapping de « Foot Citoyen», l’émission... sur Europe1 sport (99.9)Depuis un mois, Foot Citoyen a son émission radio sur Europe1sport, tous les samedis et dimanches, de 12 à 13 heures.Invités, interviews, débats, reportages, le football amateur, fort de ses aptitudes éducatives, a trouvé une très belle caisse derésonnance. Découvrez, ici, les meilleurs moments de quatre de nos émissions.

Foot amateur

Portrait de bénévole : Marc GondouinPrésident passionné au grand cœur, Marc Gondouin répond aux critères du dirigeant bénévole idéal. Cette chance, ce sontles 350 licenciés du Rosières OS Foot, dans le District de l’Aube, qui en bénéficient au quotidien. Portrait d’un homme de64 ans dont la passion demeure intacte.

Le tournoi des féminines du PUCDepuis plusieurs années, le PUC tente de développer le foot féminin grâce à ses sections jeunes. En fin de saison dernière,Poussines, Benjamines et «13 ans» sont alleés à la rencontre «des garçons», à l’occasion du tournoi de Sèvres (92), tourné versla mixité et l’échange.

foot pro

Portfolio: Le FC Nantes soutien Foot CitoyenÀ l’occasion du match entre Nantes et l’Olympique Lyonnais, les «Canaris» ont répondu «présent» pour soutenir l’associationFoot Citoyen. Après la conférence de presse pour annoncer cette opération, l’Échauffement aux couleurs mêlées FC Nantes-Foot Citoyen, les messages éducatifs transmis aux spectateurs du match et autres supporters, voici un retour en textes et enimages sur le soutien appuyé du club présidé par Waldemar Kita, séduit par notre action.

Trajectoire : Interview Charles N’Zogbia Son départ mouvementé du Havre, son club formateur, pour Newcaste, alors qu’il n’avait que 18 ans, avait beaucoup faitparler. Depuis, quatre ans se sont écoulés et Charles s’amuse chez les Magpies. À 22 ans, « Zog », préconvoqué en Bleu,s’est fait un nom Outre-manche, grâce à un plaisir de jouer qui l’accompagne depuis ses débuts en amateur.

Arbitrage

Les journées de l’arbitrage : Le football à la traîneAu petit jeu des comparaisons sur le respect de l’arbitre entre les différents sports, la Journée de l’arbitrage était le parfaitendroit pour s’y essayer. Comme prévu, hélas, le football dans son rapport avec l’arbitrage se situe encore bien loin des autressports collectifs comme le Hand, le Basket ou encore le Rugby. Et sans contestation possible !

Initiative : L’arbitrage à 5 Pour la premiére fois, l’International Board a testé l’arbitrage à cinq lors des championnats d’Europe des «moins de 19 ans»,à Chypre. Said Enjimi, arbitre de Ligue 1, mais aussi de ce tournoi, a testé ce dispositif. Et pour lui, l’essai était plutôtconcluant.

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Les Echos

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 06 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

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HISTOIRES COURTES

FÉLICITATIONSJe tenais à vous adresser toutes mes félicitations pour le dernier numéro defoot citoyen sur «L’académie» En tantqu’éducateur et responsable d’une écolede football, je trouve que c’est un supersupport pédagogique par rapport auxjoueurs, sur lequel il est facile des’appuyer pour travailler sur lesnotions de respect, de plaisir...

J’ai mis en place cette année un filrouge autour de la conception, larédaction et la mise en vidéo d’unecharte de l’esprit sportif réalisée parles jeunes eux-mêmes. A ce titre, je voulais savoir si vous aviez desdocuments à me conseiller pour oeuvrer dans ce sens.

Nicolas QUINQUENEAU

NDLR : Si un club a déjà mis en place ce type de charte, qu’ilnous écrive sur [email protected] Nous ferons suivre...

APPEL AUX PROSJe suis bénévole à la Jeunesse sportive des PennesMirabeau, à Marseille, et Je dis BRAVO pour votreMAGAZINE ! Enfin on parle des clubs amateurs.MERCI A VOUS ! Si seulement les joueurs pross’intéressaient un peu plus au football « d’en bas »,nos jeunes seraient ravis et heureux de voir queleurs idoles pensent à eux. D’ailleurs, si monsieurBoli, qui sait très bien qu’à Marseille il est « le Grandmonsieur Boli », et que personne n’oubliera seslarmes et sa tête victorieuse en finale de Couped’Europe, en 1993, souhaite nous rentre visite, il sera le bienvenu pour discuter des valeurs de respect avec nos jeunes (notre stade s’appelled’ailleurs le stade Basile Boli).

Muriel LANARIE

(Bénévole à la Jeunesse sportive

des Pennes Mirabeau, à Marseille)

ET MON COLLÈGE ?J’ai trouvé votre magazine très intéressant et, àmon avis, adapté à des collégiens. Je voulaissavoir si l’abonnement de 5 Euros était réservéaux seuls clubs de foot et aux footballeurs ? Uncollège peut-il en bénéficier et s’abonner ?

Brigitte BUET, (documentaliste et maman

d’un footballeur, District de Savoie)

NDLR : L’abonnement de 5 Euros est réservé auxlicenciés FFF et FSGT. Le tarif « normal » est de10 Euros pour 7 numéros, envoi compris.Evidemment, un collège peut s’abonner, et ilssont d’ailleurs nombreux aujourd’hui à l’avoirfait par le biais de leur CDI.

COURRIER DES LECTEURS

Envoyez vos courriers à [email protected]

Une lectrice bien attentionnée nous a fait parvenir le Midi Libre du 24/11/2008. Et elle a eu

raison, puisqu’il était fait écho d’un beau geste lors d’un match de Première Division de District

de l’Hérault. Le Dimanche 23 novembre 2008, le Pointe Courte AC, leader de sa poule, reçoit son

dauphin, Le Social. Alors que les visiteurs mènent 1-0, l’un de ses défenseurs sauve son camp en

repoussant, sur sa ligne, un ballon de la tête. L’arbitre central, lui, voit une main, et siffle penalty pour les

Pointus. Officiant en tant que juge de touche, Bruno Ceffa, bénévole au club local (l'équipe qui bénéficie

donc du penalty), a tout vu et lui signifie que le défenseur a bien repoussé le ballon de la tête. L’arbitre

central revient alors sur sa décision et les visiteurs l’emportent finalement 2-0. Chapeau Bruno !

ON APPLAUDIT DES DEUX MAINS

ELAN DE SOLIDARITÉ

Les drames de la vie sont encore plus difficiles à accepter

lorsqu’ils touchent un enfant. Le 25 novembre dernier, le

petit Jason, 12 ans, gardien de l’Avignon foot 84, est mort

dans l’incendie du domicile familial. Son petit frère a, lui, été

blessé, et ses parents sont actuellement sous respiration

artificielle. Fabrice Di Natale, son coach témoigne:«C’est terrible. C’était un gamin toujours joyeux, acharné du ballon…

Il avait un pépin physique au pied, et pourtant il s’arrachait plus que les autres. Nous avons d’abord organisé une marche

silencieuse dans Avignon. Puis le club s’est mobilisé pour créercette chaîne de solidarité pour sa famille. »

Pour soutenir sa famille, vous pouvez envoyer vos dons à cette

adresse :

Parc des sports, Avenue Pierre Coubertin, 84000 Avignon

Libellez votre chèque au nom de l’association

(« Avignon Foot Solidarité Raharivelo »)

Contact : Fabrice Di Natale 06 22 46 45 28

Foot Citoyen adresse, déjà, ses sincères condoléances

à la famille et à tous les proches du petit Jason.

Samedi 22 novembre, Valenciennes accueille Sochaux, deuxéquipes mal classées de Ligue 1. Jacques Abardonado, le défen-seur Valenciennois, remet le ballon dans les pieds du SochalienErding, qui marque. On appelle ça une « boulette »... Abardonadocraque et quitte ses partenaires à la mi-temps. Lucide, il s’en estexpliqué : « J'ai été très affecté par ce but. Je me suis senti com-plètement responsable, fautif. J'ai senti la haine monter en moi et

m'envahir. J'avais peur de moi-même, j'étais trop aveuglé par lacolère. J'avais envie de faire mal à un joueur sochalien. Je n'ai passupporté la pression du match.» Quand un joueur est à bout denerfs, le pétage de plomb n’est jamais bien loin. Et rares sont ceuxqui en écoutent les signes avant coureurs. Abardonado, lui, les aentendus et a réagi. Certains parleront de lâcheté. On y voit plutôtde la sagesse.

Le mea-culpa de Jacques ABARDONADO

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RADIO

Radio

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 07 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

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L’ ESPRIT DU JEUL’émission du 16 novembre fut consacrée au Stade de l’Est, en Seine-Saint-Denis…

Un club bien, où le jeu est bien et les gens… bien. Michel Hardelin, le président, étaitnotre invité ce matin-là. Zoom sur l’esprit de tout un club et de son âme Serge Anger.

Didier Roustan : Ça se trouve où le Stade de l’Est

Pavillonnais ?

Michel Hardelin : Eh bien ça se trouve dans la ville

de Pavillons-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis. C’est

une petite commune d’environ 20 000 habitants.

Didier : C’est en 1953 que le stade de l’Est, au

départ un club parisien, est devenu le Stade de l’Est

Pavillonnais. Combien de licenciés, Michel ?

Michel : Suivant les saisons, entre 500 et 580, plus

les éducateurs et les dirigeants.

Didier : Et vous êtes président depuis combien de

temps ?

Michel : C’est ma troisième saison. Auparavant,

j’étais responsable des jeunes, entraîneur de

l’équipe Première Seniors pendant une dizaine

d’années, en Division d’Honneur Régional et

Promotion d’Honneur, et, encore avant, joueur dans

ce même club à partir de 1974.

Didier : … Malgré les sollicitations du Real Madrid,

Liverpool…

Michel : Je suis resté de marbre.

Didier : Magnifique, ça c’est l’esprit de club et

l’amour du maillot, et ça se perd.

Alors, président depuis 3 ans ce n’est pas rien,

beaucoup de responsabilités, une grosse charge

de travail… Vous êtes bénévole ?

Michel : Totalement, et je travaille toujours…

Mais plus pour très longtemps...

Didier : Et cette fonction de président vous prend

combien de temps par semaine?

Michel : Disons, en moyenne, entre 5 et 10

heures...

Frédéric Hamelin : Pas plus ?

Michel : Non, car ce qui fait la force de notre club,

c’est qu’il y a beaucoup de gens qui y sont depuis

longtemps, qui le connaissent bien. Ils ont de la

compétence et ça me permet, pour l’instant, tout en

continuant à avoir une activité professionnelle,

d’assumer ma fonction de président en pouvant me

reposer sur ces gens-là.

Didier : Qu’est ce qu’il a de particulier ce club ?

Michel : Le Stade de l’Est, pendant des années

était un club de Division d’Honneur qui avait

fonctionné avec un président mécène qui donnait

beaucoup d’argent aux joueurs de l’équipe

Première sans qu’il ne se passe grand-chose

autour. Ça, c’était les années 50 et, à la fin des

années 60, Monsieur Serge Anger a pris les choses

en main, après avoir été joueur une saison. Il a

proposé le projet d’un sport purement amateur et,

en se référant à des principes de jeu, une certaine

idée du jeu. Pour être clair, la Hongrie, le FC Nantes,

Barcelone, Reims... Et puis, effectivement, cet

esprit associatif, cet esprit collectif et donc il a

trouvé un groupe de joueurs qui ont rallié ces idées.

Les résultats ont également suivi, sans argent,

sans entraînement intensif, sans recrutement... Et

tout cela a permis d’emmener ce club tout en haut

de la hiérarchie régionale.

Frédéric : Les Seniors sont en quelle division

maintenant ?

Michel : En 1ère division de District.

Le Stade de l’Est, maintenant, c’est un club de

District, que ça soit au niveau des Seniors ou des

jeunes. On est à notre place. On a un certain

nombre d’exigences par rapport à l’éducatif pour

ce qui concerne les jeunes, par rapport au contenu

du jeu, par rapport aussi à l’esprit club qui fait

qu’on est bien à notre place là, et on n’a pas envie

de faire des concessions pour aller je ne sais où.

Frédéric : Voilà, il y a des tas de belles

histoires et des tas de gens qui se décarcassent.

Michel, souvent les gosses sont à l’image de leur

éducateur, s’il est agressif, l’équipe le sera

aussi…Les problèmes viennent souvent des

adultes, non ?

Michel : Absolument. Souvent on me dit : « Tu es

président d’un club en Seine-Saint-Denis, ca doit

être ingérable… ». Et bien, pas du tout !

Je pense que c’est une question de qualité

d’éducateurs et de dirigeants. Il y a des idées à

faire passer et des priorités à faire respecter. Si l’on

démarre la saison en ayant pour objectif de finir

absolument premiers partout, et que seul le classe-

ment compte, on est mal partis…

Didier : Des guerriers, des équipes commando…

C’est sûr qu’avec de tels propos dans la bouche

des entraîneurs, au niveauludique, ce n’est pas

évident.

Michel : Oui, il y a des moments où c’est difficile

sur les terrains… Où on se sent un peu seuls…

Et, on peut vraiment dire merci à votre association

et, aussi, votre revue, Foot Citoyen Magazine, qui

nous épaule, nous aide, notamment dans

ces moments. Parce que, ce qu’on entend à

la télévision de la part de journalistes ou

d’entraîneurs, avec des choses du style « C’est une

faute intelligente », ça ne nous aide pas.

Didier : Nous allons être en relation au téléphone

avec Serge Anger, qui est donc toujours éducateur

au club à 70 ans. Serge Anger que vous connaissez

bien, Michel, puisqu’il est actuellement avec les

«18 ans » du Stade de l’Est qui jouent a Clichy-

sous-Bois. Présentez-le nous en quelques mots, ce

qui n’est pas facile puisqu’il mériterait un roman …

Michel : Serge Anger, c’est un poète du football.

C’est quelqu’un de très humble, de très compétent,

qui est au service du club et qui en est quand

même la poutre maîtresse. C’est vraiment lui qui a

lancé le club à l’époque et qui a fédéré un groupe

de joueurs, de dirigeants et d’éducateurs…

Frédéric : Serge, ça va, vous ne rougissez pas trop ?

Serge Anger : (Photo 2, avec la casquette rouge)Non, non, ca va, je suis actuellement à Clichy-sous-

Bois, avec les « 18 ans »...

Didier : Alors, Serge, vous avez touché un peu

à tout dans ce club… Vous avez été joueur,

président, vous êtes toujours entraîneur… Depuis

tout ce temps, vous avez encore le feu sacré !

Serge : Je vais être honnête, il y a parfois de

l’usure. Mais heureusement, nous formons

une équipe, un groupe qui va toujours dans le

même sens, ce qui nous permet de tenir. Cette

communauté d’hommes et d’idées qui s’est faite

il y a un moment dure encore.

Didier : Et ce n’est pas facile dans le monde

actuel…Qu’est-ce qui vous choque le plus dans le

monde amateur d’une manière générale ?

Serge : Pour reprendre ce qui a été dit avant, c’est

le comportement de certains « éducateurs »… Que

ce soit vis-à-vis de leurs joueurs, du jeu ou du

corps arbitral, qui est souvent jeune et malléable.

Quand il y a de la pression, ces arbitres vont

souvent dans le sens de celui qui crie le plus fort.

Et c’est choquant lorsqu’on connaît la responsabilité

des éducateurs auprès des jeunes.

Didier : Serge, merci. L’émission touche à sa fin,

Michel Hardelin, à vous le mot de la fin pour cette

émission « Foot Citoyen »…

Michel : Et bien, comme Serge en a fait état, on

ne peut qu’espérer dans les années à venir qu’on

va pouvoir continuer à pratiquer le football

de manière ludique, même lorsqu’il y a de la

compétition. Je réitère mes remerciements à

« Foot Citoyen » parce que parfois ça nous

remonte le moral de savoir que l’on n’est pas

seul et qu’on est beaucoup en France à vouloir

faire pratiquer le football dans un esprit fraternel

et citoyen (NDLR : quand on apprend toutes cesbelles choses sur ce club, cette approche dusport, cet état d’esprit magnifique, on comprendmieux pourquoi l’un des piliers de l’associationFoot Citoyen a été tant influencé par cet univers, puisqu’il a été durant plusieurs années joueur auStade de l’Est, où il avait notamment commeentraîneur, un certain... Michel Hardelin).

SERGE ANGER,C’EST UN POÈTE

DU FOOTBALL(Michel Hardelin )

SI L’ON DÉMARRELA SAISON

EN AYANT POUROBJECTIF DE FINIR

ABSOLUMENTPREMIERS

PARTOUT, ON ESTMAL PARTIS…

(Michel Hardelin)

LE SOLEIL SE LÈVE À L’EST

LE ZAPPING FOOT CITOYEN

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PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 08 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

A Rosières, Pascal Stefani (textes) et Thierry Plumey (photos)

Dirigeant

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ICI, LES GENS ONT TOUJOURS UNE RÉPONSE POSITIVE PAR

RAPPORT À LEURS PROBLÈMES.

PORTRAIT DE BÉNÉVOLE

Marc GONDOUIN(président du Rosières OS Foot, District de l’Aube)

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ccoudé contre la main courante,Marc Gondouin commente endirect la fin du match Seniors.Dernière attaque adverse : « Ça yest, on va perdre. » But !

« On a perdu... » Puis il se marre. Le présidentdu Rosières OS Foot est comme ça, décon-tracté, amusé, pas vraiment le genre à seprendre au sérieux pour du foot. Débonnaire,mais pas dilettante... Sourire après une défaitene l’empêche pas d’être concerné et dévoué,comme il le montre depuis 21 ans à la tête duclub. Présent au stade les sept jours de lasemaine, il observe et met les mains dans lecambouis : « Je viens à chaque fois parceque je veux être près de mes joueurs et demon personnel. Je jette un œil et je fais unpeu d’administratif. Je ne vois pas tousles matchs, mais pas une équipe ne peutdire que je ne suis pas venu les voir jouer. Les week-ends, ça m’arrive d’arbitrer,au centre ou à la touche, ou de nettoyer levestiaire, voire même de laver lesmaillots... » Nelo, le vice-président, etBernadette, la secrétaire-trésorière « et bienplus que ça. », sont avec lui aujourd’hui.Marc y a tenu car il ne conçoit pas évoquerson rôle sans ses fidèles acolytes : « Tout seul,je ne suis rien. », dit-il. On demande alorsleur avis à propos de leur président... Lesphrases de Bernadette ne sont que sujet-verbe-compliments : « Il donnerait sa chemise, etmême son pantalon pour le club. Il est dans lefoot depuis très longtemps, donc il connaîttout, sait où aller quand on a besoin dequelque chose. C’est quelqu’un de très calme,très disponible, très diplomate avec les bénévoles. Il sait les remercier et les valoriser.C’est le président idéal.» Marc en rougirait...Nelo préfère y aller de son anecdote : « Il y aun exemple qui en dit beaucoup... Le tournoiannuel du club se déroule sur deux jours,samedi et dimanche. À chaque fois, avec Marc,on dort dans le camion pour garder le site, les boissons et la nourriture. Et le matin, vers 6 heures, on gratte le givre du terrain... Pas mal pour deux grands pères! »

À la sortie du vestiaire trône un seau de sangria quese partagent joueurs, dirigeants et supporters.Cadeau d’un sponsor pour remercier Marc d’uncoup de main récent. La scène, forcément joyeuse,illustre l’esprit de famille qui règne au club. Il y atreize ans, la fête était moins folle. Avec trente licenciés, tous Seniors, il s’agissait plus d’une équipe que d’un club. Aujourd’hui, ils sont 350, et courent dans toutes les catégories. La «révolution»date de 95 et l’arrivée de quelques bambins: «Onavait un peu touché le fond à cette époque, il n’yavait pas de vie. Une équipe de Débutants a étécréée, et la bonne ambiance a fait que tout abien fonctionné… C’est la première année quecette génération joue en Seniors. Ça fait plaisir.»La réputation d’un club où il fait bon vivre et jouerattire chaque année plus de nouveaux, «jusqu’à150 l’année dernière!» Marc accepte tout le

monde et, surtout, a la même considérationpour tous. Depuis quelques années, les jeunes voi-sins du quartier sensible des Chartreux, à Troyes,s’inscrivent dans ce club de village. Rosières lesaccueille sans retenue, là où d’autres présidents seseraient sûrement montrés méfiants. Des jeunesséparés de leur famille, placés dans un centre spécialisé de Rosières, souhaitent également jouer aufoot. Là encore, c’est avec un mélange de simplicitéet d’intransigeance qu’ils sont reçus : «On les laisses’intégrer naturellement. On voit des évolutions,mais aussi des échecs. J’accepte tout le monde,je ne veux pas faire de différence. Mais on aédité un règlement intérieur, et celui qui ne lerespecte pas prend le risque de se faire virer.»Un ancien joueur, Ricardo, de passage au stade,vient saluer le président qui l’a fait grandir. Témoinprivilégié, il sait l’importance du président dansl’évolution du club : «C’est grand respect pour leprésident. Le club ce n’était pas ça avant... Ce qui me marque, c’est sa jeunesse intérieure,il est resté vachement cool. La preuve il«check» quand il dit bonjour.» se marre-t-il.

En interrogeant ses proches, on ne s’attendaitpas à ce qu’ils s’attardent sur ses défauts. Maisla sincérité avec laquelle ils énumèrent sesqualités en dit long sur l’homme. SeuleBernadette, la si élogieuse Bernadette, évoquela possibilité d’un excès : « A part pour la discipline, il ne sait jamais dire non. Et quand il y a besoin de taper du poing sur latable, il a parfois du mal à le faire. » Marcconcède cette petite faiblesse qui, si l’on n’étaitpas certain qu’il soit aussi respecté, pourrait lefaire passer pour la bonne poire de service : « S’il manque des voitures pour lesdéplacements, ils nous appellent toujours,Bernadette ou moi. Ou pour d’autres besoins. Ils ont toujours une réponse positive par rapport à leurs problèmes. Ilsn’hésitent pas à me demander, même si parfois c’est fatigant. Tant que les gensn’abusent pas, je le fais de bon cœur. » Toutse résume, comme souvent, en une anecdote.Une scène cocasse à laquelle on aurait aiméassister. Récemment, l’homme n’a pas dit nonquand on lui a demandé d’endosser un rôleauquel son âge ne le destinait plus : « J’ai dûjouer gardien de but en Seniors, l’autre jour.Ils n’étaient que dix sinon. A 62 ans, je nepeux pas jouer à un autre poste… J’en aipris cinq quand même. » Et il se marre.

LA

FICHE

Marc GONDOUIN

Né le 17 mars 1946 à Troyes.

Match de légende : Finale de la Coupe du monde1998, France-Brésil : 3-0

Joueur préféré : Michel Platini

Président préféré : Thierry Gomez (ESTAC)

Club préféré : ESTAC

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 09 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

A

Dirigeant

09

L’HOMME QUI NE DIT JAMAIS NONCapable de nettoyer les vestiaires, d’arbitrer, de jouer dans le but, de… jongler aussi, Marc Gondouin, 62 ans,

est un président atypique. Il ne sait pas, n’aime pas dire non. Portrait d’un homme heureux et respecté qui a construit son club, le Rosières OS Foot, du côté de Troyes, à son image : ouvert et sympathique.

IL DONNERAIT SA CHEMISE… ET MÊME SON

PANTALON POURLE CLUB !

(Bernadette, secrétaire et trésorière du club)

320 LICENCIÉS EN 12 ANS...

OUI, TOUJOURS OUI...

District de l'Aube

Page 9: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 10 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Interview croisée Yoann et Christian Gourcuff

10

Yoann GOURCUFF:«MON PÈRE M’A

LAISSÉ M’ÉPANOUIR.»Christian était un « modeste et physique » joueur de Division 2… Il est aujourd’hui un entraîneur de Ligue 1 reconnu

pour ses valeurs et la qualité de son jeu. Yoann était le gamin qui tapait dans le ballon après les entraînements paternels, «quand il en avait le droit »… Il est maintenant l’étoile montante du football français, admiré pour

sa technique, son sens du jeu et son état d’esprit, entre altruisme et plaisir… Christian et Yoann Gourcuff nous ontlivré, très intimement, à travers une interview croisée, les clés de leur incroyable relation père-fils dont pourraient

s’inspirer bon nombre de parents qui accompagnent leur enfant le week-end sur les terrains de jeu.

oann, quels souvenirs as-tu de ton pèrequand il était professionnel ?

Yoann : Très jeune j’avais une grande passion

pour le football et le tennis. Comme mon père

était entraîneur à Lorient, j’adorais aller voir ses entraînements.

J’allais ramasser les ballons quand ils partaient hors du terrain,

et je faisais quelques jonglages. Et quand mon père me

le permettait, j’avais le droit de faire quelques passes avec

les joueurs qui restaient…

Christian : C’était naturel, c’est une façon de faire commune

à tous les enfants dont le père pratique. Il a forcément été influencé

par mon activité, mais je ne pense pas que ça soit l’origine

Y JE PRENAIS DU RECUL,POUR LE PROTÉGER

AVANT TOUT. (Christian)

Propos recueillis par Frédéric Hamelin et Pascal Stefani / Photos : DR

Yoann et son papa,le temps des sourires

«Brésiliens»...

l’influence des parents

Page 10: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 11 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Interview croisée Yoann et Christian Gourcuff

11

de sa passion. Yoann était naturellement très

attiré par tous les sports : foot, tennis,

ping-pong… C’était son envie avant tout.

Yoann : C’est vrai. C’est à son contact que j’ai

pu découvrir tous ces sports, mais il ne m’a

jamais forcé et toujours laissé libre de ce que

j’avais envie de faire.

A quel moment as-tu commencé

à jouer en club ?

Yoann : Vers l’âge de cinq ans, mon père m’a

emmené à l’école de foot de Lorient. Au début

je n’étais pas très intéressé par la compétition,

que ça soit au tennis ou au foot. C’étaient

des loisirs. J’aimais bien jouer avec mes copains

de classe, et j’étais un peu stressé à l’idée de

jouer dans un club. Mais j’ai fait un entraînement,

ça m’a plu et j’ai signé une licence.

Christian, quel parent étiez-vous sur

les terrains ?

Christian : J’allais le voir assez souvent.

C’était un peu particulier, parce que j’étais

l’entraîneur général de Lorient. Les éducateurs

avaient un positionnement ambigu, parce

qu’ils étaient sous mes ordres. C’est pour ça

que j’ai toujours pris beaucoup de recul par

rapport à ça, sans jamais interférer dans quoi

que ce soit.

Yoann : Il m’emmenait souvent aux entraînements,

aux matchs. Il était présent, mais il se mettait très

en retrait, et ne m’a jamais mis de pression. Il

me laissait m’épanouir. A cet âge là, il n’est pas

question de métier ou de professionnalisme,

l’important est juste de prendre du plaisir.

Christian : Il était déjà un peu au dessus du lot,

mais malgré ça, certains parents étaient un peu

jaloux. C’est pour ça que je prenais du recul, pour

le protéger avant tout. Je regardais le match mais

je me manifestais le moins possible. Il était surtout

important qu’il sache que j’étais là, parce que

l’enfant doit s’apercevoir que ses parents

s’intéressent à lui. Ça montre qu’on lui prête

attention, et puis c’est une source de motivation,

ça l’encourage. Il me fallait aussi prendre du recul

par rapport à l’environnement. Parce que quand

on voit les parents qui, sur la touche, s’en prennent

à l’entraîneur, ou l’arbitre, voire aux enfants

eux-mêmes, c’est catastrophique…

Yoann : Très jeune je n’ai pas du tout ressenti

cette jalousie. Vers l’âge de 12-13 ans, c’était

parfois plus dur à vivre. Je sentais le regard

des autres, de certains parents qui pensaient

que j’étais là parce que mon père était

l’entraîneur du club. Ça me faisait mal qu’ils

pensent ça mais ça n’a pas duré longtemps.

Est-ce que vous parliez du match

à la maison, en rentrant ?

Christian : Oui, mais surtout pour manifester

de l’intérêt, sans jamais lui mettre de pression.

Ce n’était pas un débriefing, il n’y avait rien

de formel, rien de technique. Il n’était pas

spécialement demandeur de conseils d’ailleurs.

Il préférait en parler avec ses copains.

Yoann : Je lui demandais quelques trucs

de temps en temps. Mais je faisais attention

aussi à ne pas trop le « saouler » avec ça, parce

qu’il avait un emploi du temps très chargé.

Comme c’est un grand passionné, il fait tout à

fond. Je n’avais pas spécialement envie de lui

demander des conseils sur le foot, mais je crois

surtout que je n’osais pas trop. Et puis le foot de

mon père, ce n’était pas le même que le mien.

Je n’avais pas de contraintes, ce n’était que du

bonheur, il n’y avait pas de notion de performance.

On était juste là pour s’amuser ensemble.

Christian : Les choses se faisaient naturellement.

Je pense qu’il a été plus influencé par les

matchs que l’on regardait à la télé. Là, on pouvait

échanger dans l’appréciation du jeu.

Yoann: On regardait surtout les matchs de Coupe

des Clubs Champions. Moi, passionné de foot,

j’adorais ça. On regardait ces rencontres ensemble,

et il commentait souvent les actions ou la qualité

du jeu, d’une équipe ou d’un joueur en particulier.

Et j’étais très attentif à ce qu’il me disait.

Quelles équipes ou joueurs vous ont

marqués ?

Christian : J’étais un grand admirateur du Brésil

de Pelé lors de la coupe du monde 70. J’avais

quelques cassettes qu’on a vues ensemble.

Et Yoann les a beaucoup regardées, seul... Il y a

eu aussi l’époque du Barça de Cruyff, qui était

une référence en 92-93.

Yoann : J’adorais regarder les cassettes

du Brésil. Pour moi, c’était un rêve, c’était

extraordinaire. Elles expliquaient tout sur Pelé : la

technique, la préparation physique, plein de

choses de sa vie, et puis il y avait la petite

musique brésilienne qui allait avec… Je ne m’en

lassais jamais. Ça me faisait du bien, ça me

donnait vraiment envie de jouer au foot.

Ça peut expliquer le plaisir de jouer

et de tenter des choses que Yoann

montre aujourd’hui...

Christian : Oui, c’est possible. Je pense qu’un

joueur construit sa façon de jouer à partir de ses

motivations, de ses aspirations. J’avais, par

exemple, des grosses qualités physiques étant

jeune. Mais j’ai rapidement été bercé par ce foot

Brésilien des années 60-70, et j’ai transformé

mon jeu en le rendant plus technique. J’avais

YOANN, C’ESTAVANT TOUT LAJOIE DE VIVRE…

(Christian)

J’ADORAISREGARDER

LES CASSETTESDE MON PÈRESUR LE BRÉSIL

DE PELÉ... C’ÉTAIT EXTRAORDINAIRE.

(Yoann)

A 22 ans, avec

Bordeaux

A 21 ans, avec Milan

Page 11: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 12 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

12

quelques prédispositions, mais j’ai l’impression

de m’être transformé en fonction de ma sensibilité,

de ce que je voulais faire. Je pense que c’est

pareil pour tout joueur. Quand on a le sens

de l’esthétisme, on développe ces qualités

au quotidien.

Yoann : C’est vrai, je pense que ça m’a inspiré.

Pelé, par exemple, m’a marqué. Il avait une facilité

à éliminer ses adversaires qui était incroyable.

C’était génial de voir un joueur qui dribblait

3-4 joueurs, qui avait une très bonne conduite

de balle tout en allant très, très vite. J’essayais

de reproduire ces frappes au but ou ces

gestes techniques.

Christian, vous disiez que Yoann avait

des facilités. Mais le professionnalisme

demande aussi des notions de rigueur,

de perfectionnisme. Est-ce un message

que vous lui avez fait passer?

Christian : Oui, mais ça dépasse le cadre du foot.

Dans la vie, ce n’est pas ça qui le caractérise.

Yoann, c’est avant tout la joie de vivre… Et cette

rigueur doit être en adéquation avec cette joie

de vivre et de jouer. J’ai connu des pères qui

voulaient prédisposer leur fils à une carrière, en

l’astreignant à des entraînements supplémentaires.

En général, le résultat a toujours été catastrophique :

à 15-16 ans le gamin arrêtait tout parce qu’il

faisait une overdose de foot. La rigueur se développe

autour de l’envie. Quand c’est imposé, brutal, le jeune

ne suit pas.

Yoann : Le fait que mon père ne m’ait jamais mis

une quelconque pression, malgré mes aptitudes,

m’a facilité les choses. Je pense que je n’aurais

pas très bien vécu d’avoir des parents comme ça,

parce qu’à cet âge, si jeune, quand on la ressent -

la pression - ce n’est pas l’idéal. En priorité, il y a la

notion de loisir, le fait de partager, de prendre du

bon temps avec les autres. Après quand on grandit,

je crois qu’il faut aussi apprécier et prendre du

plaisir à progresser, par le travail au quotidien. Mes

coéquipiers voulaient souvent faire des jeux, et moi

j’attachais de plus en plus d’importance à vouloir

progresser techniquement. Travailler les passes,

les contrôles orientés, le pied gauche et toutes les

surfaces du pied... J’étais concentré là-dessus,

parce que je prenais du plaisir à m’améliorer.

Christian : Le jeu c’est l’expression de la vie,

de ses valeurs. Ce qui est formidable dans le foot,

c’est qu’il s’agit d’un sport collectif où l’on peut

retrouver tous les excès de la vie, et aussi tous

ses plaisirs, dans le partage, les émotions…

Même au niveau pro, où les intérêts sont

énormes, c’est la capacité à avoir des émotions,

mais aussi la sensibilité qui font la différence.

Yoann, le fait d’assister aux entraîne-

ments de ton père a-t-il pu t’aider

à progresser ?

Yoann : Je pense, oui. Je me souviens des

exercices qu’il faisait faire aux joueurs. Il y avait

beaucoup de travail technique et il était très

précis et exigeant à propos de la qualité

technique de ses joueurs, dans les contrôles

et les passes. Je pense qu’inconsciemment

ça m’a donné envie de trouver du plaisir

à m’appliquer comme eux. Je n’étais pas encore

dans une logique de progression à cet âge,

mais je reproduisais ce que je voyais.

Christian : On n’apprend pas les gestes,

on les reproduis. C’est ce que je disais, on imite

les joueurs que l’on a envie d’imiter. C’est

une affaire de sensibilité. Je l’ai vécu moi aussi :

on essaye de faire des gestes que l’on aime,

et après, à force de les travailler, on arrive

à les retranscrire avec ses propres aptitudes

et sa morphologie… Par exemple, Yoann a une

utilisation de l’extérieur du pied qui est

quasiment unique aujourd’hui. C’est une surface

de contact qui permet d’évoluer en mouvement,

ce qui est un atout considérable. Ça donne

une fluidité dans le jeu.

Yoann : Mon père était plus un adepte

de l’extérieur du pied que moi. Je me souviens

quand il était entraîneur et que le ballon arrivait

vers lui, il utilisait souvent l’extérieur pour

le remettre en jeu. J’ai vu aussi des joueurs très

techniques l’utiliser, et plus j’ai grandi plus je

m’en suis servi. C’est très utile dans les

situations délicates.

Est-ce un atout ou un handicap

d’être le fils de l’entraîneur du club,

comme Yoann l’a été à Lorient, puis

à Rennes ?

Christian :Je pense qu’il y a du pour et du contre,

et c’est à chaque gamin de prendre le pour, et puis

d’essayer de ne pas s’exposer aux inconvénients,

parce qu’il y en a. Aujourd’hui ce n’est plus un

problème, mais à une certaine époque ça a pu

constituer un handicap, comme à Rennes par

exemple. Quand j’ai été viré, la situation était assez

tendue au niveau du club. On n’a pas trop discuté

de cet épisode, mais je pense que pour lui ça a été

très, très dur à vivre. J’ai été certainement très

LE JEU, C’ESTL’EXPRESSION

DE LA VIE, DE SES VALEURS.

(Christian) AVANT FRANCE-SERBIE,MON PÈRE M’A

ENVOYÉ UNTEXTO EN MEDISANT QUE

ÇA NE RESTAITQU’UN MATCH

DE FOOT.(Yoann)

Interview croisée Yoann et Christian Gourcuff

A 22 ans,

première

sélection

enéquipe

de France A.

Christian avec Yoann

(et déjà un maillot brésilien

- celui de Fluminense)

et son grand frère Erwan.

Page 12: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 13 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

critiqué, et vis-à-vis des gamins, avec toute

la concurrence qui existe dans les centres de

formation, il a du subir un peu de méchanceté.

Yoann : J’ai très mal vécu cet épisode. Si

encore ça avait été mon père qui m’avait

appris son limogeage, ça serait mieux passé.

Mais il l’a su tardivement, et il n’a pas eu

l’occasion de m’en parler. A mon réveil, j’ai vu

tous les autres me regarder bizarrement. Je ne

comprenais pas pourquoi, jusqu’à ce que je

lise le journal. Après, j’étais très gêné vis-à-vis

d’eux, je sentais leur regard sur moi, et puis

j’étais très déçu pour mon père. Ça a été

difficile pendant quelques temps, j’ai même

pensé à quitter le club.

Votre relation a-t-elle changé au fil

du temps ? Est-elle devenue plus

profonde, plus professionnelle ?

Yoann : Elle a évolué quand je suis passé

pro à Rennes. On s’appelait parce que je

voulais qu’il connaisse mon quotidien,

comment se passaient mes entraînements, et

puis aussi que l’on parle de l’approche

psychologique liée à la concurrence. Tout ça était

nouveau pour moi. Et cette relation a encore

été plus forte à Milan, parce que j’arrivais

dans l’un des clubs les plus prestigieux du

monde. Et forcément, il avait envie de savoir

comment ça se passait, ce que l’on faisait à

l’entraînement…

Christian : C’est vrai que l’on parlait beaucoup

de ce qu’il faisait à Milan. Je m’y suis toujours

intéressé de près, notamment à sa préparation

physique. Il me racontait ce qu’il faisait, et puis

j’avais la chaîne italienne Milan Channel, où

je suivais pas mal d’entraînements. Pour mon

enrichissement personnel, c’était aussi intéressant.

Aujourd’hui, Yoann est en équipe

de France : continuez-vous à échanger

vos points de vue ?

Christian : Oui, on parle de ses matchs. Je reste

toujours à ma place, mais c’est peut-être

maintenant que c’est le plus enrichissant. Parce

qu’aujourd’hui il peut faire la part des choses.

Ne pas prendre tout ce que je dis pour argent

comptant. Il a aussi cette maturité dans l’analyse

qui permet que j’aille un peu plus loin. J’essaye

d’être critique avec mesure. Dans la recherche

de la perfection, il faut être aussi capable

d’apprécier le bon, et pas seulement de voir

les choses à améliorer.

Qu’avez-vous pensé de sa prestation

lors de France-Serbie ?

Christian : J’ai beaucoup apprécié. Il y avait

autour de la rencontre une tension extraordinaire,

et je pense que jamais plus il ne fera

un match avec autant de pression négative.

L’environnement était détestable. C’était la mise à

mort de Domenech. Et comme Yoann avait contre

toute attente été titularisé, il était évidemment

aussi en point de mire. Pour moi, il a fait preuve

d’une grande maturité et d’une grande intelligence

dans la gestion de son match. Il est parti

tranquillement, en commettant le minimum

d’erreurs, en se montrant très disponible et en

jouant très simplement. Il s’est mis petit à petit

dans la rencontre, et il a pris confiance pour

terminer en boulet de canon. S’il avait tenté et

raté deux ou trois roulettes sur ses premiers

ballons, la suite aurait été difficile.

Yoann : C’est vrai qu’avec la défaite quelques

jours auparavant contre l’Autriche, le climat

autour de l’équipe de France était vraiment

particulier. Il y avait beaucoup de critiques et

de polémiques, et c’était difficile à vivre pour

moi parce qu’en équipe nationale tout est plus

médiatisé. On n’arrêtait pas de parler de ça.

Quand j’ai appris que j’allais être titulaire, je l’ai

très mal vécu pendant plusieurs heures. J’ai eu

beaucoup de pression d’un coup, parce que

je savais que ça pouvait être un tournant dans

ma carrière, si ça ne se passait pas bien. Avant

le match, des journalistes critiquaient déjà le fait

que je sois titulaire, ce qui a ajouté à la tension.

J’ai su après que mon père avait mal vécu le fait

que je sois titulaire, qu’il avait aussi ressenti

beaucoup d’angoisse. Mais il m’a envoyé un texto

avant le match, en me disant tout simplement

que même si beaucoup d’aspects rentraient en

jeu et que c’était difficile à vivre, ça ne restait

qu’un match de foot. Et que je devais apprécier

ce moment et y prendre du plaisir.

C’est un petit peu le conseil qu’il

t’a donné tout le long de ta vie.

De prendre du plaisir et de t’amuser…

Yoann : Tout à fait. Je pense qu’aujourd’hui

il y a beaucoup d’enjeux autour du football,

qui devient de plus en plus un sport individuel. Il

y a moins de notions de plaisir alors que, même

si c’est un métier, avec ses avantages et

inconvénients, on fait du foot parce que c’est

notre passion. On est donc censé y prendre

du plaisir. Il ne faut jamais oublier ça, parce

que c’est quand on prend du plaisir que

la performance arrive. Si on commence à se

concentrer sur les enjeux ou les médias,

ça bouffe la passion, et ça devient plus une

charge qu’autre chose.

DANS LARECHERCHE DELA PERFECTION,

IL FAUT ÊTRECAPABLE

D’APPRÉCIER LE BON.(Christian)

Interview croisée Yoann et Christian Gourcuff

C’EST QUAND ON PREND DU

PLAISIR QUE LAPERFORMANCE

ARRIVE.(Yoann)

13

A 17 ans, première

saison pro avec

Rennes...

Yoann à 13 ans, sous

le maillot de Lorient.

Page 13: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 14 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

n a besoin d’eux, mais ils ne sont pas faciles

à gérer.» C’est, en résumé, la pensée générale

des éducateurs et dirigeants quand ils évoquent

les parents. «On a besoin d’eux», pour une multitude

de raisons. Suivre et encourager les enfants dans

leur passion; participer à la vie et l’ambiance du club; préparer

les goûters du samedi ; transporter les joueurs sur leur lieu

de match; devenir accompagnateurs ou éducateurs… « Ils ne sont

pas faciles à gérer», parce ce n’est pas aussi simple que cela. Parce

que les moins intéressés prennent le club pour une garderie

et laissent leur enfant au stade pour le reprendre à la sortie ; les anciens

footballeurs prennent parfois la place du coach et distillent des conseils

souvent inappropriés, quand eux les jugent précieux; les plus extrêmes

s’en prennent à l’arbitre, aux adversaires, aux enfants eux-mêmes; les

trop fiers et les moins objectifs imaginent pour leur enfant le destin d’un

Zidane, Ribéry ou… Gourcuff (le fils) ; ou encore parce que les jours de

match à l’extérieur, c’est bien souvent le même parent qui met sa

voiture à disposition... Les parents absents ne posent pas de problème,

mais ne font pas vivre le club. Les parents assidus sont nécessaires,

mais empêchent -parfois- leur enfant de se faire plaisir, compliquant

ainsi la tâche de l’entraîneur. Au milieu de ce dilemme, les dirigeants se

grattent souvent la tête pour ménager la chèvre et le chou. Ne pas

se faire «bouffer» par les parents, ne pas les brusquer non plus.

Une méthode tout en compromis. Pas la solution idéale.

GÉRER LES PARENTS COMME DES JOUEURS?

Le club ne doit pas se contenter de cette situation imparfaite.

Pourquoi ne pas gérer les parents comme il le fait avec ses joueurs ?

Avec respect, ce savant mélange d’amour et de crainte. Inspirer

la crainte en se montrant clair, ferme, intransigeant sur des règles

de fonctionnement. Lors des réunions d’information de début

d’année, l’éducateur de la catégorie, ou le responsable technique,

doit envoyer ce message fort, précis, aux parents : les enfants ont

besoin de votre soutien, mais le terrain n’appartient qu’aux joueurs

et à leurs éducateurs. Puis, tout au long de la saison, le répéter à

l’envi. Intervenir à chaque fois que la règle est transgressée, à chaque

fois qu’un parent sort de son rôle. En expliquer les raisons, encore et

toujours... En menant cette démarche dans chaque catégorie depuis

les Débutants, les parents comprennent petit à petit. Ou bien partent,

s’ils ne sont pas contents. Mais inspirer la seule crainte entraîne

systématiquement une démission ou une révolte. Voilà pourquoi

il faut injecter dans son discours et ses gestes un peu d’amour. Un ton

bienveillant, une ouverture à la discussion, une écoute, l’organisation

d’une fête, d’un tournoi de fin d’année, des remerciements…, autant

d’attentions qui les motivent à respecter les consignes, à faire un effort

et aussi s’impliquer dans la vie du club. Et augmentent d’autant

les chances que l’enfant s’épanouisse dans son sport.

Le dossier du mois

14

«O

L’INFLUENCE DES PARENTSIndispensables et problématiques à la fois, les parents constituent souvent un casse-tête à gérer pour les clubs.

Dans ce dossier, Foot Citoyen détaille cette relation ambigüe, compliquée, reliant parents, dirigeants, éducateurs et enfants.

Puis démontre, à travers des exemples d’initiatives et les discours de nos experts, qu’il est possible de valoriser et

d’optimiser l’apport humain extraordinaire qu'ils constituent.

Dossier réalisé par Pascal Stefani

Page 14: Foot Citoyen Magazine n°22

Propos recueillis par Pascal Stefani

PAROLES D’AMATEURSPrésidents, éducateurs, joueurs… Plusieurs acteurs du football chez les jeunes ont répondu à la

même question : comment se passe votre relation avec les parents ?

L’influence des parents

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 15 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

15

Fabrice DI NATALE

(responsable Benjamins, Avignon Foot 84)

«En Division Excellence, on n’a pas trop de

soucis avec les parents. Le problème vient

surtout avec ceux qui imaginent avoir un enfant

prodige, alors qu’il ne joue qu’en équipe 2. Ces

papas estiment que leur enfant mériterait de

jouer avec les meilleurs. Ils ne viennent pas

nous le dire directement, mais je le ressens, ça

se voit, et puis j’entends ce qui se dit. Ça créé

aussi quelques clans entre parents. Mais je

suis clair au départ : c’est l’éducatif qui prime,

et ils se feront plaisir en jouant à leur niveau.

Malheureusement, certains parents ne sont

pas objectifs, voire paranos. Ils sont trop dans

l’émotion. »

Romain(11 ans, joueur Benjamins)

«Mon père vient me voir un match sur deux. Ma mère, elle, ça ne

l’intéresse pas. Comme je suis défenseur, il se met derrière le but et me

donne des conseils. Par exemple, il me dit souvent de faire attention si

un attaquant arrive. Ça m’aide, et ça ne me gêne pas. Après le

match, on en reparle : si j’ai bien joué ou si on a gagné, il me

félicite. Si on perd, il me dit qu’il y aura d’autres matchs, que ce

n’est pas grave et que je jouerai mieux la prochaine fois. »

Serge GRAFF(président du FC Wettolsheim)

«En école de foot, l’ambiance est très bonne:chaque semaine, à tour de rôle, deux parentsamènent la collation, avec des jus, desgâteaux… C’est une tradition du club, et lesnouveaux parents la suivent à chaque fois. Çadonne un supplément d’ambiance. »

Samir(12 ans, joueur 13 ans)

«Dans mon équipe, il y a

beaucoup de parents qui nous

suivent. C’est du haut niveau,

alors ils mettent la pression. Ce

que je n’aime pas, c’est qu’ils se

permettent de nous faire des

remarques. Quand je les entends

s’énerver, si on joue mal, je ne

suis plus en confiance.»

José TORRECILLA(président du FCO Saint-Jean-de-la-Ruelle)«Les parents, c’est une des choses les plus difficiles à gérer. Nous sommes un club de quartier où ils ne suivent pas leurs enfants. Çadevient un vrai problème à partir des «13 ans». Ilssont laissés devant le stade et, après, c’est à nousde nous débrouiller. Par équipe, seuls un ou deux passionnés accompagne(nt) leur fils en déplacement. On va loin parce que nos équipesjouent toutes en Ligue et, du coup, on doit louer unminibus par formation… Le coût du transport esténorme pour le club : 20 000 euros par an ! Parcontre, chez les petites catégories, c’est trèsconvivial : les mamans amènent le thé, lesgâteaux, regardent la télé ensemble au clubhouse... Et en général, ils ne posent absolumentaucun problème sur le terrain. Ils sont très discrets.»

Sébastien SOREL(éducateur 15 ans, US Granville)

«J’ai rencontré, lors de plusieurs matchs, des parents qui prennent la place du coach.Mais chez nous, ça n’arrive jamais. Parce qu’on a fixé des règles très claires : je suis leseul responsable technique de l’équipe. Un parent dirigeant m’accompagne, il fait souvent la touche, mais c’est tout. Personne ne conteste mes choix. On peut en parler,je suis ouvert à toute discussion, et je tiens compte des avis extérieurs. Je suis disposéà m’expliquer, mais pas à me justifier. Je leur demande aussi de ne pas parler del’équipe devant les enfants. Tout est une question d’échange. Si un gars parle pendantle match,je vais lui dire d’arrêter ou d’aller en tribune. Et on en reparle à froid à la finde la rencontre. Avec les parents, il faut savoir communiquer. »

Eric MELLOUL

(éducateur Benjamins, OC Saleilles)

«Les parents sont de plus en plus durs à

cadrer. Ils sont assez nombreux à les

suivre, c’est un club de village, mais ils

ne vivent les matchs qu’à travers leur

enfant. C’est vraiment difficile. Les

entraînements se passent bien, mais aux

matchs ils se mêlent de tout, donnent

des conseils : «Fais comme-ci», « fais

comme ça»… Ça arrive aussi parfois

qu’ils crient contre les arbitres, même

s’ils ont de vraies limites. Et puis nous

leur imposons aussi cette limite. Je ne

me sens pas dépassé par ça, mais c’est

fatigant d’être toujours obligé de répéter

les mêmes choses.»

Page 15: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 16 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Propos recueillis par et Pascal Stefani

LE FC L’HÔPITALLUTTE CONTREL’ABSENTÉISME

Gabriel Robert (Dirigeant FCL’Hôpital, District de Moselle)

« Devant la faible participation des parents auxréunions d’information, nous avons décidé deles motiver à venir. Déjà, on fait une lettre àchacun pour les prévenir de la date, ainsi ona la certitude qu’ils seront au courant. À ceuxqui étaient absents, j’envoie un courrier pourleur dire que j’aimerais les voir pendant unentraînement, afin de comprendre pourquoiils n’ont pas assisté à la réunion. Cela mepermet ainsi de les rencontrer et de créer unlien. Aujourd’hui, nous avons environ 85% de présence. »

« L’année dernière, nous avons organisé,pour la première fois, une soiréed’accueil pour les joueurs et lesparents. On l’a faite au stade, en pleinair. Cette réunion a changé plein dechoses. Les parents ignoraient toutes lesrègles qui, pour nous, était évidentes.Beaucoup, par exemple, ne savaientpas que nous étions bénévoles ! Pourvous donner une anecdote de leurméconnaissance du club, un papa estvenu un jour me demander s’il avait ledroit de voir son fils jouer ! »

« Depuis cette journée, ils hésitent beaucoup moins à s’impliquer. Ils se proposent spontanément pour préparerle goûter des matchs, ce que faisaitl’éducateur avant ; les maillots sontmaintenant toujours lavés ; pour le Lotodu club, on leur demande de vendre 15Euros de tickets. Avant, ils faisaient latête, mais en leur expliquant à quoicela pouvait servir- payer des shorts,chaussettes, descendre le prix deslicences... -, ils ont compris. Nous

avons connu une affluence recordl’année dernière. En plus, les lots ontcette année tous été offerts par lesparents ! Peut-être étaient-ils réservésauparavant, ils ne voulaient pas nousdéranger… On s’est rendu comptequ’il fallait juste leur parler pour enarriver là. »

AU AC PLOUZANÉ,

ÉMARGEMENTET DIVERTISSEMENT

Gilles Boulouard (dirigeant AC Plouzané, District Finistère Nord)

« Nous sommes une grosse structure, avec 600 licenciés.Auparavant, les parents déposaient leur(s) enfant(s) au parking,n’étaient jamais en contact avec les éducateurs, ne savaient pasde quelle manière on s’occupait de leur enfant... Ça ne pouvaitpas continuer comme ça. Il y a quatre ans, on a donc créé un système d’émargement. Les parents des Débutants et Poussinsdoivent, désormais, venir signer une feuille et attester ainsi deleur présence à chaque entraînement et à chaque match. Unbénévole les accueille dans le vestiaire pour les faire émarger.Ça nous permet, d’une part, de vérifier l’assiduité des enfants etde savoir, d’autre part, s’ils seront là (les enfants, mais aussi lespapas et mamans) le samedi, et ça responsabilise les parents.Ils doivent comprendre que l’absence d’un gosse peut empêcherl’équipe de jouer, s’ils ne sont pas assez. Aujourd’hui, lesparents et les membres du club se connaissent. Cela peut enpousser certains à devenir dirigeants, éducateurs ou même, onpeut toujours rêver, même sponsors. Avant, certains n’osaient pasfranchir la porte du vestiaire. Depuis, il y a également beaucoupmoins de souci pour le covoiturage. » On implique les parentslors de la journée de clôture de la saison. Les Débutants font unplateau, avec des jeux d’éveil, de motricité, des petits jeux et,pour terminer, des matchs. Les parents regardent et, ensuite, ils remplacent leurs enfants et font le plateau à leur tour… Et, pendant ce temps, les Débutants sont supporters. On fait pareilavec nos Poussins. Pour les Benjamins, les parents jouent un matchcontre leurs enfants et avec les éducateurs. C’est franchement marrant. Ça se finit autour d’un pot très convivial, et toute cetteambiance suscite des vocations. Durant cette journée, les parentss’aperçoivent de notre travail. Ça valorise le rôle du club. Des liensse créent naturellement et entraînent beaucoup moins de refusquand on sollicite les parents par la suite. »

L’influence des parents

LES INITIATIVES CRÉENT LE CONTACTSi aucune solution miracle n’existe dans la gestion des parents, il est au moins possible d’améliorer la

situation. Exemple avec ces trois clubs, le FC L’Hôpital, le FC Labegude et l’AC Plozané, qui ont mis en place des initiatives basées sur le même principe : créer un premier contact avec les parents.

J’ENVOIE UNCOURRIER AUX

PARENTSABSENTS À LA

RÉUNION.

DEPUISCETTE

JOURNÉE,LES PARENTS

HÉSITENTBEAUCOUP

MOINS ÀS’IMPLIQUER.

ON IMPLIQUE LES PARENTS LORS DE LA JOURNÉE DE

CLÔTURE DE LA SAISON.LES DÉBUTANTS FONT

UN PLATEAU, PUIS C’ESTAU TOUR DES PARENTS...

C’EST FRANCHEMENTMARRANT... ET ILS

S’APERÇOIVENT AINSI DE NOTRE TRAVAIL...

16

FC LABÉGUDE, LA RÉUNIONQUI CHANGE TOUTJean-Michel Gros (éducateur «13 ans », FC Labegude, Comité Drôme Ardèche)

Page 16: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 17 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

uelle peut-être l’influencedes parents sur leurenfant ?

C’est très compliqué, surtout à

l’adolescence : on n’a pas envie d’être lâché par

ses parents, mais on n’a surtout pas envie d’avoir

des parents qui s’immiscent dans le groupe et

donnent leur avis. Cela dépend des jeunes, mais

certains peuvent avoir envie d’abandonner parce

que ça ne leur appartiendra plus en propre.

D’autres vont se sentir humiliés, critiqués, en plus

parfois devant les autres.

Le jeune peut-il penser que son pèrea plus raison que son entraîneur ?

Il est mis en porte-à-faux parce qu’il va se

demander qui a raison : son père ou son

entraîneur ? Il ne sait plus à qui faire confiance.

Le parent peut avoir une discussion avec

l’entraîneur, mais ce parent ne doit pas dire

« Moi je… ». Quand l’entraîneur entre en jeu,

c’est à lui seul de parler. A l’école, les parents

ne disent pas au prof ce qu’il a à faire.

Quelles raisons poussent lesparents à s’immiscer autant ?

On ne sait plus si l’enfant joue pour son plaisir

ou s’il veut faire plaisir à ses parents. Il y a

aussi les parents extrêmement directifs qui ne

veulent pas laisser d’autonomie à leur enfant et

qui vont faire preuve d’autorité, voire l’humilier

devant les autres pour garder la maîtrise de la

situation. Ils se disent, tout d’un coup, qu’ils

perdent leur enfant parce que leur sentiment

est qu’il grandit et que, peut-être, il les

abandonne. Dans ce cas-là, certains d’entre

eux vont réagir par une « sur-maîtrise » en

affirmant, à leur manière, qu’ils sont les

parents, qu’eux seuls peuvent décider pour leur

enfant et qu’ils savent ce qui est bon pour lui

et ce qui ne l’est pas.

Quelle méthode peut suivre un éducateur ?

Pour prévenir ces comportements, tenir une

réunion d’information au début de la saison

est une bonne chose. En cas de problème

ponctuel avec un parent, l’éducateur doit

établir un dialogue direct, voir quel sens tout

cela a pour lui. Vis à vis d’un adolescent, c’est

très important de ne pas parler dans son dos.

Sinon, il peut se sentir menacé. Comme son

but est de s’affranchir, il faut le considérer : on

parle de lui, donc on le fait en sa présence.

Parce qu’un père à qui on va dire d’arrêter

d’intervenir peut se sentir exclu et être blessé.

Il peut transformer les paroles de l’éducateur

dans son propre intérêt avant de les relayer à

son fils. Tout dépend également de la manière

avec laquelle l’éducateur présente les choses.

Ses remarques ne doivent pas être une mise à

pied du parent.

L’AVIS DU PSY

Alexandra CLAROU (Psychothérapeute )

« QUI A RAISON ? SON PÈRE OU SON ENTRAÎNEUR ? L’ENFANT NE SAIT

PLUS À QUI FAIRE CONFIANCE ! »

Et les parents dans tout ça ? Premiers responsablesde l’éducation de leur enfant, quand ils confient leur progéniture à un club, ils sont également en droitd’avoir des attentes. Le club du PUC a su y répondre.

Ça y est, le petit a l’âge de pratiquer son sport favori. Un nouveau

dilemme se pose pour les parents : dans quel club vont-ils

l’inscrire? C’est lemoment de de bien cerner ses attentes envers la

structure qui va l’accueillir. Certains souhaitent que l’on occupe leur

enfant le mercredi et le samedi, rien de plus. Pour d’autres, en quête

de gloire par procuration, l’aspect sportif est -déjà- primordial.

Nombreux sont encore les parents qui souhaitent que le club soit avant tout un lieu d’épanouissement pour

leur petit. C’est le cas du PUC, le club universitaire parisien partenaire de Foot Citoyen, dont la politique

éducative forge sa solide réputation… Yves y a succombé : «Après le premier jour, mon enfant m’a dit :

«C’est comme si j’avais été accueilli dans une famille.» Et j’ai ressenti la même chose vis-à-vis

de moi. Tout était très sympa : leur état d’esprit, la gentillesse de leurs propos, leur chaleur

humaine…» Il apprécie davantage encore que ces valeurs se prolongent sur le terrain :« Il y a de la

discipline, mais surtout ils s’amusent beaucoup. C’est important. Lui est ravi. Il est très timide,

sensible, émotif. Je savais que s’il y avait des gestes d’agressivité contre lui, il l’aurait mal vécu.

Mais là il n’y a rien de tout ça. J’avais aussi regardé ce que proposait un club voisin : ils s’insultaient

tout le temps, et on les laissait faire. » Les autres parents évoquent les mêmes priorités, «qu’il y ait un

bon esprit » pour Mathilde, « que l’enfant s’épanouisse dans son milieu sportif, grâce à de bons

éducateurs.» pour Patrice. Benoît, lui, sait l’apport qu’une telle activité bien encadrée peut avoir dans

l’évolution de son fils : «Intégrer un club doit être une démarche éducative. Je veux que ça lui apprenne

la vie en groupe. C’est le cas ici, j’ai vu qu’il y avait de vrais éducateurs. C’est important : je l’ai mis

aussi dans un club d’échecs, et les adultes ne leur apprennent rien et les laissent se débrouiller. Il va

devoir arrêter. » Le choix du club n’est donc pas à prendre à la légère et doit surtout se faire dans le seul

intérêt de l’enfant. Ceux du PUC pourront un jour remercier leurs parents, car comme le dit Mathilde,

«ce genre de club est parfait parce qu’il laisse plus tard des souvenirs indélébiles.»

LES ATTENTES DES PARENTS

Dossier : L’influence des parents

Q

Textes : Pascal Stefani

17

Page 17: Foot Citoyen Magazine n°22

Á Ingré, Pascal Stefani (Textes) et Cyril Fussien (Photos)

’est un match comme les aiment les adultes.

Un derby, contre le club phare de la région, dans la

plus haute division du championnat. Oui, mais voilà,

ce ne sont pas des adultes qui jouent, mais des

Benjamins. Le FCM Ingré accueille l’US Orléans, en

Division Elite, et les petits locaux sont plus impressionnés que

galvanisés par la réputation et la qualité de l’adversaire. Le long de

la main courante, pas moins de quarante parents tentent de les

soutenir. Dans une bonne ambiance, ils encouragent leurs petits

Jaunes à défendre et s’enflamment un peu quand ils s’approchent

de la ligne médiane. Rarement, donc. Puis, au fil de la rencontre,

deux ou trois papas changent de registre. Sûrement déçus par

l’apathie générale de l’équipe, ils décident d’« aider » le coach en

donnant leurs propres consignes. Les joueurs, déjà bien perdus,

entendent alors des conseils tels que « Attention, dégage ! »,

« Replace toi ! », « Attaque ! » ou « Mais non, applique toi ! » Pour les

réveiller, on leur dit «Bats-toi », «Attaque-le», « Il ne passe pas ! », ou

«Rentre-lui dedans».. Un vocabulaire pas tout à fait adapté à des

jeunes de cet âge. Comme prévu ça n’arrange rien, et un jeune fait

même signe à son père de se taire. Une constante dans ce match :

seules les mamans, nombreuses, n’ont cessé d’encourager les petits.

VOS ENFANTS ONT «UNE CHOSE» À VOUS DIRE...

La quarantaine de parents d’Ingré, dans le District du Loiret, venue assister au match de leurs enfants Benjamins, sont plutôt disciplinés et positifs. Il suffit pourtant que quelques papas élèvent la voix pour que l’on

n’entende plus qu’eux. C’est dommage car leurs enfants n’aiment pas qu’on leur parle sur le terrain...

C

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 18 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

L’influence des parents

18

Page 18: Foot Citoyen Magazine n°22

MON MARI ATENDANCE À LUI

METTRE LA PRESSION. JETEMPORISE...

Sabine, maman de Bastien : «Chaque parent

a son tempérament. Certains sont discrets, et

d’autres ont envie de donner leur avis. Pour ceux-

là, on ne dit rien mais on n’en pense pas moins. Je

pense que c’est plus au coach de donner les

consignes, pas à nous, sinon le gamin ne sait plus

qui écouter. En général, mon mari parle avec mon

fils, en rentrant à la maison. Dès fois je temporise

parce qu’il a tendance à lui mettre la pression, lui

dire qu’il n’a pas assez couru, qu’il s’est retenu,

comme aujourd’hui. Dans ces cas-là je dis qu’il a

bien joué, qu’il a fait de son mieux… Ça peut

prendre de grandes proportions. Une fois Bastien

a demandé à son papa de ne plus venir le voir,

parce qu’il était fâché par rapport à ce qu’il lui

disait. Avec son tempérament, si on insiste trop il

se braque et ne fait plus rien. »

Bastien : « Ça me fait plaisir qu’ils viennent me

voir. Ma mère dit souvent que ce n’est qu’un jeu.

Par contre je n’aime pas trop que mon père parle

sur le terrain. Quand on perd, il parle souvent, ou

il crie. Ça me gêne quand il me dit par exemple

« vas-y attaque la balle », ça me met la pression.

J’ai l’impression que je n’y arrive pas. Quand on

rentre, il veut toujours en parler. J’aime bien

savoir ce qu’il pense, ça me fait progresser. Mais

quand c’est en dehors du match. »

QUAND MONPÈRE ME PARLE,ÇA ME SAOULE...

Malamine, père de Maël : «Je le suis toutes les

semaines. J’aime bien parler, replacer, je le fais

tout le temps. Je donne des conseils, à tous, je ne

me cantonne pas qu’à mon fils. S’ils sont mal

placés, ou s’ils font des mauvaises tactiques, je

les conseille. Le coach a neuf joueurs, et il ne

peut pas avoir les yeux sur tous ! Maël, mon fils,

a l’air un peu mou, donc j’insiste auprès de lui.

Individuellement il est très fort, et je veux qu’il le

montre. Je le lui dis mais il n’aime pas ça, alors

dès fois je me tais. »

Maël : « J’aime bien que mon père soit là, mais

je n’aime pas quand il crie. Je n’aime pas quand

on parle, qu’on me dise quoi faire, que ça soit

lui ou un autre d’ailleurs. Sinon je m’y perds, ça

me déconcentre. Je lui ai dit, et il m’a promis de

ne plus rien dire… Mais il parle encore ! Ça me

saoule ! »

JE LUI DONNE DES NOTES...

ÇA LE MOTIVE !

Stéphane, père de Morgane (US Orléans) :

«J’étais éducateur, et je suis mon fils depuis que

j’ai arrêté. Tous les parents sont fiers de ce que

font leurs gamins, on vit davantage les choses.

Mais je sais que quand j’étais éducateur, je

demandais aux parents de seulement encourager

les enfants. J’essaye de le faire à mon tour, même

si c’est parfois tentant de parler. Aujourd’hui, il a

du me regarder 72 fois dans le match pour se

rassurer. Mais je ne dis rien... Après le match, je

lui donne des notes. C’est ludique et ça le motive.

Je connais des parents qui donnent de l’argent à

leur enfant s’il met un but... Aucun intérêt. »

Morgane : «J’aime que mon père m’encourage. Il

est honnête dans son jugement. J’aime bien qu’il

me mette des notes. La dernière fois j’ai eu 4 et ça

m’a saoulé. J’essaye d’avoir une meilleure note la

fois d’après, ça me motive.»

Olivier, tonton de Alexis

« Le problème, c’est d’entendre certains

ronchonner autour. Les gosses attendent la fin

de la semaine pour s’amuser, pas pour

entendre ça. J’ai plus de souvenirs, quand je

jouais, des parents qui gueulaient que de ma

joie de jouer. Dès fois je les plains, même si

c’est loin d’être le pire club à ce niveau. Même

s’ils font des erreurs, il faut essayer de faire

ressortir le meilleur. »

MÊME S’ILS FONT

DES ERREURS, IL FAUT

ESSAYER DEFAIRE

RESSORTIR LE MEILLEUR.

L’influence des parents

District du Loiret

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 19 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

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Page 19: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 20 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Propos recueillis par Frédéric Hamelin et Pascal Stefani

absent, le passionné et leréfléchi« Il y a le plus souvent trois statutsde parents. D’abord, celui qui ne

vient jamais et se désintéresse dufoot. Pour lui le club est une garderie, ce que jeconçois tout à fait : s’il met son gamin au foot,c’est aussi pour qu’il soit occupé et que lui puisse avoir du temps libre. Ce type de parent estpeut-être le moins pénible, mais il ne nous aidepas à avancer. À l’autre extrême, il y a le parentqui est toujours là, à fond, mais qui prend trop deplace. Il se prend pour l’entraîneur, il crie sur lesenfants, l’adversaire, l’arbitre… Il est difficile àgérer, mais on a aussi besoin de ces parentsassidus. Dans la troisième catégorie, on trouve leparent plus réfléchi. Lui est là pour aider au fonctionnement du club et garde sa place deparent et de spectateur. Malheureusement, ils nesont pas les plus nombreux. Avec les parents, onse doit d’avoir une gestion fine, parce que nousavons aussi besoin d’eux. »

Jouer à travers son fils…«Les parents ont souvent une telle attente enversleur enfant… Peut-être sont-ils frustrés d’avoirloupé leur carrière, et pensent qu’il va devenir unjoueur extraordinaire. Cette réaction nous amèneà entendre, sur les bords des terrains, du vocabu-laire inapproprié pour l’âge des gamins. Desphrases qui relèvent du langage guerrier, tellesque ‘‘Bats-toi !’’... On a également des problèmesavec les enfants qui jouent pour leur père, quivont sauter dans ses bras après avoir marqué unbut. Le contraire est aussi vrai : s’il rate un geste,il va regarder son père d’un air craintif, en rentrantles épaules. Ça ne me plaît pas, parce que lesenfants, qu’ils réussissent ou se loupent, doiventse marrer ou ‘‘pleurer’’ avec leurs copains. »

Le problème du double discours« Il y a souvent un problème de double discours.Même s’ils ont joué au football, les parentsn’ont pas les qualifications pour savoir ce qu’ilfaut faire et dire aux enfants, et ce que nous,éducateurs, attendons d’eux. Par exemple, oninterdit les tacles à nos débutants. Parce qu’ilsn’ont pas un contrôle suffisant de leur corps,puis parce qu’on estime qu’un footballeur doitapprendre à défendre debout. En match, desparents leur demandent pourtant de tacler. Leurdiscours va alors à l’encontre du nôtre, et c’estvalable sur plein d’autres choses. »

Intervention systématique« En tant que responsable de plateau deDébutants, j’ai la liberté de me déplacer sur tousles terrains. Je vais donc voir les éducateurs, et j’en profite pour faire le tour des parents. Si jevois qu’ils sortent de leur rôle, s’ils sont trop présents ou si je les vois engueuler leur gamindans mon dos, j’interviens tout de suite. Je leurexplique que les gamins sont là pour jouer entreeux et avec leur éducateur. Quand c’est la

première fois, je le dis gentiment, mais si ça serépète je suis un peu plus sec. Dans les catégoriesplus hautes, c’est plus difficile d’intervenir pendant la rencontre, sauf si ça prend des proportions qui ne sont pas acceptables. »

Trouver la bonne distance« Il est nécessaire de discuter avec les parentspour prévenir ou résoudre des problèmes decomportements. Tout dépend des rapports quevous construisez avec eux : il faut savoir garderune bonne distance, tout en leur donnant enviede participer à la vie associative. Si on se tapedans le dos la première fois qu’on se voit, quel’on prend l’apéro après les matchs, c’est pluscompliqué ensuite de faire passer son message.Je peux aller plus loin dans la convivialité avecdes parents dont je sais qu’ils vont rester à leurplace. Avec d’autres ce ne sera pas possible,parce qu’ils vont tout confondre et se permettretrop de choses. Il faut savoir parfois rester‘‘froid’’, sans non plus que ça soit repoussant. »

Une réunion franche et directe« Lors de la réunion de début d’année, j’emploieun ton assez ferme. Je présente d’emblée mon statut et celui des parents : je leur explique clairement ce qui est admis et ce qui ne l’est pas.Sinon on leur laisse un espace et ensuite on se faitdéborder. Ils doivent sentir qu’il y a quelqu’un quileur fera barrage s’ils dérapent. Je préfère qu’ilspensent au début que je ne suis pas sympa, si çapermet que tout se passe bien sur le terrain. Jegagne en temps, ça m’évite d’intervenir ensuite.Le rapport que vous installez avec les parents endébut de saison joue sur son comportementMalheureusement, la réunion n’est pas obligatoire,et généralement ce sont ceux qui n’y viennent pasqui posent problème par la suite.»

Vestiaire interdit«En Débutants, nous avons interdit l’accès auxvestiaires aux parents. Sinon c’est un foutoir paspossible. Et puis j’aime bien que les enfantssoient seulement avec nous. Ça fait aussi partiedu rôle de l’éducateur de leur apprendre às’habiller, faire leur lacet… Je n’aime pas qu’ilssoient assistés. Si l’enfant est obligé de demanderà chaque fois à l’éducateur pour faire son lacet etqu’il voit, à côté, ses copains y arriver seuls, il vafinir par le faire lui-même. Ça le rend autonome,ça lui apprend à communiquer aussi. Pour moi levestiaire est réservé à ceux qui jouent au foot.C’est important pour eux de ne pas toujours avoirle parent comme intermédiaire. »

La gestion des parents

« SI LES PARENTS SORTENT DE LEUR RÔLE, J’INTERVIENS TOUT DE SUITE.

QUANDJ’INTERVIENS UNEPREMIÈRE FOIS, JELE DIS GENTIMENT.SI ÇA SE RÉPÈTE,JE SUIS UN PEU

PLUS SEC.

20

EXPERT «TERRAIN»

AlexisDELAFARGUE

(responsable Débutants de l’AC Boulogne-Billancourt,

District des Hauts-de-Seine)

Alexis Delafargue, 35 ans, a pourhabitude de clarifier les rôles de chacun dès le début de saison :

les éducateurs s’occupent du terrain et les parents laissent

leurs enfants tranquilles. Une méthode directe qui évite

pas mal de débordements.

L’

L’IMPORTANCE DE

LA PREMIÈRE ANNÉE

« En tant que responsabledes Débutants, “mes”parents viennent, en général(ils peuvent avoir un autreenfant déjà licencié), pour lapremière fois au foot. J’aidonc un gros rôle d’éducationà faire. Je dois leur expliquerle fonctionnement du club,les règles de base. C’est duboulot en moins à faire pourles années suivantes et, petità petit, ils rentrent dans lemoule. Il ne s’agit pasd’éduquer les parents, maisjuste de leur transmettre nos

règles de vie. »

Page 20: Foot Citoyen Magazine n°22

LE 11 IDÉAL DE LA GESTION DES PARENTS

Pour améliorer la communication entre les parents et les membres du club, nous avons composé une équipe mixte, en... 4-4-3 :

quatre gardien-défenseurs-éducateurs, quatre milieux-dirigeants, et trois attaquants-parents. Maintenant, jouez ensemble !

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Les parents : ne pas mettre de pression sur son enfantQuel que soit l’âge, le foot doit rester un plaisir avant tout.En catégories de jeunes, cela paraît encore plus évident.Pourtant, des parents font subir leur soif de victoire et dereconnaissance à leur enfant. Certains imaginent même,dès les premières frappes du petit, détenir un prodige.Halte à la pression ! Sans plaisir, 100% des enfants perdentleurs moyens.

Dirigeants : l’importance des DébutantsLes habitudes, bonnes comme mauvaises, ne se perdentpas. Ainsi, si les parents entendent un discours clair etcohérent dès la catégorie Débutants, le même messagepassera d’autant mieux dans les catégories suivantes.Cela prouve à quel point il est important qu’un éducateur compétent soit en charge des petites catégories.

Les parents : ne pas intervenir pendant les matchs Ah que c’est tentant de donner des conseils à son filspendant le match… Un parent, surtout s’il est ancienfootballeur, «sait» ce qui est bon pour sa progéniture. Dumoins c’est ce qu’il pense. Malheureusement, l’enfantentend un double discours : celui de son éducateur etcelui de ses parents. Il est préférable qu’une seule personne ne lui parle, et cette personne c’est le coach !

Les parents : se porter volontaire pour les déplacementsCe sont souvent les mêmes parents, les plus assidus, qui accompagnentles enfants en déplacement. Les éducateurs aussi doivent emprunter leurpropre voiture. À la longue, ça coûte cher, et ce n’est pas très équitable.Avec un soupçon de communication, d’organisation et de bonne volonté,les parents peuvent se répartir les voyages tout au long de la saison.

Éducateurs : être ouvert à la discussionS’ils n’ont pas le droit de parler de l’équipe devant les enfants, les parents ne doivent pas pour autant se sentir exclus. L’éducateur doit être ouvert à la discussion. L’avis d’un parent peut-être intéressant, et expliquer son fonctionnement peut également éviterles malentendus. Mais si l’éducateur peut s’expliquer,il doit faire attention à ne pas se justifier.

Dirigeants : organiser des événements festifs Le club de foot doit être un endroit convivial où jeuneset adultes se font plaisir. L’organisation de quelquesfêtes, telles qu’un Loto, un tournoi du club ou bien unbarbecue, ne peut que renforcer les liens entre tousles membres du club. Parents souriants n’embêtentpas leurs enfants !

Dirigeants : organiser des réunions d’informations En début d’année, il est très bénéfique d’organiser une réunion par catégorie de jeunes. C’est l’occasion d’expliquer à tous le fonctionnement du club et de définir clairement les attentesenvers les parents. Employer un ton ferme et sérieux à cette occasion permet d’attirer leur attention sur ce point. En milieud’année, le club peut faire un nouveau point avec les parents.

Éducateurs : trouver la bonne distanceLe danger est de vouloir créer une complicité très rapidementavec tous les parents, pour qu’ils se sentent en confiance.Certains peuvent croire que cette relation amicale leur donnele droit de se mêler de la gestion de l’équipe. Mieux vaut quele coach force sa nature et se montre un peu distant avectout le monde en début de saison, et découvrir les gens au fildu temps.

Éducateurs : intervenir en cas d’écart Le terrain appartient aux joueurs et à l’éducateur. Alorsquand les parents viennent s’immiscer dans la vie del’équipe ou sortent de leur rôle de spectateur, le coach sedoit d’intervenir. Si l’écart de conduite est important, il estpréférable de les calmer aussitôt. Sinon, attendre la fin dumatch ou l’entraînement suivant pour en discuter.Éducateurs : adopter le bon ton

Si le parent fait un écart pour la première fois, l’éducateur doits’entretenir avec lui gentiment, en lui expliquant les raisons de son intervention. Si le coach est brusque dès le début, le parent risque de se braquer. Mais quand la «faute» serépète, il ne doit pas hésiter à adopter un ton plus ferme, pourbien faire comprendre qu’il sera intransigeant sur ce point.

Dirigeants : créer le contactPlus la relation entre le club et les parents est bonne, et moins ces derniers auront envie de porter préjudice à la structure qui s’occupe deleur enfant. En réservant aux parents un bon accueil, en allant vers eux eten créant un premier contact pendant les entraînements ou les matchs,les dirigeants leur montrent qu’ils font aussi partie du club.7

La gestion des parents

21

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 21 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Page 21: Foot Citoyen Magazine n°22

«RESPECTER DES RÈGLES DE VIE POUR Y ARRIVER ! »Au cours d’une conférence de presse à

La Jonelière, Monsieur Waldemar Kita,

président du FC Nantes, a expliqué les

raisons qui ont poussé son club à soutenir

l’action de Foot Citoyen... Extraits.

« Il est important d'aider le football amateur et celui

de la "rue". Pour cette raison, nous souhaitons appuyer

l'action de Foot Citoyen. Dans la vie, il est important de

respecter certaines règles pour y arriver. Les vraies

valeurs du sport, telles que le respect de l’autorité, des

Lois, l'abnégation ou le goût de l'effort, sont éducatives.

C’est pourquoi, il est de notre devoir, pour nous clubs professionnels

de football, d’aider des initiatives telles que celle-ci, car outre la passion et la compétence sur le sujet de Didier

Roustan et de son équipe, le football français, qu’il soit amateur ou d’élite, a besoin d’outils pédagogiques pour

pouvoir rendre les jeunes plus forts et plus citoyens. Le FC Nantes est donc très fier de pouvoir, comme Sedan,

Saint-Etienne et Montpellier ont pu le faire cette saison, aider, à son tour, l’association Foot Citoyen ! »

Portfolio FC NantesDe nos envoyés spéciaux à Marseille, Jérôme Perrin (textes) et Frédéric Gameiro (photos)

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 22 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

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LE JEU D’APPUI DES «CANARIS»Le FC Nantes est décidément un club solidaire. Sur le terrain, tout d’abord, où son fameux jeu «à la Nantaise» a construit sa

légende sur les bases du collectif. En dehors des pelouses, les «Canaris» savent également se montrer généreux. Samedi 6 décembre dernier, derrière le président Waldemar Kita, très sensible à la cause défendue par notre association,

le club de Loire-Atlantique et ses supporters ont ainsi soutenu Foot Citoyen lors du match contre le leader lyonnais, en nousallouant, notamment, à l’occasion de cette rencontre un don, scellant officiellement le partenariat entre le le club nantais

et Foot Cityen. Après la conférence de presse, les propos profonds de sens du premier des dirigeants nantais,l’échauffement des joueurs sur la pelouse, habillés du T-shirt Foot Citoyen, confectionné pour l’occasion, et un superbe

coup d’envoi donné - de l’extérieur du pied droit - par Didier Roustan, président de l’association, il est temps de remercier ce club à part, pour son aide et son accueil des plus chaleureux, qui ont d’ailleurs été récompensés le soir même,

puisque Foot Citoyen a une nouvelle fois porté chance à ses généreux donateurs…

Photos : FC Nantes

WALDEMAR KITA

Page 22: Foot Citoyen Magazine n°22

RADIO

Radio

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 23 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

23

LA MIXITÉ SOCIALELe PUC, partenaire et « club pilote » Foot Citoyen, nous nous devions de recevoir

les deux têtes pensantes de cette institution du football francilien : Daniel Morvan et

Jean-Marc Lafont. En compagnie de Didier Roustan, Frédéric Hamelin, Sébastien

Morel et Corentin Coëplet, tour d’horizon d’un « grand » club, parisien et universitaire,

et zoom sur sa philosophie la mixité sociale dans le football.

Didier Roustan : Aujourd’hui, nous accueillonsDaniel Morvan, le président de la section football duPUC, c'est-à-dire du Paris Université Club, et Jean-Marc Lafont, le vice président. C’est un vieux clubparisien, ça, le PUC ?Daniel Morvan : En effet, déjà plus d’un siècleDidier…Didier : Comment êtes vous arrivé là Jean-Marc ?Jean-Marc Lafont : J’ai rejoint Daniel, il y a unedizaine d’années. Je suis d’abord venu au PUCpour accompagner mes enfants… Et, finalement,je suis tombé dans le «piège». Daniel m’a proposéle projet de la section éducative du PUC et ça m’aséduit. Je suis ravi de faire partie de l’équipe dirigeante de cette section pour m’occuper de tousces jeunes.Didier : Et oui, très souvent, à la tête de ses clubs,il y a des gens qui ont grandi dedans et ,parfois, d’autres qui viennent de l’extérieur. Maisaussi des personnes qui ne sont pas fans de football et qui se laissent prendre au jeu. Le ballon rond est une histoire humaine et, autour deça, il se passe beaucoup de choses.Jean-Marc : C’est un peu comme pour toutes les associations, on y arrive par hasard et on se prendau jeu. Parfois, avec une certaine motivation dansla discipline en question mais, finalement, de fil enaiguille, on y voit l’occasion de retrouver des amis,

et de faire avancer les choses. Ça rentre dans un projet de vie, on commence à faire des suggestions, puis on fait en sorte de s’y impliquerensuite... C’est le travail de chaque bénévole, ondevrait d’ailleurs plus les mettre en valeur.Sébastien Morel : Le PUC, c’est aussi 35 nationalitéset origines différentes...Jean-Marc : Qu’ils soient Blancs, Jaunes ou Noirs,ils ne portent qu’une seule couleur, celle du club, leViolet. Déjà, ça résoud le problème de toutes cesdiversités, de toutes ces cultures. On travailleautour de leur passion, le football. Les enfantsprennent du plaisir et, au fur et à mesure qu’ilsgrandissent avec nous, on essaye de leurapprendre d’autres valeurs que le jeu, mais quisont très trés liées : le respect des Lois, l’esprit dujeu, la citoyenneté. On se rend compte alors que,parmi ces enfants aux origines sociales différentes,certains en échec la semaine à l’école peuventconnaître la réussite le week-end. Notre but, c’estqu’ils arrivent à avoir la même réussite en semaineque le week-end. Corentin Coëplet : Ce qui est intéressant, c’estqu’au PUC, il y a aussi une mixité sociale au seindes éducateurs, ça apporte aux jeunes une autrevision de l’éducation...Didier : Ça ne pose pas de problèmes à certains parents que leur gosse soit sous la responsabilité d’éducateurs d’autres... origines, onva dire.Daniel : On peut imaginer que ça en gratte certains… Mais…Didier : Je trouve que c’est intéressant car pourceux que ça gratte, et bien c’est l’occasion de leurmontrer que la compétence, la gentillesse,l’engagement, etc... ne sont pas uniquement uneaffaire de faciès...Daniel : La compétence d’un éducateur est incontournable. A un moment on se moque de sa couleur de peau, ce qui compte c’est ce qu’il faitsur le terrain. On est très attachés à sa qualité technique et on essaie de trouver des éducateursqui possèdent une certaine éthique… Zap, zap, zap...

Didier : Nous sommes en relation avec le Districtdes Flandres et, plus exactement, l’éducateur duRC Bois Blanc, Eric Fache. Bonjour Eric, alors il nefait pas trop froid car les températures sont tombées ?Eric Fache : Et bien si, c’est d’ailleurs pour çaqu’on avait un plateau de prévu et qu’il a été annulé.Sébastien : C’est dommage pour les petits, maispouvez-vous nous expliquer ce qu’est un plateau Débutants ?Eric : Le plateau Débutants, c’est toute une organi-sation que le District met en place une fois parmois, voire tous les deux mois selon les secteurs. Fréderic Hamelin : Il y a une particularité dansvotre club, que nous avions observé avec Foot-Citoyen, c’est que les éducateurs sont ici desjeunes du club et du quartier également.Didier : Il y a quand même une ouverture vers desgens venus d’ailleurs ?Eric : Bien sur, on est ouvert à toutes les personnes. Mais on a aussi une relation privilégiéeavec les jeunes puisqu’on peut les croiser dans lequartier… Fréderic Hamelin : Qu’est ce que ca leurs apporteaux jeunes d’encadrer des petits ? Eric : Du civisme. C’est un plus et ça les investit.Par exemple, si on fait un match de Poussins etqu’il manque un arbitre de touche, on trouverafacilement un «13» ou «15 ans» pour tenir ledrapeau. Il y a une réelle solidarité.Zap, zap, zap...

Didier : En compagnie de Jean-Noël Gaillard, président de L’US Écouen-Ezanville, du District du Val-d’Oise, qui joue en Promotion d’Honneur,mais qui a surtout un match de Coupe de France,un 7e tour contre Le Marcq AS, une équipe de CFA2.Bonjour président. Vous attendez combien de spectateurs ?Jean-Noël Gaillard : On a la chance de bénéficierdu terrain de Saint-Leu-la-Forêt, qui permet d’avoirenviron 1500 places assises et autant debout. Jepense qu’il y aura entre 1500 et 2000 personnes.Didier : Et la Coupe de France, tout le monde enparle, même les gosses ?Jean-Noël : Ce qui est extraordinaire, c’est que çaresserre encore un peu plus les liens au sein duclub car tous nos enfants sont derrière l’équipephare. Tous les gamins vont supporter le club.Didier : Merci infiniment et bonne chance (NDLR :le petit David battra le Goliath 1-0). On va terminercette émission avec une dernière question à nos amis du PUC. Quelles sont les plus grosses difficultés ?Jean-Marc : Les plus grosses difficultés, c’est qu’onmanque de bras. Le problème n’est pas spécifiqueau PUC, on voit les mêmes choses sur tous lesautres terrains. On manque de bénévoles. Le mondeamateur est une image du monde civil, on a de plusen plus de mal à mobiliser les parents.

ON ESSAYE DETROUVER DES

ÉDUCATEURS QUIPOSSÈDENT UNE

CERTAINEÉTHIQUE (Daniel Morvan)

LE MONDE AMATEUR ESTUNE IMAGE DU

MONDE CIVIL, ONA DE PLUS EN

PLUS DE MAL ÀMOBILISER LES

PARENTS (Jean Marc Lafont)

QU’ILS SOIENTBLANCS, JAUNES

OU NOIRS, ILS NE PORTENTQU’UNE SEULE

COULEUR, CELLE DU CLUB :

LE VIOLET.(Jean Marc Lafont)

LE ZAPPING FOOT CITOYEN

Page 23: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 24 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Textes Jérôme Perrin / photos Bàlint Pörneczi et Benjamin Krnic

Le tournoi de Foca

24

ai 1992, les bombes tombent sur Sarajevo faisantdes centaines de milliers de victimes, Mai 2008,des jeunes venus de toute l’Europe s’éclatent balleau pied à Foca. « Dobrodosli u Focu 08 ! »

(« Bienvenue à Foca 2008 »). Les temps ont changé,même si les stigmates d’un conflit qui a duré plus de 3 ans(d’avril 1992 à décembre 1995) se lisent encore sur les murs dela ville. Aujourd’hui la Bosnie revit. La nouvelle génération, qui

n’a que très peu connu la guerre, découvre une vie « normale ».La lueur de l’espoir semble avoir remplacé celle qui se reflétaitjadis dans la lunette des snipers. On peux même rejouer au footen toute tranquillité… Et comme un jeune Bosniaque de 15 ansvit son amour du ballon de la même manière qu’un jeuneAllemand ou un jeune ~cossais, on se dit que, finalement, on pour-rait jouer ensemble. Et comme montrer, c’est aussi partager et fairedécouvrir, voyons un peu, ballon au pied, ce qu’est devenue la

M

Il est des reportages pour Foot Citoyen qui ont une saveur particulière. Lorsque la Commission Européenne nous a invitésà un tournoi international de street-football (du foot de rue, à 5 contre 5) en… Bosnie, on se doutait que quelque chose

d’un peu particulier nous attendait. Car, même si Sarajevo n’est qu’à une heure trente d’avion de Paris, l’image de ce paysest encore empreinte de la souffrance provoquée par une guerre qui a duré plus de 3 ans. Á Foca, une ville proche de

Sarajevo, le ballon rond a pu véhiculer, durant trois jours, son message de paix auprès de jeunes venus de toute l’Europe.

ON SE SOUVIENDRA DE CE PAYSAGE COMME

D’UNE PEINTUREGÉANTE.

(Balint)

« JE SUIS ALLÉ À SARAJEVO ! »

Page 24: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 25 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Le tournoi de Foca

25

Ça, c’est Foca

72 kilomètres séparent donc Foca de Sarajevo.

Les deux villes sont nichées au pied des

montagnes et leurs histoires se ressemblent.

Les horreurs de la guerre ont marqué les souvenirs,

mais les gens veulent tourner la page. Le football

n’est peut être qu’illusoire aux yeux de certains

observateurs extérieurs mais, lorsqu’en mai

2008, en partenariat avec la Commission

européenne, la ville organise « Le festival euro-

péen du football de rue », une douce sensation de

renouveau coule le long de la Tara, la rivière

locale. 24 délégations représentées par des asso-

ciations de 16 pays différents, garçons et filles

mélangés, âgés entre 14 et 18 ans, sont là pour

le prouver. Parmi toutes ces équipes, l’une d’elle

est lyonnaise : « Sport dans la ville », une asso-

ciation axée sur l’éducation par le sport auprès des

jeunes en difficultés. La délégation française vient

de terminer son match contre les Portugais de

« Cais » (association contre l’exclusion social).

Les regards de Mour et Mounir absorbent tout ce

qui les entoure. Il y a les jeunes filles locales peu

habituées à voir « ces grands blacks » et impa-

tientes de mieux les connaître. Puis, ils s’arrêtent

un moment devant le curieux style « kick and

rush » des Irlandais, celui aux passes courtes des

Espagnols ou encore la technique plutôt « brut de

décoffrage » des Anglais au physique bien supé-

rieur à celui des Turcs. Entre deux matchs, ils se

marrent en voyant deux policiers bosniaques

« tripoter » la balle : « Dobrodosli u Focu 08 ! »

Mour témoigne : « Au début, je n’étais pas trop

rassuré par rapport à l’image d’un pays qui a

connu la guerre... Mais c’était aussi l’occa-

sion de jouer au foot et de faire connaissance

avec des Anglais, des Turcs… ». Et Mounir de

compléter : « On fait un tournoi vraiment

magnifique et ce que j’en retiens pour l’ins-

tant c’est la notion de partage et de plaisir de

jouer au foot. Ça me touche vraiment… ça

me donne des frissons » Ah oui, on a oublié de

vous dire que ce tournoi n’a pas d’arbitre. Les

joueurs s’autogèrent et lèvent la main lorsqu’ils

pensent avoir été victimes d’une faute. Encore

un moyen de communiquer et d’échanger

grâce au football, mais surtout de faire tomber

des préjugés. Balint, un jeune Hongrois de 15 ans,

explique : « Ça nous oblige à échanger entre

nous, à savoir résoudre un problème. Ça

nous rend solidaires et ça nous plaît vrai-

ment. Les filles et le foot, c’est universel... »

Pour lui aussi, ce tournoi est une décou-

verte... humaine, mais aussi culturelle : « En

rentrant chez moi, je vais dire à mes copains

qu’ici, il y a beaucoup de montagnes, que

c’est très beau. Moi, je ne connais que les

immeubles de mon quartier et je ne crois

pas qu’en Hongrie on ait des montagnes

aussi grandes… On se souviendra de ce

paysage comme d’une peinture géante. »

Trois jours et adieu les préjugés

L’image que s’étaient faite ces jeunes de la

Bosnie change petit à petit. Dans leur imaginaire,

les balles ne sont plus les mêmes et seule

les filets tremblent après avoir été traversés.

Même les plus grands effacent le souvenir

d’un pays meurtri. C’est le cas de Bachir Bejoui,

l’un des responsables des jeunes Français :

« La première chose qui m’est venue en tête

sur la Bosnie, c’est la guerre. Un pays trau-

matisé. Je ne pensais pas voir autant de jeu-

nesse car j’imaginais des personnes âgées,

des agriculteurs. On croyait surtout trouver

des ruines et des champs de mine. Ce n’est

pas le cas et on s’aperçoit que les gens ont

vite repris le dessus. On ne pourra jamais se

rendre compte de ce qu’ils ont vécu, et on se

doit de rester humbles et souriants, parce

que les plus traumatisés, ce sont eux. »

Il aura donc suffi de trois jours de football, trois

jours au milieu d’inconnus venus des quatre

coins de l’Europe, dans un pays dont le nom

n’évoquait, il y a encore quelques années, que le

désespoir et la souffrance. Un pays que Mour et

Mounir ne pouvaient situer sur une carte, et pour-

tant que tous connaissaient. En rentrant chez

eux, dans la banlieue lyonnaise, ils garderont

peut-être en tête les images d’un dribble décisif

sur un allemand, d’un coup franc magique

dans la lucarne du gardien tchèque, mais

surtout, comme le confie Georgy Sole, l’autre

accompagnateur : « Ils pourront dire dans leur

quartier : “ Je suis allé à Sarajevo ! ” »

Dans les rues de Sarajevo

l’influence ottomane est

encore très visible.

ON FAIT UNTOURNOI

VRAIMENTMAGNIFIQUE…ÇA ME DONNEDES FRISSONS

(Mounir)

ON SE DOIT DE RESTER

HUMBLES ET SOURIANTS,PARCE QUE LES PLUS

TRAUMATISÉS, CE SONT EUX

(Bachir Bejoui)

Page 25: Foot Citoyen Magazine n°22

CARSTEN RAMELOW (ex-joueur international

allemand)

« L’IMAGE D’UNMOMENT

DE PLAISIR»

Ex-pilier de la sélection allemande(46 sélections) et du BayerLeverkusen, Carsten Ramelowétait présent au tournoi

Pourquoi êtes-vous làaujourd’hui ?

Pour moi, il est très important de voir à

travers le football comment vivent ensemble

tous ces jeunes de différentes nationalités...

Et c’est génial ! Alors, si je peux aider ce

genre d’initiative par ma présence, je le fais

volontiers et de mon mieux.

Que garderez-vous de ce tournoi ?Le fais d’être tous là réunis et de jouer

ensemble en prenant du plaisir... Et si les

jeunes sont heureux, je le suis aussi.

Quelle image d’un ex-joueur provoulez-vous transmettre auxjeunes ?C’est sûr que l’image d’un pro est très

importante vis-à-vis d’un jeune. Apres tant

d’années à Leverkusen, j’ai vu de nombreux

joueurs de nationalités différentes, de conti-

nents divers, mais, au bout du compte, il y

avait l’image d’une seule et même équipe,

unie dans la victoire et la défaite. Et c’était

cela le plus important.

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 26 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Le tournoi de Foca

26

omment les jeunes ontaccueilli la nouvelle d’aller jouer en Bosnie ?Georgy Sole : Bizarrement, car

dans leur tête, la Bosnie était

encore associée à la guerre. Ils avaient une cer-

taine appréhension du pays, alors ils se sont un

peu documentés sur internet, mais ils ont surtout

vu des images très dures et ils n’imaginaient pas

la culture qui existait derrière tout ça. On a même

du rassurer certains parents. Aujourd’hui, on peut

voir qu’ils ne regrettent pas du tout leur choix.

Quels souvenirs garderont-ils de ce tournoi ?Bachir Bejoui : De la Bosnie, que du positif. Il suf-

fit de les avoir vus s’amuser durant tout le tournoi

pour en être persuadé. Même le soir, il a fallu les

canaliser. Je pense qu’ils se sont surtout aperçus

que les gens étaient super solidaires dans ce pays,

contrairement à eux dans leurs quartiers où il y a

souvent des bandes, des communautés et des

barrières. Là, tout le monde est mélangé, les

enfants viennent discuter avec eux, et ça les

marque. J’espère qu’ils retiendront aussi les

concepts de fraternité et de solidarité, et que cela

leur servira pour plus tard.

Comment allez-vous aborder le sujeten rentrant ?Georgy : Il est prévu que les jeunes nous fassent

parvenir leurs impressions sur le séjour. Nous les

ferons ensuite publier sur une sorte de gazette

qu’on distribuera sur les terrains, afin que ceux qui

n’ont pas pu venir se rendent compte du déroule-

ment du séjour. Le fait que cela vienne de jeunes

de leur âge aura plus d’impact je pense. Cela les

aidera peut-être à rentrer dans le cadre de l’asso-

ciation « Sport dans la Ville » pour pouvoir, plus

tard, être eux aussi amenés à participer à des

événements tels que celui-là.

Les témoignages sont, finalement, ce qu’il y a de plus efficace…Georgy : Exactement, et puis avec tous les jeunes

issus de différents quartiers, chacun pourra trans-

mettre dans le sien ce qu’il a vécu.

Bachir Bejoui : Ça reste un séjour assez mémora-

ble pour eux. Pour certains, c’était déjà une pre-

mière de sortir de France, de leur ville et, aussi,

l’occasion de rencontrer différentes cultures. C’est

toujours enrichissant.

Ils ne se connaissaient pas avant de partir ?Georgy : Certains s’étaient déjà rencontrés dans

des matchs ou des tournois, mais ils n’étaient pas

vraiment potes au départ. Ce séjour leur

a permis de se découvrir. Ils sont là pour

s’amuser, pas pour gagner. Ça laisse plus de place

pour apprendre à se connaître et échanger...

C

BACHIR BEJOUI (ÉDUCATEUR DE « SPORT DANS LA VILLE »)

« POUR CERTAINS JEUNES, C’ÉTAIT DÉJÀ UNE PREMIÈRE DE SORTIR DE FRANCE… »Bachir Bejoui et Georgy Sole accompagnaient les jeunes Lyonnais de « Sport dans la Ville » pendant leur séjour à Foca. Ils témoignent de l’idée que leurs joueurs se faisaient du pays et comment ils ont, eux aussi, découvert un pays qui, une dizaine d’années après la fin d’une guerre, respire l’envie et apprécie d’être comme les autres...

AVEC TOUS LESJEUNES ISSUS

DE DIFFÉRENTSQUARTIERS,

CHACUN POURRATRANSMETTREDANS LE SIEN

CE QU’IL A VÉCU.(Georgy)

Page 26: Foot Citoyen Magazine n°22

Les séances de...

Coach Fred

Une fois tous les joueurs réunis sur le terrain, Fred fait un topo

rapide sur le contenu de l’entraînement...

« Je compte les absents, et parfois je reviens sur le match précé-

dent ou sur un fait qui aurait pu se passer. C’est le moment le plus

adéquat pour un retour à froid. Après, je leur dis ce que l’on va faire

pour l’entraînement. C’est juste une ébauche, je leur indique le

menu sans entrer dans le détail, sinon on perdrait trop de temps. Ça

leur donne une idée de l’axe de travail. »

Les joueurs partent s’échauffer seuls. Placés en deux files

indiennes, ils suivent une chorégraphie sympa et bien rodée.

Fred n’a pas à intervenir.

« Un échauffement, ça peut être rébarbatif. Je leur propose donc

quelque chose de ludique, où ils travaillent ensemble, se tapent

dans les mains... C’est l’échauffement qu’ils font avant chaque

match. Ils sont maintenant autonomes parce qu’on l’a travaillé

lors de l’avant saison. Je les observe mais, quand ils sont

ensemble, il est très rare d’en voir un à la traîne. »

Les joueurs enchaînent deux exercices où ils répètent les

passes, comme des gammes. Deux par deux, d’abord, puis par

groupe de quatre. Fred parle, bouge beaucoup et va de l’un à

l’autre. Il encourage, corrige... Ses consignes sont brèves,

directes et simples. Sa présence et sa voix forte dynamisent

l’exercice.

«Ça fait aussi partie de la mise en train, qui dure de dix à vingt

minutes. J’y intègre des notions techniques et on révise les gammes

à chaque fois. Je leur demande d’être toujours en mouvement,

quitte à sautiller sur place. De mon côté, je bouge beaucoup parce

que je veux avoir le meilleur d’eux-mêmes. Si tu restes à côté d’un

seul groupe, celui-là seulement va travailler. Dans ton dos, les autres

peuvent faire le mauvais geste ou le réaliser en dilettante, sans être

en position dynamique. Je parle fort et je dis « tu », plutôt que leur

prénom, pour qu’un maximum d’entre eux se sente concerné par

mes conseils. S’ils ne font pas les efforts sur des exercices faciles,

ils seront incapables de faire des choses simples en match. Je me

répète souvent, parce que même s’ils n’écoutent pas la première

information, je sais qu’à un moment ils vont l’intégrer. »

ETAT DES LIEUX

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 28 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

À Reims, Pascal Stefani (Textes) et Frédéric Gameiro (Photos)

Les papiers du coach

28

L’ÉDUCATEUR «ANIMATEUR»Un entraînement de qualité dépend du contenu que l’éducateur veut bien proposer, mais surtout de sa capacité à l’animer.

Aussi exigeant que positif, Frédéric Izeda, coach des «16 ans nationaux» de l’EF Reims-Sainte-Anne-Châtillon (District de laMarne), s’emploie à mettre de la vie dans ses exercices. Chaque mois, au cours d’une séance, il nous explique sa méthode.

PLACE AU BALLON

ECHAUFFEMENTJE BOUGE BEAUCOUPPARCE QUE JE VEUXAVOIR LE MEILLEUR

D’EUX-MÊMES.

Au début de l’entraînement,

coach Fred explique à ses joueurs

à quelle sauce ils vont être entraînés.

Page 27: Foot Citoyen Magazine n°22

District de la Marne

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 29 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Les papiers du coach

29

Fred met ensuite ses joueurs en situation d’attaque. A travers plusieurs exercices, il leur fait travailler les longues diagonales, lesremises à une touche de balle, les centres et les frappes. Les jeuxportent sur la gestuelle et les déplacements, et se succèdent sur unrythme particulièrement soutenu. Le rôle de Fred est essentiel dansces exercices.

Positionné au milieu de l’action, Fred intervient souvent, félicite, corrige chaque erreur et fait la démonstration lui-mêmesi nécessaire. Le jeu s’arrête, mais ses explications rapides etclaires évitent de casser le rythme de l’exercice.«Je suis constamment au milieu d’eux et je mets de la voix. Ils sontjeunes et leur esprit peut partir ailleurs. Je parle fort, fermement, desorte que, même s’ils n’entendent pas tout, ils vont comprendre queje suis exigeant envers eux. On est obligé de mettre de l’intensité. Lecourage et la discipline permettent de compenser les différences deniveau quand on rencontre les équipes de clubs pros. »

Gursel, nouvel arrivé au club, force sur ses adducteurs poureffectuer ses diagonales. Fred demande de la souplessedans le geste et ne le lâche pas : « Tu as tout ton temps »... Il le fait recommencer, encore et encore, sans s’impatienter.À la fin de la séance, Gursel finit par réussir la diagonale parfaite. Son coach lui dit bravo...

« Si j’insiste sur un joueur, ça peut devenir barbant pour lui. Maisl’objectif, en fin d’année, est d’avoir progressé. Pour cela, il fautêtre généreux dans l’effort, et il y a une seule façon de régler ça :marteler le message. Ce n’est pas facile pour eux de m’avoir surle dos, mais jamais je ne leur manque de respect. Ce n’est pasl’objectif, même s’il peut m’arriver de contrarier un joueur, sansle vouloir, par un mot qui va le toucher. Dans ces cas-là, je posi-tive dès que j’ai un moment avec eux. Si un joueur en prend pourson grade, la séance d’après, je vais l’encourager d’autant plus.Je suis astreignant, sérieux, mais je dédramatise tout le temps. »

Une fois seulement, Frédéric Izeda hausse le ton sur l’un de sesjoueurs, après un centre raté... «C’est sur Loïc, un attaquant qui a d’énormes qualités mais qui n’atoujours pas marqué en championnat. À l’entraînement, il veut toujoursfaire des trucs extraordinaires, comme sur l’action où je lui crie dessus. Je lui ai dit que ce qu’il ratait ici par manque de concentrationse répercutait en match. C’est parfois un peu dur, mais c’est mon rôlede les pousser jusqu’à ce qu’ils comprennent. Je connais mes joueurs,et je sais que si je hausse le ton, ça va en motiver certains, quandd’autres vont avoir la tête dans le sac. Je fais attention à ça. »

Pendant un exercice, un jeune s’embrouille légèrement avec unpartenaire. Une insulte fuse. Fred l’entend. Sans interrompre le jeu,il lui demande de faire 50 pompes. Le ton est assez ferme pour qu’il

comprenne que c’est sérieux, mais la sanction est donnée entredeux consignes, afin de ne pas gêner l’animation de l’exercice.« C’est le respect. Même si, dans le fond, il a raison d’être énervé, mêmesi c’est sorti machinalement, il n’a pas à le dire. Il ne faut pas en faire undrame non plus. À la prochaine séance, il tournera sa langue sept foisdans sa bouche avant de parler. Les petits heurts entre joueurs font par-fois du bien, ça permet d’avancer. »

L’entraînement se termine sur un exercice douloureux, pour la têteet les jambes : le travail physique. Fred fait travailler ses joueurs enbinôme. L’objectif est de rattraper à la course son coéquipier. Et lephysique devient ludique… Fred continue à donner de la voix.«Ça, ils n’aiment pas trop, mais ils trichent rarement. À la fin, ils devaientavoir un voile noir devant les yeux et pourtant ils repartaient à fond. Il fautles encourager, et pour qu’ils se surpassent je leur mets un coéquipierdevant eux. C’est important de rendre ludique ce genre d’exercice, unpeu «usant», mais on retrouve ici une situation de match, comme quandils doivent s’accrocher pour rattraper un adversaire.»

AU MILIEU

MARTELER, DÉDRAMATISER…

POUSSER, MOTIVER…

SANCTIONNER…

DU PHYSIQUE LUDIQUE

JE SUIS EXIGEANT,SÉRIEUX, MAIS JE

DÉDRAMATISE TOUT LE TEMPS.

L’ÉDUCATEUR DOITIMPÉRATIVEMENT

ANIMER, ÊTRE VIVANT,ÊTRE UN MENEUR...

J’ESSAIE DE DYNAMISERLES EXERCICES,

Y COMPRIS LES PLUSSIMPLES, AFIN QUE

CHACUN FASSE LES EFFORTS POUR

PROGRESSER.

Un échauffement bien

«chorégraphié»,

c’est tout de suite

plus sympa.

Page 28: Foot Citoyen Magazine n°22

30

La série est diffusée tous les mercredis surà partir de 7h00.

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 30 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

foot 2 rue

JÉRÉMIE DIT « JEM » : un peufrimeur, drôle, comique,

blagueur et taquin, il est aussifragile et généreux. C’est un

dur au cœur tendre.

SAMIRA DIT « SAM » :travailleuse, brillante, déterminée, pétillante,

athlétique... Elle exploite avectalent l’architecture urbaine

quand elle joue au foot.

REQUIN : Il est le chef del’équipe des Requins. Excellent

arbitre. Il est toujours prêt àrendre service aux Bleus etsait parfois les raisonner.

ÉLOÏSE : Ses parents possèdent l’Institut Riffler.

Fort caractère et secrètement amoureusede Tag, elle garde le but

des Bleus.

GABRIEL : « L’intello » du groupe. Il est interne

car ses parents travaillent à l’étranger.

TAG : Le capitaine de l’équipe et le héros

de la série. Orphelin, il estinterne à l’Institut Riffler.

Producteur : TÉLÉ IMAGES KIDS (Philippe Alessandri et Giorgio Welter)

Réalisateurs : Stéphane Roux/Bruno Bligoux

Scénaristes : Marco Beretta/Serge Rosenzweig/Françoise Charpiat

Dessinateur : Stéphane Roux

Ensemble :«On ne peut pas louperça !»

Nos deux amies, enthousiastes, vont doncs’inscrire au tournoi…

Mais la réponse de l’organisateurn’est pas des plus sympas : « Des nanas au tournoi ?... Vousrigolez, c’est hors de question ! »

Miguel :«Je te connais, t’es ma voisine,mais il va falloir que t’ailles jouer à lababalle ailleurs... »

« Ici, le foot, c’est un truc demecs ! Les nanas, vous ne faitespas le poids ! »

En allant à l’entraînement, Sam rencontreen bas de son immeuble sa copineManuela.

Celle-ci lui montre alors une affiche:«T’as vu, demain, il y a un tournoide 3 contre 3 ! Ça te dit ? »

« MACHO » MATCH !

Alors qu’a lieu un tournoi de Foot2rue dans lacité, Sam et sa copine, Manuela, se réjouissent àl’avance de pouvoir y participer. Mais au moment

de s’inscrire, elles apprennent avec stupeur queles filles ne sont pas admises. Une vraie injusticepour nos héroïnes qui vont devoir faire preuve demalice et d’ingéniosité pour prouver que les fillesvalent bien les garçons quand il s’agit de ballon.

La maman de Momo : « Au faitSamira, j’aurais encore besoin detoi demain... »

Pour gagner un peu d’argent depoche, Sam fait du baby-sittingen s’occupant du petit Momo.

Page 29: Foot Citoyen Magazine n°22

31

Samira a du mal à accepter lesréflexions des garçons… Et ça se litencore sur son visage quand elle arriveà l’entraînement...

Tag, énervé : « T’as une demi-heure de retard… Bravo Samira!»

… Samira, excédée,répond sèchement :«Toi, tes réflexions, tute les gardes ! »

Après l’entraînement, Sam retrouveManuela en bas de son immeuble…

Eloïse : « Bon, on va t’expliquer parce quetoi, tu comprendras… »

... et les surprend en train de fouiller dansles affaires des garçons!

Samira se confie à sa partenaire...Eloïse:«Quoi! Et vous allez accepterça sans réagir ! Sam, tu te rappellescomment tu avais fait pour rentrerdans l’équipe?»

Eloïse retrouve Samira quis’exerce seule contre un mur :« Qu’est-ce qui ne va pasSam?»

Plus tard, Eloïse et Sam retrouvent lesgarçons à l’Institut. Eloïse : « Désolé lesgarçons mais, Sam et moi, demain, nousfaisons du shopping... »

Tag étonné:«Qu’est-ce qu’ellesont, aujourd’hui, les filles?»

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 31 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Et comme Jeremy y va de sa petite réflexion : « Ah les nanas, jamais à l’heure ! »…

Gabriel, intrigué, décide alors deles suivre...

Mais Miguel trouve cetteéquipe un peu louche.

Une à une, les filles s’habillent alors en…garçon pour tromper les organisateurs dutournoi...

Tag : «Bizarre cette histoire deshopping… Je me demande s’iln’y a pas un mec là-dessous.»

Malgré le réconfort deson ami, Tag, un peujaloux, ne semble pastrès rassuré...

foot 2 rue

Les filles, elles, suivent leur plan et s’inscrivent au tournoi sous le nomdes « Rebelles ».

Le lendemain, alors que Samiraprend son petit déjeuner, onsonne à la porte…

C’est le petit Momo que sa mèrevient de déposer en coup devent !

… et lui propose de venirjouer au foot avec elle.

Pendant ce temps, Gab discuteavec Tag, un peu contrarié parl’attitude étrange des filles.

Sam : « Ce sont les garçons dela cité… Ils ne veulent pasqu’on fasse leur tournoi… »

Manuela : «Toi, au moins, tu peuxt’entraîner avec les Bleus… Allez,ciao Sam!»

Manuela : « À quoi ça servirait ! De toute façon,on est des filles et on n’apas le droit de jouer aufoot ici. »

Sam:«Tu ne vas pas te laisserabattre par ces gros nuls!»

Page 30: Foot Citoyen Magazine n°22

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… et se qualifier pour la finale du tournoi.

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 32 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Et les «Rebelles» donnent le tournis àleurs adversaires.

En revanche, ça se passe moinsbien pour Gabriel et Jérémy dansleur rôle de baby-sitter.

Mademoiselle Adelaïde pensemême avoir des hallucinationsauditives, mais au bout d’unmoment…

… elle doit se dépêcher de dissimulerses cheveux longs.

Mais quand un ballon, jeté par Miguel,vient heurter la casquette de Manuela….

Quant aux garçons, ils continuent dechercher le petit Momo dans toutel’Institut...

… qui a, hélas, trouvé refuge dansle bureau de la directrice.

Gabriel : «Bon, d’accord, mais ça vaêtre difficile de le cacher. Il va falloir lajouer fine. »

Samira est en panique:«Momo! Avec ce tournoi, je t’avais complètement oublié! »

La seule solution qui s’offre à elle, pour pouvoirparticiper au tournoi : demander à Gabriel degarder le bébé...

Pendant ce temps, le tournoi a déjà commencé…

En tout cas, les garçons ont reçu une missionqui ne s’annonce pas de tout repos.

foot 2 rue

Evidemment, l’idée ne plaît pas tropaux autres... Mais ils n’ont pas le choix!

Tag : « Il y a vraiment un truc qui clochedans cette histoire de shopping ! »

Mademoiselle Adelaïde : « Non, je nerêve pas... Que se passe-t-il ici ?...

Pour les filles, les choses secompliquent face aux « Lions »de la cité de Miguel.

… Qu’est ce que vous mijotez encore ?J’ai l’impression d’avoir entendu descris de bébé ! »

Heureusement, Tag a eu letemps de cacher Momodans le débarras…

Sauf qu’entre temps, il adisparu !

Mais, finalement, ellesfinissent par l’emportergrâce à leur courage…

À la cité, les soucis commencentquand Miguel qui a suivi Manueladécouvre la supercherie.

Page 31: Foot Citoyen Magazine n°22

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PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 33 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

L’AVIS DE L’EXPERT Marinette PICHON (ex-internationale Féminines, 112 séléctions, 82 buts)

«LA MIXITÉ PERMET UNE OUVERTURE D’ESPRIT...»Que pensez-vous de la mixité filles-garçons dans le football ?Pour l’avoir connue quand j’étais plus jeune,

je peux dire que c’est une grande chance pour

les féminines. Grâce à ce contact, on peut

s’améliorer techniquement et physiquement.

On s’aguerrit également en termes de vitesse et

de perception du jeu. Cela oblige les Féminines

à se hisser au niveau des garçons, et cela se

ressent après dans les qualités footballistiques.

Que peuvent-elles apporteraux garçons ?C’est aussi une bonne chose pour eux car cela leur

permet d’avoir une ouverture d’esprit plus large et

une plus grande compréhension. Les filles apportent

de la discipline, de l’implication dans les exercices et

dans les gestes, car pour compenser leurs lacunes

techniques et physiques, elles vont rechercher le

geste parfait, plus jouer sur l'anticipation.... Et

ces attitudes inspirent alors les garçons.

Avez-vous été parfois rejetée par lesgarçons au foot ?Non, en tout cas je n’ai jamais été totalement

exclue. Dés l’âge de 5 ans j’ai joué avec des

garçons jusqu'à la fin des dérogations. Par

contre, c’est vrai qu’il y avait quelques railleries

auxquelles je répondais rapidement dans

le jeu par des dribbles ou des buts. Ça mettait

un terme à tout ça. Je me souviens lors d’un

tournoi en Minimes, les adversaires se moquaient,

genre : « Ils jouent avec une fille, ça va être facile

de gagner ! » Et puis on a gagné 1-0, et c’est moi

qui ai mis le but… Et on est allé en finale.

Sentiez-vous un besoin de faire plus queles garçons pour vous faire respecter ouaccepter complètement ?J’ai toujours eu cette envie de bien faire et

de me faire plaisir avant tout… ça coulait de

source. J’avais plus l’impression d’être la

coqueluche que le vilain petit canard.

Une fois débarrassé de lui, les« Rebelles » peuvent disputer lafinale du tournoi de la citécontre les « Snakes ».

Après un début de match difficile,les filles reprennent l’avantagegrâce à leur jeu rapide et technique.

Trop tard ! Samira, d’une superbereprise de volée, donne la victoire àson équipe.

Au coup de sifflet final, les «Rebelles » retirent leur casquetteet dévoilent leur secret…

… Les supporters etles joueurs en restentbouche bée...

Puis c’est une véritable acclamationqui accueille leur victoire… Pas dedoute, le foot2rue est aussi fait pourles filles.

Et l’organisateur du tournoidéclare alors le tournoi dela cité ouvert aux filles!

Elles décident alorsde piéger Miguel….

Les filles s’aperçoivent vite queManuela a un problème et elless’empressent de venir lasecourir.

foot 2 rue

… qui se fait prendre à son propre jeu!

Mais, au même moment, Miguels’échappe et court jusqu’au terrain raconter tout ce qu’ilsait.

Même Miguel se rend compte deson erreur:«Je m’excuse Manuela,j’étais jaloux de toi, de voir que tujouais mieux que moi... »

Même le petit Momo est heureux devant les jongleriesde Gabriel et Jeremy. L’espritdu foot2rue a encore gagné.

Miguel : « On t’avait dit que le foot ça n’étaitpas pour les filles… Il a quand même fallu quetu te la joues ! »

Enervé, il décide d’enfermer de forcela jeune fille dans le placard à balais.

Miguel : « À cause de toi, je ne suis pas enfinale... Comme ça les «Rebelles» vontdevoir déclarer forfait ! »

Du côté des garçons, Tag a récupéréMomo grâce à Gabriel, qui a réussi àfaire sortir Mademoiselle Adelaïde deson bureau.

Maintenant que les choses sontrentrées dans l’ordre, Gab décided’expliquer à Tag pourquoi lesfilles étaient si mystérieuses.

Page 32: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 34 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Textes : Juliette Lamy / Photos : Frédéric Gameiro

’est le premier jour de l’été et un

beau soleil s’est posé sur Sèvres

(92). Pour les organisateurs du

tournoi Poussins, c’est un plaisir de

plus… Pour Marie-France Ropartz

aussi, l’éducatrice des jeunes Féminines du PUC, qui

a emmené dans ses «bagages» Marie, Pénélope,

Melissa, Inès, Lou et Audrey, six des Benjamines et

Poussines du club universitaire parisien.

Des filles qui n’ont pas voulu laisser passer la

chance de participer à un tournoi. Trop rares sont,

en effet, les tournois pour les féminines de ces

catégories... C’est pourquoi Marie-France s’est

battue pour être à Sèvres ce jour-là. Elle a dû

négocier avec le club organisateur pour obtenir

la possibilité de faire jouer ses Benjamines dans

la catégorie inférieure contre des… garçons. Sa

motivation doit rejaillir sur ses « protégées » et leur

permettre de progresser grâce à des expériences

comme celle-ci, même si c’est dans un tournoi

de… garçons. Malheureusement, toutes les filles

n’ont peut-être pas la même envie, et elle a dû

renforcer son équipe de trois garçons, Grégory,

Dorian et Yannick, des Poussins du PUC évoluant

en Foot loisirs pour deux d’entre eux (photo ci-contre). Pour eux aussi, l’occasion est belle

de participer à un tournoi, même si c’est dans

une équipe de… filles! D’autres se sont montrés

moins intéressés…

34

Les jeunes féminines du PUC

OH LES FILLES, OH LES FILLES...« … Elles nous rendent marteau ! » C’est du moins ce que chantait, il y a près de vingt ans le groupe «Au Bonheur

des dames». Sur les terrains de foot, cela est encore très vrai, surtout quand elles se mettent à dribbler les garçons.Des dribbles qu’elles doivent multiplier au quotidien pour se faire une place dans un monde du football encore très

masculin. Pour vous donner une idée, nous avons accompagné, dans le cadre de notre projet de partenariat avec lePUC, les jeunes féminines du club et leur éducatrice, Marie-France Ropartz, lors d’un tournoi de… garçons !

c

MIXITÉ FORCÉE...

Le jeu (collectif et) au pied,

c’est ce qui motive

et motivera Pénélope

à pratiquer le football.

Page 33: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 35 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Pourquoi votre équipe féminine regroupe-t-elleles « 13 ans », les Benjamines et les Poussines ? J’entraîne des équipes Féminines «13 ans» depuis 6 ans, dont troisau PUC, quand le club a souhaité créer une équipe Féminines «13 ans». Dans les catégories inférieures, les filles sont souventseules au milieu de beaucoup de garçons et j’ai constaté quebeaucoup d’entre elles arrêtaient ce sport après un and’expérience, voire en cours d’année. Et cela n’avait rien à voir avecleur niveau. Comme elles ne sont pas trop nombreuses dans lacatégorie « 13 ans », j’ai proposé de créer une équipe regroupantles trois catégories pour que les plus jeunes aient une équipe danslaquelle elles puissent, elles aussi, jouer et progresser.

Quels en sont les intérêts et les inconvénients ?Les intérêts principaux pour les filles sont de pouvoir jouer etapprendre le jeu. A l’entraînement, je fais deux groupes pour lesexercices techniques : les petites et les grandes car elles n’ontpas le même niveau. Lors de matchs, elles jouent ensemble et lesplus jeunes peuvent ainsi vraiment s’améliorer. La différence deniveau est le seul inconvénient à cette équipe. Je dois donc leurfaire accepter d’avoir de moins bons résultats pour permettre auplus grand nombre de progresser.

Constatez-vous une différence dans le jeu entrefilles et garçons ?Les filles sont plus collectives, elles semblent intégrer cette notionnaturellement. Elles se font des passes, respectant davantagechacune leur zone de jeu, contrairement aux garçons qui, aumême âge, pratiquent ce qu’on appelle « la grappe de raisin », à savoir qu’ils sont tous collés au ballon.

Et dans l’attitude ?Les filles sont moins sûres d’elles. Elles ont tendance à douter de leurs capacités... Je suis très attentive à ce qu’elles découvrentleurs qualités et qu’elles aient confiance en elles. C’est aussi lespréparer pour l’avenir.

Le football féminin manque encore cruellementde reconnaissance et de considération…C’est un vrai problème. Dans la pensée commune, le football est un sport exclusivement masculin. Les filles sont rarement les bienvenues, sauf si elles sont très bonnes. Elles doivent faire deux fois plus leurs preuves. Le football féminin de hautniveau et la jeune génération d’éducateurs plus ouverts à cettequestion contribuent à l’évolution des mentalités, mais le cheminest encore très long pour que les filles aient la considérationqu’elles méritent.

35

Les jeunes féminines du PUC

Marie-France ROPARTZ(éducatrice des jeunes Féminines du PUC)

« LES FILLES SONTRAREMENT LES BIENVENUES,SAUF SI ELLES SONT TRÈSBONNES. »

Cinq matchs de dix minutes sont au programme de l’après-midi,quatre matchs de poule et un de classement. Avant d’entrer sur le terrain, Marie-France regroupe son équipe pour une dernière explication... Aujourd’hui, elle ne les fera pas tourner aux différentspostes comme à l’entraînement car elle veut éviter de mettre certaines filles en difficulté. Seul le poste de gardien(ne) sera tournant… Après les consignes sur le mode de fonctionnement, ellepasse à un petit rappel tactique… À l’aide d’un tableau magnétique,représentant un terrain de foot miniature, et de magnets de deux couleurs différentes, une pour chaque équipe, elle expliqueconcrètement les tactiques de jeu, elle donne du sens au choix etpostes des joueurs, puis elle insiste sur l’intérêt de participer et de jouer plutôt que gagner ! Les filles sont attentives, sereines,contentes d’être là et, manifestement, sans aucun complexe dejouer contre des garçons… Le message semble passer.

Au fil des matchs, on entend même des adversaires dire que « c’est la honte de se faire dribbler par des filles… » Et c’est vraiqu’elles jouent bien, ayant déjà intégré le sens du jeu collectif. C’estd’ailleurs pour ça qu’elles ont choisi ce sport, pour le plaisir du jeu collectif et du jeu au pied. Certes, quand elles perdent le ballon, elles pourraient essayer d’aller un peu plus loin pour tenter de le récupérer, mais la différence de force physique entre les garçons

et les filles à ces âges-là n’est déjà pas négligeable et elles ont, de plus, très rarement l’occasion de se mesurer à eux... Et, sur la duréed’un match, cela se ressent… À l’arrivée, l’équipe mixte du PUC n’a gagné aucun match… Pourtant, les filles ne sont pas vraimentdéçues, ayant fait preuve jusqu’au bout d’un bel état d’esprit... Au-delàdu résultat brut, elles ont déjà, elles, gagné leur tournoi, autour du plaisir et de la seule participation. Elles peuvent être fières même car lesoccasions de gagner ont été réelles et les matchs disputés. C’est pour lesgarçons de l’équipe que la frustration de ne pas avoir gagné est la plusforte. Et même s’ils reconnaissent que les filles ont bien joué au football,ils ont perdu à cause d’elles. Mauvais jugement…

Le football féminin a encore du chemin à parcourir pour se faire saplace dans ce monde encore très masculin. D’ailleurs, pour les fillesde l’équipe, jouer au foot dans la cour de récré de l’école est quasiimpossible… Même si elles sont licenciées dans un club, cela resteencore strictement réservé aux garçons. Et certains de leurs petits

camarades pensent encore que le football est interdit aux filles ! Les clichés ont la vie

dure… Dans leur club aussi, elles doivents’accrocher car, avant d’avoir la chance d’être dans l’équipe de Marie-France, elles sont seules ou à deux dans des équipes de garçons et ont rarement le ballon : « Ils ne nous font pas la passe ».C’est dire si elles doivent être passionnées et motivées ! Elles ont du tempérament ces filles, et il leur en faudra encore pour poursuivrela pratique de leur passion et faire reconnaître le football féminin,même si, à leur modeste niveau et à leur âge, elles n’ont pas encoreconscience d’œuvrer dans ce sens.

SANS COMPLEXES

LE SENS DU COLLECTIF

MOTIVATION ET PASSION

Marie, l’attaquante de l’équipe, fait admirer

son toucher de balle.

Paris Université Club

Page 34: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 36 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Textes : Pascal Stefani / Photos : Frédéric Gameiro

36

Journée de l’arbitrage

CONTESTATION DE L'ARBITRAGE :LE CANCRE FOOTBALL

Les journées de l’arbitrage réunissent quatre sports collectifs différents dans un même stade. Au Parc

de la Courneuve, pour cette septième édition, nous avons joué au jeu des comparaisons : comment l’arbitre

est-il respecté dans chaque sport ? Quels moyens sont mis en place pour cela ?

Pas de surprise, le foot est loin derrière les autres.

Page 35: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 37 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

e côté burlesque de la scène pourrait prêter

à sourire, si elle n’était pas si tristement révéla-

trice des maux du football. Nous sommes au Parc

de la Courneuve, pour la septième édition des

« Journées de l’arbitrage », et le match vient de

se terminer. Un joueur de « 13 ans » toise un arbitre qui en

compte 19 et qui lui rend cinquante centimètres. Dans une

vraie colère, il lui rappelle qu’il y avait bien penalty, lui

conseille de mettre des lunettes et finit par l’applaudir

ironiquement, avant de s’en aller, laissant l’arbitre interloqué.

La diatribe du petit amuse son coach, qui n’a pas cru bon

d’intervenir : « Une erreur d’arbitrage, ça peut arriver. Maisc’est dur à comprendre et à avaler, même pour des gaminsde cet âge. » Sur le terrain annexe, c’est le même n’importe

quoi. Plusieurs joueurs entourent un arbitre qui vient de

siffler penalty à leur encontre. L’un deux a cette réflexion,

révélatrice : « T’es trop nul ! Pourtant c’est les journées de l’arbitrage ! » Visiblement, il y a comme un malentendu sur

l’objectif de cette journée... Le tournoi de football est destiné

à aguerrir les jeunes arbitres en formation. Pourtant, toute

l’après-midi, il est souvent l’objet de tensions, de cris et de

contestations. Une suggestion pour la prochaine édition : et si

l’on profitait de l’événement pour faire arbitrer les joueurs qui

attendent leur tour sur le côté ?

Pour trouver plus de fraîcheur et de plaisir, il suffit de se balader du

côté du hand. Ici, les arbitres jouent et les joueurs arbitrent. S’il ren-

contre aussi des problèmes, le hand n’a pas la même façon de les

gérer. Exemple, lors d’un match, quand un joueur mécontent insulte

un arbitre : celui-ci l’envoie sur le banc pour deux minutes, son

entraîneur le prend à part et lui explique, tranquillement qu’il ne doit

pas dire de telles choses. Nizar, 13 ans, joueur et arbitre en forma-

tion, explique l’apport de l’exclusion temporaire :«La règle desdeux minutes, ça aide à calmer les joueurs. Quand ça m’arrive,j’ai la rage contre moi parce que je sais que j’ai fait une bêtise,et que je laisse mes coéquipiers en infériorité. » Pour François

Chouvin, coach à l’US Alfortville, les jeunes ne se préoccupent pas

de l’arbitrage : «La Fédération fait un grand boulot auprès desjeunes. C’est très rare que ça conteste ou qu’il y ait un manquede respect envers l’arbitre dans les petites catégories. Ça com-mence à être plus chaud chez les 18 ans. » On retrouve la même

décontraction côté Rugby. Dans ce tournoi amical, les équipes sont

mixtes, et là aussi les arbitres sont des joueurs des équipes partici-

pantes. Sur le terrain, pas le début de l’once d’un problème à

constater. Rien d’étonnant quand on écoute Chantal, coach à Aulnay-

sous-Bois, énumérer les mesures mises en place : «À l’école de

rugby, c’est l’éducateur qui arbitre. À chaque faute, il arrête lejeu et explique la règle. En Minimes, ce sont les joueurs qui arbi-trent à tour de rôle. Cette année, j’ai mis à l’arbitrage ceux quiont l’habitude de contester. L’année dernière, en Benjamins, ilsavaient souvent un truc à dire pour influencer ou commenter lesdécisions. Depuis, ils parlent beaucoup moins.» Au rugby, un joueur

qui conteste est fautif. Au foot, on lui trouve toujours une bonne raison.

On peut se méfier du jeu des comparaisons en arguant qu’une

erreur d’arbitrage au football a plus de conséquences sportives

que dans les autres sports. Pourtant, le Hand, le Rugby et le Basket

disposent chacun de règles qui permettent de limiter la contestation

(cf. encadrés). Ce que le foot n’a pas, ou peu. Leur atout imparable

réside dans le fait qu’un manque de respect envers l’arbitre

pénalise sportivement toute l’équipe. Pendant ce temps, les

footballeurs continuent d’entourer et d’engueuler les arbitres en

toute impunité. Certains acteurs du football pensent que la vidéo

permettrait de résoudre tous les problèmes. Tous citent le Rugby

en exemple pour prouver son efficacité. Ils oublient seulement que

ce sport avait su prendre, avant de l’utiliser, d’autres mesures

efficaces. En misant sur l’humain, pas sur des caméras.

37

Journée de l’arbitrage

L

En cas de contestation, selon la fréquence et le ton employé, un arbitre peut soit faire reculer

l’équipe de 10 mètres, l’exposant ainsi à une pénalité, soit siffler directement une pénalité, ou bien

sortir le carton jaune, qui exclut le joueur pour 10 minutes. Voire le rouge, synonyme d’exclusion

définitive. L’exclusion temporaire, instaurée en 1992, est un véritable atout pour les arbitres.

D’autres règles récemment mises en place ont fait beaucoup de bien chez les amateurs.

L’expulsion d’un coach entraîne ainsi une pénalité aux 22 mètres. Même sanction chez les jeunes,

pour toute faute déloyale entraînant un carton rouge.

(président de la commission centrale des arbitres)

« Le rugby dispose d’une très forte éducation de terroir. A l’intérieur des clubs, il y a beaucoup

de discipline. Il est évident qu’il en faut, car la frontière est mince entre la combativité et

la brutalité. Sans éducation et maîtrise de soi, certains iraient au-delà des limites permises

pour gagner. Les arbitres ont pour consigne de faire d’abord de la prévention. Mais si la

contestation se répète, ils doivent sanctionner. Après avoir pris trois points, six points, pour

des écarts de conduite, ils ont plutôt intérêt à se tenir ! Nous avons un certain nombre de règles

qui sont bonnes, qui exigent de la discipline. En général, une équipe qui n’est pas disciplinée

ne gagne pas. »

COMMENT GÈRE-T-ON LA CONTESTATION AU RUGBY ?

René HOURQUET

AUTRES MŒURS

STOP À LA CONTESTATION

Page 36: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 38 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

38

Journée de l’arbitrage

(arbitre international de handball)

« Au basket, il y a une certaine distance avec les joueurs, très peu de tutoiements ou de contacts

physiques. Pour ça, je n’aurais jamais pu être arbitre de foot. Dans notre règlement, il y a

obligation que les joueurs s’adressent à l’arbitre de façon courtoise. Bien sûr, ça m’arrive d’être

contesté, et je comprends qu’un joueur puisse se sentir lésé. Mais ça ne lui donne pas

l’autorisation de dépasser une certaine forme de langage. S’il n’est pas correct, je peux siffler

une faute technique. On donne deux lancers francs pour l’équipe adverse, et le ballon sur la

remise en jeu. En amateur, ces limites sont plus souvent dépassées. Heureusement, la

Fédération a décidé que tout joueur qui concède trois fautes techniques consécutives en

championnat sera suspendu un match. Les joueurs prennent vraiment la faute technique comme

une sanction personnelle et font tout pour ne pas en avoir. »

COMMENT GÈRE-T-ON

LA CONTESTATION AU BASKET?

Eddy VIATOR

L’exclusion temporaire de deux minutes est la mesure la plus dissuasive. Ainsi, à chaque coup

de sifflet, tout joueur doit poser la balle à terre sous peine d’être exclu. Cette règle favorise

un jeu direct et empêche toute discussion. Au bout de trois fois « deux minutes », c’est l’expulsion

définitive. En général, la contestation est sanctionnée à l’appréciation de l’arbitre, selon son

intensité. Mais si un joueur se pose devant l’arbitre, il sort automatiquement deux minutes. Pour

un geste déplacé ou une injure envers lui, c’est carton rouge. Il peut aussi utiliser les cartons

jaunes en guise de prévention. Trois jaunes mènent à l’exclusion temporaire.

(président de la commission centrale d’arbitrage à la FFHB)

« D’une manière générale, l’arbitre est respecté au handball. Même si, avec l’arrivée du professionnalisme,

on a vu arriver des comportements qu’on ne voyait pas avant. Nous avons également des règles qui

leur facilitent la tâche. On a une armada de sanctions qui empêchent les joueurs de contester. Et puis,

c’est un état d’esprit. Pourtant, au contraire d’un arbitre de foot, celui de hand n’a pas le temps

de réfléchir à sa décision. Il doit siffler tout de suite, au risque de se tromper, ce qui a plus de chances

d’entraîner des contestations. »

COMMENT GÈRE-T-ON LA CONTESTATION AU HANDBALL?

François GARCIA

Page 37: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 39 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

39

Pour MIchel Platini, utiliser la vidéo dans l’arbitragereviendrait à « déshumaniser »le football. Afin de réduireles erreurs, le président de l’UEFA préconise la présence de deux nouveauxarbitres, chargés de surveiller la surface de réparation. L’InternationalBoard a effectué à Chypre,en novembre dernier, le premier test de ce dispositif,dont faisait partie SaidEnjimi. Pour l’arbitre français, l’essai a étéconcluant.

«L’arbitre additionnel est situé derrière la ligne

de but… Deux systèmes ont été testés : dans

le traditionnel, il se trouve du côté de l’arbitre

assistant, et s’occupe de la moitié de surface qui

était auparavant dévolue à ce dernier ; dans le

système triangulaire, il se place de l’autre côté du

but, et surveille la moitié de surface face à lui…

l’arbitre central s’occupe à chaque fois de l’autre

moitié. En théorie, la surface est donc coupée en

deux. Mais en pratique, si l’additionnel voit

quelque chose dans toute la surface, il doit bien

sûr le signaler au central. »

« J’ai fait deux matchs en tant qu’arbitre

additionnel, et un match en tant qu’arbitre central.

Je trouve que c’est une excellente évolution,

parce que ça permet de croiser les regards et

d’échanger les points de vue. Ça permet aussi

de faire une prévention efficace. Quand les

joueurs sont dans la surface, l’additionnel se

trouve juste à côté d’eux. Il peut leur parler,

notamment sur les corners, quand ils se tiennent

le maillot ou se bousculent. L’effet est immédiat.

Les joueurs écoutent, parce qu’ils savent que le

penalty n’est pas loin s’ils continuent à le faire

devant nous. »

«Nous n’avons pas eu l’occasion de siffler des

décisions majeures, comme un penalty. Ça nous a

surtout permis de ne pas en prendre de mauvaises.

Par exemple, sur une action, un gardien a bousculé

un attaquant sur l’une de ses sorties. J’étais juste

derrière et j’ai pu voir que le gardien ne jouait que le

ballon. Tony Chapron était au centre, il n’avait rien

dit. Je lui ai dit «pas faute, pas faute» dans

l’oreillette, et il a pu repartir tranquillement. Il m’a dit

après le match qu’il ne savait pas s’il y avait faute,

qu’il aurait peut-être sifflé penalty. C’est un confort

très important pour le central. Ce genre d’action est

arrivé plusieurs fois, et cela le conforte dans ses

décisions, surtout quand il a un avis mitigé.»

«C’est assez frustrant d’être bloqué derrière la ligne,

de ne pas courir. Mais il faut en accepter le principe.

On est là pour donner un coup de main à l’arbitre,

et il faut le prendre tel quel. L’objectif est de limiter

le nombre d’erreurs dans la surface. En tant que

central, ce système nous oblige à courir

différemment. Mais c’est une histoire de réglages.

L’inconvénient majeur, c’est que l’on doit garder

notre concentration pendant 90 minutes, alors qu’il

n’y a pas grand chose à faire. »

« Nous sommes tous en contact avec des

oreillettes. Après c’est une question de discipline. Il

faut intervenir à bon escient, seulement si on a

l’intime conviction qu’il y a une information majeure

à donner à l’arbitre central. Le reste du temps il faut

se taire pour ne pas le perturber.»

«J’ai beaucoup apprécié le confort et la tranquilité

d’esprit que cela procure en tant qu’arbitre

central. On sait que l’on a un collègue dans

chaque surface qui est susceptible de nous aider

grandement. Mais il ne faut pas oublier que ça

reste un arbitrage humain, et que l’additionnel

peut se tromper. Là, on ne se trompera plus à

trois, mais à cinq. Ça ne va pas régler tous les

problèmes. »

«Cette compétition n’est pas assez significative

pour avoir un point de vue définitif. On était très

loin de l’ambiance, des enjeux, de la pression des

joueurs et du public qui existent chez les

professionnels. Il faut voir ce que ça va donner

lors de ces compétitions majeures. Mais c’est

une évolution intéressante, et l’International

Board va se réunir fin février pour décider de la

suite à donner à cet essai. »

Initiative : l’arbitrage à 5Pascal Stefani (Textes) / UEFA (Photos)

LE CLUB DES CINQEn novembre, l’International Board a testé l’arbitrage à cinq, à Chypre, lors du tournoi qualificatif pour le championnat

d’Europe des «moins de 19 ans». Said Enjimi faisait partie de l’aventure. Il nous a livré ses impressions, plutôt positives.

REGARDS CROISÉS

ERREURS ÉVITÉES

IMMOBILE

LE DISPOSITIF

INTIME CONVICTION

DU CONFORT

UN TEST

C’EST UNEEXCELLENTEÉVOLUTION. ÇA PERMET DE CROISER

LES REGARDS ET DE FAIRE

UNE PRÉVENTIONEFFICACE.

Un arbitre central, deux juges de touche et deux arbitres additionnels... ça fait bien cinq

Page 38: Foot Citoyen Magazine n°22

RADIO

Radio

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 41 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

41

LE RÔLE DU CAPITAINELe rôle du capitaine est un sujet que nous avions traité dans le numéro 14 de Foot Citoyen.

Pour cette émission dédiée à ce thème, nous avions reçu Pascal Baptiste, le Président du FC

Villennes Orgeval, du District des Yvelines et Philippe Jonot, son vice-président. Avec au

téléphone, un invité, prestigieux, Marius Trésor, ancien capitaine des Bleus.

Didier Roustan : Bonjour à tous. Nos invités du jour sont président et

vice-président du FC Villennes-Orgeval, Pascal Baptiste et Philippe

Jonot. Depuis combien de temps êtes-vous dans le club Philippe ?

Philippe Jonot : Depuis 23 ans Didier.

Didier : Ce n’est pas négligeable, alors que vous, Pascal, c’est un peu

plus récent, sachant que vous ne venez pas de Paris à la base.

Pascal Baptiste : Non, effectivement je suis originaire du Massif

Central où j’ai voyagé dans le monde du football jusqu’à l’âge de

20 ans. Et je joue depuis 10 ans au club du FC Villennes-Orgeval.

Didier : D’accord, et si j’ai bien compris, la politique du club

a évolué. Il y a quelques années votre politique était axée sur les

Seniors et maintenant elle est plus orientée sur les jeunes… Vous

qui êtes plus ancien Philippe (NDLR : il a été de longues années président de ce club, avant de passer la main donc à Pascal Baptiste),expliquez-nous...

Philippe : Pour avoir une équipe compétitive, il fallait acheter des

joueurs, et en Seniors, ça coûte cher. Alors, il y a 8, 9 ans, on en a eu

marre et on a décidé de former des éducateurs pour donner la priorité

aux jeunes. Aujourd’hui, on commence à en récolter les fruits puisqu’il

y a 5, 6 jeunes qui évoluent déjà en Seniors.

Didier : Pascal, tu es maintenant le nouveau président, qu’est ce qui te

pousse à donner de ton temps, de ton énergie, de ta sueur pour un club

de foot ?

Pascal : J’ai commencé le football à l’âge de 7 ans avec un père

toujours présent derrière moi... J’aime bien le milieu associatif, mon

métier, c’est formateur. J’aime transmettre, j’aime partager,

donc lorsque Philippe m’a demandé de prendre la vice-présidence,

j’ai dit oui... Et puis, quelques années plus tard, un autre oui pour la

présidence.

Zap, zap, zap...

Didier : Alors, aujourd’hui on parle du capitanat … Le capitanat c’est un

état d’esprit ! Le capitaine, c’est un rôle particulier. Il doit avoir une

influence, une sorte d’aura sur l’équipe. Ça demande des qualités bien

particulières. Vous avez déjà été capitaine, Pascal, lorsque vous étiez

joueur ?

Pascal : Oui, capitaine,, c’est un poste qui me permettait de

m’exprimer en termes de motivation, de placement, que ce soit chez

les Poussins et les Benjamins. C’est un peu le reflet du club et de

l’équipe, c'est-à-dire la motivation, l’envie de bien faire.

Philippe : Le capitaine a beaucoup de choses à dire, surtout en début

de saison. Il doit avoir des valeurs reconnues par tous et un

certain charisme et des qualités techniques. Mais il doit aussi connaître

le règlement par cœur et, bien souvent, ce n’est pas le cas.

Zap, zap, zap...

Didier : Alors, maintenant, nous sommes en compagnie d’un super

capitaine : Marius Trésor... Bonjour Marius, il ne fait pas beau à

Bordeaux en ce moment.

Marius Trésor : Bonjour Didier, ah non c’est sûr ! Il fait un mauvais

temps, et pour un Antillais, ce n’est pas bien.

Didier : Oui, mais quand on est capitaine, on tient bon la barre malgré

les intempéries. Tu avais déjà le brassard de capitaine à Ajaccio ?

Marius : Non non, j’ai eu mon premier brassard de capitaine à

23 ans, à l’OM, grâce à Jules Zvunka en 1973/1974.

Didier : Toi qui étais plutôt réservé, qu’est ce que le rôle de capitaine

t’a apporté ?

Marius : C’est vrai que le fait d’être capitaine m’a permis de

m’ouvrir un peu, parce que j’essayais d’être un leader sur le

terrain pour permettre à mes coéquipiers de me suivre. J’essayais

aussi de donner l’exemple, parce que j’ai toujours essayé d’être

correct envers l’arbitre, envers mes adversaires. Parfois, il faut

quasiment remplacer l’entraîneur sur le terrain. Mais, au final, être

capitaine de l’OM ou de l’équipe de France, ça n’a pas changé

ma vie...

Didier : Des petites anecdotes en temps que capitaine... Tu me dis

que ça n’a pas changé ta vie, mais bon, capitaine de l’équipe de

France, ce n’est pas rien… Bon, ça aurait été mieux si vous aviez

gagné en 82 aux tirs au but, puis en finale contre l’Italie, mais tu as

gagné une Coupe de France contre Lyon, en 76… Quelles étaient tes

rapports avec Michel Hidalgo ?

Marius : Michel, qui est arrivé à la tête en 1976, a été le premier

à me nommer capitaine de l’équipe de France. On se retrouvait

souvent parce qu’il aimait être entourés de certains joueurs pour

avoir toutes les données avant de choisir. Après notre qualification

pour la Coupe du monde 78, puisqu’on parle d’anecdote, on s’est

retrouvés en Italie pour un match amical (à Naples), où l’on a fait

2-2. Juste avant l’entraînement, il m’appelle et me demande ce

que je pense de l’équipe, puisqu’il y avait des jeunes, et il voulait

savoir s’il faillait les faire débuter directement. Je lui ai dit que

toute l’équipe qui nous avait qualifiés était là, et qu’il devait alors

peut-être faire entrer les jeunes en seconde mi-temps. En même

temps, je voyais les joueurs me regarder, alors je lui ai dit « Ça me

fait plaisir que tu me demandes, mais la prochaine fois, on le fera

autrement ». Je ne voulais pas que les jeunes croient que c’est moi

qui faisais les choix.

Didier : Oui, un capitaine peut avoir des problèmes de ce côté là, on

peut aussi passer pour un chouchou… Marius merci d’avoir été avec

nous, à la prochaine…

Zap, zap, zap

Didier : Alors, pour terminer Pascal et Philippe, tout se passe bien

au club ?

Philippe : Oui, il n’y a pas de problème, il y a une bonne

dynamique. J’ai passé la main à un plus jeune qui connait déjà tout du

«métier» de président.

Didier : Qu’est ce qu’il faudrait changer à l’avenir?

Pascal : Le bénévolat ! C’est très dur, pour l’encadrement des jeunes.

Après c’est une question de moyens.

Didier : Il n’y a pas possibilité de mobiliser les parents ?

Pascal : On les sollicite pour les déplacements … Avec le plus petit

budget des Yvelines, on lutte constamment. On est obligés de faire des

Lotos, des tournois, de faire plein de manifestations à coté….

Le nerf de la guerre aujourd’hui c’est l’argent !

LE CAPITAINE DOIT AVOIR DES VALEURS

RECONNUES PAR TOUS, UN CERTAIN CHARISME ET DES

QUALITÉS TECHNIQUES. (Philippe Jonot)

J’ESSAYAIS D’ÊTRE UN LEADER SUR

LE TERRAIN ET DE DONNER L’EXEMPLE.

(Marius trésor)

A BOUT DE BRAS

LE ZAPPING FOOT CITOYEN

Page 39: Foot Citoyen Magazine n°22

harles, quel est ton premiersouvenir de footballeur ?Ce sont mes débuts à Caucriauville.

Je devais avoir 5 ou 6 ans et je

jouais en bas de mon immeuble avec des copains.

Joël Baudry, qui travaillait pour la ville du Havre,

et passait par là, est allé voir ma mère pour lui

proposer de m’inscrire dans le club du quartier.

Au départ, mon père ne voulait pas et me répétait

tout le temps : « Va à l’école et travaille bien ! »…

Mais ma mère lui a habilement glissé : « Laissons

le y aller, on verra comment ça se passe. » Et dès

le premier entraînement, j’ai pris un plaisir fou.

C’est parce que tu étais très bon pourton âge qu’on est venu te chercher ?Non je ne pense pas, en tout cas pas à cet âge.

Je signais ma première licence, c’est tout ce que je

voyais. La seule chose dont je me souviens

vraiment c’est que je prenais du plaisir à jouer au

football, à marquer des buts… J’évoluais numéro 10.

Joël Baudry, c’est l’entraîneur qui t’ale plus marqué ?Oui, c’est quand même l’homme qui m’a propulsé

dans le football. Il m’a entraîné à Caucriauville, puis

je l’ai rejoint ensuite au club de La Frileuse et il a

suivi ce que je faisais quand j’étais au Havre. Même

si j’étais encore un gamin, c’était un entraîneur que

j’écoutais et que je respectais énormément.

Que t’a-t-il le plus appris ?Il m’a surtout donné confiance et m’a toujours

rassuré sur mes qualités de footballeur. Il m’a rapi-

dement dit qu’il voyait en moi un joueur

professionnel. Mais à l’époque je ne me posais pas

de question, je jouais au foot, je marquais des buts

et je gagnais des matchs.

Tu étais comment petit ?Ça dépend… en général, j’étais et je suis encore

un gars qui se méfie au début, mais une fois que

je suis à l’aise dans un groupe je m’ouvre assez

facilement.

Après Caucriauville, direction leclub de la Frileuse, puis Le HAC…Oui… La première année où j’étais à Frileuse, j’ai

reçu une lettre pour faire un essai au Havre. Mais

ma mère a dit « non ! ». Elle voulait que je reste un

an de plus, pensant que j’étais trop jeune...

L’année suivante, elle a accepté et j’ai réussi à

intégrer le groupe des Benjamins deuxième année

du HAC. Jusqu’à 17 ou 18 ans, j’habitais toujours

chez mes parents à Caucriauville,. En revanche,

ma dernière année de formation au Havre je l’ai

faite en internat au centre parce que mes parents

déménageaient à Paris.

Tes parents ont joué un rôle importantdans tes choix de jeune footballeur ?Oui, malgré le fait qu’ils soient divorcés… j’ai

plutôt grandi avec ma mère. Elle venait parfois voir

mes matchs, mais elle était plus focalisée sur mon

travail à l’école... Elle ne voulait pas que je mise

tout sur le football même si elle m’a toujours dit

qu’elle me soutiendrait dans mes choix, que

je réussisse ou pas.

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 42 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

54

Trajectoire

42

Interview et photos réalisées par Jérôme Perrin

C

MON PÈRE ME

RÉPÉTAIT TOUT LE

TEMPS : “VA À L’ÉCOLE

ET TRAVAILLE BIEN !”

J’AI VU PLEIN

DE POTES PLUS

COSTAUDS QUE MOI

NE PAS REVENIR

À LA RENTRÉE…

«Charles who?» s’interrogent les 53 000

spectateurs de Saint James’ Park, le stade

de Newcastle United, en septembre 2004.

Charles N’Zogbia, un jeune joueur de 18 ans,

arrivé du Havre sans un match de L1 dans les

jambes, qui s’en vient prêter main forte à

Alan Shearer et consorts… Et, depuis quatre

ans, l’international Espoirs arpente le couloir

gauche des « Magpies ». Une incroyable

aventure, de Caucriauville, un quartier du

Havre, à la Premier League, que «Zog»

nous conte avec toute sa franchise, nous

faisant découvrir ce monde merveilleux ou,

parfois, cruel d’un ballon rond qui roule vite.

«Charles who?» s’interrogent les 53 000

spectateurs de Saint James’ Park, le stade

de Newcastle United, en septembre 2004.

Charles N’Zogbia, un jeune joueur de 18 ans,

arrivé du Havre sans un match de L1 dans les

jambes, qui s’en vient prêter main forte à

Alan Shearer et consorts… Et, depuis quatre

ans, l’international Espoirs arpente le couloir

gauche des « Magpies ». Une incroyable

aventure, de Caucriauville, un quartier du

Havre, à la Premier League, que «Zog»

nous conte avec toute sa franchise, nous

faisant découvrir ce monde merveilleux ou,

parfois, cruel d’un ballon rond qui roule vite.

« DÈS MON PREMIER ENTRAÎNEMENT,J’AI PRIS UN PLAISIR FOU ! »

« DÈS MON PREMIER ENTRAÎNEMENT,J’AI PRIS UN PLAISIR FOU ! »

DE LA TERRE À LA LUNEAVEC... CHARLES N’ZOGBIA

Page 40: Foot Citoyen Magazine n°22

Vers quel âge commences-tu vraimentà croire en une possible carrière ?Vers 15-16 ans, avec mon premier entraîneurau HAC, Guy Guibot. C’était un super coach. Le centre de formation a été un choc pourmoi... Là, je passais d’un à deux entraînementspar semaine à un par jour, après les cours... C’était chaud !

C’est aussi un autre état d’esprit…Oui, car tu découvres ce qu’est vraiment l’esprit decompétition. Et tu te dis à bien des moments que tuvas craquer… Au départ je voulais juste prendre duplaisir en jouant et, quand venait le moment oùj’étais fatigué, j’arrêtais (rires) ! Très vite, tu com-prends alors que si tu veux réussir, il va falloir t’endonner les moyens en travaillant dur, très dur. Alorsj’ai pris sur moi et je me suis dit : « J’aime le foot etje vais tout faire pour réussir »… De toute façon,arrivé en « 13 ans » tu n’as plus beaucoup le choix…Plus ou moins dès cet âge là, les choses deviennentréellement sérieuses et tu commences à y croire.

Je crois que tu mesures 1,70 m…1,74 m, s’il te plaît (rires) !

Pardon, 1,74 m… Ceci dit, tu ne faisais pas partie des plus grands de ton équipe... Ta taille t’a-t-elleposé des problèmes ?Non, et puis je me disais que si, chaque fin desaison, on me demandait de revenir l’annéed’après, c’est que je devais valoir le coup. Et j’aivu aussi plein de potes, plus costauds, ne pasrevenir à la rentrée...

Tu suis donc tout le cursus ducentre de formation mais, à l’arrivée,tu ne signes pas pro au Havre ?Non ! On est en 2004, je suis en «18 ans» première année, on termine premiers du championnat de notre région... Ça s’annonce plutôt bien et le club me propose un contrat de Stagiaire pro de deux ans. Et il est prévu que je reprenne avec le groupe de CFA… Le souci,

c’est que je ne voulais pas deux ans, mais trois,estimant que s’ils avaient confiance en moi, celaétait normal (NDLR : s’en suivra alors un longfeuilleton plutôt nébuleux)... Finalement, comme jene peux évoluer dans un autre club français que leHAC, je vais faire un essai à… Newcastle.

Quels souvenirs en gardes-tu ?C’était Sir Bobby Robson le manager del’époque… et je débarque au milieu des LaurentRobert, Alan Shearer… Sans faire preuve de prétention, alors que j’aurais dû reprendre avec laCFA du Havre, je me retrouve à 18 ans entouré detous ces gars, encadré par un coach mythique...

Que te dit Sir Robson à l’issue deton premier entraînement ?En anglais, s’il vous plaît, il me dit : « Petit, tu restesavec nous pour le reste de la semaine ! »

Et ?… Et tout s’est bien passé. A l’issue des 6 joursd’essai, il appelle Olivier Bernard (un autrejoueur français de Newcastle), parce que je necomprenais pas grand-chose en anglais, et lui

demande de me dire : « Ce joueur-là, il restechez nous. Je ne veux pas qu’il fasse des essaisdans d’autres clubs. » J’ai signé dans la fouléemon premier contrat pro.

En septembre 2004, Newcastle mène3-0 face à Blackburn, on est dans lesdernières minutes et… Sir BobbyRobson décide de te faire entrer...Oui, Sir Bobby Robson me fait entrer… mais jen’ai pas touché un ballon (rires). Mais bon, sur le

coup, c’est un choc ! Ce n’est pas possible, tu teretrouves devant plus de 50 000 spectateurs enfeu… Je me suis dit : « C’est un rêve, je vais meréveiller bientôt ! »

Sir Bobby Robson est le coach quit’a le plus marqué à Newcastle ?Oui, c’est certain. Il imposait le respect. Il medisait souvent : « Ecoute, tu es jeune, tu as lesqualités pour réussir, alors prends du plaisir…Moi, j’ai confiance en toi. » Comment veux-tu nepas t’épanouir dans une équipe et un club avecun tel discours ?

Une notion de plaisir du jeu que tupartages…Oui, car jouer au foot, c’est mon métier, mais c’estd’abord et surtout un plaisir.

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 43 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

55

Trajectoire

43

BOBBY ROBSON

ME DISAIT TOUJOURS :“PRENDS DU

PLAISIR ! ”

LA

FICHE

Charles N’ZOGBIA

Né le : 28 mai 1986 à Harfleur (76)

Taille : 1,74 m - Poids : 69 Kg

Poste : Ailier gauche

Clubs Successifs : Le Havre Caucriauville,FC La Frileuse, Le Havre Athletic Club,Newcastle United

Sélections : 16 (Espoirs)

Joël BAUDRY (son premier éducateur à Caucriauville)

« IL SENTAIT VRAIMENT LE FOOTBALL ET NE

S’ARRÊTAIT JAMAIS DE JOUER. »

L’actuel entraîneur Seniors de Montivilliers (76) a

découvert Charles lorsqu’il travaillait pour la ville du

Havre, dans le quartier de Caucriauville. Il nous livre

un portrait du petit «Zog » devenu presque grand.

«À l’époque où j’ai connu Charles, il avaitcinq ans et demi. Généralement, on prenaitles gamins vers six ans, mais il avait l’air tellement enthousiaste à l’idée de s’entraînerdans une équipe que j’ai demandé à sa mèrede me le confier. Je me souviens très bien de ce jour-là. Je suis rentré chez moi et j’aidit à ma femme : « Aujourd’hui, j’ai vu unphénomène. Ce gosse sera professionnel ! »Par la suite, Charles m’a conforté dans monsentiment. C’était un garçon avec d’énormesqualités d’explosivité et une technique au

dessus de la moyenne. Il sentait vraiment lefootball et ne s’arrêtait jamais de jouer.Comme en plus il était assidu et assimilait leschoses rapidement, il a progressé très vite.Gamin, il avait déjà du caractère et chambraitsouvent. S’il passait deux ou trois petits pontspendant l’entraînement, je vous garantisqu’on l’entendait sous la douche. Mais c’étaitaussi un garçon très bien élevé et très respectueux. On a passé de super moments àcette époque, grâce à l’ambiance qu’il y avaitdans le club. Un vrai esprit de famille. »

Page 41: Foot Citoyen Magazine n°22

RADIO

Radio

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 44 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

44

LE RESPECT DE L’ENTRAÎNEURPour aborder le respect de l’entraîneur, Afid Djadaoui, responsable des Seniors du Tremblay-

en-France (DSR), mais aussi responsable d’animation auprès des jeunes à Sevran, enSeine–Saint-Denis, s’imposait… Pied gauche de velours et voix de stentor,

il allie technique et savoir faire pour ne pas être débordé…

Didier Roustan : Afid, tu as 47 ans, tu as été au Paris FC, aux Lilas,tu travailles au service des Sports de Sevran, dans le 93, enfin le 9-3 pour être branché, où tu mets en place également un systèmed’éducation par le football. Alors, explique-moi comment ca se passe du côté de la Mairie... Sont-ils conscients qu’à travers le football on peut« révertébrer » certains gosses et leur donner lesbases et repères qui leur manquent ?Afid Djadaoui : Et bien j’espère qu’ils en sont conscients ! C’est unpeu mon parcours... Grâce au football, j’ai pu devenir éducateur sportif, et j’essaye d’inculquer aux jeunes ce qu’on m’a appris, maisce n’est pas facile…Frédéric Hamelin : Les temps ont changé…Afid : Voilà... J’ai crée un secteur qui s’appelle prévention par lesport. Le football reste bien sûr le moyen de toucher un maximum degamins.Didier : Ça consiste en quoi ?Afid : Nous recevons pendant les vacances scolaires ces enfants quin’ont pas les moyens de s’inscrire dans les clubs. On les incite àvenir taper le ballon au stade, avec à côté de cela des actionscitoyennes, basées surtout sur le respect…Frédéric : Et ils sont réceptifs ?Afid : Oui, les résultats sont probants dans la mesure où je toucheentre 100 et 150 gamins par jour, ce qui n’est pas rien.Didier : Le thème d’aujourd’hui sera le rôle de l’entraîneur et sonautorité naturelle d’une manière générale. Beaucoup d’entraîneursont des bases pédagogiques et sont éducateurs dans l’âme…

Afid : Quand on parle d’éducateur, il y a les formations qui vontavec… Celui qui se dit éducateur mais qui ne se sent pas concernépar l’éducation des jeunes, ce n’est pas un éducateur, c’est juste unaccompagnateur pour moi.Frédéric : Afid, il a une personnalité, un charisme… J’ai été un Juniorsous ses ordres (NDLR : et il a fait un paquet de clubs ce Frédéric, etpourtant, c’était avant l’arrêt Bosman), alors qu’on n’avait que deux ansd’écart, mais il avait déjà cette maturité avant l’heure, ce côté vieuxsage, il savait mêler l’humour et la distance, ce qui lui donnait une auto-rité naturelle. Il avait aussi de très grosses qualités de footballeur…Didier : Ça aide, quand on est bon footballeur et qu’on entraîne desjeunes, ça crée une forme de respect… Afid, tu plaisantes, tu es prochedes joueurs, mais tu dois aussi mettre une distance, sinon tu te faisbouffer aussi… Afid : Tout à fait. C’est la confiance. Il ne faut pas tricher, que ce soitavec les gamins ou les moins jeunes. On fait confiance, mais il fautque le joueur nous rende cette confiance. Il y a toujours une barriè-re à ne pas franchir avec le coach, qui peut aussi être le confident.Ce n’est pas toujours évident…Didier : … Surtout quand on débute, et toi tu as commencé trèsjeune…Qu’est-ce que tu donnerais comme conseil à un jeuneentraîneur qui s’occuperait des catégories un peu compliquées, les« 15 ans » ou les « 18 ans » par exemple ?Afid : Ce sont les catégories les plus difficiles à gérer aujourd’hui…De bien être à l’écoute des enfants, de bien connaîtrel’environnement dans lequel ils vivent, c’est important pour pouvoirtirer le meilleur d’eux-mêmes sur le terrain... Si le gamin arrive enretard à l’entraînement, il peut y avoir des raisons à cela.Didier :Oui, voilà, donc pas la peine de l’engueuler s’il arrive en retard, sion connait un minimum sa situation, on peut comprendre… A cet âge-là, surtout, où les gosses sont très sensibles…Afid : …surtout aujourd’hui. Les parents ne savent plus trop comment faire. Nous sommes un peu le relais avec lesjeunes. Nous sommes le relais dans le stade, et la difficulté c’est de continuer ce relais en dehors.Frédéric : Car ce que vous enseignez sur le terrain rejaillit évidem-ment sur l’extérieur…Afid :: Tout à fait ! Je le vois tout de suite. Si le gamin se comporte bien sur le terrain, dehors il se comporte bien. S’il sechamaille parce qu’il a reçu un coup, dehors c’est la même chose.Le sport, et le football en particulier, c’est l’école de la vie…Zap, zap, zap...Laurent Tessier (Foot Citoyen, également) : On va écouter Geoffreyqui a 19 ans, et qui s’occupe des Débutants, des enfants de 6, 7 ansdonc, à propos de l’entraîneur. À cet âge, ça peut vite ressembler àune garderie et il est très difficile de les contrôler. Alors quelle est laplus grande difficulté lorsque l’on coach des Débutants ? Voici saréponse…Geoffrey : C’est leur concentration. Au bout d’une heure, ils commencent à perdre la tête, ils ne sont plus avec nous. C’est là qu’il faut les remotiver. Dans ce cas-là on leur fait faire une petitepause, on parle et ensuite, c’est bon, c’est reparti. Didier : Maintenant on va écouter des petits gosses en question,Laurent…Laurent : Plus particulièrement Bastien. Il a 9 ans et joue en pous-sin. Il va nous expliquer le contenu de ses entraînements avec sonentraîneur et quel discours leur tient leur coach lors des matchs.Bastien : Il nous laisse faire des pauses. Il nous respecte et on

essaie de le respecter. Le plus important pour les entraîneurs est quel’on progresse, pas que l’on gagne les matchs à mon avis. L’essentieln’est pas de gagner, de marquer plusieurs buts... Il nous dit qu’il fautessayer de bien jouer, de faire tout ce que l’on a appris le mercredià l’entraînement, pour le montrer dans les vrais matchs.Afid : C’est bien ce qu’il dit le gamin en parlant d’encouragement. Il ya quelques pseudos éducateurs qui jouent la gagne absolument, sansavoir une approche psychologique, sans savoir, au niveau de la pro-gression, le travail qu’ils doivent accomplir. Le plus important chez lespetits, c’est de leur donner un ballon, qu’ils prennent du plaisir à traversles matchs et les entraînements.Frédéric : Voilà, c’est aussi ne pas dépasser les limites quand on estentraîneur, ne pas toucher à la sécurité psychologique de l’enfant. Onva entendre Alexandre, responsable de l’école de foot de l’ACBoulogne Billancourt à le sujet. Alexandre : Les joueurs ont un devoir de discipline et de respect desrègles, mais à partir du moment où l’entraîneur a un manque de respect avec son devoir de sécurité affective des enfants, c'est-à-dire la violence psychologique. Fatalement derrière la réaction de l’enfant peut être une réaction de violence physique, de désobéissance ou de marginalisation. Je m’explique. Par exempleun gamin qui ne va pas avoir l’attention de l’entraîneur, alors lecoach va mal communiquer avec lui ou d’un seul coup il va l’écartersans avoir pris le soin d’y mettre les formes. Dans ces conditions,l’enfant peut prendre ça comme une violence psychologique. Et du coup,se mettre en conflit avec l’éducateur.Didier : Voilà, un discours très intéressant d’Alexandre, le respon-sable des éducateurs de Boulogne Billancourt. Afid, merci d’avoir étéen notre compagnie, et à bientôt chers auditeurs sur Europe1 Sport.

CELUI QUI SE DIT ÉDUCATEUR MAIS QUI NESE SENT PAS CONCERNÉ

PAR L’ÉDUCATION DESJEUNES, CE N’EST PASUN ÉDUCATEUR, C’EST

UN ACCOMPAGNATEUR… (Afid Djadaoui)

LE PLUS IMPORTANT POUR LES ENTRAÎNEURS

EST QUE L’ON PROGRESSE, PAS QUE

L’ON GAGNE LESMATCHS.Bastien (9 ans)

L’ENTRAÎNEUR EN QUESTION

LE ZAPPING FOOT CITOYEN

Page 42: Foot Citoyen Magazine n°22

Quelle est la clé pour permettre à des

jeunes de raccrocher scolairement ?

J’ai la chance d’être à la fois leur

entraîneur, leur éducateur à l’internat et de

travailler avec les professeurs pendant les

temps de vie scolaire. Au lycée professionnel

Saint-Jean de la Fondation d’Auteuil, scolarité,

accompagnement éducatif et football forment

un tout. Ainsi, les règles apprises sur le terrain

de foot, comme le respect de l’autre, l’esprit

d’équipe, la tenue vestimentaire, le langage, le

goût de l’effort, la volonté de réussir, sont mises

en œuvre aussi à l’école et dans la vie de

l’internat. C’est vraiment une école de vie. Le

football est un peu ‘la carotte’ pour les faire tra-

vailler scolairement.

Mais tous ne seront pas de futurs

footballeurs professionnels ?

Notre objectif premier est de permettre le rac-

crochage scolaire et l’insertion professionnelle

des jeunes... Le football est un moyen qui

fonctionne pour certains et nous l’avons vérifié

pendant ces cinq années d’existence. Nous

partons de leur rêve pour les amener, petit à

petit, à la réalité. D’ailleurs, l’essentiel de mon

travail consiste à les préparer à l’échec au cas

où ils ne pourraient pas poursuivre une carrière

professionnelle de footballeur. Cela passe par la

découverte de métiers annexes, comme la

formation à l’arbitrage par exemple.

Reportage

LA FONDATION D’AUTEUIL: LE GOÛT D’APPRENDRE

Une des missions premières de la Fondation d’Auteuil est de venir en aide aux jeunes en grande difficulté... Au LycéeProfessionnel de Saint-Jean, à Sannois, dans le Val-d’Oise, l’un des nombreux établissements de la Fondation, on a misé sur

le football comme axe de réussite… et ça marche ! De quoi s’attirer le soutien de la Fondation d’Entreprise Française des Jeux.

épartie dans 170 établisse-

ments, la Fondation d’Auteuil

accueille, éduque et insère

professionnellement plus de

10 000 garçons et filles en

grande difficulté, sociale, familiale ou affective !

Des jeunes qui sont confiés par leurs familles

(70 %), les services sociaux ou les juges pour

enfants (30 %). Souvent issus de familles

en détresse ou en difficulté dans leur mission

éducative, ils peuvent avoir été victimes

de maltraitances, être en prise avec un

environnement délinquant ou se trouver,

simplement, en quête de repères. Parmi ces

multiples établissements, celui de la section

sportive du lycée Saint-Jean de Sannois, dans

le Val-d’Oise, a opté pour vecteur d’éducation

le sport le plus populaire pour les catégories

7-18 ans. Ici, le ballon rond agit alors comme

un déclic, un moyen de valorisation

et d’amélioration de l’image qu’ils ont

d’eux-mêmes. La clé de la réussite consiste

dans un travail particulièrement intensif en

commun et croisé entre les professeurs, les

éducateurs de l’internat et l’entraîneur de foot,

suivant le modèle des anciennes classes

« sport-études », mêlant études et activités

sportives de haut niveau. La semaine, les

jeunes s’entraînent à l’internat, avant d’aller

jouer le week-end dans des clubs amateurs de

la région.

Pour être efficace, le lycée Saint-Jean

a décidé d’intégrer des enfants aux qualités

footballistiques certaines, puisque 35 %

des jeunes de cet établissement accèdent

ensuite à un centre de formation… Mais

là n’est pas la seule finalité, et pour

ceux qui échouent dans leur objectif football,

près de 78% poursuivent leurs études

en Seconde générale, les autres en Seconde

professionnelle.

Certains parents peuvent témoigner de cette

réussite, comme ce père parlant de son fils :

« A cause de son comportement, mon fils a été

exclu de deux collèges. Je ne savais plus quoi

faire pour lui. Il avait 4 de moyenne générale en

5e. Maintenant, quand il rentre le week-end,

il fait ses devoirs. Son comportement a changé,

et ça, je pense que le football et la Fondation

y sont pour beaucoup. Il est cadré, posé et sait

que s’il veut y arriver, il lui faut travailler ».

Un exemple supplémentaire que le football est

un formidable atout dans l’éducation des

jeunes, qui plus est en difficulté… Ou comment

retrouver le gout d’apprendre.

Charly JEAN (responsable technique de la section sportive du Lycée Saint-Jean)

« LE FOOTBALL SERT DE “CAROTTE’’ POUR LES FAIRE TRAVAILLER… »Ancien professionnel de Lens et Limoges, aujourd’hui manager général de l’AS Poissy, Charly Jean cumule également la fonction

de responsable technique de la section sportive du Lycée Saint-Jean depuis la mise en place de ce dispositif en 2003.

R

45

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 45 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Fondation d'Auteuil, Jean Besnard/Fondation d'Auteuil et J-P Pouteau/Fondation d'Auteuil

JEUX D'AILLEURS...

Page 43: Foot Citoyen Magazine n°22

Dimanche 21 septembre, dans le cadre du premier tour de la Coupe du Morbihan Seniors, l’US Ploeren Breçoit l’US Arradon B. À dix minutes de la fin de la rencontre, Ploeren mène 2-1 quand l’arbitre siffle unpenalty en faveur d’Arradon, suite à une faute « présumée » sur Dominique Hiegel (NDLR : Vous ne

trouvez pas qu’il a un petit côté Hristo Stoitchkov ?). Celui-ci estime alors qu’il n’y apas faute à son encontre et en avertit l’arbitre, qui refuse de revenir sur sadécision... Dominique se charge alors lui-mêmede l’exécution et, au lieu de tirer et d’essayer demarquer, fait une passe au gardien de Ploeren.Score final : Ploeren : 2 - Arradon : 1 !!! Un geste vraiment super, comme il est indiquésur son maillot.

Gérard GOUZERCH (dirigeant de l’US Arradon, District du Morbihan)NDLR : Pas de doute on a retrouvé Hristo…Serait-il devenu Fair-Play ? Et bravo àDominique Hiegel pour son geste.

Les Echos

HISTOIRES COURTES (SUITE)

« SPORTS AU FÉMININ DANS LES BANLIEUES »

Le 14 janvier 2009, à l’Espace Fraternité d’Aubervilliers

(Seine-Saint-Denis), se tiendra, de 9h00 à 18h30, la conférence« Sports au féminin dans les banlieues », organisée parl’Agence pour l’Éducation par le Sport. L’objectif est de : « contribuer à une meilleure connaissance des problématiquesliées à la pratique sportive des femmes dans les banlieues ;présenter de nombreux témoignages concernant les bonnespratiques portées par les collectivités et les associations ; fairedes propositions pour développer l’éducation du public fémininpar le sport. » Cette journée rassemblera des politiques, desexperts et des protagonistes qui travaillent au quotidien sur le terrain, qui ont fondé et font vivre des centaines d’associations etde projets dans les quartiers. On y retrouvera notamment desfemmes qui ont choisi le football pour se faire entendre ets’affirmer, à l’instar de « Femmes Plus », qui œuvre dans ce sensà Dreux, depuis déjà de nombreuses années, avec des résultatstrès probants. Alors, filles ou... garçons, bougez-vous !

LA PHOTO DU MOIS

N’OUBLIEZ PAS !

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 46 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

46

LA PHRASE DU MOIS

C’EST NORMAL DE SOURIRE SUR

UN TERRAIN. SI LESJOUEURS NE PRENNENT

PAS DE PLAISIR, ILS NE PEUVENT PAS

EN DONNER ! (STEVE SAVIDAN, APRÈS SON PREMIER MATCH

AVEC LES BLEUS, FACE À L’URUGUAY.)

Pour toute information, contacter l’Agence Pour

l’Education par le Sport. Tél. : 01 44 54 94 33

Site Internet : www.apels.org

DOMINIQUE ET HRISTO...

Le foot a parfois un rôle à jouer... PrenezCuba-Etats-Unis, du 6 septembre dernier...Ces deux formations ne s’étaient pas rencontrées depuis 1949! Faisant fi dupassé, la sélection US a donc été reçue, à la Havane, pour un match qualificatif à laCoupe du monde 2010, qui se déroulera enAfrique du Sud. Une rencontre forcémentspéciale, au regard du différend politiqueprofond existant entre les deux nations,depuis la révolution Castriste de 1959 etl’embargo imposé à Cuba par lesAméricains depuis 1962. Pour info, lesEtats-Unis l’ont emporté 1-0.

Dominique...

... et Hristo, le vrai.

HISTORIQUE

Page 44: Foot Citoyen Magazine n°22

PLATEAU TECHNIQUE LES ANGLES HEBDOPRINT - FOOT CITOYEN - 48 - MAGENTA CYAN JAUNE NOIR

Portfolio FC Nantes