Factsheet Gaz fossile – Biogaz – Power-to-Gas

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[email protected] Version mars 2019 Factsheet Gaz fossile Bioga z Power - to - Gas Potentiels, limites, besoins en infrastructures 1 Cette publication se concentre sur les gaz sources d'énergie étant donné que le débat sociétal est ici le point de départ. Pour le WWF Suisse, il est évident qu'il faut immédiatement et largement réduire l'utilisation de pétrole (et de charbon) Résumé L’objectif ancré dans l’Accord de Paris sur le climat, visant à éviter les bouleversements climatiques catastrophiques, exige que la combustion de gaz fossile et de pétrole cesse presque totalement en Suisse, au plus tard au cours des deux décennies à venir. Cette échéance soulève la question de savoir dans quelle mesure le gaz fossile 1 peut être remplacé par des gaz renouvelables, dans ce délai. Ce document traitera notamment du biogaz ou du gaz synthétique en leur qualité d’énergies renouvelables. Pour qu’à moyen terme, le biogaz reste respectueux du climat, son bilan en matière d’émissions de gaz à effet de serre doit être amélioré de manière significative. D’une conformément au budget CO2 de la Suisse. La publication ne définit pas de stratégie climatique complète applicable à toutes les sources d'énergie et tous les secteurs, bien que celle-ci soit nécessaire. © GLOBAL WARMING IMAGES / WWF

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Factsheet

Gaz fossile – Biogaz – Power-to-GasPotentiels, limites, besoins en infrastructures

1Cette publication se concentre sur les gaz sources d'énergieétant donné que le débat sociétal est ici le point de départ.Pour le WWF Suisse, il est évident qu'il faut immédiatementet largement réduire l'utilisation de pétrole (et de charbon)

RésuméL’objectif ancré dans l’Accord de Paris sur le climat,visant à éviter les bouleversements climatiquescatastrophiques, exige que la combustion de gazfossile et de pétrole cesse presque totalement enSuisse, au plus tard au cours des deux décennies àvenir. Cette échéance soulève la question de savoirdans quelle mesure le gaz fossile1 peut être remplacépar des gaz renouvelables, dans ce délai. Ce documenttraitera notamment du biogaz ou du gaz synthétiqueen leur qualité d’énergies renouvelables. Pour qu’àmoyen terme, le biogaz reste respectueux du climat,son bilan en matière d’émissions de gaz à effet de serredoit être amélioré de manière significative. D’une

conformément au budget CO2 de la Suisse. La publicationne définit pas de stratégie climatique complète applicable àtoutes les sources d'énergie et tous les secteurs, bien quecelle-ci soit nécessaire.

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manière ou d’une autre, le biogaz indigène n’est pasen mesure de se substituer à plus d’un neuvième desventes actuelles de gaz fossile, même en exploitant sonplein potentiel. Le biogaz importé n’entre pas en lignede compte à titre de solution envisageablevéritablement durable, par le simple fait que sonpotentiel durable en Europe est bien trop faible pourla décarbonisation du secteur énergétique. Parailleurs, le client suisse achetant actuellement dubiogaz importé ne profite pas de l’entière plus-valueécologique de son biogaz – mais reçoit du gaz fossilecertifié. Les gaz synthétiques ne ménagent le climatque s’ils sont produits, entre autres, avec 100% decourant renouvelable produit en plus. Les pertes derendement élevées des procédés Power-to-Gas (PtG)ont pour effet de rendre les coûts du gaz synthétiquenettement plus élevés que ceux de l’utilisation directede l’électricité (pompes à chaleur, mobilité électrique),et d’accroître fortement le besoin de production decourant supplémentaire, avant tout d’origine éolienneet solaire. Dans le secteur du bâtiment, la baisse desbesoins énergétiques, l’utilisation directe d’énergiesrenouvelables (géothermie en profondeur, énergiesolaire thermique, bois) ainsi que les pompes àchaleur alimentées par du courant renouvelabledoivent être privilégiées. Il reste au gaz synthétiqueavant tout les champs d’application où une utilisationefficace et directe de l’électricité n’est pas possible. Onignore encore si le PtG sera nécessaire pour lestockage saisonnier de l’électricité. Même si le PtGétait utilisé dans ce but, le réseau de distribution degaz serait superflu.

Il faut s’attendre à voir reculer massivement les ventesd’agents énergétiques gazeux en Suisse en l’espace dequelques décennies. Cette évolution aura desconséquences pour les propriétaires et les exploitantsde réseaux de distribution de gaz, c’est-à-dire pour lesfournisseurs ainsi que les villes et communes: desadaptations de la durée d’amortissement, de latarification et de la planification de l’entretien sontdonc urgentes, comme la mise en œuvre d’uneplanification intelligente, régionale et différenciée dudémantèlement des réseaux de distribution de gaz. Sices mesures ne sont pas prises, l’exposition au risquedes exploitants et propriétaires de réseaux vafortement augmenter et les objectifs de l’Accord deParis sur le climat vont devenir difficilementaccessibles.

2 Ces données ainsi que toutes les autres informations simi-laires proviennent de l’OFEN. Statistique globale suisse del’énergie 2017 ainsi que de la Statistique annuelle 2018 del’ASIG. En accord avec la statistique globale de l'énergie,c’est la valeur calorifique la plus basse qui est prise encompte3 Seul le Portugal présente un taux de croissance supérieur.Au Royaume-Uni, le réseau a même décliné au cours des

Comment et pourquoi utilisons-nous du gaz fossile aujourd’hui?La part du gaz fossile dans la consommation finaled’énergie en Suisse est de tout juste 14%, plaçant cetagent énergétique en troisième position derrière lepétrole et l’énergie hydraulique2. Tandis que laconsommation de gaz fossile est restée plutôtconstante en chiffres absolus (environ 35 000 GWh deconsommation énergétique brute en 2017), sa partdans la consommation globale (en baisse) augmentesans cesse. Près des deux tiers du gaz fossile servent àdes applications à basse température (chauffage delocaux et d’eau) dans les foyers et les entreprises deservices, tandis qu’un tiers revient à l’industrie(chaleur utilisée dans les processus). Les agentsénergétiques gazeux n’ont joué à ce jour qu’un rôleminimal dans le trafic et la production d’électricité enSuisse. L’ensemble du gaz fossile consommé en Suisseest importé, pour l’essentiel de l’UE, de Russie et deNorvège.

Le réseau de conduites en Suisse, sans lesraccordements aux ménages, s’étend sur près de20 000 km – la majeure partie (environ 17 500 km)faisant partie des réseaux de distribution régionaux.En comparaison internationale, le réseau suisse estcertes plutôt petit, mais il s’est largement développéau cours de ces dernières années avec environ 2% paran, ce qui constitue sans doute un record.3 Il n’est pasconçu pour stocker d’importantes quantités de gazfossile: sa limite est de 28 GWh (en raison desvariations de pression). S’y ajoutent de petitesinstallations de stockage journalier, d’une capacitétotale de 49 GWh, permettant de couvrir laconsommation de gaz fossile en Suisse pendant 18heures. Il n’existe par ailleurs pas d’installation destockage de grande ampleur en Suisse. Pourcompenser les petites variations et assurerl’approvisionnement, notre pays s’est assuré, par unaccord bilatéral, un droit d’accès au réservoir natureld’Etrez, en France. La capacité de stockage totaleassurément disponible en Suisse pour le gaz

dernières années et aux Pays-Bas, une partie du réseau desconduites des gaz est démonté dans la région de Groningue(stastique annuelle. 2008-2018 de l’ASIG ; CEER. Bench-marking Report 6.1 on the Continuity of Electricity and GasSupply. Data update 2015/2016. 2018; https://www.govern-ment.nl/latest/news/2018/03/29/dutch-cabinet-termination-of-natural-gas-extraction-in-groningen)

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fossile se monte ainsi à 1510 GWh4 en tout etcouvre la consommation suisse pour 15 jours.

Quelle est la pertinence du gaz fossile pour la protection du climat?La combustion de gaz fossile dégage du CO2, un gaz àeffet de serre. L’effet du gaz fossile sur le climat estencore plus important lorsqu’il n’est pas brûlé et qu’ilest libéré directement dans l’atmosphère, le potentieldu méthane en matière d’effet de serre étantnettement plus élevé que celui du CO2. Pour desraisons de protection du climat, le gaz fossile devraitrester si possible sous la surface de la Terre5.

Le facteur d’émission du gaz fossile utilisé pour leschaudières est de 228 g CO2eq par kWh de teneur enénergie utile en prenant en compte la production et letransport en Suisse6. Les émissions spécifiques sontainsi d’un quart inférieur à celles du mazout, soitnettement plus élevées que celles du biogaz(142 g CO2eq par kWh) et environ six fois plusimportantes que celles des pellets en bois7.L’utilisation du gaz fossile comme combustibleoccasionne en Suisse près de 7 millions de tonnes de

4 HSR. «Speicherkapazität von Erdgas in der Schweiz.»20175 L'indépendance de l'importation, la géopolitique, la créationde valeur au niveau domestique sont autant d'autres raisonsen faveur du renoncement de l'utilisation du gaz fossile. Cesraisons n'ont pas été mise au premier plan dans la présentepublication.6 Selon certaines études, les fuites de méthane durant l’ex-traction et le transport sont nettement sous-estimées. En toutcas, le gaz issu du fracking présenterait un facteur d’émis-sion nettement plus élevé. https://jere-myleggett.net/2016/05/09/an-open-letter-to-solar-compa-nies-beware-alliance-with-the-gas-and-oil-industry/ consultéle 23.5.2018 et https://arstech-nica.com/science/2018/06/study-us-oil-and-gas-methane-emissions-have-been-dramatically-underestimated/ con-sulté le 26.6.187 KBOB. «Données des écobilans dans la construction2009/1:2016» 2017

CO2eq, par année, soit près d’un cinquième desémissions de CO2 liées à l’énergie en Suisse.8

Si la Suisse prend au sérieux l’Accord de Paris sur leclimat qu’elle a ratifié au niveau international, sonbudget d’émissions nationales nettes à compter del’année d’entrée en vigueur de l’accord (2016) estlimité à 450 millions de tonnes de CO2eq maximum. Encas de diminution linéaire, la Suisse devra réduire sesémissions nettes à zéro sur son territoire au plus tardjusqu’en 2038.9 Et même si l’on se base sur deshypothèses moins strictes et que l’on accorde à laSuisse quelques années d’émissions fossilessupplémentaires, la conclusion reste la même: la

combustion de toutes les matières premières fossiles,et donc aussi celle du gaz fossile, doit être terminée auplus tard dans deux à trois décennies10. Le futurproche est placé sous le signe du 100% renouvelable etdu 0% gaspillage. En effet, l’objectif «zéro net» tolèreencore au mieux les émissions que les connaissancesactuelles ne permettent pas totalement d’éliminer,comme celles de l’agriculture, et qui doivent donc êtrecompensées par des émissions négatives. Les usagesprévus du gaz fossile dans notre pays – chaleur dansles habitations, eau chaude, processus industriels –peuvent et doivent en revanche pouvoir fonctionner

8 OFEV. «Emissions des gaz à effet de serre d’après la loisur le CO2 et d’après le Protocole de Kyoto, seconde pé-riode d’engagement (2013-2020).» 20179 EBP. «Budget CO2 de la Suisse. Rapport succinct.» 2017 Cette valeur correspond parfaitement aux conclusions durapport exceptionnel de l’IPCC au sujet du 1,5 degré. Parailleurs, l’industrie gazière ne vise clairement qu’à garantirla décarbonisation que 100 ans plus tard:https://www.erdgas.ch/wissen/detail/knowledge-topic/2-er-neuerbare-gase/10Ces éléments ont permis de calculer chaque année un tauxde réduction des émissions de CO2 d'environ quatre pointsde pourcentage. Il est ainsi évident qu'il ne suffit plus au-jourd'hui de remplacer les chauffages au pétrole par deschauffages au gaz. En effet, cela correspondrait simple-ment à une réduction annuelle de 1,25% (25% répartis sur20 ans de vie)

301

228

130 108

27

MazoutEL

Gaznaturel

Biogaz Chauffageà distance

Granules(pellets)

Emissions influençant le climatg CO2eq/ kWh énergie finale

01020304050

1990

1994

1998

2002

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2010

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Mio

.tCO

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Objectif de protection climatique dela Suisse compatible avec l'Accord

de Paris

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sans énergies fossiles. Dans le secteur du bâtiment enparticulier, les besoins énergétiques actuels peuventêtre fortement réduits et le reste couvert par lesénergies renouvelables11.

En bref: l’objectif global porté par l’ensemblede la société visant à éviter lesbouleversements climatiques catastrophiquesexige, entre autres, que la combustion de gazfossile en Suisse cesse presque totalement aucours des deux décennies à venir au plustard12.

Si le gaz fossile n’a plus sa place dans le systèmed’approvisionnement énergétique du futur proche, laquestion se pose de savoir quel rôle peuvent jouer lesagents énergétiques plus respectueux du climatcomme le biogaz ou le gaz synthétique et quelles sontles infrastructures nécessaires dans ce but.

Comment se développent les ventes de gaz?Il n’est pas pertinent de se demander si la Suisse a déjàdépassé le pic gazier, ou si cela reste à venir. En effet,la baisse est prévisible. En 2013 a été enregistrée laplus haute consommation d’énergie brute jamaisconnue pour les sources d’énergie gazeuse. Il est clairque dans certaines régions (telles que les villes deWinterthour et de Zurich), la consommation de gazdiminue depuis des années déjà. Dans l’UE, le picgazier a été atteint depuis longtemps: laconsommation finale de gaz ne cesse de chuter depuis2005 et a déjà été réduite de 12%.13

11 Agora Energiewende. «Efficiency First: Wie sieht ein effi-zientes Energiesystem in Zeiten der Sektorkopplung aus? »2017: «La réduction de la consommation d’énergie primairedes bâtiments a une importance décisive dans la réalisationdes objectifs climatiques.»12 Les études réalisées pour la Grande-Bretagne sont parve-nues aux mêmes conclusions (McGlade et al. «The futurerole of natural gas in the UK: A bridge to nowhere?” 2018)tout comme celles pour l'UE (Tyndall. «Natural Gas and Cli-mate Change.» 2017)13 Eurostat. 2018. https://ec.europa.eu/eurostat/tgm/ta-ble.do?tab=table&init=1&plugin=1&lan-guage=en&pcode=ten00095

L’ampleur de la réduction de la consommation de gazen Suisse à l’avenir a déjà été estimée en 2011 dans lecadre d’une étude mandatée par l’OFEN et le secteurgazier. Par ailleurs, d’après les estimations, lademande de gaz en Suisse va diminuer de 45 à86% entre 2008 et 2050 selon la zone dedesserte et le scénario. Et ces chiffres ne tiennentmême pas compte des conditions-cadres actuellestelles que l’Accord de Paris sur le climat, les nouvellesconclusions de l’IPCC pour le climat, la MuKen 2014et la révision en cours de la loi sur le CO2. Même lesestimations dans le cadre des activités habituelless’attendent à une baisse des ventes de gaz de moitiéenviron d’ici 205014. Les facteurs ici ne sont bienévidemment pas uniquement liés aux conditions-cadre des politiques climatiques, mais aussi au reculdes besoins de chauffage et aux avantages financiersprésentés par les technologies de production dechaleur alternatives, ce qui signifie que les ventes degaz diminueront largement dans tous les cas – selondes estimations actualisées, elles reculeraient mêmebien davantage que ce qui avait été prédit en 2011. Deplus, les besoins restants en gaz doivent êtretotalement décarbonisés dans le même délai, et celaest également valable pour l’UE15.

14 OFEN. L'avenir des systèmes d'alimentation en énergiepour les conduites en 2011.15 Une analyse de Prognos a montré qu'il existe pour presquetous les principaux pays gaziers en Europe des scenarii se-lon lesquels l'utilisation du gaz fossile sera réduit à seule-ment une fraction du niveau actuel (env. 10%) voire dispa-raîtra totalement lorsque les objectifs énergétiques etclimatiques pour 2050 auront été atteints voire surpassés.Prognos. „Klimaschutz und Gasinfrastruktur.“ 2018. et E3G.„Renewable and Decarbonised Gas. Options for a Zero-Emissions Society.» 2018.

Gaz fossile98.0%

Biogaz CH0.8% Biogaz

etrangèr1.2%

Agents énergétiques du reseau dedistribution de gaz de Suisse 2017

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Quel est le rôle joué par lebiogaz?D’après la statistique globale suisse de l’énergie del’OFS, près de 1410 GWh d’énergie brute ont été pro-duits sous forme de biogaz en 201716. Sur cette quan-tité, un cinquième (296 GWh) s’est retrouvé dans leréseau, le reste ayant servi à produire de l’électricitéet/ou de la chaleur sur le lieu de sa production. En ef-fet, en raison de la complexité technique, le traitementet l’injection du gaz dans le réseau ne sont actuelle-ment judicieux que pour les installations de produc-tion de très grande taille proche des réseaux de gazexistants (au nombre de seulement 27 en Suisse en2017). Au biogaz suisse injecté s’est ajouté en 2017433 GWh de biogaz importé de l’étranger (surtoutd’Allemagne et du Danemark). Récemment, tant l’in-jection de biogaz que l’importation de biogaz ont for-tement augmenté. Cependant, le biogaz représente àce jour environ 2% des ventes totales de gaz.17 Dansces conditions, la marque «gaz naturel/bio-gaz» (ou même dans l’ordre inverse «bio-gaz/gaz naturel) utilisée par la branche danssa communication frise la tromperie à l’égarddes consommateurs. Pour correspondre auxproportions réelles, le logo «Biogaz» devraitêtre 50 fois plus petit que le logo «Gaz natu-rel».

Biogaz suisseEn raison des contributions infimes offertes par lesbiogaz localement produits, il est indispensableque les potentiels suisses naturels etrenouvelables en biogaz soient rapidement ettotalement exploités d’une façon qui produise peude CO2, et, le cas échéant, que les conditions-cadresqui y sont nécessaires soient mises en place. Toutefois,

16 OFEN. «Statistique globale suisse de l’énergie 2016.»201717 Statistique annuelle de l’ASIG 2017.18 Steubing et al. «Bioenergy in Switzerland: Assessing thedomestic sustainable biomass potential.” 2010.econcept. «Gekoppelte Wärme- und Stromproduktion ausBiomasse für die Schweiz: Vision – Strategie - Massnah-men.» 2011.WSL. «Biomassepotenziale der Schweiz für die energeti-sche Nutzung.» 2017.19 WSL. «Biomassepotenziale der Schweiz für die energeti-sche Nutzung.» 2017.

quelle quantité de biogaz supplémentaire peut êtreproduite de façon durable en Suisse? Les donnéesvarient suivant les études, en fonction des hypothèsesde départ18. Seul point d’entente: le substratprésentant les meilleures perspectives est l’engrais deferme. Si l’on se base sur la publication la plus récente,on parvient à un potentiel exploitable techniquementet durablement, non encore totalement utilisé àl’heure actuelle, avec un maximum de 2500 GWh/ande rendement en biométhane. S’y ajoutent encorejusqu’à 1000 GWh/an de diverses sources(notamment des sous-produits de la culture agricole,la part organique des ordures ménagères, les déchetsverts domestiques et provenant de l’aménagementpaysager, les déchets organiques de l’industrie et ducommerce et les boues des stations centralesd’épuration)19. Au total, ces éléments correspondent àun rendement du biométhane supplémentaire à basede substrats indigènes de bien 3500 GWh/an20.Comparé à la production actuelle d’env. 300 GWh/an,cela revient à un potentiel multiplié par 12. Celui-ci nepourra toutefois être pleinement exploité que dans desconditions optimales et une disposition maximale à enpayer le prix21. En effet, dans les conditions actuelles,les petites installations de production de biogaz baséesuniquement sur l’engrais de ferme ne sont pasrentables. De plus, le marché des co-substratsnécessaires comme les déchets organiques de lagastronomie ou de l’industrie ou les déchetsbiodégradables est soumis à une concurrence de plusen plus féroce22. Même si tout le potentiel dubiogaz en Suisse, ou presque, était disponible,cet agent énergétique ne remplacerait qu’unneuvième des ventes actuelles de gaz fossile(soit 36 000 GWh/an).

Le biogaz suisse est-il durable?

La Suisse ne prévoit pas de critères durables légauxpour l’alimentation du biogaz en tant que combustiblepour le réseau du gaz fossile (contrairement au biogazutilisé comme carburant). En raison du cadre légal, ilserait donc possible qu’un fabricant indigène debiogaz se mette à produire du gaz à base de matièrespremières renouvelables cultivées spécialement à cet

20 L'EnFK parvient à des résultats similaires. «Potentiel d'ali-mentation en gaz renouvelable pour le réseau suisse d'ici2030.» 201821 Dans le scénario le plus favorable, les perspectives éner-gétiques 2050 du Conseil fédéral estiment qu’en 2030, le po-tentiel supplémentaire exploitable du biogaz sera de 1100GWh/an. Les ventes de biogaz en 2050 (indigène/importé)sont chiffrées à 2860 GWh/an.Prognos. «Die Energieperspektiven für die Schweiz bis2050.» 2012.22 USP. «Praktischer Leitfaden Biogas.» 2013La lutte contre le gaspillage alimentaire, nécessaire en poli-tique climatique, pourrait même contribuer à abaisser signifi-cativement les quantités de substrat correspondantes.

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effet et à l’injecter dans le réseau, sans pour autants’acquitter de l’impôt sur les huiles minérales ni de lataxe sur le CO2, et sans respecter d’exigencesminimales, quelles qu’elles soient. Le secteur gaziers’engage cependant en faveur du biogaz de productiondurable: celui-ci ne doit pas être issu de matièresrenouvelables produites spécialement dans ce but; parailleurs, les matières premières servant à laproduction de biogaz ne doivent pas concurrencerdirectement la production de denrées alimentaires oude fourrage23. La production de biogaz à base dematières premières renouvelables en Suisse ne seraitde toute manière pas rentable sans subventionsspécifiques, du moins à l’heure actuelle.

En ce qui concerne le bilan écologique du biogaz issud’engrais agricole, le principe valable est le suivant: ilvaut mieux laisser fermenter le lisier et lefumier pour obtenir du biogaz que de ne pasutiliser ces matières. En effet, l’épandage d’engraisagricoles non traités libère dans l’atmosphère duméthane et du peroxyde d’azote, des gaz à effet deserre très puissants24. Si le biogaz était uniquementproduit à partir du fumier, il présenterait un facteurd’émission très bas voire nul. Tout substrat confondu,on obtient le facteur d’émission moyen énoncé ci-avant. Le biogaz n’est donc nullement neutre pour leclimat (voir ci-dessus). Pour que le biogazdevienne donc réellement durable du point devue de la protection du climat, son bilanclimatique doit être amélioré de manièresignificative. Pour cela, les émissions de méthanediffuses générées lors du stockage préalable dusubstrat, dans l’installation de fermentation et dansl’entrepôt des restes de fermentation doivent êtreévitées de manière conséquente. Il existe par ailleursdes potentiels d’optimisation en matière de besoinsénergétiques et d’émissions de CO2 lors du transport,du stockage, de la fermentation et de la fermentationultérieure du substrat, de même que lors dutraitement du biogaz25.

23 ASIG. «Les principes directeurs de l’industrie gazièresuisse en matière de biogaz.»24 Par ailleurs, le digestat est un excellent engrais et il rem-place les engrais minéraux dont la production consommebeaucoup d'énergie25 Effenberger et al. „Klassifizierung der Treibhausgas- undEnergiebilanz landwirtschaftlicher Biogasanlagen.» 2014.Deutscher Bundestag. Wissenschaftliche Dienste. «Treib-hausgasemissionen von Biogasanlagen.» 2014.Vogel. «Methanverluste vermeiden.» 2013.26 Ecofys. «Gas for Climate.» 201827 Ainsi, 40% (!) des substrats sont des matières premièresrenouvelables. Des procédés de culture séquentiels (culturetout au long de l’année), utilisés à ce jour uniquement dansla production de biogaz en Italie, doivent en plus être étendusà presque tout le territoire européen (donc aussi dans des

Biogaz importéEtant donné qu’à l’avenir, le biogaz indigène ne serade loin pas en mesure de se substituer au gaz fossilevendu, le secteur mise fortement sur l’importation debiogaz. Aujourd’hui déjà, les importationsreprésentent près de la moitié du biogaz écoulé enSuisse via le réseau de distribution. Ici, les questionssuivantes se posent obligatoirement:

· Quel est le potentiel du biogaz durable enEurope?

· Quelle part de ce biogaz sera vraisemblablementutilisée à l’étranger même et quelle part seradisponible pour les exportations à destination dela Suisse?

· Comment peut-on garantir que le bénéfice pourl’environnement du biogaz importé profiteentièrement au consommateur en Suisse?

Les déclarations au sujet du potentiel du biogaz dansl’UE sont encore très incertaines et sont donccontestées. Une étude sur le sujet a identifié unpotentiel pour l’ensemble de l’Europe (rendement duméthane et non énergie primaire) de 1072 TWh/an debiogaz et de 263 TWh/an de gaz synthétique – soit entout 1335 TWh/an26. Ces chiffres reposent sur deshypothèses en partie audacieuses et questionnables,tant sur le plan de la politique climatique que de laprotection de la nature27. Par conséquent, les chiffresdu potentiel du gaz renouvelable dans l’UE devraientêtre fixés à un niveau réduit d’au moins deux tiersselon une autre analyse.28 Au total, le gaz renouvelableexploité dans l’UE au maximum de son potentielcouvrirait29 entre 10 et 30% des besoins actuels en lamatière (4500 TWh/an)30. Avec le potentiel du gazsynthétique, ce serait ainsi un sixième à un cinquièmede la consommation de gaz actuelle de l’UE quipourrait être couverte.

Pour la décarbonisation complète du secteurénergétique, l’UE devrait donc réduire laconsommation actuelle de gaz de 70 à 90%. Cen’est qu’alors qu’il resterait quelque chose du

zones climatiques plus froides) dans un délai de seulementtrois décennies.A l’inverse, diverses études calculent même un recul de laproduction de biogaz et en particulier de son injection dansle réseau, du moins pour l’Allemagne. Pour une vuegénérale, consulter:Agentur für Erneuerbare Energien. «Metaanalyse: Die Rolleerneuerbarer Gase in der Energiewende.» 2018.28 ICCT. “The potential for low-carbon renewable methane inheating, power, and transport in the European Union”29 http://ec.europa.eu/eurostat/web/products-datasets/-/nrg_103a – consulté le 6.4.201830 Correspond également à l'estimation dans E3G. «Renew-able and De-carbonised Gas. Options for a Zero-EmissionsSociety.» 2018.

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potentiel renouvelable du gaz de l’UE pour laSuisse. Il n’est absolument pas possible d’évaluer laquantité de gaz renouvelable qui serait réellementdisponible pour les exportations à destination de laSuisse ni à quel moment31. Il apparaît donc logiqueque la Suisse doive réduire ses besoins en gaz par desmesures d’efficacité et le remplacement des agentsénergétiques, au moins dans la même mesure quel’UE.

Le biogaz importé est-il réellement du biogaz?

Si le biogaz est injecté à un réseau de gaz local àl’étranger, ses molécules ne parviennentqu’exceptionnellement jusqu’à la frontière suisse.D’un point de vue physique, c’est donc du gaz fossilequi est importé32. Par le biais du réseau, il est parailleurs possible d’importer du biogaz «virtuel» enSuisse. En d’autres termes, cela signifie qu’à lafrontière, du gaz fossile est physiquement importé,tandis que l’importateur reçoit un certificatgarantissant entre autres que la quantité de biogazcorrespondante a été injectée dans un réseau de gazfossile étranger.33 Si le biogaz provient d’Allemagne, laquantité correspondante est décomptée du registreallemand du biogaz lors de son exportation en Suissepour exclure qu’elle soit utilisée à double pour unautre client34. Selon le Conseil fédéral, aucunegarantie ne permet encore de s’assurer actuellementque c’est aussi le cas dans d’autres paysexportateurs35.

Tout comme dans le cadre de l’importationd’électricité renouvelable, l’importation du biogaz nepermet pas d’importer les valeurs ajoutées«renouvelable» ni «meilleur bilan des gaz à effet deserre», qui restent souvent voire toujours à l’étranger,et ce même lorsqu’il est impossible que l’unitéconcernée de biogaz ou d’énergie verte soit revendue.Les importations de gaz par la Suisse n’entraînent pasune augmentation proportionnelle de la productionde biogaz et d’énergie verte à l’étranger. Les paysexportateurs reçoivent notamment des directives

31 Bien entendu, la petite Suisse aurait besoin d’un faiblepourcentage du potentiel européen de biogaz, seulementest-il durable d'y acheter des ressources alors qu'elles nesont déjà disponibles qu'en faibles quantités voire sont su-rexploitées - notamment au Danemark, l'un des principauxexportateurs de biogaz vers la Suisse? Klimaraadet. «TheRole of Biomass in the Green Transition.» 2018.32 Il doit en conséquence aussi être déclaré comme gaz fos-sile à la douane helvétique et grevé des impôts et taxes cor-respondants.33 Une telle attestation d’origine devrait à l’avenir aussi êtreutilisée pour le gaz fossile d’origine fossile, afin de permettresa traçabilité et, par exemple, d’exclure l’importation de gazde schistes (issu du fracking), qui nuit particulièrement à l’en-vironnement.34 Renseignement donné par écrit par le registre allemand dubiogaz le 15 mars 2018, voir aussi www.biogasregister.de

claires de la part de Bruxelles et s’en servent pourcalculer la part qui sera attribuée à la Suisse36 . C’estuniquement selon ces objectifs concernant les partsd’énergies renouvelables que les pays exportateurscommencent à adapter leur comptabilité vers le haut.En ce qui concerne la protection du climat, la valeurajoutée restera toutefois dans le pays exportateur siaucun accord international n’est passé à partir de 2021entre les pays concernés au sujet du transfert desdroits d’émissions.

Dans le cas du biogaz, ces circonstances revêtent uneplus grande pertinence que dans le cas de l’énergieverte. En effet, l’énergie verte importée vientcompléter la production nationale déjà faible en CO2

de la Suisse. Il s’agit donc d’un jeu à somme nulle pourle climat. Le biogaz importé doit quant à lui remplacerle gaz fossile, ce qui n’est cependant pas possible. C’estpourquoi le biogaz importé via pipeline estactuellement à juste titre associé à la taxe CO2 pour legaz fossile. D’un point de vue physique, du gaz fossileest exporté d’Allemagne en Suisse et la même quantitéde gaz fossile est importée en plus de l’étranger versl’Allemagne. Le client suisse achetant du biogazimporté ne profite donc actuellement pas del’entière plus-value écologique de son biogaz –mais obtient du gaz fossile certifié.

Un transfert des droits d’émission à la Suisse estnécessaire afin qu’une stratégie d’importation dubiogaz soit pertinente. Il est difficile de savoir si lespays exportateurs sont prêts à vendre leurs droitsd’émission et, le cas échéant, à quel prix. Cetteclarification est également importante étant donnéque les clients actuels achetant du biogaz de l’étrangern’ont souvent pas conscience de cette situation. Leclient doit également savoir que tous les paysexportateurs subventionnent déjà la production debiogaz, parfois même intégralement. Les majorationspour le biogaz ne sont souvent ni justifiées par lavaleur ajoutée produite ni par les dépenses effectives.

35 Lors des importations de gaz «les doubles comptabilisa-tions ne peuvent pas être exclues et les exigences écolo-giques minimales ne peuvent pas être garanties.» Conseilfédéral. «Message relatif à la révision totale de la loi sur leCO2 pour la période postérieure à 2020.» 201736 Renseignement donné par écrit par le Ministère de l’envi-ronnement fédéral allemand le 4.5.18 et par l’OFEN Marchéinternational du biogaz dans le secteur des combustibles.2015Il en va autrement pour les objectifs de développement enAllemagne en ce qui concerne les énergies renouvelables:le biogaz virtuellement exporté par GO n'est pas pris encompte. Renseignement donné par écrit par le Ministère del’environnement fédéral allemand le 8.5.18Il resterait à déterminer si cela est également le cas pour tousles autres pays exportant du gaz vers la Suisse.

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Quel rôle joue le gaz synthétique?Sont qualifiés ici de «gaz synthétiques» tous lescombustibles de forme gazeuse produits à l’aided’électricité renouvelable (ci-après aussi«combustibles synthétiques»). Ce processuschimique, souvent appelé aussi «power-to-gas» (PtG),vise à produire de l’hydrogène par électrolyse, à l’aidede courant renouvelable. Pour des raisons techniquestoutefois, l’hydrogène ne peut être injecté directementdans le réseau gazier que de manière très limitée. Il estdonc généralement transformé en méthane avec leCO2 au cours d’une étape ultérieure37. Le processusPtG peut aussi être combiné à la production de biogaz:lors de la méthanisation dite directe, le CO2 contenudans le biogaz réagit avec l’hydrogène et se transformeen méthane, ce qui permet de l’injecter dans le réseaude gaz avec le méthane contenu dans le gaz brut38.

L’éventualité que le gaz synthétique ou les combus-tibles liquides («Power-to-Liquid», PtL) soient néces-saires pour la décarbonisation de l’économie complètetient au fait qu’il n’y a pas suffisamment de biomassesissues de production durable pour remplacer les com-bustibles utilisés que sont le charbon, le pétrole ou legaz par du bois, du biogaz ou des combustibles li-quides biogènes partout où les processus de combus-tion joueront un rôle à l’avenir39. La question est desavoir dans quels buts d’utilisation et dans quellesquantités le gaz synthétique pourra ou devra jouer unrôle technique et économique40.

Le gaz synthétique est-il écologique?Le gaz synthétique n’est écologique quelorsqu’il remplit au moins deux conditions41:

Le courant nécessaire à l’électrolyse doit provenirexclusivement de sources renouvelables.L’électricité doit par ailleurs être purementexcédentaire (c’est-à-dire que si elle n’était pas utiliséede cette manière, les éoliennes devraient être arrêtées)

37 En Suisse, la teneur en hydrogène est limitée à 2% de vo-lume, une limite qui est fixée à 5% en Allemagne. Elle pour-rait être augmentée à 10 ou 15%.Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten strombasier-ter synthetischer Brennstoffe.» 201838 https://www.energie360.ch/de/energie-360/projekte/po-wer-to-gas-aus-erneuerbarem-strom-wird-gas/ – consulté le13.4.201839 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 201840 voir p. ex. Panos & Kanan. “Challenges and Opportunitiesfor the Swiss Energy System in Meeting Stringent ClimateMitigation Targets.” 2018. Les auteurs partent p. ex. du prin-cipe qu’en 2050, 1600 GWh H2 seront produits à partir decourant d’origine renouvelable, mais que sur cette quantité,

ou être produite en plus. Dans le cas contraire, il s’agitd’un pur déplacement d’énergie renouvelable d’unsecteur à l’autre: «l’excédent» versé dans le secteur dela production de chaleur ou des transportss’accompagnerait d’un déficit d’énergie renouvelabledans celui de l’électricité.42

Le PtG n’est pas non plus entièrement neutre sur leplan climatique, en raison de la dépense énergétiquenécessaire à la mise en place de l’infrastructure et enparticulier en raison des émissions de méthane, qui nepeuvent entièrement être évitées, lors de la productionet du transport du gaz43.

Le gaz synthétique peut-il se maintenir sur lemarché?Il est évident que le PtG constitue une technologierécente, ses perspectives d’évolution ne peuventencore être estimées de façon fiable pour le moment.Il est toutefois nécessaire d’identifier les défisauxquels sa progression sur le marché peut faire face:les installations PtG/PtL exigent d’importantscapitaux et engendrent des coûts fixes élevés. Chaqueheure d’exploitation réalisée en plus est enconséquence essentielle pour les coûts descombustibles synthétiques, puisque plus l’utilisationdes installations est importante, meilleur marché sont

seulement 230 GWh de CH4 ou de H2 pourront être injectésdans le réseau gazier.41 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 201842 Agora Energiewende. „Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.“ 2018Öko-Institut. „Prüfung der klimapolitischen Konsistenz undder Kosten von Methanisierungsstrategien.“ 201443 Actuellement, le facteur d'émissions de PtG est estiméentre 25 et 178 g CO2eq/kWh. Dans le cadre d'une économiedécarbonisée, cette valeur devrait baisser. 3G “Renewableand Decarbonised Gas. Options for a Zero-Emissions Soci-ety.” 2018. et Sustainable Gas Institute. “A greener gas grid– What are the options?” 2017.

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les coûts de l’électrolyse44. Les études réaliséesmontrent que les installations PtG/PtL ont besoind’au moins 3000 à 4000 heures à pleine charge parannée et d’électricité très bon marché pour pouvoirêtre rentables. Ceci est d’autant plus valable pour lesélectrolyseurs à haute température, plus efficaces, quidoivent fonctionner en permanence45. Sur le longterme, même l’Allemagne – dont la part de productionélectrique éolienne et solaire fluctuante est nettementplus élevée qu’en Suisse – ne produira pas d’électricitéexcédentaire dans ce cadre temporel46. Les partsmodestes de courant excédentaire disponible àl’échelle locale devraient être complétées pard’importantes quantités d’électricité renouvelable bonmarché47. Comme montré ci-dessus, ce courant doitêtre produit en plus, afin que le PtG/PtL contribue àla protection du climat. En conséquence, lesinstallations PtG/PtL ne peuvent pas seulementprendre en compte, dans leur calcul, les «déchets de laproduction électrique» gratuits, mais doivent assumerles coûts entiers de la production du courant à based’énergies renouvelables nécessaires en plus. Laquestion de savoir si les frais d’utilisation du réseaupour le courant utilisé seront prélevés ou non estégalement pertinente.48

S’ajoutent à cela les coûts non négligeables duprocessus de méthanisation lorsque la production nese limite pas au seul hydrogène. C’est particulièrementle cas quand le CO2 nécessaire doit avant tout provenirde la technologie onéreuse de «Direct Air Capture» etmoins de sources ponctuelles concentrées(combustion et fermentation de biomasse). Dès quedes quantités importantes de gaz synthétique doiventêtre produites, la technique de «Direct Air Capture»devrait, selon les connaissances actuelles, être de plusen plus utilisée, le potentiel quantitatif du CO2 desources biogènes durables étant limité49.

44 Agentur für Erneuerbare Energien. «Metaanalyse: DieRolle erneuerbarer Gase in der Energiewende.» 2018.45 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 2018 et ZHAW. Perspek-tiven von Power-to-Gas in der Schweiz. 2018 (bon résumédes facteurs de coûts)Energy Brainpool contredit cette hypothèse. «Auf dem Wegin die Wettbewerbsfähigkeit: Elektrolysegase erneuerbarenUrsprungs.» 2018. Selon sa thèse, les coûts fixes vont net-tement baisser à l’avenir et, dans leur sillage, la pertinencedes heures à pleine charge.46 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 2018Ce n’est qu’à partir d’environ 90% (!) d’énergie éolienne etsolaire fluctuante que l’Allemagne produirait un excédentd’électricité issue de sources renouvelables pendant près de4000 heures par année.47 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 2018. A cela s’ajoute le

Même dans l’hypothèse, improbable, où l’électricitéserait disponible gratuitement en quantité nécessaire(heures à pleine charge), il faut s’attendre à ce que lescoûts de production du méthane synthétique soientimportants50. A l’heure actuelle, les coûts deproduction des combustibles et descarburants sont relativement élevés. Iln’existe par ailleurs pas encore de signeconvaincant montrant qu’il est possible des’attendre à ce que les réductions de coûtsnécessaires aient lieu.

A quelle quantité de gaz synthétique suisse est-on en droit de s’attendre?Les quantités potentielles de gaz synthétique sont enthéorie très importantes. En effet, sa production nenécessite «que» du courant excédentaire, de l’eau etdu CO2. Si l’on met provisoirement de côté lesobstacles économiques susmentionnés à lacompétitivité du gaz synthétique sur le marché, laquestion la plus intéressante est alors celle de savoircombien de courant excédentaire serait nécessaire: sila consommation de gaz en Suisse reste au niveauactuel (soit env. 36 000 GWh) et si le potentiel dubiogaz indigène est exploité au maximum (env.4000 GWh), une production d’électricitésupplémentaire d’env. 57 000 GWhel serait nécessairepour couvrir les besoins restants avec le PtGnational51! Cela correspond assez exactement à laproduction d’électricité actuelle en Suisse (qui n’est deloin pas complètement renouvelable). En d’autrestermes, en plus du remplacement des centralesnucléaires vieillissantes, en plus de la fournitured’électricité nécessaire à l’électromobilité croissante eten plus de la consommation électrique des nouvellespompes à chaleur (qui seraient nécessaires dans unscénario où la consommation de gaz serait constante,au moins pour le remplacement des chauffages àmazout), la production d’électricité en Suisse

fait qu’en matière d’utilisation du courant excédentaire gra-tuit, les installations PtG/PtL entreraient en concurrence auniveau local avec d’autres charges raccordables, souventnettement meilleur marché, telles que les systèmes «Power-to-Heat», les batteries et les applications industrielles.48 Energy Brainpool. «Auf dem Weg in die Wettbewerbsfä-higkeit: Elektrolysegase erneuerbaren Ursprungs.» 2018.49 Il est actuellement encore possible d'utiliser des sourcesponctuelles de CO2 fossile (notamment les centrales aucharbon ou les cimenteries) pour la méthanation. Dansquelques décennies, ces sources de CO2 ne seront cepen-dant plus disponibles étant donné que les grandes installa-tions de combustion d'énergies fossiles sans stockage com-plet du CO2 en-dehors de l'atmosphère ne sont pascompatibles avec une économie décarbonisée.50 Un tour d'horizon de la littérature a déterminé des valeursentre 10 et 110 Rp/kWh PtG. ZHAW. «Perspektiven von Po-wer-to-Gas in der Schweiz.» 2018.51 32ʼ000 GWh PtG produits à base d’électricité avec un ren-dement moyen de 0,56.

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devrait être doublée – et ceci dans un délai dedeux à trois décennies52. L’ampleur de la tâchemontre clairement qu’un maintien complet del’infrastructure gazière en Suisse dans l’espoirde pouvoir utiliser du biogaz et des gazsynthétiques n’est pas justifié.

Les quelques études existantes au sujet du potentieldu PtG en Suisse estiment la production de méthanesynthétique à 1100-1200 GWh/a pour 205053. Il seraitainsi possible de couvrir un septième des ventes de gazactuelles, même selon le potentiel de biogazdomestique maximal.

Bien entendu, ni le gaz synthétique ni le biogaz nedoivent obligatoirement être toujours produits dans lepays. Les importations de PtG pourraient permettre àla Suisse de réduire en partie ses besoinssupplémentaires en production d’électricitérenouvelable. Toutefois, à l’étranger, les mêmesrestrictions et défis s’appliquent en principe à laproduction de PtG commercialisable et la mise enplace des infrastructures (de transport) nécessaires.

Quels sont les objectifs del’économie gazière? Commentseront-ils accomplis?L’économie gazière s’est fixé pour objectif intermé-diaire d’augmenter à 30% la part de biogaz et de gazsynthétique d’ici 203054. Dans le cadre de ces objec-tifs, il est souvent éludé qu’ils ne se fondent pas dutout sur la consommation totale de gaz, mais seule-ment sur le secteur du chauffage (voire uniquementsur la consommation de gaz des ménages)55. Selon lavaleur de référence, les estimations du secteur gazierprévoient ainsi qu’en 2030, 80 à 90% de sourcesd’énergie fossiles dans le réseau de gaz! Dans la me-sure où l’on ne s’attend pas à une remarquable réduc-tion de la consommation de gaz, l’objectif renouve-lable de l’économie gazière est largement insuffisantpar rapport aux exigences de la protection du climat(cf. ci-avant). Même si l’objectif intermédiaire était at-teint bien plus tôt, le secteur gazier manque jusqu’àaujourd’hui encore de stratégies pour le remplace-ment des 80 à 90% de gaz fossile restants avant 2040.

52 Ces calculs sont naturellement très simplifiés et ne tiennentpar exemple pas compte des importations. Mais comme pourle biogaz et le PtG, la Suisse ne doit pas, en matière d’élec-tricité renouvelable, compter sur une capacité d’importationillimitée de l’étranger.53 IET. „Potential für überschüssige erneuerbare Energie inder Schweiz.“ 2014 et présentation du Dr. Carrea (SVGW)«Das Erdgasnetz der Zukunft» lors du congrès des com-munes Pusch du 25.08.2017.

Il est cependant encore plus inquiétant que les bellesparoles pour le secteur n’aient toujours pasvéritablement été concrétisées par des actes. Selon lesmots de Rony Kaufmann, PDG de l’alliance du servicepublic Swisspower: «Le secteur gazier ne fait depuis50 ans rien d’autre que gérer des réseaux gaziers etproduire du gaz. Si le secteur souhaitesérieusement passer à une production durablepour le gaz, elle doit s’intéresser de près aubiogaz. Je ne connais aucun fournisseur de gazconcerné qui ait entrepris cette démarche.»56

Où les gaz renouvelables sont-ils (absolument) nécessaires?Où doivent-ils être utilisés?Une stratégie gazière durable fait toujourspartie intégrante d’une stratégie complètepour l’énergie et le climat dans le respect del’Accord de Paris sur le climat. Bien qu’une tellestratégie n’existe pas encore pour la Suisse, il estévident que les quantités, même limitées, de gazrenouvelable doivent être utilisées en priorité danstous les secteurs pour lesquels aucune autre solutioncompatible avec l’Accord de Paris, notammentl’efficacité énergétique ou la transition vers dessources d’énergie n’émettant pas de CO2, n’existe pasencore. L’un des critères d’application déterminantspour le gaz renouvelable réside dans «l’absenced’alternative» liée à la protection du climat dans lecadre d’une précise soumise à des critères d’efficacitéet de coûts.57 En effet, peu importe nos besoins encombustibles propres pour l’avenir, il est clair que cesderniers ne seront pas disponibles en quantitésillimitées.

Le gaz synthétique est-il nécessaire dans lesecteur du bâtiment?Les avantages du gaz synthétique (ou aussi ceux ducombustible et du carburant liquide) par rapport àl’utilisation directe de l’électricité résident dans sadensité énergétique élevée, la capacité à le stocker etl’infrastructure en partie déjà en place – descaractéristiques que les combustibles synthétiquespartagent avec les combustibles fossiles58. Les

54 ASIG. „Energieversorgung der Zukunft.“ Document de syn-thèse. 201655 Exposé de H.C. Angele du 18.05.201856 lors du congrès sur le chauffage 2018 du 24.10.2018.57 cf. Referat d'A. Kirchner lors du congrès sur le chauffage2018 du 24.10.2018 et E3G. «Renewable and DecarbonisedGas. Options for a Zero-Emissions Society» 201858 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 2018

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combustibles fossiles ont toutefois un grosdésavantage: comparée à l’utilisation directe del’électricité, leur production entraîne d’importantespertes énergétiques lors de la transformation. Deuxconséquences immédiates en résultent: d’une part,les coûts du PtG (et du PtL) sont en principenettement plus élevés que ceux de l’utilisationdirecte de l’électricité. D’autre part, il enrésulte un besoin sensiblement plusimportant de production d’électricitéd’origine éolienne et solaire59. Ainsi, le PtG nepermet aujourd’hui de ne produire en moyenne que0,56 kWh de combustible à partir de 1 kWh de courantde production renouvelable60.

Les pertes de rendement au cours de la chaîne deproduction sont à l’origine d’un à de nombreusesautres technologies, celle-ci occasionne un effet delevier particulier: elle permet en effet d’exploiter lachaleur de l’environnement (présente dans l’air, le solou l’eau), dont la quantité est supérieure à celle del’électricité nécessaire pour faire fonctionner lapompe, de sorte que des valeurs rendement totald’une pompe à chaleur électrique est ainsiquatre à six fois supérieur à celui des solutionsalternatives alimentées par des gazsynthétiques. Bien entendu, le rendement del’électrolyse et de la méthanisation va encores’améliorer dans le sillage du progrès technique, desinvestissements dans la recherche et ledéveloppement, et d’une pénétration accrue sur lemarché61. Cependant, de telles améliorationsdevraient aussi se produire dans le domaine despompes à chaleur dans une moindre mesure.

Tant qu’il n’est pas clairement attesté que cedésavantage indéniable des gaz synthétiques, quirepose sur des principes physiques, ne peut pas êtresurcompensé par d’autres avantages62 – par exempleen matière de coûts d’infrastructures –, il sembleévident de suivre en premier lieu toutes les solutionstechniques possibles offrant de faibles pertes de

59 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 201860 Institut Öko. «Prüfung der klimapolitischen Konsistenz undder Kosten von Methanisierungsstrategien.» 201461 Agentur für Erneuerbare Energien. «Metaanalyse: DieRolle erneuerbarer Gase in der Energiewende.» 2018.62 voir FNB Gas. «Der Wert der Gasinfrastruktur für die Ener-giewende in Deutschland.» 2017.Les hypothèses sur lesquelles repose la justification del’avantage pour l’économie globale d’un scénario PtG danscette étude paraissent toutefois discutables. Ainsi, plus de80% des économies avancées sont le fait des coûts d’inves-tissement plus élevés des voitures électriques par rapportaux voitures équipées de moteurs à combustion ainsi quedes pompes à chaleur vis-à-vis des chauffages à gaz. Où

transformation – c’est-à-dire l’utilisation directe del’énergie électrique.

Dans le secteur du chauffage des bâtiments,cela signifie que la baisse importante desbesoins énergétiques63, l’utilisation directedes énergies renouvelables (soit avant toutl’utilisation de chauffage issu de la géothermieprofonde, de la thermie solaire et, dans unemesure limitée du bois), ainsi que les pompesà chaleur alimentées par de l’énergierenouvelable constituent la voie à suivre. Cen’est que lorsque les alternatives présentées ci-avantne sont pas possibles pour des raisons techniques ouéconomiques, notamment dans les centres classés etprotégés ou présentant des exigences géologiquesspécifiques ou une grande densité, que lescombustibles synthétiques peuvent représenter unealternative; soit comme agent énergétique unique –avec des piles à combustible CCF ou des chaudières àcondensation – ou en lien avec des pompes à chaleuren guise de chauffages hybrides64. Il serait toutefoiscontreproductif que la perspective de l’utilisation descombustibles synthétiques basée sur l’électricité dansdes chaudières à gaz ou à pétrole mène à uneréduction du nombre de bâtiments rénovés pour enoptimiser l’efficacité énergétique. Ce point relèvenotamment de la longue durée de vie des bâtiments:en effet, seule une rénovation énergétique permet deconserver toutes les options pour des décisionsultérieures en matière de technologie de chauffage –que ce soit en faveur d’une pompe à chaleur ou du gazsynthétique – et d’offrir la flexibilité nécessaire pourle cas où des attentes particulières à l’égard del’évolution future des coûts des agents énergétiquesdevaient ne pas se concrétiser65.

Il reste au gaz synthétique avant tout leschamps d’application où une utilisationefficace et directe d’énergies renouvelables oude l’électricité n’est pas possible66. En fontpartie, le cas échéant, le transport routier sur delongues distances, le secteur des transports aériens et

sont les coûts d’exploitation bas de l’électricité utilisée direc-tement?63 Agora Energiewende. «Efficiency First: Wie sieht ein effi-zientes Energiesystem in Zeiten der Sektorkopplung aus?»201864 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 2018Chauffer un parc immobilier mal isolé, sans isolation supplé-mentaire, à 100% avec des combustibles synthétiques de-vrait toutefois s’avérer très peu rentable à long terme – enparticulier si la demande des secteurs disposant d’un fortpouvoir d’achat fait grimper le prix des combustibles.65 Agora Energiewende. «Die zukünftigen Kosten stromba-sierter synthetischer Brennstoffe.» 201866 ZHAW. «Perspektiven von Power-to-Gas in der Schweiz.»2018

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maritimes, les processus à très hautes températuresdans l’industrie, les substances organiques chimiqueset éventuellement le stockage saisonnier del’électricité (voir plus bas). Ce constat confirme lesrésultats des nombreux scénarios de protection duclimat établis à ce jour pour le système énergétiqueglobal (surtout en Allemagne) jusqu’en 205067. Sur leplan de l’infrastructure, il en résulte d’autresexigences que celles valant à ce jour – l’une desconséquences étant que le réseau de distribution degaz existant perd sa raison d’être essentielle, c’est-à-dire l’approvisionnement de différents biensimmobiliers pour des applications à faibletempérature.

Le gaz synthétique est-il nécessaire pour lestockage saisonnier de l’électricité?L’argument le plus souvent avancé pour lapréservation du réseau de distribution de gaz et ledéveloppement éventuel d’une infrastructure PtG estl’utilisation des excédents d’électricité en été etl’assurance de la sécurité de l’approvisionnementélectrique en hiver. Les phases prolongées au coursdesquelles le vent et l’ensoleillement sont faibles dansde grandes parties de l’Europe centrale, ce qui a plutôttendance à se produire en hiver, ne doivent pasprésenter de danger pour la couverture de la demanded’électricité. Ceci est d’autant plus valable que lacharge électrique en hiver devrait encore augmenteren raison d’un développement massif des pompes àchaleur et de la mobilité électrique, et ce malgrél’exploitation des potentiels d’efficacité existants68.L’excédent de production électrique d’origine solaireet éolienne pourrait être stocké sous forme de gazsynthétique à un rythme saisonnier, pour êtreréinjecté dans les turbines à gaz ou les centrales à cyclecombiné en hiver.

La littérature est partagée sur la question de savoirdans quelle mesure le cas, extrême, d’une baisse deproduction de deux semaines en Europe centralereprésenterait un danger pour la sécurité del’approvisionnement de la Suisse69. L’étude la plusrécente commandée par l’OFEN arrive à la conclusionqu’en 2035, le besoin de stockage supplémentaire

67 Agentur für Erneuerbare Energien. «Metaanalyse: DieRolle erneuerbarer Gase in der Energiewende.» 2018.«Alors que toutes les études défendant des objectifs de pro-tection du climat ambitieux s’entendent pour dire que le PtGest indispensable comme option de flexibilité dans le secteurélectrique, le potentiel le plus important pour le PtG se des-sine, tous comptes faits, dans le secteur des transports et del’industrie.»68 SATW. «Die Rolle von dezentralen Speichern für die Be-wältigung der Energiewende.» 2016

pour la couverture de la charge résiduelle – c’est-à-dire de la demande non couverte par la productiond’électricité disponible – pendant deux semainescomplètes, sera de 500 GWhel au maximum, mêmeavec les hypothèses les plus conservatrices70. À titre decomparaison: la contenance énergétique des centraleshydrauliques à accumulation en Suisse estactuellement de près de 9000 GWhel71. À moyenterme, le développement nécessaire par rapport aupotentiel de stockage actuel est donc modéré. Si lesestimations de l’OFEN étaient fausses et que la baissede la production devait durer plus longtemps, ou quedes difficultés sur les lignes électriques devaient gênerles importations, la situation ne s’améliorerait paspour autant pour PtG. Le fait de couvrirl’approvisionnement électrique de l’hiver à l’aide degaz synthétique de 7000 GWh/a (d’après lesestimations d’une étude) nécessiterait une productiond’électricité propre excédentaire (!) de 18 000 GWh/a.Il faudrait pour cela construire des centrales solaires18 GW qui produiraient toute l’année de l’électricitéexclusivement pour Power-to-Gas.72 Il est difficiled’imaginer qu’il serait possible de trouversuffisamment de propriétaires immobiliers pourmettre la surface de leurs bâtiments à disposition pourproduire de l’électricité qu’ils ne pourraient même pasutiliser.

Ce serait pourtant indispensable si l’utilisation du gaz dansle secteur des bâtiments et des transports était faible et s’ac-compagnait du démantèlement correspondant du réseau dedistribution du gaz.69 Pour une vue d’ensemble des différentes études, voir la«Fiche d’information sécurité de l’environnement» de l’Al-liance-Environnement70 OFEN. «Modélisation de l’adéquation du système élec-trique en Suisse.» 201771 SATW. «Die Rolle von dezentralen Speichern für die Be-wältigung der Energiewende.» 201672 ZHAW. «Perspektiven von Power-to-Gas in der Schweiz.»2018

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Pour finir, il n’apparaît pas clairement quand,ni dans quelle mesure la Suisse aura besoin desolutions saisonnières supplémentaires pourle stockage de l’électricité. Les conditions àl’égard de l’infrastructure sont en revanche limpides sil’on désire miser sur le PtG. Et cet aspect est souventoublié: le réseau de distribution de gaz n’est pasnécessaire, puisque son potentiel de stockageest de toute manière faible (voir plus haut) etparce que le processus PtG comme laréinjection s’avèrent plus rentables dans lesunités centrales, de plus grandes dimensions.En revanche, des réservoirs de gaz de taille suffisante(dont la Suisse ne dispose actuellement que demanière limitée, voir plus haut) ainsi que quelquesconduites de gaz restantes du réseau de transport etturbines à gaz raccordées à celles-ci et/ou descentrales à cycle combiné seraient nécessaires73.Toute l’infrastructure devrait pouvoir se refinanceravec un nombre extrêmement limité d’heures à pleinecharge, sa capacité totale n’étant exploitée que dansl’éventualité assez improbable d’une baisse de laproduction européenne.

Faut-il se passer totalement du gaz pour leremplacer par une stratégie purement fondéesur l’électricité?Tel que mentionné ci-dessus, le gaz renouvelablegarde la priorité pour certaines utilisations(notamment l’aéronautique ou les procédésindustriels à haute température) lorsqu’uneutilisation directe d’énergies renouvelables oud’électricité verte semble actuellement compliquéepour des raisons techniques ou économiques. Par

73 Les centrales CCF jouent ici aussi un rôle plutôt secon-daire, puisqu’en plus du courant, elles produisent avant toutde la chaleur à basse température, pour laquelle d’autres so-lutions plus judicieuses peuvent être exploitées (voir plushaut). – aussi parce que la chaleur ne serait disponible quequelques heures par année.74 les aborder tous dépasserait cependant le cadre de la pré-sente publication.

ailleurs, si des potentiels durables de gazrenouvelables venaient à se présenter, il est tout à faitpossible d’en planifier une utilisation intelligente. Eneffet, il convient de ne pas perdre de vuequ’une électrification sous-entend, elle aussi,des défis74:

· l’électricité n’est bien entendu pas totalementneutre en CO2 ni le mix moyen actuel dans leréseau, qui n’est pas non plus à 100% composéd’électricité propre. De plus, la part actuelle-ment renouvelable dans le réseau électrique estactuellement bien plus élevée que pour leréseau de gaz et elle va le rester à l’avenir (cf.figure)75. Par ailleurs, un système de pompe àchaleur moyen présente déjà un facteur d’émis-sion plus bas qu’un chauffage au gaz standarddans le cadre du mix hivernal actuel.76

· Le besoin d’adaptation persistant (dans le cadredu remplacement des centrales nucléaires)pour les énergies renouvelables propres etdomestiques se renforce (surtout en hiver) autravers de la transition vers l’utilisation depompes à chaleur électriques et del’électromobilité. Par ailleurs, une stratégie PtGtenant compte d’autres facteurs que les simples«excédents de production» renouvelablesnécessite des capacités de productiond’électricité bien supérieures (cf. ci-avant)

· des besoins en électricité supérieurs peuventnécessiter une nouvelle extension du réseauélectrique. Par ailleurs, l’étendue effective decette extension du réseau fait l’objet de débats.77

Conclusions: quel avenir pour l’infrastructure gazière?Dans l’état des connaissances actuelles et enregard des développements attendus àl’avenir, la vente d’agents énergétiques gazeuxen Suisse va devoir massivement reculer enl’espace de quelques décennies. Ce n’est qu’ainsique l’approvisionnement en gaz pourra contribuercomme il se doit à l’objectif global, porté par lacommunauté internationale, pour éviter une criseclimatique dangereuse. Le recul de la consommationde gaz devrait, selon les prévisions, être de l’ordre d’aumoins 80% si l’on tient compte des potentiels limités

75 Entso-E & EntsoG. TYNDP 2018 Scenario Report. 2018;Agora Energiewende. “The European Power Sector in 2018.Eurostat. Energy Statistics.» (nrg_cb_gas; nrg_cb_rw).2019.76 KBOB. Ökobilanzdaten im Baubereich 2009/1:2016. 201777 Agora Energiewende. „Stromnetze für 65 Prozent Erneu-erbare bis 2030.“ 2018.

30%

47% 52%

81%

3.80% 3.7% 3.0%14.0%

2017 2025 2030 2040

Empiricisme et pronostics:Part des énergies renouvables dans le ...

réseau électrique réseau de gaz

Page 14: Factsheet Gaz fossile – Biogaz – Power-to-Gas

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Version mars 2019

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du biogaz indigène et importé, ainsi que desperspectives incertaines du PtG.

Les conséquences pour l’infrastructure nécessairesont significatives. Elles sont d’une part de naturequantitative, étant donné que son utilisation vadiminuer de manière drastique. D’autre part, ellessont qualitatives, différents éléments (p. ex. lesréseaux de distribution régionaux) étantprobablement (encore) moins utilisés que d’autres (p.ex. conduites de transport à distance ou stockage).Indépendamment du lieu et de la rapidité àlaquelle les ventes reculeront, une adaptationde la durée d’amortissement, de la tarificationet de la planification de l’entretien s’avèrenécessaire, de même qu’une planification dudémantèlement intelligente et différenciée àl’échelle régionale. Si ces mesures ne sont pasprises, l’exposition au risque des exploitantset propriétaires de réseaux – c’est-à-dire lesfournisseurs de gaz, mais aussi les villes et lescommunes – va fortement augmenter.

Si l’on souhaite gérer la planification et l’exploitationd’un réseau de gaz avec l’espoir d’une révolution PtG,il vaut mieux miser sur un fonds d’assurance. Celui-cipourrait servir à financer les mesures de protection duclimat pour le cas où le PtG commercialisabledisponible ne suffirait pas et que les émissions fossilesseraient ainsi renforcées dans le cadre d’un réseau degaz toujours trop conséquent (Lock-in-Effect). Afin decompenser totalement ces émissions par desémissions négatives, il conviendrait d’ajouter au prixdu gaz des cotisations d’assurance suffisantes (parexemple à hauteur de 200 SFR/t CO2), en plus destaxes sur le CO2 déjà en vigueur.

La question d’une adaptation de l’infrastructure duréseau gazier respectueuse du climat va devenir unequestion de conformité légale dès que toutes lesconséquences juridiques de l’Accord de Paris aurontété évaluées à l’échelle nationale. Pour les cités del’énergie ou les autres communes souhaitant œuvrerde manière exemplaire sur le plan climatique, laquestion ne se pose plus: la planification del’infrastructure gazière communale ne doit plusignorer les exigences de la protection climatique.

Bien que cela ait été présenté différemment àplusieurs reprises: le WWF Suisse n’attend nin’exige le démantèlement total du réseaugazier. Nous souhaitons simplement indiquerqu’il n’existe actuellement pas de scénariosuffisamment complet et documenté ni destratégie convaincante concernant la façonpour l’économie gazière de décarbonisertotalement en deux ans l’approvisionnementen gaz en partant du niveau de ventes actuel,voire avec un niveau de ventes légèrementréduit. Le réseau gazier constitue ainsi une bombe àretardement climatique.

Ce risque a jusqu’à présent été négligé, activement ounon, par la plupart des directions et conseilsd’administration des fournisseurs de gaz, que ce soitpar ignorance ou par peur des conséquences.Pourtant, des solutions existent encore: il s’agit des’engager sans réserve à contribuer à la protection duclimat, de réunir les connaissances nécessaires, maisaussi de reconnaître et de tirer les conséquences quis’imposent pour l’entreprise en toute impartialité.

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